Speaker #0Bienvenue sur Divan Noir, le podcast dédié aux histoires des femmes invisibilisées, aux histoires des femmes qui vous ressemblent. Je suis Mariam, sociothérapeute spécialisée en transculturalité. J'accompagne des femmes racisées ou concernées par la double culture sur le plan de leur santé psychologique et sociale. Divan Noir, c'est un podcast qui participe à rendre visibles des parcours de vie de femmes qui sont invisibilisées par notre société. Ces femmes qui sont partout, mais que l'on entend et qu'on ne voit vraiment nulle part. Ici, vous entendrez leurs histoires. Hello, hello ! Ah, ça fait super longtemps que je n'avais pas enregistré de podcast, j'avais plusieurs mois. J'espère que vous allez bien. Là, vous m'écoutez, du moment où vous m'écoutez, ici, j'enregistre un dimanche soir en retard parce que je m'étais engagée à... C'est un engagement que j'avais pris vis-à-vis de moi. à reposter des émissions tous les 15 jours, mais je vais vous annoncer que je ne vais pas pouvoir tenir la cadence. Donc je pense que vous allez avoir un épisode de podcast peut-être toutes les trois semaines, voire un mois. En tout cas, je suis là et je suis ravie d'enregistrer cet épisode. C'est un épisode assez particulier, mais j'ai l'impression que tous les épisodes sont particuliers pour moi. Mais particulièrement après le témoignage de Nafi. et je ne sais pas si vous l'avez écouté, si vous ne l'avez pas encore écouté, vous devez aller l'écouter. Pour la petite histoire, déjà le déroulement de l'enregistrement, il était assez particulier. J'ai l'habitude de faire assez simple en termes de conditions pour enregistrer. Et là, il a fallu que je me déplace, que j'aille à Paris. Je précise parce que je déteste la ville. Non mais que j'aille enregistrer cet épisode au sein du GAMS et le GAMS si vous ne connaissez pas, vous devez connaître aussi. C'est une association nationale qui lutte contre les violences faites aux femmes et qui est partout là où il le faut pour toutes ces questions et spécifiquement pour ce qui concerne les afrodescendants. Donc voilà. Alors, on en revient au mouton. J'ai prévu de vous parler aujourd'hui d'un sujet. Et on va dire que ma semaine a fait que je me suis dit que j'allais vous en parler différemment. C'est-à-dire que ces derniers jours, j'ai eu à intervenir auprès d'une vingtaine de jeunes filles dans le cadre du programme ALBA. Donc ce sont des jeunes filles qui sont issues des banlieues et qui, pendant plusieurs jours, vont travailler sur des questions d'empouvoirment. Ouais, l'empouvoirment, je pense que c'est... que ça définit assez bien ce qu'ils font dans le cadre du programme ALBA, n'hésitez pas à aller également suivre ce programme-là, cette association-là. C'est vraiment top ce qu'ils font. Et du coup, lors de mon intervention, j'ai eu à raconter mon histoire, mon parcours, le but étant que ces jeunes femmes puissent s'identifier à une femme qui est racisée, qui est issue des banlieues. et qui a plutôt bien réussi sa vie. Donc ça a été un moment assez fort, puisque du coup, il y a eu beaucoup d'émotions. De part et d'autre, j'en ai eu également, parce qu'on a toujours des émotions, mais bon. Donc voilà, j'en ai eu également, et voilà, j'ai abordé mon enfance, les premières fois où j'ai été victime de racisme, la mort de mon père. Comment les formations que j'ai pu faire après sont un peu intervenues pile à des moments particuliers, la rencontre avec mon mari, enfin bref je leur ai raconté pas mal de choses. Et finalement ce qui en est ressorti, et après j'en ai rediscuté avec ma soeur parce que je me dis mais pourquoi ce que je dis ça suscite autant d'émotions ? Alors je pense qu'il y a le fait d'avoir le résultat final mais aussi le fait de se dire que tout dans mon histoire, je dis bien tout. laisse à penser que je suis exactement à la place à laquelle je dois être aujourd'hui. Vous savez, quand on vous parle de destinée, etc., c'était limite un peu romancé, mais j'ai l'impression que ça m'a laissé. Puis après, j'en ai