La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88) cover
La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88) cover
CIO Révolution

La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88)

La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88)

45min |13/02/2024
Play
La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88) cover
La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88) cover
CIO Révolution

La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88)

La transformation numérique de la Défense française - Vice Amiral d'escadre Arnaud Coustilliere - Président du Pôle Excellence Cyber(e88)

45min |13/02/2024
Play

Description

🪖 Vis ma vie de chef d'orchestre de la transformation numérique de la Défense française


Bienvenue dans l'épisode 88 de CIO Révolution by AirSaas. Un numéro inédit au cours duquel nous avons reçu Arnaud Coustillière un vice-amiral d’escadre !

   

Après avoir commandé plusieurs navires de combat il a contribué à la création de la cyberdéfense du ministère des Armées dont il a été le premier COMCYBER (Le commandement de la cyberdéfense) de 2011 à 2017. Il préside aujourd’hui le Pôle d’excellence Cyber. 

Il avait au préalable été DSI de la marine nationale 2006/2008, Il avait ensuite créé et mis en place la Direction générale du numérique du ministère des Armées (DGNUM) entre 2017 et 2020.
Il vient de publier "Soldat de la cyberguerre Un pionnier raconte la cyberdéfense française aux éditions Tallandier.


Avec lui on s’est intéressé à la conduite de projets et des hommes au sein d’une organisation aussi complexe que l’armée !  Il a par exemple mis en place jusqu’à 10 trains SAFe. On s’est demandé comment on structure, comment on transforme, comment on amène une “juste dose” de transversalité…ce sont quelques unes des questions abordées dans cet épisode qui vous fera découvrir les coulisses des armées le tout sans langue de bois !


TIMELINE


  • 01:36 : Présentations du parcours d’Arnaud

  • 05:04 : L’émergence d”une DSI transverse “groupe”, pour urbaniser et répartir entre le commun et le sectoriel 

  • 10:06 : L’image de l’élastique :  entre le DSI groupe qui tire le plus possible vers le transverse vs le DSI métier qui veut garder le plus de choses “ à sa main.”  “une affaire d’hommes”.

  • 11:48 La transversalité dans les organisations : entre framework rigide et hybridations de bonnes pratiques

  • 14:26 : les grands projets avec leurs “indicateurs pastèques” AKA. Les grands échecs informatiques : l’exemple du projet Louvoie

  • 18:24 : Les missions de DG Num au ministère de la défense : donner des outils de gouvernance  (droit de véto, vérification méthodes..) et orchestrer la transfo des SIC (systèmes d’information et de communication), 

  • 20:00 : L’implémentation et les limites de SAFE  au ministère des armées : mise en place d’un LAB, de nouvelles méthodes de travail sur l’innovation et test SAFe sur des grands projets.

  • 24:20 Regard sur « les trois ans du DSI » et les “lois” de la transformation REX sur deux  transfos une de huit ans avec la création de la cyberdéfense et une de trois ans en tant que DGNUM.

  • 31:28 Les deux points difficiles de la  transfo num : Timing et ressources humaines !

  • 39:02 : Regard sur l’audace  et le courage managérial …La roue du hamster pour continuer à délivrer  vs le courage des réformes de  long terme !

  • 41:59  Spécificités de la culture managériale au sein du ministère des armées.L’art de concilier le besoin de bien commun transverse et l’immobilisme structurel dans les orgas.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Et c'est comme le ministère des armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un. Et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, à un instant T.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Bertrand Ruiz et bienvenue sur le podcast CIO Révolution. Si vous êtes curieux de connaître les enjeux organisationnels, les solutions pragmatiques et les réflexions sur la transformation des entreprises, vous êtes au bon endroit. Ici, pas de langue de bois, que du concret. Mais avant de commencer, je me présente. Je suis le CEO d'Ersas, une solution web qui permet à la DSI et à la Direction Générale de partager une vue claire des projets en cours, des décisions à prendre et des priorisations à faire. Vous manquez de temps ? Ersas vous aide à vous focaliser sur l'urgent et l'important. Le besoin de reporting est de plus en plus fort. Ersas génère votre rapport flash décisionnel en un coup. S'il y a un historique fort entre les métiers, Ersas va vraiment vous aider à collaborer de manière efficace. Sur ce, je vous laisse avec ce nouvel épisode à découvrir une nouvelle façon de faire. Bonne écoute ! bonjour à tous je suis ravi aujourd'hui d'être avec Arnaud Coustillard qui est attention c'est la première fois qu'on a quelqu'un de ce secteur là vice-amiral d'escadre ancien directeur général du numérique du ministère des armées et ancien commandant de la cyber défense des armées ça fait long mais c'est tout ce que t'as été Arnaud et je suis ravi que tu sois là salut

  • Speaker #0

    Oui, bonjour, je suis ravi aussi de partager mon expérience avec vous. J'ai passé une quarantaine d'années au ministère des Armées, une vingtaine dans les opérations aéromaritimes, et je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Je ne suis pas un DSI technique, je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Et après, j'ai passé à peu près aussi une vingtaine d'années à la transformation numérique du ministère des Armées, en ayant graphié différents échelons. et en ayant eu la chance de créer la cyberdéfense des armées à action défensive et offensive, et de la commander pendant plus de six ans d'opération, et de terminer ma carrière comme directeur en créant la direction générale numérique du ministère des armées, avec toutes les problématiques de gouvernance de la donnée, d'ouverture de la donnée, de méthodologie de conduite des projets informatiques. et de tout ce qui tourne autour de l'agilité, le partage des données, tout ce qui est la transformation numérique et le lot de tous les DSI des grands groupes.

  • Speaker #1

    Ok, et donc du coup, en termes un petit peu de date et de nombre pour qu'on se situe, ça représente, de quelle année à quelle année, ça représentait combien de personnes dans tes services ?

  • Speaker #0

    Pour ne pas me concentrer que sur la partie finale, en 2006-2008, j'ai été DSI de la Marine Nationale, donc une grosse DSI, plutôt une DSI bulle qui devait faire une cinquantaine de personnes avec une population haïtienne qui devait tourner autour de 500 personnes en différents services qui étaient sous ma tutelle. Ensuite, la création des capacités cyber désarmées de 2011 à 2017. Là, une centaine de personnes au départ au sein de l'ensemble du ministère. Et quand j'ai quitté, on devait être à hauteur de 1500. Et je disposais d'un...

  • Speaker #1

    Tu passais de combien à combien, tu as dit là ?

  • Speaker #0

    Une centaine. Et quand j'ai quitté, on devait être aux alentours de 1500 en 2017. Et j'avais un état-major qui était passé de 3 personnes en 2011 à 70 personnes en 2018. Et ensuite, la Direction Générale du Numérique que j'ai créée était une entité qui, avec ses satellites, faisait une petite centaine de personnes. C'était une DSI groupe rattachée au COMEX, rattachée directement au cabinet ministre, et qui était censée avoir une autorité sur l'ensemble des entités, des différents DSI subordonnés du ministère, qui sont à peu près au nombre d'une petite vingtaine. Et le ministère des armées, c'était à peu près 20 000 spécialistes des systèmes d'information et informaticiens, plus de 3 000 systèmes d'information, sans compter l'informatique embarquée dans les systèmes d'armes, dans les infrastructures industrielles, à différents endroits, plusieurs centaines de métiers. en gros un budget d'investissement de l'ordre de 2 milliards d'euros par an sans compter les ressources humaines et les masses salariales.

  • Speaker #1

    Ok, et du coup, toi, ta mission dans tout ça, c'était, tu dis, la création. Ça veut dire quoi créer le département numérique dans ce cadre-là ?

  • Speaker #0

    Créer, si tu veux... Dans la longue maturation de la montée vers le numérique, on est parti, quand on revient dans les années 80, on était dans le domaine des télécoms, qui est à monter progressivement vers le domaine de l'informatique et monter progressivement vers le domaine du numérique pour accompagner cette transversalité importante autour des données et ainsi de suite. il a fallu que les directions informatiques des métiers et des gouvernances transverses, il a fallu concilier de plus en plus tout ce qui était le transverse, le commun, par rapport à ce qu'était le sectoriel. Typiquement, le réseau informatique d'usage général de la marine, de l'armée de l'air ou de l'armée de terre, il n'y avait aucune des raisons que ce soit des réseaux différents. D'où le fait que derrière, il y ait besoin de... d'urbaniser tout ça, il y a besoin de faire les mêmes choix techniques, et du coup finalement d'avoir une unique DSI run conduisant ce réseau. Donc cette espèce de grand mouvement pour moi lancé dans les années 80, qui est de faire en sorte que la DSI devienne de plus en plus transverse, et que les choses dans les socles réseau soient de plus en plus communs, et quelque chose qui a été aussi très fort au sein du ministère des armées, D'où l'apparition d'entités transverses, à la fois d'une DSI RUN, qui s'appelait la Direction Interarmée des Systèmes d'Information et des Systèmes d'Information. qui fournissait l'ensemble des systèmes communs à l'ensemble des ressortissants du ministère, toute armée, services civils inclus, et de l'autre côté, pour gouverner tout ça, une entité politique, très pro-entité politique, Haïti, qui est proche du cabinet du ministre. Et à un moment donné, puisqu'il fallait ouvrir davantage les données, parce qu'il fallait... mieux conduire les projets. Le ministère des Armées a senti le besoin de donner davantage d'attributs de gouvernance à cette entité et transformer cette direction générale des systèmes d'information en entité politique, en une vraie DSI groupe ayant un certain nombre de pouvoirs d'arbitrage, un certain nombre de responsabilités converses. et un certain nombre de droits de veto, notamment sur la conduite des programmes. Donc c'est ça que j'ai été amené à faire, c'est de transformer une direction IT très politique, qui découlait les normes qu'il faut faire, qui faisait des beaux papiers, très intéressants, mais qui n'étaient pas appliqués, en une direction plus opérationnelle, et exerçant une réelle autorité sur l'ensemble des différentes DSI. du ministère, quand on prend une organisation de la taille du ministère des armées, je pense que l'on est l'organisation la plus complexe en Europe.

  • Speaker #1

    La plus complexe, c'est clair.

  • Speaker #0

    Pas tellement du fait du nombre de postes de travail, mais surtout de l'hétérogénéité des systèmes, des contextes d'emploi et des métiers.

  • Speaker #1

    Ok, donc c'est plutôt le fait que ça soit vraiment tellement disparate en interne que faire en sorte que tout le monde arrive à travailler ensemble, à créer un cadre commun a été le point clé, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait. C'est la partie passée. C'est un peu la problématique que tous les grands DSI ont dans les organismes où il y a des cultures d'entreprise assez fortes. Moi j'ai beaucoup travaillé à l'époque avec EDF, avec la SNCF ou encore avec le Crédit Agricole. qui ont des cultures d'entreprise extrêmement fortes autour de métiers très structurés. Et c'est comme le ministère des Armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un, et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, un instanté.

  • Speaker #1

    Tu dis la juste dose de transverse que l'organisation à un instant T est capable de tolérer. C'est-à-dire qu'en gros, tu dis, si je résume et que je comprends bien, une organisation, elle, par défaut, historiquement, elle est silotée. On a envie que tout le monde travaille ensemble, mais en fait, on n'est pas capable d'aller plus vite que la musique non plus. Donc, il faut jauger quelles sont les bonnes tactiques qui vont petit à petit amener. dirons si on est 100% transverse ça a amené pourcentage après pourcentage à amener une meilleure collaboration transverse sans aller trop vite parce que sinon ça pète et sans aller trop lentement non plus parce que sinon on n'avance pas

  • Speaker #0

    Oui, c'est tout à fait ça. J'aime bien l'image de l'élastique. Le DSI groupe doit tirer sur l'élastique le plus possible parce que lui, il pousse vers le transverse, alors que le DSI métier va essayer de garder un ensemble de choses à sa main parce qu'il en a besoin pour sa mission. Donc c'est un juste équilibre qui est une action de transformation, qui n'est pas une action technique, c'est une action de transformation dans laquelle il a besoin à la fois de convaincre. mais aussi il a besoin de se montrer de temps en temps un peu plus coercitif, et c'est in fine une affaire d'hommes, parce que faire bouger une organisation, ça va être des relations interpersonnelles, des histoires, et cet élément très humain, fait en fait que l'organisation va accepter plus ou moins bien à tel moment. il y a des endroits où on sera allé trop loin dans le transverse, donc deux ans après on va recorriger voilà pour moi il n'y a pas de recette miracle la transformation d'une organisation c'est une entité vivante, un coup on va faire beaucoup de transverse, on sera peut-être allé un peu trop loin, on va en faire un petit peu moins voilà donc c'est un juste arbitrage à conduire avec une composante sociologique, une composante humaine, qui me paraît au moins aussi importante que la composante technologique.

  • Speaker #1

    Ok, et j'ai un truc que j'ai du mal à saisir, mais c'est le plus parce que j'y suis pas moi dedans en continu. L'idée de transversalité, tu vois, aller dans des grands frameworks où en gros tout le monde, on casse la hiérarchie de tout, safe, etc. Toi, quand tu veux amener de la transversalité dans cette organisation, c'est plus facile d'expliquer. la direction, la vision, mais aussi donner un modèle. Et je vois de plus en plus un peu cet affrontement entre personnes qui vont installer le framework par themselves parce que ça crée un cadre structuré, il y a des référents, il y a des coachs, il y a des formations, il y a un livre qui explique ce que c'est. Et du coup, c'est un cadre rigide, mais ça reste un cadre, de personnes qui vont dire non, en fait, on va prendre des bonnes pratiques un peu partout, on va créer notre propre framework. Et donc du coup, quand j'imagine que les choses sont un peu compliquées en interne politique, où il y a besoin de créer ce côté un peu vers où on va commun, Comment toi tu te positionnes par rapport à cette question de, est-ce que pour pouvoir avoir un commun dans l'organisation, il faut qu'on se rattache à un framework qui est connu et qui est explicité par d'autres, ou est-ce que c'est plutôt de la co-construction, ou est-ce que c'est un entre-deux ?

  • Speaker #0

    Pour moi ça va être un peu un entre-deux, qui va dépendre beaucoup de la taille de la structure et aussi de la taille du projet. C'est sûr que quand on vient de naître dans une structure comme le ministère des armées, qui est habitué à faire des gros projets, il y a beaucoup de méthodes en V, qui sont inspirées principalement des méthodes pour construire des porte-avions, des bateaux, des chars, des avions. Quand on transfère ça sur du numérique, ça ne marche pas forcément très bien.

  • Speaker #1

    en même temps tu vois je suis content qu'on ne fabrique pas tu vois des armes en mode super agile il y a ce côté itératif des fois mais quand on rentre dans le monde de l'IT typiquement

  • Speaker #0

    quand on fabrique un satellite de télécommunication Il y a une partie qui va être le hard, qui va être le... Par contre, il y a une partie système qui va être beaucoup plus évolutive et on commence à rentrer sur des modes de conduite extrêmement complexes où il faudrait mettre davantage d'agilité sur la partie de logiciel par rapport à la partie hard. Et c'est à partir de ce genre de projet... que l'on touche du doigt un petit peu la complexivité, la rencontre du monde agile, pur et dur, qui vient du monde de l'informatique, du système d'information, par rapport au mode projet plus classique, qui vient des projets un peu industriels classiques. L'autre chose qui était aussi à prendre en compte, c'est que dans les années 90-2000, dans toutes les grandes organisations, on a utilisé le projet informatique comme moyen de rationalisation des organisations. On a utilisé le projet de l'informatique comme étant aussi un moyen de faire travailler les gens ensemble en disant plus vous globaliserez vos besoins, plus vous mettrez assez d'informations en gros, mieux ça marchera Et tout ça, ça a généré des échecs importants dont le ministère des Armées, comme d'autres, a subi les foudres. Typiquement le projet Louvois. Le projet Louvois, c'est un projet qui est... une complexité extrêmement importante puisque c'était payer tous les militaires de l'ensemble du ministère de la même façon, alors que les règles de paiement étaient différentes. Donc c'est un projet qui a été lancé alors que les règles n'ont pas été faites. Donc c'était l'utilisation d'un projet informatique pour transformer le paiement d'un seul du ministère. Le problème d'un projet de cette taille-là, donc nous en plus, pour d'autres raisons, les gains ont été anticipés, ça a conduit à un projet, comme je l'appelle, un projet qui avait des indicateurs PASTECH, c'est-à-dire vers l'extérieur, pour assurer les autorités.

  • Speaker #1

    Indicateurs PASTECH.

  • Speaker #0

    Étaient tous rouges à l'intérieur, et puis à un moment, le truc a divergé. Quand le truc a divergé, tout le monde a regardé. a été un peu désarçonné. Puis quand on a un système qui diverge, ça fait des dégâts qui ont été quand même assez importants.

  • Speaker #1

    Donc ton point d'apport à ça, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est l'exemple même d'un grand, grand, grand système qui finalement était d'une complexité telle qu'elle n'était pas maîtrisable par les équipes de projet.

  • Speaker #1

    Mais du coup, parce que tu as dit plusieurs choses, juste pour être sûr de comprendre, tu dis, historiquement, le transverse a été introduit par les projets informatiques pour une rationalisation, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Non, le transverse répond à un besoin qui est lié, pour moi, avec le numérique. Mais d'un autre côté, dans les années 90, ou particulièrement dans l'État, dans les grandes entreprises, il y a eu un grand mouvement de rationalisation. L'idée, c'était de dire, c'est génial, l'informatique, c'est un coup de baguette magique, il suffit de faire un système d'information et on transforme, on va faire des gains énormes dans nos sociétés. Et ça, ça n'a pas marché.

  • Speaker #1

    ça n'a pas marché et ça donnait un certain nombre de grands échecs parce qu'on a voulu faire des systèmes beaucoup trop gros donc plus maîtrisables ok et du coup quand toi t'arrives dans une logique d'amener du transverse pour d'autres raisons ce tampon là où cette historique-là pèse sur le fait d'atteindre une des six groupes qui arrivent et qui veut essayer de rationaliser, qui met son nez partout ?

  • Speaker #0

    Non, moi je suis arrivé trois, quatre ans après, le retour d'expérience autour de... de cette mauvaise utilisation de l'informatique avait été en partie tirée. Moi, je suis arrivé plutôt dans le moment, donc c'était à partir de 2015, on a beaucoup parlé de transformation numérique. On a beaucoup parlé, on parlait beaucoup des laborats, des labs. des factories où on parlait beaucoup du fait que j'étais arrivé dans la période où le cloud était déjà relativement mature et tout ce qui était le développement sur le cloud, le développement rapide commençait à avoir un certain aura moi c'est à ce moment là où je suis arrivé et je suis arrivé avec deux missions bien particulières qui se retrouvent dans la délégation générale, direction générale au numérique qui sont d'un côté donner des outils de gouvernance dans la conduite des projets du ministère. Donc là, droit de veto, gouvernance, vérification des méthodes, vérification des équipes et ainsi de suite. Et de l'autre côté, orchestrer la transformation numérique du ministère, c'est-à-dire aider les différents DSI, aider les métiers à aller vers ces nouveaux modes numériques. en améliorant la façon de développer un système beaucoup plus rapidement. Donc, arriver à préconiser un certain nombre de méthodes de travail qui venaient plus du monde de l'innovation, et en allant jusqu'à la méthode SAFE pour les gros projets. Petit coupement, dans les trois jours, trois semaines, trois mois, trois jours pour émettre une idée, trois semaines pour faire un POC, trois mois pour faire un MVP. Donc essayer de retravailler alors que par une méthode classique, les projets devraient se compter plutôt en nombre de mois voire d'années. Donc un petit peu cette double mission. Et moi ce qui paraissait, et tout cela aussi, correspondait aussi à l'époque, au moment où on commençait à ouvrir, partager les données et à faire parler les données. Effectivement en ne pas en faisant parler les données, à créer de la valeur, à créer de la richesse, à créer du progrès. Ce qui n'était quand même pas tout à fait la chose qui existait dans les années 90-2000.

