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Jacques Séguéla, 90 ans d'Amour, 70 ans de Pub et quelle vie ! cover
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Com'On En Parle !

Jacques Séguéla, 90 ans d'Amour, 70 ans de Pub et quelle vie !

Jacques Séguéla, 90 ans d'Amour, 70 ans de Pub et quelle vie !

52min |29/11/2022
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Description

Jacques Séguéla et moi… Voilà ce que je fredonnais sur le chemin de la Maison Havas, un air emprunté à Vincent Delerm qui lui penchait plutôt pour Fanny Ardant.

Des noms célèbres il y en a eu : connus, reconnus, aimés, respectés... On a parlé de Gainsbourg bien sûr, pas si Gainsbarre que ça. De César et de l’unique récompense portant son nom, offerte à la Publicité, de Citroën, la marque d’Amour de Jacques, du Dalaï-Lama, de Dali et ses étranges méthodes, de politique aussi bien sûr (Mitterrand, Sarkozy, Macron, VGE, Pompidou qui s'est retrouvé malgré lui, égérie publicitaire pour Mercury)...

Je ne vais pas citer ici tous les noms qui racontent l’histoire de Monsieur Séguéla, Daron de la Pub s’il en est ! lls sont beaucoup trop nombreux. Jacques est un amoureux de l’Amour, de sa femme et de la Publicité et c’est l’histoire qu’il a fait raconter à d’autres, par malice ou par pudeur, je ne saurais toujours pas le dire aujourd'hui.

Quel bonheur en tout cas d’avoir passé un moment suspendu dans le temps avec l’incroyable, le facétieux Jacques Séguéla à l’occasion de la sortie de son livre : 90 ans d’Amour (chez PLON). 


Merci Jacques, du love sur toi. La Publicité est définitivement devenue, grâce à toi, un acte d'Amour. 


Un podcast proposé par François Gombert. 


RDV sur le site de Com'On en Parle. https://www.comonenparle.fr/2022/11/29/jacques-seguela-90-ans-damour-70-ans-de-pub-et-quelle-vie/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis François Gombert. On a 20 ans que je vis sur la planète communication et que ces incroyables métiers me passionnent. J'avais envie de créer un truc, un objet numérique, un truc qui parle des experts de la communication, du marketing, de l'influence, des relations publiques, de la publicité bien sûr, des affaires publiques, du conseil aux dirigeants, aux politiques, de tous ces experts qui mettent leur expérience et leur stratégie au service des marques, pour laisser des marques d'organisations publiques, d'entreprises, d'associations, de personnalités, de dirigeants. Chaque épisode, son invité. Chaque épisode, sa thématique. Vous écoutez comme on en parle. Le podcast qui fait savoir ce que vous savez faire. Hey hey hey vous écoutez comme on en parle le podcast qui fait le tour de la planète communication Un grand merci à vous toutes et tous, car encore une fois cette semaine, nous sommes classés cinquièmes dans la catégorie business marketing de Apple Podcast. Du love sur vous. Et en parlant de love, je vous présente sans plus attendre notre invité du jour qui a l'élégance et la gentillesse de me recevoir dans son bureau, dans la maison Avas. Avas dont il est le S, l'enfant terrible et en même temps, ces mots ne sont pas choisis au hasard, le daron de la pub française, européenne et qui sait, mondiale.

  • Speaker #1

    J'aime bien que tu dises maison. Parce que la maison a été fondée en 1850 par l'inventeur de la publicité, qui n'est pas un Américain, qui n'est pas un Anglais, qui est un Français bien de chez nous et qui s'appelle Charles Abbas. Et je ne sais pas pourquoi les publicitaires ne s'en orgueillissent pas de ça. Parce qu'on est les inventeurs de la pub. Les Américains arrivent 20 ans plus tard. Et Charles Abbas n'a pas inventé que la pub, il a inventé d'abord l'agence de presse, l'AFP, qui existe toujours. Il y a toujours eu. Deuxièmement, l'agence Média, elle est en bas, au premier étage. Troisièmement, l'agence Publicité, la maison créative, elle est là, sur les autres étages. Et il est même allé plus loin, il a inventé la première maison d'édition, en regroupant des petits éditeurs comme Editis. Lorsqu'on en parlera, quelle est la supériorité d'Avast sur toutes les autres agences du monde, c'est qu'elle est adossée à Vivendi, c'est-à-dire qu'elle est en train de passer de l'advertising... à ce que j'appelle l'advertainment, c'est-à-dire l'entertainment comme nouveau média des marques et de la communication.

  • Speaker #0

    Vous l'aurez deviné, c'est M. Jacques Séguéla qui nous reçoit aujourd'hui dans son bureau, empli d'histoires, de récompenses. Il y a beaucoup de lions.

  • Speaker #1

    C'est les cognons, ils commencent là-bas dans la salle de conférence. J'ai vu, j'ai vu. Et ils finissent chez Yannick, c'est derrière, c'est le bureau de Yannick. Oui, j'ai vu. J'ai la chance de... De ne plus être éloigné de chez lui que d'une glace de 5 cm.

  • Speaker #0

    Et c'est pour toutes ces choses que nous sommes là tous les deux, Jacques et moi, pour parler d'amour et de publicité à l'occasion de la sortie de son livre. 90 secondes d'amour, pardon, qui sort chez Plon. Donc je me permets de présenter rapidement, si tant est qu'on puisse le faire, ton incroyable livre que j'ai adoré, vraiment, je te le disais tout à l'heure.

  • Speaker #1

    On peut recommencer ? Tu peux redire une deuxième fois ?

  • Speaker #0

    Oui, je peux dire que j'ai vraiment adoré...

  • Speaker #1

    On ne s'arrête là. Ce n'est pas la peine d'aller plus loin. Tu as tout dit, tout est résumé.

  • Speaker #0

    Tout est résumé, pas tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu rentres chez toi, je rentre chez moi.

  • Speaker #0

    Quelle vie en tout cas ! Et je vais me permettre de reprendre à mon humble niveau les très beaux mots, les doux mots, les mots parfois bleus de votre amie, j'imagine en tout cas Jean-Louis Borloo.

  • Speaker #1

    Ah oui, quelle belle préface, quel beau cadeau.

  • Speaker #0

    Une magnifique préface.

  • Speaker #1

    Magnifique préface, c'est une boule de tendresse. Oui, c'est l'homme à la fois le plus raffiné, le plus intelligent, le plus proche, à la fois le plus discret, le plus discerne que je connaisse. Et on a eu un coup de foudre.

  • Speaker #0

    Il vous le rend bien en tout cas. Il écrit donc dans cette préface, ce n'est pas un livre, c'est une rencontre. Je crois aux rencontres, écrit Jacques. Elles sont les carrefours des routes de notre vie, à la condition express de vous y entraîner, de nous emmener sur les chemins de traverse. Jacques met en scène de vrais personnages qui ont jalonné sa vie, créant un nouveau genre, un genre nouveau. Une forme de réelle poésie, j'aime beaucoup ce mot réelle poésie qui colle assez bien au livre.

  • Speaker #1

    Absolument, et d'ailleurs il est... Quatrième de couverture du livre, etc. La égalité avec l'auteur, parce que je trouve que ces six pages de préface valent les 250 pages du livre.

  • Speaker #0

    Elles sont en tout cas très belles. Donc, s'il te plaît, dessine-moi un mouton, demande le petit prince. Dessine-nous le bonheur Jacques. Et il le dessine avec une balade poétique de 90 ans, que vous n'avez pas encore. Vous avez pour l'instant 88 ans.

  • Speaker #1

    J'ai, j'ai, j'ai dans deux mois 90 ans, parce que... Moi je suis un créatif, donc je compte ma vie à partir de l'instant de la création. C'est un instant de l'amour, d'un acte de l'amour. Et donc, je suis un enfant du bonheur, un enfant de l'amour, puisque mes parents faisaient leurs études ensemble à la faculté de médecine de Montpellier, qu'ils se sont connus là, que mon père est tombé fou amoureux de ma mère et vice-versa, qu'ils m'ont conçu et que mon père est allé demander la main de ma mère à ma grand-mère, qu'il a refusé parce qu'il n'était pas noble. Mais tout a commencé là, et donc il a pris par la main, ils sont échappés. à Paris et ils ne sont plus jamais revenus à Montpellier. Et donc, bien qu'ayant 89 ans dans deux mois, j'ai 90 ans. En plus, ça tombe bien parce que la publicité, ça aime les chiffres ronds.

  • Speaker #0

    C'est vrai. Pas pour tous, mais en tout cas, on le souhaite tous. Vous allez du coup vous devancer un petit peu mes questions, mais abordons alors ce livre dont vous êtes le héros. Sans trop en dire pour laisser le plaisir de la découverte. Non,

  • Speaker #1

    je ne suis pas le héros et je ne veux surtout pas être le héros. Ce n'est pas un livre où je me raconte. Je me suis raconté déjà dans les 29 premiers, ça suffit. C'est un livre où je les raconte et où ils se racontent à travers moi.

  • Speaker #0

    Mais avant tout, Jacques Seguéla, j'ai quand même une question. Parce que j'ai lu le livre et toutes ces aventures, toutes ces anecdotes folles, toute cette passion, tout cet amour. D'où vous vient toute cette énergie, cette force, cette passion ? Et pour les autres ? mais aussi pour des marques comme Citroën.

  • Speaker #1

    Écoute des au hasard de la vie. Moi, je n'ai rien programmé de ma vie. J'ai toujours essayé la vie de me mener par le bout du nez. Elle m'a amené dans les pires. Dans le début du livre, tu verras, j'ai commis tous les péchés que peut commettre un gosse rebelle. J'aurais été à deux mois de finir en taule.

  • Speaker #0

    Oui, le coup du 6-35, c'était pas mal.

  • Speaker #1

    Absolument. Et donc, je n'ai jamais planifié ma vie. Je n'ai jamais eu de plan de carrière. Je n'ai jamais voulu... D'ailleurs, j'étais parti pour être pharmacien. Et je me retrouve publicitaire en ayant été un journaliste béni des dieux puisque j'ai commencé à Paris Match et j'ai fini avec Pierre Lazareff qui décidera de ma carrière. On va en parler tout à l'heure.

  • Speaker #0

    On va en parler tout à l'heure. Alors avant de rentrer quand même dans le détail du livre, j'aimerais savoir, tu n'es pas sur les réseaux sociaux, tu n'aimes pas du tout les SMS. C'est écrit plusieurs fois dans le livre. Mais il y a quand même dans ce livre un amour qui transpire. C'est impossible de passer à côté. C'est quoi pour toi Jacques Seguéla ? Et pour Avas, la maison Avas, la communication aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La communication aujourd'hui, elle est de veiller nuit et jour, avec tout son talent, avec tout son allant, avec toutes ses idées et avec toute sa force, la survie des marques. 80% des marques que nous avons, il y en a créé quelques-unes, que nous avons consommées au XXe siècle sont mortes avec le siècle. 80% des marques qui existent aujourd'hui, que l'on côtoie aujourd'hui, vont mourir avec le siècle. Donc, évidemment que le premier métier de tout publicitaire, c'est de vendre des produits. Alors, moi, je vends des voitures, je vends des yaourts. Mais ce n'est que la vague, le profond, la densité du fond de la mer, c'est de rendre les marques éternelles. Et j'ai découvert ça. Grâce à Mitterrand, il était élu depuis quelques semaines, il me téléphone et il me téléphone directement. C'est la première fois que j'avais directement au téléphone. Allô, c'est Gala, ici François Mitterrand. J'ai cru que c'était un canular, en plus c'était l'époque des canulars téléphoniques. J'ai balbutié un peu, mais écoutez, c'est Gala, c'est vraiment moi. Est-ce que vous êtes libre à déjeuner, M. le Président ? J'arrive, précipite à l'Elysée, on est dans sa petite salle à manger au rez-de-chaussée avec la bibliothèque. Eh bien, Gala, je vais vous faire un beau cadeau, parce que vous m'avez... J'ai fait un beau cadeau. Moi j'avais offert la campagne. Parce que je ne voulais pas que ce soit un acte de péripaticien, je voulais que ce soit un acte d'amour. Et je voulais que ça change la façon de faire de la politique à la française alors que c'était des anglais et les américains qui étaient les rois du genre à l'époque. Et il me dit écoutez, vous vous êtes un peu compliqués les créatifs, je ne sais pas ce qui peut vous faire plaisir. Prenez une semaine, réfléchissez bien et dites moi. Semaine suivante, moi je l'ai vu toutes les semaines pendant 14 ans, peut-être pas toutes les semaines. Il y a au moins une semaine sur deux. Donc, je dis, président, moi j'ai trouvé, je veux passer une journée avec le Dalai Lama. Il me dit, monsieur, vous êtes fou. Vous pensez que moi j'appuie sur un bouton et que le Dalai Lama arrive ? Non mais, taisez-vous, trouvez une autre idée et revenez me voir. Je ne trouve pas une autre idée, je maintiens. Et six mois plus tard, il m'appelle, sa secrétaire m'appelle, elle me dit, le président ce soir a un dîner. un peu intime. Il aimerait bien que vous soyez là avec Sophie, si vous pouvez venir. on arrive.

  • Speaker #0

    Sophie qui est votre femme.

  • Speaker #1

    Ma femme, 8h. Daniel Mitterrand, François Mitterrand, Sophie, moi, Chesvin. 5 minutes, 10 minutes. Si je te permets d'être aussi en retard avec le président de la République, 15 minutes, arrive le Dalai Lama. Waouh !

  • Speaker #0

    C'est très bien raconté.

  • Speaker #1

    Et le Dalai Lama dit, et Mitterrand dit au Dalai Lama, waouh ! Voilà, c'est mon publicitaire, etc. Je voulais lui faire un cadeau, le cadeau c'est vous. Et le Dalai Lama me dit, mais pourquoi faire ? Parce que je veux que vous évangélisiez la jeunesse française. Donc je vais demander à la Sorbonne de nous prêter son grand amphithéâtre. Et tous les étudiants et tous les jeunes autour d'eux, ils veulent écouter le Dalai Lama, auront une heure où ils pourront poser toutes les questions du monde. Il a fait ça de 8h du matin à 18h.

  • Speaker #0

    C'est effectivement un épisode très bien raconté dans le livre et très intéressant. Je vais revenir un petit peu en amont.

  • Speaker #1

    Tu me coupes là, mais c'est le moment le plus important de ce qu'on va se dire. Parce que cette visite du Dadaï Lama, elle m'a ouvert les yeux. Car il s'est assis, et peut-être pour se faire excuser, il regarde Mitterrand dans les yeux et il lui dit Connaissez-vous cette dernière fable tibétaine ? C'est un vieux bonze qui donne à son jeune disciple sa première leçon de philosophie. Et qui lui dit Je vais te poser trois questions, réfléchis bien et réponds-moi. Première question, quel est l'envers du blanc ? Le noir ? Non, non, non, non, réfléchis. Deuxième question, quel est l'envers du jour ? Alors le jeune disciple réfléchit. Maître, la nuit, bravo, voilà, tu as réfléchi, c'est la bonne réponse. Dernière question, quel est l'envers de la vie ? Et le jeune moi réfléchit, dit maître, il n'y a pas d'autre que la mort. Tu n'as rien compris, dit le Daïlama. L'envers de la vie, c'est la naissance, c'est la définition de ce qu'est la publicité. Je réponds à ta question profondément. Très profondément, parce que la publicité, généralement, elle se joue dans la superficie des choses. Non, elle doit se jouer dans la profondeur des choses et la profondeur de la vie. Parce que mon métier, c'est de faire que la marque de ma vie, moi je mourrai, mais qu'elle continue et qu'elle continue à vivre. Et quelle est la seule façon de rendre une marque immortelle ? C'est de l'appliquer, la seule chose qu'on a inventée dans ce monde et qui est éternelle, C'est l'âme. Donc mon métier, c'est de créer, de protéger. de nourrir, de me battre pour l'âme des marques.

  • Speaker #0

    C'est quoi votre marque préférée d'ailleurs ?

  • Speaker #1

    C'est une question. Il y en a qu'une. La réponse, pardon. Louis Vuitton, j'ai été le premier publicitaire de Louis Vuitton. Raffelot, on est fou de Raffelot. C'est moi qui ai trouvé la marque, qui ai trouvé le slogan. Fond la forme. J'ai trouvé la marque, qui a trouvé le slogan. Etc.

  • Speaker #0

    Les Restos du Coeur.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment j'ai pu en faire. Un café nommé Désir pour carte noire et un avant Citroën, etc. Mais mon plus beau slogan, c'est Picasso. Parce que je me souviens que Citroën était dans une mauvaise passe. On frôlait les 7% de parts de marché. Peugeot avait presque l'intention de supprimer Citroën, de le fusionner avec Peugeot. Donc c'était une question de vie ou de mort. Et le président du moment me dit, écoute, voilà, j'ai une voiture, mais bon, elle est ce qu'elle est, elle n'est pas très extraordinaire. Et j'ai oublié le nom tellement le nom était ridicule. Et c'est là, je ne sais pas quoi. Donc il faut qu'il me fasse un lancement magnifique sur cette voiture-là. Je ne peux pas aller nul. Et son nom est ridicule. Il me dit, écoute, si tu as une meilleure idée, tu as 48 heures, parce que dans 48 heures, ça va être gravé sur les voitures. Et par une sorte de miracle, je déjeune avec le petit-fils de Picasso, Olivier Picasso. Et je lui dis, écoute, j'ai une idée. Est-ce que tu penses que ta famille accepterait que Citroën... prennent le nom de Picasso pour désigner son prochain modèle. Miracle, ils acceptent. Je me souviens que la première annonce pour lancer la chose, qui était une pleine page dans Le Monde et dans Le Figaro, où il y avait Picasso avec son pilau vert rayé, bleu et blanc, et le texte écrit comme par un petit gosse, disait Dis maman, pourquoi papa, il s'appelle comme la voiture ? Ça a failli s'arrêter là tellement la famille était folle de rage.

  • Speaker #0

    Il n'y a pas que tu as mis le fou de rage. Il y avait aussi Pompidou.

  • Speaker #1

    Oui, Pompidou. Pompidou, c'est lui qui a créé l'agence. Il nous a fait un cadeau présidentiel.

  • Speaker #0

    Il ne sait rien de le dire.

  • Speaker #1

    En 68, Bernard Roux allait défiler avec les bourgeois sur les Champs-Élysées. Moi, j'allais avec les étudiants flanquer quelques pavés dans la gueule des flics. Je n'en ai pas lancé beaucoup, je n'en ai mis trop pied aucun. Bon, c'était une révolution assez baroque. Et à la sortie de ça, on travaillait dans une agence qui s'appelait AXE, qui appartenait à deux frères d'Amenard. On était là depuis deux ans, on avait multiplié par 5 ou 6 le chiffre d'affaires de l'agence, qui était l'agence en pointe, etc. On leur a dit, écoutez, vous avez compris, 68, c'est le grand partage. Donc nous, on veut bien continuer avec vous, et de nouveau, multiplier par 5 votre chiffre d'affaires, mais il nous faut 20% chacun. Ils ont dit, c'est intéressant, on va en parler entre nous, et si vous voulez, demain matin, on se retrouve à 8h pour en parler. On arrive à 8h à l'agence, ils n'étaient pas là. Sur notre bureau, on avait... Une enveloppe, c'était pour solde de tout compte. On descend en bas, il y avait un bar à putes, c'était une des avenues qui partait de l'Etoile. On est dans le bar à putes et Bernard me dit, qu'est-ce qu'on fait ? Je lui dis, mais on fait rouler ces gars-là. Il me dit, oui, mais enfin, on n'a pas les moyens. Je lui dis, écoute, déjà, voilà mon chèque, toi mets ton chèque. On va vendre nos deux voitures, puis on gratte tout. On essaye de gratter les copains, etc. Il dit, ben d'accord, donc on fait ça, et une semaine après, on dit, ben écoute, qu'est-ce qu'on fait maintenant avec ça ? Je dis, mais on fait de la pub. Ce qui est extraordinaire, c'est que les publicitaires ne font jamais leur pub. Pourquoi ? J'ai le titre que je ne mérite pas de seul publicitaire le plus connu, parce qu'aucun autre n'avait sa pub. Moi, je suis encore en train de la faire à 90 ans. Je n'ai jamais compris, comme s'ils avaient honte de leur métier, mais il n'y a pas plus beau que la publicité, pourquoi on n'aurait pas droit, nous aussi, à être des marques ? C'est bien vrai pour les acteurs, pour les réalisateurs, pour les signastes, pour les artistes, pour les chanteurs, mais pourquoi pas pour les publicitaires ? On est un art mineur, mais on est un art quand même. Et on met tout notre argent sur une page du monde et une page du Figaro. Avec une annonce qui dit, cher annonceur, ou vous avez une agence et on va vous prouver qu'on est meilleur qu'elle, ou vous n'avez pas d'agence et ça y est, ne cherchez plus, c'est nous. On attend une semaine, pas une seule réponse. Et au dixième jour, on reçoit un coup de fil, le seul coup de fil qui ait déclenché la campagne. Deux fois une page pleine d'un certain Wittner qui dit, écoutez, moi je suis l'importateur en France des moteurs Mercury. J'ai besoin d'une campagne, vous avez l'air d'avoir des idées, venez me voir. Et en quittant, je me souviens qu'un de mes reportages à Match, quand j'avais été reporter de Match, était justement de suivre Pompidou, qui passait ses vacances à Saint-Tropez, et je me souvenais qu'il y avait une photo que j'avais faite, qui était très sympa, où il conduisait lui-même un petit dinghy pour aller retrouver son bateau. Il s'est dit, jamais c'était une Mercury, donc je vais. Je revois mes copains, j'essaye de me trouver en douce la photo, etc. Ils piquent la photo et miracle, c'était Mercury. Donc on fait l'annonce et à cette époque-là... L'Express, souvent on appelait ça des osalides, l'Express était entièrement imprimé, mais il n'était pas parti à l'imprimerie. Et il était envoyé à l'Elysée pour dire que la liberté de la presse n'était pas à l'ordre du jour, pour que le président puisse le feuilleter et puisse changer une page s'il avait envie de changer une page, changer un titre. Et donc Claude Pompidou, la femme du président, pousse un cri d'horreur en disant mais qu'est-ce qu'il vous prend ? Vous prenez maintenant pour une star qui fait la publicité des produits Mercury. Et il dit mais j'ai pas vu ça, je sais pas ce qu'il se passe. Il regarde, il téléphone tout de suite à sa vente Schreiber, qui lui n'avait pas non plus vu les choses, qui dit mais je regarde tout de suite, mais qu'est-ce qu'il se passe ? Mais comment cette page a pu se glisser entre autres ? Je l'avais envoyé au dernier moment. dans la dernière seconde où on pouvait encore envoyer une annonce. Comme ça, c'est passé à travers de tout le monde. Et Pompidou dit à Savant-Chevers, je suis désolé, je suis obligé de stopper le journal. Le journal ne paraîtra pas. Il dit, mais écoute, mes exemplaires sont tirés, ils vont être diffusés. Et je débrouille les vôtres, je débrouille les vôtres. François Giroud m'appelle, et bien, vous êtes des petits salopios. Vous avez eu une idée, mais maintenant... Trouvez-en une pour sortir de là. Je le rappelle, cinq minutes après, je lui dis Mais moi j'ai trouvé. On va arracher la page. Et on a une chance folle. La page du Verseau, c'était une page de pub. Donc ça ne gênait pas le rédactionnel du journal. Et donc, il m'amène dans un hangar à 10 km de Paris, où il y avait 40 000 exemplaires. Bon, il dit Mais voilà. L'Express sortait le mercredi, je crois, ou le mardi. Donc on avait 40 000 pages à arracher en trois jours et trois nuits. J'ai mobilisé tous les copains, j'allais dans la rue, je disais, tenez, voilà, 50 balles, venez nous aider, tout le quartier s'y est mis, etc. Et moi, je prévenus la presse qui est venue nous voir en train d'arracher les pages, et donc évidemment a publié la page qui a fait tous les journaux du soir. Et tous les journaux du lendemain et toutes les télés, toutes les télés du soir et tous les journaux du lendemain. Et l'agence est née de notre première annonce. Si je suis publicitaire, c'est à moi de faire ma publicité et d'être finalement la première marque de toutes les marques que je vais servir. Parce que ça me permettra d'ouvrir les portes. Je ne suis pas un chanteur, je n'ai pas besoin qu'on me reconnaisse dans la rue, ce n'est pas mon métier.

  • Speaker #0

    On vous reconnaît dans la rue quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas du tout le but. Mon but, c'est que les annonceurs me reconnaissent dans la rue. Alors ça, ce but-là, je le cultive. Je ne l'ai jamais, jamais lâché.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui a fait scandale, enfin pas scandale auprès finalement du consommateur, mais scandale un peu dans le milieu de la publicité et notamment auprès de Maurice Lévy. C'est le lancement des produits libres de Carrefour. Vous avez 40 ans à l'époque, la campagne cartonne puisque Carrefour lance des produits libres, donc des produits blancs.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et... C'est un énorme succès.

  • Speaker #1

    C'est la campagne qu'on devrait faire aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi ils ne la ressortent pas. C'est les produits blancs, avec une affiche qui était formidable, qui disait on fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a une marque On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il est plus cher. On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a un packaging. C'est finalement une attaque directe de la publicité. Donc j'ai eu tous les publicitaires contre moi. Blanchet a d'ailleurs écrit tout de suite une chronique dans Le Monde pour m'assassiner. Et tout le monde s'est rangé derrière lui. Et puis les annonceurs commençaient à être résistants. Il y avait ceux qui disaient mais pourquoi pas ? et ceux qui disaient mais il faut virer ces publicités qui ne croient pas dans leur métier. Mais pas du tout. Parce que ma réponse, c'est que les produits libres, c'était une marque. Finalement, ça a abusé tout le monde. Voilà. Et aujourd'hui, ça s'appelle les marques distributeurs. Et c'est tellement dommage qu'ils appellent ça des marques distributeurs. Ils sont nuls, les distributeurs. Mais appeler ça des marques libres, enfin, un peu de talent, un peu de mouvement, un peu d'esprit, un peu... Toujours rester sur la platitude des choses. à bonne entendeur mais oui prenez les ailes du désir envolez-vous tu sais c'est quoi la dimension de la publicité c'est Gocteau qui un jour croise Daguilef à l'opéra et qui lui dit quelle est la définition de ton art et Daguilef le danseur dit étonne-moi Génial dit Cocteau, mais c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la poésie. Moi je dis au musée, Cocteau, au musée, le danseur, ça c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la publicité. Oui, la publicité, c'est la poésie. Mais une poésie qui va servir à quelque chose, qui va vendre un produit et qui va le rendre immortel. Est-ce qu'il y a un plus beau métier que ça dans le monde ?

  • Speaker #0

    Et une autre histoire assez savoureuse qui est avec Salvador Dali. Je ne sais pas pourquoi vous êtes lancé là-dedans. Là,

  • Speaker #1

    on doit être en deuxième ou troisième année avec Roux. On s'appelle encore Rousseguela. Keizak va arriver deux ou trois ans après. Et on court les bâtisseurs de maisons parce que c'est la grande mode. Et qu'il y a tous les vendredis matins... Tous les lundis matins, les grandes agences immobilières mettaient en compétition des agences pour qu'on leur amène une annonce le jeudi qui serait publiée le samedi et qui ferait le samedi les ventes du week-end. En plus, c'était millimétré parce qu'on savait au nombre de ventes faites si la publicité était bonne, s'il fallait la reproduire ou s'il fallait la jeter aux orties. Et donc nous, on était les professionnels de ça, on avait pratiquement tous les budgets immobiliers. Et un jour, Publicis, qui s'est dit, mais qu'est-ce que cette petite agence, etc., qui fait de l'agence de publicité immobilière, Publicis décide d'entrer dans la bataille. Nous, on n'avait que des nains comme concurrents. Mais là, tout d'un coup, c'est le géant qui est là. Je me suis dit, il faut que je trouve une idée formidable. Ce qui était obligatoire dans ces publicités, c'est qu'il fallait absolument qu'il y ait un dessin d'architecte qui montre le produit fini, puisque j'ai dit, non. ils ont acheté du vide pour l'instant. Et moi, je me dis, pour taper Publicis, au lieu de faire ce que tout le monde fait, je vais demander à Dali de faire le dessin, ce qui deviendra une peinture, la peinture du final du meuble. Et je vais la baptiser du nom de Totem, parce que Totem, c'est un mot favori de Dali. Et donc, j'arrive, même pas avec une maquette, je raconte simplement les choses, etc. Et je me souviens, applaudissement. Donc je sors, le publiciste passe derrière, il est éjecté, et on me téléphone en disant Vous avez le budget Mais le problème, c'est que je ne connaissais pas Dali. Donc je téléphone à des copains de Paris-Nanay, qui me prennent un rendez-vous miraculeusement avec lui à New York. Je fonce à New York, je le retrouve dans un 5 o'clock, et j'arrive, il était là, assis, avec une japonaise. Absolument sublime, c'était le grand mannequin japonais de l'époque. Et à quatre tables de là, il y avait Andy Varol. Je n'en crois pas mes yeux. Dali, cette fille sublime, Andy Varol. J'arrive, je m'assois à la table. Dali fait un signe, Andy Varol qui vient se rajouter à la table. Et on est là tous les quatre autour de la table. Et je dis à Dali, Dali me dit qu'est-ce que vous me voulez ? Je veux que vous fassiez une publicité. Mais Dali déteste la publicité. Mais faites-vous en fête. Mais... Écoutez, est-ce que vous avez la valise de dollars ? Je dis Oui, elle est là, mais elle est cachée. Évidemment, vous serez payé, vous me direz ce que vous voulez. Et il dit Écoutez, je veux bien la faire, mais il faut passer le test de Dali. Bon, écoutez, je suis présent. Vous voyez la jeune fille qui est là ? Elle a appris la danse balinaise. Et vous voyez ses mains. Elle arrive à branler un homme à l'envers. Oui ? Eh bien, elle va vous montrer. Et elle descend. Moi, je suis accroché à la table. Je me dis, mais qu'est-ce que je fais ? Je me lève, je me planque. Mais il est fou, mais le mec, c'est vraiment Barjot. Un divarole qui éclatait de rire, etc. Et évidemment... La japonaise s'arrête avant le crime et je comprends que c'est une farce qu'il devait faire de temps en temps pour se marrer parce qu'il était au milieu en plus du Pannes-Courte qui était l'endroit le plus couru de New York. Et c'est ce qui m'a permis de décrocher Dali. Deux mois après, il était à Paris et il m'a dit je vais vous faire votre dessin mais je ne peux pas, Dali ne peut pas dessiner une publicité de la main droite. Je dessinerai une publicité de la main gauche. Donc il faut que je... puisse occuper ma main droite et ma main gauche. Donc je ferai votre tableau et en même temps, demandez à la plus jolie fille de l'agence si elle est d'accord pour que je fasse son portrait. Alors la plus jolie fille de l'agence me dit, oui, je suis d'accord, c'est formidable. Tout ça se passait dans l'hôtel qui occupait Thalie d'habitude. Gala était là, etc. Elle commence à poser une première après-midi. Elle lui dit, il faut revenir le lendemain. Elle revient le lendemain. Et elle revient le lendemain. À chaque fois, il disait, mais est-ce que je peux voir mon portrait ? Est-ce que je peux voir mon portrait ? Et quand il a été fini, il lui dit absolument, le voilà, il n'avait peint que son sexe. Et il a demandé à être payé avec la valise de dollars, il avait fait 50 000 euros de l'époque, mais il voulait un bougreau. Le bougreau, c'était le peintre pompier qu'il était en train de remettre à la mode. Donc moi, je m'étais débrouillé pour trouver trois bougreaux, pour qu'il puisse choisir entre les trois bougreaux. Il arrive, il dit, mais ça, c'est mieux que ça, c'est celui-là qui est le bon, donc on s'arrête sur celui-là. Moi j'envoie un petit mot, parce que j'avais raconté l'histoire dans un de mes livres, j'avais reçu une lettre de la cour de Hollande en disant mais vous devez être un escroc ou un incapable, parce que le bougreau dont vous parlez est dans notre salon depuis des années, et pour des années. Ça veut dire que le bougreau était faux, et il est au musée de Dali, à Figueras. Donc personne ne sait qu'il est faux. Mais il est vraiment fort, sauf le prince de Hollande.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui m'a beaucoup amusé, même deux campagnes qui m'ont beaucoup amusé avec Gainsbourg. Une qui n'a pas vraiment touché sa cible et une autre qui n'a pas vu le jour. C'est la fameuse histoire du baron Bic, qui est quand même incroyable.

