- Speaker #0
Bienvenue dans H comme handicapé.e.s, le podcast qui donne la parole aux personnes handicapées parce qu'on ne les entend pas assez. Dans ce nouvel épisode sur les personnes trans et handicapées, vous allez entendre trois témoignages. Le témoignage d'une personne transféminine qui parle de la prise de conscience tardive de sa transidentité et du rôle de son handicap dans cette prise de conscience tardive. Vous allez aussi entendre le témoignage d'un homme trans qui parle de transphobie et notamment de la transphobie qu'il a vécue en milieu familial. Et pour finir, vous allez entendre mon témoignage sur ma non-binarité et sur les choses positives que m'ont apporté la découverte de ma non-binarité. Je vous laisse avec les témoignages.
- Speaker #1
Bonjour, je suis Rafaelle. Je suis une personne transgenre et également porteuse d'un handicap comme vous pouvez l'entendre. J'ai découvert ma transidentité vraiment tardivement. J'ai 34 ans, j'en avais 27 bien passé quand j'ai découvert ça en fait. Et c'est quelque chose qui m'a vraiment pesé dans le sens où, je pense vraiment que c'est aussi dû à mon handicap, mais quand je me suis rendu compte de ma transidentité, donc j'avais 27 ans 3 quarts presque, ben je me suis dit que j'avais 27 ans 3 quarts, que j'avais entre guillemets à rattraper en fait. Et, bah rattraper 27 ans 3 quarts quand on a un handicap, c'est pas extrêmement facile. Donc bon ben à ce moment là, je me suis mis à acheter des habits féminins, enfin stéréotypés féminins et tout, et là je m'en rends compte maintenant, plusieurs années après, ben ouais. Sur le moment, j'avais l'impression de vivre ma meilleure vie, mais maintenant quand j'y repense, il y a énormément de choses que j'ai faites trop vite en fait, que vraiment, si je devais le refaire maintenant, je ne m'y prendrais pas du tout pareil en fait. Et notamment sur... Ben comment intéragir avec les autres. Si je devais le refaire maintenant, je laisserais passer beaucoup moins de choses qu'avant en fait. Maintenant, je laisse passer très peu de choses justement, en repensant à mon mois d'avant, en me disant, ben ça vraiment, il y a... 5 ans, 6 ans, je l'aurais laissé passer. Alors que maintenant, je ne laisse plus passer grand chose. J'anticipe, je préfère même anticiper que la personne pense mal ou que moi, je ça ne me convient pas. Plutôt que de laisser passer quelque chose, que je ne laisserais pas passé sinon. Pour préciser les violences que je ne laisse plus passées, j'ai des soucis de mémoire donc je vais parler de quelque chose qui s'est passé il y a peu de temps. J'étais en rendez-vous médical, c'était la semaine qui est passée, bon et j'ai parlé de ma petite amie et la médecin, qui me demande mais votre petite amie, elle a un pénis ? Et donc moi je n'ai pas réagis, ça aurait été à propos de moi, j'aurais dit clairement mais ça ne se pose pas ce genre de question. Donc là j'ai répondu, mais juste après en répondant je me suis dit que c'est pas normal, et donc après je lui ai répondu et je lui ai dit mais ça ne se pose pas ce genre de question. Bon, elle a eu l'air vraiment gênée. Vraiment désolé, donc ça s'est bien finis.