  • Speaker #1

    et donc du coup là tu viens de parler de SAFE tu l'as mis en place sur l'ensemble du périmètre, sur une partie

  • Speaker #0

    Non, on l'a testé sur une partie du périmètre. Le périmètre du ministère des Armées, c'est un truc qui est quand même assez monstrueux en termes de projet. Donc, on a... Et en tant que direction générale, moi j'étais responsable de la préconisation des nouvelles méthodes, donc on a fait plusieurs choses, on a mis en place un lab, donc là on utilisait du CEF rapide, un lab c'est-à-dire un petit peu comme faisait aussi la DINUM à l'époque sur l'entrepreneuriat d'État ou ainsi de suite. un porteur de projet, une entité porteuse de projet, venait, on lui fournissait un data scientiste, on lui fournissait un expert RSSI, on l'aidait très rapidement à faire un POC et un MVP en 3-4 mois. Donc on a mis en place une fabrique, qui était une fabrique pour montrer que ces nouvelles méthodes marchaient, que quand on avait un parti produit relativement simple et bien maîtrisé, on arrivait à faire des choses qui marchaient bien. en très peu de temps. Donc on a mis en place cette fabrique. De l'autre côté, on a mis en place des méthodes de travail sur l'innovation, justement pour aider à conceptualiser un POC, pour ensuite le faire monter vers du MVP. Et sur les projets un tout petit peu plus complexes, on a commencé à mettre en place... des précotisations pour former un certain nombre de gens à la méthode CEF. Et on a testé la méthode CEF sur différents projets, soit sur des projets qui étaient des projets métiers d'une DSI, donc sur des projets relativement bien maîtrisés, soit, on l'a testé aussi sur un projet extrêmement complexe, qui était la refonte du socle numérique du ministère des Armées. Et là, je vais peut-être me tromper, mais... Je pense qu'on avait plus d'une dizaine de trains safe qui roulaient en parallèle. Donc on a testé aussi sur un gros projet, ce qui a permis aussi d'en toucher les limites. Voilà, parce qu'il y a aussi les dogmatiques de la méthode safe, comme il y a les dogmatiques de la méthode en V. Il faut savoir avoir à faire affaire à un bon dosage. Et je pense que mettre en place une méthode type conduite agile demande une préparation importante de ceux qui font la maîtrise d'ouvrage. Parce que ce n'est pas la même mentalité, ce n'est pas le même état d'esprit. Dans la méthode CEF, ce que je retiens surtout, c'est que finalement, on met de côté la méthode telle qu'elle est, et finalement, la philosophie de ces méthodes agiles, c'est qu'on prend un problème particulièrement complexe. On regarde un peu, pour moi, c'est un peu des intégrales en mathématiques. On a un truc extrêmement complexe, on ne sait pas forcément bien le résoudre, on sait qu'on va se planter si on essaie de l'attaquer globalement. Donc du coup, on le coupe par petits morceaux, et chacun des petits morceaux est maîtrisable. ou maîtrisables, à condition que l'on confie à une équipe en qui on a confiance et qui est capable de prendre des décisions sur ces parties maîtrisables. Parce que si on confie et on découpe notre projet en 300 micro-projets maîtrisables et que ces 300 micro-projets sont soumis à la direction d'une salle de délégation à l'échelon d'exécution, ça ne marchera pas non plus, ça va diverger. donc je veux dire que la méthode CEF ça accompagne un changement culturel beaucoup plus profond dans l'organisation et que ça ne s'applique pas c'est pas une baguette magique on va faire de l'agilité, ça va marcher il y a tous ceux qui disent on fait de l'agilité qui ne change pas culturellement leur mode de travail ça conduit à l'échec ça marche pas, donc c'est assez profond d'où un besoin d'acculturation, d'où un besoin d'accompagnement d'où ce qu'on avait commencé à mettre en place. Après, moi, je suis parti. Je suis quand même parti en 2020. J'avais maintenant plus de trois ans des coachs, des formations à cette méthode-là.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'en trois ans, parce que tu sais, le problème d'un DSI qui part tous les trois ans, c'est quand même la majorité aujourd'hui dans le marché. Ce qu'on voit, c'est qu'en gros, tu arrives à initier un changement parce que tu as quand même la confiance des gens qui t'ont recruté, etc., que c'est nécessaire. Mais c'est tellement dur au moment donné où ça commence à bouger que c'est le moment où il faut partir. Est-ce que c'est... Est-ce que tu valides ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je valide, je valide, je valide. De toute façon, c'est vrai, quand on fait de la transformation partout, quand on fait de la transformation, des moments où on est recruté, on vient, on est neuf, on va se dire, lui, il sera moins con que son prédécesseur, on va pouvoir faire quelque chose. Et au bout d'un moment, la réalité se rappelle à tous. Et si on fait faire des progrès pendant un temps, il y a un moment où l'organisation va peut-être avoir besoin d'une pause. Donc c'est pour ça que le DSI ou le DSI réformateur... Au bout de trois ans, il a peut-être bien avancé sa structure pendant deux ans. Soit on lui redonne un mandat de trois ans parce que du coup il s'installe dans la continuité, il a du temps devant lui, il n'est pas obligé d'aller au forcing, soit on ne lui donne pas de temps, du coup il va au forcing, donc il va au clash. Moi ce qui est intéressant dans mon expérience, c'est que j'ai fait deux grandes transformations du ministère des Armées. La première, c'est la création de la cyberdéfense. Je suis quasiment resté en poste pendant huit ans. Donc j'ai été en charge du projet pendant deux ans et je l'ai commandé pendant plus de six ans. et donc du coup j'ai été avec mon équipe donc on a bénéficié de ce recul du temps qui a permis d'y aller à un certain rythme Ensuite, comme DG NUM, je suis resté trois ans. La mise en place de la DG NUM la première année, j'ai été plébiscité par tout le monde, tout le monde était content. On a mis en place des tas de jeux de reglets. À partir de l'année suivante, quand on a commencé à exercer nos pouvoirs, j'ai commencé à constater quelques grincements de dents parce que c'était un peu un empêcheur de tourner en rond, parce qu'Intel voulait prendre la norme du small alors que le ministère avait choisi collégialement. de prendre une norme X, voilà, donc on commence à rentrer, et ça, ce n'était pas très gênant. En contre, c'est quand on a commencé à ouvrir la boîte de la conduite de projet. Et dans les boîtes de conduite de projet, en tant que directeur général, j'allais voir les projets qui allaient bien, mais j'allais surtout voir les projets qui n'allaient pas bien. Et là, quand on enlève les projets qui ne vont pas bien, on enlève des dysfonctionnements, on enlève des... des erreurs, on enlève des choses qui ne font pas très plaisir. Du coup, après, il fallait changer les organisations et changer les méthodes. Et là, c'était une deuxième phase de transformation. Et les transformations demandent du temps. Donc, il était bien que je parte au bout de trois ans, remplacé par quelqu'un qui avait une autre culture, une autre approche, une autre méthode, qui a continué le travail. Et je vois dans pas mal de structures, je ne vais pas citer les noms, mais deux autres DSI qui étaient particulièrement innovants, parce qu'on est un consommateur, il y en a un qui a été éjecté au bout de trois ans en profitant du fait qu'il soit malade, et quant à un autre qui a été remercié par sa direction parce que les métiers ont trouvé qu'il avait fait trop de transverses par rapport à leur verticalité. Voilà, donc un métier, je pense, dans une organisation, un directeur du numérique qui vient secouer l'organisation, effectivement, il y a un moment où il faut le changer.

  • Speaker #1

    et tu penses que le mec la personne qui suit à ce moment là continue ce que tu fais ou recasse tout parce qu'il considère qu'il doit se mettre en opposition pour créer une marque

  • Speaker #0

    Non, parce que la direction est bonne. Je pense qu'il y a besoin d'inflexion, parce qu'au bout d'un moment, quand on est en transformation, on a des combats, on fait aussi des erreurs. Donc, avoir quelqu'un qui vienne remplacer... Mais la direction générale ne va pas changer. La direction générale de Verreux, c'est plus d'agilité, c'est plus de traitement des données, c'est plus de partage. Il y a toutes ces grandes tendances. restent vraies et elles sont vraies dans tous les grands groupes. Après, qu'on fasse un petit peu moins de transverse, un petit peu plus de transverse, qu'on perde deux ans sur le déploiement de l'agilité parce que la structure n'est pas prête ou parce que là, il y a un directeur général d'une verticalité qui faut attendre qu'il part pour pouvoir avancer. Voilà, donc je pense que dans ces grands mouvements, on est sur un axe où on voit où il faut aller et puis après, c'est un art d'exécution.

  • Speaker #1

    ok et tu penses franchement parce qu'il y a quand même une question sur ce côté des 6 et 3 ans toi tu as initié un mouvement tu as vraiment initié un mouvement de transformation à ce moment là tu changes des pratiques etc parce que j'imagine que tu sais un peu encore ce qui s'y passe etc de manière globale est-ce que du coup ils sont quand même allés dans la même direction et ils y sont allés pas exactement comme tu pensais qu'il faudrait mais c'est continu

  • Speaker #0

    Non, non, non. Ce que j'ai lancé avant de partir, qui était la création de 17 DSI métiers du ministère des Armées, le projet a été entériné par le ministre six mois après mon départ et est devenu opératoire. La création de l'agence numérique de défense, elle a été créée. Après, qu'elle ait réussi ou pas réussi à trouver sa place, c'est un autre sujet. Mais ces choses-là, globalement... ce qui a été mis sur les rails à continuer à évoluer. La question, est-ce qu'il aurait mieux fallu me laisser 5 ans, 6 ans ou ne pas me changer ? Je pense que dans un DSI, il faut lui redonner un vrai mandat. Moi, quand j'ai transformé cette partie-là, j'ai créé la direction gérante numérique. Ça m'a pris deux ans, six mois, un an pour la créer. Et puis un an et demi pour la mettre sur les rails, à peu près pour qu'elle fonctionne bien, qu'elle soit bien acceptée. Ça, pas de souci, ça a marché, ça rentrait bien dans mon périmètre où j'avais trois ans de vie. Après, quand on m'a demandé d'attaquer la conduite des projets, la question que j'ai posée au cabinet, c'est vous me donnez combien de temps ? Et là, la réponse a été extrêmement floue. Et donc, du coup, parce que cette réforme, ça conduit des projets, c'est vraiment du dur. C'est du dur.

  • Speaker #1

    Ah oui.

  • Speaker #0

    Et puis là, j'ai pu lancer. Là, du coup, je me suis contenté de lancer les premiers inputs parce que je savais très bien que ça ne servait à rien d'aller plus loin parce que je savais très bien qu'à l'été 2020, je partais et que je ne saurais pas prolonger, que mon équipe serait aussi un petit peu défaite. Donc, la particularité, si vous voulez, nous, militaires, c'est que on est comme les pots de yaourt on a une date de fin de vie sur nos contrats donc on sait très bien que 59 ans on est dehors après la pastèque le pot de yaourt on est très dans la nourriture aujourd'hui très dans la nourriture, énorme il n'y a pas de surprise c'est différent d'un DSI du monde privé qui peut être débarqué du jour au lendemain donc nous on ne débarque pas trop c'est pas tellement notre culture mais on sait que les gens vont disparaître à telle date parce que c'est leur limite d'âge Voilà, donc les relations sont peut-être un tout petit peu plus différentes. Mais je pense que la transformation numérique a été un mouvement qui est intéressant parce que ça met en route une dynamique. Je pense que ça a deux points difficiles, c'est que ça met en place un tempo qui est très rapide. Et puis deuxièmement, c'est le point le plus, je pense, le plus compliqué, le plus délicat et qui est vraiment la ligne de conduite et la ligne directrice de toutes ces transformations, c'est les compétences et les ressources humaines.

  • Speaker #1

    Et ça par rapport à la partie RH interne, c'était quoi le lien ?

  • Speaker #0

    En tant que directeur général du numérique, j'étais ce qu'on appelle en jargon pilote des métiers numériques. Donc j'étais comptable du suivi de ces métiers, du suivi de la situation, de la formation et de l'état des lieux, de l'évolution du nombre d'agents, des difficultés de recrutement, des difficultés de formation, des affectations. Voilà, donc de la... de la radioscopie annuelle en permanent de l'état des lieux de la ressource humaine numérique du ministère des armées. Et je pense que dans la transformation du ministère qu'on a conduite, c'est l'élément le plus structurant. Parce que ce n'est pas la peine de rêver de super DSI si on n'a pas les bonhommes. Et derrière, ça veut dire que ça... et moins on a de personnes. malheureusement, s'il faut externaliser, plus il faut garder des personnes de haut niveau capables de faire de la maîtrise d'ouvrage. Donc des métiers d'architectes, d'entreprises sont des métiers très en tension. Je passe bien sûr sur toutes les data scientists, les gens qui vont parler de data, ou encore tous les gens qui sont les experts de la cyber. Mais c'est vraiment ce côté... Ce côté manque de ressources humaines quantitatif et qualitatif, qui impose dans différents endroits aussi qu'on rassemble les experts au bon endroit. Typiquement, quand on a créé l'agence numérique de défense, c'était de se dire, il faut mettre dans cette agence les meilleures culottes de conduite de produits, les meilleurs architectes, pour ne pas les avoir disséminés dans tous les services, je les mets là. et cette agence va devoir conduire les 50 principaux programmes de système d'information du ministère des armées, ceux qui sont les plus structurants, ceux que moi en tant que dégénume je suivais dans une liste, et après on rendait compte à l'interministériel ou directement au ministre de l'avancement de ces projets. voilà, arriver à concentrer la ressource humaine parce qu'elle est rare.

  • Speaker #1

    Et du coup, par rapport à la ressource humaine, donc du coup, il y a une question de compétence dans l'IT, etc. Première question, est-ce que tu pouvais recruter un intern, c'était la Presta. Et deuxièmement, est-ce qu'il y avait une problématique aussi de RH liée… aux autres métiers où en gros tu as eu du mal parce que bon on sait que l'agilité c'est quand même être proche du tuteur finot etc et donc du coup un changement un peu global au niveau de l'organisation qui dépasse la DSI est-ce que c'était aussi un point de difficulté ou au contraire il y a eu plutôt un mouvement en interne comme quoi c'est ça qu'il fallait faire et du coup c'était plutôt moteur ?

  • Speaker #0

    Non, sur les bilans RH, non. Il y avait une assez bonne mobilisation, notamment de la direction des ressources humaines, du ministère, avec qui on a créé une académie du numérique. Donc, par contre, la ressource est rare. On avait aussi revalorisé énormément les salaires des contractuels pour arriver à les hitter au même niveau que les salaires équivalents du privé. Après, les corps des fonctionnaires, c'est une autre problématique. Mais non, il y avait là, autant sur la conduite de projet, c'était des choses qu'on tapait dans le dur, avec des oppositions fortes, par mauvaise compréhension, autant sur le besoin de faire quelque chose sur les RH, autant sur le besoin de mobiliser l'ensemble des acteurs du ministère des Armées pour trouver des solutions innovantes. sur les ressources humaines, sur le recrutement, toutes spécialités IT confondues. Oui, il y a eu un mouvement, une vraie dynamique. Les armées, les directions des ressources humaines, les armées ont réinventé des partenariats en allant chercher des gens dans les écoles à partir de la classe de première. Il y a eu beaucoup d'initiatives. Vont-elles suffire à alimenter le... Très franchement, je pense que non. et qu'il va falloir là aussi dans la conduite de projet revoir un certain nombre de façons d'exploiter nos systèmes d'information. Je ne parle pas avec de l'externalisation telle qu'on pouvait mal la comprendre il y a quelques années, mais le recours à des partenaires, à des prestataires à qui on confie typiquement l'hébergement. Aujourd'hui, faire de l'hébergement cloud en code sévatif. Ok, sur certains nombres de données très sensibles au ministère des armées, sur un certain nombre de données de niveau sensible, je pense aux données des ressources humaines ou des choses dans ce genre là, le cloud peut être mis en commun avec les autres services de l'État ou peut être confié à des partenaires comme Tavis, OVH, j'ai un petit pote, Airbus, je ne peux pas en oublier Orange et compagnie. des gens qui sont absolument sous le cadre juridique français et avec du personnel qui est capable, comme on est capable d'habiliter avec les standards de la défense. Pour moi, ce n'est pas à des militaires en uniforme de faire de l'hébergement cloud sur des données RH du ministère. Voilà, donc c'est les militaires en uniforme du cycle, il est fait pour aller sur le tas d'opérations, il est fait pour aller combattre. Voilà, donc il y a un juste équilibre, il y a un juste équilibre à trouver.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tout ça, en fait, si tu dis que tu as créé plein de DSI, que tu es en relation avec le ministère, etc., est-ce qu'il y avait un sentiment d'équipe commune dans le mouvement que vous y avez créé et donc du coup, bon, des distinctions sur certains points, mais qui étaient à la marge ? Ou est-ce que le mouvement qui est en train de se mettre en place, il n'y avait pas encore tout le monde dans la direction IT globalement qui était embarqué ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la première année et demie où je suis arrivé, il y avait une bonne convergence, il y avait une bonne équipe. Au sein de ma direction, j'avais une équipe extrêmement soudée. Ça nous a permis de se mettre d'accord, de travailler très vite et de faire des propositions très rapidement. Avec ALEUR, une équipe était 50% civile, militaire, et on devait avoir 30% de taux de féminisation. Et notamment, j'avais une chief digital officer qui arrivait du groupe Vinci, qui avait une culture civile totalement. Voilà, donc ça c'était une partie un peu qui était une locomotive.

  • Speaker #1

    C'est un temps d'équipe.

  • Speaker #0

    C'est un temps d'équipe. Et avec le reste des autres entités qui gouvernaient les systèmes d'information du ministère, c'était un petit peu géométrie variable. Je dirais que sur 80% des suivis, il y avait consensus, on travaillait bien ensemble. Il y avait quelques sujets qui étaient proxogènes pour certaines entités, qui fait qu'il y avait un refus de prendre des risques. alors que l'on voit que la ressource humaine va manquer, donc les décisions qu'on tarde trop à prendre, on va les prendre dans l'urgence, alors qu'il valait mieux les prendre quelques années, mais ça veut dire qu'il faut accepter de prendre des décisions un peu audacieuses.

  • Speaker #1

    Et en fait, quand tu parles de décisions audacieuses, de courage, est-ce que tu le mets, ça incite à des trucs et tout, mais est-ce que tu le mets plutôt sur le compte de… La peur, la peur de ne pas gérer, d'être mis en question de soi, ou le fait de ne pas croire dans la nécessité de changer, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Ne pas croire dans la nécessité de changer, le fait que dans deux ans on sera parti, donc finalement ça ne marche pas si mal. Et puis je pense que là aussi... Quand on est à la tête d'une entité, d'une DSI, et qu'on travaille énormément pour faire marcher son truc, on n'est pas capable de regarder au-delà de six mois. On est dans la cage du hamster, on galope, on galope, on galope, on galope, mais on ne voit pas que du coup il y a le mur qui est devant nous. Voilà, mais que du coup, quand on vous dit, ton mur il va arriver, maintenant tu es reçu au VN, regarde, tu perds 8% de personnel depuis 5 ans, c'est systémique, on ne va pas arriver avec les données, donc il faut que tu te fasses une organisation. Et ce côté-là, je ne sais pas moi, mon successeur, il y a un peu ça, parce que c'est très compliqué quand même de réformer, de transformer, de prendre des décisions douloureuses, audacieuses, quand pareil, le magasin ne ferme pas et qu'il faut continuer à délivrer. et que pour continuer à délivrer, les mecs triment comme les troupes triment. Voilà, donc c'est pour ça que c'est le rôle du directeur général, le rôle c'est d'être à la fois l'aiguillon et le cété, pour forcer à aller, tout en étant bien conscient qu'il ne faut pas aller trop loin non plus pour ne pas casser la machine. Donc c'est pour ça que c'est cette espèce d'image de l'élastique, le tirer jusqu'à certains points et pas le faire rentrer.

  • Speaker #1

    ok et aujourd'hui quand toi t'as eu ce côté un peu challenge entre une autre direction, etc. Tu n'as pas voulu, tu n'as pas réussi, ça ne pouvait pas se faire, avoir pas une question d'arbitrage, mais un soutien un peu plus global des autres parties prenantes, de la direction générale, ou quelque chose comme ça ?

  • Speaker #0

    Ah non, je n'ai pas cherché, j'avais un soutien extrêmement fort du ministre et de son cabinet. C'est pour ça que les décisions ont été prises malgré les freins d'un certain nombre d'entités. Voilà, mais si tu veux, c'est plus dans la discussion de tous les jours, dans le rapport de discussion de tous les jours de conviction que j'ai eu des freins. Pour les décisions de haut niveau proposées au Bidist, ce que j'ai proposé a toujours été accepté. Mais là aussi, une décision qui tombe comme un truc assez formel, si elle n'a pas été discutée, acceptée avant, ce n'est pas très bon non plus parce que les gens n'y adhèrent pas.

  • Speaker #1

    Ok, c'est intéressant. Et dans ce côté un peu, tu sais... un peu primaire qu'on peut avoir de guéguerre, ce genre de choses qui peuvent arriver dans les sociétés. Toi, tu n'es pas allé sur une posture de attendez, il faut changer cette personne-là ou changer ce type d'entité-là parce que là-dessus, tu n'as pas voulu aller dans ce registre-là ?

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas la mentalité du ministère des Armées. D'abord, les militaires restent en potes que deux, trois ans, c'est peu. Ils tournent beaucoup. Non, ce n'est pas tellement la… C'est pas la culture. Non, c'est pas la culture. Ça peut arriver, bien sûr, mais il faut vraiment... Il y a une faute. il faudra vraiment qu'il y ait une faute, un accumulement de choses, avoir une opinion qui diverge. Parce que les positions, ça, d'un côté, vous avez la direction générale numérique, qui va pousser vers le transvers, vers la vision du ministre, vers des choses, vers un bien commun transverse, alors que de l'autre côté, les gens qui ne veulent pas y aller, ils vont avoir plutôt une tendance à privilégier leur propre structure dans la satisfaction de leur chef.

  • Speaker #1

    c'est arrivé à considérer deux écoute merci Arnaud c'était super intéressant on a fait un bon tour je pense c'est passionnant de découvrir les dangers de transfo du numérique des ministères des armées c'est pas commun comme tu le dis une des organisations les plus complexes que je pense que j'ai rencontré merci encore d'avoir partagé ton parcours de la marine en plus avec les coulisses de la première création de la direction générale du numérique du ministère des armées donc c'est top et en plus sans l'aide de bois donc c'était vraiment génial

  • Speaker #0

    Oui, surtout aussi, merci à toi, parce que c'est toujours un exercice intéressant de condenser et de sortir quelques grands enseignements d'années de travail, d'années d'investissement. Ce que je retiens, c'est effectivement que c'était un moment passionnant. Cette troisième transformation, je n'ai pas eu assez de temps pour convaincre, pour arriver à doser les bonnes doses de transversalité et de verticalité. C'était pour moi ma troisième grande transformation dans le ministère, après celle que j'avais conduite. pour la création de la cyber défense, mais dans lequel j'avais eu quasiment 9 ans pour déployer toute cette transformation. Et d'ailleurs, c'est ce que je raconte dans le livre que je viens de sortir qui s'appelle Soldats de la cyber guerre Mais toutes ces choses-là restent avant tout quelque chose d'extrêmement humain, des aventures humaines, des alignements, des forces de conviction. Voilà, donc merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'intervenir et de témoigner.

  • Speaker #1

    Merci encore pour ta participation et à bientôt. Bon, j'espère que vous avez kiffé ce podcast. Comme toujours, n'hésitez pas à le partager sur LinkedIn, à le partager à vos collègues chefs de projet IT, DSI. Ça nous aide toujours à trouver de nouveaux et des DSI toujours plus intéressants. Et écoutez, ciao !

