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HEURE INDUE

NUIT BLANCHE AVEC DOULLY

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58min |21/05/2025
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HEURE INDUE

NUIT BLANCHE AVEC DOULLY

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58min |21/05/2025
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Description

HEURE INDUE est de retour !

Heure Indue, journal d'un insomniaque : le road-trip nocturne dans la ville. 


HEURE INDUE, C'EST QUOI ?  

C’est l’histoire d’un type qui ne dort pas la nuit et emmène avec lui un compagnon de route d’un soir (artiste, auteur, politique …) vivre un road-trip dans Paris. 

Par sa poésie et sa forme intimiste, « Heure Indue » révèle les personnalités avec la nuit pour toile de fond. 

Porté par une narration à la première personne, Johann Roques embarque l’auditeur dans une grande virée au bout de la nuit.


JOHANN ROQUES, C'EST QUI ? 

Par le passé, vous êtes peut-être déjà tombé sur moi en écoutant la matinale de Radio Nova ou OUI-FM, Europe 1, RTL2, France Culture, et dernièrement "Les mots du soir" la libre antenne de France Bleu,

Ceinture 12ème Dan en insomnie, « Heure Indue » est le programme sur lequel j’aurais aimé pouvoir zapper tard la nuit à la radio. 

Ça n’existait pas, alors j’ai décidé de m’y coller…


Doully, compagne de route d’une nuit : 

Actrice, humoriste et standupeuse. 

Professionnellement, elle débute très jeune en exerçant des petits boulots dans le milieu de la nuit et du clubbing à Paris.

À cette époque, elle sombre dans l’addiction aux drogues dures. 

Après trois arrêts cardiaques suite à des overdoses, elle part en Israël pour suivre un programme de sevrage. 

Elle ira vivre ensuite à Barcelone plusieurs années. 

C’est en revenant à Paris qu’elle va commencer à jouer la comédie. 

À la radio, elle débute comme chroniqueuse sur Europe 1, puis France Inter dans l’équipe de Charline Vanhoenacker.  Désormais, elle est sur Radio Nova dans La Dernière avec Guillaume Meurice. 

À la télévision, c’est elle qui a repris le flambeau de Jules-Edouard Moustic à la présentation de l’émission satirique Groland Le Zapoï sur Canal Plus. 

 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    « Prends son numéro et appelle-le de ma part, c'est le meilleur » , avait-elle dit au sujet de ce médecin spécialiste du sommeil. Le sceptique, moi, j'avais épluché son compte Instagram qui compte plus de followers que j'en aurais jamais. Est-ce que c'était d'être passé à la télé qui lui avait rempli son cabinet pour les six prochains mois ? On n'allait pas être pressé pour décrocher un rendez-vous chez le docteur Sommeil. Mais j'y étais à présent. La salle d'attente, trois personnes assises sur des chaises en plexi bleu. Comme moi, sans doute, elles viennent m'endier quelques heures de sommeil en échange d'une consultation à tarif non conventionnel. Ça ne me ferait pas de mal de dormir un peu. Les derniers temps, j'avais repoussé jusqu'à l'absurde le moment de m'endormir. Une fois que je serais sorti de là, cette nuit, j'avais rendez-vous avec Dooley, comédienne, humoriste, stand-up-euse. Depuis le bout du couloir, une voix prononce mon nom. Je me lève et marche, direction le bureau du docteur Sommeil. Je rentre dans le bureau du tout-bip. Ses yeux sont rivés sur un écran d'ordinateur. Il m'annonce. « C'est pour ça que vous dormez pas. Il est là, votre problème. » Il tourne l'écran vers moi. Dessus, un graphique en dents de scie, mon cycle de sommeil enregistré deux semaines auparavant. Moi, je vois qu'une courbe au trait hystérique qui monte et descend continuellement. Je l'ai tout de suite prévenu. Hors de question que je ressorte de là avec une ordonnance pour des médocs. Stilnox, Imovan, Zolpidem. Tout le catalogue entier des somnifères, je l'ai déjà feuilleté et je ne le réouvrirai pas. Le docteur Sommeil est d'accord. Ces trucs-là, c'est jamais bon sur le long terme. Enfin, tout bip sérieux. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait vous convenir, m'a-t-il annoncé. Il m'a parlé d'une liste d'attente pour un protocole expérimental au Canada. Une nouvelle thérapie pour restaurer le sommeil en reconditionnant le cerveau grâce à l'intelligence artificielle. Trois à quatre séances, tout au plus, sous anesthésie générale. Des électrodes vissées au crâne pour envoyer du jus à plus ou moins vive intensité. Vous dormirez comme un bébé, après. M'a promis le docteur Sommeil, ses yeux pétillés comme le type qui voit s'approcher la fin du monde depuis la fenêtre de sa cuisine. Il m'a proposé d'envoyer mon dossier à Toronto. « Mon cycle de sommeil à l'agonie et moi, on pourrait intégrer le club très fermé des volontaires sélectionnés pour être cobayes. » « Hum, ouais, c'était pas sûr. » « Le cerveau, c'est quand même plus fragile qu'une machine à laver. Moins on y touche et mieux c'est, non ? » Il a souri. « Monsieur Rock, traverser la rue, c'est risqué aussi. Pourtant, on le fait bien tous les jours. » « À la tête que j'ai fait, il n'a pas insisté. » Ça semblait bien l'ennuyer de me laisser partir sans la moindre solution. Un tout bip qui passe à la télé. Je dois rester fidèle à son image de marque. Le docteur Sommeil s'est penché vers moi. Il a dit. Écoutez, pour ce mois-ci, je vais vous prescrire une boîte de Stilnox. Ce soir, j'avais donné rendez-vous à Dooley dans une brasserie. Je l'attendais.

  • Speaker #1

    Allô ? Vous êtes dans quel coin ? Comment ça en bas ? En bas d'où ? Ouais, je suis dans la brasserie. Ouais, exactement. Regardez, je tends la main. Je suis là. C'est bien. Bonjour. À la bise.

  • Speaker #2

    Bah ouais.

  • Speaker #1

    Vous en priez. Asseyez-vous.

  • Speaker #2

    Ça va bien ? Ça va, yo. Ouais. On peut se tutoyer ?

  • Speaker #1

    Alors on va faire ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    Mais toi tu me tutoies ?

  • Speaker #1

    Moi je ferai ce que je veux et vous,

  • Speaker #2

    vous allez faire un truc.

  • Speaker #1

    Vous allez faire absolument ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Comment s'est passée cette journée ?

  • Speaker #2

    Cette journée s'est passée. Je dois écrire des blagues, voilà. Je dois écrire des blagues et du coup j'hésite entre les sujets de blagues pour préparer d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Vous êtes en pleine tournée ?

  • Speaker #2

    Ouais, aussi. Demain je repars.

  • Speaker #1

    Vous serez où ?

  • Speaker #2

    À ma mère.

  • Speaker #1

    Vous savez où c'est ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais ça vous plaît ?

  • Speaker #2

    De tout ça ? C'est super de rencontrer des gens nouveaux. Par contre, c'est vrai qu'on n'a pas trop le temps de profiter.

  • Speaker #1

    Regardez-vous les avis du public une fois qu'ils sont venus à votre spectacle ?

  • Speaker #2

    Jamais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Je crois que je n'ai pas envie de savoir trop.

  • Speaker #1

    C'est qui la personne dont l'avis compte le plus alors ?

  • Speaker #2

    Ça dépend. En vrai, j'ai tellement d'amis que je crois que tous les avis comptent en fait.

  • Speaker #1

    Il y a des choses que vous avez changées grâce ou à cause de vos amis ?

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr. Heureusement qu'ils sont là. Parce que moi, je suis un peu souvent toute seule dans ma tête. Donc si... Je vais souvent du point A au point Z sans faire les autres lettres. Oui, il faut me déchiffrer.

  • Speaker #1

    Et vous, vous arrivez à déchiffrer facilement les gens ?

  • Speaker #2

    Je crois, oui, mais on peut toujours se planter.

  • Speaker #1

    Par exemple, regardez. Moi, ce que j'aime ici, dans cette brasserie, c'est qu'on a l'impression d'être derrière la vitre d'un aquarium. Vous les observez, vous, les gens ?

  • Speaker #2

    Alors moi, déjà, je ne vois rien de loin.

  • Speaker #0

    Là,

  • Speaker #1

    on est très loin. Regardez, à 15 centimètres, il y a un mec qui parle avec sa copine.

  • Speaker #2

    En fait, je n'aime pas trop regarder les gens. Comme j'ai pris l'habitude de ne rien voir, j'ai pris l'habitude de ne pas regarder les gens. Du coup, peut-être que j'ai raté l'homme de ma vie comme ça. Peut-être qu'il y a quelqu'un qui m'a regardé un jour et que je l'ai regardé dans les yeux sans le voir.

  • Speaker #1

    Si c'était l'homme de votre vie, il serait venu quand même, non ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, peut-être qu'il était timide.

  • Speaker #1

    Ah, et vous, vous êtes timide ?

  • Speaker #2

    Oui, je suis hyper timide. On n'a pas l'impression que ça, mais je suis timide. Par exemple, si tu m'invites à une soirée et que tu me laisses dans le salon alors que je ne connais personne...

  • Speaker #1

    Il faut que les gens viennent vers vous.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais ça doit être compliqué, ça, parce que maintenant que vous avez la petite notoriété qui est arrivée, les gens peuvent venir vers vous pour de mauvaises raisons.

  • Speaker #2

    Oui, mais en vrai, c'est plutôt l'inverse dans mon cas. C'est-à-dire que, par exemple, je trouve qu'on rencontre moins de gens quand on a ça, moins facilement.

  • Speaker #1

    Parce que les gens qui ont la notoriété... Vous en parlez comme d'une maladie.

  • Speaker #2

    Non, mais ça l'est un peu.

  • Speaker #1

    Ça fait combien de temps que vous avez fait ça ? Ça fait combien de temps que vous avez réalisé que vous aviez ça ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Depuis le confinement, tu vois, un truc comme ça. Mais si tu veux, quand tu as cette maladie, les gens osent moins venir te parler spontanément. Même si tu rencontres quelqu'un sur une appli de rencontre ou n'importe quoi, il va te parler normalement. Une fois qu'il s'est quitté... Il y a un changement de comportement. Là, si on parle que de rencontres, je trouve que c'est plutôt un handicap.

  • Speaker #1

    Ça fait cinq fois que vous me parlez de rencontres déjà. D'un cours, d'aller vers l'autre.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, c'est toi qui m'as dit, viens, regarde les gens et tout.

  • Speaker #1

    Vous savez ce qu'on va faire de cette nuit ? Est-ce que vous avez une idée ?

  • Speaker #2

    Non, aucune.

  • Speaker #1

    Et l'idée de ne pas savoir ce qui va se passer dans cinq, dix minutes, ça vous met dans quel état d'esprit ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'adore l'inconnu, donc plutôt cool. Je prévois jamais rien dans ma vie. Par exemple, quand je pars en vacances, je n'ai jamais de billet de retour. Après, en général, je n'ai pas réservé d'hôtel. Moi, j'aime bien la liberté, quoi. De faire ci ou ça. Mais rien n'est fixé dans le marbre. Tu vois, si demain, je change d'avis, je change d'avis, quoi.

  • Speaker #1

    Vous n'êtes pas forcément faite pour la vie de couple.

  • Speaker #2

    Ah non, non. Moi, je n'ai jamais dit qu'il fallait vivre en couple. J'étais pas là, moi, le jour où ils ont décidé ça. Ah non, non, non. Moi, il est hors de question que je vive avec la personne que j'aime.

  • Speaker #1

    Ça vous le dites dès le début ?

  • Speaker #2

    Ouais, ouais. Enfin, pas des premiers rendez-vous, parce que le gars, il va angoisser, quand même. Enfin, une fois qu'on se dit qu'on est ensemble, si tu évoques l'idée d'habiter avec moi, je te dis instantanément que ça n'arrivera jamais. Mais jamais. Le quotidien tue. Moi...

  • Speaker #1

    Mais ça, c'est pas bien accepté. Je me rappelle d'une vie à qui j'avais dit, même l'héroïne dans un film n'est pas de tous les plans.

  • Speaker #2

    Ben oui.

  • Speaker #1

    Mais elle n'avait pas compris qu'elle soit coupée au montage à certains moments.

  • Speaker #2

    Oui, oui, mais je suis tout à fait d'accord avec toi. C'est-à-dire que tu vois, je veux dire, tu aimes les pêches melbares. C'est vraiment un dessert éclaté. Je ne sais pas pourquoi, parce qu'on est dans une brasserie. Mais tu aimes les pêches melbares. Je t'en sers tous les jours à midi. À un moment donné, tu vas dire, casse-toi avec ta pêche melbares.

  • Speaker #1

    Si vous deviez résumer votre vie sentimentale à un tableau Excel, vous savez quoi ?

  • Speaker #2

    C'est compliqué.

  • Speaker #1

    De votre fait ou de la personne en face ?

  • Speaker #2

    Je crois que c'est plutôt mes choix qui ne sont pas les bons. Non, parce que c'est quand même très cool en couple. On n'a pas grand-chose à me reprocher, à part le fait peut-être un petit peu trop d'indépendance. À part ça, je te laisse faire absolument tout ce que tu veux dans ta vie.

  • Speaker #1

    C'est peut-être ça le problème.

  • Speaker #2

    Non, moi...

  • Speaker #1

    Ils veulent un peu être serrés, non ? C'est pas que les hommes aiment la conquête aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Mais oui, oui, j'ai bien remarqué que mes potes adoraient avoir des nanas un peu relous. C'est fou comme on s'attache souvent... À l'opposé de ce qu'on aimerait vraiment.

  • Speaker #1

    Et ça serait quoi votre opposé, vous ?

  • Speaker #2

    Mon opposé, ce serait quelqu'un de très rangé, avec des mocassins. Mais ça c'est pas possible du coup.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Non c'est une catastrophe. Ça revient à la mode là. Ouais c'est pas sexy quoi.

  • Speaker #1

    Vos parents ils sont toujours ensemble ?

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Ils sont aimés à la folie ?

  • Speaker #2

    Vous pensez ? Ils sont aimés à leur façon mais...

  • Speaker #1

    C'est quoi leur façon ?

  • Speaker #2

    C'est pas passionné quoi tu vois mais par contre ils s'aiment profondément. Mais c'est pas ça que je veux. Bah je les ai jamais vu s'embrasser ou se plaquer contre un mur quoi tu vois.

  • Speaker #1

    On ne fait pas ça forcément devant sa fille.

  • Speaker #2

    Oui, mais on vivait dans un 30 mètres carrés. Alors si tu veux, comme je n'avais pas de chambre, à un moment donné, j'aurais pu croiser un moment intime sans qu'il le veuille vraiment.

  • Speaker #1

    Donc vous voulez de l'amour comme au cinéma ou dans les romans ?

  • Speaker #2

    Oui, moi j'y crois à ça.

  • Speaker #1

    Vous avez quel âge aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est indiscret de demander ça. Oui,

  • Speaker #1

    mais c'est justement pour la raison pour laquelle je pose la question. 37, 38 ?

  • Speaker #2

    37.

  • Speaker #1

    Mais il tarde à venir alors !

  • Speaker #2

    Après, tu vois, imaginons, je l'aurais rencontré il y a 10 ans. Bon, très bien, super, mais il y a plein de rencontres que je n'aurais pas faites non plus. Des beaux gosses et tout, quoi.

  • Speaker #1

    Qui sont moqués, ça.

  • Speaker #2

    Mais moi, j'ai un souci, là, c'est que depuis genre 4-5 ans, il n'y a que des mecs de 10 ans de moins que moi qui viennent me voir et qui me draguent. Donc du coup, je ne sors qu'avec des mecs de 26-27 ans.

  • Speaker #1

    C'est votre genre ?

  • Speaker #2

    Ouais, C'est marrant parce que ça ne l'était pas forcément avant.

  • Speaker #1

    C'est une barrière ça, 10 ans d'écart ?

  • Speaker #2

    Non,

  • Speaker #1

    pas du tout. À partir de combien d'années sur le contrat, c'est une barrière ?

  • Speaker #2

    Je pense que ça commencera...

  • Speaker #1

    25 ans d'écart, est-ce que ça pèse ? Là,

  • Speaker #2

    moi, je pense que ça me dérangerait. Non, mais si tu m'enlèves 25 ans, la société, il a 12 ans. C'est compliqué.

  • Speaker #1

    Il y a plein de sujets que vous ne pourrez pas aborder.

  • Speaker #2

    Mais 10 ans, c'est que dalle. Ça dépend comment tu es dans ta tête. Moi j'ai des potes de 26 ans qui... J'ai un copain, il a 26 piges, il adore les nanas de 50 ans. Il aime ça, il a envie de tomber amoureux d'une meuf de 50 ans.

  • Speaker #1

    Histoire de revenu. Moi, ça a été longtemps une ambition de passer ma vie en peignoir toute la journée, attendre la femme de ma vie au bord de la piscine.

  • Speaker #2

    C'est ça qui l'excite. Sexuellement, il est attiré par les nanas de 50 balais, voire plus. Et toi, tu as quelqu'un ?

  • Speaker #1

    J'ai rencontré une fille, et puis au bout de trois semaines, elle m'a dit qu'elle partait au Mexique. Je me demande si ce n'est pas un prétexte pour...

  • Speaker #2

    Mais tu l'as rencontré vraiment ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    je l'ai vraiment rencontré. Ah, vous avez l'impression que je me fais des films dans ma tête ? Non,

  • Speaker #2

    mais peut-être que c'était un fake. Oui, oui, oui. Il y avait des sentiments ? Tu étais amoureux un peu ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi l'amour ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Elle m'envoyait des vidéos filmées sur son smartphone. Des selfies aussi, avec pour toile de fond, des monuments, des paysages. Quelques semaines avant, elle m'avait annoncé partir en voyage. Ouais, elle ne savait pas quand elle rentrerait. J'aurais bien voulu partir avec elle. Mais à chaque fois, c'est comme si mes pieds étaient pris dans le béton de la ville. Je suis resté là. Dans ses vidéos face caméra, elle me disait « Vous » . Ça ne m'était donc pas exclusivement adressé. C'était pas désagréable. Depuis mon canapé, voir cette fille à l'autre bout du monde jouer les guides touristiques. J'avais l'impression d'être devant un doc sur France 5 ou Arte. Seulement, après quelques jours passés là-bas... Quelque chose d'étrange a commencé à s'opérer. C'est difficilement explicable. Sur ses vidéos, j'avais l'impression que son visage se modifiait. D'abord sa bouche, puis un truc dans ses yeux, ensuite sa coupe de cheveux. Progressivement, son apparence s'éloignait de celle que j'avais connue avant son départ. C'était déroutant. Elle ne semblait rien remarquer de ce bouleversement. Environ quinze jours, elle ne s'était plus du tout la même femme. Le plus étrange, c'est qu'à mesure qu'elle se transformait, son visage me devenait de plus en plus familier. Un matin, j'ai ouvert sa dernière vidéo. Elle avait totalement disparu. À sa place, une autre femme s'exprimait face caméra au milieu des paysages. Je la connaissais. C'était Oslo. Qu'est-ce qu'elle foutait là, elle, à réapparaître d'un coup sur mon écran ? C'est pas comme si j'avais pas mis des années pour l'oublier. Peut-être tout simplement que j'étais devenu dingue. J'ai remonté le fil de discussion WhatsApp des jours précédents. Oslo était désormais présente sur toutes les vidéos. La même voix, les mêmes mimiques, sa gestuelle. Tout pareil comme à l'époque, avant qu'elle ne s'éclipse pour plus jamais donner de nouvelles. Je devais être fatigué. C'est du moins ce que je me suis dit sur le moment. La nuit d'après. Il était 3h30 quand mon téléphone s'est mis à vibrer. À cette heure-là, qui pouvait tenter de m'appeler ? Là ? Sur l'écran rétro-éclairé, le prénom d'Oslo est apparu. Avec Doulie, on avait quitté la brasserie. Il faisait bon, on s'était mis à marcher dans le quartier.

  • Speaker #2

    J'avais été à Barcelone.

  • Speaker #1

    Je sais, pendant combien d'années ?

  • Speaker #2

    Huit ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous êtes partie faire pendant huit ans ?

  • Speaker #2

    À la base, je voulais voir du pays et surtout arrêter de travailler la nuit.

  • Speaker #1

    Vous avez fait pas mal de petits boulots ?

  • Speaker #2

    Ouais. Par là ? Allez.

  • Speaker #1

    Quel petit boulot qui va laisser le meilleur souvenir, vous ?

  • Speaker #2

    J'ai adoré travailler la nuit, en vrai. C'était un peu la fête tous les jours, même si c'est des boulots très durs. C'était très chouette, mais on bossait de 19h à 7h du matin, 7 jours sur 7.

  • Speaker #1

    Tu étais quoi ?

  • Speaker #2

    J'ai un peu fait tous les métiers là-bas. J'étais au vestiaire au premier, et après j'avais 17 ans. Et après, je suis passée barman.

  • Speaker #1

    C'est stratégique le vestiaire. C'est très stratégique.

  • Speaker #2

    C'est très stratégique, il faut se faufiler. C'est mieux d'être petit quand on fait le vestiaire. Enfin, ça dépend des endroits. Mais disons que dans les endroits où j'ai travaillé, dans des cales à bateau. J'ai fait le vestiaire dans pas mal d'endroits à Paris.

  • Speaker #1

    Donc ça, c'était les meilleurs souvenirs ? Le plus mauvais ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Je crois que vendeuse de fringues, ça ne m'a pas passionnée. Alors que j'adore les fringues, tu vois. Moi, tu me dirais, je m'éclatais quand même. Mais je me faisais un peu chier. En fait, je n'aime pas avoir un patron. Donc la nuit, ton patron, il picole, il s'en fout. quand même un peu de chill quoi tu vois alors que dans un magasin de fringues bah tu vois t'as des horaires bah très tôt déjà je déteste le matin et puis t'as un chef qui veut qu'il ait du rendement quoi moi ça je suis pas très compète j'aime pas la compète j'aime pas tu sais il faisait des concours du meilleur vendeur je déteste ça je préfère laisser gagner les autres et montrer que j'en ai rien à foutre parce que J'aime pas ce que ça véhicule. et moi avoir la paix quoi.

  • Speaker #1

    Et vous me dites ça alors vous travaillez dans le show business, dans l'industrie du spectacle.

  • Speaker #2

    Je t'aime mais...

  • Speaker #1

    C'est friand de lit les humoristes entre eux ou on se tire la bourre quand même ?

  • Speaker #2

    Non, moi je trouve que... Non, moi je trouve qu'on s'en sort plutôt pas mal. Après je sais que je suis pas compétitrice là-dedans et je sais que ça peut me porter préjudice parce que je sais pas aller dans des trucs par intérêt. Je sais pas aller demander. En général dans toutes les soirées. Tu me verras discuter en général avec les mecs de la sécu ou le mec au bar. Mais c'est rarement les personnes qui vont me donner le premier rôle.

  • Speaker #1

    Donc là, on est ce soir à Belleville, sur un banc public, entre des sanisettes, des dames qui vont de leur corps, un camion poubelle qui est en train de faire...

  • Speaker #2

    C'est un peu l'histoire de ma vie.

  • Speaker #1

    J'ai lu une interview de vous, vous disiez, je descendais dans la rue, je m'asseyais sur un banc et des inconnus m'ont raconté leurs histoires, leurs problèmes.

  • Speaker #2

    Enfin non, je ne m'asseyais pas sur des bancs en attendant des gens qui venaient me raconter.

  • Speaker #1

    Ou ailleurs, disons.

  • Speaker #2

    Non, non, je pense que cette interview a été très...

  • Speaker #1

    Je l'ai confondue avec Anne Roumanoff, pardonnez-moi, désolé.

  • Speaker #2

    Non, je m'asseyais beaucoup avec les mecs qui vivaient dans la rue, je discutais des heures avec eux. Mais sinon, oui, il y avait ce phénomène qui faisait que pendant longtemps... Des gens que je croisais au boulot ou quoi, on s'échangeait les numéros, parce qu'il y avait une petite connexion, mais amicale, mais si tu veux pas plus que ça. Et ces gens m'appelaient pour me raconter des problèmes existentiels.

  • Speaker #1

    Mais des problèmes comme quoi ? Des problèmes de couple, des problèmes d'argent ?

  • Speaker #2

    Des problèmes plus profonds que ça, des problèmes de dépression, d'envie de suicide.

  • Speaker #1

    Et ils disaient que vous étiez la bonne personne pour éviter le suicide.

  • Speaker #2

    Oui, apparemment.

  • Speaker #1

    Donc vous avez sauvé pas mal de vies.

  • Speaker #2

    Oui, je crois.

  • Speaker #1

    En étant à l'écoute.

  • Speaker #2

    Oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Dans une de ses interviews, vous avez parlé d'un gars qui s'appelait Momo.

  • Speaker #2

    Oui, Momo. C'est un mec qui habitait dans la rue. Enfin, qui habitait. Je l'ai rencontré sur le premier jour de rue. Et il était très touchant. Parce qu'il avait perdu sa femme. Enfin, sa femme l'avait larguée. Il avait perdu son boulot.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il avait fait ? Il a gringolé ?

  • Speaker #2

    Je ne sais plus du tout l'histoire dans son intégralité. Mais en tout cas, je l'ai vu moi, lui, dégringoler. Ça abîme la rue. Ça abîme très rapidement. Je pense que même pas si une semaine dans la rue, t'aurais pu avoir une gueule.

  • Speaker #1

    Vous, c'est l'époque où vous étiez émancipée. Vous étiez partie de chez vos parents à 14 ans. Vous aviez votre petit appartement. Vous faisiez votre vie.

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous l'avez dit sciemment, je vais rencontrer des gens à la marge. Ou c'est les gens à la marge qui sont venus vers vous ?

  • Speaker #2

    Non, c'est juste que je pense qu'on se faisait un petit sourire et puis qu'à un moment donné, on se mettait à discuter, tu vois. Tu les croises tous les soirs, tous les matins. Il y a un eye contact. Il y a un lien qui se crée, quoi.

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il est devenu quoi, Momo ?

  • Speaker #2

    Je pense qu'il est mort, Momo. Je doute qu'il ait survécu à tout ça, parce qu'à la fin, il n'allait pas bien du tout. En quoi ? En 3-4 ans. Tu sais que j'ai voulu faire, pendant le confinement... Assitant social ? Mais non, je voulais faire SOS à détresse amitié, là, tu vois. Le truc où les gens t'appellent, parce que moi je suis insomniaque. Je me disais, bon, les gens ne font rien de la journée, alors j'écrivais un peu des blagues, tu vois. Mais du coup, je me disais la nuit. Je pourrais faire ça. J'ai l'impression qu'il fallait faire tout un entretien, répondre à des questionnaires.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous diriez, vous, si vous aviez été dans cette configuration de répondre à des gens qui sont désespérés au-delà de toute attente, et qui vous disent...

  • Speaker #2

    Moi, je leur demanderais s'ils ont un rêve et de me parler de leur rêve. Tu vois, il faut se raccrocher à des trucs positifs et à des projections sur l'avenir. Parce qu'en vrai, quand t'es pas bien, t'as juste envie que ça s'arrête. Et tu ne vois pas au-delà de la situation du présent. Donc du coup, je pense qu'il faut arriver à se projeter sur des trucs positifs de l'avenir.

  • Speaker #1

    Oui, vous êtes arrivé de vous dire, si je ne suis pas là demain, ce n'est pas grave.

  • Speaker #2

    Bien évidemment, mais 150 fois. Mais encore il y a une semaine. Enfin, il y a même trois jours. Moi, ça m'arrive souvent d'être à un balcon et de regarder en bas et de me dire, oui, bon, pourquoi pas.

  • Speaker #1

    Mais vous avez un traitement pour ça.

  • Speaker #2

    Non, mais je crois que c'est assez sain. Je ne sais plus, quelqu'un m'avait dit que c'était assez sain de penser au suicide. Il est toujours là. Toujours de ce monde. Il y avait eu des études de fête. Tu n'as jamais regardé le métro arriver ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je ne pourrais pas pousser cette personne devant pour prendre ma place tout à l'heure ?

  • Speaker #2

    C'est un putain de psychopathe. Voilà ce que t'es.

  • Speaker #1

    Vous faites quoi la nuit habituellement, quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Je fais de la merde. Tu vois, je scrolle sur les réseaux, je regarde des conneries dont je ne me souviens pas deux minutes après.

