- Speaker #0
Bienvenue sur le podcast d'aVB, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir ensemble quelques notions clés de l'assurance en quelques minutes. Bonjour, nous avons le plaisir de nous retrouver pour un nouvel épisode du podcast aVB Assure'actu et j'ai le plaisir d'accueillir une nouvelle voix au sein du podcast. Santiago, tu es directeur actuaire au sein d'AVB et tu vas aujourd'hui nous parler durabilité.
- Speaker #1
Bonjour Virginie.
- Speaker #0
Eh bien, la durabilité, c'est un terme dont on entend parler très souvent en ce moment, qui est très dans l'actualité, et je ne suis pas sûr qu'on ait tous bien compris ce que c'est, et qu'est-ce qui se cache derrière la durabilité. Est-ce que tu pourrais nous expliquer comment ça peut se définir, la durabilité, déjà ?
- Speaker #1
Bien sûr. C'est vrai que la durabilité, c'est un mot dont on entend beaucoup parler ces derniers temps. Mais c'est un mot qui est assez ancien. Il est apparu pour la première fois en 1987 dans un rapport de l'ONU qui s'appelait "Notre avenir à tous " et dans ce rapport, le développement durable est défini comme le développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Donc il y a cette notion de à la fois un développement actuel mais qui ne compromet pas la capacité de nos générations futures, de nos enfants, à se développer eux-mêmes à leur tour.
- Speaker #0
Donc finalement, ça fait presque 40 ans qu'on a fait apparaître ce terme. Mais aujourd'hui, c'est une notion qu'on rencontre en entreprise, qu'on rencontre en assurance. Est-ce que ça se mesure du coup, la durabilité ?
- Speaker #1
Justement, c'est toute la complexité de la question. Ce concept même de durabilité ou de développement durable est difficile à mesurer. Donc ce qu'on a fait, c'est que pour pouvoir estimer ce caractère durable, nous nous penchons généralement sur des impacts à la fois environnementaux, sociétaux et de gouvernance. C'est ce qu'on appelle communément les critères ESG. Et ces dernières années, nous avons fait beaucoup d'efforts pour proposer un cadre d'évaluation commun à chacun de ces trois critères., notamment en ce qui concerne les impacts liés aux changements climatiques. À partir de 2025, la Directive européenne sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, plus connue pour ses initiales en anglais CSRD, imposera aux entreprises un cadre pour communiquer sur les informations matérielles en termes de durabilité.
- Speaker #0
Donc aujourd'hui, on est dans une situation où on veut pouvoir mesurer cette durabilité. On a un cadre qui a été fixé au niveau européen, la fameuse CSRD, et qui introduit cette notion d'information matérielle. Mais pour moi, ça reste un peu abstrait, une information matérielle, ça correspond à quoi ?
- Speaker #1
Bien sûr, jusque-là, les entreprises étaient habituées à communiquer uniquement sur une notion de matérialité financière. Quelque chose est matériel lorsqu'il peut impacter l'opinion. Et les décisions qu'une tierce personne pourrait se faire en lisant les informations financières d'une entreprise, c'est-à-dire le bilan, le compte de résultats et les annexes. Les critères ESG sont donc considérés matériels du point de vue financier lorsqu'ils affectent la performance et la valorisation d'une entreprise. Par exemple, pour un assureur non-vie, le changement climatique est matériel puisqu'il peut se traduire par une hausse de la fréquence et de l'intensité des événements climatiques et donc par une hausse des indemnisations.
- Speaker #0
Donc l'information matérielle, qui est une notion clé qu'il y a dans les principes de CSRD, de durabilité, elle se traduit essentiellement sous un angle d'une matérialité financière.
