Speaker #0Les éditions Caracolivres présentent Contes merveilleux pour enfants Lus par Fabienne Prost Le singe sage et le sanglier Contes japonais Il y a très longtemps, vivait dans la province de Shinshin, au Japon, un voyageur, montreur de singes, qui gagnait sa vie accompagné d'un singe dont il exhibait les tours. Un soir, l'homme rentra à la maison de mauvaise humeur et dit à sa femme de faire venir le boucher le lendemain. L'épouse, très déconcertée, demanda à son mari: pourquoi veux-tu que je fasse venir le boucher ? - Ça ne sert plus à rien de travailler avec ce singe. Il est trop vieux et il oublie ses tours. Tout ce que je sais, c'est que quand je le frappe avec mon bâton, il ne veut pas danser correctement. Je dois maintenant le vendre au boucher et je dois gagner autant d'argent que possible avec lui. Il n'y a rien d'autre à faire. La femme fut vraiment désolée pour cette pauvre petite créature. Et elle implora à son mari d'épargner le singe. Mais ses supplications furent vaines. L'homme était déterminé à le vendre au boucher. Cependant, le singe se trouvait dans la pièce à côté et entendit chaque mot de la conversation. Il comprit très vite qu'il allait être tué. Et il se dit : en fait, mon maître est un barbare. Voilà que je l'ai servi fidèlement pendant des années et au lieu de me laisser finir mes jours en paix, il va laisser le boucher me couper en morceaux et mon pauvre corps sera rôti, cuit lentement et mangé. Pauvre de moi ! Que dois-je faire ? J'ai une idée. Je sais qu'il y a un sanglier sauvage qui vit dans la forêt à côté. J'ai souvent entendu des histoires pleines de sagesse à son sujet. Si je vais le voir et que je lui raconte ma situation, peut-être qu'il me donnera ses conseils ? Je vais essayer. Il n'y avait plus de temps à perdre. Le singe s'éclipsa de la maison et courut aussi vite qu'il put pour aller trouver le sanglier dans la forêt. Le sanglier était chez lui, et le singe lui raconta immédiatement sa triste histoire. - Bien, monsieur le sanglier, j'ai entendu parler de votre sagesse admirable. Je suis en danger, et vous seul pouvez m'aider. J'ai vieilli au service de mon maître, et maintenant que je ne peux plus danser convenablement, il veut me vendre au boucher. Je sais que vous êtes intelligent. Que me conseillez-vous ? Le sanglier apprécia le compliment et il décida d'aider le singe. Il réfléchit pendant un moment et puis il demanda: ton maître n'a-t-il pas d'enfant ? -Oh oui, dit le singe, il a un fils. Est-ce qu'il ne dort pas le matin à côté de la porte quand ta maîtresse commence sa journée de travail ? Eh bien, je viendrai tôt, et quand l'occasion se présentera, je m'emparerai de l'enfant, et je m'enfuirai avec lui. - Et après ? dit le singe. - Quand la mère sera complètement apeurée, et avant que ton maître et ta maîtresse ne sachent quoi faire, tu dois me courir après, sauver l'enfant, et le ramener à la maison sain et sauf à ses parents. Et tu verras qu'ils n'auront pas le courage de te vendre quand le boucher viendra. Le singe remercia le sanglier de nombreuses fois et rentra chez lui. Il dormit peu cette nuit, en pensant au lendemain, comme vous vous en doutez. Sa vie dépendait du plan du sanglier et si celui-ci réussissait ou pas. Il se leva le premier, attendant anxieusement ce qui allait se passer. Il lui sembla une éternité avant que la femme du maître commença à s'affairer et à ouvrir les volets pour laisser entrer la lumière du jour. Alors tout se déroula comme le sanglier avait prévu. La mère plaça l'enfant près de la véranda, comme à son habitude, pendant qu'elle rangeait la maison et préparait son petit déjeuner. L'enfant chantonnait joyeusement dans les rayons de soleil matinaux sur sa natte en jouant avec l'ombre et la lumière. Soudain, on entendit un bruit et un grand cri d'enfant dans la véranda. La mère sortit de la cuisine en courant, juste à temps, pour voir le sanglier disparaître à travers la porte avec l'enfant, qui l'agrippait fortement. Elle poussa un cri de désespoir et avec les mains grandes ouvertes, elle se précipita dans la chambre où son mari dormait profondément. L'homme s'assit lentement, se frotta les yeux et avec colère, il lui demanda pourquoi sa femme faisait autant de bruit. Au moment où l'homme comprit ce qu'il s'était passé et sortit de la maison avec sa femme, le sanglier était déjà loin. Et ils virent le singe courir après le voleur aussi vite que ses pattes le lui permettaient. L'homme et la femme furent tous les deux remplis d'admiration par l'attitude exemplaire du singe sage. Et leur gratitude fut infinie quand le fidèle singe leur ramena l'enfant, sain et sauf. - Voilà, dit la femme, c'est l'animal que tu veux tuer. Si le singe n'avait pas été là, nous aurions perdu notre enfant à jamais. - Femme, tu as raison pour une fois, dit l'homme alors qu'il portait l'enfant dans la maison. Tu peux renvoyer le boucher d'où il vient. Et maintenant, fais-nous un bon petit déjeuner, et pour le singe aussi ! Quand le boucher arriva, il fut renvoyé avec une commande de viande de sanglier pour le dîner du soir. Quant au singe, il fut choyé et vécut le reste de ses jours en paix, sans que jamais son maître ne le frappe à nouveau.