discuté avec des proches autour de moi, et c'est ce qui en ressort beaucoup, c'est qu'aujourd'hui, quand les gens me voient, quand les gens savent ce que je fais et qu'ils ont idée de ce qui s'est passé dans ma vie, qu'ils m'ont connue enfant, ils se disent, non, t'es exactement là où tu devais être. C'est fou. Enfin, eux, c'est ce qu'ils me disent, que c'est fou. C'est le sentiment que ça laisse aux gens, mais pour moi, c'est naturel. Il n'y a pas de sujet, voilà. Et par contre... Et là, on va en venir au sujet du jour, c'est que j'ai conscience aujourd'hui, et ça c'est quelque chose que j'ai porté à ma conscience depuis plusieurs années, que c'est tout ce qu'on m'a transmis qui m'a permis d'être le professionnel, d'être la femme que je suis aujourd'hui. Et quand je parle de transmission, je pense qu'il faut entendre quelque chose de l'ordre de la conscience et de l'inconscient. Je pense que c'est ça le plus fort. Et d'ailleurs, c'est exactement le sentiment que j'ai eu, là, tout ce que je vous dis sur... Ce qui s'est dit après mon témoignage de mes échanges avec mes proches, c'est exactement, mais vraiment exactement le sentiment que j'ai eu en écoutant Nafi. Oui, parce que le témoignage de Nafi, je pense qu'il faut l'écouter deux fois pour entendre tout ce qu'il faut entendre. Il y a une première écoute où vous allez écouter un peu l'histoire, vous allez entendre l'histoire, vous allez entendre les éléments qui peuvent être de l'ordre du trauma, qui peuvent générer un choc. qui peuvent surprendre, qui peuvent susciter de l'émotion. Et puis, vous pouvez entendre aussi quelque chose qui se trouve à un autre niveau et qui, je pense, a été présent tout au long de son histoire. Et ça se situe au niveau de la transmission. Voilà, il parle, Nafi, de comment elle a hérité des croyances et des schémas de vie de sa famille. Elle parle de ses trois femmes, sa mère, sa grand-mère et sa tante maternelle. Elle se rappelle aussi à un moment donné de son histoire quand elle arrive en France des phrases que sa grand-mère lui disait. Et elle le dit au tout début de son témoignage lorsqu'elle parle de ces trois femmes, donc sa mère, sa grand-mère et sa tante, que ce sont des femmes qui ont fait d'elle ce qu'elle était. Et je pense qu'il faut entendre quelque chose à ce niveau-là. Aujourd'hui, nous allons parler donc de transmission, de transmission consciente, de transmission inconsciente. d'exemples de traumas transgénérationnels, parce que le trauma transgénérationnel se situe au niveau de la transmission inconsciente. Et voilà, c'est parti, on y va. Qu'est-ce que c'est que la transmission ? Donc déjà, la transmission, on peut la définir comme tout ce qui se passe d'une génération à une autre, que ce soit sur le plan matériel ou immatériel. Et donc, par immatériel, est-ce que c'est surtout ça le plus important, finalement ? Oui. Alors on va parler de valeurs, de croyances, de comportements. Et donc il faut, comme je vous l'ai dit, mettre en lumière le fait qu'il y a deux types de transmission, la transmission consciente et la transmission inconsciente. La transmission consciente, on peut dire que ça va être l'ensemble des valeurs, des traditions et des croyances qu'on va décider de transmettre de manière intentionnelle. Et donc là, le parent, les grands-parents, etc., la famille, a bien conscience qu'ils transmettent, par exemple, l'importance du respect. de transmettre une certaine vision de la réussite, de la vie. Et donc, par exemple, un exemple concret du quotidien, ça pourrait être celui des parents qui inculquent à leurs enfants l'importance d'être économiquement indépendants, de respecter les aînés, etc. Et donc là, pour vous donner un autre exemple qui peut bien schématiser ce qui se passe dans les communautés traditionnelles, chez les afrodescendants, c'est par exemple le nom, le prénom en Afrique. Et le fait, alors ça peut être le nom, mais particulièrement le prénom, parce que le prénom, il y a un choix qui se fait dessus. Il y a un adage qui dit, en Afrique, qu'un