  • Speaker #1

    Mais jusqu'à quelle heure ?

  • Speaker #2

    Ça peut être loin.

  • Speaker #1

    Dormir vraiment pas ?

  • Speaker #2

    J'ai du mal, j'ai vraiment du mal à m'endormir. Si tu ne me donnes rien du tout, pas de cachet, pas de CBD, rien, je ne dors pas avant 6h du matin.

  • Speaker #1

    Il y a quelque chose qui me déprime énormément, surtout à cette saison, c'est quand tu as... 5, 5h30, on commence à entendre le chant des oiseaux, on n'est toujours pas endormis.

  • Speaker #2

    C'est une horreur, je déteste les oiseaux, j'ai envie de les buter.

  • Speaker #1

    Si vous ne dormez pas, vous avez beaucoup de difficultés. Depuis quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Depuis toujours. Depuis toujours moi aussi. Jamais dormi.

  • Speaker #1

    Les bainsos, les bainsos de diazépine, c'est la seule drogue que j'ai connu. Ah oui, oui. Et j'adorais ça.

  • Speaker #2

    Ben oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Non mais j'aimais bien le moment avant, vous savez, j'en prenais un et je me mettais à appeler des gens, souvent des filles.

  • Speaker #2

    Tu prenais quoi ? Tu prenais pas du Seresta ? Je prenais du Stilnok.

  • Speaker #1

    J'avais un médecin.

  • Speaker #2

    Ça donne la tchatche, le synox ?

  • Speaker #1

    Non, c'était pas la tchatche.

  • Speaker #2

    Mais t'étais sous,

  • Speaker #1

    quoi. La discussion glissait un peu. Et j'avais eu l'angoisse d'appeler ma grand-mère. Parce que le lendemain, je regardais qui j'avais appelé. J'ai dit, pourquoi je l'ai appelée à cette heure-là ?

  • Speaker #2

    T'avais peur d'avoir chiné ta grand-mère ?

  • Speaker #1

    Et j'ai arrêté pour ça. Ah oui ?

  • Speaker #2

    Ça te sortait de ton contrôle, quoi. T'es contrôle fric ?

  • Speaker #1

    Je ?

  • Speaker #2

    T'es contrôle fric toi ?

  • Speaker #1

    Contrôle fric ?

  • Speaker #2

    Contrôle fric.

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #2

    Ça veut dire genre, t'aimes bien tout contrôler.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez pris longtemps, vous, des bains de jour ?

  • Speaker #2

    Moi, je continue à en prendre, je prends l'hexanaque.

  • Speaker #1

    Et alors, vous appelez des gens quand...

  • Speaker #2

    Non, pas du tout.

  • Speaker #1

    Vous n'avez jamais appelé des gens pendant que...

  • Speaker #2

    Je sais que... Je crois qu'à mes 22 ans, j'ai appelé la dernière personne sous l'emprise de l'alcool. Genre, j'étais bourrée en soirée, et j'ai appelé, pas un ex, mais un mec avec qui c'était en train de se finir. Je l'ai appelé pour la énième fois, parce que ça m'était déjà arrivé plein de fois, d'appeler pour le coup des ex, un ex en particulier. Et je me souviens, je revoyais mon portail, je me disais, putain, on a parlé deux heures, et je me disais, mais je ne me souviendrai de rien de ce qu'on avait dit. Et ça a été la fois trop, je me souviens, j'avais 22 piges, j'étais au Canary, je crois. Et je me suis dit, plus jamais, jamais, jamais, je n'appellerai. je n'utiliserai mon téléphone quand je suis bourrée ou dans un état de conscience modifié.

  • Speaker #1

    Vous êtes tenue à cette promesse.

  • Speaker #2

    Je suis tenue à cette promesse, c'est-à-dire que mon cerveau a été reprogrammé pour ne jamais appeler qui que ce soit quand je ne suis plus moi-même. À 100%. Donc du coup, ouais, je ne vais pas arrêter le Xernax.

  • Speaker #1

    Vous aimez faire des trucs inutiles dans la vie ?

  • Speaker #2

    Ouais, moi je fais souvent des trucs inutiles. J'ai une idée.

  • Speaker #1

    « Un taxi. »

  • Speaker #2

    « Ah bon ? » « Ouais. »

  • Speaker #0

    Ça me fait bizarre d'être dehors à cette heure-là. Ces derniers temps, mes soirées, je les avais passées enfermées dans un studio de radio, au septième étage d'une roue de hamster posée à plat. à l'ouest de la ville. Durant deux heures quotidiennement, j'écoutais des gens au téléphone me raconter leur vie. Ça devait être la veille avant que mon émission s'arrête. Marie-Lou, 12 ans, bientôt 13, venait de débarquer sur l'antenne. Huit mois déjà qu'elle écoutait l'émission depuis qu'un jour, zappant la FM, elle était tombée dessus par hasard. Désormais, la nuit tombée, elle s'abreuvait des histoires des autres avant de fermer les yeux et s'endormir. Marie-Lou. déléguée de classe de cinquième, avait le tempérament affirmé d'une gamine qui sait qu'on doit attendre quelque chose de la vie si on veut que ça arrive vraiment. Elle, plus tard, elle aimerait bien être journaliste, politique ou judiciaire. Elle hésitait encore. Bolubile, authentique surtout. Depuis quelques minutes qu'elle avait commencé à parler, Marie-Lou, moi, j'étais retourné dans ma chambre d'ado. assis sur mon lit une place. Je patientais, fébrile. Depuis de longues minutes déjà, j'étais accroché au téléphone. Ce téléphone fixe, préhistorique, qu'avaient mes parents quand j'étais gosse. J'avais tiré des kilomètres de câble jusqu'à ma piaule. Refermer la porte pour pas les réveiller. Je m'en souviens de cette nuit-là, et comme si c'était il y a une heure. J'attendais mon tour, fixant l'affiche accrochée au mur au-dessus de mon lit. Mad Max, un dit plongiligne, combinaison de cuir et casque, brandissant arme à feu sur un bolide noir fonçant toute allure dans ma direction. À l'horloge de mon radio-réveil, déjà minuit passé, le lendemain à huit heures, j'avais cours d'histoire avec M. Aubert. Il y aurait un terreau écrit sur la Première Guerre mondiale. Mais je m'en foutais. Demain, c'était loin. L'important ? Qu'est-ce qui allait se passer dans les prochaines minutes ? Bientôt, ce serait à moi. Faudrait que je sois bon. Quand le disque à la radio fut terminé, dans le combiné téléphonique, j'ai entendu une voix qui s'adressait à moi. Cette même voix que j'écoutais à la radio depuis des mois, chaque soir, dans l'obscurité, venait de me poser une question. « T'as quel âge ? Tu t'appelles comment ? » J'ai pris une grande respiration. Et mes yeux plantés dans ceux de Mad Max, j'ai dit... Moi, je m'appelle Johan. J'ai 12 ans. Avec Doulie, on a pris un taxi. Direction le centre de la ville.

  • Speaker #2

    C'est quoi d'autre que métier ?

  • Speaker #1

    Le problème, c'est que je n'ai jamais fait de métier, jamais fait que de la radio.

  • Speaker #2

    Toujours fait que de la radio.

  • Speaker #1

    Ce qui n'est pas un métier en soi.

  • Speaker #2

    Ben si, attends.

  • Speaker #1

    Non, non, non.

  • Speaker #2

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Vous faites un vrai métier ?

  • Speaker #2

    Ben ouais, sinon... C'est des métiers, ouais. C'est des vrais métiers. J'ai bien vu la gueule de mes emplois du temps, j'estime que c'est un vrai métier, oui.

  • Speaker #1

    Vous travaillez beaucoup ?

  • Speaker #2

    Je travaille énormément.

  • Speaker #1

    Vous êtes fatiguée en ce moment ?

  • Speaker #2

    Très.

  • Speaker #0

    Ça ne se voit pas.

  • Speaker #2

    C'est gentil.

  • Speaker #0

    Enfin, ça ne s'entend pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est dégueulasse.

  • Speaker #1

    Mais ça n'a jamais aussi bien marché pour vous,

  • Speaker #0

    là ?

  • Speaker #2

    Je ne me rends pas vraiment compte, en fait. Oui, ça marche bien.

  • Speaker #1

    Il y a un indice pour savoir.

  • Speaker #2

    Ah ouais ? C'est vrai ?

  • Speaker #1

    Dans quelques jours, on va déclarer ses impôts.

  • Speaker #2

    Ah ouais, ça c'est une catastrophe ça. C'est dégueulasse, parce que moi je suis dans une espèce de marge où en fait je suis dans la tranche la plus haute de ma catégorie.

  • Speaker #0

    Enfin tu vois ce que je veux dire, moi j'y comprends rien à ces conneries mais si tu veux en fait je paye beaucoup trop par rapport à ce que je gagne quoi. En fait c'est juste...

  • Speaker #1

    Donc vous payez trop d'impôts quoi ?

  • Speaker #0

    Un peu trop ouais par rapport à ce que je gagne ouais.

  • Speaker #1

    Vous êtes avec une bande du maris de gauche.

  • Speaker #0

    Ouais mais moi je suis pas politisée tu sais.

  • Speaker #1

    C'est important pour vous l'argent ?

  • Speaker #0

    Non, c'est important de pas se prendre la tête mais j'ai pas de... j'attache pas plus d'importance que ça. D'ailleurs si tu vois la gueule des mecs avec qui je suis... Tu comprendras que je n'y attache aucune importance.

  • Speaker #1

    Vous en faites quoi alors ?

  • Speaker #0

    J'aide beaucoup des gens dans ma famille. Et puis, quand je peux inviter des potes, ça me fait plaisir.

  • Speaker #1

    Vous êtes économe ?

  • Speaker #0

    Non, pas du tout. Je suis un panier percé, c'est une catastrophe.

  • Speaker #1

    Vous n'avez pas l'angoisse de ce qui va se passer demain ?

  • Speaker #0

    Oui, je l'ai l'angoisse, mais comme je n'ai vécu avec rien, du coup, je n'ai juste pas envie de revivre avec rien. Mais je sais que c'est possible de survivre, en tout cas.

  • Speaker #1

    Comment on vit ? Avec rien, justement ?

  • Speaker #0

    On survit. Il y a des gens qui n'y arrivent pas. Malheureusement. Mais parce que je pense que quand tu as perdu le moral de tout, tu es un peu... Quand tu n'as vraiment pas le moral... C'est pour ça qu'il y a des gens qui jugent beaucoup, des gens qui ne s'en sortent pas. Mais je crois que ces gens-là n'ont jamais été dans ces situations. Ils pensent avoir galéré un peu parce que leur père ou leur mère a arrêté de leur donner de l'argent de poche ou j'en sais rien. Et ils se disent qu'ils ont vécu la galère. Mais la galère, c'est tout mélangé, c'est tout en même temps. C'est-à-dire que tu n'as pas le moral, tu n'as pas d'oseille, tu n'as pas d'appart, tu n'as rien, tu n'as pas d'amis. Je pense que les gens qui jugent, ils ne se sont jamais retrouvés confrontés à cette situation. d'avoir rien, pas une main tendue. Là, du coup, va toi trouver l'énergie à l'intérieur de toi pour t'en sortir. C'est pas forcément évident. Mais je crois que j'irai au soleil si je suis dans la merde, tu vois.

  • Speaker #1

    J'ai vu ces gens-là qui font la queue pour aller dans ce... C'est quoi ?

  • Speaker #0

    Moi, je fais pas la queue.

  • Speaker #1

    Vous faites jamais la queue, vous ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Vous passez devant les gens ?

  • Speaker #0

    Non, c'est pas ça. Je dis que je fais pas la queue. C'est-à-dire que j'ai jamais fait la queue. S'il y a la queue, ça me saoule. Même 10 minutes, ça me saoule de faire une queue. Je vais dans un autre endroit.

  • Speaker #1

    Vous avez vu ce que c'est comme un resto ? Comment ils appellent ces trucs-là ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est des plats en sauce, des plats traditionnels, avec des toutes petites portions. Ce qui fait le bouillon.

  • Speaker #0

    Oui, je sais, ça fait beaucoup la queue au bouillon.

  • Speaker #1

    Truc bobo par excellence.

  • Speaker #0

    Je n'y suis jamais allée, parce qu'il y a la queue.

  • Speaker #1

    Parce qu'il y a la queue ?

  • Speaker #0

    Pour manger un oeuf mimosa, ça ne m'intéresse pas.

  • Speaker #1

    Il y a vraiment une très très longue...

  • Speaker #0

    C'est surtout qu'il y a de la bouffe à peu près à tous les 3 mètres.

  • Speaker #1

    Vous ferez ça toute votre vie, vous pensez ?

  • Speaker #0

    Oui, je pense. Je me vois pas... J'ai quand même fait pas mal d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Mais dans votre spectacle, il y a beaucoup de vous, beaucoup de votre vie.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous avez l'angoisse de vous dire qu'est-ce que je vais raconter dans le deuxième, le troisième, le quatrième ?

  • Speaker #0

    Là, là, j'ai plus de spectacle. Dans deux mois, j'ai plus de spectacle. Donc non, j'ai jamais l'angoisse. Enfin, j'ai l'angoisse parce qu'il faut que je réécrive des trucs très drôles, mais par contre, en termes de matière. Je n'ai pas de manque de matière à raconter. Après, il faut savoir les mettre en blague et que ça fasse un bon spectacle. Mais par contre, en termes d'inspiration, de trucs à raconter, non, ce n'est pas un gros souci pour moi.

  • Speaker #1

    Ça vous arrive d'être sur scène certains soirs et votre tête n'est pas là ?

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Donc vous déroulez en automatique ?

  • Speaker #0

    Non, c'est des moments, ce n'est pas surtout le spectacle quand même.

  • Speaker #1

    Ça peut durer combien de temps ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, c'est un tunnel. Tu ne veux pas savoir combien de temps il a duré.

  • Speaker #1

    Donc là, les gens payent pour voir un robot dévier du texte.

  • Speaker #0

    Mais pas du tout. Ça peut durer une minute. Une minute, tout d'un coup, je ne sais pas, tu penses à un truc. Moi, ça m'est arrivé de perdre un ami très proche, par exemple, une heure avant le spectacle. Bon, ben, j'ai du mal à être concentrée dans le spectacle. Si tu veux, j'étais dans un tunnel de lui. C'est compliqué d'être tout le temps à 100%. Merci. Focus quand dans ta vie perso il t'arrive des trucs compliqués à gérer. C'est dur de mettre tout entre parenthèses, tout ça parce que t'es en train de bosser. T'effaces pas tout ce que tu fais ou tout ce que tu vis dans ta vie.

  • Speaker #1

    La scène ça reste un endroit comme n'importe quel autre endroit de la vie ?

  • Speaker #0

    C'est un endroit où je suis bien mais je suis pas sûre que tu puisses contrôler ton cerveau à ce point là. J'aimerais bien mais il fait ce qu'il veut. Il est indépendant. Il vit sa vie. Il vit sa vie.

  • Speaker #1

    Il vit trop sa vie, pour toi, votre cerveau ?

  • Speaker #0

    Oui, un peu trop. Moi, j'aimerais bien qu'il y ait un truc pour le débrancher. Je pense que les insomniaques moulinent trop, qui réfléchissent trop. C'est souvent ton cerveau qui fait que tu n'arrives pas à te relaxer.

  • Speaker #1

    Vous savez où on va ? Non. On va dans un endroit où les gens payent le soir pour s'enfermer dans un endroit et se vider la tête.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Mais c'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que ça peut être ce genre de choses ?

  • Speaker #0

    Une boîte de nuit ?

  • Speaker #1

    On se vide vraiment la tête dans une boîte de nuit ?

  • Speaker #0

    Bah si tu picole et que tu danses, ouais. Même sans picole d'ailleurs. Danser, ça vide la tête. Chanter aussi. T'as déjà chanté ?

  • Speaker #1

    Ça m'arrive, oui.

  • Speaker #0

    Mais tout seul ?

  • Speaker #1

    Chez moi.

  • Speaker #0

    Et t'aimes bien ça ?

  • Speaker #1

    Quand j'écoute France Info, pour ne pas entendre toutes les infos qu'il y a justement.

  • Speaker #0

    Ah oui ? Tu mets un truc et tu chantes par dessus pour ne pas le mettre ?

  • Speaker #1

    Pour ne pas entendre, oui. Ah oui, c'est vrai, c'est une ligne. Je vous ai dit, je ne suis pas très pragmatique. Tout ce qui est pratique me rebute.

  • Speaker #0

    Ah oui, je vois ça. Et vous,

  • Speaker #1

    vous êtes très pratico-pratique.

  • Speaker #0

    Non, j'ai appris à me démerder, quoi. Oui, on me démerde aussi.

  • Speaker #1

    Regardez, on a commandé un Uber, on arrive dans un endroit.

  • Speaker #0

    Je suis très impressionnée. Oui. C'est là ? Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est là ? Ah oui, d'accord, ok. Eh bien, je vous remercie. Merci à vous.

  • Speaker #0

    Ça me donne faim.

  • Speaker #1

    Vous voulez manger un truc ?

  • Speaker #0

    J'ai très faim.

  • Speaker #1

    Je crois que c'est là. Bonsoir.

  • Speaker #0

    Bonsoir. Ah, Fury Room.

  • Speaker #1

    Vous connaissez ce truc-là ?

  • Speaker #0

    C'est un truc où tu défonces des trucs.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en fait, quelle utilité ça peut avoir, ça, dans la vraie vie ?

  • Speaker #0

    Je n'en sais rien, il faut être énervé, quoi.

  • Speaker #1

    Pensez.

  • Speaker #0

    On a toute une rage à l'intérieur. Non, tu n'as pas de rage à l'intérieur ? C'est... Des gens qui t'ont fait du mal.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est une bonne idée ça. Donner des prénoms à des objets et ensuite s'occuper d'eux.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez beaucoup des rancœurs ?

  • Speaker #0

    Oui, j'en ai pas mal. Ecoutez,

  • Speaker #1

    rentrez, je vous en prie.

  • Speaker #0

    Après vous. Allez.

  • Speaker #1

    Bonsoir. Johan, à réserver. Alors expliquez-nous...

  • Speaker #0

    Ah mais faut mettre des combis et tout ?

  • Speaker #1

    Ouais c'est exactement ça, on va pouvoir vous équiper.

  • Speaker #0

    Putain c'est pas la force.

  • Speaker #1

    On est obligé de mettre des combis ? Ouais. Franchement ouais bah... Le but c'est de faire un peu orange mécanique. Habillez-nous.

  • Speaker #0

    J'ai pas envie d'être là,

  • Speaker #1

    c'est vraiment pour toi que je fais ça ? Pourquoi c'est dit... S'il y a un problème,

  • Speaker #0

    parce que...

  • Speaker #1

    Vous signez sans regarder le truc. Moi je m'en fous.

  • Speaker #0

    Non ? Hop, très bien. C'est vous ?

  • Speaker #1

    C'est ça y est on...

  • Speaker #0

    Duri et Johan c'est ça Johan ? courage on doit enlever les manteaux et tout merci il faut changer de chaussure aussi ?

  • Speaker #1

    avec une combinaison ça va être magnifique c'est assez saillant, c'est pour moi ?

  • Speaker #0

    c'est un jogging on va voir ça les ans dessous vous savez,

  • Speaker #1

    vous ne savez absolument pas ce qu'on a laissé en arrivant ici Ça, c'est quoi ? Ah oui, avec une visière, oui. C'est à ce point-là dangereux de rentrer dans ce genre de pièce ? Vous savez, on peut rentrer et ne rien casser. Je ne suis pas pour l'ultra-violence.

  • Speaker #0

    Tu ne vas pas avoir le choix, tu vas être obligé de bousiller des trucs.

  • Speaker #1

    C'est parti. Donc, on descend là dans la pièce en... C'est quoi, dans une cave ? D'accord. Donc, une fois à l'intérieur, on est enfermé. Ah, vous êtes enfermé, oui. D'accord. Vous êtes où, Doulie ? Ah oui, ils n'ont pas fait semblant de tout péter les précédents.

  • Speaker #0

    But the baseball must... pour utiliser pour casser. Quand vous voulez jeter des bouteilles. Il faut casser ça ? Oui. Ah, tu peux éclater la télé ? Oui, ça se peut. C'est vrai ? Ah oui.

  • Speaker #1

    Déjà, c'est plus intéressant.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci vraiment.

  • Speaker #0

    Tu expulses toute cette violence que tu entoures. Attends, j'ai envie d'éclater cette bouteille.

  • Speaker #1

    Ce n'est pas le problème du matériel.

  • Speaker #0

    On l'a lancé.

  • Speaker #1

    Regardez, le lard de bien péter une bouteille.

  • Speaker #0

    Allez !

  • Speaker #1

    Là vous pensez à quelqu'un ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Descendez bien votre visière.

  • Speaker #0

    C'est pas bien là.

  • Speaker #1

    C'est nul. Moi je serais vous, j'attaquerais directement l'écran. Elle n'a peut-être pas semblant. L'écran d'ordinateur aussi, vous lui avez donné un prénom mental ?

  • Speaker #0

    Non, là ça me fait un peu de soude.

  • Speaker #1

    C'est quoi c'est une bouteille ? C'est du petit chablis.

  • Speaker #0

    Le chablis il va sauter.

  • Speaker #1

    Hop là ! C'est que du matériel informatique.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est vraiment le moment d'utiliser un pied de biche.

  • Speaker #1

    La tour PC, j'ai l'impression qu'elle vous fait de l'œil.

  • Speaker #0

    Attends, j'entends la musique. Ça aide. T'écoutes quoi comme musique,

  • Speaker #1

    toi ? J'aurais bien aimé qu'on fasse ça sur du Luan. Non. Et ben voilà ! C'est vrai que ça fait du bien !

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on commence à y prendre goût ! Toi, comme tu n'es pas du tout violente, tu vas peut-être complètement briller !

  • Speaker #1

    Wow ! Regardez ! Ça, c'est du vino blanco !

  • Speaker #0

    Tu vas jouer gentil, là !

  • Speaker #1

    Alors attendez, la bouteille qu'on casse après une relation de vivant ?

  • Speaker #0

    Non ! Et on l'attend seulement ? Non, je vais faire une relation d'une nuit !

  • Speaker #1

    Tu vas l'attendre d'une nuit ?

  • Speaker #0

    D'une nuit ! Surtout que vous êtes vénère !

  • Speaker #1

    C'est la nuit et pas... Nuit c'est combien d'heures ?

  • Speaker #0

    8 heures ! C'est déjà 2 heures ? Ah ah ah ah ! Je vous dis, y'a aucune raison de faire ce que vous voulez ! Ah ah ah ! Laisse-moi ! Bah oui, je suis énervée !

  • Speaker #1

    Vous êtes rentré le bouchon dans le doigt.

  • Speaker #0

    C'est trop dur ça !

  • Speaker #1

    Ah vous reprenez le pied de biche ! Regarde, la tour d'ordinateur... Ça c'est acheté chez Sercouf à tous les coups !

  • Speaker #0

    Il faut que tu y ailles !

  • Speaker #1

    Je me demande combien de gens passent chaque nuit dans cet endroit pour péter des trucs comme on les pète là.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas. J'avais entendu parler, mais je n'y étais jamais allée.

  • Speaker #1

    Parce que vous n'êtes pas curieuse ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois que j'avais lu que tu ne pouvais péter qu'une télé ou quoi. Moi, je voulais tout bousiller.

  • Speaker #1

    Mais dans l'absolu, quel est l'objet qui n'est pas présent dans cette salle que vous adoreriez défoncer ?

  • Speaker #0

    Un mur.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que vous faites.

  • Speaker #0

    Je peux shooter le mannequin ? Comment ? A toi, un peu.

  • Speaker #1

    Faire des votes prog, Julie.

  • Speaker #0

    Faire mon choix. Je peux en faire.

  • Speaker #1

    Bon, écoutez, euh... Non, mais ne ramassez pas tout. Vous êtes très bien élevés, enfin.

  • Speaker #0

    Attention, la bouteille de champagne, grand potentiel.

  • Speaker #1

    brise bien une bouteille de champagne et la hynocène un petit potentiel pas mal recherche que j'ai vu on comprend pas ce qu'ils ont foutu aux jeux olympiques de paris vous aurez pu introduire cette mission on va pas la rialer d'où il est C'est super. Je crois que ça lui a plu. C'est vrai ? Oui, contre toute attente. Oui, c'est vrai. C'est vrai que ça fait réfléchir.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait du bien.

  • Speaker #1

    Vous dites ça parce que vous êtes bien élevée.

  • Speaker #0

    Oui. Non,

  • Speaker #1

    mais si, vous êtes super bien élevée. Qu'est-ce qui pourrait égaler la sensation qui a été la vôtre dans cette pièce, dans la vie saine et réelle ?

  • Speaker #0

    Un énervement. Mais ça m'est arrivé, moi j'étais un peu plus... Moi, j'ai du mal avec les objets. Tu sais, par exemple, si une télé ne marche pas.

  • Speaker #1

    Tu peux la casser ? Oui. Vous allez voir votre ordinateur différent après en avoir pété un comme vous l'avez fait il y a un instant.

  • Speaker #0

    Non. Mais des fois, j'ai envie de l'éclater.

  • Speaker #1

    Pourquoi vous ne le faites pas ? Je veux dire, vous avez les moyens, Manon.

  • Speaker #0

    Non, c'est un peu dommage, même si tu peux t'en racheter un. J'étais beaucoup plus agressive avec les objets quand j'avais vraiment pas d'oseille. C'est vrai ? J'ai pété des télés, ouais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que le programme vous plaisait pas ?

  • Speaker #0

    Non, parce qu'il marchait pas.

  • Speaker #1

    Et ça, quand vous étiez gamine ?

  • Speaker #0

    Non, non, dans... ado, quoi.

  • Speaker #1

    Il est déjà battu ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Par Françard Diz ou par Zénithu ?

  • Speaker #0

    Non, parce que des fois, je rêve de déclater la gueule à quelqu'un qui l'aurait cherché, quand même. Il y a des gens qui méritent qu'on leur éclate la gueule.

  • Speaker #1

    Dans votre vie, par le passé.

  • Speaker #0

    Oui. Oui, j'aimerais bien, tu vois, si je vois une embrouille arriver, pouvoir dégommer le gars qui fout la merde. Ça, ça me ferait un bien fou, mais je pense que je n'ai pas la force.

  • Speaker #1

    Vous prendriez le mec, un mec ou une fille ? Ça serait qui ?

  • Speaker #0

    Peu importe.

  • Speaker #1

    L'engendrer ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    oui. Vous prendriez la personne par le call-back ?

  • Speaker #0

    Je lui éclaterais la gueule vraiment. Ça dépend de ce qu'il est en train de faire. Si, par exemple...

  • Speaker #1

    Il fait tomber un papier gras par terre, par exemple, ça mérite.

  • Speaker #0

    Non, non.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il mériterait qu'il reçoive votre poing dans la figure ?

  • Speaker #0

    Un violon de meuf, tu lui dis, tu l'attrapes et tu le dégommes. Tu vois ? Là, c'est un gros kiff, quoi.

  • Speaker #1

    Il vous est arrivé, vous, de vous retrouver dans des situations où vous étiez impuissante et vous aviez justement la range en vous ?

  • Speaker #0

    Je me suis fait beaucoup agresser, mais je suis toujours sortie par la tchatche. Donc, je n'ai jamais eu à me battre. Mais j'ai cette rage en moi qui fait que je pense que si vraiment tu touches à quelqu'un que j'aime, je pense que je suis capable de... de t'éclater. Je pense que même si je n'ai pas la force pour, je pense que la force, elle se décuple quand tu es très, très, très énervé. Donc si on touche à quelqu'un que tu aimes, je pense que tu es capable de buter quelqu'un même s'il est plus grand que toi.

  • Speaker #1

    Ça pourrait vous faire peur. On se dit parfois, j'ai peur de passer à l'acte.

  • Speaker #0

    Si la personne mérite vraiment, c'est-à-dire que si quelqu'un a buté ma mère, par exemple, elle mérite de mourir. Donc elle mourra.

  • Speaker #1

    Nécessité fait loi. S'il y avait quelque chose d'injuste, de dramatique, vous pourriez justement aller...

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Quelles qu'en soient les conséquences après.

  • Speaker #0

    Oui. Je peux faire croupir en prison, mais je ne laisserai pas quelqu'un qui a tué quelqu'un que j'aime en vie, vivre sa vie.