Description

🪖 Vis ma vie de chef d'orchestre de la transformation numérique de la Défense française


Bienvenue dans l'épisode 88 de CIO Révolution by AirSaas. Un numéro inédit au cours duquel nous avons reçu Arnaud Coustillière un vice-amiral d’escadre !

   

Après avoir commandé plusieurs navires de combat il a contribué à la création de la cyberdéfense du ministère des Armées dont il a été le premier COMCYBER (Le commandement de la cyberdéfense) de 2011 à 2017. Il préside aujourd’hui le Pôle d’excellence Cyber. 

Il avait au préalable été DSI de la marine nationale 2006/2008, Il avait ensuite créé et mis en place la Direction générale du numérique du ministère des Armées (DGNUM) entre 2017 et 2020.
Il vient de publier "Soldat de la cyberguerre Un pionnier raconte la cyberdéfense française aux éditions Tallandier.


Avec lui on s’est intéressé à la conduite de projets et des hommes au sein d’une organisation aussi complexe que l’armée !  Il a par exemple mis en place jusqu’à 10 trains SAFe. On s’est demandé comment on structure, comment on transforme, comment on amène une “juste dose” de transversalité…ce sont quelques unes des questions abordées dans cet épisode qui vous fera découvrir les coulisses des armées le tout sans langue de bois !


TIMELINE


  • 01:36 : Présentations du parcours d’Arnaud

  • 05:04 : L’émergence d”une DSI transverse “groupe”, pour urbaniser et répartir entre le commun et le sectoriel 

  • 10:06 : L’image de l’élastique :  entre le DSI groupe qui tire le plus possible vers le transverse vs le DSI métier qui veut garder le plus de choses “ à sa main.”  “une affaire d’hommes”.

  • 11:48 La transversalité dans les organisations : entre framework rigide et hybridations de bonnes pratiques

  • 14:26 : les grands projets avec leurs “indicateurs pastèques” AKA. Les grands échecs informatiques : l’exemple du projet Louvoie

  • 18:24 : Les missions de DG Num au ministère de la défense : donner des outils de gouvernance  (droit de véto, vérification méthodes..) et orchestrer la transfo des SIC (systèmes d’information et de communication), 

  • 20:00 : L’implémentation et les limites de SAFE  au ministère des armées : mise en place d’un LAB, de nouvelles méthodes de travail sur l’innovation et test SAFe sur des grands projets.

  • 24:20 Regard sur « les trois ans du DSI » et les “lois” de la transformation REX sur deux  transfos une de huit ans avec la création de la cyberdéfense et une de trois ans en tant que DGNUM.

  • 31:28 Les deux points difficiles de la  transfo num : Timing et ressources humaines !

  • 39:02 : Regard sur l’audace  et le courage managérial …La roue du hamster pour continuer à délivrer  vs le courage des réformes de  long terme !

  • 41:59  Spécificités de la culture managériale au sein du ministère des armées.L’art de concilier le besoin de bien commun transverse et l’immobilisme structurel dans les orgas.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Et c'est comme le ministère des armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un. Et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, à un instant T.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Bertrand Ruiz et bienvenue sur le podcast CIO Révolution. Si vous êtes curieux de connaître les enjeux organisationnels, les solutions pragmatiques et les réflexions sur la transformation des entreprises, vous êtes au bon endroit. Ici, pas de langue de bois, que du concret. Mais avant de commencer, je me présente. Je suis le CEO d'Ersas, une solution web qui permet à la DSI et à la Direction Générale de partager une vue claire des projets en cours, des décisions à prendre et des priorisations à faire. Vous manquez de temps ? Ersas vous aide à vous focaliser sur l'urgent et l'important. Le besoin de reporting est de plus en plus fort. Ersas génère votre rapport flash décisionnel en un coup. S'il y a un historique fort entre les métiers, Ersas va vraiment vous aider à collaborer de manière efficace. Sur ce, je vous laisse avec ce nouvel épisode à découvrir une nouvelle façon de faire. Bonne écoute ! bonjour à tous je suis ravi aujourd'hui d'être avec Arnaud Coustillard qui est attention c'est la première fois qu'on a quelqu'un de ce secteur là vice-amiral d'escadre ancien directeur général du numérique du ministère des armées et ancien commandant de la cyber défense des armées ça fait long mais c'est tout ce que t'as été Arnaud et je suis ravi que tu sois là salut

  • Speaker #0

    Oui, bonjour, je suis ravi aussi de partager mon expérience avec vous. J'ai passé une quarantaine d'années au ministère des Armées, une vingtaine dans les opérations aéromaritimes, et je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Je ne suis pas un DSI technique, je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Et après, j'ai passé à peu près aussi une vingtaine d'années à la transformation numérique du ministère des Armées, en ayant graphié différents échelons. et en ayant eu la chance de créer la cyberdéfense des armées à action défensive et offensive, et de la commander pendant plus de six ans d'opération, et de terminer ma carrière comme directeur en créant la direction générale numérique du ministère des armées, avec toutes les problématiques de gouvernance de la donnée, d'ouverture de la donnée, de méthodologie de conduite des projets informatiques. et de tout ce qui tourne autour de l'agilité, le partage des données, tout ce qui est la transformation numérique et le lot de tous les DSI des grands groupes.

  • Speaker #1

    Ok, et donc du coup, en termes un petit peu de date et de nombre pour qu'on se situe, ça représente, de quelle année à quelle année, ça représentait combien de personnes dans tes services ?

  • Speaker #0

    Pour ne pas me concentrer que sur la partie finale, en 2006-2008, j'ai été DSI de la Marine Nationale, donc une grosse DSI, plutôt une DSI bulle qui devait faire une cinquantaine de personnes avec une population haïtienne qui devait tourner autour de 500 personnes en différents services qui étaient sous ma tutelle. Ensuite, la création des capacités cyber désarmées de 2011 à 2017. Là, une centaine de personnes au départ au sein de l'ensemble du ministère. Et quand j'ai quitté, on devait être à hauteur de 1500. Et je disposais d'un...

  • Speaker #1

    Tu passais de combien à combien, tu as dit là ?

  • Speaker #0

    Une centaine. Et quand j'ai quitté, on devait être aux alentours de 1500 en 2017. Et j'avais un état-major qui était passé de 3 personnes en 2011 à 70 personnes en 2018. Et ensuite, la Direction Générale du Numérique que j'ai créée était une entité qui, avec ses satellites, faisait une petite centaine de personnes. C'était une DSI groupe rattachée au COMEX, rattachée directement au cabinet ministre, et qui était censée avoir une autorité sur l'ensemble des entités, des différents DSI subordonnés du ministère, qui sont à peu près au nombre d'une petite vingtaine. Et le ministère des armées, c'était à peu près 20 000 spécialistes des systèmes d'information et informaticiens, plus de 3 000 systèmes d'information, sans compter l'informatique embarquée dans les systèmes d'armes, dans les infrastructures industrielles, à différents endroits, plusieurs centaines de métiers. en gros un budget d'investissement de l'ordre de 2 milliards d'euros par an sans compter les ressources humaines et les masses salariales.

  • Speaker #1

    Ok, et du coup, toi, ta mission dans tout ça, c'était, tu dis, la création. Ça veut dire quoi créer le département numérique dans ce cadre-là ?

  • Speaker #0

    Créer, si tu veux... Dans la longue maturation de la montée vers le numérique, on est parti, quand on revient dans les années 80, on était dans le domaine des télécoms, qui est à monter progressivement vers le domaine de l'informatique et monter progressivement vers le domaine du numérique pour accompagner cette transversalité importante autour des données et ainsi de suite. il a fallu que les directions informatiques des métiers et des gouvernances transverses, il a fallu concilier de plus en plus tout ce qui était le transverse, le commun, par rapport à ce qu'était le sectoriel. Typiquement, le réseau informatique d'usage général de la marine, de l'armée de l'air ou de l'armée de terre, il n'y avait aucune des raisons que ce soit des réseaux différents. D'où le fait que derrière, il y ait besoin de... d'urbaniser tout ça, il y a besoin de faire les mêmes choix techniques, et du coup finalement d'avoir une unique DSI run conduisant ce réseau. Donc cette espèce de grand mouvement pour moi lancé dans les années 80, qui est de faire en sorte que la DSI devienne de plus en plus transverse, et que les choses dans les socles réseau soient de plus en plus communs, et quelque chose qui a été aussi très fort au sein du ministère des armées, D'où l'apparition d'entités transverses, à la fois d'une DSI RUN, qui s'appelait la Direction Interarmée des Systèmes d'Information et des Systèmes d'Information. qui fournissait l'ensemble des systèmes communs à l'ensemble des ressortissants du ministère, toute armée, services civils inclus, et de l'autre côté, pour gouverner tout ça, une entité politique, très pro-entité politique, Haïti, qui est proche du cabinet du ministre. Et à un moment donné, puisqu'il fallait ouvrir davantage les données, parce qu'il fallait... mieux conduire les projets. Le ministère des Armées a senti le besoin de donner davantage d'attributs de gouvernance à cette entité et transformer cette direction générale des systèmes d'information en entité politique, en une vraie DSI groupe ayant un certain nombre de pouvoirs d'arbitrage, un certain nombre de responsabilités converses. et un certain nombre de droits de veto, notamment sur la conduite des programmes. Donc c'est ça que j'ai été amené à faire, c'est de transformer une direction IT très politique, qui découlait les normes qu'il faut faire, qui faisait des beaux papiers, très intéressants, mais qui n'étaient pas appliqués, en une direction plus opérationnelle, et exerçant une réelle autorité sur l'ensemble des différentes DSI. du ministère, quand on prend une organisation de la taille du ministère des armées, je pense que l'on est l'organisation la plus complexe en Europe.

  • Speaker #1

    La plus complexe, c'est clair.

  • Speaker #0

    Pas tellement du fait du nombre de postes de travail, mais surtout de l'hétérogénéité des systèmes, des contextes d'emploi et des métiers.

  • Speaker #1

    Ok, donc c'est plutôt le fait que ça soit vraiment tellement disparate en interne que faire en sorte que tout le monde arrive à travailler ensemble, à créer un cadre commun a été le point clé, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait. C'est la partie passée. C'est un peu la problématique que tous les grands DSI ont dans les organismes où il y a des cultures d'entreprise assez fortes. Moi j'ai beaucoup travaillé à l'époque avec EDF, avec la SNCF ou encore avec le Crédit Agricole. qui ont des cultures d'entreprise extrêmement fortes autour de métiers très structurés. Et c'est comme le ministère des Armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un, et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, un instanté.

  • Speaker #1

    Tu dis la juste dose de transverse que l'organisation à un instant T est capable de tolérer. C'est-à-dire qu'en gros, tu dis, si je résume et que je comprends bien, une organisation, elle, par défaut, historiquement, elle est silotée. On a envie que tout le monde travaille ensemble, mais en fait, on n'est pas capable d'aller plus vite que la musique non plus. Donc, il faut jauger quelles sont les bonnes tactiques qui vont petit à petit amener. dirons si on est 100% transverse ça a amené pourcentage après pourcentage à amener une meilleure collaboration transverse sans aller trop vite parce que sinon ça pète et sans aller trop lentement non plus parce que sinon on n'avance pas

  • Speaker #0

    Oui, c'est tout à fait ça. J'aime bien l'image de l'élastique. Le DSI groupe doit tirer sur l'élastique le plus possible parce que lui, il pousse vers le transverse, alors que le DSI métier va essayer de garder un ensemble de choses à sa main parce qu'il en a besoin pour sa mission. Donc c'est un juste équilibre qui est une action de transformation, qui n'est pas une action technique, c'est une action de transformation dans laquelle il a besoin à la fois de convaincre. mais aussi il a besoin de se montrer de temps en temps un peu plus coercitif, et c'est in fine une affaire d'hommes, parce que faire bouger une organisation, ça va être des relations interpersonnelles, des histoires, et cet élément très humain, fait en fait que l'organisation va accepter plus ou moins bien à tel moment. il y a des endroits où on sera allé trop loin dans le transverse, donc deux ans après on va recorriger voilà pour moi il n'y a pas de recette miracle la transformation d'une organisation c'est une entité vivante, un coup on va faire beaucoup de transverse, on sera peut-être allé un peu trop loin, on va en faire un petit peu moins voilà donc c'est un juste arbitrage à conduire avec une composante sociologique, une composante humaine, qui me paraît au moins aussi importante que la composante technologique.

  • Speaker #1

    Ok, et j'ai un truc que j'ai du mal à saisir, mais c'est le plus parce que j'y suis pas moi dedans en continu. L'idée de transversalité, tu vois, aller dans des grands frameworks où en gros tout le monde, on casse la hiérarchie de tout, safe, etc. Toi, quand tu veux amener de la transversalité dans cette organisation, c'est plus facile d'expliquer. la direction, la vision, mais aussi donner un modèle. Et je vois de plus en plus un peu cet affrontement entre personnes qui vont installer le framework par themselves parce que ça crée un cadre structuré, il y a des référents, il y a des coachs, il y a des formations, il y a un livre qui explique ce que c'est. Et du coup, c'est un cadre rigide, mais ça reste un cadre, de personnes qui vont dire non, en fait, on va prendre des bonnes pratiques un peu partout, on va créer notre propre framework. Et donc du coup, quand j'imagine que les choses sont un peu compliquées en interne politique, où il y a besoin de créer ce côté un peu vers où on va commun, Comment toi tu te positionnes par rapport à cette question de, est-ce que pour pouvoir avoir un commun dans l'organisation, il faut qu'on se rattache à un framework qui est connu et qui est explicité par d'autres, ou est-ce que c'est plutôt de la co-construction, ou est-ce que c'est un entre-deux ?

  • Speaker #0

    Pour moi ça va être un peu un entre-deux, qui va dépendre beaucoup de la taille de la structure et aussi de la taille du projet. C'est sûr que quand on vient de naître dans une structure comme le ministère des armées, qui est habitué à faire des gros projets, il y a beaucoup de méthodes en V, qui sont inspirées principalement des méthodes pour construire des porte-avions, des bateaux, des chars, des avions. Quand on transfère ça sur du numérique, ça ne marche pas forcément très bien.

  • Speaker #1

    en même temps tu vois je suis content qu'on ne fabrique pas tu vois des armes en mode super agile il y a ce côté itératif des fois mais quand on rentre dans le monde de l'IT typiquement

  • Speaker #0

    quand on fabrique un satellite de télécommunication Il y a une partie qui va être le hard, qui va être le... Par contre, il y a une partie système qui va être beaucoup plus évolutive et on commence à rentrer sur des modes de conduite extrêmement complexes où il faudrait mettre davantage d'agilité sur la partie de logiciel par rapport à la partie hard. Et c'est à partir de ce genre de projet... que l'on touche du doigt un petit peu la complexivité, la rencontre du monde agile, pur et dur, qui vient du monde de l'informatique, du système d'information, par rapport au mode projet plus classique, qui vient des projets un peu industriels classiques. L'autre chose qui était aussi à prendre en compte, c'est que dans les années 90-2000, dans toutes les grandes organisations, on a utilisé le projet informatique comme moyen de rationalisation des organisations. On a utilisé le projet de l'informatique comme étant aussi un moyen de faire travailler les gens ensemble en disant plus vous globaliserez vos besoins, plus vous mettrez assez d'informations en gros, mieux ça marchera Et tout ça, ça a généré des échecs importants dont le ministère des Armées, comme d'autres, a subi les foudres. Typiquement le projet Louvois. Le projet Louvois, c'est un projet qui est... une complexité extrêmement importante puisque c'était payer tous les militaires de l'ensemble du ministère de la même façon, alors que les règles de paiement étaient différentes. Donc c'est un projet qui a été lancé alors que les règles n'ont pas été faites. Donc c'était l'utilisation d'un projet informatique pour transformer le paiement d'un seul du ministère. Le problème d'un projet de cette taille-là, donc nous en plus, pour d'autres raisons, les gains ont été anticipés, ça a conduit à un projet, comme je l'appelle, un projet qui avait des indicateurs PASTECH, c'est-à-dire vers l'extérieur, pour assurer les autorités.

  • Speaker #1

    Indicateurs PASTECH.

  • Speaker #0

    Étaient tous rouges à l'intérieur, et puis à un moment, le truc a divergé. Quand le truc a divergé, tout le monde a regardé. a été un peu désarçonné. Puis quand on a un système qui diverge, ça fait des dégâts qui ont été quand même assez importants.

  • Speaker #1

    Donc ton point d'apport à ça, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est l'exemple même d'un grand, grand, grand système qui finalement était d'une complexité telle qu'elle n'était pas maîtrisable par les équipes de projet.

  • Speaker #1

    Mais du coup, parce que tu as dit plusieurs choses, juste pour être sûr de comprendre, tu dis, historiquement, le transverse a été introduit par les projets informatiques pour une rationalisation, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Non, le transverse répond à un besoin qui est lié, pour moi, avec le numérique. Mais d'un autre côté, dans les années 90, ou particulièrement dans l'État, dans les grandes entreprises, il y a eu un grand mouvement de rationalisation. L'idée, c'était de dire, c'est génial, l'informatique, c'est un coup de baguette magique, il suffit de faire un système d'information et on transforme, on va faire des gains énormes dans nos sociétés. Et ça, ça n'a pas marché.

  • Speaker #1

    ça n'a pas marché et ça donnait un certain nombre de grands échecs parce qu'on a voulu faire des systèmes beaucoup trop gros donc plus maîtrisables ok et du coup quand toi t'arrives dans une logique d'amener du transverse pour d'autres raisons ce tampon là où cette historique-là pèse sur le fait d'atteindre une des six groupes qui arrivent et qui veut essayer de rationaliser, qui met son nez partout ?

  • Speaker #0

    Non, moi je suis arrivé trois, quatre ans après, le retour d'expérience autour de... de cette mauvaise utilisation de l'informatique avait été en partie tirée. Moi, je suis arrivé plutôt dans le moment, donc c'était à partir de 2015, on a beaucoup parlé de transformation numérique. On a beaucoup parlé, on parlait beaucoup des laborats, des labs. des factories où on parlait beaucoup du fait que j'étais arrivé dans la période où le cloud était déjà relativement mature et tout ce qui était le développement sur le cloud, le développement rapide commençait à avoir un certain aura moi c'est à ce moment là où je suis arrivé et je suis arrivé avec deux missions bien particulières qui se retrouvent dans la délégation générale, direction générale au numérique qui sont d'un côté donner des outils de gouvernance dans la conduite des projets du ministère. Donc là, droit de veto, gouvernance, vérification des méthodes, vérification des équipes et ainsi de suite. Et de l'autre côté, orchestrer la transformation numérique du ministère, c'est-à-dire aider les différents DSI, aider les métiers à aller vers ces nouveaux modes numériques. en améliorant la façon de développer un système beaucoup plus rapidement. Donc, arriver à préconiser un certain nombre de méthodes de travail qui venaient plus du monde de l'innovation, et en allant jusqu'à la méthode SAFE pour les gros projets. Petit coupement, dans les trois jours, trois semaines, trois mois, trois jours pour émettre une idée, trois semaines pour faire un POC, trois mois pour faire un MVP. Donc essayer de retravailler alors que par une méthode classique, les projets devraient se compter plutôt en nombre de mois voire d'années. Donc un petit peu cette double mission. Et moi ce qui paraissait, et tout cela aussi, correspondait aussi à l'époque, au moment où on commençait à ouvrir, partager les données et à faire parler les données. Effectivement en ne pas en faisant parler les données, à créer de la valeur, à créer de la richesse, à créer du progrès. Ce qui n'était quand même pas tout à fait la chose qui existait dans les années 90-2000.

