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ALBERT CAMUS - Noces cover
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BOUGIES

ALBERT CAMUS - Noces

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04min |07/11/2024
Play
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Description

Le premier épisode de BOUGIES met à l’honneur Albert Camus, né le 7 novembre 1913.


Partez en balade avec nous jusqu’à Djemila, vestige du nord de l’Algérie.
Camus nous raconte sa traversée silencieuse de cette cité antique, ses réflexions sur la vie - et plus précisément sur la mort - que cette chaleur assommante et cette magnificence lui inspiraient à l’époque.


Cette lecture est tirée de son recueil Noces, paru en 1938. Foncez le lire : vous y découvrirez d’autres poèmes, d’autres paysages et d’autres pensées sur des thèmes qui nous obsèdent tous, comme le bonheur, l’espoir, la joie, mais aussi… la résignation !


Ce mois-ci, tu aurais eu 111 ans…
Ton Algérie adorée nous fait voyager le temps de cette lecture alors…
Albert, mes vœux les plus sincères !



Direction éditoriale : Alice Daubelcour

Production éditoriale, montage, création sonore : Simon Daubelcour


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    bougies lorsque je suis allé à gemmila il y avait du vent et du soleil mais c'est une autre histoire Ce qu'il faut dire d'abord, c'est qu'il y régnait un grand silence, lourd et sans fêlure, quelque chose comme l'équilibre d'une balance. Il faut beaucoup de temps pour aller à Djemila. Ce n'est pas une ville où l'on s'arrête et que l'on dépasse, elle ne mène nulle part et n'ouvre sur aucun pays. C'est un lieu d'où l'on revient. Dans cette splendeur aride, nous avions erré toute la journée. Peu à peu, le vent, à peine senti au début de l'après-midi, semblait grandir. Ce bain violent de soleil épuisait toutes mes forces de vie. Je ne peux aller plus loin. Il ne me plaît pas de croire que la mort ouvre sur une autre vie. Elle est pour moi une porte fermée. Je ne dis pas que c'est un pas qu'il faut franchir, mais que c'est une aventure horrible, sale. J'ai trop de jeunesse en moi pour parler de la mort, mais il me semble que si je le devais, c'est ici que je trouverais le mot exact. Qu'est-ce que le bleu ? Et que penser du bleu ? C'est la même difficulté avec la mort. De la mort et des couleurs, nous ne savons pas discuter. J'ai vu des gens mourir, surtout j'ai vu des chiens mourir. C'est de les toucher qui me bouleversaient. Je pensais alors fleurs, sourires. Désir de femme. Et je comprends que toute mon horreur de mourir tient dans ma jalousie de vivre. Je suis jaloux de ceux qui vivront et pour qui, fleurs, les désirs de femmes auront tout leur sens, de chair et de sang. Je suis envieux parce que j'aime trop la vie pour ne pas être égoïste. Le cœur se serre devant cette grandeur que nous quittons déjà. Gemilla reste derrière nous, avec l'eau triste de son ciel. Noces, Albert Camus Pupille de la nation, Albert n'a eu pour seul lien avec son père que le fait d'être né 21 jours avant lui, à quelques années près. Il ne connaîtra de cet homme que les histoires que lui racontera sa mère, Catherine Hélène, en partie sourde, ne sachant ni lire, ni écrire, lisant sur les lèvres et parlant en utilisant "une gestuelle propre à sa famille" comme il dit. De son enfance, entre inconnue paternelle et silence maternel, Il gardera surtout l'Algérie, du souvenir de ses paysages, des réflexions du jeune homme qu'il était. Il en fera un recueil, NOCES, dont je vous livre un extrait pour l'occasion. Albert, joyeux anniversaire !

Description

Le premier épisode de BOUGIES met à l’honneur Albert Camus, né le 7 novembre 1913.


Partez en balade avec nous jusqu’à Djemila, vestige du nord de l’Algérie.
Camus nous raconte sa traversée silencieuse de cette cité antique, ses réflexions sur la vie - et plus précisément sur la mort - que cette chaleur assommante et cette magnificence lui inspiraient à l’époque.


Cette lecture est tirée de son recueil Noces, paru en 1938. Foncez le lire : vous y découvrirez d’autres poèmes, d’autres paysages et d’autres pensées sur des thèmes qui nous obsèdent tous, comme le bonheur, l’espoir, la joie, mais aussi… la résignation !


Ce mois-ci, tu aurais eu 111 ans…
Ton Algérie adorée nous fait voyager le temps de cette lecture alors…
Albert, mes vœux les plus sincères !



