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Grosse rageuse !

#28. La transidentité dans le business x Alan de l'Agence Alan

#28. La transidentité dans le business x Alan de l'Agence Alan

59min |26/06/2025
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Grosse rageuse !

#28. La transidentité dans le business x Alan de l'Agence Alan

#28. La transidentité dans le business x Alan de l'Agence Alan

59min |26/06/2025
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Description

T’as déjà tout perdu à cause de ton prénom ?
Lui, oui.


Alan est une personne transgenre qui politise son taf : avec l’Agence Alan, il aide les freelances atypiques à prendre leur place grâce à une com’ plus safe, plus humaine et surtout plus honnête. Photographe de formation, réal de docu aujourd’hui, il raconte comment il a dû tout reconstruire après son coming out trans : SEO cramé, fiches Google disparues, clients perdus — et pourtant, toujours debout.


Dans cet épisode :

  • Le vrai prix d’un coming out quand t’es indépendant·e.

  • Comment on pose ses limites face aux questions qu’on ne devrait jamais poser (« c’est quoi ton dead name ? »).

  • Pourquoi dire « femmes ET minorités de genre » peut transformer ta com’ et faire que tout le monde se sente à sa place.

  • Ce que ça coûte émotionnellement de vivre, bosser et exister quand ton identité est politique.


💡 Ses recos culturelles :

  • Lauren Marx — comédienne, metteuse en scène, critique ciné : génie brut.

  • Transphobia de Eli Hervé — une enquête coup de poing sur la désinformation et la haine anti-trans dans les médias.


🔗 Ses liens :
👉 Site
👉 Instagram
👉 LinkedIn


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non-binaires et aux mecs trans en ayant une communication féminin, ça pose des questions. Et moi, c'est vrai que je l'ai vécu. Il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou je voulais. Et en fait, ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur corps.

  • Speaker #1

    Hello, ma star ! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Grosse Rageuse, le podcast des meubles qui en ont marre qu'on leur dise comment exister. Moi, c'est Jasmine. Et après des années à me détester parce que je ne compterais dans aucune case, j'ai décidé d'envoyer péter les inventions et d'enfin m'assumer, pour le meilleur et pour le pire.

  • Speaker #2

    Je suis Mme Alaba Edgar, avec Tartine.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je suis coach et mentor en storytelling, personal branding et copywriting. En bref, je suis celle qui t'aide à transformer les « t'es trop inspirante » en « shut up and take my money » . Ici, on parle cash, on assume nos galères et on se donne la permission d'être qui on est vraiment. Sans filtre, sans bullshit,

  • Speaker #0

    juste nous.

  • Speaker #1

    Alors mets tes écouteurs, prends ton petit carnet, ton café, ton thé et même ton matcha et prépare-toi à un moment de pure folie. Allez, c'est parti mon kiki !

  • Speaker #2

    Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de podcast de Grosse Rageuse. Aujourd'hui, je ne suis pas toute seule, je suis accompagnée de Alan, Alan Raymond. Bonjour Alan.

  • Speaker #0

    Salut.

  • Speaker #2

    Alors déjà avant de commencer, comme d'hab, je ne vais pas beaucoup innover, je vais te remercier d'avoir accepté cette invitation, d'avoir accepté d'être avec moi aujourd'hui dans Grosse Rageuse Est-ce que tu peux te présenter Alan ?

  • Speaker #0

    Oui avec plaisir, je suis ravi d'être là déjà pour parler un peu de plein de choses Je m'appelle Alan, je suis photographe de formation et depuis quelques années je fais de la communication, j'accompagne les freelances qui se sentent atypiques Merci. à prendre leur place grâce aux outils de com et un travail sur leur positionnement, leur image, mais aussi les aider à développer leur communication sur tout un tas de sujets. Donc j'ai un peu politisé mon travail et ma manière de faire de la communication.

  • Speaker #2

    Quand tu parles de politiser ton travail, de quoi on parle ?

  • Speaker #0

    Vaste sujet ! On parle de plein de petites choses qui sont un peu des angles morts dans le travail en général et dans... dans le travail des entrepreneurs et la manière d'accompagner les gens en général. En tout cas, c'est des enclements pour les personnes qui ne sont pas concernées. Quand je parle de politiser, c'est-à-dire qu'on prend en compte, dans notre manière d'aborder les gens, de travailler avec eux, de leur proposer des offres, mais aussi la manière dont on construit nos offres et la manière dont on travaille concrètement. On prend en compte les violences systémiques, les oppressions, et aussi on essaie de mettre du soin. en fonction des besoins des uns des uns des autres. Donc pour le dire grossièrement, on fait au max pour être le plus safe possible, le plus bienveillant, le non-jugeant, travailler sur nos propres biais et nos propres clichés pour ne pas reproduire ça, ne pas reproduire de violences systémiques, de micro-violences ou de moments gênants, ou en tout cas mettre les gens au maximum à l'aise dans le travail qu'on fait avec eux, avec elles, et aussi dans ce qu'on leur propose concrètement.

  • Speaker #2

    L'idée, c'est quand même d'humaniser le travail, d'essayer de plus humaniser par rapport à ce qu'on nous propose aujourd'hui.

  • Speaker #0

    J'ai l'impression qu'il y a plein de gens qui pourraient dire qu'ils sont humains. Pour moi, c'est un peu aller au-delà. C'est vraiment travailler sur nos ombres. Qu'est-ce qui fait que j'ai un cliché quand je pense à un chef d'entreprise ? Tout de suite, je vois un homme blanc, six, debout dans un endroit immaculé en gérant une équipe, et pas une femme noire. habillé avec de la couleur ou une personne en situation de handicap, une personne handicapée. Donc en fait, c'est plutôt travailler sur nos propres biais à nous. Donc pour moi, ce n'est pas qu'une question d'humain, c'est une question de travail en fait, c'est une question de bosser concrètement ces sujets pour devenir meilleur, mais ce n'est même pas ça. C'est pour bien traiter les gens. On peut se dire humain, mais sans avoir... en ayant des angles morts, en fait, parce qu'on n'est pas concerné par certains sujets. Et on peut penser qu'on accueille tout le monde sans s'être mis dans la tête et la peau des gens pour créer concrètement les conditions qui permettent aux gens de venir et à tout le monde de venir. Ça m'est déjà arrivé de discuter avec des médecins ou des dentistes, pour le coup, qui me disaient, moi, mes collègues... Ils pensent être safe et bienveillants pour tout le monde, mais de fait, il n'y a que des gens qui leur ressemblent qui viennent et ils ne sont pas du tout safe pour les personnes LGBT ou les personnes grosses parce qu'ils n'ont pas travaillé ces sujets-là, ou en tout cas ils ne savent pas par quoi ça passe concrètement pour mettre les gens à l'aise et pour être sécurisants, bienveillants et non-jugeants avec différents types de publics.

  • Speaker #2

    Et comment on passe de la photographie à accompagner les gens dans ça, en fait ? Comment on prend conscience qu'il y a un besoin ? Pourquoi on décide de commencer à travailler sur ses biais et d'aider les gens ?

  • Speaker #0

    C'est plus mon parcours perso. Il y a plusieurs choses. C'est que déjà, en tant que professionnelle dans la photo, j'ai fait plein de choses différentes. Et puis, je me rendais bien compte que ce que je préférais, c'était vraiment l'humain, le one-one, aider les gens qui me... qui avaient des entreprises un petit peu similaires aux miennes, donc des petites équipes, des collectifs, des artistes, des freelances, des musiciens, des créateurs, des artisans, et pas forcément des très grosses boîtes, parce que j'ai bossé avec beaucoup de gens différents et dont des très grosses boîtes, par exemple. Et je me sentais frustrée, moi, de ne pas aider les gens plus que ça et de venir juste faire quelques photos et repartir, alors que quand je travaillais avec des freelances, il y avait vraiment un sujet qui s'ouvrait quand on commençait à faire des images. On parlait de honte, on parlait de peur, on parlait de ne pas oser se montrer, on parlait de rôle de genre, de comment être crédible dans le travail. Et en fait, j'avais commencé à ouvrir une brèche et je donnais des conseils en com aux freelances qui venaient me voir et je commençais à travailler avec eux, mais sans vraiment facturer ce temps-là, en mode plus on s'aide les uns les autres et on se conseille. Et je me rendais bien compte que ce que je faisais en shooting, c'était ouvrir un espace qui permettait... de faire plein d'autres choses par la suite, en tout cas d'approcher certains sujets. Et je n'avais pas forcément les moyens, parce que je ne vendais pas de la com pour prendre soin de ce qu'on ouvrait pendant cet espace-là. Donc, je me retrouvais souvent à sortir de mon cadre. Les gens venaient pour une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie, et on dépassait souvent le cadre. J'abordais des sujets plus profonds, et on aurait pu, parce qu'ils avaient commencé à partager ces sujets-là. on aurait pu bosser et j'aurais pu les accompagner. Mais comme c'est ce passe que je vendais, on était un peu frustrés ensemble. Et aussi, je les laissais repartir avec leur sujet sur le cœur et je n'avais pas forcément prévu d'en faire quelque chose. Donc, je me retrouvais un peu à écouter les gens et à les conseiller sans vraiment l'avoir formalisé. Et il a fallu moi-même que je me forme et que je me forme aussi sur la partie systémique et violents systémiques et féminisme et... et intersectionnalité. Mais ça, c'était plutôt un travail perso que j'ai fait en parallèle. Et du coup, j'ai mis ces trucs-là dans mon travail, à la fois par envie, parce que je voyais qu'il y avait un besoin, mais aussi par nécessité. Parce qu'en cours de route, j'ai fait mon coming out trans. Donc, je suis une personne trans. Et j'ai réalisé ça super tard. Donc, j'avais 29 ans. Et il m'a fallu du temps, moi, pour comprendre, le dire, faire mon coming out. Et du coup, je me suis retrouvée moi-même. dans la case minorisée, alors que ce n'était pas mon plan de carrière. Et donc, je me suis retrouvé photographe trans et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais avec ça ? Et ça a amené aussi plein d'autres réflexions sur une révolution globale de ma vie pro et perso. Je me suis rendu compte que j'avais de la frustration dans mon travail, je n'étais pas vraiment au bon endroit, je n'avais pas osé faire de la com parce que je ne me sentais pas légitime. Et en fait, du fait d'être... de comprendre que j'étais trans, j'ai réalisé que moi-même j'avais aussi un besoin de travailler avec des personnes qui me sécurisent. Je ne peux plus travailler au salon de l'automobile entouré de mecs 600 costards qui passent leur journée à me dire est-ce que tu es une meuf ou un mec et qui me met genre et qui ne respecte pas ou alors faire des coming out au téléphone à chaque appel de clients ou à chaque rendez-vous, répondre à des questions gênantes. Donc j'ai dû moi-même déjà pour moi réadapter mon travail pour que je me sente mieux. d'un point de vue des violences systémiques, mais aussi pour mettre plus de sens dans mon travail parce que je n'avais pas réalisé que je n'étais pas tout à fait au bon endroit. Et la lecture que j'en ai aujourd'hui, c'est en fait que la photo, c'était un peu une manière de me cacher. Et j'ai un peu traversé ce truc-là. Et aujourd'hui, je me montre un peu plus, je prends un peu la parole, j'essaye en tout cas. Et j'ai politisé ma manière d'aborder à la fois la photo et la communication.

  • Speaker #2

    J'ai une question, mais j'ai peur qu'après je fasse partie des personnes qui posent des questions. C'est la question ultra transphobe.

  • Speaker #0

    Je suis là pour ça. Franchement, je suis là pour répondre aux questions.

  • Speaker #2

    J'ai une question. En fait, quand tu parles de ton coming out, alors ça fait trop, j'ai des amis noirs. J'ai des potes, forcément, vu le milieu dans lequel j'ai évolué, vu mes choix de vie, mon lifestyle. Donc j'ai pas mal de... potes qui sont trans, etc. Et en fait, moi, ce qui m'a vite fait fait tilter, ou pas en fait, parce que j'arrive avec mes présupposés, c'est cette impression que tu donnes de ne pas avoir fait partie de la communauté LGBT avant ton coming-out trans. Et c'est vrai que moi, j'ai... Ce truc de « avant la transition, mes potes étaient lesbiennes » . Je ne sais pas si je peux le dire comme ça. Maintenant, elles sont hétéros, tu vois. Ce n'est pas ton cas ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Non, ce n'est pas forcément une mauvaise question.

  • Speaker #2

    Tu as vu comme j'ai marché ?

  • Speaker #0

    Oui, mais bien formulé. En fait, c'est une vraie question. Est-ce que j'étais déjà dans ce milieu-là avant ou pas ? Je pense que ça a du sens d'y répondre. Moi, pas du tout. En fait, je regardais de loin le drag, la scène drag. J'avais quelques potes gays, pans, lesbiennes, mais vraiment un peu de loin. Et tant que ça, j'avais peut-être deux, trois potes concernés. La question de la non-binarité n'était pas non plus autour de… de la transidentité n'était pas dans mon réseau. Et je crois que la première personne trans que j'ai rencontrée, c'était… vraiment super tard en fait quand j'avais déjà compris que j'étais trans. Donc moi je me suis renseignée et je me suis rapprochée de la communauté LGBT par nécessité pour comprendre déjà ce que je vivais en écoutant des podcasts, en me renseignant, en suivant des gens sur Insta, sur Youtube, des documentaires, des articles, de la ressource, un peu dans tous les sens et j'ai commencé à fréquenter entre guillemets le milieu LGBT, pas forcément via le milieu LGBT mais via des espaces Merci. qui sont safe pour les personnes LGBT, donc j'ai rencontré des personnes LGBT là-dedans, qui est plutôt la communauté sexe positive ou des mouvements autour de la libération, non c'est pas très mal expliqué, libération sexuelle, il ne faut pas du tout dire ça comme ça, mais c'est des espaces où on parle de sexualité, on pratique la sexualité, et c'est des espaces féministes, antisexistes, et il y a un grand cadre qui est posé sur le respect des pronoms, des genres des gens, et c'est aussi un espace où on peut explorer. ce que c'est que d'être genré autrement. Et donc tu peux un peu cheminer sur tes questionnements aussi de genre. Et moi c'est un des espaces qui m'ont permis de questionner mon genre dans des retraites de développement personnel, un peu dans ces mouvances-là. Et c'est via cette communauté-là que je suis rentré dans la communauté LGBT et aussi par nécessité, quand je me suis posé les premières questions, je suis allé dans des cercles de parole, dans les assos LGBT. Et au fur et à mesure, j'ai rencontré de plus en plus de personnes concernées. Et surtout, pour avancer dans ma transition, je n'avais pas le choix que de me renseigner. Et les infos, on les trouve où ? Dans des groupes Facebook, tout simplement, de personnes LGBT, de personnes trans. Et de là, j'ai découvert les assos, tout ça. Et je suis montée à Paris un peu en même temps. Et donc, il y a plus d'offres, plus de choses qui existent. Et donc j'ai eu besoin de me rapprocher des personnes qui vivaient des choses similaires aux miennes, pour cheminer moi-même personnellement, comprendre ce que je vivais, et au fur et à mesure je me suis fait des liens, et au fur et à mesure j'ai créé aussi un entourage, et je ne fréquente pas que des personnes LGBT très loin de là. Mais en fait c'est un vrai chemin de comment on appréhende la communauté LGBT, c'est vraiment très très différent pour les uns et pour les autres. Il y a des gens qui sont un peu en rejet et c'est vrai que moi dans mon cheminement je dois avouer qu'il y a des moments où j'avais peur d'y aller, j'avais peur de rentrer dans une bulle, j'avais peur de me sentir si bien dedans qu'en fait je ne peux plus être à l'extérieur. Et en fait c'est ce qui s'est passé de fait. Il y a plein de choses que j'ai arrêté de faire, des endroits où j'ai arrêté d'aller, dans le travail mais aussi dans les... de perso parce qu'en fait on est fatigué de répondre à des questions gênantes et aussi de se sentir en danger donc c'est vrai qu'il y a un besoin de repli et moi c'est vrai que j'ai eu besoin de trouver juste un milieu entre j'ai besoin de ressources, de repli, de trouver des adelfes avec qui je peux échanger avec qui je peux être en lien pour cheminer mais aussi trouver de la ressource pour pouvoir aller à l'extérieur et pas être que dans cette bulle moi je sais que j'ai besoin d'altérité et j'ai besoin de de rencontrer des gens différents. Et donc j'essaye de trouver le juste milieu. Mais de fait, ça fait vraiment beaucoup de bien et c'est vraiment nécessaire ces espaces, donc j'y passe quand même du temps.

  • Speaker #2

    Moi, c'est vrai que j'ai une expérience tout à fait différente avec les milieux LGBT que j'ai beaucoup fréquentés et que je rejette beaucoup aujourd'hui. Je ne rejette pas les personnes, encore heureux. Je rejette les milieux qui m'ont fait beaucoup de mal. Alors c'est très douloureux d'être avec des personnes qui se posent des questions trop connes et tout. Franchement, c'est fatigant. Mais tu en as parlé, tu as parlé de repli. Moi, j'ai eu l'impression vraiment à un moment d'être dans une secte et de ne pas réussir à penser un autre.

  • Speaker #0

    En tout cas, dans tous les milieux communautaires et dans tous les mouvances où on veut faire communauté par nécessité, on essaye de ne pas reproduire les violences qu'on vit à l'extérieur, mais on n'est pas vierge de notre éducation. Donc il y a aussi des biais, il y a des violences à trac communautaire, il y a de la transphobie, il y a de la biphobie, il y a du racisme. Et tout ça, ça existe de partout. Donc c'est un peu l'illusion que c'est safe. C'est pour ça que je dis que nous, on... Il n'y a pas d'espace safe, on est safe d'une part, il faut toujours être en vigilance de ça et faire attention à soi. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes de partout. Après, ça dépend aussi forcément des sectes, il y a des personnes problématiques, plus ou moins, en fonction des lieux. Mais c'est vrai qu'il y a aussi la pureté militante, il y a de la pression, il y a des fois des injonctions. Et effectivement, c'est aussi des gens qui sont en construction et les milieux sont aussi en train. Les assos, les milieux sont en construction aussi, de travailler sur ses propres biais. Typiquement, la question de la transphobie et du racisme, c'est des choses... J'ai l'impression qu'il y a des choses qui avancent, mais c'est lent, quoi.

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr.

  • Speaker #0

    Donc, il y a de l'équipe...

  • Speaker #2

    Pas de problème en mondial. Oui. C'est les débuts de certaines prises de conscience,

  • Speaker #0

    on va dire. Mais en fait, quand on dit milieu LGBT, ça ne veut rien dire. Ça veut dire quoi ? Moi, j'ai quelques potes LGBT, je vais dans quelques endroits. à quelques événements qui a l'impression de fréquenter le milieu LGBT. Mais en fait, il y a toute une multitude d'événements, d'associations, de gens et on ne peut pas réduire tout ça à des expériences individuelles. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes et il y en a partout.

  • Speaker #2

    Oui. J'ai une question. Tu étais déjà freelance avant de faire ton coming out ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Ouais, t'as fait quoi ? Raconte-nous un petit peu ton parcours sur ça.

  • Speaker #0

    Alors, je suis né en 91. Et j'ai commencé l'indépendance. En fait, dès que le statut d'auto-entrepreneur a pu exister, je me suis inscrit et j'ai commencé à bosser avant d'avoir mon bac. Donc, mon premier projet pro photo, c'était à 18 ans et un jour. Et j'ai gardé ce statut pendant mes années de... de lycée de photos. J'ai fait une école de photos en Belgique avec un aspect aussi un peu com, en tout cas photo un peu large, image. Et en parallèle, j'ai commencé à prendre des projets, à me lancer pour avoir un peu d'expérience et pas tomber des nues à la sortie de l'école de comment je fais pour un des clients et me faire un petit peu les armes et aussi pour avoir un petit peu de sous. Et donc, j'ai quand même pas mal bossé pendant mes études et quand j'ai fini mon... Mon diplôme, je me suis lancé à temps plein à Lyon. J'étais en Belgique et je suis arrivé à Lyon dans une ville où j'avais un oncle, deux petits cousins, trois petits cousins et c'est tout. Je ne connaissais pas grand monde et je me suis lancé à temps plein et j'avais un peu d'aide familiale. J'avais un an ou deux ans pour me lancer et être autonome. et donc je me suis mis à fond en tant qu'indépendant à Lyon et j'ai essayé de bosser dans plein d'endroits différents, j'ai fait des reportages d'entreprise, des reportages pro, des pubs de comédiens, beaucoup de photos de scènes, d'événementiels, de musiciens et tout un tas de choses. J'ai participé à plusieurs studios photo, j'étais dans plusieurs collectifs, j'ai monté mon propre studio photo avec d'autres collègues et j'ai passé 9 ans à Lyon, à explorer plein d'aspects de la photo, à me former à la vidéo, à me former à plein de choses en tant que freelance, à me prendre aussi des bonnes claques dans la gueule, à faire des erreurs, à réapprendre, à mal choisir les journées qui se posaient, puis après revenir en arrière. Et en même temps, j'ai appris plein de choses, j'ai investi beaucoup et j'ai fait, je pense, plein d'erreurs de débutant aussi qui m'ont permis d'au bout de neuf ans, de faire un gros tri de qu'est-ce que je garde. Qu'est-ce que je sais faire ? Qu'est-ce que je veux faire ? Vers où je vais ? Et j'ai fait mon coming out au bout de 9 ans de freelancing à Lyon. Et ça a pour moi amené à une révolution dans ma vie assez intense. J'ai réalisé que je pouvais passer de l'autre côté de la caméra, accompagner les gens autrement, accompagner sur d'autres aspects, travailler avec d'autres gens dans la com, faire aussi de la vidéo, plus de vidéos. Et donc je me suis monté dans un très beau projet de film documentaire. Je me suis lancé un peu dans la vidéo, j'ai fait quelques prises de la vidéo, et ce mouvement-là a amené un ras-le-bol global de ma vie à Lyon. En fait, j'ai l'impression d'avoir fait le tour, et il fallait que je mue, entre guillemets, et je suis parti à Paris. J'ai une amie qui m'a accueilli, elle m'a dit « viens à Paris » , et du coup je me suis retrouvé à Paris avec mon identité en questionnement. Et de là, j'ai repris tout à zéro, aussi parce que j'ai vécu des problématiques liées à la transition. dans mon travail, qui ont fait que j'étais un peu obligé de repartir à zéro avec un nouveau projet, une nouvelle adresse mail et aussi un nouveau réseau courant.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ça ou pas ?

  • Speaker #0

    Tout à fait. Bon, être trans, c'est plein d'emmerdes, c'est plein de joie aussi, c'est plein de choses. Mais ce n'est pas juste faire des opérations et prendre des hormones, c'est changer de statut social, c'est être confronté à des coming-out réguliers, confronté à des problèmes administratifs, de vivre plein de petites étapes, d'oser s'habiller autrement, d'oser sortir dehors. un peu différemment, se faire genrer, dire son prénom à sa voisine pour la première fois, traverser plein de choses. Et dans le travail, il y a tout un tas de problématiques que je n'avais pas du tout prévues et qui m'ont un peu surprise, notamment des problèmes administratifs. Des trucs qui paraissent bêtes, mais en fait, quand tu changes de prénom, ma vie d'avant était tout basée sur mon prénom d'avant. Le nom de ma boîte, c'était mon nom et mon prénom. Donc déjà, partant de là, en voulant tout changer, il a fallu changer le nom de ma boîte. Je me suis rendu compte que ce n'est pas le bon statut, donc j'ai aussi changé de statut de boîte. Donc ça veut dire déjà repartir avec une nouvelle entreprise. C'est des frais, c'est du temps, ça me tense. Mais surtout, moi dans mon cas, j'avais une activité, tout mon canal d'acquisition client était basé sur le référencement. Donc les gens tapaient... photographiant sur internet et il me trouvait et ça c'était ma stratégie principale que j'ai mis six ans à mettre en place pour être sur la première page j'avais bossé mon référencement à fond je m'étais formé pour ça j'avais un site web j'avais investi de l'argent et je travaillais vraiment beaucoup mon positionnement vis-à-vis de mon marché pour que voilà être positionné sur des mots clés sauf que tout ça tout ce travail là que j'avais mis six huit ans à mettre en place et avoir et avoir une activité qui roule a été basé sur mon prénom sur mon nom de domaine, sur mon prénom et mon nom, donc tous mes backlinks, mes copyrights, tout ce que j'avais mis en place, et dépendait de mon prénom d'avant. Donc, j'ai changé de prénom, et donc, par exemple, typiquement, les 150 avis que j'avais sur ma fiche Google, que j'ai mis des années à avoir, parce que c'est un travail qui est long, qui me rapportaient beaucoup de référencements et de clients, et bien, j'ai perdu ça en trois mois. parce qu'on ne peut pas changer d'entreprise et garder les avis clients, parce que j'ai dû changer de prénom dans mon nom d'entreprise, et donc on m'a dit que je faisais de la fraude, et donc Google n'a jamais voulu réhabiliter mon nom. J'ai perdu ma fiche Google. Et donc, rien que d'en parler alors que ça fait des années, je suis encore sous le coup de l'émotion, parce que ça a vraiment été difficile, parce que j'avais vraiment mis toute ma life là-dedans, et beaucoup d'énergie. Et donc je me suis rendu compte au bout de six mois de galères administratives que je n'avais pas le choix de recommencer à zéro, jusqu'à vraiment reprendre une nouvelle adresse mail et repartir à zéro. Et donc j'ai perdu un trafic sur mon site, j'ai perdu une énorme partie de ma visibilité, et en parallèle, la transition ça va pour beaucoup de personnes avec des problèmes familiaux, dit des violences intrafamiliales, une exclusion, des doutes, et aussi une charge de travail de « ok, je suis trans, ok, est-ce que je transitionne ? » « ok, ça veut dire quoi, transitionner ? » « il faut que je fasse des recherches, que je me renseigne ? » Les démarches administratives sont très lourdes, et donc en fait, ça impacte beaucoup ton estime de toi, ton moral, ta capacité à travailler, ça te prend du temps. Tu vis aussi, à chaque fois que j'allais à la poste, tu es en enfer pour récupérer des colis. aller à la pharmacie, aller trouver des médecins safe. Et du coup, en fait, il y a un coût émotionnel qui est énorme, qui moi m'a beaucoup impacté dans ma capacité à travailler, parce que j'étais persuadé que j'avais fait des allers-retours à Lyon, à Paris, donc j'habitais à Lyon, et je faisais déjà beaucoup d'allers-retours à Paris, parce que j'avais déjà de la clientèle à Paris. J'étais persuadé que j'allais passer un an à faire encore des allers-retours avant de consolider ma nouvelle boîte à Paris et que la transition professionnelle allait se faire parce que j'avais préparé un peu le terrain. Sauf qu'en fait, j'ai perdu mon référencement. En fait, j'ai eu des problèmes pour me faire payer parce qu'il y a des problèmes administratifs avec la banque. J'ai eu des problèmes avec des plateformes en ligne pour me faire payer. Et tout ça m'a beaucoup impacté. Je n'arrivais plus à dire qui j'étais parce que pendant six mois, il a fallu que je dise à mes clients « En fait, je suis trans, maintenant c'est Alan, c'est il. » Expliquer à chaque fois, me retrouver sur des prestations où je ne me sens pas safe. du coup Du coup, je rentre chez moi, je chiale ma race, je n'ai plus du tout envie d'y retourner. Et en fait, le coût émotionnel a été trop fort pour moi. Tu vois, typiquement, il y a quelque chose que je faisais beaucoup avant, c'est d'aller dans des after-work organisés par plein d'assos, plein de structures différentes, pour rencontrer d'autres entrepreneurs et développer ma clientèle. Et en fait, j'ai dû arrêter de le faire. déjà parce que j'avais moins d'argent pour sortir puisque ma boîte a commencé à se casser la gueule et parce que faire un coming out à chaque fois que tu sors et te prendre en pleine tronche de t'es une meuf, t'es un mec à chaque fois que tu sors ben en fait c'est moi j'étais là pour le travail j'étais pas là pour pour avoir les tripes à terre devant tout le monde et me sentir méga vulnérable en danger aussi parce que du coup on se prend des réflexions et donc j'ai arrêté purement et simplement d'être d'être dans les after work et j'ai aussi vécu de l'exclusion familiale très forte jusqu'à des démarches juridiques, mais sur d'autres sujets. Donc, en fait, tout est arrivé en même temps. Et en parallèle, je n'ai plus de site web qui est fonctionnel. Les gens ne voient plus du coup, en fait, être visible alors que je ne me sens pas encore moi même, entre guillemets, et que j'ai plein de sujets à gérer. C'était un très gros... C'était compliqué, quoi. Donc, j'ai quand même tenu le coup et je suis reparti à zéro. Mais voilà, pas le droit au chômage. J'ai eu des problèmes d'assurance pendant l'arrêt de... Pendant l'opération que j'ai faite, je n'ai pas eu d'indemnité au chômage, d'indemnité de l'assurance que j'aurais dû toucher. J'ai eu plein de soucis comme ça, administratifs, qui font que... Franchement, je ne sais pas comment j'ai tenu. J'ai tenu grâce à mes amis. Mais en fait, il y en a plein qui sont partis aussi. Il y a aussi tout ce que tu vis du tris social. Il y a des choses que tu ne peux plus faire. Tu dois appréhender le fait de se sentir en danger autrement qu'en étant une meuf cis, en tout cas perçue comme une meuf dans la rue. Tu appréhendes aussi le danger, tu appréhendes le fait d'être minorisée, tu appréhendes le fait que dès que tu ablumes la radio, tu entends des blagues transphobes, tu entends des débats surtout à la télé, la montée du fascisme, et du coup, tu es là, OK. je vais arriver à Paris, je vais me faire agresser, tu vois. Et donc, il y a aussi tout ça à appréhender, en plus de vivre la transition, en plus de vivre des gens qui arrêtent de te parler, des personnes de ma famille qui m'ont tourné le dos, les liens qui s'arrêtent. Donc, en fait, c'est en ça que la nécessité de trouver une famille choisie, la communauté LGBT, là, c'est une réponse incroyable, parce qu'en fait, il y a beaucoup de gens qui n'ont juste plus de famille. Et le fait de vivre ça, forcément, ça a un impact sur ton travail.