  • Speaker #1

    et donc du coup là tu viens de parler de SAFE tu l'as mis en place sur l'ensemble du périmètre, sur une partie

  • Speaker #0

    Non, on l'a testé sur une partie du périmètre. Le périmètre du ministère des Armées, c'est un truc qui est quand même assez monstrueux en termes de projet. Donc, on a... Et en tant que direction générale, moi j'étais responsable de la préconisation des nouvelles méthodes, donc on a fait plusieurs choses, on a mis en place un lab, donc là on utilisait du CEF rapide, un lab c'est-à-dire un petit peu comme faisait aussi la DINUM à l'époque sur l'entrepreneuriat d'État ou ainsi de suite. un porteur de projet, une entité porteuse de projet, venait, on lui fournissait un data scientiste, on lui fournissait un expert RSSI, on l'aidait très rapidement à faire un POC et un MVP en 3-4 mois. Donc on a mis en place une fabrique, qui était une fabrique pour montrer que ces nouvelles méthodes marchaient, que quand on avait un parti produit relativement simple et bien maîtrisé, on arrivait à faire des choses qui marchaient bien. en très peu de temps. Donc on a mis en place cette fabrique. De l'autre côté, on a mis en place des méthodes de travail sur l'innovation, justement pour aider à conceptualiser un POC, pour ensuite le faire monter vers du MVP. Et sur les projets un tout petit peu plus complexes, on a commencé à mettre en place... des précotisations pour former un certain nombre de gens à la méthode CEF. Et on a testé la méthode CEF sur différents projets, soit sur des projets qui étaient des projets métiers d'une DSI, donc sur des projets relativement bien maîtrisés, soit, on l'a testé aussi sur un projet extrêmement complexe, qui était la refonte du socle numérique du ministère des Armées. Et là, je vais peut-être me tromper, mais... Je pense qu'on avait plus d'une dizaine de trains safe qui roulaient en parallèle. Donc on a testé aussi sur un gros projet, ce qui a permis aussi d'en toucher les limites. Voilà, parce qu'il y a aussi les dogmatiques de la méthode safe, comme il y a les dogmatiques de la méthode en V. Il faut savoir avoir à faire affaire à un bon dosage. Et je pense que mettre en place une méthode type conduite agile demande une préparation importante de ceux qui font la maîtrise d'ouvrage. Parce que ce n'est pas la même mentalité, ce n'est pas le même état d'esprit. Dans la méthode CEF, ce que je retiens surtout, c'est que finalement, on met de côté la méthode telle qu'elle est, et finalement, la philosophie de ces méthodes agiles, c'est qu'on prend un problème particulièrement complexe. On regarde un peu, pour moi, c'est un peu des intégrales en mathématiques. On a un truc extrêmement complexe, on ne sait pas forcément bien le résoudre, on sait qu'on va se planter si on essaie de l'attaquer globalement. Donc du coup, on le coupe par petits morceaux, et chacun des petits morceaux est maîtrisable. ou maîtrisables, à condition que l'on confie à une équipe en qui on a confiance et qui est capable de prendre des décisions sur ces parties maîtrisables. Parce que si on confie et on découpe notre projet en 300 micro-projets maîtrisables et que ces 300 micro-projets sont soumis à la direction d'une salle de délégation à l'échelon d'exécution, ça ne marchera pas non plus, ça va diverger. donc je veux dire que la méthode CEF ça accompagne un changement culturel beaucoup plus profond dans l'organisation et que ça ne s'applique pas c'est pas une baguette magique on va faire de l'agilité, ça va marcher il y a tous ceux qui disent on fait de l'agilité qui ne change pas culturellement leur mode de travail ça conduit à l'échec ça marche pas, donc c'est assez profond d'où un besoin d'acculturation, d'où un besoin d'accompagnement d'où ce qu'on avait commencé à mettre en place. Après, moi, je suis parti. Je suis quand même parti en 2020. J'avais maintenant plus de trois ans des coachs, des formations à cette méthode-là.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'en trois ans, parce que tu sais, le problème d'un DSI qui part tous les trois ans, c'est quand même la majorité aujourd'hui dans le marché. Ce qu'on voit, c'est qu'en gros, tu arrives à initier un changement parce que tu as quand même la confiance des gens qui t'ont recruté, etc., que c'est nécessaire. Mais c'est tellement dur au moment donné où ça commence à bouger que c'est le moment où il faut partir. Est-ce que c'est... Est-ce que tu valides ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je valide, je valide, je valide. De toute façon, c'est vrai, quand on fait de la transformation partout, quand on fait de la transformation, des moments où on est recruté, on vient, on est neuf, on va se dire, lui, il sera moins con que son prédécesseur, on va pouvoir faire quelque chose. Et au bout d'un moment, la réalité se rappelle à tous. Et si on fait faire des progrès pendant un temps, il y a un moment où l'organisation va peut-être avoir besoin d'une pause. Donc c'est pour ça que le DSI ou le DSI réformateur... Au bout de trois ans, il a peut-être bien avancé sa structure pendant deux ans. Soit on lui redonne un mandat de trois ans parce que du coup il s'installe dans la continuité, il a du temps devant lui, il n'est pas obligé d'aller au forcing, soit on ne lui donne pas de temps, du coup il va au forcing, donc il va au clash. Moi ce qui est intéressant dans mon expérience, c'est que j'ai fait deux grandes transformations du ministère des Armées. La première, c'est la création de la cyberdéfense. Je suis quasiment resté en poste pendant huit ans. Donc j'ai été en charge du projet pendant deux ans et je l'ai commandé pendant plus de six ans. et donc du coup j'ai été avec mon équipe donc on a bénéficié de ce recul du temps qui a permis d'y aller à un certain rythme Ensuite, comme DG NUM, je suis resté trois ans. La mise en place de la DG NUM la première année, j'ai été plébiscité par tout le monde, tout le monde était content. On a mis en place des tas de jeux de reglets. À partir de l'année suivante, quand on a commencé à exercer nos pouvoirs, j'ai commencé à constater quelques grincements de dents parce que c'était un peu un empêcheur de tourner en rond, parce qu'Intel voulait prendre la norme du small alors que le ministère avait choisi collégialement. de prendre une norme X, voilà, donc on commence à rentrer, et ça, ce n'était pas très gênant. En contre, c'est quand on a commencé à ouvrir la boîte de la conduite de projet. Et dans les boîtes de conduite de projet, en tant que directeur général, j'allais voir les projets qui allaient bien, mais j'allais surtout voir les projets qui n'allaient pas bien. Et là, quand on enlève les projets qui ne vont pas bien, on enlève des dysfonctionnements, on enlève des... des erreurs, on enlève des choses qui ne font pas très plaisir. Du coup, après, il fallait changer les organisations et changer les méthodes. Et là, c'était une deuxième phase de transformation. Et les transformations demandent du temps. Donc, il était bien que je parte au bout de trois ans, remplacé par quelqu'un qui avait une autre culture, une autre approche, une autre méthode, qui a continué le travail. Et je vois dans pas mal de structures, je ne vais pas citer les noms, mais deux autres DSI qui étaient particulièrement innovants, parce qu'on est un consommateur, il y en a un qui a été éjecté au bout de trois ans en profitant du fait qu'il soit malade, et quant à un autre qui a été remercié par sa direction parce que les métiers ont trouvé qu'il avait fait trop de transverses par rapport à leur verticalité. Voilà, donc un métier, je pense, dans une organisation, un directeur du numérique qui vient secouer l'organisation, effectivement, il y a un moment où il faut le changer.

  • Speaker #1

    et tu penses que le mec la personne qui suit à ce moment là continue ce que tu fais ou recasse tout parce qu'il considère qu'il doit se mettre en opposition pour créer une marque

  • Speaker #0

    Non, parce que la direction est bonne. Je pense qu'il y a besoin d'inflexion, parce qu'au bout d'un moment, quand on est en transformation, on a des combats, on fait aussi des erreurs. Donc, avoir quelqu'un qui vienne remplacer... Mais la direction générale ne va pas changer. La direction générale de Verreux, c'est plus d'agilité, c'est plus de traitement des données, c'est plus de partage. Il y a toutes ces grandes tendances. restent vraies et elles sont vraies dans tous les grands groupes. Après, qu'on fasse un petit peu moins de transverse, un petit peu plus de transverse, qu'on perde deux ans sur le déploiement de l'agilité parce que la structure n'est pas prête ou parce que là, il y a un directeur général d'une verticalité qui faut attendre qu'il part pour pouvoir avancer. Voilà, donc je pense que dans ces grands mouvements, on est sur un axe où on voit où il faut aller et puis après, c'est un art d'exécution.

  • Speaker #1

    ok et tu penses franchement parce qu'il y a quand même une question sur ce côté des 6 et 3 ans toi tu as initié un mouvement tu as vraiment initié un mouvement de transformation à ce moment là tu changes des pratiques etc parce que j'imagine que tu sais un peu encore ce qui s'y passe etc de manière globale est-ce que du coup ils sont quand même allés dans la même direction et ils y sont allés pas exactement comme tu pensais qu'il faudrait mais c'est continu

  • Speaker #0

    Non, non, non. Ce que j'ai lancé avant de partir, qui était la création de 17 DSI métiers du ministère des Armées, le projet a été entériné par le ministre six mois après mon départ et est devenu opératoire. La création de l'agence numérique de défense, elle a été créée. Après, qu'elle ait réussi ou pas réussi à trouver sa place, c'est un autre sujet. Mais ces choses-là, globalement... ce qui a été mis sur les rails à continuer à évoluer. La question, est-ce qu'il aurait mieux fallu me laisser 5 ans, 6 ans ou ne pas me changer ? Je pense que dans un DSI, il faut lui redonner un vrai mandat. Moi, quand j'ai transformé cette partie-là, j'ai créé la direction gérante numérique. Ça m'a pris deux ans, six mois, un an pour la créer. Et puis un an et demi pour la mettre sur les rails, à peu près pour qu'elle fonctionne bien, qu'elle soit bien acceptée. Ça, pas de souci, ça a marché, ça rentrait bien dans mon périmètre où j'avais trois ans de vie. Après, quand on m'a demandé d'attaquer la conduite des projets, la question que j'ai posée au cabinet, c'est vous me donnez combien de temps ? Et là, la réponse a été extrêmement floue. Et donc, du coup, parce que cette réforme, ça conduit des projets, c'est vraiment du dur. C'est du dur.

  • Speaker #1

    Ah oui.

  • Speaker #0

    Et puis là, j'ai pu lancer. Là, du coup, je me suis contenté de lancer les premiers inputs parce que je savais très bien que ça ne servait à rien d'aller plus loin parce que je savais très bien qu'à l'été 2020, je partais et que je ne saurais pas prolonger, que mon équipe serait aussi un petit peu défaite. Donc, la particularité, si vous voulez, nous, militaires, c'est que on est comme les pots de yaourt on a une date de fin de vie sur nos contrats donc on sait très bien que 59 ans on est dehors après la pastèque le pot de yaourt on est très dans la nourriture aujourd'hui très dans la nourriture, énorme il n'y a pas de surprise c'est différent d'un DSI du monde privé qui peut être débarqué du jour au lendemain donc nous on ne débarque pas trop c'est pas tellement notre culture mais on sait que les gens vont disparaître à telle date parce que c'est leur limite d'âge Voilà, donc les relations sont peut-être un tout petit peu plus différentes. Mais je pense que la transformation numérique a été un mouvement qui est intéressant parce que ça met en route une dynamique. Je pense que ça a deux points difficiles, c'est que ça met en place un tempo qui est très rapide. Et puis deuxièmement, c'est le point le plus, je pense, le plus compliqué, le plus délicat et qui est vraiment la ligne de conduite et la ligne directrice de toutes ces transformations, c'est les compétences et les ressources humaines.

  • Speaker #1

    Et ça par rapport à la partie RH interne, c'était quoi le lien ?

  • Speaker #0

    En tant que directeur général du numérique, j'étais ce qu'on appelle en jargon pilote des métiers numériques. Donc j'étais comptable du suivi de ces métiers, du suivi de la situation, de la formation et de l'état des lieux, de l'évolution du nombre d'agents, des difficultés de recrutement, des difficultés de formation, des affectations. Voilà, donc de la... de la radioscopie annuelle en permanent de l'état des lieux de la ressource humaine numérique du ministère des armées. Et je pense que dans la transformation du ministère qu'on a conduite, c'est l'élément le plus structurant. Parce que ce n'est pas la peine de rêver de super DSI si on n'a pas les bonhommes. Et derrière, ça veut dire que ça... et moins on a de personnes. malheureusement, s'il faut externaliser, plus il faut garder des personnes de haut niveau capables de faire de la maîtrise d'ouvrage. Donc des métiers d'architectes, d'entreprises sont des métiers très en tension. Je passe bien sûr sur toutes les data scientists, les gens qui vont parler de data, ou encore tous les gens qui sont les experts de la cyber. Mais c'est vraiment ce côté... Ce côté manque de ressources humaines quantitatif et qualitatif, qui impose dans différents endroits aussi qu'on rassemble les experts au bon endroit. Typiquement, quand on a créé l'agence numérique de défense, c'était de se dire, il faut mettre dans cette agence les meilleures culottes de conduite de produits, les meilleurs architectes, pour ne pas les avoir disséminés dans tous les services, je les mets là. et cette agence va devoir conduire les 50 principaux programmes de système d'information du ministère des armées, ceux qui sont les plus structurants, ceux que moi en tant que dégénume je suivais dans une liste, et après on rendait compte à l'interministériel ou directement au ministre de l'avancement de ces projets. voilà, arriver à concentrer la ressource humaine parce qu'elle est rare.

  • Speaker #1

    Et du coup, par rapport à la ressource humaine, donc du coup, il y a une question de compétence dans l'IT, etc. Première question, est-ce que tu pouvais recruter un intern, c'était la Presta. Et deuxièmement, est-ce qu'il y avait une problématique aussi de RH liée… aux autres métiers où en gros tu as eu du mal parce que bon on sait que l'agilité c'est quand même être proche du tuteur finot etc et donc du coup un changement un peu global au niveau de l'organisation qui dépasse la DSI est-ce que c'était aussi un point de difficulté ou au contraire il y a eu plutôt un mouvement en interne comme quoi c'est ça qu'il fallait faire et du coup c'était plutôt moteur ?

  • Speaker #0

    Non, sur les bilans RH, non. Il y avait une assez bonne mobilisation, notamment de la direction des ressources humaines, du ministère, avec qui on a créé une académie du numérique. Donc, par contre, la ressource est rare. On avait aussi revalorisé énormément les salaires des contractuels pour arriver à les hitter au même niveau que les salaires équivalents du privé. Après, les corps des fonctionnaires, c'est une autre problématique. Mais non, il y avait là, autant sur la conduite de projet, c'était des choses qu'on tapait dans le dur, avec des oppositions fortes, par mauvaise compréhension, autant sur le besoin de faire quelque chose sur les RH, autant sur le besoin de mobiliser l'ensemble des acteurs du ministère des Armées pour trouver des solutions innovantes. sur les ressources humaines, sur le recrutement, toutes spécialités IT confondues. Oui, il y a eu un mouvement, une vraie dynamique. Les armées, les directions des ressources humaines, les armées ont réinventé des partenariats en allant chercher des gens dans les écoles à partir de la classe de première. Il y a eu beaucoup d'initiatives. Vont-elles suffire à alimenter le... Très franchement, je pense que non. et qu'il va falloir là aussi dans la conduite de projet revoir un certain nombre de façons d'exploiter nos systèmes d'information. Je ne parle pas avec de l'externalisation telle qu'on pouvait mal la comprendre il y a quelques années, mais le recours à des partenaires, à des prestataires à qui on confie typiquement l'hébergement. Aujourd'hui, faire de l'hébergement cloud en code sévatif. Ok, sur certains nombres de données très sensibles au ministère des armées, sur un certain nombre de données de niveau sensible, je pense aux données des ressources humaines ou des choses dans ce genre là, le cloud peut être mis en commun avec les autres services de l'État ou peut être confié à des partenaires comme Tavis, OVH, j'ai un petit pote, Airbus, je ne peux pas en oublier Orange et compagnie. des gens qui sont absolument sous le cadre juridique français et avec du personnel qui est capable, comme on est capable d'habiliter avec les standards de la défense. Pour moi, ce n'est pas à des militaires en uniforme de faire de l'hébergement cloud sur des données RH du ministère. Voilà, donc c'est les militaires en uniforme du cycle, il est fait pour aller sur le tas d'opérations, il est fait pour aller combattre. Voilà, donc il y a un juste équilibre, il y a un juste équilibre à trouver.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tout ça, en fait, si tu dis que tu as créé plein de DSI, que tu es en relation avec le ministère, etc., est-ce qu'il y avait un sentiment d'équipe commune dans le mouvement que vous y avez créé et donc du coup, bon, des distinctions sur certains points, mais qui étaient à la marge ? Ou est-ce que le mouvement qui est en train de se mettre en place, il n'y avait pas encore tout le monde dans la direction IT globalement qui était embarqué ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la première année et demie où je suis arrivé, il y avait une bonne convergence, il y avait une bonne équipe. Au sein de ma direction, j'avais une équipe extrêmement soudée. Ça nous a permis de se mettre d'accord, de travailler très vite et de faire des propositions très rapidement. Avec ALEUR, une équipe était 50% civile, militaire, et on devait avoir 30% de taux de féminisation. Et notamment, j'avais une chief digital officer qui arrivait du groupe Vinci, qui avait une culture civile totalement. Voilà, donc ça c'était une partie un peu qui était une locomotive.

  • Speaker #1

    C'est un temps d'équipe.

  • Speaker #0

    C'est un temps d'équipe. Et avec le reste des autres entités qui gouvernaient les systèmes d'information du ministère, c'était un petit peu géométrie variable. Je dirais que sur 80% des suivis, il y avait consensus, on travaillait bien ensemble. Il y avait quelques sujets qui étaient proxogènes pour certaines entités, qui fait qu'il y avait un refus de prendre des risques. alors que l'on voit que la ressource humaine va manquer, donc les décisions qu'on tarde trop à prendre, on va les prendre dans l'urgence, alors qu'il valait mieux les prendre quelques années, mais ça veut dire qu'il faut accepter de prendre des décisions un peu audacieuses.

  • Speaker #1

    Et en fait, quand tu parles de décisions audacieuses, de courage, est-ce que tu le mets, ça incite à des trucs et tout, mais est-ce que tu le mets plutôt sur le compte de… La peur, la peur de ne pas gérer, d'être mis en question de soi, ou le fait de ne pas croire dans la nécessité de changer, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Ne pas croire dans la nécessité de changer, le fait que dans deux ans on sera parti, donc finalement ça ne marche pas si mal. Et puis je pense que là aussi... Quand on est à la tête d'une entité, d'une DSI, et qu'on travaille énormément pour faire marcher son truc, on n'est pas capable de regarder au-delà de six mois. On est dans la cage du hamster, on galope, on galope, on galope, on galope, mais on ne voit pas que du coup il y a le mur qui est devant nous. Voilà, mais que du coup, quand on vous dit, ton mur il va arriver, maintenant tu es reçu au VN, regarde, tu perds 8% de personnel depuis 5 ans, c'est systémique, on ne va pas arriver avec les données, donc il faut que tu te fasses une organisation. Et ce côté-là, je ne sais pas moi, mon successeur, il y a un peu ça, parce que c'est très compliqué quand même de réformer, de transformer, de prendre des décisions douloureuses, audacieuses, quand pareil, le magasin ne ferme pas et qu'il faut continuer à délivrer. et que pour continuer à délivrer, les mecs triment comme les troupes triment. Voilà, donc c'est pour ça que c'est le rôle du directeur général, le rôle c'est d'être à la fois l'aiguillon et le cété, pour forcer à aller, tout en étant bien conscient qu'il ne faut pas aller trop loin non plus pour ne pas casser la machine. Donc c'est pour ça que c'est cette espèce d'image de l'élastique, le tirer jusqu'à certains points et pas le faire rentrer.

  • Speaker #1

    ok et aujourd'hui quand toi t'as eu ce côté un peu challenge entre une autre direction, etc. Tu n'as pas voulu, tu n'as pas réussi, ça ne pouvait pas se faire, avoir pas une question d'arbitrage, mais un soutien un peu plus global des autres parties prenantes, de la direction générale, ou quelque chose comme ça ?

  • Speaker #0

    Ah non, je n'ai pas cherché, j'avais un soutien extrêmement fort du ministre et de son cabinet. C'est pour ça que les décisions ont été prises malgré les freins d'un certain nombre d'entités. Voilà, mais si tu veux, c'est plus dans la discussion de tous les jours, dans le rapport de discussion de tous les jours de conviction que j'ai eu des freins. Pour les décisions de haut niveau proposées au Bidist, ce que j'ai proposé a toujours été accepté. Mais là aussi, une décision qui tombe comme un truc assez formel, si elle n'a pas été discutée, acceptée avant, ce n'est pas très bon non plus parce que les gens n'y adhèrent pas.

  • Speaker #1

    Ok, c'est intéressant. Et dans ce côté un peu, tu sais... un peu primaire qu'on peut avoir de guéguerre, ce genre de choses qui peuvent arriver dans les sociétés. Toi, tu n'es pas allé sur une posture de attendez, il faut changer cette personne-là ou changer ce type d'entité-là parce que là-dessus, tu n'as pas voulu aller dans ce registre-là ?

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas la mentalité du ministère des Armées. D'abord, les militaires restent en potes que deux, trois ans, c'est peu. Ils tournent beaucoup. Non, ce n'est pas tellement la… C'est pas la culture. Non, c'est pas la culture. Ça peut arriver, bien sûr, mais il faut vraiment... Il y a une faute. il faudra vraiment qu'il y ait une faute, un accumulement de choses, avoir une opinion qui diverge. Parce que les positions, ça, d'un côté, vous avez la direction générale numérique, qui va pousser vers le transvers, vers la vision du ministre, vers des choses, vers un bien commun transverse, alors que de l'autre côté, les gens qui ne veulent pas y aller, ils vont avoir plutôt une tendance à privilégier leur propre structure dans la satisfaction de leur chef.

  • Speaker #1

    c'est arrivé à considérer deux écoute merci Arnaud c'était super intéressant on a fait un bon tour je pense c'est passionnant de découvrir les dangers de transfo du numérique des ministères des armées c'est pas commun comme tu le dis une des organisations les plus complexes que je pense que j'ai rencontré merci encore d'avoir partagé ton parcours de la marine en plus avec les coulisses de la première création de la direction générale du numérique du ministère des armées donc c'est top et en plus sans l'aide de bois donc c'était vraiment génial

  • Speaker #0

    Oui, surtout aussi, merci à toi, parce que c'est toujours un exercice intéressant de condenser et de sortir quelques grands enseignements d'années de travail, d'années d'investissement. Ce que je retiens, c'est effectivement que c'était un moment passionnant. Cette troisième transformation, je n'ai pas eu assez de temps pour convaincre, pour arriver à doser les bonnes doses de transversalité et de verticalité. C'était pour moi ma troisième grande transformation dans le ministère, après celle que j'avais conduite. pour la création de la cyber défense, mais dans lequel j'avais eu quasiment 9 ans pour déployer toute cette transformation. Et d'ailleurs, c'est ce que je raconte dans le livre que je viens de sortir qui s'appelle Soldats de la cyber guerre Mais toutes ces choses-là restent avant tout quelque chose d'extrêmement humain, des aventures humaines, des alignements, des forces de conviction. Voilà, donc merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'intervenir et de témoigner.

  • Speaker #1

    Merci encore pour ta participation et à bientôt. Bon, j'espère que vous avez kiffé ce podcast. Comme toujours, n'hésitez pas à le partager sur LinkedIn, à le partager à vos collègues chefs de projet IT, DSI. Ça nous aide toujours à trouver de nouveaux et des DSI toujours plus intéressants. Et écoutez, ciao !