  • Speaker #1

    Mon rêve, c'était d'avoir la marque Bic. Parce qu'on ne le sait pas, la marque Bic, c'est la marque française la plus connue dans le monde. Parce qu'elle est dans pratiquement 200 pays du monde. Et puis c'est un produit de première nécessité. Et à l'époque, j'étais très copain avec Gainsbourg, parce que Gainsbourg voulait faire du cinéma. Il va le faire, d'ailleurs, il va faire son film, Je t'aime, moi non plus. Et je lui dis, écoute, si tu veux faire du cinéma, fais de la pub, tu vas apprendre le cinéma, parce que finalement, c'est une minute et demie, toi, après, tu en feras une heure et demie, mais c'est la même technique, les mêmes professionnels qui le font. Et un jour, je lui dis, écoute, j'ai un truc pour toi, j'ai écrit un script. Si tu es d'accord, tu le tournes, on fait une maquette, et moi je vais le vendre au bar en bique. J'avais écrit mon script, il arrive dans le studio, à l'heure, parce qu'il était très professionnel, Serge, contrairement à ce qu'on racontait, et il est là, devant un fond noir, et il dit, Moi ma vie est foutue. J'ai vendu tout ce que j'avais à vendre, j'ai vendu mon inspiration à la chanson, j'ai vendu mes poumons à la cigarette, j'ai vendu mon sexe aux femmes. Qu'est-ce qu'il me reste ? Ah ! Il me reste un truc. Il me reste ma barbe. C'est lui qui avait inventé la barbe de trois jours. Alors oui, je veux bien vendre ma barbe, mais à bique. Et il se rasait.

  • Speaker #0

    devant tout le monde. Tout le monde était en train de lui dire pourquoi il a une barre, pourquoi il ne se rase pas, etc. Il se rasait devant tout le monde. J'arrive une semaine après devant le bar en Bic, j'appuie sur la machine, il voit le film, il dit mais ça c'est très marrant, mais moi je ne fais pas de publicité à la télévision en France, mais mon fils Bruno en fait aux Etats-Unis. Donc si vous voulez, je vous obtiens un rendez-vous avec mon fils Bruno. Et il appelle au Bruno devant moi et je prends rendez-vous pour trois jours après à New York. Je saute dans un avion. J'arrive à 9h du matin, à 11h du matin, je suis dans son bureau, je présente le film, il éclate de rire, il dit mais ton film est marrant mais il n'y a pas un américain qui connaisse Gainsbourg. Donc tu peux repartir à Paris, le film existe, il n'est jamais sorti.

  • Speaker #1

    Et il y a donc une autre campagne avec Gainsbourg qui est une campagne pour une marque de lessive qui je crois a vu le jour mais qui n'a jamais touché sa cible.

  • Speaker #0

    Je rêvais de faire une campagne de lessive qui est le rêve de tout publicitaire. Mais en plus, je me disais, si ça pouvait être une lessive un peu de luxe, qu'on puisse dire autre chose que je lave plus blanc Et j'ai la chance de rencontrer le patron de Woolit, qui est la lessive d'Hélénage Délicat, et qui me dit écoutez, donnez-moi une idée Mais je dis que c'est très simple. Au lieu d'avoir pour slogan je lave plus blanc moi je propose comme slogan je lave plus belle Et je demande à toutes les stars françaises, et même quelques stars américaines, Je leur donne 30 secondes ou 45 secondes, qui est le temps du spot que j'ai, pour faire un numéro de séduction pour la marque. Et c'est gratuit. Elles font ce qu'elles veulent, mais elles séduisent en 30 secondes. Et on arrive au jour où c'est la femme de Serge. Et Jane Birkin. Jane Birkin. Ça lui permettait lui aussi d'être le réalisateur du film. Et l'auteur du script. Donc on écrit ensemble une dizaine de scripts, j'amène ça à l'annonceur qui en choisit un, on se retrouve dans le studio, et quand on arrive dans le studio, la situation était tout noire, il y avait juste une lumière qui était sur un petit podium comme ça, qui était un podium qui tournait sur lui-même. On ne comprend pas ce que ça veut dire parce que ce n'était dans aucun des scripts. Et Serge dit oui, mais j'ai eu une idée du dernier moment, vous allez voir, mettez-vous sur le coin, etc. Arrive Jeanne. qui était moulée dans une grande écharpe comme ça, bleue et blanche, aux couleurs de Woolit. Elle monte sur le petit podium et elle tourne avec le podium, alors qu'il y avait deux assistants qui tenaient à l'autre bout l'écharpe. Et quand on arrive au moment où il ne faut pas aller plus loin dans la télévision française, tac, elle s'arrête. Et puis tout le monde applaudit, comme toujours quand on tournait un film. Et à ce moment-là, elle laisse tomber l'écharpe. Je vois mon client qui se décompose complètement. devant Jane Birkin. Il ne m'a même pas dit que ce n'était pas un script qu'on avait écrit ensemble, mais que c'était le script qu'il avait acheté. Il a été décompensé. Le film a eu 100%, à l'époque tout était sondé, a eu 100% d'appréciation. Il n'a pas fait de vente. Alors on a fait un test, une étude pour savoir pourquoi. Parce que les ménagères de moins de 50 ans ont dit, mais moi, je ne veux pas que mon mari voit cette publicité, parce que je sais qu'il me quittera pour Jeanne Berkin.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce que vous écrivez dans le livre que les publicitaires sont des séducteurs pour les ménagères de moins de 50 ans.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, mais là, ça allait trop loin, parce que c'était le mari qu'on séduisait.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    j'entends bien. Donc, si ça avait été Alain Delon, je pense qu'elles auraient été d'accord. C'est possible.

  • Speaker #1

    À 50 ans, vos ouvrages sont maintenant traduits en dix langues, en turc, en russe, en chinois, en japonais et les créations redoublent. Europe 1, c'est la pêche, l'AX Citroën qui a descendu la muraille de Chine. Ça, je l'ai découvert aussi, ce qui était quand même assez incroyable.

  • Speaker #0

    Le révolutionnaire. Ah oui,

  • Speaker #1

    incroyable. La drogue, c'est de la merde. Air France.

  • Speaker #0

    Avec Jean-Marie Perrier, la drogue, c'est la merde. C'était un grand cinéaste publicitaire aux Etats-Unis. Mais en France, je ne sais pas pourquoi, il n'était pas reconnu. Comme toujours, les Français ne reconnaissent jamais les leurs. Et on avait fait le film ensemble, qui a été un très gros succès.

  • Speaker #1

    Et Microsoft pour leurs premières apparitions européennes. À 55 ans, RSCG et Eurocom fusionnent pour devenir Euro RSCG. Alain de Pouziac devient le CEO de la holding Avas Advertising. Et vous êtes finalement le directeur de création et vice-président.

  • Speaker #0

    On devient une vraie agence internationale présente dans... une quarantaine de pays du monde, pouvant prendre des gros budgets mondiaux. Et surtout, pouvant surtout faire que nos gros budgets existants, comme Vuitton, comme Citroën, comme Afloulou et tout ça, puissent profiter de nos agences internationales. C'est donc l'internalisation de l'activité, c'est l'internationalisation de la publicité. Mais le problème est qu'à ce moment-là, nous on appartenait. au vivendi de l'époque qui avait été créé par Jean-Marie Mercier, un espèce de fou.

  • Speaker #1

    J6M, oui.

  • Speaker #0

    Un fou dangereux qui, je ne sais pas pourquoi, avait pris la publicité en grippe et décide un jour de nous vendre. Sans nous le dire, sans le dire à Pouziac le président, sans me le dire. Dans une conférence de presse, on est là au premier rang, il dit mais je mets en vente la publicité. On n'a pas le vent, on est complètement fou, etc. Pour stopper ça, Pouziac se précipite aux Etats-Unis pour faire un achat. Ce n'est pas le moment de vente quand on achète. Donc c'est pour bloquer finalement l'idée de vente de Messier. Et il achète un peu trop vite, sans nous demander notre conseil, une boîte de marketing services, ni faite ni à faire, que l'on paye 2 milliards de dollars, qui en fait emballait un, et qui est confié à notre patron américain pour son management, et il va en rester 500 millions au bout d'un an. Donc on aura perdu 1,5 milliard en deux ans. Et c'est là que Vincent est arrivé, sans se presser.

  • Speaker #1

    Donc à 70 ans, effectivement, Vincent Bolloré, vous 70 ans, Vincent Bolloré reprend Abbas et en devient le président, mais vous gardez la tête de la création. Le groupe va prendre un nouvel essor, 20 000 collaborateurs, déployant 500 agences, 100 pays dans le monde, font rimer créativité et efficacité. Ça ne donne pas un peu le tournis ?

  • Speaker #0

    C'est formidable, j'ai jamais autant voyagé de ma vie. Parce que moi j'ai toujours pensé que la publicité c'était d'abord l'amour. C'est mon livre, 90 ans d'amour, parce que 90 ans de publicité, ou disons 70 ans de publicité, 90 ans d'amour. Et donc il faut aimer les gens, il faut aimer les gens avec qui on travaille. Il faut aimer ses créatifs. Moi ma vie a consisté à sauter d'un avion dans l'autre, pour aller dire à mes créatifs que je les aimais. Et pour les écouter, pour essayer de régler le problème s'il y en avait, et surtout pour leur dire écoutez, maintenant le futur de la publicité c'est des lions à cannes. Donc on va s'y mettre, on va se rever les manches et on va montrer aux américains que les lions ça peut aussi être français.

  • Speaker #1

    Alors je fais un flashback, mais dans votre vie il y a quand même eu la politique. Beaucoup. Il n'y a pas eu...

  • Speaker #0

    Oh, beaucoup, oui.

  • Speaker #1

    Vous commencez sur les municipales, puis vous êtes en même temps sur Valéry Giscard d'Estaing, sur Chirac, sur Mitterrand.

  • Speaker #0

    Ça, c'est un moment incroyable. Je ne comprends même pas, d'ailleurs, que ça ait pu exister. À l'époque, il n'y avait pas d'agence de publicité politique ou de communication politique. Simplement, le directeur des campagnes était chargé de faire l'affiche. Parce que la communication des politiques se résumait à une affiche et des tracts. Rien d'autre. D'ailleurs, il n'y avait pas de télévision à ce moment-là. Donc, moi, je reçois Jean-Pierre Soissons, qui était le directeur de campagne de Valéry Giscard d'Estaing, qui me dit Est-ce que tu es prêt à faire une affiche ? J'ai dit Bien sûr, d'accord, je me mets au boulot. Mais une semaine après, je reçois le patron d'ailleurs de Davaz de l'époque, c'est très marrant, qui représentait François Mitterrand, qui me dit Est-ce que tu peux me faire une affiche ? Parce que le brief, c'était ça. On ne me disait même pas Je suis de droite, je suis de gauche On ne me disait pas Voilà ce que je veux dire On me dit Fais-moi une affiche 3 jours après... Goudard avec Brochand, qui était le patron de DDB à l'époque, étaient les publicitaires de Chirac. Ils me disent, écoute, on a les photos magnifiques, c'est les photos qu'ils avaient faites pendant le photographie américaine, mais on n'arrive pas à trouver le slogan. Viens nous donner un coup de main. Et moi, le dimanche, je vais leur donner un coup de main. Je dis, ben voilà, moi, je crois que je pourrais dire La France qui ose, la France qui gagne le slogan qui a traîné dans les guêtres de Chirac pendant 20 ans. Et un jour, je descends dans la rue et je vois mes trois affiches dans la rue. Je dis, mais... Incroyable ! Il n'y a personne qui ne dit rien. Après la campagne... Alors les trois affiches, dans les trois affiches, il y avait ma plus belle affiche, qui n'est pas la France tranquille. Il y avait l'affiche de Giscard qui disait la majorité aura la majorité. Ils l'ont eue, c'est même la dernière fois où ils l'ont eue. Il y avait la France qui ose et il y avait cette très belle affiche pour Mitterrand qui était le socialisme, une idée qui fait son chemin. Il y avait une photo de Mitterrand. Moi, je voulais que la photo de Mitterrand, ça soit la photo de De Gaulle sur les grèves d'Irlande et que ce soit les photos. La photo de Mao Tse-tung, en complet blanc comme ça, sur les grèves du Yangtze-Kiang. Et la photo est magnifique, il est sur les grèves de Biarritz, de la Côte Basque, etc. Je lui avais acheté une longue écharpe rouge, etc., qu'il a gardée pendant toute sa campagne. Et je pense que c'est ce qui m'a fait rentrer en communication. Parce que trois ans après, c'était les présidentielles. Donc moi j'écris à mes trois clients. Je lui ai dit écoutez c'est moi qui ai fait votre affiche, un peu par inadvertance, parce que j'ai fait aussi celle de vos concurrents. Mais cette fois-ci je voudrais que les choses soient sérieuses, je voudrais que à l'américaine... Et à l'anglaise, on a un contrat qui nous donne une exclusivité réciproque et qu'on ne puisse pas faire, même Créatif ne puisse pas faire, ce n'est pas très démocratique, faire les trois campagnes. Le seul qui me répond, c'est François Mitterrand. D'un petit mot que j'ai perdu en plus, d'un petit mot de sa main, il me dit si vous êtes libre demain à 13h, rendez-vous à telle adresse pour déjeuner.

  • Speaker #1

    C'est vrai cette histoire du pactole ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'y arrive. Devant un tout petit restaurant près de la rue de Bièvre, je ne sais pas s'il existe encore, près de la rue de Bièvre, il avait son petit hôtel particulier, tout petit, parce qu'il faisait 60 mètres carrés. On pensait qu'il avait un palace et il avait 60 mètres carrés. Je lève les yeux, le pactole. Je dis ça y est, c'est parti. Et là, j'ai eu droit à un numéro de charme de François Mitterrand qui ne fait qu'une fois par personne. Quand il veut vraiment séduire, mais quel dommage qu'il n'ait pas été filmé, c'était un vrai petit bonheur. Et c'est là qu'on décide de se retrouver tous les lundis matins de midi à 1h pour faire la campagne. Et ça a failli s'arrêter au bout de la troisième fois, parce qu'au bout de la troisième fois, Mitra était un peu en retard, il était presque 1h30, or il avait rendez-vous à 1h. Chez Leap. Et il me dit, c'est gala, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je n'ai pas de chauffeur, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je dis, bien sûr, président, j'ai ma voiture au coin de la rue, on descend dans le coin de la rue. Moi, je ne me méfie de rien, j'étais dans mes nuages, etc. Et il découvre la voiture, c'était une Rolls. Parce que je n'ai rien raté de toutes les conneries que l'on pouvait faire dans les années 80. Il n'y a pas eu que la Rolex. Il y a eu toutes les erreurs possiblement. Et il me dit, mais c'est gala, je vous vire. Il faut passer votre vie à me dire que chaque signe a un sens. Je dois faire attention à tout. Moi, je me suis rhabillé pour faire plus socialiste. Je voulais que j'arrive avec ce symbole de la richesse incongrue. Chez Lippe, qui est le restaurant préféré des journalistes, vous êtes où ? On va y aller à pied. J'étais allé à pied, je me suis précipité à l'agence, j'ai réuni les créatifs, j'ai dit j'ai reçu la leçon de communication de ma vie. J'ai vendu, j'ai mis tout de suite une petite annonce sur la Rolls à moitié prix. Elle s'est vendue dans la nuit, elle s'est vendue dans la nuit et je n'ai plus jamais touché de Rolls de ma vie.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'il a été assez rugueux avec toi.

  • Speaker #0

    Oui, je finis. Le Citroën, c'est quand même mieux.

  • Speaker #1

    C'est quand même le budget de votre vie, ça, Citroën.

  • Speaker #0

    Oui, mais en plus, quand François Mitterrand me dit Est-ce que vous êtes d'accord pour faire ma campagne ? Je dis Oui, Président, mais je suis obligé de demander à mon gros client. Citroën, c'était 70% de l'agence. Donc, il faut que j'aille demander au Peugeot. Parce que le Peugeot n'est évidemment pas très mitterrandien. Je vais voir Jacques Alvé, et il est formidable parce qu'il me dit écoutez, je ne devrais pas vous autoriser, mais ça me flatte quand même que Mitterrand vienne me mendier mon publicitaire. Mais je demande une seule chose, il roule en Renault, je ne vous autorise à le faire que s'il roule en Citroën. Et donc je vois Mitterrand, je dis je suis désolé, il faut que vous rouliez en Citroën. Il dit mais je n'aime pas les Citroën, ils sont trop suspendus, moi j'ai besoin de quelques-uns durs comme dans les Renault, etc. Parce que j'ai toujours mal au dos. Je lui ai dit, écoutez, moi je vais vous en faire une sur mesure. Et je fais une voiture sur mesure, c'était une CX. Elle était socialiste à l'extérieur, toute grise, etc. Tout était peint, c'est devenu à la mode après. Tout était peint, les enjoliveurs et tout ça. Et à l'intérieur, c'était une voiture de riche. Il y avait du bois de rose pour qu'il puisse écrire. Les cuirs étaient moelleux, etc. Et Mitterrand fait toute sa campagne en Citroën. Et moi, j'avais dit à Paris Match de faire la première photo de Mitterrand, faire la couverture et la double centrale de match. J'ai dit à lui que je devais venir à Château-Chinon, je me disais que je me débrouillerais pour que le président me donne son heure exacte de départ. Je serais le seul journaliste à pouvoir le photographier et je préviens Mitterrand que tout est organisé. Le jour J arrive, Mitterrand est élu, c'est le bonheur absolu. À 22h, il prend sa voiture pour entrer à Paris. Orage fou ! Et à ce moment-là, panne d'essuie-glaces de la Citroën. Et donc, il est obligé de prendre la voiture qui suit, qui est une Renault. Et ces salauds de Paris Match, ils sortent quand même.

  • Speaker #1

    Vous dites du mal de Paris Match, maintenant. Oui,

  • Speaker #0

    ils sortent quand même la photo. Et ils disent, premier ratage du Mitterrand.

  • Speaker #1

    C'est assez amusant. Vous en avez fait gagner plein des présidents à travers le monde. Mais il y a eu un échec.

  • Speaker #0

    Il y a eu un échec. Parce que j'ai fait 20 campagnes présidentielles. J'en ai fait 4 en France. Trois pour Mitterrand et une pour Jospin et j'ai fait les autres en international. Et Jospin, c'est mon grand regret parce que Jospin était un très grand Premier ministre, ça aurait été un grand président et la France fabrique rarement de grands présidents qui étaient prêts pour gouverner la France, mais... Il avait une sorte de réticence de la communication. Par rigueur, par honnêteté, il ne voulait pas que ce soit les images qui remplacent le fond de son projet, le fond de sa pensée. Et il ne voulait surtout pas que la télévision, qui s'est toujours livrée... à des émissions un peu populaires, sortent de la vérité et de la rigueur qu'ils voulaient à la politique. Je me souviens que quatre semaines avant l'élection, les choses commençaient à tourner. Je lui dis Écoutez, Président, il faut d'abord que vous présentiez votre femme aux Français. Parce qu'en France, on élit un couple. Et elle ne voulait pas. Mais il faut que vous vous forciez, c'est obligé. Deuxièmement, j'ai obtenu de Michel Drucker qu'il fasse un spécial dimanche avec vous et votre épouse. C'était le 23 février. Il y avait le best-of de l'année et puis il y avait 5 ou 6 stars qui venaient. C'était la bonne année à tous les Français et vous étiez là avec votre femme devant tout ça pendant 2 heures de télé. Ils vont changer un peu les choses, ils vont stopper le début de chute parce qu'on avait commencé à 53. Le début de chute des sondages. Elle me dit oui mais je ne veux pas faire ça et puis ma femme ne sera pas d'accord. Une fois de plus vous allez me faire jouer les pantins publicitaires. Une ministre avec beaucoup de gentillesse et beaucoup de respect, c'est un être très extraordinaire. Mais je lui ai dit, écoutez, laissez-moi convaincre votre femme, organisez-moi un déjeuner avec elle. Et il m'organise un déjeuner avec Ségolène Royal, il y avait un ministère de l'époque, donc on est là tous les trois. Et Ségolène Royal, elle adore la pub. Oui,

  • Speaker #1

    elle est plutôt l'inverse.

  • Speaker #0

    Donc quand je raconte mon histoire, elle me défend à mort, etc. Et elle arrive à convaincre Mme Jospin. Donc j'appelle Lionel, je dis ça y est, ta femme est d'accord, j'appuie sur le bouton pour qu'on fasse l'émission, il était à trois ou quatre semaines de l'émission, et il me dit écoute, laisse-moi une dernière fois en parler ce soir, et je t'appelle demain matin à 7h. A 7h il m'appelle, il me dit tu vas m'en vouloir beaucoup, tu vas être fâché, je ne peux pas, c'est pas digne de moi, c'est pas digne, je sais que c'est l'habitude, mais c'est pas digne d'un président, c'est pas comme ça qu'on doit faire une campagne d'information, une campagne présidentielle aujourd'hui. Cette émission, d'après les politologues, pouvait ramener 400 000 votes. On a perdu à 175 000. Par rigueur, par honnêteté professionnelle, c'est ça qui est lamentable dans la politique. C'est ça qui, par moments, donne le dégoût de la politique. Parce que c'était qui était le plus sincère de tous, qui était le plus rigoureux de tous, qui était le plus près de tous à gouverner la France, et qui voulait le faire à cœur ouvert. face aux Français et pas en utilisant les artifices de la communication présidentielle, a perdu à son son de l'Union.

  • Speaker #1

    Mais ça veut dire que vous, qui êtes un proche de Sarkozy, vous êtes mis en marche après avec Emmanuel Macron. Vous trouvez qu'ils ont moins de rigueur face aux médias, face au système médiatique ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, bien sûr. La campagne de Macron, c'est une campagne magnifique de communication. En marche, c'est génial. Je me souviens d'ailleurs qu'un jour, il est venu dîner à la maison avec sa femme. Il m'a dit, je voudrais que tu m'écrives un slogan. Mais je lui ai dit, mais ton slogan, tu en as ? Mais non, je n'ai pas de slogan. Mais tu es En Marche. Je lui ai dit, mais En Marche, ce n'est pas un slogan. C'est le plus beau slogan de tous les temps. Parce que non seulement c'est un slogan, mais en plus, c'est le cri d'amour. Et puis, c'est le cri de guerre. Donc, tu ne vas certainement pas, si tu gâches ça. Il voulait vraiment abandonner En Marche. Et puis, je lui ai dit, en plus, En Marche, ça va donner des marcheurs. Donc, il ne faut surtout pas y toucher. Il m'a écouté.

  • Speaker #1

    Et il a eu raison visiblement. Est-ce que devant moi, c'est le fameux César pour Citroën ?

  • Speaker #0

    C'est le fameux César parce que lorsque le César a été créé par César, pour l'organisateur des Césars, qui pour cette première année, c'était je crois en 87, avait demandé à l'ensemble du cinéma d'abord de juger les meilleurs films, les meilleurs acteurs, les meilleures actrices de l'année. Et question subsidiaire, quelle est la campagne de publicité qui vous a le plus étonné cette année ? J'ai eu beaucoup de chance, c'est les chevrons sauvages qui ont été choisis et qui ont reçu cet Oscar, que je sois allé chercher. Une semaine après, les délégués du cinéma sont allés rencontrer Craven, qui était l'organisateur de la manifestation. Il a dit écoute, on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Voilà, ils ont choisi les torchons, ils ont choisi le cinéma, alors qu'il fallait garder les serviettes de la pub.

  • Speaker #1

    C'est le seul César qui a été attribué à une publicité.

  • Speaker #0

    C'est le seul, il n'y en aura jamais d'autre. C'est le seul César. J'étais très ami avec lui, il est mort dans mes bras. Parce qu'il a passé ses dernières vacances chez nous en Corse, il est revenu, il s'est alité. Et moi tous les dimanches quand je revenais de ma maison de vacances, j'allais le voir, je me mettais dans le lit avec lui et je lui racontais les potins de la semaine. Je l'ai connu parce qu'il est venu dîner un jour à la maison. J'avais un mur à l'époque où je collectionnais les boîtes publicitaires, les bouillons cubes et tout ça. Et il a regardé et il m'a dit je vais compresser ta passion Il m'a envoyé son assistant deux jours après qui a raflé toutes les boîtes. Et un mois après, il est arrivé avec un magnifique tableau qui est grand comme ça, etc. Qui est un cube. Je fais de toutes mes boîtes publicitaires, aller à compresser ma passion, c'est ça, mais avec des boîtes publicitaires sur 2 mètres de haut, mais 2 mètres de large.

  • Speaker #1

    Jacques, puisque quand même le sujet du jour c'est l'amour, comment ne pas parler de la fin de ton livre qui m'a, je le confesse, fait pleurer. C'est très belle lettre à ton fils, à tes filles, à ta femme.

  • Speaker #0

    Écoute. C'est le but du livre, parce que le but du livre, bon, c'est d'amuser un peu les gens au début, mais de leur dire, attention, dans ce monde qui s'autodétruit, dans ce monde qui ne sait que distiller de la haine, dans ce monde qui ne croit qu'au malheur, qui agit très peur, et qui ne sait que voir la vie en noir, c'est là où il faut agir. D'ailleurs, Pierre Dacq disait, si on mettait un peu de rose dans notre matière grise, on aurait moins d'idées noires. Et la façon de mettre un peu de rose... Rose, parce que rose c'est la couleur de l'amour. C'est de mettre un peu d'amour dans sa vie. Mais l'amour, elle est la mal aimée. L'amour, elle est l'ignorée, la laissée de côté. Vous n'avez jamais un homme politique qui parle d'amour. C'est hallucinant. Et donc, j'essaye de faire passer le message que on pourrait peut-être un jour tous se donner la main pour essayer que l'amour prenne la place de la haine dans ce monde des terriens. Et pour ça, il faut aimer les gens.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que tu fais d'ailleurs, ce que tu dis à ton ami Jean-Louis Borloo quand tu le croises en voiture, il est avec sa femme et tu lui dis n'oubliez pas de vous aimer.

  • Speaker #0

    Moi tous les matins quand je me réveille, et encore ce matin, Sophie ma femme me dit mon chéri tu es beau, je t'aime, tu es beau ? Je dis mais Cahuzac est passé dans la nuit, il m'a planté des cheveux, je me précipite devant mon sale miroir de nona génère. Je dis bon ta femme est amoureuse puisque l'amour est aveugle. Et je pars, retourne. J'ai trouvé ma maîtresse. Et ma maîtresse, elle est là. Le lit de ma maîtresse, c'est ma table de travail, qui est encombrée. J'ai deux amours, l'amour fou de ma femme et l'amour fou de la pub. Et plus on donne à l'amour, plus l'amour vous rend de l'amour. Plus on l'honore, plus il vous honore. Plus on le gratifie, plus il vous gratifie. Donc, cultivons l'amour et tout ira mieux. Et l'amour, c'est l'optimisme. Voilà, les optimistes. d'inventer l'avion, les pessimistes le parachutent. Restons dans l'avion, accrochons-nous dans l'avion. Aimons-nous les uns les autres. Le premier publicitaire du monde, c'est Jésus-Christ. Il a tout inventé de notre métier, le slogan, aimons-nous le monde du monde. Le logo, la croix, qui 2000 ans après, 2000 ans après, existe encore. Et il a même inventé la promotion, parce que lorsque la fréquentation baissait, il faisait un miracle et les ventes reparaissaient.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Jacques Seguéla. Je rappelle le titre de votre livre, 90 ans d'amour, c'est Cheplon et je ne peux que vivement vous le recommander. C'est un plaisir qu'on lit d'une traite. Merci Jacques. Merci.