  • Speaker #1

    Vous vous rendez compte qu'on est en train de dire tout ça, règlement de compte, justice soi-même, avec du bon reggae en fond sonore.

  • Speaker #0

    Ouais mais je déteste le reggae.

  • Speaker #1

    No woman, no cry.

  • Speaker #0

    J'aime pas le reggae.

  • Speaker #1

    Moi non plus je déteste ça, c'est un merdique. C'est vrai qu'on aurait pu péter des trucs sur du reggae.

  • Speaker #0

    Ouais ouais c'est vrai.

  • Speaker #1

    Vous, vous avez voulu la facilité du métal.

  • Speaker #0

    Mais c'est vrai que si tu m'avais mis du reggae je crois que j'aurais été encore plus énervée.

  • Speaker #1

    On aurait dû faire ça sur du reggae.

  • Speaker #0

    On s'en va ? Allez y alors.

  • Speaker #1

    « C'était vachement bien. Je vais recommander ça à ma mère. Elle en a besoin en ce moment. » Je ne saurais pas dire quand ça avait commencé. Les filles de cette ville s'étaient mises à porter des chaussettes blanches à l'intérieur de mon cassin aux semelles trop épaisses. Comme on compte les moutons avant de s'endormir, je tiens la comptabilité de celles que je croise sur mon chemin. Onze depuis le début de la soirée. Qui décide de ça ? La mode. Le même pouvoir de persuasion autoritaire qu'un cachet. glissé dans le verre d'une inconnue en boîte de nuit. Avec Doulie, on a quitté la Fury Room, rue Blondel. On vient de passer devant un monument en restauration. Enveloppé d'une bâche XXL, il exhibe une chanteuse qui fait la moue pour mieux vendre le sac à main qu'elle porte autour du bras. Si c'est à moi qu'on avait proposé la pub, combien d'années-lumière est-ce que je pourrais tenir avec tout ce fric-là, sans rien avoir à foutre, devant les vitrines d'un grand magasin ? Une famille de Roumains allongés sur des matelas ne dort pas encore. L'un des gamins rit devant une vidéo sur un smartphone. J'entends les sons d'un cartoon. On marche dans la rue tous les deux sans destination définie. Quelle conclusion on peut tirer de cette expérience ? Si expérience il y a.

  • Speaker #0

    La conclusion c'est que j'ai vu un peu de violence contre toi et que je suis assez contente. Parce que j'ai l'impression que ça t'a quand même un peu plu.

  • Speaker #1

    Je me suis aperçu que je pouvais y avoir du bad boy en moi.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est ça qui me plaît.

  • Speaker #1

    Vous avez remarqué que ce soir, cette nuit, contrairement à beaucoup de mes condisciples journalistes et animateurs, on n'a pas parlé de drogue avec vous.

  • Speaker #0

    C'est bien ça, ça me plaît.

  • Speaker #1

    Vous n'en avez pas marre d'ailleurs.

  • Speaker #0

    Je sais que ça a aidé beaucoup de gens, donc tant mieux. Parce que ça a aidé beaucoup de junkies à se dire qu'il y avait un après. Mais d'ailleurs, je ne l'ai même pas fait dans ce but-là. Je l'ai fait à la base pour désacraliser un peu la mauvaise image qu'on pouvait avoir des gens qui consommaient. Dans le sens où ce ne sont pas des gens à mépriser. C'est juste des gens qui ont bossé.

  • Speaker #1

    C'est toujours votre grand-mère, vous ?

  • Speaker #0

    Non, je l'aimais très fort.

  • Speaker #1

    C'était quel genre de fille, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    C'était une femme incroyable. Elle aurait pu avoir 25 ans quand elle avait 80 ans. Elle avait le cerveau de quelqu'un de 25 ans.

  • Speaker #1

    C'est elle qui vous a trouvé un médecin et qui vous a sorti de là ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Comment ça se fait que ce soit votre grand-mère qui vous a sorti ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, il y a ma mère aussi qui était dans le coup.

  • Speaker #1

    Pourquoi c'était une femme formidable, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    Parce qu'elle comprenait tout et elle était très éduquée. Mais elle s'en foutait. Je crois que c'était quelqu'un de très moderne pour sa génération.

  • Speaker #1

    Elle fait quoi de sa vie ?

  • Speaker #0

    C'est une très bonne question, ça. Putain, dans quoi elle a bossé ? Parce que moi, j'ai toujours connu à la retraite. Elle s'est beaucoup occupée de ses gamins, surtout, je crois. Elle en avait quatre, quand même. Mais on s'entendait très bien. Je regrette de ne pas avoir été à jeun quand elle est partie. Parce que moi, j'étais dans le dur quand elle est partie. Et franchement, ça m'aurait fait plaisir qu'elle voit tout ça. Parce qu'elle aurait aimé. En plus, j'adorais son rire. Et si j'avais entendu son rire dans la salle, je pense qu'elle aurait dit « Oh, quand même ! » sur certaines vannes.

  • Speaker #1

    Tu as vu où on est, là ?

  • Speaker #0

    On est dans une rue.

  • Speaker #1

    On est à un numéro de la rue la plus mythique de Paris.

  • Speaker #0

    Rue Saint-Denis.

  • Speaker #1

    Avec tous ses commerces de proximité.

  • Speaker #0

    Miss Bonbon, Le Mirage, Jorge. Love shop.

  • Speaker #1

    Love shop.

  • Speaker #0

    Tu vas des fois dans des love shop ?

  • Speaker #1

    Vous êtes déjà allé dans des love shop ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    C'est très longtemps que je ne suis pas rentré dans un...

  • Speaker #0

    C'est vrai ?

  • Speaker #1

    A quelle occasion vous êtes déjà rentré, vous, dans ce genre de truc ?

  • Speaker #0

    Pour acheter des trucs, quoi.

  • Speaker #1

    Oui, ça j'imagine.

  • Speaker #0

    Oui, oui, non, moi j'y vais, s'il faut, il y a les quoi. Mais c'est marrant d'y aller avec ton mec aussi. Tu passes devant un sex shop, tu y vas, ça attire l'œil. Tu veux aller au sex shop ?

  • Speaker #1

    Peut-être non, juste regarder la vitrine. Tu sais, moi, je suis un garçon très prune. Qu'est-ce qui vous fait marrer ?

  • Speaker #0

    C'est ce mot, prude.

  • Speaker #1

    Quoi ?

  • Speaker #0

    Ça ne me fait rien.

  • Speaker #1

    Ça pourrait être un titre pour votre prochain spectacle, prude ? Avec votre photo dessus,

  • Speaker #0

    ça serait cool. Tu vois, un petit gars de Tour Eiffel. Un souvenir inoubliable, tu vois ?

  • Speaker #1

    Tu as vu l'affiche en dessous ? Black Empire, une vraie lady doit savoir cacher son jeu.

  • Speaker #0

    C'est un rouge à lèvres vibromasseur.

  • Speaker #1

    On dirait ma belle-sœur.

  • Speaker #0

    T'as qu'à faire une photo. Comme ça, tu lui envoies. Tu lui dis tu m'avais caché ça ?

  • Speaker #1

    Non, je pense que ça va pas améliorer nos relations.

  • Speaker #0

    Non ? C'est déjà compliqué ?

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il y a qui derrière le rideau ?

  • Speaker #0

    L'homme de ma vie ?

  • Speaker #1

    Allez, on va voir. Allez, juste, on jette le museau.

  • Speaker #0

    Allez,

  • Speaker #1

    un rideau bleu. Quelle texture.

  • Speaker #0

    Il est en latex. Tu vois ? Il me soit. C'est dommage qu'il n'y ait pas de...

  • Speaker #1

    Il est phallus.

  • Speaker #0

    C'est dommage qu'il n'y ait pas de photo. Est-ce que tu te sens à l'aise ?

  • Speaker #1

    Ce qui est gênant, et c'est souvent aussi ça, peut-être dans les relations, c'est que ce qu'on imagine, ce qu'on projette avant de consommer est parfois plus fort que ce qu'on voit une fois qu'on rentre. Alors peut-être que je suis trop cérébrale.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est souvent ça.

  • Speaker #1

    Qu'il y a des menottes. Dès que vous voyez quelque chose, qu'est-ce que dans tous ces objets qui sont autour de nous, vous pourriez voir figurer sur votre cheminée, chez vous, dans votre appartement, salon, cuisine ?

  • Speaker #0

    Ah ben, je ne vais pas foutre ça sur une... J'ai une étagère, enfin. Ça,

  • Speaker #1

    c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est une laisse, chérie.

  • Speaker #1

    Il y a des affiches au plafond.

  • Speaker #0

    T'as un fouet. Pas très. Non.

  • Speaker #1

    Il y a des cagoules. Il y a toujours des cagoules. Cagoule résille.

  • Speaker #0

    Ça, ça peut être un peu sexy, tu vois, cette espèce d'ensemble avec des lanières en cuir.

  • Speaker #1

    La marque est jolie. Kalida.

  • Speaker #0

    Kalida. Est-ce que tu vois ça ? Ça tu vois tu pourrais essayer un jour, c'est des petits anneaux vibrants, bon c'est pas dingo.

  • Speaker #1

    Vous avez des mecs qui ont utilisé des trucs comme ça ?

  • Speaker #0

    Ouais, ça m'est... il y a longtemps j'ai utilisé ça.

  • Speaker #1

    Je trouve ça très propre pour un endroit...

  • Speaker #0

    Mais c'est... ça a toujours été un peu comme ça.

  • Speaker #1

    Ah il y a le rayon vidéo, lesbienne, solo nylon, fétiche.

  • Speaker #0

    Ah ouais mais là on est old school quoi, c'est des DVD carrément. Bah il est petit hein.

  • Speaker #1

    C'est marrant.

  • Speaker #0

    Alors ça tu vois, ça je pourrais pas par contre.

  • Speaker #1

    De quoi ?

  • Speaker #0

    Ben un gueux de ceinture, c'est-à-dire que là ça veut dire que techniquement... Non.

  • Speaker #1

    L'emballage a l'air heureuse.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, mais... Non, non, mais c'est pas mon délire.

  • Speaker #1

    J'observe que c'est quand même grandement vide, pourtant on est un vendredi soir.

  • Speaker #0

    Ouais, mais...

  • Speaker #1

    Et en revanche, les gels de lubrifiant, c'est à l'américaine, c'est des Ectolid. Soir.

  • Speaker #0

    Et là t'as du Popper, tu vois.

  • Speaker #1

    Vous êtes là depuis combien de temps ? Vous gérez le magasin depuis combien de temps ? Ah oui, pardon. D'accord. Bonne nuit. Ça vous fait marrer. Pensez de constater qu'on est rentrés et il n'y avait pas l'homme de votre vie.

  • Speaker #0

    C'était une cata. Il n'y avait vraiment qu'un mec et c'était le vendeur.

  • Speaker #1

    Que j'ai trouvé très prude.

  • Speaker #0

    Oui, lui aussi était très prude.

  • Speaker #1

    En fait, il a pensé que je lui brandissais un gomme miché.

  • Speaker #0

    Peut-être.

  • Speaker #1

    Comment vous imaginez, vous, dans 20 ans ?

  • Speaker #0

    Peut-être plus là.

  • Speaker #1

    Ça fait quoi ? Ça ne fait pas beaucoup si vous n'êtes plus là dans 20 ans.

  • Speaker #0

    Oui, mais je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas. J'espère être comblée de tout ce que j'avais envie de faire dans cette vie dans 20 ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que, avant de mourir, vous aimeriez absolument faire que vous n'avez pas encore fait ?

  • Speaker #0

    Il y a plein de trucs en fait. J'ai envie de passer mon permis bateau, savoir ce que c'est l'amour véritable, d'aimer et d'être aimé à la même puissance. Permis bateau parce que j'adorerais avoir mon permis moto.

  • Speaker #1

    Vous foutez dans la même phrase, le permis bateau et l'amour vrai.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Il n'y a qu'à Dubaï que les gens font des phrases comme ça.

  • Speaker #0

    Je suis peut-être un cerveau dubaïote, qu'est-ce que tu veux ? J'adorerais passer mon permis moto, mais j'ai peur de tuer des gens, donc non. Et... un voyage quoi. Visiter à peu près tous les pays que j'ai envie de voir dans ma vie. Ouais. Aimer la vie, être heureuse.

  • Speaker #1

    C'est difficile ça d'être heureuse. Ouais. Vous êtes heureuse aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Ça va, tu vois, il y a pire. Ça c'est pas une réponse. Mais je pense qu'il y a mieux. Ouais, mais franchement, ça va. Ça va, je peux pas me plaindre.

  • Speaker #1

    Alors qu'est-ce qui manque ? Le plus du plus, c'est l'amour ?

  • Speaker #0

    Ouais, je crois.

  • Speaker #1

    Vous accepteriez si on vous proposait de changer de cerveau ? On dirait, tu seras sûrement plus heureuse, mais on te change le cerveau. Ou on change des trucs comme ça, des connexions neuronales. Oui,

  • Speaker #0

    mais tu me donnes quoi comme cerveau à la place ?

  • Speaker #1

    Je connais un mec à courbe voix qui fait des trucs, un peu de mécanique, tout ça, enfin, il se démerdera. Je serais heureuse.

  • Speaker #0

    Mais je serais heureuse. Oui,

  • Speaker #1

    comme dans l'au-dessus d'un lit de coucou à la fin.

  • Speaker #0

    Non, j'ai trop bossé sur ce cerveau pour en changer.

  • Speaker #1

    Vous n'allez même pas aller voir un psy, vous appelez ça travailler.

  • Speaker #0

    Ben ouais, c'est l'école de la vie chérie. Nous sommes fraîchis de revenir à un stade genre où il y a plein de subtilités de la vie que je ne capte pas, tu vois.

  • Speaker #1

    Je l'avais dit tout à l'heure, il y a de grandes chances pour que quand on comprend beaucoup de choses, on soit moins heureux que ceux qui en comprennent moins.

  • Speaker #0

    Mais moi mon but c'est d'être heureuse avec ce cerveau. Tu crois que c'est impossible ?

  • Speaker #1

    Soit que la réponse est derrière le rideau du love and shop.

  • Speaker #0

    Ben ça va finir là, ça va se finir comme ça cette histoire.

  • Speaker #1

    J'ai reçu un SMS. C'est l'écrivain imaginaire. « Tu fais quoi, là ? J'ai un truc à fêter. Tu viens ? » À cette heure-là, je sais où il est. Au Master Poulet. Un euro le pilon, deux cinquante la cuisse avec sauce offerte Ausha, ouvert jusqu'à cinq heures du matin. Devant, toujours du monde qui attend. Des jeunes, majoritairement. Casquettes, sacoches, verres fumés. Tous patientent pour de la volaille frite. Dans la file d'attente, ça sent le faux poulet et la vraie weed. L'écrivain imaginaire est assis sur une chaise de jardin, sur le trottoir qui fait terrasse. Il mange son poulet. Rivé sur son smartphone, il regarde une chaîne info où les intervenants refont le monde en s'engueulant. C'est distrayant. Il suit ça comme ses parents regardaient au théâtre ce soir. « Je m'assois. » je demande. « Alors qu'est-ce qu'on fait ? T'as rencontré quelqu'un ? » Il hausse les épaules. « Tu comptes ? » il m'interroge. « Tu comptes faire quoi, toi, quand ça va être la fin du monde ? » Ces derniers temps, il a que ça à la bouche, la fin du monde. Ce serait sa revanche. Cette nuit, il en a encore contre ce vieil éditeur qui lui tourne autour depuis des mois. Il lui fait croire qu'il publiera son roman, alors que c'est tout autre chose chez lui qui l'intéresse. « C'est ces connards qui servent à rien dans leur bureau, là. Crois-moi bien qu'avec l'intelligence artificielle, bientôt, ils seront tous dehors. Et quand ils auront perdu leur job, on verra. » Ça lui fait marrer. Enfin, pas tout à fait. « Tu vois, pour vivre seul avec Quedal, il faut le mode d'emploi. Moi, je l'ai. » « Tu viens ? Je vais te montrer là où j'habite maintenant. » Nous voilà partis. Assis au fond d'un bus, on sort de la ville pour s'enfoncer en grande banlieue. Quand je repose le pied à terre, il est déjà quatre heures passées. Où est-ce qu'on est ? Où est-ce qu'on va ? Je sais pas. « Tu vas voir, c'est ouf ! » m'annonce l'écrivain dans un regain d'énergie. On passe devant des lotissements, des résidences. Aux façades, plus une lumière. Tout le monde qui dort. Les rues sont vides. Après dix minutes, comme ça, il s'arrête l'écrivain. « C'est là ! » qui me dit tout fier la gueule enfarinée. On est devant une barre d'immeubles désaffectée. Longs grillages qui courent devant. Un panneau dessus pour indiquer la destruction prochaine du HLM. Voilà qui soulève le grillage. Avance quelques mètres avant de se retourner vers moi. « Qu'est-ce que tu fous, putain ? Tu viens ? » Voilà ce qu'on est venu fêter. L'écrivain imaginaire mène désormais la grande vie d'un squatter. Au huitième et dernier étage, cloisons, appartements, tout a été préalablement détruit. Au sol, il reste encore des petits bouts de mur. Plusieurs centaines de mètres carrés pour lui tout seul, l'écrivain, avec vue panoramique sur la ville au loin. « S'emmerde pas ? » je l'entends qui me dit. « Qu'est-ce que t'en penses ? C'est pas mal, non ? C'est pas Stéphane Plaza qui m'aurait trouvé ça. On est seul. Tout en haut de cette barre HLM. Bientôt le jour qui va se lever. La vue est dingue. C'est beau, mais en même temps c'est comme si tout était bientôt fini. Comme si pour de bon on l'a répété cette fin du monde. Avant les autres. Juste pour prendre nos marques. S'il avait raison, l'écrivain. Si l'homme du futur, le vrai, celui qui survivra, c'était lui. Man Max au RSA. On l'a fait, Macrémaillère, ou pas ? De son sac à dos, il sort deux boîtes de Red Bull. En euphorie, le voilà qui gueule. « Santé ! » C'est la première fois que je le vois, l'écrivain, qui semble apaisé. À mon tour, je lève ma boîte d'énergie drink. Je regarde droit devant, comme on le fait pour un vœu le jour de l'an. « Bonne fin du monde à nous. »

  • Speaker #0

    Yann Roque

  • Speaker #1

    Rindu,

  • Speaker #0

    journal d'un insomniac. Vos oreilles s'égarent dans la nuit.

Description

HEURE INDUE est de retour !

Heure Indue, journal d'un insomniaque : le road-trip nocturne dans la ville. 


HEURE INDUE, C'EST QUOI ?  

C’est l’histoire d’un type qui ne dort pas la nuit et emmène avec lui un compagnon de route d’un soir (artiste, auteur, politique …) vivre un road-trip dans Paris. 

Par sa poésie et sa forme intimiste, « Heure Indue » révèle les personnalités avec la nuit pour toile de fond. 

Porté par une narration à la première personne, Johann Roques embarque l’auditeur dans une grande virée au bout de la nuit.


JOHANN ROQUES, C'EST QUI ? 

Par le passé, vous êtes peut-être déjà tombé sur moi en écoutant la matinale de Radio Nova ou OUI-FM, Europe 1, RTL2, France Culture, et dernièrement "Les mots du soir" la libre antenne de France Bleu,

Ceinture 12ème Dan en insomnie, « Heure Indue » est le programme sur lequel j’aurais aimé pouvoir zapper tard la nuit à la radio. 

Ça n’existait pas, alors j’ai décidé de m’y coller…


Doully, compagne de route d’une nuit : 

Actrice, humoriste et standupeuse. 

Professionnellement, elle débute très jeune en exerçant des petits boulots dans le milieu de la nuit et du clubbing à Paris.

À cette époque, elle sombre dans l’addiction aux drogues dures. 

Après trois arrêts cardiaques suite à des overdoses, elle part en Israël pour suivre un programme de sevrage. 

Elle ira vivre ensuite à Barcelone plusieurs années. 

C’est en revenant à Paris qu’elle va commencer à jouer la comédie. 

À la radio, elle débute comme chroniqueuse sur Europe 1, puis France Inter dans l’équipe de Charline Vanhoenacker.  Désormais, elle est sur Radio Nova dans La Dernière avec Guillaume Meurice. 

À la télévision, c’est elle qui a repris le flambeau de Jules-Edouard Moustic à la présentation de l’émission satirique Groland Le Zapoï sur Canal Plus. 

 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    « Prends son numéro et appelle-le de ma part, c'est le meilleur » , avait-elle dit au sujet de ce médecin spécialiste du sommeil. Le sceptique, moi, j'avais épluché son compte Instagram qui compte plus de followers que j'en aurais jamais. Est-ce que c'était d'être passé à la télé qui lui avait rempli son cabinet pour les six prochains mois ? On n'allait pas être pressé pour décrocher un rendez-vous chez le docteur Sommeil. Mais j'y étais à présent. La salle d'attente, trois personnes assises sur des chaises en plexi bleu. Comme moi, sans doute, elles viennent m'endier quelques heures de sommeil en échange d'une consultation à tarif non conventionnel. Ça ne me ferait pas de mal de dormir un peu. Les derniers temps, j'avais repoussé jusqu'à l'absurde le moment de m'endormir. Une fois que je serais sorti de là, cette nuit, j'avais rendez-vous avec Dooley, comédienne, humoriste, stand-up-euse. Depuis le bout du couloir, une voix prononce mon nom. Je me lève et marche, direction le bureau du docteur Sommeil. Je rentre dans le bureau du tout-bip. Ses yeux sont rivés sur un écran d'ordinateur. Il m'annonce. « C'est pour ça que vous dormez pas. Il est là, votre problème. » Il tourne l'écran vers moi. Dessus, un graphique en dents de scie, mon cycle de sommeil enregistré deux semaines auparavant. Moi, je vois qu'une courbe au trait hystérique qui monte et descend continuellement. Je l'ai tout de suite prévenu. Hors de question que je ressorte de là avec une ordonnance pour des médocs. Stilnox, Imovan, Zolpidem. Tout le catalogue entier des somnifères, je l'ai déjà feuilleté et je ne le réouvrirai pas. Le docteur Sommeil est d'accord. Ces trucs-là, c'est jamais bon sur le long terme. Enfin, tout bip sérieux. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait vous convenir, m'a-t-il annoncé. Il m'a parlé d'une liste d'attente pour un protocole expérimental au Canada. Une nouvelle thérapie pour restaurer le sommeil en reconditionnant le cerveau grâce à l'intelligence artificielle. Trois à quatre séances, tout au plus, sous anesthésie générale. Des électrodes vissées au crâne pour envoyer du jus à plus ou moins vive intensité. Vous dormirez comme un bébé, après. M'a promis le docteur Sommeil, ses yeux pétillés comme le type qui voit s'approcher la fin du monde depuis la fenêtre de sa cuisine. Il m'a proposé d'envoyer mon dossier à Toronto. « Mon cycle de sommeil à l'agonie et moi, on pourrait intégrer le club très fermé des volontaires sélectionnés pour être cobayes. » « Hum, ouais, c'était pas sûr. » « Le cerveau, c'est quand même plus fragile qu'une machine à laver. Moins on y touche et mieux c'est, non ? » Il a souri. « Monsieur Rock, traverser la rue, c'est risqué aussi. Pourtant, on le fait bien tous les jours. » « À la tête que j'ai fait, il n'a pas insisté. » Ça semblait bien l'ennuyer de me laisser partir sans la moindre solution. Un tout bip qui passe à la télé. Je dois rester fidèle à son image de marque. Le docteur Sommeil s'est penché vers moi. Il a dit. Écoutez, pour ce mois-ci, je vais vous prescrire une boîte de Stilnox. Ce soir, j'avais donné rendez-vous à Dooley dans une brasserie. Je l'attendais.

  • Speaker #1

    Allô ? Vous êtes dans quel coin ? Comment ça en bas ? En bas d'où ? Ouais, je suis dans la brasserie. Ouais, exactement. Regardez, je tends la main. Je suis là. C'est bien. Bonjour. À la bise.

  • Speaker #2

    Bah ouais.

  • Speaker #1

    Vous en priez. Asseyez-vous.

  • Speaker #2

    Ça va bien ? Ça va, yo. Ouais. On peut se tutoyer ?

  • Speaker #1

    Alors on va faire ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    Mais toi tu me tutoies ?

  • Speaker #1

    Moi je ferai ce que je veux et vous,

  • Speaker #2

    vous allez faire un truc.

  • Speaker #1

    Vous allez faire absolument ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Comment s'est passée cette journée ?

  • Speaker #2

    Cette journée s'est passée. Je dois écrire des blagues, voilà. Je dois écrire des blagues et du coup j'hésite entre les sujets de blagues pour préparer d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Vous êtes en pleine tournée ?

  • Speaker #2

    Ouais, aussi. Demain je repars.

  • Speaker #1

    Vous serez où ?

  • Speaker #2

    À ma mère.

  • Speaker #1

    Vous savez où c'est ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais ça vous plaît ?

  • Speaker #2

    De tout ça ? C'est super de rencontrer des gens nouveaux. Par contre, c'est vrai qu'on n'a pas trop le temps de profiter.

  • Speaker #1

    Regardez-vous les avis du public une fois qu'ils sont venus à votre spectacle ?

  • Speaker #2

    Jamais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Je crois que je n'ai pas envie de savoir trop.

  • Speaker #1

    C'est qui la personne dont l'avis compte le plus alors ?

  • Speaker #2

    Ça dépend. En vrai, j'ai tellement d'amis que je crois que tous les avis comptent en fait.

  • Speaker #1

    Il y a des choses que vous avez changées grâce ou à cause de vos amis ?

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr. Heureusement qu'ils sont là. Parce que moi, je suis un peu souvent toute seule dans ma tête. Donc si... Je vais souvent du point A au point Z sans faire les autres lettres. Oui, il faut me déchiffrer.

  • Speaker #1

    Et vous, vous arrivez à déchiffrer facilement les gens ?

  • Speaker #2

    Je crois, oui, mais on peut toujours se planter.

  • Speaker #1

    Par exemple, regardez. Moi, ce que j'aime ici, dans cette brasserie, c'est qu'on a l'impression d'être derrière la vitre d'un aquarium. Vous les observez, vous, les gens ?

  • Speaker #2

    Alors moi, déjà, je ne vois rien de loin.

  • Speaker #0

    Là,

  • Speaker #1

    on est très loin. Regardez, à 15 centimètres, il y a un mec qui parle avec sa copine.

  • Speaker #2

    En fait, je n'aime pas trop regarder les gens. Comme j'ai pris l'habitude de ne rien voir, j'ai pris l'habitude de ne pas regarder les gens. Du coup, peut-être que j'ai raté l'homme de ma vie comme ça. Peut-être qu'il y a quelqu'un qui m'a regardé un jour et que je l'ai regardé dans les yeux sans le voir.

  • Speaker #1

    Si c'était l'homme de votre vie, il serait venu quand même, non ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, peut-être qu'il était timide.

  • Speaker #1

    Ah, et vous, vous êtes timide ?

  • Speaker #2

    Oui, je suis hyper timide. On n'a pas l'impression que ça, mais je suis timide. Par exemple, si tu m'invites à une soirée et que tu me laisses dans le salon alors que je ne connais personne...

  • Speaker #1

    Il faut que les gens viennent vers vous.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais ça doit être compliqué, ça, parce que maintenant que vous avez la petite notoriété qui est arrivée, les gens peuvent venir vers vous pour de mauvaises raisons.

  • Speaker #2

    Oui, mais en vrai, c'est plutôt l'inverse dans mon cas. C'est-à-dire que, par exemple, je trouve qu'on rencontre moins de gens quand on a ça, moins facilement.

  • Speaker #1

    Parce que les gens qui ont la notoriété... Vous en parlez comme d'une maladie.

  • Speaker #2

    Non, mais ça l'est un peu.

  • Speaker #1

    Ça fait combien de temps que vous avez fait ça ? Ça fait combien de temps que vous avez réalisé que vous aviez ça ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Depuis le confinement, tu vois, un truc comme ça. Mais si tu veux, quand tu as cette maladie, les gens osent moins venir te parler spontanément. Même si tu rencontres quelqu'un sur une appli de rencontre ou n'importe quoi, il va te parler normalement. Une fois qu'il s'est quitté... Il y a un changement de comportement. Là, si on parle que de rencontres, je trouve que c'est plutôt un handicap.