Share

Embed

You may also like

Description

🪖 Vis ma vie de chef d'orchestre de la transformation numérique de la Défense française


Bienvenue dans l'épisode 88 de CIO Révolution by AirSaas. Un numéro inédit au cours duquel nous avons reçu Arnaud Coustillière un vice-amiral d’escadre !

   

Après avoir commandé plusieurs navires de combat il a contribué à la création de la cyberdéfense du ministère des Armées dont il a été le premier COMCYBER (Le commandement de la cyberdéfense) de 2011 à 2017. Il préside aujourd’hui le Pôle d’excellence Cyber. 

Il avait au préalable été DSI de la marine nationale 2006/2008, Il avait ensuite créé et mis en place la Direction générale du numérique du ministère des Armées (DGNUM) entre 2017 et 2020.
Il vient de publier "Soldat de la cyberguerre Un pionnier raconte la cyberdéfense française aux éditions Tallandier.


Avec lui on s’est intéressé à la conduite de projets et des hommes au sein d’une organisation aussi complexe que l’armée !  Il a par exemple mis en place jusqu’à 10 trains SAFe. On s’est demandé comment on structure, comment on transforme, comment on amène une “juste dose” de transversalité…ce sont quelques unes des questions abordées dans cet épisode qui vous fera découvrir les coulisses des armées le tout sans langue de bois !


TIMELINE


  • 01:36 : Présentations du parcours d’Arnaud

  • 05:04 : L’émergence d”une DSI transverse “groupe”, pour urbaniser et répartir entre le commun et le sectoriel 

  • 10:06 : L’image de l’élastique :  entre le DSI groupe qui tire le plus possible vers le transverse vs le DSI métier qui veut garder le plus de choses “ à sa main.”  “une affaire d’hommes”.

  • 11:48 La transversalité dans les organisations : entre framework rigide et hybridations de bonnes pratiques

  • 14:26 : les grands projets avec leurs “indicateurs pastèques” AKA. Les grands échecs informatiques : l’exemple du projet Louvoie

  • 18:24 : Les missions de DG Num au ministère de la défense : donner des outils de gouvernance  (droit de véto, vérification méthodes..) et orchestrer la transfo des SIC (systèmes d’information et de communication), 

  • 20:00 : L’implémentation et les limites de SAFE  au ministère des armées : mise en place d’un LAB, de nouvelles méthodes de travail sur l’innovation et test SAFe sur des grands projets.

  • 24:20 Regard sur « les trois ans du DSI » et les “lois” de la transformation REX sur deux  transfos une de huit ans avec la création de la cyberdéfense et une de trois ans en tant que DGNUM.

  • 31:28 Les deux points difficiles de la  transfo num : Timing et ressources humaines !

  • 39:02 : Regard sur l’audace  et le courage managérial …La roue du hamster pour continuer à délivrer  vs le courage des réformes de  long terme !

  • 41:59  Spécificités de la culture managériale au sein du ministère des armées.L’art de concilier le besoin de bien commun transverse et l’immobilisme structurel dans les orgas.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Et c'est comme le ministère des armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un. Et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, à un instant T.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Bertrand Ruiz et bienvenue sur le podcast CIO Révolution. Si vous êtes curieux de connaître les enjeux organisationnels, les solutions pragmatiques et les réflexions sur la transformation des entreprises, vous êtes au bon endroit. Ici, pas de langue de bois, que du concret. Mais avant de commencer, je me présente. Je suis le CEO d'Ersas, une solution web qui permet à la DSI et à la Direction Générale de partager une vue claire des projets en cours, des décisions à prendre et des priorisations à faire. Vous manquez de temps ? Ersas vous aide à vous focaliser sur l'urgent et l'important. Le besoin de reporting est de plus en plus fort. Ersas génère votre rapport flash décisionnel en un coup. S'il y a un historique fort entre les métiers, Ersas va vraiment vous aider à collaborer de manière efficace. Sur ce, je vous laisse avec ce nouvel épisode à découvrir une nouvelle façon de faire. Bonne écoute ! bonjour à tous je suis ravi aujourd'hui d'être avec Arnaud Coustillard qui est attention c'est la première fois qu'on a quelqu'un de ce secteur là vice-amiral d'escadre ancien directeur général du numérique du ministère des armées et ancien commandant de la cyber défense des armées ça fait long mais c'est tout ce que t'as été Arnaud et je suis ravi que tu sois là salut

  • Speaker #0

    Oui, bonjour, je suis ravi aussi de partager mon expérience avec vous. J'ai passé une quarantaine d'années au ministère des Armées, une vingtaine dans les opérations aéromaritimes, et je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Je ne suis pas un DSI technique, je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Et après, j'ai passé à peu près aussi une vingtaine d'années à la transformation numérique du ministère des Armées, en ayant graphié différents échelons. et en ayant eu la chance de créer la cyberdéfense des armées à action défensive et offensive, et de la commander pendant plus de six ans d'opération, et de terminer ma carrière comme directeur en créant la direction générale numérique du ministère des armées, avec toutes les problématiques de gouvernance de la donnée, d'ouverture de la donnée, de méthodologie de conduite des projets informatiques. et de tout ce qui tourne autour de l'agilité, le partage des données, tout ce qui est la transformation numérique et le lot de tous les DSI des grands groupes.

  • Speaker #1

    Ok, et donc du coup, en termes un petit peu de date et de nombre pour qu'on se situe, ça représente, de quelle année à quelle année, ça représentait combien de personnes dans tes services ?

  • Speaker #0

    Pour ne pas me concentrer que sur la partie finale, en 2006-2008, j'ai été DSI de la Marine Nationale, donc une grosse DSI, plutôt une DSI bulle qui devait faire une cinquantaine de personnes avec une population haïtienne qui devait tourner autour de 500 personnes en différents services qui étaient sous ma tutelle. Ensuite, la création des capacités cyber désarmées de 2011 à 2017. Là, une centaine de personnes au départ au sein de l'ensemble du ministère. Et quand j'ai quitté, on devait être à hauteur de 1500. Et je disposais d'un...

  • Speaker #1

    Tu passais de combien à combien, tu as dit là ?

  • Speaker #0

    Une centaine. Et quand j'ai quitté, on devait être aux alentours de 1500 en 2017. Et j'avais un état-major qui était passé de 3 personnes en 2011 à 70 personnes en 2018. Et ensuite, la Direction Générale du Numérique que j'ai créée était une entité qui, avec ses satellites, faisait une petite centaine de personnes. C'était une DSI groupe rattachée au COMEX, rattachée directement au cabinet ministre, et qui était censée avoir une autorité sur l'ensemble des entités, des différents DSI subordonnés du ministère, qui sont à peu près au nombre d'une petite vingtaine. Et le ministère des armées, c'était à peu près 20 000 spécialistes des systèmes d'information et informaticiens, plus de 3 000 systèmes d'information, sans compter l'informatique embarquée dans les systèmes d'armes, dans les infrastructures industrielles, à différents endroits, plusieurs centaines de métiers. en gros un budget d'investissement de l'ordre de 2 milliards d'euros par an sans compter les ressources humaines et les masses salariales.

  • Speaker #1

    Ok, et du coup, toi, ta mission dans tout ça, c'était, tu dis, la création. Ça veut dire quoi créer le département numérique dans ce cadre-là ?

  • Speaker #0

    Créer, si tu veux... Dans la longue maturation de la montée vers le numérique, on est parti, quand on revient dans les années 80, on était dans le domaine des télécoms, qui est à monter progressivement vers le domaine de l'informatique et monter progressivement vers le domaine du numérique pour accompagner cette transversalité importante autour des données et ainsi de suite. il a fallu que les directions informatiques des métiers et des gouvernances transverses, il a fallu concilier de plus en plus tout ce qui était le transverse, le commun, par rapport à ce qu'était le sectoriel. Typiquement, le réseau informatique d'usage général de la marine, de l'armée de l'air ou de l'armée de terre, il n'y avait aucune des raisons que ce soit des réseaux différents. D'où le fait que derrière, il y ait besoin de... d'urbaniser tout ça, il y a besoin de faire les mêmes choix techniques, et du coup finalement d'avoir une unique DSI run conduisant ce réseau. Donc cette espèce de grand mouvement pour moi lancé dans les années 80, qui est de faire en sorte que la DSI devienne de plus en plus transverse, et que les choses dans les socles réseau soient de plus en plus communs, et quelque chose qui a été aussi très fort au sein du ministère des armées, D'où l'apparition d'entités transverses, à la fois d'une DSI RUN, qui s'appelait la Direction Interarmée des Systèmes d'Information et des Systèmes d'Information. qui fournissait l'ensemble des systèmes communs à l'ensemble des ressortissants du ministère, toute armée, services civils inclus, et de l'autre côté, pour gouverner tout ça, une entité politique, très pro-entité politique, Haïti, qui est proche du cabinet du ministre. Et à un moment donné, puisqu'il fallait ouvrir davantage les données, parce qu'il fallait... mieux conduire les projets. Le ministère des Armées a senti le besoin de donner davantage d'attributs de gouvernance à cette entité et transformer cette direction générale des systèmes d'information en entité politique, en une vraie DSI groupe ayant un certain nombre de pouvoirs d'arbitrage, un certain nombre de responsabilités converses. et un certain nombre de droits de veto, notamment sur la conduite des programmes. Donc c'est ça que j'ai été amené à faire, c'est de transformer une direction IT très politique, qui découlait les normes qu'il faut faire, qui faisait des beaux papiers, très intéressants, mais qui n'étaient pas appliqués, en une direction plus opérationnelle, et exerçant une réelle autorité sur l'ensemble des différentes DSI. du ministère, quand on prend une organisation de la taille du ministère des armées, je pense que l'on est l'organisation la plus complexe en Europe.

  • Speaker #1

    La plus complexe, c'est clair.

  • Speaker #0

    Pas tellement du fait du nombre de postes de travail, mais surtout de l'hétérogénéité des systèmes, des contextes d'emploi et des métiers.

  • Speaker #1

    Ok, donc c'est plutôt le fait que ça soit vraiment tellement disparate en interne que faire en sorte que tout le monde arrive à travailler ensemble, à créer un cadre commun a été le point clé, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait. C'est la partie passée. C'est un peu la problématique que tous les grands DSI ont dans les organismes où il y a des cultures d'entreprise assez fortes. Moi j'ai beaucoup travaillé à l'époque avec EDF, avec la SNCF ou encore avec le Crédit Agricole. qui ont des cultures d'entreprise extrêmement fortes autour de métiers très structurés. Et c'est comme le ministère des Armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un, et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, un instanté.

  • Speaker #1

    Tu dis la juste dose de transverse que l'organisation à un instant T est capable de tolérer. C'est-à-dire qu'en gros, tu dis, si je résume et que je comprends bien, une organisation, elle, par défaut, historiquement, elle est silotée. On a envie que tout le monde travaille ensemble, mais en fait, on n'est pas capable d'aller plus vite que la musique non plus. Donc, il faut jauger quelles sont les bonnes tactiques qui vont petit à petit amener. dirons si on est 100% transverse ça a amené pourcentage après pourcentage à amener une meilleure collaboration transverse sans aller trop vite parce que sinon ça pète et sans aller trop lentement non plus parce que sinon on n'avance pas

  • Speaker #0

    Oui, c'est tout à fait ça. J'aime bien l'image de l'élastique. Le DSI groupe doit tirer sur l'élastique le plus possible parce que lui, il pousse vers le transverse, alors que le DSI métier va essayer de garder un ensemble de choses à sa main parce qu'il en a besoin pour sa mission. Donc c'est un juste équilibre qui est une action de transformation, qui n'est pas une action technique, c'est une action de transformation dans laquelle il a besoin à la fois de convaincre. mais aussi il a besoin de se montrer de temps en temps un peu plus coercitif, et c'est in fine une affaire d'hommes, parce que faire bouger une organisation, ça va être des relations interpersonnelles, des histoires, et cet élément très humain, fait en fait que l'organisation va accepter plus ou moins bien à tel moment. il y a des endroits où on sera allé trop loin dans le transverse, donc deux ans après on va recorriger voilà pour moi il n'y a pas de recette miracle la transformation d'une organisation c'est une entité vivante, un coup on va faire beaucoup de transverse, on sera peut-être allé un peu trop loin, on va en faire un petit peu moins voilà donc c'est un juste arbitrage à conduire avec une composante sociologique, une composante humaine, qui me paraît au moins aussi importante que la composante technologique.

  • Speaker #1

    Ok, et j'ai un truc que j'ai du mal à saisir, mais c'est le plus parce que j'y suis pas moi dedans en continu. L'idée de transversalité, tu vois, aller dans des grands frameworks où en gros tout le monde, on casse la hiérarchie de tout, safe, etc. Toi, quand tu veux amener de la transversalité dans cette organisation, c'est plus facile d'expliquer. la direction, la vision, mais aussi donner un modèle. Et je vois de plus en plus un peu cet affrontement entre personnes qui vont installer le framework par themselves parce que ça crée un cadre structuré, il y a des référents, il y a des coachs, il y a des formations, il y a un livre qui explique ce que c'est. Et du coup, c'est un cadre rigide, mais ça reste un cadre, de personnes qui vont dire non, en fait, on va prendre des bonnes pratiques un peu partout, on va créer notre propre framework. Et donc du coup, quand j'imagine que les choses sont un peu compliquées en interne politique, où il y a besoin de créer ce côté un peu vers où on va commun, Comment toi tu te positionnes par rapport à cette question de, est-ce que pour pouvoir avoir un commun dans l'organisation, il faut qu'on se rattache à un framework qui est connu et qui est explicité par d'autres, ou est-ce que c'est plutôt de la co-construction, ou est-ce que c'est un entre-deux ?

  • Speaker #0

    Pour moi ça va être un peu un entre-deux, qui va dépendre beaucoup de la taille de la structure et aussi de la taille du projet. C'est sûr que quand on vient de naître dans une structure comme le ministère des armées, qui est habitué à faire des gros projets, il y a beaucoup de méthodes en V, qui sont inspirées principalement des méthodes pour construire des porte-avions, des bateaux, des chars, des avions. Quand on transfère ça sur du numérique, ça ne marche pas forcément très bien.

  • Speaker #1

    en même temps tu vois je suis content qu'on ne fabrique pas tu vois des armes en mode super agile il y a ce côté itératif des fois mais quand on rentre dans le monde de l'IT typiquement

  • Speaker #0

    quand on fabrique un satellite de télécommunication Il y a une partie qui va être le hard, qui va être le... Par contre, il y a une partie système qui va être beaucoup plus évolutive et on commence à rentrer sur des modes de conduite extrêmement complexes où il faudrait mettre davantage d'agilité sur la partie de logiciel par rapport à la partie hard. Et c'est à partir de ce genre de projet... que l'on touche du doigt un petit peu la complexivité, la rencontre du monde agile, pur et dur, qui vient du monde de l'informatique, du système d'information, par rapport au mode projet plus classique, qui vient des projets un peu industriels classiques. L'autre chose qui était aussi à prendre en compte, c'est que dans les années 90-2000, dans toutes les grandes organisations, on a utilisé le projet informatique comme moyen de rationalisation des organisations. On a utilisé le projet de l'informatique comme étant aussi un moyen de faire travailler les gens ensemble en disant plus vous globaliserez vos besoins, plus vous mettrez assez d'informations en gros, mieux ça marchera Et tout ça, ça a généré des échecs importants dont le ministère des Armées, comme d'autres, a subi les foudres. Typiquement le projet Louvois. Le projet Louvois, c'est un projet qui est... une complexité extrêmement importante puisque c'était payer tous les militaires de l'ensemble du ministère de la même façon, alors que les règles de paiement étaient différentes. Donc c'est un projet qui a été lancé alors que les règles n'ont pas été faites. Donc c'était l'utilisation d'un projet informatique pour transformer le paiement d'un seul du ministère. Le problème d'un projet de cette taille-là, donc nous en plus, pour d'autres raisons, les gains ont été anticipés, ça a conduit à un projet, comme je l'appelle, un projet qui avait des indicateurs PASTECH, c'est-à-dire vers l'extérieur, pour assurer les autorités.

  • Speaker #1

    Indicateurs PASTECH.

  • Speaker #0

    Étaient tous rouges à l'intérieur, et puis à un moment, le truc a divergé. Quand le truc a divergé, tout le monde a regardé. a été un peu désarçonné. Puis quand on a un système qui diverge, ça fait des dégâts qui ont été quand même assez importants.

  • Speaker #1

    Donc ton point d'apport à ça, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est l'exemple même d'un grand, grand, grand système qui finalement était d'une complexité telle qu'elle n'était pas maîtrisable par les équipes de projet.

  • Speaker #1

    Mais du coup, parce que tu as dit plusieurs choses, juste pour être sûr de comprendre, tu dis, historiquement, le transverse a été introduit par les projets informatiques pour une rationalisation, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Non, le transverse répond à un besoin qui est lié, pour moi, avec le numérique. Mais d'un autre côté, dans les années 90, ou particulièrement dans l'État, dans les grandes entreprises, il y a eu un grand mouvement de rationalisation. L'idée, c'était de dire, c'est génial, l'informatique, c'est un coup de baguette magique, il suffit de faire un système d'information et on transforme, on va faire des gains énormes dans nos sociétés. Et ça, ça n'a pas marché.

  • Speaker #1

    ça n'a pas marché et ça donnait un certain nombre de grands échecs parce qu'on a voulu faire des systèmes beaucoup trop gros donc plus maîtrisables ok et du coup quand toi t'arrives dans une logique d'amener du transverse pour d'autres raisons ce tampon là où cette historique-là pèse sur le fait d'atteindre une des six groupes qui arrivent et qui veut essayer de rationaliser, qui met son nez partout ?

  • Speaker #0

    Non, moi je suis arrivé trois, quatre ans après, le retour d'expérience autour de... de cette mauvaise utilisation de l'informatique avait été en partie tirée. Moi, je suis arrivé plutôt dans le moment, donc c'était à partir de 2015, on a beaucoup parlé de transformation numérique. On a beaucoup parlé, on parlait beaucoup des laborats, des labs. des factories où on parlait beaucoup du fait que j'étais arrivé dans la période où le cloud était déjà relativement mature et tout ce qui était le développement sur le cloud, le développement rapide commençait à avoir un certain aura moi c'est à ce moment là où je suis arrivé et je suis arrivé avec deux missions bien particulières qui se retrouvent dans la délégation générale, direction générale au numérique qui sont d'un côté donner des outils de gouvernance dans la conduite des projets du ministère. Donc là, droit de veto, gouvernance, vérification des méthodes, vérification des équipes et ainsi de suite. Et de l'autre côté, orchestrer la transformation numérique du ministère, c'est-à-dire aider les différents DSI, aider les métiers à aller vers ces nouveaux modes numériques. en améliorant la façon de développer un système beaucoup plus rapidement. Donc, arriver à préconiser un certain nombre de méthodes de travail qui venaient plus du monde de l'innovation, et en allant jusqu'à la méthode SAFE pour les gros projets. Petit coupement, dans les trois jours, trois semaines, trois mois, trois jours pour émettre une idée, trois semaines pour faire un POC, trois mois pour faire un MVP. Donc essayer de retravailler alors que par une méthode classique, les projets devraient se compter plutôt en nombre de mois voire d'années. Donc un petit peu cette double mission. Et moi ce qui paraissait, et tout cela aussi, correspondait aussi à l'époque, au moment où on commençait à ouvrir, partager les données et à faire parler les données. Effectivement en ne pas en faisant parler les données, à créer de la valeur, à créer de la richesse, à créer du progrès. Ce qui n'était quand même pas tout à fait la chose qui existait dans les années 90-2000.