enfant va porter les qualités et les défauts de son homonyme. C'est fort et des fois, on ne s'en rend pas compte. Donc, il y a peut-être aussi à ce niveau-là, deux niveaux de conscience. Quand on va donner un prénom, en Afrique, ça va avoir une importance. Et très souvent, on va donner le prénom d'une personne qui nous est chère, dont les qualités... sont reconnues, etc. Alors ça, c'était à la base. Maintenant, aujourd'hui, il y a des gens qui se retrouvent obligés de donner des homonymes parce que les premiers homonymes, en général, c'est les parents. C'est ce qui fait beaucoup. Les premiers enfants, c'est les parents. J'ai moi-même appliqué le truc. Ma fille, elle porte le nom de ma belle-mère. Mon fils, il porte le nom de mon père. Mais du coup, il y a dans beaucoup de familles africaines aujourd'hui l'obligation presque systématique de faire porter aux enfants le prénom d'un parent. Et d'ailleurs, c'est ce qui a fait débat pendant un certain temps, c'est-à-dire que je crois que ça fait encore débat aujourd'hui, je ne sais pas, mais en tout cas, il y avait un moment où on parlait beaucoup des prénoms dits fashion modernes et qui n'étaient pas à l'image des prénoms africains, des prénoms dits africains. Donc, pour en revenir à ce que je disais sur la transmission par rapport aux noms africains, regardez autour de vous les homonymes. et comparer aux personnes de qui elles portent les noms. Regardez si elles ont des qualités. et des défauts en commun. Et honnêtement, vous serez surpris. Moi, j'en ai fait l'expérience, je le dis avec mes propres enfants et avec moi-même parce que moi, je porte le nom, par exemple, de ma tante maternelle et les gens me disent tout le temps déjà qu'on se ressemble et que la ressemblance est frappante. J'y vais en Guinée, au Bled, les gens qui ne m'ont pas vue pendant un certain temps, ils m'appellent par le prénom d'une de ces filles parce que pour eux, on a la même tête. Ma mère me dit tout le temps que j'ai des expressions et des mimiques. Enfin bref, c'est tout un truc où on peut effectivement s'interroger sur le fait que donner un prénom, ce n'est pas simplement donner un prénom, il y a toute une transmission qui se fait derrière. Et d'ailleurs, quand je parle de transmission consciente, est-ce que lorsqu'on va donner le prénom à l'enfant en se disant qu'on va lui faire porter le prénom de telle ou telle personne, est-ce qu'on a conscience du fait qu'on souhaite qu'il porte ses qualités ou on lui donne ce prénom-là juste en disant... C'est pour me rappeler de cette personne-là. Je parle par exemple d'un parent qui n'est plus de ce monde. Et à ce moment-là, peut-être qu'il y a quelque chose qui n'est pas conscient, qui n'est pas conscientisé, mais qui doit l'être. Parce que du coup, il faut se dire que potentiellement, cet enfant va porter les qualités du parent. Du parent dont on fait porter le nom à l'enfant. Donc voilà. Parlons de la transmission inconsciente. Dans la transmission inconsciente, on va avoir des schémas, des comportements. ou des croyances que l'on transmet sans en avoir pleinement conscience. Donc là, pour en venir au prénom africain, des fois, on peut se retrouver dans de la transmission inconsciente. Et par exemple, il va y avoir les peurs, les blessures émotionnelles non résolues des parents qui vont influencer les enfants, mais de manière subtile. On pourrait illustrer ça par une personne qui réalise plus tard dans la vie qu'elle a hérité de l'anxiété de ses parents, par exemple face aux défis, sans que ces derniers explicitement disent qu'il fallait être anxieux. Aujourd'hui, je vais très longuement m'arrêter sur la transmission inconsciente et je vais aussi vous parler du trauma transgénérationnel. Parce que c'est un sujet extrêmement important. Et pour illustrer ça, je vais mettre en avant le fait qu'en psychanalyse, on parle de l'inconscient comme d'un lieu qui précède le sujet, qui précède la personne. Je ne sais pas si vous avez saisi le truc. Ça veut dire que qu'il que tu sois aujourd'hui, il