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Jennifer Lopez - Play cover
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CD2Titres

Jennifer Lopez - Play

Jennifer Lopez - Play

23min |31/05/2024
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Jennifer Lopez - Play

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23min |31/05/2024
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Description

Vous le savez, j’aime bien vous raconter ce qui se passe dans l’arrière-cuisine de l’industrie musicale, les petites combines et mesquineries. L’occasion de voir que certains tubes qu’on aime encore aujourd’hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. 

 

La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, “This is me…now”, le 16 février 2024, accompagné d’un film et d’un documentaire, rien que ça, sont l’occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur insta suivent sous le nom de JLo. 

Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle, et dans l’optique de replacer la star qu’elle est au coeur du game après une décennie musicalement en dent de scie et néanmoins quelques jolies performances, au cinéma dans Hustlers ou en co-tête d’affiche du Superbowl 2020 avec Shakira. 

Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque JLo ? Ne montre-t-il pas que finalement, la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. 

 

Mais comme d’habitude on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R’n’B du début des années 2000. On appuie sur PLAY, de Jennifer Lopez.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si vous voulez savoir d'où viennent les tubes qui ont bercé les années 90 et 2000, quel a été leur impact et quel est leur héritage aujourd'hui, vous êtes au bon endroit. Pour ne rien louper, abonnez-vous sur votre plateforme de podcast habituelle et suivez-moi sur Twitter et Instagram à cd2titres underscore podcast. Vous le savez, j'aime bien vous raconter ce qui se passe dans l'arrière-cuisine de l'industrie musicale, les petites combines et mes skinneries. L'occasion de voir que certains tubes qu'on aime encore aujourd'hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, This Is Me Now, le 16 février 2024, accompagnée d'un film et d'un documentaire rien que ça, sont l'occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur Insta suivent sous le nom de J-Lo. Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle et dans l'optique de replacer la star qu'elle est au cœur du game après une décennie musicalement en dents de scie et néanmoins quelques jolies performances au cinéma dans Hustlers ou en cotette d'affiche du Super Bowl 2020 avec Shakira. Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque J-Lo ? Ne montre-t-il pas que finalement la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. Mais comme d'habitude, on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R&B du début des années 2000. J'appuie littéralement sur Play de Jennifer Lopez, From the Block. Autant entrer directement dans le vif du sujet, le refrain que vous venez d'entendre est bien celui de la version définitive de Play, le deuxième single extrait du second album de Jennifer Lopez, J-Lo. Pourtant, la voix que vous avez entendue n'est pas celle de Jennie. On revient en arrière pour vérifier, une fois qu'on le sait, c'est très audible.

  • Speaker #1

    C'est parti !

  • Speaker #0

    Cette voix, c'est celle de la jeune autrice compositrice américaine Christina Milian. Et si vous vérifiez, vous ne verrez pas la mention Featuring Christina Milian sur la pochette du CD de titre. Comme souvent pour les popstars qui n'écrivent pas leurs chansons, ou très peu, par exemple Céline Dion, Cher ou Whitney Houston qui sont de grandes interprètes mais pas des autrices, les directeurs artistiques au sein de leur label partent en virée shopping à la recherche de titres correspondant à la couleur souhaitée pour le projet en cours. On avait évoqué ce sujet avec Kylie dans l'épisode précédent. Il y a plusieurs manières de soumettre des chansons à ce genre d'artiste. Parfois, ça prend la forme de writing camps, ou résidences d'écriture, où on réunit plusieurs songwriters pour les faire plancher sur des titres à partir d'un brief précis. Cela a souvent été le cas pour Beyoncé par exemple, qui a eu l'habitude de réunir la fine fleur des artistes du moment pour qu'ils lui pondent des tubes. La Queen Bey n'ayant ensuite qu'à choisir les plus pertinents, et à y ajouter ou non sa patte. Je précise qu'elle a aussi écrit et co-écrit des titres de son répertoire sans cette méthode. Jennifer, la nôtre, de la Starac, m'avait raconté ça dans une interview en 2010 à l'occasion de la sortie de son album Appelle-moi Jen. Je n'ai malheureusement plus l'enregistrement audio, alors je vous en lis un extrait. Et là, Dominique, Go, son directeur artistique, me parle d'un séminaire. Je n'étais pas très motivé. C'était trop scolaire, conventionnel, et puis il y a cet esprit de compétition, ce n'est pas du tout mon truc. Je préfère rencontrer les gens. Et s'il y a un feeling, on travaille ensemble. Sinon, non. Il me dit Fais-moi confiance, tu vas choisir les gens avec qui tu vas partir. J'écoute alors plein de sons différents et je choisis Coco Royal, Feed, des gens qui avaient une culture différente et ça a été extraordinairement enrichissant. On est parti en colo, faire de la musique avec l'ambiance qui va avec. Feu de camp, séance d'écoute le soir, on composait des morceaux ensemble, chacun donnait son avis, un peu, les uns les autres, dans un esprit hyper bon enfant. Il existait déjà des textes qui avaient été écrits pour moi avec lesquels nous étions partis, mais je les ai laissés libres pour écrire ce qu'ils ressentaient ou pas. Ils piochaient dans les textes et allaient dans leur chambre pour composer de la musique, et moi j'allais de chambre en chambre pour donner mon avis. Non, là tu pars trop loin, je mettais mon grain de sel un peu partout, c'était assez énorme. On ressort de ce séminaire hyper heureux parce qu'on a une trentaine de chansons. On a passé deux semaines dans cet endroit de rêve qu'est la Corse, on a beaucoup de chance, la maison de disques nous a loué une superbe maison avec tout pour se sentir bien et faire de la bonne musique. On a fait de la bonne musique et j'étais très très content des rencontres que j'ai faites et hyper charmé par les personnes qui sont venues et qui ont relevé le défi de faire des chansons pour Jennifer, pour reprendre leur mot. Voilà pour ce petit aparté, merci Jennifer. Alors, je reprends, deuxième option. Le label commande à des auteurs-compositeurs chevronnés des tubes sur mesure. Par exemple, Allumer le feu de Johnny Hallyday, créé rien que pour l'idole des jeunes par les alors relativement jeunes Zazie et Pascal Obispo. A l'international, on peut penser au duo Julia Michaels-Justin Tranter, qui ont écrit pour toute la teen pop US de ces dix dernières années, de Bieber à Selena Gomez ou Olivia Rodrigo. Troisième option, un artiste successful se délaisse d'un titre dont il n'a pas l'utilité pour lui-même, dans l'espoir que ce relatif fond de tiroir puisse rapporter quelques deniers en étant interprété par un ou une autre qui cartonne à ce moment-là. On pense à Breakaway, le hit de Kelly Clarkson, qu'Avril Lavigne avait à la base écrit pour son propre album Let Go. Ou encore What I Want From Me, donné par Pink à Adam Lambert. Sia s'est souvent illustré dans ce domaine. Quatrième possibilité, un auteur-compositeur et souvent producteur s'enferme en studio avec un artiste avec qui il écrit et produit un album entier. On pense par exemple à Timbaland et Nelly Furtado qui en 2006 accouchent de l'excellent Lose et de sa ribambelle de tubes Man Eater, Promiscuous Girl, Say It Right, etc. Enfin, des démos sont soumises par des auteurs-compositeurs signés sur le même label ou chez le même éditeur. Des chansons souvent écrites à la basse pour eux ou elles-mêmes, et quasiment terminées donc avec une voix témoin pour guider l'enregistrement. Mais parfois, il faut savoir être réaliste, mieux vaut donner un tube potentiel à un gros artiste capable de le transformer en or, et percevoir de cette manière des royalties confortables sans être sur le devant de la scène, plutôt que de gâcher une chanson en la gardant pour soi sans pouvoir lui offrir le destin qu'elle mérite. C'est à peu près cela qui s'est passé avec Play. Jennifer Lopez n'écrit pas un mot de ses chansons et ce n'est pas grave, d'autres le font très bien pour elle. Mais revenons un peu en arrière. Jennifer est issue d'une famille d'immigrants portoricains installés dans le Bronx, à New York. Le foyer, modeste, élève ses trois filles de manière stricte, dans la foi catholique. Jennifer se distingue rapidement par un certain talent artistique et surtout un appétit féroce pour la réussite. Elle, la jeune Latina, veut montrer à l'Amérique qu'une jeune femme issue d'une minorité peut réussir et même s'imposer. Après quelques rôles mineurs sur petit et grand écran, Elle est remarquée en 1997 pour son interprétation de la chanteuse mexicano-américaine Selena, surnommée la Madonna Texane et assassinée à 23 ans en 1995. Elle est même nommée pour le Golden Globe de la meilleure actrice, mais ne gagne pas. Suite à cela, quelques rôles plus ou moins marquants vont la faire émerger, mais sans en faire une superstar. Elle enclenche donc la seconde partie de son plan de conquête du monde, la musique. Ça tombe bien, Selena lui avait mis le pied à l'étrier et donné envie d'enregistrer ses propres titres. Elle chante correctement, sans être une diva à voix, danse comme si sa vie en dépendait, et incarne parfaitement l'archétype de la beauté latine sophistiquée et métissée, à même de séduire les blancs sans trop les bousculer. Elle signe chez Sony Music, qui veut surfer sur le succès de la latine pop, courant qui... Carton à l'époque, porté par Ricky Martin, Enrique Iglesias ou encore Thalia, Paulina Rubio et Gloria Estefan. Son premier single, If You Had My Love, sort début 99, atteint la première place du Billboard Hot 100 américain et devient un tube mondial. S'en suivent deux autres gros hits, Waiting for Tonight et Let's Get Loud. C'est efficace, dansant, hyper accessible sans oublier de faire référence de loin certes, à son héritage latin. Très vite, un deuxième album est mis en chantier. Il s'appelle Jello et a quelques jolies signatures dans ses crédits dont P.D.D., le compagnon d'alors de Jennifer, est désormais inquiété par la justice américaine pour agressions, harcèlement et trafic sexuel. On trouve encore le mythique Rodney Jerkins, plus connu sous le nom de Dark Child. Le premier single s'appelle Love Don't Cost a Thing, une prod char d'assaut pas très subtile sur le thème l'argent ne fait pas le bonheur. C'est bourrin mais irrésistible. En mars 2001, après le joli succès de ce titre, le label enchaîne sur l'exploitation d'un deuxième single, Play. Dans un style très différent, plus futuriste et sexy, il montre une autre facette de Jenny, devenue en moins de deux ans une véritable marque et sa propriétaire une incontournable de l'entertainment mondial. Derrière Play, on trouve quatre auteurs-compositeurs. Tout d'abord, les suédois Anders Bage et Arndt Norbergesson, dont on devine qu'ils ont composé l'instru et la mélodie vocale de la chanson. Petit aparté, on leur doit aussi, et entre autres, la pépite Gotta Tell You de Samantha Mumba. Sous cette première forme, la démo passe entre les mains de Corey Rooney, auteur-compositeur prolifique signé chez Sony Music et qui écrit pour les artistes de la major. Retenez bien cela, c'est Tony Motola, grand patron de la firme japonaise et premier mari de Maria Carey, qui le signe en 1994 en tant que producteur, puis le promeut au poste de vice-président du département artistique chez Epic Records, l'un des labels de Sony sur lequel est justement signé J-Lo. A ce poste, on imagine aisément qu'il acquiert la démo de Play auprès de Bag Hantor pour son artiste phare du moment. Rien que de très banal, les suédois sont les champions des démos pop vendus pour être retravaillés. Enfin, la jeune Christina Milian, fraîchement signée sur le label de rap Murder Inc. par son créateur Irv Gotti, retenez bien ce nom aussi pour la suite, est également crédité à l'écriture vraisemblablement des paroles avec Ronnie. Comme c'est l'usage, c'est elle qui enregistre la voix témoin de la démo qui sera présentée à Jello. Il existe donc quelque part dans un coffre de Sony une version de Play chantée uniquement par Millian. Lopez se rend à Stockholm pour enregistrer ses parties vocales et une fois finalisée, sa voix est absente du refrain en lead remplacé par celle de Millian. Les deux voix sont suffisamment similaires pour que cela passe inaperçu auprès du grand public, mais lorsque l'on écoute attentivement, c'est flagrant. Millian est néanmoins crédité pour les chœurs, mais pas comme artiste en featuring comme on pourrait l'imaginer. Pas question en effet de faire de l'ombre à la nouvelle poule aux œufs d'or de Sony, avec une quasi inconnue qui n'a à son actif qu'un featuring avec le rappeur Jarul. Le single n'est pas un grand tube, mais s'en sort convenablement, surtout en Europe. Top 3 au UK, 20 en France, 8 en Italie et seulement 18 au Billboard US. Pas de quoi crier à la cata donc, mais malheureusement, et malgré ses qualités indéniables, ce titre ne fait pas partie des incontournables de son interprète. Moi, je l'adore. Les paroles sont tellement simples et cons qu'elles sont géniales. En gros, J-Lo veut que le DJ joue sa motherfucking song dans le club alors qu'elle y est pour s'enjailler avec ses potes. Un peu égocentrique je trouve, mais bon, je vois le trip. Bon, ça c'est si on garde son âme innocente. Si on gratte un peu, cette chanson parle clairement de cul. En gros, vous remplacez tous les dancing par fucking et vous comprenez le topo. Jennie veut donc que son mec, le DJ donc, lui fasse ce qu'elle aime, à savoir des trucs sous la ceinture et le tout toute la nuit, all night long. L'ambiance pour le moins moite du titre ne laisse pas trop de doute quant à ce sens pas si caché. Vous aurez donc bien compris que contrairement à ce qu'on a pu entendre, J-Lo n'a pas volé la chanson à Christina Milian. Celle-ci lui était bien destinée, mais le producteur a bizarrement choisi de garder la voix de la démo sur le refrain. On peut s'étonner que Lopez ait laissé faire ça, mais finalement, peu de gens ont réalisé la supercherie et on peut imaginer qu'à l'époque, J-Lo n'était pas très regardante. Cela dit, à cette même période, la mythe Jane est liée un peu malgré elle à d'autres affaires similaires dont les ramifications sont bien plus sordides et la relie à une autre superstar dont on a parlé dans l'épisode 45, Maria Care. Vous connaissez probablement ce même mythique, Maria Carey répondant à une interview en 2003 où on l'interroge sur celle en qui les médias aiment voir une rivale, Jennifer Lopez. Gardant son sourire showbiz à toute épreuve, la diva répond du tac au tac I don't know her je ne la connais pas. Évidemment, elle sait qui c'est, mais elle choisit d'ignorer totalement son existence, comme pour mieux s'en protéger. Aux sources de cette petite phrase passée à la postérité de la pop culture, on trouve Tommy Mottola. Le grand patron de Sony Music et ex-mari de Maria a très très mal vécu que sa poupée chantante s'émancipe de son influence néfaste et contrôlante en divorçant en mai 1997. Dès lors, il s'emploie à lui faire payer professionnellement ce qui ne peut plus lui faire subir dans l'intimité. Elle expédie l'enregistrement du dernier album qu'elle doit à Sony, Rainbow, en 1999, puis en avril 2001, elle signe un contrat de 100 millions de dollars, du jamais vu dans l'industrie, avec EMI Virgin, une autre major concurrente de Sony. J-Lo va donc devenir malgré elle l'instrument de la vengeance de Motola. En 2001, Carey planche sur le film Maudie Glitter et l'album qui l'accompagne. Pour le premier single Loverboy, elle veut utiliser un sample du titre Firecracker du groupe Yellow Magic Orchestra. Motola l'apprend et fait en sorte que Jennifer l'utilise avant elle sur le titre I'm Real présent sur son deuxième album. Pour ne pas risquer l'humiliation, Maria est contrainte d'abandonner son idée et se rabat sur un sample de Candy du groupe Cameo. En 2020, à l'occasion de la sortie de l'album The Rarities qui accompagne celle de ses mémoires, elle dévoile la version avec le sample de Firecracker. Deuxième coup bas de Motola, toujours en 2001, lorsqu'il apprend que son ex travaille avec Ja Rule, il s'empresse de faire réaliser un remix R&B d'I'm Real, destiné à séduire les radios urbaines. Cette nouvelle version est un duo suave entre le rappeur new-yorkais Ejello, et c'est un carton qui passe 5 semaines en tête du mille-bord. Et encore une fois, Maria est obligée de céder et de laisser la priorité à Jello. Irv Gulley, le manager de Jarul et qui, rappelez-vous, avait signé Christian Millian, l'a expliqué des années après. Maria, elle, revient sur ces deux épisodes dans ses mémoires, là encore sans jamais nommer Jello, mais en reconnaissant que leur supposée rivalité n'existait que par les basses manœuvres d'un homme décidément bien médiocre.