Description

Jacques Séguéla et moi… Voilà ce que je fredonnais sur le chemin de la Maison Havas, un air emprunté à Vincent Delerm qui lui penchait plutôt pour Fanny Ardant.

Des noms célèbres il y en a eu : connus, reconnus, aimés, respectés... On a parlé de Gainsbourg bien sûr, pas si Gainsbarre que ça. De César et de l’unique récompense portant son nom, offerte à la Publicité, de Citroën, la marque d’Amour de Jacques, du Dalaï-Lama, de Dali et ses étranges méthodes, de politique aussi bien sûr (Mitterrand, Sarkozy, Macron, VGE, Pompidou qui s'est retrouvé malgré lui, égérie publicitaire pour Mercury)...

Je ne vais pas citer ici tous les noms qui racontent l’histoire de Monsieur Séguéla, Daron de la Pub s’il en est ! lls sont beaucoup trop nombreux. Jacques est un amoureux de l’Amour, de sa femme et de la Publicité et c’est l’histoire qu’il a fait raconter à d’autres, par malice ou par pudeur, je ne saurais toujours pas le dire aujourd'hui.

Quel bonheur en tout cas d’avoir passé un moment suspendu dans le temps avec l’incroyable, le facétieux Jacques Séguéla à l’occasion de la sortie de son livre : 90 ans d’Amour (chez PLON). 


Merci Jacques, du love sur toi. La Publicité est définitivement devenue, grâce à toi, un acte d'Amour. 


Un podcast proposé par François Gombert. 


RDV sur le site de Com'On en Parle. https://www.comonenparle.fr/2022/11/29/jacques-seguela-90-ans-damour-70-ans-de-pub-et-quelle-vie/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis François Gombert. On a 20 ans que je vis sur la planète communication et que ces incroyables métiers me passionnent. J'avais envie de créer un truc, un objet numérique, un truc qui parle des experts de la communication, du marketing, de l'influence, des relations publiques, de la publicité bien sûr, des affaires publiques, du conseil aux dirigeants, aux politiques, de tous ces experts qui mettent leur expérience et leur stratégie au service des marques, pour laisser des marques d'organisations publiques, d'entreprises, d'associations, de personnalités, de dirigeants. Chaque épisode, son invité. Chaque épisode, sa thématique. Vous écoutez comme on en parle. Le podcast qui fait savoir ce que vous savez faire. Hey hey hey vous écoutez comme on en parle le podcast qui fait le tour de la planète communication Un grand merci à vous toutes et tous, car encore une fois cette semaine, nous sommes classés cinquièmes dans la catégorie business marketing de Apple Podcast. Du love sur vous. Et en parlant de love, je vous présente sans plus attendre notre invité du jour qui a l'élégance et la gentillesse de me recevoir dans son bureau, dans la maison Avas. Avas dont il est le S, l'enfant terrible et en même temps, ces mots ne sont pas choisis au hasard, le daron de la pub française, européenne et qui sait, mondiale.

  • Speaker #1

    J'aime bien que tu dises maison. Parce que la maison a été fondée en 1850 par l'inventeur de la publicité, qui n'est pas un Américain, qui n'est pas un Anglais, qui est un Français bien de chez nous et qui s'appelle Charles Abbas. Et je ne sais pas pourquoi les publicitaires ne s'en orgueillissent pas de ça. Parce qu'on est les inventeurs de la pub. Les Américains arrivent 20 ans plus tard. Et Charles Abbas n'a pas inventé que la pub, il a inventé d'abord l'agence de presse, l'AFP, qui existe toujours. Il y a toujours eu. Deuxièmement, l'agence Média, elle est en bas, au premier étage. Troisièmement, l'agence Publicité, la maison créative, elle est là, sur les autres étages. Et il est même allé plus loin, il a inventé la première maison d'édition, en regroupant des petits éditeurs comme Editis. Lorsqu'on en parlera, quelle est la supériorité d'Avast sur toutes les autres agences du monde, c'est qu'elle est adossée à Vivendi, c'est-à-dire qu'elle est en train de passer de l'advertising... à ce que j'appelle l'advertainment, c'est-à-dire l'entertainment comme nouveau média des marques et de la communication.

  • Speaker #0

    Vous l'aurez deviné, c'est M. Jacques Séguéla qui nous reçoit aujourd'hui dans son bureau, empli d'histoires, de récompenses. Il y a beaucoup de lions.

  • Speaker #1

    C'est les cognons, ils commencent là-bas dans la salle de conférence. J'ai vu, j'ai vu. Et ils finissent chez Yannick, c'est derrière, c'est le bureau de Yannick. Oui, j'ai vu. J'ai la chance de... De ne plus être éloigné de chez lui que d'une glace de 5 cm.

  • Speaker #0

    Et c'est pour toutes ces choses que nous sommes là tous les deux, Jacques et moi, pour parler d'amour et de publicité à l'occasion de la sortie de son livre. 90 secondes d'amour, pardon, qui sort chez Plon. Donc je me permets de présenter rapidement, si tant est qu'on puisse le faire, ton incroyable livre que j'ai adoré, vraiment, je te le disais tout à l'heure.

  • Speaker #1

    On peut recommencer ? Tu peux redire une deuxième fois ?

  • Speaker #0

    Oui, je peux dire que j'ai vraiment adoré...

  • Speaker #1

    On ne s'arrête là. Ce n'est pas la peine d'aller plus loin. Tu as tout dit, tout est résumé.

  • Speaker #0

    Tout est résumé, pas tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu rentres chez toi, je rentre chez moi.

  • Speaker #0

    Quelle vie en tout cas ! Et je vais me permettre de reprendre à mon humble niveau les très beaux mots, les doux mots, les mots parfois bleus de votre amie, j'imagine en tout cas Jean-Louis Borloo.

  • Speaker #1

    Ah oui, quelle belle préface, quel beau cadeau.

  • Speaker #0

    Une magnifique préface.

  • Speaker #1

    Magnifique préface, c'est une boule de tendresse. Oui, c'est l'homme à la fois le plus raffiné, le plus intelligent, le plus proche, à la fois le plus discret, le plus discerne que je connaisse. Et on a eu un coup de foudre.

  • Speaker #0

    Il vous le rend bien en tout cas. Il écrit donc dans cette préface, ce n'est pas un livre, c'est une rencontre. Je crois aux rencontres, écrit Jacques. Elles sont les carrefours des routes de notre vie, à la condition express de vous y entraîner, de nous emmener sur les chemins de traverse. Jacques met en scène de vrais personnages qui ont jalonné sa vie, créant un nouveau genre, un genre nouveau. Une forme de réelle poésie, j'aime beaucoup ce mot réelle poésie qui colle assez bien au livre.

  • Speaker #1

    Absolument, et d'ailleurs il est... Quatrième de couverture du livre, etc. La égalité avec l'auteur, parce que je trouve que ces six pages de préface valent les 250 pages du livre.

  • Speaker #0

    Elles sont en tout cas très belles. Donc, s'il te plaît, dessine-moi un mouton, demande le petit prince. Dessine-nous le bonheur Jacques. Et il le dessine avec une balade poétique de 90 ans, que vous n'avez pas encore. Vous avez pour l'instant 88 ans.

  • Speaker #1

    J'ai, j'ai, j'ai dans deux mois 90 ans, parce que... Moi je suis un créatif, donc je compte ma vie à partir de l'instant de la création. C'est un instant de l'amour, d'un acte de l'amour. Et donc, je suis un enfant du bonheur, un enfant de l'amour, puisque mes parents faisaient leurs études ensemble à la faculté de médecine de Montpellier, qu'ils se sont connus là, que mon père est tombé fou amoureux de ma mère et vice-versa, qu'ils m'ont conçu et que mon père est allé demander la main de ma mère à ma grand-mère, qu'il a refusé parce qu'il n'était pas noble. Mais tout a commencé là, et donc il a pris par la main, ils sont échappés. à Paris et ils ne sont plus jamais revenus à Montpellier. Et donc, bien qu'ayant 89 ans dans deux mois, j'ai 90 ans. En plus, ça tombe bien parce que la publicité, ça aime les chiffres ronds.

  • Speaker #0

    C'est vrai. Pas pour tous, mais en tout cas, on le souhaite tous. Vous allez du coup vous devancer un petit peu mes questions, mais abordons alors ce livre dont vous êtes le héros. Sans trop en dire pour laisser le plaisir de la découverte. Non,

  • Speaker #1

    je ne suis pas le héros et je ne veux surtout pas être le héros. Ce n'est pas un livre où je me raconte. Je me suis raconté déjà dans les 29 premiers, ça suffit. C'est un livre où je les raconte et où ils se racontent à travers moi.

  • Speaker #0

    Mais avant tout, Jacques Seguéla, j'ai quand même une question. Parce que j'ai lu le livre et toutes ces aventures, toutes ces anecdotes folles, toute cette passion, tout cet amour. D'où vous vient toute cette énergie, cette force, cette passion ? Et pour les autres ? mais aussi pour des marques comme Citroën.

  • Speaker #1

    Écoute des au hasard de la vie. Moi, je n'ai rien programmé de ma vie. J'ai toujours essayé la vie de me mener par le bout du nez. Elle m'a amené dans les pires. Dans le début du livre, tu verras, j'ai commis tous les péchés que peut commettre un gosse rebelle. J'aurais été à deux mois de finir en taule.

  • Speaker #0

    Oui, le coup du 6-35, c'était pas mal.

  • Speaker #1

    Absolument. Et donc, je n'ai jamais planifié ma vie. Je n'ai jamais eu de plan de carrière. Je n'ai jamais voulu... D'ailleurs, j'étais parti pour être pharmacien. Et je me retrouve publicitaire en ayant été un journaliste béni des dieux puisque j'ai commencé à Paris Match et j'ai fini avec Pierre Lazareff qui décidera de ma carrière. On va en parler tout à l'heure.

  • Speaker #0

    On va en parler tout à l'heure. Alors avant de rentrer quand même dans le détail du livre, j'aimerais savoir, tu n'es pas sur les réseaux sociaux, tu n'aimes pas du tout les SMS. C'est écrit plusieurs fois dans le livre. Mais il y a quand même dans ce livre un amour qui transpire. C'est impossible de passer à côté. C'est quoi pour toi Jacques Seguéla ? Et pour Avas, la maison Avas, la communication aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La communication aujourd'hui, elle est de veiller nuit et jour, avec tout son talent, avec tout son allant, avec toutes ses idées et avec toute sa force, la survie des marques. 80% des marques que nous avons, il y en a créé quelques-unes, que nous avons consommées au XXe siècle sont mortes avec le siècle. 80% des marques qui existent aujourd'hui, que l'on côtoie aujourd'hui, vont mourir avec le siècle. Donc, évidemment que le premier métier de tout publicitaire, c'est de vendre des produits. Alors, moi, je vends des voitures, je vends des yaourts. Mais ce n'est que la vague, le profond, la densité du fond de la mer, c'est de rendre les marques éternelles. Et j'ai découvert ça. Grâce à Mitterrand, il était élu depuis quelques semaines, il me téléphone et il me téléphone directement. C'est la première fois que j'avais directement au téléphone. Allô, c'est Gala, ici François Mitterrand. J'ai cru que c'était un canular, en plus c'était l'époque des canulars téléphoniques. J'ai balbutié un peu, mais écoutez, c'est Gala, c'est vraiment moi. Est-ce que vous êtes libre à déjeuner, M. le Président ? J'arrive, précipite à l'Elysée, on est dans sa petite salle à manger au rez-de-chaussée avec la bibliothèque. Eh bien, Gala, je vais vous faire un beau cadeau, parce que vous m'avez... J'ai fait un beau cadeau. Moi j'avais offert la campagne. Parce que je ne voulais pas que ce soit un acte de péripaticien, je voulais que ce soit un acte d'amour. Et je voulais que ça change la façon de faire de la politique à la française alors que c'était des anglais et les américains qui étaient les rois du genre à l'époque. Et il me dit écoutez, vous vous êtes un peu compliqués les créatifs, je ne sais pas ce qui peut vous faire plaisir. Prenez une semaine, réfléchissez bien et dites moi. Semaine suivante, moi je l'ai vu toutes les semaines pendant 14 ans, peut-être pas toutes les semaines. Il y a au moins une semaine sur deux. Donc, je dis, président, moi j'ai trouvé, je veux passer une journée avec le Dalai Lama. Il me dit, monsieur, vous êtes fou. Vous pensez que moi j'appuie sur un bouton et que le Dalai Lama arrive ? Non mais, taisez-vous, trouvez une autre idée et revenez me voir. Je ne trouve pas une autre idée, je maintiens. Et six mois plus tard, il m'appelle, sa secrétaire m'appelle, elle me dit, le président ce soir a un dîner. un peu intime. Il aimerait bien que vous soyez là avec Sophie, si vous pouvez venir. on arrive.

  • Speaker #0

    Sophie qui est votre femme.

  • Speaker #1

    Ma femme, 8h. Daniel Mitterrand, François Mitterrand, Sophie, moi, Chesvin. 5 minutes, 10 minutes. Si je te permets d'être aussi en retard avec le président de la République, 15 minutes, arrive le Dalai Lama. Waouh !

  • Speaker #0

    C'est très bien raconté.

  • Speaker #1

    Et le Dalai Lama dit, et Mitterrand dit au Dalai Lama, waouh ! Voilà, c'est mon publicitaire, etc. Je voulais lui faire un cadeau, le cadeau c'est vous. Et le Dalai Lama me dit, mais pourquoi faire ? Parce que je veux que vous évangélisiez la jeunesse française. Donc je vais demander à la Sorbonne de nous prêter son grand amphithéâtre. Et tous les étudiants et tous les jeunes autour d'eux, ils veulent écouter le Dalai Lama, auront une heure où ils pourront poser toutes les questions du monde. Il a fait ça de 8h du matin à 18h.

  • Speaker #0

    C'est effectivement un épisode très bien raconté dans le livre et très intéressant. Je vais revenir un petit peu en amont.

  • Speaker #1

    Tu me coupes là, mais c'est le moment le plus important de ce qu'on va se dire. Parce que cette visite du Dadaï Lama, elle m'a ouvert les yeux. Car il s'est assis, et peut-être pour se faire excuser, il regarde Mitterrand dans les yeux et il lui dit Connaissez-vous cette dernière fable tibétaine ? C'est un vieux bonze qui donne à son jeune disciple sa première leçon de philosophie. Et qui lui dit Je vais te poser trois questions, réfléchis bien et réponds-moi. Première question, quel est l'envers du blanc ? Le noir ? Non, non, non, non, réfléchis. Deuxième question, quel est l'envers du jour ? Alors le jeune disciple réfléchit. Maître, la nuit, bravo, voilà, tu as réfléchi, c'est la bonne réponse. Dernière question, quel est l'envers de la vie ? Et le jeune moi réfléchit, dit maître, il n'y a pas d'autre que la mort. Tu n'as rien compris, dit le Daïlama. L'envers de la vie, c'est la naissance, c'est la définition de ce qu'est la publicité. Je réponds à ta question profondément. Très profondément, parce que la publicité, généralement, elle se joue dans la superficie des choses. Non, elle doit se jouer dans la profondeur des choses et la profondeur de la vie. Parce que mon métier, c'est de faire que la marque de ma vie, moi je mourrai, mais qu'elle continue et qu'elle continue à vivre. Et quelle est la seule façon de rendre une marque immortelle ? C'est de l'appliquer, la seule chose qu'on a inventée dans ce monde et qui est éternelle, C'est l'âme. Donc mon métier, c'est de créer, de protéger. de nourrir, de me battre pour l'âme des marques.

  • Speaker #0

    C'est quoi votre marque préférée d'ailleurs ?

  • Speaker #1

    C'est une question. Il y en a qu'une. La réponse, pardon. Louis Vuitton, j'ai été le premier publicitaire de Louis Vuitton. Raffelot, on est fou de Raffelot. C'est moi qui ai trouvé la marque, qui ai trouvé le slogan. Fond la forme. J'ai trouvé la marque, qui a trouvé le slogan. Etc.

  • Speaker #0

    Les Restos du Coeur.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment j'ai pu en faire. Un café nommé Désir pour carte noire et un avant Citroën, etc. Mais mon plus beau slogan, c'est Picasso. Parce que je me souviens que Citroën était dans une mauvaise passe. On frôlait les 7% de parts de marché. Peugeot avait presque l'intention de supprimer Citroën, de le fusionner avec Peugeot. Donc c'était une question de vie ou de mort. Et le président du moment me dit, écoute, voilà, j'ai une voiture, mais bon, elle est ce qu'elle est, elle n'est pas très extraordinaire. Et j'ai oublié le nom tellement le nom était ridicule. Et c'est là, je ne sais pas quoi. Donc il faut qu'il me fasse un lancement magnifique sur cette voiture-là. Je ne peux pas aller nul. Et son nom est ridicule. Il me dit, écoute, si tu as une meilleure idée, tu as 48 heures, parce que dans 48 heures, ça va être gravé sur les voitures. Et par une sorte de miracle, je déjeune avec le petit-fils de Picasso, Olivier Picasso. Et je lui dis, écoute, j'ai une idée. Est-ce que tu penses que ta famille accepterait que Citroën... prennent le nom de Picasso pour désigner son prochain modèle. Miracle, ils acceptent. Je me souviens que la première annonce pour lancer la chose, qui était une pleine page dans Le Monde et dans Le Figaro, où il y avait Picasso avec son pilau vert rayé, bleu et blanc, et le texte écrit comme par un petit gosse, disait Dis maman, pourquoi papa, il s'appelle comme la voiture ? Ça a failli s'arrêter là tellement la famille était folle de rage.

  • Speaker #0

    Il n'y a pas que tu as mis le fou de rage. Il y avait aussi Pompidou.

  • Speaker #1

    Oui, Pompidou. Pompidou, c'est lui qui a créé l'agence. Il nous a fait un cadeau présidentiel.

  • Speaker #0

    Il ne sait rien de le dire.

  • Speaker #1

    En 68, Bernard Roux allait défiler avec les bourgeois sur les Champs-Élysées. Moi, j'allais avec les étudiants flanquer quelques pavés dans la gueule des flics. Je n'en ai pas lancé beaucoup, je n'en ai mis trop pied aucun. Bon, c'était une révolution assez baroque. Et à la sortie de ça, on travaillait dans une agence qui s'appelait AXE, qui appartenait à deux frères d'Amenard. On était là depuis deux ans, on avait multiplié par 5 ou 6 le chiffre d'affaires de l'agence, qui était l'agence en pointe, etc. On leur a dit, écoutez, vous avez compris, 68, c'est le grand partage. Donc nous, on veut bien continuer avec vous, et de nouveau, multiplier par 5 votre chiffre d'affaires, mais il nous faut 20% chacun. Ils ont dit, c'est intéressant, on va en parler entre nous, et si vous voulez, demain matin, on se retrouve à 8h pour en parler. On arrive à 8h à l'agence, ils n'étaient pas là. Sur notre bureau, on avait... Une enveloppe, c'était pour solde de tout compte. On descend en bas, il y avait un bar à putes, c'était une des avenues qui partait de l'Etoile. On est dans le bar à putes et Bernard me dit, qu'est-ce qu'on fait ? Je lui dis, mais on fait rouler ces gars-là. Il me dit, oui, mais enfin, on n'a pas les moyens. Je lui dis, écoute, déjà, voilà mon chèque, toi mets ton chèque. On va vendre nos deux voitures, puis on gratte tout. On essaye de gratter les copains, etc. Il dit, ben d'accord, donc on fait ça, et une semaine après, on dit, ben écoute, qu'est-ce qu'on fait maintenant avec ça ? Je dis, mais on fait de la pub. Ce qui est extraordinaire, c'est que les publicitaires ne font jamais leur pub. Pourquoi ? J'ai le titre que je ne mérite pas de seul publicitaire le plus connu, parce qu'aucun autre n'avait sa pub. Moi, je suis encore en train de la faire à 90 ans. Je n'ai jamais compris, comme s'ils avaient honte de leur métier, mais il n'y a pas plus beau que la publicité, pourquoi on n'aurait pas droit, nous aussi, à être des marques ? C'est bien vrai pour les acteurs, pour les réalisateurs, pour les signastes, pour les artistes, pour les chanteurs, mais pourquoi pas pour les publicitaires ? On est un art mineur, mais on est un art quand même. Et on met tout notre argent sur une page du monde et une page du Figaro. Avec une annonce qui dit, cher annonceur, ou vous avez une agence et on va vous prouver qu'on est meilleur qu'elle, ou vous n'avez pas d'agence et ça y est, ne cherchez plus, c'est nous. On attend une semaine, pas une seule réponse. Et au dixième jour, on reçoit un coup de fil, le seul coup de fil qui ait déclenché la campagne. Deux fois une page pleine d'un certain Wittner qui dit, écoutez, moi je suis l'importateur en France des moteurs Mercury. J'ai besoin d'une campagne, vous avez l'air d'avoir des idées, venez me voir. Et en quittant, je me souviens qu'un de mes reportages à Match, quand j'avais été reporter de Match, était justement de suivre Pompidou, qui passait ses vacances à Saint-Tropez, et je me souvenais qu'il y avait une photo que j'avais faite, qui était très sympa, où il conduisait lui-même un petit dinghy pour aller retrouver son bateau. Il s'est dit, jamais c'était une Mercury, donc je vais. Je revois mes copains, j'essaye de me trouver en douce la photo, etc. Ils piquent la photo et miracle, c'était Mercury. Donc on fait l'annonce et à cette époque-là... L'Express, souvent on appelait ça des osalides, l'Express était entièrement imprimé, mais il n'était pas parti à l'imprimerie. Et il était envoyé à l'Elysée pour dire que la liberté de la presse n'était pas à l'ordre du jour, pour que le président puisse le feuilleter et puisse changer une page s'il avait envie de changer une page, changer un titre. Et donc Claude Pompidou, la femme du président, pousse un cri d'horreur en disant mais qu'est-ce qu'il vous prend ? Vous prenez maintenant pour une star qui fait la publicité des produits Mercury. Et il dit mais j'ai pas vu ça, je sais pas ce qu'il se passe. Il regarde, il téléphone tout de suite à sa vente Schreiber, qui lui n'avait pas non plus vu les choses, qui dit mais je regarde tout de suite, mais qu'est-ce qu'il se passe ? Mais comment cette page a pu se glisser entre autres ? Je l'avais envoyé au dernier moment. dans la dernière seconde où on pouvait encore envoyer une annonce. Comme ça, c'est passé à travers de tout le monde. Et Pompidou dit à Savant-Chevers, je suis désolé, je suis obligé de stopper le journal. Le journal ne paraîtra pas. Il dit, mais écoute, mes exemplaires sont tirés, ils vont être diffusés. Et je débrouille les vôtres, je débrouille les vôtres. François Giroud m'appelle, et bien, vous êtes des petits salopios. Vous avez eu une idée, mais maintenant... Trouvez-en une pour sortir de là. Je le rappelle, cinq minutes après, je lui dis Mais moi j'ai trouvé. On va arracher la page. Et on a une chance folle. La page du Verseau, c'était une page de pub. Donc ça ne gênait pas le rédactionnel du journal. Et donc, il m'amène dans un hangar à 10 km de Paris, où il y avait 40 000 exemplaires. Bon, il dit Mais voilà. L'Express sortait le mercredi, je crois, ou le mardi. Donc on avait 40 000 pages à arracher en trois jours et trois nuits. J'ai mobilisé tous les copains, j'allais dans la rue, je disais, tenez, voilà, 50 balles, venez nous aider, tout le quartier s'y est mis, etc. Et moi, je prévenus la presse qui est venue nous voir en train d'arracher les pages, et donc évidemment a publié la page qui a fait tous les journaux du soir. Et tous les journaux du lendemain et toutes les télés, toutes les télés du soir et tous les journaux du lendemain. Et l'agence est née de notre première annonce. Si je suis publicitaire, c'est à moi de faire ma publicité et d'être finalement la première marque de toutes les marques que je vais servir. Parce que ça me permettra d'ouvrir les portes. Je ne suis pas un chanteur, je n'ai pas besoin qu'on me reconnaisse dans la rue, ce n'est pas mon métier.

  • Speaker #0

    On vous reconnaît dans la rue quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas du tout le but. Mon but, c'est que les annonceurs me reconnaissent dans la rue. Alors ça, ce but-là, je le cultive. Je ne l'ai jamais, jamais lâché.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui a fait scandale, enfin pas scandale auprès finalement du consommateur, mais scandale un peu dans le milieu de la publicité et notamment auprès de Maurice Lévy. C'est le lancement des produits libres de Carrefour. Vous avez 40 ans à l'époque, la campagne cartonne puisque Carrefour lance des produits libres, donc des produits blancs.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et... C'est un énorme succès.

  • Speaker #1

    C'est la campagne qu'on devrait faire aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi ils ne la ressortent pas. C'est les produits blancs, avec une affiche qui était formidable, qui disait on fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a une marque On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il est plus cher. On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a un packaging. C'est finalement une attaque directe de la publicité. Donc j'ai eu tous les publicitaires contre moi. Blanchet a d'ailleurs écrit tout de suite une chronique dans Le Monde pour m'assassiner. Et tout le monde s'est rangé derrière lui. Et puis les annonceurs commençaient à être résistants. Il y avait ceux qui disaient mais pourquoi pas ? et ceux qui disaient mais il faut virer ces publicités qui ne croient pas dans leur métier. Mais pas du tout. Parce que ma réponse, c'est que les produits libres, c'était une marque. Finalement, ça a abusé tout le monde. Voilà. Et aujourd'hui, ça s'appelle les marques distributeurs. Et c'est tellement dommage qu'ils appellent ça des marques distributeurs. Ils sont nuls, les distributeurs. Mais appeler ça des marques libres, enfin, un peu de talent, un peu de mouvement, un peu d'esprit, un peu... Toujours rester sur la platitude des choses. à bonne entendeur mais oui prenez les ailes du désir envolez-vous tu sais c'est quoi la dimension de la publicité c'est Gocteau qui un jour croise Daguilef à l'opéra et qui lui dit quelle est la définition de ton art et Daguilef le danseur dit étonne-moi Génial dit Cocteau, mais c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la poésie. Moi je dis au musée, Cocteau, au musée, le danseur, ça c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la publicité. Oui, la publicité, c'est la poésie. Mais une poésie qui va servir à quelque chose, qui va vendre un produit et qui va le rendre immortel. Est-ce qu'il y a un plus beau métier que ça dans le monde ?

  • Speaker #0

    Et une autre histoire assez savoureuse qui est avec Salvador Dali. Je ne sais pas pourquoi vous êtes lancé là-dedans. Là,

  • Speaker #1

    on doit être en deuxième ou troisième année avec Roux. On s'appelle encore Rousseguela. Keizak va arriver deux ou trois ans après. Et on court les bâtisseurs de maisons parce que c'est la grande mode. Et qu'il y a tous les vendredis matins... Tous les lundis matins, les grandes agences immobilières mettaient en compétition des agences pour qu'on leur amène une annonce le jeudi qui serait publiée le samedi et qui ferait le samedi les ventes du week-end. En plus, c'était millimétré parce qu'on savait au nombre de ventes faites si la publicité était bonne, s'il fallait la reproduire ou s'il fallait la jeter aux orties. Et donc nous, on était les professionnels de ça, on avait pratiquement tous les budgets immobiliers. Et un jour, Publicis, qui s'est dit, mais qu'est-ce que cette petite agence, etc., qui fait de l'agence de publicité immobilière, Publicis décide d'entrer dans la bataille. Nous, on n'avait que des nains comme concurrents. Mais là, tout d'un coup, c'est le géant qui est là. Je me suis dit, il faut que je trouve une idée formidable. Ce qui était obligatoire dans ces publicités, c'est qu'il fallait absolument qu'il y ait un dessin d'architecte qui montre le produit fini, puisque j'ai dit, non. ils ont acheté du vide pour l'instant. Et moi, je me dis, pour taper Publicis, au lieu de faire ce que tout le monde fait, je vais demander à Dali de faire le dessin, ce qui deviendra une peinture, la peinture du final du meuble. Et je vais la baptiser du nom de Totem, parce que Totem, c'est un mot favori de Dali. Et donc, j'arrive, même pas avec une maquette, je raconte simplement les choses, etc. Et je me souviens, applaudissement. Donc je sors, le publiciste passe derrière, il est éjecté, et on me téléphone en disant Vous avez le budget Mais le problème, c'est que je ne connaissais pas Dali. Donc je téléphone à des copains de Paris-Nanay, qui me prennent un rendez-vous miraculeusement avec lui à New York. Je fonce à New York, je le retrouve dans un 5 o'clock, et j'arrive, il était là, assis, avec une japonaise. Absolument sublime, c'était le grand mannequin japonais de l'époque. Et à quatre tables de là, il y avait Andy Varol. Je n'en crois pas mes yeux. Dali, cette fille sublime, Andy Varol. J'arrive, je m'assois à la table. Dali fait un signe, Andy Varol qui vient se rajouter à la table. Et on est là tous les quatre autour de la table. Et je dis à Dali, Dali me dit qu'est-ce que vous me voulez ? Je veux que vous fassiez une publicité. Mais Dali déteste la publicité. Mais faites-vous en fête. Mais... Écoutez, est-ce que vous avez la valise de dollars ? Je dis Oui, elle est là, mais elle est cachée. Évidemment, vous serez payé, vous me direz ce que vous voulez. Et il dit Écoutez, je veux bien la faire, mais il faut passer le test de Dali. Bon, écoutez, je suis présent. Vous voyez la jeune fille qui est là ? Elle a appris la danse balinaise. Et vous voyez ses mains. Elle arrive à branler un homme à l'envers. Oui ? Eh bien, elle va vous montrer. Et elle descend. Moi, je suis accroché à la table. Je me dis, mais qu'est-ce que je fais ? Je me lève, je me planque. Mais il est fou, mais le mec, c'est vraiment Barjot. Un divarole qui éclatait de rire, etc. Et évidemment... La japonaise s'arrête avant le crime et je comprends que c'est une farce qu'il devait faire de temps en temps pour se marrer parce qu'il était au milieu en plus du Pannes-Courte qui était l'endroit le plus couru de New York. Et c'est ce qui m'a permis de décrocher Dali. Deux mois après, il était à Paris et il m'a dit je vais vous faire votre dessin mais je ne peux pas, Dali ne peut pas dessiner une publicité de la main droite. Je dessinerai une publicité de la main gauche. Donc il faut que je... puisse occuper ma main droite et ma main gauche. Donc je ferai votre tableau et en même temps, demandez à la plus jolie fille de l'agence si elle est d'accord pour que je fasse son portrait. Alors la plus jolie fille de l'agence me dit, oui, je suis d'accord, c'est formidable. Tout ça se passait dans l'hôtel qui occupait Thalie d'habitude. Gala était là, etc. Elle commence à poser une première après-midi. Elle lui dit, il faut revenir le lendemain. Elle revient le lendemain. Et elle revient le lendemain. À chaque fois, il disait, mais est-ce que je peux voir mon portrait ? Est-ce que je peux voir mon portrait ? Et quand il a été fini, il lui dit absolument, le voilà, il n'avait peint que son sexe. Et il a demandé à être payé avec la valise de dollars, il avait fait 50 000 euros de l'époque, mais il voulait un bougreau. Le bougreau, c'était le peintre pompier qu'il était en train de remettre à la mode. Donc moi, je m'étais débrouillé pour trouver trois bougreaux, pour qu'il puisse choisir entre les trois bougreaux. Il arrive, il dit, mais ça, c'est mieux que ça, c'est celui-là qui est le bon, donc on s'arrête sur celui-là. Moi j'envoie un petit mot, parce que j'avais raconté l'histoire dans un de mes livres, j'avais reçu une lettre de la cour de Hollande en disant mais vous devez être un escroc ou un incapable, parce que le bougreau dont vous parlez est dans notre salon depuis des années, et pour des années. Ça veut dire que le bougreau était faux, et il est au musée de Dali, à Figueras. Donc personne ne sait qu'il est faux. Mais il est vraiment fort, sauf le prince de Hollande.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui m'a beaucoup amusé, même deux campagnes qui m'ont beaucoup amusé avec Gainsbourg. Une qui n'a pas vraiment touché sa cible et une autre qui n'a pas vu le jour. C'est la fameuse histoire du baron Bic, qui est quand même incroyable.

