Nanotechnologies : plongez au-delà du visible ! cover
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Détour vers le futur

Nanotechnologies : plongez au-delà du visible !

Nanotechnologies : plongez au-delà du visible !

34min |06/11/2024|

235

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Nanotechnologies : plongez au-delà du visible !

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34min |06/11/2024|

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Description

Ce mois-ci nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans Détour vers le futur. C’est la physique qui se cache, à une échelle infiniment petite, derrière toutes les technologies de l’information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd’hui de nanotechnologies et de physique quantique, et tenter d’y voir clair, au-delà du visible…


Avec :


Julien Bobroff est physicien et professeur à l'Université Paris-Saclay. Après 20 ans de recherches en physique quantique, il anime maintenant une équipe de recherche, La Physique Autrement, autour des questions de vulgarisation et d'enseignement de la physique.


Gonzague Agez est physicien et universitaire français. Diplômé d’un doctorat en physique des lasers de l’Université de Lille, il effectue ses études post-doctorales à l’Université du Chili à Santiago, puis à Nice, avant d’être nommé Maître de conférences à l’Université de Toulouse 3 en 2007. Il y enseigne essentiellement la physique expérimentale au département de Mesures Physiques de l’IUT. Ses recherches au laboratoire CEMES-CNRS concernent les propriétés optiques des cristaux liquides, la physique des lasers et la nano-photonique.

Un podcast du Quai des Savoirs, en coproduction avec le CNRS et en partenariat avec l'INA, présenté par Marina Léonard et Laurent Chicoineau | Réalisation : Arnaud Maisonneuve | Prise de son : Laurent Codoul

Capsule sonore : Rencontre I Texte : Li-Cam I Sound design et réalisation : François Donato I Voix : Corinne Mariotto

Ces recherches et ce podcast ont été financés en tout ou partie, par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce mois-ci, nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans des tours vers le futur.

  • Speaker #1

    C'est la physique qui se cache à une échelle infiniment petite derrière toutes les technologies de l'information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd'hui de nanotechnologie et de physique quantique et tenter d'y voir un peu plus clair au-delà du visible.

  • Speaker #0

    Alors pour en discuter, nous recevons non pas un mais deux... Prof de physique, le premier et peut-être le seul prof de physique à accumuler le statut d'influenceur sur les réseaux sociaux et d'enseignant-chercheur à l'université Paris-Saclay. Il publie de nombreux ouvrages pour nous aider à mieux comprendre la physique autrement. Bonjour Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Notre second invité enseigne à l'université Paul Sabatier à Toulouse et fait ses recherches sur la nanophotonique au CMS, un laboratoire du CNRS. Il vient de participer à un projet de recherche sur des émetteurs quantiques. Bonjour Gonzaga Ghez. Bonjour.

  • Speaker #1

    Alors, pour attaquer, Julien Beaubrof, il va falloir nous donner quelques clés pour plonger dans la nanophotonique. De quoi parle-t-on quand on parle de nano ? À quelle dimension sommes-nous et quels en sont les enjeux ?

  • Speaker #2

    Le nanomètre, on est un milliard de fois plus petit que vous et moi. En gros, c'est facile, on nous rapetit ici et on nous met un milliard de fois plus petit. On est à l'échelle de l'atome, à l'échelle de la molécule. Un atome, c'est un peu moins d'un nanomètre. Ce qu'il y a d'intéressant, ce n'est pas seulement qu'on va avoir des atomes et des molécules à cette échelle, c'est que les lois de la physique vont être modifiées. C'est-à-dire qu'on a un monde radicalement différent à cette échelle. On n'est plus comme juste avec des petites boules autour de nous, comme on pourrait imaginer naïvement. En fait, on entre dans le champ de la physique quantique. On entre dans un champ de nouvelles lois, de nouveaux comportements. Ce qui est absolument incroyable dans ce domaine, c'est qu'on le pensait complètement inaccessible à nous, humains, parce qu'on s'est dit, mais dès qu'on va fabriquer un instrument, il va déjà faire des milliards d'atomes et ça sera impossible d'y accéder. Et en fait, depuis quelques dizaines d'années, on vit une véritable révolution dans les labos, dans plein de champs différents. On arrive... enfin à aller à l'échelle du nanomètre et encore mieux, à manipuler à l'échelle du nanomètre. Donc maintenant, on est capable de manipuler la lumière, les atomes, les molécules, les circuits électriques à l'échelle du nanomètre.

  • Speaker #0

    Alors c'est exactement ce que vous avez fait, Gonzague Hages, j'imagine, puisque vous avez travaillé sur des nano-antennes, c'est ça, dans ce projet de recherche. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel était le défi que vous vouliez relever dans ce projet ?

  • Speaker #3

    Alors oui, le défi en fait, c'est de faire un peu, bon l'équivalent avec l'électronique. L'électronique, c'est un peu plus rentrer dans la culture commune. L'idée c'est de faire voyager de l'information ou de l'énergie sur des circuits, pas seulement le laisser comme ça faire ce qu'il veut, c'est de le contrôler pour aller amener les informations là où on veut. Nous l'idée c'est de faire un peu la même chose mais avec de la lumière. Donc l'électronique c'est des électrons, la photonique avec des photons, et les photons pour faire simple on va dire que c'est eux qui transportent l'énergie lumineuse. On voit tous à quoi ça ressemble une antenne.

  • Speaker #0

    sur les voitures ça reçoit l'information et ça peut l'envoyer ça peut marcher dans les deux sens c'est exactement ça,

  • Speaker #3

    c'est pour ça que je parlais de contrôler l'information ou l'énergie, l'information c'est de l'énergie et donc le défi c'est de trouver la bonne géométrie d'une antenne qui marcherait pour la lumière, alors il se trouve que les antennes qu'on a sur nos voitures ou les vieilles antennes râteaux qu'on voyait là Elles sont de l'ordre du mètre parce qu'elles sont faites pour recevoir ou émettre des ondes électromagnétiques qui ont la taille à peu près de ces antennes. Alors si on transpose ça à la lumière qui est aussi une onde électromagnétique, la taille caractéristique de ces ondes est du nanomètre. On en parle depuis tout à l'heure. Donc il faut faire des antennes qui ont la taille... de quelques centaines de nanomètres, on va dire. On est dans la centaine de nanomètres.

  • Speaker #0

    Comment vous arrivez à manipuler, à fabriquer des choses à cette échelle-là ? Quels outils de laboratoire ?

  • Speaker #3

    Ce n'est pas moi qui fabrique. En fait, dans ce consortium, on a chacun notre rôle. Nous, notre rôle, c'était déjà de designer. Donc ça, on le fait avec des outils numériques.

  • Speaker #0

    Vous dessinez la forme, c'est ça que ça veut dire ?

  • Speaker #3

    On dessine complètement la forme. Et puis, en fonction des propriétés qu'on veut mettre en avant, on en reparlera. peut-être tout à l'heure. Et puis, une fois qu'on a trouvé des formes intéressantes avec des calculs, on propose ça à nos partenaires, qui eux vont venir graver ces antennes sur du silicium, sur des plaques de silicium. Alors, il y a le Letty à Grenoble qui fournit ces plaques de silicium, le LAS à Toulouse qui vient graver ça. Et techniquement, comment on fait pour graver à ces toutes petites échelles ? C'était votre question. On utilise des électrons principalement. On vient graver avec des électrons parce que les électrons, on est capable de les focaliser de manière très très précise et de contrôler vraiment leur position. Et ces électrons qui vont venir vraiment graver la matière. Et en fait, ce qui reste, c'est l'antenne.

  • Speaker #0

    Alors cette antenne, elle va servir à quoi ? Est-ce que par exemple, on va la trouver dans des futurs téléphones portables ? Est-ce qu'on va la trouver, je ne sais pas moi, dans des... voitures, dans l'électronique embarquée de voitures. Ça va servir à quoi, ce type de composants ?

  • Speaker #3

    À quoi ça va servir ? Il y a déjà des applications là-dessus. Par exemple, si on en met plusieurs, on les met l'une à côté de l'autre, plein de petites antennes à base de silicium, par exemple, et à ce moment-là, on appelle ça des métasurfaces. Et ces métasurfaces, elles ont des propriétés qui peuvent être comparées à des lentilles classiques, typiquement les lentilles de vos lunettes. Sauf que ce matériau, Cette méta-surface va avoir une épaisseur qui est beaucoup plus fine. de l'ordre de la centaine de nanomètres, plus un substrat pour les tenir. Et elles vont avoir quelques autres avantages, qui sont principalement dus au fait qu'on peut multiplier plusieurs fonctions. Vos lunettes peuvent focaliser la lumière ou diverger suivant la pathologie qu'elle doit corriger. Et ces métasurfaces peuvent faire l'effet de filtre pour laisser passer une couleur ou une autre. Elles peuvent aussi disperser... différents rayons pour typiquement viser plusieurs objectifs en même temps, etc. Il faut savoir que la propriété même de l'antenne, donc sa couleur pour faire simple, elle est très liée à son environnement. Si on change un tout petit peu son environnement, son interaction avec la lumière va changer, mais de manière assez drastique, en tout cas quelque chose de mesurable. Donc il y a des capteurs qui utilisent ce principe-là. Par exemple, si vous venez mettre une molécule, Parce qu'on a, comme Julien l'a dit juste avant, on est sur des ordres de grandeur qui sont assez équivalents. Si on vient mettre une molécule qu'on veut détecter la présence de cette molécule, en fait l'antenne va réagir différemment. Et en détectant cette différence de réaction, on peut être capable de détecter la présence, voire de mesurer la quantité par exemple d'une substance.

  • Speaker #1

    Alors puisqu'il est question de couleur, petit quiz. Alors petit quiz, allez, on va jouer avec Laurent d'abord. D'après toi Laurent, l'argent c'est de quelle couleur ?

  • Speaker #0

    Je dirais gris comme tous les métaux, non ?

  • Speaker #1

    pas à peu près, et l'or. Jaune. Alors ça, c'est vrai, à l'échelle du visible, mais à l'échelle nanométrique, t'as tout faux. Et c'est ce que va nous expliquer Pierre-Gilles De Gênes, donc prix Nobel de physique, c'est ce qu'il racontait au sujet des nanoparticules d'or et d'argent. On était dans les années 90.

  • Speaker #4

    Il y a un très beau rouge dans les vitraux du XIIIe siècle qui est fait avec des toutes petites, petites particules, qu'on appelle des nanoparticules. Dans le cas particulier, c'était de l'or. Il y a d'ailleurs une autre couleur aussi, c'est le halo qu'il y a autour de la tête des seins. Il est jaune. Et là, c'est des nanoparticules d'argent. Alors, c'est très bon de savoir ça parce que ça nous le garde un peu modeste. On est en train de découvrir des tas de choses sur les nanoparticules, mais c'est intéressant de voir que nos ancêtres du Moyen-Âge, ils en savaient déjà un sacré bout.

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, il va falloir nous l'expliquer, messieurs les physiciens. Je ne sais pas lequel des deux veut s'y coller, mais pourquoi l'or à cette échelle-là en nanoparticules est rouge ? Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Allez, je me lance. C'est Gonzague qui est le spécialiste. Déjà, il exagère un petit un chiffre de gêne. Il est sympa, mais vraiment, ils n'avaient rien compris à ça au Moyen-Âge. Ils savaient le même. Mais ce n'est pas pareil. Il y a une bonne raison à ça. C'est que même la couleur de l'or, telle que tu l'as dit, Laurent, elle est quantique. C'est-à-dire que le fait que l'or est jaune, c'est des raisons à la fois, et c'est même pire pour l'or particulièrement, c'est à la fois quantique et de la théorie de la relativité restreinte. C'est vraiment la totale. Je ne vais pas vous expliquer en détail pourquoi, mais fondamentalement, c'est le fait que la lumière, c'est ce que disait Gonzague, c'est des photons, c'est des petits grains quantiques. et qui va interagir avec les atomes de l'or, être renvoyé par l'or, et l'or va manifester en quelque sorte sa nature quantique en vous faisant du doré. Maintenant, quand on descend en échelle, qu'on réduit l'or, et qu'on le réduit, on pourrait se dire que ça va être exactement pareil, parce que les atomes, c'est exactement les mêmes. Mais en fait, il se passe un truc très curieux, c'est qu'à l'échelle du nanomètre, si votre bout d'or, votre lingot d'or, il ne fait que nanomètre, donc il ne va pas valoir très cher pour le coup, eh bien la lumière va interagir avec lui différemment. Et ça vient vraiment du fait que la lumière, c'est une vague, qui est très bien Gonzague. Cette vague, elle a une taille caractéristique. Et soudain, cette taille, elle va être de l'ordre ou même plus grande que la taille de la particule. Donc la particule, elle ne reçoit plus du tout la lumière de la même manière et elle ne la recrache plus de la même manière. Et donc, il va y avoir des effets, notamment des électrons, des effets collectifs, qui vont faire que la particule a une couleur différente. Alors, si c'était juste pour faire de l'or rouge, ça ne serait pas hyper intéressant. Mais ce que ça dit plus fondamentalement, c'est que juste en jouant sur la forme et la taille de la particule, on choisit un peu sur mesure ses propriétés et par exemple sa couleur. Et là, soudain, ça ouvre tout un champ des possibles. On va être un peu maître des propriétés optiques. Quand il parlait de métasurface et de métamatérieux, Gonzague, c'est une idée absolument géniale. C'est qu'on va faire ce qu'on veut avec la lumière et même tricher avec les lois de l'optique habituelle. Certains de ces matériaux arrivent à rendre presque invisibles certains matériaux. On arrive à faire des indices négatifs. Donc, on arrive à faire ce qu'on ne savait pas faire avec la lumière habituellement, juste parce qu'on n'était pas descendu à la bonne échelle.

  • Speaker #0

    D'accord, donc Gonzague, en fait, vous utilisez ces propriétés, enfin nouvelles pour nous qui les découvrons aujourd'hui, mais vous utilisez ces propriétés. Est-ce que ce n'est pas compliqué ? Comment vous travaillez sur ça ? Quelles sont les difficultés à cette échelle-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ce n'est pas compliqué parce que c'est la physique qui le fait pour nous. Nous, on ne fait qu'observer. C'est ce qu'on appelle des effets de résonance, en fait. La matière résonne parce qu'on l'excite avec une vague, comme n'importe quelle chose pourrait. On pourrait osciller parce qu'une balançoire, typiquement, quand on pousse dessus, elle va osciller à une vitesse qu'on n'a pas choisie. D'accord ? Donc voilà, on ne choisit pas. Par contre, on peut décider de changer la géométrie, la taille de la balançoire typiquement. On peut changer la taille des nanostructures. Et donc pour répondre à la question de comment on observe ça, en fait, nous, le vecteur principal, c'est les photons, bien sûr. C'est ce qu'on observe. Donc si vous voulez vous rendre compte un peu plus de la chose, c'est... Bon, vous avez un microscope. Tout le monde voit ce que c'est à peu près. Sauf que bon, c'est des microscopes qui restent des microscopes optiques. On reste sur de l'observation parce qu'il existe aussi des microscopes électroniques pour voir des choses encore plus petites. Si on a besoin de voir le résultat de la gravure pour voir si c'est effectivement ce qu'on avait imaginé, à ce moment-là on va faire une imagerie avec des microscopes électroniques. Et ces microscopes là sont capables de descendre sur des résolutions telles qu'on est capable de, typiquement, voir l'arrangement atomique à l'intérieur. Donc nous, on est un peu à une échelle au-dessus, l'arrangement supra-atomique, on va dire. Et donc ça, on peut mesurer très précisément la taille, etc. Ensuite, les propriétés optiques, parce que c'est celles qui nous intéressent, nous. C'est un microscope optique avec des objectifs de qualité un peu supérieure. On essaie de récolter un maximum de lumière, parce que forcément, si on fait des choses à toute petite échelle, on ne peut pas s'attendre à avoir énormément de lumière. Donc là, il faut être équipé avec des... des détecteurs particuliers qui vont pouvoir compter les photons un par un, grosso modo.

  • Speaker #0

    Alors vous ne nous avez pas dit non plus, pourquoi finalement utiliser des photons plutôt que des électrons ? Puisqu'il y a des choses qu'on sait faire déjà avec de l'électronique. Alors qu'est-ce que vous cherchez à gagner à travers l'utilisation de photons ?

  • Speaker #3

    Alors ce qu'on peut gagner, alors on ne cherche pas à gagner grand chose, généralement.

  • Speaker #0

    Comme le plaisir de la recherche !

  • Speaker #3

    Ouais, en fait comme Julien l'a dit, c'est que la physique déjà, elle est différente à ces échelles-là. D'accord, sans même descendre complètement jusqu'au système quantique, rien que l'effet qu'on décrivait, que Pierre-Gilles de Gênes décrit, ça c'est un effet de taille parce qu'on est descendu et on ne peut pas l'expliquer en imaginant l'interaction de la lumière avec un objet d'une taille un peu plus grosse. D'accord ? Donc déjà on cherche ça. Ensuite, pourquoi les photons plutôt que les électrons ? Fondamentalement, c'est des choses qui sont très différentes. J'ai envie de dire, les photons, on peut en mettre plein au même endroit. On peut les superposer, c'est une propriété qu'ils ont. Si on met 12 photons au même endroit, on a 12 fois plus d'énergie. Les électrons, ils ne vont pas trop aimer ça. Les électrons, si on en met 12, ils vont se battre entre eux. C'est vraiment une propriété intrinsèque de ces particules, même si je n'aime pas trop dire que les photons sont des particules, mais voilà.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est pour ça que vous utilisez le photon, parce que vous pouvez en mettre plus au même endroit, et donc ça va vous donner... Plus de possibilités derrière sur les composants que vous fabriquez pour apporter plus d'énergie.

  • Speaker #3

    On va pouvoir concentrer effectivement pas mal d'énergie. On va probablement moins chauffer aussi que des électrons, parce que le fait qu'ils se repoussent aussi, les électrons font chauffer. Vous le repérez sur vos batteries, votre téléphone, généralement quand il est en marche, il chauffe. La lumière peut aussi faire chauffer, mais ça dépend du matériau avec lequel il interagit.

  • Speaker #0

    D'accord, alors on parle de physique quantique depuis un petit moment. On ne peut pas parler de physique quantique sans parler de ce fameux chat de Schrödinger, dont on parle de partout sur Internet, un peu partout dans l'histoire des sciences, évidemment. C'est un chat, vous savez, c'est celui qu'on a enfermé dans une boîte pour faire une expérience.... et une substance radioactive mortelle.

  • Speaker #2

    Si un seul de ces atomes se dégrave durant la période de Perse... Un mécanisme de relais actionnera un marteau qui d'un coup brisera la fiole et le chat en mourra. Jusqu'à l'ouverture de la boîte,

  • Speaker #0

    nous ignorons si le chat est vivant ou bien s'il est mort. Il est mort. Non, Raven,

  • Speaker #1

    selon la théorie quantique, il est les deux jusqu'à l'ouverture de la boîte. Non,

  • Speaker #0

    il est bien mort avant l'ouverture.

  • Speaker #2

    Ah, ignorez le fantôme.

  • Speaker #0

    Oui, alors ça c'est le fantôme du chat de Schrödinger qui sort de la boîte dans ce petit dessin animé. Alors pour les personnes qui ont au moins plus de 10 ans aujourd'hui, c'est peut-être pas la référence. C'était l'été. Tins, titans, go. Julien Bobroff, cette expérience, elle traduit quoi par rapport à la physique quantique ? Qu'est-ce qu'elle nous apprend ? Pourquoi on parle tout le temps de ce chat de Schrödinger dès qu'on parle de physique quantique ?

  • Speaker #2

    D'abord, je dois dire qu'elle est assez bien décrite dans le dessin animé. De toute façon, au Curieux, c'est la première fois que je l'entends, mais je suis assez épaté. Elle est compliquée, cette expérience, mais en gros, faisons-le bien plus simple, sans décrire peut-être l'expérience elle-même dans son détail. Ce qu'elle dit fondamentalement, c'est qu'à l'échelle quantique, on peut avoir des objets dans deux états à la fois. Alors, pas mort et vivant, parce que la notion de vie n'a aucun sens pour un atome. Par exemple, on peut avoir un atome dans deux endroits à la fois. Il peut être à 40 cm de lui-même, par exemple. Ou on peut avoir un atome excité et pas excité à la fois. Et alors nous, on appelle ça le chat de Schrödinger parce qu'il y a cette expérience dont on parle tout le temps de pensée qu'avait proposé Schrödinger où il avait dit, et c'est hyper bizarre ce truc parce qu'on pourrait imaginer des expériences où on transmettrait cette espèce de superposition assez incroyable, cette espèce de don d'ubiquité un peu magique, et on pourrait le transmettre à un chat. Et donc le chat, dans l'expérience de Schrödinger, il sera à la fois mort et vivant. Alors, bonne ou mauvaise nouvelle, je ne sais pas, non. Vous n'arriverez pas à faire une expérience avec un chat qui sera à la fois mort et vivant. Et alors, ce n'est pas juste pour des arguments théoriques, on l'a testé. Alors, on n'a pas testé ça sur des vrais chats, rassurez-vous. Mais on a essayé, on a été un peu plus malin. Il y a des prix Nobel qui ont mis même leur prix Nobel pour ça, notamment Serge Haroche en France. L'idée, ça a été de prendre un objet quantique pur et dur, genre un atome ou un photon, de le mettre dans deux états à la fois, et puis en fait, de le faire grossir petit à petit. Et ce dont on se rend compte, c'est qu'en gros, dès que l'objet est un peu trop gros, ou alors qu'il y a trop de choses qui se passent autour de lui, un peu d'air, un peu de chaleur, un peu de mouvement, il arrête d'être dans deux états à la fois. Donc, ce qu'on peut juste retenir assez simplement, c'est que... à l'échelle de la quantique, à l'échelle du nanomètre, à toute petite échelle, on sait mettre un objet dans deux états à la fois, même si nous, ça nous semble étrange. Et ça nous semble étrange, en fait, parce qu'à notre échelle, à nous, on ne peut pas. Ça s'arrête quelque part entre les deux, en gros. Donc, on sait mettre des tout petits objets dans deux états à la fois. Alors là, on pourrait se dire que c'est vraiment du plaisir de physicien qui veut juste s'observer des trucs bizarres en labo. Alors, même si ce n'était que ça, moi, je trouve ça absolument magnifique. Mais ce qu'il y a d'assez remarquable, et là aussi, c'est tout récent, c'est qu'on s'est rendu compte depuis peu qu'en faisant ça... on ouvre soudain une boîte de Pandore et on est capable de faire des choses. Alors pour le coup, du côté des applications, c'est incroyable. Et en particulier, il y a des physiciens qui, depuis quelques dizaines d'années, se sont rendus compte qu'en prenant plein de ces atomes dans deux états à la fois ou de ces photons dans deux états à la fois, on pouvait calculer. Et qu'on pouvait calculer bien mieux et bien plus vite qu'avec un ordinateur normal, dans certains cas. En fait, ce qu'on appelle les ordinateurs quantiques, c'est une assemblée de millions, on aimerait bien mettre des millions, de petits chatons de Schrödinger qui siennent tous les uns les autres dans une sorte de pouponnière de chatons. Là, je m'emballe dans ma métaphore complètement pourrie. Mais en gros, il y a cette idée-là. Il y a l'idée que si on est capable de bien contrôler cette superposition à l'échelle de tout petits objets, et qu'on est capable d'en mettre plein, on va accéder vraiment à des possibilités complètement révolutionnaires, par exemple en termes de calcul.