  • Speaker #1

    Ça fait cinq fois que vous me parlez de rencontres déjà. D'un cours, d'aller vers l'autre.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, c'est toi qui m'as dit, viens, regarde les gens et tout.

  • Speaker #1

    Vous savez ce qu'on va faire de cette nuit ? Est-ce que vous avez une idée ?

  • Speaker #2

    Non, aucune.

  • Speaker #1

    Et l'idée de ne pas savoir ce qui va se passer dans cinq, dix minutes, ça vous met dans quel état d'esprit ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'adore l'inconnu, donc plutôt cool. Je prévois jamais rien dans ma vie. Par exemple, quand je pars en vacances, je n'ai jamais de billet de retour. Après, en général, je n'ai pas réservé d'hôtel. Moi, j'aime bien la liberté, quoi. De faire ci ou ça. Mais rien n'est fixé dans le marbre. Tu vois, si demain, je change d'avis, je change d'avis, quoi.

  • Speaker #1

    Vous n'êtes pas forcément faite pour la vie de couple.

  • Speaker #2

    Ah non, non. Moi, je n'ai jamais dit qu'il fallait vivre en couple. J'étais pas là, moi, le jour où ils ont décidé ça. Ah non, non, non. Moi, il est hors de question que je vive avec la personne que j'aime.

  • Speaker #1

    Ça vous le dites dès le début ?

  • Speaker #2

    Ouais, ouais. Enfin, pas des premiers rendez-vous, parce que le gars, il va angoisser, quand même. Enfin, une fois qu'on se dit qu'on est ensemble, si tu évoques l'idée d'habiter avec moi, je te dis instantanément que ça n'arrivera jamais. Mais jamais. Le quotidien tue. Moi...

  • Speaker #1

    Mais ça, c'est pas bien accepté. Je me rappelle d'une vie à qui j'avais dit, même l'héroïne dans un film n'est pas de tous les plans.

  • Speaker #2

    Ben oui.

  • Speaker #1

    Mais elle n'avait pas compris qu'elle soit coupée au montage à certains moments.

  • Speaker #2

    Oui, oui, mais je suis tout à fait d'accord avec toi. C'est-à-dire que tu vois, je veux dire, tu aimes les pêches melbares. C'est vraiment un dessert éclaté. Je ne sais pas pourquoi, parce qu'on est dans une brasserie. Mais tu aimes les pêches melbares. Je t'en sers tous les jours à midi. À un moment donné, tu vas dire, casse-toi avec ta pêche melbares.

  • Speaker #1

    Si vous deviez résumer votre vie sentimentale à un tableau Excel, vous savez quoi ?

  • Speaker #2

    C'est compliqué.

  • Speaker #1

    De votre fait ou de la personne en face ?

  • Speaker #2

    Je crois que c'est plutôt mes choix qui ne sont pas les bons. Non, parce que c'est quand même très cool en couple. On n'a pas grand-chose à me reprocher, à part le fait peut-être un petit peu trop d'indépendance. À part ça, je te laisse faire absolument tout ce que tu veux dans ta vie.

  • Speaker #1

    C'est peut-être ça le problème.

  • Speaker #2

    Non, moi...

  • Speaker #1

    Ils veulent un peu être serrés, non ? C'est pas que les hommes aiment la conquête aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Mais oui, oui, j'ai bien remarqué que mes potes adoraient avoir des nanas un peu relous. C'est fou comme on s'attache souvent... À l'opposé de ce qu'on aimerait vraiment.

  • Speaker #1

    Et ça serait quoi votre opposé, vous ?

  • Speaker #2

    Mon opposé, ce serait quelqu'un de très rangé, avec des mocassins. Mais ça c'est pas possible du coup.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Non c'est une catastrophe. Ça revient à la mode là. Ouais c'est pas sexy quoi.

  • Speaker #1

    Vos parents ils sont toujours ensemble ?

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Ils sont aimés à la folie ?

  • Speaker #2

    Vous pensez ? Ils sont aimés à leur façon mais...

  • Speaker #1

    C'est quoi leur façon ?

  • Speaker #2

    C'est pas passionné quoi tu vois mais par contre ils s'aiment profondément. Mais c'est pas ça que je veux. Bah je les ai jamais vu s'embrasser ou se plaquer contre un mur quoi tu vois.

  • Speaker #1

    On ne fait pas ça forcément devant sa fille.

  • Speaker #2

    Oui, mais on vivait dans un 30 mètres carrés. Alors si tu veux, comme je n'avais pas de chambre, à un moment donné, j'aurais pu croiser un moment intime sans qu'il le veuille vraiment.

  • Speaker #1

    Donc vous voulez de l'amour comme au cinéma ou dans les romans ?

  • Speaker #2

    Oui, moi j'y crois à ça.

  • Speaker #1

    Vous avez quel âge aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est indiscret de demander ça. Oui,

  • Speaker #1

    mais c'est justement pour la raison pour laquelle je pose la question. 37, 38 ?

  • Speaker #2

    37.

  • Speaker #1

    Mais il tarde à venir alors !

  • Speaker #2

    Après, tu vois, imaginons, je l'aurais rencontré il y a 10 ans. Bon, très bien, super, mais il y a plein de rencontres que je n'aurais pas faites non plus. Des beaux gosses et tout, quoi.

  • Speaker #1

    Qui sont moqués, ça.

  • Speaker #2

    Mais moi, j'ai un souci, là, c'est que depuis genre 4-5 ans, il n'y a que des mecs de 10 ans de moins que moi qui viennent me voir et qui me draguent. Donc du coup, je ne sors qu'avec des mecs de 26-27 ans.

  • Speaker #1

    C'est votre genre ?

  • Speaker #2

    Ouais, C'est marrant parce que ça ne l'était pas forcément avant.

  • Speaker #1

    C'est une barrière ça, 10 ans d'écart ?

  • Speaker #2

    Non,

  • Speaker #1

    pas du tout. À partir de combien d'années sur le contrat, c'est une barrière ?

  • Speaker #2

    Je pense que ça commencera...

  • Speaker #1

    25 ans d'écart, est-ce que ça pèse ? Là,

  • Speaker #2

    moi, je pense que ça me dérangerait. Non, mais si tu m'enlèves 25 ans, la société, il a 12 ans. C'est compliqué.

  • Speaker #1

    Il y a plein de sujets que vous ne pourrez pas aborder.

  • Speaker #2

    Mais 10 ans, c'est que dalle. Ça dépend comment tu es dans ta tête. Moi j'ai des potes de 26 ans qui... J'ai un copain, il a 26 piges, il adore les nanas de 50 ans. Il aime ça, il a envie de tomber amoureux d'une meuf de 50 ans.

  • Speaker #1

    Histoire de revenu. Moi, ça a été longtemps une ambition de passer ma vie en peignoir toute la journée, attendre la femme de ma vie au bord de la piscine.

  • Speaker #2

    C'est ça qui l'excite. Sexuellement, il est attiré par les nanas de 50 balais, voire plus. Et toi, tu as quelqu'un ?

  • Speaker #1

    J'ai rencontré une fille, et puis au bout de trois semaines, elle m'a dit qu'elle partait au Mexique. Je me demande si ce n'est pas un prétexte pour...

  • Speaker #2

    Mais tu l'as rencontré vraiment ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    je l'ai vraiment rencontré. Ah, vous avez l'impression que je me fais des films dans ma tête ? Non,

  • Speaker #2

    mais peut-être que c'était un fake. Oui, oui, oui. Il y avait des sentiments ? Tu étais amoureux un peu ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi l'amour ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Elle m'envoyait des vidéos filmées sur son smartphone. Des selfies aussi, avec pour toile de fond, des monuments, des paysages. Quelques semaines avant, elle m'avait annoncé partir en voyage. Ouais, elle ne savait pas quand elle rentrerait. J'aurais bien voulu partir avec elle. Mais à chaque fois, c'est comme si mes pieds étaient pris dans le béton de la ville. Je suis resté là. Dans ses vidéos face caméra, elle me disait « Vous » . Ça ne m'était donc pas exclusivement adressé. C'était pas désagréable. Depuis mon canapé, voir cette fille à l'autre bout du monde jouer les guides touristiques. J'avais l'impression d'être devant un doc sur France 5 ou Arte. Seulement, après quelques jours passés là-bas... Quelque chose d'étrange a commencé à s'opérer. C'est difficilement explicable. Sur ses vidéos, j'avais l'impression que son visage se modifiait. D'abord sa bouche, puis un truc dans ses yeux, ensuite sa coupe de cheveux. Progressivement, son apparence s'éloignait de celle que j'avais connue avant son départ. C'était déroutant. Elle ne semblait rien remarquer de ce bouleversement. Environ quinze jours, elle ne s'était plus du tout la même femme. Le plus étrange, c'est qu'à mesure qu'elle se transformait, son visage me devenait de plus en plus familier. Un matin, j'ai ouvert sa dernière vidéo. Elle avait totalement disparu. À sa place, une autre femme s'exprimait face caméra au milieu des paysages. Je la connaissais. C'était Oslo. Qu'est-ce qu'elle foutait là, elle, à réapparaître d'un coup sur mon écran ? C'est pas comme si j'avais pas mis des années pour l'oublier. Peut-être tout simplement que j'étais devenu dingue. J'ai remonté le fil de discussion WhatsApp des jours précédents. Oslo était désormais présente sur toutes les vidéos. La même voix, les mêmes mimiques, sa gestuelle. Tout pareil comme à l'époque, avant qu'elle ne s'éclipse pour plus jamais donner de nouvelles. Je devais être fatigué. C'est du moins ce que je me suis dit sur le moment. La nuit d'après. Il était 3h30 quand mon téléphone s'est mis à vibrer. À cette heure-là, qui pouvait tenter de m'appeler ? Là ? Sur l'écran rétro-éclairé, le prénom d'Oslo est apparu. Avec Doulie, on avait quitté la brasserie. Il faisait bon, on s'était mis à marcher dans le quartier.

  • Speaker #2

    J'avais été à Barcelone.

  • Speaker #1

    Je sais, pendant combien d'années ?

  • Speaker #2

    Huit ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous êtes partie faire pendant huit ans ?

  • Speaker #2

    À la base, je voulais voir du pays et surtout arrêter de travailler la nuit.

  • Speaker #1

    Vous avez fait pas mal de petits boulots ?

  • Speaker #2

    Ouais. Par là ? Allez.

  • Speaker #1

    Quel petit boulot qui va laisser le meilleur souvenir, vous ?

  • Speaker #2

    J'ai adoré travailler la nuit, en vrai. C'était un peu la fête tous les jours, même si c'est des boulots très durs. C'était très chouette, mais on bossait de 19h à 7h du matin, 7 jours sur 7.

  • Speaker #1

    Tu étais quoi ?

  • Speaker #2

    J'ai un peu fait tous les métiers là-bas. J'étais au vestiaire au premier, et après j'avais 17 ans. Et après, je suis passée barman.

  • Speaker #1

    C'est stratégique le vestiaire. C'est très stratégique.

  • Speaker #2

    C'est très stratégique, il faut se faufiler. C'est mieux d'être petit quand on fait le vestiaire. Enfin, ça dépend des endroits. Mais disons que dans les endroits où j'ai travaillé, dans des cales à bateau. J'ai fait le vestiaire dans pas mal d'endroits à Paris.

  • Speaker #1

    Donc ça, c'était les meilleurs souvenirs ? Le plus mauvais ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Je crois que vendeuse de fringues, ça ne m'a pas passionnée. Alors que j'adore les fringues, tu vois. Moi, tu me dirais, je m'éclatais quand même. Mais je me faisais un peu chier. En fait, je n'aime pas avoir un patron. Donc la nuit, ton patron, il picole, il s'en fout. quand même un peu de chill quoi tu vois alors que dans un magasin de fringues bah tu vois t'as des horaires bah très tôt déjà je déteste le matin et puis t'as un chef qui veut qu'il ait du rendement quoi moi ça je suis pas très compète j'aime pas la compète j'aime pas tu sais il faisait des concours du meilleur vendeur je déteste ça je préfère laisser gagner les autres et montrer que j'en ai rien à foutre parce que J'aime pas ce que ça véhicule. et moi avoir la paix quoi.

  • Speaker #1

    Et vous me dites ça alors vous travaillez dans le show business, dans l'industrie du spectacle.

  • Speaker #2

    Je t'aime mais...

  • Speaker #1

    C'est friand de lit les humoristes entre eux ou on se tire la bourre quand même ?

  • Speaker #2

    Non, moi je trouve que... Non, moi je trouve qu'on s'en sort plutôt pas mal. Après je sais que je suis pas compétitrice là-dedans et je sais que ça peut me porter préjudice parce que je sais pas aller dans des trucs par intérêt. Je sais pas aller demander. En général dans toutes les soirées. Tu me verras discuter en général avec les mecs de la sécu ou le mec au bar. Mais c'est rarement les personnes qui vont me donner le premier rôle.

  • Speaker #1

    Donc là, on est ce soir à Belleville, sur un banc public, entre des sanisettes, des dames qui vont de leur corps, un camion poubelle qui est en train de faire...

  • Speaker #2

    C'est un peu l'histoire de ma vie.

  • Speaker #1

    J'ai lu une interview de vous, vous disiez, je descendais dans la rue, je m'asseyais sur un banc et des inconnus m'ont raconté leurs histoires, leurs problèmes.

  • Speaker #2

    Enfin non, je ne m'asseyais pas sur des bancs en attendant des gens qui venaient me raconter.

  • Speaker #1

    Ou ailleurs, disons.

  • Speaker #2

    Non, non, je pense que cette interview a été très...

  • Speaker #1

    Je l'ai confondue avec Anne Roumanoff, pardonnez-moi, désolé.

  • Speaker #2

    Non, je m'asseyais beaucoup avec les mecs qui vivaient dans la rue, je discutais des heures avec eux. Mais sinon, oui, il y avait ce phénomène qui faisait que pendant longtemps... Des gens que je croisais au boulot ou quoi, on s'échangeait les numéros, parce qu'il y avait une petite connexion, mais amicale, mais si tu veux pas plus que ça. Et ces gens m'appelaient pour me raconter des problèmes existentiels.

  • Speaker #1

    Mais des problèmes comme quoi ? Des problèmes de couple, des problèmes d'argent ?

  • Speaker #2

    Des problèmes plus profonds que ça, des problèmes de dépression, d'envie de suicide.

  • Speaker #1

    Et ils disaient que vous étiez la bonne personne pour éviter le suicide.

  • Speaker #2

    Oui, apparemment.

  • Speaker #1

    Donc vous avez sauvé pas mal de vies.

  • Speaker #2

    Oui, je crois.

  • Speaker #1

    En étant à l'écoute.

  • Speaker #2

    Oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Dans une de ses interviews, vous avez parlé d'un gars qui s'appelait Momo.

  • Speaker #2

    Oui, Momo. C'est un mec qui habitait dans la rue. Enfin, qui habitait. Je l'ai rencontré sur le premier jour de rue. Et il était très touchant. Parce qu'il avait perdu sa femme. Enfin, sa femme l'avait larguée. Il avait perdu son boulot.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il avait fait ? Il a gringolé ?

  • Speaker #2

    Je ne sais plus du tout l'histoire dans son intégralité. Mais en tout cas, je l'ai vu moi, lui, dégringoler. Ça abîme la rue. Ça abîme très rapidement. Je pense que même pas si une semaine dans la rue, t'aurais pu avoir une gueule.

  • Speaker #1

    Vous, c'est l'époque où vous étiez émancipée. Vous étiez partie de chez vos parents à 14 ans. Vous aviez votre petit appartement. Vous faisiez votre vie.

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous l'avez dit sciemment, je vais rencontrer des gens à la marge. Ou c'est les gens à la marge qui sont venus vers vous ?

  • Speaker #2

    Non, c'est juste que je pense qu'on se faisait un petit sourire et puis qu'à un moment donné, on se mettait à discuter, tu vois. Tu les croises tous les soirs, tous les matins. Il y a un eye contact. Il y a un lien qui se crée, quoi.

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il est devenu quoi, Momo ?

  • Speaker #2

    Je pense qu'il est mort, Momo. Je doute qu'il ait survécu à tout ça, parce qu'à la fin, il n'allait pas bien du tout. En quoi ? En 3-4 ans. Tu sais que j'ai voulu faire, pendant le confinement... Assitant social ? Mais non, je voulais faire SOS à détresse amitié, là, tu vois. Le truc où les gens t'appellent, parce que moi je suis insomniaque. Je me disais, bon, les gens ne font rien de la journée, alors j'écrivais un peu des blagues, tu vois. Mais du coup, je me disais la nuit. Je pourrais faire ça. J'ai l'impression qu'il fallait faire tout un entretien, répondre à des questionnaires.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous diriez, vous, si vous aviez été dans cette configuration de répondre à des gens qui sont désespérés au-delà de toute attente, et qui vous disent...

  • Speaker #2

    Moi, je leur demanderais s'ils ont un rêve et de me parler de leur rêve. Tu vois, il faut se raccrocher à des trucs positifs et à des projections sur l'avenir. Parce qu'en vrai, quand t'es pas bien, t'as juste envie que ça s'arrête. Et tu ne vois pas au-delà de la situation du présent. Donc du coup, je pense qu'il faut arriver à se projeter sur des trucs positifs de l'avenir.

  • Speaker #1

    Oui, vous êtes arrivé de vous dire, si je ne suis pas là demain, ce n'est pas grave.

  • Speaker #2

    Bien évidemment, mais 150 fois. Mais encore il y a une semaine. Enfin, il y a même trois jours. Moi, ça m'arrive souvent d'être à un balcon et de regarder en bas et de me dire, oui, bon, pourquoi pas.

  • Speaker #1

    Mais vous avez un traitement pour ça.

  • Speaker #2

    Non, mais je crois que c'est assez sain. Je ne sais plus, quelqu'un m'avait dit que c'était assez sain de penser au suicide. Il est toujours là. Toujours de ce monde. Il y avait eu des études de fête. Tu n'as jamais regardé le métro arriver ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je ne pourrais pas pousser cette personne devant pour prendre ma place tout à l'heure ?

  • Speaker #2

    C'est un putain de psychopathe. Voilà ce que t'es.

  • Speaker #1

    Vous faites quoi la nuit habituellement, quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Je fais de la merde. Tu vois, je scrolle sur les réseaux, je regarde des conneries dont je ne me souviens pas deux minutes après.

  • Speaker #1

    Mais jusqu'à quelle heure ?

  • Speaker #2

    Ça peut être loin.

  • Speaker #1

    Dormir vraiment pas ?

  • Speaker #2

    J'ai du mal, j'ai vraiment du mal à m'endormir. Si tu ne me donnes rien du tout, pas de cachet, pas de CBD, rien, je ne dors pas avant 6h du matin.

  • Speaker #1

    Il y a quelque chose qui me déprime énormément, surtout à cette saison, c'est quand tu as... 5, 5h30, on commence à entendre le chant des oiseaux, on n'est toujours pas endormis.

  • Speaker #2

    C'est une horreur, je déteste les oiseaux, j'ai envie de les buter.

  • Speaker #1

    Si vous ne dormez pas, vous avez beaucoup de difficultés. Depuis quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Depuis toujours. Depuis toujours moi aussi. Jamais dormi.

  • Speaker #1

    Les bainsos, les bainsos de diazépine, c'est la seule drogue que j'ai connu. Ah oui, oui. Et j'adorais ça.

  • Speaker #2

    Ben oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Non mais j'aimais bien le moment avant, vous savez, j'en prenais un et je me mettais à appeler des gens, souvent des filles.

  • Speaker #2

    Tu prenais quoi ? Tu prenais pas du Seresta ? Je prenais du Stilnok.

  • Speaker #1

    J'avais un médecin.

  • Speaker #2

    Ça donne la tchatche, le synox ?

  • Speaker #1

    Non, c'était pas la tchatche.

  • Speaker #2

    Mais t'étais sous,

  • Speaker #1

    quoi. La discussion glissait un peu. Et j'avais eu l'angoisse d'appeler ma grand-mère. Parce que le lendemain, je regardais qui j'avais appelé. J'ai dit, pourquoi je l'ai appelée à cette heure-là ?

  • Speaker #2

    T'avais peur d'avoir chiné ta grand-mère ?

  • Speaker #1

    Et j'ai arrêté pour ça. Ah oui ?

  • Speaker #2

    Ça te sortait de ton contrôle, quoi. T'es contrôle fric ?

  • Speaker #1

    Je ?

  • Speaker #2

    T'es contrôle fric toi ?

  • Speaker #1

    Contrôle fric ?

  • Speaker #2

    Contrôle fric.

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #2

    Ça veut dire genre, t'aimes bien tout contrôler.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez pris longtemps, vous, des bains de jour ?

  • Speaker #2

    Moi, je continue à en prendre, je prends l'hexanaque.

  • Speaker #1

    Et alors, vous appelez des gens quand...

  • Speaker #2

    Non, pas du tout.

  • Speaker #1

    Vous n'avez jamais appelé des gens pendant que...

  • Speaker #2

    Je sais que... Je crois qu'à mes 22 ans, j'ai appelé la dernière personne sous l'emprise de l'alcool. Genre, j'étais bourrée en soirée, et j'ai appelé, pas un ex, mais un mec avec qui c'était en train de se finir. Je l'ai appelé pour la énième fois, parce que ça m'était déjà arrivé plein de fois, d'appeler pour le coup des ex, un ex en particulier. Et je me souviens, je revoyais mon portail, je me disais, putain, on a parlé deux heures, et je me disais, mais je ne me souviendrai de rien de ce qu'on avait dit. Et ça a été la fois trop, je me souviens, j'avais 22 piges, j'étais au Canary, je crois. Et je me suis dit, plus jamais, jamais, jamais, je n'appellerai. je n'utiliserai mon téléphone quand je suis bourrée ou dans un état de conscience modifié.

  • Speaker #1

    Vous êtes tenue à cette promesse.

  • Speaker #2

    Je suis tenue à cette promesse, c'est-à-dire que mon cerveau a été reprogrammé pour ne jamais appeler qui que ce soit quand je ne suis plus moi-même. À 100%. Donc du coup, ouais, je ne vais pas arrêter le Xernax.

  • Speaker #1

    Vous aimez faire des trucs inutiles dans la vie ?

  • Speaker #2

    Ouais, moi je fais souvent des trucs inutiles. J'ai une idée.

  • Speaker #1

    « Un taxi. »

  • Speaker #2

    « Ah bon ? » « Ouais. »

  • Speaker #0

    Ça me fait bizarre d'être dehors à cette heure-là. Ces derniers temps, mes soirées, je les avais passées enfermées dans un studio de radio, au septième étage d'une roue de hamster posée à plat. à l'ouest de la ville. Durant deux heures quotidiennement, j'écoutais des gens au téléphone me raconter leur vie. Ça devait être la veille avant que mon émission s'arrête. Marie-Lou, 12 ans, bientôt 13, venait de débarquer sur l'antenne. Huit mois déjà qu'elle écoutait l'émission depuis qu'un jour, zappant la FM, elle était tombée dessus par hasard. Désormais, la nuit tombée, elle s'abreuvait des histoires des autres avant de fermer les yeux et s'endormir. Marie-Lou. déléguée de classe de cinquième, avait le tempérament affirmé d'une gamine qui sait qu'on doit attendre quelque chose de la vie si on veut que ça arrive vraiment. Elle, plus tard, elle aimerait bien être journaliste, politique ou judiciaire. Elle hésitait encore. Bolubile, authentique surtout. Depuis quelques minutes qu'elle avait commencé à parler, Marie-Lou, moi, j'étais retourné dans ma chambre d'ado. assis sur mon lit une place. Je patientais, fébrile. Depuis de longues minutes déjà, j'étais accroché au téléphone. Ce téléphone fixe, préhistorique, qu'avaient mes parents quand j'étais gosse. J'avais tiré des kilomètres de câble jusqu'à ma piaule. Refermer la porte pour pas les réveiller. Je m'en souviens de cette nuit-là, et comme si c'était il y a une heure. J'attendais mon tour, fixant l'affiche accrochée au mur au-dessus de mon lit. Mad Max, un dit plongiligne, combinaison de cuir et casque, brandissant arme à feu sur un bolide noir fonçant toute allure dans ma direction. À l'horloge de mon radio-réveil, déjà minuit passé, le lendemain à huit heures, j'avais cours d'histoire avec M. Aubert. Il y aurait un terreau écrit sur la Première Guerre mondiale. Mais je m'en foutais. Demain, c'était loin. L'important ? Qu'est-ce qui allait se passer dans les prochaines minutes ? Bientôt, ce serait à moi. Faudrait que je sois bon. Quand le disque à la radio fut terminé, dans le combiné téléphonique, j'ai entendu une voix qui s'adressait à moi. Cette même voix que j'écoutais à la radio depuis des mois, chaque soir, dans l'obscurité, venait de me poser une question. « T'as quel âge ? Tu t'appelles comment ? » J'ai pris une grande respiration. Et mes yeux plantés dans ceux de Mad Max, j'ai dit... Moi, je m'appelle Johan. J'ai 12 ans. Avec Doulie, on a pris un taxi. Direction le centre de la ville.

  • Speaker #2

    C'est quoi d'autre que métier ?

  • Speaker #1

    Le problème, c'est que je n'ai jamais fait de métier, jamais fait que de la radio.

  • Speaker #2

    Toujours fait que de la radio.

  • Speaker #1

    Ce qui n'est pas un métier en soi.

  • Speaker #2

    Ben si, attends.

  • Speaker #1

    Non, non, non.

  • Speaker #2

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Vous faites un vrai métier ?

  • Speaker #2

    Ben ouais, sinon... C'est des métiers, ouais. C'est des vrais métiers. J'ai bien vu la gueule de mes emplois du temps, j'estime que c'est un vrai métier, oui.

  • Speaker #1

    Vous travaillez beaucoup ?

  • Speaker #2

    Je travaille énormément.

  • Speaker #1

    Vous êtes fatiguée en ce moment ?

  • Speaker #2

    Très.

  • Speaker #0

    Ça ne se voit pas.

  • Speaker #2

    C'est gentil.

  • Speaker #0

    Enfin, ça ne s'entend pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est dégueulasse.

  • Speaker #1

    Mais ça n'a jamais aussi bien marché pour vous,

  • Speaker #0

    là ?

  • Speaker #2

    Je ne me rends pas vraiment compte, en fait. Oui, ça marche bien.

  • Speaker #1

    Il y a un indice pour savoir.

  • Speaker #2

    Ah ouais ? C'est vrai ?

  • Speaker #1

    Dans quelques jours, on va déclarer ses impôts.

  • Speaker #2

    Ah ouais, ça c'est une catastrophe ça. C'est dégueulasse, parce que moi je suis dans une espèce de marge où en fait je suis dans la tranche la plus haute de ma catégorie.

  • Speaker #0

    Enfin tu vois ce que je veux dire, moi j'y comprends rien à ces conneries mais si tu veux en fait je paye beaucoup trop par rapport à ce que je gagne quoi. En fait c'est juste...

  • Speaker #1

    Donc vous payez trop d'impôts quoi ?

  • Speaker #0

    Un peu trop ouais par rapport à ce que je gagne ouais.

  • Speaker #1

    Vous êtes avec une bande du maris de gauche.

  • Speaker #0

    Ouais mais moi je suis pas politisée tu sais.

  • Speaker #1

    C'est important pour vous l'argent ?

  • Speaker #0

    Non, c'est important de pas se prendre la tête mais j'ai pas de... j'attache pas plus d'importance que ça. D'ailleurs si tu vois la gueule des mecs avec qui je suis... Tu comprendras que je n'y attache aucune importance.

  • Speaker #1

    Vous en faites quoi alors ?

  • Speaker #0

    J'aide beaucoup des gens dans ma famille. Et puis, quand je peux inviter des potes, ça me fait plaisir.

  • Speaker #1

    Vous êtes économe ?

  • Speaker #0

    Non, pas du tout. Je suis un panier percé, c'est une catastrophe.

  • Speaker #1

    Vous n'avez pas l'angoisse de ce qui va se passer demain ?

  • Speaker #0

    Oui, je l'ai l'angoisse, mais comme je n'ai vécu avec rien, du coup, je n'ai juste pas envie de revivre avec rien. Mais je sais que c'est possible de survivre, en tout cas.

  • Speaker #1

    Comment on vit ? Avec rien, justement ?