Direction éditoriale : Alice Daubelcour

Production éditoriale, montage, création sonore : Simon Daubelcour


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    bougies lorsque je suis allé à gemmila il y avait du vent et du soleil mais c'est une autre histoire Ce qu'il faut dire d'abord, c'est qu'il y régnait un grand silence, lourd et sans fêlure, quelque chose comme l'équilibre d'une balance. Il faut beaucoup de temps pour aller à Djemila. Ce n'est pas une ville où l'on s'arrête et que l'on dépasse, elle ne mène nulle part et n'ouvre sur aucun pays. C'est un lieu d'où l'on revient. Dans cette splendeur aride, nous avions erré toute la journée. Peu à peu, le vent, à peine senti au début de l'après-midi, semblait grandir. Ce bain violent de soleil épuisait toutes mes forces de vie. Je ne peux aller plus loin. Il ne me plaît pas de croire que la mort ouvre sur une autre vie. Elle est pour moi une porte fermée. Je ne dis pas que c'est un pas qu'il faut franchir, mais que c'est une aventure horrible, sale. J'ai trop de jeunesse en moi pour parler de la mort, mais il me semble que si je le devais, c'est ici que je trouverais le mot exact. Qu'est-ce que le bleu ? Et que penser du bleu ? C'est la même difficulté avec la mort. De la mort et des couleurs, nous ne savons pas discuter. J'ai vu des gens mourir, surtout j'ai vu des chiens mourir. C'est de les toucher qui me bouleversaient. Je pensais alors fleurs, sourires. Désir de femme. Et je comprends que toute mon horreur de mourir tient dans ma jalousie de vivre. Je suis jaloux de ceux qui vivront et pour qui, fleurs, les désirs de femmes auront tout leur sens, de chair et de sang. Je suis envieux parce que j'aime trop la vie pour ne pas être égoïste. Le cœur se serre devant cette grandeur que nous quittons déjà. Gemilla reste derrière nous, avec l'eau triste de son ciel. Noces, Albert Camus Pupille de la nation, Albert n'a eu pour seul lien avec son père que le fait d'être né 21 jours avant lui, à quelques années près. Il ne connaîtra de cet homme que les histoires que lui racontera sa mère, Catherine Hélène, en partie sourde, ne sachant ni lire, ni écrire, lisant sur les lèvres et parlant en utilisant "une gestuelle propre à sa famille" comme il dit. De son enfance, entre inconnue paternelle et silence maternel, Il gardera surtout l'Algérie, du souvenir de ses paysages, des réflexions du jeune homme qu'il était. Il en fera un recueil, NOCES, dont je vous livre un extrait pour l'occasion. Albert, joyeux anniversaire !

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Le premier épisode de BOUGIES met à l’honneur Albert Camus, né le 7 novembre 1913.


Partez en balade avec nous jusqu’à Djemila, vestige du nord de l’Algérie.
Camus nous raconte sa traversée silencieuse de cette cité antique, ses réflexions sur la vie - et plus précisément sur la mort - que cette chaleur assommante et cette magnificence lui inspiraient à l’époque.


Cette lecture est tirée de son recueil Noces, paru en 1938. Foncez le lire : vous y découvrirez d’autres poèmes, d’autres paysages et d’autres pensées sur des thèmes qui nous obsèdent tous, comme le bonheur, l’espoir, la joie, mais aussi… la résignation !


Ce mois-ci, tu aurais eu 111 ans…
Ton Algérie adorée nous fait voyager le temps de cette lecture alors…
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    bougies lorsque je suis allé à gemmila il y avait du vent et du soleil mais c'est une autre histoire Ce qu'il faut dire d'abord, c'est qu'il y régnait un grand silence, lourd et sans fêlure, quelque chose comme l'équilibre d'une balance. Il faut beaucoup de temps pour aller à Djemila. Ce n'est pas une ville où l'on s'arrête et que l'on dépasse, elle ne mène nulle part et n'ouvre sur aucun pays. C'est un lieu d'où l'on revient. Dans cette splendeur aride, nous avions erré toute la journée. Peu à peu, le vent, à peine senti au début de l'après-midi, semblait grandir. Ce bain violent de soleil épuisait toutes mes forces de vie. Je ne peux aller plus loin. Il ne me plaît pas de croire que la mort ouvre sur une autre vie. Elle est pour moi une porte fermée. Je ne dis pas que c'est un pas qu'il faut franchir, mais que c'est une aventure horrible, sale. J'ai trop de jeunesse en moi pour parler de la mort, mais il me semble que si je le devais, c'est ici que je trouverais le mot exact. Qu'est-ce que le bleu ? Et que penser du bleu ? C'est la même difficulté avec la mort. De la mort et des couleurs, nous ne savons pas discuter. J'ai vu des gens mourir, surtout j'ai vu des chiens mourir. C'est de les toucher qui me bouleversaient. Je pensais alors fleurs, sourires. Désir de femme. Et je comprends que toute mon horreur de mourir tient dans ma jalousie de vivre. Je suis jaloux de ceux qui vivront et pour qui, fleurs, les désirs de femmes auront tout leur sens, de chair et de sang. Je suis envieux parce que j'aime trop la vie pour ne pas être égoïste. Le cœur se serre devant cette grandeur que nous quittons déjà. Gemilla reste derrière nous, avec l'eau triste de son ciel. Noces, Albert Camus Pupille de la nation, Albert n'a eu pour seul lien avec son père que le fait d'être né 21 jours avant lui, à quelques années près. Il ne connaîtra de cet homme que les histoires que lui racontera sa mère, Catherine Hélène, en partie sourde, ne sachant ni lire, ni écrire, lisant sur les lèvres et parlant en utilisant "une gestuelle propre à sa famille" comme il dit. De son enfance, entre inconnue paternelle et silence maternel, Il gardera surtout l'Algérie, du souvenir de ses paysages, des réflexions du jeune homme qu'il était. Il en fera un recueil, NOCES, dont je vous livre un extrait pour l'occasion. Albert, joyeux anniversaire !