  • Speaker #1

    Alors là, on vient de parler de la superposition d'états. Vous disiez qu'il y avait d'autres propriétés quand on passe à des échelles toutes petites, petites, petites, comme ça, en physique quantique. Quels sont les autres grands principes qu'il faut avoir à peu près en tête quand on est hors-physicien ?

  • Speaker #2

    Donc on se fait la physique quantique en deux minutes à peu près, c'est ça ? Allez, et pourquoi pas ? En gros, à toute petite échelle, c'est ce que disait très bien Gonzague, c'est qu'on ne sait pas bien vous dire avec notre vocabulaire à nous ce qui se passe. On dit bon alors l'objet c'est à la fois une particule et une onde, mais ça dépend comment on le regarde, etc. Donc voilà, il y a cette espèce de paradoxe. Imaginez que si vous regardez un électron par exemple, ça va être plutôt une sorte de nuage qui occupe toute une zone de l'espace. Premier truc troublant, si vous essayez de le mesurer, hop, il se réduit soudainement en un endroit et il a l'air de tirer au sort où est cet endroit. Déjà ça c'est hyper curieux. Deuxième truc hyper curieux, on peut le mettre à deux endroits à la fois. Troisième truc hyper curieux, on peut le balancer contre un mur et de temps en temps, il va passer à travers le mur. Ça s'appelle l'effet tunnel. Autre truc hyper bizarre, il est complètement discontinu. Il a le droit qu'à certaines énergies, qu'à certaines vitesses. Il n'est pas du tout, je ne sais pas, comme une pomme qui tomberait gentiment. Lui, il va choisir, il va tomber à une vitesse, puis une autre vitesse, puis une autre vitesse. Ce qui n'existe absolument pas dans la vie de tous les jours. Et puis, on peut continuer comme ça et comme ça. On peut même aller jusqu'à l'intrication. Donc là, c'est le sommet du bizarre. J'adore ça. Vous prenez maintenant deux. objets quantiques, vous les frottez l'un à l'autre de façon un peu astucieuse, et si vous les séparez de milliers de kilomètres, on a fait ça sur des milliers de kilomètres, ils ont l'air de partager des propriétés à distance. Comme s'ils se parlaient entre eux, mais ils ne se parlent pas entre eux. Mais quand on titille l'un, ça a l'air de titiller l'autre à mille kilomètres de là.

  • Speaker #0

    À des milliers de kilomètres ?

  • Speaker #2

    Ouais, le record c'est 1200 kilomètres actuellement. Ah vache !

  • Speaker #1

    On comprend que ça inspire les dessinateurs pour les dessins animés.

  • Speaker #2

    Oui, ils sont vraiment dans le dessin animé avec effet spécial.

  • Speaker #1

    Et alors ça, tous ces éléments, tous ces principes, c'est des éléments qui sont à la base de l'ordinateur quantique dont vous parliez il y a quelques instants. C'est ça qu'on met là-dedans ? On essaie de fabriquer un ordinateur qui dispose de tous ces... Alors, il ne dispose pas de toutes les propriétés, mais il s'appuie sur tous ces principes pour faire des choses folles ?

  • Speaker #2

    L'ordinateur, c'est tout à la fois. C'est vraiment le sommet du délire. C'est qu'on va prendre plein d'objets quantiques, les mettre chacun dans plusieurs états à la fois, et en plus, tous les intriquer entre eux. Et donc, on pourrait se dire que ça va être le cauchemar absolu pour un informaticien. qu'au lieu de se faire des zéros et des 1 normaux, on va faire des trucs qui sont à la fois zéro et un, et puis qui sont tous ensemble et autres. Et donc, ça n'a aucun sens, a priori. Le truc assez magique, c'est que les théoriciens en premier se sont rendus compte qu'en fait, si on savait manipuler cette espèce de bouillie d'objets quantiques et de zéros et de 1 dans tous les sens, et qu'on les manipulait un peu astucieusement, ils étaient capables de faire certains calculs qu'on n'est pas capables de faire avec des ordinateurs de mots. Et des calculs qui peuvent avoir des conséquences vraiment importantes sur l'humanité. Et donc, c'est un peu ça l'enjeu. Alors, je vous rassure, je ne vous rassure pas, au contraire, je démine tout de suite le terrain, ça ne marche pas. Ou plutôt, ça marche hyper mal pour l'instant. Les ordinateurs quantiques actuels, vraiment, font des pauvres calculs minables qu'on sait très bien faire avec des ordinateurs minables, avec des ordinateurs normaux, pardon, mais ça progresse. Et donc, il y a des gens qui pensent que d'ici quelques années, ces ordinateurs quantiques vont faire des choses remarquables. Et d'autres qui disent qu'on n'y arrivera jamais. Et on est un peu dans cet entre-deux assez palpitant actuellement, qui est un monde en pleine évolution et révolution. Alors, ça ne se limite pas aux ordinateurs quantiques. Et je m'arrêterai là, mais pour repasser justement la parole à Gonzague. Il se trouve qu'on s'est rendu compte au passage que plein de choses qu'on faisait à l'échelle du nanomètre, sans nécessairement que ce soit du calcul, ouvraient tout un champ des possibles. Les métamatérieux, comme l'a très bien dit Gonzague. On peut parler aussi des capteurs. On sait maintenant faire des capteurs absolument incroyables à petite échelle. qui vont mesurer des choses qu'on ne savait pas mesurer actuelles jusque-là, et qui vont avoir des effets dans plein de domaines et pas seulement dans la physique.

  • Speaker #1

    Alors juste avant, tant qu'on est dans le déminage et les fantasmes, on voit régulièrement passer des éléments marketing. Alors au-delà de l'ordinateur quantique, on voit passer des crèmes solaires, des crèmes antirides et compagnie. Tout ça pour le moment c'est de l'ordre du marketing ou il y a vraiment des fondements scientifiques, physiques ? j'entends dedans,

  • Speaker #2

    au-delà des propriétés biologiques parce que vous n'êtes pas ni biologiste ni médecin On a beaucoup de choses bien plus dangereuses aussi en thérapie quantique, on dit qu'on va vous soigner grâce à la quantique, et on voit bien ce que je viens de vous raconter, ça crée des imaginaires ça crée des métaphores et ça donne envie de s'en emparer pour parler aussi d'ésotérisme d'énergie, de résonance, etc. Alors ce qu'on peut dire, nous en tant que scientifiques et là j'espère que Gonzague partagera mon point de vue, c'est que on sait très bien, nous, et ça a été expérimenté en laboratoire et ça a été prouvé maintes et maintes fois et on sait maintenant la physique qui se cache derrière c'est que tous les effets s'arrêtent dès que l'objet est trop gros et trop chaud. Donc en gros, un corps humain ne peut pas avoir des effets quantiques à grande échelle. Donc on ne peut pas vous soigner grâce à la physique quantique, malheureusement. Et tous les gens qui vont vous parler de thérapie quantique, de biorésonance, de biofeedback, et de tout un vocabulaire emprunté à la quantique pour faire scientifique, en fait, vous arnaquent. Si par contre, ils vous disent que c'est juste une métaphore et qu'en fait, ils sont dans un champ qui n'est pas scientifique, moi, je n'ai aucun problème. J'ai un problème s'ils usurpent la quantique en lui faisant dire ce qu'elle n'est pas capable de dire.

  • Speaker #0

    Oui, alors moi j'ai envie de vous poser Gonzague la question à 1000 euros ou peut-être 1 milliard d'euros. C'est-à-dire, est-ce qu'on sait pourquoi ces effets s'arrêtent à un moment donné à une certaine échelle ? Comment ça se fait que finalement tous ces effets assez magiques qui viennent de nous être décrits, pourquoi à un moment donné, paf, ça s'arrête et on passe à un autre type d'effet ?

  • Speaker #3

    Oui, on sait, je ne suis pas du tout spécialiste de ça. Le gros mot, c'est la décohérence.

  • Speaker #0

    Ok,

  • Speaker #1

    c'est un joli mot.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #3

    C'est-à-dire qu'en fait, quand on les additionne... On n'arrive pas à bien les additionner, c'est-à-dire qu'il y a des plus, des moins, pour faire simple, on aimerait bien additionner que des plus ensemble, que des moins ensemble, on sait ce que ça fait, mais en fait au final, plus on additionne, plus on va faire un mélange, et puis on va arriver à une moyenne qui est nulle. Et on peut voir le monde classique, au sens de la physique classique, comme la moyenne des effets quantiques.

  • Speaker #0

    D'accord, donc la pomme qui tombe, puisque Julien en a parlé, et puis on a Newton tout son tête, avec cette fameuse pomme pour l'effet gravité, qui tombe de manière... Alors, je vais me lancer dans la physique, je vais dire des bêtises constantes, ou en tout cas qui arrivent au sol sans avoir des saccades, ce que j'ai compris si on était dans un univers quantique, la pomme pourrait tomber avec plusieurs vitesses différentes. Donc ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #3

    Ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #1

    Qui est donc une moyenne.

  • Speaker #3

    Oui, la physique classique, comme tous les champs de recherche, le but, c'est de faire des modèles, des modèles qui fonctionnent. Donc pour expliquer pourquoi la pomme tombe, en combien de temps elle tombe, on n'a pas besoin d'invoquer la physique quantique. Même si, dans l'absolu, si on voulait décrire parfaitement l'état de cette pomme, on serait obligé de rentrer dans la physique quantique.

  • Speaker #1

    Et alors, est-ce que la différence... Alors là, attention, pareil, je me lance. Est-ce que la différence entre passer de la physique de notre dimension à nous, notre échelle, jusqu'aux ordinateurs quantiques, c'est passer de la modélisation à la simulation ?

  • Speaker #0

    Alors non, en fait, il est capable de faire les deux. C'est-à-dire qu'un ordinateur quantique est capable de simuler. Et en fait, quand on dit simuler, c'est juste que l'ordinateur quantique, il est bien fichu pour traduire les lois de la quantique, vu qu'il est lui-même quantique. Donc si vous voulez en gros comprendre comment une réaction chimique, par exemple, fonctionne, et qui est purement quantique, et une réaction chimique, c'est que de la quantique, en gros, l'ordinateur quantique, il est bien câblé pour ça. Il va vous aider à le simuler. Simuler, ça veut dire que vous ne faites pas de calcul de la réaction, vous lui demandez juste de faire comme dans la vraie vie. Et vous regardez ce qui se passe. Par ailleurs, il peut calculer. Et là, on va vraiment le programmer comme on programmerait un ordinateur normal, avec des outils un peu différents, mais avec des portes logiques, avec des langages de programmation. Donc, il y a deux sortes de façons d'utiliser un ordinateur quantique. Alors,

  • Speaker #1

    puisqu'on parle d'applications futuristes, il est l'heure d'écouter notre feuilleton SF, proposé par l'ICAM et François Donato. Et cette fois-ci, il nous parle d'une certaine rencontre.

  • Speaker #2

    Je viens de sortir mon t-shirt,

  • Speaker #3

    dont la couleur et les motifs changent en fonction des autres t-shirts de mon proximité. C'est très ludique.

  • Speaker #4

    Quand je suis chez moi, il est dans le gris,

  • Speaker #3

    il se tourne. Et dès que je sors, c'est le même artiste. Il forme sa peau, il est comme dans un test de recherche. Il est sans cesse changeant.

  • Speaker #4

    C'est si amusant que j'ai envie de le porter tous les jours. Hier, j'étais au centre commercial pour acheter des yaourts et de la compote. En m'approchant de la caisse robotisée, j'ai entendu des exclamations. C'était une jeune femme en train de récupérer ses courses à une autre caisse un peu plus loin. Son t-shirt et le mien s'étaient mis à converser. Ils échangeaient des formes, redoublées d'inventivité à l'unisson, à un rythme effréné. C'était vraiment très beau et super fun. et complètement incompréhensible. Je regardais son t-shirt et elle regardait le mien. Nous étions si enchantés que nous en avons oublié les gens qui patientaient pour avoir accès aux caisses robotisées. Certains ont commencé à ronchonner, nous n'en avions que l'air. D'autres personnes, comme nous, fascinées par le spectacle, et souriaient béatement. Ces vêtements en métatextile sont très à la mode, mais nul ne comprend leur langage, si toutefois c'en est un. Est-ce si important pour les trucs ? La beauté se suffit à elle-même ? C'est en tout cas mon avis.

  • Speaker #0

    Bonsoir.

  • Speaker #4

    Nous avons récupéré la force,

  • Speaker #3

    et nous avons fait un vrai de causette. Rien de bien profond, juste des banalités. Tandis que nos t-shirts continuent à bavarder un grand renfort de couleurs et de figures plus ou moins géométriques.

  • Speaker #4

    Elles se prénomment Flora,

  • Speaker #3

    qui habite à côté. Nos t-shirts s'entendent bien. Nous avons décidé de nous revoir.

  • Speaker #5

    Texte, l'ICAM. Voix, Corinne Marion. Son design et réalisation, François Benapour.

  • Speaker #6

    Bon, là, on va un tout petit peu loin avec un mythique futuriste. Pourtant, les métatextiles, ça fait un peu penser au graphène qui est étudié notamment à Manchester. Il y a déjà quelques années de ça, on avait parlé de textiles intelligents. Est-ce que les métatextiles, c'est pour bientôt ?

  • Speaker #1

    Gonzague, vous qui travaillez sur justement les nanotechnologies.

  • Speaker #7

    Oui, oui, c'était top. En vrai, il y a plein de mots-clés qui sont presque des métaphores de ce qu'on fait. Je trouve superbe le travail. Et oui, pourquoi pas ? Pourquoi pas les textiles, les surfaces, si on veut qu'elles changent de couleur. Et d'ailleurs... En fait, les textiles se parlent dans l'extrait. Oui. Donc, ça, c'est vraiment la métaphore de l'information. J'en parlais tout à l'heure. L'idée, c'est de transporter de l'information par la lumière. Et pour changer de couleur, il faut passer d'un mode passif à un mode actif. D'accord ? Passif, ce serait toujours la même couleur. Et là, en fait, on voit que ça change de couleur, etc. Donc, il existe déjà des choses comme ça. Et pour que ce soit un mode actif, généralement, il faut un stimulus. Ce stimulus, ça peut être... de la lumière, des faisceaux laser, nous on fait ça avec des faisceaux laser par exemple, qu'on peut modeler comme on veut, ça peut être un champ électrique, ça peut être typiquement, là on entame une nouvelle phase dans nos recherches qui est l'interaction de ces antennes avec leur environnement et leur environnement serait des cristaux liquides. Ces cristaux liquides, on sait qu'on peut les activer, en tout cas les bouger avec un champ électrique pour changer de manière active l'environnement. Et si on change leur environnement, ça changera typiquement la couleur et plein d'autres propriétés qu'elles auront.

  • Speaker #0

    Je veux juste compléter. Donc déjà, c'est pratique parce que Gonzague est en train de vous dire que dans quelques années, il a le T-shirt pour vous.

  • Speaker #6

    Génial.

  • Speaker #0

    Peut-être bon dire. À un moment donné, l'héroïne dit cette phrase que je trouve très belle. Elle dit la beauté se suffit à elle-même. Je n'ai pas forcément besoin de comprendre comment il marche mon T-shirt. C'est peut-être là, je trouve, la définition même de la science et de la physique. C'est que nous, on a besoin de comprendre. C'est que Gonzague et moi, ce qui nous anime, ce qui nous motive, c'est de comprendre. Et un point clé pour moi... C'est que ça n'enlève rien à la beauté du phénomène. Les gens, parfois, quand on comprend, on rend ça cartésien, on rend ça triste, on rend ça dur, il y a des tas d'équations. Moi, je trouve que ça rajoute de la beauté à la beauté. De comprendre comment ça fonctionne, de comprendre la physique quantique qui va se cacher derrière le t-shirt ou les métamatériaux ou l'interaction lumière-mature, ça le rend encore plus beau.

  • Speaker #1

    Absolument. Et alors, on voulait terminer cette émission en vous interrogeant sur les enjeux qu'on a aujourd'hui, auxquels on est tous confrontés à travers... le changement climatique, à travers la crise écologique ou la transition écologique. Est-ce que les recherches que vous faites à cette échelle quantique, est-ce que, par exemple, ces nouveaux composants que vous êtes en train de travailler, ça pourrait réduire la consommation énergétique ? Est-ce que vous imaginez aussi, en utilisant les matériaux, on sait qu'on utilise beaucoup de terres rares, avec des stocks qui sont limités à l'échelle de la planète. Comment vous prenez ces enjeux en compte ?

  • Speaker #7

    Vous avez tout à fait raison. Au-delà de nos pratiques même, où on essaie d'être un peu plus vertueux dans les laboratoires, ça c'est un mouvement national, Il faut réfléchir à ces choses parce que le problème des ressources, ça fait partie d'une des neuf limites planétaires. Donc oui, inventer une techno actuelle qui utiliserait des ressources trop rares et qui ne seraient pas déployables, serait probablement très inutile ou en tout cas n'irait pas dans la bonne voie. Maintenant, si on veut parler des terres rares, sur les applications que nous on en a, ces terres rares, on les utilise comme des émetteurs. Justement, si on veut aller même un peu plus vers la quantique, il faut en mettre très peu. Mais très peu, c'est vraiment très très peu.

  • Speaker #1

    Oui, on a compris qu'on était à l'échelle de l'atome.

  • Speaker #7

    Voilà, donc de ce point de vue-là, pour l'instant, on ne réfléchit pas trop à ça. Elles ont des propriétés qu'on aime bien et qu'on veut jouer avec. Mais probablement, effectivement, s'il fallait le déployer, il faudrait aller chercher vers des matériaux pour lesquels on a plus de ressources sur Terre. Typiquement, ces métasurfaces, on en a parlé pas mal, elles peuvent aussi être utilisées pour optimiser le photovoltaïque, typiquement. C'est quelque chose qui est très utilisé parce que... Pour les panneaux solaires ? Pour les panneaux solaires, voilà. À la fois pour concentrer l'énergie là où on en aurait le plus besoin, pour faire des lentilles par exemple, mais aussi, comme j'ai dit au début, ces petites antennes, elles sont là pour concentrer l'énergie.

  • Speaker #1

    Ça pourrait augmenter le rendement des panneaux solaires ?

  • Speaker #7

    Ça pourrait tout à fait augmenter le rendement des panneaux solaires, et il y a beaucoup. de choses, il y a beaucoup de choses qui se font là dessus. Et comme on est sur des technos à base de silicium, ça pour l'instant on n'en manque pas trop. Oui,

  • Speaker #1

    il y en a sur toutes les plages du monde.

  • Speaker #7

    Voilà, alors c'est de la silice.

  • Speaker #1

    C'est de la silice, mais ce n'est pas celui-ci.

  • Speaker #7

    Avant le silicium, oui voilà. Mais bon, c'est moins critique que les terrains, typiquement.

  • Speaker #1

    Julien, vos réflexions aussi dans votre laboratoire ?

  • Speaker #0

    Oui, d'abord la première remarque, c'est le domaine dont on est en train de parler, cette interaction entre des matériaux qu'on fabrique très spécialement et la lumière, c'est ça qui a produit les LED. Les LED, elles ont été inventées. elle n'existait pas à l'état naturel, elles sont 10 à 100 fois plus efficaces que nos anciennes ampoules incandescentes à filaments, et ça a été un sacré gain en énergie pour l'humanité. Donc c'est des recherches qui peuvent avoir des sacrés impacts. Alors il ne faut pas non plus tomber, je pense que ni Gonzague ni moi ne sommes là-dedans, dans une espèce de technosolutionnisme à tout va qui dirait vous inquiétez pas avec la physique quantique qu'on va tout vous résoudre. Je dis ça parce que j'ai certains collègues qui ont tendance à dire ça, notamment avec l'ordinateur quantique, qui disent que ça va résoudre par exemple la captation du CO2, et je pense qu'il ne faut pas s'emballer et rien que les échelles de temps nous mettent dedans. Donc... La crise écologique, on va devoir y faire face. Et ce n'est pas ce qu'on fait en laboratoire qui va permettre de la résoudre. Ça peut permettre d'aider à la passer mieux.

  • Speaker #1

    Très bien. Eh bien, bienvenue dans la nouvelle révolution quantique. C'est le titre de votre dernier ouvrage, Julien, qui est paru chez Flammarion. Et le précédent, je rappelle, la quantique autrement, qui est sortie en poche. Donc, pour moins de 10 euros, Marina, vous saurez tout sur la physique quantique. Voilà. Et on vous retrouve aussi sur Instagram, sur TikTok et sur Facebook.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, c'est terminé pour aujourd'hui. Un grand merci à nos deux invités, Gonzague Hages et Julien Bobroff.

  • Speaker #1

    Merci à nos partenaires de l'INA pour la recherche documentaire et merci aussi à l'ICAM et François Donato pour leur création sonore. Cet épisode a été réalisé en coproduction par le Quai des Savoirs et le CNRS avec le soutien de l'Agence Nationale de la Recherche.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, un podcast présenté par Laurent Chicoineau et Marina Léonard, préparé avec l'aide de Françoise Bissac et Héloïse Bonin. Et on ne pouvait pas ne pas faire une petite dédicace à Catherine Demathéis.