  • Speaker #1

    Mon rêve, c'était d'avoir la marque Bic. Parce qu'on ne le sait pas, la marque Bic, c'est la marque française la plus connue dans le monde. Parce qu'elle est dans pratiquement 200 pays du monde. Et puis c'est un produit de première nécessité. Et à l'époque, j'étais très copain avec Gainsbourg, parce que Gainsbourg voulait faire du cinéma. Il va le faire, d'ailleurs, il va faire son film, Je t'aime, moi non plus. Et je lui dis, écoute, si tu veux faire du cinéma, fais de la pub, tu vas apprendre le cinéma, parce que finalement, c'est une minute et demie, toi, après, tu en feras une heure et demie, mais c'est la même technique, les mêmes professionnels qui le font. Et un jour, je lui dis, écoute, j'ai un truc pour toi, j'ai écrit un script. Si tu es d'accord, tu le tournes, on fait une maquette, et moi je vais le vendre au bar en bique. J'avais écrit mon script, il arrive dans le studio, à l'heure, parce qu'il était très professionnel, Serge, contrairement à ce qu'on racontait, et il est là, devant un fond noir, et il dit, Moi ma vie est foutue. J'ai vendu tout ce que j'avais à vendre, j'ai vendu mon inspiration à la chanson, j'ai vendu mes poumons à la cigarette, j'ai vendu mon sexe aux femmes. Qu'est-ce qu'il me reste ? Ah ! Il me reste un truc. Il me reste ma barbe. C'est lui qui avait inventé la barbe de trois jours. Alors oui, je veux bien vendre ma barbe, mais à bique. Et il se rasait.

  • Speaker #0

    devant tout le monde. Tout le monde était en train de lui dire pourquoi il a une barre, pourquoi il ne se rase pas, etc. Il se rasait devant tout le monde. J'arrive une semaine après devant le bar en Bic, j'appuie sur la machine, il voit le film, il dit mais ça c'est très marrant, mais moi je ne fais pas de publicité à la télévision en France, mais mon fils Bruno en fait aux Etats-Unis. Donc si vous voulez, je vous obtiens un rendez-vous avec mon fils Bruno. Et il appelle au Bruno devant moi et je prends rendez-vous pour trois jours après à New York. Je saute dans un avion. J'arrive à 9h du matin, à 11h du matin, je suis dans son bureau, je présente le film, il éclate de rire, il dit mais ton film est marrant mais il n'y a pas un américain qui connaisse Gainsbourg. Donc tu peux repartir à Paris, le film existe, il n'est jamais sorti.

  • Speaker #1

    Et il y a donc une autre campagne avec Gainsbourg qui est une campagne pour une marque de lessive qui je crois a vu le jour mais qui n'a jamais touché sa cible.

  • Speaker #0

    Je rêvais de faire une campagne de lessive qui est le rêve de tout publicitaire. Mais en plus, je me disais, si ça pouvait être une lessive un peu de luxe, qu'on puisse dire autre chose que je lave plus blanc Et j'ai la chance de rencontrer le patron de Woolit, qui est la lessive d'Hélénage Délicat, et qui me dit écoutez, donnez-moi une idée Mais je dis que c'est très simple. Au lieu d'avoir pour slogan je lave plus blanc moi je propose comme slogan je lave plus belle Et je demande à toutes les stars françaises, et même quelques stars américaines, Je leur donne 30 secondes ou 45 secondes, qui est le temps du spot que j'ai, pour faire un numéro de séduction pour la marque. Et c'est gratuit. Elles font ce qu'elles veulent, mais elles séduisent en 30 secondes. Et on arrive au jour où c'est la femme de Serge. Et Jane Birkin. Jane Birkin. Ça lui permettait lui aussi d'être le réalisateur du film. Et l'auteur du script. Donc on écrit ensemble une dizaine de scripts, j'amène ça à l'annonceur qui en choisit un, on se retrouve dans le studio, et quand on arrive dans le studio, la situation était tout noire, il y avait juste une lumière qui était sur un petit podium comme ça, qui était un podium qui tournait sur lui-même. On ne comprend pas ce que ça veut dire parce que ce n'était dans aucun des scripts. Et Serge dit oui, mais j'ai eu une idée du dernier moment, vous allez voir, mettez-vous sur le coin, etc. Arrive Jeanne. qui était moulée dans une grande écharpe comme ça, bleue et blanche, aux couleurs de Woolit. Elle monte sur le petit podium et elle tourne avec le podium, alors qu'il y avait deux assistants qui tenaient à l'autre bout l'écharpe. Et quand on arrive au moment où il ne faut pas aller plus loin dans la télévision française, tac, elle s'arrête. Et puis tout le monde applaudit, comme toujours quand on tournait un film. Et à ce moment-là, elle laisse tomber l'écharpe. Je vois mon client qui se décompose complètement. devant Jane Birkin. Il ne m'a même pas dit que ce n'était pas un script qu'on avait écrit ensemble, mais que c'était le script qu'il avait acheté. Il a été décompensé. Le film a eu 100%, à l'époque tout était sondé, a eu 100% d'appréciation. Il n'a pas fait de vente. Alors on a fait un test, une étude pour savoir pourquoi. Parce que les ménagères de moins de 50 ans ont dit, mais moi, je ne veux pas que mon mari voit cette publicité, parce que je sais qu'il me quittera pour Jeanne Berkin.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce que vous écrivez dans le livre que les publicitaires sont des séducteurs pour les ménagères de moins de 50 ans.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, mais là, ça allait trop loin, parce que c'était le mari qu'on séduisait.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    j'entends bien. Donc, si ça avait été Alain Delon, je pense qu'elles auraient été d'accord. C'est possible.

  • Speaker #1

    À 50 ans, vos ouvrages sont maintenant traduits en dix langues, en turc, en russe, en chinois, en japonais et les créations redoublent. Europe 1, c'est la pêche, l'AX Citroën qui a descendu la muraille de Chine. Ça, je l'ai découvert aussi, ce qui était quand même assez incroyable.

  • Speaker #0

    Le révolutionnaire. Ah oui,

  • Speaker #1

    incroyable. La drogue, c'est de la merde. Air France.

  • Speaker #0

    Avec Jean-Marie Perrier, la drogue, c'est la merde. C'était un grand cinéaste publicitaire aux Etats-Unis. Mais en France, je ne sais pas pourquoi, il n'était pas reconnu. Comme toujours, les Français ne reconnaissent jamais les leurs. Et on avait fait le film ensemble, qui a été un très gros succès.

  • Speaker #1

    Et Microsoft pour leurs premières apparitions européennes. À 55 ans, RSCG et Eurocom fusionnent pour devenir Euro RSCG. Alain de Pouziac devient le CEO de la holding Avas Advertising. Et vous êtes finalement le directeur de création et vice-président.

  • Speaker #0

    On devient une vraie agence internationale présente dans... une quarantaine de pays du monde, pouvant prendre des gros budgets mondiaux. Et surtout, pouvant surtout faire que nos gros budgets existants, comme Vuitton, comme Citroën, comme Afloulou et tout ça, puissent profiter de nos agences internationales. C'est donc l'internalisation de l'activité, c'est l'internationalisation de la publicité. Mais le problème est qu'à ce moment-là, nous on appartenait. au vivendi de l'époque qui avait été créé par Jean-Marie Mercier, un espèce de fou.

  • Speaker #1

    J6M, oui.

  • Speaker #0

    Un fou dangereux qui, je ne sais pas pourquoi, avait pris la publicité en grippe et décide un jour de nous vendre. Sans nous le dire, sans le dire à Pouziac le président, sans me le dire. Dans une conférence de presse, on est là au premier rang, il dit mais je mets en vente la publicité. On n'a pas le vent, on est complètement fou, etc. Pour stopper ça, Pouziac se précipite aux Etats-Unis pour faire un achat. Ce n'est pas le moment de vente quand on achète. Donc c'est pour bloquer finalement l'idée de vente de Messier. Et il achète un peu trop vite, sans nous demander notre conseil, une boîte de marketing services, ni faite ni à faire, que l'on paye 2 milliards de dollars, qui en fait emballait un, et qui est confié à notre patron américain pour son management, et il va en rester 500 millions au bout d'un an. Donc on aura perdu 1,5 milliard en deux ans. Et c'est là que Vincent est arrivé, sans se presser.

  • Speaker #1

    Donc à 70 ans, effectivement, Vincent Bolloré, vous 70 ans, Vincent Bolloré reprend Abbas et en devient le président, mais vous gardez la tête de la création. Le groupe va prendre un nouvel essor, 20 000 collaborateurs, déployant 500 agences, 100 pays dans le monde, font rimer créativité et efficacité. Ça ne donne pas un peu le tournis ?

  • Speaker #0

    C'est formidable, j'ai jamais autant voyagé de ma vie. Parce que moi j'ai toujours pensé que la publicité c'était d'abord l'amour. C'est mon livre, 90 ans d'amour, parce que 90 ans de publicité, ou disons 70 ans de publicité, 90 ans d'amour. Et donc il faut aimer les gens, il faut aimer les gens avec qui on travaille. Il faut aimer ses créatifs. Moi ma vie a consisté à sauter d'un avion dans l'autre, pour aller dire à mes créatifs que je les aimais. Et pour les écouter, pour essayer de régler le problème s'il y en avait, et surtout pour leur dire écoutez, maintenant le futur de la publicité c'est des lions à cannes. Donc on va s'y mettre, on va se rever les manches et on va montrer aux américains que les lions ça peut aussi être français.

  • Speaker #1

    Alors je fais un flashback, mais dans votre vie il y a quand même eu la politique. Beaucoup. Il n'y a pas eu...

  • Speaker #0

    Oh, beaucoup, oui.

  • Speaker #1

    Vous commencez sur les municipales, puis vous êtes en même temps sur Valéry Giscard d'Estaing, sur Chirac, sur Mitterrand.

  • Speaker #0

    Ça, c'est un moment incroyable. Je ne comprends même pas, d'ailleurs, que ça ait pu exister. À l'époque, il n'y avait pas d'agence de publicité politique ou de communication politique. Simplement, le directeur des campagnes était chargé de faire l'affiche. Parce que la communication des politiques se résumait à une affiche et des tracts. Rien d'autre. D'ailleurs, il n'y avait pas de télévision à ce moment-là. Donc, moi, je reçois Jean-Pierre Soissons, qui était le directeur de campagne de Valéry Giscard d'Estaing, qui me dit Est-ce que tu es prêt à faire une affiche ? J'ai dit Bien sûr, d'accord, je me mets au boulot. Mais une semaine après, je reçois le patron d'ailleurs de Davaz de l'époque, c'est très marrant, qui représentait François Mitterrand, qui me dit Est-ce que tu peux me faire une affiche ? Parce que le brief, c'était ça. On ne me disait même pas Je suis de droite, je suis de gauche On ne me disait pas Voilà ce que je veux dire On me dit Fais-moi une affiche 3 jours après... Goudard avec Brochand, qui était le patron de DDB à l'époque, étaient les publicitaires de Chirac. Ils me disent, écoute, on a les photos magnifiques, c'est les photos qu'ils avaient faites pendant le photographie américaine, mais on n'arrive pas à trouver le slogan. Viens nous donner un coup de main. Et moi, le dimanche, je vais leur donner un coup de main. Je dis, ben voilà, moi, je crois que je pourrais dire La France qui ose, la France qui gagne le slogan qui a traîné dans les guêtres de Chirac pendant 20 ans. Et un jour, je descends dans la rue et je vois mes trois affiches dans la rue. Je dis, mais... Incroyable ! Il n'y a personne qui ne dit rien. Après la campagne... Alors les trois affiches, dans les trois affiches, il y avait ma plus belle affiche, qui n'est pas la France tranquille. Il y avait l'affiche de Giscard qui disait la majorité aura la majorité. Ils l'ont eue, c'est même la dernière fois où ils l'ont eue. Il y avait la France qui ose et il y avait cette très belle affiche pour Mitterrand qui était le socialisme, une idée qui fait son chemin. Il y avait une photo de Mitterrand. Moi, je voulais que la photo de Mitterrand, ça soit la photo de De Gaulle sur les grèves d'Irlande et que ce soit les photos. La photo de Mao Tse-tung, en complet blanc comme ça, sur les grèves du Yangtze-Kiang. Et la photo est magnifique, il est sur les grèves de Biarritz, de la Côte Basque, etc. Je lui avais acheté une longue écharpe rouge, etc., qu'il a gardée pendant toute sa campagne. Et je pense que c'est ce qui m'a fait rentrer en communication. Parce que trois ans après, c'était les présidentielles. Donc moi j'écris à mes trois clients. Je lui ai dit écoutez c'est moi qui ai fait votre affiche, un peu par inadvertance, parce que j'ai fait aussi celle de vos concurrents. Mais cette fois-ci je voudrais que les choses soient sérieuses, je voudrais que à l'américaine... Et à l'anglaise, on a un contrat qui nous donne une exclusivité réciproque et qu'on ne puisse pas faire, même Créatif ne puisse pas faire, ce n'est pas très démocratique, faire les trois campagnes. Le seul qui me répond, c'est François Mitterrand. D'un petit mot que j'ai perdu en plus, d'un petit mot de sa main, il me dit si vous êtes libre demain à 13h, rendez-vous à telle adresse pour déjeuner.

  • Speaker #1

    C'est vrai cette histoire du pactole ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'y arrive. Devant un tout petit restaurant près de la rue de Bièvre, je ne sais pas s'il existe encore, près de la rue de Bièvre, il avait son petit hôtel particulier, tout petit, parce qu'il faisait 60 mètres carrés. On pensait qu'il avait un palace et il avait 60 mètres carrés. Je lève les yeux, le pactole. Je dis ça y est, c'est parti. Et là, j'ai eu droit à un numéro de charme de François Mitterrand qui ne fait qu'une fois par personne. Quand il veut vraiment séduire, mais quel dommage qu'il n'ait pas été filmé, c'était un vrai petit bonheur. Et c'est là qu'on décide de se retrouver tous les lundis matins de midi à 1h pour faire la campagne. Et ça a failli s'arrêter au bout de la troisième fois, parce qu'au bout de la troisième fois, Mitra était un peu en retard, il était presque 1h30, or il avait rendez-vous à 1h. Chez Leap. Et il me dit, c'est gala, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je n'ai pas de chauffeur, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je dis, bien sûr, président, j'ai ma voiture au coin de la rue, on descend dans le coin de la rue. Moi, je ne me méfie de rien, j'étais dans mes nuages, etc. Et il découvre la voiture, c'était une Rolls. Parce que je n'ai rien raté de toutes les conneries que l'on pouvait faire dans les années 80. Il n'y a pas eu que la Rolex. Il y a eu toutes les erreurs possiblement. Et il me dit, mais c'est gala, je vous vire. Il faut passer votre vie à me dire que chaque signe a un sens. Je dois faire attention à tout. Moi, je me suis rhabillé pour faire plus socialiste. Je voulais que j'arrive avec ce symbole de la richesse incongrue. Chez Lippe, qui est le restaurant préféré des journalistes, vous êtes où ? On va y aller à pied. J'étais allé à pied, je me suis précipité à l'agence, j'ai réuni les créatifs, j'ai dit j'ai reçu la leçon de communication de ma vie. J'ai vendu, j'ai mis tout de suite une petite annonce sur la Rolls à moitié prix. Elle s'est vendue dans la nuit, elle s'est vendue dans la nuit et je n'ai plus jamais touché de Rolls de ma vie.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'il a été assez rugueux avec toi.

  • Speaker #0

    Oui, je finis. Le Citroën, c'est quand même mieux.

  • Speaker #1

    C'est quand même le budget de votre vie, ça, Citroën.

  • Speaker #0

    Oui, mais en plus, quand François Mitterrand me dit Est-ce que vous êtes d'accord pour faire ma campagne ? Je dis Oui, Président, mais je suis obligé de demander à mon gros client. Citroën, c'était 70% de l'agence. Donc, il faut que j'aille demander au Peugeot. Parce que le Peugeot n'est évidemment pas très mitterrandien. Je vais voir Jacques Alvé, et il est formidable parce qu'il me dit écoutez, je ne devrais pas vous autoriser, mais ça me flatte quand même que Mitterrand vienne me mendier mon publicitaire. Mais je demande une seule chose, il roule en Renault, je ne vous autorise à le faire que s'il roule en Citroën. Et donc je vois Mitterrand, je dis je suis désolé, il faut que vous rouliez en Citroën. Il dit mais je n'aime pas les Citroën, ils sont trop suspendus, moi j'ai besoin de quelques-uns durs comme dans les Renault, etc. Parce que j'ai toujours mal au dos. Je lui ai dit, écoutez, moi je vais vous en faire une sur mesure. Et je fais une voiture sur mesure, c'était une CX. Elle était socialiste à l'extérieur, toute grise, etc. Tout était peint, c'est devenu à la mode après. Tout était peint, les enjoliveurs et tout ça. Et à l'intérieur, c'était une voiture de riche. Il y avait du bois de rose pour qu'il puisse écrire. Les cuirs étaient moelleux, etc. Et Mitterrand fait toute sa campagne en Citroën. Et moi, j'avais dit à Paris Match de faire la première photo de Mitterrand, faire la couverture et la double centrale de match. J'ai dit à lui que je devais venir à Château-Chinon, je me disais que je me débrouillerais pour que le président me donne son heure exacte de départ. Je serais le seul journaliste à pouvoir le photographier et je préviens Mitterrand que tout est organisé. Le jour J arrive, Mitterrand est élu, c'est le bonheur absolu. À 22h, il prend sa voiture pour entrer à Paris. Orage fou ! Et à ce moment-là, panne d'essuie-glaces de la Citroën. Et donc, il est obligé de prendre la voiture qui suit, qui est une Renault. Et ces salauds de Paris Match, ils sortent quand même.

  • Speaker #1

    Vous dites du mal de Paris Match, maintenant. Oui,

  • Speaker #0

    ils sortent quand même la photo. Et ils disent, premier ratage du Mitterrand.

  • Speaker #1

    C'est assez amusant. Vous en avez fait gagner plein des présidents à travers le monde. Mais il y a eu un échec.

  • Speaker #0

    Il y a eu un échec. Parce que j'ai fait 20 campagnes présidentielles. J'en ai fait 4 en France. Trois pour Mitterrand et une pour Jospin et j'ai fait les autres en international. Et Jospin, c'est mon grand regret parce que Jospin était un très grand Premier ministre, ça aurait été un grand président et la France fabrique rarement de grands présidents qui étaient prêts pour gouverner la France, mais... Il avait une sorte de réticence de la communication. Par rigueur, par honnêteté, il ne voulait pas que ce soit les images qui remplacent le fond de son projet, le fond de sa pensée. Et il ne voulait surtout pas que la télévision, qui s'est toujours livrée... à des émissions un peu populaires, sortent de la vérité et de la rigueur qu'ils voulaient à la politique. Je me souviens que quatre semaines avant l'élection, les choses commençaient à tourner. Je lui dis Écoutez, Président, il faut d'abord que vous présentiez votre femme aux Français. Parce qu'en France, on élit un couple. Et elle ne voulait pas. Mais il faut que vous vous forciez, c'est obligé. Deuxièmement, j'ai obtenu de Michel Drucker qu'il fasse un spécial dimanche avec vous et votre épouse. C'était le 23 février. Il y avait le best-of de l'année et puis il y avait 5 ou 6 stars qui venaient. C'était la bonne année à tous les Français et vous étiez là avec votre femme devant tout ça pendant 2 heures de télé. Ils vont changer un peu les choses, ils vont stopper le début de chute parce qu'on avait commencé à 53. Le début de chute des sondages. Elle me dit oui mais je ne veux pas faire ça et puis ma femme ne sera pas d'accord. Une fois de plus vous allez me faire jouer les pantins publicitaires. Une ministre avec beaucoup de gentillesse et beaucoup de respect, c'est un être très extraordinaire. Mais je lui ai dit, écoutez, laissez-moi convaincre votre femme, organisez-moi un déjeuner avec elle. Et il m'organise un déjeuner avec Ségolène Royal, il y avait un ministère de l'époque, donc on est là tous les trois. Et Ségolène Royal, elle adore la pub. Oui,

  • Speaker #1

    elle est plutôt l'inverse.

  • Speaker #0

    Donc quand je raconte mon histoire, elle me défend à mort, etc. Et elle arrive à convaincre Mme Jospin. Donc j'appelle Lionel, je dis ça y est, ta femme est d'accord, j'appuie sur le bouton pour qu'on fasse l'émission, il était à trois ou quatre semaines de l'émission, et il me dit écoute, laisse-moi une dernière fois en parler ce soir, et je t'appelle demain matin à 7h. A 7h il m'appelle, il me dit tu vas m'en vouloir beaucoup, tu vas être fâché, je ne peux pas, c'est pas digne de moi, c'est pas digne, je sais que c'est l'habitude, mais c'est pas digne d'un président, c'est pas comme ça qu'on doit faire une campagne d'information, une campagne présidentielle aujourd'hui. Cette émission, d'après les politologues, pouvait ramener 400 000 votes. On a perdu à 175 000. Par rigueur, par honnêteté professionnelle, c'est ça qui est lamentable dans la politique. C'est ça qui, par moments, donne le dégoût de la politique. Parce que c'était qui était le plus sincère de tous, qui était le plus rigoureux de tous, qui était le plus près de tous à gouverner la France, et qui voulait le faire à cœur ouvert. face aux Français et pas en utilisant les artifices de la communication présidentielle, a perdu à son son de l'Union.

  • Speaker #1

    Mais ça veut dire que vous, qui êtes un proche de Sarkozy, vous êtes mis en marche après avec Emmanuel Macron. Vous trouvez qu'ils ont moins de rigueur face aux médias, face au système médiatique ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, bien sûr. La campagne de Macron, c'est une campagne magnifique de communication. En marche, c'est génial. Je me souviens d'ailleurs qu'un jour, il est venu dîner à la maison avec sa femme. Il m'a dit, je voudrais que tu m'écrives un slogan. Mais je lui ai dit, mais ton slogan, tu en as ? Mais non, je n'ai pas de slogan. Mais tu es En Marche. Je lui ai dit, mais En Marche, ce n'est pas un slogan. C'est le plus beau slogan de tous les temps. Parce que non seulement c'est un slogan, mais en plus, c'est le cri d'amour. Et puis, c'est le cri de guerre. Donc, tu ne vas certainement pas, si tu gâches ça. Il voulait vraiment abandonner En Marche. Et puis, je lui ai dit, en plus, En Marche, ça va donner des marcheurs. Donc, il ne faut surtout pas y toucher. Il m'a écouté.

  • Speaker #1

    Et il a eu raison visiblement. Est-ce que devant moi, c'est le fameux César pour Citroën ?

  • Speaker #0

    C'est le fameux César parce que lorsque le César a été créé par César, pour l'organisateur des Césars, qui pour cette première année, c'était je crois en 87, avait demandé à l'ensemble du cinéma d'abord de juger les meilleurs films, les meilleurs acteurs, les meilleures actrices de l'année. Et question subsidiaire, quelle est la campagne de publicité qui vous a le plus étonné cette année ? J'ai eu beaucoup de chance, c'est les chevrons sauvages qui ont été choisis et qui ont reçu cet Oscar, que je sois allé chercher. Une semaine après, les délégués du cinéma sont allés rencontrer Craven, qui était l'organisateur de la manifestation. Il a dit écoute, on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Voilà, ils ont choisi les torchons, ils ont choisi le cinéma, alors qu'il fallait garder les serviettes de la pub.

  • Speaker #1

    C'est le seul César qui a été attribué à une publicité.

  • Speaker #0

    C'est le seul, il n'y en aura jamais d'autre. C'est le seul César. J'étais très ami avec lui, il est mort dans mes bras. Parce qu'il a passé ses dernières vacances chez nous en Corse, il est revenu, il s'est alité. Et moi tous les dimanches quand je revenais de ma maison de vacances, j'allais le voir, je me mettais dans le lit avec lui et je lui racontais les potins de la semaine. Je l'ai connu parce qu'il est venu dîner un jour à la maison. J'avais un mur à l'époque où je collectionnais les boîtes publicitaires, les bouillons cubes et tout ça. Et il a regardé et il m'a dit je vais compresser ta passion Il m'a envoyé son assistant deux jours après qui a raflé toutes les boîtes. Et un mois après, il est arrivé avec un magnifique tableau qui est grand comme ça, etc. Qui est un cube. Je fais de toutes mes boîtes publicitaires, aller à compresser ma passion, c'est ça, mais avec des boîtes publicitaires sur 2 mètres de haut, mais 2 mètres de large.

  • Speaker #1

    Jacques, puisque quand même le sujet du jour c'est l'amour, comment ne pas parler de la fin de ton livre qui m'a, je le confesse, fait pleurer. C'est très belle lettre à ton fils, à tes filles, à ta femme.

  • Speaker #0

    Écoute. C'est le but du livre, parce que le but du livre, bon, c'est d'amuser un peu les gens au début, mais de leur dire, attention, dans ce monde qui s'autodétruit, dans ce monde qui ne sait que distiller de la haine, dans ce monde qui ne croit qu'au malheur, qui agit très peur, et qui ne sait que voir la vie en noir, c'est là où il faut agir. D'ailleurs, Pierre Dacq disait, si on mettait un peu de rose dans notre matière grise, on aurait moins d'idées noires. Et la façon de mettre un peu de rose... Rose, parce que rose c'est la couleur de l'amour. C'est de mettre un peu d'amour dans sa vie. Mais l'amour, elle est la mal aimée. L'amour, elle est l'ignorée, la laissée de côté. Vous n'avez jamais un homme politique qui parle d'amour. C'est hallucinant. Et donc, j'essaye de faire passer le message que on pourrait peut-être un jour tous se donner la main pour essayer que l'amour prenne la place de la haine dans ce monde des terriens. Et pour ça, il faut aimer les gens.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que tu fais d'ailleurs, ce que tu dis à ton ami Jean-Louis Borloo quand tu le croises en voiture, il est avec sa femme et tu lui dis n'oubliez pas de vous aimer.

  • Speaker #0

    Moi tous les matins quand je me réveille, et encore ce matin, Sophie ma femme me dit mon chéri tu es beau, je t'aime, tu es beau ? Je dis mais Cahuzac est passé dans la nuit, il m'a planté des cheveux, je me précipite devant mon sale miroir de nona génère. Je dis bon ta femme est amoureuse puisque l'amour est aveugle. Et je pars, retourne. J'ai trouvé ma maîtresse. Et ma maîtresse, elle est là. Le lit de ma maîtresse, c'est ma table de travail, qui est encombrée. J'ai deux amours, l'amour fou de ma femme et l'amour fou de la pub. Et plus on donne à l'amour, plus l'amour vous rend de l'amour. Plus on l'honore, plus il vous honore. Plus on le gratifie, plus il vous gratifie. Donc, cultivons l'amour et tout ira mieux. Et l'amour, c'est l'optimisme. Voilà, les optimistes. d'inventer l'avion, les pessimistes le parachutent. Restons dans l'avion, accrochons-nous dans l'avion. Aimons-nous les uns les autres. Le premier publicitaire du monde, c'est Jésus-Christ. Il a tout inventé de notre métier, le slogan, aimons-nous le monde du monde. Le logo, la croix, qui 2000 ans après, 2000 ans après, existe encore. Et il a même inventé la promotion, parce que lorsque la fréquentation baissait, il faisait un miracle et les ventes reparaissaient.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Jacques Seguéla. Je rappelle le titre de votre livre, 90 ans d'amour, c'est Cheplon et je ne peux que vivement vous le recommander. C'est un plaisir qu'on lit d'une traite. Merci Jacques. Merci.