- Speaker #1
Alors, pas uniquement, ou pas tout à fait, c'est un des gros changements apportés par la CSRD. Au-delà de cette matérialité financière, nous allons aussi parler de matérialité à impact. C'est-à-dire se poser la question de l'impact que les activités d'une entreprise peuvent avoir en termes de visibilité dans son environnement. Un assureur peut par exemple avoir un impact lui-même sur le changement climatique à cause des émissions de gaz à effet de serre liées à ses activités directes et indirectes, et notamment via ses activités d'investissement. On parle dès lors de double matérialité. Dans le cadre de la CSRD, les entreprises doivent communiquer non seulement sur les facteurs matériels du point de vue financier, mais aussi en termes d'impact. Pour les assureurs, cela nécessite une analyse très minutieuse des différentes activités et notamment des garanties souscrites du portefeuille d'investissement et de la gouvernance des risques.
- Speaker #0
Donc si je comprends bien, on a une matérialité au départ qui est très centrée sur une matérialité financière de mon activité, de ce que en tant qu'entreprise je vais générer comme flux financier, on va dire, ou activité financière. Et aujourd'hui, c'est enrichi de cette notion de matérialité liée à l'impact de mon activité sur l'environnement dans lequel j'interviens.
- Speaker #1
Tout à fait, et c'est une grande première, parce que même sur les directives ou sur les réglementations liées à la durabilité, on se contentait jusqu'à présent de parler de matérialité financière ou de simple matérialité. Et c'est d'ailleurs une des grosses différences entre la CSRD et d'autres textes comme par exemple l'ISSB, qui est le International Sustainability Supervisory Board et qui va émettre des normes de durabilité similaires aux normes IFRS, mais qui vont toujours se baser sur une matérialité simple ou financière et qui ne vont pas prendre en compte l'impact de nos propres activités sur l'environnement.
- Speaker #0
Mais alors, en tant qu'assureur, est-ce qu'il y a des dimensions particulières, des aspects particuliers à regarder pour évaluer l'impact de cette durabilité ou les risques liés à cette durabilité ?
- Speaker #1
Ce qui est clair, c'est que les assureurs sont en première ligne face aux risques de durabilité et surtout aux risques de changement climatique. Les inondations en Espagne d'octobre 2024 vont être chiffrées à plusieurs milliards d'euros. Les épisodes de sécheresse en France en 2022 était estimée par la CCR à 3,5 milliards d'euros. Donc on parle de sommes qui sont très importantes. Mais au-delà du risque physique, aujourd'hui, la durabilité est avant tout un énorme défi réglementaire pour les assureurs qui vont devoir se conformer rapidement à des nouveaux textes. On a parlé de CSRD, mais il y aura aussi des changements à la formule standard de Solvabilité 2 et d'autres textes locaux qui peuvent se rajouter. D'ailleurs, il y a aujourd'hui de plus en plus de voix qui s'insurgent contre cette inflation réglementaire. Mais il faut se dire que c'est avant tout une opportunité pour les assureurs pour pouvoir analyser leur exposition à ces nouveaux risques qui apparaissent et à mettre en place des mesures pour pouvoir faire face, que ce soit via l'adaptation de leurs produits ou via des mesures de prévention.
- Speaker #0
Tu parlais de l'impact réglementaire et effectivement, c'est un défi de s'approprier ces évolutions réglementaires et d'en tirer une opportunité. Mais il n'y a pas que des impacts réglementaires pour les assureurs. Tu viens d'évoquer l'adaptation produit. Est-ce que tu vois d'autres sujets sur lesquels les assureurs vont être amenés à s'investir pour faire face à ces nouveautés ou à ces changements ?
- Speaker #1
C'est clair que les assureurs ont une carte à jouer puisqu'il s'agit d'investisseurs institutionnels qui peuvent mobiliser leurs réserves pour avoir un changement concret en termes de financement de la transition. Mais les acteurs ont aussi un rôle sociétal à jouer, notamment via l'assurabilité et en luttant contre les exclusions d'assurance. Et ce sont des challenges qui aujourd'hui préoccupent nos clients.
- Speaker #0
Merci Santiago pour cet éclairage sur la durabilité.
- Speaker #1
Merci Virginie.