  • Speaker #1

    Réalisation Arnaud Maisonneuve, à la prise de son Thomas Gwazé. Abonnez-vous à Détour vers le futur sur Deezer, Spotify ou Apple Podcasts pour ne rater aucun épisode. Et n'oubliez pas, nous sommes le futur.

Description

Ce mois-ci nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans Détour vers le futur. C’est la physique qui se cache, à une échelle infiniment petite, derrière toutes les technologies de l’information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd’hui de nanotechnologies et de physique quantique, et tenter d’y voir clair, au-delà du visible…


Avec :


Julien Bobroff est physicien et professeur à l'Université Paris-Saclay. Après 20 ans de recherches en physique quantique, il anime maintenant une équipe de recherche, La Physique Autrement, autour des questions de vulgarisation et d'enseignement de la physique.


Gonzague Agez est physicien et universitaire français. Diplômé d’un doctorat en physique des lasers de l’Université de Lille, il effectue ses études post-doctorales à l’Université du Chili à Santiago, puis à Nice, avant d’être nommé Maître de conférences à l’Université de Toulouse 3 en 2007. Il y enseigne essentiellement la physique expérimentale au département de Mesures Physiques de l’IUT. Ses recherches au laboratoire CEMES-CNRS concernent les propriétés optiques des cristaux liquides, la physique des lasers et la nano-photonique.

Un podcast du Quai des Savoirs, en coproduction avec le CNRS et en partenariat avec l'INA, présenté par Marina Léonard et Laurent Chicoineau | Réalisation : Arnaud Maisonneuve | Prise de son : Laurent Codoul

Capsule sonore : Rencontre I Texte : Li-Cam I Sound design et réalisation : François Donato I Voix : Corinne Mariotto

Ces recherches et ce podcast ont été financés en tout ou partie, par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce mois-ci, nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans des tours vers le futur.

  • Speaker #1

    C'est la physique qui se cache à une échelle infiniment petite derrière toutes les technologies de l'information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd'hui de nanotechnologie et de physique quantique et tenter d'y voir un peu plus clair au-delà du visible.

  • Speaker #0

    Alors pour en discuter, nous recevons non pas un mais deux... Prof de physique, le premier et peut-être le seul prof de physique à accumuler le statut d'influenceur sur les réseaux sociaux et d'enseignant-chercheur à l'université Paris-Saclay. Il publie de nombreux ouvrages pour nous aider à mieux comprendre la physique autrement. Bonjour Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Notre second invité enseigne à l'université Paul Sabatier à Toulouse et fait ses recherches sur la nanophotonique au CMS, un laboratoire du CNRS. Il vient de participer à un projet de recherche sur des émetteurs quantiques. Bonjour Gonzaga Ghez. Bonjour.

  • Speaker #1

    Alors, pour attaquer, Julien Beaubrof, il va falloir nous donner quelques clés pour plonger dans la nanophotonique. De quoi parle-t-on quand on parle de nano ? À quelle dimension sommes-nous et quels en sont les enjeux ?

  • Speaker #2

    Le nanomètre, on est un milliard de fois plus petit que vous et moi. En gros, c'est facile, on nous rapetit ici et on nous met un milliard de fois plus petit. On est à l'échelle de l'atome, à l'échelle de la molécule. Un atome, c'est un peu moins d'un nanomètre. Ce qu'il y a d'intéressant, ce n'est pas seulement qu'on va avoir des atomes et des molécules à cette échelle, c'est que les lois de la physique vont être modifiées. C'est-à-dire qu'on a un monde radicalement différent à cette échelle. On n'est plus comme juste avec des petites boules autour de nous, comme on pourrait imaginer naïvement. En fait, on entre dans le champ de la physique quantique. On entre dans un champ de nouvelles lois, de nouveaux comportements. Ce qui est absolument incroyable dans ce domaine, c'est qu'on le pensait complètement inaccessible à nous, humains, parce qu'on s'est dit, mais dès qu'on va fabriquer un instrument, il va déjà faire des milliards d'atomes et ça sera impossible d'y accéder. Et en fait, depuis quelques dizaines d'années, on vit une véritable révolution dans les labos, dans plein de champs différents. On arrive... enfin à aller à l'échelle du nanomètre et encore mieux, à manipuler à l'échelle du nanomètre. Donc maintenant, on est capable de manipuler la lumière, les atomes, les molécules, les circuits électriques à l'échelle du nanomètre.

  • Speaker #0

    Alors c'est exactement ce que vous avez fait, Gonzague Hages, j'imagine, puisque vous avez travaillé sur des nano-antennes, c'est ça, dans ce projet de recherche. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel était le défi que vous vouliez relever dans ce projet ?

  • Speaker #3

    Alors oui, le défi en fait, c'est de faire un peu, bon l'équivalent avec l'électronique. L'électronique, c'est un peu plus rentrer dans la culture commune. L'idée c'est de faire voyager de l'information ou de l'énergie sur des circuits, pas seulement le laisser comme ça faire ce qu'il veut, c'est de le contrôler pour aller amener les informations là où on veut. Nous l'idée c'est de faire un peu la même chose mais avec de la lumière. Donc l'électronique c'est des électrons, la photonique avec des photons, et les photons pour faire simple on va dire que c'est eux qui transportent l'énergie lumineuse. On voit tous à quoi ça ressemble une antenne.

  • Speaker #0

    sur les voitures ça reçoit l'information et ça peut l'envoyer ça peut marcher dans les deux sens c'est exactement ça,

  • Speaker #3

    c'est pour ça que je parlais de contrôler l'information ou l'énergie, l'information c'est de l'énergie et donc le défi c'est de trouver la bonne géométrie d'une antenne qui marcherait pour la lumière, alors il se trouve que les antennes qu'on a sur nos voitures ou les vieilles antennes râteaux qu'on voyait là Elles sont de l'ordre du mètre parce qu'elles sont faites pour recevoir ou émettre des ondes électromagnétiques qui ont la taille à peu près de ces antennes. Alors si on transpose ça à la lumière qui est aussi une onde électromagnétique, la taille caractéristique de ces ondes est du nanomètre. On en parle depuis tout à l'heure. Donc il faut faire des antennes qui ont la taille... de quelques centaines de nanomètres, on va dire. On est dans la centaine de nanomètres.

  • Speaker #0

    Comment vous arrivez à manipuler, à fabriquer des choses à cette échelle-là ? Quels outils de laboratoire ?

  • Speaker #3

    Ce n'est pas moi qui fabrique. En fait, dans ce consortium, on a chacun notre rôle. Nous, notre rôle, c'était déjà de designer. Donc ça, on le fait avec des outils numériques.

  • Speaker #0

    Vous dessinez la forme, c'est ça que ça veut dire ?

  • Speaker #3

    On dessine complètement la forme. Et puis, en fonction des propriétés qu'on veut mettre en avant, on en reparlera. peut-être tout à l'heure. Et puis, une fois qu'on a trouvé des formes intéressantes avec des calculs, on propose ça à nos partenaires, qui eux vont venir graver ces antennes sur du silicium, sur des plaques de silicium. Alors, il y a le Letty à Grenoble qui fournit ces plaques de silicium, le LAS à Toulouse qui vient graver ça. Et techniquement, comment on fait pour graver à ces toutes petites échelles ? C'était votre question. On utilise des électrons principalement. On vient graver avec des électrons parce que les électrons, on est capable de les focaliser de manière très très précise et de contrôler vraiment leur position. Et ces électrons qui vont venir vraiment graver la matière. Et en fait, ce qui reste, c'est l'antenne.

  • Speaker #0

    Alors cette antenne, elle va servir à quoi ? Est-ce que par exemple, on va la trouver dans des futurs téléphones portables ? Est-ce qu'on va la trouver, je ne sais pas moi, dans des... voitures, dans l'électronique embarquée de voitures. Ça va servir à quoi, ce type de composants ?

  • Speaker #3

    À quoi ça va servir ? Il y a déjà des applications là-dessus. Par exemple, si on en met plusieurs, on les met l'une à côté de l'autre, plein de petites antennes à base de silicium, par exemple, et à ce moment-là, on appelle ça des métasurfaces. Et ces métasurfaces, elles ont des propriétés qui peuvent être comparées à des lentilles classiques, typiquement les lentilles de vos lunettes. Sauf que ce matériau, Cette méta-surface va avoir une épaisseur qui est beaucoup plus fine. de l'ordre de la centaine de nanomètres, plus un substrat pour les tenir. Et elles vont avoir quelques autres avantages, qui sont principalement dus au fait qu'on peut multiplier plusieurs fonctions. Vos lunettes peuvent focaliser la lumière ou diverger suivant la pathologie qu'elle doit corriger. Et ces métasurfaces peuvent faire l'effet de filtre pour laisser passer une couleur ou une autre. Elles peuvent aussi disperser... différents rayons pour typiquement viser plusieurs objectifs en même temps, etc. Il faut savoir que la propriété même de l'antenne, donc sa couleur pour faire simple, elle est très liée à son environnement. Si on change un tout petit peu son environnement, son interaction avec la lumière va changer, mais de manière assez drastique, en tout cas quelque chose de mesurable. Donc il y a des capteurs qui utilisent ce principe-là. Par exemple, si vous venez mettre une molécule, Parce qu'on a, comme Julien l'a dit juste avant, on est sur des ordres de grandeur qui sont assez équivalents. Si on vient mettre une molécule qu'on veut détecter la présence de cette molécule, en fait l'antenne va réagir différemment. Et en détectant cette différence de réaction, on peut être capable de détecter la présence, voire de mesurer la quantité par exemple d'une substance.

  • Speaker #1

    Alors puisqu'il est question de couleur, petit quiz. Alors petit quiz, allez, on va jouer avec Laurent d'abord. D'après toi Laurent, l'argent c'est de quelle couleur ?

  • Speaker #0

    Je dirais gris comme tous les métaux, non ?

  • Speaker #1

    pas à peu près, et l'or. Jaune. Alors ça, c'est vrai, à l'échelle du visible, mais à l'échelle nanométrique, t'as tout faux. Et c'est ce que va nous expliquer Pierre-Gilles De Gênes, donc prix Nobel de physique, c'est ce qu'il racontait au sujet des nanoparticules d'or et d'argent. On était dans les années 90.

  • Speaker #4

    Il y a un très beau rouge dans les vitraux du XIIIe siècle qui est fait avec des toutes petites, petites particules, qu'on appelle des nanoparticules. Dans le cas particulier, c'était de l'or. Il y a d'ailleurs une autre couleur aussi, c'est le halo qu'il y a autour de la tête des seins. Il est jaune. Et là, c'est des nanoparticules d'argent. Alors, c'est très bon de savoir ça parce que ça nous le garde un peu modeste. On est en train de découvrir des tas de choses sur les nanoparticules, mais c'est intéressant de voir que nos ancêtres du Moyen-Âge, ils en savaient déjà un sacré bout.

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, il va falloir nous l'expliquer, messieurs les physiciens. Je ne sais pas lequel des deux veut s'y coller, mais pourquoi l'or à cette échelle-là en nanoparticules est rouge ? Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Allez, je me lance. C'est Gonzague qui est le spécialiste. Déjà, il exagère un petit un chiffre de gêne. Il est sympa, mais vraiment, ils n'avaient rien compris à ça au Moyen-Âge. Ils savaient le même. Mais ce n'est pas pareil. Il y a une bonne raison à ça. C'est que même la couleur de l'or, telle que tu l'as dit, Laurent, elle est quantique. C'est-à-dire que le fait que l'or est jaune, c'est des raisons à la fois, et c'est même pire pour l'or particulièrement, c'est à la fois quantique et de la théorie de la relativité restreinte. C'est vraiment la totale. Je ne vais pas vous expliquer en détail pourquoi, mais fondamentalement, c'est le fait que la lumière, c'est ce que disait Gonzague, c'est des photons, c'est des petits grains quantiques. et qui va interagir avec les atomes de l'or, être renvoyé par l'or, et l'or va manifester en quelque sorte sa nature quantique en vous faisant du doré. Maintenant, quand on descend en échelle, qu'on réduit l'or, et qu'on le réduit, on pourrait se dire que ça va être exactement pareil, parce que les atomes, c'est exactement les mêmes. Mais en fait, il se passe un truc très curieux, c'est qu'à l'échelle du nanomètre, si votre bout d'or, votre lingot d'or, il ne fait que nanomètre, donc il ne va pas valoir très cher pour le coup, eh bien la lumière va interagir avec lui différemment. Et ça vient vraiment du fait que la lumière, c'est une vague, qui est très bien Gonzague. Cette vague, elle a une taille caractéristique. Et soudain, cette taille, elle va être de l'ordre ou même plus grande que la taille de la particule. Donc la particule, elle ne reçoit plus du tout la lumière de la même manière et elle ne la recrache plus de la même manière. Et donc, il va y avoir des effets, notamment des électrons, des effets collectifs, qui vont faire que la particule a une couleur différente. Alors, si c'était juste pour faire de l'or rouge, ça ne serait pas hyper intéressant. Mais ce que ça dit plus fondamentalement, c'est que juste en jouant sur la forme et la taille de la particule, on choisit un peu sur mesure ses propriétés et par exemple sa couleur. Et là, soudain, ça ouvre tout un champ des possibles. On va être un peu maître des propriétés optiques. Quand il parlait de métasurface et de métamatérieux, Gonzague, c'est une idée absolument géniale. C'est qu'on va faire ce qu'on veut avec la lumière et même tricher avec les lois de l'optique habituelle. Certains de ces matériaux arrivent à rendre presque invisibles certains matériaux. On arrive à faire des indices négatifs. Donc, on arrive à faire ce qu'on ne savait pas faire avec la lumière habituellement, juste parce qu'on n'était pas descendu à la bonne échelle.

  • Speaker #0

    D'accord, donc Gonzague, en fait, vous utilisez ces propriétés, enfin nouvelles pour nous qui les découvrons aujourd'hui, mais vous utilisez ces propriétés. Est-ce que ce n'est pas compliqué ? Comment vous travaillez sur ça ? Quelles sont les difficultés à cette échelle-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ce n'est pas compliqué parce que c'est la physique qui le fait pour nous. Nous, on ne fait qu'observer. C'est ce qu'on appelle des effets de résonance, en fait. La matière résonne parce qu'on l'excite avec une vague, comme n'importe quelle chose pourrait. On pourrait osciller parce qu'une balançoire, typiquement, quand on pousse dessus, elle va osciller à une vitesse qu'on n'a pas choisie. D'accord ? Donc voilà, on ne choisit pas. Par contre, on peut décider de changer la géométrie, la taille de la balançoire typiquement. On peut changer la taille des nanostructures. Et donc pour répondre à la question de comment on observe ça, en fait, nous, le vecteur principal, c'est les photons, bien sûr. C'est ce qu'on observe. Donc si vous voulez vous rendre compte un peu plus de la chose, c'est... Bon, vous avez un microscope. Tout le monde voit ce que c'est à peu près. Sauf que bon, c'est des microscopes qui restent des microscopes optiques. On reste sur de l'observation parce qu'il existe aussi des microscopes électroniques pour voir des choses encore plus petites. Si on a besoin de voir le résultat de la gravure pour voir si c'est effectivement ce qu'on avait imaginé, à ce moment-là on va faire une imagerie avec des microscopes électroniques. Et ces microscopes là sont capables de descendre sur des résolutions telles qu'on est capable de, typiquement, voir l'arrangement atomique à l'intérieur. Donc nous, on est un peu à une échelle au-dessus, l'arrangement supra-atomique, on va dire. Et donc ça, on peut mesurer très précisément la taille, etc. Ensuite, les propriétés optiques, parce que c'est celles qui nous intéressent, nous. C'est un microscope optique avec des objectifs de qualité un peu supérieure. On essaie de récolter un maximum de lumière, parce que forcément, si on fait des choses à toute petite échelle, on ne peut pas s'attendre à avoir énormément de lumière. Donc là, il faut être équipé avec des... des détecteurs particuliers qui vont pouvoir compter les photons un par un, grosso modo.

  • Speaker #0

    Alors vous ne nous avez pas dit non plus, pourquoi finalement utiliser des photons plutôt que des électrons ? Puisqu'il y a des choses qu'on sait faire déjà avec de l'électronique. Alors qu'est-ce que vous cherchez à gagner à travers l'utilisation de photons ?

  • Speaker #3

    Alors ce qu'on peut gagner, alors on ne cherche pas à gagner grand chose, généralement.

  • Speaker #0

    Comme le plaisir de la recherche !

  • Speaker #3

    Ouais, en fait comme Julien l'a dit, c'est que la physique déjà, elle est différente à ces échelles-là. D'accord, sans même descendre complètement jusqu'au système quantique, rien que l'effet qu'on décrivait, que Pierre-Gilles de Gênes décrit, ça c'est un effet de taille parce qu'on est descendu et on ne peut pas l'expliquer en imaginant l'interaction de la lumière avec un objet d'une taille un peu plus grosse. D'accord ? Donc déjà on cherche ça. Ensuite, pourquoi les photons plutôt que les électrons ? Fondamentalement, c'est des choses qui sont très différentes. J'ai envie de dire, les photons, on peut en mettre plein au même endroit. On peut les superposer, c'est une propriété qu'ils ont. Si on met 12 photons au même endroit, on a 12 fois plus d'énergie. Les électrons, ils ne vont pas trop aimer ça. Les électrons, si on en met 12, ils vont se battre entre eux. C'est vraiment une propriété intrinsèque de ces particules, même si je n'aime pas trop dire que les photons sont des particules, mais voilà.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est pour ça que vous utilisez le photon, parce que vous pouvez en mettre plus au même endroit, et donc ça va vous donner... Plus de possibilités derrière sur les composants que vous fabriquez pour apporter plus d'énergie.

  • Speaker #3

    On va pouvoir concentrer effectivement pas mal d'énergie. On va probablement moins chauffer aussi que des électrons, parce que le fait qu'ils se repoussent aussi, les électrons font chauffer. Vous le repérez sur vos batteries, votre téléphone, généralement quand il est en marche, il chauffe. La lumière peut aussi faire chauffer, mais ça dépend du matériau avec lequel il interagit.

  • Speaker #0

    D'accord, alors on parle de physique quantique depuis un petit moment. On ne peut pas parler de physique quantique sans parler de ce fameux chat de Schrödinger, dont on parle de partout sur Internet, un peu partout dans l'histoire des sciences, évidemment. C'est un chat, vous savez, c'est celui qu'on a enfermé dans une boîte pour faire une expérience.... et une substance radioactive mortelle.

  • Speaker #2

    Si un seul de ces atomes se dégrave durant la période de Perse... Un mécanisme de relais actionnera un marteau qui d'un coup brisera la fiole et le chat en mourra. Jusqu'à l'ouverture de la boîte,

  • Speaker #0

    nous ignorons si le chat est vivant ou bien s'il est mort. Il est mort. Non, Raven,

  • Speaker #1

    selon la théorie quantique, il est les deux jusqu'à l'ouverture de la boîte. Non,

  • Speaker #0

    il est bien mort avant l'ouverture.

  • Speaker #2

    Ah, ignorez le fantôme.

  • Speaker #0

    Oui, alors ça c'est le fantôme du chat de Schrödinger qui sort de la boîte dans ce petit dessin animé. Alors pour les personnes qui ont au moins plus de 10 ans aujourd'hui, c'est peut-être pas la référence. C'était l'été. Tins, titans, go. Julien Bobroff, cette expérience, elle traduit quoi par rapport à la physique quantique ? Qu'est-ce qu'elle nous apprend ? Pourquoi on parle tout le temps de ce chat de Schrödinger dès qu'on parle de physique quantique ?

  • Speaker #2

    D'abord, je dois dire qu'elle est assez bien décrite dans le dessin animé. De toute façon, au Curieux, c'est la première fois que je l'entends, mais je suis assez épaté. Elle est compliquée, cette expérience, mais en gros, faisons-le bien plus simple, sans décrire peut-être l'expérience elle-même dans son détail. Ce qu'elle dit fondamentalement, c'est qu'à l'échelle quantique, on peut avoir des objets dans deux états à la fois. Alors, pas mort et vivant, parce que la notion de vie n'a aucun sens pour un atome. Par exemple, on peut avoir un atome dans deux endroits à la fois. Il peut être à 40 cm de lui-même, par exemple. Ou on peut avoir un atome excité et pas excité à la fois. Et alors nous, on appelle ça le chat de Schrödinger parce qu'il y a cette expérience dont on parle tout le temps de pensée qu'avait proposé Schrödinger où il avait dit, et c'est hyper bizarre ce truc parce qu'on pourrait imaginer des expériences où on transmettrait cette espèce de superposition assez incroyable, cette espèce de don d'ubiquité un peu magique, et on pourrait le transmettre à un chat. Et donc le chat, dans l'expérience de Schrödinger, il sera à la fois mort et vivant. Alors, bonne ou mauvaise nouvelle, je ne sais pas, non. Vous n'arriverez pas à faire une expérience avec un chat qui sera à la fois mort et vivant. Et alors, ce n'est pas juste pour des arguments théoriques, on l'a testé. Alors, on n'a pas testé ça sur des vrais chats, rassurez-vous. Mais on a essayé, on a été un peu plus malin. Il y a des prix Nobel qui ont mis même leur prix Nobel pour ça, notamment Serge Haroche en France. L'idée, ça a été de prendre un objet quantique pur et dur, genre un atome ou un photon, de le mettre dans deux états à la fois, et puis en fait, de le faire grossir petit à petit. Et ce dont on se rend compte, c'est qu'en gros, dès que l'objet est un peu trop gros, ou alors qu'il y a trop de choses qui se passent autour de lui, un peu d'air, un peu de chaleur, un peu de mouvement, il arrête d'être dans deux états à la fois. Donc, ce qu'on peut juste retenir assez simplement, c'est que... à l'échelle de la quantique, à l'échelle du nanomètre, à toute petite échelle, on sait mettre un objet dans deux états à la fois, même si nous, ça nous semble étrange. Et ça nous semble étrange, en fait, parce qu'à notre échelle, à nous, on ne peut pas. Ça s'arrête quelque part entre les deux, en gros. Donc, on sait mettre des tout petits objets dans deux états à la fois. Alors là, on pourrait se dire que c'est vraiment du plaisir de physicien qui veut juste s'observer des trucs bizarres en labo. Alors, même si ce n'était que ça, moi, je trouve ça absolument magnifique. Mais ce qu'il y a d'assez remarquable, et là aussi, c'est tout récent, c'est qu'on s'est rendu compte depuis peu qu'en faisant ça... on ouvre soudain une boîte de Pandore et on est capable de faire des choses. Alors pour le coup, du côté des applications, c'est incroyable. Et en particulier, il y a des physiciens qui, depuis quelques dizaines d'années, se sont rendus compte qu'en prenant plein de ces atomes dans deux états à la fois ou de ces photons dans deux états à la fois, on pouvait calculer. Et qu'on pouvait calculer bien mieux et bien plus vite qu'avec un ordinateur normal, dans certains cas. En fait, ce qu'on appelle les ordinateurs quantiques, c'est une assemblée de millions, on aimerait bien mettre des millions, de petits chatons de Schrödinger qui siennent tous les uns les autres dans une sorte de pouponnière de chatons. Là, je m'emballe dans ma métaphore complètement pourrie. Mais en gros, il y a cette idée-là. Il y a l'idée que si on est capable de bien contrôler cette superposition à l'échelle de tout petits objets, et qu'on est capable d'en mettre plein, on va accéder vraiment à des possibilités complètement révolutionnaires, par exemple en termes de calcul.