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Description

Jacques Séguéla et moi… Voilà ce que je fredonnais sur le chemin de la Maison Havas, un air emprunté à Vincent Delerm qui lui penchait plutôt pour Fanny Ardant.

Des noms célèbres il y en a eu : connus, reconnus, aimés, respectés... On a parlé de Gainsbourg bien sûr, pas si Gainsbarre que ça. De César et de l’unique récompense portant son nom, offerte à la Publicité, de Citroën, la marque d’Amour de Jacques, du Dalaï-Lama, de Dali et ses étranges méthodes, de politique aussi bien sûr (Mitterrand, Sarkozy, Macron, VGE, Pompidou qui s'est retrouvé malgré lui, égérie publicitaire pour Mercury)...

Je ne vais pas citer ici tous les noms qui racontent l’histoire de Monsieur Séguéla, Daron de la Pub s’il en est ! lls sont beaucoup trop nombreux. Jacques est un amoureux de l’Amour, de sa femme et de la Publicité et c’est l’histoire qu’il a fait raconter à d’autres, par malice ou par pudeur, je ne saurais toujours pas le dire aujourd'hui.

Quel bonheur en tout cas d’avoir passé un moment suspendu dans le temps avec l’incroyable, le facétieux Jacques Séguéla à l’occasion de la sortie de son livre : 90 ans d’Amour (chez PLON). 


Merci Jacques, du love sur toi. La Publicité est définitivement devenue, grâce à toi, un acte d'Amour. 


Un podcast proposé par François Gombert. 


RDV sur le site de Com'On en Parle. https://www.comonenparle.fr/2022/11/29/jacques-seguela-90-ans-damour-70-ans-de-pub-et-quelle-vie/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis François Gombert. On a 20 ans que je vis sur la planète communication et que ces incroyables métiers me passionnent. J'avais envie de créer un truc, un objet numérique, un truc qui parle des experts de la communication, du marketing, de l'influence, des relations publiques, de la publicité bien sûr, des affaires publiques, du conseil aux dirigeants, aux politiques, de tous ces experts qui mettent leur expérience et leur stratégie au service des marques, pour laisser des marques d'organisations publiques, d'entreprises, d'associations, de personnalités, de dirigeants. Chaque épisode, son invité. Chaque épisode, sa thématique. Vous écoutez comme on en parle. Le podcast qui fait savoir ce que vous savez faire. Hey hey hey vous écoutez comme on en parle le podcast qui fait le tour de la planète communication Un grand merci à vous toutes et tous, car encore une fois cette semaine, nous sommes classés cinquièmes dans la catégorie business marketing de Apple Podcast. Du love sur vous. Et en parlant de love, je vous présente sans plus attendre notre invité du jour qui a l'élégance et la gentillesse de me recevoir dans son bureau, dans la maison Avas. Avas dont il est le S, l'enfant terrible et en même temps, ces mots ne sont pas choisis au hasard, le daron de la pub française, européenne et qui sait, mondiale.

  • Speaker #1

    J'aime bien que tu dises maison. Parce que la maison a été fondée en 1850 par l'inventeur de la publicité, qui n'est pas un Américain, qui n'est pas un Anglais, qui est un Français bien de chez nous et qui s'appelle Charles Abbas. Et je ne sais pas pourquoi les publicitaires ne s'en orgueillissent pas de ça. Parce qu'on est les inventeurs de la pub. Les Américains arrivent 20 ans plus tard. Et Charles Abbas n'a pas inventé que la pub, il a inventé d'abord l'agence de presse, l'AFP, qui existe toujours. Il y a toujours eu. Deuxièmement, l'agence Média, elle est en bas, au premier étage. Troisièmement, l'agence Publicité, la maison créative, elle est là, sur les autres étages. Et il est même allé plus loin, il a inventé la première maison d'édition, en regroupant des petits éditeurs comme Editis. Lorsqu'on en parlera, quelle est la supériorité d'Avast sur toutes les autres agences du monde, c'est qu'elle est adossée à Vivendi, c'est-à-dire qu'elle est en train de passer de l'advertising... à ce que j'appelle l'advertainment, c'est-à-dire l'entertainment comme nouveau média des marques et de la communication.

  • Speaker #0

    Vous l'aurez deviné, c'est M. Jacques Séguéla qui nous reçoit aujourd'hui dans son bureau, empli d'histoires, de récompenses. Il y a beaucoup de lions.

  • Speaker #1

    C'est les cognons, ils commencent là-bas dans la salle de conférence. J'ai vu, j'ai vu. Et ils finissent chez Yannick, c'est derrière, c'est le bureau de Yannick. Oui, j'ai vu. J'ai la chance de... De ne plus être éloigné de chez lui que d'une glace de 5 cm.

  • Speaker #0

    Et c'est pour toutes ces choses que nous sommes là tous les deux, Jacques et moi, pour parler d'amour et de publicité à l'occasion de la sortie de son livre. 90 secondes d'amour, pardon, qui sort chez Plon. Donc je me permets de présenter rapidement, si tant est qu'on puisse le faire, ton incroyable livre que j'ai adoré, vraiment, je te le disais tout à l'heure.

  • Speaker #1

    On peut recommencer ? Tu peux redire une deuxième fois ?

  • Speaker #0

    Oui, je peux dire que j'ai vraiment adoré...

  • Speaker #1

    On ne s'arrête là. Ce n'est pas la peine d'aller plus loin. Tu as tout dit, tout est résumé.

  • Speaker #0

    Tout est résumé, pas tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu rentres chez toi, je rentre chez moi.

  • Speaker #0

    Quelle vie en tout cas ! Et je vais me permettre de reprendre à mon humble niveau les très beaux mots, les doux mots, les mots parfois bleus de votre amie, j'imagine en tout cas Jean-Louis Borloo.

  • Speaker #1

    Ah oui, quelle belle préface, quel beau cadeau.

  • Speaker #0

    Une magnifique préface.

  • Speaker #1

    Magnifique préface, c'est une boule de tendresse. Oui, c'est l'homme à la fois le plus raffiné, le plus intelligent, le plus proche, à la fois le plus discret, le plus discerne que je connaisse. Et on a eu un coup de foudre.

  • Speaker #0

    Il vous le rend bien en tout cas. Il écrit donc dans cette préface, ce n'est pas un livre, c'est une rencontre. Je crois aux rencontres, écrit Jacques. Elles sont les carrefours des routes de notre vie, à la condition express de vous y entraîner, de nous emmener sur les chemins de traverse. Jacques met en scène de vrais personnages qui ont jalonné sa vie, créant un nouveau genre, un genre nouveau. Une forme de réelle poésie, j'aime beaucoup ce mot réelle poésie qui colle assez bien au livre.

  • Speaker #1

    Absolument, et d'ailleurs il est... Quatrième de couverture du livre, etc. La égalité avec l'auteur, parce que je trouve que ces six pages de préface valent les 250 pages du livre.

  • Speaker #0

    Elles sont en tout cas très belles. Donc, s'il te plaît, dessine-moi un mouton, demande le petit prince. Dessine-nous le bonheur Jacques. Et il le dessine avec une balade poétique de 90 ans, que vous n'avez pas encore. Vous avez pour l'instant 88 ans.

  • Speaker #1

    J'ai, j'ai, j'ai dans deux mois 90 ans, parce que... Moi je suis un créatif, donc je compte ma vie à partir de l'instant de la création. C'est un instant de l'amour, d'un acte de l'amour. Et donc, je suis un enfant du bonheur, un enfant de l'amour, puisque mes parents faisaient leurs études ensemble à la faculté de médecine de Montpellier, qu'ils se sont connus là, que mon père est tombé fou amoureux de ma mère et vice-versa, qu'ils m'ont conçu et que mon père est allé demander la main de ma mère à ma grand-mère, qu'il a refusé parce qu'il n'était pas noble. Mais tout a commencé là, et donc il a pris par la main, ils sont échappés. à Paris et ils ne sont plus jamais revenus à Montpellier. Et donc, bien qu'ayant 89 ans dans deux mois, j'ai 90 ans. En plus, ça tombe bien parce que la publicité, ça aime les chiffres ronds.

  • Speaker #0

    C'est vrai. Pas pour tous, mais en tout cas, on le souhaite tous. Vous allez du coup vous devancer un petit peu mes questions, mais abordons alors ce livre dont vous êtes le héros. Sans trop en dire pour laisser le plaisir de la découverte. Non,

  • Speaker #1

    je ne suis pas le héros et je ne veux surtout pas être le héros. Ce n'est pas un livre où je me raconte. Je me suis raconté déjà dans les 29 premiers, ça suffit. C'est un livre où je les raconte et où ils se racontent à travers moi.

  • Speaker #0

    Mais avant tout, Jacques Seguéla, j'ai quand même une question. Parce que j'ai lu le livre et toutes ces aventures, toutes ces anecdotes folles, toute cette passion, tout cet amour. D'où vous vient toute cette énergie, cette force, cette passion ? Et pour les autres ? mais aussi pour des marques comme Citroën.

  • Speaker #1

    Écoute des au hasard de la vie. Moi, je n'ai rien programmé de ma vie. J'ai toujours essayé la vie de me mener par le bout du nez. Elle m'a amené dans les pires. Dans le début du livre, tu verras, j'ai commis tous les péchés que peut commettre un gosse rebelle. J'aurais été à deux mois de finir en taule.

  • Speaker #0

    Oui, le coup du 6-35, c'était pas mal.

  • Speaker #1

    Absolument. Et donc, je n'ai jamais planifié ma vie. Je n'ai jamais eu de plan de carrière. Je n'ai jamais voulu... D'ailleurs, j'étais parti pour être pharmacien. Et je me retrouve publicitaire en ayant été un journaliste béni des dieux puisque j'ai commencé à Paris Match et j'ai fini avec Pierre Lazareff qui décidera de ma carrière. On va en parler tout à l'heure.

  • Speaker #0

    On va en parler tout à l'heure. Alors avant de rentrer quand même dans le détail du livre, j'aimerais savoir, tu n'es pas sur les réseaux sociaux, tu n'aimes pas du tout les SMS. C'est écrit plusieurs fois dans le livre. Mais il y a quand même dans ce livre un amour qui transpire. C'est impossible de passer à côté. C'est quoi pour toi Jacques Seguéla ? Et pour Avas, la maison Avas, la communication aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La communication aujourd'hui, elle est de veiller nuit et jour, avec tout son talent, avec tout son allant, avec toutes ses idées et avec toute sa force, la survie des marques. 80% des marques que nous avons, il y en a créé quelques-unes, que nous avons consommées au XXe siècle sont mortes avec le siècle. 80% des marques qui existent aujourd'hui, que l'on côtoie aujourd'hui, vont mourir avec le siècle. Donc, évidemment que le premier métier de tout publicitaire, c'est de vendre des produits. Alors, moi, je vends des voitures, je vends des yaourts. Mais ce n'est que la vague, le profond, la densité du fond de la mer, c'est de rendre les marques éternelles. Et j'ai découvert ça. Grâce à Mitterrand, il était élu depuis quelques semaines, il me téléphone et il me téléphone directement. C'est la première fois que j'avais directement au téléphone. Allô, c'est Gala, ici François Mitterrand. J'ai cru que c'était un canular, en plus c'était l'époque des canulars téléphoniques. J'ai balbutié un peu, mais écoutez, c'est Gala, c'est vraiment moi. Est-ce que vous êtes libre à déjeuner, M. le Président ? J'arrive, précipite à l'Elysée, on est dans sa petite salle à manger au rez-de-chaussée avec la bibliothèque. Eh bien, Gala, je vais vous faire un beau cadeau, parce que vous m'avez... J'ai fait un beau cadeau. Moi j'avais offert la campagne. Parce que je ne voulais pas que ce soit un acte de péripaticien, je voulais que ce soit un acte d'amour. Et je voulais que ça change la façon de faire de la politique à la française alors que c'était des anglais et les américains qui étaient les rois du genre à l'époque. Et il me dit écoutez, vous vous êtes un peu compliqués les créatifs, je ne sais pas ce qui peut vous faire plaisir. Prenez une semaine, réfléchissez bien et dites moi. Semaine suivante, moi je l'ai vu toutes les semaines pendant 14 ans, peut-être pas toutes les semaines. Il y a au moins une semaine sur deux. Donc, je dis, président, moi j'ai trouvé, je veux passer une journée avec le Dalai Lama. Il me dit, monsieur, vous êtes fou. Vous pensez que moi j'appuie sur un bouton et que le Dalai Lama arrive ? Non mais, taisez-vous, trouvez une autre idée et revenez me voir. Je ne trouve pas une autre idée, je maintiens. Et six mois plus tard, il m'appelle, sa secrétaire m'appelle, elle me dit, le président ce soir a un dîner. un peu intime. Il aimerait bien que vous soyez là avec Sophie, si vous pouvez venir. on arrive.

  • Speaker #0

    Sophie qui est votre femme.

  • Speaker #1

    Ma femme, 8h. Daniel Mitterrand, François Mitterrand, Sophie, moi, Chesvin. 5 minutes, 10 minutes. Si je te permets d'être aussi en retard avec le président de la République, 15 minutes, arrive le Dalai Lama. Waouh !

  • Speaker #0

    C'est très bien raconté.

  • Speaker #1

    Et le Dalai Lama dit, et Mitterrand dit au Dalai Lama, waouh ! Voilà, c'est mon publicitaire, etc. Je voulais lui faire un cadeau, le cadeau c'est vous. Et le Dalai Lama me dit, mais pourquoi faire ? Parce que je veux que vous évangélisiez la jeunesse française. Donc je vais demander à la Sorbonne de nous prêter son grand amphithéâtre. Et tous les étudiants et tous les jeunes autour d'eux, ils veulent écouter le Dalai Lama, auront une heure où ils pourront poser toutes les questions du monde. Il a fait ça de 8h du matin à 18h.

  • Speaker #0

    C'est effectivement un épisode très bien raconté dans le livre et très intéressant. Je vais revenir un petit peu en amont.

  • Speaker #1

    Tu me coupes là, mais c'est le moment le plus important de ce qu'on va se dire. Parce que cette visite du Dadaï Lama, elle m'a ouvert les yeux. Car il s'est assis, et peut-être pour se faire excuser, il regarde Mitterrand dans les yeux et il lui dit Connaissez-vous cette dernière fable tibétaine ? C'est un vieux bonze qui donne à son jeune disciple sa première leçon de philosophie. Et qui lui dit Je vais te poser trois questions, réfléchis bien et réponds-moi. Première question, quel est l'envers du blanc ? Le noir ? Non, non, non, non, réfléchis. Deuxième question, quel est l'envers du jour ? Alors le jeune disciple réfléchit. Maître, la nuit, bravo, voilà, tu as réfléchi, c'est la bonne réponse. Dernière question, quel est l'envers de la vie ? Et le jeune moi réfléchit, dit maître, il n'y a pas d'autre que la mort. Tu n'as rien compris, dit le Daïlama. L'envers de la vie, c'est la naissance, c'est la définition de ce qu'est la publicité. Je réponds à ta question profondément. Très profondément, parce que la publicité, généralement, elle se joue dans la superficie des choses. Non, elle doit se jouer dans la profondeur des choses et la profondeur de la vie. Parce que mon métier, c'est de faire que la marque de ma vie, moi je mourrai, mais qu'elle continue et qu'elle continue à vivre. Et quelle est la seule façon de rendre une marque immortelle ? C'est de l'appliquer, la seule chose qu'on a inventée dans ce monde et qui est éternelle, C'est l'âme. Donc mon métier, c'est de créer, de protéger. de nourrir, de me battre pour l'âme des marques.

  • Speaker #0

    C'est quoi votre marque préférée d'ailleurs ?

  • Speaker #1

    C'est une question. Il y en a qu'une. La réponse, pardon. Louis Vuitton, j'ai été le premier publicitaire de Louis Vuitton. Raffelot, on est fou de Raffelot. C'est moi qui ai trouvé la marque, qui ai trouvé le slogan. Fond la forme. J'ai trouvé la marque, qui a trouvé le slogan. Etc.

  • Speaker #0

    Les Restos du Coeur.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment j'ai pu en faire. Un café nommé Désir pour carte noire et un avant Citroën, etc. Mais mon plus beau slogan, c'est Picasso. Parce que je me souviens que Citroën était dans une mauvaise passe. On frôlait les 7% de parts de marché. Peugeot avait presque l'intention de supprimer Citroën, de le fusionner avec Peugeot. Donc c'était une question de vie ou de mort. Et le président du moment me dit, écoute, voilà, j'ai une voiture, mais bon, elle est ce qu'elle est, elle n'est pas très extraordinaire. Et j'ai oublié le nom tellement le nom était ridicule. Et c'est là, je ne sais pas quoi. Donc il faut qu'il me fasse un lancement magnifique sur cette voiture-là. Je ne peux pas aller nul. Et son nom est ridicule. Il me dit, écoute, si tu as une meilleure idée, tu as 48 heures, parce que dans 48 heures, ça va être gravé sur les voitures. Et par une sorte de miracle, je déjeune avec le petit-fils de Picasso, Olivier Picasso. Et je lui dis, écoute, j'ai une idée. Est-ce que tu penses que ta famille accepterait que Citroën... prennent le nom de Picasso pour désigner son prochain modèle. Miracle, ils acceptent. Je me souviens que la première annonce pour lancer la chose, qui était une pleine page dans Le Monde et dans Le Figaro, où il y avait Picasso avec son pilau vert rayé, bleu et blanc, et le texte écrit comme par un petit gosse, disait Dis maman, pourquoi papa, il s'appelle comme la voiture ? Ça a failli s'arrêter là tellement la famille était folle de rage.

  • Speaker #0

    Il n'y a pas que tu as mis le fou de rage. Il y avait aussi Pompidou.

  • Speaker #1

    Oui, Pompidou. Pompidou, c'est lui qui a créé l'agence. Il nous a fait un cadeau présidentiel.

  • Speaker #0

    Il ne sait rien de le dire.

  • Speaker #1

    En 68, Bernard Roux allait défiler avec les bourgeois sur les Champs-Élysées. Moi, j'allais avec les étudiants flanquer quelques pavés dans la gueule des flics. Je n'en ai pas lancé beaucoup, je n'en ai mis trop pied aucun. Bon, c'était une révolution assez baroque. Et à la sortie de ça, on travaillait dans une agence qui s'appelait AXE, qui appartenait à deux frères d'Amenard. On était là depuis deux ans, on avait multiplié par 5 ou 6 le chiffre d'affaires de l'agence, qui était l'agence en pointe, etc. On leur a dit, écoutez, vous avez compris, 68, c'est le grand partage. Donc nous, on veut bien continuer avec vous, et de nouveau, multiplier par 5 votre chiffre d'affaires, mais il nous faut 20% chacun. Ils ont dit, c'est intéressant, on va en parler entre nous, et si vous voulez, demain matin, on se retrouve à 8h pour en parler. On arrive à 8h à l'agence, ils n'étaient pas là. Sur notre bureau, on avait... Une enveloppe, c'était pour solde de tout compte. On descend en bas, il y avait un bar à putes, c'était une des avenues qui partait de l'Etoile. On est dans le bar à putes et Bernard me dit, qu'est-ce qu'on fait ? Je lui dis, mais on fait rouler ces gars-là. Il me dit, oui, mais enfin, on n'a pas les moyens. Je lui dis, écoute, déjà, voilà mon chèque, toi mets ton chèque. On va vendre nos deux voitures, puis on gratte tout. On essaye de gratter les copains, etc. Il dit, ben d'accord, donc on fait ça, et une semaine après, on dit, ben écoute, qu'est-ce qu'on fait maintenant avec ça ? Je dis, mais on fait de la pub. Ce qui est extraordinaire, c'est que les publicitaires ne font jamais leur pub. Pourquoi ? J'ai le titre que je ne mérite pas de seul publicitaire le plus connu, parce qu'aucun autre n'avait sa pub. Moi, je suis encore en train de la faire à 90 ans. Je n'ai jamais compris, comme s'ils avaient honte de leur métier, mais il n'y a pas plus beau que la publicité, pourquoi on n'aurait pas droit, nous aussi, à être des marques ? C'est bien vrai pour les acteurs, pour les réalisateurs, pour les signastes, pour les artistes, pour les chanteurs, mais pourquoi pas pour les publicitaires ? On est un art mineur, mais on est un art quand même. Et on met tout notre argent sur une page du monde et une page du Figaro. Avec une annonce qui dit, cher annonceur, ou vous avez une agence et on va vous prouver qu'on est meilleur qu'elle, ou vous n'avez pas d'agence et ça y est, ne cherchez plus, c'est nous. On attend une semaine, pas une seule réponse. Et au dixième jour, on reçoit un coup de fil, le seul coup de fil qui ait déclenché la campagne. Deux fois une page pleine d'un certain Wittner qui dit, écoutez, moi je suis l'importateur en France des moteurs Mercury. J'ai besoin d'une campagne, vous avez l'air d'avoir des idées, venez me voir. Et en quittant, je me souviens qu'un de mes reportages à Match, quand j'avais été reporter de Match, était justement de suivre Pompidou, qui passait ses vacances à Saint-Tropez, et je me souvenais qu'il y avait une photo que j'avais faite, qui était très sympa, où il conduisait lui-même un petit dinghy pour aller retrouver son bateau. Il s'est dit, jamais c'était une Mercury, donc je vais. Je revois mes copains, j'essaye de me trouver en douce la photo, etc. Ils piquent la photo et miracle, c'était Mercury. Donc on fait l'annonce et à cette époque-là... L'Express, souvent on appelait ça des osalides, l'Express était entièrement imprimé, mais il n'était pas parti à l'imprimerie. Et il était envoyé à l'Elysée pour dire que la liberté de la presse n'était pas à l'ordre du jour, pour que le président puisse le feuilleter et puisse changer une page s'il avait envie de changer une page, changer un titre. Et donc Claude Pompidou, la femme du président, pousse un cri d'horreur en disant mais qu'est-ce qu'il vous prend ? Vous prenez maintenant pour une star qui fait la publicité des produits Mercury. Et il dit mais j'ai pas vu ça, je sais pas ce qu'il se passe. Il regarde, il téléphone tout de suite à sa vente Schreiber, qui lui n'avait pas non plus vu les choses, qui dit mais je regarde tout de suite, mais qu'est-ce qu'il se passe ? Mais comment cette page a pu se glisser entre autres ? Je l'avais envoyé au dernier moment. dans la dernière seconde où on pouvait encore envoyer une annonce. Comme ça, c'est passé à travers de tout le monde. Et Pompidou dit à Savant-Chevers, je suis désolé, je suis obligé de stopper le journal. Le journal ne paraîtra pas. Il dit, mais écoute, mes exemplaires sont tirés, ils vont être diffusés. Et je débrouille les vôtres, je débrouille les vôtres. François Giroud m'appelle, et bien, vous êtes des petits salopios. Vous avez eu une idée, mais maintenant... Trouvez-en une pour sortir de là. Je le rappelle, cinq minutes après, je lui dis Mais moi j'ai trouvé. On va arracher la page. Et on a une chance folle. La page du Verseau, c'était une page de pub. Donc ça ne gênait pas le rédactionnel du journal. Et donc, il m'amène dans un hangar à 10 km de Paris, où il y avait 40 000 exemplaires. Bon, il dit Mais voilà. L'Express sortait le mercredi, je crois, ou le mardi. Donc on avait 40 000 pages à arracher en trois jours et trois nuits. J'ai mobilisé tous les copains, j'allais dans la rue, je disais, tenez, voilà, 50 balles, venez nous aider, tout le quartier s'y est mis, etc. Et moi, je prévenus la presse qui est venue nous voir en train d'arracher les pages, et donc évidemment a publié la page qui a fait tous les journaux du soir. Et tous les journaux du lendemain et toutes les télés, toutes les télés du soir et tous les journaux du lendemain. Et l'agence est née de notre première annonce. Si je suis publicitaire, c'est à moi de faire ma publicité et d'être finalement la première marque de toutes les marques que je vais servir. Parce que ça me permettra d'ouvrir les portes. Je ne suis pas un chanteur, je n'ai pas besoin qu'on me reconnaisse dans la rue, ce n'est pas mon métier.

  • Speaker #0

    On vous reconnaît dans la rue quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas du tout le but. Mon but, c'est que les annonceurs me reconnaissent dans la rue. Alors ça, ce but-là, je le cultive. Je ne l'ai jamais, jamais lâché.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui a fait scandale, enfin pas scandale auprès finalement du consommateur, mais scandale un peu dans le milieu de la publicité et notamment auprès de Maurice Lévy. C'est le lancement des produits libres de Carrefour. Vous avez 40 ans à l'époque, la campagne cartonne puisque Carrefour lance des produits libres, donc des produits blancs.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et... C'est un énorme succès.

  • Speaker #1

    C'est la campagne qu'on devrait faire aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi ils ne la ressortent pas. C'est les produits blancs, avec une affiche qui était formidable, qui disait on fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a une marque On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il est plus cher. On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a un packaging. C'est finalement une attaque directe de la publicité. Donc j'ai eu tous les publicitaires contre moi. Blanchet a d'ailleurs écrit tout de suite une chronique dans Le Monde pour m'assassiner. Et tout le monde s'est rangé derrière lui. Et puis les annonceurs commençaient à être résistants. Il y avait ceux qui disaient mais pourquoi pas ? et ceux qui disaient mais il faut virer ces publicités qui ne croient pas dans leur métier. Mais pas du tout. Parce que ma réponse, c'est que les produits libres, c'était une marque. Finalement, ça a abusé tout le monde. Voilà. Et aujourd'hui, ça s'appelle les marques distributeurs. Et c'est tellement dommage qu'ils appellent ça des marques distributeurs. Ils sont nuls, les distributeurs. Mais appeler ça des marques libres, enfin, un peu de talent, un peu de mouvement, un peu d'esprit, un peu... Toujours rester sur la platitude des choses. à bonne entendeur mais oui prenez les ailes du désir envolez-vous tu sais c'est quoi la dimension de la publicité c'est Gocteau qui un jour croise Daguilef à l'opéra et qui lui dit quelle est la définition de ton art et Daguilef le danseur dit étonne-moi Génial dit Cocteau, mais c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la poésie. Moi je dis au musée, Cocteau, au musée, le danseur, ça c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la publicité. Oui, la publicité, c'est la poésie. Mais une poésie qui va servir à quelque chose, qui va vendre un produit et qui va le rendre immortel. Est-ce qu'il y a un plus beau métier que ça dans le monde ?

  • Speaker #0

    Et une autre histoire assez savoureuse qui est avec Salvador Dali. Je ne sais pas pourquoi vous êtes lancé là-dedans. Là,

  • Speaker #1

    on doit être en deuxième ou troisième année avec Roux. On s'appelle encore Rousseguela. Keizak va arriver deux ou trois ans après. Et on court les bâtisseurs de maisons parce que c'est la grande mode. Et qu'il y a tous les vendredis matins... Tous les lundis matins, les grandes agences immobilières mettaient en compétition des agences pour qu'on leur amène une annonce le jeudi qui serait publiée le samedi et qui ferait le samedi les ventes du week-end. En plus, c'était millimétré parce qu'on savait au nombre de ventes faites si la publicité était bonne, s'il fallait la reproduire ou s'il fallait la jeter aux orties. Et donc nous, on était les professionnels de ça, on avait pratiquement tous les budgets immobiliers. Et un jour, Publicis, qui s'est dit, mais qu'est-ce que cette petite agence, etc., qui fait de l'agence de publicité immobilière, Publicis décide d'entrer dans la bataille. Nous, on n'avait que des nains comme concurrents. Mais là, tout d'un coup, c'est le géant qui est là. Je me suis dit, il faut que je trouve une idée formidable. Ce qui était obligatoire dans ces publicités, c'est qu'il fallait absolument qu'il y ait un dessin d'architecte qui montre le produit fini, puisque j'ai dit, non. ils ont acheté du vide pour l'instant. Et moi, je me dis, pour taper Publicis, au lieu de faire ce que tout le monde fait, je vais demander à Dali de faire le dessin, ce qui deviendra une peinture, la peinture du final du meuble. Et je vais la baptiser du nom de Totem, parce que Totem, c'est un mot favori de Dali. Et donc, j'arrive, même pas avec une maquette, je raconte simplement les choses, etc. Et je me souviens, applaudissement. Donc je sors, le publiciste passe derrière, il est éjecté, et on me téléphone en disant Vous avez le budget Mais le problème, c'est que je ne connaissais pas Dali. Donc je téléphone à des copains de Paris-Nanay, qui me prennent un rendez-vous miraculeusement avec lui à New York. Je fonce à New York, je le retrouve dans un 5 o'clock, et j'arrive, il était là, assis, avec une japonaise. Absolument sublime, c'était le grand mannequin japonais de l'époque. Et à quatre tables de là, il y avait Andy Varol. Je n'en crois pas mes yeux. Dali, cette fille sublime, Andy Varol. J'arrive, je m'assois à la table. Dali fait un signe, Andy Varol qui vient se rajouter à la table. Et on est là tous les quatre autour de la table. Et je dis à Dali, Dali me dit qu'est-ce que vous me voulez ? Je veux que vous fassiez une publicité. Mais Dali déteste la publicité. Mais faites-vous en fête. Mais... Écoutez, est-ce que vous avez la valise de dollars ? Je dis Oui, elle est là, mais elle est cachée. Évidemment, vous serez payé, vous me direz ce que vous voulez. Et il dit Écoutez, je veux bien la faire, mais il faut passer le test de Dali. Bon, écoutez, je suis présent. Vous voyez la jeune fille qui est là ? Elle a appris la danse balinaise. Et vous voyez ses mains. Elle arrive à branler un homme à l'envers. Oui ? Eh bien, elle va vous montrer. Et elle descend. Moi, je suis accroché à la table. Je me dis, mais qu'est-ce que je fais ? Je me lève, je me planque. Mais il est fou, mais le mec, c'est vraiment Barjot. Un divarole qui éclatait de rire, etc. Et évidemment... La japonaise s'arrête avant le crime et je comprends que c'est une farce qu'il devait faire de temps en temps pour se marrer parce qu'il était au milieu en plus du Pannes-Courte qui était l'endroit le plus couru de New York. Et c'est ce qui m'a permis de décrocher Dali. Deux mois après, il était à Paris et il m'a dit je vais vous faire votre dessin mais je ne peux pas, Dali ne peut pas dessiner une publicité de la main droite. Je dessinerai une publicité de la main gauche. Donc il faut que je... puisse occuper ma main droite et ma main gauche. Donc je ferai votre tableau et en même temps, demandez à la plus jolie fille de l'agence si elle est d'accord pour que je fasse son portrait. Alors la plus jolie fille de l'agence me dit, oui, je suis d'accord, c'est formidable. Tout ça se passait dans l'hôtel qui occupait Thalie d'habitude. Gala était là, etc. Elle commence à poser une première après-midi. Elle lui dit, il faut revenir le lendemain. Elle revient le lendemain. Et elle revient le lendemain. À chaque fois, il disait, mais est-ce que je peux voir mon portrait ? Est-ce que je peux voir mon portrait ? Et quand il a été fini, il lui dit absolument, le voilà, il n'avait peint que son sexe. Et il a demandé à être payé avec la valise de dollars, il avait fait 50 000 euros de l'époque, mais il voulait un bougreau. Le bougreau, c'était le peintre pompier qu'il était en train de remettre à la mode. Donc moi, je m'étais débrouillé pour trouver trois bougreaux, pour qu'il puisse choisir entre les trois bougreaux. Il arrive, il dit, mais ça, c'est mieux que ça, c'est celui-là qui est le bon, donc on s'arrête sur celui-là. Moi j'envoie un petit mot, parce que j'avais raconté l'histoire dans un de mes livres, j'avais reçu une lettre de la cour de Hollande en disant mais vous devez être un escroc ou un incapable, parce que le bougreau dont vous parlez est dans notre salon depuis des années, et pour des années. Ça veut dire que le bougreau était faux, et il est au musée de Dali, à Figueras. Donc personne ne sait qu'il est faux. Mais il est vraiment fort, sauf le prince de Hollande.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui m'a beaucoup amusé, même deux campagnes qui m'ont beaucoup amusé avec Gainsbourg. Une qui n'a pas vraiment touché sa cible et une autre qui n'a pas vu le jour. C'est la fameuse histoire du baron Bic, qui est quand même incroyable.