- Speaker #2
Bonjour à tous, je préfererais rester anonyme pour ce vocal. Mais je vais quand même dire quelques infos sur moi. Donc je suis un homme trans, j'ai 20 ans et voilà. (rire). Je vais parler de transphobie, à quel point j'en peux plus, à quel point ça me fait me sentir seul. À quel point j'aimerais que les gens se renseignent et juste nous laissent vivre tranquille. Actuellement, je suis très fatigué par tout ce que j'ai vécu rapidement. Toute la transphobie que j'ai vécue vraiment de manière très compacte, d'un seul coup. Donc ça fait six mois que je suis sous T actuellement. Et avant, j'habitais encore dans mon cercle familial et c'était déjà assez tendu. J'ai eu beaucoup de phrases comme " oh tu as un démon en toi" des choses comme ça, mais j'arrivais encore à le gérer et tout, vu que c'était qu'une seule personne. Et après, elle faisait comme si ça allait. Donc c'était un peu du chaud-froid, mais ça allait encore. Après, il y a eu un moment où j'étais outé, pas par moi-même, mais par une autre personne, qui a fait que... une des personnes les plus transphobes possible de mon entourage à ce moment là a su donc que j'étais trans et pire sous hormones et a décidé donc de me pourrir la vie de m'insulter de dire à quel point je suis une mauvaise personne de mentir sur des choses que j'aurais pu faire et de retourner énormément de personnes contre moi. Et ce qu'elle faisait c'était surtout... Elle pouvait m'insulter par exemple de déchet en face de moi, ce qui est très violent. Mais surtout ce qu'elle faisait c'est retourner les personnes contre moi sans me parler directement. Juste leur parler et que du coup les personnes commencent à m'ignorer. Des personnes proches, enfin j'ai jamais été tant proche de mon entourage familial. Mais on ne me détestait pas. pour qui j'étais. Et maintenant il y a des personnes où ça me fait de la peine de me dire que ma grand-mère et mon grand-père, j'ai jamais été proche d'eux. Vraiment. Mais je pourrais sans doute pas les revoir jusqu'à leur mort parce qu'ils me détestent, parce que je suis trans. Et aussi parce que je serais un voleur des choses comme ça donc, il y a eu vraiment une volonté de décrire toute ma réputation et clairement, c e qu'elle voulait, c'était juste... Enfin, ce qu'elle veut toujours, d'ailleurs, je pense qu'elle doit toujours penser à moi avec une rage profonde, parce que j'ai fait un choix personnel, je veux dire, qui ça regarde d'autre que moi-même, si je vais prendre un traitement hormonal, de dire vraiment... J'ai oublié ce que je voulais dire. Désolé. C'est un peu de peur de... Oui, elle veut que je finisse à la rue. C'est son souhait, elle aimerait que je finisse à la rue, sans argent, sans personne. Et je ne comprends pas comment on peut... détester autant quelqu'un juste parce que j'ai décidé d'être heureux. Parce que personne n'est venu me poser la question, "oh comment tu vas?". Non. J'ai subi toute cette avalanche d'insultes de ternissage de réputation et du coup j'ai fui en me trouvant un travail en me trouvant un appartement donc je suis aussi en plein diAg TSA et tout. Et j'espère, j'ai fait une demande d'AAH, et j'espère l'avoir. *soupir* C'est... la transphobie... J'aimerais mettre tellement ça derrière moi. Au travail, je suis pas out à mes collègues et tout, et ça me fait vraiment du bien. Je suis juste perçu comme un mec, bon gay. (rire)Ca j'ai pas de probleme à le dire. Mais ça me fait juste de bien qu'il y a personne qui va m'insulter et me dire que je suis un déchet et que, oh, aucune... entreprise ne vaudra de toi. Voilà. Je ne sais pas si c'est hyper intéressant de dire ça comme ça, mais je suis tellement fatigué. Et pourtant, je suis tellement, mais tellement plus heureux sous six mois sous T, malgré toute la transphobie, malgré toutes les insultes, enfin, à un moment, je n'en pouvais plus, mais, j'ai jamais autant penser à mourir que quand... je n'étais pas encore sous T et maintenant je me sens extrêmement seul je vais pas mentir ma vie est chaotique j'ai du mal à créer des bonnes relations etc. Mais je suis mieux qu'avant. Je suis mieux en étant trans et en transitionnant. Je suis sincèrement mieux. Voilà.