  • Speaker #1

    Alors là, on vient de parler de la superposition d'états. Vous disiez qu'il y avait d'autres propriétés quand on passe à des échelles toutes petites, petites, petites, comme ça, en physique quantique. Quels sont les autres grands principes qu'il faut avoir à peu près en tête quand on est hors-physicien ?

  • Speaker #2

    Donc on se fait la physique quantique en deux minutes à peu près, c'est ça ? Allez, et pourquoi pas ? En gros, à toute petite échelle, c'est ce que disait très bien Gonzague, c'est qu'on ne sait pas bien vous dire avec notre vocabulaire à nous ce qui se passe. On dit bon alors l'objet c'est à la fois une particule et une onde, mais ça dépend comment on le regarde, etc. Donc voilà, il y a cette espèce de paradoxe. Imaginez que si vous regardez un électron par exemple, ça va être plutôt une sorte de nuage qui occupe toute une zone de l'espace. Premier truc troublant, si vous essayez de le mesurer, hop, il se réduit soudainement en un endroit et il a l'air de tirer au sort où est cet endroit. Déjà ça c'est hyper curieux. Deuxième truc hyper curieux, on peut le mettre à deux endroits à la fois. Troisième truc hyper curieux, on peut le balancer contre un mur et de temps en temps, il va passer à travers le mur. Ça s'appelle l'effet tunnel. Autre truc hyper bizarre, il est complètement discontinu. Il a le droit qu'à certaines énergies, qu'à certaines vitesses. Il n'est pas du tout, je ne sais pas, comme une pomme qui tomberait gentiment. Lui, il va choisir, il va tomber à une vitesse, puis une autre vitesse, puis une autre vitesse. Ce qui n'existe absolument pas dans la vie de tous les jours. Et puis, on peut continuer comme ça et comme ça. On peut même aller jusqu'à l'intrication. Donc là, c'est le sommet du bizarre. J'adore ça. Vous prenez maintenant deux. objets quantiques, vous les frottez l'un à l'autre de façon un peu astucieuse, et si vous les séparez de milliers de kilomètres, on a fait ça sur des milliers de kilomètres, ils ont l'air de partager des propriétés à distance. Comme s'ils se parlaient entre eux, mais ils ne se parlent pas entre eux. Mais quand on titille l'un, ça a l'air de titiller l'autre à mille kilomètres de là.

  • Speaker #0

    À des milliers de kilomètres ?

  • Speaker #2

    Ouais, le record c'est 1200 kilomètres actuellement. Ah vache !

  • Speaker #1

    On comprend que ça inspire les dessinateurs pour les dessins animés.

  • Speaker #2

    Oui, ils sont vraiment dans le dessin animé avec effet spécial.

  • Speaker #1

    Et alors ça, tous ces éléments, tous ces principes, c'est des éléments qui sont à la base de l'ordinateur quantique dont vous parliez il y a quelques instants. C'est ça qu'on met là-dedans ? On essaie de fabriquer un ordinateur qui dispose de tous ces... Alors, il ne dispose pas de toutes les propriétés, mais il s'appuie sur tous ces principes pour faire des choses folles ?

  • Speaker #2

    L'ordinateur, c'est tout à la fois. C'est vraiment le sommet du délire. C'est qu'on va prendre plein d'objets quantiques, les mettre chacun dans plusieurs états à la fois, et en plus, tous les intriquer entre eux. Et donc, on pourrait se dire que ça va être le cauchemar absolu pour un informaticien. qu'au lieu de se faire des zéros et des 1 normaux, on va faire des trucs qui sont à la fois zéro et un, et puis qui sont tous ensemble et autres. Et donc, ça n'a aucun sens, a priori. Le truc assez magique, c'est que les théoriciens en premier se sont rendus compte qu'en fait, si on savait manipuler cette espèce de bouillie d'objets quantiques et de zéros et de 1 dans tous les sens, et qu'on les manipulait un peu astucieusement, ils étaient capables de faire certains calculs qu'on n'est pas capables de faire avec des ordinateurs de mots. Et des calculs qui peuvent avoir des conséquences vraiment importantes sur l'humanité. Et donc, c'est un peu ça l'enjeu. Alors, je vous rassure, je ne vous rassure pas, au contraire, je démine tout de suite le terrain, ça ne marche pas. Ou plutôt, ça marche hyper mal pour l'instant. Les ordinateurs quantiques actuels, vraiment, font des pauvres calculs minables qu'on sait très bien faire avec des ordinateurs minables, avec des ordinateurs normaux, pardon, mais ça progresse. Et donc, il y a des gens qui pensent que d'ici quelques années, ces ordinateurs quantiques vont faire des choses remarquables. Et d'autres qui disent qu'on n'y arrivera jamais. Et on est un peu dans cet entre-deux assez palpitant actuellement, qui est un monde en pleine évolution et révolution. Alors, ça ne se limite pas aux ordinateurs quantiques. Et je m'arrêterai là, mais pour repasser justement la parole à Gonzague. Il se trouve qu'on s'est rendu compte au passage que plein de choses qu'on faisait à l'échelle du nanomètre, sans nécessairement que ce soit du calcul, ouvraient tout un champ des possibles. Les métamatérieux, comme l'a très bien dit Gonzague. On peut parler aussi des capteurs. On sait maintenant faire des capteurs absolument incroyables à petite échelle. qui vont mesurer des choses qu'on ne savait pas mesurer actuelles jusque-là, et qui vont avoir des effets dans plein de domaines et pas seulement dans la physique.

  • Speaker #1

    Alors juste avant, tant qu'on est dans le déminage et les fantasmes, on voit régulièrement passer des éléments marketing. Alors au-delà de l'ordinateur quantique, on voit passer des crèmes solaires, des crèmes antirides et compagnie. Tout ça pour le moment c'est de l'ordre du marketing ou il y a vraiment des fondements scientifiques, physiques ? j'entends dedans,

  • Speaker #2

    au-delà des propriétés biologiques parce que vous n'êtes pas ni biologiste ni médecin On a beaucoup de choses bien plus dangereuses aussi en thérapie quantique, on dit qu'on va vous soigner grâce à la quantique, et on voit bien ce que je viens de vous raconter, ça crée des imaginaires ça crée des métaphores et ça donne envie de s'en emparer pour parler aussi d'ésotérisme d'énergie, de résonance, etc. Alors ce qu'on peut dire, nous en tant que scientifiques et là j'espère que Gonzague partagera mon point de vue, c'est que on sait très bien, nous, et ça a été expérimenté en laboratoire et ça a été prouvé maintes et maintes fois et on sait maintenant la physique qui se cache derrière c'est que tous les effets s'arrêtent dès que l'objet est trop gros et trop chaud. Donc en gros, un corps humain ne peut pas avoir des effets quantiques à grande échelle. Donc on ne peut pas vous soigner grâce à la physique quantique, malheureusement. Et tous les gens qui vont vous parler de thérapie quantique, de biorésonance, de biofeedback, et de tout un vocabulaire emprunté à la quantique pour faire scientifique, en fait, vous arnaquent. Si par contre, ils vous disent que c'est juste une métaphore et qu'en fait, ils sont dans un champ qui n'est pas scientifique, moi, je n'ai aucun problème. J'ai un problème s'ils usurpent la quantique en lui faisant dire ce qu'elle n'est pas capable de dire.

  • Speaker #0

    Oui, alors moi j'ai envie de vous poser Gonzague la question à 1000 euros ou peut-être 1 milliard d'euros. C'est-à-dire, est-ce qu'on sait pourquoi ces effets s'arrêtent à un moment donné à une certaine échelle ? Comment ça se fait que finalement tous ces effets assez magiques qui viennent de nous être décrits, pourquoi à un moment donné, paf, ça s'arrête et on passe à un autre type d'effet ?

  • Speaker #3

    Oui, on sait, je ne suis pas du tout spécialiste de ça. Le gros mot, c'est la décohérence.

  • Speaker #0

    Ok,

  • Speaker #1

    c'est un joli mot.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #3

    C'est-à-dire qu'en fait, quand on les additionne... On n'arrive pas à bien les additionner, c'est-à-dire qu'il y a des plus, des moins, pour faire simple, on aimerait bien additionner que des plus ensemble, que des moins ensemble, on sait ce que ça fait, mais en fait au final, plus on additionne, plus on va faire un mélange, et puis on va arriver à une moyenne qui est nulle. Et on peut voir le monde classique, au sens de la physique classique, comme la moyenne des effets quantiques.

  • Speaker #0

    D'accord, donc la pomme qui tombe, puisque Julien en a parlé, et puis on a Newton tout son tête, avec cette fameuse pomme pour l'effet gravité, qui tombe de manière... Alors, je vais me lancer dans la physique, je vais dire des bêtises constantes, ou en tout cas qui arrivent au sol sans avoir des saccades, ce que j'ai compris si on était dans un univers quantique, la pomme pourrait tomber avec plusieurs vitesses différentes. Donc ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #3

    Ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #1

    Qui est donc une moyenne.

  • Speaker #3

    Oui, la physique classique, comme tous les champs de recherche, le but, c'est de faire des modèles, des modèles qui fonctionnent. Donc pour expliquer pourquoi la pomme tombe, en combien de temps elle tombe, on n'a pas besoin d'invoquer la physique quantique. Même si, dans l'absolu, si on voulait décrire parfaitement l'état de cette pomme, on serait obligé de rentrer dans la physique quantique.

  • Speaker #1

    Et alors, est-ce que la différence... Alors là, attention, pareil, je me lance. Est-ce que la différence entre passer de la physique de notre dimension à nous, notre échelle, jusqu'aux ordinateurs quantiques, c'est passer de la modélisation à la simulation ?

  • Speaker #0

    Alors non, en fait, il est capable de faire les deux. C'est-à-dire qu'un ordinateur quantique est capable de simuler. Et en fait, quand on dit simuler, c'est juste que l'ordinateur quantique, il est bien fichu pour traduire les lois de la quantique, vu qu'il est lui-même quantique. Donc si vous voulez en gros comprendre comment une réaction chimique, par exemple, fonctionne, et qui est purement quantique, et une réaction chimique, c'est que de la quantique, en gros, l'ordinateur quantique, il est bien câblé pour ça. Il va vous aider à le simuler. Simuler, ça veut dire que vous ne faites pas de calcul de la réaction, vous lui demandez juste de faire comme dans la vraie vie. Et vous regardez ce qui se passe. Par ailleurs, il peut calculer. Et là, on va vraiment le programmer comme on programmerait un ordinateur normal, avec des outils un peu différents, mais avec des portes logiques, avec des langages de programmation. Donc, il y a deux sortes de façons d'utiliser un ordinateur quantique. Alors,

  • Speaker #1

    puisqu'on parle d'applications futuristes, il est l'heure d'écouter notre feuilleton SF, proposé par l'ICAM et François Donato. Et cette fois-ci, il nous parle d'une certaine rencontre.

  • Speaker #2

    Je viens de sortir mon t-shirt,

  • Speaker #3

    dont la couleur et les motifs changent en fonction des autres t-shirts de mon proximité. C'est très ludique.

  • Speaker #4

    Quand je suis chez moi, il est dans le gris,

  • Speaker #3

    il se tourne. Et dès que je sors, c'est le même artiste. Il forme sa peau, il est comme dans un test de recherche. Il est sans cesse changeant.

  • Speaker #4

    C'est si amusant que j'ai envie de le porter tous les jours. Hier, j'étais au centre commercial pour acheter des yaourts et de la compote. En m'approchant de la caisse robotisée, j'ai entendu des exclamations. C'était une jeune femme en train de récupérer ses courses à une autre caisse un peu plus loin. Son t-shirt et le mien s'étaient mis à converser. Ils échangeaient des formes, redoublées d'inventivité à l'unisson, à un rythme effréné. C'était vraiment très beau et super fun. et complètement incompréhensible. Je regardais son t-shirt et elle regardait le mien. Nous étions si enchantés que nous en avons oublié les gens qui patientaient pour avoir accès aux caisses robotisées. Certains ont commencé à ronchonner, nous n'en avions que l'air. D'autres personnes, comme nous, fascinées par le spectacle, et souriaient béatement. Ces vêtements en métatextile sont très à la mode, mais nul ne comprend leur langage, si toutefois c'en est un. Est-ce si important pour les trucs ? La beauté se suffit à elle-même ? C'est en tout cas mon avis.

  • Speaker #0

    Bonsoir.

  • Speaker #4

    Nous avons récupéré la force,

  • Speaker #3

    et nous avons fait un vrai de causette. Rien de bien profond, juste des banalités. Tandis que nos t-shirts continuent à bavarder un grand renfort de couleurs et de figures plus ou moins géométriques.

  • Speaker #4

    Elles se prénomment Flora,

  • Speaker #3

    qui habite à côté. Nos t-shirts s'entendent bien. Nous avons décidé de nous revoir.

  • Speaker #5

    Texte, l'ICAM. Voix, Corinne Marion. Son design et réalisation, François Benapour.

  • Speaker #6

    Bon, là, on va un tout petit peu loin avec un mythique futuriste. Pourtant, les métatextiles, ça fait un peu penser au graphène qui est étudié notamment à Manchester. Il y a déjà quelques années de ça, on avait parlé de textiles intelligents. Est-ce que les métatextiles, c'est pour bientôt ?

  • Speaker #1

    Gonzague, vous qui travaillez sur justement les nanotechnologies.

  • Speaker #7

    Oui, oui, c'était top. En vrai, il y a plein de mots-clés qui sont presque des métaphores de ce qu'on fait. Je trouve superbe le travail. Et oui, pourquoi pas ? Pourquoi pas les textiles, les surfaces, si on veut qu'elles changent de couleur. Et d'ailleurs... En fait, les textiles se parlent dans l'extrait. Oui. Donc, ça, c'est vraiment la métaphore de l'information. J'en parlais tout à l'heure. L'idée, c'est de transporter de l'information par la lumière. Et pour changer de couleur, il faut passer d'un mode passif à un mode actif. D'accord ? Passif, ce serait toujours la même couleur. Et là, en fait, on voit que ça change de couleur, etc. Donc, il existe déjà des choses comme ça. Et pour que ce soit un mode actif, généralement, il faut un stimulus. Ce stimulus, ça peut être... de la lumière, des faisceaux laser, nous on fait ça avec des faisceaux laser par exemple, qu'on peut modeler comme on veut, ça peut être un champ électrique, ça peut être typiquement, là on entame une nouvelle phase dans nos recherches qui est l'interaction de ces antennes avec leur environnement et leur environnement serait des cristaux liquides. Ces cristaux liquides, on sait qu'on peut les activer, en tout cas les bouger avec un champ électrique pour changer de manière active l'environnement. Et si on change leur environnement, ça changera typiquement la couleur et plein d'autres propriétés qu'elles auront.

  • Speaker #0

    Je veux juste compléter. Donc déjà, c'est pratique parce que Gonzague est en train de vous dire que dans quelques années, il a le T-shirt pour vous.

  • Speaker #6

    Génial.

  • Speaker #0

    Peut-être bon dire. À un moment donné, l'héroïne dit cette phrase que je trouve très belle. Elle dit la beauté se suffit à elle-même. Je n'ai pas forcément besoin de comprendre comment il marche mon T-shirt. C'est peut-être là, je trouve, la définition même de la science et de la physique. C'est que nous, on a besoin de comprendre. C'est que Gonzague et moi, ce qui nous anime, ce qui nous motive, c'est de comprendre. Et un point clé pour moi... C'est que ça n'enlève rien à la beauté du phénomène. Les gens, parfois, quand on comprend, on rend ça cartésien, on rend ça triste, on rend ça dur, il y a des tas d'équations. Moi, je trouve que ça rajoute de la beauté à la beauté. De comprendre comment ça fonctionne, de comprendre la physique quantique qui va se cacher derrière le t-shirt ou les métamatériaux ou l'interaction lumière-mature, ça le rend encore plus beau.

  • Speaker #1

    Absolument. Et alors, on voulait terminer cette émission en vous interrogeant sur les enjeux qu'on a aujourd'hui, auxquels on est tous confrontés à travers... le changement climatique, à travers la crise écologique ou la transition écologique. Est-ce que les recherches que vous faites à cette échelle quantique, est-ce que, par exemple, ces nouveaux composants que vous êtes en train de travailler, ça pourrait réduire la consommation énergétique ? Est-ce que vous imaginez aussi, en utilisant les matériaux, on sait qu'on utilise beaucoup de terres rares, avec des stocks qui sont limités à l'échelle de la planète. Comment vous prenez ces enjeux en compte ?

  • Speaker #7

    Vous avez tout à fait raison. Au-delà de nos pratiques même, où on essaie d'être un peu plus vertueux dans les laboratoires, ça c'est un mouvement national, Il faut réfléchir à ces choses parce que le problème des ressources, ça fait partie d'une des neuf limites planétaires. Donc oui, inventer une techno actuelle qui utiliserait des ressources trop rares et qui ne seraient pas déployables, serait probablement très inutile ou en tout cas n'irait pas dans la bonne voie. Maintenant, si on veut parler des terres rares, sur les applications que nous on en a, ces terres rares, on les utilise comme des émetteurs. Justement, si on veut aller même un peu plus vers la quantique, il faut en mettre très peu. Mais très peu, c'est vraiment très très peu.

  • Speaker #1

    Oui, on a compris qu'on était à l'échelle de l'atome.

  • Speaker #7

    Voilà, donc de ce point de vue-là, pour l'instant, on ne réfléchit pas trop à ça. Elles ont des propriétés qu'on aime bien et qu'on veut jouer avec. Mais probablement, effectivement, s'il fallait le déployer, il faudrait aller chercher vers des matériaux pour lesquels on a plus de ressources sur Terre. Typiquement, ces métasurfaces, on en a parlé pas mal, elles peuvent aussi être utilisées pour optimiser le photovoltaïque, typiquement. C'est quelque chose qui est très utilisé parce que... Pour les panneaux solaires ? Pour les panneaux solaires, voilà. À la fois pour concentrer l'énergie là où on en aurait le plus besoin, pour faire des lentilles par exemple, mais aussi, comme j'ai dit au début, ces petites antennes, elles sont là pour concentrer l'énergie.

  • Speaker #1

    Ça pourrait augmenter le rendement des panneaux solaires ?

  • Speaker #7

    Ça pourrait tout à fait augmenter le rendement des panneaux solaires, et il y a beaucoup. de choses, il y a beaucoup de choses qui se font là dessus. Et comme on est sur des technos à base de silicium, ça pour l'instant on n'en manque pas trop. Oui,

  • Speaker #1

    il y en a sur toutes les plages du monde.

  • Speaker #7

    Voilà, alors c'est de la silice.

  • Speaker #1

    C'est de la silice, mais ce n'est pas celui-ci.

  • Speaker #7

    Avant le silicium, oui voilà. Mais bon, c'est moins critique que les terrains, typiquement.

  • Speaker #1

    Julien, vos réflexions aussi dans votre laboratoire ?

  • Speaker #0

    Oui, d'abord la première remarque, c'est le domaine dont on est en train de parler, cette interaction entre des matériaux qu'on fabrique très spécialement et la lumière, c'est ça qui a produit les LED. Les LED, elles ont été inventées. elle n'existait pas à l'état naturel, elles sont 10 à 100 fois plus efficaces que nos anciennes ampoules incandescentes à filaments, et ça a été un sacré gain en énergie pour l'humanité. Donc c'est des recherches qui peuvent avoir des sacrés impacts. Alors il ne faut pas non plus tomber, je pense que ni Gonzague ni moi ne sommes là-dedans, dans une espèce de technosolutionnisme à tout va qui dirait vous inquiétez pas avec la physique quantique qu'on va tout vous résoudre. Je dis ça parce que j'ai certains collègues qui ont tendance à dire ça, notamment avec l'ordinateur quantique, qui disent que ça va résoudre par exemple la captation du CO2, et je pense qu'il ne faut pas s'emballer et rien que les échelles de temps nous mettent dedans. Donc... La crise écologique, on va devoir y faire face. Et ce n'est pas ce qu'on fait en laboratoire qui va permettre de la résoudre. Ça peut permettre d'aider à la passer mieux.

  • Speaker #1

    Très bien. Eh bien, bienvenue dans la nouvelle révolution quantique. C'est le titre de votre dernier ouvrage, Julien, qui est paru chez Flammarion. Et le précédent, je rappelle, la quantique autrement, qui est sortie en poche. Donc, pour moins de 10 euros, Marina, vous saurez tout sur la physique quantique. Voilà. Et on vous retrouve aussi sur Instagram, sur TikTok et sur Facebook.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, c'est terminé pour aujourd'hui. Un grand merci à nos deux invités, Gonzague Hages et Julien Bobroff.

  • Speaker #1

    Merci à nos partenaires de l'INA pour la recherche documentaire et merci aussi à l'ICAM et François Donato pour leur création sonore. Cet épisode a été réalisé en coproduction par le Quai des Savoirs et le CNRS avec le soutien de l'Agence Nationale de la Recherche.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, un podcast présenté par Laurent Chicoineau et Marina Léonard, préparé avec l'aide de Françoise Bissac et Héloïse Bonin. Et on ne pouvait pas ne pas faire une petite dédicace à Catherine Demathéis.

  • Speaker #1

    Réalisation Arnaud Maisonneuve, à la prise de son Thomas Gwazé. Abonnez-vous à Détour vers le futur sur Deezer, Spotify ou Apple Podcasts pour ne rater aucun épisode. Et n'oubliez pas, nous sommes le futur.