  • Speaker #1

    et donc du coup là tu viens de parler de SAFE tu l'as mis en place sur l'ensemble du périmètre, sur une partie

  • Speaker #0

    Non, on l'a testé sur une partie du périmètre. Le périmètre du ministère des Armées, c'est un truc qui est quand même assez monstrueux en termes de projet. Donc, on a... Et en tant que direction générale, moi j'étais responsable de la préconisation des nouvelles méthodes, donc on a fait plusieurs choses, on a mis en place un lab, donc là on utilisait du CEF rapide, un lab c'est-à-dire un petit peu comme faisait aussi la DINUM à l'époque sur l'entrepreneuriat d'État ou ainsi de suite. un porteur de projet, une entité porteuse de projet, venait, on lui fournissait un data scientiste, on lui fournissait un expert RSSI, on l'aidait très rapidement à faire un POC et un MVP en 3-4 mois. Donc on a mis en place une fabrique, qui était une fabrique pour montrer que ces nouvelles méthodes marchaient, que quand on avait un parti produit relativement simple et bien maîtrisé, on arrivait à faire des choses qui marchaient bien. en très peu de temps. Donc on a mis en place cette fabrique. De l'autre côté, on a mis en place des méthodes de travail sur l'innovation, justement pour aider à conceptualiser un POC, pour ensuite le faire monter vers du MVP. Et sur les projets un tout petit peu plus complexes, on a commencé à mettre en place... des précotisations pour former un certain nombre de gens à la méthode CEF. Et on a testé la méthode CEF sur différents projets, soit sur des projets qui étaient des projets métiers d'une DSI, donc sur des projets relativement bien maîtrisés, soit, on l'a testé aussi sur un projet extrêmement complexe, qui était la refonte du socle numérique du ministère des Armées. Et là, je vais peut-être me tromper, mais... Je pense qu'on avait plus d'une dizaine de trains safe qui roulaient en parallèle. Donc on a testé aussi sur un gros projet, ce qui a permis aussi d'en toucher les limites. Voilà, parce qu'il y a aussi les dogmatiques de la méthode safe, comme il y a les dogmatiques de la méthode en V. Il faut savoir avoir à faire affaire à un bon dosage. Et je pense que mettre en place une méthode type conduite agile demande une préparation importante de ceux qui font la maîtrise d'ouvrage. Parce que ce n'est pas la même mentalité, ce n'est pas le même état d'esprit. Dans la méthode CEF, ce que je retiens surtout, c'est que finalement, on met de côté la méthode telle qu'elle est, et finalement, la philosophie de ces méthodes agiles, c'est qu'on prend un problème particulièrement complexe. On regarde un peu, pour moi, c'est un peu des intégrales en mathématiques. On a un truc extrêmement complexe, on ne sait pas forcément bien le résoudre, on sait qu'on va se planter si on essaie de l'attaquer globalement. Donc du coup, on le coupe par petits morceaux, et chacun des petits morceaux est maîtrisable. ou maîtrisables, à condition que l'on confie à une équipe en qui on a confiance et qui est capable de prendre des décisions sur ces parties maîtrisables. Parce que si on confie et on découpe notre projet en 300 micro-projets maîtrisables et que ces 300 micro-projets sont soumis à la direction d'une salle de délégation à l'échelon d'exécution, ça ne marchera pas non plus, ça va diverger. donc je veux dire que la méthode CEF ça accompagne un changement culturel beaucoup plus profond dans l'organisation et que ça ne s'applique pas c'est pas une baguette magique on va faire de l'agilité, ça va marcher il y a tous ceux qui disent on fait de l'agilité qui ne change pas culturellement leur mode de travail ça conduit à l'échec ça marche pas, donc c'est assez profond d'où un besoin d'acculturation, d'où un besoin d'accompagnement d'où ce qu'on avait commencé à mettre en place. Après, moi, je suis parti. Je suis quand même parti en 2020. J'avais maintenant plus de trois ans des coachs, des formations à cette méthode-là.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'en trois ans, parce que tu sais, le problème d'un DSI qui part tous les trois ans, c'est quand même la majorité aujourd'hui dans le marché. Ce qu'on voit, c'est qu'en gros, tu arrives à initier un changement parce que tu as quand même la confiance des gens qui t'ont recruté, etc., que c'est nécessaire. Mais c'est tellement dur au moment donné où ça commence à bouger que c'est le moment où il faut partir. Est-ce que c'est... Est-ce que tu valides ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je valide, je valide, je valide. De toute façon, c'est vrai, quand on fait de la transformation partout, quand on fait de la transformation, des moments où on est recruté, on vient, on est neuf, on va se dire, lui, il sera moins con que son prédécesseur, on va pouvoir faire quelque chose. Et au bout d'un moment, la réalité se rappelle à tous. Et si on fait faire des progrès pendant un temps, il y a un moment où l'organisation va peut-être avoir besoin d'une pause. Donc c'est pour ça que le DSI ou le DSI réformateur... Au bout de trois ans, il a peut-être bien avancé sa structure pendant deux ans. Soit on lui redonne un mandat de trois ans parce que du coup il s'installe dans la continuité, il a du temps devant lui, il n'est pas obligé d'aller au forcing, soit on ne lui donne pas de temps, du coup il va au forcing, donc il va au clash. Moi ce qui est intéressant dans mon expérience, c'est que j'ai fait deux grandes transformations du ministère des Armées. La première, c'est la création de la cyberdéfense. Je suis quasiment resté en poste pendant huit ans. Donc j'ai été en charge du projet pendant deux ans et je l'ai commandé pendant plus de six ans. et donc du coup j'ai été avec mon équipe donc on a bénéficié de ce recul du temps qui a permis d'y aller à un certain rythme Ensuite, comme DG NUM, je suis resté trois ans. La mise en place de la DG NUM la première année, j'ai été plébiscité par tout le monde, tout le monde était content. On a mis en place des tas de jeux de reglets. À partir de l'année suivante, quand on a commencé à exercer nos pouvoirs, j'ai commencé à constater quelques grincements de dents parce que c'était un peu un empêcheur de tourner en rond, parce qu'Intel voulait prendre la norme du small alors que le ministère avait choisi collégialement. de prendre une norme X, voilà, donc on commence à rentrer, et ça, ce n'était pas très gênant. En contre, c'est quand on a commencé à ouvrir la boîte de la conduite de projet. Et dans les boîtes de conduite de projet, en tant que directeur général, j'allais voir les projets qui allaient bien, mais j'allais surtout voir les projets qui n'allaient pas bien. Et là, quand on enlève les projets qui ne vont pas bien, on enlève des dysfonctionnements, on enlève des... des erreurs, on enlève des choses qui ne font pas très plaisir. Du coup, après, il fallait changer les organisations et changer les méthodes. Et là, c'était une deuxième phase de transformation. Et les transformations demandent du temps. Donc, il était bien que je parte au bout de trois ans, remplacé par quelqu'un qui avait une autre culture, une autre approche, une autre méthode, qui a continué le travail. Et je vois dans pas mal de structures, je ne vais pas citer les noms, mais deux autres DSI qui étaient particulièrement innovants, parce qu'on est un consommateur, il y en a un qui a été éjecté au bout de trois ans en profitant du fait qu'il soit malade, et quant à un autre qui a été remercié par sa direction parce que les métiers ont trouvé qu'il avait fait trop de transverses par rapport à leur verticalité. Voilà, donc un métier, je pense, dans une organisation, un directeur du numérique qui vient secouer l'organisation, effectivement, il y a un moment où il faut le changer.

  • Speaker #1

    et tu penses que le mec la personne qui suit à ce moment là continue ce que tu fais ou recasse tout parce qu'il considère qu'il doit se mettre en opposition pour créer une marque

  • Speaker #0

    Non, parce que la direction est bonne. Je pense qu'il y a besoin d'inflexion, parce qu'au bout d'un moment, quand on est en transformation, on a des combats, on fait aussi des erreurs. Donc, avoir quelqu'un qui vienne remplacer... Mais la direction générale ne va pas changer. La direction générale de Verreux, c'est plus d'agilité, c'est plus de traitement des données, c'est plus de partage. Il y a toutes ces grandes tendances. restent vraies et elles sont vraies dans tous les grands groupes. Après, qu'on fasse un petit peu moins de transverse, un petit peu plus de transverse, qu'on perde deux ans sur le déploiement de l'agilité parce que la structure n'est pas prête ou parce que là, il y a un directeur général d'une verticalité qui faut attendre qu'il part pour pouvoir avancer. Voilà, donc je pense que dans ces grands mouvements, on est sur un axe où on voit où il faut aller et puis après, c'est un art d'exécution.

  • Speaker #1

    ok et tu penses franchement parce qu'il y a quand même une question sur ce côté des 6 et 3 ans toi tu as initié un mouvement tu as vraiment initié un mouvement de transformation à ce moment là tu changes des pratiques etc parce que j'imagine que tu sais un peu encore ce qui s'y passe etc de manière globale est-ce que du coup ils sont quand même allés dans la même direction et ils y sont allés pas exactement comme tu pensais qu'il faudrait mais c'est continu

  • Speaker #0

    Non, non, non. Ce que j'ai lancé avant de partir, qui était la création de 17 DSI métiers du ministère des Armées, le projet a été entériné par le ministre six mois après mon départ et est devenu opératoire. La création de l'agence numérique de défense, elle a été créée. Après, qu'elle ait réussi ou pas réussi à trouver sa place, c'est un autre sujet. Mais ces choses-là, globalement... ce qui a été mis sur les rails à continuer à évoluer. La question, est-ce qu'il aurait mieux fallu me laisser 5 ans, 6 ans ou ne pas me changer ? Je pense que dans un DSI, il faut lui redonner un vrai mandat. Moi, quand j'ai transformé cette partie-là, j'ai créé la direction gérante numérique. Ça m'a pris deux ans, six mois, un an pour la créer. Et puis un an et demi pour la mettre sur les rails, à peu près pour qu'elle fonctionne bien, qu'elle soit bien acceptée. Ça, pas de souci, ça a marché, ça rentrait bien dans mon périmètre où j'avais trois ans de vie. Après, quand on m'a demandé d'attaquer la conduite des projets, la question que j'ai posée au cabinet, c'est vous me donnez combien de temps ? Et là, la réponse a été extrêmement floue. Et donc, du coup, parce que cette réforme, ça conduit des projets, c'est vraiment du dur. C'est du dur.

  • Speaker #1

    Ah oui.

  • Speaker #0

    Et puis là, j'ai pu lancer. Là, du coup, je me suis contenté de lancer les premiers inputs parce que je savais très bien que ça ne servait à rien d'aller plus loin parce que je savais très bien qu'à l'été 2020, je partais et que je ne saurais pas prolonger, que mon équipe serait aussi un petit peu défaite. Donc, la particularité, si vous voulez, nous, militaires, c'est que on est comme les pots de yaourt on a une date de fin de vie sur nos contrats donc on sait très bien que 59 ans on est dehors après la pastèque le pot de yaourt on est très dans la nourriture aujourd'hui très dans la nourriture, énorme il n'y a pas de surprise c'est différent d'un DSI du monde privé qui peut être débarqué du jour au lendemain donc nous on ne débarque pas trop c'est pas tellement notre culture mais on sait que les gens vont disparaître à telle date parce que c'est leur limite d'âge Voilà, donc les relations sont peut-être un tout petit peu plus différentes. Mais je pense que la transformation numérique a été un mouvement qui est intéressant parce que ça met en route une dynamique. Je pense que ça a deux points difficiles, c'est que ça met en place un tempo qui est très rapide. Et puis deuxièmement, c'est le point le plus, je pense, le plus compliqué, le plus délicat et qui est vraiment la ligne de conduite et la ligne directrice de toutes ces transformations, c'est les compétences et les ressources humaines.

  • Speaker #1

    Et ça par rapport à la partie RH interne, c'était quoi le lien ?

  • Speaker #0

    En tant que directeur général du numérique, j'étais ce qu'on appelle en jargon pilote des métiers numériques. Donc j'étais comptable du suivi de ces métiers, du suivi de la situation, de la formation et de l'état des lieux, de l'évolution du nombre d'agents, des difficultés de recrutement, des difficultés de formation, des affectations. Voilà, donc de la... de la radioscopie annuelle en permanent de l'état des lieux de la ressource humaine numérique du ministère des armées. Et je pense que dans la transformation du ministère qu'on a conduite, c'est l'élément le plus structurant. Parce que ce n'est pas la peine de rêver de super DSI si on n'a pas les bonhommes. Et derrière, ça veut dire que ça... et moins on a de personnes. malheureusement, s'il faut externaliser, plus il faut garder des personnes de haut niveau capables de faire de la maîtrise d'ouvrage. Donc des métiers d'architectes, d'entreprises sont des métiers très en tension. Je passe bien sûr sur toutes les data scientists, les gens qui vont parler de data, ou encore tous les gens qui sont les experts de la cyber. Mais c'est vraiment ce côté... Ce côté manque de ressources humaines quantitatif et qualitatif, qui impose dans différents endroits aussi qu'on rassemble les experts au bon endroit. Typiquement, quand on a créé l'agence numérique de défense, c'était de se dire, il faut mettre dans cette agence les meilleures culottes de conduite de produits, les meilleurs architectes, pour ne pas les avoir disséminés dans tous les services, je les mets là. et cette agence va devoir conduire les 50 principaux programmes de système d'information du ministère des armées, ceux qui sont les plus structurants, ceux que moi en tant que dégénume je suivais dans une liste, et après on rendait compte à l'interministériel ou directement au ministre de l'avancement de ces projets. voilà, arriver à concentrer la ressource humaine parce qu'elle est rare.

  • Speaker #1

    Et du coup, par rapport à la ressource humaine, donc du coup, il y a une question de compétence dans l'IT, etc. Première question, est-ce que tu pouvais recruter un intern, c'était la Presta. Et deuxièmement, est-ce qu'il y avait une problématique aussi de RH liée… aux autres métiers où en gros tu as eu du mal parce que bon on sait que l'agilité c'est quand même être proche du tuteur finot etc et donc du coup un changement un peu global au niveau de l'organisation qui dépasse la DSI est-ce que c'était aussi un point de difficulté ou au contraire il y a eu plutôt un mouvement en interne comme quoi c'est ça qu'il fallait faire et du coup c'était plutôt moteur ?

  • Speaker #0

    Non, sur les bilans RH, non. Il y avait une assez bonne mobilisation, notamment de la direction des ressources humaines, du ministère, avec qui on a créé une académie du numérique. Donc, par contre, la ressource est rare. On avait aussi revalorisé énormément les salaires des contractuels pour arriver à les hitter au même niveau que les salaires équivalents du privé. Après, les corps des fonctionnaires, c'est une autre problématique. Mais non, il y avait là, autant sur la conduite de projet, c'était des choses qu'on tapait dans le dur, avec des oppositions fortes, par mauvaise compréhension, autant sur le besoin de faire quelque chose sur les RH, autant sur le besoin de mobiliser l'ensemble des acteurs du ministère des Armées pour trouver des solutions innovantes. sur les ressources humaines, sur le recrutement, toutes spécialités IT confondues. Oui, il y a eu un mouvement, une vraie dynamique. Les armées, les directions des ressources humaines, les armées ont réinventé des partenariats en allant chercher des gens dans les écoles à partir de la classe de première. Il y a eu beaucoup d'initiatives. Vont-elles suffire à alimenter le... Très franchement, je pense que non. et qu'il va falloir là aussi dans la conduite de projet revoir un certain nombre de façons d'exploiter nos systèmes d'information. Je ne parle pas avec de l'externalisation telle qu'on pouvait mal la comprendre il y a quelques années, mais le recours à des partenaires, à des prestataires à qui on confie typiquement l'hébergement. Aujourd'hui, faire de l'hébergement cloud en code sévatif. Ok, sur certains nombres de données très sensibles au ministère des armées, sur un certain nombre de données de niveau sensible, je pense aux données des ressources humaines ou des choses dans ce genre là, le cloud peut être mis en commun avec les autres services de l'État ou peut être confié à des partenaires comme Tavis, OVH, j'ai un petit pote, Airbus, je ne peux pas en oublier Orange et compagnie. des gens qui sont absolument sous le cadre juridique français et avec du personnel qui est capable, comme on est capable d'habiliter avec les standards de la défense. Pour moi, ce n'est pas à des militaires en uniforme de faire de l'hébergement cloud sur des données RH du ministère. Voilà, donc c'est les militaires en uniforme du cycle, il est fait pour aller sur le tas d'opérations, il est fait pour aller combattre. Voilà, donc il y a un juste équilibre, il y a un juste équilibre à trouver.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tout ça, en fait, si tu dis que tu as créé plein de DSI, que tu es en relation avec le ministère, etc., est-ce qu'il y avait un sentiment d'équipe commune dans le mouvement que vous y avez créé et donc du coup, bon, des distinctions sur certains points, mais qui étaient à la marge ? Ou est-ce que le mouvement qui est en train de se mettre en place, il n'y avait pas encore tout le monde dans la direction IT globalement qui était embarqué ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la première année et demie où je suis arrivé, il y avait une bonne convergence, il y avait une bonne équipe. Au sein de ma direction, j'avais une équipe extrêmement soudée. Ça nous a permis de se mettre d'accord, de travailler très vite et de faire des propositions très rapidement. Avec ALEUR, une équipe était 50% civile, militaire, et on devait avoir 30% de taux de féminisation. Et notamment, j'avais une chief digital officer qui arrivait du groupe Vinci, qui avait une culture civile totalement. Voilà, donc ça c'était une partie un peu qui était une locomotive.

  • Speaker #1

    C'est un temps d'équipe.

  • Speaker #0

    C'est un temps d'équipe. Et avec le reste des autres entités qui gouvernaient les systèmes d'information du ministère, c'était un petit peu géométrie variable. Je dirais que sur 80% des suivis, il y avait consensus, on travaillait bien ensemble. Il y avait quelques sujets qui étaient proxogènes pour certaines entités, qui fait qu'il y avait un refus de prendre des risques. alors que l'on voit que la ressource humaine va manquer, donc les décisions qu'on tarde trop à prendre, on va les prendre dans l'urgence, alors qu'il valait mieux les prendre quelques années, mais ça veut dire qu'il faut accepter de prendre des décisions un peu audacieuses.

  • Speaker #1

    Et en fait, quand tu parles de décisions audacieuses, de courage, est-ce que tu le mets, ça incite à des trucs et tout, mais est-ce que tu le mets plutôt sur le compte de… La peur, la peur de ne pas gérer, d'être mis en question de soi, ou le fait de ne pas croire dans la nécessité de changer, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Ne pas croire dans la nécessité de changer, le fait que dans deux ans on sera parti, donc finalement ça ne marche pas si mal. Et puis je pense que là aussi... Quand on est à la tête d'une entité, d'une DSI, et qu'on travaille énormément pour faire marcher son truc, on n'est pas capable de regarder au-delà de six mois. On est dans la cage du hamster, on galope, on galope, on galope, on galope, mais on ne voit pas que du coup il y a le mur qui est devant nous. Voilà, mais que du coup, quand on vous dit, ton mur il va arriver, maintenant tu es reçu au VN, regarde, tu perds 8% de personnel depuis 5 ans, c'est systémique, on ne va pas arriver avec les données, donc il faut que tu te fasses une organisation. Et ce côté-là, je ne sais pas moi, mon successeur, il y a un peu ça, parce que c'est très compliqué quand même de réformer, de transformer, de prendre des décisions douloureuses, audacieuses, quand pareil, le magasin ne ferme pas et qu'il faut continuer à délivrer. et que pour continuer à délivrer, les mecs triment comme les troupes triment. Voilà, donc c'est pour ça que c'est le rôle du directeur général, le rôle c'est d'être à la fois l'aiguillon et le cété, pour forcer à aller, tout en étant bien conscient qu'il ne faut pas aller trop loin non plus pour ne pas casser la machine. Donc c'est pour ça que c'est cette espèce d'image de l'élastique, le tirer jusqu'à certains points et pas le faire rentrer.

  • Speaker #1

    ok et aujourd'hui quand toi t'as eu ce côté un peu challenge entre une autre direction, etc. Tu n'as pas voulu, tu n'as pas réussi, ça ne pouvait pas se faire, avoir pas une question d'arbitrage, mais un soutien un peu plus global des autres parties prenantes, de la direction générale, ou quelque chose comme ça ?

  • Speaker #0

    Ah non, je n'ai pas cherché, j'avais un soutien extrêmement fort du ministre et de son cabinet. C'est pour ça que les décisions ont été prises malgré les freins d'un certain nombre d'entités. Voilà, mais si tu veux, c'est plus dans la discussion de tous les jours, dans le rapport de discussion de tous les jours de conviction que j'ai eu des freins. Pour les décisions de haut niveau proposées au Bidist, ce que j'ai proposé a toujours été accepté. Mais là aussi, une décision qui tombe comme un truc assez formel, si elle n'a pas été discutée, acceptée avant, ce n'est pas très bon non plus parce que les gens n'y adhèrent pas.

  • Speaker #1

    Ok, c'est intéressant. Et dans ce côté un peu, tu sais... un peu primaire qu'on peut avoir de guéguerre, ce genre de choses qui peuvent arriver dans les sociétés. Toi, tu n'es pas allé sur une posture de attendez, il faut changer cette personne-là ou changer ce type d'entité-là parce que là-dessus, tu n'as pas voulu aller dans ce registre-là ?

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas la mentalité du ministère des Armées. D'abord, les militaires restent en potes que deux, trois ans, c'est peu. Ils tournent beaucoup. Non, ce n'est pas tellement la… C'est pas la culture. Non, c'est pas la culture. Ça peut arriver, bien sûr, mais il faut vraiment... Il y a une faute. il faudra vraiment qu'il y ait une faute, un accumulement de choses, avoir une opinion qui diverge. Parce que les positions, ça, d'un côté, vous avez la direction générale numérique, qui va pousser vers le transvers, vers la vision du ministre, vers des choses, vers un bien commun transverse, alors que de l'autre côté, les gens qui ne veulent pas y aller, ils vont avoir plutôt une tendance à privilégier leur propre structure dans la satisfaction de leur chef.

  • Speaker #1

    c'est arrivé à considérer deux écoute merci Arnaud c'était super intéressant on a fait un bon tour je pense c'est passionnant de découvrir les dangers de transfo du numérique des ministères des armées c'est pas commun comme tu le dis une des organisations les plus complexes que je pense que j'ai rencontré merci encore d'avoir partagé ton parcours de la marine en plus avec les coulisses de la première création de la direction générale du numérique du ministère des armées donc c'est top et en plus sans l'aide de bois donc c'était vraiment génial

  • Speaker #0

    Oui, surtout aussi, merci à toi, parce que c'est toujours un exercice intéressant de condenser et de sortir quelques grands enseignements d'années de travail, d'années d'investissement. Ce que je retiens, c'est effectivement que c'était un moment passionnant. Cette troisième transformation, je n'ai pas eu assez de temps pour convaincre, pour arriver à doser les bonnes doses de transversalité et de verticalité. C'était pour moi ma troisième grande transformation dans le ministère, après celle que j'avais conduite. pour la création de la cyber défense, mais dans lequel j'avais eu quasiment 9 ans pour déployer toute cette transformation. Et d'ailleurs, c'est ce que je raconte dans le livre que je viens de sortir qui s'appelle Soldats de la cyber guerre Mais toutes ces choses-là restent avant tout quelque chose d'extrêmement humain, des aventures humaines, des alignements, des forces de conviction. Voilà, donc merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'intervenir et de témoigner.

  • Speaker #1

    Merci encore pour ta participation et à bientôt. Bon, j'espère que vous avez kiffé ce podcast. Comme toujours, n'hésitez pas à le partager sur LinkedIn, à le partager à vos collègues chefs de projet IT, DSI. Ça nous aide toujours à trouver de nouveaux et des DSI toujours plus intéressants. Et écoutez, ciao !

Description

🪖 Vis ma vie de chef d'orchestre de la transformation numérique de la Défense française


Bienvenue dans l'épisode 88 de CIO Révolution by AirSaas. Un numéro inédit au cours duquel nous avons reçu Arnaud Coustillière un vice-amiral d’escadre !