y a une part de toi qui était là avant ta naissance. et qui est là en toi tout de suite. Et là encore, j'aimerais faire une aparté, et je n'ai pas encore bien saisi où ça pourrait se situer, mais dans l'inconscient, il y a aussi l'idée que tout ce qu'on reflète aujourd'hui dans la société, par rapport à notre identité, c'est-à-dire, là je vais parler de moi, par exemple, d'être une femme noire, issue de l'immigration, malienne et guinéenne, enfin etc., je ne vais pas refaire tout le truc. Mais tout ce qui va se référer à mon identité et à l'histoire de mes groupes d'appartenance vont faire partie de ce lot. Ben oui, finalement, on m'a transmis de manière inconsciente tout ce qui avait attrait à mon identité, sans même qu'on ait pu poser de mots dessus. Et là, quand je vais parler de ça, il va falloir comprendre et entendre que ça va être tout ce qui va être attrait à l'histoire, sur la domination de race, sur l'appartenance ethnique, etc. Il y a un premier niveau déjà, je pense qu'il faut entendre, de la transmission au niveau de la conscience, qui n'est pas de l'ordre du trauma, mais qui va être lié à l'histoire et à notre identité. Donc là, il faut se dire quand même que la transmission, c'est la part de vous qui fait de vous un sujet et que vous n'avez pas choisi en toute conscience et en connaissance de cause. Et c'est là que ça a toute son importance en thérapie. Mais j'y reviendrai. Donc, on va parler du coup du trauma transgénérationnel. Parce que dans la transmission inconsciente, il y a aussi le trauma transgénérationnel. Et c'est quand même une grosse part du gâteau dans le sens où, lorsqu'on va être amené à travailler avec des personnes en thérapie, on va souvent se rendre compte qu'il y a des choses qui l'ont précédé et qui ont un impact sur sa vie. En tout cas, c'est le constat que je fais en cabinet. Donc, le trauma transgénérationnel se transmet lorsque les effets d'un traumatisme vécu par une personne ou une génération sont inconsciemment ou indirectement transmis aux générations suivantes. Et ce phénomène, il a été étudié en profondeur, en psychologie, en psychanalyse, et il montre que des événements traumatiques vécus par un individu, ils peuvent influencer ses descendants, même s'ils n'ont pas directement vécu ces événements. Et comment ça c'est possible ? C'est possible parce qu'il y a des mécanismes de transmission. Le premier mécanisme de transmission dont je vais vous parler, c'est la transmission psychologique et comportementale. Un parent traumatisé, par exemple, il peut, sans s'en rendre compte, projeter ses peurs, ses angoisses ou ses comportements de défense sur ses enfants. Par exemple, une mère ayant subi un traumatisme peut devenir surprontécrice, anxieuse ou émotionnellement distante. Ses enfants vont observer et absorber ces comportements. ils vont peut-être développer des schémas similaires, même sans connaître l'origine du traumatisme. Donc là, on est dans la transmission psychologique et comportementale. Ensuite, on va avoir une transmission par le silence ou les non-dits. Et là, de manière très caricaturale, on peut parler des secrets de famille. Donc ce sont des traumatismes qui vont être souvent accompagnés de silence. Et en fait, ces non-dits vont créer une espèce d'atmosphère lourde et inexplicable que les descendants ressentent sans toujours comprendre. Donc ce silence autour du traumatisme, il peut générer par exemple des troubles identitaires, de la culpabilité ou un sentiment de malaise qui va être diffus chez les descendants. Et là, c'est vraiment compliqué parce qu'on sait qu'il y a quelque chose qui ne va pas, il y a un malaise qui est profond et qui est ressenti individuellement, mais on ne sait se l'expliquer. Donc la troisième transmission, ça va être la transmission biologique et épigénétique et là on est sur des études qui sont assez récentes. qui vont suggérer que les traumatismes peuvent modifier l'expression des gènes, ce qui affecte la manière dont les descendants gèrent le stress ou les