  • Speaker #1

    Mon rêve, c'était d'avoir la marque Bic. Parce qu'on ne le sait pas, la marque Bic, c'est la marque française la plus connue dans le monde. Parce qu'elle est dans pratiquement 200 pays du monde. Et puis c'est un produit de première nécessité. Et à l'époque, j'étais très copain avec Gainsbourg, parce que Gainsbourg voulait faire du cinéma. Il va le faire, d'ailleurs, il va faire son film, Je t'aime, moi non plus. Et je lui dis, écoute, si tu veux faire du cinéma, fais de la pub, tu vas apprendre le cinéma, parce que finalement, c'est une minute et demie, toi, après, tu en feras une heure et demie, mais c'est la même technique, les mêmes professionnels qui le font. Et un jour, je lui dis, écoute, j'ai un truc pour toi, j'ai écrit un script. Si tu es d'accord, tu le tournes, on fait une maquette, et moi je vais le vendre au bar en bique. J'avais écrit mon script, il arrive dans le studio, à l'heure, parce qu'il était très professionnel, Serge, contrairement à ce qu'on racontait, et il est là, devant un fond noir, et il dit, Moi ma vie est foutue. J'ai vendu tout ce que j'avais à vendre, j'ai vendu mon inspiration à la chanson, j'ai vendu mes poumons à la cigarette, j'ai vendu mon sexe aux femmes. Qu'est-ce qu'il me reste ? Ah ! Il me reste un truc. Il me reste ma barbe. C'est lui qui avait inventé la barbe de trois jours. Alors oui, je veux bien vendre ma barbe, mais à bique. Et il se rasait.

  • Speaker #0

    devant tout le monde. Tout le monde était en train de lui dire pourquoi il a une barre, pourquoi il ne se rase pas, etc. Il se rasait devant tout le monde. J'arrive une semaine après devant le bar en Bic, j'appuie sur la machine, il voit le film, il dit mais ça c'est très marrant, mais moi je ne fais pas de publicité à la télévision en France, mais mon fils Bruno en fait aux Etats-Unis. Donc si vous voulez, je vous obtiens un rendez-vous avec mon fils Bruno. Et il appelle au Bruno devant moi et je prends rendez-vous pour trois jours après à New York. Je saute dans un avion. J'arrive à 9h du matin, à 11h du matin, je suis dans son bureau, je présente le film, il éclate de rire, il dit mais ton film est marrant mais il n'y a pas un américain qui connaisse Gainsbourg. Donc tu peux repartir à Paris, le film existe, il n'est jamais sorti.

  • Speaker #1

    Et il y a donc une autre campagne avec Gainsbourg qui est une campagne pour une marque de lessive qui je crois a vu le jour mais qui n'a jamais touché sa cible.

  • Speaker #0

    Je rêvais de faire une campagne de lessive qui est le rêve de tout publicitaire. Mais en plus, je me disais, si ça pouvait être une lessive un peu de luxe, qu'on puisse dire autre chose que je lave plus blanc Et j'ai la chance de rencontrer le patron de Woolit, qui est la lessive d'Hélénage Délicat, et qui me dit écoutez, donnez-moi une idée Mais je dis que c'est très simple. Au lieu d'avoir pour slogan je lave plus blanc moi je propose comme slogan je lave plus belle Et je demande à toutes les stars françaises, et même quelques stars américaines, Je leur donne 30 secondes ou 45 secondes, qui est le temps du spot que j'ai, pour faire un numéro de séduction pour la marque. Et c'est gratuit. Elles font ce qu'elles veulent, mais elles séduisent en 30 secondes. Et on arrive au jour où c'est la femme de Serge. Et Jane Birkin. Jane Birkin. Ça lui permettait lui aussi d'être le réalisateur du film. Et l'auteur du script. Donc on écrit ensemble une dizaine de scripts, j'amène ça à l'annonceur qui en choisit un, on se retrouve dans le studio, et quand on arrive dans le studio, la situation était tout noire, il y avait juste une lumière qui était sur un petit podium comme ça, qui était un podium qui tournait sur lui-même. On ne comprend pas ce que ça veut dire parce que ce n'était dans aucun des scripts. Et Serge dit oui, mais j'ai eu une idée du dernier moment, vous allez voir, mettez-vous sur le coin, etc. Arrive Jeanne. qui était moulée dans une grande écharpe comme ça, bleue et blanche, aux couleurs de Woolit. Elle monte sur le petit podium et elle tourne avec le podium, alors qu'il y avait deux assistants qui tenaient à l'autre bout l'écharpe. Et quand on arrive au moment où il ne faut pas aller plus loin dans la télévision française, tac, elle s'arrête. Et puis tout le monde applaudit, comme toujours quand on tournait un film. Et à ce moment-là, elle laisse tomber l'écharpe. Je vois mon client qui se décompose complètement. devant Jane Birkin. Il ne m'a même pas dit que ce n'était pas un script qu'on avait écrit ensemble, mais que c'était le script qu'il avait acheté. Il a été décompensé. Le film a eu 100%, à l'époque tout était sondé, a eu 100% d'appréciation. Il n'a pas fait de vente. Alors on a fait un test, une étude pour savoir pourquoi. Parce que les ménagères de moins de 50 ans ont dit, mais moi, je ne veux pas que mon mari voit cette publicité, parce que je sais qu'il me quittera pour Jeanne Berkin.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce que vous écrivez dans le livre que les publicitaires sont des séducteurs pour les ménagères de moins de 50 ans.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, mais là, ça allait trop loin, parce que c'était le mari qu'on séduisait.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    j'entends bien. Donc, si ça avait été Alain Delon, je pense qu'elles auraient été d'accord. C'est possible.

  • Speaker #1

    À 50 ans, vos ouvrages sont maintenant traduits en dix langues, en turc, en russe, en chinois, en japonais et les créations redoublent. Europe 1, c'est la pêche, l'AX Citroën qui a descendu la muraille de Chine. Ça, je l'ai découvert aussi, ce qui était quand même assez incroyable.

  • Speaker #0

    Le révolutionnaire. Ah oui,

  • Speaker #1

    incroyable. La drogue, c'est de la merde. Air France.

  • Speaker #0

    Avec Jean-Marie Perrier, la drogue, c'est la merde. C'était un grand cinéaste publicitaire aux Etats-Unis. Mais en France, je ne sais pas pourquoi, il n'était pas reconnu. Comme toujours, les Français ne reconnaissent jamais les leurs. Et on avait fait le film ensemble, qui a été un très gros succès.

  • Speaker #1

    Et Microsoft pour leurs premières apparitions européennes. À 55 ans, RSCG et Eurocom fusionnent pour devenir Euro RSCG. Alain de Pouziac devient le CEO de la holding Avas Advertising. Et vous êtes finalement le directeur de création et vice-président.

  • Speaker #0

    On devient une vraie agence internationale présente dans... une quarantaine de pays du monde, pouvant prendre des gros budgets mondiaux. Et surtout, pouvant surtout faire que nos gros budgets existants, comme Vuitton, comme Citroën, comme Afloulou et tout ça, puissent profiter de nos agences internationales. C'est donc l'internalisation de l'activité, c'est l'internationalisation de la publicité. Mais le problème est qu'à ce moment-là, nous on appartenait. au vivendi de l'époque qui avait été créé par Jean-Marie Mercier, un espèce de fou.

  • Speaker #1

    J6M, oui.

  • Speaker #0

    Un fou dangereux qui, je ne sais pas pourquoi, avait pris la publicité en grippe et décide un jour de nous vendre. Sans nous le dire, sans le dire à Pouziac le président, sans me le dire. Dans une conférence de presse, on est là au premier rang, il dit mais je mets en vente la publicité. On n'a pas le vent, on est complètement fou, etc. Pour stopper ça, Pouziac se précipite aux Etats-Unis pour faire un achat. Ce n'est pas le moment de vente quand on achète. Donc c'est pour bloquer finalement l'idée de vente de Messier. Et il achète un peu trop vite, sans nous demander notre conseil, une boîte de marketing services, ni faite ni à faire, que l'on paye 2 milliards de dollars, qui en fait emballait un, et qui est confié à notre patron américain pour son management, et il va en rester 500 millions au bout d'un an. Donc on aura perdu 1,5 milliard en deux ans. Et c'est là que Vincent est arrivé, sans se presser.

  • Speaker #1

    Donc à 70 ans, effectivement, Vincent Bolloré, vous 70 ans, Vincent Bolloré reprend Abbas et en devient le président, mais vous gardez la tête de la création. Le groupe va prendre un nouvel essor, 20 000 collaborateurs, déployant 500 agences, 100 pays dans le monde, font rimer créativité et efficacité. Ça ne donne pas un peu le tournis ?

  • Speaker #0

    C'est formidable, j'ai jamais autant voyagé de ma vie. Parce que moi j'ai toujours pensé que la publicité c'était d'abord l'amour. C'est mon livre, 90 ans d'amour, parce que 90 ans de publicité, ou disons 70 ans de publicité, 90 ans d'amour. Et donc il faut aimer les gens, il faut aimer les gens avec qui on travaille. Il faut aimer ses créatifs. Moi ma vie a consisté à sauter d'un avion dans l'autre, pour aller dire à mes créatifs que je les aimais. Et pour les écouter, pour essayer de régler le problème s'il y en avait, et surtout pour leur dire écoutez, maintenant le futur de la publicité c'est des lions à cannes. Donc on va s'y mettre, on va se rever les manches et on va montrer aux américains que les lions ça peut aussi être français.

  • Speaker #1

    Alors je fais un flashback, mais dans votre vie il y a quand même eu la politique. Beaucoup. Il n'y a pas eu...

  • Speaker #0

    Oh, beaucoup, oui.

  • Speaker #1

    Vous commencez sur les municipales, puis vous êtes en même temps sur Valéry Giscard d'Estaing, sur Chirac, sur Mitterrand.

  • Speaker #0

    Ça, c'est un moment incroyable. Je ne comprends même pas, d'ailleurs, que ça ait pu exister. À l'époque, il n'y avait pas d'agence de publicité politique ou de communication politique. Simplement, le directeur des campagnes était chargé de faire l'affiche. Parce que la communication des politiques se résumait à une affiche et des tracts. Rien d'autre. D'ailleurs, il n'y avait pas de télévision à ce moment-là. Donc, moi, je reçois Jean-Pierre Soissons, qui était le directeur de campagne de Valéry Giscard d'Estaing, qui me dit Est-ce que tu es prêt à faire une affiche ? J'ai dit Bien sûr, d'accord, je me mets au boulot. Mais une semaine après, je reçois le patron d'ailleurs de Davaz de l'époque, c'est très marrant, qui représentait François Mitterrand, qui me dit Est-ce que tu peux me faire une affiche ? Parce que le brief, c'était ça. On ne me disait même pas Je suis de droite, je suis de gauche On ne me disait pas Voilà ce que je veux dire On me dit Fais-moi une affiche 3 jours après... Goudard avec Brochand, qui était le patron de DDB à l'époque, étaient les publicitaires de Chirac. Ils me disent, écoute, on a les photos magnifiques, c'est les photos qu'ils avaient faites pendant le photographie américaine, mais on n'arrive pas à trouver le slogan. Viens nous donner un coup de main. Et moi, le dimanche, je vais leur donner un coup de main. Je dis, ben voilà, moi, je crois que je pourrais dire La France qui ose, la France qui gagne le slogan qui a traîné dans les guêtres de Chirac pendant 20 ans. Et un jour, je descends dans la rue et je vois mes trois affiches dans la rue. Je dis, mais... Incroyable ! Il n'y a personne qui ne dit rien. Après la campagne... Alors les trois affiches, dans les trois affiches, il y avait ma plus belle affiche, qui n'est pas la France tranquille. Il y avait l'affiche de Giscard qui disait la majorité aura la majorité. Ils l'ont eue, c'est même la dernière fois où ils l'ont eue. Il y avait la France qui ose et il y avait cette très belle affiche pour Mitterrand qui était le socialisme, une idée qui fait son chemin. Il y avait une photo de Mitterrand. Moi, je voulais que la photo de Mitterrand, ça soit la photo de De Gaulle sur les grèves d'Irlande et que ce soit les photos. La photo de Mao Tse-tung, en complet blanc comme ça, sur les grèves du Yangtze-Kiang. Et la photo est magnifique, il est sur les grèves de Biarritz, de la Côte Basque, etc. Je lui avais acheté une longue écharpe rouge, etc., qu'il a gardée pendant toute sa campagne. Et je pense que c'est ce qui m'a fait rentrer en communication. Parce que trois ans après, c'était les présidentielles. Donc moi j'écris à mes trois clients. Je lui ai dit écoutez c'est moi qui ai fait votre affiche, un peu par inadvertance, parce que j'ai fait aussi celle de vos concurrents. Mais cette fois-ci je voudrais que les choses soient sérieuses, je voudrais que à l'américaine... Et à l'anglaise, on a un contrat qui nous donne une exclusivité réciproque et qu'on ne puisse pas faire, même Créatif ne puisse pas faire, ce n'est pas très démocratique, faire les trois campagnes. Le seul qui me répond, c'est François Mitterrand. D'un petit mot que j'ai perdu en plus, d'un petit mot de sa main, il me dit si vous êtes libre demain à 13h, rendez-vous à telle adresse pour déjeuner.

  • Speaker #1

    C'est vrai cette histoire du pactole ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'y arrive. Devant un tout petit restaurant près de la rue de Bièvre, je ne sais pas s'il existe encore, près de la rue de Bièvre, il avait son petit hôtel particulier, tout petit, parce qu'il faisait 60 mètres carrés. On pensait qu'il avait un palace et il avait 60 mètres carrés. Je lève les yeux, le pactole. Je dis ça y est, c'est parti. Et là, j'ai eu droit à un numéro de charme de François Mitterrand qui ne fait qu'une fois par personne. Quand il veut vraiment séduire, mais quel dommage qu'il n'ait pas été filmé, c'était un vrai petit bonheur. Et c'est là qu'on décide de se retrouver tous les lundis matins de midi à 1h pour faire la campagne. Et ça a failli s'arrêter au bout de la troisième fois, parce qu'au bout de la troisième fois, Mitra était un peu en retard, il était presque 1h30, or il avait rendez-vous à 1h. Chez Leap. Et il me dit, c'est gala, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je n'ai pas de chauffeur, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je dis, bien sûr, président, j'ai ma voiture au coin de la rue, on descend dans le coin de la rue. Moi, je ne me méfie de rien, j'étais dans mes nuages, etc. Et il découvre la voiture, c'était une Rolls. Parce que je n'ai rien raté de toutes les conneries que l'on pouvait faire dans les années 80. Il n'y a pas eu que la Rolex. Il y a eu toutes les erreurs possiblement. Et il me dit, mais c'est gala, je vous vire. Il faut passer votre vie à me dire que chaque signe a un sens. Je dois faire attention à tout. Moi, je me suis rhabillé pour faire plus socialiste. Je voulais que j'arrive avec ce symbole de la richesse incongrue. Chez Lippe, qui est le restaurant préféré des journalistes, vous êtes où ? On va y aller à pied. J'étais allé à pied, je me suis précipité à l'agence, j'ai réuni les créatifs, j'ai dit j'ai reçu la leçon de communication de ma vie. J'ai vendu, j'ai mis tout de suite une petite annonce sur la Rolls à moitié prix. Elle s'est vendue dans la nuit, elle s'est vendue dans la nuit et je n'ai plus jamais touché de Rolls de ma vie.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'il a été assez rugueux avec toi.

  • Speaker #0

    Oui, je finis. Le Citroën, c'est quand même mieux.

  • Speaker #1

    C'est quand même le budget de votre vie, ça, Citroën.

  • Speaker #0

    Oui, mais en plus, quand François Mitterrand me dit Est-ce que vous êtes d'accord pour faire ma campagne ? Je dis Oui, Président, mais je suis obligé de demander à mon gros client. Citroën, c'était 70% de l'agence. Donc, il faut que j'aille demander au Peugeot. Parce que le Peugeot n'est évidemment pas très mitterrandien. Je vais voir Jacques Alvé, et il est formidable parce qu'il me dit écoutez, je ne devrais pas vous autoriser, mais ça me flatte quand même que Mitterrand vienne me mendier mon publicitaire. Mais je demande une seule chose, il roule en Renault, je ne vous autorise à le faire que s'il roule en Citroën. Et donc je vois Mitterrand, je dis je suis désolé, il faut que vous rouliez en Citroën. Il dit mais je n'aime pas les Citroën, ils sont trop suspendus, moi j'ai besoin de quelques-uns durs comme dans les Renault, etc. Parce que j'ai toujours mal au dos. Je lui ai dit, écoutez, moi je vais vous en faire une sur mesure. Et je fais une voiture sur mesure, c'était une CX. Elle était socialiste à l'extérieur, toute grise, etc. Tout était peint, c'est devenu à la mode après. Tout était peint, les enjoliveurs et tout ça. Et à l'intérieur, c'était une voiture de riche. Il y avait du bois de rose pour qu'il puisse écrire. Les cuirs étaient moelleux, etc. Et Mitterrand fait toute sa campagne en Citroën. Et moi, j'avais dit à Paris Match de faire la première photo de Mitterrand, faire la couverture et la double centrale de match. J'ai dit à lui que je devais venir à Château-Chinon, je me disais que je me débrouillerais pour que le président me donne son heure exacte de départ. Je serais le seul journaliste à pouvoir le photographier et je préviens Mitterrand que tout est organisé. Le jour J arrive, Mitterrand est élu, c'est le bonheur absolu. À 22h, il prend sa voiture pour entrer à Paris. Orage fou ! Et à ce moment-là, panne d'essuie-glaces de la Citroën. Et donc, il est obligé de prendre la voiture qui suit, qui est une Renault. Et ces salauds de Paris Match, ils sortent quand même.

  • Speaker #1

    Vous dites du mal de Paris Match, maintenant. Oui,

  • Speaker #0

    ils sortent quand même la photo. Et ils disent, premier ratage du Mitterrand.

  • Speaker #1

    C'est assez amusant. Vous en avez fait gagner plein des présidents à travers le monde. Mais il y a eu un échec.

  • Speaker #0

    Il y a eu un échec. Parce que j'ai fait 20 campagnes présidentielles. J'en ai fait 4 en France. Trois pour Mitterrand et une pour Jospin et j'ai fait les autres en international. Et Jospin, c'est mon grand regret parce que Jospin était un très grand Premier ministre, ça aurait été un grand président et la France fabrique rarement de grands présidents qui étaient prêts pour gouverner la France, mais... Il avait une sorte de réticence de la communication. Par rigueur, par honnêteté, il ne voulait pas que ce soit les images qui remplacent le fond de son projet, le fond de sa pensée. Et il ne voulait surtout pas que la télévision, qui s'est toujours livrée... à des émissions un peu populaires, sortent de la vérité et de la rigueur qu'ils voulaient à la politique. Je me souviens que quatre semaines avant l'élection, les choses commençaient à tourner. Je lui dis Écoutez, Président, il faut d'abord que vous présentiez votre femme aux Français. Parce qu'en France, on élit un couple. Et elle ne voulait pas. Mais il faut que vous vous forciez, c'est obligé. Deuxièmement, j'ai obtenu de Michel Drucker qu'il fasse un spécial dimanche avec vous et votre épouse. C'était le 23 février. Il y avait le best-of de l'année et puis il y avait 5 ou 6 stars qui venaient. C'était la bonne année à tous les Français et vous étiez là avec votre femme devant tout ça pendant 2 heures de télé. Ils vont changer un peu les choses, ils vont stopper le début de chute parce qu'on avait commencé à 53. Le début de chute des sondages. Elle me dit oui mais je ne veux pas faire ça et puis ma femme ne sera pas d'accord. Une fois de plus vous allez me faire jouer les pantins publicitaires. Une ministre avec beaucoup de gentillesse et beaucoup de respect, c'est un être très extraordinaire. Mais je lui ai dit, écoutez, laissez-moi convaincre votre femme, organisez-moi un déjeuner avec elle. Et il m'organise un déjeuner avec Ségolène Royal, il y avait un ministère de l'époque, donc on est là tous les trois. Et Ségolène Royal, elle adore la pub. Oui,

  • Speaker #1

    elle est plutôt l'inverse.

  • Speaker #0

    Donc quand je raconte mon histoire, elle me défend à mort, etc. Et elle arrive à convaincre Mme Jospin. Donc j'appelle Lionel, je dis ça y est, ta femme est d'accord, j'appuie sur le bouton pour qu'on fasse l'émission, il était à trois ou quatre semaines de l'émission, et il me dit écoute, laisse-moi une dernière fois en parler ce soir, et je t'appelle demain matin à 7h. A 7h il m'appelle, il me dit tu vas m'en vouloir beaucoup, tu vas être fâché, je ne peux pas, c'est pas digne de moi, c'est pas digne, je sais que c'est l'habitude, mais c'est pas digne d'un président, c'est pas comme ça qu'on doit faire une campagne d'information, une campagne présidentielle aujourd'hui. Cette émission, d'après les politologues, pouvait ramener 400 000 votes. On a perdu à 175 000. Par rigueur, par honnêteté professionnelle, c'est ça qui est lamentable dans la politique. C'est ça qui, par moments, donne le dégoût de la politique. Parce que c'était qui était le plus sincère de tous, qui était le plus rigoureux de tous, qui était le plus près de tous à gouverner la France, et qui voulait le faire à cœur ouvert. face aux Français et pas en utilisant les artifices de la communication présidentielle, a perdu à son son de l'Union.

  • Speaker #1

    Mais ça veut dire que vous, qui êtes un proche de Sarkozy, vous êtes mis en marche après avec Emmanuel Macron. Vous trouvez qu'ils ont moins de rigueur face aux médias, face au système médiatique ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, bien sûr. La campagne de Macron, c'est une campagne magnifique de communication. En marche, c'est génial. Je me souviens d'ailleurs qu'un jour, il est venu dîner à la maison avec sa femme. Il m'a dit, je voudrais que tu m'écrives un slogan. Mais je lui ai dit, mais ton slogan, tu en as ? Mais non, je n'ai pas de slogan. Mais tu es En Marche. Je lui ai dit, mais En Marche, ce n'est pas un slogan. C'est le plus beau slogan de tous les temps. Parce que non seulement c'est un slogan, mais en plus, c'est le cri d'amour. Et puis, c'est le cri de guerre. Donc, tu ne vas certainement pas, si tu gâches ça. Il voulait vraiment abandonner En Marche. Et puis, je lui ai dit, en plus, En Marche, ça va donner des marcheurs. Donc, il ne faut surtout pas y toucher. Il m'a écouté.

  • Speaker #1

    Et il a eu raison visiblement. Est-ce que devant moi, c'est le fameux César pour Citroën ?

  • Speaker #0

    C'est le fameux César parce que lorsque le César a été créé par César, pour l'organisateur des Césars, qui pour cette première année, c'était je crois en 87, avait demandé à l'ensemble du cinéma d'abord de juger les meilleurs films, les meilleurs acteurs, les meilleures actrices de l'année. Et question subsidiaire, quelle est la campagne de publicité qui vous a le plus étonné cette année ? J'ai eu beaucoup de chance, c'est les chevrons sauvages qui ont été choisis et qui ont reçu cet Oscar, que je sois allé chercher. Une semaine après, les délégués du cinéma sont allés rencontrer Craven, qui était l'organisateur de la manifestation. Il a dit écoute, on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Voilà, ils ont choisi les torchons, ils ont choisi le cinéma, alors qu'il fallait garder les serviettes de la pub.

  • Speaker #1

    C'est le seul César qui a été attribué à une publicité.

  • Speaker #0

    C'est le seul, il n'y en aura jamais d'autre. C'est le seul César. J'étais très ami avec lui, il est mort dans mes bras. Parce qu'il a passé ses dernières vacances chez nous en Corse, il est revenu, il s'est alité. Et moi tous les dimanches quand je revenais de ma maison de vacances, j'allais le voir, je me mettais dans le lit avec lui et je lui racontais les potins de la semaine. Je l'ai connu parce qu'il est venu dîner un jour à la maison. J'avais un mur à l'époque où je collectionnais les boîtes publicitaires, les bouillons cubes et tout ça. Et il a regardé et il m'a dit je vais compresser ta passion Il m'a envoyé son assistant deux jours après qui a raflé toutes les boîtes. Et un mois après, il est arrivé avec un magnifique tableau qui est grand comme ça, etc. Qui est un cube. Je fais de toutes mes boîtes publicitaires, aller à compresser ma passion, c'est ça, mais avec des boîtes publicitaires sur 2 mètres de haut, mais 2 mètres de large.

  • Speaker #1

    Jacques, puisque quand même le sujet du jour c'est l'amour, comment ne pas parler de la fin de ton livre qui m'a, je le confesse, fait pleurer. C'est très belle lettre à ton fils, à tes filles, à ta femme.

  • Speaker #0

    Écoute. C'est le but du livre, parce que le but du livre, bon, c'est d'amuser un peu les gens au début, mais de leur dire, attention, dans ce monde qui s'autodétruit, dans ce monde qui ne sait que distiller de la haine, dans ce monde qui ne croit qu'au malheur, qui agit très peur, et qui ne sait que voir la vie en noir, c'est là où il faut agir. D'ailleurs, Pierre Dacq disait, si on mettait un peu de rose dans notre matière grise, on aurait moins d'idées noires. Et la façon de mettre un peu de rose... Rose, parce que rose c'est la couleur de l'amour. C'est de mettre un peu d'amour dans sa vie. Mais l'amour, elle est la mal aimée. L'amour, elle est l'ignorée, la laissée de côté. Vous n'avez jamais un homme politique qui parle d'amour. C'est hallucinant. Et donc, j'essaye de faire passer le message que on pourrait peut-être un jour tous se donner la main pour essayer que l'amour prenne la place de la haine dans ce monde des terriens. Et pour ça, il faut aimer les gens.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que tu fais d'ailleurs, ce que tu dis à ton ami Jean-Louis Borloo quand tu le croises en voiture, il est avec sa femme et tu lui dis n'oubliez pas de vous aimer.

  • Speaker #0

    Moi tous les matins quand je me réveille, et encore ce matin, Sophie ma femme me dit mon chéri tu es beau, je t'aime, tu es beau ? Je dis mais Cahuzac est passé dans la nuit, il m'a planté des cheveux, je me précipite devant mon sale miroir de nona génère. Je dis bon ta femme est amoureuse puisque l'amour est aveugle. Et je pars, retourne. J'ai trouvé ma maîtresse. Et ma maîtresse, elle est là. Le lit de ma maîtresse, c'est ma table de travail, qui est encombrée. J'ai deux amours, l'amour fou de ma femme et l'amour fou de la pub. Et plus on donne à l'amour, plus l'amour vous rend de l'amour. Plus on l'honore, plus il vous honore. Plus on le gratifie, plus il vous gratifie. Donc, cultivons l'amour et tout ira mieux. Et l'amour, c'est l'optimisme. Voilà, les optimistes. d'inventer l'avion, les pessimistes le parachutent. Restons dans l'avion, accrochons-nous dans l'avion. Aimons-nous les uns les autres. Le premier publicitaire du monde, c'est Jésus-Christ. Il a tout inventé de notre métier, le slogan, aimons-nous le monde du monde. Le logo, la croix, qui 2000 ans après, 2000 ans après, existe encore. Et il a même inventé la promotion, parce que lorsque la fréquentation baissait, il faisait un miracle et les ventes reparaissaient.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Jacques Seguéla. Je rappelle le titre de votre livre, 90 ans d'amour, c'est Cheplon et je ne peux que vivement vous le recommander. C'est un plaisir qu'on lit d'une traite. Merci Jacques. Merci.

Description

Jacques Séguéla et moi… Voilà ce que je fredonnais sur le chemin de la Maison Havas, un air emprunté à Vincent Delerm qui lui penchait plutôt pour Fanny Ardant.