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Ce mois-ci nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans Détour vers le futur. C’est la physique qui se cache, à une échelle infiniment petite, derrière toutes les technologies de l’information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd’hui de nanotechnologies et de physique quantique, et tenter d’y voir clair, au-delà du visible…


Avec :


Julien Bobroff est physicien et professeur à l'Université Paris-Saclay. Après 20 ans de recherches en physique quantique, il anime maintenant une équipe de recherche, La Physique Autrement, autour des questions de vulgarisation et d'enseignement de la physique.


Gonzague Agez est physicien et universitaire français. Diplômé d’un doctorat en physique des lasers de l’Université de Lille, il effectue ses études post-doctorales à l’Université du Chili à Santiago, puis à Nice, avant d’être nommé Maître de conférences à l’Université de Toulouse 3 en 2007. Il y enseigne essentiellement la physique expérimentale au département de Mesures Physiques de l’IUT. Ses recherches au laboratoire CEMES-CNRS concernent les propriétés optiques des cristaux liquides, la physique des lasers et la nano-photonique.

Un podcast du Quai des Savoirs, en coproduction avec le CNRS et en partenariat avec l'INA, présenté par Marina Léonard et Laurent Chicoineau | Réalisation : Arnaud Maisonneuve | Prise de son : Laurent Codoul

Capsule sonore : Rencontre I Texte : Li-Cam I Sound design et réalisation : François Donato I Voix : Corinne Mariotto

Ces recherches et ce podcast ont été financés en tout ou partie, par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce mois-ci, nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans des tours vers le futur.

  • Speaker #1

    C'est la physique qui se cache à une échelle infiniment petite derrière toutes les technologies de l'information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd'hui de nanotechnologie et de physique quantique et tenter d'y voir un peu plus clair au-delà du visible.

  • Speaker #0

    Alors pour en discuter, nous recevons non pas un mais deux... Prof de physique, le premier et peut-être le seul prof de physique à accumuler le statut d'influenceur sur les réseaux sociaux et d'enseignant-chercheur à l'université Paris-Saclay. Il publie de nombreux ouvrages pour nous aider à mieux comprendre la physique autrement. Bonjour Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Notre second invité enseigne à l'université Paul Sabatier à Toulouse et fait ses recherches sur la nanophotonique au CMS, un laboratoire du CNRS. Il vient de participer à un projet de recherche sur des émetteurs quantiques. Bonjour Gonzaga Ghez. Bonjour.

  • Speaker #1

    Alors, pour attaquer, Julien Beaubrof, il va falloir nous donner quelques clés pour plonger dans la nanophotonique. De quoi parle-t-on quand on parle de nano ? À quelle dimension sommes-nous et quels en sont les enjeux ?

  • Speaker #2

    Le nanomètre, on est un milliard de fois plus petit que vous et moi. En gros, c'est facile, on nous rapetit ici et on nous met un milliard de fois plus petit. On est à l'échelle de l'atome, à l'échelle de la molécule. Un atome, c'est un peu moins d'un nanomètre. Ce qu'il y a d'intéressant, ce n'est pas seulement qu'on va avoir des atomes et des molécules à cette échelle, c'est que les lois de la physique vont être modifiées. C'est-à-dire qu'on a un monde radicalement différent à cette échelle. On n'est plus comme juste avec des petites boules autour de nous, comme on pourrait imaginer naïvement. En fait, on entre dans le champ de la physique quantique. On entre dans un champ de nouvelles lois, de nouveaux comportements. Ce qui est absolument incroyable dans ce domaine, c'est qu'on le pensait complètement inaccessible à nous, humains, parce qu'on s'est dit, mais dès qu'on va fabriquer un instrument, il va déjà faire des milliards d'atomes et ça sera impossible d'y accéder. Et en fait, depuis quelques dizaines d'années, on vit une véritable révolution dans les labos, dans plein de champs différents. On arrive... enfin à aller à l'échelle du nanomètre et encore mieux, à manipuler à l'échelle du nanomètre. Donc maintenant, on est capable de manipuler la lumière, les atomes, les molécules, les circuits électriques à l'échelle du nanomètre.

  • Speaker #0

    Alors c'est exactement ce que vous avez fait, Gonzague Hages, j'imagine, puisque vous avez travaillé sur des nano-antennes, c'est ça, dans ce projet de recherche. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel était le défi que vous vouliez relever dans ce projet ?

  • Speaker #3

    Alors oui, le défi en fait, c'est de faire un peu, bon l'équivalent avec l'électronique. L'électronique, c'est un peu plus rentrer dans la culture commune. L'idée c'est de faire voyager de l'information ou de l'énergie sur des circuits, pas seulement le laisser comme ça faire ce qu'il veut, c'est de le contrôler pour aller amener les informations là où on veut. Nous l'idée c'est de faire un peu la même chose mais avec de la lumière. Donc l'électronique c'est des électrons, la photonique avec des photons, et les photons pour faire simple on va dire que c'est eux qui transportent l'énergie lumineuse. On voit tous à quoi ça ressemble une antenne.

  • Speaker #0

    sur les voitures ça reçoit l'information et ça peut l'envoyer ça peut marcher dans les deux sens c'est exactement ça,

  • Speaker #3

    c'est pour ça que je parlais de contrôler l'information ou l'énergie, l'information c'est de l'énergie et donc le défi c'est de trouver la bonne géométrie d'une antenne qui marcherait pour la lumière, alors il se trouve que les antennes qu'on a sur nos voitures ou les vieilles antennes râteaux qu'on voyait là Elles sont de l'ordre du mètre parce qu'elles sont faites pour recevoir ou émettre des ondes électromagnétiques qui ont la taille à peu près de ces antennes. Alors si on transpose ça à la lumière qui est aussi une onde électromagnétique, la taille caractéristique de ces ondes est du nanomètre. On en parle depuis tout à l'heure. Donc il faut faire des antennes qui ont la taille... de quelques centaines de nanomètres, on va dire. On est dans la centaine de nanomètres.

  • Speaker #0

    Comment vous arrivez à manipuler, à fabriquer des choses à cette échelle-là ? Quels outils de laboratoire ?

  • Speaker #3

    Ce n'est pas moi qui fabrique. En fait, dans ce consortium, on a chacun notre rôle. Nous, notre rôle, c'était déjà de designer. Donc ça, on le fait avec des outils numériques.

  • Speaker #0

    Vous dessinez la forme, c'est ça que ça veut dire ?

  • Speaker #3

    On dessine complètement la forme. Et puis, en fonction des propriétés qu'on veut mettre en avant, on en reparlera. peut-être tout à l'heure. Et puis, une fois qu'on a trouvé des formes intéressantes avec des calculs, on propose ça à nos partenaires, qui eux vont venir graver ces antennes sur du silicium, sur des plaques de silicium. Alors, il y a le Letty à Grenoble qui fournit ces plaques de silicium, le LAS à Toulouse qui vient graver ça. Et techniquement, comment on fait pour graver à ces toutes petites échelles ? C'était votre question. On utilise des électrons principalement. On vient graver avec des électrons parce que les électrons, on est capable de les focaliser de manière très très précise et de contrôler vraiment leur position. Et ces électrons qui vont venir vraiment graver la matière. Et en fait, ce qui reste, c'est l'antenne.

  • Speaker #0

    Alors cette antenne, elle va servir à quoi ? Est-ce que par exemple, on va la trouver dans des futurs téléphones portables ? Est-ce qu'on va la trouver, je ne sais pas moi, dans des... voitures, dans l'électronique embarquée de voitures. Ça va servir à quoi, ce type de composants ?

  • Speaker #3

    À quoi ça va servir ? Il y a déjà des applications là-dessus. Par exemple, si on en met plusieurs, on les met l'une à côté de l'autre, plein de petites antennes à base de silicium, par exemple, et à ce moment-là, on appelle ça des métasurfaces. Et ces métasurfaces, elles ont des propriétés qui peuvent être comparées à des lentilles classiques, typiquement les lentilles de vos lunettes. Sauf que ce matériau, Cette méta-surface va avoir une épaisseur qui est beaucoup plus fine. de l'ordre de la centaine de nanomètres, plus un substrat pour les tenir. Et elles vont avoir quelques autres avantages, qui sont principalement dus au fait qu'on peut multiplier plusieurs fonctions. Vos lunettes peuvent focaliser la lumière ou diverger suivant la pathologie qu'elle doit corriger. Et ces métasurfaces peuvent faire l'effet de filtre pour laisser passer une couleur ou une autre. Elles peuvent aussi disperser... différents rayons pour typiquement viser plusieurs objectifs en même temps, etc. Il faut savoir que la propriété même de l'antenne, donc sa couleur pour faire simple, elle est très liée à son environnement. Si on change un tout petit peu son environnement, son interaction avec la lumière va changer, mais de manière assez drastique, en tout cas quelque chose de mesurable. Donc il y a des capteurs qui utilisent ce principe-là. Par exemple, si vous venez mettre une molécule, Parce qu'on a, comme Julien l'a dit juste avant, on est sur des ordres de grandeur qui sont assez équivalents. Si on vient mettre une molécule qu'on veut détecter la présence de cette molécule, en fait l'antenne va réagir différemment. Et en détectant cette différence de réaction, on peut être capable de détecter la présence, voire de mesurer la quantité par exemple d'une substance.

  • Speaker #1

    Alors puisqu'il est question de couleur, petit quiz. Alors petit quiz, allez, on va jouer avec Laurent d'abord. D'après toi Laurent, l'argent c'est de quelle couleur ?

  • Speaker #0

    Je dirais gris comme tous les métaux, non ?

  • Speaker #1

    pas à peu près, et l'or. Jaune. Alors ça, c'est vrai, à l'échelle du visible, mais à l'échelle nanométrique, t'as tout faux. Et c'est ce que va nous expliquer Pierre-Gilles De Gênes, donc prix Nobel de physique, c'est ce qu'il racontait au sujet des nanoparticules d'or et d'argent. On était dans les années 90.

  • Speaker #4

    Il y a un très beau rouge dans les vitraux du XIIIe siècle qui est fait avec des toutes petites, petites particules, qu'on appelle des nanoparticules. Dans le cas particulier, c'était de l'or. Il y a d'ailleurs une autre couleur aussi, c'est le halo qu'il y a autour de la tête des seins. Il est jaune. Et là, c'est des nanoparticules d'argent. Alors, c'est très bon de savoir ça parce que ça nous le garde un peu modeste. On est en train de découvrir des tas de choses sur les nanoparticules, mais c'est intéressant de voir que nos ancêtres du Moyen-Âge, ils en savaient déjà un sacré bout.

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, il va falloir nous l'expliquer, messieurs les physiciens. Je ne sais pas lequel des deux veut s'y coller, mais pourquoi l'or à cette échelle-là en nanoparticules est rouge ? Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Allez, je me lance. C'est Gonzague qui est le spécialiste. Déjà, il exagère un petit un chiffre de gêne. Il est sympa, mais vraiment, ils n'avaient rien compris à ça au Moyen-Âge. Ils savaient le même. Mais ce n'est pas pareil. Il y a une bonne raison à ça. C'est que même la couleur de l'or, telle que tu l'as dit, Laurent, elle est quantique. C'est-à-dire que le fait que l'or est jaune, c'est des raisons à la fois, et c'est même pire pour l'or particulièrement, c'est à la fois quantique et de la théorie de la relativité restreinte. C'est vraiment la totale. Je ne vais pas vous expliquer en détail pourquoi, mais fondamentalement, c'est le fait que la lumière, c'est ce que disait Gonzague, c'est des photons, c'est des petits grains quantiques. et qui va interagir avec les atomes de l'or, être renvoyé par l'or, et l'or va manifester en quelque sorte sa nature quantique en vous faisant du doré. Maintenant, quand on descend en échelle, qu'on réduit l'or, et qu'on le réduit, on pourrait se dire que ça va être exactement pareil, parce que les atomes, c'est exactement les mêmes. Mais en fait, il se passe un truc très curieux, c'est qu'à l'échelle du nanomètre, si votre bout d'or, votre lingot d'or, il ne fait que nanomètre, donc il ne va pas valoir très cher pour le coup, eh bien la lumière va interagir avec lui différemment. Et ça vient vraiment du fait que la lumière, c'est une vague, qui est très bien Gonzague. Cette vague, elle a une taille caractéristique. Et soudain, cette taille, elle va être de l'ordre ou même plus grande que la taille de la particule. Donc la particule, elle ne reçoit plus du tout la lumière de la même manière et elle ne la recrache plus de la même manière. Et donc, il va y avoir des effets, notamment des électrons, des effets collectifs, qui vont faire que la particule a une couleur différente. Alors, si c'était juste pour faire de l'or rouge, ça ne serait pas hyper intéressant. Mais ce que ça dit plus fondamentalement, c'est que juste en jouant sur la forme et la taille de la particule, on choisit un peu sur mesure ses propriétés et par exemple sa couleur. Et là, soudain, ça ouvre tout un champ des possibles. On va être un peu maître des propriétés optiques. Quand il parlait de métasurface et de métamatérieux, Gonzague, c'est une idée absolument géniale. C'est qu'on va faire ce qu'on veut avec la lumière et même tricher avec les lois de l'optique habituelle. Certains de ces matériaux arrivent à rendre presque invisibles certains matériaux. On arrive à faire des indices négatifs. Donc, on arrive à faire ce qu'on ne savait pas faire avec la lumière habituellement, juste parce qu'on n'était pas descendu à la bonne échelle.

  • Speaker #0

    D'accord, donc Gonzague, en fait, vous utilisez ces propriétés, enfin nouvelles pour nous qui les découvrons aujourd'hui, mais vous utilisez ces propriétés. Est-ce que ce n'est pas compliqué ? Comment vous travaillez sur ça ? Quelles sont les difficultés à cette échelle-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ce n'est pas compliqué parce que c'est la physique qui le fait pour nous. Nous, on ne fait qu'observer. C'est ce qu'on appelle des effets de résonance, en fait. La matière résonne parce qu'on l'excite avec une vague, comme n'importe quelle chose pourrait. On pourrait osciller parce qu'une balançoire, typiquement, quand on pousse dessus, elle va osciller à une vitesse qu'on n'a pas choisie. D'accord ? Donc voilà, on ne choisit pas. Par contre, on peut décider de changer la géométrie, la taille de la balançoire typiquement. On peut changer la taille des nanostructures. Et donc pour répondre à la question de comment on observe ça, en fait, nous, le vecteur principal, c'est les photons, bien sûr. C'est ce qu'on observe. Donc si vous voulez vous rendre compte un peu plus de la chose, c'est... Bon, vous avez un microscope. Tout le monde voit ce que c'est à peu près. Sauf que bon, c'est des microscopes qui restent des microscopes optiques. On reste sur de l'observation parce qu'il existe aussi des microscopes électroniques pour voir des choses encore plus petites. Si on a besoin de voir le résultat de la gravure pour voir si c'est effectivement ce qu'on avait imaginé, à ce moment-là on va faire une imagerie avec des microscopes électroniques. Et ces microscopes là sont capables de descendre sur des résolutions telles qu'on est capable de, typiquement, voir l'arrangement atomique à l'intérieur. Donc nous, on est un peu à une échelle au-dessus, l'arrangement supra-atomique, on va dire. Et donc ça, on peut mesurer très précisément la taille, etc. Ensuite, les propriétés optiques, parce que c'est celles qui nous intéressent, nous. C'est un microscope optique avec des objectifs de qualité un peu supérieure. On essaie de récolter un maximum de lumière, parce que forcément, si on fait des choses à toute petite échelle, on ne peut pas s'attendre à avoir énormément de lumière. Donc là, il faut être équipé avec des... des détecteurs particuliers qui vont pouvoir compter les photons un par un, grosso modo.

  • Speaker #0

    Alors vous ne nous avez pas dit non plus, pourquoi finalement utiliser des photons plutôt que des électrons ? Puisqu'il y a des choses qu'on sait faire déjà avec de l'électronique. Alors qu'est-ce que vous cherchez à gagner à travers l'utilisation de photons ?

  • Speaker #3

    Alors ce qu'on peut gagner, alors on ne cherche pas à gagner grand chose, généralement.

  • Speaker #0

    Comme le plaisir de la recherche !

  • Speaker #3

    Ouais, en fait comme Julien l'a dit, c'est que la physique déjà, elle est différente à ces échelles-là. D'accord, sans même descendre complètement jusqu'au système quantique, rien que l'effet qu'on décrivait, que Pierre-Gilles de Gênes décrit, ça c'est un effet de taille parce qu'on est descendu et on ne peut pas l'expliquer en imaginant l'interaction de la lumière avec un objet d'une taille un peu plus grosse. D'accord ? Donc déjà on cherche ça. Ensuite, pourquoi les photons plutôt que les électrons ? Fondamentalement, c'est des choses qui sont très différentes. J'ai envie de dire, les photons, on peut en mettre plein au même endroit. On peut les superposer, c'est une propriété qu'ils ont. Si on met 12 photons au même endroit, on a 12 fois plus d'énergie. Les électrons, ils ne vont pas trop aimer ça. Les électrons, si on en met 12, ils vont se battre entre eux. C'est vraiment une propriété intrinsèque de ces particules, même si je n'aime pas trop dire que les photons sont des particules, mais voilà.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est pour ça que vous utilisez le photon, parce que vous pouvez en mettre plus au même endroit, et donc ça va vous donner... Plus de possibilités derrière sur les composants que vous fabriquez pour apporter plus d'énergie.

  • Speaker #3

    On va pouvoir concentrer effectivement pas mal d'énergie. On va probablement moins chauffer aussi que des électrons, parce que le fait qu'ils se repoussent aussi, les électrons font chauffer. Vous le repérez sur vos batteries, votre téléphone, généralement quand il est en marche, il chauffe. La lumière peut aussi faire chauffer, mais ça dépend du matériau avec lequel il interagit.

  • Speaker #0

    D'accord, alors on parle de physique quantique depuis un petit moment. On ne peut pas parler de physique quantique sans parler de ce fameux chat de Schrödinger, dont on parle de partout sur Internet, un peu partout dans l'histoire des sciences, évidemment. C'est un chat, vous savez, c'est celui qu'on a enfermé dans une boîte pour faire une expérience.... et une substance radioactive mortelle.

  • Speaker #2

    Si un seul de ces atomes se dégrave durant la période de Perse... Un mécanisme de relais actionnera un marteau qui d'un coup brisera la fiole et le chat en mourra. Jusqu'à l'ouverture de la boîte,

  • Speaker #0

    nous ignorons si le chat est vivant ou bien s'il est mort. Il est mort. Non, Raven,

  • Speaker #1

    selon la théorie quantique, il est les deux jusqu'à l'ouverture de la boîte. Non,

  • Speaker #0

    il est bien mort avant l'ouverture.

  • Speaker #2

    Ah, ignorez le fantôme.

  • Speaker #0

    Oui, alors ça c'est le fantôme du chat de Schrödinger qui sort de la boîte dans ce petit dessin animé. Alors pour les personnes qui ont au moins plus de 10 ans aujourd'hui, c'est peut-être pas la référence. C'était l'été. Tins, titans, go. Julien Bobroff, cette expérience, elle traduit quoi par rapport à la physique quantique ? Qu'est-ce qu'elle nous apprend ? Pourquoi on parle tout le temps de ce chat de Schrödinger dès qu'on parle de physique quantique ?

  • Speaker #2

    D'abord, je dois dire qu'elle est assez bien décrite dans le dessin animé. De toute façon, au Curieux, c'est la première fois que je l'entends, mais je suis assez épaté. Elle est compliquée, cette expérience, mais en gros, faisons-le bien plus simple, sans décrire peut-être l'expérience elle-même dans son détail. Ce qu'elle dit fondamentalement, c'est qu'à l'échelle quantique, on peut avoir des objets dans deux états à la fois. Alors, pas mort et vivant, parce que la notion de vie n'a aucun sens pour un atome. Par exemple, on peut avoir un atome dans deux endroits à la fois. Il peut être à 40 cm de lui-même, par exemple. Ou on peut avoir un atome excité et pas excité à la fois. Et alors nous, on appelle ça le chat de Schrödinger parce qu'il y a cette expérience dont on parle tout le temps de pensée qu'avait proposé Schrödinger où il avait dit, et c'est hyper bizarre ce truc parce qu'on pourrait imaginer des expériences où on transmettrait cette espèce de superposition assez incroyable, cette espèce de don d'ubiquité un peu magique, et on pourrait le transmettre à un chat. Et donc le chat, dans l'expérience de Schrödinger, il sera à la fois mort et vivant. Alors, bonne ou mauvaise nouvelle, je ne sais pas, non. Vous n'arriverez pas à faire une expérience avec un chat qui sera à la fois mort et vivant. Et alors, ce n'est pas juste pour des arguments théoriques, on l'a testé. Alors, on n'a pas testé ça sur des vrais chats, rassurez-vous. Mais on a essayé, on a été un peu plus malin. Il y a des prix Nobel qui ont mis même leur prix Nobel pour ça, notamment Serge Haroche en France. L'idée, ça a été de prendre un objet quantique pur et dur, genre un atome ou un photon, de le mettre dans deux états à la fois, et puis en fait, de le faire grossir petit à petit. Et ce dont on se rend compte, c'est qu'en gros, dès que l'objet est un peu trop gros, ou alors qu'il y a trop de choses qui se passent autour de lui, un peu d'air, un peu de chaleur, un peu de mouvement, il arrête d'être dans deux états à la fois. Donc, ce qu'on peut juste retenir assez simplement, c'est que... à l'échelle de la quantique, à l'échelle du nanomètre, à toute petite échelle, on sait mettre un objet dans deux états à la fois, même si nous, ça nous semble étrange. Et ça nous semble étrange, en fait, parce qu'à notre échelle, à nous, on ne peut pas. Ça s'arrête quelque part entre les deux, en gros. Donc, on sait mettre des tout petits objets dans deux états à la fois. Alors là, on pourrait se dire que c'est vraiment du plaisir de physicien qui veut juste s'observer des trucs bizarres en labo. Alors, même si ce n'était que ça, moi, je trouve ça absolument magnifique. Mais ce qu'il y a d'assez remarquable, et là aussi, c'est tout récent, c'est qu'on s'est rendu compte depuis peu qu'en faisant ça... on ouvre soudain une boîte de Pandore et on est capable de faire des choses. Alors pour le coup, du côté des applications, c'est incroyable. Et en particulier, il y a des physiciens qui, depuis quelques dizaines d'années, se sont rendus compte qu'en prenant plein de ces atomes dans deux états à la fois ou de ces photons dans deux états à la fois, on pouvait calculer. Et qu'on pouvait calculer bien mieux et bien plus vite qu'avec un ordinateur normal, dans certains cas. En fait, ce qu'on appelle les ordinateurs quantiques, c'est une assemblée de millions, on aimerait bien mettre des millions, de petits chatons de Schrödinger qui siennent tous les uns les autres dans une sorte de pouponnière de chatons. Là, je m'emballe dans ma métaphore complètement pourrie. Mais en gros, il y a cette idée-là. Il y a l'idée que si on est capable de bien contrôler cette superposition à l'échelle de tout petits objets, et qu'on est capable d'en mettre plein, on va accéder vraiment à des possibilités complètement révolutionnaires, par exemple en termes de calcul.