émotions. Et là, les études qui ont été menées, par exemple, ce sont sur les survivants de l'Holocauste, et ils montrent que ces survivants-là, ils ont un taux de cortisol, donc l'hormone du stress, différent, ce qui les rend plus vulnérables à l'anxiété et à la dépression. Donc je vous laisse imaginer cela. Ces études, particulièrement, c'était sur les survivants de l'Holocauste. Imaginez-les sur les descendants. de l'esclavage, de la colonisation, etc. Le quatrième mécanisme de transmission, c'est celui que je vais appeler social et familial. Et on va être dans des croyances et des schémas de vie qui vont se transmettre à travers des interactions sociales et familiales. Par exemple, on peut illustrer cela par une personne qui a subi un traumatisme et qui va développer un rapport conflictuel à l'autorité ou aux relations. Et il peut être imité, simplement imité, par ses enfants. Et ces derniers, je dis simplement, mais... Une fois que c'est intériorisé, ils peuvent développer et reproduire ces comportements autodestructeurs ou adopter des attitudes négatives envers les autres sans en comprendre l'origine. Donc ça peut ressembler un peu au premier mécanisme de transmission dont j'ai parlé, mais là on va dire qu'il y a quelque chose de l'ordre du comportemental plus plus plus, puisqu'on va être dans la répétition d'un schéma, d'une façon de se comporter et d'être dans les relations familiales et sociales. Et donc là, pour vraiment illustrer tout ça, j'aimerais vous donner des exemples de traumas qui peuvent être transgénérationnels et de comment ils ont pu se transmettre, mais de manière très simple. Je vais essayer de vous en donner 6-7 et peut-être qu'on fera un cas clinique à la fin. Pas peut-être, je vais vous proposer un cas clinique. Allez, c'est parti. Premier exemple de trauma, la guerre et une peur constante. Donc la transmission, ça serait le fait que le parent qui a survécu à des situations de danger il développe une peur du monde qui va communiquer de manière involontaire par une vigilance accrue vis-à-vis de son enfant. Et cet enfant qui va grandir dans cet environnement-là, il va apprendre à percevoir le monde comme étant menaçant. Donc je vous laisse imaginer ce que ça peut donner pour un adjute. Deuxième exemple, le travail forcé et les humiliations coloniales. Et là, je pense que je vais m'arrêter un petit peu. Oui, parce que là maintenant, je regarde beaucoup ce qui se passe sur TikTok et j'ai vu une polémique. où il y avait un influenceur qui parlait des afrodescendants, de la peur des chiens, et en fait, il mettait en évidence un peu les conséquences de la colonisation en termes de trauma. Alors, sans dire vraiment que c'était des traumas, mais voilà, il a fait le parallèle. Et puis, il y en a un autre qui est arrivé derrière en disant, oui, mais les Africains n'ont pas directement vécu, en tout cas les Africains d'aujourd'hui, ils n'ont pas des ancêtres qui ont vécu l'esclavage, puisque ceux qui ont vécu l'esclavage ont été déportés. Donc, ce n'est pas faux. Et en même temps, là, on néglige la notion de trauma, parce que si on l'entend dans sa définition, on comprendrait qu'être exposé de manière directe ou indirecte à une menace, à une menace de l'ordre psychologique, peut faire trauma. Le simple, et je mets les guillemets, fait de savoir que ses pairs... Les personnes qui partagent la même couleur de peau, qui se trouvent dans un pays à côté ou, je ne sais pas, dans le village d'à côté, sont exposées à l'esclavage et donc sont réduites à l'esclavage. peut faire trauma chez les personnes qui n'ont pas été esclavagisées. Et donc c'est pour ça qu'il y a aussi la notion de mémoire collective ou de souffrance collective qui est transmise à travers les récits, les silences ou même les attitudes, parce que les générations qui ont subi l'esclavage ont intégré des comportements de survie dans un contexte de déshumanisation et de violences répétées. Et même si l'esclavage est aboli, il y a quelque chose qui s'est transmis de cet ordre-là. Cette