Speaker #0Bienvenue dans 300 secondes de crime, une série d'épisodes hebdomadaires faisant partie du podcast Contre-enquête. Aujourd'hui, nous allons explorer l'affaire Thérèse Himbert, une histoire qui a captivé la France à la fin du XIXe siècle. En 1879, Thérèse Imbert, une femme issue d'une famille modeste, se retrouve au cœur de l'un des plus importants scandales financiers de l'époque qui implique une histoire de faux héritage et de manipulation. Avec ce récit, nous allons découvrir comment Thérèse Imbert, par son ingéniosité et son audace, a pu berner l'élite française et causer un véritable séisme dans le monde financier en réalisant ce qui est probablement la plus grande escroquerie du XIXe siècle. La fin de ce XIXe siècle en France est justement une époque marquée par une grande effervescence économique et sociale. La société est en pleine transformation avec l'essor de l'industrialisation, l'augmentation des richesses et le développement des marchés financiers. Cependant, cette période est également caractérisée par une grande disparité sociale et une fascination pour le statut bourgeois et la richesse. Dans ce contexte, les escroqueries financières et les affaires de fraude sont relativement courantes, exploitant souvent la crédulité et l'avidité des investisseurs. Enquête de gains rapides Une avidité et une crédulité que Thérèse Himbert va parvenir à exploiter parfaitement. Thérèse est née en 1855 dans une famille modeste et dès son plus jeune âge, on l'a dit affabulatrice. Elle prétend par exemple qu'elle est issue de la noblesse, ce qui est évidemment faux. En 1878, elle épouse Frédéric Himbert qui est le fils du maire de Toulouse. Grâce aux relations du père de Frédéric, qui devient député, puis ministre, elle et son épouse s'installent à Paris et se font connaître dans ce qu'on appelle la bonne société. Thérèse utilise habilement son charme, son intelligence et son sens de la manipulation pour gagner la confiance des gens les mieux placés, mais elle en veut plus. Son audace et sa facilité à manipuler les gens lui permettent de s'infiltrer dans les cercles les plus influents de Paris. L'affaire Thérèse Himbert débute alors véritablement avec une histoire qu'elle commence à raconter au tout Paris. En 1883, elle commence en effet à prétendre qu'elle a hérité d'un millionnaire américain nommé Thomas Crawford qui aurait légué une immense fortune à sa famille. Ce récit, astucieusement construit, repose sur un document qu'on appelle le testament Crawford qu'elle présente comme une preuve de cet héritage. Selon ce document, elle doit hériter de la somme pharaonique de 100 millions de francs. Mais elle ne peut en profiter immédiatement et elle sollicite alors quelques riches relations pour leur emprunter de l'argent tout en attendant qu'elles reçoivent ce fabuleux héritage. Son mari est rapidement mis dans la confidence de ce qui se trame et il devient son complice. Thérèse et sa famille vivent dans l'opulence grâce à des emprunts réalisés en l'attente de cette incroyable fortune. Au fil du temps, elle réussit à convaincre de nombreux investisseurs et des institutions financières de lui prêter d'importantes sommes d'argent en promettant des retours lucratifs une fois l'héritage débloqué. Son histoire est si convaincante que même des personnalités éminentes de la finance et de la société parisienne sont dupes. Maison de campagne, robe luxueuse et même un voilier, le couple ne s'interdit aucune dépense et finit par emprunter jusqu'à 50 millions de francs dont la somme est couverte par l'héritage du millionnaire, tout droit sorti de l'imagination de Thérèse. En 1893, elle crée même une société qui promet à des petits épargnants qui lui confient leur argent de recevoir ensuite des intérêts bien au-dessus des montants habituels. 