  • Speaker #2

    C'est drôle ton histoire parce qu'elle va un petit peu à l'encontre de ce qu'on imagine dans l'imaginaire collectif qui est qu'un mec trans, on savait quand il avait 10 ans que lui c'était un petit garçon. Il nous fait son coming out sans le vouloir quand il a 12 ans en disant « moi je suis un petit garçon » . Il a toujours été très garçon manqué, puis il a attiré par les filles. C'est pour ça que moi je te dis que c'est la réalité que je connais. Moi, je ne connais aucun mec trans qui était une meuf hétéro, etc. Donc en plus, outre le fait de changer parce que les gens sont en mode... Il y a aussi, sur le marché de la désirabilité, tout change en fait. C'est-à-dire, même si par exemple, tu fréquentais des mecs, tu étais hétéro, là tu deviens gay. Comment ça se passe quand on n'avait pas déjà un pied dedans ? Et donc en fait, c'est un petit peu ce truc de quand tu dis... Oui, c'est vrai, ça arrive tard, ça arrive à 29 ans. Mais je trouve que c'est intéressant d'interroger des gens à qui ça arrive tard parce qu'on a trop cet imaginaire que ça doit arriver...

  • Speaker #0

    Dans mon cas, c'est arrivé tard. En fait, je l'ai dit tard et j'ai commencé ma transition tard, mais c'était là depuis très longtemps. Je n'étais juste pas en capacité, pas en sécurité émotionnelle. Je n'avais pas un cadre assez sécurisant pour faire mon coming out et surtout, j'avais d'autres sujets à gérer. J'ai vécu avec beaucoup de problèmes de santé pendant six ans. et j'avais mon entreprise à fond. En fait, il y a une personne trans un jour qui m'a dit, une médecin, elle m'a dit tu sais il y a quand même beaucoup de personnes trans quand elles font leur coming out tard, ça vient après des gros bouleversements, ça peut venir avec des sujets comme le burn out et le fait de s'être mis à fond dans le travail un peu pour se cacher ou pour ne pas voir ce que tu vis personnellement. Moi c'est typiquement ce que j'ai vécu, je me suis mis à fond dans le travail pour pas me regarder personnellement. Et c'est le fait de faire de l'épuisement, le burn-out et tout ça qui m'a un peu arrêté. C'est mon corps qui m'a arrêté en me disant, il y a un truc qui cloche, il y a un truc qui ne va pas dans ta vie, il faut que tu le regardes. Mais par contre, j'ai toujours été, tu vois, quand tu parles de garçon manqué, et en fait, moi, j'ai toujours été ce que je suis. D'ailleurs, j'ai l'impression qu'avec la transition, j'ai juste accepté ce que je suis et j'ai l'impression de revenir un peu en arrière à mes origines, entre guillemets, parce que j'ai arrêté de vouloir performer le genre. ou vouloir correspondre à un rôle qu'on m'avait assigné à la naissance. En fait, j'ai tout fait pour... En gros, je suis vraiment le bon trans entre guillemets. J'ai vraiment tout fait pour correspondre à cette image de meuf et à me conformer. Et c'est venu avec la peur de ne pas être acceptée dans le travail. Quand j'ai commencé à travailler, j'ai commencé à être dans un genre féminin, plus féminin. Alors qu'avant, j'étais... et j'avais une expression de genre très masculine, très androgyne. Et de fait, de travailler avec des grosses boîtes, de travailler avec des gens très variés que je ne connaissais pas, j'ai un peu reproduit ce qu'on attendait de moi. Et pour pas trop dénoter déjà que, en tant qu'artiste et photographe, je dénotais déjà pas mal, j'avais surtout envie de me faire accepter d'avoir du boulot. Donc, il y avait surtout la première problématique, c'était d'avoir du taf. Et ça est venu, j'ai commencé à me poser dessus, sur ces questions-là, et à me laisser ressentir quand j'ai eu l'espace, quand je me suis créé l'espace pour moi. Et en fait, mon coming out, j'ai pu le faire grâce au fait de trouver une communauté sécurisante, pas forcément LGBT d'ailleurs, mais de trouver des gens avec qui je me sens bien, des gens avec qui je peux être moi-même, et du coup, petit à petit, me sentir Sentir que je n'allais pas tout perdre en fait, que je n'allais pas perdre toute ma vie. Effectivement ça a quand même été un gros bouleversement, mais j'avais assez de sécurité intérieure pour me dire ok je le fais parce que parce qu'en fait déjà je n'avais plus le choix clairement, c'était soit ça, soit je ne pense pas que je serai encore là pour en parler. Et parce qu'à un moment donné, voilà j'ai presque 30 ans, est-ce que je continue à jouer ce rôle toute ma vie ou pas tu vois ? Et aussi parce que je ne savais pas, tout bêtement. Moi, je savais qu'il y avait un truc avec le genre depuis longtemps. Dans mes relations, j'ai toujours dit que c'était moi le bonhomme. J'ai toujours été très garçon manqué. Mais je ne savais pas que ça existait d'être trans. Donc, en fait, je ne savais pas forcément les mots pour comprendre ce que je vivais. Et il m'a fallu que je fasse des recherches, tu vois, pour tomber sur... Ah oui, en fait, c'est ça. En fait, j'ai le droit de transitionner. En fait, je peux vivre ça. Et c'est ça que je suis. Et c'est juste que j'avais un... c'était pour moi invisible, c'était un impensé, c'était pas des questions auxquelles... enfin des réponses auxquelles j'avais accès. Et après par rapport aux relations, alors moi j'avais une relation avec une femme il y a quelques temps, il y a quelques temps avant mon coming out, et du coup oui ça a posé des questions, mais tu vois mon coming out trans j'ai pu le faire grâce à un mec cis qui m'a beaucoup aimé, avec qui je me sentais bien qui m'a dit « écoute, si t'es trans, super, je t'aimerais que quoi qu'il arrive » . Et par contre, notre relation n'a pas continué. Mais il y a aussi des questionnements qui peuvent venir, mais ce n'est pas nécessaire. En tout cas, moi, je ne suis pas passé par la classe lesbienne parce que je ne suis pas en sexuel, donc je pense que je n'ai pas eu trop ce questionnement-là. Même si aujourd'hui, je m'autorise plus à relationner avec des femmes. Et c'est vrai que de changer de statut social, forcément ça change les rapports avec les gens et ça peut perturber de paraître gay dans la société, ça peut perturber une relation que j'avais en cours avec un mec qui n'avait jamais questionné sa sexualité. Pour lui, ce n'était pas possible d'être vu comme une personne gay ou même de questionner sa sexualité. Il était forcé de le faire parce que j'ai fait mon coming out, mais du coup je perds aussi des relations en cours de route et c'est vrai qu'il y a plein de... Il y a plein de sous-problèmes ou de sous-prolématiques qui peuvent arriver, mais ce n'est pas le cas de toutes les personnes trans. Vraiment, ce que je dis aujourd'hui, c'est ce que moi je l'ai vécu, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Et voilà.

  • Speaker #1

    T'as dit un truc que j'ai aussi tilté, je tilte beaucoup. T'as dit que t'avais pas envie d'aller dans des after work pour pas être confrontée à des questions que tu faisais avant, mais que t'avais arrêté de le faire. Alors moi, maintenant, je sais que t'es trans parce que tu l'as dit et parce que je suis ton contenu, mais t'as un bon passing. Pourquoi ? Alors je te pousse dans tes retranchements pour les autres qui nous écoutent. Pourquoi tu fais pas juste le mec 6 ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est très nouveau que j'ai un bon passing.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Parce que c'est pas magique de prendre des hormones, c'est pas en quelques semaines ou en quelques mois que ça change. Ça fait, je crois, depuis janvier, février, donc c'est très très récent, que les gens ne savent pas que je suis trans. Mais il y a encore six mois, c'est tout nouveau. Du coup, des fois, je me retrouve dans des situations, moi je suis sûr que ça se voit, ou que j'ai encore habitué au fait que ça se voit, et je me retrouve dans des situations où les gens n'ont pas compris. Donc des fois ça crée des incompréhensions, mais c'est très nouveau. Donc il a fallu, tu vois j'ai commencé Zermond il y a presque trois ans et demi, il y a trois ans qui se passent où on ne sait pas dans quel cas on met. Et les changements sont très progressifs, et là tu vois j'ai un peu de moustache mais c'est très récent. Et donc il y a eu toute une phase où j'étais hors case, en tout cas pour les gens. Donc, nécessairement, j'avais plein de questions et c'était pas très confortable. Et aujourd'hui, je dois capter que ça se voit plus ou beaucoup moins. Et donc, c'est d'autres problématiques.

  • Speaker #1

    C'est ça que j'allais dire. C'est d'autres problématiques dans le sens où... Alors, c'est une question qu'on ne pose jamais, mais c'est une question... Moi, par exemple, j'ai une copine, elle est trans. Elle, elle ne veut pas être vue comme une femme trans. Après, c'est différent. Les femmes trans, c'est autre chose. Avec la société dans laquelle on est, la misogynie, la ND, enfin... C'est très très violent pour les femmes trans. C'est encore...

  • Speaker #0

    Moi, j'ai clairement le privilège de passer pour un mec.

  • Speaker #1

    Oui, voilà, c'est ça que j'allais dire.

  • Speaker #0

    J'ai vu des privilèges que les femmes trans ne vivent pas.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est sûr. Mais ma question, c'est, toi, dans l'idéal, t'es OK avec le fait d'être vue comme un homme cis ou t'aimerais être vue comme un homme trans ?

  • Speaker #0

    Je suis en train de capter que c'est une question que je dois me poser en tout cas. Est-ce que je le dis ? comment je le dis, quand est-ce que je le dis, à qui je le dis. Moi déjà, il y a un enjeu d'être visible par rapport à ça, parce que j'ai à cœur de pouvoir accompagner d'autres personnes LGBT et qu'ils se disent que je suis des leurs, mais je ne suis pas obligé de le crier sur tous les doigts non plus. Mais il y a... En fait... C'est à la fois confortable parce que ça me met dans une sécurité que je découvre, de ne pas être en danger dans la rue, maintenant que j'ai un bon passing. Mais tu vois là, tu dis que j'ai un bon passing, mais on m'appelle madame trois fois par jour. Donc en fait, c'est très très subjectif et ça dépend vraiment des gens. Effectivement, depuis que je n'ai plus mes seins, ça a changé. On m'appelle beaucoup plus monsieur. Mais en fait, ce n'est pas forcément... une vérité absolue, on m'appelle Madame une fois sur deux. Donc, ce n'est pas complètement acquis. Et est-ce que j'ai envie de passer pour un mec cis ? Je ne crois pas parce que… Non, je ne crois pas. Mais en fait, il y a aussi une fierté d'être trans, d'être visible. Je suis fière d'être trans. J'ai envie de le dire parce que c'est politique de le dire, c'est politique d'être visible. Et j'ai envie de porter ça aussi. Après, ça dépend des contextes. Des fois, ça m'arrange de ne pas être visible, mais c'est très vite vu. Je ne sais pas, des contextes médicaux, des contextes où quand je raconte un peu mon parcours, dès qu'on rentre un peu dans des relations où je raconte ma vie, c'est parfois difficile de le cacher. Si je voulais le cacher, ce serait quand même aussi un effort. Pour moi, la problématique, c'est de ne pas dépenser de l'énergie à cacher les choses. La question de l'énergie est importante, en fait. De conserver mes points de vie, entre guillemets. Et je trouve, en tout cas, aujourd'hui, que si je devais le cacher, ça me demanderait beaucoup d'efforts. Et aussi, je ne peux pas vraiment le cacher, parce que, tu vois, je parlais de mon travail documentaire. Je réalise un film documentaire où je suis un des personnages du film. Et donc, dans mon travail, je me retrouve à... à pitcher mon projet devant des professionnels, là je suis en formation, j'écris dans une école de cinéma le projet, et donc je ne peux pas faire comme si ça n'existait pas, parce que c'est au centre de mon travail, c'est au centre de mes engagements, et c'est ce que je raconte aussi en partie, ce n'est pas le centre du film, mais c'est une chose qui va être visible dans le film, donc c'est difficile de passer outre. C'est vrai que pour l'instant, je ne vais pas trop dans des cadres où... où j'ai besoin de passer pour Amexis. À part dans la rue, pour être en sécurité, c'est vrai que j'ai surtout envie de fréquenter des gens qui sont OK avec mon identité et d'être sûr de ça pour pouvoir les fréquenter et pas prendre des risques de « si jamais ça se sait » ou « qu'est-ce qui va m'arriver ? » Parce qu'il y a aussi le danger qui va avec. Et donc, je préfère ne pas le cacher. Mais parfois, pour ma sécurité, Ça ne se voit pas, mais ce n'est pas un but pour moi de passer pour un ex-cis.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'aujourd'hui, être trans dans le business, c'est problématique ou pas, sachant que tu as créé ton propre business ? Ce que je veux dire, c'est qu'un peu comme ta famille choisie. Est-ce qu'il y a encore des limites ? Je présume qu'avec tes clients, non, vu qu'ils t'ont choisi. Mais est-ce que dans d'autres cadres, avec des prestats, ou est-ce que tu as déjà été confrontée à de la transphobie ? En fait, ce que je veux dire, c'est qu'on dit que quand on est indépendant, on a choisi une vie sur mesure. Donc, dans l'idée, on a une liberté d'être nous et de se confronter à rien d'autre, comme si on ne vivait pas dans une société. Est-ce que toi, tu ressens quand même les limites de la pensée des gens, de leur part d'ombre ?

  • Speaker #0

    En fait, oui, effectivement, je choisis des gens qui sont sécurisants et je choisis des collègues, des clients avec qui c'est cool. Mais ça n'empêche pas les questions parce que toutes les personnes ne sont pas forcément au fait de tout, éduquées. Ça n'empêche pas que les gens ragent, ça n'empêche pas des petits moments de gênance qui sont ok, tant que tu t'excuses et que ce n'est pas de la malveillance, c'est chouette. Mais par contre, il y a d'autres contextes. Là, j'ai un truc qui me vient, j'ai fait une conférence sur les freelances atypiques sur un salon d'entrepreneurs. J'ai eu rendez-vous avec une des personnes qui gère le salon. La première question qu'il m'a posée en rendez-vous, c'est « c'est quoi ton prénom d'avant ? » . Donc, en fait, ce n'est pas parce que je suis positionnée là-dessus que ça m'évite d'avoir ce genre de remarques ou de moments gênants. Et dans le cadre de l'écriture de mon documentaire, ça m'arrive. En fait, je suis en train de me rendre compte que j'ai aussi le statut de réaltrance. et on me met dans une case qui ne m'appartient pas, parce que être trans, c'est pas juste... C'est une des composantes de mon identité, mais c'est pas toute mon identité, et surtout, toutes les personnes trans ne font pas les mêmes films. Et en fait, quand, tu vois, je pense, certains professionnels, diffuseurs, producteurs ou autres, entendent le fait que je suis trans dans la manière dont je parle de mon projet, il y a un court-circuit qui se fait dans leur cerveau, tu vois. Comme on en parle beaucoup, comme... on se dit que le sujet des trans on l'a déjà traité, en fait on me met dans une case qui je pense peut me desservir, et si ce n'est pas de la discrimination, en tout cas c'est une petite case qui peut m'empêcher d'avancer dans ce projet, parce que du coup j'ai des problématiques avec ça, parce que ça fait peur aux gens, ou alors il y a justement un gros fantasme. derrière ça ou alors en tout cas on bug là dessus tu vois et alors que mon travail c'est dans mon film et dans mon projet documentaire c'est un travail sur la sexualité et le consentement donc en fait ça n'a pas forcément lieu d'être mais je vois aussi qu'il y a la manière dont on me met dans une case et aussi la légitimité que moi je peux me sentir ou pas c'est normal en fait comme j'ai été éduqué comme une meuf à à me sentir moins légitime certaines choses à me sentir encore en chemin d'oser des choses, d'oser porter des projets, d'oser prospecter, d'oser demander des partenariats ou des projets. Et forcément, c'est un sujet.

  • Speaker #1

    Comment on répond à quelqu'un qui dit c'est quoi ton dead name dans le monde du travail ? Parce que dans la vraie vie, tu peux ne pas répondre, passer. Dans l'intimité, tu peux dire mais ça ne va pas te demander ça. Dans le travail, comment on met ses limites tout en étant corporate ?

  • Speaker #0

    Poser ses limites, c'est un gros sujet dans le boulot. Je pense qu'avec l'expérience, j'ai de plus en plus de pédagogie et j'arrive à sentir quand j'en ai marre de répondre à des questions, j'arrive à dire écoute, je n'ai pas envie de répondre, mais en fait, des fois tu es pris de cours, des fois tu ne sais pas. Là, il se trouve qu'il y avait quand même un gros biais avec cette personne de pouvoir parce que je voulais vraiment avoir accès, pouvoir faire cette formation, cette conférence. Et en fait, je lui ai dit tout en lui disant, après en fait, je suis revenu, après le rendez-vous, j'ai envoyé un mail en disant écoute, je n'étais pas du tout à l'aise que tu me posais cette question. Attention à ne pas la poser aux personnes concernées, ce n'est pas une question qui se pose, et je lui ai expliqué. Mais du coup, j'ai dû revenir par la suite, et la personne s'est excusée, et on a pu échanger. Mais en fait, on fait comme on peut. En fait, c'est ça le truc, c'est que ça dépend de... Est-ce que tu es préparé ou pas ? Est-ce que tu as assez d'énergie ? Est-ce que tu l'as vu venir ? Est-ce que tu sais quoi dire ? C'est difficile. Moi, j'ai aussi beaucoup vécu ça dans le parcours médical. avec des ostéos, avec des kinés, avec des trucs qui sont pas forcément en lien avec ma transition. Et donc je suis parfois obligée, pour que je sois bien pris en charge, de dire que je suis sous hormones. Donc je peux pas cacher que je suis trans, parce qu'on me dit pourquoi, on me demande, machin. Et donc quand on sait que je suis trans, parfois c'est des questions... soit malaisantes, soit voir des discours anti-LGBT, des discours de « ah bah non, on m'a déjà dit que la survie de l'espèce c'était un papa et une maman, on m'a déjà expliqué que c'était un choix, j'ai eu des infirmières qui m'ont dit des dingueries. » Et en fait, je ne me suis préparé comme je pouvais, mais tant que tu ne vis pas ce genre de choses, tant que tu ne vis pas la discrimination et les micro-violences et les propos transphobes, Tu ne sais pas comment ça va te faire dans le corps, tu ne sais pas si tu vas la répartir, si tu vas savoir faire. Et c'est pour ça qu'être trans, ça isole, ça marginalise, parce que ça demande un effort mental. Il y a des choses, typiquement, avoir accès à des clubs en sport, aller à la piscine, en fait, ce ne sont plus des moments détente, parce que ce sont des moments où on te regarde des cicatrices. On te dit que t'es pas dans le bon endroit pour les vestiaires, tu dois te retrouver. Moi je me suis retrouvé à dire devant un groupe de 30 personnes dans un club de sport que j'étais trans pour savoir quel vestiaire j'allais choisir. Et c'est pas moi qui amène le sujet, tu vois, c'est les gens qui tiennent le cadre. Je me retrouve aussi dans le def perso, dans des retraites où il y a des gens qui me disent « Non mais pourquoi on fait tout un tatouin sur les personnes trans, les pronoms, machin, je suis en colère, les étiquettes qu'on nous met et tout » Et en fait, ça retombe toujours sur les personnes concernées, de faire de la pédagogie, d'expliquer, si les personnes qui tiennent le cadre ne le font pas. Donc en fait, on fait comme on peut, et ça impacte énormément ton mental, et aussi ta légitimité à être là, tout simplement. Donc c'est vraiment compliqué au quotidien. Et moi, c'est vrai que je me suis formée à la communication non-violente dans mon parcours, et je trouve que ça m'aide beaucoup. Parce que je peux dire, écoute, je comprends que tu aies des questions, je comprends que ça te questionne. Parfois même, ça vient d'une bonne intention, tu vois, de savoir, de créer du lien. Mais en fait, je dois leur dire, je comprends que tu as envie de créer du lien, sauf que moi, c'est des questions qu'on me pose trop souvent, je suis fatigué, je n'ai pas envie d'y répondre, je n'ai pas l'espace. Demande-moi mon consentement si j'ai envie d'en parler avant de m'imposer ce genre de questions. Ne dis pas ça devant les autres, ça me met en danger. J'ai une copine qui m'a outé, tu vois, typiquement, en pleine transition. J'avais un billet à mon dead name parce que je ne pouvais pas payer avec ma... Je n'avais pas encore mon nom sur mes cartes bancaires, parce que ça prend du temps et tout. Donc, je me retrouve aussi avec des fois des gens dans l'administratif, tu vois, qui parlent fort, dans les laboratoires, quand tu vas faire un examen de sang. Moi, j'ai ma carte vitale où il y a encore le 2 de femme dessus. Donc, je me retrouve à devoir me outer dans le train. C'est un enfer. Dans le train, c'est compliqué. D'ailleurs, j'avais fait un sous-de-gueule sur LinkedIn qui avait un peu explosé sur LinkedIn en taguant la SNCF parce que quand tu as une carte de réduction à ton nom d'avant, tu ne peux pas, en cours de route, la faire actualiser. Et ça, ce n'est pas légal de ne pas pouvoir actualiser les données personnelles. D'ailleurs, ils se sont fait épingler par la Commission européenne récemment. Et je me retrouve à devoir me justifier que c'est bien moi parce qu'ils voient un peu un prénom qui n'est pas le bon, ou alors ils voient le genre qui n'est pas le bon dans leur billet, du coup ils me disent non c'est pas vous, vous fraudez, donc je me retrouve à devoir dire que je suis trans devant 40 personnes dans des files d'attente, à devoir me battre à la poste, tu vois des trucs comme ça et c'est je sais plus quelle était ta question, excuse moi je me suis un peu perdue, mais c'est plein de situations comme ça que tu peux pas les anticiper. Tu peux te préparer en écoutant les parcours des uns et des autres, mais clairement, tu vois, moi le train, je ne l'avais pas vu venir. Je n'avais pas vu venir que j'allais avoir la boule au ventre en voyageant à chaque fois.

  • Speaker #1

    J'ai une dernière question, enfin c'est la non-dernière question. C'est une question sur le fait qu'il y a beaucoup de meufs comme moi qui ont une communication vachement tournée vers les meufs. Et je me suis déjà fait ramasser d'ailleurs par un mec trans qui m'avait écrit en me disant « J'adore ce que tu fais, mais en fait à chaque fois tu es genre tout au féminin. Et moi je ne sais pas trop où est ma place. » Donc maintenant j'essaie de préciser, femmes et personnes LGBT, qu'est-ce que tu ressens par rapport à ça ? Est-ce que tu as l'impression parfois d'avoir le cul entre deux chaises ? Même si après franchement, d'un côté les meufs font ça pour se protéger, mais je sais même que quand je vais dans des événements et que je dis « Ouais mais non les mecs, ... Il y a toujours des meufs qui vont me reprendre, qui vont me dire non les mecs cis, pour pas qu'on parle des mecs trans et tout, mais sur internet on le fait moins, c'est à qui ira le plus vite, à qui fera le plus de visibilité, donc on va essayer d'être le moins dans la nuance, etc. Est-ce que tu as quelque chose à nous dire sur ça aujourd'hui ? Peut-être une piste de réflexion aussi pour toutes les meufs ?

  • Speaker #0

    C'est bien que tu en parles parce que c'est pas évident je pense pour les mecs trans et les meufs trans. de dire qu'on ne se sent pas concerné parce qu'effectivement, il y a vraiment besoin d'espace en non-mixité pour les femmes en général. Et c'est hyper important d'avoir des business qui parlent concernés et des business féministes. Déjà, j'ai envie de dire aux gens qui veulent travailler pour les femmes, les femmes cis ou les femmes trans, les femmes en général, on a le droit d'avoir une communication au féminin. Tu as le droit de travailler pour la cible que tu veux et c'est OK. Tu as le droit aussi de travailler au masculin ou... ou en neutre, déjà il n'y a pas forcément d'injonction à forcément faire de l'inclusif pour tout le monde tout le temps. Mais par contre c'est vrai que si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non binaires et aux mecs trans en ayant une communication en féminin, ça pose des questions. Et moi c'est vrai que je l'ai vécu, il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou que je voulais. Et en fait ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur com. Et c'est vrai que ça pose la question de notre place à nous. Je pense qu'il y a des petites techniques de dire « femmes et minorités de genre » , ça englobe beaucoup de gens et ça permet d'être inclusif. Il y a aussi un point qui est important, c'est le féminin neutre. Moi, j'ai notamment été coachée par deux personnes qui sont antisexistes, féministes et qui ont une communication pas forcément féminine dans leur... communication visible sur les réseaux, mais dans les événements, c'est posé dans le cadre qu'on va parler au féminin neutre pour tout le monde. Et les mecs qui sont présents, trans ou pas, en fait, on va parler au féminin neutre. Et je trouve que c'est intéressant de mettre le féminin et de mettre le féminin neutre, parce que ça pose aussi pour les mecs cis l'expérience de ce que c'est d'être exclu de la langue et d'inclure autrement les... les femmes et les minorités de genre, mais c'est vrai que ça peut nous, à titre perso, nous faire sentir pas concernés. Donc c'est vrai que si vous voulez inclure et être en tout cas safe, c'est une des choses à faire pour les personnes, les minorités de genre, les personnes non-binaires et trans, c'est bien de le préciser. Et pareil pour les femmes trans en fait, c'est pas parce que tu as une communication au féminin que tu es safe pour les femmes trans. Moi je pense que l'inclusion, elle vient, c'est un travail à faire et en vrai il n'y a pas de bonne façon de faire. On fait tous comme on peut avec les armes qu'on a et au fur et à mesure on apprend et on fait de notre mieux. Mais je pense que de préciser que c'est safe pour les personnes trans et que les femmes trans sont bienvenues quand c'est une communication en féminin, c'est nécessaire pour que ces personnes viennent. se sentir légitime de venir, tu vois. Mais on n'est pas obligé de tout genrer au neutre, on n'est pas obligé... Je pense que le minimum, c'est de mettre LGBT friendly quelque part, bienvenue aux femmes trans aussi, tu vois, de répéter ça de temps en temps, de dire que je parle au féminin neutre, mais ça inclut toutes les femmes. Et effectivement, après, la question de la non-binarité aussi, c'est un questionnement, parce qu'on les oublie beaucoup, les personnes non-binaires, Aïe ! Et peut-être de dire LGBT friendly ou minorité de genre, ok, ça englobe tout le monde. Mais ça pose la question de comment tu fais, si tu fais des cercles de femmes, est-ce que tu acceptes les personnes non-binaires ou pas ? Et je pense que si c'est le cas, il faut le dire et le clarifier, le préciser pour que ces personnes se sentent légitimes de venir et à l'aise de venir.

  • Speaker #1

    Deux dernières questions, mais des questions plutôt... légères. Donc la première, quel créateur de contenu tu peux nous conseiller ? Quelqu'un qui travaille un petit peu sur les questions de discrimination. Tout ce dont on vient parler pendant une heure. Et la deuxième, est-ce que tu peux nous conseiller aussi des productions artistiques, littérature, films, etc. sur les discriminations, les luttes LGBT. Moi, je te donnerais le mien, qui est mon livre préféré. Pourtant, il ne parle pas de meuf lesbienne. Enfin, si, c'est une meuf lesbienne, mais qui transitionne. Le livre est assez compliqué, mais c'est mon livre préféré depuis la nuit des temps. Je n'ai pas attendu que tu viennes aujourd'hui pour le dire. À ton tour.

  • Speaker #0

    Deux recos indispensables de personnages LGBT. La première, c'est Lorraine Marx, qui est comédienne, metteuse en scène, critique, qui fait des critiques de cinéma. sur son Instagram en ce moment, qui est délicieusement pertinente, drôle. Elle a aussi un seul en scène que je n'ai pas encore vu, qui aborde les sujets de santé mentale et de transition, et qui a beaucoup d'excellents avis. Donc, je pense que c'est quelqu'un sur scène à aller voir. Et si vous voulez vous éduquer sur des questions aussi... de classe et d'invisibilisation des personnes trans, mais aussi si vous aimez le cinéma et la littérature, elle fait des critiques en roue libre sur les bourgeois qui font la culture et c'est délicieux et ça éveille beaucoup de choses. Et puis une deuxième chose, c'est le dernier livre d'Eli Hervé qui est journaliste avec qui j'ai travaillé. C'est un livre dans lequel j'ai partagé mon histoire qui s'appelle Transphobia. Merci. C'est en fait une enquête qui vient de sortir il y a quelques mois sur la désinformation et la discrimination transphobe des médias en France. C'est vraiment une enquête sur comment on traite le sujet de la transidentité dans les médias et comment on laisse faire la montée de l'extrême droite et de la transphobie dans beaucoup de complaisance. C'est très très très sourcé, c'est facile à lire. Et il y a beaucoup de personnes concernées, dont moi, mais aussi l'autre Autignon et d'autres personnes transvisibles, qui ont partagé leur expérience. Et c'est super intéressant et surtout très nécessaire.

  • Speaker #1

    Super, merci beaucoup. Ça sera mis dans la bio, dans le résumé. Est-ce que Transphobia, c'est une réponse à Transmania ?

  • Speaker #0

    Un petit peu, oui. Je ne vais pas parler pour la personne, pour Elie. mais oui en fait ça débunk toutes les idées de phénomènes de mode et de contagion sociale qu'on entend sur la transidentité. Et surtout, ça explique comment les médias sont complices de la montée de la transphobie.

  • Speaker #1

    Super, merci Alan. Pour ma part, créateuriste de contenu, je ne sais pas. Il y en a trop, je n'ai pas envie de faire une boulette, je n'ai pas envie de dire quelqu'un et pas quelqu'un d'autre. Donc, vivez les personnes que je suis sur Instagram, normalement, elles ne sont pas trop mauvaises. Mais mon livre préféré ever, c'est Stun Butch Blues de Leslie Fenberg. C'est l'histoire d'une meuf juive prolétaire. Et c'est l'histoire de sa transition, de sa vie, des luttes antiracistes, des luttes de classe dans les usines. Bref, je ne lui rends pas du tout honneur quand je le présente, mais c'est vraiment un livre fabuleux, fabuleux, fabuleux, qui d'ailleurs, si je ne me trompe pas, est écrit au féminin de tout. Donc voilà, ça c'est Marocco. Alan, on peut te retrouver sur LinkedIn, Alan Raymond. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait, sur LinkedIn, Instagram principalement. Et sur mon site internet aussi, agence-alan.fr.

  • Speaker #1

    Super, est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

  • Speaker #0

    Non, mais merci, je veux juste te remercier de ce moment d'échange, je pense que c'est important et je suis ravi de pouvoir participer. à parler de ces sujets-là. Si jamais vous avez des questions, si vous avez envie d'en discuter, je suis aussi très dispo en DM sur Instagram. Donc, n'hésitez pas.

  • Speaker #1

    Merci à toi. Merci, Alan. Au revoir. Bisous. Ciao, ciao. Et voilà, c'est déjà fini, ma star. Alors, sache que c'était un pur plaisir de partager ce moment avec toi. Si cet épisode t'a parlé, montre-moi tout ton amour. Abonne-toi et mets-moi 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. En attendant, tu peux me retrouver sur Instagram. arrobase jasmine.tweetoo sur ma newsletter Walk Me Up ou encore sur LinkedIn jasmine.tweetoo Tu trouveras tous les liens et toutes tes informations en description. Et puis, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. Allez, stay tuned, my bad bitch.