- Speaker #0
Avant de parler de ma non-binarité, j'aimerais rappeler que les deux témoignages que vous venez d'entendre sont uniquement deux témoignages et qu'ils ne sont pas représentatifs de toute la communauté trans. C'est une communauté comme toutes les communautés qui est très vaste et très diverse et les parcours sont tous différents même s'il y a des similitudes. J'aurais aimé qu'il y ait d'autres témoignages mais j'avais clairement pas l'énergie d'en rajouter d'autres. Et donc j'aimerais parler de ma non-binarité qui, je le rappelle, fait partie des différents types de transidentité. J'aimerais rappeler aussi qu'il y a plusieurs types de transition et qu'une personne trans n'est pas obligée de faire une transition médicale ou hormonale. Il y a aussi la transition sociale, donc par exemple changer de prénom, changer de pronom, etc. Faire un coming out, etc. Et que oui, trans du coup n'est pas égal à transition, trans est égal à transgenre. Les personnes qui ne sont pas en accord avec le genre auquel elles ont été assignées à la naissance. Et c'est donc mon cas, puisque quand je suis né.e, les médecins et la société ont décidé que j'étais une fille. Et ce n'est pas le cas, puisque je suis une personne non-binaire. Et donc pour moi, ma définition de ma non-binarité, puisque encore une fois, il y a plusieurs définitions, Et que aussi, non-binaire n'est pas forcément égal à androgyne. Les personnes non-binaires ne vous doivent pas d'androgénéité, même si c'est un peu mon cas car je suis un peu un cliché sur pattes. Voilà, c'était des rappels importants, je pense, à faire. Et donc pour moi, la définition de ma non-binarité, c'est le fait que je ne sois ni un homme ni une femme. Que je sois quelque part entre les deux et en même temps aucun des deux à la fois. Je pense que c'est quelque chose que j'ai toujours plus ou moins su depuis l'enfance et l'adolescence. Mais j'avais juste pas les mots pour le dire. Et aussi j'avais d'autres bails à gérer. Comme par exemple le handicap, le validisme, le sexisme, la biphobie intériorisée, etc. D'où le fait que je n'ai pris vraiment conscience de ma non-binarité que quelques mois avant mes 28 ans, pendant le premier confinement. Et je dis souvent que c'est pas un hasard, je pense, si cette prise de conscience de ma non-binarité et l'idée du podcast sont arrivées à peu près en même temps, donc pendant le premier confinement, parce que ça m'a vraiment aidée à avoir plus confiance en moi. Ça m'a vraiment donné un boost de confiance en moi, ça m'a libéré d'un poids. Encore une fois, c'est très cliché, je me suis rasée la tête et... Ouais, il y a un poids qui est tombé de mes épaules dans tous les sens du terme. Il y a vraiment eu un avant et un après rasage de tête et un avant et un après non-binarité pour moi, en tout cas prise de conscience de ma non-binarité. Ça m'a aussi aidée à me sentir... plus légitime dans ma queerness et plus légitime dans le fait d'appartenir à la communauté LGBTQIA+, plus légitime pour me dire militant, militante. Parce que du coup j'avais l'impression de cumuler assez d'étiquettes marginalisées pour le faire. Ça c'est un autre sujet, mais le fait que je ne me sentais pas légitime à me sentir appartenir à la communauté queer, en pensant que j'étais juste une meuf cis bisexuelle, et qu'il a fallu attendre que je prenne conscience de ma non-binarité pour me sentir légitime. Voilà, voilà hein, le gatekeeping, c'est pas cool, c'est vraiment pas cool, et il serait temps d'arrêter ça. Mais c'est un autre sujet. Et donc oui, il y a vraiment eu un avant et un après qui a été très positif. dans ma confiance en moi, dans mon affirmation de moi-même, et aussi dans mes relations, notamment amicales, puisque maintenant j'ai vraiment... des ami.es de qualité et les copaines si vous passez par là coeur sur vous. Et merci d'être là. J'ai vraiment des amis avec qui je peux être moi-même et avec qui je n'ai pas peur d'être jugée et qui sont là pour moi et c'est vraiment top et je souhaite à tout le monde d'avoir