Des noms célèbres il y en a eu : connus, reconnus, aimés, respectés... On a parlé de Gainsbourg bien sûr, pas si Gainsbarre que ça. De César et de l’unique récompense portant son nom, offerte à la Publicité, de Citroën, la marque d’Amour de Jacques, du Dalaï-Lama, de Dali et ses étranges méthodes, de politique aussi bien sûr (Mitterrand, Sarkozy, Macron, VGE, Pompidou qui s'est retrouvé malgré lui, égérie publicitaire pour Mercury)...

Je ne vais pas citer ici tous les noms qui racontent l’histoire de Monsieur Séguéla, Daron de la Pub s’il en est ! lls sont beaucoup trop nombreux. Jacques est un amoureux de l’Amour, de sa femme et de la Publicité et c’est l’histoire qu’il a fait raconter à d’autres, par malice ou par pudeur, je ne saurais toujours pas le dire aujourd'hui.

Quel bonheur en tout cas d’avoir passé un moment suspendu dans le temps avec l’incroyable, le facétieux Jacques Séguéla à l’occasion de la sortie de son livre : 90 ans d’Amour (chez PLON). 


Merci Jacques, du love sur toi. La Publicité est définitivement devenue, grâce à toi, un acte d'Amour. 


Un podcast proposé par François Gombert. 


RDV sur le site de Com'On en Parle. https://www.comonenparle.fr/2022/11/29/jacques-seguela-90-ans-damour-70-ans-de-pub-et-quelle-vie/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis François Gombert. On a 20 ans que je vis sur la planète communication et que ces incroyables métiers me passionnent. J'avais envie de créer un truc, un objet numérique, un truc qui parle des experts de la communication, du marketing, de l'influence, des relations publiques, de la publicité bien sûr, des affaires publiques, du conseil aux dirigeants, aux politiques, de tous ces experts qui mettent leur expérience et leur stratégie au service des marques, pour laisser des marques d'organisations publiques, d'entreprises, d'associations, de personnalités, de dirigeants. Chaque épisode, son invité. Chaque épisode, sa thématique. Vous écoutez comme on en parle. Le podcast qui fait savoir ce que vous savez faire. Hey hey hey vous écoutez comme on en parle le podcast qui fait le tour de la planète communication Un grand merci à vous toutes et tous, car encore une fois cette semaine, nous sommes classés cinquièmes dans la catégorie business marketing de Apple Podcast. Du love sur vous. Et en parlant de love, je vous présente sans plus attendre notre invité du jour qui a l'élégance et la gentillesse de me recevoir dans son bureau, dans la maison Avas. Avas dont il est le S, l'enfant terrible et en même temps, ces mots ne sont pas choisis au hasard, le daron de la pub française, européenne et qui sait, mondiale.

  • Speaker #1

    J'aime bien que tu dises maison. Parce que la maison a été fondée en 1850 par l'inventeur de la publicité, qui n'est pas un Américain, qui n'est pas un Anglais, qui est un Français bien de chez nous et qui s'appelle Charles Abbas. Et je ne sais pas pourquoi les publicitaires ne s'en orgueillissent pas de ça. Parce qu'on est les inventeurs de la pub. Les Américains arrivent 20 ans plus tard. Et Charles Abbas n'a pas inventé que la pub, il a inventé d'abord l'agence de presse, l'AFP, qui existe toujours. Il y a toujours eu. Deuxièmement, l'agence Média, elle est en bas, au premier étage. Troisièmement, l'agence Publicité, la maison créative, elle est là, sur les autres étages. Et il est même allé plus loin, il a inventé la première maison d'édition, en regroupant des petits éditeurs comme Editis. Lorsqu'on en parlera, quelle est la supériorité d'Avast sur toutes les autres agences du monde, c'est qu'elle est adossée à Vivendi, c'est-à-dire qu'elle est en train de passer de l'advertising... à ce que j'appelle l'advertainment, c'est-à-dire l'entertainment comme nouveau média des marques et de la communication.

  • Speaker #0

    Vous l'aurez deviné, c'est M. Jacques Séguéla qui nous reçoit aujourd'hui dans son bureau, empli d'histoires, de récompenses. Il y a beaucoup de lions.

  • Speaker #1

    C'est les cognons, ils commencent là-bas dans la salle de conférence. J'ai vu, j'ai vu. Et ils finissent chez Yannick, c'est derrière, c'est le bureau de Yannick. Oui, j'ai vu. J'ai la chance de... De ne plus être éloigné de chez lui que d'une glace de 5 cm.

  • Speaker #0

    Et c'est pour toutes ces choses que nous sommes là tous les deux, Jacques et moi, pour parler d'amour et de publicité à l'occasion de la sortie de son livre. 90 secondes d'amour, pardon, qui sort chez Plon. Donc je me permets de présenter rapidement, si tant est qu'on puisse le faire, ton incroyable livre que j'ai adoré, vraiment, je te le disais tout à l'heure.

  • Speaker #1

    On peut recommencer ? Tu peux redire une deuxième fois ?

  • Speaker #0

    Oui, je peux dire que j'ai vraiment adoré...

  • Speaker #1

    On ne s'arrête là. Ce n'est pas la peine d'aller plus loin. Tu as tout dit, tout est résumé.

  • Speaker #0

    Tout est résumé, pas tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu rentres chez toi, je rentre chez moi.

  • Speaker #0

    Quelle vie en tout cas ! Et je vais me permettre de reprendre à mon humble niveau les très beaux mots, les doux mots, les mots parfois bleus de votre amie, j'imagine en tout cas Jean-Louis Borloo.

  • Speaker #1

    Ah oui, quelle belle préface, quel beau cadeau.

  • Speaker #0

    Une magnifique préface.

  • Speaker #1

    Magnifique préface, c'est une boule de tendresse. Oui, c'est l'homme à la fois le plus raffiné, le plus intelligent, le plus proche, à la fois le plus discret, le plus discerne que je connaisse. Et on a eu un coup de foudre.

  • Speaker #0

    Il vous le rend bien en tout cas. Il écrit donc dans cette préface, ce n'est pas un livre, c'est une rencontre. Je crois aux rencontres, écrit Jacques. Elles sont les carrefours des routes de notre vie, à la condition express de vous y entraîner, de nous emmener sur les chemins de traverse. Jacques met en scène de vrais personnages qui ont jalonné sa vie, créant un nouveau genre, un genre nouveau. Une forme de réelle poésie, j'aime beaucoup ce mot réelle poésie qui colle assez bien au livre.

  • Speaker #1

    Absolument, et d'ailleurs il est... Quatrième de couverture du livre, etc. La égalité avec l'auteur, parce que je trouve que ces six pages de préface valent les 250 pages du livre.

  • Speaker #0

    Elles sont en tout cas très belles. Donc, s'il te plaît, dessine-moi un mouton, demande le petit prince. Dessine-nous le bonheur Jacques. Et il le dessine avec une balade poétique de 90 ans, que vous n'avez pas encore. Vous avez pour l'instant 88 ans.

  • Speaker #1

    J'ai, j'ai, j'ai dans deux mois 90 ans, parce que... Moi je suis un créatif, donc je compte ma vie à partir de l'instant de la création. C'est un instant de l'amour, d'un acte de l'amour. Et donc, je suis un enfant du bonheur, un enfant de l'amour, puisque mes parents faisaient leurs études ensemble à la faculté de médecine de Montpellier, qu'ils se sont connus là, que mon père est tombé fou amoureux de ma mère et vice-versa, qu'ils m'ont conçu et que mon père est allé demander la main de ma mère à ma grand-mère, qu'il a refusé parce qu'il n'était pas noble. Mais tout a commencé là, et donc il a pris par la main, ils sont échappés. à Paris et ils ne sont plus jamais revenus à Montpellier. Et donc, bien qu'ayant 89 ans dans deux mois, j'ai 90 ans. En plus, ça tombe bien parce que la publicité, ça aime les chiffres ronds.

  • Speaker #0

    C'est vrai. Pas pour tous, mais en tout cas, on le souhaite tous. Vous allez du coup vous devancer un petit peu mes questions, mais abordons alors ce livre dont vous êtes le héros. Sans trop en dire pour laisser le plaisir de la découverte. Non,

  • Speaker #1

    je ne suis pas le héros et je ne veux surtout pas être le héros. Ce n'est pas un livre où je me raconte. Je me suis raconté déjà dans les 29 premiers, ça suffit. C'est un livre où je les raconte et où ils se racontent à travers moi.

  • Speaker #0

    Mais avant tout, Jacques Seguéla, j'ai quand même une question. Parce que j'ai lu le livre et toutes ces aventures, toutes ces anecdotes folles, toute cette passion, tout cet amour. D'où vous vient toute cette énergie, cette force, cette passion ? Et pour les autres ? mais aussi pour des marques comme Citroën.

  • Speaker #1

    Écoute des au hasard de la vie. Moi, je n'ai rien programmé de ma vie. J'ai toujours essayé la vie de me mener par le bout du nez. Elle m'a amené dans les pires. Dans le début du livre, tu verras, j'ai commis tous les péchés que peut commettre un gosse rebelle. J'aurais été à deux mois de finir en taule.

  • Speaker #0

    Oui, le coup du 6-35, c'était pas mal.

  • Speaker #1

    Absolument. Et donc, je n'ai jamais planifié ma vie. Je n'ai jamais eu de plan de carrière. Je n'ai jamais voulu... D'ailleurs, j'étais parti pour être pharmacien. Et je me retrouve publicitaire en ayant été un journaliste béni des dieux puisque j'ai commencé à Paris Match et j'ai fini avec Pierre Lazareff qui décidera de ma carrière. On va en parler tout à l'heure.

  • Speaker #0

    On va en parler tout à l'heure. Alors avant de rentrer quand même dans le détail du livre, j'aimerais savoir, tu n'es pas sur les réseaux sociaux, tu n'aimes pas du tout les SMS. C'est écrit plusieurs fois dans le livre. Mais il y a quand même dans ce livre un amour qui transpire. C'est impossible de passer à côté. C'est quoi pour toi Jacques Seguéla ? Et pour Avas, la maison Avas, la communication aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    La communication aujourd'hui, elle est de veiller nuit et jour, avec tout son talent, avec tout son allant, avec toutes ses idées et avec toute sa force, la survie des marques. 80% des marques que nous avons, il y en a créé quelques-unes, que nous avons consommées au XXe siècle sont mortes avec le siècle. 80% des marques qui existent aujourd'hui, que l'on côtoie aujourd'hui, vont mourir avec le siècle. Donc, évidemment que le premier métier de tout publicitaire, c'est de vendre des produits. Alors, moi, je vends des voitures, je vends des yaourts. Mais ce n'est que la vague, le profond, la densité du fond de la mer, c'est de rendre les marques éternelles. Et j'ai découvert ça. Grâce à Mitterrand, il était élu depuis quelques semaines, il me téléphone et il me téléphone directement. C'est la première fois que j'avais directement au téléphone. Allô, c'est Gala, ici François Mitterrand. J'ai cru que c'était un canular, en plus c'était l'époque des canulars téléphoniques. J'ai balbutié un peu, mais écoutez, c'est Gala, c'est vraiment moi. Est-ce que vous êtes libre à déjeuner, M. le Président ? J'arrive, précipite à l'Elysée, on est dans sa petite salle à manger au rez-de-chaussée avec la bibliothèque. Eh bien, Gala, je vais vous faire un beau cadeau, parce que vous m'avez... J'ai fait un beau cadeau. Moi j'avais offert la campagne. Parce que je ne voulais pas que ce soit un acte de péripaticien, je voulais que ce soit un acte d'amour. Et je voulais que ça change la façon de faire de la politique à la française alors que c'était des anglais et les américains qui étaient les rois du genre à l'époque. Et il me dit écoutez, vous vous êtes un peu compliqués les créatifs, je ne sais pas ce qui peut vous faire plaisir. Prenez une semaine, réfléchissez bien et dites moi. Semaine suivante, moi je l'ai vu toutes les semaines pendant 14 ans, peut-être pas toutes les semaines. Il y a au moins une semaine sur deux. Donc, je dis, président, moi j'ai trouvé, je veux passer une journée avec le Dalai Lama. Il me dit, monsieur, vous êtes fou. Vous pensez que moi j'appuie sur un bouton et que le Dalai Lama arrive ? Non mais, taisez-vous, trouvez une autre idée et revenez me voir. Je ne trouve pas une autre idée, je maintiens. Et six mois plus tard, il m'appelle, sa secrétaire m'appelle, elle me dit, le président ce soir a un dîner. un peu intime. Il aimerait bien que vous soyez là avec Sophie, si vous pouvez venir. on arrive.

  • Speaker #0

    Sophie qui est votre femme.

  • Speaker #1

    Ma femme, 8h. Daniel Mitterrand, François Mitterrand, Sophie, moi, Chesvin. 5 minutes, 10 minutes. Si je te permets d'être aussi en retard avec le président de la République, 15 minutes, arrive le Dalai Lama. Waouh !

  • Speaker #0

    C'est très bien raconté.

  • Speaker #1

    Et le Dalai Lama dit, et Mitterrand dit au Dalai Lama, waouh ! Voilà, c'est mon publicitaire, etc. Je voulais lui faire un cadeau, le cadeau c'est vous. Et le Dalai Lama me dit, mais pourquoi faire ? Parce que je veux que vous évangélisiez la jeunesse française. Donc je vais demander à la Sorbonne de nous prêter son grand amphithéâtre. Et tous les étudiants et tous les jeunes autour d'eux, ils veulent écouter le Dalai Lama, auront une heure où ils pourront poser toutes les questions du monde. Il a fait ça de 8h du matin à 18h.

  • Speaker #0

    C'est effectivement un épisode très bien raconté dans le livre et très intéressant. Je vais revenir un petit peu en amont.

  • Speaker #1

    Tu me coupes là, mais c'est le moment le plus important de ce qu'on va se dire. Parce que cette visite du Dadaï Lama, elle m'a ouvert les yeux. Car il s'est assis, et peut-être pour se faire excuser, il regarde Mitterrand dans les yeux et il lui dit Connaissez-vous cette dernière fable tibétaine ? C'est un vieux bonze qui donne à son jeune disciple sa première leçon de philosophie. Et qui lui dit Je vais te poser trois questions, réfléchis bien et réponds-moi. Première question, quel est l'envers du blanc ? Le noir ? Non, non, non, non, réfléchis. Deuxième question, quel est l'envers du jour ? Alors le jeune disciple réfléchit. Maître, la nuit, bravo, voilà, tu as réfléchi, c'est la bonne réponse. Dernière question, quel est l'envers de la vie ? Et le jeune moi réfléchit, dit maître, il n'y a pas d'autre que la mort. Tu n'as rien compris, dit le Daïlama. L'envers de la vie, c'est la naissance, c'est la définition de ce qu'est la publicité. Je réponds à ta question profondément. Très profondément, parce que la publicité, généralement, elle se joue dans la superficie des choses. Non, elle doit se jouer dans la profondeur des choses et la profondeur de la vie. Parce que mon métier, c'est de faire que la marque de ma vie, moi je mourrai, mais qu'elle continue et qu'elle continue à vivre. Et quelle est la seule façon de rendre une marque immortelle ? C'est de l'appliquer, la seule chose qu'on a inventée dans ce monde et qui est éternelle, C'est l'âme. Donc mon métier, c'est de créer, de protéger. de nourrir, de me battre pour l'âme des marques.

  • Speaker #0

    C'est quoi votre marque préférée d'ailleurs ?

  • Speaker #1

    C'est une question. Il y en a qu'une. La réponse, pardon. Louis Vuitton, j'ai été le premier publicitaire de Louis Vuitton. Raffelot, on est fou de Raffelot. C'est moi qui ai trouvé la marque, qui ai trouvé le slogan. Fond la forme. J'ai trouvé la marque, qui a trouvé le slogan. Etc.

  • Speaker #0

    Les Restos du Coeur.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas comment j'ai pu en faire. Un café nommé Désir pour carte noire et un avant Citroën, etc. Mais mon plus beau slogan, c'est Picasso. Parce que je me souviens que Citroën était dans une mauvaise passe. On frôlait les 7% de parts de marché. Peugeot avait presque l'intention de supprimer Citroën, de le fusionner avec Peugeot. Donc c'était une question de vie ou de mort. Et le président du moment me dit, écoute, voilà, j'ai une voiture, mais bon, elle est ce qu'elle est, elle n'est pas très extraordinaire. Et j'ai oublié le nom tellement le nom était ridicule. Et c'est là, je ne sais pas quoi. Donc il faut qu'il me fasse un lancement magnifique sur cette voiture-là. Je ne peux pas aller nul. Et son nom est ridicule. Il me dit, écoute, si tu as une meilleure idée, tu as 48 heures, parce que dans 48 heures, ça va être gravé sur les voitures. Et par une sorte de miracle, je déjeune avec le petit-fils de Picasso, Olivier Picasso. Et je lui dis, écoute, j'ai une idée. Est-ce que tu penses que ta famille accepterait que Citroën... prennent le nom de Picasso pour désigner son prochain modèle. Miracle, ils acceptent. Je me souviens que la première annonce pour lancer la chose, qui était une pleine page dans Le Monde et dans Le Figaro, où il y avait Picasso avec son pilau vert rayé, bleu et blanc, et le texte écrit comme par un petit gosse, disait Dis maman, pourquoi papa, il s'appelle comme la voiture ? Ça a failli s'arrêter là tellement la famille était folle de rage.

  • Speaker #0

    Il n'y a pas que tu as mis le fou de rage. Il y avait aussi Pompidou.

  • Speaker #1

    Oui, Pompidou. Pompidou, c'est lui qui a créé l'agence. Il nous a fait un cadeau présidentiel.

  • Speaker #0

    Il ne sait rien de le dire.

  • Speaker #1

    En 68, Bernard Roux allait défiler avec les bourgeois sur les Champs-Élysées. Moi, j'allais avec les étudiants flanquer quelques pavés dans la gueule des flics. Je n'en ai pas lancé beaucoup, je n'en ai mis trop pied aucun. Bon, c'était une révolution assez baroque. Et à la sortie de ça, on travaillait dans une agence qui s'appelait AXE, qui appartenait à deux frères d'Amenard. On était là depuis deux ans, on avait multiplié par 5 ou 6 le chiffre d'affaires de l'agence, qui était l'agence en pointe, etc. On leur a dit, écoutez, vous avez compris, 68, c'est le grand partage. Donc nous, on veut bien continuer avec vous, et de nouveau, multiplier par 5 votre chiffre d'affaires, mais il nous faut 20% chacun. Ils ont dit, c'est intéressant, on va en parler entre nous, et si vous voulez, demain matin, on se retrouve à 8h pour en parler. On arrive à 8h à l'agence, ils n'étaient pas là. Sur notre bureau, on avait... Une enveloppe, c'était pour solde de tout compte. On descend en bas, il y avait un bar à putes, c'était une des avenues qui partait de l'Etoile. On est dans le bar à putes et Bernard me dit, qu'est-ce qu'on fait ? Je lui dis, mais on fait rouler ces gars-là. Il me dit, oui, mais enfin, on n'a pas les moyens. Je lui dis, écoute, déjà, voilà mon chèque, toi mets ton chèque. On va vendre nos deux voitures, puis on gratte tout. On essaye de gratter les copains, etc. Il dit, ben d'accord, donc on fait ça, et une semaine après, on dit, ben écoute, qu'est-ce qu'on fait maintenant avec ça ? Je dis, mais on fait de la pub. Ce qui est extraordinaire, c'est que les publicitaires ne font jamais leur pub. Pourquoi ? J'ai le titre que je ne mérite pas de seul publicitaire le plus connu, parce qu'aucun autre n'avait sa pub. Moi, je suis encore en train de la faire à 90 ans. Je n'ai jamais compris, comme s'ils avaient honte de leur métier, mais il n'y a pas plus beau que la publicité, pourquoi on n'aurait pas droit, nous aussi, à être des marques ? C'est bien vrai pour les acteurs, pour les réalisateurs, pour les signastes, pour les artistes, pour les chanteurs, mais pourquoi pas pour les publicitaires ? On est un art mineur, mais on est un art quand même. Et on met tout notre argent sur une page du monde et une page du Figaro. Avec une annonce qui dit, cher annonceur, ou vous avez une agence et on va vous prouver qu'on est meilleur qu'elle, ou vous n'avez pas d'agence et ça y est, ne cherchez plus, c'est nous. On attend une semaine, pas une seule réponse. Et au dixième jour, on reçoit un coup de fil, le seul coup de fil qui ait déclenché la campagne. Deux fois une page pleine d'un certain Wittner qui dit, écoutez, moi je suis l'importateur en France des moteurs Mercury. J'ai besoin d'une campagne, vous avez l'air d'avoir des idées, venez me voir. Et en quittant, je me souviens qu'un de mes reportages à Match, quand j'avais été reporter de Match, était justement de suivre Pompidou, qui passait ses vacances à Saint-Tropez, et je me souvenais qu'il y avait une photo que j'avais faite, qui était très sympa, où il conduisait lui-même un petit dinghy pour aller retrouver son bateau. Il s'est dit, jamais c'était une Mercury, donc je vais. Je revois mes copains, j'essaye de me trouver en douce la photo, etc. Ils piquent la photo et miracle, c'était Mercury. Donc on fait l'annonce et à cette époque-là... L'Express, souvent on appelait ça des osalides, l'Express était entièrement imprimé, mais il n'était pas parti à l'imprimerie. Et il était envoyé à l'Elysée pour dire que la liberté de la presse n'était pas à l'ordre du jour, pour que le président puisse le feuilleter et puisse changer une page s'il avait envie de changer une page, changer un titre. Et donc Claude Pompidou, la femme du président, pousse un cri d'horreur en disant mais qu'est-ce qu'il vous prend ? Vous prenez maintenant pour une star qui fait la publicité des produits Mercury. Et il dit mais j'ai pas vu ça, je sais pas ce qu'il se passe. Il regarde, il téléphone tout de suite à sa vente Schreiber, qui lui n'avait pas non plus vu les choses, qui dit mais je regarde tout de suite, mais qu'est-ce qu'il se passe ? Mais comment cette page a pu se glisser entre autres ? Je l'avais envoyé au dernier moment. dans la dernière seconde où on pouvait encore envoyer une annonce. Comme ça, c'est passé à travers de tout le monde. Et Pompidou dit à Savant-Chevers, je suis désolé, je suis obligé de stopper le journal. Le journal ne paraîtra pas. Il dit, mais écoute, mes exemplaires sont tirés, ils vont être diffusés. Et je débrouille les vôtres, je débrouille les vôtres. François Giroud m'appelle, et bien, vous êtes des petits salopios. Vous avez eu une idée, mais maintenant... Trouvez-en une pour sortir de là. Je le rappelle, cinq minutes après, je lui dis Mais moi j'ai trouvé. On va arracher la page. Et on a une chance folle. La page du Verseau, c'était une page de pub. Donc ça ne gênait pas le rédactionnel du journal. Et donc, il m'amène dans un hangar à 10 km de Paris, où il y avait 40 000 exemplaires. Bon, il dit Mais voilà. L'Express sortait le mercredi, je crois, ou le mardi. Donc on avait 40 000 pages à arracher en trois jours et trois nuits. J'ai mobilisé tous les copains, j'allais dans la rue, je disais, tenez, voilà, 50 balles, venez nous aider, tout le quartier s'y est mis, etc. Et moi, je prévenus la presse qui est venue nous voir en train d'arracher les pages, et donc évidemment a publié la page qui a fait tous les journaux du soir. Et tous les journaux du lendemain et toutes les télés, toutes les télés du soir et tous les journaux du lendemain. Et l'agence est née de notre première annonce. Si je suis publicitaire, c'est à moi de faire ma publicité et d'être finalement la première marque de toutes les marques que je vais servir. Parce que ça me permettra d'ouvrir les portes. Je ne suis pas un chanteur, je n'ai pas besoin qu'on me reconnaisse dans la rue, ce n'est pas mon métier.

  • Speaker #0

    On vous reconnaît dans la rue quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas du tout le but. Mon but, c'est que les annonceurs me reconnaissent dans la rue. Alors ça, ce but-là, je le cultive. Je ne l'ai jamais, jamais lâché.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui a fait scandale, enfin pas scandale auprès finalement du consommateur, mais scandale un peu dans le milieu de la publicité et notamment auprès de Maurice Lévy. C'est le lancement des produits libres de Carrefour. Vous avez 40 ans à l'époque, la campagne cartonne puisque Carrefour lance des produits libres, donc des produits blancs.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et... C'est un énorme succès.

  • Speaker #1

    C'est la campagne qu'on devrait faire aujourd'hui. Je ne sais pas pourquoi ils ne la ressortent pas. C'est les produits blancs, avec une affiche qui était formidable, qui disait on fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a une marque On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il est plus cher. On fait croire encore qu'un produit est meilleur parce qu'il a un packaging. C'est finalement une attaque directe de la publicité. Donc j'ai eu tous les publicitaires contre moi. Blanchet a d'ailleurs écrit tout de suite une chronique dans Le Monde pour m'assassiner. Et tout le monde s'est rangé derrière lui. Et puis les annonceurs commençaient à être résistants. Il y avait ceux qui disaient mais pourquoi pas ? et ceux qui disaient mais il faut virer ces publicités qui ne croient pas dans leur métier. Mais pas du tout. Parce que ma réponse, c'est que les produits libres, c'était une marque. Finalement, ça a abusé tout le monde. Voilà. Et aujourd'hui, ça s'appelle les marques distributeurs. Et c'est tellement dommage qu'ils appellent ça des marques distributeurs. Ils sont nuls, les distributeurs. Mais appeler ça des marques libres, enfin, un peu de talent, un peu de mouvement, un peu d'esprit, un peu... Toujours rester sur la platitude des choses. à bonne entendeur mais oui prenez les ailes du désir envolez-vous tu sais c'est quoi la dimension de la publicité c'est Gocteau qui un jour croise Daguilef à l'opéra et qui lui dit quelle est la définition de ton art et Daguilef le danseur dit étonne-moi Génial dit Cocteau, mais c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la poésie. Moi je dis au musée, Cocteau, au musée, le danseur, ça c'est la définition de mon art à moi. C'est la définition de la publicité. Oui, la publicité, c'est la poésie. Mais une poésie qui va servir à quelque chose, qui va vendre un produit et qui va le rendre immortel. Est-ce qu'il y a un plus beau métier que ça dans le monde ?

  • Speaker #0

    Et une autre histoire assez savoureuse qui est avec Salvador Dali. Je ne sais pas pourquoi vous êtes lancé là-dedans. Là,

  • Speaker #1

    on doit être en deuxième ou troisième année avec Roux. On s'appelle encore Rousseguela. Keizak va arriver deux ou trois ans après. Et on court les bâtisseurs de maisons parce que c'est la grande mode. Et qu'il y a tous les vendredis matins... Tous les lundis matins, les grandes agences immobilières mettaient en compétition des agences pour qu'on leur amène une annonce le jeudi qui serait publiée le samedi et qui ferait le samedi les ventes du week-end. En plus, c'était millimétré parce qu'on savait au nombre de ventes faites si la publicité était bonne, s'il fallait la reproduire ou s'il fallait la jeter aux orties. Et donc nous, on était les professionnels de ça, on avait pratiquement tous les budgets immobiliers. Et un jour, Publicis, qui s'est dit, mais qu'est-ce que cette petite agence, etc., qui fait de l'agence de publicité immobilière, Publicis décide d'entrer dans la bataille. Nous, on n'avait que des nains comme concurrents. Mais là, tout d'un coup, c'est le géant qui est là. Je me suis dit, il faut que je trouve une idée formidable. Ce qui était obligatoire dans ces publicités, c'est qu'il fallait absolument qu'il y ait un dessin d'architecte qui montre le produit fini, puisque j'ai dit, non. ils ont acheté du vide pour l'instant. Et moi, je me dis, pour taper Publicis, au lieu de faire ce que tout le monde fait, je vais demander à Dali de faire le dessin, ce qui deviendra une peinture, la peinture du final du meuble. Et je vais la baptiser du nom de Totem, parce que Totem, c'est un mot favori de Dali. Et donc, j'arrive, même pas avec une maquette, je raconte simplement les choses, etc. Et je me souviens, applaudissement. Donc je sors, le publiciste passe derrière, il est éjecté, et on me téléphone en disant Vous avez le budget Mais le problème, c'est que je ne connaissais pas Dali. Donc je téléphone à des copains de Paris-Nanay, qui me prennent un rendez-vous miraculeusement avec lui à New York. Je fonce à New York, je le retrouve dans un 5 o'clock, et j'arrive, il était là, assis, avec une japonaise. Absolument sublime, c'était le grand mannequin japonais de l'époque. Et à quatre tables de là, il y avait Andy Varol. Je n'en crois pas mes yeux. Dali, cette fille sublime, Andy Varol. J'arrive, je m'assois à la table. Dali fait un signe, Andy Varol qui vient se rajouter à la table. Et on est là tous les quatre autour de la table. Et je dis à Dali, Dali me dit qu'est-ce que vous me voulez ? Je veux que vous fassiez une publicité. Mais Dali déteste la publicité. Mais faites-vous en fête. Mais... Écoutez, est-ce que vous avez la valise de dollars ? Je dis Oui, elle est là, mais elle est cachée. Évidemment, vous serez payé, vous me direz ce que vous voulez. Et il dit Écoutez, je veux bien la faire, mais il faut passer le test de Dali. Bon, écoutez, je suis présent. Vous voyez la jeune fille qui est là ? Elle a appris la danse balinaise. Et vous voyez ses mains. Elle arrive à branler un homme à l'envers. Oui ? Eh bien, elle va vous montrer. Et elle descend. Moi, je suis accroché à la table. Je me dis, mais qu'est-ce que je fais ? Je me lève, je me planque. Mais il est fou, mais le mec, c'est vraiment Barjot. Un divarole qui éclatait de rire, etc. Et évidemment... La japonaise s'arrête avant le crime et je comprends que c'est une farce qu'il devait faire de temps en temps pour se marrer parce qu'il était au milieu en plus du Pannes-Courte qui était l'endroit le plus couru de New York. Et c'est ce qui m'a permis de décrocher Dali. Deux mois après, il était à Paris et il m'a dit je vais vous faire votre dessin mais je ne peux pas, Dali ne peut pas dessiner une publicité de la main droite. Je dessinerai une publicité de la main gauche. Donc il faut que je... puisse occuper ma main droite et ma main gauche. Donc je ferai votre tableau et en même temps, demandez à la plus jolie fille de l'agence si elle est d'accord pour que je fasse son portrait. Alors la plus jolie fille de l'agence me dit, oui, je suis d'accord, c'est formidable. Tout ça se passait dans l'hôtel qui occupait Thalie d'habitude. Gala était là, etc. Elle commence à poser une première après-midi. Elle lui dit, il faut revenir le lendemain. Elle revient le lendemain. Et elle revient le lendemain. À chaque fois, il disait, mais est-ce que je peux voir mon portrait ? Est-ce que je peux voir mon portrait ? Et quand il a été fini, il lui dit absolument, le voilà, il n'avait peint que son sexe. Et il a demandé à être payé avec la valise de dollars, il avait fait 50 000 euros de l'époque, mais il voulait un bougreau. Le bougreau, c'était le peintre pompier qu'il était en train de remettre à la mode. Donc moi, je m'étais débrouillé pour trouver trois bougreaux, pour qu'il puisse choisir entre les trois bougreaux. Il arrive, il dit, mais ça, c'est mieux que ça, c'est celui-là qui est le bon, donc on s'arrête sur celui-là. Moi j'envoie un petit mot, parce que j'avais raconté l'histoire dans un de mes livres, j'avais reçu une lettre de la cour de Hollande en disant mais vous devez être un escroc ou un incapable, parce que le bougreau dont vous parlez est dans notre salon depuis des années, et pour des années. Ça veut dire que le bougreau était faux, et il est au musée de Dali, à Figueras. Donc personne ne sait qu'il est faux. Mais il est vraiment fort, sauf le prince de Hollande.