  • Speaker #1

    Alors là, on vient de parler de la superposition d'états. Vous disiez qu'il y avait d'autres propriétés quand on passe à des échelles toutes petites, petites, petites, comme ça, en physique quantique. Quels sont les autres grands principes qu'il faut avoir à peu près en tête quand on est hors-physicien ?

  • Speaker #2

    Donc on se fait la physique quantique en deux minutes à peu près, c'est ça ? Allez, et pourquoi pas ? En gros, à toute petite échelle, c'est ce que disait très bien Gonzague, c'est qu'on ne sait pas bien vous dire avec notre vocabulaire à nous ce qui se passe. On dit bon alors l'objet c'est à la fois une particule et une onde, mais ça dépend comment on le regarde, etc. Donc voilà, il y a cette espèce de paradoxe. Imaginez que si vous regardez un électron par exemple, ça va être plutôt une sorte de nuage qui occupe toute une zone de l'espace. Premier truc troublant, si vous essayez de le mesurer, hop, il se réduit soudainement en un endroit et il a l'air de tirer au sort où est cet endroit. Déjà ça c'est hyper curieux. Deuxième truc hyper curieux, on peut le mettre à deux endroits à la fois. Troisième truc hyper curieux, on peut le balancer contre un mur et de temps en temps, il va passer à travers le mur. Ça s'appelle l'effet tunnel. Autre truc hyper bizarre, il est complètement discontinu. Il a le droit qu'à certaines énergies, qu'à certaines vitesses. Il n'est pas du tout, je ne sais pas, comme une pomme qui tomberait gentiment. Lui, il va choisir, il va tomber à une vitesse, puis une autre vitesse, puis une autre vitesse. Ce qui n'existe absolument pas dans la vie de tous les jours. Et puis, on peut continuer comme ça et comme ça. On peut même aller jusqu'à l'intrication. Donc là, c'est le sommet du bizarre. J'adore ça. Vous prenez maintenant deux. objets quantiques, vous les frottez l'un à l'autre de façon un peu astucieuse, et si vous les séparez de milliers de kilomètres, on a fait ça sur des milliers de kilomètres, ils ont l'air de partager des propriétés à distance. Comme s'ils se parlaient entre eux, mais ils ne se parlent pas entre eux. Mais quand on titille l'un, ça a l'air de titiller l'autre à mille kilomètres de là.

  • Speaker #0

    À des milliers de kilomètres ?

  • Speaker #2

    Ouais, le record c'est 1200 kilomètres actuellement. Ah vache !

  • Speaker #1

    On comprend que ça inspire les dessinateurs pour les dessins animés.

  • Speaker #2

    Oui, ils sont vraiment dans le dessin animé avec effet spécial.

  • Speaker #1

    Et alors ça, tous ces éléments, tous ces principes, c'est des éléments qui sont à la base de l'ordinateur quantique dont vous parliez il y a quelques instants. C'est ça qu'on met là-dedans ? On essaie de fabriquer un ordinateur qui dispose de tous ces... Alors, il ne dispose pas de toutes les propriétés, mais il s'appuie sur tous ces principes pour faire des choses folles ?

  • Speaker #2

    L'ordinateur, c'est tout à la fois. C'est vraiment le sommet du délire. C'est qu'on va prendre plein d'objets quantiques, les mettre chacun dans plusieurs états à la fois, et en plus, tous les intriquer entre eux. Et donc, on pourrait se dire que ça va être le cauchemar absolu pour un informaticien. qu'au lieu de se faire des zéros et des 1 normaux, on va faire des trucs qui sont à la fois zéro et un, et puis qui sont tous ensemble et autres. Et donc, ça n'a aucun sens, a priori. Le truc assez magique, c'est que les théoriciens en premier se sont rendus compte qu'en fait, si on savait manipuler cette espèce de bouillie d'objets quantiques et de zéros et de 1 dans tous les sens, et qu'on les manipulait un peu astucieusement, ils étaient capables de faire certains calculs qu'on n'est pas capables de faire avec des ordinateurs de mots. Et des calculs qui peuvent avoir des conséquences vraiment importantes sur l'humanité. Et donc, c'est un peu ça l'enjeu. Alors, je vous rassure, je ne vous rassure pas, au contraire, je démine tout de suite le terrain, ça ne marche pas. Ou plutôt, ça marche hyper mal pour l'instant. Les ordinateurs quantiques actuels, vraiment, font des pauvres calculs minables qu'on sait très bien faire avec des ordinateurs minables, avec des ordinateurs normaux, pardon, mais ça progresse. Et donc, il y a des gens qui pensent que d'ici quelques années, ces ordinateurs quantiques vont faire des choses remarquables. Et d'autres qui disent qu'on n'y arrivera jamais. Et on est un peu dans cet entre-deux assez palpitant actuellement, qui est un monde en pleine évolution et révolution. Alors, ça ne se limite pas aux ordinateurs quantiques. Et je m'arrêterai là, mais pour repasser justement la parole à Gonzague. Il se trouve qu'on s'est rendu compte au passage que plein de choses qu'on faisait à l'échelle du nanomètre, sans nécessairement que ce soit du calcul, ouvraient tout un champ des possibles. Les métamatérieux, comme l'a très bien dit Gonzague. On peut parler aussi des capteurs. On sait maintenant faire des capteurs absolument incroyables à petite échelle. qui vont mesurer des choses qu'on ne savait pas mesurer actuelles jusque-là, et qui vont avoir des effets dans plein de domaines et pas seulement dans la physique.

  • Speaker #1

    Alors juste avant, tant qu'on est dans le déminage et les fantasmes, on voit régulièrement passer des éléments marketing. Alors au-delà de l'ordinateur quantique, on voit passer des crèmes solaires, des crèmes antirides et compagnie. Tout ça pour le moment c'est de l'ordre du marketing ou il y a vraiment des fondements scientifiques, physiques ? j'entends dedans,

  • Speaker #2

    au-delà des propriétés biologiques parce que vous n'êtes pas ni biologiste ni médecin On a beaucoup de choses bien plus dangereuses aussi en thérapie quantique, on dit qu'on va vous soigner grâce à la quantique, et on voit bien ce que je viens de vous raconter, ça crée des imaginaires ça crée des métaphores et ça donne envie de s'en emparer pour parler aussi d'ésotérisme d'énergie, de résonance, etc. Alors ce qu'on peut dire, nous en tant que scientifiques et là j'espère que Gonzague partagera mon point de vue, c'est que on sait très bien, nous, et ça a été expérimenté en laboratoire et ça a été prouvé maintes et maintes fois et on sait maintenant la physique qui se cache derrière c'est que tous les effets s'arrêtent dès que l'objet est trop gros et trop chaud. Donc en gros, un corps humain ne peut pas avoir des effets quantiques à grande échelle. Donc on ne peut pas vous soigner grâce à la physique quantique, malheureusement. Et tous les gens qui vont vous parler de thérapie quantique, de biorésonance, de biofeedback, et de tout un vocabulaire emprunté à la quantique pour faire scientifique, en fait, vous arnaquent. Si par contre, ils vous disent que c'est juste une métaphore et qu'en fait, ils sont dans un champ qui n'est pas scientifique, moi, je n'ai aucun problème. J'ai un problème s'ils usurpent la quantique en lui faisant dire ce qu'elle n'est pas capable de dire.

  • Speaker #0

    Oui, alors moi j'ai envie de vous poser Gonzague la question à 1000 euros ou peut-être 1 milliard d'euros. C'est-à-dire, est-ce qu'on sait pourquoi ces effets s'arrêtent à un moment donné à une certaine échelle ? Comment ça se fait que finalement tous ces effets assez magiques qui viennent de nous être décrits, pourquoi à un moment donné, paf, ça s'arrête et on passe à un autre type d'effet ?

  • Speaker #3

    Oui, on sait, je ne suis pas du tout spécialiste de ça. Le gros mot, c'est la décohérence.

  • Speaker #0

    Ok,

  • Speaker #1

    c'est un joli mot.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #3

    C'est-à-dire qu'en fait, quand on les additionne... On n'arrive pas à bien les additionner, c'est-à-dire qu'il y a des plus, des moins, pour faire simple, on aimerait bien additionner que des plus ensemble, que des moins ensemble, on sait ce que ça fait, mais en fait au final, plus on additionne, plus on va faire un mélange, et puis on va arriver à une moyenne qui est nulle. Et on peut voir le monde classique, au sens de la physique classique, comme la moyenne des effets quantiques.

  • Speaker #0

    D'accord, donc la pomme qui tombe, puisque Julien en a parlé, et puis on a Newton tout son tête, avec cette fameuse pomme pour l'effet gravité, qui tombe de manière... Alors, je vais me lancer dans la physique, je vais dire des bêtises constantes, ou en tout cas qui arrivent au sol sans avoir des saccades, ce que j'ai compris si on était dans un univers quantique, la pomme pourrait tomber avec plusieurs vitesses différentes. Donc ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #3

    Ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #1

    Qui est donc une moyenne.

  • Speaker #3

    Oui, la physique classique, comme tous les champs de recherche, le but, c'est de faire des modèles, des modèles qui fonctionnent. Donc pour expliquer pourquoi la pomme tombe, en combien de temps elle tombe, on n'a pas besoin d'invoquer la physique quantique. Même si, dans l'absolu, si on voulait décrire parfaitement l'état de cette pomme, on serait obligé de rentrer dans la physique quantique.

  • Speaker #1

    Et alors, est-ce que la différence... Alors là, attention, pareil, je me lance. Est-ce que la différence entre passer de la physique de notre dimension à nous, notre échelle, jusqu'aux ordinateurs quantiques, c'est passer de la modélisation à la simulation ?

  • Speaker #0

    Alors non, en fait, il est capable de faire les deux. C'est-à-dire qu'un ordinateur quantique est capable de simuler. Et en fait, quand on dit simuler, c'est juste que l'ordinateur quantique, il est bien fichu pour traduire les lois de la quantique, vu qu'il est lui-même quantique. Donc si vous voulez en gros comprendre comment une réaction chimique, par exemple, fonctionne, et qui est purement quantique, et une réaction chimique, c'est que de la quantique, en gros, l'ordinateur quantique, il est bien câblé pour ça. Il va vous aider à le simuler. Simuler, ça veut dire que vous ne faites pas de calcul de la réaction, vous lui demandez juste de faire comme dans la vraie vie. Et vous regardez ce qui se passe. Par ailleurs, il peut calculer. Et là, on va vraiment le programmer comme on programmerait un ordinateur normal, avec des outils un peu différents, mais avec des portes logiques, avec des langages de programmation. Donc, il y a deux sortes de façons d'utiliser un ordinateur quantique. Alors,

  • Speaker #1

    puisqu'on parle d'applications futuristes, il est l'heure d'écouter notre feuilleton SF, proposé par l'ICAM et François Donato. Et cette fois-ci, il nous parle d'une certaine rencontre.

  • Speaker #2

    Je viens de sortir mon t-shirt,

  • Speaker #3

    dont la couleur et les motifs changent en fonction des autres t-shirts de mon proximité. C'est très ludique.

  • Speaker #4

    Quand je suis chez moi, il est dans le gris,

  • Speaker #3

    il se tourne. Et dès que je sors, c'est le même artiste. Il forme sa peau, il est comme dans un test de recherche. Il est sans cesse changeant.

  • Speaker #4

    C'est si amusant que j'ai envie de le porter tous les jours. Hier, j'étais au centre commercial pour acheter des yaourts et de la compote. En m'approchant de la caisse robotisée, j'ai entendu des exclamations. C'était une jeune femme en train de récupérer ses courses à une autre caisse un peu plus loin. Son t-shirt et le mien s'étaient mis à converser. Ils échangeaient des formes, redoublées d'inventivité à l'unisson, à un rythme effréné. C'était vraiment très beau et super fun. et complètement incompréhensible. Je regardais son t-shirt et elle regardait le mien. Nous étions si enchantés que nous en avons oublié les gens qui patientaient pour avoir accès aux caisses robotisées. Certains ont commencé à ronchonner, nous n'en avions que l'air. D'autres personnes, comme nous, fascinées par le spectacle, et souriaient béatement. Ces vêtements en métatextile sont très à la mode, mais nul ne comprend leur langage, si toutefois c'en est un. Est-ce si important pour les trucs ? La beauté se suffit à elle-même ? C'est en tout cas mon avis.

  • Speaker #0

    Bonsoir.

  • Speaker #4

    Nous avons récupéré la force,

  • Speaker #3

    et nous avons fait un vrai de causette. Rien de bien profond, juste des banalités. Tandis que nos t-shirts continuent à bavarder un grand renfort de couleurs et de figures plus ou moins géométriques.

  • Speaker #4

    Elles se prénomment Flora,

  • Speaker #3

    qui habite à côté. Nos t-shirts s'entendent bien. Nous avons décidé de nous revoir.

  • Speaker #5

    Texte, l'ICAM. Voix, Corinne Marion. Son design et réalisation, François Benapour.

  • Speaker #6

    Bon, là, on va un tout petit peu loin avec un mythique futuriste. Pourtant, les métatextiles, ça fait un peu penser au graphène qui est étudié notamment à Manchester. Il y a déjà quelques années de ça, on avait parlé de textiles intelligents. Est-ce que les métatextiles, c'est pour bientôt ?

  • Speaker #1

    Gonzague, vous qui travaillez sur justement les nanotechnologies.

  • Speaker #7

    Oui, oui, c'était top. En vrai, il y a plein de mots-clés qui sont presque des métaphores de ce qu'on fait. Je trouve superbe le travail. Et oui, pourquoi pas ? Pourquoi pas les textiles, les surfaces, si on veut qu'elles changent de couleur. Et d'ailleurs... En fait, les textiles se parlent dans l'extrait. Oui. Donc, ça, c'est vraiment la métaphore de l'information. J'en parlais tout à l'heure. L'idée, c'est de transporter de l'information par la lumière. Et pour changer de couleur, il faut passer d'un mode passif à un mode actif. D'accord ? Passif, ce serait toujours la même couleur. Et là, en fait, on voit que ça change de couleur, etc. Donc, il existe déjà des choses comme ça. Et pour que ce soit un mode actif, généralement, il faut un stimulus. Ce stimulus, ça peut être... de la lumière, des faisceaux laser, nous on fait ça avec des faisceaux laser par exemple, qu'on peut modeler comme on veut, ça peut être un champ électrique, ça peut être typiquement, là on entame une nouvelle phase dans nos recherches qui est l'interaction de ces antennes avec leur environnement et leur environnement serait des cristaux liquides. Ces cristaux liquides, on sait qu'on peut les activer, en tout cas les bouger avec un champ électrique pour changer de manière active l'environnement. Et si on change leur environnement, ça changera typiquement la couleur et plein d'autres propriétés qu'elles auront.

  • Speaker #0

    Je veux juste compléter. Donc déjà, c'est pratique parce que Gonzague est en train de vous dire que dans quelques années, il a le T-shirt pour vous.

  • Speaker #6

    Génial.

  • Speaker #0

    Peut-être bon dire. À un moment donné, l'héroïne dit cette phrase que je trouve très belle. Elle dit la beauté se suffit à elle-même. Je n'ai pas forcément besoin de comprendre comment il marche mon T-shirt. C'est peut-être là, je trouve, la définition même de la science et de la physique. C'est que nous, on a besoin de comprendre. C'est que Gonzague et moi, ce qui nous anime, ce qui nous motive, c'est de comprendre. Et un point clé pour moi... C'est que ça n'enlève rien à la beauté du phénomène. Les gens, parfois, quand on comprend, on rend ça cartésien, on rend ça triste, on rend ça dur, il y a des tas d'équations. Moi, je trouve que ça rajoute de la beauté à la beauté. De comprendre comment ça fonctionne, de comprendre la physique quantique qui va se cacher derrière le t-shirt ou les métamatériaux ou l'interaction lumière-mature, ça le rend encore plus beau.

  • Speaker #1

    Absolument. Et alors, on voulait terminer cette émission en vous interrogeant sur les enjeux qu'on a aujourd'hui, auxquels on est tous confrontés à travers... le changement climatique, à travers la crise écologique ou la transition écologique. Est-ce que les recherches que vous faites à cette échelle quantique, est-ce que, par exemple, ces nouveaux composants que vous êtes en train de travailler, ça pourrait réduire la consommation énergétique ? Est-ce que vous imaginez aussi, en utilisant les matériaux, on sait qu'on utilise beaucoup de terres rares, avec des stocks qui sont limités à l'échelle de la planète. Comment vous prenez ces enjeux en compte ?

  • Speaker #7

    Vous avez tout à fait raison. Au-delà de nos pratiques même, où on essaie d'être un peu plus vertueux dans les laboratoires, ça c'est un mouvement national, Il faut réfléchir à ces choses parce que le problème des ressources, ça fait partie d'une des neuf limites planétaires. Donc oui, inventer une techno actuelle qui utiliserait des ressources trop rares et qui ne seraient pas déployables, serait probablement très inutile ou en tout cas n'irait pas dans la bonne voie. Maintenant, si on veut parler des terres rares, sur les applications que nous on en a, ces terres rares, on les utilise comme des émetteurs. Justement, si on veut aller même un peu plus vers la quantique, il faut en mettre très peu. Mais très peu, c'est vraiment très très peu.

  • Speaker #1

    Oui, on a compris qu'on était à l'échelle de l'atome.

  • Speaker #7

    Voilà, donc de ce point de vue-là, pour l'instant, on ne réfléchit pas trop à ça. Elles ont des propriétés qu'on aime bien et qu'on veut jouer avec. Mais probablement, effectivement, s'il fallait le déployer, il faudrait aller chercher vers des matériaux pour lesquels on a plus de ressources sur Terre. Typiquement, ces métasurfaces, on en a parlé pas mal, elles peuvent aussi être utilisées pour optimiser le photovoltaïque, typiquement. C'est quelque chose qui est très utilisé parce que... Pour les panneaux solaires ? Pour les panneaux solaires, voilà. À la fois pour concentrer l'énergie là où on en aurait le plus besoin, pour faire des lentilles par exemple, mais aussi, comme j'ai dit au début, ces petites antennes, elles sont là pour concentrer l'énergie.

  • Speaker #1

    Ça pourrait augmenter le rendement des panneaux solaires ?

  • Speaker #7

    Ça pourrait tout à fait augmenter le rendement des panneaux solaires, et il y a beaucoup. de choses, il y a beaucoup de choses qui se font là dessus. Et comme on est sur des technos à base de silicium, ça pour l'instant on n'en manque pas trop. Oui,

  • Speaker #1

    il y en a sur toutes les plages du monde.

  • Speaker #7

    Voilà, alors c'est de la silice.

  • Speaker #1

    C'est de la silice, mais ce n'est pas celui-ci.

  • Speaker #7

    Avant le silicium, oui voilà. Mais bon, c'est moins critique que les terrains, typiquement.

  • Speaker #1

    Julien, vos réflexions aussi dans votre laboratoire ?

  • Speaker #0

    Oui, d'abord la première remarque, c'est le domaine dont on est en train de parler, cette interaction entre des matériaux qu'on fabrique très spécialement et la lumière, c'est ça qui a produit les LED. Les LED, elles ont été inventées. elle n'existait pas à l'état naturel, elles sont 10 à 100 fois plus efficaces que nos anciennes ampoules incandescentes à filaments, et ça a été un sacré gain en énergie pour l'humanité. Donc c'est des recherches qui peuvent avoir des sacrés impacts. Alors il ne faut pas non plus tomber, je pense que ni Gonzague ni moi ne sommes là-dedans, dans une espèce de technosolutionnisme à tout va qui dirait vous inquiétez pas avec la physique quantique qu'on va tout vous résoudre. Je dis ça parce que j'ai certains collègues qui ont tendance à dire ça, notamment avec l'ordinateur quantique, qui disent que ça va résoudre par exemple la captation du CO2, et je pense qu'il ne faut pas s'emballer et rien que les échelles de temps nous mettent dedans. Donc... La crise écologique, on va devoir y faire face. Et ce n'est pas ce qu'on fait en laboratoire qui va permettre de la résoudre. Ça peut permettre d'aider à la passer mieux.

  • Speaker #1

    Très bien. Eh bien, bienvenue dans la nouvelle révolution quantique. C'est le titre de votre dernier ouvrage, Julien, qui est paru chez Flammarion. Et le précédent, je rappelle, la quantique autrement, qui est sortie en poche. Donc, pour moins de 10 euros, Marina, vous saurez tout sur la physique quantique. Voilà. Et on vous retrouve aussi sur Instagram, sur TikTok et sur Facebook.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, c'est terminé pour aujourd'hui. Un grand merci à nos deux invités, Gonzague Hages et Julien Bobroff.

  • Speaker #1

    Merci à nos partenaires de l'INA pour la recherche documentaire et merci aussi à l'ICAM et François Donato pour leur création sonore. Cet épisode a été réalisé en coproduction par le Quai des Savoirs et le CNRS avec le soutien de l'Agence Nationale de la Recherche.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, un podcast présenté par Laurent Chicoineau et Marina Léonard, préparé avec l'aide de Françoise Bissac et Héloïse Bonin. Et on ne pouvait pas ne pas faire une petite dédicace à Catherine Demathéis.

  • Speaker #1

    Réalisation Arnaud Maisonneuve, à la prise de son Thomas Gwazé. Abonnez-vous à Détour vers le futur sur Deezer, Spotify ou Apple Podcasts pour ne rater aucun épisode. Et n'oubliez pas, nous sommes le futur.