Description

T’as déjà tout perdu à cause de ton prénom ?
Lui, oui.


Alan est une personne transgenre qui politise son taf : avec l’Agence Alan, il aide les freelances atypiques à prendre leur place grâce à une com’ plus safe, plus humaine et surtout plus honnête. Photographe de formation, réal de docu aujourd’hui, il raconte comment il a dû tout reconstruire après son coming out trans : SEO cramé, fiches Google disparues, clients perdus — et pourtant, toujours debout.


Dans cet épisode :

  • Le vrai prix d’un coming out quand t’es indépendant·e.

  • Comment on pose ses limites face aux questions qu’on ne devrait jamais poser (« c’est quoi ton dead name ? »).

  • Pourquoi dire « femmes ET minorités de genre » peut transformer ta com’ et faire que tout le monde se sente à sa place.

  • Ce que ça coûte émotionnellement de vivre, bosser et exister quand ton identité est politique.


💡 Ses recos culturelles :

  • Lauren Marx — comédienne, metteuse en scène, critique ciné : génie brut.

  • Transphobia de Eli Hervé — une enquête coup de poing sur la désinformation et la haine anti-trans dans les médias.


🔗 Ses liens :
👉 Site
👉 Instagram
👉 LinkedIn


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non-binaires et aux mecs trans en ayant une communication féminin, ça pose des questions. Et moi, c'est vrai que je l'ai vécu. Il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou je voulais. Et en fait, ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur corps.

  • Speaker #1

    Hello, ma star ! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Grosse Rageuse, le podcast des meubles qui en ont marre qu'on leur dise comment exister. Moi, c'est Jasmine. Et après des années à me détester parce que je ne compterais dans aucune case, j'ai décidé d'envoyer péter les inventions et d'enfin m'assumer, pour le meilleur et pour le pire.

  • Speaker #2

    Je suis Mme Alaba Edgar, avec Tartine.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je suis coach et mentor en storytelling, personal branding et copywriting. En bref, je suis celle qui t'aide à transformer les « t'es trop inspirante » en « shut up and take my money » . Ici, on parle cash, on assume nos galères et on se donne la permission d'être qui on est vraiment. Sans filtre, sans bullshit,

  • Speaker #0

    juste nous.

  • Speaker #1

    Alors mets tes écouteurs, prends ton petit carnet, ton café, ton thé et même ton matcha et prépare-toi à un moment de pure folie. Allez, c'est parti mon kiki !

  • Speaker #2

    Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de podcast de Grosse Rageuse. Aujourd'hui, je ne suis pas toute seule, je suis accompagnée de Alan, Alan Raymond. Bonjour Alan.

  • Speaker #0

    Salut.

  • Speaker #2

    Alors déjà avant de commencer, comme d'hab, je ne vais pas beaucoup innover, je vais te remercier d'avoir accepté cette invitation, d'avoir accepté d'être avec moi aujourd'hui dans Grosse Rageuse Est-ce que tu peux te présenter Alan ?

  • Speaker #0

    Oui avec plaisir, je suis ravi d'être là déjà pour parler un peu de plein de choses Je m'appelle Alan, je suis photographe de formation et depuis quelques années je fais de la communication, j'accompagne les freelances qui se sentent atypiques Merci. à prendre leur place grâce aux outils de com et un travail sur leur positionnement, leur image, mais aussi les aider à développer leur communication sur tout un tas de sujets. Donc j'ai un peu politisé mon travail et ma manière de faire de la communication.

  • Speaker #2

    Quand tu parles de politiser ton travail, de quoi on parle ?

  • Speaker #0

    Vaste sujet ! On parle de plein de petites choses qui sont un peu des angles morts dans le travail en général et dans... dans le travail des entrepreneurs et la manière d'accompagner les gens en général. En tout cas, c'est des enclements pour les personnes qui ne sont pas concernées. Quand je parle de politiser, c'est-à-dire qu'on prend en compte, dans notre manière d'aborder les gens, de travailler avec eux, de leur proposer des offres, mais aussi la manière dont on construit nos offres et la manière dont on travaille concrètement. On prend en compte les violences systémiques, les oppressions, et aussi on essaie de mettre du soin. en fonction des besoins des uns des uns des autres. Donc pour le dire grossièrement, on fait au max pour être le plus safe possible, le plus bienveillant, le non-jugeant, travailler sur nos propres biais et nos propres clichés pour ne pas reproduire ça, ne pas reproduire de violences systémiques, de micro-violences ou de moments gênants, ou en tout cas mettre les gens au maximum à l'aise dans le travail qu'on fait avec eux, avec elles, et aussi dans ce qu'on leur propose concrètement.

  • Speaker #2

    L'idée, c'est quand même d'humaniser le travail, d'essayer de plus humaniser par rapport à ce qu'on nous propose aujourd'hui.

  • Speaker #0

    J'ai l'impression qu'il y a plein de gens qui pourraient dire qu'ils sont humains. Pour moi, c'est un peu aller au-delà. C'est vraiment travailler sur nos ombres. Qu'est-ce qui fait que j'ai un cliché quand je pense à un chef d'entreprise ? Tout de suite, je vois un homme blanc, six, debout dans un endroit immaculé en gérant une équipe, et pas une femme noire. habillé avec de la couleur ou une personne en situation de handicap, une personne handicapée. Donc en fait, c'est plutôt travailler sur nos propres biais à nous. Donc pour moi, ce n'est pas qu'une question d'humain, c'est une question de travail en fait, c'est une question de bosser concrètement ces sujets pour devenir meilleur, mais ce n'est même pas ça. C'est pour bien traiter les gens. On peut se dire humain, mais sans avoir... en ayant des angles morts, en fait, parce qu'on n'est pas concerné par certains sujets. Et on peut penser qu'on accueille tout le monde sans s'être mis dans la tête et la peau des gens pour créer concrètement les conditions qui permettent aux gens de venir et à tout le monde de venir. Ça m'est déjà arrivé de discuter avec des médecins ou des dentistes, pour le coup, qui me disaient, moi, mes collègues... Ils pensent être safe et bienveillants pour tout le monde, mais de fait, il n'y a que des gens qui leur ressemblent qui viennent et ils ne sont pas du tout safe pour les personnes LGBT ou les personnes grosses parce qu'ils n'ont pas travaillé ces sujets-là, ou en tout cas ils ne savent pas par quoi ça passe concrètement pour mettre les gens à l'aise et pour être sécurisants, bienveillants et non-jugeants avec différents types de publics.

  • Speaker #2

    Et comment on passe de la photographie à accompagner les gens dans ça, en fait ? Comment on prend conscience qu'il y a un besoin ? Pourquoi on décide de commencer à travailler sur ses biais et d'aider les gens ?

  • Speaker #0

    C'est plus mon parcours perso. Il y a plusieurs choses. C'est que déjà, en tant que professionnelle dans la photo, j'ai fait plein de choses différentes. Et puis, je me rendais bien compte que ce que je préférais, c'était vraiment l'humain, le one-one, aider les gens qui me... qui avaient des entreprises un petit peu similaires aux miennes, donc des petites équipes, des collectifs, des artistes, des freelances, des musiciens, des créateurs, des artisans, et pas forcément des très grosses boîtes, parce que j'ai bossé avec beaucoup de gens différents et dont des très grosses boîtes, par exemple. Et je me sentais frustrée, moi, de ne pas aider les gens plus que ça et de venir juste faire quelques photos et repartir, alors que quand je travaillais avec des freelances, il y avait vraiment un sujet qui s'ouvrait quand on commençait à faire des images. On parlait de honte, on parlait de peur, on parlait de ne pas oser se montrer, on parlait de rôle de genre, de comment être crédible dans le travail. Et en fait, j'avais commencé à ouvrir une brèche et je donnais des conseils en com aux freelances qui venaient me voir et je commençais à travailler avec eux, mais sans vraiment facturer ce temps-là, en mode plus on s'aide les uns les autres et on se conseille. Et je me rendais bien compte que ce que je faisais en shooting, c'était ouvrir un espace qui permettait... de faire plein d'autres choses par la suite, en tout cas d'approcher certains sujets. Et je n'avais pas forcément les moyens, parce que je ne vendais pas de la com pour prendre soin de ce qu'on ouvrait pendant cet espace-là. Donc, je me retrouvais souvent à sortir de mon cadre. Les gens venaient pour une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie, et on dépassait souvent le cadre. J'abordais des sujets plus profonds, et on aurait pu, parce qu'ils avaient commencé à partager ces sujets-là. on aurait pu bosser et j'aurais pu les accompagner. Mais comme c'est ce passe que je vendais, on était un peu frustrés ensemble. Et aussi, je les laissais repartir avec leur sujet sur le cœur et je n'avais pas forcément prévu d'en faire quelque chose. Donc, je me retrouvais un peu à écouter les gens et à les conseiller sans vraiment l'avoir formalisé. Et il a fallu moi-même que je me forme et que je me forme aussi sur la partie systémique et violents systémiques et féminisme et... et intersectionnalité. Mais ça, c'était plutôt un travail perso que j'ai fait en parallèle. Et du coup, j'ai mis ces trucs-là dans mon travail, à la fois par envie, parce que je voyais qu'il y avait un besoin, mais aussi par nécessité. Parce qu'en cours de route, j'ai fait mon coming out trans. Donc, je suis une personne trans. Et j'ai réalisé ça super tard. Donc, j'avais 29 ans. Et il m'a fallu du temps, moi, pour comprendre, le dire, faire mon coming out. Et du coup, je me suis retrouvée moi-même. dans la case minorisée, alors que ce n'était pas mon plan de carrière. Et donc, je me suis retrouvé photographe trans et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais avec ça ? Et ça a amené aussi plein d'autres réflexions sur une révolution globale de ma vie pro et perso. Je me suis rendu compte que j'avais de la frustration dans mon travail, je n'étais pas vraiment au bon endroit, je n'avais pas osé faire de la com parce que je ne me sentais pas légitime. Et en fait, du fait d'être... de comprendre que j'étais trans, j'ai réalisé que moi-même j'avais aussi un besoin de travailler avec des personnes qui me sécurisent. Je ne peux plus travailler au salon de l'automobile entouré de mecs 600 costards qui passent leur journée à me dire est-ce que tu es une meuf ou un mec et qui me met genre et qui ne respecte pas ou alors faire des coming out au téléphone à chaque appel de clients ou à chaque rendez-vous, répondre à des questions gênantes. Donc j'ai dû moi-même déjà pour moi réadapter mon travail pour que je me sente mieux. d'un point de vue des violences systémiques, mais aussi pour mettre plus de sens dans mon travail parce que je n'avais pas réalisé que je n'étais pas tout à fait au bon endroit. Et la lecture que j'en ai aujourd'hui, c'est en fait que la photo, c'était un peu une manière de me cacher. Et j'ai un peu traversé ce truc-là. Et aujourd'hui, je me montre un peu plus, je prends un peu la parole, j'essaye en tout cas. Et j'ai politisé ma manière d'aborder à la fois la photo et la communication.

  • Speaker #2

    J'ai une question, mais j'ai peur qu'après je fasse partie des personnes qui posent des questions. C'est la question ultra transphobe.

  • Speaker #0

    Je suis là pour ça. Franchement, je suis là pour répondre aux questions.

  • Speaker #2

    J'ai une question. En fait, quand tu parles de ton coming out, alors ça fait trop, j'ai des amis noirs. J'ai des potes, forcément, vu le milieu dans lequel j'ai évolué, vu mes choix de vie, mon lifestyle. Donc j'ai pas mal de... potes qui sont trans, etc. Et en fait, moi, ce qui m'a vite fait fait tilter, ou pas en fait, parce que j'arrive avec mes présupposés, c'est cette impression que tu donnes de ne pas avoir fait partie de la communauté LGBT avant ton coming-out trans. Et c'est vrai que moi, j'ai... Ce truc de « avant la transition, mes potes étaient lesbiennes » . Je ne sais pas si je peux le dire comme ça. Maintenant, elles sont hétéros, tu vois. Ce n'est pas ton cas ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Non, ce n'est pas forcément une mauvaise question.

  • Speaker #2

    Tu as vu comme j'ai marché ?

  • Speaker #0

    Oui, mais bien formulé. En fait, c'est une vraie question. Est-ce que j'étais déjà dans ce milieu-là avant ou pas ? Je pense que ça a du sens d'y répondre. Moi, pas du tout. En fait, je regardais de loin le drag, la scène drag. J'avais quelques potes gays, pans, lesbiennes, mais vraiment un peu de loin. Et tant que ça, j'avais peut-être deux, trois potes concernés. La question de la non-binarité n'était pas non plus autour de… de la transidentité n'était pas dans mon réseau. Et je crois que la première personne trans que j'ai rencontrée, c'était… vraiment super tard en fait quand j'avais déjà compris que j'étais trans. Donc moi je me suis renseignée et je me suis rapprochée de la communauté LGBT par nécessité pour comprendre déjà ce que je vivais en écoutant des podcasts, en me renseignant, en suivant des gens sur Insta, sur Youtube, des documentaires, des articles, de la ressource, un peu dans tous les sens et j'ai commencé à fréquenter entre guillemets le milieu LGBT, pas forcément via le milieu LGBT mais via des espaces Merci. qui sont safe pour les personnes LGBT, donc j'ai rencontré des personnes LGBT là-dedans, qui est plutôt la communauté sexe positive ou des mouvements autour de la libération, non c'est pas très mal expliqué, libération sexuelle, il ne faut pas du tout dire ça comme ça, mais c'est des espaces où on parle de sexualité, on pratique la sexualité, et c'est des espaces féministes, antisexistes, et il y a un grand cadre qui est posé sur le respect des pronoms, des genres des gens, et c'est aussi un espace où on peut explorer. ce que c'est que d'être genré autrement. Et donc tu peux un peu cheminer sur tes questionnements aussi de genre. Et moi c'est un des espaces qui m'ont permis de questionner mon genre dans des retraites de développement personnel, un peu dans ces mouvances-là. Et c'est via cette communauté-là que je suis rentré dans la communauté LGBT et aussi par nécessité, quand je me suis posé les premières questions, je suis allé dans des cercles de parole, dans les assos LGBT. Et au fur et à mesure, j'ai rencontré de plus en plus de personnes concernées. Et surtout, pour avancer dans ma transition, je n'avais pas le choix que de me renseigner. Et les infos, on les trouve où ? Dans des groupes Facebook, tout simplement, de personnes LGBT, de personnes trans. Et de là, j'ai découvert les assos, tout ça. Et je suis montée à Paris un peu en même temps. Et donc, il y a plus d'offres, plus de choses qui existent. Et donc j'ai eu besoin de me rapprocher des personnes qui vivaient des choses similaires aux miennes, pour cheminer moi-même personnellement, comprendre ce que je vivais, et au fur et à mesure je me suis fait des liens, et au fur et à mesure j'ai créé aussi un entourage, et je ne fréquente pas que des personnes LGBT très loin de là. Mais en fait c'est un vrai chemin de comment on appréhende la communauté LGBT, c'est vraiment très très différent pour les uns et pour les autres. Il y a des gens qui sont un peu en rejet et c'est vrai que moi dans mon cheminement je dois avouer qu'il y a des moments où j'avais peur d'y aller, j'avais peur de rentrer dans une bulle, j'avais peur de me sentir si bien dedans qu'en fait je ne peux plus être à l'extérieur. Et en fait c'est ce qui s'est passé de fait. Il y a plein de choses que j'ai arrêté de faire, des endroits où j'ai arrêté d'aller, dans le travail mais aussi dans les... de perso parce qu'en fait on est fatigué de répondre à des questions gênantes et aussi de se sentir en danger donc c'est vrai qu'il y a un besoin de repli et moi c'est vrai que j'ai eu besoin de trouver juste un milieu entre j'ai besoin de ressources, de repli, de trouver des adelfes avec qui je peux échanger avec qui je peux être en lien pour cheminer mais aussi trouver de la ressource pour pouvoir aller à l'extérieur et pas être que dans cette bulle moi je sais que j'ai besoin d'altérité et j'ai besoin de de rencontrer des gens différents. Et donc j'essaye de trouver le juste milieu. Mais de fait, ça fait vraiment beaucoup de bien et c'est vraiment nécessaire ces espaces, donc j'y passe quand même du temps.

  • Speaker #2

    Moi, c'est vrai que j'ai une expérience tout à fait différente avec les milieux LGBT que j'ai beaucoup fréquentés et que je rejette beaucoup aujourd'hui. Je ne rejette pas les personnes, encore heureux. Je rejette les milieux qui m'ont fait beaucoup de mal. Alors c'est très douloureux d'être avec des personnes qui se posent des questions trop connes et tout. Franchement, c'est fatigant. Mais tu en as parlé, tu as parlé de repli. Moi, j'ai eu l'impression vraiment à un moment d'être dans une secte et de ne pas réussir à penser un autre.

  • Speaker #0

    En tout cas, dans tous les milieux communautaires et dans tous les mouvances où on veut faire communauté par nécessité, on essaye de ne pas reproduire les violences qu'on vit à l'extérieur, mais on n'est pas vierge de notre éducation. Donc il y a aussi des biais, il y a des violences à trac communautaire, il y a de la transphobie, il y a de la biphobie, il y a du racisme. Et tout ça, ça existe de partout. Donc c'est un peu l'illusion que c'est safe. C'est pour ça que je dis que nous, on... Il n'y a pas d'espace safe, on est safe d'une part, il faut toujours être en vigilance de ça et faire attention à soi. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes de partout. Après, ça dépend aussi forcément des sectes, il y a des personnes problématiques, plus ou moins, en fonction des lieux. Mais c'est vrai qu'il y a aussi la pureté militante, il y a de la pression, il y a des fois des injonctions. Et effectivement, c'est aussi des gens qui sont en construction et les milieux sont aussi en train. Les assos, les milieux sont en construction aussi, de travailler sur ses propres biais. Typiquement, la question de la transphobie et du racisme, c'est des choses... J'ai l'impression qu'il y a des choses qui avancent, mais c'est lent, quoi.

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr.

  • Speaker #0

    Donc, il y a de l'équipe...

  • Speaker #2

    Pas de problème en mondial. Oui. C'est les débuts de certaines prises de conscience,

  • Speaker #0

    on va dire. Mais en fait, quand on dit milieu LGBT, ça ne veut rien dire. Ça veut dire quoi ? Moi, j'ai quelques potes LGBT, je vais dans quelques endroits. à quelques événements qui a l'impression de fréquenter le milieu LGBT. Mais en fait, il y a toute une multitude d'événements, d'associations, de gens et on ne peut pas réduire tout ça à des expériences individuelles. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes et il y en a partout.

  • Speaker #2

    Oui. J'ai une question. Tu étais déjà freelance avant de faire ton coming out ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Ouais, t'as fait quoi ? Raconte-nous un petit peu ton parcours sur ça.

  • Speaker #0

    Alors, je suis né en 91. Et j'ai commencé l'indépendance. En fait, dès que le statut d'auto-entrepreneur a pu exister, je me suis inscrit et j'ai commencé à bosser avant d'avoir mon bac. Donc, mon premier projet pro photo, c'était à 18 ans et un jour. Et j'ai gardé ce statut pendant mes années de... de lycée de photos. J'ai fait une école de photos en Belgique avec un aspect aussi un peu com, en tout cas photo un peu large, image. Et en parallèle, j'ai commencé à prendre des projets, à me lancer pour avoir un peu d'expérience et pas tomber des nues à la sortie de l'école de comment je fais pour un des clients et me faire un petit peu les armes et aussi pour avoir un petit peu de sous. Et donc, j'ai quand même pas mal bossé pendant mes études et quand j'ai fini mon... Mon diplôme, je me suis lancé à temps plein à Lyon. J'étais en Belgique et je suis arrivé à Lyon dans une ville où j'avais un oncle, deux petits cousins, trois petits cousins et c'est tout. Je ne connaissais pas grand monde et je me suis lancé à temps plein et j'avais un peu d'aide familiale. J'avais un an ou deux ans pour me lancer et être autonome. et donc je me suis mis à fond en tant qu'indépendant à Lyon et j'ai essayé de bosser dans plein d'endroits différents, j'ai fait des reportages d'entreprise, des reportages pro, des pubs de comédiens, beaucoup de photos de scènes, d'événementiels, de musiciens et tout un tas de choses. J'ai participé à plusieurs studios photo, j'étais dans plusieurs collectifs, j'ai monté mon propre studio photo avec d'autres collègues et j'ai passé 9 ans à Lyon, à explorer plein d'aspects de la photo, à me former à la vidéo, à me former à plein de choses en tant que freelance, à me prendre aussi des bonnes claques dans la gueule, à faire des erreurs, à réapprendre, à mal choisir les journées qui se posaient, puis après revenir en arrière. Et en même temps, j'ai appris plein de choses, j'ai investi beaucoup et j'ai fait, je pense, plein d'erreurs de débutant aussi qui m'ont permis d'au bout de neuf ans, de faire un gros tri de qu'est-ce que je garde. Qu'est-ce que je sais faire ? Qu'est-ce que je veux faire ? Vers où je vais ? Et j'ai fait mon coming out au bout de 9 ans de freelancing à Lyon. Et ça a pour moi amené à une révolution dans ma vie assez intense. J'ai réalisé que je pouvais passer de l'autre côté de la caméra, accompagner les gens autrement, accompagner sur d'autres aspects, travailler avec d'autres gens dans la com, faire aussi de la vidéo, plus de vidéos. Et donc je me suis monté dans un très beau projet de film documentaire. Je me suis lancé un peu dans la vidéo, j'ai fait quelques prises de la vidéo, et ce mouvement-là a amené un ras-le-bol global de ma vie à Lyon. En fait, j'ai l'impression d'avoir fait le tour, et il fallait que je mue, entre guillemets, et je suis parti à Paris. J'ai une amie qui m'a accueilli, elle m'a dit « viens à Paris » , et du coup je me suis retrouvé à Paris avec mon identité en questionnement. Et de là, j'ai repris tout à zéro, aussi parce que j'ai vécu des problématiques liées à la transition. dans mon travail, qui ont fait que j'étais un peu obligé de repartir à zéro avec un nouveau projet, une nouvelle adresse mail et aussi un nouveau réseau courant.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ça ou pas ?

  • Speaker #0

    Tout à fait. Bon, être trans, c'est plein d'emmerdes, c'est plein de joie aussi, c'est plein de choses. Mais ce n'est pas juste faire des opérations et prendre des hormones, c'est changer de statut social, c'est être confronté à des coming-out réguliers, confronté à des problèmes administratifs, de vivre plein de petites étapes, d'oser s'habiller autrement, d'oser sortir dehors. un peu différemment, se faire genrer, dire son prénom à sa voisine pour la première fois, traverser plein de choses. Et dans le travail, il y a tout un tas de problématiques que je n'avais pas du tout prévues et qui m'ont un peu surprise, notamment des problèmes administratifs. Des trucs qui paraissent bêtes, mais en fait, quand tu changes de prénom, ma vie d'avant était tout basée sur mon prénom d'avant. Le nom de ma boîte, c'était mon nom et mon prénom. Donc déjà, partant de là, en voulant tout changer, il a fallu changer le nom de ma boîte. Je me suis rendu compte que ce n'est pas le bon statut, donc j'ai aussi changé de statut de boîte. Donc ça veut dire déjà repartir avec une nouvelle entreprise. C'est des frais, c'est du temps, ça me tense. Mais surtout, moi dans mon cas, j'avais une activité, tout mon canal d'acquisition client était basé sur le référencement. Donc les gens tapaient... photographiant sur internet et il me trouvait et ça c'était ma stratégie principale que j'ai mis six ans à mettre en place pour être sur la première page j'avais bossé mon référencement à fond je m'étais formé pour ça j'avais un site web j'avais investi de l'argent et je travaillais vraiment beaucoup mon positionnement vis-à-vis de mon marché pour que voilà être positionné sur des mots clés sauf que tout ça tout ce travail là que j'avais mis six huit ans à mettre en place et avoir et avoir une activité qui roule a été basé sur mon prénom sur mon nom de domaine, sur mon prénom et mon nom, donc tous mes backlinks, mes copyrights, tout ce que j'avais mis en place, et dépendait de mon prénom d'avant. Donc, j'ai changé de prénom, et donc, par exemple, typiquement, les 150 avis que j'avais sur ma fiche Google, que j'ai mis des années à avoir, parce que c'est un travail qui est long, qui me rapportaient beaucoup de référencements et de clients, et bien, j'ai perdu ça en trois mois. parce qu'on ne peut pas changer d'entreprise et garder les avis clients, parce que j'ai dû changer de prénom dans mon nom d'entreprise, et donc on m'a dit que je faisais de la fraude, et donc Google n'a jamais voulu réhabiliter mon nom. J'ai perdu ma fiche Google. Et donc, rien que d'en parler alors que ça fait des années, je suis encore sous le coup de l'émotion, parce que ça a vraiment été difficile, parce que j'avais vraiment mis toute ma life là-dedans, et beaucoup d'énergie. Et donc je me suis rendu compte au bout de six mois de galères administratives que je n'avais pas le choix de recommencer à zéro, jusqu'à vraiment reprendre une nouvelle adresse mail et repartir à zéro. Et donc j'ai perdu un trafic sur mon site, j'ai perdu une énorme partie de ma visibilité, et en parallèle, la transition ça va pour beaucoup de personnes avec des problèmes familiaux, dit des violences intrafamiliales, une exclusion, des doutes, et aussi une charge de travail de « ok, je suis trans, ok, est-ce que je transitionne ? » « ok, ça veut dire quoi, transitionner ? » « il faut que je fasse des recherches, que je me renseigne ? » Les démarches administratives sont très lourdes, et donc en fait, ça impacte beaucoup ton estime de toi, ton moral, ta capacité à travailler, ça te prend du temps. Tu vis aussi, à chaque fois que j'allais à la poste, tu es en enfer pour récupérer des colis. aller à la pharmacie, aller trouver des médecins safe. Et du coup, en fait, il y a un coût émotionnel qui est énorme, qui moi m'a beaucoup impacté dans ma capacité à travailler, parce que j'étais persuadé que j'avais fait des allers-retours à Lyon, à Paris, donc j'habitais à Lyon, et je faisais déjà beaucoup d'allers-retours à Paris, parce que j'avais déjà de la clientèle à Paris. J'étais persuadé que j'allais passer un an à faire encore des allers-retours avant de consolider ma nouvelle boîte à Paris et que la transition professionnelle allait se faire parce que j'avais préparé un peu le terrain. Sauf qu'en fait, j'ai perdu mon référencement. En fait, j'ai eu des problèmes pour me faire payer parce qu'il y a des problèmes administratifs avec la banque. J'ai eu des problèmes avec des plateformes en ligne pour me faire payer. Et tout ça m'a beaucoup impacté. Je n'arrivais plus à dire qui j'étais parce que pendant six mois, il a fallu que je dise à mes clients « En fait, je suis trans, maintenant c'est Alan, c'est il. » Expliquer à chaque fois, me retrouver sur des prestations où je ne me sens pas safe. du coup Du coup, je rentre chez moi, je chiale ma race, je n'ai plus du tout envie d'y retourner. Et en fait, le coût émotionnel a été trop fort pour moi. Tu vois, typiquement, il y a quelque chose que je faisais beaucoup avant, c'est d'aller dans des after-work organisés par plein d'assos, plein de structures différentes, pour rencontrer d'autres entrepreneurs et développer ma clientèle. Et en fait, j'ai dû arrêter de le faire. déjà parce que j'avais moins d'argent pour sortir puisque ma boîte a commencé à se casser la gueule et parce que faire un coming out à chaque fois que tu sors et te prendre en pleine tronche de t'es une meuf, t'es un mec à chaque fois que tu sors ben en fait c'est moi j'étais là pour le travail j'étais pas là pour pour avoir les tripes à terre devant tout le monde et me sentir méga vulnérable en danger aussi parce que du coup on se prend des réflexions et donc j'ai arrêté purement et simplement d'être d'être dans les after work et j'ai aussi vécu de l'exclusion familiale très forte jusqu'à des démarches juridiques, mais sur d'autres sujets. Donc, en fait, tout est arrivé en même temps. Et en parallèle, je n'ai plus de site web qui est fonctionnel. Les gens ne voient plus du coup, en fait, être visible alors que je ne me sens pas encore moi même, entre guillemets, et que j'ai plein de sujets à gérer. C'était un très gros... C'était compliqué, quoi. Donc, j'ai quand même tenu le coup et je suis reparti à zéro. Mais voilà, pas le droit au chômage. J'ai eu des problèmes d'assurance pendant l'arrêt de... Pendant l'opération que j'ai faite, je n'ai pas eu d'indemnité au chômage, d'indemnité de l'assurance que j'aurais dû toucher. J'ai eu plein de soucis comme ça, administratifs, qui font que... Franchement, je ne sais pas comment j'ai tenu. J'ai tenu grâce à mes amis. Mais en fait, il y en a plein qui sont partis aussi. Il y a aussi tout ce que tu vis du tris social. Il y a des choses que tu ne peux plus faire. Tu dois appréhender le fait de se sentir en danger autrement qu'en étant une meuf cis, en tout cas perçue comme une meuf dans la rue. Tu appréhendes aussi le danger, tu appréhendes le fait d'être minorisée, tu appréhendes le fait que dès que tu ablumes la radio, tu entends des blagues transphobes, tu entends des débats surtout à la télé, la montée du fascisme, et du coup, tu es là, OK. je vais arriver à Paris, je vais me faire agresser, tu vois. Et donc, il y a aussi tout ça à appréhender, en plus de vivre la transition, en plus de vivre des gens qui arrêtent de te parler, des personnes de ma famille qui m'ont tourné le dos, les liens qui s'arrêtent. Donc, en fait, c'est en ça que la nécessité de trouver une famille choisie, la communauté LGBT, là, c'est une réponse incroyable, parce qu'en fait, il y a beaucoup de gens qui n'ont juste plus de famille. Et le fait de vivre ça, forcément, ça a un impact sur ton travail.

  • Speaker #2

    C'est drôle ton histoire parce qu'elle va un petit peu à l'encontre de ce qu'on imagine dans l'imaginaire collectif qui est qu'un mec trans, on savait quand il avait 10 ans que lui c'était un petit garçon. Il nous fait son coming out sans le vouloir quand il a 12 ans en disant « moi je suis un petit garçon » . Il a toujours été très garçon manqué, puis il a attiré par les filles. C'est pour ça que moi je te dis que c'est la réalité que je connais. Moi, je ne connais aucun mec trans qui était une meuf hétéro, etc. Donc en plus, outre le fait de changer parce que les gens sont en mode... Il y a aussi, sur le marché de la désirabilité, tout change en fait. C'est-à-dire, même si par exemple, tu fréquentais des mecs, tu étais hétéro, là tu deviens gay. Comment ça se passe quand on n'avait pas déjà un pied dedans ? Et donc en fait, c'est un petit peu ce truc de quand tu dis... Oui, c'est vrai, ça arrive tard, ça arrive à 29 ans. Mais je trouve que c'est intéressant d'interroger des gens à qui ça arrive tard parce qu'on a trop cet imaginaire que ça doit arriver...