cette communauté et de trouver ses adelphes, parce que vraiment ça change la vie et ça fait du bien. Et voilà, c'était vraiment important pour moi d'appuyer sur le fait que ma non-binarité et la prise de conscience de ma non-binarité ont été quelque chose de très positif pour moi et que la majorité des violences que j'ai pu subir en lien avec ça venaient de l'extérieur et de la société et non pas de mon identité ou de moi. Même si la dysphorie de genre, c'est une des choses, je pense, les plus difficiles à vivre quand on est trans. Et ça peut faire beaucoup de mal. Et c'est quelque chose que j'ai pu ressentir, justement, avant de me raser la tête. Et qu'il m'arrive encore de ressentir parfois. Mais majoritairement, les violences les plus dures venaient toujours de l'extérieur. Les violences, c'est quand une médecin du centre de rééducation où je suis suivie me dit que pour elle, je suis une femme avant tout, quand bien même je lui répète que je suis une personne. La violence, c'est quand je dois remplir un formulaire administratif et qu'il n'y a que deux options, monsieur, madame, et que moi j'ai envie de remplir aucun des deux. La violence, c'est quand mes parents m'appellent leur fille alors que... que je suis leur enfant. C'est tout ça la violence et j'aimerais rappeler que la violence, elle ne viendra jamais, mais vraiment jamais, des personnes trans et des personnes minorisées en général. Les personnes trans et les personnes minorisées ne sont pas des dangers pour la société, ne sont pas des dangers pour les enfants. Les dangers, ce sont justement le manque d'accès aux soins. le manque d'accès aux transitions, le manque d'accès à l'information. Ce sont tout ça les dangers, les dangers pour les personnes trans jeunes, les dangers pour les enfants trans. Vraiment, il faut arrêter de diaboliser et déshumaniser les personnes trans et toutes les minorités d'ailleurs, les personnes handicapées, les personnes racisées, les personnes palestiniennes puisqu'on en parle. C'est vraiment toujours, toujours, toujours les mêmes mécaniques d'oppression et de déshumanisation. Et j'espère que j'aurai réussi à montrer ça avec ce podcast et que ça fera prendre conscience de certaines choses à certaines personnes. Parce que vraiment c'est important et on en a marre d'être en mode survie et de se battre tout le temps pour faire reconnaître. nos droits, etc. On en a marre et on veut juste vivre nos vies tranquilles. Ça a été dit dans le précédent témoignage, mais vraiment, je plussois parce que on veut juste vivre nos vies tranquilles et pouvoir décider nous-mêmes ce qu'on fait avec notre corps et ce qu'on fait de notre vie et avoir une vie digne et épanouissante. Et encore une fois, ne pas être tout le temps en mode survie. Voilà, je pense que je vais m'arrêter là. Je pense que vous avez compris le message. Et je pense que si je continue encore, je vais me mettre à pleurer. Parce que c'est un sujet qui me touche beaucoup, évidemment. Et que c'est aussi bientôt la fin du podcast. Et que ça aussi, ça me donne un peu envie de pleurer. C'était donc le tout dernier épisode témoignage. Et dans deux semaines... Ce sera le tout dernier épisode recommandation culturelle et le tout dernier épisode du podcast ever. Oh, ça fait bizarre de le dire. Et ce sera un épisode recommandation culturelle sur le livre Stone Butch Blues de Leslie Feinberg, qui est un classique de la littérature queer américaine et qui est, je pense, vraiment un livre très important par les temps qui courent, encore une fois. Et voilà, j'espère que... que vous écouterez cet épisode, ce dernier épisode recommandation culturelle, et le dernier épisode du podcast, du coup. Je préviens d'avance, ce sera un épisode où je vais finir en mode cérémonie des Oscars, à remercier 15 000 personnes et à certainement pleurer. Et c'est pas grave, j'ai le droit parce que c'est la fin du podcast. Et voilà, comme ça vous êtes prévenu.es. Du coup, je vous dis à dans deux semaines pour un tout dernier épisode recommandation culturelle.