  • Speaker #2

    J'ai écrit un chanson ensemble, et la prochaine chose que vous savez, Tommy a appelé son manager, Irv Gotti, pour lui demander de collaborer sur un duet pour le même record d'entretenants féminins, me laissant scourer et remettre le chanson. Irv a même discuté depuis, dans une interview avec Desus et Mero. Il sait qu'on a juste fait cette merde avec Mariah. Et il essaie de fucker avec Mariah. C'était un sabotage, simple et clair. Regarde, j'étais bien entraînée dans l'art de transformer les situations de merde en fertilisateur, mais Tommy savait que fucker avec mes choix artistiques était particulièrement bas. Mais je ne les laisserais pas m'arrêter. J'ai changé de caméra et j'ai changé de influence techno à un sample plus funk de Candy par Cameo. Vous ne pouvez pas faire de erreur avec Cameo. Et après tout ça, Loverboy est devenu le meilleur single de 2001 aux Etats-Unis. Je suis réel.

  • Speaker #0

    Je ne pouvais pas faire l'impasse sur cet épisode maintes fois raconté car il illustre à merveille la position difficile des artistes pop féminines dans les années 90 et 2000. 99% des décideurs de l'industrie du disque sont des hommes, les businessmen souvent très éloignés de l'artistique et qui sont les premiers à bénéficier du succès des femmes. En étant producteurs, auteurs, compositeurs, éditeurs, etc., ils engrangent le fruit parfois colossal de l'arras sans travail qu'est la vie d'une pop star, de la promotion intense à la performance de leur musique et de leur image. Pour peu que comme J-Lo, elle n'écrive pas leurs chansons, elle ne touche qu'une petite part des revenus générés par celle-ci. Heureusement, notre bomba latina pouvait également compter sur ses cachets d'actrices et elle a surtout su créer un véritable empire en capitalisant sur sa personnalité, son sens du business, sa vie privée et son physique. Half Time, le documentaire que Netflix lui consacre en 2022, montre parfaitement le chemin parcouru depuis ses débuts jusqu'à sa performance à la mi-temps du Super Bowl en 2020. Alors oui, ce doc est totalement agiographique, mais il restitue parfaitement la bascule qu'elle a su faire. Passée de poupée de producteur ciné ou musique à véritable boss woman, qui décide de tout et qui plus de 20 ans après son lancement, est toujours dans le game. Qu'importe si elle n'a pas eu de hit depuis presque 15 ans, ou si ses rôles au ciné à l'exception du récent et très ghoul Hustlers ne marquent pas vraiment l'histoire de 7ème art, Jello est une marque et une incontournable de l'entertainment mondial. Cette entreprise s'est poursuivie en ce mois de février avec la sortie d'un nouvel album, This Is Me Now, d'un film et d'un documentaire, rien que ça. Ce triple projet sans la moindre logique financière et économique en 2024, a pour but de continuer à positionner la marque Jello dans l'inconscient collectif comme incontournable. La bible du showbiz US Variety a publié un long papier assez passionnant sur les dessous de cette égotripe à 20 millions de dollars, entièrement financée par la star elle-même, après qu'elle eut logiquement essuyé les refus des personnes censées qu'elle avait approchées. On y apprend que Jenny tenait absolument à nous expliquer les tenants et aboutissants de son historique amoureux, avec évidemment un focus sur sa romance renouée avec Ben Affleck, 15 ans après leur rupture initiale. L'album est affligeant de ringardisme. Son concept est, je cite, des histoires inédites sur sa quête d'amour dans les années comprises entre sa première histoire avec Ben Affleck et le triomphe de leur retrouvaille ainsi qu'elle l'a expliqué au journal anglais The Independent. C'est le manager de JLo qui lui a suggéré de baser l'album sur cette storyline, que l'artiste a ensuite soumise à des auteurs-compositeurs réunis chez elle en résidence d'écriture. Malgré un casting plutôt costaud aux manettes, aucun titre n'émerge et on croirait entendre des albums tracks de 2004. Cadence, qui a écrit Seven Rings ou Thank U, Next pour Ariana Grande, deux numéros 1, ne produit pas de miracle ici, tout comme Roger Chahayed ou Jess Gittleman, derrière des hits récents pour Mac Miller, Her, The Weeknd, Doja Cat ou Jack Harlow. Un des titres, Hearts and Flowers, ne compte pas moins de 16 collaborateurs crédités, en partie car il contient un sample de Jenny from the Block, Je suis épuisé. Comme je vous l'expliquais tout à l'heure, on imagine bien que ces auteurs-compositeurs n'ont pas refilé leurs meilleurs titres à Jello, préférant sans doute les garder pour des artistes plus à même d'en faire des succès commerciaux. Le documentaire, The Greatest Love Story Never Told, rien que ça, est assez fascinant et je l'ai regardé pour que vous n'ayez pas à le faire. Il raconte la jeunesse de l'album et surtout du film qui l'accompagne. Il y a un côté touchant à voir cette femme richissime de 54 ans s'exprimer et entretenir seule sa légende au milieu d'une foule de collaborateurs et collaboratrices plus ou moins acquis à sa cause mais surtout heureux de prendre un petit cachet au passage. Où le monde semble assez d'accord pour dire que tout ce bazar n'a pas grand intérêt et pourtant Jello donne tout. Elle répète sans relâche ses chorés, s'investit dans l'écriture, les réunions budget et encaisse les déconvenues. On comprend en filigrane que le projet n'a pas intéressé grand monde, mais heureusement, au dernier moment, Amazon Prime l'a acquis, ce qui a permis 1. de le diffuser à grande échelle et 2. que Jenny rentre, on l'espère, à peu près dans ses frais. Résultat de tout cela, un flop retentissant. L'album a connu une carrière courte et tragique dans les charts du monde entier, entré 38e au Billboard 200, out la semaine suivante, numéro 55 au Royaume-Uni ou encore 38 en France également, avant de disparaître du classement la semaine suivante. Bref, une cata, l'instar de son collègue Justin Timberlake, dont le dernier album ringardissime a déjà disparu des charts et des mémoires. Une preuve de l'écart considérable qui existe entre l'intérêt médiatique suscité par Jello et la réalité commerciale. Avec ce genre d'artiste, on se demande un peu à quoi bon ? Pourquoi vouloir absolument continuer à alimenter une carrière qui n'intéresse plus grand monde au lieu d'entretenir un catalogue solide qui ravit les nostalgiques des années 2000 qui ne rechignent pas à payer des sommes considérables pour venir vous voir en tournée ? Meilleur exemple, Janet Jackson qui ne se fadigue même plus à teaser son album fantôme Black Diamond et qui prend le cash où il est, dans les arédas du monde entier avec un show pas très ambitieux qui permet de vite rentabiliser le voyage. Côté tournée justement, ce n'est guère mieux pour l'ami de Jenny. Le This Is Me Now, The Tour, devait arpenter les plus grandes salles américaines l'été prochain pour 30 shows. Très vite, 7 dates sont annulées, officiellement pour des problèmes d'itinéraire, mais en vérité parce que les billets avaient du mal à trouver preneur. En revers, mais qu'à cela ne tienne, le show est vite rebaptisé This Is Me Live Greatest Hits, pour tenter de capitaliser sur le catalogue de l'artiste, plus que sur son dernier album passé totalement inaperçu. On espère pour Jello qu'elle fera vite oublier cette déroute, en misant sur son meilleur atout, elle-même. Je vous laisse avec une version presque vraiment live de Play, enregistrée lors du Let's Get Loud Tour. Vous y entendrez la vraie voix de Jennifer sur le refrain, mais ça, ça n'a pas de prix. Merci d'avoir suivi ce nouvel épisode de CD de Titres. Comme d'habitude, je serai ravi de vous retrouver pour discuter sur Instagram ou X at cddetitres underscore pod. Si ce n'est pas déjà fait, abonnez-vous au podcast sur votre plateforme préférée pour ne rien manquer et surtout laissez commentaires et étoiles sur Apple Podcasts et Spotify, c'est hyper important pour la visibilité du podcast. Et si vous voulez prolonger, j'organise régulièrement des séances de cinéma au Brady, un ciné indépendant à Paris. Ensemble, on regarde un film de pop star et on en discute après la projection. On a déjà diffusé Truth or Dare et Dick Tracy avec Madonna, Dreamgirls avec Beyoncé et plus récemment Glitter avec Maria Carey. Suivez mes réseaux pour ne pas louper les prochains et surtout dites-moi les films que vous aimeriez voir. Qu'étaient les plateformes dans quelques jours ? Un nouvel épisode complémentaire de celui-ci arrive. Je suis Loïc Dubon-Laurichet et je vous dis à très vite.