  • Speaker #0

    Dans mon cas, c'est arrivé tard. En fait, je l'ai dit tard et j'ai commencé ma transition tard, mais c'était là depuis très longtemps. Je n'étais juste pas en capacité, pas en sécurité émotionnelle. Je n'avais pas un cadre assez sécurisant pour faire mon coming out et surtout, j'avais d'autres sujets à gérer. J'ai vécu avec beaucoup de problèmes de santé pendant six ans. et j'avais mon entreprise à fond. En fait, il y a une personne trans un jour qui m'a dit, une médecin, elle m'a dit tu sais il y a quand même beaucoup de personnes trans quand elles font leur coming out tard, ça vient après des gros bouleversements, ça peut venir avec des sujets comme le burn out et le fait de s'être mis à fond dans le travail un peu pour se cacher ou pour ne pas voir ce que tu vis personnellement. Moi c'est typiquement ce que j'ai vécu, je me suis mis à fond dans le travail pour pas me regarder personnellement. Et c'est le fait de faire de l'épuisement, le burn-out et tout ça qui m'a un peu arrêté. C'est mon corps qui m'a arrêté en me disant, il y a un truc qui cloche, il y a un truc qui ne va pas dans ta vie, il faut que tu le regardes. Mais par contre, j'ai toujours été, tu vois, quand tu parles de garçon manqué, et en fait, moi, j'ai toujours été ce que je suis. D'ailleurs, j'ai l'impression qu'avec la transition, j'ai juste accepté ce que je suis et j'ai l'impression de revenir un peu en arrière à mes origines, entre guillemets, parce que j'ai arrêté de vouloir performer le genre. ou vouloir correspondre à un rôle qu'on m'avait assigné à la naissance. En fait, j'ai tout fait pour... En gros, je suis vraiment le bon trans entre guillemets. J'ai vraiment tout fait pour correspondre à cette image de meuf et à me conformer. Et c'est venu avec la peur de ne pas être acceptée dans le travail. Quand j'ai commencé à travailler, j'ai commencé à être dans un genre féminin, plus féminin. Alors qu'avant, j'étais... et j'avais une expression de genre très masculine, très androgyne. Et de fait, de travailler avec des grosses boîtes, de travailler avec des gens très variés que je ne connaissais pas, j'ai un peu reproduit ce qu'on attendait de moi. Et pour pas trop dénoter déjà que, en tant qu'artiste et photographe, je dénotais déjà pas mal, j'avais surtout envie de me faire accepter d'avoir du boulot. Donc, il y avait surtout la première problématique, c'était d'avoir du taf. Et ça est venu, j'ai commencé à me poser dessus, sur ces questions-là, et à me laisser ressentir quand j'ai eu l'espace, quand je me suis créé l'espace pour moi. Et en fait, mon coming out, j'ai pu le faire grâce au fait de trouver une communauté sécurisante, pas forcément LGBT d'ailleurs, mais de trouver des gens avec qui je me sens bien, des gens avec qui je peux être moi-même, et du coup, petit à petit, me sentir Sentir que je n'allais pas tout perdre en fait, que je n'allais pas perdre toute ma vie. Effectivement ça a quand même été un gros bouleversement, mais j'avais assez de sécurité intérieure pour me dire ok je le fais parce que parce qu'en fait déjà je n'avais plus le choix clairement, c'était soit ça, soit je ne pense pas que je serai encore là pour en parler. Et parce qu'à un moment donné, voilà j'ai presque 30 ans, est-ce que je continue à jouer ce rôle toute ma vie ou pas tu vois ? Et aussi parce que je ne savais pas, tout bêtement. Moi, je savais qu'il y avait un truc avec le genre depuis longtemps. Dans mes relations, j'ai toujours dit que c'était moi le bonhomme. J'ai toujours été très garçon manqué. Mais je ne savais pas que ça existait d'être trans. Donc, en fait, je ne savais pas forcément les mots pour comprendre ce que je vivais. Et il m'a fallu que je fasse des recherches, tu vois, pour tomber sur... Ah oui, en fait, c'est ça. En fait, j'ai le droit de transitionner. En fait, je peux vivre ça. Et c'est ça que je suis. Et c'est juste que j'avais un... c'était pour moi invisible, c'était un impensé, c'était pas des questions auxquelles... enfin des réponses auxquelles j'avais accès. Et après par rapport aux relations, alors moi j'avais une relation avec une femme il y a quelques temps, il y a quelques temps avant mon coming out, et du coup oui ça a posé des questions, mais tu vois mon coming out trans j'ai pu le faire grâce à un mec cis qui m'a beaucoup aimé, avec qui je me sentais bien qui m'a dit « écoute, si t'es trans, super, je t'aimerais que quoi qu'il arrive » . Et par contre, notre relation n'a pas continué. Mais il y a aussi des questionnements qui peuvent venir, mais ce n'est pas nécessaire. En tout cas, moi, je ne suis pas passé par la classe lesbienne parce que je ne suis pas en sexuel, donc je pense que je n'ai pas eu trop ce questionnement-là. Même si aujourd'hui, je m'autorise plus à relationner avec des femmes. Et c'est vrai que de changer de statut social, forcément ça change les rapports avec les gens et ça peut perturber de paraître gay dans la société, ça peut perturber une relation que j'avais en cours avec un mec qui n'avait jamais questionné sa sexualité. Pour lui, ce n'était pas possible d'être vu comme une personne gay ou même de questionner sa sexualité. Il était forcé de le faire parce que j'ai fait mon coming out, mais du coup je perds aussi des relations en cours de route et c'est vrai qu'il y a plein de... Il y a plein de sous-problèmes ou de sous-prolématiques qui peuvent arriver, mais ce n'est pas le cas de toutes les personnes trans. Vraiment, ce que je dis aujourd'hui, c'est ce que moi je l'ai vécu, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Et voilà.

  • Speaker #1

    T'as dit un truc que j'ai aussi tilté, je tilte beaucoup. T'as dit que t'avais pas envie d'aller dans des after work pour pas être confrontée à des questions que tu faisais avant, mais que t'avais arrêté de le faire. Alors moi, maintenant, je sais que t'es trans parce que tu l'as dit et parce que je suis ton contenu, mais t'as un bon passing. Pourquoi ? Alors je te pousse dans tes retranchements pour les autres qui nous écoutent. Pourquoi tu fais pas juste le mec 6 ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est très nouveau que j'ai un bon passing.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Parce que c'est pas magique de prendre des hormones, c'est pas en quelques semaines ou en quelques mois que ça change. Ça fait, je crois, depuis janvier, février, donc c'est très très récent, que les gens ne savent pas que je suis trans. Mais il y a encore six mois, c'est tout nouveau. Du coup, des fois, je me retrouve dans des situations, moi je suis sûr que ça se voit, ou que j'ai encore habitué au fait que ça se voit, et je me retrouve dans des situations où les gens n'ont pas compris. Donc des fois ça crée des incompréhensions, mais c'est très nouveau. Donc il a fallu, tu vois j'ai commencé Zermond il y a presque trois ans et demi, il y a trois ans qui se passent où on ne sait pas dans quel cas on met. Et les changements sont très progressifs, et là tu vois j'ai un peu de moustache mais c'est très récent. Et donc il y a eu toute une phase où j'étais hors case, en tout cas pour les gens. Donc, nécessairement, j'avais plein de questions et c'était pas très confortable. Et aujourd'hui, je dois capter que ça se voit plus ou beaucoup moins. Et donc, c'est d'autres problématiques.

  • Speaker #1

    C'est ça que j'allais dire. C'est d'autres problématiques dans le sens où... Alors, c'est une question qu'on ne pose jamais, mais c'est une question... Moi, par exemple, j'ai une copine, elle est trans. Elle, elle ne veut pas être vue comme une femme trans. Après, c'est différent. Les femmes trans, c'est autre chose. Avec la société dans laquelle on est, la misogynie, la ND, enfin... C'est très très violent pour les femmes trans. C'est encore...

  • Speaker #0

    Moi, j'ai clairement le privilège de passer pour un mec.

  • Speaker #1

    Oui, voilà, c'est ça que j'allais dire.

  • Speaker #0

    J'ai vu des privilèges que les femmes trans ne vivent pas.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est sûr. Mais ma question, c'est, toi, dans l'idéal, t'es OK avec le fait d'être vue comme un homme cis ou t'aimerais être vue comme un homme trans ?

  • Speaker #0

    Je suis en train de capter que c'est une question que je dois me poser en tout cas. Est-ce que je le dis ? comment je le dis, quand est-ce que je le dis, à qui je le dis. Moi déjà, il y a un enjeu d'être visible par rapport à ça, parce que j'ai à cœur de pouvoir accompagner d'autres personnes LGBT et qu'ils se disent que je suis des leurs, mais je ne suis pas obligé de le crier sur tous les doigts non plus. Mais il y a... En fait... C'est à la fois confortable parce que ça me met dans une sécurité que je découvre, de ne pas être en danger dans la rue, maintenant que j'ai un bon passing. Mais tu vois là, tu dis que j'ai un bon passing, mais on m'appelle madame trois fois par jour. Donc en fait, c'est très très subjectif et ça dépend vraiment des gens. Effectivement, depuis que je n'ai plus mes seins, ça a changé. On m'appelle beaucoup plus monsieur. Mais en fait, ce n'est pas forcément... une vérité absolue, on m'appelle Madame une fois sur deux. Donc, ce n'est pas complètement acquis. Et est-ce que j'ai envie de passer pour un mec cis ? Je ne crois pas parce que… Non, je ne crois pas. Mais en fait, il y a aussi une fierté d'être trans, d'être visible. Je suis fière d'être trans. J'ai envie de le dire parce que c'est politique de le dire, c'est politique d'être visible. Et j'ai envie de porter ça aussi. Après, ça dépend des contextes. Des fois, ça m'arrange de ne pas être visible, mais c'est très vite vu. Je ne sais pas, des contextes médicaux, des contextes où quand je raconte un peu mon parcours, dès qu'on rentre un peu dans des relations où je raconte ma vie, c'est parfois difficile de le cacher. Si je voulais le cacher, ce serait quand même aussi un effort. Pour moi, la problématique, c'est de ne pas dépenser de l'énergie à cacher les choses. La question de l'énergie est importante, en fait. De conserver mes points de vie, entre guillemets. Et je trouve, en tout cas, aujourd'hui, que si je devais le cacher, ça me demanderait beaucoup d'efforts. Et aussi, je ne peux pas vraiment le cacher, parce que, tu vois, je parlais de mon travail documentaire. Je réalise un film documentaire où je suis un des personnages du film. Et donc, dans mon travail, je me retrouve à... à pitcher mon projet devant des professionnels, là je suis en formation, j'écris dans une école de cinéma le projet, et donc je ne peux pas faire comme si ça n'existait pas, parce que c'est au centre de mon travail, c'est au centre de mes engagements, et c'est ce que je raconte aussi en partie, ce n'est pas le centre du film, mais c'est une chose qui va être visible dans le film, donc c'est difficile de passer outre. C'est vrai que pour l'instant, je ne vais pas trop dans des cadres où... où j'ai besoin de passer pour Amexis. À part dans la rue, pour être en sécurité, c'est vrai que j'ai surtout envie de fréquenter des gens qui sont OK avec mon identité et d'être sûr de ça pour pouvoir les fréquenter et pas prendre des risques de « si jamais ça se sait » ou « qu'est-ce qui va m'arriver ? » Parce qu'il y a aussi le danger qui va avec. Et donc, je préfère ne pas le cacher. Mais parfois, pour ma sécurité, Ça ne se voit pas, mais ce n'est pas un but pour moi de passer pour un ex-cis.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'aujourd'hui, être trans dans le business, c'est problématique ou pas, sachant que tu as créé ton propre business ? Ce que je veux dire, c'est qu'un peu comme ta famille choisie. Est-ce qu'il y a encore des limites ? Je présume qu'avec tes clients, non, vu qu'ils t'ont choisi. Mais est-ce que dans d'autres cadres, avec des prestats, ou est-ce que tu as déjà été confrontée à de la transphobie ? En fait, ce que je veux dire, c'est qu'on dit que quand on est indépendant, on a choisi une vie sur mesure. Donc, dans l'idée, on a une liberté d'être nous et de se confronter à rien d'autre, comme si on ne vivait pas dans une société. Est-ce que toi, tu ressens quand même les limites de la pensée des gens, de leur part d'ombre ?

  • Speaker #0

    En fait, oui, effectivement, je choisis des gens qui sont sécurisants et je choisis des collègues, des clients avec qui c'est cool. Mais ça n'empêche pas les questions parce que toutes les personnes ne sont pas forcément au fait de tout, éduquées. Ça n'empêche pas que les gens ragent, ça n'empêche pas des petits moments de gênance qui sont ok, tant que tu t'excuses et que ce n'est pas de la malveillance, c'est chouette. Mais par contre, il y a d'autres contextes. Là, j'ai un truc qui me vient, j'ai fait une conférence sur les freelances atypiques sur un salon d'entrepreneurs. J'ai eu rendez-vous avec une des personnes qui gère le salon. La première question qu'il m'a posée en rendez-vous, c'est « c'est quoi ton prénom d'avant ? » . Donc, en fait, ce n'est pas parce que je suis positionnée là-dessus que ça m'évite d'avoir ce genre de remarques ou de moments gênants. Et dans le cadre de l'écriture de mon documentaire, ça m'arrive. En fait, je suis en train de me rendre compte que j'ai aussi le statut de réaltrance. et on me met dans une case qui ne m'appartient pas, parce que être trans, c'est pas juste... C'est une des composantes de mon identité, mais c'est pas toute mon identité, et surtout, toutes les personnes trans ne font pas les mêmes films. Et en fait, quand, tu vois, je pense, certains professionnels, diffuseurs, producteurs ou autres, entendent le fait que je suis trans dans la manière dont je parle de mon projet, il y a un court-circuit qui se fait dans leur cerveau, tu vois. Comme on en parle beaucoup, comme... on se dit que le sujet des trans on l'a déjà traité, en fait on me met dans une case qui je pense peut me desservir, et si ce n'est pas de la discrimination, en tout cas c'est une petite case qui peut m'empêcher d'avancer dans ce projet, parce que du coup j'ai des problématiques avec ça, parce que ça fait peur aux gens, ou alors il y a justement un gros fantasme. derrière ça ou alors en tout cas on bug là dessus tu vois et alors que mon travail c'est dans mon film et dans mon projet documentaire c'est un travail sur la sexualité et le consentement donc en fait ça n'a pas forcément lieu d'être mais je vois aussi qu'il y a la manière dont on me met dans une case et aussi la légitimité que moi je peux me sentir ou pas c'est normal en fait comme j'ai été éduqué comme une meuf à à me sentir moins légitime certaines choses à me sentir encore en chemin d'oser des choses, d'oser porter des projets, d'oser prospecter, d'oser demander des partenariats ou des projets. Et forcément, c'est un sujet.

  • Speaker #1

    Comment on répond à quelqu'un qui dit c'est quoi ton dead name dans le monde du travail ? Parce que dans la vraie vie, tu peux ne pas répondre, passer. Dans l'intimité, tu peux dire mais ça ne va pas te demander ça. Dans le travail, comment on met ses limites tout en étant corporate ?

  • Speaker #0

    Poser ses limites, c'est un gros sujet dans le boulot. Je pense qu'avec l'expérience, j'ai de plus en plus de pédagogie et j'arrive à sentir quand j'en ai marre de répondre à des questions, j'arrive à dire écoute, je n'ai pas envie de répondre, mais en fait, des fois tu es pris de cours, des fois tu ne sais pas. Là, il se trouve qu'il y avait quand même un gros biais avec cette personne de pouvoir parce que je voulais vraiment avoir accès, pouvoir faire cette formation, cette conférence. Et en fait, je lui ai dit tout en lui disant, après en fait, je suis revenu, après le rendez-vous, j'ai envoyé un mail en disant écoute, je n'étais pas du tout à l'aise que tu me posais cette question. Attention à ne pas la poser aux personnes concernées, ce n'est pas une question qui se pose, et je lui ai expliqué. Mais du coup, j'ai dû revenir par la suite, et la personne s'est excusée, et on a pu échanger. Mais en fait, on fait comme on peut. En fait, c'est ça le truc, c'est que ça dépend de... Est-ce que tu es préparé ou pas ? Est-ce que tu as assez d'énergie ? Est-ce que tu l'as vu venir ? Est-ce que tu sais quoi dire ? C'est difficile. Moi, j'ai aussi beaucoup vécu ça dans le parcours médical. avec des ostéos, avec des kinés, avec des trucs qui sont pas forcément en lien avec ma transition. Et donc je suis parfois obligée, pour que je sois bien pris en charge, de dire que je suis sous hormones. Donc je peux pas cacher que je suis trans, parce qu'on me dit pourquoi, on me demande, machin. Et donc quand on sait que je suis trans, parfois c'est des questions... soit malaisantes, soit voir des discours anti-LGBT, des discours de « ah bah non, on m'a déjà dit que la survie de l'espèce c'était un papa et une maman, on m'a déjà expliqué que c'était un choix, j'ai eu des infirmières qui m'ont dit des dingueries. » Et en fait, je ne me suis préparé comme je pouvais, mais tant que tu ne vis pas ce genre de choses, tant que tu ne vis pas la discrimination et les micro-violences et les propos transphobes, Tu ne sais pas comment ça va te faire dans le corps, tu ne sais pas si tu vas la répartir, si tu vas savoir faire. Et c'est pour ça qu'être trans, ça isole, ça marginalise, parce que ça demande un effort mental. Il y a des choses, typiquement, avoir accès à des clubs en sport, aller à la piscine, en fait, ce ne sont plus des moments détente, parce que ce sont des moments où on te regarde des cicatrices. On te dit que t'es pas dans le bon endroit pour les vestiaires, tu dois te retrouver. Moi je me suis retrouvé à dire devant un groupe de 30 personnes dans un club de sport que j'étais trans pour savoir quel vestiaire j'allais choisir. Et c'est pas moi qui amène le sujet, tu vois, c'est les gens qui tiennent le cadre. Je me retrouve aussi dans le def perso, dans des retraites où il y a des gens qui me disent « Non mais pourquoi on fait tout un tatouin sur les personnes trans, les pronoms, machin, je suis en colère, les étiquettes qu'on nous met et tout » Et en fait, ça retombe toujours sur les personnes concernées, de faire de la pédagogie, d'expliquer, si les personnes qui tiennent le cadre ne le font pas. Donc en fait, on fait comme on peut, et ça impacte énormément ton mental, et aussi ta légitimité à être là, tout simplement. Donc c'est vraiment compliqué au quotidien. Et moi, c'est vrai que je me suis formée à la communication non-violente dans mon parcours, et je trouve que ça m'aide beaucoup. Parce que je peux dire, écoute, je comprends que tu aies des questions, je comprends que ça te questionne. Parfois même, ça vient d'une bonne intention, tu vois, de savoir, de créer du lien. Mais en fait, je dois leur dire, je comprends que tu as envie de créer du lien, sauf que moi, c'est des questions qu'on me pose trop souvent, je suis fatigué, je n'ai pas envie d'y répondre, je n'ai pas l'espace. Demande-moi mon consentement si j'ai envie d'en parler avant de m'imposer ce genre de questions. Ne dis pas ça devant les autres, ça me met en danger. J'ai une copine qui m'a outé, tu vois, typiquement, en pleine transition. J'avais un billet à mon dead name parce que je ne pouvais pas payer avec ma... Je n'avais pas encore mon nom sur mes cartes bancaires, parce que ça prend du temps et tout. Donc, je me retrouve aussi avec des fois des gens dans l'administratif, tu vois, qui parlent fort, dans les laboratoires, quand tu vas faire un examen de sang. Moi, j'ai ma carte vitale où il y a encore le 2 de femme dessus. Donc, je me retrouve à devoir me outer dans le train. C'est un enfer. Dans le train, c'est compliqué. D'ailleurs, j'avais fait un sous-de-gueule sur LinkedIn qui avait un peu explosé sur LinkedIn en taguant la SNCF parce que quand tu as une carte de réduction à ton nom d'avant, tu ne peux pas, en cours de route, la faire actualiser. Et ça, ce n'est pas légal de ne pas pouvoir actualiser les données personnelles. D'ailleurs, ils se sont fait épingler par la Commission européenne récemment. Et je me retrouve à devoir me justifier que c'est bien moi parce qu'ils voient un peu un prénom qui n'est pas le bon, ou alors ils voient le genre qui n'est pas le bon dans leur billet, du coup ils me disent non c'est pas vous, vous fraudez, donc je me retrouve à devoir dire que je suis trans devant 40 personnes dans des files d'attente, à devoir me battre à la poste, tu vois des trucs comme ça et c'est je sais plus quelle était ta question, excuse moi je me suis un peu perdue, mais c'est plein de situations comme ça que tu peux pas les anticiper. Tu peux te préparer en écoutant les parcours des uns et des autres, mais clairement, tu vois, moi le train, je ne l'avais pas vu venir. Je n'avais pas vu venir que j'allais avoir la boule au ventre en voyageant à chaque fois.

  • Speaker #1

    J'ai une dernière question, enfin c'est la non-dernière question. C'est une question sur le fait qu'il y a beaucoup de meufs comme moi qui ont une communication vachement tournée vers les meufs. Et je me suis déjà fait ramasser d'ailleurs par un mec trans qui m'avait écrit en me disant « J'adore ce que tu fais, mais en fait à chaque fois tu es genre tout au féminin. Et moi je ne sais pas trop où est ma place. » Donc maintenant j'essaie de préciser, femmes et personnes LGBT, qu'est-ce que tu ressens par rapport à ça ? Est-ce que tu as l'impression parfois d'avoir le cul entre deux chaises ? Même si après franchement, d'un côté les meufs font ça pour se protéger, mais je sais même que quand je vais dans des événements et que je dis « Ouais mais non les mecs, ... Il y a toujours des meufs qui vont me reprendre, qui vont me dire non les mecs cis, pour pas qu'on parle des mecs trans et tout, mais sur internet on le fait moins, c'est à qui ira le plus vite, à qui fera le plus de visibilité, donc on va essayer d'être le moins dans la nuance, etc. Est-ce que tu as quelque chose à nous dire sur ça aujourd'hui ? Peut-être une piste de réflexion aussi pour toutes les meufs ?

  • Speaker #0

    C'est bien que tu en parles parce que c'est pas évident je pense pour les mecs trans et les meufs trans. de dire qu'on ne se sent pas concerné parce qu'effectivement, il y a vraiment besoin d'espace en non-mixité pour les femmes en général. Et c'est hyper important d'avoir des business qui parlent concernés et des business féministes. Déjà, j'ai envie de dire aux gens qui veulent travailler pour les femmes, les femmes cis ou les femmes trans, les femmes en général, on a le droit d'avoir une communication au féminin. Tu as le droit de travailler pour la cible que tu veux et c'est OK. Tu as le droit aussi de travailler au masculin ou... ou en neutre, déjà il n'y a pas forcément d'injonction à forcément faire de l'inclusif pour tout le monde tout le temps. Mais par contre c'est vrai que si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non binaires et aux mecs trans en ayant une communication en féminin, ça pose des questions. Et moi c'est vrai que je l'ai vécu, il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou que je voulais. Et en fait ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur com. Et c'est vrai que ça pose la question de notre place à nous. Je pense qu'il y a des petites techniques de dire « femmes et minorités de genre » , ça englobe beaucoup de gens et ça permet d'être inclusif. Il y a aussi un point qui est important, c'est le féminin neutre. Moi, j'ai notamment été coachée par deux personnes qui sont antisexistes, féministes et qui ont une communication pas forcément féminine dans leur... communication visible sur les réseaux, mais dans les événements, c'est posé dans le cadre qu'on va parler au féminin neutre pour tout le monde. Et les mecs qui sont présents, trans ou pas, en fait, on va parler au féminin neutre. Et je trouve que c'est intéressant de mettre le féminin et de mettre le féminin neutre, parce que ça pose aussi pour les mecs cis l'expérience de ce que c'est d'être exclu de la langue et d'inclure autrement les... les femmes et les minorités de genre, mais c'est vrai que ça peut nous, à titre perso, nous faire sentir pas concernés. Donc c'est vrai que si vous voulez inclure et être en tout cas safe, c'est une des choses à faire pour les personnes, les minorités de genre, les personnes non-binaires et trans, c'est bien de le préciser. Et pareil pour les femmes trans en fait, c'est pas parce que tu as une communication au féminin que tu es safe pour les femmes trans. Moi je pense que l'inclusion, elle vient, c'est un travail à faire et en vrai il n'y a pas de bonne façon de faire. On fait tous comme on peut avec les armes qu'on a et au fur et à mesure on apprend et on fait de notre mieux. Mais je pense que de préciser que c'est safe pour les personnes trans et que les femmes trans sont bienvenues quand c'est une communication en féminin, c'est nécessaire pour que ces personnes viennent. se sentir légitime de venir, tu vois. Mais on n'est pas obligé de tout genrer au neutre, on n'est pas obligé... Je pense que le minimum, c'est de mettre LGBT friendly quelque part, bienvenue aux femmes trans aussi, tu vois, de répéter ça de temps en temps, de dire que je parle au féminin neutre, mais ça inclut toutes les femmes. Et effectivement, après, la question de la non-binarité aussi, c'est un questionnement, parce qu'on les oublie beaucoup, les personnes non-binaires, Aïe ! Et peut-être de dire LGBT friendly ou minorité de genre, ok, ça englobe tout le monde. Mais ça pose la question de comment tu fais, si tu fais des cercles de femmes, est-ce que tu acceptes les personnes non-binaires ou pas ? Et je pense que si c'est le cas, il faut le dire et le clarifier, le préciser pour que ces personnes se sentent légitimes de venir et à l'aise de venir.

  • Speaker #1

    Deux dernières questions, mais des questions plutôt... légères. Donc la première, quel créateur de contenu tu peux nous conseiller ? Quelqu'un qui travaille un petit peu sur les questions de discrimination. Tout ce dont on vient parler pendant une heure. Et la deuxième, est-ce que tu peux nous conseiller aussi des productions artistiques, littérature, films, etc. sur les discriminations, les luttes LGBT. Moi, je te donnerais le mien, qui est mon livre préféré. Pourtant, il ne parle pas de meuf lesbienne. Enfin, si, c'est une meuf lesbienne, mais qui transitionne. Le livre est assez compliqué, mais c'est mon livre préféré depuis la nuit des temps. Je n'ai pas attendu que tu viennes aujourd'hui pour le dire. À ton tour.

  • Speaker #0

    Deux recos indispensables de personnages LGBT. La première, c'est Lorraine Marx, qui est comédienne, metteuse en scène, critique, qui fait des critiques de cinéma. sur son Instagram en ce moment, qui est délicieusement pertinente, drôle. Elle a aussi un seul en scène que je n'ai pas encore vu, qui aborde les sujets de santé mentale et de transition, et qui a beaucoup d'excellents avis. Donc, je pense que c'est quelqu'un sur scène à aller voir. Et si vous voulez vous éduquer sur des questions aussi... de classe et d'invisibilisation des personnes trans, mais aussi si vous aimez le cinéma et la littérature, elle fait des critiques en roue libre sur les bourgeois qui font la culture et c'est délicieux et ça éveille beaucoup de choses. Et puis une deuxième chose, c'est le dernier livre d'Eli Hervé qui est journaliste avec qui j'ai travaillé. C'est un livre dans lequel j'ai partagé mon histoire qui s'appelle Transphobia. Merci. C'est en fait une enquête qui vient de sortir il y a quelques mois sur la désinformation et la discrimination transphobe des médias en France. C'est vraiment une enquête sur comment on traite le sujet de la transidentité dans les médias et comment on laisse faire la montée de l'extrême droite et de la transphobie dans beaucoup de complaisance. C'est très très très sourcé, c'est facile à lire. Et il y a beaucoup de personnes concernées, dont moi, mais aussi l'autre Autignon et d'autres personnes transvisibles, qui ont partagé leur expérience. Et c'est super intéressant et surtout très nécessaire.

  • Speaker #1

    Super, merci beaucoup. Ça sera mis dans la bio, dans le résumé. Est-ce que Transphobia, c'est une réponse à Transmania ?

  • Speaker #0

    Un petit peu, oui. Je ne vais pas parler pour la personne, pour Elie. mais oui en fait ça débunk toutes les idées de phénomènes de mode et de contagion sociale qu'on entend sur la transidentité. Et surtout, ça explique comment les médias sont complices de la montée de la transphobie.

  • Speaker #1

    Super, merci Alan. Pour ma part, créateuriste de contenu, je ne sais pas. Il y en a trop, je n'ai pas envie de faire une boulette, je n'ai pas envie de dire quelqu'un et pas quelqu'un d'autre. Donc, vivez les personnes que je suis sur Instagram, normalement, elles ne sont pas trop mauvaises. Mais mon livre préféré ever, c'est Stun Butch Blues de Leslie Fenberg. C'est l'histoire d'une meuf juive prolétaire. Et c'est l'histoire de sa transition, de sa vie, des luttes antiracistes, des luttes de classe dans les usines. Bref, je ne lui rends pas du tout honneur quand je le présente, mais c'est vraiment un livre fabuleux, fabuleux, fabuleux, qui d'ailleurs, si je ne me trompe pas, est écrit au féminin de tout. Donc voilà, ça c'est Marocco. Alan, on peut te retrouver sur LinkedIn, Alan Raymond. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait, sur LinkedIn, Instagram principalement. Et sur mon site internet aussi, agence-alan.fr.

  • Speaker #1

    Super, est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

  • Speaker #0

    Non, mais merci, je veux juste te remercier de ce moment d'échange, je pense que c'est important et je suis ravi de pouvoir participer. à parler de ces sujets-là. Si jamais vous avez des questions, si vous avez envie d'en discuter, je suis aussi très dispo en DM sur Instagram. Donc, n'hésitez pas.

  • Speaker #1

    Merci à toi. Merci, Alan. Au revoir. Bisous. Ciao, ciao. Et voilà, c'est déjà fini, ma star. Alors, sache que c'était un pur plaisir de partager ce moment avec toi. Si cet épisode t'a parlé, montre-moi tout ton amour. Abonne-toi et mets-moi 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. En attendant, tu peux me retrouver sur Instagram. arrobase jasmine.tweetoo sur ma newsletter Walk Me Up ou encore sur LinkedIn jasmine.tweetoo Tu trouveras tous les liens et toutes tes informations en description. Et puis, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. Allez, stay tuned, my bad bitch.