   

Après avoir commandé plusieurs navires de combat il a contribué à la création de la cyberdéfense du ministère des Armées dont il a été le premier COMCYBER (Le commandement de la cyberdéfense) de 2011 à 2017. Il préside aujourd’hui le Pôle d’excellence Cyber. 

Il avait au préalable été DSI de la marine nationale 2006/2008, Il avait ensuite créé et mis en place la Direction générale du numérique du ministère des Armées (DGNUM) entre 2017 et 2020.
Il vient de publier "Soldat de la cyberguerre Un pionnier raconte la cyberdéfense française aux éditions Tallandier.


Avec lui on s’est intéressé à la conduite de projets et des hommes au sein d’une organisation aussi complexe que l’armée !  Il a par exemple mis en place jusqu’à 10 trains SAFe. On s’est demandé comment on structure, comment on transforme, comment on amène une “juste dose” de transversalité…ce sont quelques unes des questions abordées dans cet épisode qui vous fera découvrir les coulisses des armées le tout sans langue de bois !


TIMELINE


  • 01:36 : Présentations du parcours d’Arnaud

  • 05:04 : L’émergence d”une DSI transverse “groupe”, pour urbaniser et répartir entre le commun et le sectoriel 

  • 10:06 : L’image de l’élastique :  entre le DSI groupe qui tire le plus possible vers le transverse vs le DSI métier qui veut garder le plus de choses “ à sa main.”  “une affaire d’hommes”.

  • 11:48 La transversalité dans les organisations : entre framework rigide et hybridations de bonnes pratiques

  • 14:26 : les grands projets avec leurs “indicateurs pastèques” AKA. Les grands échecs informatiques : l’exemple du projet Louvoie

  • 18:24 : Les missions de DG Num au ministère de la défense : donner des outils de gouvernance  (droit de véto, vérification méthodes..) et orchestrer la transfo des SIC (systèmes d’information et de communication), 

  • 20:00 : L’implémentation et les limites de SAFE  au ministère des armées : mise en place d’un LAB, de nouvelles méthodes de travail sur l’innovation et test SAFe sur des grands projets.

  • 24:20 Regard sur « les trois ans du DSI » et les “lois” de la transformation REX sur deux  transfos une de huit ans avec la création de la cyberdéfense et une de trois ans en tant que DGNUM.

  • 31:28 Les deux points difficiles de la  transfo num : Timing et ressources humaines !

  • 39:02 : Regard sur l’audace  et le courage managérial …La roue du hamster pour continuer à délivrer  vs le courage des réformes de  long terme !

  • 41:59  Spécificités de la culture managériale au sein du ministère des armées.L’art de concilier le besoin de bien commun transverse et l’immobilisme structurel dans les orgas.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Et c'est comme le ministère des armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un. Et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, à un instant T.

  • Speaker #1

    Je m'appelle Bertrand Ruiz et bienvenue sur le podcast CIO Révolution. Si vous êtes curieux de connaître les enjeux organisationnels, les solutions pragmatiques et les réflexions sur la transformation des entreprises, vous êtes au bon endroit. Ici, pas de langue de bois, que du concret. Mais avant de commencer, je me présente. Je suis le CEO d'Ersas, une solution web qui permet à la DSI et à la Direction Générale de partager une vue claire des projets en cours, des décisions à prendre et des priorisations à faire. Vous manquez de temps ? Ersas vous aide à vous focaliser sur l'urgent et l'important. Le besoin de reporting est de plus en plus fort. Ersas génère votre rapport flash décisionnel en un coup. S'il y a un historique fort entre les métiers, Ersas va vraiment vous aider à collaborer de manière efficace. Sur ce, je vous laisse avec ce nouvel épisode à découvrir une nouvelle façon de faire. Bonne écoute ! bonjour à tous je suis ravi aujourd'hui d'être avec Arnaud Coustillard qui est attention c'est la première fois qu'on a quelqu'un de ce secteur là vice-amiral d'escadre ancien directeur général du numérique du ministère des armées et ancien commandant de la cyber défense des armées ça fait long mais c'est tout ce que t'as été Arnaud et je suis ravi que tu sois là salut

  • Speaker #0

    Oui, bonjour, je suis ravi aussi de partager mon expérience avec vous. J'ai passé une quarantaine d'années au ministère des Armées, une vingtaine dans les opérations aéromaritimes, et je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Je ne suis pas un DSI technique, je suis un DSI qui vient du cœur du métier. Et après, j'ai passé à peu près aussi une vingtaine d'années à la transformation numérique du ministère des Armées, en ayant graphié différents échelons. et en ayant eu la chance de créer la cyberdéfense des armées à action défensive et offensive, et de la commander pendant plus de six ans d'opération, et de terminer ma carrière comme directeur en créant la direction générale numérique du ministère des armées, avec toutes les problématiques de gouvernance de la donnée, d'ouverture de la donnée, de méthodologie de conduite des projets informatiques. et de tout ce qui tourne autour de l'agilité, le partage des données, tout ce qui est la transformation numérique et le lot de tous les DSI des grands groupes.

  • Speaker #1

    Ok, et donc du coup, en termes un petit peu de date et de nombre pour qu'on se situe, ça représente, de quelle année à quelle année, ça représentait combien de personnes dans tes services ?

  • Speaker #0

    Pour ne pas me concentrer que sur la partie finale, en 2006-2008, j'ai été DSI de la Marine Nationale, donc une grosse DSI, plutôt une DSI bulle qui devait faire une cinquantaine de personnes avec une population haïtienne qui devait tourner autour de 500 personnes en différents services qui étaient sous ma tutelle. Ensuite, la création des capacités cyber désarmées de 2011 à 2017. Là, une centaine de personnes au départ au sein de l'ensemble du ministère. Et quand j'ai quitté, on devait être à hauteur de 1500. Et je disposais d'un...

  • Speaker #1

    Tu passais de combien à combien, tu as dit là ?

  • Speaker #0

    Une centaine. Et quand j'ai quitté, on devait être aux alentours de 1500 en 2017. Et j'avais un état-major qui était passé de 3 personnes en 2011 à 70 personnes en 2018. Et ensuite, la Direction Générale du Numérique que j'ai créée était une entité qui, avec ses satellites, faisait une petite centaine de personnes. C'était une DSI groupe rattachée au COMEX, rattachée directement au cabinet ministre, et qui était censée avoir une autorité sur l'ensemble des entités, des différents DSI subordonnés du ministère, qui sont à peu près au nombre d'une petite vingtaine. Et le ministère des armées, c'était à peu près 20 000 spécialistes des systèmes d'information et informaticiens, plus de 3 000 systèmes d'information, sans compter l'informatique embarquée dans les systèmes d'armes, dans les infrastructures industrielles, à différents endroits, plusieurs centaines de métiers. en gros un budget d'investissement de l'ordre de 2 milliards d'euros par an sans compter les ressources humaines et les masses salariales.

  • Speaker #1

    Ok, et du coup, toi, ta mission dans tout ça, c'était, tu dis, la création. Ça veut dire quoi créer le département numérique dans ce cadre-là ?

  • Speaker #0

    Créer, si tu veux... Dans la longue maturation de la montée vers le numérique, on est parti, quand on revient dans les années 80, on était dans le domaine des télécoms, qui est à monter progressivement vers le domaine de l'informatique et monter progressivement vers le domaine du numérique pour accompagner cette transversalité importante autour des données et ainsi de suite. il a fallu que les directions informatiques des métiers et des gouvernances transverses, il a fallu concilier de plus en plus tout ce qui était le transverse, le commun, par rapport à ce qu'était le sectoriel. Typiquement, le réseau informatique d'usage général de la marine, de l'armée de l'air ou de l'armée de terre, il n'y avait aucune des raisons que ce soit des réseaux différents. D'où le fait que derrière, il y ait besoin de... d'urbaniser tout ça, il y a besoin de faire les mêmes choix techniques, et du coup finalement d'avoir une unique DSI run conduisant ce réseau. Donc cette espèce de grand mouvement pour moi lancé dans les années 80, qui est de faire en sorte que la DSI devienne de plus en plus transverse, et que les choses dans les socles réseau soient de plus en plus communs, et quelque chose qui a été aussi très fort au sein du ministère des armées, D'où l'apparition d'entités transverses, à la fois d'une DSI RUN, qui s'appelait la Direction Interarmée des Systèmes d'Information et des Systèmes d'Information. qui fournissait l'ensemble des systèmes communs à l'ensemble des ressortissants du ministère, toute armée, services civils inclus, et de l'autre côté, pour gouverner tout ça, une entité politique, très pro-entité politique, Haïti, qui est proche du cabinet du ministre. Et à un moment donné, puisqu'il fallait ouvrir davantage les données, parce qu'il fallait... mieux conduire les projets. Le ministère des Armées a senti le besoin de donner davantage d'attributs de gouvernance à cette entité et transformer cette direction générale des systèmes d'information en entité politique, en une vraie DSI groupe ayant un certain nombre de pouvoirs d'arbitrage, un certain nombre de responsabilités converses. et un certain nombre de droits de veto, notamment sur la conduite des programmes. Donc c'est ça que j'ai été amené à faire, c'est de transformer une direction IT très politique, qui découlait les normes qu'il faut faire, qui faisait des beaux papiers, très intéressants, mais qui n'étaient pas appliqués, en une direction plus opérationnelle, et exerçant une réelle autorité sur l'ensemble des différentes DSI. du ministère, quand on prend une organisation de la taille du ministère des armées, je pense que l'on est l'organisation la plus complexe en Europe.

  • Speaker #1

    La plus complexe, c'est clair.

  • Speaker #0

    Pas tellement du fait du nombre de postes de travail, mais surtout de l'hétérogénéité des systèmes, des contextes d'emploi et des métiers.

  • Speaker #1

    Ok, donc c'est plutôt le fait que ça soit vraiment tellement disparate en interne que faire en sorte que tout le monde arrive à travailler ensemble, à créer un cadre commun a été le point clé, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait. C'est la partie passée. C'est un peu la problématique que tous les grands DSI ont dans les organismes où il y a des cultures d'entreprise assez fortes. Moi j'ai beaucoup travaillé à l'époque avec EDF, avec la SNCF ou encore avec le Crédit Agricole. qui ont des cultures d'entreprise extrêmement fortes autour de métiers très structurés. Et c'est comme le ministère des Armées, que l'armée de terre a un métier, la marine a un métier, l'armée de l'air a un métier, le service de santé en a un, et toute l'organisation est très structurée autour de ce métier. Donc dans ces approches assez verticales, très métiers, il faut aller mettre du transverse. Il faut mettre la juste dose de transverse que l'organisation est capable de tolérer à un moment, un instanté.

  • Speaker #1

    Tu dis la juste dose de transverse que l'organisation à un instant T est capable de tolérer. C'est-à-dire qu'en gros, tu dis, si je résume et que je comprends bien, une organisation, elle, par défaut, historiquement, elle est silotée. On a envie que tout le monde travaille ensemble, mais en fait, on n'est pas capable d'aller plus vite que la musique non plus. Donc, il faut jauger quelles sont les bonnes tactiques qui vont petit à petit amener. dirons si on est 100% transverse ça a amené pourcentage après pourcentage à amener une meilleure collaboration transverse sans aller trop vite parce que sinon ça pète et sans aller trop lentement non plus parce que sinon on n'avance pas

  • Speaker #0

    Oui, c'est tout à fait ça. J'aime bien l'image de l'élastique. Le DSI groupe doit tirer sur l'élastique le plus possible parce que lui, il pousse vers le transverse, alors que le DSI métier va essayer de garder un ensemble de choses à sa main parce qu'il en a besoin pour sa mission. Donc c'est un juste équilibre qui est une action de transformation, qui n'est pas une action technique, c'est une action de transformation dans laquelle il a besoin à la fois de convaincre. mais aussi il a besoin de se montrer de temps en temps un peu plus coercitif, et c'est in fine une affaire d'hommes, parce que faire bouger une organisation, ça va être des relations interpersonnelles, des histoires, et cet élément très humain, fait en fait que l'organisation va accepter plus ou moins bien à tel moment. il y a des endroits où on sera allé trop loin dans le transverse, donc deux ans après on va recorriger voilà pour moi il n'y a pas de recette miracle la transformation d'une organisation c'est une entité vivante, un coup on va faire beaucoup de transverse, on sera peut-être allé un peu trop loin, on va en faire un petit peu moins voilà donc c'est un juste arbitrage à conduire avec une composante sociologique, une composante humaine, qui me paraît au moins aussi importante que la composante technologique.

  • Speaker #1

    Ok, et j'ai un truc que j'ai du mal à saisir, mais c'est le plus parce que j'y suis pas moi dedans en continu. L'idée de transversalité, tu vois, aller dans des grands frameworks où en gros tout le monde, on casse la hiérarchie de tout, safe, etc. Toi, quand tu veux amener de la transversalité dans cette organisation, c'est plus facile d'expliquer. la direction, la vision, mais aussi donner un modèle. Et je vois de plus en plus un peu cet affrontement entre personnes qui vont installer le framework par themselves parce que ça crée un cadre structuré, il y a des référents, il y a des coachs, il y a des formations, il y a un livre qui explique ce que c'est. Et du coup, c'est un cadre rigide, mais ça reste un cadre, de personnes qui vont dire non, en fait, on va prendre des bonnes pratiques un peu partout, on va créer notre propre framework. Et donc du coup, quand j'imagine que les choses sont un peu compliquées en interne politique, où il y a besoin de créer ce côté un peu vers où on va commun, Comment toi tu te positionnes par rapport à cette question de, est-ce que pour pouvoir avoir un commun dans l'organisation, il faut qu'on se rattache à un framework qui est connu et qui est explicité par d'autres, ou est-ce que c'est plutôt de la co-construction, ou est-ce que c'est un entre-deux ?

  • Speaker #0

    Pour moi ça va être un peu un entre-deux, qui va dépendre beaucoup de la taille de la structure et aussi de la taille du projet. C'est sûr que quand on vient de naître dans une structure comme le ministère des armées, qui est habitué à faire des gros projets, il y a beaucoup de méthodes en V, qui sont inspirées principalement des méthodes pour construire des porte-avions, des bateaux, des chars, des avions. Quand on transfère ça sur du numérique, ça ne marche pas forcément très bien.

  • Speaker #1

    en même temps tu vois je suis content qu'on ne fabrique pas tu vois des armes en mode super agile il y a ce côté itératif des fois mais quand on rentre dans le monde de l'IT typiquement

  • Speaker #0

    quand on fabrique un satellite de télécommunication Il y a une partie qui va être le hard, qui va être le... Par contre, il y a une partie système qui va être beaucoup plus évolutive et on commence à rentrer sur des modes de conduite extrêmement complexes où il faudrait mettre davantage d'agilité sur la partie de logiciel par rapport à la partie hard. Et c'est à partir de ce genre de projet... que l'on touche du doigt un petit peu la complexivité, la rencontre du monde agile, pur et dur, qui vient du monde de l'informatique, du système d'information, par rapport au mode projet plus classique, qui vient des projets un peu industriels classiques. L'autre chose qui était aussi à prendre en compte, c'est que dans les années 90-2000, dans toutes les grandes organisations, on a utilisé le projet informatique comme moyen de rationalisation des organisations. On a utilisé le projet de l'informatique comme étant aussi un moyen de faire travailler les gens ensemble en disant plus vous globaliserez vos besoins, plus vous mettrez assez d'informations en gros, mieux ça marchera Et tout ça, ça a généré des échecs importants dont le ministère des Armées, comme d'autres, a subi les foudres. Typiquement le projet Louvois. Le projet Louvois, c'est un projet qui est... une complexité extrêmement importante puisque c'était payer tous les militaires de l'ensemble du ministère de la même façon, alors que les règles de paiement étaient différentes. Donc c'est un projet qui a été lancé alors que les règles n'ont pas été faites. Donc c'était l'utilisation d'un projet informatique pour transformer le paiement d'un seul du ministère. Le problème d'un projet de cette taille-là, donc nous en plus, pour d'autres raisons, les gains ont été anticipés, ça a conduit à un projet, comme je l'appelle, un projet qui avait des indicateurs PASTECH, c'est-à-dire vers l'extérieur, pour assurer les autorités.

  • Speaker #1

    Indicateurs PASTECH.

  • Speaker #0

    Étaient tous rouges à l'intérieur, et puis à un moment, le truc a divergé. Quand le truc a divergé, tout le monde a regardé. a été un peu désarçonné. Puis quand on a un système qui diverge, ça fait des dégâts qui ont été quand même assez importants.

  • Speaker #1

    Donc ton point d'apport à ça, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est l'exemple même d'un grand, grand, grand système qui finalement était d'une complexité telle qu'elle n'était pas maîtrisable par les équipes de projet.

  • Speaker #1

    Mais du coup, parce que tu as dit plusieurs choses, juste pour être sûr de comprendre, tu dis, historiquement, le transverse a été introduit par les projets informatiques pour une rationalisation, c'est ça ?

  • Speaker #0

    Non, le transverse répond à un besoin qui est lié, pour moi, avec le numérique. Mais d'un autre côté, dans les années 90, ou particulièrement dans l'État, dans les grandes entreprises, il y a eu un grand mouvement de rationalisation. L'idée, c'était de dire, c'est génial, l'informatique, c'est un coup de baguette magique, il suffit de faire un système d'information et on transforme, on va faire des gains énormes dans nos sociétés. Et ça, ça n'a pas marché.

  • Speaker #1

    ça n'a pas marché et ça donnait un certain nombre de grands échecs parce qu'on a voulu faire des systèmes beaucoup trop gros donc plus maîtrisables ok et du coup quand toi t'arrives dans une logique d'amener du transverse pour d'autres raisons ce tampon là où cette historique-là pèse sur le fait d'atteindre une des six groupes qui arrivent et qui veut essayer de rationaliser, qui met son nez partout ?

  • Speaker #0

    Non, moi je suis arrivé trois, quatre ans après, le retour d'expérience autour de... de cette mauvaise utilisation de l'informatique avait été en partie tirée. Moi, je suis arrivé plutôt dans le moment, donc c'était à partir de 2015, on a beaucoup parlé de transformation numérique. On a beaucoup parlé, on parlait beaucoup des laborats, des labs. des factories où on parlait beaucoup du fait que j'étais arrivé dans la période où le cloud était déjà relativement mature et tout ce qui était le développement sur le cloud, le développement rapide commençait à avoir un certain aura moi c'est à ce moment là où je suis arrivé et je suis arrivé avec deux missions bien particulières qui se retrouvent dans la délégation générale, direction générale au numérique qui sont d'un côté donner des outils de gouvernance dans la conduite des projets du ministère. Donc là, droit de veto, gouvernance, vérification des méthodes, vérification des équipes et ainsi de suite. Et de l'autre côté, orchestrer la transformation numérique du ministère, c'est-à-dire aider les différents DSI, aider les métiers à aller vers ces nouveaux modes numériques. en améliorant la façon de développer un système beaucoup plus rapidement. Donc, arriver à préconiser un certain nombre de méthodes de travail qui venaient plus du monde de l'innovation, et en allant jusqu'à la méthode SAFE pour les gros projets. Petit coupement, dans les trois jours, trois semaines, trois mois, trois jours pour émettre une idée, trois semaines pour faire un POC, trois mois pour faire un MVP. Donc essayer de retravailler alors que par une méthode classique, les projets devraient se compter plutôt en nombre de mois voire d'années. Donc un petit peu cette double mission. Et moi ce qui paraissait, et tout cela aussi, correspondait aussi à l'époque, au moment où on commençait à ouvrir, partager les données et à faire parler les données. Effectivement en ne pas en faisant parler les données, à créer de la valeur, à créer de la richesse, à créer du progrès. Ce qui n'était quand même pas tout à fait la chose qui existait dans les années 90-2000.