  • Speaker #0

    On survit. Il y a des gens qui n'y arrivent pas. Malheureusement. Mais parce que je pense que quand tu as perdu le moral de tout, tu es un peu... Quand tu n'as vraiment pas le moral... C'est pour ça qu'il y a des gens qui jugent beaucoup, des gens qui ne s'en sortent pas. Mais je crois que ces gens-là n'ont jamais été dans ces situations. Ils pensent avoir galéré un peu parce que leur père ou leur mère a arrêté de leur donner de l'argent de poche ou j'en sais rien. Et ils se disent qu'ils ont vécu la galère. Mais la galère, c'est tout mélangé, c'est tout en même temps. C'est-à-dire que tu n'as pas le moral, tu n'as pas d'oseille, tu n'as pas d'appart, tu n'as rien, tu n'as pas d'amis. Je pense que les gens qui jugent, ils ne se sont jamais retrouvés confrontés à cette situation. d'avoir rien, pas une main tendue. Là, du coup, va toi trouver l'énergie à l'intérieur de toi pour t'en sortir. C'est pas forcément évident. Mais je crois que j'irai au soleil si je suis dans la merde, tu vois.

  • Speaker #1

    J'ai vu ces gens-là qui font la queue pour aller dans ce... C'est quoi ?

  • Speaker #0

    Moi, je fais pas la queue.

  • Speaker #1

    Vous faites jamais la queue, vous ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Vous passez devant les gens ?

  • Speaker #0

    Non, c'est pas ça. Je dis que je fais pas la queue. C'est-à-dire que j'ai jamais fait la queue. S'il y a la queue, ça me saoule. Même 10 minutes, ça me saoule de faire une queue. Je vais dans un autre endroit.

  • Speaker #1

    Vous avez vu ce que c'est comme un resto ? Comment ils appellent ces trucs-là ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est des plats en sauce, des plats traditionnels, avec des toutes petites portions. Ce qui fait le bouillon.

  • Speaker #0

    Oui, je sais, ça fait beaucoup la queue au bouillon.

  • Speaker #1

    Truc bobo par excellence.

  • Speaker #0

    Je n'y suis jamais allée, parce qu'il y a la queue.

  • Speaker #1

    Parce qu'il y a la queue ?

  • Speaker #0

    Pour manger un oeuf mimosa, ça ne m'intéresse pas.

  • Speaker #1

    Il y a vraiment une très très longue...

  • Speaker #0

    C'est surtout qu'il y a de la bouffe à peu près à tous les 3 mètres.

  • Speaker #1

    Vous ferez ça toute votre vie, vous pensez ?

  • Speaker #0

    Oui, je pense. Je me vois pas... J'ai quand même fait pas mal d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Mais dans votre spectacle, il y a beaucoup de vous, beaucoup de votre vie.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous avez l'angoisse de vous dire qu'est-ce que je vais raconter dans le deuxième, le troisième, le quatrième ?

  • Speaker #0

    Là, là, j'ai plus de spectacle. Dans deux mois, j'ai plus de spectacle. Donc non, j'ai jamais l'angoisse. Enfin, j'ai l'angoisse parce qu'il faut que je réécrive des trucs très drôles, mais par contre, en termes de matière. Je n'ai pas de manque de matière à raconter. Après, il faut savoir les mettre en blague et que ça fasse un bon spectacle. Mais par contre, en termes d'inspiration, de trucs à raconter, non, ce n'est pas un gros souci pour moi.

  • Speaker #1

    Ça vous arrive d'être sur scène certains soirs et votre tête n'est pas là ?

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Donc vous déroulez en automatique ?

  • Speaker #0

    Non, c'est des moments, ce n'est pas surtout le spectacle quand même.

  • Speaker #1

    Ça peut durer combien de temps ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, c'est un tunnel. Tu ne veux pas savoir combien de temps il a duré.

  • Speaker #1

    Donc là, les gens payent pour voir un robot dévier du texte.

  • Speaker #0

    Mais pas du tout. Ça peut durer une minute. Une minute, tout d'un coup, je ne sais pas, tu penses à un truc. Moi, ça m'est arrivé de perdre un ami très proche, par exemple, une heure avant le spectacle. Bon, ben, j'ai du mal à être concentrée dans le spectacle. Si tu veux, j'étais dans un tunnel de lui. C'est compliqué d'être tout le temps à 100%. Merci. Focus quand dans ta vie perso il t'arrive des trucs compliqués à gérer. C'est dur de mettre tout entre parenthèses, tout ça parce que t'es en train de bosser. T'effaces pas tout ce que tu fais ou tout ce que tu vis dans ta vie.

  • Speaker #1

    La scène ça reste un endroit comme n'importe quel autre endroit de la vie ?

  • Speaker #0

    C'est un endroit où je suis bien mais je suis pas sûre que tu puisses contrôler ton cerveau à ce point là. J'aimerais bien mais il fait ce qu'il veut. Il est indépendant. Il vit sa vie. Il vit sa vie.

  • Speaker #1

    Il vit trop sa vie, pour toi, votre cerveau ?

  • Speaker #0

    Oui, un peu trop. Moi, j'aimerais bien qu'il y ait un truc pour le débrancher. Je pense que les insomniaques moulinent trop, qui réfléchissent trop. C'est souvent ton cerveau qui fait que tu n'arrives pas à te relaxer.

  • Speaker #1

    Vous savez où on va ? Non. On va dans un endroit où les gens payent le soir pour s'enfermer dans un endroit et se vider la tête.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Mais c'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que ça peut être ce genre de choses ?

  • Speaker #0

    Une boîte de nuit ?

  • Speaker #1

    On se vide vraiment la tête dans une boîte de nuit ?

  • Speaker #0

    Bah si tu picole et que tu danses, ouais. Même sans picole d'ailleurs. Danser, ça vide la tête. Chanter aussi. T'as déjà chanté ?

  • Speaker #1

    Ça m'arrive, oui.

  • Speaker #0

    Mais tout seul ?

  • Speaker #1

    Chez moi.

  • Speaker #0

    Et t'aimes bien ça ?

  • Speaker #1

    Quand j'écoute France Info, pour ne pas entendre toutes les infos qu'il y a justement.

  • Speaker #0

    Ah oui ? Tu mets un truc et tu chantes par dessus pour ne pas le mettre ?

  • Speaker #1

    Pour ne pas entendre, oui. Ah oui, c'est vrai, c'est une ligne. Je vous ai dit, je ne suis pas très pragmatique. Tout ce qui est pratique me rebute.

  • Speaker #0

    Ah oui, je vois ça. Et vous,

  • Speaker #1

    vous êtes très pratico-pratique.

  • Speaker #0

    Non, j'ai appris à me démerder, quoi. Oui, on me démerde aussi.

  • Speaker #1

    Regardez, on a commandé un Uber, on arrive dans un endroit.

  • Speaker #0

    Je suis très impressionnée. Oui. C'est là ? Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est là ? Ah oui, d'accord, ok. Eh bien, je vous remercie. Merci à vous.

  • Speaker #0

    Ça me donne faim.

  • Speaker #1

    Vous voulez manger un truc ?

  • Speaker #0

    J'ai très faim.

  • Speaker #1

    Je crois que c'est là. Bonsoir.

  • Speaker #0

    Bonsoir. Ah, Fury Room.

  • Speaker #1

    Vous connaissez ce truc-là ?

  • Speaker #0

    C'est un truc où tu défonces des trucs.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en fait, quelle utilité ça peut avoir, ça, dans la vraie vie ?

  • Speaker #0

    Je n'en sais rien, il faut être énervé, quoi.

  • Speaker #1

    Pensez.

  • Speaker #0

    On a toute une rage à l'intérieur. Non, tu n'as pas de rage à l'intérieur ? C'est... Des gens qui t'ont fait du mal.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est une bonne idée ça. Donner des prénoms à des objets et ensuite s'occuper d'eux.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez beaucoup des rancœurs ?

  • Speaker #0

    Oui, j'en ai pas mal. Ecoutez,

  • Speaker #1

    rentrez, je vous en prie.

  • Speaker #0

    Après vous. Allez.

  • Speaker #1

    Bonsoir. Johan, à réserver. Alors expliquez-nous...

  • Speaker #0

    Ah mais faut mettre des combis et tout ?

  • Speaker #1

    Ouais c'est exactement ça, on va pouvoir vous équiper.

  • Speaker #0

    Putain c'est pas la force.

  • Speaker #1

    On est obligé de mettre des combis ? Ouais. Franchement ouais bah... Le but c'est de faire un peu orange mécanique. Habillez-nous.

  • Speaker #0

    J'ai pas envie d'être là,

  • Speaker #1

    c'est vraiment pour toi que je fais ça ? Pourquoi c'est dit... S'il y a un problème,

  • Speaker #0

    parce que...

  • Speaker #1

    Vous signez sans regarder le truc. Moi je m'en fous.

  • Speaker #0

    Non ? Hop, très bien. C'est vous ?

  • Speaker #1

    C'est ça y est on...

  • Speaker #0

    Duri et Johan c'est ça Johan ? courage on doit enlever les manteaux et tout merci il faut changer de chaussure aussi ?

  • Speaker #1

    avec une combinaison ça va être magnifique c'est assez saillant, c'est pour moi ?

  • Speaker #0

    c'est un jogging on va voir ça les ans dessous vous savez,

  • Speaker #1

    vous ne savez absolument pas ce qu'on a laissé en arrivant ici Ça, c'est quoi ? Ah oui, avec une visière, oui. C'est à ce point-là dangereux de rentrer dans ce genre de pièce ? Vous savez, on peut rentrer et ne rien casser. Je ne suis pas pour l'ultra-violence.

  • Speaker #0

    Tu ne vas pas avoir le choix, tu vas être obligé de bousiller des trucs.

  • Speaker #1

    C'est parti. Donc, on descend là dans la pièce en... C'est quoi, dans une cave ? D'accord. Donc, une fois à l'intérieur, on est enfermé. Ah, vous êtes enfermé, oui. D'accord. Vous êtes où, Doulie ? Ah oui, ils n'ont pas fait semblant de tout péter les précédents.

  • Speaker #0

    But the baseball must... pour utiliser pour casser. Quand vous voulez jeter des bouteilles. Il faut casser ça ? Oui. Ah, tu peux éclater la télé ? Oui, ça se peut. C'est vrai ? Ah oui.

  • Speaker #1

    Déjà, c'est plus intéressant.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci vraiment.

  • Speaker #0

    Tu expulses toute cette violence que tu entoures. Attends, j'ai envie d'éclater cette bouteille.

  • Speaker #1

    Ce n'est pas le problème du matériel.

  • Speaker #0

    On l'a lancé.

  • Speaker #1

    Regardez, le lard de bien péter une bouteille.

  • Speaker #0

    Allez !

  • Speaker #1

    Là vous pensez à quelqu'un ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Descendez bien votre visière.

  • Speaker #0

    C'est pas bien là.

  • Speaker #1

    C'est nul. Moi je serais vous, j'attaquerais directement l'écran. Elle n'a peut-être pas semblant. L'écran d'ordinateur aussi, vous lui avez donné un prénom mental ?

  • Speaker #0

    Non, là ça me fait un peu de soude.

  • Speaker #1

    C'est quoi c'est une bouteille ? C'est du petit chablis.

  • Speaker #0

    Le chablis il va sauter.

  • Speaker #1

    Hop là ! C'est que du matériel informatique.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est vraiment le moment d'utiliser un pied de biche.

  • Speaker #1

    La tour PC, j'ai l'impression qu'elle vous fait de l'œil.

  • Speaker #0

    Attends, j'entends la musique. Ça aide. T'écoutes quoi comme musique,

  • Speaker #1

    toi ? J'aurais bien aimé qu'on fasse ça sur du Luan. Non. Et ben voilà ! C'est vrai que ça fait du bien !

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on commence à y prendre goût ! Toi, comme tu n'es pas du tout violente, tu vas peut-être complètement briller !

  • Speaker #1

    Wow ! Regardez ! Ça, c'est du vino blanco !

  • Speaker #0

    Tu vas jouer gentil, là !

  • Speaker #1

    Alors attendez, la bouteille qu'on casse après une relation de vivant ?

  • Speaker #0

    Non ! Et on l'attend seulement ? Non, je vais faire une relation d'une nuit !

  • Speaker #1

    Tu vas l'attendre d'une nuit ?

  • Speaker #0

    D'une nuit ! Surtout que vous êtes vénère !

  • Speaker #1

    C'est la nuit et pas... Nuit c'est combien d'heures ?

  • Speaker #0

    8 heures ! C'est déjà 2 heures ? Ah ah ah ah ! Je vous dis, y'a aucune raison de faire ce que vous voulez ! Ah ah ah ! Laisse-moi ! Bah oui, je suis énervée !

  • Speaker #1

    Vous êtes rentré le bouchon dans le doigt.

  • Speaker #0

    C'est trop dur ça !

  • Speaker #1

    Ah vous reprenez le pied de biche ! Regarde, la tour d'ordinateur... Ça c'est acheté chez Sercouf à tous les coups !

  • Speaker #0

    Il faut que tu y ailles !

  • Speaker #1

    Je me demande combien de gens passent chaque nuit dans cet endroit pour péter des trucs comme on les pète là.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas. J'avais entendu parler, mais je n'y étais jamais allée.

  • Speaker #1

    Parce que vous n'êtes pas curieuse ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois que j'avais lu que tu ne pouvais péter qu'une télé ou quoi. Moi, je voulais tout bousiller.

  • Speaker #1

    Mais dans l'absolu, quel est l'objet qui n'est pas présent dans cette salle que vous adoreriez défoncer ?

  • Speaker #0

    Un mur.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que vous faites.

  • Speaker #0

    Je peux shooter le mannequin ? Comment ? A toi, un peu.

  • Speaker #1

    Faire des votes prog, Julie.

  • Speaker #0

    Faire mon choix. Je peux en faire.

  • Speaker #1

    Bon, écoutez, euh... Non, mais ne ramassez pas tout. Vous êtes très bien élevés, enfin.

  • Speaker #0

    Attention, la bouteille de champagne, grand potentiel.

  • Speaker #1

    brise bien une bouteille de champagne et la hynocène un petit potentiel pas mal recherche que j'ai vu on comprend pas ce qu'ils ont foutu aux jeux olympiques de paris vous aurez pu introduire cette mission on va pas la rialer d'où il est C'est super. Je crois que ça lui a plu. C'est vrai ? Oui, contre toute attente. Oui, c'est vrai. C'est vrai que ça fait réfléchir.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait du bien.

  • Speaker #1

    Vous dites ça parce que vous êtes bien élevée.

  • Speaker #0

    Oui. Non,

  • Speaker #1

    mais si, vous êtes super bien élevée. Qu'est-ce qui pourrait égaler la sensation qui a été la vôtre dans cette pièce, dans la vie saine et réelle ?

  • Speaker #0

    Un énervement. Mais ça m'est arrivé, moi j'étais un peu plus... Moi, j'ai du mal avec les objets. Tu sais, par exemple, si une télé ne marche pas.

  • Speaker #1

    Tu peux la casser ? Oui. Vous allez voir votre ordinateur différent après en avoir pété un comme vous l'avez fait il y a un instant.

  • Speaker #0

    Non. Mais des fois, j'ai envie de l'éclater.

  • Speaker #1

    Pourquoi vous ne le faites pas ? Je veux dire, vous avez les moyens, Manon.

  • Speaker #0

    Non, c'est un peu dommage, même si tu peux t'en racheter un. J'étais beaucoup plus agressive avec les objets quand j'avais vraiment pas d'oseille. C'est vrai ? J'ai pété des télés, ouais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que le programme vous plaisait pas ?

  • Speaker #0

    Non, parce qu'il marchait pas.

  • Speaker #1

    Et ça, quand vous étiez gamine ?

  • Speaker #0

    Non, non, dans... ado, quoi.

  • Speaker #1

    Il est déjà battu ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Par Françard Diz ou par Zénithu ?

  • Speaker #0

    Non, parce que des fois, je rêve de déclater la gueule à quelqu'un qui l'aurait cherché, quand même. Il y a des gens qui méritent qu'on leur éclate la gueule.

  • Speaker #1

    Dans votre vie, par le passé.

  • Speaker #0

    Oui. Oui, j'aimerais bien, tu vois, si je vois une embrouille arriver, pouvoir dégommer le gars qui fout la merde. Ça, ça me ferait un bien fou, mais je pense que je n'ai pas la force.

  • Speaker #1

    Vous prendriez le mec, un mec ou une fille ? Ça serait qui ?

  • Speaker #0

    Peu importe.

  • Speaker #1

    L'engendrer ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    oui. Vous prendriez la personne par le call-back ?

  • Speaker #0

    Je lui éclaterais la gueule vraiment. Ça dépend de ce qu'il est en train de faire. Si, par exemple...

  • Speaker #1

    Il fait tomber un papier gras par terre, par exemple, ça mérite.

  • Speaker #0

    Non, non.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il mériterait qu'il reçoive votre poing dans la figure ?

  • Speaker #0

    Un violon de meuf, tu lui dis, tu l'attrapes et tu le dégommes. Tu vois ? Là, c'est un gros kiff, quoi.

  • Speaker #1

    Il vous est arrivé, vous, de vous retrouver dans des situations où vous étiez impuissante et vous aviez justement la range en vous ?

  • Speaker #0

    Je me suis fait beaucoup agresser, mais je suis toujours sortie par la tchatche. Donc, je n'ai jamais eu à me battre. Mais j'ai cette rage en moi qui fait que je pense que si vraiment tu touches à quelqu'un que j'aime, je pense que je suis capable de... de t'éclater. Je pense que même si je n'ai pas la force pour, je pense que la force, elle se décuple quand tu es très, très, très énervé. Donc si on touche à quelqu'un que tu aimes, je pense que tu es capable de buter quelqu'un même s'il est plus grand que toi.

  • Speaker #1

    Ça pourrait vous faire peur. On se dit parfois, j'ai peur de passer à l'acte.

  • Speaker #0

    Si la personne mérite vraiment, c'est-à-dire que si quelqu'un a buté ma mère, par exemple, elle mérite de mourir. Donc elle mourra.

  • Speaker #1

    Nécessité fait loi. S'il y avait quelque chose d'injuste, de dramatique, vous pourriez justement aller...

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Quelles qu'en soient les conséquences après.

  • Speaker #0

    Oui. Je peux faire croupir en prison, mais je ne laisserai pas quelqu'un qui a tué quelqu'un que j'aime en vie, vivre sa vie.

  • Speaker #1

    Vous vous rendez compte qu'on est en train de dire tout ça, règlement de compte, justice soi-même, avec du bon reggae en fond sonore.

  • Speaker #0

    Ouais mais je déteste le reggae.

  • Speaker #1

    No woman, no cry.

  • Speaker #0

    J'aime pas le reggae.

  • Speaker #1

    Moi non plus je déteste ça, c'est un merdique. C'est vrai qu'on aurait pu péter des trucs sur du reggae.

  • Speaker #0

    Ouais ouais c'est vrai.

  • Speaker #1

    Vous, vous avez voulu la facilité du métal.

  • Speaker #0

    Mais c'est vrai que si tu m'avais mis du reggae je crois que j'aurais été encore plus énervée.

  • Speaker #1

    On aurait dû faire ça sur du reggae.

  • Speaker #0

    On s'en va ? Allez y alors.

  • Speaker #1

    « C'était vachement bien. Je vais recommander ça à ma mère. Elle en a besoin en ce moment. » Je ne saurais pas dire quand ça avait commencé. Les filles de cette ville s'étaient mises à porter des chaussettes blanches à l'intérieur de mon cassin aux semelles trop épaisses. Comme on compte les moutons avant de s'endormir, je tiens la comptabilité de celles que je croise sur mon chemin. Onze depuis le début de la soirée. Qui décide de ça ? La mode. Le même pouvoir de persuasion autoritaire qu'un cachet. glissé dans le verre d'une inconnue en boîte de nuit. Avec Doulie, on a quitté la Fury Room, rue Blondel. On vient de passer devant un monument en restauration. Enveloppé d'une bâche XXL, il exhibe une chanteuse qui fait la moue pour mieux vendre le sac à main qu'elle porte autour du bras. Si c'est à moi qu'on avait proposé la pub, combien d'années-lumière est-ce que je pourrais tenir avec tout ce fric-là, sans rien avoir à foutre, devant les vitrines d'un grand magasin ? Une famille de Roumains allongés sur des matelas ne dort pas encore. L'un des gamins rit devant une vidéo sur un smartphone. J'entends les sons d'un cartoon. On marche dans la rue tous les deux sans destination définie. Quelle conclusion on peut tirer de cette expérience ? Si expérience il y a.

  • Speaker #0

    La conclusion c'est que j'ai vu un peu de violence contre toi et que je suis assez contente. Parce que j'ai l'impression que ça t'a quand même un peu plu.

  • Speaker #1

    Je me suis aperçu que je pouvais y avoir du bad boy en moi.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est ça qui me plaît.

  • Speaker #1

    Vous avez remarqué que ce soir, cette nuit, contrairement à beaucoup de mes condisciples journalistes et animateurs, on n'a pas parlé de drogue avec vous.

  • Speaker #0

    C'est bien ça, ça me plaît.

  • Speaker #1

    Vous n'en avez pas marre d'ailleurs.

  • Speaker #0

    Je sais que ça a aidé beaucoup de gens, donc tant mieux. Parce que ça a aidé beaucoup de junkies à se dire qu'il y avait un après. Mais d'ailleurs, je ne l'ai même pas fait dans ce but-là. Je l'ai fait à la base pour désacraliser un peu la mauvaise image qu'on pouvait avoir des gens qui consommaient. Dans le sens où ce ne sont pas des gens à mépriser. C'est juste des gens qui ont bossé.

  • Speaker #1

    C'est toujours votre grand-mère, vous ?

  • Speaker #0

    Non, je l'aimais très fort.

  • Speaker #1

    C'était quel genre de fille, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    C'était une femme incroyable. Elle aurait pu avoir 25 ans quand elle avait 80 ans. Elle avait le cerveau de quelqu'un de 25 ans.

  • Speaker #1

    C'est elle qui vous a trouvé un médecin et qui vous a sorti de là ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Comment ça se fait que ce soit votre grand-mère qui vous a sorti ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, il y a ma mère aussi qui était dans le coup.

  • Speaker #1

    Pourquoi c'était une femme formidable, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    Parce qu'elle comprenait tout et elle était très éduquée. Mais elle s'en foutait. Je crois que c'était quelqu'un de très moderne pour sa génération.

  • Speaker #1

    Elle fait quoi de sa vie ?

  • Speaker #0

    C'est une très bonne question, ça. Putain, dans quoi elle a bossé ? Parce que moi, j'ai toujours connu à la retraite. Elle s'est beaucoup occupée de ses gamins, surtout, je crois. Elle en avait quatre, quand même. Mais on s'entendait très bien. Je regrette de ne pas avoir été à jeun quand elle est partie. Parce que moi, j'étais dans le dur quand elle est partie. Et franchement, ça m'aurait fait plaisir qu'elle voit tout ça. Parce qu'elle aurait aimé. En plus, j'adorais son rire. Et si j'avais entendu son rire dans la salle, je pense qu'elle aurait dit « Oh, quand même ! » sur certaines vannes.

  • Speaker #1

    Tu as vu où on est, là ?

  • Speaker #0

    On est dans une rue.

  • Speaker #1

    On est à un numéro de la rue la plus mythique de Paris.

  • Speaker #0

    Rue Saint-Denis.

  • Speaker #1

    Avec tous ses commerces de proximité.

  • Speaker #0

    Miss Bonbon, Le Mirage, Jorge. Love shop.

  • Speaker #1

    Love shop.

  • Speaker #0

    Tu vas des fois dans des love shop ?

  • Speaker #1

    Vous êtes déjà allé dans des love shop ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    C'est très longtemps que je ne suis pas rentré dans un...

  • Speaker #0

    C'est vrai ?

  • Speaker #1

    A quelle occasion vous êtes déjà rentré, vous, dans ce genre de truc ?

  • Speaker #0

    Pour acheter des trucs, quoi.

  • Speaker #1

    Oui, ça j'imagine.

  • Speaker #0

    Oui, oui, non, moi j'y vais, s'il faut, il y a les quoi. Mais c'est marrant d'y aller avec ton mec aussi. Tu passes devant un sex shop, tu y vas, ça attire l'œil. Tu veux aller au sex shop ?

  • Speaker #1

    Peut-être non, juste regarder la vitrine. Tu sais, moi, je suis un garçon très prune. Qu'est-ce qui vous fait marrer ?

  • Speaker #0

    C'est ce mot, prude.

  • Speaker #1

    Quoi ?

  • Speaker #0

    Ça ne me fait rien.

  • Speaker #1

    Ça pourrait être un titre pour votre prochain spectacle, prude ? Avec votre photo dessus,

  • Speaker #0

    ça serait cool. Tu vois, un petit gars de Tour Eiffel. Un souvenir inoubliable, tu vois ?

  • Speaker #1

    Tu as vu l'affiche en dessous ? Black Empire, une vraie lady doit savoir cacher son jeu.

  • Speaker #0

    C'est un rouge à lèvres vibromasseur.

  • Speaker #1

    On dirait ma belle-sœur.

  • Speaker #0

    T'as qu'à faire une photo. Comme ça, tu lui envoies. Tu lui dis tu m'avais caché ça ?

  • Speaker #1

    Non, je pense que ça va pas améliorer nos relations.

  • Speaker #0

    Non ? C'est déjà compliqué ?

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il y a qui derrière le rideau ?

  • Speaker #0

    L'homme de ma vie ?

  • Speaker #1

    Allez, on va voir. Allez, juste, on jette le museau.

  • Speaker #0

    Allez,

  • Speaker #1

    un rideau bleu. Quelle texture.

  • Speaker #0

    Il est en latex. Tu vois ? Il me soit. C'est dommage qu'il n'y ait pas de...

  • Speaker #1

    Il est phallus.

  • Speaker #0

    C'est dommage qu'il n'y ait pas de photo. Est-ce que tu te sens à l'aise ?

  • Speaker #1

    Ce qui est gênant, et c'est souvent aussi ça, peut-être dans les relations, c'est que ce qu'on imagine, ce qu'on projette avant de consommer est parfois plus fort que ce qu'on voit une fois qu'on rentre. Alors peut-être que je suis trop cérébrale.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est souvent ça.

  • Speaker #1

    Qu'il y a des menottes. Dès que vous voyez quelque chose, qu'est-ce que dans tous ces objets qui sont autour de nous, vous pourriez voir figurer sur votre cheminée, chez vous, dans votre appartement, salon, cuisine ?

  • Speaker #0

    Ah ben, je ne vais pas foutre ça sur une... J'ai une étagère, enfin. Ça,

  • Speaker #1

    c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est une laisse, chérie.

  • Speaker #1

    Il y a des affiches au plafond.

  • Speaker #0

    T'as un fouet. Pas très. Non.

  • Speaker #1

    Il y a des cagoules. Il y a toujours des cagoules. Cagoule résille.

  • Speaker #0

    Ça, ça peut être un peu sexy, tu vois, cette espèce d'ensemble avec des lanières en cuir.

  • Speaker #1

    La marque est jolie. Kalida.

  • Speaker #0

    Kalida. Est-ce que tu vois ça ? Ça tu vois tu pourrais essayer un jour, c'est des petits anneaux vibrants, bon c'est pas dingo.

  • Speaker #1

    Vous avez des mecs qui ont utilisé des trucs comme ça ?

  • Speaker #0

    Ouais, ça m'est... il y a longtemps j'ai utilisé ça.

  • Speaker #1

    Je trouve ça très propre pour un endroit...

  • Speaker #0

    Mais c'est... ça a toujours été un peu comme ça.

  • Speaker #1

    Ah il y a le rayon vidéo, lesbienne, solo nylon, fétiche.

  • Speaker #0

    Ah ouais mais là on est old school quoi, c'est des DVD carrément. Bah il est petit hein.

  • Speaker #1

    C'est marrant.

  • Speaker #0

    Alors ça tu vois, ça je pourrais pas par contre.

  • Speaker #1

    De quoi ?

  • Speaker #0

    Ben un gueux de ceinture, c'est-à-dire que là ça veut dire que techniquement... Non.

  • Speaker #1

    L'emballage a l'air heureuse.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, mais... Non, non, mais c'est pas mon délire.

  • Speaker #1

    J'observe que c'est quand même grandement vide, pourtant on est un vendredi soir.

  • Speaker #0

    Ouais, mais...