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Description

T’as déjà tout perdu à cause de ton prénom ?
Lui, oui.


Alan est une personne transgenre qui politise son taf : avec l’Agence Alan, il aide les freelances atypiques à prendre leur place grâce à une com’ plus safe, plus humaine et surtout plus honnête. Photographe de formation, réal de docu aujourd’hui, il raconte comment il a dû tout reconstruire après son coming out trans : SEO cramé, fiches Google disparues, clients perdus — et pourtant, toujours debout.


Dans cet épisode :

  • Le vrai prix d’un coming out quand t’es indépendant·e.

  • Comment on pose ses limites face aux questions qu’on ne devrait jamais poser (« c’est quoi ton dead name ? »).

  • Pourquoi dire « femmes ET minorités de genre » peut transformer ta com’ et faire que tout le monde se sente à sa place.

  • Ce que ça coûte émotionnellement de vivre, bosser et exister quand ton identité est politique.


💡 Ses recos culturelles :

  • Lauren Marx — comédienne, metteuse en scène, critique ciné : génie brut.

  • Transphobia de Eli Hervé — une enquête coup de poing sur la désinformation et la haine anti-trans dans les médias.


🔗 Ses liens :
👉 Site
👉 Instagram
👉 LinkedIn


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non-binaires et aux mecs trans en ayant une communication féminin, ça pose des questions. Et moi, c'est vrai que je l'ai vécu. Il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou je voulais. Et en fait, ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur corps.

  • Speaker #1

    Hello, ma star ! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Grosse Rageuse, le podcast des meubles qui en ont marre qu'on leur dise comment exister. Moi, c'est Jasmine. Et après des années à me détester parce que je ne compterais dans aucune case, j'ai décidé d'envoyer péter les inventions et d'enfin m'assumer, pour le meilleur et pour le pire.

  • Speaker #2

    Je suis Mme Alaba Edgar, avec Tartine.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je suis coach et mentor en storytelling, personal branding et copywriting. En bref, je suis celle qui t'aide à transformer les « t'es trop inspirante » en « shut up and take my money » . Ici, on parle cash, on assume nos galères et on se donne la permission d'être qui on est vraiment. Sans filtre, sans bullshit,

  • Speaker #0

    juste nous.

  • Speaker #1

    Alors mets tes écouteurs, prends ton petit carnet, ton café, ton thé et même ton matcha et prépare-toi à un moment de pure folie. Allez, c'est parti mon kiki !

  • Speaker #2

    Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de podcast de Grosse Rageuse. Aujourd'hui, je ne suis pas toute seule, je suis accompagnée de Alan, Alan Raymond. Bonjour Alan.

  • Speaker #0

    Salut.

  • Speaker #2

    Alors déjà avant de commencer, comme d'hab, je ne vais pas beaucoup innover, je vais te remercier d'avoir accepté cette invitation, d'avoir accepté d'être avec moi aujourd'hui dans Grosse Rageuse Est-ce que tu peux te présenter Alan ?

  • Speaker #0

    Oui avec plaisir, je suis ravi d'être là déjà pour parler un peu de plein de choses Je m'appelle Alan, je suis photographe de formation et depuis quelques années je fais de la communication, j'accompagne les freelances qui se sentent atypiques Merci. à prendre leur place grâce aux outils de com et un travail sur leur positionnement, leur image, mais aussi les aider à développer leur communication sur tout un tas de sujets. Donc j'ai un peu politisé mon travail et ma manière de faire de la communication.

  • Speaker #2

    Quand tu parles de politiser ton travail, de quoi on parle ?

  • Speaker #0

    Vaste sujet ! On parle de plein de petites choses qui sont un peu des angles morts dans le travail en général et dans... dans le travail des entrepreneurs et la manière d'accompagner les gens en général. En tout cas, c'est des enclements pour les personnes qui ne sont pas concernées. Quand je parle de politiser, c'est-à-dire qu'on prend en compte, dans notre manière d'aborder les gens, de travailler avec eux, de leur proposer des offres, mais aussi la manière dont on construit nos offres et la manière dont on travaille concrètement. On prend en compte les violences systémiques, les oppressions, et aussi on essaie de mettre du soin. en fonction des besoins des uns des uns des autres. Donc pour le dire grossièrement, on fait au max pour être le plus safe possible, le plus bienveillant, le non-jugeant, travailler sur nos propres biais et nos propres clichés pour ne pas reproduire ça, ne pas reproduire de violences systémiques, de micro-violences ou de moments gênants, ou en tout cas mettre les gens au maximum à l'aise dans le travail qu'on fait avec eux, avec elles, et aussi dans ce qu'on leur propose concrètement.

  • Speaker #2

    L'idée, c'est quand même d'humaniser le travail, d'essayer de plus humaniser par rapport à ce qu'on nous propose aujourd'hui.

  • Speaker #0

    J'ai l'impression qu'il y a plein de gens qui pourraient dire qu'ils sont humains. Pour moi, c'est un peu aller au-delà. C'est vraiment travailler sur nos ombres. Qu'est-ce qui fait que j'ai un cliché quand je pense à un chef d'entreprise ? Tout de suite, je vois un homme blanc, six, debout dans un endroit immaculé en gérant une équipe, et pas une femme noire. habillé avec de la couleur ou une personne en situation de handicap, une personne handicapée. Donc en fait, c'est plutôt travailler sur nos propres biais à nous. Donc pour moi, ce n'est pas qu'une question d'humain, c'est une question de travail en fait, c'est une question de bosser concrètement ces sujets pour devenir meilleur, mais ce n'est même pas ça. C'est pour bien traiter les gens. On peut se dire humain, mais sans avoir... en ayant des angles morts, en fait, parce qu'on n'est pas concerné par certains sujets. Et on peut penser qu'on accueille tout le monde sans s'être mis dans la tête et la peau des gens pour créer concrètement les conditions qui permettent aux gens de venir et à tout le monde de venir. Ça m'est déjà arrivé de discuter avec des médecins ou des dentistes, pour le coup, qui me disaient, moi, mes collègues... Ils pensent être safe et bienveillants pour tout le monde, mais de fait, il n'y a que des gens qui leur ressemblent qui viennent et ils ne sont pas du tout safe pour les personnes LGBT ou les personnes grosses parce qu'ils n'ont pas travaillé ces sujets-là, ou en tout cas ils ne savent pas par quoi ça passe concrètement pour mettre les gens à l'aise et pour être sécurisants, bienveillants et non-jugeants avec différents types de publics.

  • Speaker #2

    Et comment on passe de la photographie à accompagner les gens dans ça, en fait ? Comment on prend conscience qu'il y a un besoin ? Pourquoi on décide de commencer à travailler sur ses biais et d'aider les gens ?

  • Speaker #0

    C'est plus mon parcours perso. Il y a plusieurs choses. C'est que déjà, en tant que professionnelle dans la photo, j'ai fait plein de choses différentes. Et puis, je me rendais bien compte que ce que je préférais, c'était vraiment l'humain, le one-one, aider les gens qui me... qui avaient des entreprises un petit peu similaires aux miennes, donc des petites équipes, des collectifs, des artistes, des freelances, des musiciens, des créateurs, des artisans, et pas forcément des très grosses boîtes, parce que j'ai bossé avec beaucoup de gens différents et dont des très grosses boîtes, par exemple. Et je me sentais frustrée, moi, de ne pas aider les gens plus que ça et de venir juste faire quelques photos et repartir, alors que quand je travaillais avec des freelances, il y avait vraiment un sujet qui s'ouvrait quand on commençait à faire des images. On parlait de honte, on parlait de peur, on parlait de ne pas oser se montrer, on parlait de rôle de genre, de comment être crédible dans le travail. Et en fait, j'avais commencé à ouvrir une brèche et je donnais des conseils en com aux freelances qui venaient me voir et je commençais à travailler avec eux, mais sans vraiment facturer ce temps-là, en mode plus on s'aide les uns les autres et on se conseille. Et je me rendais bien compte que ce que je faisais en shooting, c'était ouvrir un espace qui permettait... de faire plein d'autres choses par la suite, en tout cas d'approcher certains sujets. Et je n'avais pas forcément les moyens, parce que je ne vendais pas de la com pour prendre soin de ce qu'on ouvrait pendant cet espace-là. Donc, je me retrouvais souvent à sortir de mon cadre. Les gens venaient pour une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie, et on dépassait souvent le cadre. J'abordais des sujets plus profonds, et on aurait pu, parce qu'ils avaient commencé à partager ces sujets-là. on aurait pu bosser et j'aurais pu les accompagner. Mais comme c'est ce passe que je vendais, on était un peu frustrés ensemble. Et aussi, je les laissais repartir avec leur sujet sur le cœur et je n'avais pas forcément prévu d'en faire quelque chose. Donc, je me retrouvais un peu à écouter les gens et à les conseiller sans vraiment l'avoir formalisé. Et il a fallu moi-même que je me forme et que je me forme aussi sur la partie systémique et violents systémiques et féminisme et... et intersectionnalité. Mais ça, c'était plutôt un travail perso que j'ai fait en parallèle. Et du coup, j'ai mis ces trucs-là dans mon travail, à la fois par envie, parce que je voyais qu'il y avait un besoin, mais aussi par nécessité. Parce qu'en cours de route, j'ai fait mon coming out trans. Donc, je suis une personne trans. Et j'ai réalisé ça super tard. Donc, j'avais 29 ans. Et il m'a fallu du temps, moi, pour comprendre, le dire, faire mon coming out. Et du coup, je me suis retrouvée moi-même. dans la case minorisée, alors que ce n'était pas mon plan de carrière. Et donc, je me suis retrouvé photographe trans et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais avec ça ? Et ça a amené aussi plein d'autres réflexions sur une révolution globale de ma vie pro et perso. Je me suis rendu compte que j'avais de la frustration dans mon travail, je n'étais pas vraiment au bon endroit, je n'avais pas osé faire de la com parce que je ne me sentais pas légitime. Et en fait, du fait d'être... de comprendre que j'étais trans, j'ai réalisé que moi-même j'avais aussi un besoin de travailler avec des personnes qui me sécurisent. Je ne peux plus travailler au salon de l'automobile entouré de mecs 600 costards qui passent leur journée à me dire est-ce que tu es une meuf ou un mec et qui me met genre et qui ne respecte pas ou alors faire des coming out au téléphone à chaque appel de clients ou à chaque rendez-vous, répondre à des questions gênantes. Donc j'ai dû moi-même déjà pour moi réadapter mon travail pour que je me sente mieux. d'un point de vue des violences systémiques, mais aussi pour mettre plus de sens dans mon travail parce que je n'avais pas réalisé que je n'étais pas tout à fait au bon endroit. Et la lecture que j'en ai aujourd'hui, c'est en fait que la photo, c'était un peu une manière de me cacher. Et j'ai un peu traversé ce truc-là. Et aujourd'hui, je me montre un peu plus, je prends un peu la parole, j'essaye en tout cas. Et j'ai politisé ma manière d'aborder à la fois la photo et la communication.

  • Speaker #2

    J'ai une question, mais j'ai peur qu'après je fasse partie des personnes qui posent des questions. C'est la question ultra transphobe.

  • Speaker #0

    Je suis là pour ça. Franchement, je suis là pour répondre aux questions.

  • Speaker #2

    J'ai une question. En fait, quand tu parles de ton coming out, alors ça fait trop, j'ai des amis noirs. J'ai des potes, forcément, vu le milieu dans lequel j'ai évolué, vu mes choix de vie, mon lifestyle. Donc j'ai pas mal de... potes qui sont trans, etc. Et en fait, moi, ce qui m'a vite fait fait tilter, ou pas en fait, parce que j'arrive avec mes présupposés, c'est cette impression que tu donnes de ne pas avoir fait partie de la communauté LGBT avant ton coming-out trans. Et c'est vrai que moi, j'ai... Ce truc de « avant la transition, mes potes étaient lesbiennes » . Je ne sais pas si je peux le dire comme ça. Maintenant, elles sont hétéros, tu vois. Ce n'est pas ton cas ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Non, ce n'est pas forcément une mauvaise question.

  • Speaker #2

    Tu as vu comme j'ai marché ?

  • Speaker #0

    Oui, mais bien formulé. En fait, c'est une vraie question. Est-ce que j'étais déjà dans ce milieu-là avant ou pas ? Je pense que ça a du sens d'y répondre. Moi, pas du tout. En fait, je regardais de loin le drag, la scène drag. J'avais quelques potes gays, pans, lesbiennes, mais vraiment un peu de loin. Et tant que ça, j'avais peut-être deux, trois potes concernés. La question de la non-binarité n'était pas non plus autour de… de la transidentité n'était pas dans mon réseau. Et je crois que la première personne trans que j'ai rencontrée, c'était… vraiment super tard en fait quand j'avais déjà compris que j'étais trans. Donc moi je me suis renseignée et je me suis rapprochée de la communauté LGBT par nécessité pour comprendre déjà ce que je vivais en écoutant des podcasts, en me renseignant, en suivant des gens sur Insta, sur Youtube, des documentaires, des articles, de la ressource, un peu dans tous les sens et j'ai commencé à fréquenter entre guillemets le milieu LGBT, pas forcément via le milieu LGBT mais via des espaces Merci. qui sont safe pour les personnes LGBT, donc j'ai rencontré des personnes LGBT là-dedans, qui est plutôt la communauté sexe positive ou des mouvements autour de la libération, non c'est pas très mal expliqué, libération sexuelle, il ne faut pas du tout dire ça comme ça, mais c'est des espaces où on parle de sexualité, on pratique la sexualité, et c'est des espaces féministes, antisexistes, et il y a un grand cadre qui est posé sur le respect des pronoms, des genres des gens, et c'est aussi un espace où on peut explorer. ce que c'est que d'être genré autrement. Et donc tu peux un peu cheminer sur tes questionnements aussi de genre. Et moi c'est un des espaces qui m'ont permis de questionner mon genre dans des retraites de développement personnel, un peu dans ces mouvances-là. Et c'est via cette communauté-là que je suis rentré dans la communauté LGBT et aussi par nécessité, quand je me suis posé les premières questions, je suis allé dans des cercles de parole, dans les assos LGBT. Et au fur et à mesure, j'ai rencontré de plus en plus de personnes concernées. Et surtout, pour avancer dans ma transition, je n'avais pas le choix que de me renseigner. Et les infos, on les trouve où ? Dans des groupes Facebook, tout simplement, de personnes LGBT, de personnes trans. Et de là, j'ai découvert les assos, tout ça. Et je suis montée à Paris un peu en même temps. Et donc, il y a plus d'offres, plus de choses qui existent. Et donc j'ai eu besoin de me rapprocher des personnes qui vivaient des choses similaires aux miennes, pour cheminer moi-même personnellement, comprendre ce que je vivais, et au fur et à mesure je me suis fait des liens, et au fur et à mesure j'ai créé aussi un entourage, et je ne fréquente pas que des personnes LGBT très loin de là. Mais en fait c'est un vrai chemin de comment on appréhende la communauté LGBT, c'est vraiment très très différent pour les uns et pour les autres. Il y a des gens qui sont un peu en rejet et c'est vrai que moi dans mon cheminement je dois avouer qu'il y a des moments où j'avais peur d'y aller, j'avais peur de rentrer dans une bulle, j'avais peur de me sentir si bien dedans qu'en fait je ne peux plus être à l'extérieur. Et en fait c'est ce qui s'est passé de fait. Il y a plein de choses que j'ai arrêté de faire, des endroits où j'ai arrêté d'aller, dans le travail mais aussi dans les... de perso parce qu'en fait on est fatigué de répondre à des questions gênantes et aussi de se sentir en danger donc c'est vrai qu'il y a un besoin de repli et moi c'est vrai que j'ai eu besoin de trouver juste un milieu entre j'ai besoin de ressources, de repli, de trouver des adelfes avec qui je peux échanger avec qui je peux être en lien pour cheminer mais aussi trouver de la ressource pour pouvoir aller à l'extérieur et pas être que dans cette bulle moi je sais que j'ai besoin d'altérité et j'ai besoin de de rencontrer des gens différents. Et donc j'essaye de trouver le juste milieu. Mais de fait, ça fait vraiment beaucoup de bien et c'est vraiment nécessaire ces espaces, donc j'y passe quand même du temps.

  • Speaker #2

    Moi, c'est vrai que j'ai une expérience tout à fait différente avec les milieux LGBT que j'ai beaucoup fréquentés et que je rejette beaucoup aujourd'hui. Je ne rejette pas les personnes, encore heureux. Je rejette les milieux qui m'ont fait beaucoup de mal. Alors c'est très douloureux d'être avec des personnes qui se posent des questions trop connes et tout. Franchement, c'est fatigant. Mais tu en as parlé, tu as parlé de repli. Moi, j'ai eu l'impression vraiment à un moment d'être dans une secte et de ne pas réussir à penser un autre.

  • Speaker #0

    En tout cas, dans tous les milieux communautaires et dans tous les mouvances où on veut faire communauté par nécessité, on essaye de ne pas reproduire les violences qu'on vit à l'extérieur, mais on n'est pas vierge de notre éducation. Donc il y a aussi des biais, il y a des violences à trac communautaire, il y a de la transphobie, il y a de la biphobie, il y a du racisme. Et tout ça, ça existe de partout. Donc c'est un peu l'illusion que c'est safe. C'est pour ça que je dis que nous, on... Il n'y a pas d'espace safe, on est safe d'une part, il faut toujours être en vigilance de ça et faire attention à soi. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes de partout. Après, ça dépend aussi forcément des sectes, il y a des personnes problématiques, plus ou moins, en fonction des lieux. Mais c'est vrai qu'il y a aussi la pureté militante, il y a de la pression, il y a des fois des injonctions. Et effectivement, c'est aussi des gens qui sont en construction et les milieux sont aussi en train. Les assos, les milieux sont en construction aussi, de travailler sur ses propres biais. Typiquement, la question de la transphobie et du racisme, c'est des choses... J'ai l'impression qu'il y a des choses qui avancent, mais c'est lent, quoi.

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr.

  • Speaker #0

    Donc, il y a de l'équipe...

  • Speaker #2

    Pas de problème en mondial. Oui. C'est les débuts de certaines prises de conscience,

  • Speaker #0

    on va dire. Mais en fait, quand on dit milieu LGBT, ça ne veut rien dire. Ça veut dire quoi ? Moi, j'ai quelques potes LGBT, je vais dans quelques endroits. à quelques événements qui a l'impression de fréquenter le milieu LGBT. Mais en fait, il y a toute une multitude d'événements, d'associations, de gens et on ne peut pas réduire tout ça à des expériences individuelles. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes et il y en a partout.

  • Speaker #2

    Oui. J'ai une question. Tu étais déjà freelance avant de faire ton coming out ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Ouais, t'as fait quoi ? Raconte-nous un petit peu ton parcours sur ça.

  • Speaker #0

    Alors, je suis né en 91. Et j'ai commencé l'indépendance. En fait, dès que le statut d'auto-entrepreneur a pu exister, je me suis inscrit et j'ai commencé à bosser avant d'avoir mon bac. Donc, mon premier projet pro photo, c'était à 18 ans et un jour. Et j'ai gardé ce statut pendant mes années de... de lycée de photos. J'ai fait une école de photos en Belgique avec un aspect aussi un peu com, en tout cas photo un peu large, image. Et en parallèle, j'ai commencé à prendre des projets, à me lancer pour avoir un peu d'expérience et pas tomber des nues à la sortie de l'école de comment je fais pour un des clients et me faire un petit peu les armes et aussi pour avoir un petit peu de sous. Et donc, j'ai quand même pas mal bossé pendant mes études et quand j'ai fini mon... Mon diplôme, je me suis lancé à temps plein à Lyon. J'étais en Belgique et je suis arrivé à Lyon dans une ville où j'avais un oncle, deux petits cousins, trois petits cousins et c'est tout. Je ne connaissais pas grand monde et je me suis lancé à temps plein et j'avais un peu d'aide familiale. J'avais un an ou deux ans pour me lancer et être autonome. et donc je me suis mis à fond en tant qu'indépendant à Lyon et j'ai essayé de bosser dans plein d'endroits différents, j'ai fait des reportages d'entreprise, des reportages pro, des pubs de comédiens, beaucoup de photos de scènes, d'événementiels, de musiciens et tout un tas de choses. J'ai participé à plusieurs studios photo, j'étais dans plusieurs collectifs, j'ai monté mon propre studio photo avec d'autres collègues et j'ai passé 9 ans à Lyon, à explorer plein d'aspects de la photo, à me former à la vidéo, à me former à plein de choses en tant que freelance, à me prendre aussi des bonnes claques dans la gueule, à faire des erreurs, à réapprendre, à mal choisir les journées qui se posaient, puis après revenir en arrière. Et en même temps, j'ai appris plein de choses, j'ai investi beaucoup et j'ai fait, je pense, plein d'erreurs de débutant aussi qui m'ont permis d'au bout de neuf ans, de faire un gros tri de qu'est-ce que je garde. Qu'est-ce que je sais faire ? Qu'est-ce que je veux faire ? Vers où je vais ? Et j'ai fait mon coming out au bout de 9 ans de freelancing à Lyon. Et ça a pour moi amené à une révolution dans ma vie assez intense. J'ai réalisé que je pouvais passer de l'autre côté de la caméra, accompagner les gens autrement, accompagner sur d'autres aspects, travailler avec d'autres gens dans la com, faire aussi de la vidéo, plus de vidéos. Et donc je me suis monté dans un très beau projet de film documentaire. Je me suis lancé un peu dans la vidéo, j'ai fait quelques prises de la vidéo, et ce mouvement-là a amené un ras-le-bol global de ma vie à Lyon. En fait, j'ai l'impression d'avoir fait le tour, et il fallait que je mue, entre guillemets, et je suis parti à Paris. J'ai une amie qui m'a accueilli, elle m'a dit « viens à Paris » , et du coup je me suis retrouvé à Paris avec mon identité en questionnement. Et de là, j'ai repris tout à zéro, aussi parce que j'ai vécu des problématiques liées à la transition. dans mon travail, qui ont fait que j'étais un peu obligé de repartir à zéro avec un nouveau projet, une nouvelle adresse mail et aussi un nouveau réseau courant.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ça ou pas ?

  • Speaker #0

    Tout à fait. Bon, être trans, c'est plein d'emmerdes, c'est plein de joie aussi, c'est plein de choses. Mais ce n'est pas juste faire des opérations et prendre des hormones, c'est changer de statut social, c'est être confronté à des coming-out réguliers, confronté à des problèmes administratifs, de vivre plein de petites étapes, d'oser s'habiller autrement, d'oser sortir dehors. un peu différemment, se faire genrer, dire son prénom à sa voisine pour la première fois, traverser plein de choses. Et dans le travail, il y a tout un tas de problématiques que je n'avais pas du tout prévues et qui m'ont un peu surprise, notamment des problèmes administratifs. Des trucs qui paraissent bêtes, mais en fait, quand tu changes de prénom, ma vie d'avant était tout basée sur mon prénom d'avant. Le nom de ma boîte, c'était mon nom et mon prénom. Donc déjà, partant de là, en voulant tout changer, il a fallu changer le nom de ma boîte. Je me suis rendu compte que ce n'est pas le bon statut, donc j'ai aussi changé de statut de boîte. Donc ça veut dire déjà repartir avec une nouvelle entreprise. C'est des frais, c'est du temps, ça me tense. Mais surtout, moi dans mon cas, j'avais une activité, tout mon canal d'acquisition client était basé sur le référencement. Donc les gens tapaient... photographiant sur internet et il me trouvait et ça c'était ma stratégie principale que j'ai mis six ans à mettre en place pour être sur la première page j'avais bossé mon référencement à fond je m'étais formé pour ça j'avais un site web j'avais investi de l'argent et je travaillais vraiment beaucoup mon positionnement vis-à-vis de mon marché pour que voilà être positionné sur des mots clés sauf que tout ça tout ce travail là que j'avais mis six huit ans à mettre en place et avoir et avoir une activité qui roule a été basé sur mon prénom sur mon nom de domaine, sur mon prénom et mon nom, donc tous mes backlinks, mes copyrights, tout ce que j'avais mis en place, et dépendait de mon prénom d'avant. Donc, j'ai changé de prénom, et donc, par exemple, typiquement, les 150 avis que j'avais sur ma fiche Google, que j'ai mis des années à avoir, parce que c'est un travail qui est long, qui me rapportaient beaucoup de référencements et de clients, et bien, j'ai perdu ça en trois mois. parce qu'on ne peut pas changer d'entreprise et garder les avis clients, parce que j'ai dû changer de prénom dans mon nom d'entreprise, et donc on m'a dit que je faisais de la fraude, et donc Google n'a jamais voulu réhabiliter mon nom. J'ai perdu ma fiche Google. Et donc, rien que d'en parler alors que ça fait des années, je suis encore sous le coup de l'émotion, parce que ça a vraiment été difficile, parce que j'avais vraiment mis toute ma life là-dedans, et beaucoup d'énergie. Et donc je me suis rendu compte au bout de six mois de galères administratives que je n'avais pas le choix de recommencer à zéro, jusqu'à vraiment reprendre une nouvelle adresse mail et repartir à zéro. Et donc j'ai perdu un trafic sur mon site, j'ai perdu une énorme partie de ma visibilité, et en parallèle, la transition ça va pour beaucoup de personnes avec des problèmes familiaux, dit des violences intrafamiliales, une exclusion, des doutes, et aussi une charge de travail de « ok, je suis trans, ok, est-ce que je transitionne ? » « ok, ça veut dire quoi, transitionner ? » « il faut que je fasse des recherches, que je me renseigne ? » Les démarches administratives sont très lourdes, et donc en fait, ça impacte beaucoup ton estime de toi, ton moral, ta capacité à travailler, ça te prend du temps. Tu vis aussi, à chaque fois que j'allais à la poste, tu es en enfer pour récupérer des colis. aller à la pharmacie, aller trouver des médecins safe. Et du coup, en fait, il y a un coût émotionnel qui est énorme, qui moi m'a beaucoup impacté dans ma capacité à travailler, parce que j'étais persuadé que j'avais fait des allers-retours à Lyon, à Paris, donc j'habitais à Lyon, et je faisais déjà beaucoup d'allers-retours à Paris, parce que j'avais déjà de la clientèle à Paris. J'étais persuadé que j'allais passer un an à faire encore des allers-retours avant de consolider ma nouvelle boîte à Paris et que la transition professionnelle allait se faire parce que j'avais préparé un peu le terrain. Sauf qu'en fait, j'ai perdu mon référencement. En fait, j'ai eu des problèmes pour me faire payer parce qu'il y a des problèmes administratifs avec la banque. J'ai eu des problèmes avec des plateformes en ligne pour me faire payer. Et tout ça m'a beaucoup impacté. Je n'arrivais plus à dire qui j'étais parce que pendant six mois, il a fallu que je dise à mes clients « En fait, je suis trans, maintenant c'est Alan, c'est il. » Expliquer à chaque fois, me retrouver sur des prestations où je ne me sens pas safe. du coup Du coup, je rentre chez moi, je chiale ma race, je n'ai plus du tout envie d'y retourner. Et en fait, le coût émotionnel a été trop fort pour moi. Tu vois, typiquement, il y a quelque chose que je faisais beaucoup avant, c'est d'aller dans des after-work organisés par plein d'assos, plein de structures différentes, pour rencontrer d'autres entrepreneurs et développer ma clientèle. Et en fait, j'ai dû arrêter de le faire. déjà parce que j'avais moins d'argent pour sortir puisque ma boîte a commencé à se casser la gueule et parce que faire un coming out à chaque fois que tu sors et te prendre en pleine tronche de t'es une meuf, t'es un mec à chaque fois que tu sors ben en fait c'est moi j'étais là pour le travail j'étais pas là pour pour avoir les tripes à terre devant tout le monde et me sentir méga vulnérable en danger aussi parce que du coup on se prend des réflexions et donc j'ai arrêté purement et simplement d'être d'être dans les after work et j'ai aussi vécu de l'exclusion familiale très forte jusqu'à des démarches juridiques, mais sur d'autres sujets. Donc, en fait, tout est arrivé en même temps. Et en parallèle, je n'ai plus de site web qui est fonctionnel. Les gens ne voient plus du coup, en fait, être visible alors que je ne me sens pas encore moi même, entre guillemets, et que j'ai plein de sujets à gérer. C'était un très gros... C'était compliqué, quoi. Donc, j'ai quand même tenu le coup et je suis reparti à zéro. Mais voilà, pas le droit au chômage. J'ai eu des problèmes d'assurance pendant l'arrêt de... Pendant l'opération que j'ai faite, je n'ai pas eu d'indemnité au chômage, d'indemnité de l'assurance que j'aurais dû toucher. J'ai eu plein de soucis comme ça, administratifs, qui font que... Franchement, je ne sais pas comment j'ai tenu. J'ai tenu grâce à mes amis. Mais en fait, il y en a plein qui sont partis aussi. Il y a aussi tout ce que tu vis du tris social. Il y a des choses que tu ne peux plus faire. Tu dois appréhender le fait de se sentir en danger autrement qu'en étant une meuf cis, en tout cas perçue comme une meuf dans la rue. Tu appréhendes aussi le danger, tu appréhendes le fait d'être minorisée, tu appréhendes le fait que dès que tu ablumes la radio, tu entends des blagues transphobes, tu entends des débats surtout à la télé, la montée du fascisme, et du coup, tu es là, OK. je vais arriver à Paris, je vais me faire agresser, tu vois. Et donc, il y a aussi tout ça à appréhender, en plus de vivre la transition, en plus de vivre des gens qui arrêtent de te parler, des personnes de ma famille qui m'ont tourné le dos, les liens qui s'arrêtent. Donc, en fait, c'est en ça que la nécessité de trouver une famille choisie, la communauté LGBT, là, c'est une réponse incroyable, parce qu'en fait, il y a beaucoup de gens qui n'ont juste plus de famille. Et le fait de vivre ça, forcément, ça a un impact sur ton travail.

  • Speaker #2

    C'est drôle ton histoire parce qu'elle va un petit peu à l'encontre de ce qu'on imagine dans l'imaginaire collectif qui est qu'un mec trans, on savait quand il avait 10 ans que lui c'était un petit garçon. Il nous fait son coming out sans le vouloir quand il a 12 ans en disant « moi je suis un petit garçon » . Il a toujours été très garçon manqué, puis il a attiré par les filles. C'est pour ça que moi je te dis que c'est la réalité que je connais. Moi, je ne connais aucun mec trans qui était une meuf hétéro, etc. Donc en plus, outre le fait de changer parce que les gens sont en mode... Il y a aussi, sur le marché de la désirabilité, tout change en fait. C'est-à-dire, même si par exemple, tu fréquentais des mecs, tu étais hétéro, là tu deviens gay. Comment ça se passe quand on n'avait pas déjà un pied dedans ? Et donc en fait, c'est un petit peu ce truc de quand tu dis... Oui, c'est vrai, ça arrive tard, ça arrive à 29 ans. Mais je trouve que c'est intéressant d'interroger des gens à qui ça arrive tard parce qu'on a trop cet imaginaire que ça doit arriver...