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Le premier épisode de BOUGIES met à l’honneur Albert Camus, né le 7 novembre 1913.


Partez en balade avec nous jusqu’à Djemila, vestige du nord de l’Algérie.
Camus nous raconte sa traversée silencieuse de cette cité antique, ses réflexions sur la vie - et plus précisément sur la mort - que cette chaleur assommante et cette magnificence lui inspiraient à l’époque.


Cette lecture est tirée de son recueil Noces, paru en 1938. Foncez le lire : vous y découvrirez d’autres poèmes, d’autres paysages et d’autres pensées sur des thèmes qui nous obsèdent tous, comme le bonheur, l’espoir, la joie, mais aussi… la résignation !


Ce mois-ci, tu aurais eu 111 ans…
Ton Algérie adorée nous fait voyager le temps de cette lecture alors…
Albert, mes vœux les plus sincères !



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  • Speaker #0

    bougies lorsque je suis allé à gemmila il y avait du vent et du soleil mais c'est une autre histoire Ce qu'il faut dire d'abord, c'est qu'il y régnait un grand silence, lourd et sans fêlure, quelque chose comme l'équilibre d'une balance. Il faut beaucoup de temps pour aller à Djemila. Ce n'est pas une ville où l'on s'arrête et que l'on dépasse, elle ne mène nulle part et n'ouvre sur aucun pays. C'est un lieu d'où l'on revient. Dans cette splendeur aride, nous avions erré toute la journée. Peu à peu, le vent, à peine senti au début de l'après-midi, semblait grandir. Ce bain violent de soleil épuisait toutes mes forces de vie. Je ne peux aller plus loin. Il ne me plaît pas de croire que la mort ouvre sur une autre vie. Elle est pour moi une porte fermée. Je ne dis pas que c'est un pas qu'il faut franchir, mais que c'est une aventure horrible, sale. J'ai trop de jeunesse en moi pour parler de la mort, mais il me semble que si je le devais, c'est ici que je trouverais le mot exact. Qu'est-ce que le bleu ? Et que penser du bleu ? C'est la même difficulté avec la mort. De la mort et des couleurs, nous ne savons pas discuter. J'ai vu des gens mourir, surtout j'ai vu des chiens mourir. C'est de les toucher qui me bouleversaient. Je pensais alors fleurs, sourires. Désir de femme. Et je comprends que toute mon horreur de mourir tient dans ma jalousie de vivre. Je suis jaloux de ceux qui vivront et pour qui, fleurs, les désirs de femmes auront tout leur sens, de chair et de sang. Je suis envieux parce que j'aime trop la vie pour ne pas être égoïste. Le cœur se serre devant cette grandeur que nous quittons déjà. Gemilla reste derrière nous, avec l'eau triste de son ciel. Noces, Albert Camus Pupille de la nation, Albert n'a eu pour seul lien avec son père que le fait d'être né 21 jours avant lui, à quelques années près. Il ne connaîtra de cet homme que les histoires que lui racontera sa mère, Catherine Hélène, en partie sourde, ne sachant ni lire, ni écrire, lisant sur les lèvres et parlant en utilisant "une gestuelle propre à sa famille" comme il dit. De son enfance, entre inconnue paternelle et silence maternel, Il gardera surtout l'Algérie, du souvenir de ses paysages, des réflexions du jeune homme qu'il était. Il en fera un recueil, NOCES, dont je vous livre un extrait pour l'occasion. Albert, joyeux anniversaire !

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