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Vous le savez, j’aime bien vous raconter ce qui se passe dans l’arrière-cuisine de l’industrie musicale, les petites combines et mesquineries. L’occasion de voir que certains tubes qu’on aime encore aujourd’hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. 

 

La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, “This is me…now”, le 16 février 2024, accompagné d’un film et d’un documentaire, rien que ça, sont l’occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur insta suivent sous le nom de JLo. 

Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle, et dans l’optique de replacer la star qu’elle est au coeur du game après une décennie musicalement en dent de scie et néanmoins quelques jolies performances, au cinéma dans Hustlers ou en co-tête d’affiche du Superbowl 2020 avec Shakira. 

Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque JLo ? Ne montre-t-il pas que finalement, la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. 

 

Mais comme d’habitude on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R’n’B du début des années 2000. On appuie sur PLAY, de Jennifer Lopez.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Si vous voulez savoir d'où viennent les tubes qui ont bercé les années 90 et 2000, quel a été leur impact et quel est leur héritage aujourd'hui, vous êtes au bon endroit. Pour ne rien louper, abonnez-vous sur votre plateforme de podcast habituelle et suivez-moi sur Twitter et Instagram à cd2titres underscore podcast. Vous le savez, j'aime bien vous raconter ce qui se passe dans l'arrière-cuisine de l'industrie musicale, les petites combines et mes skinneries. L'occasion de voir que certains tubes qu'on aime encore aujourd'hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, This Is Me Now, le 16 février 2024, accompagnée d'un film et d'un documentaire rien que ça, sont l'occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur Insta suivent sous le nom de J-Lo. Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle et dans l'optique de replacer la star qu'elle est au cœur du game après une décennie musicalement en dents de scie et néanmoins quelques jolies performances au cinéma dans Hustlers ou en cotette d'affiche du Super Bowl 2020 avec Shakira. Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque J-Lo ? Ne montre-t-il pas que finalement la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. Mais comme d'habitude, on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R&B du début des années 2000. J'appuie littéralement sur Play de Jennifer Lopez, From the Block. Autant entrer directement dans le vif du sujet, le refrain que vous venez d'entendre est bien celui de la version définitive de Play, le deuxième single extrait du second album de Jennifer Lopez, J-Lo. Pourtant, la voix que vous avez entendue n'est pas celle de Jennie. On revient en arrière pour vérifier, une fois qu'on le sait, c'est très audible.

  • Speaker #1

    C'est parti !

  • Speaker #0

    Cette voix, c'est celle de la jeune autrice compositrice américaine Christina Milian. Et si vous vérifiez, vous ne verrez pas la mention Featuring Christina Milian sur la pochette du CD de titre. Comme souvent pour les popstars qui n'écrivent pas leurs chansons, ou très peu, par exemple Céline Dion, Cher ou Whitney Houston qui sont de grandes interprètes mais pas des autrices, les directeurs artistiques au sein de leur label partent en virée shopping à la recherche de titres correspondant à la couleur souhaitée pour le projet en cours. On avait évoqué ce sujet avec Kylie dans l'épisode précédent. Il y a plusieurs manières de soumettre des chansons à ce genre d'artiste. Parfois, ça prend la forme de writing camps, ou résidences d'écriture, où on réunit plusieurs songwriters pour les faire plancher sur des titres à partir d'un brief précis. Cela a souvent été le cas pour Beyoncé par exemple, qui a eu l'habitude de réunir la fine fleur des artistes du moment pour qu'ils lui pondent des tubes. La Queen Bey n'ayant ensuite qu'à choisir les plus pertinents, et à y ajouter ou non sa patte. Je précise qu'elle a aussi écrit et co-écrit des titres de son répertoire sans cette méthode. Jennifer, la nôtre, de la Starac, m'avait raconté ça dans une interview en 2010 à l'occasion de la sortie de son album Appelle-moi Jen. Je n'ai malheureusement plus l'enregistrement audio, alors je vous en lis un extrait. Et là, Dominique, Go, son directeur artistique, me parle d'un séminaire. Je n'étais pas très motivé. C'était trop scolaire, conventionnel, et puis il y a cet esprit de compétition, ce n'est pas du tout mon truc. Je préfère rencontrer les gens. Et s'il y a un feeling, on travaille ensemble. Sinon, non. Il me dit Fais-moi confiance, tu vas choisir les gens avec qui tu vas partir. J'écoute alors plein de sons différents et je choisis Coco Royal, Feed, des gens qui avaient une culture différente et ça a été extraordinairement enrichissant. On est parti en colo, faire de la musique avec l'ambiance qui va avec. Feu de camp, séance d'écoute le soir, on composait des morceaux ensemble, chacun donnait son avis, un peu, les uns les autres, dans un esprit hyper bon enfant. Il existait déjà des textes qui avaient été écrits pour moi avec lesquels nous étions partis, mais je les ai laissés libres pour écrire ce qu'ils ressentaient ou pas. Ils piochaient dans les textes et allaient dans leur chambre pour composer de la musique, et moi j'allais de chambre en chambre pour donner mon avis. Non, là tu pars trop loin, je mettais mon grain de sel un peu partout, c'était assez énorme. On ressort de ce séminaire hyper heureux parce qu'on a une trentaine de chansons. On a passé deux semaines dans cet endroit de rêve qu'est la Corse, on a beaucoup de chance, la maison de disques nous a loué une superbe maison avec tout pour se sentir bien et faire de la bonne musique. On a fait de la bonne musique et j'étais très très content des rencontres que j'ai faites et hyper charmé par les personnes qui sont venues et qui ont relevé le défi de faire des chansons pour Jennifer, pour reprendre leur mot. Voilà pour ce petit aparté, merci Jennifer. Alors, je reprends, deuxième option. Le label commande à des auteurs-compositeurs chevronnés des tubes sur mesure. Par exemple, Allumer le feu de Johnny Hallyday, créé rien que pour l'idole des jeunes par les alors relativement jeunes Zazie et Pascal Obispo. A l'international, on peut penser au duo Julia Michaels-Justin Tranter, qui ont écrit pour toute la teen pop US de ces dix dernières années, de Bieber à Selena Gomez ou Olivia Rodrigo. Troisième option, un artiste successful se délaisse d'un titre dont il n'a pas l'utilité pour lui-même, dans l'espoir que ce relatif fond de tiroir puisse rapporter quelques deniers en étant interprété par un ou une autre qui cartonne à ce moment-là. On pense à Breakaway, le hit de Kelly Clarkson, qu'Avril Lavigne avait à la base écrit pour son propre album Let Go. Ou encore What I Want From Me, donné par Pink à Adam Lambert. Sia s'est souvent illustré dans ce domaine. Quatrième possibilité, un auteur-compositeur et souvent producteur s'enferme en studio avec un artiste avec qui il écrit et produit un album entier. On pense par exemple à Timbaland et Nelly Furtado qui en 2006 accouchent de l'excellent Lose et de sa ribambelle de tubes Man Eater, Promiscuous Girl, Say It Right, etc. Enfin, des démos sont soumises par des auteurs-compositeurs signés sur le même label ou chez le même éditeur. Des chansons souvent écrites à la basse pour eux ou elles-mêmes, et quasiment terminées donc avec une voix témoin pour guider l'enregistrement. Mais parfois, il faut savoir être réaliste, mieux vaut donner un tube potentiel à un gros artiste capable de le transformer en or, et percevoir de cette manière des royalties confortables sans être sur le devant de la scène, plutôt que de gâcher une chanson en la gardant pour soi sans pouvoir lui offrir le destin qu'elle mérite. C'est à peu près cela qui s'est passé avec Play. Jennifer Lopez n'écrit pas un mot de ses chansons et ce n'est pas grave, d'autres le font très bien pour elle. Mais revenons un peu en arrière. Jennifer est issue d'une famille d'immigrants portoricains installés dans le Bronx, à New York. Le foyer, modeste, élève ses trois filles de manière stricte, dans la foi catholique. Jennifer se distingue rapidement par un certain talent artistique et surtout un appétit féroce pour la réussite. Elle, la jeune Latina, veut montrer à l'Amérique qu'une jeune femme issue d'une minorité peut réussir et même s'imposer. Après quelques rôles mineurs sur petit et grand écran, Elle est remarquée en 1997 pour son interprétation de la chanteuse mexicano-américaine Selena, surnommée la Madonna Texane et assassinée à 23 ans en 1995. Elle est même nommée pour le Golden Globe de la meilleure actrice, mais ne gagne pas. Suite à cela, quelques rôles plus ou moins marquants vont la faire émerger, mais sans en faire une superstar. Elle enclenche donc la seconde partie de son plan de conquête du monde, la musique. Ça tombe bien, Selena lui avait mis le pied à l'étrier et donné envie d'enregistrer ses propres titres. Elle chante correctement, sans être une diva à voix, danse comme si sa vie en dépendait, et incarne parfaitement l'archétype de la beauté latine sophistiquée et métissée, à même de séduire les blancs sans trop les bousculer. Elle signe chez Sony Music, qui veut surfer sur le succès de la latine pop, courant qui... Carton à l'époque, porté par Ricky Martin, Enrique Iglesias ou encore Thalia, Paulina Rubio et Gloria Estefan. Son premier single, If You Had My Love, sort début 99, atteint la première place du Billboard Hot 100 américain et devient un tube mondial. S'en suivent deux autres gros hits, Waiting for Tonight et Let's Get Loud. C'est efficace, dansant, hyper accessible sans oublier de faire référence de loin certes, à son héritage latin. Très vite, un deuxième album est mis en chantier. Il s'appelle Jello et a quelques jolies signatures dans ses crédits dont P.D.D., le compagnon d'alors de Jennifer, est désormais inquiété par la justice américaine pour agressions, harcèlement et trafic sexuel. On trouve encore le mythique Rodney Jerkins, plus connu sous le nom de Dark Child. Le premier single s'appelle Love Don't Cost a Thing, une prod char d'assaut pas très subtile sur le thème l'argent ne fait pas le bonheur. C'est bourrin mais irrésistible. En mars 2001, après le joli succès de ce titre, le label enchaîne sur l'exploitation d'un deuxième single, Play. Dans un style très différent, plus futuriste et sexy, il montre une autre facette de Jenny, devenue en moins de deux ans une véritable marque et sa propriétaire une incontournable de l'entertainment mondial. Derrière Play, on trouve quatre auteurs-compositeurs. Tout d'abord, les suédois Anders Bage et Arndt Norbergesson, dont on devine qu'ils ont composé l'instru et la mélodie vocale de la chanson. Petit aparté, on leur doit aussi, et entre autres, la pépite Gotta Tell You de Samantha Mumba. Sous cette première forme, la démo passe entre les mains de Corey Rooney, auteur-compositeur prolifique signé chez Sony Music et qui écrit pour les artistes de la major. Retenez bien cela, c'est Tony Motola, grand patron de la firme japonaise et premier mari de Maria Carey, qui le signe en 1994 en tant que producteur, puis le promeut au poste de vice-président du département artistique chez Epic Records, l'un des labels de Sony sur lequel est justement signé J-Lo. A ce poste, on imagine aisément qu'il acquiert la démo de Play auprès de Bag Hantor pour son artiste phare du moment. Rien que de très banal, les suédois sont les champions des démos pop vendus pour être retravaillés. Enfin, la jeune Christina Milian, fraîchement signée sur le label de rap Murder Inc. par son créateur Irv Gotti, retenez bien ce nom aussi pour la suite, est également crédité à l'écriture vraisemblablement des paroles avec Ronnie. Comme c'est l'usage, c'est elle qui enregistre la voix témoin de la démo qui sera présentée à Jello. Il existe donc quelque part dans un coffre de Sony une version de Play chantée uniquement par Millian. Lopez se rend à Stockholm pour enregistrer ses parties vocales et une fois finalisée, sa voix est absente du refrain en lead remplacé par celle de Millian. Les deux voix sont suffisamment similaires pour que cela passe inaperçu auprès du grand public, mais lorsque l'on écoute attentivement, c'est flagrant. Millian est néanmoins crédité pour les chœurs, mais pas comme artiste en featuring comme on pourrait l'imaginer. Pas question en effet de faire de l'ombre à la nouvelle poule aux œufs d'or de Sony, avec une quasi inconnue qui n'a à son actif qu'un featuring avec le rappeur Jarul. Le single n'est pas un grand tube, mais s'en sort convenablement, surtout en Europe. Top 3 au UK, 20 en France, 8 en Italie et seulement 18 au Billboard US. Pas de quoi crier à la cata donc, mais malheureusement, et malgré ses qualités indéniables, ce titre ne fait pas partie des incontournables de son interprète. Moi, je l'adore. Les paroles sont tellement simples et cons qu'elles sont géniales. En gros, J-Lo veut que le DJ joue sa motherfucking song dans le club alors qu'elle y est pour s'enjailler avec ses potes. Un peu égocentrique je trouve, mais bon, je vois le trip. Bon, ça c'est si on garde son âme innocente. Si on gratte un peu, cette chanson parle clairement de cul. En gros, vous remplacez tous les dancing par fucking et vous comprenez le topo. Jennie veut donc que son mec, le DJ donc, lui fasse ce qu'elle aime, à savoir des trucs sous la ceinture et le tout toute la nuit, all night long. L'ambiance pour le moins moite du titre ne laisse pas trop de doute quant à ce sens pas si caché. Vous aurez donc bien compris que contrairement à ce qu'on a pu entendre, J-Lo n'a pas volé la chanson à Christina Milian. Celle-ci lui était bien destinée, mais le producteur a bizarrement choisi de garder la voix de la démo sur le refrain. On peut s'étonner que Lopez ait laissé faire ça, mais finalement, peu de gens ont réalisé la supercherie et on peut imaginer qu'à l'époque, J-Lo n'était pas très regardante. Cela dit, à cette même période, la mythe Jane est liée un peu malgré elle à d'autres affaires similaires dont les ramifications sont bien plus sordides et la relie à une autre superstar dont on a parlé dans l'épisode 45, Maria Care. Vous connaissez probablement ce même mythique, Maria Carey répondant à une interview en 2003 où on l'interroge sur celle en qui les médias aiment voir une rivale, Jennifer Lopez. Gardant son sourire showbiz à toute épreuve, la diva répond du tac au tac I don't know her je ne la connais pas. Évidemment, elle sait qui c'est, mais elle choisit d'ignorer totalement son existence, comme pour mieux s'en protéger. Aux sources de cette petite phrase passée à la postérité de la pop culture, on trouve Tommy Mottola. Le grand patron de Sony Music et ex-mari de Maria a très très mal vécu que sa poupée chantante s'émancipe de son influence néfaste et contrôlante en divorçant en mai 1997. Dès lors, il s'emploie à lui faire payer professionnellement ce qui ne peut plus lui faire subir dans l'intimité. Elle expédie l'enregistrement du dernier album qu'elle doit à Sony, Rainbow, en 1999, puis en avril 2001, elle signe un contrat de 100 millions de dollars, du jamais vu dans l'industrie, avec EMI Virgin, une autre major concurrente de Sony. J-Lo va donc devenir malgré elle l'instrument de la vengeance de Motola. En 2001, Carey planche sur le film Maudie Glitter et l'album qui l'accompagne. Pour le premier single Loverboy, elle veut utiliser un sample du titre Firecracker du groupe Yellow Magic Orchestra. Motola l'apprend et fait en sorte que Jennifer l'utilise avant elle sur le titre I'm Real présent sur son deuxième album. Pour ne pas risquer l'humiliation, Maria est contrainte d'abandonner son idée et se rabat sur un sample de Candy du groupe Cameo. En 2020, à l'occasion de la sortie de l'album The Rarities qui accompagne celle de ses mémoires, elle dévoile la version avec le sample de Firecracker. Deuxième coup bas de Motola, toujours en 2001, lorsqu'il apprend que son ex travaille avec Ja Rule, il s'empresse de faire réaliser un remix R&B d'I'm Real, destiné à séduire les radios urbaines. Cette nouvelle version est un duo suave entre le rappeur new-yorkais Ejello, et c'est un carton qui passe 5 semaines en tête du mille-bord. Et encore une fois, Maria est obligée de céder et de laisser la priorité à Jello. Irv Gulley, le manager de Jarul et qui, rappelez-vous, avait signé Christian Millian, l'a expliqué des années après. Maria, elle, revient sur ces deux épisodes dans ses mémoires, là encore sans jamais nommer Jello, mais en reconnaissant que leur supposée rivalité n'existait que par les basses manœuvres d'un homme décidément bien médiocre.