  • Speaker #0

    Dans mon cas, c'est arrivé tard. En fait, je l'ai dit tard et j'ai commencé ma transition tard, mais c'était là depuis très longtemps. Je n'étais juste pas en capacité, pas en sécurité émotionnelle. Je n'avais pas un cadre assez sécurisant pour faire mon coming out et surtout, j'avais d'autres sujets à gérer. J'ai vécu avec beaucoup de problèmes de santé pendant six ans. et j'avais mon entreprise à fond. En fait, il y a une personne trans un jour qui m'a dit, une médecin, elle m'a dit tu sais il y a quand même beaucoup de personnes trans quand elles font leur coming out tard, ça vient après des gros bouleversements, ça peut venir avec des sujets comme le burn out et le fait de s'être mis à fond dans le travail un peu pour se cacher ou pour ne pas voir ce que tu vis personnellement. Moi c'est typiquement ce que j'ai vécu, je me suis mis à fond dans le travail pour pas me regarder personnellement. Et c'est le fait de faire de l'épuisement, le burn-out et tout ça qui m'a un peu arrêté. C'est mon corps qui m'a arrêté en me disant, il y a un truc qui cloche, il y a un truc qui ne va pas dans ta vie, il faut que tu le regardes. Mais par contre, j'ai toujours été, tu vois, quand tu parles de garçon manqué, et en fait, moi, j'ai toujours été ce que je suis. D'ailleurs, j'ai l'impression qu'avec la transition, j'ai juste accepté ce que je suis et j'ai l'impression de revenir un peu en arrière à mes origines, entre guillemets, parce que j'ai arrêté de vouloir performer le genre. ou vouloir correspondre à un rôle qu'on m'avait assigné à la naissance. En fait, j'ai tout fait pour... En gros, je suis vraiment le bon trans entre guillemets. J'ai vraiment tout fait pour correspondre à cette image de meuf et à me conformer. Et c'est venu avec la peur de ne pas être acceptée dans le travail. Quand j'ai commencé à travailler, j'ai commencé à être dans un genre féminin, plus féminin. Alors qu'avant, j'étais... et j'avais une expression de genre très masculine, très androgyne. Et de fait, de travailler avec des grosses boîtes, de travailler avec des gens très variés que je ne connaissais pas, j'ai un peu reproduit ce qu'on attendait de moi. Et pour pas trop dénoter déjà que, en tant qu'artiste et photographe, je dénotais déjà pas mal, j'avais surtout envie de me faire accepter d'avoir du boulot. Donc, il y avait surtout la première problématique, c'était d'avoir du taf. Et ça est venu, j'ai commencé à me poser dessus, sur ces questions-là, et à me laisser ressentir quand j'ai eu l'espace, quand je me suis créé l'espace pour moi. Et en fait, mon coming out, j'ai pu le faire grâce au fait de trouver une communauté sécurisante, pas forcément LGBT d'ailleurs, mais de trouver des gens avec qui je me sens bien, des gens avec qui je peux être moi-même, et du coup, petit à petit, me sentir Sentir que je n'allais pas tout perdre en fait, que je n'allais pas perdre toute ma vie. Effectivement ça a quand même été un gros bouleversement, mais j'avais assez de sécurité intérieure pour me dire ok je le fais parce que parce qu'en fait déjà je n'avais plus le choix clairement, c'était soit ça, soit je ne pense pas que je serai encore là pour en parler. Et parce qu'à un moment donné, voilà j'ai presque 30 ans, est-ce que je continue à jouer ce rôle toute ma vie ou pas tu vois ? Et aussi parce que je ne savais pas, tout bêtement. Moi, je savais qu'il y avait un truc avec le genre depuis longtemps. Dans mes relations, j'ai toujours dit que c'était moi le bonhomme. J'ai toujours été très garçon manqué. Mais je ne savais pas que ça existait d'être trans. Donc, en fait, je ne savais pas forcément les mots pour comprendre ce que je vivais. Et il m'a fallu que je fasse des recherches, tu vois, pour tomber sur... Ah oui, en fait, c'est ça. En fait, j'ai le droit de transitionner. En fait, je peux vivre ça. Et c'est ça que je suis. Et c'est juste que j'avais un... c'était pour moi invisible, c'était un impensé, c'était pas des questions auxquelles... enfin des réponses auxquelles j'avais accès. Et après par rapport aux relations, alors moi j'avais une relation avec une femme il y a quelques temps, il y a quelques temps avant mon coming out, et du coup oui ça a posé des questions, mais tu vois mon coming out trans j'ai pu le faire grâce à un mec cis qui m'a beaucoup aimé, avec qui je me sentais bien qui m'a dit « écoute, si t'es trans, super, je t'aimerais que quoi qu'il arrive » . Et par contre, notre relation n'a pas continué. Mais il y a aussi des questionnements qui peuvent venir, mais ce n'est pas nécessaire. En tout cas, moi, je ne suis pas passé par la classe lesbienne parce que je ne suis pas en sexuel, donc je pense que je n'ai pas eu trop ce questionnement-là. Même si aujourd'hui, je m'autorise plus à relationner avec des femmes. Et c'est vrai que de changer de statut social, forcément ça change les rapports avec les gens et ça peut perturber de paraître gay dans la société, ça peut perturber une relation que j'avais en cours avec un mec qui n'avait jamais questionné sa sexualité. Pour lui, ce n'était pas possible d'être vu comme une personne gay ou même de questionner sa sexualité. Il était forcé de le faire parce que j'ai fait mon coming out, mais du coup je perds aussi des relations en cours de route et c'est vrai qu'il y a plein de... Il y a plein de sous-problèmes ou de sous-prolématiques qui peuvent arriver, mais ce n'est pas le cas de toutes les personnes trans. Vraiment, ce que je dis aujourd'hui, c'est ce que moi je l'ai vécu, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Et voilà.

  • Speaker #1

    T'as dit un truc que j'ai aussi tilté, je tilte beaucoup. T'as dit que t'avais pas envie d'aller dans des after work pour pas être confrontée à des questions que tu faisais avant, mais que t'avais arrêté de le faire. Alors moi, maintenant, je sais que t'es trans parce que tu l'as dit et parce que je suis ton contenu, mais t'as un bon passing. Pourquoi ? Alors je te pousse dans tes retranchements pour les autres qui nous écoutent. Pourquoi tu fais pas juste le mec 6 ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est très nouveau que j'ai un bon passing.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Parce que c'est pas magique de prendre des hormones, c'est pas en quelques semaines ou en quelques mois que ça change. Ça fait, je crois, depuis janvier, février, donc c'est très très récent, que les gens ne savent pas que je suis trans. Mais il y a encore six mois, c'est tout nouveau. Du coup, des fois, je me retrouve dans des situations, moi je suis sûr que ça se voit, ou que j'ai encore habitué au fait que ça se voit, et je me retrouve dans des situations où les gens n'ont pas compris. Donc des fois ça crée des incompréhensions, mais c'est très nouveau. Donc il a fallu, tu vois j'ai commencé Zermond il y a presque trois ans et demi, il y a trois ans qui se passent où on ne sait pas dans quel cas on met. Et les changements sont très progressifs, et là tu vois j'ai un peu de moustache mais c'est très récent. Et donc il y a eu toute une phase où j'étais hors case, en tout cas pour les gens. Donc, nécessairement, j'avais plein de questions et c'était pas très confortable. Et aujourd'hui, je dois capter que ça se voit plus ou beaucoup moins. Et donc, c'est d'autres problématiques.

  • Speaker #1

    C'est ça que j'allais dire. C'est d'autres problématiques dans le sens où... Alors, c'est une question qu'on ne pose jamais, mais c'est une question... Moi, par exemple, j'ai une copine, elle est trans. Elle, elle ne veut pas être vue comme une femme trans. Après, c'est différent. Les femmes trans, c'est autre chose. Avec la société dans laquelle on est, la misogynie, la ND, enfin... C'est très très violent pour les femmes trans. C'est encore...

  • Speaker #0

    Moi, j'ai clairement le privilège de passer pour un mec.

  • Speaker #1

    Oui, voilà, c'est ça que j'allais dire.

  • Speaker #0

    J'ai vu des privilèges que les femmes trans ne vivent pas.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est sûr. Mais ma question, c'est, toi, dans l'idéal, t'es OK avec le fait d'être vue comme un homme cis ou t'aimerais être vue comme un homme trans ?

  • Speaker #0

    Je suis en train de capter que c'est une question que je dois me poser en tout cas. Est-ce que je le dis ? comment je le dis, quand est-ce que je le dis, à qui je le dis. Moi déjà, il y a un enjeu d'être visible par rapport à ça, parce que j'ai à cœur de pouvoir accompagner d'autres personnes LGBT et qu'ils se disent que je suis des leurs, mais je ne suis pas obligé de le crier sur tous les doigts non plus. Mais il y a... En fait... C'est à la fois confortable parce que ça me met dans une sécurité que je découvre, de ne pas être en danger dans la rue, maintenant que j'ai un bon passing. Mais tu vois là, tu dis que j'ai un bon passing, mais on m'appelle madame trois fois par jour. Donc en fait, c'est très très subjectif et ça dépend vraiment des gens. Effectivement, depuis que je n'ai plus mes seins, ça a changé. On m'appelle beaucoup plus monsieur. Mais en fait, ce n'est pas forcément... une vérité absolue, on m'appelle Madame une fois sur deux. Donc, ce n'est pas complètement acquis. Et est-ce que j'ai envie de passer pour un mec cis ? Je ne crois pas parce que… Non, je ne crois pas. Mais en fait, il y a aussi une fierté d'être trans, d'être visible. Je suis fière d'être trans. J'ai envie de le dire parce que c'est politique de le dire, c'est politique d'être visible. Et j'ai envie de porter ça aussi. Après, ça dépend des contextes. Des fois, ça m'arrange de ne pas être visible, mais c'est très vite vu. Je ne sais pas, des contextes médicaux, des contextes où quand je raconte un peu mon parcours, dès qu'on rentre un peu dans des relations où je raconte ma vie, c'est parfois difficile de le cacher. Si je voulais le cacher, ce serait quand même aussi un effort. Pour moi, la problématique, c'est de ne pas dépenser de l'énergie à cacher les choses. La question de l'énergie est importante, en fait. De conserver mes points de vie, entre guillemets. Et je trouve, en tout cas, aujourd'hui, que si je devais le cacher, ça me demanderait beaucoup d'efforts. Et aussi, je ne peux pas vraiment le cacher, parce que, tu vois, je parlais de mon travail documentaire. Je réalise un film documentaire où je suis un des personnages du film. Et donc, dans mon travail, je me retrouve à... à pitcher mon projet devant des professionnels, là je suis en formation, j'écris dans une école de cinéma le projet, et donc je ne peux pas faire comme si ça n'existait pas, parce que c'est au centre de mon travail, c'est au centre de mes engagements, et c'est ce que je raconte aussi en partie, ce n'est pas le centre du film, mais c'est une chose qui va être visible dans le film, donc c'est difficile de passer outre. C'est vrai que pour l'instant, je ne vais pas trop dans des cadres où... où j'ai besoin de passer pour Amexis. À part dans la rue, pour être en sécurité, c'est vrai que j'ai surtout envie de fréquenter des gens qui sont OK avec mon identité et d'être sûr de ça pour pouvoir les fréquenter et pas prendre des risques de « si jamais ça se sait » ou « qu'est-ce qui va m'arriver ? » Parce qu'il y a aussi le danger qui va avec. Et donc, je préfère ne pas le cacher. Mais parfois, pour ma sécurité, Ça ne se voit pas, mais ce n'est pas un but pour moi de passer pour un ex-cis.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'aujourd'hui, être trans dans le business, c'est problématique ou pas, sachant que tu as créé ton propre business ? Ce que je veux dire, c'est qu'un peu comme ta famille choisie. Est-ce qu'il y a encore des limites ? Je présume qu'avec tes clients, non, vu qu'ils t'ont choisi. Mais est-ce que dans d'autres cadres, avec des prestats, ou est-ce que tu as déjà été confrontée à de la transphobie ? En fait, ce que je veux dire, c'est qu'on dit que quand on est indépendant, on a choisi une vie sur mesure. Donc, dans l'idée, on a une liberté d'être nous et de se confronter à rien d'autre, comme si on ne vivait pas dans une société. Est-ce que toi, tu ressens quand même les limites de la pensée des gens, de leur part d'ombre ?

  • Speaker #0

    En fait, oui, effectivement, je choisis des gens qui sont sécurisants et je choisis des collègues, des clients avec qui c'est cool. Mais ça n'empêche pas les questions parce que toutes les personnes ne sont pas forcément au fait de tout, éduquées. Ça n'empêche pas que les gens ragent, ça n'empêche pas des petits moments de gênance qui sont ok, tant que tu t'excuses et que ce n'est pas de la malveillance, c'est chouette. Mais par contre, il y a d'autres contextes. Là, j'ai un truc qui me vient, j'ai fait une conférence sur les freelances atypiques sur un salon d'entrepreneurs. J'ai eu rendez-vous avec une des personnes qui gère le salon. La première question qu'il m'a posée en rendez-vous, c'est « c'est quoi ton prénom d'avant ? » . Donc, en fait, ce n'est pas parce que je suis positionnée là-dessus que ça m'évite d'avoir ce genre de remarques ou de moments gênants. Et dans le cadre de l'écriture de mon documentaire, ça m'arrive. En fait, je suis en train de me rendre compte que j'ai aussi le statut de réaltrance. et on me met dans une case qui ne m'appartient pas, parce que être trans, c'est pas juste... C'est une des composantes de mon identité, mais c'est pas toute mon identité, et surtout, toutes les personnes trans ne font pas les mêmes films. Et en fait, quand, tu vois, je pense, certains professionnels, diffuseurs, producteurs ou autres, entendent le fait que je suis trans dans la manière dont je parle de mon projet, il y a un court-circuit qui se fait dans leur cerveau, tu vois. Comme on en parle beaucoup, comme... on se dit que le sujet des trans on l'a déjà traité, en fait on me met dans une case qui je pense peut me desservir, et si ce n'est pas de la discrimination, en tout cas c'est une petite case qui peut m'empêcher d'avancer dans ce projet, parce que du coup j'ai des problématiques avec ça, parce que ça fait peur aux gens, ou alors il y a justement un gros fantasme. derrière ça ou alors en tout cas on bug là dessus tu vois et alors que mon travail c'est dans mon film et dans mon projet documentaire c'est un travail sur la sexualité et le consentement donc en fait ça n'a pas forcément lieu d'être mais je vois aussi qu'il y a la manière dont on me met dans une case et aussi la légitimité que moi je peux me sentir ou pas c'est normal en fait comme j'ai été éduqué comme une meuf à à me sentir moins légitime certaines choses à me sentir encore en chemin d'oser des choses, d'oser porter des projets, d'oser prospecter, d'oser demander des partenariats ou des projets. Et forcément, c'est un sujet.

  • Speaker #1

    Comment on répond à quelqu'un qui dit c'est quoi ton dead name dans le monde du travail ? Parce que dans la vraie vie, tu peux ne pas répondre, passer. Dans l'intimité, tu peux dire mais ça ne va pas te demander ça. Dans le travail, comment on met ses limites tout en étant corporate ?

  • Speaker #0

    Poser ses limites, c'est un gros sujet dans le boulot. Je pense qu'avec l'expérience, j'ai de plus en plus de pédagogie et j'arrive à sentir quand j'en ai marre de répondre à des questions, j'arrive à dire écoute, je n'ai pas envie de répondre, mais en fait, des fois tu es pris de cours, des fois tu ne sais pas. Là, il se trouve qu'il y avait quand même un gros biais avec cette personne de pouvoir parce que je voulais vraiment avoir accès, pouvoir faire cette formation, cette conférence. Et en fait, je lui ai dit tout en lui disant, après en fait, je suis revenu, après le rendez-vous, j'ai envoyé un mail en disant écoute, je n'étais pas du tout à l'aise que tu me posais cette question. Attention à ne pas la poser aux personnes concernées, ce n'est pas une question qui se pose, et je lui ai expliqué. Mais du coup, j'ai dû revenir par la suite, et la personne s'est excusée, et on a pu échanger. Mais en fait, on fait comme on peut. En fait, c'est ça le truc, c'est que ça dépend de... Est-ce que tu es préparé ou pas ? Est-ce que tu as assez d'énergie ? Est-ce que tu l'as vu venir ? Est-ce que tu sais quoi dire ? C'est difficile. Moi, j'ai aussi beaucoup vécu ça dans le parcours médical. avec des ostéos, avec des kinés, avec des trucs qui sont pas forcément en lien avec ma transition. Et donc je suis parfois obligée, pour que je sois bien pris en charge, de dire que je suis sous hormones. Donc je peux pas cacher que je suis trans, parce qu'on me dit pourquoi, on me demande, machin. Et donc quand on sait que je suis trans, parfois c'est des questions... soit malaisantes, soit voir des discours anti-LGBT, des discours de « ah bah non, on m'a déjà dit que la survie de l'espèce c'était un papa et une maman, on m'a déjà expliqué que c'était un choix, j'ai eu des infirmières qui m'ont dit des dingueries. » Et en fait, je ne me suis préparé comme je pouvais, mais tant que tu ne vis pas ce genre de choses, tant que tu ne vis pas la discrimination et les micro-violences et les propos transphobes, Tu ne sais pas comment ça va te faire dans le corps, tu ne sais pas si tu vas la répartir, si tu vas savoir faire. Et c'est pour ça qu'être trans, ça isole, ça marginalise, parce que ça demande un effort mental. Il y a des choses, typiquement, avoir accès à des clubs en sport, aller à la piscine, en fait, ce ne sont plus des moments détente, parce que ce sont des moments où on te regarde des cicatrices. On te dit que t'es pas dans le bon endroit pour les vestiaires, tu dois te retrouver. Moi je me suis retrouvé à dire devant un groupe de 30 personnes dans un club de sport que j'étais trans pour savoir quel vestiaire j'allais choisir. Et c'est pas moi qui amène le sujet, tu vois, c'est les gens qui tiennent le cadre. Je me retrouve aussi dans le def perso, dans des retraites où il y a des gens qui me disent « Non mais pourquoi on fait tout un tatouin sur les personnes trans, les pronoms, machin, je suis en colère, les étiquettes qu'on nous met et tout » Et en fait, ça retombe toujours sur les personnes concernées, de faire de la pédagogie, d'expliquer, si les personnes qui tiennent le cadre ne le font pas. Donc en fait, on fait comme on peut, et ça impacte énormément ton mental, et aussi ta légitimité à être là, tout simplement. Donc c'est vraiment compliqué au quotidien. Et moi, c'est vrai que je me suis formée à la communication non-violente dans mon parcours, et je trouve que ça m'aide beaucoup. Parce que je peux dire, écoute, je comprends que tu aies des questions, je comprends que ça te questionne. Parfois même, ça vient d'une bonne intention, tu vois, de savoir, de créer du lien. Mais en fait, je dois leur dire, je comprends que tu as envie de créer du lien, sauf que moi, c'est des questions qu'on me pose trop souvent, je suis fatigué, je n'ai pas envie d'y répondre, je n'ai pas l'espace. Demande-moi mon consentement si j'ai envie d'en parler avant de m'imposer ce genre de questions. Ne dis pas ça devant les autres, ça me met en danger. J'ai une copine qui m'a outé, tu vois, typiquement, en pleine transition. J'avais un billet à mon dead name parce que je ne pouvais pas payer avec ma... Je n'avais pas encore mon nom sur mes cartes bancaires, parce que ça prend du temps et tout. Donc, je me retrouve aussi avec des fois des gens dans l'administratif, tu vois, qui parlent fort, dans les laboratoires, quand tu vas faire un examen de sang. Moi, j'ai ma carte vitale où il y a encore le 2 de femme dessus. Donc, je me retrouve à devoir me outer dans le train. C'est un enfer. Dans le train, c'est compliqué. D'ailleurs, j'avais fait un sous-de-gueule sur LinkedIn qui avait un peu explosé sur LinkedIn en taguant la SNCF parce que quand tu as une carte de réduction à ton nom d'avant, tu ne peux pas, en cours de route, la faire actualiser. Et ça, ce n'est pas légal de ne pas pouvoir actualiser les données personnelles. D'ailleurs, ils se sont fait épingler par la Commission européenne récemment. Et je me retrouve à devoir me justifier que c'est bien moi parce qu'ils voient un peu un prénom qui n'est pas le bon, ou alors ils voient le genre qui n'est pas le bon dans leur billet, du coup ils me disent non c'est pas vous, vous fraudez, donc je me retrouve à devoir dire que je suis trans devant 40 personnes dans des files d'attente, à devoir me battre à la poste, tu vois des trucs comme ça et c'est je sais plus quelle était ta question, excuse moi je me suis un peu perdue, mais c'est plein de situations comme ça que tu peux pas les anticiper. Tu peux te préparer en écoutant les parcours des uns et des autres, mais clairement, tu vois, moi le train, je ne l'avais pas vu venir. Je n'avais pas vu venir que j'allais avoir la boule au ventre en voyageant à chaque fois.

  • Speaker #1

    J'ai une dernière question, enfin c'est la non-dernière question. C'est une question sur le fait qu'il y a beaucoup de meufs comme moi qui ont une communication vachement tournée vers les meufs. Et je me suis déjà fait ramasser d'ailleurs par un mec trans qui m'avait écrit en me disant « J'adore ce que tu fais, mais en fait à chaque fois tu es genre tout au féminin. Et moi je ne sais pas trop où est ma place. » Donc maintenant j'essaie de préciser, femmes et personnes LGBT, qu'est-ce que tu ressens par rapport à ça ? Est-ce que tu as l'impression parfois d'avoir le cul entre deux chaises ? Même si après franchement, d'un côté les meufs font ça pour se protéger, mais je sais même que quand je vais dans des événements et que je dis « Ouais mais non les mecs, ... Il y a toujours des meufs qui vont me reprendre, qui vont me dire non les mecs cis, pour pas qu'on parle des mecs trans et tout, mais sur internet on le fait moins, c'est à qui ira le plus vite, à qui fera le plus de visibilité, donc on va essayer d'être le moins dans la nuance, etc. Est-ce que tu as quelque chose à nous dire sur ça aujourd'hui ? Peut-être une piste de réflexion aussi pour toutes les meufs ?

  • Speaker #0

    C'est bien que tu en parles parce que c'est pas évident je pense pour les mecs trans et les meufs trans. de dire qu'on ne se sent pas concerné parce qu'effectivement, il y a vraiment besoin d'espace en non-mixité pour les femmes en général. Et c'est hyper important d'avoir des business qui parlent concernés et des business féministes. Déjà, j'ai envie de dire aux gens qui veulent travailler pour les femmes, les femmes cis ou les femmes trans, les femmes en général, on a le droit d'avoir une communication au féminin. Tu as le droit de travailler pour la cible que tu veux et c'est OK. Tu as le droit aussi de travailler au masculin ou... ou en neutre, déjà il n'y a pas forcément d'injonction à forcément faire de l'inclusif pour tout le monde tout le temps. Mais par contre c'est vrai que si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non binaires et aux mecs trans en ayant une communication en féminin, ça pose des questions. Et moi c'est vrai que je l'ai vécu, il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou que je voulais. Et en fait ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur com. Et c'est vrai que ça pose la question de notre place à nous. Je pense qu'il y a des petites techniques de dire « femmes et minorités de genre » , ça englobe beaucoup de gens et ça permet d'être inclusif. Il y a aussi un point qui est important, c'est le féminin neutre. Moi, j'ai notamment été coachée par deux personnes qui sont antisexistes, féministes et qui ont une communication pas forcément féminine dans leur... communication visible sur les réseaux, mais dans les événements, c'est posé dans le cadre qu'on va parler au féminin neutre pour tout le monde. Et les mecs qui sont présents, trans ou pas, en fait, on va parler au féminin neutre. Et je trouve que c'est intéressant de mettre le féminin et de mettre le féminin neutre, parce que ça pose aussi pour les mecs cis l'expérience de ce que c'est d'être exclu de la langue et d'inclure autrement les... les femmes et les minorités de genre, mais c'est vrai que ça peut nous, à titre perso, nous faire sentir pas concernés. Donc c'est vrai que si vous voulez inclure et être en tout cas safe, c'est une des choses à faire pour les personnes, les minorités de genre, les personnes non-binaires et trans, c'est bien de le préciser. Et pareil pour les femmes trans en fait, c'est pas parce que tu as une communication au féminin que tu es safe pour les femmes trans. Moi je pense que l'inclusion, elle vient, c'est un travail à faire et en vrai il n'y a pas de bonne façon de faire. On fait tous comme on peut avec les armes qu'on a et au fur et à mesure on apprend et on fait de notre mieux. Mais je pense que de préciser que c'est safe pour les personnes trans et que les femmes trans sont bienvenues quand c'est une communication en féminin, c'est nécessaire pour que ces personnes viennent. se sentir légitime de venir, tu vois. Mais on n'est pas obligé de tout genrer au neutre, on n'est pas obligé... Je pense que le minimum, c'est de mettre LGBT friendly quelque part, bienvenue aux femmes trans aussi, tu vois, de répéter ça de temps en temps, de dire que je parle au féminin neutre, mais ça inclut toutes les femmes. Et effectivement, après, la question de la non-binarité aussi, c'est un questionnement, parce qu'on les oublie beaucoup, les personnes non-binaires, Aïe ! Et peut-être de dire LGBT friendly ou minorité de genre, ok, ça englobe tout le monde. Mais ça pose la question de comment tu fais, si tu fais des cercles de femmes, est-ce que tu acceptes les personnes non-binaires ou pas ? Et je pense que si c'est le cas, il faut le dire et le clarifier, le préciser pour que ces personnes se sentent légitimes de venir et à l'aise de venir.

  • Speaker #1

    Deux dernières questions, mais des questions plutôt... légères. Donc la première, quel créateur de contenu tu peux nous conseiller ? Quelqu'un qui travaille un petit peu sur les questions de discrimination. Tout ce dont on vient parler pendant une heure. Et la deuxième, est-ce que tu peux nous conseiller aussi des productions artistiques, littérature, films, etc. sur les discriminations, les luttes LGBT. Moi, je te donnerais le mien, qui est mon livre préféré. Pourtant, il ne parle pas de meuf lesbienne. Enfin, si, c'est une meuf lesbienne, mais qui transitionne. Le livre est assez compliqué, mais c'est mon livre préféré depuis la nuit des temps. Je n'ai pas attendu que tu viennes aujourd'hui pour le dire. À ton tour.

  • Speaker #0

    Deux recos indispensables de personnages LGBT. La première, c'est Lorraine Marx, qui est comédienne, metteuse en scène, critique, qui fait des critiques de cinéma. sur son Instagram en ce moment, qui est délicieusement pertinente, drôle. Elle a aussi un seul en scène que je n'ai pas encore vu, qui aborde les sujets de santé mentale et de transition, et qui a beaucoup d'excellents avis. Donc, je pense que c'est quelqu'un sur scène à aller voir. Et si vous voulez vous éduquer sur des questions aussi... de classe et d'invisibilisation des personnes trans, mais aussi si vous aimez le cinéma et la littérature, elle fait des critiques en roue libre sur les bourgeois qui font la culture et c'est délicieux et ça éveille beaucoup de choses. Et puis une deuxième chose, c'est le dernier livre d'Eli Hervé qui est journaliste avec qui j'ai travaillé. C'est un livre dans lequel j'ai partagé mon histoire qui s'appelle Transphobia. Merci. C'est en fait une enquête qui vient de sortir il y a quelques mois sur la désinformation et la discrimination transphobe des médias en France. C'est vraiment une enquête sur comment on traite le sujet de la transidentité dans les médias et comment on laisse faire la montée de l'extrême droite et de la transphobie dans beaucoup de complaisance. C'est très très très sourcé, c'est facile à lire. Et il y a beaucoup de personnes concernées, dont moi, mais aussi l'autre Autignon et d'autres personnes transvisibles, qui ont partagé leur expérience. Et c'est super intéressant et surtout très nécessaire.

  • Speaker #1

    Super, merci beaucoup. Ça sera mis dans la bio, dans le résumé. Est-ce que Transphobia, c'est une réponse à Transmania ?

  • Speaker #0

    Un petit peu, oui. Je ne vais pas parler pour la personne, pour Elie. mais oui en fait ça débunk toutes les idées de phénomènes de mode et de contagion sociale qu'on entend sur la transidentité. Et surtout, ça explique comment les médias sont complices de la montée de la transphobie.

  • Speaker #1

    Super, merci Alan. Pour ma part, créateuriste de contenu, je ne sais pas. Il y en a trop, je n'ai pas envie de faire une boulette, je n'ai pas envie de dire quelqu'un et pas quelqu'un d'autre. Donc, vivez les personnes que je suis sur Instagram, normalement, elles ne sont pas trop mauvaises. Mais mon livre préféré ever, c'est Stun Butch Blues de Leslie Fenberg. C'est l'histoire d'une meuf juive prolétaire. Et c'est l'histoire de sa transition, de sa vie, des luttes antiracistes, des luttes de classe dans les usines. Bref, je ne lui rends pas du tout honneur quand je le présente, mais c'est vraiment un livre fabuleux, fabuleux, fabuleux, qui d'ailleurs, si je ne me trompe pas, est écrit au féminin de tout. Donc voilà, ça c'est Marocco. Alan, on peut te retrouver sur LinkedIn, Alan Raymond. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait, sur LinkedIn, Instagram principalement. Et sur mon site internet aussi, agence-alan.fr.

  • Speaker #1

    Super, est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

  • Speaker #0

    Non, mais merci, je veux juste te remercier de ce moment d'échange, je pense que c'est important et je suis ravi de pouvoir participer. à parler de ces sujets-là. Si jamais vous avez des questions, si vous avez envie d'en discuter, je suis aussi très dispo en DM sur Instagram. Donc, n'hésitez pas.

  • Speaker #1

    Merci à toi. Merci, Alan. Au revoir. Bisous. Ciao, ciao. Et voilà, c'est déjà fini, ma star. Alors, sache que c'était un pur plaisir de partager ce moment avec toi. Si cet épisode t'a parlé, montre-moi tout ton amour. Abonne-toi et mets-moi 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. En attendant, tu peux me retrouver sur Instagram. arrobase jasmine.tweetoo sur ma newsletter Walk Me Up ou encore sur LinkedIn jasmine.tweetoo Tu trouveras tous les liens et toutes tes informations en description. Et puis, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. Allez, stay tuned, my bad bitch.

Description

T’as déjà tout perdu à cause de ton prénom ?
Lui, oui.