mémoire dont je vous ai parlé, elle porte un poids qui va être identitaire, une intériorisation d'un sentiment de dévalorisation ou d'infériorité qui peut pousser les descendants à se percevoir à travers un prisme d'autoprotection, de méfiance et en particulier vis-à-vis de la société ou des autorités. Donc là il faut entendre un rapport de domination etc. Le sujet est assez complexe et vraiment je pourrais apporter plus d'éléments mais là on se retrouve dans le... Dans un contexte où je vais citer des exemples et puis si besoin, peut-être qu'il fera le sujet d'un podcast dans son intégralité. Troisième exemple au niveau du trauma transgénérationnel, l'exil et le déracinement. Le parent qui n'a jamais eu l'impression de se poser ou qui a été déraciné, il va rester par exemple distant ou insatisfait et il peut communiquer à son enfant le sentiment de ne jamais appartenir à un lieu ou à une communauté. Et ça, je pense que les enfants issus de l'immigration peuvent très bien l'illustrer et le raconter. Moi, par exemple, quand je vais au Mali, on m'appelle la Parisienne. Et le nombre de fois où en France, on m'a renvoyée à mes caractères d'afro-descendante, de manière raciste ou pas, je ne le compte pas. Alors, quatrième exemple. Et là, je viens de me souvenir que je ne vous ai pas dit en tout début, mais je vais le mettre dans la description. C'est un épisode qui peut être rigueur, clairement. Et du coup, on va quand même parler de sujets un peu touchy et des sujets auxquels vous pouvez être sensible. Donc, je le mettrai dans la description. Là, par exemple, on va parler des violences conjugales. Donc, quatrième exemple, les violences conjugales. Un parent qui a vécu des violences conjugales, il peut, par exemple, transmettre... par ses réactions une acceptation passive de la violence. Et l'enfant qui va absorber ce modèle, il peut reproduire cette tolérance dans ses propres relations. Donc cinquième exemple, un exemple de trauma au niveau de la discrimination et du racisme. La souffrance vécue par le parent, qui va être victime de discrimination et de racisme, elle peut affecter sa confiance en soi. Et c'est quelque chose qu'il peut communiquer de manière involontaire à son enfant. Et celui-ci va intégrer une image de soi qui va être dévalorisée et qui va être influencée par les expériences parentales. D'où l'importance de parler de ces sujets et de ne pas les minimiser. Donc sixième exemple de trauma qui peut être de l'ordre du transgénérationnel, ça peut être un deuil non résolu, entre guillemets non résolu. pas trop ça, mais bon. Un deuil qui ne va pas être abouti, même si ma conception du deuil est quand même assez spéciale. Je vais dire deuil non abouti. Allez, un deuil non abouti. L'idée, c'est que le parent qui va avoir une douleur par rapport à un deuil, qui va souffrir d'un deuil, qui ne va pas l'exprimer, il va sans le vouloir créer une ambiance d'anxiété et de perte. Et l'enfant... peut, sans explication notable, sans explication en tout cas de quelque chose qui est de l'ordre du verbalisé, il peut ressentir cette peur de l'abandon et il va l'intégrer dans ses propres relations. Donc un autre exemple, le septième, de trauma qui peut être de l'ordre du transgénérationnel, c'est par exemple le parent qui va être confronté à une pauvreté extrême et qui va avoir une peur du manque. Il va transmettre cette peur constante du manque par des comportements d'accumulation ou de prudence excessive. L'enfant, même s'il est dans un contexte plus stable, il peut reproduire cette crainte et cette propension à être dans l'accumulation. Huitième exemple, l'échec professionnel et la honte. Donc, l'échec est vécu comme honteux par le parent, il se traduit par des attentes irréalistes et une peur de l'échec dans l'éducation de l'enfant. Et ce dernier, il va développer une pression intense à la réussite et un perfectionnisme, par exemple, paralysant. Donc voilà, là on est vraiment sur de l'exemple du comment ça peut se transmettre un trauma transgénérationnel de parent