  • Speaker #1

    Et en revanche, les gels de lubrifiant, c'est à l'américaine, c'est des Ectolid. Soir.

  • Speaker #0

    Et là t'as du Popper, tu vois.

  • Speaker #1

    Vous êtes là depuis combien de temps ? Vous gérez le magasin depuis combien de temps ? Ah oui, pardon. D'accord. Bonne nuit. Ça vous fait marrer. Pensez de constater qu'on est rentrés et il n'y avait pas l'homme de votre vie.

  • Speaker #0

    C'était une cata. Il n'y avait vraiment qu'un mec et c'était le vendeur.

  • Speaker #1

    Que j'ai trouvé très prude.

  • Speaker #0

    Oui, lui aussi était très prude.

  • Speaker #1

    En fait, il a pensé que je lui brandissais un gomme miché.

  • Speaker #0

    Peut-être.

  • Speaker #1

    Comment vous imaginez, vous, dans 20 ans ?

  • Speaker #0

    Peut-être plus là.

  • Speaker #1

    Ça fait quoi ? Ça ne fait pas beaucoup si vous n'êtes plus là dans 20 ans.

  • Speaker #0

    Oui, mais je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas. J'espère être comblée de tout ce que j'avais envie de faire dans cette vie dans 20 ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que, avant de mourir, vous aimeriez absolument faire que vous n'avez pas encore fait ?

  • Speaker #0

    Il y a plein de trucs en fait. J'ai envie de passer mon permis bateau, savoir ce que c'est l'amour véritable, d'aimer et d'être aimé à la même puissance. Permis bateau parce que j'adorerais avoir mon permis moto.

  • Speaker #1

    Vous foutez dans la même phrase, le permis bateau et l'amour vrai.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Il n'y a qu'à Dubaï que les gens font des phrases comme ça.

  • Speaker #0

    Je suis peut-être un cerveau dubaïote, qu'est-ce que tu veux ? J'adorerais passer mon permis moto, mais j'ai peur de tuer des gens, donc non. Et... un voyage quoi. Visiter à peu près tous les pays que j'ai envie de voir dans ma vie. Ouais. Aimer la vie, être heureuse.

  • Speaker #1

    C'est difficile ça d'être heureuse. Ouais. Vous êtes heureuse aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Ça va, tu vois, il y a pire. Ça c'est pas une réponse. Mais je pense qu'il y a mieux. Ouais, mais franchement, ça va. Ça va, je peux pas me plaindre.

  • Speaker #1

    Alors qu'est-ce qui manque ? Le plus du plus, c'est l'amour ?

  • Speaker #0

    Ouais, je crois.

  • Speaker #1

    Vous accepteriez si on vous proposait de changer de cerveau ? On dirait, tu seras sûrement plus heureuse, mais on te change le cerveau. Ou on change des trucs comme ça, des connexions neuronales. Oui,

  • Speaker #0

    mais tu me donnes quoi comme cerveau à la place ?

  • Speaker #1

    Je connais un mec à courbe voix qui fait des trucs, un peu de mécanique, tout ça, enfin, il se démerdera. Je serais heureuse.

  • Speaker #0

    Mais je serais heureuse. Oui,

  • Speaker #1

    comme dans l'au-dessus d'un lit de coucou à la fin.

  • Speaker #0

    Non, j'ai trop bossé sur ce cerveau pour en changer.

  • Speaker #1

    Vous n'allez même pas aller voir un psy, vous appelez ça travailler.

  • Speaker #0

    Ben ouais, c'est l'école de la vie chérie. Nous sommes fraîchis de revenir à un stade genre où il y a plein de subtilités de la vie que je ne capte pas, tu vois.

  • Speaker #1

    Je l'avais dit tout à l'heure, il y a de grandes chances pour que quand on comprend beaucoup de choses, on soit moins heureux que ceux qui en comprennent moins.

  • Speaker #0

    Mais moi mon but c'est d'être heureuse avec ce cerveau. Tu crois que c'est impossible ?

  • Speaker #1

    Soit que la réponse est derrière le rideau du love and shop.

  • Speaker #0

    Ben ça va finir là, ça va se finir comme ça cette histoire.

  • Speaker #1

    J'ai reçu un SMS. C'est l'écrivain imaginaire. « Tu fais quoi, là ? J'ai un truc à fêter. Tu viens ? » À cette heure-là, je sais où il est. Au Master Poulet. Un euro le pilon, deux cinquante la cuisse avec sauce offerte Ausha, ouvert jusqu'à cinq heures du matin. Devant, toujours du monde qui attend. Des jeunes, majoritairement. Casquettes, sacoches, verres fumés. Tous patientent pour de la volaille frite. Dans la file d'attente, ça sent le faux poulet et la vraie weed. L'écrivain imaginaire est assis sur une chaise de jardin, sur le trottoir qui fait terrasse. Il mange son poulet. Rivé sur son smartphone, il regarde une chaîne info où les intervenants refont le monde en s'engueulant. C'est distrayant. Il suit ça comme ses parents regardaient au théâtre ce soir. « Je m'assois. » je demande. « Alors qu'est-ce qu'on fait ? T'as rencontré quelqu'un ? » Il hausse les épaules. « Tu comptes ? » il m'interroge. « Tu comptes faire quoi, toi, quand ça va être la fin du monde ? » Ces derniers temps, il a que ça à la bouche, la fin du monde. Ce serait sa revanche. Cette nuit, il en a encore contre ce vieil éditeur qui lui tourne autour depuis des mois. Il lui fait croire qu'il publiera son roman, alors que c'est tout autre chose chez lui qui l'intéresse. « C'est ces connards qui servent à rien dans leur bureau, là. Crois-moi bien qu'avec l'intelligence artificielle, bientôt, ils seront tous dehors. Et quand ils auront perdu leur job, on verra. » Ça lui fait marrer. Enfin, pas tout à fait. « Tu vois, pour vivre seul avec Quedal, il faut le mode d'emploi. Moi, je l'ai. » « Tu viens ? Je vais te montrer là où j'habite maintenant. » Nous voilà partis. Assis au fond d'un bus, on sort de la ville pour s'enfoncer en grande banlieue. Quand je repose le pied à terre, il est déjà quatre heures passées. Où est-ce qu'on est ? Où est-ce qu'on va ? Je sais pas. « Tu vas voir, c'est ouf ! » m'annonce l'écrivain dans un regain d'énergie. On passe devant des lotissements, des résidences. Aux façades, plus une lumière. Tout le monde qui dort. Les rues sont vides. Après dix minutes, comme ça, il s'arrête l'écrivain. « C'est là ! » qui me dit tout fier la gueule enfarinée. On est devant une barre d'immeubles désaffectée. Longs grillages qui courent devant. Un panneau dessus pour indiquer la destruction prochaine du HLM. Voilà qui soulève le grillage. Avance quelques mètres avant de se retourner vers moi. « Qu'est-ce que tu fous, putain ? Tu viens ? » Voilà ce qu'on est venu fêter. L'écrivain imaginaire mène désormais la grande vie d'un squatter. Au huitième et dernier étage, cloisons, appartements, tout a été préalablement détruit. Au sol, il reste encore des petits bouts de mur. Plusieurs centaines de mètres carrés pour lui tout seul, l'écrivain, avec vue panoramique sur la ville au loin. « S'emmerde pas ? » je l'entends qui me dit. « Qu'est-ce que t'en penses ? C'est pas mal, non ? C'est pas Stéphane Plaza qui m'aurait trouvé ça. On est seul. Tout en haut de cette barre HLM. Bientôt le jour qui va se lever. La vue est dingue. C'est beau, mais en même temps c'est comme si tout était bientôt fini. Comme si pour de bon on l'a répété cette fin du monde. Avant les autres. Juste pour prendre nos marques. S'il avait raison, l'écrivain. Si l'homme du futur, le vrai, celui qui survivra, c'était lui. Man Max au RSA. On l'a fait, Macrémaillère, ou pas ? De son sac à dos, il sort deux boîtes de Red Bull. En euphorie, le voilà qui gueule. « Santé ! » C'est la première fois que je le vois, l'écrivain, qui semble apaisé. À mon tour, je lève ma boîte d'énergie drink. Je regarde droit devant, comme on le fait pour un vœu le jour de l'an. « Bonne fin du monde à nous. »

  • Speaker #0

    Yann Roque

  • Speaker #1

    Rindu,

  • Speaker #0

    journal d'un insomniac. Vos oreilles s'égarent dans la nuit.

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Description

HEURE INDUE est de retour !

Heure Indue, journal d'un insomniaque : le road-trip nocturne dans la ville. 


HEURE INDUE, C'EST QUOI ?  

C’est l’histoire d’un type qui ne dort pas la nuit et emmène avec lui un compagnon de route d’un soir (artiste, auteur, politique …) vivre un road-trip dans Paris. 

Par sa poésie et sa forme intimiste, « Heure Indue » révèle les personnalités avec la nuit pour toile de fond. 

Porté par une narration à la première personne, Johann Roques embarque l’auditeur dans une grande virée au bout de la nuit.


JOHANN ROQUES, C'EST QUI ? 

Par le passé, vous êtes peut-être déjà tombé sur moi en écoutant la matinale de Radio Nova ou OUI-FM, Europe 1, RTL2, France Culture, et dernièrement "Les mots du soir" la libre antenne de France Bleu,

Ceinture 12ème Dan en insomnie, « Heure Indue » est le programme sur lequel j’aurais aimé pouvoir zapper tard la nuit à la radio. 

Ça n’existait pas, alors j’ai décidé de m’y coller…


Doully, compagne de route d’une nuit : 

Actrice, humoriste et standupeuse. 

Professionnellement, elle débute très jeune en exerçant des petits boulots dans le milieu de la nuit et du clubbing à Paris.

À cette époque, elle sombre dans l’addiction aux drogues dures. 

Après trois arrêts cardiaques suite à des overdoses, elle part en Israël pour suivre un programme de sevrage. 

Elle ira vivre ensuite à Barcelone plusieurs années. 

C’est en revenant à Paris qu’elle va commencer à jouer la comédie. 

À la radio, elle débute comme chroniqueuse sur Europe 1, puis France Inter dans l’équipe de Charline Vanhoenacker.  Désormais, elle est sur Radio Nova dans La Dernière avec Guillaume Meurice. 

À la télévision, c’est elle qui a repris le flambeau de Jules-Edouard Moustic à la présentation de l’émission satirique Groland Le Zapoï sur Canal Plus. 

 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    « Prends son numéro et appelle-le de ma part, c'est le meilleur » , avait-elle dit au sujet de ce médecin spécialiste du sommeil. Le sceptique, moi, j'avais épluché son compte Instagram qui compte plus de followers que j'en aurais jamais. Est-ce que c'était d'être passé à la télé qui lui avait rempli son cabinet pour les six prochains mois ? On n'allait pas être pressé pour décrocher un rendez-vous chez le docteur Sommeil. Mais j'y étais à présent. La salle d'attente, trois personnes assises sur des chaises en plexi bleu. Comme moi, sans doute, elles viennent m'endier quelques heures de sommeil en échange d'une consultation à tarif non conventionnel. Ça ne me ferait pas de mal de dormir un peu. Les derniers temps, j'avais repoussé jusqu'à l'absurde le moment de m'endormir. Une fois que je serais sorti de là, cette nuit, j'avais rendez-vous avec Dooley, comédienne, humoriste, stand-up-euse. Depuis le bout du couloir, une voix prononce mon nom. Je me lève et marche, direction le bureau du docteur Sommeil. Je rentre dans le bureau du tout-bip. Ses yeux sont rivés sur un écran d'ordinateur. Il m'annonce. « C'est pour ça que vous dormez pas. Il est là, votre problème. » Il tourne l'écran vers moi. Dessus, un graphique en dents de scie, mon cycle de sommeil enregistré deux semaines auparavant. Moi, je vois qu'une courbe au trait hystérique qui monte et descend continuellement. Je l'ai tout de suite prévenu. Hors de question que je ressorte de là avec une ordonnance pour des médocs. Stilnox, Imovan, Zolpidem. Tout le catalogue entier des somnifères, je l'ai déjà feuilleté et je ne le réouvrirai pas. Le docteur Sommeil est d'accord. Ces trucs-là, c'est jamais bon sur le long terme. Enfin, tout bip sérieux. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait vous convenir, m'a-t-il annoncé. Il m'a parlé d'une liste d'attente pour un protocole expérimental au Canada. Une nouvelle thérapie pour restaurer le sommeil en reconditionnant le cerveau grâce à l'intelligence artificielle. Trois à quatre séances, tout au plus, sous anesthésie générale. Des électrodes vissées au crâne pour envoyer du jus à plus ou moins vive intensité. Vous dormirez comme un bébé, après. M'a promis le docteur Sommeil, ses yeux pétillés comme le type qui voit s'approcher la fin du monde depuis la fenêtre de sa cuisine. Il m'a proposé d'envoyer mon dossier à Toronto. « Mon cycle de sommeil à l'agonie et moi, on pourrait intégrer le club très fermé des volontaires sélectionnés pour être cobayes. » « Hum, ouais, c'était pas sûr. » « Le cerveau, c'est quand même plus fragile qu'une machine à laver. Moins on y touche et mieux c'est, non ? » Il a souri. « Monsieur Rock, traverser la rue, c'est risqué aussi. Pourtant, on le fait bien tous les jours. » « À la tête que j'ai fait, il n'a pas insisté. » Ça semblait bien l'ennuyer de me laisser partir sans la moindre solution. Un tout bip qui passe à la télé. Je dois rester fidèle à son image de marque. Le docteur Sommeil s'est penché vers moi. Il a dit. Écoutez, pour ce mois-ci, je vais vous prescrire une boîte de Stilnox. Ce soir, j'avais donné rendez-vous à Dooley dans une brasserie. Je l'attendais.

  • Speaker #1

    Allô ? Vous êtes dans quel coin ? Comment ça en bas ? En bas d'où ? Ouais, je suis dans la brasserie. Ouais, exactement. Regardez, je tends la main. Je suis là. C'est bien. Bonjour. À la bise.

  • Speaker #2

    Bah ouais.

  • Speaker #1

    Vous en priez. Asseyez-vous.

  • Speaker #2

    Ça va bien ? Ça va, yo. Ouais. On peut se tutoyer ?

  • Speaker #1

    Alors on va faire ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    Mais toi tu me tutoies ?

  • Speaker #1

    Moi je ferai ce que je veux et vous,

  • Speaker #2

    vous allez faire un truc.

  • Speaker #1

    Vous allez faire absolument ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Comment s'est passée cette journée ?

  • Speaker #2

    Cette journée s'est passée. Je dois écrire des blagues, voilà. Je dois écrire des blagues et du coup j'hésite entre les sujets de blagues pour préparer d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Vous êtes en pleine tournée ?

  • Speaker #2

    Ouais, aussi. Demain je repars.

  • Speaker #1

    Vous serez où ?

  • Speaker #2

    À ma mère.

  • Speaker #1

    Vous savez où c'est ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais ça vous plaît ?

  • Speaker #2

    De tout ça ? C'est super de rencontrer des gens nouveaux. Par contre, c'est vrai qu'on n'a pas trop le temps de profiter.

  • Speaker #1

    Regardez-vous les avis du public une fois qu'ils sont venus à votre spectacle ?

  • Speaker #2

    Jamais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Je crois que je n'ai pas envie de savoir trop.

  • Speaker #1

    C'est qui la personne dont l'avis compte le plus alors ?

  • Speaker #2

    Ça dépend. En vrai, j'ai tellement d'amis que je crois que tous les avis comptent en fait.

  • Speaker #1

    Il y a des choses que vous avez changées grâce ou à cause de vos amis ?

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr. Heureusement qu'ils sont là. Parce que moi, je suis un peu souvent toute seule dans ma tête. Donc si... Je vais souvent du point A au point Z sans faire les autres lettres. Oui, il faut me déchiffrer.

  • Speaker #1

    Et vous, vous arrivez à déchiffrer facilement les gens ?

  • Speaker #2

    Je crois, oui, mais on peut toujours se planter.

  • Speaker #1

    Par exemple, regardez. Moi, ce que j'aime ici, dans cette brasserie, c'est qu'on a l'impression d'être derrière la vitre d'un aquarium. Vous les observez, vous, les gens ?

  • Speaker #2

    Alors moi, déjà, je ne vois rien de loin.

  • Speaker #0

    Là,

  • Speaker #1

    on est très loin. Regardez, à 15 centimètres, il y a un mec qui parle avec sa copine.

  • Speaker #2

    En fait, je n'aime pas trop regarder les gens. Comme j'ai pris l'habitude de ne rien voir, j'ai pris l'habitude de ne pas regarder les gens. Du coup, peut-être que j'ai raté l'homme de ma vie comme ça. Peut-être qu'il y a quelqu'un qui m'a regardé un jour et que je l'ai regardé dans les yeux sans le voir.

  • Speaker #1

    Si c'était l'homme de votre vie, il serait venu quand même, non ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, peut-être qu'il était timide.

  • Speaker #1

    Ah, et vous, vous êtes timide ?

  • Speaker #2

    Oui, je suis hyper timide. On n'a pas l'impression que ça, mais je suis timide. Par exemple, si tu m'invites à une soirée et que tu me laisses dans le salon alors que je ne connais personne...

  • Speaker #1

    Il faut que les gens viennent vers vous.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais ça doit être compliqué, ça, parce que maintenant que vous avez la petite notoriété qui est arrivée, les gens peuvent venir vers vous pour de mauvaises raisons.

  • Speaker #2

    Oui, mais en vrai, c'est plutôt l'inverse dans mon cas. C'est-à-dire que, par exemple, je trouve qu'on rencontre moins de gens quand on a ça, moins facilement.

  • Speaker #1

    Parce que les gens qui ont la notoriété... Vous en parlez comme d'une maladie.

  • Speaker #2

    Non, mais ça l'est un peu.

  • Speaker #1

    Ça fait combien de temps que vous avez fait ça ? Ça fait combien de temps que vous avez réalisé que vous aviez ça ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Depuis le confinement, tu vois, un truc comme ça. Mais si tu veux, quand tu as cette maladie, les gens osent moins venir te parler spontanément. Même si tu rencontres quelqu'un sur une appli de rencontre ou n'importe quoi, il va te parler normalement. Une fois qu'il s'est quitté... Il y a un changement de comportement. Là, si on parle que de rencontres, je trouve que c'est plutôt un handicap.

  • Speaker #1

    Ça fait cinq fois que vous me parlez de rencontres déjà. D'un cours, d'aller vers l'autre.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, c'est toi qui m'as dit, viens, regarde les gens et tout.

  • Speaker #1

    Vous savez ce qu'on va faire de cette nuit ? Est-ce que vous avez une idée ?

  • Speaker #2

    Non, aucune.

  • Speaker #1

    Et l'idée de ne pas savoir ce qui va se passer dans cinq, dix minutes, ça vous met dans quel état d'esprit ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'adore l'inconnu, donc plutôt cool. Je prévois jamais rien dans ma vie. Par exemple, quand je pars en vacances, je n'ai jamais de billet de retour. Après, en général, je n'ai pas réservé d'hôtel. Moi, j'aime bien la liberté, quoi. De faire ci ou ça. Mais rien n'est fixé dans le marbre. Tu vois, si demain, je change d'avis, je change d'avis, quoi.

  • Speaker #1

    Vous n'êtes pas forcément faite pour la vie de couple.

  • Speaker #2

    Ah non, non. Moi, je n'ai jamais dit qu'il fallait vivre en couple. J'étais pas là, moi, le jour où ils ont décidé ça. Ah non, non, non. Moi, il est hors de question que je vive avec la personne que j'aime.

  • Speaker #1

    Ça vous le dites dès le début ?

  • Speaker #2

    Ouais, ouais. Enfin, pas des premiers rendez-vous, parce que le gars, il va angoisser, quand même. Enfin, une fois qu'on se dit qu'on est ensemble, si tu évoques l'idée d'habiter avec moi, je te dis instantanément que ça n'arrivera jamais. Mais jamais. Le quotidien tue. Moi...

  • Speaker #1

    Mais ça, c'est pas bien accepté. Je me rappelle d'une vie à qui j'avais dit, même l'héroïne dans un film n'est pas de tous les plans.

  • Speaker #2

    Ben oui.

  • Speaker #1

    Mais elle n'avait pas compris qu'elle soit coupée au montage à certains moments.

  • Speaker #2

    Oui, oui, mais je suis tout à fait d'accord avec toi. C'est-à-dire que tu vois, je veux dire, tu aimes les pêches melbares. C'est vraiment un dessert éclaté. Je ne sais pas pourquoi, parce qu'on est dans une brasserie. Mais tu aimes les pêches melbares. Je t'en sers tous les jours à midi. À un moment donné, tu vas dire, casse-toi avec ta pêche melbares.

  • Speaker #1

    Si vous deviez résumer votre vie sentimentale à un tableau Excel, vous savez quoi ?

  • Speaker #2

    C'est compliqué.

  • Speaker #1

    De votre fait ou de la personne en face ?

  • Speaker #2

    Je crois que c'est plutôt mes choix qui ne sont pas les bons. Non, parce que c'est quand même très cool en couple. On n'a pas grand-chose à me reprocher, à part le fait peut-être un petit peu trop d'indépendance. À part ça, je te laisse faire absolument tout ce que tu veux dans ta vie.

  • Speaker #1

    C'est peut-être ça le problème.

  • Speaker #2

    Non, moi...

  • Speaker #1

    Ils veulent un peu être serrés, non ? C'est pas que les hommes aiment la conquête aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Mais oui, oui, j'ai bien remarqué que mes potes adoraient avoir des nanas un peu relous. C'est fou comme on s'attache souvent... À l'opposé de ce qu'on aimerait vraiment.

  • Speaker #1

    Et ça serait quoi votre opposé, vous ?

  • Speaker #2

    Mon opposé, ce serait quelqu'un de très rangé, avec des mocassins. Mais ça c'est pas possible du coup.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Non c'est une catastrophe. Ça revient à la mode là. Ouais c'est pas sexy quoi.

  • Speaker #1

    Vos parents ils sont toujours ensemble ?

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Ils sont aimés à la folie ?

  • Speaker #2

    Vous pensez ? Ils sont aimés à leur façon mais...

  • Speaker #1

    C'est quoi leur façon ?

  • Speaker #2

    C'est pas passionné quoi tu vois mais par contre ils s'aiment profondément. Mais c'est pas ça que je veux. Bah je les ai jamais vu s'embrasser ou se plaquer contre un mur quoi tu vois.

  • Speaker #1

    On ne fait pas ça forcément devant sa fille.

  • Speaker #2

    Oui, mais on vivait dans un 30 mètres carrés. Alors si tu veux, comme je n'avais pas de chambre, à un moment donné, j'aurais pu croiser un moment intime sans qu'il le veuille vraiment.

  • Speaker #1

    Donc vous voulez de l'amour comme au cinéma ou dans les romans ?

  • Speaker #2

    Oui, moi j'y crois à ça.

  • Speaker #1

    Vous avez quel âge aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est indiscret de demander ça. Oui,

  • Speaker #1

    mais c'est justement pour la raison pour laquelle je pose la question. 37, 38 ?

  • Speaker #2

    37.

  • Speaker #1

    Mais il tarde à venir alors !

  • Speaker #2

    Après, tu vois, imaginons, je l'aurais rencontré il y a 10 ans. Bon, très bien, super, mais il y a plein de rencontres que je n'aurais pas faites non plus. Des beaux gosses et tout, quoi.

  • Speaker #1

    Qui sont moqués, ça.

  • Speaker #2

    Mais moi, j'ai un souci, là, c'est que depuis genre 4-5 ans, il n'y a que des mecs de 10 ans de moins que moi qui viennent me voir et qui me draguent. Donc du coup, je ne sors qu'avec des mecs de 26-27 ans.

  • Speaker #1

    C'est votre genre ?

  • Speaker #2

    Ouais, C'est marrant parce que ça ne l'était pas forcément avant.

  • Speaker #1

    C'est une barrière ça, 10 ans d'écart ?

  • Speaker #2

    Non,

  • Speaker #1

    pas du tout. À partir de combien d'années sur le contrat, c'est une barrière ?

  • Speaker #2

    Je pense que ça commencera...

  • Speaker #1

    25 ans d'écart, est-ce que ça pèse ? Là,

  • Speaker #2

    moi, je pense que ça me dérangerait. Non, mais si tu m'enlèves 25 ans, la société, il a 12 ans. C'est compliqué.

  • Speaker #1

    Il y a plein de sujets que vous ne pourrez pas aborder.

  • Speaker #2

    Mais 10 ans, c'est que dalle. Ça dépend comment tu es dans ta tête. Moi j'ai des potes de 26 ans qui... J'ai un copain, il a 26 piges, il adore les nanas de 50 ans. Il aime ça, il a envie de tomber amoureux d'une meuf de 50 ans.

  • Speaker #1

    Histoire de revenu. Moi, ça a été longtemps une ambition de passer ma vie en peignoir toute la journée, attendre la femme de ma vie au bord de la piscine.

  • Speaker #2

    C'est ça qui l'excite. Sexuellement, il est attiré par les nanas de 50 balais, voire plus. Et toi, tu as quelqu'un ?

  • Speaker #1

    J'ai rencontré une fille, et puis au bout de trois semaines, elle m'a dit qu'elle partait au Mexique. Je me demande si ce n'est pas un prétexte pour...

  • Speaker #2

    Mais tu l'as rencontré vraiment ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    je l'ai vraiment rencontré. Ah, vous avez l'impression que je me fais des films dans ma tête ? Non,

  • Speaker #2

    mais peut-être que c'était un fake. Oui, oui, oui. Il y avait des sentiments ? Tu étais amoureux un peu ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi l'amour ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Elle m'envoyait des vidéos filmées sur son smartphone. Des selfies aussi, avec pour toile de fond, des monuments, des paysages. Quelques semaines avant, elle m'avait annoncé partir en voyage. Ouais, elle ne savait pas quand elle rentrerait. J'aurais bien voulu partir avec elle. Mais à chaque fois, c'est comme si mes pieds étaient pris dans le béton de la ville. Je suis resté là. Dans ses vidéos face caméra, elle me disait « Vous » . Ça ne m'était donc pas exclusivement adressé. C'était pas désagréable. Depuis mon canapé, voir cette fille à l'autre bout du monde jouer les guides touristiques. J'avais l'impression d'être devant un doc sur France 5 ou Arte. Seulement, après quelques jours passés là-bas... Quelque chose d'étrange a commencé à s'opérer. C'est difficilement explicable. Sur ses vidéos, j'avais l'impression que son visage se modifiait. D'abord sa bouche, puis un truc dans ses yeux, ensuite sa coupe de cheveux. Progressivement, son apparence s'éloignait de celle que j'avais connue avant son départ. C'était déroutant. Elle ne semblait rien remarquer de ce bouleversement. Environ quinze jours, elle ne s'était plus du tout la même femme. Le plus étrange, c'est qu'à mesure qu'elle se transformait, son visage me devenait de plus en plus familier. Un matin, j'ai ouvert sa dernière vidéo. Elle avait totalement disparu. À sa place, une autre femme s'exprimait face caméra au milieu des paysages. Je la connaissais. C'était Oslo. Qu'est-ce qu'elle foutait là, elle, à réapparaître d'un coup sur mon écran ? C'est pas comme si j'avais pas mis des années pour l'oublier. Peut-être tout simplement que j'étais devenu dingue. J'ai remonté le fil de discussion WhatsApp des jours précédents. Oslo était désormais présente sur toutes les vidéos. La même voix, les mêmes mimiques, sa gestuelle. Tout pareil comme à l'époque, avant qu'elle ne s'éclipse pour plus jamais donner de nouvelles. Je devais être fatigué. C'est du moins ce que je me suis dit sur le moment. La nuit d'après. Il était 3h30 quand mon téléphone s'est mis à vibrer. À cette heure-là, qui pouvait tenter de m'appeler ? Là ? Sur l'écran rétro-éclairé, le prénom d'Oslo est apparu. Avec Doulie, on avait quitté la brasserie. Il faisait bon, on s'était mis à marcher dans le quartier.

  • Speaker #2

    J'avais été à Barcelone.

  • Speaker #1

    Je sais, pendant combien d'années ?

  • Speaker #2

    Huit ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous êtes partie faire pendant huit ans ?

  • Speaker #2

    À la base, je voulais voir du pays et surtout arrêter de travailler la nuit.

  • Speaker #1

    Vous avez fait pas mal de petits boulots ?