Alan est une personne transgenre qui politise son taf : avec l’Agence Alan, il aide les freelances atypiques à prendre leur place grâce à une com’ plus safe, plus humaine et surtout plus honnête. Photographe de formation, réal de docu aujourd’hui, il raconte comment il a dû tout reconstruire après son coming out trans : SEO cramé, fiches Google disparues, clients perdus — et pourtant, toujours debout.


Dans cet épisode :

  • Le vrai prix d’un coming out quand t’es indépendant·e.

  • Comment on pose ses limites face aux questions qu’on ne devrait jamais poser (« c’est quoi ton dead name ? »).

  • Pourquoi dire « femmes ET minorités de genre » peut transformer ta com’ et faire que tout le monde se sente à sa place.

  • Ce que ça coûte émotionnellement de vivre, bosser et exister quand ton identité est politique.


💡 Ses recos culturelles :

  • Lauren Marx — comédienne, metteuse en scène, critique ciné : génie brut.

  • Transphobia de Eli Hervé — une enquête coup de poing sur la désinformation et la haine anti-trans dans les médias.


🔗 Ses liens :
👉 Site
👉 Instagram
👉 LinkedIn


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non-binaires et aux mecs trans en ayant une communication féminin, ça pose des questions. Et moi, c'est vrai que je l'ai vécu. Il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou je voulais. Et en fait, ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur corps.

  • Speaker #1

    Hello, ma star ! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Grosse Rageuse, le podcast des meubles qui en ont marre qu'on leur dise comment exister. Moi, c'est Jasmine. Et après des années à me détester parce que je ne compterais dans aucune case, j'ai décidé d'envoyer péter les inventions et d'enfin m'assumer, pour le meilleur et pour le pire.

  • Speaker #2

    Je suis Mme Alaba Edgar, avec Tartine.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, je suis coach et mentor en storytelling, personal branding et copywriting. En bref, je suis celle qui t'aide à transformer les « t'es trop inspirante » en « shut up and take my money » . Ici, on parle cash, on assume nos galères et on se donne la permission d'être qui on est vraiment. Sans filtre, sans bullshit,

  • Speaker #0

    juste nous.

  • Speaker #1

    Alors mets tes écouteurs, prends ton petit carnet, ton café, ton thé et même ton matcha et prépare-toi à un moment de pure folie. Allez, c'est parti mon kiki !

  • Speaker #2

    Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de podcast de Grosse Rageuse. Aujourd'hui, je ne suis pas toute seule, je suis accompagnée de Alan, Alan Raymond. Bonjour Alan.

  • Speaker #0

    Salut.

  • Speaker #2

    Alors déjà avant de commencer, comme d'hab, je ne vais pas beaucoup innover, je vais te remercier d'avoir accepté cette invitation, d'avoir accepté d'être avec moi aujourd'hui dans Grosse Rageuse Est-ce que tu peux te présenter Alan ?

  • Speaker #0

    Oui avec plaisir, je suis ravi d'être là déjà pour parler un peu de plein de choses Je m'appelle Alan, je suis photographe de formation et depuis quelques années je fais de la communication, j'accompagne les freelances qui se sentent atypiques Merci. à prendre leur place grâce aux outils de com et un travail sur leur positionnement, leur image, mais aussi les aider à développer leur communication sur tout un tas de sujets. Donc j'ai un peu politisé mon travail et ma manière de faire de la communication.

  • Speaker #2

    Quand tu parles de politiser ton travail, de quoi on parle ?

  • Speaker #0

    Vaste sujet ! On parle de plein de petites choses qui sont un peu des angles morts dans le travail en général et dans... dans le travail des entrepreneurs et la manière d'accompagner les gens en général. En tout cas, c'est des enclements pour les personnes qui ne sont pas concernées. Quand je parle de politiser, c'est-à-dire qu'on prend en compte, dans notre manière d'aborder les gens, de travailler avec eux, de leur proposer des offres, mais aussi la manière dont on construit nos offres et la manière dont on travaille concrètement. On prend en compte les violences systémiques, les oppressions, et aussi on essaie de mettre du soin. en fonction des besoins des uns des uns des autres. Donc pour le dire grossièrement, on fait au max pour être le plus safe possible, le plus bienveillant, le non-jugeant, travailler sur nos propres biais et nos propres clichés pour ne pas reproduire ça, ne pas reproduire de violences systémiques, de micro-violences ou de moments gênants, ou en tout cas mettre les gens au maximum à l'aise dans le travail qu'on fait avec eux, avec elles, et aussi dans ce qu'on leur propose concrètement.

  • Speaker #2

    L'idée, c'est quand même d'humaniser le travail, d'essayer de plus humaniser par rapport à ce qu'on nous propose aujourd'hui.

  • Speaker #0

    J'ai l'impression qu'il y a plein de gens qui pourraient dire qu'ils sont humains. Pour moi, c'est un peu aller au-delà. C'est vraiment travailler sur nos ombres. Qu'est-ce qui fait que j'ai un cliché quand je pense à un chef d'entreprise ? Tout de suite, je vois un homme blanc, six, debout dans un endroit immaculé en gérant une équipe, et pas une femme noire. habillé avec de la couleur ou une personne en situation de handicap, une personne handicapée. Donc en fait, c'est plutôt travailler sur nos propres biais à nous. Donc pour moi, ce n'est pas qu'une question d'humain, c'est une question de travail en fait, c'est une question de bosser concrètement ces sujets pour devenir meilleur, mais ce n'est même pas ça. C'est pour bien traiter les gens. On peut se dire humain, mais sans avoir... en ayant des angles morts, en fait, parce qu'on n'est pas concerné par certains sujets. Et on peut penser qu'on accueille tout le monde sans s'être mis dans la tête et la peau des gens pour créer concrètement les conditions qui permettent aux gens de venir et à tout le monde de venir. Ça m'est déjà arrivé de discuter avec des médecins ou des dentistes, pour le coup, qui me disaient, moi, mes collègues... Ils pensent être safe et bienveillants pour tout le monde, mais de fait, il n'y a que des gens qui leur ressemblent qui viennent et ils ne sont pas du tout safe pour les personnes LGBT ou les personnes grosses parce qu'ils n'ont pas travaillé ces sujets-là, ou en tout cas ils ne savent pas par quoi ça passe concrètement pour mettre les gens à l'aise et pour être sécurisants, bienveillants et non-jugeants avec différents types de publics.

  • Speaker #2

    Et comment on passe de la photographie à accompagner les gens dans ça, en fait ? Comment on prend conscience qu'il y a un besoin ? Pourquoi on décide de commencer à travailler sur ses biais et d'aider les gens ?

  • Speaker #0

    C'est plus mon parcours perso. Il y a plusieurs choses. C'est que déjà, en tant que professionnelle dans la photo, j'ai fait plein de choses différentes. Et puis, je me rendais bien compte que ce que je préférais, c'était vraiment l'humain, le one-one, aider les gens qui me... qui avaient des entreprises un petit peu similaires aux miennes, donc des petites équipes, des collectifs, des artistes, des freelances, des musiciens, des créateurs, des artisans, et pas forcément des très grosses boîtes, parce que j'ai bossé avec beaucoup de gens différents et dont des très grosses boîtes, par exemple. Et je me sentais frustrée, moi, de ne pas aider les gens plus que ça et de venir juste faire quelques photos et repartir, alors que quand je travaillais avec des freelances, il y avait vraiment un sujet qui s'ouvrait quand on commençait à faire des images. On parlait de honte, on parlait de peur, on parlait de ne pas oser se montrer, on parlait de rôle de genre, de comment être crédible dans le travail. Et en fait, j'avais commencé à ouvrir une brèche et je donnais des conseils en com aux freelances qui venaient me voir et je commençais à travailler avec eux, mais sans vraiment facturer ce temps-là, en mode plus on s'aide les uns les autres et on se conseille. Et je me rendais bien compte que ce que je faisais en shooting, c'était ouvrir un espace qui permettait... de faire plein d'autres choses par la suite, en tout cas d'approcher certains sujets. Et je n'avais pas forcément les moyens, parce que je ne vendais pas de la com pour prendre soin de ce qu'on ouvrait pendant cet espace-là. Donc, je me retrouvais souvent à sortir de mon cadre. Les gens venaient pour une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie, et on dépassait souvent le cadre. J'abordais des sujets plus profonds, et on aurait pu, parce qu'ils avaient commencé à partager ces sujets-là. on aurait pu bosser et j'aurais pu les accompagner. Mais comme c'est ce passe que je vendais, on était un peu frustrés ensemble. Et aussi, je les laissais repartir avec leur sujet sur le cœur et je n'avais pas forcément prévu d'en faire quelque chose. Donc, je me retrouvais un peu à écouter les gens et à les conseiller sans vraiment l'avoir formalisé. Et il a fallu moi-même que je me forme et que je me forme aussi sur la partie systémique et violents systémiques et féminisme et... et intersectionnalité. Mais ça, c'était plutôt un travail perso que j'ai fait en parallèle. Et du coup, j'ai mis ces trucs-là dans mon travail, à la fois par envie, parce que je voyais qu'il y avait un besoin, mais aussi par nécessité. Parce qu'en cours de route, j'ai fait mon coming out trans. Donc, je suis une personne trans. Et j'ai réalisé ça super tard. Donc, j'avais 29 ans. Et il m'a fallu du temps, moi, pour comprendre, le dire, faire mon coming out. Et du coup, je me suis retrouvée moi-même. dans la case minorisée, alors que ce n'était pas mon plan de carrière. Et donc, je me suis retrouvé photographe trans et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais avec ça ? Et ça a amené aussi plein d'autres réflexions sur une révolution globale de ma vie pro et perso. Je me suis rendu compte que j'avais de la frustration dans mon travail, je n'étais pas vraiment au bon endroit, je n'avais pas osé faire de la com parce que je ne me sentais pas légitime. Et en fait, du fait d'être... de comprendre que j'étais trans, j'ai réalisé que moi-même j'avais aussi un besoin de travailler avec des personnes qui me sécurisent. Je ne peux plus travailler au salon de l'automobile entouré de mecs 600 costards qui passent leur journée à me dire est-ce que tu es une meuf ou un mec et qui me met genre et qui ne respecte pas ou alors faire des coming out au téléphone à chaque appel de clients ou à chaque rendez-vous, répondre à des questions gênantes. Donc j'ai dû moi-même déjà pour moi réadapter mon travail pour que je me sente mieux. d'un point de vue des violences systémiques, mais aussi pour mettre plus de sens dans mon travail parce que je n'avais pas réalisé que je n'étais pas tout à fait au bon endroit. Et la lecture que j'en ai aujourd'hui, c'est en fait que la photo, c'était un peu une manière de me cacher. Et j'ai un peu traversé ce truc-là. Et aujourd'hui, je me montre un peu plus, je prends un peu la parole, j'essaye en tout cas. Et j'ai politisé ma manière d'aborder à la fois la photo et la communication.

  • Speaker #2

    J'ai une question, mais j'ai peur qu'après je fasse partie des personnes qui posent des questions. C'est la question ultra transphobe.

  • Speaker #0

    Je suis là pour ça. Franchement, je suis là pour répondre aux questions.

  • Speaker #2

    J'ai une question. En fait, quand tu parles de ton coming out, alors ça fait trop, j'ai des amis noirs. J'ai des potes, forcément, vu le milieu dans lequel j'ai évolué, vu mes choix de vie, mon lifestyle. Donc j'ai pas mal de... potes qui sont trans, etc. Et en fait, moi, ce qui m'a vite fait fait tilter, ou pas en fait, parce que j'arrive avec mes présupposés, c'est cette impression que tu donnes de ne pas avoir fait partie de la communauté LGBT avant ton coming-out trans. Et c'est vrai que moi, j'ai... Ce truc de « avant la transition, mes potes étaient lesbiennes » . Je ne sais pas si je peux le dire comme ça. Maintenant, elles sont hétéros, tu vois. Ce n'est pas ton cas ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Non, ce n'est pas forcément une mauvaise question.

  • Speaker #2

    Tu as vu comme j'ai marché ?

  • Speaker #0

    Oui, mais bien formulé. En fait, c'est une vraie question. Est-ce que j'étais déjà dans ce milieu-là avant ou pas ? Je pense que ça a du sens d'y répondre. Moi, pas du tout. En fait, je regardais de loin le drag, la scène drag. J'avais quelques potes gays, pans, lesbiennes, mais vraiment un peu de loin. Et tant que ça, j'avais peut-être deux, trois potes concernés. La question de la non-binarité n'était pas non plus autour de… de la transidentité n'était pas dans mon réseau. Et je crois que la première personne trans que j'ai rencontrée, c'était… vraiment super tard en fait quand j'avais déjà compris que j'étais trans. Donc moi je me suis renseignée et je me suis rapprochée de la communauté LGBT par nécessité pour comprendre déjà ce que je vivais en écoutant des podcasts, en me renseignant, en suivant des gens sur Insta, sur Youtube, des documentaires, des articles, de la ressource, un peu dans tous les sens et j'ai commencé à fréquenter entre guillemets le milieu LGBT, pas forcément via le milieu LGBT mais via des espaces Merci. qui sont safe pour les personnes LGBT, donc j'ai rencontré des personnes LGBT là-dedans, qui est plutôt la communauté sexe positive ou des mouvements autour de la libération, non c'est pas très mal expliqué, libération sexuelle, il ne faut pas du tout dire ça comme ça, mais c'est des espaces où on parle de sexualité, on pratique la sexualité, et c'est des espaces féministes, antisexistes, et il y a un grand cadre qui est posé sur le respect des pronoms, des genres des gens, et c'est aussi un espace où on peut explorer. ce que c'est que d'être genré autrement. Et donc tu peux un peu cheminer sur tes questionnements aussi de genre. Et moi c'est un des espaces qui m'ont permis de questionner mon genre dans des retraites de développement personnel, un peu dans ces mouvances-là. Et c'est via cette communauté-là que je suis rentré dans la communauté LGBT et aussi par nécessité, quand je me suis posé les premières questions, je suis allé dans des cercles de parole, dans les assos LGBT. Et au fur et à mesure, j'ai rencontré de plus en plus de personnes concernées. Et surtout, pour avancer dans ma transition, je n'avais pas le choix que de me renseigner. Et les infos, on les trouve où ? Dans des groupes Facebook, tout simplement, de personnes LGBT, de personnes trans. Et de là, j'ai découvert les assos, tout ça. Et je suis montée à Paris un peu en même temps. Et donc, il y a plus d'offres, plus de choses qui existent. Et donc j'ai eu besoin de me rapprocher des personnes qui vivaient des choses similaires aux miennes, pour cheminer moi-même personnellement, comprendre ce que je vivais, et au fur et à mesure je me suis fait des liens, et au fur et à mesure j'ai créé aussi un entourage, et je ne fréquente pas que des personnes LGBT très loin de là. Mais en fait c'est un vrai chemin de comment on appréhende la communauté LGBT, c'est vraiment très très différent pour les uns et pour les autres. Il y a des gens qui sont un peu en rejet et c'est vrai que moi dans mon cheminement je dois avouer qu'il y a des moments où j'avais peur d'y aller, j'avais peur de rentrer dans une bulle, j'avais peur de me sentir si bien dedans qu'en fait je ne peux plus être à l'extérieur. Et en fait c'est ce qui s'est passé de fait. Il y a plein de choses que j'ai arrêté de faire, des endroits où j'ai arrêté d'aller, dans le travail mais aussi dans les... de perso parce qu'en fait on est fatigué de répondre à des questions gênantes et aussi de se sentir en danger donc c'est vrai qu'il y a un besoin de repli et moi c'est vrai que j'ai eu besoin de trouver juste un milieu entre j'ai besoin de ressources, de repli, de trouver des adelfes avec qui je peux échanger avec qui je peux être en lien pour cheminer mais aussi trouver de la ressource pour pouvoir aller à l'extérieur et pas être que dans cette bulle moi je sais que j'ai besoin d'altérité et j'ai besoin de de rencontrer des gens différents. Et donc j'essaye de trouver le juste milieu. Mais de fait, ça fait vraiment beaucoup de bien et c'est vraiment nécessaire ces espaces, donc j'y passe quand même du temps.

  • Speaker #2

    Moi, c'est vrai que j'ai une expérience tout à fait différente avec les milieux LGBT que j'ai beaucoup fréquentés et que je rejette beaucoup aujourd'hui. Je ne rejette pas les personnes, encore heureux. Je rejette les milieux qui m'ont fait beaucoup de mal. Alors c'est très douloureux d'être avec des personnes qui se posent des questions trop connes et tout. Franchement, c'est fatigant. Mais tu en as parlé, tu as parlé de repli. Moi, j'ai eu l'impression vraiment à un moment d'être dans une secte et de ne pas réussir à penser un autre.

  • Speaker #0

    En tout cas, dans tous les milieux communautaires et dans tous les mouvances où on veut faire communauté par nécessité, on essaye de ne pas reproduire les violences qu'on vit à l'extérieur, mais on n'est pas vierge de notre éducation. Donc il y a aussi des biais, il y a des violences à trac communautaire, il y a de la transphobie, il y a de la biphobie, il y a du racisme. Et tout ça, ça existe de partout. Donc c'est un peu l'illusion que c'est safe. C'est pour ça que je dis que nous, on... Il n'y a pas d'espace safe, on est safe d'une part, il faut toujours être en vigilance de ça et faire attention à soi. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes de partout. Après, ça dépend aussi forcément des sectes, il y a des personnes problématiques, plus ou moins, en fonction des lieux. Mais c'est vrai qu'il y a aussi la pureté militante, il y a de la pression, il y a des fois des injonctions. Et effectivement, c'est aussi des gens qui sont en construction et les milieux sont aussi en train. Les assos, les milieux sont en construction aussi, de travailler sur ses propres biais. Typiquement, la question de la transphobie et du racisme, c'est des choses... J'ai l'impression qu'il y a des choses qui avancent, mais c'est lent, quoi.

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr.

  • Speaker #0

    Donc, il y a de l'équipe...

  • Speaker #2

    Pas de problème en mondial. Oui. C'est les débuts de certaines prises de conscience,

  • Speaker #0

    on va dire. Mais en fait, quand on dit milieu LGBT, ça ne veut rien dire. Ça veut dire quoi ? Moi, j'ai quelques potes LGBT, je vais dans quelques endroits. à quelques événements qui a l'impression de fréquenter le milieu LGBT. Mais en fait, il y a toute une multitude d'événements, d'associations, de gens et on ne peut pas réduire tout ça à des expériences individuelles. Mais c'est vrai qu'il y a des problèmes et il y en a partout.

  • Speaker #2

    Oui. J'ai une question. Tu étais déjà freelance avant de faire ton coming out ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Ouais, t'as fait quoi ? Raconte-nous un petit peu ton parcours sur ça.

  • Speaker #0

    Alors, je suis né en 91. Et j'ai commencé l'indépendance. En fait, dès que le statut d'auto-entrepreneur a pu exister, je me suis inscrit et j'ai commencé à bosser avant d'avoir mon bac. Donc, mon premier projet pro photo, c'était à 18 ans et un jour. Et j'ai gardé ce statut pendant mes années de... de lycée de photos. J'ai fait une école de photos en Belgique avec un aspect aussi un peu com, en tout cas photo un peu large, image. Et en parallèle, j'ai commencé à prendre des projets, à me lancer pour avoir un peu d'expérience et pas tomber des nues à la sortie de l'école de comment je fais pour un des clients et me faire un petit peu les armes et aussi pour avoir un petit peu de sous. Et donc, j'ai quand même pas mal bossé pendant mes études et quand j'ai fini mon... Mon diplôme, je me suis lancé à temps plein à Lyon. J'étais en Belgique et je suis arrivé à Lyon dans une ville où j'avais un oncle, deux petits cousins, trois petits cousins et c'est tout. Je ne connaissais pas grand monde et je me suis lancé à temps plein et j'avais un peu d'aide familiale. J'avais un an ou deux ans pour me lancer et être autonome. et donc je me suis mis à fond en tant qu'indépendant à Lyon et j'ai essayé de bosser dans plein d'endroits différents, j'ai fait des reportages d'entreprise, des reportages pro, des pubs de comédiens, beaucoup de photos de scènes, d'événementiels, de musiciens et tout un tas de choses. J'ai participé à plusieurs studios photo, j'étais dans plusieurs collectifs, j'ai monté mon propre studio photo avec d'autres collègues et j'ai passé 9 ans à Lyon, à explorer plein d'aspects de la photo, à me former à la vidéo, à me former à plein de choses en tant que freelance, à me prendre aussi des bonnes claques dans la gueule, à faire des erreurs, à réapprendre, à mal choisir les journées qui se posaient, puis après revenir en arrière. Et en même temps, j'ai appris plein de choses, j'ai investi beaucoup et j'ai fait, je pense, plein d'erreurs de débutant aussi qui m'ont permis d'au bout de neuf ans, de faire un gros tri de qu'est-ce que je garde. Qu'est-ce que je sais faire ? Qu'est-ce que je veux faire ? Vers où je vais ? Et j'ai fait mon coming out au bout de 9 ans de freelancing à Lyon. Et ça a pour moi amené à une révolution dans ma vie assez intense. J'ai réalisé que je pouvais passer de l'autre côté de la caméra, accompagner les gens autrement, accompagner sur d'autres aspects, travailler avec d'autres gens dans la com, faire aussi de la vidéo, plus de vidéos. Et donc je me suis monté dans un très beau projet de film documentaire. Je me suis lancé un peu dans la vidéo, j'ai fait quelques prises de la vidéo, et ce mouvement-là a amené un ras-le-bol global de ma vie à Lyon. En fait, j'ai l'impression d'avoir fait le tour, et il fallait que je mue, entre guillemets, et je suis parti à Paris. J'ai une amie qui m'a accueilli, elle m'a dit « viens à Paris » , et du coup je me suis retrouvé à Paris avec mon identité en questionnement. Et de là, j'ai repris tout à zéro, aussi parce que j'ai vécu des problématiques liées à la transition. dans mon travail, qui ont fait que j'étais un peu obligé de repartir à zéro avec un nouveau projet, une nouvelle adresse mail et aussi un nouveau réseau courant.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ça ou pas ?

  • Speaker #0

    Tout à fait. Bon, être trans, c'est plein d'emmerdes, c'est plein de joie aussi, c'est plein de choses. Mais ce n'est pas juste faire des opérations et prendre des hormones, c'est changer de statut social, c'est être confronté à des coming-out réguliers, confronté à des problèmes administratifs, de vivre plein de petites étapes, d'oser s'habiller autrement, d'oser sortir dehors. un peu différemment, se faire genrer, dire son prénom à sa voisine pour la première fois, traverser plein de choses. Et dans le travail, il y a tout un tas de problématiques que je n'avais pas du tout prévues et qui m'ont un peu surprise, notamment des problèmes administratifs. Des trucs qui paraissent bêtes, mais en fait, quand tu changes de prénom, ma vie d'avant était tout basée sur mon prénom d'avant. Le nom de ma boîte, c'était mon nom et mon prénom. Donc déjà, partant de là, en voulant tout changer, il a fallu changer le nom de ma boîte. Je me suis rendu compte que ce n'est pas le bon statut, donc j'ai aussi changé de statut de boîte. Donc ça veut dire déjà repartir avec une nouvelle entreprise. C'est des frais, c'est du temps, ça me tense. Mais surtout, moi dans mon cas, j'avais une activité, tout mon canal d'acquisition client était basé sur le référencement. Donc les gens tapaient... photographiant sur internet et il me trouvait et ça c'était ma stratégie principale que j'ai mis six ans à mettre en place pour être sur la première page j'avais bossé mon référencement à fond je m'étais formé pour ça j'avais un site web j'avais investi de l'argent et je travaillais vraiment beaucoup mon positionnement vis-à-vis de mon marché pour que voilà être positionné sur des mots clés sauf que tout ça tout ce travail là que j'avais mis six huit ans à mettre en place et avoir et avoir une activité qui roule a été basé sur mon prénom sur mon nom de domaine, sur mon prénom et mon nom, donc tous mes backlinks, mes copyrights, tout ce que j'avais mis en place, et dépendait de mon prénom d'avant. Donc, j'ai changé de prénom, et donc, par exemple, typiquement, les 150 avis que j'avais sur ma fiche Google, que j'ai mis des années à avoir, parce que c'est un travail qui est long, qui me rapportaient beaucoup de référencements et de clients, et bien, j'ai perdu ça en trois mois. parce qu'on ne peut pas changer d'entreprise et garder les avis clients, parce que j'ai dû changer de prénom dans mon nom d'entreprise, et donc on m'a dit que je faisais de la fraude, et donc Google n'a jamais voulu réhabiliter mon nom. J'ai perdu ma fiche Google. Et donc, rien que d'en parler alors que ça fait des années, je suis encore sous le coup de l'émotion, parce que ça a vraiment été difficile, parce que j'avais vraiment mis toute ma life là-dedans, et beaucoup d'énergie. Et donc je me suis rendu compte au bout de six mois de galères administratives que je n'avais pas le choix de recommencer à zéro, jusqu'à vraiment reprendre une nouvelle adresse mail et repartir à zéro. Et donc j'ai perdu un trafic sur mon site, j'ai perdu une énorme partie de ma visibilité, et en parallèle, la transition ça va pour beaucoup de personnes avec des problèmes familiaux, dit des violences intrafamiliales, une exclusion, des doutes, et aussi une charge de travail de « ok, je suis trans, ok, est-ce que je transitionne ? » « ok, ça veut dire quoi, transitionner ? » « il faut que je fasse des recherches, que je me renseigne ? » Les démarches administratives sont très lourdes, et donc en fait, ça impacte beaucoup ton estime de toi, ton moral, ta capacité à travailler, ça te prend du temps. Tu vis aussi, à chaque fois que j'allais à la poste, tu es en enfer pour récupérer des colis. aller à la pharmacie, aller trouver des médecins safe. Et du coup, en fait, il y a un coût émotionnel qui est énorme, qui moi m'a beaucoup impacté dans ma capacité à travailler, parce que j'étais persuadé que j'avais fait des allers-retours à Lyon, à Paris, donc j'habitais à Lyon, et je faisais déjà beaucoup d'allers-retours à Paris, parce que j'avais déjà de la clientèle à Paris. J'étais persuadé que j'allais passer un an à faire encore des allers-retours avant de consolider ma nouvelle boîte à Paris et que la transition professionnelle allait se faire parce que j'avais préparé un peu le terrain. Sauf qu'en fait, j'ai perdu mon référencement. En fait, j'ai eu des problèmes pour me faire payer parce qu'il y a des problèmes administratifs avec la banque. J'ai eu des problèmes avec des plateformes en ligne pour me faire payer. Et tout ça m'a beaucoup impacté. Je n'arrivais plus à dire qui j'étais parce que pendant six mois, il a fallu que je dise à mes clients « En fait, je suis trans, maintenant c'est Alan, c'est il. » Expliquer à chaque fois, me retrouver sur des prestations où je ne me sens pas safe. du coup Du coup, je rentre chez moi, je chiale ma race, je n'ai plus du tout envie d'y retourner. Et en fait, le coût émotionnel a été trop fort pour moi. Tu vois, typiquement, il y a quelque chose que je faisais beaucoup avant, c'est d'aller dans des after-work organisés par plein d'assos, plein de structures différentes, pour rencontrer d'autres entrepreneurs et développer ma clientèle. Et en fait, j'ai dû arrêter de le faire. déjà parce que j'avais moins d'argent pour sortir puisque ma boîte a commencé à se casser la gueule et parce que faire un coming out à chaque fois que tu sors et te prendre en pleine tronche de t'es une meuf, t'es un mec à chaque fois que tu sors ben en fait c'est moi j'étais là pour le travail j'étais pas là pour pour avoir les tripes à terre devant tout le monde et me sentir méga vulnérable en danger aussi parce que du coup on se prend des réflexions et donc j'ai arrêté purement et simplement d'être d'être dans les after work et j'ai aussi vécu de l'exclusion familiale très forte jusqu'à des démarches juridiques, mais sur d'autres sujets. Donc, en fait, tout est arrivé en même temps. Et en parallèle, je n'ai plus de site web qui est fonctionnel. Les gens ne voient plus du coup, en fait, être visible alors que je ne me sens pas encore moi même, entre guillemets, et que j'ai plein de sujets à gérer. C'était un très gros... C'était compliqué, quoi. Donc, j'ai quand même tenu le coup et je suis reparti à zéro. Mais voilà, pas le droit au chômage. J'ai eu des problèmes d'assurance pendant l'arrêt de... Pendant l'opération que j'ai faite, je n'ai pas eu d'indemnité au chômage, d'indemnité de l'assurance que j'aurais dû toucher. J'ai eu plein de soucis comme ça, administratifs, qui font que... Franchement, je ne sais pas comment j'ai tenu. J'ai tenu grâce à mes amis. Mais en fait, il y en a plein qui sont partis aussi. Il y a aussi tout ce que tu vis du tris social. Il y a des choses que tu ne peux plus faire. Tu dois appréhender le fait de se sentir en danger autrement qu'en étant une meuf cis, en tout cas perçue comme une meuf dans la rue. Tu appréhendes aussi le danger, tu appréhendes le fait d'être minorisée, tu appréhendes le fait que dès que tu ablumes la radio, tu entends des blagues transphobes, tu entends des débats surtout à la télé, la montée du fascisme, et du coup, tu es là, OK. je vais arriver à Paris, je vais me faire agresser, tu vois. Et donc, il y a aussi tout ça à appréhender, en plus de vivre la transition, en plus de vivre des gens qui arrêtent de te parler, des personnes de ma famille qui m'ont tourné le dos, les liens qui s'arrêtent. Donc, en fait, c'est en ça que la nécessité de trouver une famille choisie, la communauté LGBT, là, c'est une réponse incroyable, parce qu'en fait, il y a beaucoup de gens qui n'ont juste plus de famille. Et le fait de vivre ça, forcément, ça a un impact sur ton travail.

  • Speaker #2

    C'est drôle ton histoire parce qu'elle va un petit peu à l'encontre de ce qu'on imagine dans l'imaginaire collectif qui est qu'un mec trans, on savait quand il avait 10 ans que lui c'était un petit garçon. Il nous fait son coming out sans le vouloir quand il a 12 ans en disant « moi je suis un petit garçon » . Il a toujours été très garçon manqué, puis il a attiré par les filles. C'est pour ça que moi je te dis que c'est la réalité que je connais. Moi, je ne connais aucun mec trans qui était une meuf hétéro, etc. Donc en plus, outre le fait de changer parce que les gens sont en mode... Il y a aussi, sur le marché de la désirabilité, tout change en fait. C'est-à-dire, même si par exemple, tu fréquentais des mecs, tu étais hétéro, là tu deviens gay. Comment ça se passe quand on n'avait pas déjà un pied dedans ? Et donc en fait, c'est un petit peu ce truc de quand tu dis... Oui, c'est vrai, ça arrive tard, ça arrive à 29 ans. Mais je trouve que c'est intéressant d'interroger des gens à qui ça arrive tard parce qu'on a trop cet imaginaire que ça doit arriver...