  • Speaker #2

    J'ai écrit un chanson ensemble, et la prochaine chose que vous savez, Tommy a appelé son manager, Irv Gotti, pour lui demander de collaborer sur un duet pour le même record d'entretenants féminins, me laissant scourer et remettre le chanson. Irv a même discuté depuis, dans une interview avec Desus et Mero. Il sait qu'on a juste fait cette merde avec Mariah. Et il essaie de fucker avec Mariah. C'était un sabotage, simple et clair. Regarde, j'étais bien entraînée dans l'art de transformer les situations de merde en fertilisateur, mais Tommy savait que fucker avec mes choix artistiques était particulièrement bas. Mais je ne les laisserais pas m'arrêter. J'ai changé de caméra et j'ai changé de influence techno à un sample plus funk de Candy par Cameo. Vous ne pouvez pas faire de erreur avec Cameo. Et après tout ça, Loverboy est devenu le meilleur single de 2001 aux Etats-Unis. Je suis réel.

  • Speaker #0

    Je ne pouvais pas faire l'impasse sur cet épisode maintes fois raconté car il illustre à merveille la position difficile des artistes pop féminines dans les années 90 et 2000. 99% des décideurs de l'industrie du disque sont des hommes, les businessmen souvent très éloignés de l'artistique et qui sont les premiers à bénéficier du succès des femmes. En étant producteurs, auteurs, compositeurs, éditeurs, etc., ils engrangent le fruit parfois colossal de l'arras sans travail qu'est la vie d'une pop star, de la promotion intense à la performance de leur musique et de leur image. Pour peu que comme J-Lo, elle n'écrive pas leurs chansons, elle ne touche qu'une petite part des revenus générés par celle-ci. Heureusement, notre bomba latina pouvait également compter sur ses cachets d'actrices et elle a surtout su créer un véritable empire en capitalisant sur sa personnalité, son sens du business, sa vie privée et son physique. Half Time, le documentaire que Netflix lui consacre en 2022, montre parfaitement le chemin parcouru depuis ses débuts jusqu'à sa performance à la mi-temps du Super Bowl en 2020. Alors oui, ce doc est totalement agiographique, mais il restitue parfaitement la bascule qu'elle a su faire. Passée de poupée de producteur ciné ou musique à véritable boss woman, qui décide de tout et qui plus de 20 ans après son lancement, est toujours dans le game. Qu'importe si elle n'a pas eu de hit depuis presque 15 ans, ou si ses rôles au ciné à l'exception du récent et très ghoul Hustlers ne marquent pas vraiment l'histoire de 7ème art, Jello est une marque et une incontournable de l'entertainment mondial. Cette entreprise s'est poursuivie en ce mois de février avec la sortie d'un nouvel album, This Is Me Now, d'un film et d'un documentaire, rien que ça. Ce triple projet sans la moindre logique financière et économique en 2024, a pour but de continuer à positionner la marque Jello dans l'inconscient collectif comme incontournable. La bible du showbiz US Variety a publié un long papier assez passionnant sur les dessous de cette égotripe à 20 millions de dollars, entièrement financée par la star elle-même, après qu'elle eut logiquement essuyé les refus des personnes censées qu'elle avait approchées. On y apprend que Jenny tenait absolument à nous expliquer les tenants et aboutissants de son historique amoureux, avec évidemment un focus sur sa romance renouée avec Ben Affleck, 15 ans après leur rupture initiale. L'album est affligeant de ringardisme. Son concept est, je cite, des histoires inédites sur sa quête d'amour dans les années comprises entre sa première histoire avec Ben Affleck et le triomphe de leur retrouvaille ainsi qu'elle l'a expliqué au journal anglais The Independent. C'est le manager de JLo qui lui a suggéré de baser l'album sur cette storyline, que l'artiste a ensuite soumise à des auteurs-compositeurs réunis chez elle en résidence d'écriture. Malgré un casting plutôt costaud aux manettes, aucun titre n'émerge et on croirait entendre des albums tracks de 2004. Cadence, qui a écrit Seven Rings ou Thank U, Next pour Ariana Grande, deux numéros 1, ne produit pas de miracle ici, tout comme Roger Chahayed ou Jess Gittleman, derrière des hits récents pour Mac Miller, Her, The Weeknd, Doja Cat ou Jack Harlow. Un des titres, Hearts and Flowers, ne compte pas moins de 16 collaborateurs crédités, en partie car il contient un sample de Jenny from the Block, Je suis épuisé. Comme je vous l'expliquais tout à l'heure, on imagine bien que ces auteurs-compositeurs n'ont pas refilé leurs meilleurs titres à Jello, préférant sans doute les garder pour des artistes plus à même d'en faire des succès commerciaux. Le documentaire, The Greatest Love Story Never Told, rien que ça, est assez fascinant et je l'ai regardé pour que vous n'ayez pas à le faire. Il raconte la jeunesse de l'album et surtout du film qui l'accompagne. Il y a un côté touchant à voir cette femme richissime de 54 ans s'exprimer et entretenir seule sa légende au milieu d'une foule de collaborateurs et collaboratrices plus ou moins acquis à sa cause mais surtout heureux de prendre un petit cachet au passage. Où le monde semble assez d'accord pour dire que tout ce bazar n'a pas grand intérêt et pourtant Jello donne tout. Elle répète sans relâche ses chorés, s'investit dans l'écriture, les réunions budget et encaisse les déconvenues. On comprend en filigrane que le projet n'a pas intéressé grand monde, mais heureusement, au dernier moment, Amazon Prime l'a acquis, ce qui a permis 1. de le diffuser à grande échelle et 2. que Jenny rentre, on l'espère, à peu près dans ses frais. Résultat de tout cela, un flop retentissant. L'album a connu une carrière courte et tragique dans les charts du monde entier, entré 38e au Billboard 200, out la semaine suivante, numéro 55 au Royaume-Uni ou encore 38 en France également, avant de disparaître du classement la semaine suivante. Bref, une cata, l'instar de son collègue Justin Timberlake, dont le dernier album ringardissime a déjà disparu des charts et des mémoires. Une preuve de l'écart considérable qui existe entre l'intérêt médiatique suscité par Jello et la réalité commerciale. Avec ce genre d'artiste, on se demande un peu à quoi bon ? Pourquoi vouloir absolument continuer à alimenter une carrière qui n'intéresse plus grand monde au lieu d'entretenir un catalogue solide qui ravit les nostalgiques des années 2000 qui ne rechignent pas à payer des sommes considérables pour venir vous voir en tournée ? Meilleur exemple, Janet Jackson qui ne se fadigue même plus à teaser son album fantôme Black Diamond et qui prend le cash où il est, dans les arédas du monde entier avec un show pas très ambitieux qui permet de vite rentabiliser le voyage. Côté tournée justement, ce n'est guère mieux pour l'ami de Jenny. Le This Is Me Now, The Tour, devait arpenter les plus grandes salles américaines l'été prochain pour 30 shows. Très vite, 7 dates sont annulées, officiellement pour des problèmes d'itinéraire, mais en vérité parce que les billets avaient du mal à trouver preneur. En revers, mais qu'à cela ne tienne, le show est vite rebaptisé This Is Me Live Greatest Hits, pour tenter de capitaliser sur le catalogue de l'artiste, plus que sur son dernier album passé totalement inaperçu. On espère pour Jello qu'elle fera vite oublier cette déroute, en misant sur son meilleur atout, elle-même. Je vous laisse avec une version presque vraiment live de Play, enregistrée lors du Let's Get Loud Tour. Vous y entendrez la vraie voix de Jennifer sur le refrain, mais ça, ça n'a pas de prix. Merci d'avoir suivi ce nouvel épisode de CD de Titres. Comme d'habitude, je serai ravi de vous retrouver pour discuter sur Instagram ou X at cddetitres underscore pod. Si ce n'est pas déjà fait, abonnez-vous au podcast sur votre plateforme préférée pour ne rien manquer et surtout laissez commentaires et étoiles sur Apple Podcasts et Spotify, c'est hyper important pour la visibilité du podcast. Et si vous voulez prolonger, j'organise régulièrement des séances de cinéma au Brady, un ciné indépendant à Paris. Ensemble, on regarde un film de pop star et on en discute après la projection. On a déjà diffusé Truth or Dare et Dick Tracy avec Madonna, Dreamgirls avec Beyoncé et plus récemment Glitter avec Maria Carey. Suivez mes réseaux pour ne pas louper les prochains et surtout dites-moi les films que vous aimeriez voir. Qu'étaient les plateformes dans quelques jours ? Un nouvel épisode complémentaire de celui-ci arrive. Je suis Loïc Dubon-Laurichet et je vous dis à très vite.

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Description

Vous le savez, j’aime bien vous raconter ce qui se passe dans l’arrière-cuisine de l’industrie musicale, les petites combines et mesquineries. L’occasion de voir que certains tubes qu’on aime encore aujourd’hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. 