à enfant. Bien sûr, le trauma peut être bien antérieur aux parents, mais du coup, ça vous donne une idée de comment ça peut se transmettre de manière... Et là, on est vraiment sur du comportemental et du psychologique, on n'est pas sur de l'épigénétique, etc. Mais je trouvais que ça pouvait être intéressant que vous vous rendiez compte. comment ça peut se transmettre du parent à l'enfant, parce que déjà j'ai beaucoup de jeunes parents qui m'écoutent, et j'ai aussi des enfants qui vont peut-être se sentir concernés par un de ces exemples, par rapport à la relation qu'ils ont eue avec leurs parents. Donc passons au cas clinique. Et là j'emploie le terme cas clinique, mais du coup c'est plusieurs cas cliniques que je condense en un, et pour lequel je vais mettre en évidence... Une histoire avec des noms qui vont être inventés et finalement il n'y a pas d'individu dernière. Donc je vais vous parler de l'histoire de Fatou, une femme d'une trentaine d'années, et de sa mère Aïcha. Donc imaginons l'histoire de Fatou. C'est une femme d'une trentaine d'années, comme je vous ai dit, qui a du mal à établir des relations saines et épanouies avec les hommes. Elle est souvent anxieuse et méfiante et évite tout engagement amoureux. Au cours d'une thérapie, elle découvre que sa mère, Aïcha, avait vécu une grande souffrance liée à un traumatisme qu'elle n'avait jamais révélé à ses enfants, Aïcha avait été violée dans sa jeunesse, une histoire cachée dans le silence et la honte. Donc, il y a eu une transmission de l'ordre du psychologique et de l'émotionnel. Bien qu'Aïcha n'ait jamais parlé de son viol à sa fille Fatou, elle avait développé une attitude méfiante vis-à-vis des hommes et avait transmis cette méfiance à Fatou par ses comportements protecteurs, ses conseils réticents sur la sexualité. et son discours sur la dangerosité des relations amoureuses. Fatou a donc grandi avec un sentiment d'insécurité, reproduisant sans le savoir les craintes de sa mère. Et donc là, on a un parent qui cache le traumatisme, mais la peur et la méfiance dans ses interactions affectives, ils vont créer une distance émotionnelle que l'enfant va percevoir. Et l'enfant, il va intérioriser cette crainte dans ses relations intimes. Ensuite, on a une transmission par le silence. Le silence d'Aïcha autour de son traumatisme a créé un ondit qui a pesé sur Fatou. C'est un silence qui a généré une espèce d'angoisse diffuse, un sentiment que quelque chose n'allait pas, sans que Fatou ne puisse expliquer pourquoi elle ressentait cette peur de l'intimité. Et Fatou, ne comprenant pas la source de cette peur, elle a commencé à adopter des comportements d'évitement dans ses relations, en reproduisant encore une fois inconsciemment le traumatisme de sa mère. Et il peut aussi y avoir une transmission de l'ordre de l'épigénétique. Donc, pour rappel, j'avais dit plus tôt... qu'il y avait une étude qui avait montré que certains traumas pouvaient affecter la régulation du stress chez les victimes et leurs descendants, et bien là on peut aussi imaginer que Fatoua ait hérité à un niveau biologique d'une sensibilité plus accrue au stress ou à l'anxiété en raison du traumatisme non résolu de sa mère. Donc cet examen clinique que je viens de faire, il peut par exemple s'appuyer sur si vous avez envie d'aller plus loin par rapport à ça, et d'essayer de comprendre par... Un livre qui a été écrit par Anans Lange-Zenberg, je vais peut-être écorcher son nom, Aïe mes aïeux, et il est vraiment super, il explique comment des traumatismes non traités, comme des abus ou des violences, peuvent ressurgir dans les générations suivantes à travers des troubles psychologiques, des maladies ou des comportements récurrents. Mais l'idée, pour conclure, c'est que le trauma transgénérationnel n'est pas seulement une transmission de souvenirs, mais une empreinte bien profonde, laissée dans la psyché et même dans le corps. Dans le cas de Fatou et Aïcha, par exemple, on peut se dire que le viol subi par Aïcha est un exemple de trauma