  • Speaker #0

    Dans mon cas, c'est arrivé tard. En fait, je l'ai dit tard et j'ai commencé ma transition tard, mais c'était là depuis très longtemps. Je n'étais juste pas en capacité, pas en sécurité émotionnelle. Je n'avais pas un cadre assez sécurisant pour faire mon coming out et surtout, j'avais d'autres sujets à gérer. J'ai vécu avec beaucoup de problèmes de santé pendant six ans. et j'avais mon entreprise à fond. En fait, il y a une personne trans un jour qui m'a dit, une médecin, elle m'a dit tu sais il y a quand même beaucoup de personnes trans quand elles font leur coming out tard, ça vient après des gros bouleversements, ça peut venir avec des sujets comme le burn out et le fait de s'être mis à fond dans le travail un peu pour se cacher ou pour ne pas voir ce que tu vis personnellement. Moi c'est typiquement ce que j'ai vécu, je me suis mis à fond dans le travail pour pas me regarder personnellement. Et c'est le fait de faire de l'épuisement, le burn-out et tout ça qui m'a un peu arrêté. C'est mon corps qui m'a arrêté en me disant, il y a un truc qui cloche, il y a un truc qui ne va pas dans ta vie, il faut que tu le regardes. Mais par contre, j'ai toujours été, tu vois, quand tu parles de garçon manqué, et en fait, moi, j'ai toujours été ce que je suis. D'ailleurs, j'ai l'impression qu'avec la transition, j'ai juste accepté ce que je suis et j'ai l'impression de revenir un peu en arrière à mes origines, entre guillemets, parce que j'ai arrêté de vouloir performer le genre. ou vouloir correspondre à un rôle qu'on m'avait assigné à la naissance. En fait, j'ai tout fait pour... En gros, je suis vraiment le bon trans entre guillemets. J'ai vraiment tout fait pour correspondre à cette image de meuf et à me conformer. Et c'est venu avec la peur de ne pas être acceptée dans le travail. Quand j'ai commencé à travailler, j'ai commencé à être dans un genre féminin, plus féminin. Alors qu'avant, j'étais... et j'avais une expression de genre très masculine, très androgyne. Et de fait, de travailler avec des grosses boîtes, de travailler avec des gens très variés que je ne connaissais pas, j'ai un peu reproduit ce qu'on attendait de moi. Et pour pas trop dénoter déjà que, en tant qu'artiste et photographe, je dénotais déjà pas mal, j'avais surtout envie de me faire accepter d'avoir du boulot. Donc, il y avait surtout la première problématique, c'était d'avoir du taf. Et ça est venu, j'ai commencé à me poser dessus, sur ces questions-là, et à me laisser ressentir quand j'ai eu l'espace, quand je me suis créé l'espace pour moi. Et en fait, mon coming out, j'ai pu le faire grâce au fait de trouver une communauté sécurisante, pas forcément LGBT d'ailleurs, mais de trouver des gens avec qui je me sens bien, des gens avec qui je peux être moi-même, et du coup, petit à petit, me sentir Sentir que je n'allais pas tout perdre en fait, que je n'allais pas perdre toute ma vie. Effectivement ça a quand même été un gros bouleversement, mais j'avais assez de sécurité intérieure pour me dire ok je le fais parce que parce qu'en fait déjà je n'avais plus le choix clairement, c'était soit ça, soit je ne pense pas que je serai encore là pour en parler. Et parce qu'à un moment donné, voilà j'ai presque 30 ans, est-ce que je continue à jouer ce rôle toute ma vie ou pas tu vois ? Et aussi parce que je ne savais pas, tout bêtement. Moi, je savais qu'il y avait un truc avec le genre depuis longtemps. Dans mes relations, j'ai toujours dit que c'était moi le bonhomme. J'ai toujours été très garçon manqué. Mais je ne savais pas que ça existait d'être trans. Donc, en fait, je ne savais pas forcément les mots pour comprendre ce que je vivais. Et il m'a fallu que je fasse des recherches, tu vois, pour tomber sur... Ah oui, en fait, c'est ça. En fait, j'ai le droit de transitionner. En fait, je peux vivre ça. Et c'est ça que je suis. Et c'est juste que j'avais un... c'était pour moi invisible, c'était un impensé, c'était pas des questions auxquelles... enfin des réponses auxquelles j'avais accès. Et après par rapport aux relations, alors moi j'avais une relation avec une femme il y a quelques temps, il y a quelques temps avant mon coming out, et du coup oui ça a posé des questions, mais tu vois mon coming out trans j'ai pu le faire grâce à un mec cis qui m'a beaucoup aimé, avec qui je me sentais bien qui m'a dit « écoute, si t'es trans, super, je t'aimerais que quoi qu'il arrive » . Et par contre, notre relation n'a pas continué. Mais il y a aussi des questionnements qui peuvent venir, mais ce n'est pas nécessaire. En tout cas, moi, je ne suis pas passé par la classe lesbienne parce que je ne suis pas en sexuel, donc je pense que je n'ai pas eu trop ce questionnement-là. Même si aujourd'hui, je m'autorise plus à relationner avec des femmes. Et c'est vrai que de changer de statut social, forcément ça change les rapports avec les gens et ça peut perturber de paraître gay dans la société, ça peut perturber une relation que j'avais en cours avec un mec qui n'avait jamais questionné sa sexualité. Pour lui, ce n'était pas possible d'être vu comme une personne gay ou même de questionner sa sexualité. Il était forcé de le faire parce que j'ai fait mon coming out, mais du coup je perds aussi des relations en cours de route et c'est vrai qu'il y a plein de... Il y a plein de sous-problèmes ou de sous-prolématiques qui peuvent arriver, mais ce n'est pas le cas de toutes les personnes trans. Vraiment, ce que je dis aujourd'hui, c'est ce que moi je l'ai vécu, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Et voilà.

  • Speaker #1

    T'as dit un truc que j'ai aussi tilté, je tilte beaucoup. T'as dit que t'avais pas envie d'aller dans des after work pour pas être confrontée à des questions que tu faisais avant, mais que t'avais arrêté de le faire. Alors moi, maintenant, je sais que t'es trans parce que tu l'as dit et parce que je suis ton contenu, mais t'as un bon passing. Pourquoi ? Alors je te pousse dans tes retranchements pour les autres qui nous écoutent. Pourquoi tu fais pas juste le mec 6 ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est très nouveau que j'ai un bon passing.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Parce que c'est pas magique de prendre des hormones, c'est pas en quelques semaines ou en quelques mois que ça change. Ça fait, je crois, depuis janvier, février, donc c'est très très récent, que les gens ne savent pas que je suis trans. Mais il y a encore six mois, c'est tout nouveau. Du coup, des fois, je me retrouve dans des situations, moi je suis sûr que ça se voit, ou que j'ai encore habitué au fait que ça se voit, et je me retrouve dans des situations où les gens n'ont pas compris. Donc des fois ça crée des incompréhensions, mais c'est très nouveau. Donc il a fallu, tu vois j'ai commencé Zermond il y a presque trois ans et demi, il y a trois ans qui se passent où on ne sait pas dans quel cas on met. Et les changements sont très progressifs, et là tu vois j'ai un peu de moustache mais c'est très récent. Et donc il y a eu toute une phase où j'étais hors case, en tout cas pour les gens. Donc, nécessairement, j'avais plein de questions et c'était pas très confortable. Et aujourd'hui, je dois capter que ça se voit plus ou beaucoup moins. Et donc, c'est d'autres problématiques.

  • Speaker #1

    C'est ça que j'allais dire. C'est d'autres problématiques dans le sens où... Alors, c'est une question qu'on ne pose jamais, mais c'est une question... Moi, par exemple, j'ai une copine, elle est trans. Elle, elle ne veut pas être vue comme une femme trans. Après, c'est différent. Les femmes trans, c'est autre chose. Avec la société dans laquelle on est, la misogynie, la ND, enfin... C'est très très violent pour les femmes trans. C'est encore...

  • Speaker #0

    Moi, j'ai clairement le privilège de passer pour un mec.

  • Speaker #1

    Oui, voilà, c'est ça que j'allais dire.

  • Speaker #0

    J'ai vu des privilèges que les femmes trans ne vivent pas.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est sûr. Mais ma question, c'est, toi, dans l'idéal, t'es OK avec le fait d'être vue comme un homme cis ou t'aimerais être vue comme un homme trans ?

  • Speaker #0

    Je suis en train de capter que c'est une question que je dois me poser en tout cas. Est-ce que je le dis ? comment je le dis, quand est-ce que je le dis, à qui je le dis. Moi déjà, il y a un enjeu d'être visible par rapport à ça, parce que j'ai à cœur de pouvoir accompagner d'autres personnes LGBT et qu'ils se disent que je suis des leurs, mais je ne suis pas obligé de le crier sur tous les doigts non plus. Mais il y a... En fait... C'est à la fois confortable parce que ça me met dans une sécurité que je découvre, de ne pas être en danger dans la rue, maintenant que j'ai un bon passing. Mais tu vois là, tu dis que j'ai un bon passing, mais on m'appelle madame trois fois par jour. Donc en fait, c'est très très subjectif et ça dépend vraiment des gens. Effectivement, depuis que je n'ai plus mes seins, ça a changé. On m'appelle beaucoup plus monsieur. Mais en fait, ce n'est pas forcément... une vérité absolue, on m'appelle Madame une fois sur deux. Donc, ce n'est pas complètement acquis. Et est-ce que j'ai envie de passer pour un mec cis ? Je ne crois pas parce que… Non, je ne crois pas. Mais en fait, il y a aussi une fierté d'être trans, d'être visible. Je suis fière d'être trans. J'ai envie de le dire parce que c'est politique de le dire, c'est politique d'être visible. Et j'ai envie de porter ça aussi. Après, ça dépend des contextes. Des fois, ça m'arrange de ne pas être visible, mais c'est très vite vu. Je ne sais pas, des contextes médicaux, des contextes où quand je raconte un peu mon parcours, dès qu'on rentre un peu dans des relations où je raconte ma vie, c'est parfois difficile de le cacher. Si je voulais le cacher, ce serait quand même aussi un effort. Pour moi, la problématique, c'est de ne pas dépenser de l'énergie à cacher les choses. La question de l'énergie est importante, en fait. De conserver mes points de vie, entre guillemets. Et je trouve, en tout cas, aujourd'hui, que si je devais le cacher, ça me demanderait beaucoup d'efforts. Et aussi, je ne peux pas vraiment le cacher, parce que, tu vois, je parlais de mon travail documentaire. Je réalise un film documentaire où je suis un des personnages du film. Et donc, dans mon travail, je me retrouve à... à pitcher mon projet devant des professionnels, là je suis en formation, j'écris dans une école de cinéma le projet, et donc je ne peux pas faire comme si ça n'existait pas, parce que c'est au centre de mon travail, c'est au centre de mes engagements, et c'est ce que je raconte aussi en partie, ce n'est pas le centre du film, mais c'est une chose qui va être visible dans le film, donc c'est difficile de passer outre. C'est vrai que pour l'instant, je ne vais pas trop dans des cadres où... où j'ai besoin de passer pour Amexis. À part dans la rue, pour être en sécurité, c'est vrai que j'ai surtout envie de fréquenter des gens qui sont OK avec mon identité et d'être sûr de ça pour pouvoir les fréquenter et pas prendre des risques de « si jamais ça se sait » ou « qu'est-ce qui va m'arriver ? » Parce qu'il y a aussi le danger qui va avec. Et donc, je préfère ne pas le cacher. Mais parfois, pour ma sécurité, Ça ne se voit pas, mais ce n'est pas un but pour moi de passer pour un ex-cis.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'aujourd'hui, être trans dans le business, c'est problématique ou pas, sachant que tu as créé ton propre business ? Ce que je veux dire, c'est qu'un peu comme ta famille choisie. Est-ce qu'il y a encore des limites ? Je présume qu'avec tes clients, non, vu qu'ils t'ont choisi. Mais est-ce que dans d'autres cadres, avec des prestats, ou est-ce que tu as déjà été confrontée à de la transphobie ? En fait, ce que je veux dire, c'est qu'on dit que quand on est indépendant, on a choisi une vie sur mesure. Donc, dans l'idée, on a une liberté d'être nous et de se confronter à rien d'autre, comme si on ne vivait pas dans une société. Est-ce que toi, tu ressens quand même les limites de la pensée des gens, de leur part d'ombre ?

  • Speaker #0

    En fait, oui, effectivement, je choisis des gens qui sont sécurisants et je choisis des collègues, des clients avec qui c'est cool. Mais ça n'empêche pas les questions parce que toutes les personnes ne sont pas forcément au fait de tout, éduquées. Ça n'empêche pas que les gens ragent, ça n'empêche pas des petits moments de gênance qui sont ok, tant que tu t'excuses et que ce n'est pas de la malveillance, c'est chouette. Mais par contre, il y a d'autres contextes. Là, j'ai un truc qui me vient, j'ai fait une conférence sur les freelances atypiques sur un salon d'entrepreneurs. J'ai eu rendez-vous avec une des personnes qui gère le salon. La première question qu'il m'a posée en rendez-vous, c'est « c'est quoi ton prénom d'avant ? » . Donc, en fait, ce n'est pas parce que je suis positionnée là-dessus que ça m'évite d'avoir ce genre de remarques ou de moments gênants. Et dans le cadre de l'écriture de mon documentaire, ça m'arrive. En fait, je suis en train de me rendre compte que j'ai aussi le statut de réaltrance. et on me met dans une case qui ne m'appartient pas, parce que être trans, c'est pas juste... C'est une des composantes de mon identité, mais c'est pas toute mon identité, et surtout, toutes les personnes trans ne font pas les mêmes films. Et en fait, quand, tu vois, je pense, certains professionnels, diffuseurs, producteurs ou autres, entendent le fait que je suis trans dans la manière dont je parle de mon projet, il y a un court-circuit qui se fait dans leur cerveau, tu vois. Comme on en parle beaucoup, comme... on se dit que le sujet des trans on l'a déjà traité, en fait on me met dans une case qui je pense peut me desservir, et si ce n'est pas de la discrimination, en tout cas c'est une petite case qui peut m'empêcher d'avancer dans ce projet, parce que du coup j'ai des problématiques avec ça, parce que ça fait peur aux gens, ou alors il y a justement un gros fantasme. derrière ça ou alors en tout cas on bug là dessus tu vois et alors que mon travail c'est dans mon film et dans mon projet documentaire c'est un travail sur la sexualité et le consentement donc en fait ça n'a pas forcément lieu d'être mais je vois aussi qu'il y a la manière dont on me met dans une case et aussi la légitimité que moi je peux me sentir ou pas c'est normal en fait comme j'ai été éduqué comme une meuf à à me sentir moins légitime certaines choses à me sentir encore en chemin d'oser des choses, d'oser porter des projets, d'oser prospecter, d'oser demander des partenariats ou des projets. Et forcément, c'est un sujet.

  • Speaker #1

    Comment on répond à quelqu'un qui dit c'est quoi ton dead name dans le monde du travail ? Parce que dans la vraie vie, tu peux ne pas répondre, passer. Dans l'intimité, tu peux dire mais ça ne va pas te demander ça. Dans le travail, comment on met ses limites tout en étant corporate ?

  • Speaker #0

    Poser ses limites, c'est un gros sujet dans le boulot. Je pense qu'avec l'expérience, j'ai de plus en plus de pédagogie et j'arrive à sentir quand j'en ai marre de répondre à des questions, j'arrive à dire écoute, je n'ai pas envie de répondre, mais en fait, des fois tu es pris de cours, des fois tu ne sais pas. Là, il se trouve qu'il y avait quand même un gros biais avec cette personne de pouvoir parce que je voulais vraiment avoir accès, pouvoir faire cette formation, cette conférence. Et en fait, je lui ai dit tout en lui disant, après en fait, je suis revenu, après le rendez-vous, j'ai envoyé un mail en disant écoute, je n'étais pas du tout à l'aise que tu me posais cette question. Attention à ne pas la poser aux personnes concernées, ce n'est pas une question qui se pose, et je lui ai expliqué. Mais du coup, j'ai dû revenir par la suite, et la personne s'est excusée, et on a pu échanger. Mais en fait, on fait comme on peut. En fait, c'est ça le truc, c'est que ça dépend de... Est-ce que tu es préparé ou pas ? Est-ce que tu as assez d'énergie ? Est-ce que tu l'as vu venir ? Est-ce que tu sais quoi dire ? C'est difficile. Moi, j'ai aussi beaucoup vécu ça dans le parcours médical. avec des ostéos, avec des kinés, avec des trucs qui sont pas forcément en lien avec ma transition. Et donc je suis parfois obligée, pour que je sois bien pris en charge, de dire que je suis sous hormones. Donc je peux pas cacher que je suis trans, parce qu'on me dit pourquoi, on me demande, machin. Et donc quand on sait que je suis trans, parfois c'est des questions... soit malaisantes, soit voir des discours anti-LGBT, des discours de « ah bah non, on m'a déjà dit que la survie de l'espèce c'était un papa et une maman, on m'a déjà expliqué que c'était un choix, j'ai eu des infirmières qui m'ont dit des dingueries. » Et en fait, je ne me suis préparé comme je pouvais, mais tant que tu ne vis pas ce genre de choses, tant que tu ne vis pas la discrimination et les micro-violences et les propos transphobes, Tu ne sais pas comment ça va te faire dans le corps, tu ne sais pas si tu vas la répartir, si tu vas savoir faire. Et c'est pour ça qu'être trans, ça isole, ça marginalise, parce que ça demande un effort mental. Il y a des choses, typiquement, avoir accès à des clubs en sport, aller à la piscine, en fait, ce ne sont plus des moments détente, parce que ce sont des moments où on te regarde des cicatrices. On te dit que t'es pas dans le bon endroit pour les vestiaires, tu dois te retrouver. Moi je me suis retrouvé à dire devant un groupe de 30 personnes dans un club de sport que j'étais trans pour savoir quel vestiaire j'allais choisir. Et c'est pas moi qui amène le sujet, tu vois, c'est les gens qui tiennent le cadre. Je me retrouve aussi dans le def perso, dans des retraites où il y a des gens qui me disent « Non mais pourquoi on fait tout un tatouin sur les personnes trans, les pronoms, machin, je suis en colère, les étiquettes qu'on nous met et tout » Et en fait, ça retombe toujours sur les personnes concernées, de faire de la pédagogie, d'expliquer, si les personnes qui tiennent le cadre ne le font pas. Donc en fait, on fait comme on peut, et ça impacte énormément ton mental, et aussi ta légitimité à être là, tout simplement. Donc c'est vraiment compliqué au quotidien. Et moi, c'est vrai que je me suis formée à la communication non-violente dans mon parcours, et je trouve que ça m'aide beaucoup. Parce que je peux dire, écoute, je comprends que tu aies des questions, je comprends que ça te questionne. Parfois même, ça vient d'une bonne intention, tu vois, de savoir, de créer du lien. Mais en fait, je dois leur dire, je comprends que tu as envie de créer du lien, sauf que moi, c'est des questions qu'on me pose trop souvent, je suis fatigué, je n'ai pas envie d'y répondre, je n'ai pas l'espace. Demande-moi mon consentement si j'ai envie d'en parler avant de m'imposer ce genre de questions. Ne dis pas ça devant les autres, ça me met en danger. J'ai une copine qui m'a outé, tu vois, typiquement, en pleine transition. J'avais un billet à mon dead name parce que je ne pouvais pas payer avec ma... Je n'avais pas encore mon nom sur mes cartes bancaires, parce que ça prend du temps et tout. Donc, je me retrouve aussi avec des fois des gens dans l'administratif, tu vois, qui parlent fort, dans les laboratoires, quand tu vas faire un examen de sang. Moi, j'ai ma carte vitale où il y a encore le 2 de femme dessus. Donc, je me retrouve à devoir me outer dans le train. C'est un enfer. Dans le train, c'est compliqué. D'ailleurs, j'avais fait un sous-de-gueule sur LinkedIn qui avait un peu explosé sur LinkedIn en taguant la SNCF parce que quand tu as une carte de réduction à ton nom d'avant, tu ne peux pas, en cours de route, la faire actualiser. Et ça, ce n'est pas légal de ne pas pouvoir actualiser les données personnelles. D'ailleurs, ils se sont fait épingler par la Commission européenne récemment. Et je me retrouve à devoir me justifier que c'est bien moi parce qu'ils voient un peu un prénom qui n'est pas le bon, ou alors ils voient le genre qui n'est pas le bon dans leur billet, du coup ils me disent non c'est pas vous, vous fraudez, donc je me retrouve à devoir dire que je suis trans devant 40 personnes dans des files d'attente, à devoir me battre à la poste, tu vois des trucs comme ça et c'est je sais plus quelle était ta question, excuse moi je me suis un peu perdue, mais c'est plein de situations comme ça que tu peux pas les anticiper. Tu peux te préparer en écoutant les parcours des uns et des autres, mais clairement, tu vois, moi le train, je ne l'avais pas vu venir. Je n'avais pas vu venir que j'allais avoir la boule au ventre en voyageant à chaque fois.

  • Speaker #1

    J'ai une dernière question, enfin c'est la non-dernière question. C'est une question sur le fait qu'il y a beaucoup de meufs comme moi qui ont une communication vachement tournée vers les meufs. Et je me suis déjà fait ramasser d'ailleurs par un mec trans qui m'avait écrit en me disant « J'adore ce que tu fais, mais en fait à chaque fois tu es genre tout au féminin. Et moi je ne sais pas trop où est ma place. » Donc maintenant j'essaie de préciser, femmes et personnes LGBT, qu'est-ce que tu ressens par rapport à ça ? Est-ce que tu as l'impression parfois d'avoir le cul entre deux chaises ? Même si après franchement, d'un côté les meufs font ça pour se protéger, mais je sais même que quand je vais dans des événements et que je dis « Ouais mais non les mecs, ... Il y a toujours des meufs qui vont me reprendre, qui vont me dire non les mecs cis, pour pas qu'on parle des mecs trans et tout, mais sur internet on le fait moins, c'est à qui ira le plus vite, à qui fera le plus de visibilité, donc on va essayer d'être le moins dans la nuance, etc. Est-ce que tu as quelque chose à nous dire sur ça aujourd'hui ? Peut-être une piste de réflexion aussi pour toutes les meufs ?

  • Speaker #0

    C'est bien que tu en parles parce que c'est pas évident je pense pour les mecs trans et les meufs trans. de dire qu'on ne se sent pas concerné parce qu'effectivement, il y a vraiment besoin d'espace en non-mixité pour les femmes en général. Et c'est hyper important d'avoir des business qui parlent concernés et des business féministes. Déjà, j'ai envie de dire aux gens qui veulent travailler pour les femmes, les femmes cis ou les femmes trans, les femmes en général, on a le droit d'avoir une communication au féminin. Tu as le droit de travailler pour la cible que tu veux et c'est OK. Tu as le droit aussi de travailler au masculin ou... ou en neutre, déjà il n'y a pas forcément d'injonction à forcément faire de l'inclusif pour tout le monde tout le temps. Mais par contre c'est vrai que si tu veux être accessible et parler aux minorités de genre, aux personnes non binaires et aux mecs trans en ayant une communication en féminin, ça pose des questions. Et moi c'est vrai que je l'ai vécu, il y a plein de personnes que j'adorais, à qui j'aurais pu travailler ou que je voulais. Et en fait ça me déchauffe parce que je ne me sens pas concernée par leur com. Et c'est vrai que ça pose la question de notre place à nous. Je pense qu'il y a des petites techniques de dire « femmes et minorités de genre » , ça englobe beaucoup de gens et ça permet d'être inclusif. Il y a aussi un point qui est important, c'est le féminin neutre. Moi, j'ai notamment été coachée par deux personnes qui sont antisexistes, féministes et qui ont une communication pas forcément féminine dans leur... communication visible sur les réseaux, mais dans les événements, c'est posé dans le cadre qu'on va parler au féminin neutre pour tout le monde. Et les mecs qui sont présents, trans ou pas, en fait, on va parler au féminin neutre. Et je trouve que c'est intéressant de mettre le féminin et de mettre le féminin neutre, parce que ça pose aussi pour les mecs cis l'expérience de ce que c'est d'être exclu de la langue et d'inclure autrement les... les femmes et les minorités de genre, mais c'est vrai que ça peut nous, à titre perso, nous faire sentir pas concernés. Donc c'est vrai que si vous voulez inclure et être en tout cas safe, c'est une des choses à faire pour les personnes, les minorités de genre, les personnes non-binaires et trans, c'est bien de le préciser. Et pareil pour les femmes trans en fait, c'est pas parce que tu as une communication au féminin que tu es safe pour les femmes trans. Moi je pense que l'inclusion, elle vient, c'est un travail à faire et en vrai il n'y a pas de bonne façon de faire. On fait tous comme on peut avec les armes qu'on a et au fur et à mesure on apprend et on fait de notre mieux. Mais je pense que de préciser que c'est safe pour les personnes trans et que les femmes trans sont bienvenues quand c'est une communication en féminin, c'est nécessaire pour que ces personnes viennent. se sentir légitime de venir, tu vois. Mais on n'est pas obligé de tout genrer au neutre, on n'est pas obligé... Je pense que le minimum, c'est de mettre LGBT friendly quelque part, bienvenue aux femmes trans aussi, tu vois, de répéter ça de temps en temps, de dire que je parle au féminin neutre, mais ça inclut toutes les femmes. Et effectivement, après, la question de la non-binarité aussi, c'est un questionnement, parce qu'on les oublie beaucoup, les personnes non-binaires, Aïe ! Et peut-être de dire LGBT friendly ou minorité de genre, ok, ça englobe tout le monde. Mais ça pose la question de comment tu fais, si tu fais des cercles de femmes, est-ce que tu acceptes les personnes non-binaires ou pas ? Et je pense que si c'est le cas, il faut le dire et le clarifier, le préciser pour que ces personnes se sentent légitimes de venir et à l'aise de venir.

  • Speaker #1

    Deux dernières questions, mais des questions plutôt... légères. Donc la première, quel créateur de contenu tu peux nous conseiller ? Quelqu'un qui travaille un petit peu sur les questions de discrimination. Tout ce dont on vient parler pendant une heure. Et la deuxième, est-ce que tu peux nous conseiller aussi des productions artistiques, littérature, films, etc. sur les discriminations, les luttes LGBT. Moi, je te donnerais le mien, qui est mon livre préféré. Pourtant, il ne parle pas de meuf lesbienne. Enfin, si, c'est une meuf lesbienne, mais qui transitionne. Le livre est assez compliqué, mais c'est mon livre préféré depuis la nuit des temps. Je n'ai pas attendu que tu viennes aujourd'hui pour le dire. À ton tour.

  • Speaker #0

    Deux recos indispensables de personnages LGBT. La première, c'est Lorraine Marx, qui est comédienne, metteuse en scène, critique, qui fait des critiques de cinéma. sur son Instagram en ce moment, qui est délicieusement pertinente, drôle. Elle a aussi un seul en scène que je n'ai pas encore vu, qui aborde les sujets de santé mentale et de transition, et qui a beaucoup d'excellents avis. Donc, je pense que c'est quelqu'un sur scène à aller voir. Et si vous voulez vous éduquer sur des questions aussi... de classe et d'invisibilisation des personnes trans, mais aussi si vous aimez le cinéma et la littérature, elle fait des critiques en roue libre sur les bourgeois qui font la culture et c'est délicieux et ça éveille beaucoup de choses. Et puis une deuxième chose, c'est le dernier livre d'Eli Hervé qui est journaliste avec qui j'ai travaillé. C'est un livre dans lequel j'ai partagé mon histoire qui s'appelle Transphobia. Merci. C'est en fait une enquête qui vient de sortir il y a quelques mois sur la désinformation et la discrimination transphobe des médias en France. C'est vraiment une enquête sur comment on traite le sujet de la transidentité dans les médias et comment on laisse faire la montée de l'extrême droite et de la transphobie dans beaucoup de complaisance. C'est très très très sourcé, c'est facile à lire. Et il y a beaucoup de personnes concernées, dont moi, mais aussi l'autre Autignon et d'autres personnes transvisibles, qui ont partagé leur expérience. Et c'est super intéressant et surtout très nécessaire.

  • Speaker #1

    Super, merci beaucoup. Ça sera mis dans la bio, dans le résumé. Est-ce que Transphobia, c'est une réponse à Transmania ?

  • Speaker #0

    Un petit peu, oui. Je ne vais pas parler pour la personne, pour Elie. mais oui en fait ça débunk toutes les idées de phénomènes de mode et de contagion sociale qu'on entend sur la transidentité. Et surtout, ça explique comment les médias sont complices de la montée de la transphobie.

  • Speaker #1

    Super, merci Alan. Pour ma part, créateuriste de contenu, je ne sais pas. Il y en a trop, je n'ai pas envie de faire une boulette, je n'ai pas envie de dire quelqu'un et pas quelqu'un d'autre. Donc, vivez les personnes que je suis sur Instagram, normalement, elles ne sont pas trop mauvaises. Mais mon livre préféré ever, c'est Stun Butch Blues de Leslie Fenberg. C'est l'histoire d'une meuf juive prolétaire. Et c'est l'histoire de sa transition, de sa vie, des luttes antiracistes, des luttes de classe dans les usines. Bref, je ne lui rends pas du tout honneur quand je le présente, mais c'est vraiment un livre fabuleux, fabuleux, fabuleux, qui d'ailleurs, si je ne me trompe pas, est écrit au féminin de tout. Donc voilà, ça c'est Marocco. Alan, on peut te retrouver sur LinkedIn, Alan Raymond. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait, sur LinkedIn, Instagram principalement. Et sur mon site internet aussi, agence-alan.fr.

  • Speaker #1

    Super, est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

  • Speaker #0

    Non, mais merci, je veux juste te remercier de ce moment d'échange, je pense que c'est important et je suis ravi de pouvoir participer. à parler de ces sujets-là. Si jamais vous avez des questions, si vous avez envie d'en discuter, je suis aussi très dispo en DM sur Instagram. Donc, n'hésitez pas.

  • Speaker #1

    Merci à toi. Merci, Alan. Au revoir. Bisous. Ciao, ciao. Et voilà, c'est déjà fini, ma star. Alors, sache que c'était un pur plaisir de partager ce moment avec toi. Si cet épisode t'a parlé, montre-moi tout ton amour. Abonne-toi et mets-moi 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. En attendant, tu peux me retrouver sur Instagram. arrobase jasmine.tweetoo sur ma newsletter Walk Me Up ou encore sur LinkedIn jasmine.tweetoo Tu trouveras tous les liens et toutes tes informations en description. Et puis, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. Allez, stay tuned, my bad bitch.

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