  • Speaker #2

    Ouais. Par là ? Allez.

  • Speaker #1

    Quel petit boulot qui va laisser le meilleur souvenir, vous ?

  • Speaker #2

    J'ai adoré travailler la nuit, en vrai. C'était un peu la fête tous les jours, même si c'est des boulots très durs. C'était très chouette, mais on bossait de 19h à 7h du matin, 7 jours sur 7.

  • Speaker #1

    Tu étais quoi ?

  • Speaker #2

    J'ai un peu fait tous les métiers là-bas. J'étais au vestiaire au premier, et après j'avais 17 ans. Et après, je suis passée barman.

  • Speaker #1

    C'est stratégique le vestiaire. C'est très stratégique.

  • Speaker #2

    C'est très stratégique, il faut se faufiler. C'est mieux d'être petit quand on fait le vestiaire. Enfin, ça dépend des endroits. Mais disons que dans les endroits où j'ai travaillé, dans des cales à bateau. J'ai fait le vestiaire dans pas mal d'endroits à Paris.

  • Speaker #1

    Donc ça, c'était les meilleurs souvenirs ? Le plus mauvais ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Je crois que vendeuse de fringues, ça ne m'a pas passionnée. Alors que j'adore les fringues, tu vois. Moi, tu me dirais, je m'éclatais quand même. Mais je me faisais un peu chier. En fait, je n'aime pas avoir un patron. Donc la nuit, ton patron, il picole, il s'en fout. quand même un peu de chill quoi tu vois alors que dans un magasin de fringues bah tu vois t'as des horaires bah très tôt déjà je déteste le matin et puis t'as un chef qui veut qu'il ait du rendement quoi moi ça je suis pas très compète j'aime pas la compète j'aime pas tu sais il faisait des concours du meilleur vendeur je déteste ça je préfère laisser gagner les autres et montrer que j'en ai rien à foutre parce que J'aime pas ce que ça véhicule. et moi avoir la paix quoi.

  • Speaker #1

    Et vous me dites ça alors vous travaillez dans le show business, dans l'industrie du spectacle.

  • Speaker #2

    Je t'aime mais...

  • Speaker #1

    C'est friand de lit les humoristes entre eux ou on se tire la bourre quand même ?

  • Speaker #2

    Non, moi je trouve que... Non, moi je trouve qu'on s'en sort plutôt pas mal. Après je sais que je suis pas compétitrice là-dedans et je sais que ça peut me porter préjudice parce que je sais pas aller dans des trucs par intérêt. Je sais pas aller demander. En général dans toutes les soirées. Tu me verras discuter en général avec les mecs de la sécu ou le mec au bar. Mais c'est rarement les personnes qui vont me donner le premier rôle.

  • Speaker #1

    Donc là, on est ce soir à Belleville, sur un banc public, entre des sanisettes, des dames qui vont de leur corps, un camion poubelle qui est en train de faire...

  • Speaker #2

    C'est un peu l'histoire de ma vie.

  • Speaker #1

    J'ai lu une interview de vous, vous disiez, je descendais dans la rue, je m'asseyais sur un banc et des inconnus m'ont raconté leurs histoires, leurs problèmes.

  • Speaker #2

    Enfin non, je ne m'asseyais pas sur des bancs en attendant des gens qui venaient me raconter.

  • Speaker #1

    Ou ailleurs, disons.

  • Speaker #2

    Non, non, je pense que cette interview a été très...

  • Speaker #1

    Je l'ai confondue avec Anne Roumanoff, pardonnez-moi, désolé.

  • Speaker #2

    Non, je m'asseyais beaucoup avec les mecs qui vivaient dans la rue, je discutais des heures avec eux. Mais sinon, oui, il y avait ce phénomène qui faisait que pendant longtemps... Des gens que je croisais au boulot ou quoi, on s'échangeait les numéros, parce qu'il y avait une petite connexion, mais amicale, mais si tu veux pas plus que ça. Et ces gens m'appelaient pour me raconter des problèmes existentiels.

  • Speaker #1

    Mais des problèmes comme quoi ? Des problèmes de couple, des problèmes d'argent ?

  • Speaker #2

    Des problèmes plus profonds que ça, des problèmes de dépression, d'envie de suicide.

  • Speaker #1

    Et ils disaient que vous étiez la bonne personne pour éviter le suicide.

  • Speaker #2

    Oui, apparemment.

  • Speaker #1

    Donc vous avez sauvé pas mal de vies.

  • Speaker #2

    Oui, je crois.

  • Speaker #1

    En étant à l'écoute.

  • Speaker #2

    Oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Dans une de ses interviews, vous avez parlé d'un gars qui s'appelait Momo.

  • Speaker #2

    Oui, Momo. C'est un mec qui habitait dans la rue. Enfin, qui habitait. Je l'ai rencontré sur le premier jour de rue. Et il était très touchant. Parce qu'il avait perdu sa femme. Enfin, sa femme l'avait larguée. Il avait perdu son boulot.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il avait fait ? Il a gringolé ?

  • Speaker #2

    Je ne sais plus du tout l'histoire dans son intégralité. Mais en tout cas, je l'ai vu moi, lui, dégringoler. Ça abîme la rue. Ça abîme très rapidement. Je pense que même pas si une semaine dans la rue, t'aurais pu avoir une gueule.

  • Speaker #1

    Vous, c'est l'époque où vous étiez émancipée. Vous étiez partie de chez vos parents à 14 ans. Vous aviez votre petit appartement. Vous faisiez votre vie.

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous l'avez dit sciemment, je vais rencontrer des gens à la marge. Ou c'est les gens à la marge qui sont venus vers vous ?

  • Speaker #2

    Non, c'est juste que je pense qu'on se faisait un petit sourire et puis qu'à un moment donné, on se mettait à discuter, tu vois. Tu les croises tous les soirs, tous les matins. Il y a un eye contact. Il y a un lien qui se crée, quoi.

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il est devenu quoi, Momo ?

  • Speaker #2

    Je pense qu'il est mort, Momo. Je doute qu'il ait survécu à tout ça, parce qu'à la fin, il n'allait pas bien du tout. En quoi ? En 3-4 ans. Tu sais que j'ai voulu faire, pendant le confinement... Assitant social ? Mais non, je voulais faire SOS à détresse amitié, là, tu vois. Le truc où les gens t'appellent, parce que moi je suis insomniaque. Je me disais, bon, les gens ne font rien de la journée, alors j'écrivais un peu des blagues, tu vois. Mais du coup, je me disais la nuit. Je pourrais faire ça. J'ai l'impression qu'il fallait faire tout un entretien, répondre à des questionnaires.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous diriez, vous, si vous aviez été dans cette configuration de répondre à des gens qui sont désespérés au-delà de toute attente, et qui vous disent...

  • Speaker #2

    Moi, je leur demanderais s'ils ont un rêve et de me parler de leur rêve. Tu vois, il faut se raccrocher à des trucs positifs et à des projections sur l'avenir. Parce qu'en vrai, quand t'es pas bien, t'as juste envie que ça s'arrête. Et tu ne vois pas au-delà de la situation du présent. Donc du coup, je pense qu'il faut arriver à se projeter sur des trucs positifs de l'avenir.

  • Speaker #1

    Oui, vous êtes arrivé de vous dire, si je ne suis pas là demain, ce n'est pas grave.

  • Speaker #2

    Bien évidemment, mais 150 fois. Mais encore il y a une semaine. Enfin, il y a même trois jours. Moi, ça m'arrive souvent d'être à un balcon et de regarder en bas et de me dire, oui, bon, pourquoi pas.

  • Speaker #1

    Mais vous avez un traitement pour ça.

  • Speaker #2

    Non, mais je crois que c'est assez sain. Je ne sais plus, quelqu'un m'avait dit que c'était assez sain de penser au suicide. Il est toujours là. Toujours de ce monde. Il y avait eu des études de fête. Tu n'as jamais regardé le métro arriver ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je ne pourrais pas pousser cette personne devant pour prendre ma place tout à l'heure ?

  • Speaker #2

    C'est un putain de psychopathe. Voilà ce que t'es.

  • Speaker #1

    Vous faites quoi la nuit habituellement, quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Je fais de la merde. Tu vois, je scrolle sur les réseaux, je regarde des conneries dont je ne me souviens pas deux minutes après.

  • Speaker #1

    Mais jusqu'à quelle heure ?

  • Speaker #2

    Ça peut être loin.

  • Speaker #1

    Dormir vraiment pas ?

  • Speaker #2

    J'ai du mal, j'ai vraiment du mal à m'endormir. Si tu ne me donnes rien du tout, pas de cachet, pas de CBD, rien, je ne dors pas avant 6h du matin.

  • Speaker #1

    Il y a quelque chose qui me déprime énormément, surtout à cette saison, c'est quand tu as... 5, 5h30, on commence à entendre le chant des oiseaux, on n'est toujours pas endormis.

  • Speaker #2

    C'est une horreur, je déteste les oiseaux, j'ai envie de les buter.

  • Speaker #1

    Si vous ne dormez pas, vous avez beaucoup de difficultés. Depuis quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Depuis toujours. Depuis toujours moi aussi. Jamais dormi.

  • Speaker #1

    Les bainsos, les bainsos de diazépine, c'est la seule drogue que j'ai connu. Ah oui, oui. Et j'adorais ça.

  • Speaker #2

    Ben oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Non mais j'aimais bien le moment avant, vous savez, j'en prenais un et je me mettais à appeler des gens, souvent des filles.

  • Speaker #2

    Tu prenais quoi ? Tu prenais pas du Seresta ? Je prenais du Stilnok.

  • Speaker #1

    J'avais un médecin.

  • Speaker #2

    Ça donne la tchatche, le synox ?

  • Speaker #1

    Non, c'était pas la tchatche.

  • Speaker #2

    Mais t'étais sous,

  • Speaker #1

    quoi. La discussion glissait un peu. Et j'avais eu l'angoisse d'appeler ma grand-mère. Parce que le lendemain, je regardais qui j'avais appelé. J'ai dit, pourquoi je l'ai appelée à cette heure-là ?

  • Speaker #2

    T'avais peur d'avoir chiné ta grand-mère ?

  • Speaker #1

    Et j'ai arrêté pour ça. Ah oui ?

  • Speaker #2

    Ça te sortait de ton contrôle, quoi. T'es contrôle fric ?

  • Speaker #1

    Je ?

  • Speaker #2

    T'es contrôle fric toi ?

  • Speaker #1

    Contrôle fric ?

  • Speaker #2

    Contrôle fric.

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #2

    Ça veut dire genre, t'aimes bien tout contrôler.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez pris longtemps, vous, des bains de jour ?

  • Speaker #2

    Moi, je continue à en prendre, je prends l'hexanaque.

  • Speaker #1

    Et alors, vous appelez des gens quand...

  • Speaker #2

    Non, pas du tout.

  • Speaker #1

    Vous n'avez jamais appelé des gens pendant que...

  • Speaker #2

    Je sais que... Je crois qu'à mes 22 ans, j'ai appelé la dernière personne sous l'emprise de l'alcool. Genre, j'étais bourrée en soirée, et j'ai appelé, pas un ex, mais un mec avec qui c'était en train de se finir. Je l'ai appelé pour la énième fois, parce que ça m'était déjà arrivé plein de fois, d'appeler pour le coup des ex, un ex en particulier. Et je me souviens, je revoyais mon portail, je me disais, putain, on a parlé deux heures, et je me disais, mais je ne me souviendrai de rien de ce qu'on avait dit. Et ça a été la fois trop, je me souviens, j'avais 22 piges, j'étais au Canary, je crois. Et je me suis dit, plus jamais, jamais, jamais, je n'appellerai. je n'utiliserai mon téléphone quand je suis bourrée ou dans un état de conscience modifié.

  • Speaker #1

    Vous êtes tenue à cette promesse.

  • Speaker #2

    Je suis tenue à cette promesse, c'est-à-dire que mon cerveau a été reprogrammé pour ne jamais appeler qui que ce soit quand je ne suis plus moi-même. À 100%. Donc du coup, ouais, je ne vais pas arrêter le Xernax.

  • Speaker #1

    Vous aimez faire des trucs inutiles dans la vie ?

  • Speaker #2

    Ouais, moi je fais souvent des trucs inutiles. J'ai une idée.

  • Speaker #1

    « Un taxi. »

  • Speaker #2

    « Ah bon ? » « Ouais. »

  • Speaker #0

    Ça me fait bizarre d'être dehors à cette heure-là. Ces derniers temps, mes soirées, je les avais passées enfermées dans un studio de radio, au septième étage d'une roue de hamster posée à plat. à l'ouest de la ville. Durant deux heures quotidiennement, j'écoutais des gens au téléphone me raconter leur vie. Ça devait être la veille avant que mon émission s'arrête. Marie-Lou, 12 ans, bientôt 13, venait de débarquer sur l'antenne. Huit mois déjà qu'elle écoutait l'émission depuis qu'un jour, zappant la FM, elle était tombée dessus par hasard. Désormais, la nuit tombée, elle s'abreuvait des histoires des autres avant de fermer les yeux et s'endormir. Marie-Lou. déléguée de classe de cinquième, avait le tempérament affirmé d'une gamine qui sait qu'on doit attendre quelque chose de la vie si on veut que ça arrive vraiment. Elle, plus tard, elle aimerait bien être journaliste, politique ou judiciaire. Elle hésitait encore. Bolubile, authentique surtout. Depuis quelques minutes qu'elle avait commencé à parler, Marie-Lou, moi, j'étais retourné dans ma chambre d'ado. assis sur mon lit une place. Je patientais, fébrile. Depuis de longues minutes déjà, j'étais accroché au téléphone. Ce téléphone fixe, préhistorique, qu'avaient mes parents quand j'étais gosse. J'avais tiré des kilomètres de câble jusqu'à ma piaule. Refermer la porte pour pas les réveiller. Je m'en souviens de cette nuit-là, et comme si c'était il y a une heure. J'attendais mon tour, fixant l'affiche accrochée au mur au-dessus de mon lit. Mad Max, un dit plongiligne, combinaison de cuir et casque, brandissant arme à feu sur un bolide noir fonçant toute allure dans ma direction. À l'horloge de mon radio-réveil, déjà minuit passé, le lendemain à huit heures, j'avais cours d'histoire avec M. Aubert. Il y aurait un terreau écrit sur la Première Guerre mondiale. Mais je m'en foutais. Demain, c'était loin. L'important ? Qu'est-ce qui allait se passer dans les prochaines minutes ? Bientôt, ce serait à moi. Faudrait que je sois bon. Quand le disque à la radio fut terminé, dans le combiné téléphonique, j'ai entendu une voix qui s'adressait à moi. Cette même voix que j'écoutais à la radio depuis des mois, chaque soir, dans l'obscurité, venait de me poser une question. « T'as quel âge ? Tu t'appelles comment ? » J'ai pris une grande respiration. Et mes yeux plantés dans ceux de Mad Max, j'ai dit... Moi, je m'appelle Johan. J'ai 12 ans. Avec Doulie, on a pris un taxi. Direction le centre de la ville.

  • Speaker #2

    C'est quoi d'autre que métier ?

  • Speaker #1

    Le problème, c'est que je n'ai jamais fait de métier, jamais fait que de la radio.

  • Speaker #2

    Toujours fait que de la radio.

  • Speaker #1

    Ce qui n'est pas un métier en soi.

  • Speaker #2

    Ben si, attends.

  • Speaker #1

    Non, non, non.

  • Speaker #2

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Vous faites un vrai métier ?

  • Speaker #2

    Ben ouais, sinon... C'est des métiers, ouais. C'est des vrais métiers. J'ai bien vu la gueule de mes emplois du temps, j'estime que c'est un vrai métier, oui.

  • Speaker #1

    Vous travaillez beaucoup ?

  • Speaker #2

    Je travaille énormément.

  • Speaker #1

    Vous êtes fatiguée en ce moment ?

  • Speaker #2

    Très.

  • Speaker #0

    Ça ne se voit pas.

  • Speaker #2

    C'est gentil.

  • Speaker #0

    Enfin, ça ne s'entend pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est dégueulasse.

  • Speaker #1

    Mais ça n'a jamais aussi bien marché pour vous,

  • Speaker #0

    là ?

  • Speaker #2

    Je ne me rends pas vraiment compte, en fait. Oui, ça marche bien.

  • Speaker #1

    Il y a un indice pour savoir.

  • Speaker #2

    Ah ouais ? C'est vrai ?

  • Speaker #1

    Dans quelques jours, on va déclarer ses impôts.

  • Speaker #2

    Ah ouais, ça c'est une catastrophe ça. C'est dégueulasse, parce que moi je suis dans une espèce de marge où en fait je suis dans la tranche la plus haute de ma catégorie.

  • Speaker #0

    Enfin tu vois ce que je veux dire, moi j'y comprends rien à ces conneries mais si tu veux en fait je paye beaucoup trop par rapport à ce que je gagne quoi. En fait c'est juste...

  • Speaker #1

    Donc vous payez trop d'impôts quoi ?

  • Speaker #0

    Un peu trop ouais par rapport à ce que je gagne ouais.

  • Speaker #1

    Vous êtes avec une bande du maris de gauche.

  • Speaker #0

    Ouais mais moi je suis pas politisée tu sais.

  • Speaker #1

    C'est important pour vous l'argent ?

  • Speaker #0

    Non, c'est important de pas se prendre la tête mais j'ai pas de... j'attache pas plus d'importance que ça. D'ailleurs si tu vois la gueule des mecs avec qui je suis... Tu comprendras que je n'y attache aucune importance.

  • Speaker #1

    Vous en faites quoi alors ?

  • Speaker #0

    J'aide beaucoup des gens dans ma famille. Et puis, quand je peux inviter des potes, ça me fait plaisir.

  • Speaker #1

    Vous êtes économe ?

  • Speaker #0

    Non, pas du tout. Je suis un panier percé, c'est une catastrophe.

  • Speaker #1

    Vous n'avez pas l'angoisse de ce qui va se passer demain ?

  • Speaker #0

    Oui, je l'ai l'angoisse, mais comme je n'ai vécu avec rien, du coup, je n'ai juste pas envie de revivre avec rien. Mais je sais que c'est possible de survivre, en tout cas.

  • Speaker #1

    Comment on vit ? Avec rien, justement ?

  • Speaker #0

    On survit. Il y a des gens qui n'y arrivent pas. Malheureusement. Mais parce que je pense que quand tu as perdu le moral de tout, tu es un peu... Quand tu n'as vraiment pas le moral... C'est pour ça qu'il y a des gens qui jugent beaucoup, des gens qui ne s'en sortent pas. Mais je crois que ces gens-là n'ont jamais été dans ces situations. Ils pensent avoir galéré un peu parce que leur père ou leur mère a arrêté de leur donner de l'argent de poche ou j'en sais rien. Et ils se disent qu'ils ont vécu la galère. Mais la galère, c'est tout mélangé, c'est tout en même temps. C'est-à-dire que tu n'as pas le moral, tu n'as pas d'oseille, tu n'as pas d'appart, tu n'as rien, tu n'as pas d'amis. Je pense que les gens qui jugent, ils ne se sont jamais retrouvés confrontés à cette situation. d'avoir rien, pas une main tendue. Là, du coup, va toi trouver l'énergie à l'intérieur de toi pour t'en sortir. C'est pas forcément évident. Mais je crois que j'irai au soleil si je suis dans la merde, tu vois.

  • Speaker #1

    J'ai vu ces gens-là qui font la queue pour aller dans ce... C'est quoi ?

  • Speaker #0

    Moi, je fais pas la queue.

  • Speaker #1

    Vous faites jamais la queue, vous ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Vous passez devant les gens ?

  • Speaker #0

    Non, c'est pas ça. Je dis que je fais pas la queue. C'est-à-dire que j'ai jamais fait la queue. S'il y a la queue, ça me saoule. Même 10 minutes, ça me saoule de faire une queue. Je vais dans un autre endroit.

  • Speaker #1

    Vous avez vu ce que c'est comme un resto ? Comment ils appellent ces trucs-là ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est des plats en sauce, des plats traditionnels, avec des toutes petites portions. Ce qui fait le bouillon.

  • Speaker #0

    Oui, je sais, ça fait beaucoup la queue au bouillon.

  • Speaker #1

    Truc bobo par excellence.

  • Speaker #0

    Je n'y suis jamais allée, parce qu'il y a la queue.

  • Speaker #1

    Parce qu'il y a la queue ?

  • Speaker #0

    Pour manger un oeuf mimosa, ça ne m'intéresse pas.

  • Speaker #1

    Il y a vraiment une très très longue...

  • Speaker #0

    C'est surtout qu'il y a de la bouffe à peu près à tous les 3 mètres.

  • Speaker #1

    Vous ferez ça toute votre vie, vous pensez ?

  • Speaker #0

    Oui, je pense. Je me vois pas... J'ai quand même fait pas mal d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Mais dans votre spectacle, il y a beaucoup de vous, beaucoup de votre vie.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous avez l'angoisse de vous dire qu'est-ce que je vais raconter dans le deuxième, le troisième, le quatrième ?

  • Speaker #0

    Là, là, j'ai plus de spectacle. Dans deux mois, j'ai plus de spectacle. Donc non, j'ai jamais l'angoisse. Enfin, j'ai l'angoisse parce qu'il faut que je réécrive des trucs très drôles, mais par contre, en termes de matière. Je n'ai pas de manque de matière à raconter. Après, il faut savoir les mettre en blague et que ça fasse un bon spectacle. Mais par contre, en termes d'inspiration, de trucs à raconter, non, ce n'est pas un gros souci pour moi.

  • Speaker #1

    Ça vous arrive d'être sur scène certains soirs et votre tête n'est pas là ?

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Donc vous déroulez en automatique ?

  • Speaker #0

    Non, c'est des moments, ce n'est pas surtout le spectacle quand même.

  • Speaker #1

    Ça peut durer combien de temps ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, c'est un tunnel. Tu ne veux pas savoir combien de temps il a duré.

  • Speaker #1

    Donc là, les gens payent pour voir un robot dévier du texte.

  • Speaker #0

    Mais pas du tout. Ça peut durer une minute. Une minute, tout d'un coup, je ne sais pas, tu penses à un truc. Moi, ça m'est arrivé de perdre un ami très proche, par exemple, une heure avant le spectacle. Bon, ben, j'ai du mal à être concentrée dans le spectacle. Si tu veux, j'étais dans un tunnel de lui. C'est compliqué d'être tout le temps à 100%. Merci. Focus quand dans ta vie perso il t'arrive des trucs compliqués à gérer. C'est dur de mettre tout entre parenthèses, tout ça parce que t'es en train de bosser. T'effaces pas tout ce que tu fais ou tout ce que tu vis dans ta vie.

  • Speaker #1

    La scène ça reste un endroit comme n'importe quel autre endroit de la vie ?

  • Speaker #0

    C'est un endroit où je suis bien mais je suis pas sûre que tu puisses contrôler ton cerveau à ce point là. J'aimerais bien mais il fait ce qu'il veut. Il est indépendant. Il vit sa vie. Il vit sa vie.

  • Speaker #1

    Il vit trop sa vie, pour toi, votre cerveau ?

  • Speaker #0

    Oui, un peu trop. Moi, j'aimerais bien qu'il y ait un truc pour le débrancher. Je pense que les insomniaques moulinent trop, qui réfléchissent trop. C'est souvent ton cerveau qui fait que tu n'arrives pas à te relaxer.

  • Speaker #1

    Vous savez où on va ? Non. On va dans un endroit où les gens payent le soir pour s'enfermer dans un endroit et se vider la tête.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Mais c'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que ça peut être ce genre de choses ?

  • Speaker #0

    Une boîte de nuit ?

  • Speaker #1

    On se vide vraiment la tête dans une boîte de nuit ?

  • Speaker #0

    Bah si tu picole et que tu danses, ouais. Même sans picole d'ailleurs. Danser, ça vide la tête. Chanter aussi. T'as déjà chanté ?

  • Speaker #1

    Ça m'arrive, oui.

  • Speaker #0

    Mais tout seul ?

  • Speaker #1

    Chez moi.

  • Speaker #0

    Et t'aimes bien ça ?

  • Speaker #1

    Quand j'écoute France Info, pour ne pas entendre toutes les infos qu'il y a justement.

  • Speaker #0

    Ah oui ? Tu mets un truc et tu chantes par dessus pour ne pas le mettre ?

  • Speaker #1

    Pour ne pas entendre, oui. Ah oui, c'est vrai, c'est une ligne. Je vous ai dit, je ne suis pas très pragmatique. Tout ce qui est pratique me rebute.

  • Speaker #0

    Ah oui, je vois ça. Et vous,

  • Speaker #1

    vous êtes très pratico-pratique.

  • Speaker #0

    Non, j'ai appris à me démerder, quoi. Oui, on me démerde aussi.

  • Speaker #1

    Regardez, on a commandé un Uber, on arrive dans un endroit.

  • Speaker #0

    Je suis très impressionnée. Oui. C'est là ? Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est là ? Ah oui, d'accord, ok. Eh bien, je vous remercie. Merci à vous.

  • Speaker #0

    Ça me donne faim.

  • Speaker #1

    Vous voulez manger un truc ?

  • Speaker #0

    J'ai très faim.

  • Speaker #1

    Je crois que c'est là. Bonsoir.

  • Speaker #0

    Bonsoir. Ah, Fury Room.

  • Speaker #1

    Vous connaissez ce truc-là ?

  • Speaker #0

    C'est un truc où tu défonces des trucs.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en fait, quelle utilité ça peut avoir, ça, dans la vraie vie ?

  • Speaker #0

    Je n'en sais rien, il faut être énervé, quoi.

  • Speaker #1

    Pensez.

  • Speaker #0

    On a toute une rage à l'intérieur. Non, tu n'as pas de rage à l'intérieur ? C'est... Des gens qui t'ont fait du mal.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est une bonne idée ça. Donner des prénoms à des objets et ensuite s'occuper d'eux.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez beaucoup des rancœurs ?

  • Speaker #0

    Oui, j'en ai pas mal. Ecoutez,

  • Speaker #1

    rentrez, je vous en prie.

  • Speaker #0

    Après vous. Allez.

  • Speaker #1

    Bonsoir. Johan, à réserver. Alors expliquez-nous...

  • Speaker #0

    Ah mais faut mettre des combis et tout ?

  • Speaker #1

    Ouais c'est exactement ça, on va pouvoir vous équiper.

  • Speaker #0

    Putain c'est pas la force.

  • Speaker #1

    On est obligé de mettre des combis ? Ouais. Franchement ouais bah... Le but c'est de faire un peu orange mécanique. Habillez-nous.

  • Speaker #0

    J'ai pas envie d'être là,

  • Speaker #1

    c'est vraiment pour toi que je fais ça ? Pourquoi c'est dit... S'il y a un problème,

  • Speaker #0

    parce que...

  • Speaker #1

    Vous signez sans regarder le truc. Moi je m'en fous.

  • Speaker #0

    Non ? Hop, très bien. C'est vous ?

  • Speaker #1

    C'est ça y est on...

  • Speaker #0

    Duri et Johan c'est ça Johan ? courage on doit enlever les manteaux et tout merci il faut changer de chaussure aussi ?

  • Speaker #1

    avec une combinaison ça va être magnifique c'est assez saillant, c'est pour moi ?

  • Speaker #0

    c'est un jogging on va voir ça les ans dessous vous savez,

  • Speaker #1

    vous ne savez absolument pas ce qu'on a laissé en arrivant ici Ça, c'est quoi ? Ah oui, avec une visière, oui. C'est à ce point-là dangereux de rentrer dans ce genre de pièce ? Vous savez, on peut rentrer et ne rien casser. Je ne suis pas pour l'ultra-violence.

  • Speaker #0

    Tu ne vas pas avoir le choix, tu vas être obligé de bousiller des trucs.

  • Speaker #1

    C'est parti. Donc, on descend là dans la pièce en... C'est quoi, dans une cave ? D'accord. Donc, une fois à l'intérieur, on est enfermé. Ah, vous êtes enfermé, oui. D'accord. Vous êtes où, Doulie ? Ah oui, ils n'ont pas fait semblant de tout péter les précédents.

  • Speaker #0

    But the baseball must... pour utiliser pour casser. Quand vous voulez jeter des bouteilles. Il faut casser ça ? Oui. Ah, tu peux éclater la télé ? Oui, ça se peut. C'est vrai ? Ah oui.

  • Speaker #1

    Déjà, c'est plus intéressant.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci vraiment.