 

La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, “This is me…now”, le 16 février 2024, accompagné d’un film et d’un documentaire, rien que ça, sont l’occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur insta suivent sous le nom de JLo. 

Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle, et dans l’optique de replacer la star qu’elle est au coeur du game après une décennie musicalement en dent de scie et néanmoins quelques jolies performances, au cinéma dans Hustlers ou en co-tête d’affiche du Superbowl 2020 avec Shakira. 

Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque JLo ? Ne montre-t-il pas que finalement, la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. 

 

Mais comme d’habitude on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R’n’B du début des années 2000. On appuie sur PLAY, de Jennifer Lopez.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si vous voulez savoir d'où viennent les tubes qui ont bercé les années 90 et 2000, quel a été leur impact et quel est leur héritage aujourd'hui, vous êtes au bon endroit. Pour ne rien louper, abonnez-vous sur votre plateforme de podcast habituelle et suivez-moi sur Twitter et Instagram à cd2titres underscore podcast. Vous le savez, j'aime bien vous raconter ce qui se passe dans l'arrière-cuisine de l'industrie musicale, les petites combines et mes skinneries. L'occasion de voir que certains tubes qu'on aime encore aujourd'hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, This Is Me Now, le 16 février 2024, accompagnée d'un film et d'un documentaire rien que ça, sont l'occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur Insta suivent sous le nom de J-Lo. Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle et dans l'optique de replacer la star qu'elle est au cœur du game après une décennie musicalement en dents de scie et néanmoins quelques jolies performances au cinéma dans Hustlers ou en cotette d'affiche du Super Bowl 2020 avec Shakira. Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque J-Lo ? Ne montre-t-il pas que finalement la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. Mais comme d'habitude, on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R&B du début des années 2000. J'appuie littéralement sur Play de Jennifer Lopez, From the Block. Autant entrer directement dans le vif du sujet, le refrain que vous venez d'entendre est bien celui de la version définitive de Play, le deuxième single extrait du second album de Jennifer Lopez, J-Lo. Pourtant, la voix que vous avez entendue n'est pas celle de Jennie. On revient en arrière pour vérifier, une fois qu'on le sait, c'est très audible.

  • Speaker #1

    C'est parti !

  • Speaker #0

    Cette voix, c'est celle de la jeune autrice compositrice américaine Christina Milian. Et si vous vérifiez, vous ne verrez pas la mention Featuring Christina Milian sur la pochette du CD de titre. Comme souvent pour les popstars qui n'écrivent pas leurs chansons, ou très peu, par exemple Céline Dion, Cher ou Whitney Houston qui sont de grandes interprètes mais pas des autrices, les directeurs artistiques au sein de leur label partent en virée shopping à la recherche de titres correspondant à la couleur souhaitée pour le projet en cours. On avait évoqué ce sujet avec Kylie dans l'épisode précédent. Il y a plusieurs manières de soumettre des chansons à ce genre d'artiste. Parfois, ça prend la forme de writing camps, ou résidences d'écriture, où on réunit plusieurs songwriters pour les faire plancher sur des titres à partir d'un brief précis. Cela a souvent été le cas pour Beyoncé par exemple, qui a eu l'habitude de réunir la fine fleur des artistes du moment pour qu'ils lui pondent des tubes. La Queen Bey n'ayant ensuite qu'à choisir les plus pertinents, et à y ajouter ou non sa patte. Je précise qu'elle a aussi écrit et co-écrit des titres de son répertoire sans cette méthode. Jennifer, la nôtre, de la Starac, m'avait raconté ça dans une interview en 2010 à l'occasion de la sortie de son album Appelle-moi Jen. Je n'ai malheureusement plus l'enregistrement audio, alors je vous en lis un extrait. Et là, Dominique, Go, son directeur artistique, me parle d'un séminaire. Je n'étais pas très motivé. C'était trop scolaire, conventionnel, et puis il y a cet esprit de compétition, ce n'est pas du tout mon truc. Je préfère rencontrer les gens. Et s'il y a un feeling, on travaille ensemble. Sinon, non. Il me dit Fais-moi confiance, tu vas choisir les gens avec qui tu vas partir. J'écoute alors plein de sons différents et je choisis Coco Royal, Feed, des gens qui avaient une culture différente et ça a été extraordinairement enrichissant. On est parti en colo, faire de la musique avec l'ambiance qui va avec. Feu de camp, séance d'écoute le soir, on composait des morceaux ensemble, chacun donnait son avis, un peu, les uns les autres, dans un esprit hyper bon enfant. Il existait déjà des textes qui avaient été écrits pour moi avec lesquels nous étions partis, mais je les ai laissés libres pour écrire ce qu'ils ressentaient ou pas. Ils piochaient dans les textes et allaient dans leur chambre pour composer de la musique, et moi j'allais de chambre en chambre pour donner mon avis. Non, là tu pars trop loin, je mettais mon grain de sel un peu partout, c'était assez énorme. On ressort de ce séminaire hyper heureux parce qu'on a une trentaine de chansons. On a passé deux semaines dans cet endroit de rêve qu'est la Corse, on a beaucoup de chance, la maison de disques nous a loué une superbe maison avec tout pour se sentir bien et faire de la bonne musique. On a fait de la bonne musique et j'étais très très content des rencontres que j'ai faites et hyper charmé par les personnes qui sont venues et qui ont relevé le défi de faire des chansons pour Jennifer, pour reprendre leur mot. Voilà pour ce petit aparté, merci Jennifer. Alors, je reprends, deuxième option. Le label commande à des auteurs-compositeurs chevronnés des tubes sur mesure. Par exemple, Allumer le feu de Johnny Hallyday, créé rien que pour l'idole des jeunes par les alors relativement jeunes Zazie et Pascal Obispo. A l'international, on peut penser au duo Julia Michaels-Justin Tranter, qui ont écrit pour toute la teen pop US de ces dix dernières années, de Bieber à Selena Gomez ou Olivia Rodrigo. Troisième option, un artiste successful se délaisse d'un titre dont il n'a pas l'utilité pour lui-même, dans l'espoir que ce relatif fond de tiroir puisse rapporter quelques deniers en étant interprété par un ou une autre qui cartonne à ce moment-là. On pense à Breakaway, le hit de Kelly Clarkson, qu'Avril Lavigne avait à la base écrit pour son propre album Let Go. Ou encore What I Want From Me, donné par Pink à Adam Lambert. Sia s'est souvent illustré dans ce domaine. Quatrième possibilité, un auteur-compositeur et souvent producteur s'enferme en studio avec un artiste avec qui il écrit et produit un album entier. On pense par exemple à Timbaland et Nelly Furtado qui en 2006 accouchent de l'excellent Lose et de sa ribambelle de tubes Man Eater, Promiscuous Girl, Say It Right, etc. Enfin, des démos sont soumises par des auteurs-compositeurs signés sur le même label ou chez le même éditeur. Des chansons souvent écrites à la basse pour eux ou elles-mêmes, et quasiment terminées donc avec une voix témoin pour guider l'enregistrement. Mais parfois, il faut savoir être réaliste, mieux vaut donner un tube potentiel à un gros artiste capable de le transformer en or, et percevoir de cette manière des royalties confortables sans être sur le devant de la scène, plutôt que de gâcher une chanson en la gardant pour soi sans pouvoir lui offrir le destin qu'elle mérite. C'est à peu près cela qui s'est passé avec Play. Jennifer Lopez n'écrit pas un mot de ses chansons et ce n'est pas grave, d'autres le font très bien pour elle. Mais revenons un peu en arrière. Jennifer est issue d'une famille d'immigrants portoricains installés dans le Bronx, à New York. Le foyer, modeste, élève ses trois filles de manière stricte, dans la foi catholique. Jennifer se distingue rapidement par un certain talent artistique et surtout un appétit féroce pour la réussite. Elle, la jeune Latina, veut montrer à l'Amérique qu'une jeune femme issue d'une minorité peut réussir et même s'imposer. Après quelques rôles mineurs sur petit et grand écran, Elle est remarquée en 1997 pour son interprétation de la chanteuse mexicano-américaine Selena, surnommée la Madonna Texane et assassinée à 23 ans en 1995. Elle est même nommée pour le Golden Globe de la meilleure actrice, mais ne gagne pas. Suite à cela, quelques rôles plus ou moins marquants vont la faire émerger, mais sans en faire une superstar. Elle enclenche donc la seconde partie de son plan de conquête du monde, la musique. Ça tombe bien, Selena lui avait mis le pied à l'étrier et donné envie d'enregistrer ses propres titres. Elle chante correctement, sans être une diva à voix, danse comme si sa vie en dépendait, et incarne parfaitement l'archétype de la beauté latine sophistiquée et métissée, à même de séduire les blancs sans trop les bousculer. Elle signe chez Sony Music, qui veut surfer sur le succès de la latine pop, courant qui... Carton à l'époque, porté par Ricky Martin, Enrique Iglesias ou encore Thalia, Paulina Rubio et Gloria Estefan. Son premier single, If You Had My Love, sort début 99, atteint la première place du Billboard Hot 100 américain et devient un tube mondial. S'en suivent deux autres gros hits, Waiting for Tonight et Let's Get Loud. C'est efficace, dansant, hyper accessible sans oublier de faire référence de loin certes, à son héritage latin. Très vite, un deuxième album est mis en chantier. Il s'appelle Jello et a quelques jolies signatures dans ses crédits dont P.D.D., le compagnon d'alors de Jennifer, est désormais inquiété par la justice américaine pour agressions, harcèlement et trafic sexuel. On trouve encore le mythique Rodney Jerkins, plus connu sous le nom de Dark Child. Le premier single s'appelle Love Don't Cost a Thing, une prod char d'assaut pas très subtile sur le thème l'argent ne fait pas le bonheur. C'est bourrin mais irrésistible. En mars 2001, après le joli succès de ce titre, le label enchaîne sur l'exploitation d'un deuxième single, Play. Dans un style très différent, plus futuriste et sexy, il montre une autre facette de Jenny, devenue en moins de deux ans une véritable marque et sa propriétaire une incontournable de l'entertainment mondial. Derrière Play, on trouve quatre auteurs-compositeurs. Tout d'abord, les suédois Anders Bage et Arndt Norbergesson, dont on devine qu'ils ont composé l'instru et la mélodie vocale de la chanson. Petit aparté, on leur doit aussi, et entre autres, la pépite Gotta Tell You de Samantha Mumba. Sous cette première forme, la démo passe entre les mains de Corey Rooney, auteur-compositeur prolifique signé chez Sony Music et qui écrit pour les artistes de la major. Retenez bien cela, c'est Tony Motola, grand patron de la firme japonaise et premier mari de Maria Carey, qui le signe en 1994 en tant que producteur, puis le promeut au poste de vice-président du département artistique chez Epic Records, l'un des labels de Sony sur lequel est justement signé J-Lo. A ce poste, on imagine aisément qu'il acquiert la démo de Play auprès de Bag Hantor pour son artiste phare du moment. Rien que de très banal, les suédois sont les champions des démos pop vendus pour être retravaillés. Enfin, la jeune Christina Milian, fraîchement signée sur le label de rap Murder Inc. par son créateur Irv Gotti, retenez bien ce nom aussi pour la suite, est également crédité à l'écriture vraisemblablement des paroles avec Ronnie. Comme c'est l'usage, c'est elle qui enregistre la voix témoin de la démo qui sera présentée à Jello. Il existe donc quelque part dans un coffre de Sony une version de Play chantée uniquement par Millian. Lopez se rend à Stockholm pour enregistrer ses parties vocales et une fois finalisée, sa voix est absente du refrain en lead remplacé par celle de Millian. Les deux voix sont suffisamment similaires pour que cela passe inaperçu auprès du grand public, mais lorsque l'on écoute attentivement, c'est flagrant. Millian est néanmoins crédité pour les chœurs, mais pas comme artiste en featuring comme on pourrait l'imaginer. Pas question en effet de faire de l'ombre à la nouvelle poule aux œufs d'or de Sony, avec une quasi inconnue qui n'a à son actif qu'un featuring avec le rappeur Jarul. Le single n'est pas un grand tube, mais s'en sort convenablement, surtout en Europe. Top 3 au UK, 20 en France, 8 en Italie et seulement 18 au Billboard US. Pas de quoi crier à la cata donc, mais malheureusement, et malgré ses qualités indéniables, ce titre ne fait pas partie des incontournables de son interprète. Moi, je l'adore. Les paroles sont tellement simples et cons qu'elles sont géniales. En gros, J-Lo veut que le DJ joue sa motherfucking song dans le club alors qu'elle y est pour s'enjailler avec ses potes. Un peu égocentrique je trouve, mais bon, je vois le trip. Bon, ça c'est si on garde son âme innocente. Si on gratte un peu, cette chanson parle clairement de cul. En gros, vous remplacez tous les dancing par fucking et vous comprenez le topo. Jennie veut donc que son mec, le DJ donc, lui fasse ce qu'elle aime, à savoir des trucs sous la ceinture et le tout toute la nuit, all night long. L'ambiance pour le moins moite du titre ne laisse pas trop de doute quant à ce sens pas si caché. Vous aurez donc bien compris que contrairement à ce qu'on a pu entendre, J-Lo n'a pas volé la chanson à Christina Milian. Celle-ci lui était bien destinée, mais le producteur a bizarrement choisi de garder la voix de la démo sur le refrain. On peut s'étonner que Lopez ait laissé faire ça, mais finalement, peu de gens ont réalisé la supercherie et on peut imaginer qu'à l'époque, J-Lo n'était pas très regardante. Cela dit, à cette même période, la mythe Jane est liée un peu malgré elle à d'autres affaires similaires dont les ramifications sont bien plus sordides et la relie à une autre superstar dont on a parlé dans l'épisode 45, Maria Care. Vous connaissez probablement ce même mythique, Maria Carey répondant à une interview en 2003 où on l'interroge sur celle en qui les médias aiment voir une rivale, Jennifer Lopez. Gardant son sourire showbiz à toute épreuve, la diva répond du tac au tac I don't know her je ne la connais pas. Évidemment, elle sait qui c'est, mais elle choisit d'ignorer totalement son existence, comme pour mieux s'en protéger. Aux sources de cette petite phrase passée à la postérité de la pop culture, on trouve Tommy Mottola. Le grand patron de Sony Music et ex-mari de Maria a très très mal vécu que sa poupée chantante s'émancipe de son influence néfaste et contrôlante en divorçant en mai 1997. Dès lors, il s'emploie à lui faire payer professionnellement ce qui ne peut plus lui faire subir dans l'intimité. Elle expédie l'enregistrement du dernier album qu'elle doit à Sony, Rainbow, en 1999, puis en avril 2001, elle signe un contrat de 100 millions de dollars, du jamais vu dans l'industrie, avec EMI Virgin, une autre major concurrente de Sony. J-Lo va donc devenir malgré elle l'instrument de la vengeance de Motola. En 2001, Carey planche sur le film Maudie Glitter et l'album qui l'accompagne. Pour le premier single Loverboy, elle veut utiliser un sample du titre Firecracker du groupe Yellow Magic Orchestra. Motola l'apprend et fait en sorte que Jennifer l'utilise avant elle sur le titre I'm Real présent sur son deuxième album. Pour ne pas risquer l'humiliation, Maria est contrainte d'abandonner son idée et se rabat sur un sample de Candy du groupe Cameo. En 2020, à l'occasion de la sortie de l'album The Rarities qui accompagne celle de ses mémoires, elle dévoile la version avec le sample de Firecracker. Deuxième coup bas de Motola, toujours en 2001, lorsqu'il apprend que son ex travaille avec Ja Rule, il s'empresse de faire réaliser un remix R&B d'I'm Real, destiné à séduire les radios urbaines. Cette nouvelle version est un duo suave entre le rappeur new-yorkais Ejello, et c'est un carton qui passe 5 semaines en tête du mille-bord. Et encore une fois, Maria est obligée de céder et de laisser la priorité à Jello. Irv Gulley, le manager de Jarul et qui, rappelez-vous, avait signé Christian Millian, l'a expliqué des années après. Maria, elle, revient sur ces deux épisodes dans ses mémoires, là encore sans jamais nommer Jello, mais en reconnaissant que leur supposée rivalité n'existait que par les basses manœuvres d'un homme décidément bien médiocre.