sexuel transgénérationnel qui a marqué leur rapport aux autres et à elle-même malgré le silence. Donc ça montre l'importance de briser ce cycle, notamment à travers des thérapies qui permettent de rendre conscience ce qui a été transmis inconsciemment et de travailler sur la guérison, tant pour soi que pour les générations futures. Donc pour conclure... au niveau de cet épisode, je pense qu'on est déjà dans la conclusion, ce que je viens de dire sur l'importance de briser le cycle. Moi, j'ai souvent en thérapie des personnes qui ne se sentent pas encore prêtes pour aller explorer un peu leur histoire familiale, en tout cas l'histoire familiale qui les a précédées. Et je comprends la résistance parce que ce qui est dit, c'est que je ne veux pas porter quelque chose sur mes épaules qui ne m'appartient pas. Sauf que... Et souvent, en thérapie, je ne le dis pas tout de suite, mais j'essaye de le faire entendre, c'est que parfois, on porte déjà le fardeau qu'on ne souhaite pas porter de manière inconsciente. et un fardeau dont on ne sait pas ce qu'il est. Donc je vous invite à vraiment... Tenir compte de cet aspect-là. Je vous invite également à aller vous faire accompagner lorsque vous décidez d'aller investiguer dans l'histoire de vos parents, de vos grands-parents, de vos aïeux. Parce que vous pouvez parfois découvrir des choses pour lesquelles vous n'êtes pas prêt. Et ce n'est pas négligeable d'avoir un endroit sèche dans lequel vous pouvez déposer et dans lequel ces choses-là peuvent être accueillies. Le meilleur moyen d'acquérir du self-power, c'est de porter à la conscience ce qui est dans la conscience. Pas tout, pas tout, mais quand même. Et donc, ça va parfois demander un travail d'introspection, de s'interroger quand on a des comportements, quand on pose des actes pour lesquels on a l'impression qu'il n'y a pas de contrôle, ça nous échappe, il y a un malaise. Et je pense que quand on a ces comportements-là, qu'on n'arrive pas à contrôler, sur lesquels on n'arrive pas à avoir La main, entre guillemets. Même s'il n'est pas possible d'avoir du contrôle sur tout, je pense que c'est intéressant d'aller mettre le doigt dessus et d'y aller. Et de se faire accompagner. Je le redis, le meilleur moyen d'acquérir du self-power, c'est de porter à la conscience ce qui est dans l'inconscient. Et cela passe parfois par les transmissions et par ce que nos parents nous ont donné. C'est peut-être très à l'air du temps ce que je vais ajouter là, mais je me dis que c'est quelque chose qu'on doit peut-être à nos enfants et aux générations futures. Oui, parce que chaque génération a son lot d'épreuves, a son lot de défis. J'ai à peu près conscience des défis de la génération de mes parents. Je me dis qu'on a la chance parce que les dispositions nous le permettent, alors que ce n'était pas le cas pour nombreux de nos parents. Et en même temps, le fardeau de devoir, entre guillemets, ou pouvoir s'occuper de cela. Mettre un point final à tous ces cycles. qui causent des souffrances pour en créer des nouveaux, pour nos enfants et les générations futures. Voilà, c'était tout pour aujourd'hui. Je pense que la prochaine fois, nous allons nous retrouver à parler d'un sujet lié à la transmission, mais dans un autre contexte. Vous allez découvrir un témoignage dont les thèmes ne sont que très, trop rarement abordée. Voilà, voilà. Je vous dis à très bientôt pour de nouvelles aventures et je vous remercie pour votre écoute. Vous écoutiez Divan Noir, le podcast des femmes invisibilisées et des femmes qui vous ressemblent. Merci de nous avoir écoutés et entendus. Si vous avez apprécié cet épisode, merci de nous mettre 5 étoiles. C'est le meilleur moyen de participer à nous rendre visibles. Vous pouvez me suivre sur mes différents réseaux sociaux et vous pouvez aussi m'écrire via mon adresse e-mail, si vous aussi. ou souhaitez partager votre histoire. Toutes les informations figurent dans le descriptif de cet épisode. A bientôt pour de nouvelles aventures. Mariam, votre sociothérapeute.