40 millions de francs sont alors à nouveau récupérés et dépensés par le couple. Toutefois, des doutes commencent à émerger lorsque l'héritage tarde à se matérialiser. Les créanciers et les investisseurs, devenus impatients, commencent à réclamer leur dû. La pression monte sur Thérèse et sa famille, mais elle continue de maintenir sa façade, insistant sur le fait que l'héritage sera disponible dès que certaines conditions seront remplies. Cette situation perdure depuis des années, au cours desquelles Thérèse Himbert et sa famille mènent un train de vie luxueux, financé entièrement par les fonds empruntés sous le prétexte de cet héritage imminent. Cependant, le château de cartes s'effondre lorsqu'un banquier proche de la ruine, à force d'avoir prêté de l'argent au couple, finit par se suicider en 1898. Après ce suicide, d'autres créanciers alertent les autorités. Réunissant les informations données aux uns et aux autres par Thérèse Himbert, il réalise alors que l'héritage, même s'il est gigantesque, ne suffira vraisemblablement pas à couvrir les dépenses engagées par le couple. Il devient alors évident que le testament Crawford est un faux et que l'héritage promis n'a jamais existé. La découverte de cette supercherie ébranle la société parisienne et a des répercussions importantes jusque sur les marchés financiers, révélant la vulnérabilité des investisseurs face à la fraude et aux fausses promesses. Une enquête officielle est évidemment lancée pour faire la lumière sur les agissements de Thérèse et de sa famille. Les enquêteurs se concentrent d'abord sur le fameux testament Crawford. Un juge ordonne d'ailleurs l'ouverture d'un coffre censé détenir le précieux document. On n'y retrouve évidemment rien. Mais pendant ce temps, Thérèse et son mari ont quitté Paris pour l'Espagne, où ils espèrent échapper aux autorités françaises. L'enquête révèle le mode de vie extravagant de Thérèse et de sa famille, financé entièrement par des fonds frauduleux. Les dépenses somptueuses, les propriétés de luxe, le statut social, tout était basé sur l'argent des investisseurs dupés. L'affaire Thérèse Himbert se transforme rapidement en un scandale national mettant en évidence la vulnérabilité des investisseurs et surtout la facilité avec laquelle cet escroc bien préparé a pu exploiter la crédulité humaine et les lacunes du système. En 1902, Thérèse et son époux sont arrêtés à Madrid et extradés à Paris pour y être jugés. Thérèse et les membres de sa famille sont traduits en justice et le procès est très médiatisé. Il captive l'opinion publique française tant par l'audace du stratagème que par l'ampleur de la fraude. Au tribunal, les détails de l'escroquerie sont exposés en plein jour. Les preuves accumulées par les enquêteurs, incluant le faux testament, les transactions financières douteuses et les témoignages des victimes, sont accablants. Thérèse, malgré ses tentatives pour se défendre, ne peut échapper à la réalité des faits qui sont présentés. Finalement, elle est reconnue coupable de fraude et de manipulation. Les deux époux sont condamnés à cinq ans de travaux forcés, sanctionnant ainsi leurs actes graves et mettant fin à des années de tromperie. Les deux frères de Thérèse Imbert sont pour leur part condamnés à deux et trois ans de prison. Une fois sa peine purgée, on dit que Thérèse Himbert aurait vécu en France où elle serait morte dans la pauvreté quelques décennies plus tard. Ce récit est maintenant terminé. L'affaire Thérèse Himbert offre une leçon intemporelle sur les dangers de la crédulité et de la spéculation aveugle. Thérèse, par son audace et surtout sa capacité à manipuler les perceptions, a pu tromper la haute société parisienne, révélant la vulnérabilité d'un monde où les apparences et les promesses non fondées avaient souvent plus de poids que la réalité concrète. Ce récit met en évidence la nécessité de la vigilance et de la prudence, surtout dans le domaine des investissements financiers où la promesse de gain facile peut aveugler le jugement et la raison. On dit que les grands escrocs allient trois traits de personnalité, la psychopathie, le narcissisme et le machiavélisme, des traits de caractère que devait sûrement posséder Thérèse Imbert. C'était 300 secondes de crime. Je profite de la fin de cet épisode pour vous remercier pour les 50 000 écoutes réalisées en deux mois de mise en ligne de ce podcast. Je vous dis à bientôt et n'oubliez pas de vous abonner à Contre-Enquête sur Apple Podcast ou Spotify pour ne rien manquer des prochains épisodes et des autres séries du podcast.