  • Speaker #1

    et donc du coup là tu viens de parler de SAFE tu l'as mis en place sur l'ensemble du périmètre, sur une partie

  • Speaker #0

    Non, on l'a testé sur une partie du périmètre. Le périmètre du ministère des Armées, c'est un truc qui est quand même assez monstrueux en termes de projet. Donc, on a... Et en tant que direction générale, moi j'étais responsable de la préconisation des nouvelles méthodes, donc on a fait plusieurs choses, on a mis en place un lab, donc là on utilisait du CEF rapide, un lab c'est-à-dire un petit peu comme faisait aussi la DINUM à l'époque sur l'entrepreneuriat d'État ou ainsi de suite. un porteur de projet, une entité porteuse de projet, venait, on lui fournissait un data scientiste, on lui fournissait un expert RSSI, on l'aidait très rapidement à faire un POC et un MVP en 3-4 mois. Donc on a mis en place une fabrique, qui était une fabrique pour montrer que ces nouvelles méthodes marchaient, que quand on avait un parti produit relativement simple et bien maîtrisé, on arrivait à faire des choses qui marchaient bien. en très peu de temps. Donc on a mis en place cette fabrique. De l'autre côté, on a mis en place des méthodes de travail sur l'innovation, justement pour aider à conceptualiser un POC, pour ensuite le faire monter vers du MVP. Et sur les projets un tout petit peu plus complexes, on a commencé à mettre en place... des précotisations pour former un certain nombre de gens à la méthode CEF. Et on a testé la méthode CEF sur différents projets, soit sur des projets qui étaient des projets métiers d'une DSI, donc sur des projets relativement bien maîtrisés, soit, on l'a testé aussi sur un projet extrêmement complexe, qui était la refonte du socle numérique du ministère des Armées. Et là, je vais peut-être me tromper, mais... Je pense qu'on avait plus d'une dizaine de trains safe qui roulaient en parallèle. Donc on a testé aussi sur un gros projet, ce qui a permis aussi d'en toucher les limites. Voilà, parce qu'il y a aussi les dogmatiques de la méthode safe, comme il y a les dogmatiques de la méthode en V. Il faut savoir avoir à faire affaire à un bon dosage. Et je pense que mettre en place une méthode type conduite agile demande une préparation importante de ceux qui font la maîtrise d'ouvrage. Parce que ce n'est pas la même mentalité, ce n'est pas le même état d'esprit. Dans la méthode CEF, ce que je retiens surtout, c'est que finalement, on met de côté la méthode telle qu'elle est, et finalement, la philosophie de ces méthodes agiles, c'est qu'on prend un problème particulièrement complexe. On regarde un peu, pour moi, c'est un peu des intégrales en mathématiques. On a un truc extrêmement complexe, on ne sait pas forcément bien le résoudre, on sait qu'on va se planter si on essaie de l'attaquer globalement. Donc du coup, on le coupe par petits morceaux, et chacun des petits morceaux est maîtrisable. ou maîtrisables, à condition que l'on confie à une équipe en qui on a confiance et qui est capable de prendre des décisions sur ces parties maîtrisables. Parce que si on confie et on découpe notre projet en 300 micro-projets maîtrisables et que ces 300 micro-projets sont soumis à la direction d'une salle de délégation à l'échelon d'exécution, ça ne marchera pas non plus, ça va diverger. donc je veux dire que la méthode CEF ça accompagne un changement culturel beaucoup plus profond dans l'organisation et que ça ne s'applique pas c'est pas une baguette magique on va faire de l'agilité, ça va marcher il y a tous ceux qui disent on fait de l'agilité qui ne change pas culturellement leur mode de travail ça conduit à l'échec ça marche pas, donc c'est assez profond d'où un besoin d'acculturation, d'où un besoin d'accompagnement d'où ce qu'on avait commencé à mettre en place. Après, moi, je suis parti. Je suis quand même parti en 2020. J'avais maintenant plus de trois ans des coachs, des formations à cette méthode-là.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'en trois ans, parce que tu sais, le problème d'un DSI qui part tous les trois ans, c'est quand même la majorité aujourd'hui dans le marché. Ce qu'on voit, c'est qu'en gros, tu arrives à initier un changement parce que tu as quand même la confiance des gens qui t'ont recruté, etc., que c'est nécessaire. Mais c'est tellement dur au moment donné où ça commence à bouger que c'est le moment où il faut partir. Est-ce que c'est... Est-ce que tu valides ?

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, je valide, je valide, je valide. De toute façon, c'est vrai, quand on fait de la transformation partout, quand on fait de la transformation, des moments où on est recruté, on vient, on est neuf, on va se dire, lui, il sera moins con que son prédécesseur, on va pouvoir faire quelque chose. Et au bout d'un moment, la réalité se rappelle à tous. Et si on fait faire des progrès pendant un temps, il y a un moment où l'organisation va peut-être avoir besoin d'une pause. Donc c'est pour ça que le DSI ou le DSI réformateur... Au bout de trois ans, il a peut-être bien avancé sa structure pendant deux ans. Soit on lui redonne un mandat de trois ans parce que du coup il s'installe dans la continuité, il a du temps devant lui, il n'est pas obligé d'aller au forcing, soit on ne lui donne pas de temps, du coup il va au forcing, donc il va au clash. Moi ce qui est intéressant dans mon expérience, c'est que j'ai fait deux grandes transformations du ministère des Armées. La première, c'est la création de la cyberdéfense. Je suis quasiment resté en poste pendant huit ans. Donc j'ai été en charge du projet pendant deux ans et je l'ai commandé pendant plus de six ans. et donc du coup j'ai été avec mon équipe donc on a bénéficié de ce recul du temps qui a permis d'y aller à un certain rythme Ensuite, comme DG NUM, je suis resté trois ans. La mise en place de la DG NUM la première année, j'ai été plébiscité par tout le monde, tout le monde était content. On a mis en place des tas de jeux de reglets. À partir de l'année suivante, quand on a commencé à exercer nos pouvoirs, j'ai commencé à constater quelques grincements de dents parce que c'était un peu un empêcheur de tourner en rond, parce qu'Intel voulait prendre la norme du small alors que le ministère avait choisi collégialement. de prendre une norme X, voilà, donc on commence à rentrer, et ça, ce n'était pas très gênant. En contre, c'est quand on a commencé à ouvrir la boîte de la conduite de projet. Et dans les boîtes de conduite de projet, en tant que directeur général, j'allais voir les projets qui allaient bien, mais j'allais surtout voir les projets qui n'allaient pas bien. Et là, quand on enlève les projets qui ne vont pas bien, on enlève des dysfonctionnements, on enlève des... des erreurs, on enlève des choses qui ne font pas très plaisir. Du coup, après, il fallait changer les organisations et changer les méthodes. Et là, c'était une deuxième phase de transformation. Et les transformations demandent du temps. Donc, il était bien que je parte au bout de trois ans, remplacé par quelqu'un qui avait une autre culture, une autre approche, une autre méthode, qui a continué le travail. Et je vois dans pas mal de structures, je ne vais pas citer les noms, mais deux autres DSI qui étaient particulièrement innovants, parce qu'on est un consommateur, il y en a un qui a été éjecté au bout de trois ans en profitant du fait qu'il soit malade, et quant à un autre qui a été remercié par sa direction parce que les métiers ont trouvé qu'il avait fait trop de transverses par rapport à leur verticalité. Voilà, donc un métier, je pense, dans une organisation, un directeur du numérique qui vient secouer l'organisation, effectivement, il y a un moment où il faut le changer.

  • Speaker #1

    et tu penses que le mec la personne qui suit à ce moment là continue ce que tu fais ou recasse tout parce qu'il considère qu'il doit se mettre en opposition pour créer une marque

  • Speaker #0

    Non, parce que la direction est bonne. Je pense qu'il y a besoin d'inflexion, parce qu'au bout d'un moment, quand on est en transformation, on a des combats, on fait aussi des erreurs. Donc, avoir quelqu'un qui vienne remplacer... Mais la direction générale ne va pas changer. La direction générale de Verreux, c'est plus d'agilité, c'est plus de traitement des données, c'est plus de partage. Il y a toutes ces grandes tendances. restent vraies et elles sont vraies dans tous les grands groupes. Après, qu'on fasse un petit peu moins de transverse, un petit peu plus de transverse, qu'on perde deux ans sur le déploiement de l'agilité parce que la structure n'est pas prête ou parce que là, il y a un directeur général d'une verticalité qui faut attendre qu'il part pour pouvoir avancer. Voilà, donc je pense que dans ces grands mouvements, on est sur un axe où on voit où il faut aller et puis après, c'est un art d'exécution.

  • Speaker #1

    ok et tu penses franchement parce qu'il y a quand même une question sur ce côté des 6 et 3 ans toi tu as initié un mouvement tu as vraiment initié un mouvement de transformation à ce moment là tu changes des pratiques etc parce que j'imagine que tu sais un peu encore ce qui s'y passe etc de manière globale est-ce que du coup ils sont quand même allés dans la même direction et ils y sont allés pas exactement comme tu pensais qu'il faudrait mais c'est continu

  • Speaker #0

    Non, non, non. Ce que j'ai lancé avant de partir, qui était la création de 17 DSI métiers du ministère des Armées, le projet a été entériné par le ministre six mois après mon départ et est devenu opératoire. La création de l'agence numérique de défense, elle a été créée. Après, qu'elle ait réussi ou pas réussi à trouver sa place, c'est un autre sujet. Mais ces choses-là, globalement... ce qui a été mis sur les rails à continuer à évoluer. La question, est-ce qu'il aurait mieux fallu me laisser 5 ans, 6 ans ou ne pas me changer ? Je pense que dans un DSI, il faut lui redonner un vrai mandat. Moi, quand j'ai transformé cette partie-là, j'ai créé la direction gérante numérique. Ça m'a pris deux ans, six mois, un an pour la créer. Et puis un an et demi pour la mettre sur les rails, à peu près pour qu'elle fonctionne bien, qu'elle soit bien acceptée. Ça, pas de souci, ça a marché, ça rentrait bien dans mon périmètre où j'avais trois ans de vie. Après, quand on m'a demandé d'attaquer la conduite des projets, la question que j'ai posée au cabinet, c'est vous me donnez combien de temps ? Et là, la réponse a été extrêmement floue. Et donc, du coup, parce que cette réforme, ça conduit des projets, c'est vraiment du dur. C'est du dur.

  • Speaker #1

    Ah oui.

  • Speaker #0

    Et puis là, j'ai pu lancer. Là, du coup, je me suis contenté de lancer les premiers inputs parce que je savais très bien que ça ne servait à rien d'aller plus loin parce que je savais très bien qu'à l'été 2020, je partais et que je ne saurais pas prolonger, que mon équipe serait aussi un petit peu défaite. Donc, la particularité, si vous voulez, nous, militaires, c'est que on est comme les pots de yaourt on a une date de fin de vie sur nos contrats donc on sait très bien que 59 ans on est dehors après la pastèque le pot de yaourt on est très dans la nourriture aujourd'hui très dans la nourriture, énorme il n'y a pas de surprise c'est différent d'un DSI du monde privé qui peut être débarqué du jour au lendemain donc nous on ne débarque pas trop c'est pas tellement notre culture mais on sait que les gens vont disparaître à telle date parce que c'est leur limite d'âge Voilà, donc les relations sont peut-être un tout petit peu plus différentes. Mais je pense que la transformation numérique a été un mouvement qui est intéressant parce que ça met en route une dynamique. Je pense que ça a deux points difficiles, c'est que ça met en place un tempo qui est très rapide. Et puis deuxièmement, c'est le point le plus, je pense, le plus compliqué, le plus délicat et qui est vraiment la ligne de conduite et la ligne directrice de toutes ces transformations, c'est les compétences et les ressources humaines.

  • Speaker #1

    Et ça par rapport à la partie RH interne, c'était quoi le lien ?

  • Speaker #0

    En tant que directeur général du numérique, j'étais ce qu'on appelle en jargon pilote des métiers numériques. Donc j'étais comptable du suivi de ces métiers, du suivi de la situation, de la formation et de l'état des lieux, de l'évolution du nombre d'agents, des difficultés de recrutement, des difficultés de formation, des affectations. Voilà, donc de la... de la radioscopie annuelle en permanent de l'état des lieux de la ressource humaine numérique du ministère des armées. Et je pense que dans la transformation du ministère qu'on a conduite, c'est l'élément le plus structurant. Parce que ce n'est pas la peine de rêver de super DSI si on n'a pas les bonhommes. Et derrière, ça veut dire que ça... et moins on a de personnes. malheureusement, s'il faut externaliser, plus il faut garder des personnes de haut niveau capables de faire de la maîtrise d'ouvrage. Donc des métiers d'architectes, d'entreprises sont des métiers très en tension. Je passe bien sûr sur toutes les data scientists, les gens qui vont parler de data, ou encore tous les gens qui sont les experts de la cyber. Mais c'est vraiment ce côté... Ce côté manque de ressources humaines quantitatif et qualitatif, qui impose dans différents endroits aussi qu'on rassemble les experts au bon endroit. Typiquement, quand on a créé l'agence numérique de défense, c'était de se dire, il faut mettre dans cette agence les meilleures culottes de conduite de produits, les meilleurs architectes, pour ne pas les avoir disséminés dans tous les services, je les mets là. et cette agence va devoir conduire les 50 principaux programmes de système d'information du ministère des armées, ceux qui sont les plus structurants, ceux que moi en tant que dégénume je suivais dans une liste, et après on rendait compte à l'interministériel ou directement au ministre de l'avancement de ces projets. voilà, arriver à concentrer la ressource humaine parce qu'elle est rare.

  • Speaker #1

    Et du coup, par rapport à la ressource humaine, donc du coup, il y a une question de compétence dans l'IT, etc. Première question, est-ce que tu pouvais recruter un intern, c'était la Presta. Et deuxièmement, est-ce qu'il y avait une problématique aussi de RH liée… aux autres métiers où en gros tu as eu du mal parce que bon on sait que l'agilité c'est quand même être proche du tuteur finot etc et donc du coup un changement un peu global au niveau de l'organisation qui dépasse la DSI est-ce que c'était aussi un point de difficulté ou au contraire il y a eu plutôt un mouvement en interne comme quoi c'est ça qu'il fallait faire et du coup c'était plutôt moteur ?

  • Speaker #0

    Non, sur les bilans RH, non. Il y avait une assez bonne mobilisation, notamment de la direction des ressources humaines, du ministère, avec qui on a créé une académie du numérique. Donc, par contre, la ressource est rare. On avait aussi revalorisé énormément les salaires des contractuels pour arriver à les hitter au même niveau que les salaires équivalents du privé. Après, les corps des fonctionnaires, c'est une autre problématique. Mais non, il y avait là, autant sur la conduite de projet, c'était des choses qu'on tapait dans le dur, avec des oppositions fortes, par mauvaise compréhension, autant sur le besoin de faire quelque chose sur les RH, autant sur le besoin de mobiliser l'ensemble des acteurs du ministère des Armées pour trouver des solutions innovantes. sur les ressources humaines, sur le recrutement, toutes spécialités IT confondues. Oui, il y a eu un mouvement, une vraie dynamique. Les armées, les directions des ressources humaines, les armées ont réinventé des partenariats en allant chercher des gens dans les écoles à partir de la classe de première. Il y a eu beaucoup d'initiatives. Vont-elles suffire à alimenter le... Très franchement, je pense que non. et qu'il va falloir là aussi dans la conduite de projet revoir un certain nombre de façons d'exploiter nos systèmes d'information. Je ne parle pas avec de l'externalisation telle qu'on pouvait mal la comprendre il y a quelques années, mais le recours à des partenaires, à des prestataires à qui on confie typiquement l'hébergement. Aujourd'hui, faire de l'hébergement cloud en code sévatif. Ok, sur certains nombres de données très sensibles au ministère des armées, sur un certain nombre de données de niveau sensible, je pense aux données des ressources humaines ou des choses dans ce genre là, le cloud peut être mis en commun avec les autres services de l'État ou peut être confié à des partenaires comme Tavis, OVH, j'ai un petit pote, Airbus, je ne peux pas en oublier Orange et compagnie. des gens qui sont absolument sous le cadre juridique français et avec du personnel qui est capable, comme on est capable d'habiliter avec les standards de la défense. Pour moi, ce n'est pas à des militaires en uniforme de faire de l'hébergement cloud sur des données RH du ministère. Voilà, donc c'est les militaires en uniforme du cycle, il est fait pour aller sur le tas d'opérations, il est fait pour aller combattre. Voilà, donc il y a un juste équilibre, il y a un juste équilibre à trouver.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tout ça, en fait, si tu dis que tu as créé plein de DSI, que tu es en relation avec le ministère, etc., est-ce qu'il y avait un sentiment d'équipe commune dans le mouvement que vous y avez créé et donc du coup, bon, des distinctions sur certains points, mais qui étaient à la marge ? Ou est-ce que le mouvement qui est en train de se mettre en place, il n'y avait pas encore tout le monde dans la direction IT globalement qui était embarqué ?

  • Speaker #0

    Non, je pense que la première année et demie où je suis arrivé, il y avait une bonne convergence, il y avait une bonne équipe. Au sein de ma direction, j'avais une équipe extrêmement soudée. Ça nous a permis de se mettre d'accord, de travailler très vite et de faire des propositions très rapidement. Avec ALEUR, une équipe était 50% civile, militaire, et on devait avoir 30% de taux de féminisation. Et notamment, j'avais une chief digital officer qui arrivait du groupe Vinci, qui avait une culture civile totalement. Voilà, donc ça c'était une partie un peu qui était une locomotive.

  • Speaker #1

    C'est un temps d'équipe.

  • Speaker #0

    C'est un temps d'équipe. Et avec le reste des autres entités qui gouvernaient les systèmes d'information du ministère, c'était un petit peu géométrie variable. Je dirais que sur 80% des suivis, il y avait consensus, on travaillait bien ensemble. Il y avait quelques sujets qui étaient proxogènes pour certaines entités, qui fait qu'il y avait un refus de prendre des risques. alors que l'on voit que la ressource humaine va manquer, donc les décisions qu'on tarde trop à prendre, on va les prendre dans l'urgence, alors qu'il valait mieux les prendre quelques années, mais ça veut dire qu'il faut accepter de prendre des décisions un peu audacieuses.

  • Speaker #1

    Et en fait, quand tu parles de décisions audacieuses, de courage, est-ce que tu le mets, ça incite à des trucs et tout, mais est-ce que tu le mets plutôt sur le compte de… La peur, la peur de ne pas gérer, d'être mis en question de soi, ou le fait de ne pas croire dans la nécessité de changer, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Ne pas croire dans la nécessité de changer, le fait que dans deux ans on sera parti, donc finalement ça ne marche pas si mal. Et puis je pense que là aussi... Quand on est à la tête d'une entité, d'une DSI, et qu'on travaille énormément pour faire marcher son truc, on n'est pas capable de regarder au-delà de six mois. On est dans la cage du hamster, on galope, on galope, on galope, on galope, mais on ne voit pas que du coup il y a le mur qui est devant nous. Voilà, mais que du coup, quand on vous dit, ton mur il va arriver, maintenant tu es reçu au VN, regarde, tu perds 8% de personnel depuis 5 ans, c'est systémique, on ne va pas arriver avec les données, donc il faut que tu te fasses une organisation. Et ce côté-là, je ne sais pas moi, mon successeur, il y a un peu ça, parce que c'est très compliqué quand même de réformer, de transformer, de prendre des décisions douloureuses, audacieuses, quand pareil, le magasin ne ferme pas et qu'il faut continuer à délivrer. et que pour continuer à délivrer, les mecs triment comme les troupes triment. Voilà, donc c'est pour ça que c'est le rôle du directeur général, le rôle c'est d'être à la fois l'aiguillon et le cété, pour forcer à aller, tout en étant bien conscient qu'il ne faut pas aller trop loin non plus pour ne pas casser la machine. Donc c'est pour ça que c'est cette espèce d'image de l'élastique, le tirer jusqu'à certains points et pas le faire rentrer.

  • Speaker #1

    ok et aujourd'hui quand toi t'as eu ce côté un peu challenge entre une autre direction, etc. Tu n'as pas voulu, tu n'as pas réussi, ça ne pouvait pas se faire, avoir pas une question d'arbitrage, mais un soutien un peu plus global des autres parties prenantes, de la direction générale, ou quelque chose comme ça ?

  • Speaker #0

    Ah non, je n'ai pas cherché, j'avais un soutien extrêmement fort du ministre et de son cabinet. C'est pour ça que les décisions ont été prises malgré les freins d'un certain nombre d'entités. Voilà, mais si tu veux, c'est plus dans la discussion de tous les jours, dans le rapport de discussion de tous les jours de conviction que j'ai eu des freins. Pour les décisions de haut niveau proposées au Bidist, ce que j'ai proposé a toujours été accepté. Mais là aussi, une décision qui tombe comme un truc assez formel, si elle n'a pas été discutée, acceptée avant, ce n'est pas très bon non plus parce que les gens n'y adhèrent pas.

  • Speaker #1

    Ok, c'est intéressant. Et dans ce côté un peu, tu sais... un peu primaire qu'on peut avoir de guéguerre, ce genre de choses qui peuvent arriver dans les sociétés. Toi, tu n'es pas allé sur une posture de attendez, il faut changer cette personne-là ou changer ce type d'entité-là parce que là-dessus, tu n'as pas voulu aller dans ce registre-là ?

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas la mentalité du ministère des Armées. D'abord, les militaires restent en potes que deux, trois ans, c'est peu. Ils tournent beaucoup. Non, ce n'est pas tellement la… C'est pas la culture. Non, c'est pas la culture. Ça peut arriver, bien sûr, mais il faut vraiment... Il y a une faute. il faudra vraiment qu'il y ait une faute, un accumulement de choses, avoir une opinion qui diverge. Parce que les positions, ça, d'un côté, vous avez la direction générale numérique, qui va pousser vers le transvers, vers la vision du ministre, vers des choses, vers un bien commun transverse, alors que de l'autre côté, les gens qui ne veulent pas y aller, ils vont avoir plutôt une tendance à privilégier leur propre structure dans la satisfaction de leur chef.

  • Speaker #1

    c'est arrivé à considérer deux écoute merci Arnaud c'était super intéressant on a fait un bon tour je pense c'est passionnant de découvrir les dangers de transfo du numérique des ministères des armées c'est pas commun comme tu le dis une des organisations les plus complexes que je pense que j'ai rencontré merci encore d'avoir partagé ton parcours de la marine en plus avec les coulisses de la première création de la direction générale du numérique du ministère des armées donc c'est top et en plus sans l'aide de bois donc c'était vraiment génial

  • Speaker #0

    Oui, surtout aussi, merci à toi, parce que c'est toujours un exercice intéressant de condenser et de sortir quelques grands enseignements d'années de travail, d'années d'investissement. Ce que je retiens, c'est effectivement que c'était un moment passionnant. Cette troisième transformation, je n'ai pas eu assez de temps pour convaincre, pour arriver à doser les bonnes doses de transversalité et de verticalité. C'était pour moi ma troisième grande transformation dans le ministère, après celle que j'avais conduite. pour la création de la cyber défense, mais dans lequel j'avais eu quasiment 9 ans pour déployer toute cette transformation. Et d'ailleurs, c'est ce que je raconte dans le livre que je viens de sortir qui s'appelle Soldats de la cyber guerre Mais toutes ces choses-là restent avant tout quelque chose d'extrêmement humain, des aventures humaines, des alignements, des forces de conviction. Voilà, donc merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'intervenir et de témoigner.

  • Speaker #1

    Merci encore pour ta participation et à bientôt. Bon, j'espère que vous avez kiffé ce podcast. Comme toujours, n'hésitez pas à le partager sur LinkedIn, à le partager à vos collègues chefs de projet IT, DSI. Ça nous aide toujours à trouver de nouveaux et des DSI toujours plus intéressants. Et écoutez, ciao !

Share

Embed

You may also like