  • Speaker #2

    J'ai écrit un chanson ensemble, et la prochaine chose que vous savez, Tommy a appelé son manager, Irv Gotti, pour lui demander de collaborer sur un duet pour le même record d'entretenants féminins, me laissant scourer et remettre le chanson. Irv a même discuté depuis, dans une interview avec Desus et Mero. Il sait qu'on a juste fait cette merde avec Mariah. Et il essaie de fucker avec Mariah. C'était un sabotage, simple et clair. Regarde, j'étais bien entraînée dans l'art de transformer les situations de merde en fertilisateur, mais Tommy savait que fucker avec mes choix artistiques était particulièrement bas. Mais je ne les laisserais pas m'arrêter. J'ai changé de caméra et j'ai changé de influence techno à un sample plus funk de Candy par Cameo. Vous ne pouvez pas faire de erreur avec Cameo. Et après tout ça, Loverboy est devenu le meilleur single de 2001 aux Etats-Unis. Je suis réel.

  • Speaker #0

    Je ne pouvais pas faire l'impasse sur cet épisode maintes fois raconté car il illustre à merveille la position difficile des artistes pop féminines dans les années 90 et 2000. 99% des décideurs de l'industrie du disque sont des hommes, les businessmen souvent très éloignés de l'artistique et qui sont les premiers à bénéficier du succès des femmes. En étant producteurs, auteurs, compositeurs, éditeurs, etc., ils engrangent le fruit parfois colossal de l'arras sans travail qu'est la vie d'une pop star, de la promotion intense à la performance de leur musique et de leur image. Pour peu que comme J-Lo, elle n'écrive pas leurs chansons, elle ne touche qu'une petite part des revenus générés par celle-ci. Heureusement, notre bomba latina pouvait également compter sur ses cachets d'actrices et elle a surtout su créer un véritable empire en capitalisant sur sa personnalité, son sens du business, sa vie privée et son physique. Half Time, le documentaire que Netflix lui consacre en 2022, montre parfaitement le chemin parcouru depuis ses débuts jusqu'à sa performance à la mi-temps du Super Bowl en 2020. Alors oui, ce doc est totalement agiographique, mais il restitue parfaitement la bascule qu'elle a su faire. Passée de poupée de producteur ciné ou musique à véritable boss woman, qui décide de tout et qui plus de 20 ans après son lancement, est toujours dans le game. Qu'importe si elle n'a pas eu de hit depuis presque 15 ans, ou si ses rôles au ciné à l'exception du récent et très ghoul Hustlers ne marquent pas vraiment l'histoire de 7ème art, Jello est une marque et une incontournable de l'entertainment mondial. Cette entreprise s'est poursuivie en ce mois de février avec la sortie d'un nouvel album, This Is Me Now, d'un film et d'un documentaire, rien que ça. Ce triple projet sans la moindre logique financière et économique en 2024, a pour but de continuer à positionner la marque Jello dans l'inconscient collectif comme incontournable. La bible du showbiz US Variety a publié un long papier assez passionnant sur les dessous de cette égotripe à 20 millions de dollars, entièrement financée par la star elle-même, après qu'elle eut logiquement essuyé les refus des personnes censées qu'elle avait approchées. On y apprend que Jenny tenait absolument à nous expliquer les tenants et aboutissants de son historique amoureux, avec évidemment un focus sur sa romance renouée avec Ben Affleck, 15 ans après leur rupture initiale. L'album est affligeant de ringardisme. Son concept est, je cite, des histoires inédites sur sa quête d'amour dans les années comprises entre sa première histoire avec Ben Affleck et le triomphe de leur retrouvaille ainsi qu'elle l'a expliqué au journal anglais The Independent. C'est le manager de JLo qui lui a suggéré de baser l'album sur cette storyline, que l'artiste a ensuite soumise à des auteurs-compositeurs réunis chez elle en résidence d'écriture. Malgré un casting plutôt costaud aux manettes, aucun titre n'émerge et on croirait entendre des albums tracks de 2004. Cadence, qui a écrit Seven Rings ou Thank U, Next pour Ariana Grande, deux numéros 1, ne produit pas de miracle ici, tout comme Roger Chahayed ou Jess Gittleman, derrière des hits récents pour Mac Miller, Her, The Weeknd, Doja Cat ou Jack Harlow. Un des titres, Hearts and Flowers, ne compte pas moins de 16 collaborateurs crédités, en partie car il contient un sample de Jenny from the Block, Je suis épuisé. Comme je vous l'expliquais tout à l'heure, on imagine bien que ces auteurs-compositeurs n'ont pas refilé leurs meilleurs titres à Jello, préférant sans doute les garder pour des artistes plus à même d'en faire des succès commerciaux. Le documentaire, The Greatest Love Story Never Told, rien que ça, est assez fascinant et je l'ai regardé pour que vous n'ayez pas à le faire. Il raconte la jeunesse de l'album et surtout du film qui l'accompagne. Il y a un côté touchant à voir cette femme richissime de 54 ans s'exprimer et entretenir seule sa légende au milieu d'une foule de collaborateurs et collaboratrices plus ou moins acquis à sa cause mais surtout heureux de prendre un petit cachet au passage. Où le monde semble assez d'accord pour dire que tout ce bazar n'a pas grand intérêt et pourtant Jello donne tout. Elle répète sans relâche ses chorés, s'investit dans l'écriture, les réunions budget et encaisse les déconvenues. On comprend en filigrane que le projet n'a pas intéressé grand monde, mais heureusement, au dernier moment, Amazon Prime l'a acquis, ce qui a permis 1. de le diffuser à grande échelle et 2. que Jenny rentre, on l'espère, à peu près dans ses frais. Résultat de tout cela, un flop retentissant. L'album a connu une carrière courte et tragique dans les charts du monde entier, entré 38e au Billboard 200, out la semaine suivante, numéro 55 au Royaume-Uni ou encore 38 en France également, avant de disparaître du classement la semaine suivante. Bref, une cata, l'instar de son collègue Justin Timberlake, dont le dernier album ringardissime a déjà disparu des charts et des mémoires. Une preuve de l'écart considérable qui existe entre l'intérêt médiatique suscité par Jello et la réalité commerciale. Avec ce genre d'artiste, on se demande un peu à quoi bon ? Pourquoi vouloir absolument continuer à alimenter une carrière qui n'intéresse plus grand monde au lieu d'entretenir un catalogue solide qui ravit les nostalgiques des années 2000 qui ne rechignent pas à payer des sommes considérables pour venir vous voir en tournée ? Meilleur exemple, Janet Jackson qui ne se fadigue même plus à teaser son album fantôme Black Diamond et qui prend le cash où il est, dans les arédas du monde entier avec un show pas très ambitieux qui permet de vite rentabiliser le voyage. Côté tournée justement, ce n'est guère mieux pour l'ami de Jenny. Le This Is Me Now, The Tour, devait arpenter les plus grandes salles américaines l'été prochain pour 30 shows. Très vite, 7 dates sont annulées, officiellement pour des problèmes d'itinéraire, mais en vérité parce que les billets avaient du mal à trouver preneur. En revers, mais qu'à cela ne tienne, le show est vite rebaptisé This Is Me Live Greatest Hits, pour tenter de capitaliser sur le catalogue de l'artiste, plus que sur son dernier album passé totalement inaperçu. On espère pour Jello qu'elle fera vite oublier cette déroute, en misant sur son meilleur atout, elle-même. Je vous laisse avec une version presque vraiment live de Play, enregistrée lors du Let's Get Loud Tour. Vous y entendrez la vraie voix de Jennifer sur le refrain, mais ça, ça n'a pas de prix. Merci d'avoir suivi ce nouvel épisode de CD de Titres. Comme d'habitude, je serai ravi de vous retrouver pour discuter sur Instagram ou X at cddetitres underscore pod. Si ce n'est pas déjà fait, abonnez-vous au podcast sur votre plateforme préférée pour ne rien manquer et surtout laissez commentaires et étoiles sur Apple Podcasts et Spotify, c'est hyper important pour la visibilité du podcast. Et si vous voulez prolonger, j'organise régulièrement des séances de cinéma au Brady, un ciné indépendant à Paris. Ensemble, on regarde un film de pop star et on en discute après la projection. On a déjà diffusé Truth or Dare et Dick Tracy avec Madonna, Dreamgirls avec Beyoncé et plus récemment Glitter avec Maria Carey. Suivez mes réseaux pour ne pas louper les prochains et surtout dites-moi les films que vous aimeriez voir. Qu'étaient les plateformes dans quelques jours ? Un nouvel épisode complémentaire de celui-ci arrive. Je suis Loïc Dubon-Laurichet et je vous dis à très vite.

Description

Vous le savez, j’aime bien vous raconter ce qui se passe dans l’arrière-cuisine de l’industrie musicale, les petites combines et mesquineries. L’occasion de voir que certains tubes qu’on aime encore aujourd’hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. 

 

La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, “This is me…now”, le 16 février 2024, accompagné d’un film et d’un documentaire, rien que ça, sont l’occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur insta suivent sous le nom de JLo. 

Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle, et dans l’optique de replacer la star qu’elle est au coeur du game après une décennie musicalement en dent de scie et néanmoins quelques jolies performances, au cinéma dans Hustlers ou en co-tête d’affiche du Superbowl 2020 avec Shakira. 

Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque JLo ? Ne montre-t-il pas que finalement, la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. 

 

Mais comme d’habitude on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R’n’B du début des années 2000. On appuie sur PLAY, de Jennifer Lopez.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si vous voulez savoir d'où viennent les tubes qui ont bercé les années 90 et 2000, quel a été leur impact et quel est leur héritage aujourd'hui, vous êtes au bon endroit. Pour ne rien louper, abonnez-vous sur votre plateforme de podcast habituelle et suivez-moi sur Twitter et Instagram à cd2titres underscore podcast. Vous le savez, j'aime bien vous raconter ce qui se passe dans l'arrière-cuisine de l'industrie musicale, les petites combines et mes skinneries. L'occasion de voir que certains tubes qu'on aime encore aujourd'hui ont une histoire un peu trouble à la limite de la moralité. La récente sortie du premier album de Jennifer Lopez en 10 ans, This Is Me Now, le 16 février 2024, accompagnée d'un film et d'un documentaire rien que ça, sont l'occasion rêvée de parler de celle que ses 250 millions de followers sur Insta suivent sous le nom de J-Lo. Ce projet narcissique qui défie toute logique commerciale ou artistique a été piloté par elle, pour elle et dans l'optique de replacer la star qu'elle est au cœur du game après une décennie musicalement en dents de scie et néanmoins quelques jolies performances au cinéma dans Hustlers ou en cotette d'affiche du Super Bowl 2020 avec Shakira. Mais ce retour a-t-il un autre intérêt que de faire vivre la marque J-Lo ? Ne montre-t-il pas que finalement la seule chose qui lui importe est son nom plus que son œuvre ? Et surtout, a-t-il été un succès ? On va essayer de répondre à ces questions. Mais comme d'habitude, on va se baser sur un titre emblématique de son répertoire qui nous permettra de parler de shopping de chansons, de guerre des divas sur fond de misogynie et de R&B du début des années 2000. J'appuie littéralement sur Play de Jennifer Lopez, From the Block. Autant entrer directement dans le vif du sujet, le refrain que vous venez d'entendre est bien celui de la version définitive de Play, le deuxième single extrait du second album de Jennifer Lopez, J-Lo. Pourtant, la voix que vous avez entendue n'est pas celle de Jennie. On revient en arrière pour vérifier, une fois qu'on le sait, c'est très audible.

  • Speaker #1

    C'est parti !

  • Speaker #0

    Cette voix, c'est celle de la jeune autrice compositrice américaine Christina Milian. Et si vous vérifiez, vous ne verrez pas la mention Featuring Christina Milian sur la pochette du CD de titre. Comme souvent pour les popstars qui n'écrivent pas leurs chansons, ou très peu, par exemple Céline Dion, Cher ou Whitney Houston qui sont de grandes interprètes mais pas des autrices, les directeurs artistiques au sein de leur label partent en virée shopping à la recherche de titres correspondant à la couleur souhaitée pour le projet en cours. On avait évoqué ce sujet avec Kylie dans l'épisode précédent. Il y a plusieurs manières de soumettre des chansons à ce genre d'artiste. Parfois, ça prend la forme de writing camps, ou résidences d'écriture, où on réunit plusieurs songwriters pour les faire plancher sur des titres à partir d'un brief précis. Cela a souvent été le cas pour Beyoncé par exemple, qui a eu l'habitude de réunir la fine fleur des artistes du moment pour qu'ils lui pondent des tubes. La Queen Bey n'ayant ensuite qu'à choisir les plus pertinents, et à y ajouter ou non sa patte. Je précise qu'elle a aussi écrit et co-écrit des titres de son répertoire sans cette méthode. Jennifer, la nôtre, de la Starac, m'avait raconté ça dans une interview en 2010 à l'occasion de la sortie de son album Appelle-moi Jen. Je n'ai malheureusement plus l'enregistrement audio, alors je vous en lis un extrait. Et là, Dominique, Go, son directeur artistique, me parle d'un séminaire. Je n'étais pas très motivé. C'était trop scolaire, conventionnel, et puis il y a cet esprit de compétition, ce n'est pas du tout mon truc. Je préfère rencontrer les gens. Et s'il y a un feeling, on travaille ensemble. Sinon, non. Il me dit Fais-moi confiance, tu vas choisir les gens avec qui tu vas partir. J'écoute alors plein de sons différents et je choisis Coco Royal, Feed, des gens qui avaient une culture différente et ça a été extraordinairement enrichissant. On est parti en colo, faire de la musique avec l'ambiance qui va avec. Feu de camp, séance d'écoute le soir, on composait des morceaux ensemble, chacun donnait son avis, un peu, les uns les autres, dans un esprit hyper bon enfant. Il existait déjà des textes qui avaient été écrits pour moi avec lesquels nous étions partis, mais je les ai laissés libres pour écrire ce qu'ils ressentaient ou pas. Ils piochaient dans les textes et allaient dans leur chambre pour composer de la musique, et moi j'allais de chambre en chambre pour donner mon avis. Non, là tu pars trop loin, je mettais mon grain de sel un peu partout, c'était assez énorme. On ressort de ce séminaire hyper heureux parce qu'on a une trentaine de chansons. On a passé deux semaines dans cet endroit de rêve qu'est la Corse, on a beaucoup de chance, la maison de disques nous a loué une superbe maison avec tout pour se sentir bien et faire de la bonne musique. On a fait de la bonne musique et j'étais très très content des rencontres que j'ai faites et hyper charmé par les personnes qui sont venues et qui ont relevé le défi de faire des chansons pour Jennifer, pour reprendre leur mot. Voilà pour ce petit aparté, merci Jennifer. Alors, je reprends, deuxième option. Le label commande à des auteurs-compositeurs chevronnés des tubes sur mesure. Par exemple, Allumer le feu de Johnny Hallyday, créé rien que pour l'idole des jeunes par les alors relativement jeunes Zazie et Pascal Obispo. A l'international, on peut penser au duo Julia Michaels-Justin Tranter, qui ont écrit pour toute la teen pop US de ces dix dernières années, de Bieber à Selena Gomez ou Olivia Rodrigo. Troisième option, un artiste successful se délaisse d'un titre dont il n'a pas l'utilité pour lui-même, dans l'espoir que ce relatif fond de tiroir puisse rapporter quelques deniers en étant interprété par un ou une autre qui cartonne à ce moment-là. On pense à Breakaway, le hit de Kelly Clarkson, qu'Avril Lavigne avait à la base écrit pour son propre album Let Go. Ou encore What I Want From Me, donné par Pink à Adam Lambert. Sia s'est souvent illustré dans ce domaine. Quatrième possibilité, un auteur-compositeur et souvent producteur s'enferme en studio avec un artiste avec qui il écrit et produit un album entier. On pense par exemple à Timbaland et Nelly Furtado qui en 2006 accouchent de l'excellent Lose et de sa ribambelle de tubes Man Eater, Promiscuous Girl, Say It Right, etc. Enfin, des démos sont soumises par des auteurs-compositeurs signés sur le même label ou chez le même éditeur. Des chansons souvent écrites à la basse pour eux ou elles-mêmes, et quasiment terminées donc avec une voix témoin pour guider l'enregistrement. Mais parfois, il faut savoir être réaliste, mieux vaut donner un tube potentiel à un gros artiste capable de le transformer en or, et percevoir de cette manière des royalties confortables sans être sur le devant de la scène, plutôt que de gâcher une chanson en la gardant pour soi sans pouvoir lui offrir le destin qu'elle mérite. C'est à peu près cela qui s'est passé avec Play. Jennifer Lopez n'écrit pas un mot de ses chansons et ce n'est pas grave, d'autres le font très bien pour elle. Mais revenons un peu en arrière. Jennifer est issue d'une famille d'immigrants portoricains installés dans le Bronx, à New York. Le foyer, modeste, élève ses trois filles de manière stricte, dans la foi catholique. Jennifer se distingue rapidement par un certain talent artistique et surtout un appétit féroce pour la réussite. Elle, la jeune Latina, veut montrer à l'Amérique qu'une jeune femme issue d'une minorité peut réussir et même s'imposer. Après quelques rôles mineurs sur petit et grand écran, Elle est remarquée en 1997 pour son interprétation de la chanteuse mexicano-américaine Selena, surnommée la Madonna Texane et assassinée à 23 ans en 1995. Elle est même nommée pour le Golden Globe de la meilleure actrice, mais ne gagne pas. Suite à cela, quelques rôles plus ou moins marquants vont la faire émerger, mais sans en faire une superstar. Elle enclenche donc la seconde partie de son plan de conquête du monde, la musique. Ça tombe bien, Selena lui avait mis le pied à l'étrier et donné envie d'enregistrer ses propres titres. Elle chante correctement, sans être une diva à voix, danse comme si sa vie en dépendait, et incarne parfaitement l'archétype de la beauté latine sophistiquée et métissée, à même de séduire les blancs sans trop les bousculer. Elle signe chez Sony Music, qui veut surfer sur le succès de la latine pop, courant qui... Carton à l'époque, porté par Ricky Martin, Enrique Iglesias ou encore Thalia, Paulina Rubio et Gloria Estefan. Son premier single, If You Had My Love, sort début 99, atteint la première place du Billboard Hot 100 américain et devient un tube mondial. S'en suivent deux autres gros hits, Waiting for Tonight et Let's Get Loud. C'est efficace, dansant, hyper accessible sans oublier de faire référence de loin certes, à son héritage latin. Très vite, un deuxième album est mis en chantier. Il s'appelle Jello et a quelques jolies signatures dans ses crédits dont P.D.D., le compagnon d'alors de Jennifer, est désormais inquiété par la justice américaine pour agressions, harcèlement et trafic sexuel. On trouve encore le mythique Rodney Jerkins, plus connu sous le nom de Dark Child. Le premier single s'appelle Love Don't Cost a Thing, une prod char d'assaut pas très subtile sur le thème l'argent ne fait pas le bonheur. C'est bourrin mais irrésistible. En mars 2001, après le joli succès de ce titre, le label enchaîne sur l'exploitation d'un deuxième single, Play. Dans un style très différent, plus futuriste et sexy, il montre une autre facette de Jenny, devenue en moins de deux ans une véritable marque et sa propriétaire une incontournable de l'entertainment mondial. Derrière Play, on trouve quatre auteurs-compositeurs. Tout d'abord, les suédois Anders Bage et Arndt Norbergesson, dont on devine qu'ils ont composé l'instru et la mélodie vocale de la chanson. Petit aparté, on leur doit aussi, et entre autres, la pépite Gotta Tell You de Samantha Mumba. Sous cette première forme, la démo passe entre les mains de Corey Rooney, auteur-compositeur prolifique signé chez Sony Music et qui écrit pour les artistes de la major. Retenez bien cela, c'est Tony Motola, grand patron de la firme japonaise et premier mari de Maria Carey, qui le signe en 1994 en tant que producteur, puis le promeut au poste de vice-président du département artistique chez Epic Records, l'un des labels de Sony sur lequel est justement signé J-Lo. A ce poste, on imagine aisément qu'il acquiert la démo de Play auprès de Bag Hantor pour son artiste phare du moment. Rien que de très banal, les suédois sont les champions des démos pop vendus pour être retravaillés. Enfin, la jeune Christina Milian, fraîchement signée sur le label de rap Murder Inc. par son créateur Irv Gotti, retenez bien ce nom aussi pour la suite, est également crédité à l'écriture vraisemblablement des paroles avec Ronnie. Comme c'est l'usage, c'est elle qui enregistre la voix témoin de la démo qui sera présentée à Jello. Il existe donc quelque part dans un coffre de Sony une version de Play chantée uniquement par Millian. Lopez se rend à Stockholm pour enregistrer ses parties vocales et une fois finalisée, sa voix est absente du refrain en lead remplacé par celle de Millian. Les deux voix sont suffisamment similaires pour que cela passe inaperçu auprès du grand public, mais lorsque l'on écoute attentivement, c'est flagrant. Millian est néanmoins crédité pour les chœurs, mais pas comme artiste en featuring comme on pourrait l'imaginer. Pas question en effet de faire de l'ombre à la nouvelle poule aux œufs d'or de Sony, avec une quasi inconnue qui n'a à son actif qu'un featuring avec le rappeur Jarul. Le single n'est pas un grand tube, mais s'en sort convenablement, surtout en Europe. Top 3 au UK, 20 en France, 8 en Italie et seulement 18 au Billboard US. Pas de quoi crier à la cata donc, mais malheureusement, et malgré ses qualités indéniables, ce titre ne fait pas partie des incontournables de son interprète. Moi, je l'adore. Les paroles sont tellement simples et cons qu'elles sont géniales. En gros, J-Lo veut que le DJ joue sa motherfucking song dans le club alors qu'elle y est pour s'enjailler avec ses potes. Un peu égocentrique je trouve, mais bon, je vois le trip. Bon, ça c'est si on garde son âme innocente. Si on gratte un peu, cette chanson parle clairement de cul. En gros, vous remplacez tous les dancing par fucking et vous comprenez le topo. Jennie veut donc que son mec, le DJ donc, lui fasse ce qu'elle aime, à savoir des trucs sous la ceinture et le tout toute la nuit, all night long. L'ambiance pour le moins moite du titre ne laisse pas trop de doute quant à ce sens pas si caché. Vous aurez donc bien compris que contrairement à ce qu'on a pu entendre, J-Lo n'a pas volé la chanson à Christina Milian. Celle-ci lui était bien destinée, mais le producteur a bizarrement choisi de garder la voix de la démo sur le refrain. On peut s'étonner que Lopez ait laissé faire ça, mais finalement, peu de gens ont réalisé la supercherie et on peut imaginer qu'à l'époque, J-Lo n'était pas très regardante. Cela dit, à cette même période, la mythe Jane est liée un peu malgré elle à d'autres affaires similaires dont les ramifications sont bien plus sordides et la relie à une autre superstar dont on a parlé dans l'épisode 45, Maria Care. Vous connaissez probablement ce même mythique, Maria Carey répondant à une interview en 2003 où on l'interroge sur celle en qui les médias aiment voir une rivale, Jennifer Lopez. Gardant son sourire showbiz à toute épreuve, la diva répond du tac au tac I don't know her je ne la connais pas. Évidemment, elle sait qui c'est, mais elle choisit d'ignorer totalement son existence, comme pour mieux s'en protéger. Aux sources de cette petite phrase passée à la postérité de la pop culture, on trouve Tommy Mottola. Le grand patron de Sony Music et ex-mari de Maria a très très mal vécu que sa poupée chantante s'émancipe de son influence néfaste et contrôlante en divorçant en mai 1997. Dès lors, il s'emploie à lui faire payer professionnellement ce qui ne peut plus lui faire subir dans l'intimité. Elle expédie l'enregistrement du dernier album qu'elle doit à Sony, Rainbow, en 1999, puis en avril 2001, elle signe un contrat de 100 millions de dollars, du jamais vu dans l'industrie, avec EMI Virgin, une autre major concurrente de Sony. J-Lo va donc devenir malgré elle l'instrument de la vengeance de Motola. En 2001, Carey planche sur le film Maudie Glitter et l'album qui l'accompagne. Pour le premier single Loverboy, elle veut utiliser un sample du titre Firecracker du groupe Yellow Magic Orchestra. Motola l'apprend et fait en sorte que Jennifer l'utilise avant elle sur le titre I'm Real présent sur son deuxième album. Pour ne pas risquer l'humiliation, Maria est contrainte d'abandonner son idée et se rabat sur un sample de Candy du groupe Cameo. En 2020, à l'occasion de la sortie de l'album The Rarities qui accompagne celle de ses mémoires, elle dévoile la version avec le sample de Firecracker. Deuxième coup bas de Motola, toujours en 2001, lorsqu'il apprend que son ex travaille avec Ja Rule, il s'empresse de faire réaliser un remix R&B d'I'm Real, destiné à séduire les radios urbaines. Cette nouvelle version est un duo suave entre le rappeur new-yorkais Ejello, et c'est un carton qui passe 5 semaines en tête du mille-bord. Et encore une fois, Maria est obligée de céder et de laisser la priorité à Jello. Irv Gulley, le manager de Jarul et qui, rappelez-vous, avait signé Christian Millian, l'a expliqué des années après. Maria, elle, revient sur ces deux épisodes dans ses mémoires, là encore sans jamais nommer Jello, mais en reconnaissant que leur supposée rivalité n'existait que par les basses manœuvres d'un homme décidément bien médiocre.