  • Speaker #0

    Il y a une autre campagne qui m'a beaucoup amusé, même deux campagnes qui m'ont beaucoup amusé avec Gainsbourg. Une qui n'a pas vraiment touché sa cible et une autre qui n'a pas vu le jour. C'est la fameuse histoire du baron Bic, qui est quand même incroyable.

  • Speaker #1

    Mon rêve, c'était d'avoir la marque Bic. Parce qu'on ne le sait pas, la marque Bic, c'est la marque française la plus connue dans le monde. Parce qu'elle est dans pratiquement 200 pays du monde. Et puis c'est un produit de première nécessité. Et à l'époque, j'étais très copain avec Gainsbourg, parce que Gainsbourg voulait faire du cinéma. Il va le faire, d'ailleurs, il va faire son film, Je t'aime, moi non plus. Et je lui dis, écoute, si tu veux faire du cinéma, fais de la pub, tu vas apprendre le cinéma, parce que finalement, c'est une minute et demie, toi, après, tu en feras une heure et demie, mais c'est la même technique, les mêmes professionnels qui le font. Et un jour, je lui dis, écoute, j'ai un truc pour toi, j'ai écrit un script. Si tu es d'accord, tu le tournes, on fait une maquette, et moi je vais le vendre au bar en bique. J'avais écrit mon script, il arrive dans le studio, à l'heure, parce qu'il était très professionnel, Serge, contrairement à ce qu'on racontait, et il est là, devant un fond noir, et il dit, Moi ma vie est foutue. J'ai vendu tout ce que j'avais à vendre, j'ai vendu mon inspiration à la chanson, j'ai vendu mes poumons à la cigarette, j'ai vendu mon sexe aux femmes. Qu'est-ce qu'il me reste ? Ah ! Il me reste un truc. Il me reste ma barbe. C'est lui qui avait inventé la barbe de trois jours. Alors oui, je veux bien vendre ma barbe, mais à bique. Et il se rasait.

  • Speaker #0

    devant tout le monde. Tout le monde était en train de lui dire pourquoi il a une barre, pourquoi il ne se rase pas, etc. Il se rasait devant tout le monde. J'arrive une semaine après devant le bar en Bic, j'appuie sur la machine, il voit le film, il dit mais ça c'est très marrant, mais moi je ne fais pas de publicité à la télévision en France, mais mon fils Bruno en fait aux Etats-Unis. Donc si vous voulez, je vous obtiens un rendez-vous avec mon fils Bruno. Et il appelle au Bruno devant moi et je prends rendez-vous pour trois jours après à New York. Je saute dans un avion. J'arrive à 9h du matin, à 11h du matin, je suis dans son bureau, je présente le film, il éclate de rire, il dit mais ton film est marrant mais il n'y a pas un américain qui connaisse Gainsbourg. Donc tu peux repartir à Paris, le film existe, il n'est jamais sorti.

  • Speaker #1

    Et il y a donc une autre campagne avec Gainsbourg qui est une campagne pour une marque de lessive qui je crois a vu le jour mais qui n'a jamais touché sa cible.

  • Speaker #0

    Je rêvais de faire une campagne de lessive qui est le rêve de tout publicitaire. Mais en plus, je me disais, si ça pouvait être une lessive un peu de luxe, qu'on puisse dire autre chose que je lave plus blanc Et j'ai la chance de rencontrer le patron de Woolit, qui est la lessive d'Hélénage Délicat, et qui me dit écoutez, donnez-moi une idée Mais je dis que c'est très simple. Au lieu d'avoir pour slogan je lave plus blanc moi je propose comme slogan je lave plus belle Et je demande à toutes les stars françaises, et même quelques stars américaines, Je leur donne 30 secondes ou 45 secondes, qui est le temps du spot que j'ai, pour faire un numéro de séduction pour la marque. Et c'est gratuit. Elles font ce qu'elles veulent, mais elles séduisent en 30 secondes. Et on arrive au jour où c'est la femme de Serge. Et Jane Birkin. Jane Birkin. Ça lui permettait lui aussi d'être le réalisateur du film. Et l'auteur du script. Donc on écrit ensemble une dizaine de scripts, j'amène ça à l'annonceur qui en choisit un, on se retrouve dans le studio, et quand on arrive dans le studio, la situation était tout noire, il y avait juste une lumière qui était sur un petit podium comme ça, qui était un podium qui tournait sur lui-même. On ne comprend pas ce que ça veut dire parce que ce n'était dans aucun des scripts. Et Serge dit oui, mais j'ai eu une idée du dernier moment, vous allez voir, mettez-vous sur le coin, etc. Arrive Jeanne. qui était moulée dans une grande écharpe comme ça, bleue et blanche, aux couleurs de Woolit. Elle monte sur le petit podium et elle tourne avec le podium, alors qu'il y avait deux assistants qui tenaient à l'autre bout l'écharpe. Et quand on arrive au moment où il ne faut pas aller plus loin dans la télévision française, tac, elle s'arrête. Et puis tout le monde applaudit, comme toujours quand on tournait un film. Et à ce moment-là, elle laisse tomber l'écharpe. Je vois mon client qui se décompose complètement. devant Jane Birkin. Il ne m'a même pas dit que ce n'était pas un script qu'on avait écrit ensemble, mais que c'était le script qu'il avait acheté. Il a été décompensé. Le film a eu 100%, à l'époque tout était sondé, a eu 100% d'appréciation. Il n'a pas fait de vente. Alors on a fait un test, une étude pour savoir pourquoi. Parce que les ménagères de moins de 50 ans ont dit, mais moi, je ne veux pas que mon mari voit cette publicité, parce que je sais qu'il me quittera pour Jeanne Berkin.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce que vous écrivez dans le livre que les publicitaires sont des séducteurs pour les ménagères de moins de 50 ans.

  • Speaker #0

    Oui, oui, oui, mais là, ça allait trop loin, parce que c'était le mari qu'on séduisait.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    j'entends bien. Donc, si ça avait été Alain Delon, je pense qu'elles auraient été d'accord. C'est possible.

  • Speaker #1

    À 50 ans, vos ouvrages sont maintenant traduits en dix langues, en turc, en russe, en chinois, en japonais et les créations redoublent. Europe 1, c'est la pêche, l'AX Citroën qui a descendu la muraille de Chine. Ça, je l'ai découvert aussi, ce qui était quand même assez incroyable.

  • Speaker #0

    Le révolutionnaire. Ah oui,

  • Speaker #1

    incroyable. La drogue, c'est de la merde. Air France.

  • Speaker #0

    Avec Jean-Marie Perrier, la drogue, c'est la merde. C'était un grand cinéaste publicitaire aux Etats-Unis. Mais en France, je ne sais pas pourquoi, il n'était pas reconnu. Comme toujours, les Français ne reconnaissent jamais les leurs. Et on avait fait le film ensemble, qui a été un très gros succès.

  • Speaker #1

    Et Microsoft pour leurs premières apparitions européennes. À 55 ans, RSCG et Eurocom fusionnent pour devenir Euro RSCG. Alain de Pouziac devient le CEO de la holding Avas Advertising. Et vous êtes finalement le directeur de création et vice-président.

  • Speaker #0

    On devient une vraie agence internationale présente dans... une quarantaine de pays du monde, pouvant prendre des gros budgets mondiaux. Et surtout, pouvant surtout faire que nos gros budgets existants, comme Vuitton, comme Citroën, comme Afloulou et tout ça, puissent profiter de nos agences internationales. C'est donc l'internalisation de l'activité, c'est l'internationalisation de la publicité. Mais le problème est qu'à ce moment-là, nous on appartenait. au vivendi de l'époque qui avait été créé par Jean-Marie Mercier, un espèce de fou.

  • Speaker #1

    J6M, oui.

  • Speaker #0

    Un fou dangereux qui, je ne sais pas pourquoi, avait pris la publicité en grippe et décide un jour de nous vendre. Sans nous le dire, sans le dire à Pouziac le président, sans me le dire. Dans une conférence de presse, on est là au premier rang, il dit mais je mets en vente la publicité. On n'a pas le vent, on est complètement fou, etc. Pour stopper ça, Pouziac se précipite aux Etats-Unis pour faire un achat. Ce n'est pas le moment de vente quand on achète. Donc c'est pour bloquer finalement l'idée de vente de Messier. Et il achète un peu trop vite, sans nous demander notre conseil, une boîte de marketing services, ni faite ni à faire, que l'on paye 2 milliards de dollars, qui en fait emballait un, et qui est confié à notre patron américain pour son management, et il va en rester 500 millions au bout d'un an. Donc on aura perdu 1,5 milliard en deux ans. Et c'est là que Vincent est arrivé, sans se presser.

  • Speaker #1

    Donc à 70 ans, effectivement, Vincent Bolloré, vous 70 ans, Vincent Bolloré reprend Abbas et en devient le président, mais vous gardez la tête de la création. Le groupe va prendre un nouvel essor, 20 000 collaborateurs, déployant 500 agences, 100 pays dans le monde, font rimer créativité et efficacité. Ça ne donne pas un peu le tournis ?

  • Speaker #0

    C'est formidable, j'ai jamais autant voyagé de ma vie. Parce que moi j'ai toujours pensé que la publicité c'était d'abord l'amour. C'est mon livre, 90 ans d'amour, parce que 90 ans de publicité, ou disons 70 ans de publicité, 90 ans d'amour. Et donc il faut aimer les gens, il faut aimer les gens avec qui on travaille. Il faut aimer ses créatifs. Moi ma vie a consisté à sauter d'un avion dans l'autre, pour aller dire à mes créatifs que je les aimais. Et pour les écouter, pour essayer de régler le problème s'il y en avait, et surtout pour leur dire écoutez, maintenant le futur de la publicité c'est des lions à cannes. Donc on va s'y mettre, on va se rever les manches et on va montrer aux américains que les lions ça peut aussi être français.

  • Speaker #1

    Alors je fais un flashback, mais dans votre vie il y a quand même eu la politique. Beaucoup. Il n'y a pas eu...

  • Speaker #0

    Oh, beaucoup, oui.

  • Speaker #1

    Vous commencez sur les municipales, puis vous êtes en même temps sur Valéry Giscard d'Estaing, sur Chirac, sur Mitterrand.

  • Speaker #0

    Ça, c'est un moment incroyable. Je ne comprends même pas, d'ailleurs, que ça ait pu exister. À l'époque, il n'y avait pas d'agence de publicité politique ou de communication politique. Simplement, le directeur des campagnes était chargé de faire l'affiche. Parce que la communication des politiques se résumait à une affiche et des tracts. Rien d'autre. D'ailleurs, il n'y avait pas de télévision à ce moment-là. Donc, moi, je reçois Jean-Pierre Soissons, qui était le directeur de campagne de Valéry Giscard d'Estaing, qui me dit Est-ce que tu es prêt à faire une affiche ? J'ai dit Bien sûr, d'accord, je me mets au boulot. Mais une semaine après, je reçois le patron d'ailleurs de Davaz de l'époque, c'est très marrant, qui représentait François Mitterrand, qui me dit Est-ce que tu peux me faire une affiche ? Parce que le brief, c'était ça. On ne me disait même pas Je suis de droite, je suis de gauche On ne me disait pas Voilà ce que je veux dire On me dit Fais-moi une affiche 3 jours après... Goudard avec Brochand, qui était le patron de DDB à l'époque, étaient les publicitaires de Chirac. Ils me disent, écoute, on a les photos magnifiques, c'est les photos qu'ils avaient faites pendant le photographie américaine, mais on n'arrive pas à trouver le slogan. Viens nous donner un coup de main. Et moi, le dimanche, je vais leur donner un coup de main. Je dis, ben voilà, moi, je crois que je pourrais dire La France qui ose, la France qui gagne le slogan qui a traîné dans les guêtres de Chirac pendant 20 ans. Et un jour, je descends dans la rue et je vois mes trois affiches dans la rue. Je dis, mais... Incroyable ! Il n'y a personne qui ne dit rien. Après la campagne... Alors les trois affiches, dans les trois affiches, il y avait ma plus belle affiche, qui n'est pas la France tranquille. Il y avait l'affiche de Giscard qui disait la majorité aura la majorité. Ils l'ont eue, c'est même la dernière fois où ils l'ont eue. Il y avait la France qui ose et il y avait cette très belle affiche pour Mitterrand qui était le socialisme, une idée qui fait son chemin. Il y avait une photo de Mitterrand. Moi, je voulais que la photo de Mitterrand, ça soit la photo de De Gaulle sur les grèves d'Irlande et que ce soit les photos. La photo de Mao Tse-tung, en complet blanc comme ça, sur les grèves du Yangtze-Kiang. Et la photo est magnifique, il est sur les grèves de Biarritz, de la Côte Basque, etc. Je lui avais acheté une longue écharpe rouge, etc., qu'il a gardée pendant toute sa campagne. Et je pense que c'est ce qui m'a fait rentrer en communication. Parce que trois ans après, c'était les présidentielles. Donc moi j'écris à mes trois clients. Je lui ai dit écoutez c'est moi qui ai fait votre affiche, un peu par inadvertance, parce que j'ai fait aussi celle de vos concurrents. Mais cette fois-ci je voudrais que les choses soient sérieuses, je voudrais que à l'américaine... Et à l'anglaise, on a un contrat qui nous donne une exclusivité réciproque et qu'on ne puisse pas faire, même Créatif ne puisse pas faire, ce n'est pas très démocratique, faire les trois campagnes. Le seul qui me répond, c'est François Mitterrand. D'un petit mot que j'ai perdu en plus, d'un petit mot de sa main, il me dit si vous êtes libre demain à 13h, rendez-vous à telle adresse pour déjeuner.

  • Speaker #1

    C'est vrai cette histoire du pactole ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, j'y arrive. Devant un tout petit restaurant près de la rue de Bièvre, je ne sais pas s'il existe encore, près de la rue de Bièvre, il avait son petit hôtel particulier, tout petit, parce qu'il faisait 60 mètres carrés. On pensait qu'il avait un palace et il avait 60 mètres carrés. Je lève les yeux, le pactole. Je dis ça y est, c'est parti. Et là, j'ai eu droit à un numéro de charme de François Mitterrand qui ne fait qu'une fois par personne. Quand il veut vraiment séduire, mais quel dommage qu'il n'ait pas été filmé, c'était un vrai petit bonheur. Et c'est là qu'on décide de se retrouver tous les lundis matins de midi à 1h pour faire la campagne. Et ça a failli s'arrêter au bout de la troisième fois, parce qu'au bout de la troisième fois, Mitra était un peu en retard, il était presque 1h30, or il avait rendez-vous à 1h. Chez Leap. Et il me dit, c'est gala, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je n'ai pas de chauffeur, est-ce que vous pouvez m'amener ? Je dis, bien sûr, président, j'ai ma voiture au coin de la rue, on descend dans le coin de la rue. Moi, je ne me méfie de rien, j'étais dans mes nuages, etc. Et il découvre la voiture, c'était une Rolls. Parce que je n'ai rien raté de toutes les conneries que l'on pouvait faire dans les années 80. Il n'y a pas eu que la Rolex. Il y a eu toutes les erreurs possiblement. Et il me dit, mais c'est gala, je vous vire. Il faut passer votre vie à me dire que chaque signe a un sens. Je dois faire attention à tout. Moi, je me suis rhabillé pour faire plus socialiste. Je voulais que j'arrive avec ce symbole de la richesse incongrue. Chez Lippe, qui est le restaurant préféré des journalistes, vous êtes où ? On va y aller à pied. J'étais allé à pied, je me suis précipité à l'agence, j'ai réuni les créatifs, j'ai dit j'ai reçu la leçon de communication de ma vie. J'ai vendu, j'ai mis tout de suite une petite annonce sur la Rolls à moitié prix. Elle s'est vendue dans la nuit, elle s'est vendue dans la nuit et je n'ai plus jamais touché de Rolls de ma vie.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'il a été assez rugueux avec toi.

  • Speaker #0

    Oui, je finis. Le Citroën, c'est quand même mieux.

  • Speaker #1

    C'est quand même le budget de votre vie, ça, Citroën.

  • Speaker #0

    Oui, mais en plus, quand François Mitterrand me dit Est-ce que vous êtes d'accord pour faire ma campagne ? Je dis Oui, Président, mais je suis obligé de demander à mon gros client. Citroën, c'était 70% de l'agence. Donc, il faut que j'aille demander au Peugeot. Parce que le Peugeot n'est évidemment pas très mitterrandien. Je vais voir Jacques Alvé, et il est formidable parce qu'il me dit écoutez, je ne devrais pas vous autoriser, mais ça me flatte quand même que Mitterrand vienne me mendier mon publicitaire. Mais je demande une seule chose, il roule en Renault, je ne vous autorise à le faire que s'il roule en Citroën. Et donc je vois Mitterrand, je dis je suis désolé, il faut que vous rouliez en Citroën. Il dit mais je n'aime pas les Citroën, ils sont trop suspendus, moi j'ai besoin de quelques-uns durs comme dans les Renault, etc. Parce que j'ai toujours mal au dos. Je lui ai dit, écoutez, moi je vais vous en faire une sur mesure. Et je fais une voiture sur mesure, c'était une CX. Elle était socialiste à l'extérieur, toute grise, etc. Tout était peint, c'est devenu à la mode après. Tout était peint, les enjoliveurs et tout ça. Et à l'intérieur, c'était une voiture de riche. Il y avait du bois de rose pour qu'il puisse écrire. Les cuirs étaient moelleux, etc. Et Mitterrand fait toute sa campagne en Citroën. Et moi, j'avais dit à Paris Match de faire la première photo de Mitterrand, faire la couverture et la double centrale de match. J'ai dit à lui que je devais venir à Château-Chinon, je me disais que je me débrouillerais pour que le président me donne son heure exacte de départ. Je serais le seul journaliste à pouvoir le photographier et je préviens Mitterrand que tout est organisé. Le jour J arrive, Mitterrand est élu, c'est le bonheur absolu. À 22h, il prend sa voiture pour entrer à Paris. Orage fou ! Et à ce moment-là, panne d'essuie-glaces de la Citroën. Et donc, il est obligé de prendre la voiture qui suit, qui est une Renault. Et ces salauds de Paris Match, ils sortent quand même.

  • Speaker #1

    Vous dites du mal de Paris Match, maintenant. Oui,

  • Speaker #0

    ils sortent quand même la photo. Et ils disent, premier ratage du Mitterrand.

  • Speaker #1

    C'est assez amusant. Vous en avez fait gagner plein des présidents à travers le monde. Mais il y a eu un échec.

  • Speaker #0

    Il y a eu un échec. Parce que j'ai fait 20 campagnes présidentielles. J'en ai fait 4 en France. Trois pour Mitterrand et une pour Jospin et j'ai fait les autres en international. Et Jospin, c'est mon grand regret parce que Jospin était un très grand Premier ministre, ça aurait été un grand président et la France fabrique rarement de grands présidents qui étaient prêts pour gouverner la France, mais... Il avait une sorte de réticence de la communication. Par rigueur, par honnêteté, il ne voulait pas que ce soit les images qui remplacent le fond de son projet, le fond de sa pensée. Et il ne voulait surtout pas que la télévision, qui s'est toujours livrée... à des émissions un peu populaires, sortent de la vérité et de la rigueur qu'ils voulaient à la politique. Je me souviens que quatre semaines avant l'élection, les choses commençaient à tourner. Je lui dis Écoutez, Président, il faut d'abord que vous présentiez votre femme aux Français. Parce qu'en France, on élit un couple. Et elle ne voulait pas. Mais il faut que vous vous forciez, c'est obligé. Deuxièmement, j'ai obtenu de Michel Drucker qu'il fasse un spécial dimanche avec vous et votre épouse. C'était le 23 février. Il y avait le best-of de l'année et puis il y avait 5 ou 6 stars qui venaient. C'était la bonne année à tous les Français et vous étiez là avec votre femme devant tout ça pendant 2 heures de télé. Ils vont changer un peu les choses, ils vont stopper le début de chute parce qu'on avait commencé à 53. Le début de chute des sondages. Elle me dit oui mais je ne veux pas faire ça et puis ma femme ne sera pas d'accord. Une fois de plus vous allez me faire jouer les pantins publicitaires. Une ministre avec beaucoup de gentillesse et beaucoup de respect, c'est un être très extraordinaire. Mais je lui ai dit, écoutez, laissez-moi convaincre votre femme, organisez-moi un déjeuner avec elle. Et il m'organise un déjeuner avec Ségolène Royal, il y avait un ministère de l'époque, donc on est là tous les trois. Et Ségolène Royal, elle adore la pub. Oui,

  • Speaker #1

    elle est plutôt l'inverse.

  • Speaker #0

    Donc quand je raconte mon histoire, elle me défend à mort, etc. Et elle arrive à convaincre Mme Jospin. Donc j'appelle Lionel, je dis ça y est, ta femme est d'accord, j'appuie sur le bouton pour qu'on fasse l'émission, il était à trois ou quatre semaines de l'émission, et il me dit écoute, laisse-moi une dernière fois en parler ce soir, et je t'appelle demain matin à 7h. A 7h il m'appelle, il me dit tu vas m'en vouloir beaucoup, tu vas être fâché, je ne peux pas, c'est pas digne de moi, c'est pas digne, je sais que c'est l'habitude, mais c'est pas digne d'un président, c'est pas comme ça qu'on doit faire une campagne d'information, une campagne présidentielle aujourd'hui. Cette émission, d'après les politologues, pouvait ramener 400 000 votes. On a perdu à 175 000. Par rigueur, par honnêteté professionnelle, c'est ça qui est lamentable dans la politique. C'est ça qui, par moments, donne le dégoût de la politique. Parce que c'était qui était le plus sincère de tous, qui était le plus rigoureux de tous, qui était le plus près de tous à gouverner la France, et qui voulait le faire à cœur ouvert. face aux Français et pas en utilisant les artifices de la communication présidentielle, a perdu à son son de l'Union.

  • Speaker #1

    Mais ça veut dire que vous, qui êtes un proche de Sarkozy, vous êtes mis en marche après avec Emmanuel Macron. Vous trouvez qu'ils ont moins de rigueur face aux médias, face au système médiatique ?

  • Speaker #0

    Bien sûr, bien sûr. La campagne de Macron, c'est une campagne magnifique de communication. En marche, c'est génial. Je me souviens d'ailleurs qu'un jour, il est venu dîner à la maison avec sa femme. Il m'a dit, je voudrais que tu m'écrives un slogan. Mais je lui ai dit, mais ton slogan, tu en as ? Mais non, je n'ai pas de slogan. Mais tu es En Marche. Je lui ai dit, mais En Marche, ce n'est pas un slogan. C'est le plus beau slogan de tous les temps. Parce que non seulement c'est un slogan, mais en plus, c'est le cri d'amour. Et puis, c'est le cri de guerre. Donc, tu ne vas certainement pas, si tu gâches ça. Il voulait vraiment abandonner En Marche. Et puis, je lui ai dit, en plus, En Marche, ça va donner des marcheurs. Donc, il ne faut surtout pas y toucher. Il m'a écouté.

  • Speaker #1

    Et il a eu raison visiblement. Est-ce que devant moi, c'est le fameux César pour Citroën ?

  • Speaker #0

    C'est le fameux César parce que lorsque le César a été créé par César, pour l'organisateur des Césars, qui pour cette première année, c'était je crois en 87, avait demandé à l'ensemble du cinéma d'abord de juger les meilleurs films, les meilleurs acteurs, les meilleures actrices de l'année. Et question subsidiaire, quelle est la campagne de publicité qui vous a le plus étonné cette année ? J'ai eu beaucoup de chance, c'est les chevrons sauvages qui ont été choisis et qui ont reçu cet Oscar, que je sois allé chercher. Une semaine après, les délégués du cinéma sont allés rencontrer Craven, qui était l'organisateur de la manifestation. Il a dit écoute, on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Voilà, ils ont choisi les torchons, ils ont choisi le cinéma, alors qu'il fallait garder les serviettes de la pub.

  • Speaker #1

    C'est le seul César qui a été attribué à une publicité.

  • Speaker #0

    C'est le seul, il n'y en aura jamais d'autre. C'est le seul César. J'étais très ami avec lui, il est mort dans mes bras. Parce qu'il a passé ses dernières vacances chez nous en Corse, il est revenu, il s'est alité. Et moi tous les dimanches quand je revenais de ma maison de vacances, j'allais le voir, je me mettais dans le lit avec lui et je lui racontais les potins de la semaine. Je l'ai connu parce qu'il est venu dîner un jour à la maison. J'avais un mur à l'époque où je collectionnais les boîtes publicitaires, les bouillons cubes et tout ça. Et il a regardé et il m'a dit je vais compresser ta passion Il m'a envoyé son assistant deux jours après qui a raflé toutes les boîtes. Et un mois après, il est arrivé avec un magnifique tableau qui est grand comme ça, etc. Qui est un cube. Je fais de toutes mes boîtes publicitaires, aller à compresser ma passion, c'est ça, mais avec des boîtes publicitaires sur 2 mètres de haut, mais 2 mètres de large.

  • Speaker #1

    Jacques, puisque quand même le sujet du jour c'est l'amour, comment ne pas parler de la fin de ton livre qui m'a, je le confesse, fait pleurer. C'est très belle lettre à ton fils, à tes filles, à ta femme.

  • Speaker #0

    Écoute. C'est le but du livre, parce que le but du livre, bon, c'est d'amuser un peu les gens au début, mais de leur dire, attention, dans ce monde qui s'autodétruit, dans ce monde qui ne sait que distiller de la haine, dans ce monde qui ne croit qu'au malheur, qui agit très peur, et qui ne sait que voir la vie en noir, c'est là où il faut agir. D'ailleurs, Pierre Dacq disait, si on mettait un peu de rose dans notre matière grise, on aurait moins d'idées noires. Et la façon de mettre un peu de rose... Rose, parce que rose c'est la couleur de l'amour. C'est de mettre un peu d'amour dans sa vie. Mais l'amour, elle est la mal aimée. L'amour, elle est l'ignorée, la laissée de côté. Vous n'avez jamais un homme politique qui parle d'amour. C'est hallucinant. Et donc, j'essaye de faire passer le message que on pourrait peut-être un jour tous se donner la main pour essayer que l'amour prenne la place de la haine dans ce monde des terriens. Et pour ça, il faut aimer les gens.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que tu fais d'ailleurs, ce que tu dis à ton ami Jean-Louis Borloo quand tu le croises en voiture, il est avec sa femme et tu lui dis n'oubliez pas de vous aimer.

  • Speaker #0

    Moi tous les matins quand je me réveille, et encore ce matin, Sophie ma femme me dit mon chéri tu es beau, je t'aime, tu es beau ? Je dis mais Cahuzac est passé dans la nuit, il m'a planté des cheveux, je me précipite devant mon sale miroir de nona génère. Je dis bon ta femme est amoureuse puisque l'amour est aveugle. Et je pars, retourne. J'ai trouvé ma maîtresse. Et ma maîtresse, elle est là. Le lit de ma maîtresse, c'est ma table de travail, qui est encombrée. J'ai deux amours, l'amour fou de ma femme et l'amour fou de la pub. Et plus on donne à l'amour, plus l'amour vous rend de l'amour. Plus on l'honore, plus il vous honore. Plus on le gratifie, plus il vous gratifie. Donc, cultivons l'amour et tout ira mieux. Et l'amour, c'est l'optimisme. Voilà, les optimistes. d'inventer l'avion, les pessimistes le parachutent. Restons dans l'avion, accrochons-nous dans l'avion. Aimons-nous les uns les autres. Le premier publicitaire du monde, c'est Jésus-Christ. Il a tout inventé de notre métier, le slogan, aimons-nous le monde du monde. Le logo, la croix, qui 2000 ans après, 2000 ans après, existe encore. Et il a même inventé la promotion, parce que lorsque la fréquentation baissait, il faisait un miracle et les ventes reparaissaient.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup Jacques Seguéla. Je rappelle le titre de votre livre, 90 ans d'amour, c'est Cheplon et je ne peux que vivement vous le recommander. C'est un plaisir qu'on lit d'une traite. Merci Jacques. Merci.

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