Description

Ce mois-ci nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans Détour vers le futur. C’est la physique qui se cache, à une échelle infiniment petite, derrière toutes les technologies de l’information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd’hui de nanotechnologies et de physique quantique, et tenter d’y voir clair, au-delà du visible…


Avec :


Julien Bobroff est physicien et professeur à l'Université Paris-Saclay. Après 20 ans de recherches en physique quantique, il anime maintenant une équipe de recherche, La Physique Autrement, autour des questions de vulgarisation et d'enseignement de la physique.


Gonzague Agez est physicien et universitaire français. Diplômé d’un doctorat en physique des lasers de l’Université de Lille, il effectue ses études post-doctorales à l’Université du Chili à Santiago, puis à Nice, avant d’être nommé Maître de conférences à l’Université de Toulouse 3 en 2007. Il y enseigne essentiellement la physique expérimentale au département de Mesures Physiques de l’IUT. Ses recherches au laboratoire CEMES-CNRS concernent les propriétés optiques des cristaux liquides, la physique des lasers et la nano-photonique.

Un podcast du Quai des Savoirs, en coproduction avec le CNRS et en partenariat avec l'INA, présenté par Marina Léonard et Laurent Chicoineau | Réalisation : Arnaud Maisonneuve | Prise de son : Laurent Codoul

Capsule sonore : Rencontre I Texte : Li-Cam I Sound design et réalisation : François Donato I Voix : Corinne Mariotto

Ces recherches et ce podcast ont été financés en tout ou partie, par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Ce mois-ci, nous vous proposons une plongée au-delà du visible, décryptage des mystères de la physique quantique dans des tours vers le futur.

  • Speaker #1

    C'est la physique qui se cache à une échelle infiniment petite derrière toutes les technologies de l'information et de la communication que nous utilisons au quotidien. Nous allons parler aujourd'hui de nanotechnologie et de physique quantique et tenter d'y voir un peu plus clair au-delà du visible.

  • Speaker #0

    Alors pour en discuter, nous recevons non pas un mais deux... Prof de physique, le premier et peut-être le seul prof de physique à accumuler le statut d'influenceur sur les réseaux sociaux et d'enseignant-chercheur à l'université Paris-Saclay. Il publie de nombreux ouvrages pour nous aider à mieux comprendre la physique autrement. Bonjour Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Notre second invité enseigne à l'université Paul Sabatier à Toulouse et fait ses recherches sur la nanophotonique au CMS, un laboratoire du CNRS. Il vient de participer à un projet de recherche sur des émetteurs quantiques. Bonjour Gonzaga Ghez. Bonjour.

  • Speaker #1

    Alors, pour attaquer, Julien Beaubrof, il va falloir nous donner quelques clés pour plonger dans la nanophotonique. De quoi parle-t-on quand on parle de nano ? À quelle dimension sommes-nous et quels en sont les enjeux ?

  • Speaker #2

    Le nanomètre, on est un milliard de fois plus petit que vous et moi. En gros, c'est facile, on nous rapetit ici et on nous met un milliard de fois plus petit. On est à l'échelle de l'atome, à l'échelle de la molécule. Un atome, c'est un peu moins d'un nanomètre. Ce qu'il y a d'intéressant, ce n'est pas seulement qu'on va avoir des atomes et des molécules à cette échelle, c'est que les lois de la physique vont être modifiées. C'est-à-dire qu'on a un monde radicalement différent à cette échelle. On n'est plus comme juste avec des petites boules autour de nous, comme on pourrait imaginer naïvement. En fait, on entre dans le champ de la physique quantique. On entre dans un champ de nouvelles lois, de nouveaux comportements. Ce qui est absolument incroyable dans ce domaine, c'est qu'on le pensait complètement inaccessible à nous, humains, parce qu'on s'est dit, mais dès qu'on va fabriquer un instrument, il va déjà faire des milliards d'atomes et ça sera impossible d'y accéder. Et en fait, depuis quelques dizaines d'années, on vit une véritable révolution dans les labos, dans plein de champs différents. On arrive... enfin à aller à l'échelle du nanomètre et encore mieux, à manipuler à l'échelle du nanomètre. Donc maintenant, on est capable de manipuler la lumière, les atomes, les molécules, les circuits électriques à l'échelle du nanomètre.

  • Speaker #0

    Alors c'est exactement ce que vous avez fait, Gonzague Hages, j'imagine, puisque vous avez travaillé sur des nano-antennes, c'est ça, dans ce projet de recherche. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel était le défi que vous vouliez relever dans ce projet ?

  • Speaker #3

    Alors oui, le défi en fait, c'est de faire un peu, bon l'équivalent avec l'électronique. L'électronique, c'est un peu plus rentrer dans la culture commune. L'idée c'est de faire voyager de l'information ou de l'énergie sur des circuits, pas seulement le laisser comme ça faire ce qu'il veut, c'est de le contrôler pour aller amener les informations là où on veut. Nous l'idée c'est de faire un peu la même chose mais avec de la lumière. Donc l'électronique c'est des électrons, la photonique avec des photons, et les photons pour faire simple on va dire que c'est eux qui transportent l'énergie lumineuse. On voit tous à quoi ça ressemble une antenne.

  • Speaker #0

    sur les voitures ça reçoit l'information et ça peut l'envoyer ça peut marcher dans les deux sens c'est exactement ça,

  • Speaker #3

    c'est pour ça que je parlais de contrôler l'information ou l'énergie, l'information c'est de l'énergie et donc le défi c'est de trouver la bonne géométrie d'une antenne qui marcherait pour la lumière, alors il se trouve que les antennes qu'on a sur nos voitures ou les vieilles antennes râteaux qu'on voyait là Elles sont de l'ordre du mètre parce qu'elles sont faites pour recevoir ou émettre des ondes électromagnétiques qui ont la taille à peu près de ces antennes. Alors si on transpose ça à la lumière qui est aussi une onde électromagnétique, la taille caractéristique de ces ondes est du nanomètre. On en parle depuis tout à l'heure. Donc il faut faire des antennes qui ont la taille... de quelques centaines de nanomètres, on va dire. On est dans la centaine de nanomètres.

  • Speaker #0

    Comment vous arrivez à manipuler, à fabriquer des choses à cette échelle-là ? Quels outils de laboratoire ?

  • Speaker #3

    Ce n'est pas moi qui fabrique. En fait, dans ce consortium, on a chacun notre rôle. Nous, notre rôle, c'était déjà de designer. Donc ça, on le fait avec des outils numériques.

  • Speaker #0

    Vous dessinez la forme, c'est ça que ça veut dire ?

  • Speaker #3

    On dessine complètement la forme. Et puis, en fonction des propriétés qu'on veut mettre en avant, on en reparlera. peut-être tout à l'heure. Et puis, une fois qu'on a trouvé des formes intéressantes avec des calculs, on propose ça à nos partenaires, qui eux vont venir graver ces antennes sur du silicium, sur des plaques de silicium. Alors, il y a le Letty à Grenoble qui fournit ces plaques de silicium, le LAS à Toulouse qui vient graver ça. Et techniquement, comment on fait pour graver à ces toutes petites échelles ? C'était votre question. On utilise des électrons principalement. On vient graver avec des électrons parce que les électrons, on est capable de les focaliser de manière très très précise et de contrôler vraiment leur position. Et ces électrons qui vont venir vraiment graver la matière. Et en fait, ce qui reste, c'est l'antenne.

  • Speaker #0

    Alors cette antenne, elle va servir à quoi ? Est-ce que par exemple, on va la trouver dans des futurs téléphones portables ? Est-ce qu'on va la trouver, je ne sais pas moi, dans des... voitures, dans l'électronique embarquée de voitures. Ça va servir à quoi, ce type de composants ?

  • Speaker #3

    À quoi ça va servir ? Il y a déjà des applications là-dessus. Par exemple, si on en met plusieurs, on les met l'une à côté de l'autre, plein de petites antennes à base de silicium, par exemple, et à ce moment-là, on appelle ça des métasurfaces. Et ces métasurfaces, elles ont des propriétés qui peuvent être comparées à des lentilles classiques, typiquement les lentilles de vos lunettes. Sauf que ce matériau, Cette méta-surface va avoir une épaisseur qui est beaucoup plus fine. de l'ordre de la centaine de nanomètres, plus un substrat pour les tenir. Et elles vont avoir quelques autres avantages, qui sont principalement dus au fait qu'on peut multiplier plusieurs fonctions. Vos lunettes peuvent focaliser la lumière ou diverger suivant la pathologie qu'elle doit corriger. Et ces métasurfaces peuvent faire l'effet de filtre pour laisser passer une couleur ou une autre. Elles peuvent aussi disperser... différents rayons pour typiquement viser plusieurs objectifs en même temps, etc. Il faut savoir que la propriété même de l'antenne, donc sa couleur pour faire simple, elle est très liée à son environnement. Si on change un tout petit peu son environnement, son interaction avec la lumière va changer, mais de manière assez drastique, en tout cas quelque chose de mesurable. Donc il y a des capteurs qui utilisent ce principe-là. Par exemple, si vous venez mettre une molécule, Parce qu'on a, comme Julien l'a dit juste avant, on est sur des ordres de grandeur qui sont assez équivalents. Si on vient mettre une molécule qu'on veut détecter la présence de cette molécule, en fait l'antenne va réagir différemment. Et en détectant cette différence de réaction, on peut être capable de détecter la présence, voire de mesurer la quantité par exemple d'une substance.

  • Speaker #1

    Alors puisqu'il est question de couleur, petit quiz. Alors petit quiz, allez, on va jouer avec Laurent d'abord. D'après toi Laurent, l'argent c'est de quelle couleur ?

  • Speaker #0

    Je dirais gris comme tous les métaux, non ?

  • Speaker #1

    pas à peu près, et l'or. Jaune. Alors ça, c'est vrai, à l'échelle du visible, mais à l'échelle nanométrique, t'as tout faux. Et c'est ce que va nous expliquer Pierre-Gilles De Gênes, donc prix Nobel de physique, c'est ce qu'il racontait au sujet des nanoparticules d'or et d'argent. On était dans les années 90.

  • Speaker #4

    Il y a un très beau rouge dans les vitraux du XIIIe siècle qui est fait avec des toutes petites, petites particules, qu'on appelle des nanoparticules. Dans le cas particulier, c'était de l'or. Il y a d'ailleurs une autre couleur aussi, c'est le halo qu'il y a autour de la tête des seins. Il est jaune. Et là, c'est des nanoparticules d'argent. Alors, c'est très bon de savoir ça parce que ça nous le garde un peu modeste. On est en train de découvrir des tas de choses sur les nanoparticules, mais c'est intéressant de voir que nos ancêtres du Moyen-Âge, ils en savaient déjà un sacré bout.

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, il va falloir nous l'expliquer, messieurs les physiciens. Je ne sais pas lequel des deux veut s'y coller, mais pourquoi l'or à cette échelle-là en nanoparticules est rouge ? Julien Bobroff.

  • Speaker #2

    Allez, je me lance. C'est Gonzague qui est le spécialiste. Déjà, il exagère un petit un chiffre de gêne. Il est sympa, mais vraiment, ils n'avaient rien compris à ça au Moyen-Âge. Ils savaient le même. Mais ce n'est pas pareil. Il y a une bonne raison à ça. C'est que même la couleur de l'or, telle que tu l'as dit, Laurent, elle est quantique. C'est-à-dire que le fait que l'or est jaune, c'est des raisons à la fois, et c'est même pire pour l'or particulièrement, c'est à la fois quantique et de la théorie de la relativité restreinte. C'est vraiment la totale. Je ne vais pas vous expliquer en détail pourquoi, mais fondamentalement, c'est le fait que la lumière, c'est ce que disait Gonzague, c'est des photons, c'est des petits grains quantiques. et qui va interagir avec les atomes de l'or, être renvoyé par l'or, et l'or va manifester en quelque sorte sa nature quantique en vous faisant du doré. Maintenant, quand on descend en échelle, qu'on réduit l'or, et qu'on le réduit, on pourrait se dire que ça va être exactement pareil, parce que les atomes, c'est exactement les mêmes. Mais en fait, il se passe un truc très curieux, c'est qu'à l'échelle du nanomètre, si votre bout d'or, votre lingot d'or, il ne fait que nanomètre, donc il ne va pas valoir très cher pour le coup, eh bien la lumière va interagir avec lui différemment. Et ça vient vraiment du fait que la lumière, c'est une vague, qui est très bien Gonzague. Cette vague, elle a une taille caractéristique. Et soudain, cette taille, elle va être de l'ordre ou même plus grande que la taille de la particule. Donc la particule, elle ne reçoit plus du tout la lumière de la même manière et elle ne la recrache plus de la même manière. Et donc, il va y avoir des effets, notamment des électrons, des effets collectifs, qui vont faire que la particule a une couleur différente. Alors, si c'était juste pour faire de l'or rouge, ça ne serait pas hyper intéressant. Mais ce que ça dit plus fondamentalement, c'est que juste en jouant sur la forme et la taille de la particule, on choisit un peu sur mesure ses propriétés et par exemple sa couleur. Et là, soudain, ça ouvre tout un champ des possibles. On va être un peu maître des propriétés optiques. Quand il parlait de métasurface et de métamatérieux, Gonzague, c'est une idée absolument géniale. C'est qu'on va faire ce qu'on veut avec la lumière et même tricher avec les lois de l'optique habituelle. Certains de ces matériaux arrivent à rendre presque invisibles certains matériaux. On arrive à faire des indices négatifs. Donc, on arrive à faire ce qu'on ne savait pas faire avec la lumière habituellement, juste parce qu'on n'était pas descendu à la bonne échelle.

  • Speaker #0

    D'accord, donc Gonzague, en fait, vous utilisez ces propriétés, enfin nouvelles pour nous qui les découvrons aujourd'hui, mais vous utilisez ces propriétés. Est-ce que ce n'est pas compliqué ? Comment vous travaillez sur ça ? Quelles sont les difficultés à cette échelle-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ce n'est pas compliqué parce que c'est la physique qui le fait pour nous. Nous, on ne fait qu'observer. C'est ce qu'on appelle des effets de résonance, en fait. La matière résonne parce qu'on l'excite avec une vague, comme n'importe quelle chose pourrait. On pourrait osciller parce qu'une balançoire, typiquement, quand on pousse dessus, elle va osciller à une vitesse qu'on n'a pas choisie. D'accord ? Donc voilà, on ne choisit pas. Par contre, on peut décider de changer la géométrie, la taille de la balançoire typiquement. On peut changer la taille des nanostructures. Et donc pour répondre à la question de comment on observe ça, en fait, nous, le vecteur principal, c'est les photons, bien sûr. C'est ce qu'on observe. Donc si vous voulez vous rendre compte un peu plus de la chose, c'est... Bon, vous avez un microscope. Tout le monde voit ce que c'est à peu près. Sauf que bon, c'est des microscopes qui restent des microscopes optiques. On reste sur de l'observation parce qu'il existe aussi des microscopes électroniques pour voir des choses encore plus petites. Si on a besoin de voir le résultat de la gravure pour voir si c'est effectivement ce qu'on avait imaginé, à ce moment-là on va faire une imagerie avec des microscopes électroniques. Et ces microscopes là sont capables de descendre sur des résolutions telles qu'on est capable de, typiquement, voir l'arrangement atomique à l'intérieur. Donc nous, on est un peu à une échelle au-dessus, l'arrangement supra-atomique, on va dire. Et donc ça, on peut mesurer très précisément la taille, etc. Ensuite, les propriétés optiques, parce que c'est celles qui nous intéressent, nous. C'est un microscope optique avec des objectifs de qualité un peu supérieure. On essaie de récolter un maximum de lumière, parce que forcément, si on fait des choses à toute petite échelle, on ne peut pas s'attendre à avoir énormément de lumière. Donc là, il faut être équipé avec des... des détecteurs particuliers qui vont pouvoir compter les photons un par un, grosso modo.

  • Speaker #0

    Alors vous ne nous avez pas dit non plus, pourquoi finalement utiliser des photons plutôt que des électrons ? Puisqu'il y a des choses qu'on sait faire déjà avec de l'électronique. Alors qu'est-ce que vous cherchez à gagner à travers l'utilisation de photons ?

  • Speaker #3

    Alors ce qu'on peut gagner, alors on ne cherche pas à gagner grand chose, généralement.

  • Speaker #0

    Comme le plaisir de la recherche !

  • Speaker #3

    Ouais, en fait comme Julien l'a dit, c'est que la physique déjà, elle est différente à ces échelles-là. D'accord, sans même descendre complètement jusqu'au système quantique, rien que l'effet qu'on décrivait, que Pierre-Gilles de Gênes décrit, ça c'est un effet de taille parce qu'on est descendu et on ne peut pas l'expliquer en imaginant l'interaction de la lumière avec un objet d'une taille un peu plus grosse. D'accord ? Donc déjà on cherche ça. Ensuite, pourquoi les photons plutôt que les électrons ? Fondamentalement, c'est des choses qui sont très différentes. J'ai envie de dire, les photons, on peut en mettre plein au même endroit. On peut les superposer, c'est une propriété qu'ils ont. Si on met 12 photons au même endroit, on a 12 fois plus d'énergie. Les électrons, ils ne vont pas trop aimer ça. Les électrons, si on en met 12, ils vont se battre entre eux. C'est vraiment une propriété intrinsèque de ces particules, même si je n'aime pas trop dire que les photons sont des particules, mais voilà.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est pour ça que vous utilisez le photon, parce que vous pouvez en mettre plus au même endroit, et donc ça va vous donner... Plus de possibilités derrière sur les composants que vous fabriquez pour apporter plus d'énergie.

  • Speaker #3

    On va pouvoir concentrer effectivement pas mal d'énergie. On va probablement moins chauffer aussi que des électrons, parce que le fait qu'ils se repoussent aussi, les électrons font chauffer. Vous le repérez sur vos batteries, votre téléphone, généralement quand il est en marche, il chauffe. La lumière peut aussi faire chauffer, mais ça dépend du matériau avec lequel il interagit.

  • Speaker #0

    D'accord, alors on parle de physique quantique depuis un petit moment. On ne peut pas parler de physique quantique sans parler de ce fameux chat de Schrödinger, dont on parle de partout sur Internet, un peu partout dans l'histoire des sciences, évidemment. C'est un chat, vous savez, c'est celui qu'on a enfermé dans une boîte pour faire une expérience.... et une substance radioactive mortelle.

  • Speaker #2

    Si un seul de ces atomes se dégrave durant la période de Perse... Un mécanisme de relais actionnera un marteau qui d'un coup brisera la fiole et le chat en mourra. Jusqu'à l'ouverture de la boîte,

  • Speaker #0

    nous ignorons si le chat est vivant ou bien s'il est mort. Il est mort. Non, Raven,

  • Speaker #1

    selon la théorie quantique, il est les deux jusqu'à l'ouverture de la boîte. Non,

  • Speaker #0

    il est bien mort avant l'ouverture.

  • Speaker #2

    Ah, ignorez le fantôme.

  • Speaker #0

    Oui, alors ça c'est le fantôme du chat de Schrödinger qui sort de la boîte dans ce petit dessin animé. Alors pour les personnes qui ont au moins plus de 10 ans aujourd'hui, c'est peut-être pas la référence. C'était l'été. Tins, titans, go. Julien Bobroff, cette expérience, elle traduit quoi par rapport à la physique quantique ? Qu'est-ce qu'elle nous apprend ? Pourquoi on parle tout le temps de ce chat de Schrödinger dès qu'on parle de physique quantique ?

  • Speaker #2

    D'abord, je dois dire qu'elle est assez bien décrite dans le dessin animé. De toute façon, au Curieux, c'est la première fois que je l'entends, mais je suis assez épaté. Elle est compliquée, cette expérience, mais en gros, faisons-le bien plus simple, sans décrire peut-être l'expérience elle-même dans son détail. Ce qu'elle dit fondamentalement, c'est qu'à l'échelle quantique, on peut avoir des objets dans deux états à la fois. Alors, pas mort et vivant, parce que la notion de vie n'a aucun sens pour un atome. Par exemple, on peut avoir un atome dans deux endroits à la fois. Il peut être à 40 cm de lui-même, par exemple. Ou on peut avoir un atome excité et pas excité à la fois. Et alors nous, on appelle ça le chat de Schrödinger parce qu'il y a cette expérience dont on parle tout le temps de pensée qu'avait proposé Schrödinger où il avait dit, et c'est hyper bizarre ce truc parce qu'on pourrait imaginer des expériences où on transmettrait cette espèce de superposition assez incroyable, cette espèce de don d'ubiquité un peu magique, et on pourrait le transmettre à un chat. Et donc le chat, dans l'expérience de Schrödinger, il sera à la fois mort et vivant. Alors, bonne ou mauvaise nouvelle, je ne sais pas, non. Vous n'arriverez pas à faire une expérience avec un chat qui sera à la fois mort et vivant. Et alors, ce n'est pas juste pour des arguments théoriques, on l'a testé. Alors, on n'a pas testé ça sur des vrais chats, rassurez-vous. Mais on a essayé, on a été un peu plus malin. Il y a des prix Nobel qui ont mis même leur prix Nobel pour ça, notamment Serge Haroche en France. L'idée, ça a été de prendre un objet quantique pur et dur, genre un atome ou un photon, de le mettre dans deux états à la fois, et puis en fait, de le faire grossir petit à petit. Et ce dont on se rend compte, c'est qu'en gros, dès que l'objet est un peu trop gros, ou alors qu'il y a trop de choses qui se passent autour de lui, un peu d'air, un peu de chaleur, un peu de mouvement, il arrête d'être dans deux états à la fois. Donc, ce qu'on peut juste retenir assez simplement, c'est que... à l'échelle de la quantique, à l'échelle du nanomètre, à toute petite échelle, on sait mettre un objet dans deux états à la fois, même si nous, ça nous semble étrange. Et ça nous semble étrange, en fait, parce qu'à notre échelle, à nous, on ne peut pas. Ça s'arrête quelque part entre les deux, en gros. Donc, on sait mettre des tout petits objets dans deux états à la fois. Alors là, on pourrait se dire que c'est vraiment du plaisir de physicien qui veut juste s'observer des trucs bizarres en labo. Alors, même si ce n'était que ça, moi, je trouve ça absolument magnifique. Mais ce qu'il y a d'assez remarquable, et là aussi, c'est tout récent, c'est qu'on s'est rendu compte depuis peu qu'en faisant ça... on ouvre soudain une boîte de Pandore et on est capable de faire des choses. Alors pour le coup, du côté des applications, c'est incroyable. Et en particulier, il y a des physiciens qui, depuis quelques dizaines d'années, se sont rendus compte qu'en prenant plein de ces atomes dans deux états à la fois ou de ces photons dans deux états à la fois, on pouvait calculer. Et qu'on pouvait calculer bien mieux et bien plus vite qu'avec un ordinateur normal, dans certains cas. En fait, ce qu'on appelle les ordinateurs quantiques, c'est une assemblée de millions, on aimerait bien mettre des millions, de petits chatons de Schrödinger qui siennent tous les uns les autres dans une sorte de pouponnière de chatons. Là, je m'emballe dans ma métaphore complètement pourrie. Mais en gros, il y a cette idée-là. Il y a l'idée que si on est capable de bien contrôler cette superposition à l'échelle de tout petits objets, et qu'on est capable d'en mettre plein, on va accéder vraiment à des possibilités complètement révolutionnaires, par exemple en termes de calcul.