  • Speaker #2

    J'ai écrit un chanson ensemble, et la prochaine chose que vous savez, Tommy a appelé son manager, Irv Gotti, pour lui demander de collaborer sur un duet pour le même record d'entretenants féminins, me laissant scourer et remettre le chanson. Irv a même discuté depuis, dans une interview avec Desus et Mero. Il sait qu'on a juste fait cette merde avec Mariah. Et il essaie de fucker avec Mariah. C'était un sabotage, simple et clair. Regarde, j'étais bien entraînée dans l'art de transformer les situations de merde en fertilisateur, mais Tommy savait que fucker avec mes choix artistiques était particulièrement bas. Mais je ne les laisserais pas m'arrêter. J'ai changé de caméra et j'ai changé de influence techno à un sample plus funk de Candy par Cameo. Vous ne pouvez pas faire de erreur avec Cameo. Et après tout ça, Loverboy est devenu le meilleur single de 2001 aux Etats-Unis. Je suis réel.

  • Speaker #0

    Je ne pouvais pas faire l'impasse sur cet épisode maintes fois raconté car il illustre à merveille la position difficile des artistes pop féminines dans les années 90 et 2000. 99% des décideurs de l'industrie du disque sont des hommes, les businessmen souvent très éloignés de l'artistique et qui sont les premiers à bénéficier du succès des femmes. En étant producteurs, auteurs, compositeurs, éditeurs, etc., ils engrangent le fruit parfois colossal de l'arras sans travail qu'est la vie d'une pop star, de la promotion intense à la performance de leur musique et de leur image. Pour peu que comme J-Lo, elle n'écrive pas leurs chansons, elle ne touche qu'une petite part des revenus générés par celle-ci. Heureusement, notre bomba latina pouvait également compter sur ses cachets d'actrices et elle a surtout su créer un véritable empire en capitalisant sur sa personnalité, son sens du business, sa vie privée et son physique. Half Time, le documentaire que Netflix lui consacre en 2022, montre parfaitement le chemin parcouru depuis ses débuts jusqu'à sa performance à la mi-temps du Super Bowl en 2020. Alors oui, ce doc est totalement agiographique, mais il restitue parfaitement la bascule qu'elle a su faire. Passée de poupée de producteur ciné ou musique à véritable boss woman, qui décide de tout et qui plus de 20 ans après son lancement, est toujours dans le game. Qu'importe si elle n'a pas eu de hit depuis presque 15 ans, ou si ses rôles au ciné à l'exception du récent et très ghoul Hustlers ne marquent pas vraiment l'histoire de 7ème art, Jello est une marque et une incontournable de l'entertainment mondial. Cette entreprise s'est poursuivie en ce mois de février avec la sortie d'un nouvel album, This Is Me Now, d'un film et d'un documentaire, rien que ça. Ce triple projet sans la moindre logique financière et économique en 2024, a pour but de continuer à positionner la marque Jello dans l'inconscient collectif comme incontournable. La bible du showbiz US Variety a publié un long papier assez passionnant sur les dessous de cette égotripe à 20 millions de dollars, entièrement financée par la star elle-même, après qu'elle eut logiquement essuyé les refus des personnes censées qu'elle avait approchées. On y apprend que Jenny tenait absolument à nous expliquer les tenants et aboutissants de son historique amoureux, avec évidemment un focus sur sa romance renouée avec Ben Affleck, 15 ans après leur rupture initiale. L'album est affligeant de ringardisme. Son concept est, je cite, des histoires inédites sur sa quête d'amour dans les années comprises entre sa première histoire avec Ben Affleck et le triomphe de leur retrouvaille ainsi qu'elle l'a expliqué au journal anglais The Independent. C'est le manager de JLo qui lui a suggéré de baser l'album sur cette storyline, que l'artiste a ensuite soumise à des auteurs-compositeurs réunis chez elle en résidence d'écriture. Malgré un casting plutôt costaud aux manettes, aucun titre n'émerge et on croirait entendre des albums tracks de 2004. Cadence, qui a écrit Seven Rings ou Thank U, Next pour Ariana Grande, deux numéros 1, ne produit pas de miracle ici, tout comme Roger Chahayed ou Jess Gittleman, derrière des hits récents pour Mac Miller, Her, The Weeknd, Doja Cat ou Jack Harlow. Un des titres, Hearts and Flowers, ne compte pas moins de 16 collaborateurs crédités, en partie car il contient un sample de Jenny from the Block, Je suis épuisé. Comme je vous l'expliquais tout à l'heure, on imagine bien que ces auteurs-compositeurs n'ont pas refilé leurs meilleurs titres à Jello, préférant sans doute les garder pour des artistes plus à même d'en faire des succès commerciaux. Le documentaire, The Greatest Love Story Never Told, rien que ça, est assez fascinant et je l'ai regardé pour que vous n'ayez pas à le faire. Il raconte la jeunesse de l'album et surtout du film qui l'accompagne. Il y a un côté touchant à voir cette femme richissime de 54 ans s'exprimer et entretenir seule sa légende au milieu d'une foule de collaborateurs et collaboratrices plus ou moins acquis à sa cause mais surtout heureux de prendre un petit cachet au passage. Où le monde semble assez d'accord pour dire que tout ce bazar n'a pas grand intérêt et pourtant Jello donne tout. Elle répète sans relâche ses chorés, s'investit dans l'écriture, les réunions budget et encaisse les déconvenues. On comprend en filigrane que le projet n'a pas intéressé grand monde, mais heureusement, au dernier moment, Amazon Prime l'a acquis, ce qui a permis 1. de le diffuser à grande échelle et 2. que Jenny rentre, on l'espère, à peu près dans ses frais. Résultat de tout cela, un flop retentissant. L'album a connu une carrière courte et tragique dans les charts du monde entier, entré 38e au Billboard 200, out la semaine suivante, numéro 55 au Royaume-Uni ou encore 38 en France également, avant de disparaître du classement la semaine suivante. Bref, une cata, l'instar de son collègue Justin Timberlake, dont le dernier album ringardissime a déjà disparu des charts et des mémoires. Une preuve de l'écart considérable qui existe entre l'intérêt médiatique suscité par Jello et la réalité commerciale. Avec ce genre d'artiste, on se demande un peu à quoi bon ? Pourquoi vouloir absolument continuer à alimenter une carrière qui n'intéresse plus grand monde au lieu d'entretenir un catalogue solide qui ravit les nostalgiques des années 2000 qui ne rechignent pas à payer des sommes considérables pour venir vous voir en tournée ? Meilleur exemple, Janet Jackson qui ne se fadigue même plus à teaser son album fantôme Black Diamond et qui prend le cash où il est, dans les arédas du monde entier avec un show pas très ambitieux qui permet de vite rentabiliser le voyage. Côté tournée justement, ce n'est guère mieux pour l'ami de Jenny. Le This Is Me Now, The Tour, devait arpenter les plus grandes salles américaines l'été prochain pour 30 shows. Très vite, 7 dates sont annulées, officiellement pour des problèmes d'itinéraire, mais en vérité parce que les billets avaient du mal à trouver preneur. En revers, mais qu'à cela ne tienne, le show est vite rebaptisé This Is Me Live Greatest Hits, pour tenter de capitaliser sur le catalogue de l'artiste, plus que sur son dernier album passé totalement inaperçu. On espère pour Jello qu'elle fera vite oublier cette déroute, en misant sur son meilleur atout, elle-même. Je vous laisse avec une version presque vraiment live de Play, enregistrée lors du Let's Get Loud Tour. Vous y entendrez la vraie voix de Jennifer sur le refrain, mais ça, ça n'a pas de prix. Merci d'avoir suivi ce nouvel épisode de CD de Titres. Comme d'habitude, je serai ravi de vous retrouver pour discuter sur Instagram ou X at cddetitres underscore pod. Si ce n'est pas déjà fait, abonnez-vous au podcast sur votre plateforme préférée pour ne rien manquer et surtout laissez commentaires et étoiles sur Apple Podcasts et Spotify, c'est hyper important pour la visibilité du podcast. Et si vous voulez prolonger, j'organise régulièrement des séances de cinéma au Brady, un ciné indépendant à Paris. Ensemble, on regarde un film de pop star et on en discute après la projection. On a déjà diffusé Truth or Dare et Dick Tracy avec Madonna, Dreamgirls avec Beyoncé et plus récemment Glitter avec Maria Carey. Suivez mes réseaux pour ne pas louper les prochains et surtout dites-moi les films que vous aimeriez voir. Qu'étaient les plateformes dans quelques jours ? Un nouvel épisode complémentaire de celui-ci arrive. Je suis Loïc Dubon-Laurichet et je vous dis à très vite.

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