  • Speaker #1

    Alors là, on vient de parler de la superposition d'états. Vous disiez qu'il y avait d'autres propriétés quand on passe à des échelles toutes petites, petites, petites, comme ça, en physique quantique. Quels sont les autres grands principes qu'il faut avoir à peu près en tête quand on est hors-physicien ?

  • Speaker #2

    Donc on se fait la physique quantique en deux minutes à peu près, c'est ça ? Allez, et pourquoi pas ? En gros, à toute petite échelle, c'est ce que disait très bien Gonzague, c'est qu'on ne sait pas bien vous dire avec notre vocabulaire à nous ce qui se passe. On dit bon alors l'objet c'est à la fois une particule et une onde, mais ça dépend comment on le regarde, etc. Donc voilà, il y a cette espèce de paradoxe. Imaginez que si vous regardez un électron par exemple, ça va être plutôt une sorte de nuage qui occupe toute une zone de l'espace. Premier truc troublant, si vous essayez de le mesurer, hop, il se réduit soudainement en un endroit et il a l'air de tirer au sort où est cet endroit. Déjà ça c'est hyper curieux. Deuxième truc hyper curieux, on peut le mettre à deux endroits à la fois. Troisième truc hyper curieux, on peut le balancer contre un mur et de temps en temps, il va passer à travers le mur. Ça s'appelle l'effet tunnel. Autre truc hyper bizarre, il est complètement discontinu. Il a le droit qu'à certaines énergies, qu'à certaines vitesses. Il n'est pas du tout, je ne sais pas, comme une pomme qui tomberait gentiment. Lui, il va choisir, il va tomber à une vitesse, puis une autre vitesse, puis une autre vitesse. Ce qui n'existe absolument pas dans la vie de tous les jours. Et puis, on peut continuer comme ça et comme ça. On peut même aller jusqu'à l'intrication. Donc là, c'est le sommet du bizarre. J'adore ça. Vous prenez maintenant deux. objets quantiques, vous les frottez l'un à l'autre de façon un peu astucieuse, et si vous les séparez de milliers de kilomètres, on a fait ça sur des milliers de kilomètres, ils ont l'air de partager des propriétés à distance. Comme s'ils se parlaient entre eux, mais ils ne se parlent pas entre eux. Mais quand on titille l'un, ça a l'air de titiller l'autre à mille kilomètres de là.

  • Speaker #0

    À des milliers de kilomètres ?

  • Speaker #2

    Ouais, le record c'est 1200 kilomètres actuellement. Ah vache !

  • Speaker #1

    On comprend que ça inspire les dessinateurs pour les dessins animés.

  • Speaker #2

    Oui, ils sont vraiment dans le dessin animé avec effet spécial.

  • Speaker #1

    Et alors ça, tous ces éléments, tous ces principes, c'est des éléments qui sont à la base de l'ordinateur quantique dont vous parliez il y a quelques instants. C'est ça qu'on met là-dedans ? On essaie de fabriquer un ordinateur qui dispose de tous ces... Alors, il ne dispose pas de toutes les propriétés, mais il s'appuie sur tous ces principes pour faire des choses folles ?

  • Speaker #2

    L'ordinateur, c'est tout à la fois. C'est vraiment le sommet du délire. C'est qu'on va prendre plein d'objets quantiques, les mettre chacun dans plusieurs états à la fois, et en plus, tous les intriquer entre eux. Et donc, on pourrait se dire que ça va être le cauchemar absolu pour un informaticien. qu'au lieu de se faire des zéros et des 1 normaux, on va faire des trucs qui sont à la fois zéro et un, et puis qui sont tous ensemble et autres. Et donc, ça n'a aucun sens, a priori. Le truc assez magique, c'est que les théoriciens en premier se sont rendus compte qu'en fait, si on savait manipuler cette espèce de bouillie d'objets quantiques et de zéros et de 1 dans tous les sens, et qu'on les manipulait un peu astucieusement, ils étaient capables de faire certains calculs qu'on n'est pas capables de faire avec des ordinateurs de mots. Et des calculs qui peuvent avoir des conséquences vraiment importantes sur l'humanité. Et donc, c'est un peu ça l'enjeu. Alors, je vous rassure, je ne vous rassure pas, au contraire, je démine tout de suite le terrain, ça ne marche pas. Ou plutôt, ça marche hyper mal pour l'instant. Les ordinateurs quantiques actuels, vraiment, font des pauvres calculs minables qu'on sait très bien faire avec des ordinateurs minables, avec des ordinateurs normaux, pardon, mais ça progresse. Et donc, il y a des gens qui pensent que d'ici quelques années, ces ordinateurs quantiques vont faire des choses remarquables. Et d'autres qui disent qu'on n'y arrivera jamais. Et on est un peu dans cet entre-deux assez palpitant actuellement, qui est un monde en pleine évolution et révolution. Alors, ça ne se limite pas aux ordinateurs quantiques. Et je m'arrêterai là, mais pour repasser justement la parole à Gonzague. Il se trouve qu'on s'est rendu compte au passage que plein de choses qu'on faisait à l'échelle du nanomètre, sans nécessairement que ce soit du calcul, ouvraient tout un champ des possibles. Les métamatérieux, comme l'a très bien dit Gonzague. On peut parler aussi des capteurs. On sait maintenant faire des capteurs absolument incroyables à petite échelle. qui vont mesurer des choses qu'on ne savait pas mesurer actuelles jusque-là, et qui vont avoir des effets dans plein de domaines et pas seulement dans la physique.

  • Speaker #1

    Alors juste avant, tant qu'on est dans le déminage et les fantasmes, on voit régulièrement passer des éléments marketing. Alors au-delà de l'ordinateur quantique, on voit passer des crèmes solaires, des crèmes antirides et compagnie. Tout ça pour le moment c'est de l'ordre du marketing ou il y a vraiment des fondements scientifiques, physiques ? j'entends dedans,

  • Speaker #2

    au-delà des propriétés biologiques parce que vous n'êtes pas ni biologiste ni médecin On a beaucoup de choses bien plus dangereuses aussi en thérapie quantique, on dit qu'on va vous soigner grâce à la quantique, et on voit bien ce que je viens de vous raconter, ça crée des imaginaires ça crée des métaphores et ça donne envie de s'en emparer pour parler aussi d'ésotérisme d'énergie, de résonance, etc. Alors ce qu'on peut dire, nous en tant que scientifiques et là j'espère que Gonzague partagera mon point de vue, c'est que on sait très bien, nous, et ça a été expérimenté en laboratoire et ça a été prouvé maintes et maintes fois et on sait maintenant la physique qui se cache derrière c'est que tous les effets s'arrêtent dès que l'objet est trop gros et trop chaud. Donc en gros, un corps humain ne peut pas avoir des effets quantiques à grande échelle. Donc on ne peut pas vous soigner grâce à la physique quantique, malheureusement. Et tous les gens qui vont vous parler de thérapie quantique, de biorésonance, de biofeedback, et de tout un vocabulaire emprunté à la quantique pour faire scientifique, en fait, vous arnaquent. Si par contre, ils vous disent que c'est juste une métaphore et qu'en fait, ils sont dans un champ qui n'est pas scientifique, moi, je n'ai aucun problème. J'ai un problème s'ils usurpent la quantique en lui faisant dire ce qu'elle n'est pas capable de dire.

  • Speaker #0

    Oui, alors moi j'ai envie de vous poser Gonzague la question à 1000 euros ou peut-être 1 milliard d'euros. C'est-à-dire, est-ce qu'on sait pourquoi ces effets s'arrêtent à un moment donné à une certaine échelle ? Comment ça se fait que finalement tous ces effets assez magiques qui viennent de nous être décrits, pourquoi à un moment donné, paf, ça s'arrête et on passe à un autre type d'effet ?

  • Speaker #3

    Oui, on sait, je ne suis pas du tout spécialiste de ça. Le gros mot, c'est la décohérence.

  • Speaker #0

    Ok,

  • Speaker #1

    c'est un joli mot.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #3

    C'est-à-dire qu'en fait, quand on les additionne... On n'arrive pas à bien les additionner, c'est-à-dire qu'il y a des plus, des moins, pour faire simple, on aimerait bien additionner que des plus ensemble, que des moins ensemble, on sait ce que ça fait, mais en fait au final, plus on additionne, plus on va faire un mélange, et puis on va arriver à une moyenne qui est nulle. Et on peut voir le monde classique, au sens de la physique classique, comme la moyenne des effets quantiques.

  • Speaker #0

    D'accord, donc la pomme qui tombe, puisque Julien en a parlé, et puis on a Newton tout son tête, avec cette fameuse pomme pour l'effet gravité, qui tombe de manière... Alors, je vais me lancer dans la physique, je vais dire des bêtises constantes, ou en tout cas qui arrivent au sol sans avoir des saccades, ce que j'ai compris si on était dans un univers quantique, la pomme pourrait tomber avec plusieurs vitesses différentes. Donc ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #3

    Ça, c'est la physique classique.

  • Speaker #1

    Qui est donc une moyenne.

  • Speaker #3

    Oui, la physique classique, comme tous les champs de recherche, le but, c'est de faire des modèles, des modèles qui fonctionnent. Donc pour expliquer pourquoi la pomme tombe, en combien de temps elle tombe, on n'a pas besoin d'invoquer la physique quantique. Même si, dans l'absolu, si on voulait décrire parfaitement l'état de cette pomme, on serait obligé de rentrer dans la physique quantique.

  • Speaker #1

    Et alors, est-ce que la différence... Alors là, attention, pareil, je me lance. Est-ce que la différence entre passer de la physique de notre dimension à nous, notre échelle, jusqu'aux ordinateurs quantiques, c'est passer de la modélisation à la simulation ?

  • Speaker #0

    Alors non, en fait, il est capable de faire les deux. C'est-à-dire qu'un ordinateur quantique est capable de simuler. Et en fait, quand on dit simuler, c'est juste que l'ordinateur quantique, il est bien fichu pour traduire les lois de la quantique, vu qu'il est lui-même quantique. Donc si vous voulez en gros comprendre comment une réaction chimique, par exemple, fonctionne, et qui est purement quantique, et une réaction chimique, c'est que de la quantique, en gros, l'ordinateur quantique, il est bien câblé pour ça. Il va vous aider à le simuler. Simuler, ça veut dire que vous ne faites pas de calcul de la réaction, vous lui demandez juste de faire comme dans la vraie vie. Et vous regardez ce qui se passe. Par ailleurs, il peut calculer. Et là, on va vraiment le programmer comme on programmerait un ordinateur normal, avec des outils un peu différents, mais avec des portes logiques, avec des langages de programmation. Donc, il y a deux sortes de façons d'utiliser un ordinateur quantique. Alors,

  • Speaker #1

    puisqu'on parle d'applications futuristes, il est l'heure d'écouter notre feuilleton SF, proposé par l'ICAM et François Donato. Et cette fois-ci, il nous parle d'une certaine rencontre.

  • Speaker #2

    Je viens de sortir mon t-shirt,

  • Speaker #3

    dont la couleur et les motifs changent en fonction des autres t-shirts de mon proximité. C'est très ludique.

  • Speaker #4

    Quand je suis chez moi, il est dans le gris,

  • Speaker #3

    il se tourne. Et dès que je sors, c'est le même artiste. Il forme sa peau, il est comme dans un test de recherche. Il est sans cesse changeant.

  • Speaker #4

    C'est si amusant que j'ai envie de le porter tous les jours. Hier, j'étais au centre commercial pour acheter des yaourts et de la compote. En m'approchant de la caisse robotisée, j'ai entendu des exclamations. C'était une jeune femme en train de récupérer ses courses à une autre caisse un peu plus loin. Son t-shirt et le mien s'étaient mis à converser. Ils échangeaient des formes, redoublées d'inventivité à l'unisson, à un rythme effréné. C'était vraiment très beau et super fun. et complètement incompréhensible. Je regardais son t-shirt et elle regardait le mien. Nous étions si enchantés que nous en avons oublié les gens qui patientaient pour avoir accès aux caisses robotisées. Certains ont commencé à ronchonner, nous n'en avions que l'air. D'autres personnes, comme nous, fascinées par le spectacle, et souriaient béatement. Ces vêtements en métatextile sont très à la mode, mais nul ne comprend leur langage, si toutefois c'en est un. Est-ce si important pour les trucs ? La beauté se suffit à elle-même ? C'est en tout cas mon avis.

  • Speaker #0

    Bonsoir.

  • Speaker #4

    Nous avons récupéré la force,

  • Speaker #3

    et nous avons fait un vrai de causette. Rien de bien profond, juste des banalités. Tandis que nos t-shirts continuent à bavarder un grand renfort de couleurs et de figures plus ou moins géométriques.

  • Speaker #4

    Elles se prénomment Flora,

  • Speaker #3

    qui habite à côté. Nos t-shirts s'entendent bien. Nous avons décidé de nous revoir.

  • Speaker #5

    Texte, l'ICAM. Voix, Corinne Marion. Son design et réalisation, François Benapour.

  • Speaker #6

    Bon, là, on va un tout petit peu loin avec un mythique futuriste. Pourtant, les métatextiles, ça fait un peu penser au graphène qui est étudié notamment à Manchester. Il y a déjà quelques années de ça, on avait parlé de textiles intelligents. Est-ce que les métatextiles, c'est pour bientôt ?

  • Speaker #1

    Gonzague, vous qui travaillez sur justement les nanotechnologies.

  • Speaker #7

    Oui, oui, c'était top. En vrai, il y a plein de mots-clés qui sont presque des métaphores de ce qu'on fait. Je trouve superbe le travail. Et oui, pourquoi pas ? Pourquoi pas les textiles, les surfaces, si on veut qu'elles changent de couleur. Et d'ailleurs... En fait, les textiles se parlent dans l'extrait. Oui. Donc, ça, c'est vraiment la métaphore de l'information. J'en parlais tout à l'heure. L'idée, c'est de transporter de l'information par la lumière. Et pour changer de couleur, il faut passer d'un mode passif à un mode actif. D'accord ? Passif, ce serait toujours la même couleur. Et là, en fait, on voit que ça change de couleur, etc. Donc, il existe déjà des choses comme ça. Et pour que ce soit un mode actif, généralement, il faut un stimulus. Ce stimulus, ça peut être... de la lumière, des faisceaux laser, nous on fait ça avec des faisceaux laser par exemple, qu'on peut modeler comme on veut, ça peut être un champ électrique, ça peut être typiquement, là on entame une nouvelle phase dans nos recherches qui est l'interaction de ces antennes avec leur environnement et leur environnement serait des cristaux liquides. Ces cristaux liquides, on sait qu'on peut les activer, en tout cas les bouger avec un champ électrique pour changer de manière active l'environnement. Et si on change leur environnement, ça changera typiquement la couleur et plein d'autres propriétés qu'elles auront.

  • Speaker #0

    Je veux juste compléter. Donc déjà, c'est pratique parce que Gonzague est en train de vous dire que dans quelques années, il a le T-shirt pour vous.

  • Speaker #6

    Génial.

  • Speaker #0

    Peut-être bon dire. À un moment donné, l'héroïne dit cette phrase que je trouve très belle. Elle dit la beauté se suffit à elle-même. Je n'ai pas forcément besoin de comprendre comment il marche mon T-shirt. C'est peut-être là, je trouve, la définition même de la science et de la physique. C'est que nous, on a besoin de comprendre. C'est que Gonzague et moi, ce qui nous anime, ce qui nous motive, c'est de comprendre. Et un point clé pour moi... C'est que ça n'enlève rien à la beauté du phénomène. Les gens, parfois, quand on comprend, on rend ça cartésien, on rend ça triste, on rend ça dur, il y a des tas d'équations. Moi, je trouve que ça rajoute de la beauté à la beauté. De comprendre comment ça fonctionne, de comprendre la physique quantique qui va se cacher derrière le t-shirt ou les métamatériaux ou l'interaction lumière-mature, ça le rend encore plus beau.

  • Speaker #1

    Absolument. Et alors, on voulait terminer cette émission en vous interrogeant sur les enjeux qu'on a aujourd'hui, auxquels on est tous confrontés à travers... le changement climatique, à travers la crise écologique ou la transition écologique. Est-ce que les recherches que vous faites à cette échelle quantique, est-ce que, par exemple, ces nouveaux composants que vous êtes en train de travailler, ça pourrait réduire la consommation énergétique ? Est-ce que vous imaginez aussi, en utilisant les matériaux, on sait qu'on utilise beaucoup de terres rares, avec des stocks qui sont limités à l'échelle de la planète. Comment vous prenez ces enjeux en compte ?

  • Speaker #7

    Vous avez tout à fait raison. Au-delà de nos pratiques même, où on essaie d'être un peu plus vertueux dans les laboratoires, ça c'est un mouvement national, Il faut réfléchir à ces choses parce que le problème des ressources, ça fait partie d'une des neuf limites planétaires. Donc oui, inventer une techno actuelle qui utiliserait des ressources trop rares et qui ne seraient pas déployables, serait probablement très inutile ou en tout cas n'irait pas dans la bonne voie. Maintenant, si on veut parler des terres rares, sur les applications que nous on en a, ces terres rares, on les utilise comme des émetteurs. Justement, si on veut aller même un peu plus vers la quantique, il faut en mettre très peu. Mais très peu, c'est vraiment très très peu.

  • Speaker #1

    Oui, on a compris qu'on était à l'échelle de l'atome.

  • Speaker #7

    Voilà, donc de ce point de vue-là, pour l'instant, on ne réfléchit pas trop à ça. Elles ont des propriétés qu'on aime bien et qu'on veut jouer avec. Mais probablement, effectivement, s'il fallait le déployer, il faudrait aller chercher vers des matériaux pour lesquels on a plus de ressources sur Terre. Typiquement, ces métasurfaces, on en a parlé pas mal, elles peuvent aussi être utilisées pour optimiser le photovoltaïque, typiquement. C'est quelque chose qui est très utilisé parce que... Pour les panneaux solaires ? Pour les panneaux solaires, voilà. À la fois pour concentrer l'énergie là où on en aurait le plus besoin, pour faire des lentilles par exemple, mais aussi, comme j'ai dit au début, ces petites antennes, elles sont là pour concentrer l'énergie.

  • Speaker #1

    Ça pourrait augmenter le rendement des panneaux solaires ?

  • Speaker #7

    Ça pourrait tout à fait augmenter le rendement des panneaux solaires, et il y a beaucoup. de choses, il y a beaucoup de choses qui se font là dessus. Et comme on est sur des technos à base de silicium, ça pour l'instant on n'en manque pas trop. Oui,

  • Speaker #1

    il y en a sur toutes les plages du monde.

  • Speaker #7

    Voilà, alors c'est de la silice.

  • Speaker #1

    C'est de la silice, mais ce n'est pas celui-ci.

  • Speaker #7

    Avant le silicium, oui voilà. Mais bon, c'est moins critique que les terrains, typiquement.

  • Speaker #1

    Julien, vos réflexions aussi dans votre laboratoire ?

  • Speaker #0

    Oui, d'abord la première remarque, c'est le domaine dont on est en train de parler, cette interaction entre des matériaux qu'on fabrique très spécialement et la lumière, c'est ça qui a produit les LED. Les LED, elles ont été inventées. elle n'existait pas à l'état naturel, elles sont 10 à 100 fois plus efficaces que nos anciennes ampoules incandescentes à filaments, et ça a été un sacré gain en énergie pour l'humanité. Donc c'est des recherches qui peuvent avoir des sacrés impacts. Alors il ne faut pas non plus tomber, je pense que ni Gonzague ni moi ne sommes là-dedans, dans une espèce de technosolutionnisme à tout va qui dirait vous inquiétez pas avec la physique quantique qu'on va tout vous résoudre. Je dis ça parce que j'ai certains collègues qui ont tendance à dire ça, notamment avec l'ordinateur quantique, qui disent que ça va résoudre par exemple la captation du CO2, et je pense qu'il ne faut pas s'emballer et rien que les échelles de temps nous mettent dedans. Donc... La crise écologique, on va devoir y faire face. Et ce n'est pas ce qu'on fait en laboratoire qui va permettre de la résoudre. Ça peut permettre d'aider à la passer mieux.

  • Speaker #1

    Très bien. Eh bien, bienvenue dans la nouvelle révolution quantique. C'est le titre de votre dernier ouvrage, Julien, qui est paru chez Flammarion. Et le précédent, je rappelle, la quantique autrement, qui est sortie en poche. Donc, pour moins de 10 euros, Marina, vous saurez tout sur la physique quantique. Voilà. Et on vous retrouve aussi sur Instagram, sur TikTok et sur Facebook.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, c'est terminé pour aujourd'hui. Un grand merci à nos deux invités, Gonzague Hages et Julien Bobroff.

  • Speaker #1

    Merci à nos partenaires de l'INA pour la recherche documentaire et merci aussi à l'ICAM et François Donato pour leur création sonore. Cet épisode a été réalisé en coproduction par le Quai des Savoirs et le CNRS avec le soutien de l'Agence Nationale de la Recherche.

  • Speaker #6

    Détour vers le futur, un podcast présenté par Laurent Chicoineau et Marina Léonard, préparé avec l'aide de Françoise Bissac et Héloïse Bonin. Et on ne pouvait pas ne pas faire une petite dédicace à Catherine Demathéis.

  • Speaker #1

    Réalisation Arnaud Maisonneuve, à la prise de son Thomas Gwazé. Abonnez-vous à Détour vers le futur sur Deezer, Spotify ou Apple Podcasts pour ne rater aucun épisode. Et n'oubliez pas, nous sommes le futur.

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