  • Speaker #0

    Tu expulses toute cette violence que tu entoures. Attends, j'ai envie d'éclater cette bouteille.

  • Speaker #1

    Ce n'est pas le problème du matériel.

  • Speaker #0

    On l'a lancé.

  • Speaker #1

    Regardez, le lard de bien péter une bouteille.

  • Speaker #0

    Allez !

  • Speaker #1

    Là vous pensez à quelqu'un ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Descendez bien votre visière.

  • Speaker #0

    C'est pas bien là.

  • Speaker #1

    C'est nul. Moi je serais vous, j'attaquerais directement l'écran. Elle n'a peut-être pas semblant. L'écran d'ordinateur aussi, vous lui avez donné un prénom mental ?

  • Speaker #0

    Non, là ça me fait un peu de soude.

  • Speaker #1

    C'est quoi c'est une bouteille ? C'est du petit chablis.

  • Speaker #0

    Le chablis il va sauter.

  • Speaker #1

    Hop là ! C'est que du matériel informatique.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est vraiment le moment d'utiliser un pied de biche.

  • Speaker #1

    La tour PC, j'ai l'impression qu'elle vous fait de l'œil.

  • Speaker #0

    Attends, j'entends la musique. Ça aide. T'écoutes quoi comme musique,

  • Speaker #1

    toi ? J'aurais bien aimé qu'on fasse ça sur du Luan. Non. Et ben voilà ! C'est vrai que ça fait du bien !

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on commence à y prendre goût ! Toi, comme tu n'es pas du tout violente, tu vas peut-être complètement briller !

  • Speaker #1

    Wow ! Regardez ! Ça, c'est du vino blanco !

  • Speaker #0

    Tu vas jouer gentil, là !

  • Speaker #1

    Alors attendez, la bouteille qu'on casse après une relation de vivant ?

  • Speaker #0

    Non ! Et on l'attend seulement ? Non, je vais faire une relation d'une nuit !

  • Speaker #1

    Tu vas l'attendre d'une nuit ?

  • Speaker #0

    D'une nuit ! Surtout que vous êtes vénère !

  • Speaker #1

    C'est la nuit et pas... Nuit c'est combien d'heures ?

  • Speaker #0

    8 heures ! C'est déjà 2 heures ? Ah ah ah ah ! Je vous dis, y'a aucune raison de faire ce que vous voulez ! Ah ah ah ! Laisse-moi ! Bah oui, je suis énervée !

  • Speaker #1

    Vous êtes rentré le bouchon dans le doigt.

  • Speaker #0

    C'est trop dur ça !

  • Speaker #1

    Ah vous reprenez le pied de biche ! Regarde, la tour d'ordinateur... Ça c'est acheté chez Sercouf à tous les coups !

  • Speaker #0

    Il faut que tu y ailles !

  • Speaker #1

    Je me demande combien de gens passent chaque nuit dans cet endroit pour péter des trucs comme on les pète là.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas. J'avais entendu parler, mais je n'y étais jamais allée.

  • Speaker #1

    Parce que vous n'êtes pas curieuse ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois que j'avais lu que tu ne pouvais péter qu'une télé ou quoi. Moi, je voulais tout bousiller.

  • Speaker #1

    Mais dans l'absolu, quel est l'objet qui n'est pas présent dans cette salle que vous adoreriez défoncer ?

  • Speaker #0

    Un mur.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que vous faites.

  • Speaker #0

    Je peux shooter le mannequin ? Comment ? A toi, un peu.

  • Speaker #1

    Faire des votes prog, Julie.

  • Speaker #0

    Faire mon choix. Je peux en faire.

  • Speaker #1

    Bon, écoutez, euh... Non, mais ne ramassez pas tout. Vous êtes très bien élevés, enfin.

  • Speaker #0

    Attention, la bouteille de champagne, grand potentiel.

  • Speaker #1

    brise bien une bouteille de champagne et la hynocène un petit potentiel pas mal recherche que j'ai vu on comprend pas ce qu'ils ont foutu aux jeux olympiques de paris vous aurez pu introduire cette mission on va pas la rialer d'où il est C'est super. Je crois que ça lui a plu. C'est vrai ? Oui, contre toute attente. Oui, c'est vrai. C'est vrai que ça fait réfléchir.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait du bien.

  • Speaker #1

    Vous dites ça parce que vous êtes bien élevée.

  • Speaker #0

    Oui. Non,

  • Speaker #1

    mais si, vous êtes super bien élevée. Qu'est-ce qui pourrait égaler la sensation qui a été la vôtre dans cette pièce, dans la vie saine et réelle ?

  • Speaker #0

    Un énervement. Mais ça m'est arrivé, moi j'étais un peu plus... Moi, j'ai du mal avec les objets. Tu sais, par exemple, si une télé ne marche pas.

  • Speaker #1

    Tu peux la casser ? Oui. Vous allez voir votre ordinateur différent après en avoir pété un comme vous l'avez fait il y a un instant.

  • Speaker #0

    Non. Mais des fois, j'ai envie de l'éclater.

  • Speaker #1

    Pourquoi vous ne le faites pas ? Je veux dire, vous avez les moyens, Manon.

  • Speaker #0

    Non, c'est un peu dommage, même si tu peux t'en racheter un. J'étais beaucoup plus agressive avec les objets quand j'avais vraiment pas d'oseille. C'est vrai ? J'ai pété des télés, ouais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que le programme vous plaisait pas ?

  • Speaker #0

    Non, parce qu'il marchait pas.

  • Speaker #1

    Et ça, quand vous étiez gamine ?

  • Speaker #0

    Non, non, dans... ado, quoi.

  • Speaker #1

    Il est déjà battu ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Par Françard Diz ou par Zénithu ?

  • Speaker #0

    Non, parce que des fois, je rêve de déclater la gueule à quelqu'un qui l'aurait cherché, quand même. Il y a des gens qui méritent qu'on leur éclate la gueule.

  • Speaker #1

    Dans votre vie, par le passé.

  • Speaker #0

    Oui. Oui, j'aimerais bien, tu vois, si je vois une embrouille arriver, pouvoir dégommer le gars qui fout la merde. Ça, ça me ferait un bien fou, mais je pense que je n'ai pas la force.

  • Speaker #1

    Vous prendriez le mec, un mec ou une fille ? Ça serait qui ?

  • Speaker #0

    Peu importe.

  • Speaker #1

    L'engendrer ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    oui. Vous prendriez la personne par le call-back ?

  • Speaker #0

    Je lui éclaterais la gueule vraiment. Ça dépend de ce qu'il est en train de faire. Si, par exemple...

  • Speaker #1

    Il fait tomber un papier gras par terre, par exemple, ça mérite.

  • Speaker #0

    Non, non.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il mériterait qu'il reçoive votre poing dans la figure ?

  • Speaker #0

    Un violon de meuf, tu lui dis, tu l'attrapes et tu le dégommes. Tu vois ? Là, c'est un gros kiff, quoi.

  • Speaker #1

    Il vous est arrivé, vous, de vous retrouver dans des situations où vous étiez impuissante et vous aviez justement la range en vous ?

  • Speaker #0

    Je me suis fait beaucoup agresser, mais je suis toujours sortie par la tchatche. Donc, je n'ai jamais eu à me battre. Mais j'ai cette rage en moi qui fait que je pense que si vraiment tu touches à quelqu'un que j'aime, je pense que je suis capable de... de t'éclater. Je pense que même si je n'ai pas la force pour, je pense que la force, elle se décuple quand tu es très, très, très énervé. Donc si on touche à quelqu'un que tu aimes, je pense que tu es capable de buter quelqu'un même s'il est plus grand que toi.

  • Speaker #1

    Ça pourrait vous faire peur. On se dit parfois, j'ai peur de passer à l'acte.

  • Speaker #0

    Si la personne mérite vraiment, c'est-à-dire que si quelqu'un a buté ma mère, par exemple, elle mérite de mourir. Donc elle mourra.

  • Speaker #1

    Nécessité fait loi. S'il y avait quelque chose d'injuste, de dramatique, vous pourriez justement aller...

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Quelles qu'en soient les conséquences après.

  • Speaker #0

    Oui. Je peux faire croupir en prison, mais je ne laisserai pas quelqu'un qui a tué quelqu'un que j'aime en vie, vivre sa vie.

  • Speaker #1

    Vous vous rendez compte qu'on est en train de dire tout ça, règlement de compte, justice soi-même, avec du bon reggae en fond sonore.

  • Speaker #0

    Ouais mais je déteste le reggae.

  • Speaker #1

    No woman, no cry.

  • Speaker #0

    J'aime pas le reggae.

  • Speaker #1

    Moi non plus je déteste ça, c'est un merdique. C'est vrai qu'on aurait pu péter des trucs sur du reggae.

  • Speaker #0

    Ouais ouais c'est vrai.

  • Speaker #1

    Vous, vous avez voulu la facilité du métal.

  • Speaker #0

    Mais c'est vrai que si tu m'avais mis du reggae je crois que j'aurais été encore plus énervée.

  • Speaker #1

    On aurait dû faire ça sur du reggae.

  • Speaker #0

    On s'en va ? Allez y alors.

  • Speaker #1

    « C'était vachement bien. Je vais recommander ça à ma mère. Elle en a besoin en ce moment. » Je ne saurais pas dire quand ça avait commencé. Les filles de cette ville s'étaient mises à porter des chaussettes blanches à l'intérieur de mon cassin aux semelles trop épaisses. Comme on compte les moutons avant de s'endormir, je tiens la comptabilité de celles que je croise sur mon chemin. Onze depuis le début de la soirée. Qui décide de ça ? La mode. Le même pouvoir de persuasion autoritaire qu'un cachet. glissé dans le verre d'une inconnue en boîte de nuit. Avec Doulie, on a quitté la Fury Room, rue Blondel. On vient de passer devant un monument en restauration. Enveloppé d'une bâche XXL, il exhibe une chanteuse qui fait la moue pour mieux vendre le sac à main qu'elle porte autour du bras. Si c'est à moi qu'on avait proposé la pub, combien d'années-lumière est-ce que je pourrais tenir avec tout ce fric-là, sans rien avoir à foutre, devant les vitrines d'un grand magasin ? Une famille de Roumains allongés sur des matelas ne dort pas encore. L'un des gamins rit devant une vidéo sur un smartphone. J'entends les sons d'un cartoon. On marche dans la rue tous les deux sans destination définie. Quelle conclusion on peut tirer de cette expérience ? Si expérience il y a.

  • Speaker #0

    La conclusion c'est que j'ai vu un peu de violence contre toi et que je suis assez contente. Parce que j'ai l'impression que ça t'a quand même un peu plu.

  • Speaker #1

    Je me suis aperçu que je pouvais y avoir du bad boy en moi.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est ça qui me plaît.

  • Speaker #1

    Vous avez remarqué que ce soir, cette nuit, contrairement à beaucoup de mes condisciples journalistes et animateurs, on n'a pas parlé de drogue avec vous.

  • Speaker #0

    C'est bien ça, ça me plaît.

  • Speaker #1

    Vous n'en avez pas marre d'ailleurs.

  • Speaker #0

    Je sais que ça a aidé beaucoup de gens, donc tant mieux. Parce que ça a aidé beaucoup de junkies à se dire qu'il y avait un après. Mais d'ailleurs, je ne l'ai même pas fait dans ce but-là. Je l'ai fait à la base pour désacraliser un peu la mauvaise image qu'on pouvait avoir des gens qui consommaient. Dans le sens où ce ne sont pas des gens à mépriser. C'est juste des gens qui ont bossé.

  • Speaker #1

    C'est toujours votre grand-mère, vous ?

  • Speaker #0

    Non, je l'aimais très fort.

  • Speaker #1

    C'était quel genre de fille, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    C'était une femme incroyable. Elle aurait pu avoir 25 ans quand elle avait 80 ans. Elle avait le cerveau de quelqu'un de 25 ans.

  • Speaker #1

    C'est elle qui vous a trouvé un médecin et qui vous a sorti de là ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Comment ça se fait que ce soit votre grand-mère qui vous a sorti ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, il y a ma mère aussi qui était dans le coup.

  • Speaker #1

    Pourquoi c'était une femme formidable, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    Parce qu'elle comprenait tout et elle était très éduquée. Mais elle s'en foutait. Je crois que c'était quelqu'un de très moderne pour sa génération.

  • Speaker #1

    Elle fait quoi de sa vie ?

  • Speaker #0

    C'est une très bonne question, ça. Putain, dans quoi elle a bossé ? Parce que moi, j'ai toujours connu à la retraite. Elle s'est beaucoup occupée de ses gamins, surtout, je crois. Elle en avait quatre, quand même. Mais on s'entendait très bien. Je regrette de ne pas avoir été à jeun quand elle est partie. Parce que moi, j'étais dans le dur quand elle est partie. Et franchement, ça m'aurait fait plaisir qu'elle voit tout ça. Parce qu'elle aurait aimé. En plus, j'adorais son rire. Et si j'avais entendu son rire dans la salle, je pense qu'elle aurait dit « Oh, quand même ! » sur certaines vannes.

  • Speaker #1

    Tu as vu où on est, là ?

  • Speaker #0

    On est dans une rue.

  • Speaker #1

    On est à un numéro de la rue la plus mythique de Paris.

  • Speaker #0

    Rue Saint-Denis.

  • Speaker #1

    Avec tous ses commerces de proximité.

  • Speaker #0

    Miss Bonbon, Le Mirage, Jorge. Love shop.

  • Speaker #1

    Love shop.

  • Speaker #0

    Tu vas des fois dans des love shop ?

  • Speaker #1

    Vous êtes déjà allé dans des love shop ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    C'est très longtemps que je ne suis pas rentré dans un...

  • Speaker #0

    C'est vrai ?

  • Speaker #1

    A quelle occasion vous êtes déjà rentré, vous, dans ce genre de truc ?

  • Speaker #0

    Pour acheter des trucs, quoi.

  • Speaker #1

    Oui, ça j'imagine.

  • Speaker #0

    Oui, oui, non, moi j'y vais, s'il faut, il y a les quoi. Mais c'est marrant d'y aller avec ton mec aussi. Tu passes devant un sex shop, tu y vas, ça attire l'œil. Tu veux aller au sex shop ?

  • Speaker #1

    Peut-être non, juste regarder la vitrine. Tu sais, moi, je suis un garçon très prune. Qu'est-ce qui vous fait marrer ?

  • Speaker #0

    C'est ce mot, prude.

  • Speaker #1

    Quoi ?

  • Speaker #0

    Ça ne me fait rien.

  • Speaker #1

    Ça pourrait être un titre pour votre prochain spectacle, prude ? Avec votre photo dessus,

  • Speaker #0

    ça serait cool. Tu vois, un petit gars de Tour Eiffel. Un souvenir inoubliable, tu vois ?

  • Speaker #1

    Tu as vu l'affiche en dessous ? Black Empire, une vraie lady doit savoir cacher son jeu.

  • Speaker #0

    C'est un rouge à lèvres vibromasseur.

  • Speaker #1

    On dirait ma belle-sœur.

  • Speaker #0

    T'as qu'à faire une photo. Comme ça, tu lui envoies. Tu lui dis tu m'avais caché ça ?

  • Speaker #1

    Non, je pense que ça va pas améliorer nos relations.

  • Speaker #0

    Non ? C'est déjà compliqué ?

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il y a qui derrière le rideau ?

  • Speaker #0

    L'homme de ma vie ?

  • Speaker #1

    Allez, on va voir. Allez, juste, on jette le museau.

  • Speaker #0

    Allez,

  • Speaker #1

    un rideau bleu. Quelle texture.

  • Speaker #0

    Il est en latex. Tu vois ? Il me soit. C'est dommage qu'il n'y ait pas de...

  • Speaker #1

    Il est phallus.

  • Speaker #0

    C'est dommage qu'il n'y ait pas de photo. Est-ce que tu te sens à l'aise ?

  • Speaker #1

    Ce qui est gênant, et c'est souvent aussi ça, peut-être dans les relations, c'est que ce qu'on imagine, ce qu'on projette avant de consommer est parfois plus fort que ce qu'on voit une fois qu'on rentre. Alors peut-être que je suis trop cérébrale.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est souvent ça.

  • Speaker #1

    Qu'il y a des menottes. Dès que vous voyez quelque chose, qu'est-ce que dans tous ces objets qui sont autour de nous, vous pourriez voir figurer sur votre cheminée, chez vous, dans votre appartement, salon, cuisine ?

  • Speaker #0

    Ah ben, je ne vais pas foutre ça sur une... J'ai une étagère, enfin. Ça,

  • Speaker #1

    c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est une laisse, chérie.

  • Speaker #1

    Il y a des affiches au plafond.

  • Speaker #0

    T'as un fouet. Pas très. Non.

  • Speaker #1

    Il y a des cagoules. Il y a toujours des cagoules. Cagoule résille.

  • Speaker #0

    Ça, ça peut être un peu sexy, tu vois, cette espèce d'ensemble avec des lanières en cuir.

  • Speaker #1

    La marque est jolie. Kalida.

  • Speaker #0

    Kalida. Est-ce que tu vois ça ? Ça tu vois tu pourrais essayer un jour, c'est des petits anneaux vibrants, bon c'est pas dingo.

  • Speaker #1

    Vous avez des mecs qui ont utilisé des trucs comme ça ?

  • Speaker #0

    Ouais, ça m'est... il y a longtemps j'ai utilisé ça.

  • Speaker #1

    Je trouve ça très propre pour un endroit...

  • Speaker #0

    Mais c'est... ça a toujours été un peu comme ça.

  • Speaker #1

    Ah il y a le rayon vidéo, lesbienne, solo nylon, fétiche.

  • Speaker #0

    Ah ouais mais là on est old school quoi, c'est des DVD carrément. Bah il est petit hein.

  • Speaker #1

    C'est marrant.

  • Speaker #0

    Alors ça tu vois, ça je pourrais pas par contre.

  • Speaker #1

    De quoi ?

  • Speaker #0

    Ben un gueux de ceinture, c'est-à-dire que là ça veut dire que techniquement... Non.

  • Speaker #1

    L'emballage a l'air heureuse.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, mais... Non, non, mais c'est pas mon délire.

  • Speaker #1

    J'observe que c'est quand même grandement vide, pourtant on est un vendredi soir.

  • Speaker #0

    Ouais, mais...

  • Speaker #1

    Et en revanche, les gels de lubrifiant, c'est à l'américaine, c'est des Ectolid. Soir.

  • Speaker #0

    Et là t'as du Popper, tu vois.

  • Speaker #1

    Vous êtes là depuis combien de temps ? Vous gérez le magasin depuis combien de temps ? Ah oui, pardon. D'accord. Bonne nuit. Ça vous fait marrer. Pensez de constater qu'on est rentrés et il n'y avait pas l'homme de votre vie.

  • Speaker #0

    C'était une cata. Il n'y avait vraiment qu'un mec et c'était le vendeur.

  • Speaker #1

    Que j'ai trouvé très prude.

  • Speaker #0

    Oui, lui aussi était très prude.

  • Speaker #1

    En fait, il a pensé que je lui brandissais un gomme miché.

  • Speaker #0

    Peut-être.

  • Speaker #1

    Comment vous imaginez, vous, dans 20 ans ?

  • Speaker #0

    Peut-être plus là.

  • Speaker #1

    Ça fait quoi ? Ça ne fait pas beaucoup si vous n'êtes plus là dans 20 ans.

  • Speaker #0

    Oui, mais je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas. J'espère être comblée de tout ce que j'avais envie de faire dans cette vie dans 20 ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que, avant de mourir, vous aimeriez absolument faire que vous n'avez pas encore fait ?

  • Speaker #0

    Il y a plein de trucs en fait. J'ai envie de passer mon permis bateau, savoir ce que c'est l'amour véritable, d'aimer et d'être aimé à la même puissance. Permis bateau parce que j'adorerais avoir mon permis moto.

  • Speaker #1

    Vous foutez dans la même phrase, le permis bateau et l'amour vrai.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Il n'y a qu'à Dubaï que les gens font des phrases comme ça.

  • Speaker #0

    Je suis peut-être un cerveau dubaïote, qu'est-ce que tu veux ? J'adorerais passer mon permis moto, mais j'ai peur de tuer des gens, donc non. Et... un voyage quoi. Visiter à peu près tous les pays que j'ai envie de voir dans ma vie. Ouais. Aimer la vie, être heureuse.

  • Speaker #1

    C'est difficile ça d'être heureuse. Ouais. Vous êtes heureuse aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Ça va, tu vois, il y a pire. Ça c'est pas une réponse. Mais je pense qu'il y a mieux. Ouais, mais franchement, ça va. Ça va, je peux pas me plaindre.

  • Speaker #1

    Alors qu'est-ce qui manque ? Le plus du plus, c'est l'amour ?

  • Speaker #0

    Ouais, je crois.

  • Speaker #1

    Vous accepteriez si on vous proposait de changer de cerveau ? On dirait, tu seras sûrement plus heureuse, mais on te change le cerveau. Ou on change des trucs comme ça, des connexions neuronales. Oui,

  • Speaker #0

    mais tu me donnes quoi comme cerveau à la place ?

  • Speaker #1

    Je connais un mec à courbe voix qui fait des trucs, un peu de mécanique, tout ça, enfin, il se démerdera. Je serais heureuse.

  • Speaker #0

    Mais je serais heureuse. Oui,

  • Speaker #1

    comme dans l'au-dessus d'un lit de coucou à la fin.

  • Speaker #0

    Non, j'ai trop bossé sur ce cerveau pour en changer.

  • Speaker #1

    Vous n'allez même pas aller voir un psy, vous appelez ça travailler.

  • Speaker #0

    Ben ouais, c'est l'école de la vie chérie. Nous sommes fraîchis de revenir à un stade genre où il y a plein de subtilités de la vie que je ne capte pas, tu vois.

  • Speaker #1

    Je l'avais dit tout à l'heure, il y a de grandes chances pour que quand on comprend beaucoup de choses, on soit moins heureux que ceux qui en comprennent moins.

  • Speaker #0

    Mais moi mon but c'est d'être heureuse avec ce cerveau. Tu crois que c'est impossible ?

  • Speaker #1

    Soit que la réponse est derrière le rideau du love and shop.

  • Speaker #0

    Ben ça va finir là, ça va se finir comme ça cette histoire.

  • Speaker #1

    J'ai reçu un SMS. C'est l'écrivain imaginaire. « Tu fais quoi, là ? J'ai un truc à fêter. Tu viens ? » À cette heure-là, je sais où il est. Au Master Poulet. Un euro le pilon, deux cinquante la cuisse avec sauce offerte Ausha, ouvert jusqu'à cinq heures du matin. Devant, toujours du monde qui attend. Des jeunes, majoritairement. Casquettes, sacoches, verres fumés. Tous patientent pour de la volaille frite. Dans la file d'attente, ça sent le faux poulet et la vraie weed. L'écrivain imaginaire est assis sur une chaise de jardin, sur le trottoir qui fait terrasse. Il mange son poulet. Rivé sur son smartphone, il regarde une chaîne info où les intervenants refont le monde en s'engueulant. C'est distrayant. Il suit ça comme ses parents regardaient au théâtre ce soir. « Je m'assois. » je demande. « Alors qu'est-ce qu'on fait ? T'as rencontré quelqu'un ? » Il hausse les épaules. « Tu comptes ? » il m'interroge. « Tu comptes faire quoi, toi, quand ça va être la fin du monde ? » Ces derniers temps, il a que ça à la bouche, la fin du monde. Ce serait sa revanche. Cette nuit, il en a encore contre ce vieil éditeur qui lui tourne autour depuis des mois. Il lui fait croire qu'il publiera son roman, alors que c'est tout autre chose chez lui qui l'intéresse. « C'est ces connards qui servent à rien dans leur bureau, là. Crois-moi bien qu'avec l'intelligence artificielle, bientôt, ils seront tous dehors. Et quand ils auront perdu leur job, on verra. » Ça lui fait marrer. Enfin, pas tout à fait. « Tu vois, pour vivre seul avec Quedal, il faut le mode d'emploi. Moi, je l'ai. » « Tu viens ? Je vais te montrer là où j'habite maintenant. » Nous voilà partis. Assis au fond d'un bus, on sort de la ville pour s'enfoncer en grande banlieue. Quand je repose le pied à terre, il est déjà quatre heures passées. Où est-ce qu'on est ? Où est-ce qu'on va ? Je sais pas. « Tu vas voir, c'est ouf ! » m'annonce l'écrivain dans un regain d'énergie. On passe devant des lotissements, des résidences. Aux façades, plus une lumière. Tout le monde qui dort. Les rues sont vides. Après dix minutes, comme ça, il s'arrête l'écrivain. « C'est là ! » qui me dit tout fier la gueule enfarinée. On est devant une barre d'immeubles désaffectée. Longs grillages qui courent devant. Un panneau dessus pour indiquer la destruction prochaine du HLM. Voilà qui soulève le grillage. Avance quelques mètres avant de se retourner vers moi. « Qu'est-ce que tu fous, putain ? Tu viens ? » Voilà ce qu'on est venu fêter. L'écrivain imaginaire mène désormais la grande vie d'un squatter. Au huitième et dernier étage, cloisons, appartements, tout a été préalablement détruit. Au sol, il reste encore des petits bouts de mur. Plusieurs centaines de mètres carrés pour lui tout seul, l'écrivain, avec vue panoramique sur la ville au loin. « S'emmerde pas ? » je l'entends qui me dit. « Qu'est-ce que t'en penses ? C'est pas mal, non ? C'est pas Stéphane Plaza qui m'aurait trouvé ça. On est seul. Tout en haut de cette barre HLM. Bientôt le jour qui va se lever. La vue est dingue. C'est beau, mais en même temps c'est comme si tout était bientôt fini. Comme si pour de bon on l'a répété cette fin du monde. Avant les autres. Juste pour prendre nos marques. S'il avait raison, l'écrivain. Si l'homme du futur, le vrai, celui qui survivra, c'était lui. Man Max au RSA. On l'a fait, Macrémaillère, ou pas ? De son sac à dos, il sort deux boîtes de Red Bull. En euphorie, le voilà qui gueule. « Santé ! » C'est la première fois que je le vois, l'écrivain, qui semble apaisé. À mon tour, je lève ma boîte d'énergie drink. Je regarde droit devant, comme on le fait pour un vœu le jour de l'an. « Bonne fin du monde à nous. »

  • Speaker #0

    Yann Roque

  • Speaker #1

    Rindu,

  • Speaker #0

    journal d'un insomniac. Vos oreilles s'égarent dans la nuit.

Description

HEURE INDUE est de retour !

Heure Indue, journal d'un insomniaque : le road-trip nocturne dans la ville. 


HEURE INDUE, C'EST QUOI ?  

C’est l’histoire d’un type qui ne dort pas la nuit et emmène avec lui un compagnon de route d’un soir (artiste, auteur, politique …) vivre un road-trip dans Paris. 

Par sa poésie et sa forme intimiste, « Heure Indue » révèle les personnalités avec la nuit pour toile de fond. 

Porté par une narration à la première personne, Johann Roques embarque l’auditeur dans une grande virée au bout de la nuit.


JOHANN ROQUES, C'EST QUI ? 

Par le passé, vous êtes peut-être déjà tombé sur moi en écoutant la matinale de Radio Nova ou OUI-FM, Europe 1, RTL2, France Culture, et dernièrement "Les mots du soir" la libre antenne de France Bleu,

Ceinture 12ème Dan en insomnie, « Heure Indue » est le programme sur lequel j’aurais aimé pouvoir zapper tard la nuit à la radio. 

Ça n’existait pas, alors j’ai décidé de m’y coller…


Doully, compagne de route d’une nuit : 

Actrice, humoriste et standupeuse. 

Professionnellement, elle débute très jeune en exerçant des petits boulots dans le milieu de la nuit et du clubbing à Paris.

À cette époque, elle sombre dans l’addiction aux drogues dures. 

Après trois arrêts cardiaques suite à des overdoses, elle part en Israël pour suivre un programme de sevrage. 

Elle ira vivre ensuite à Barcelone plusieurs années. 

C’est en revenant à Paris qu’elle va commencer à jouer la comédie. 

À la radio, elle débute comme chroniqueuse sur Europe 1, puis France Inter dans l’équipe de Charline Vanhoenacker.  Désormais, elle est sur Radio Nova dans La Dernière avec Guillaume Meurice. 

À la télévision, c’est elle qui a repris le flambeau de Jules-Edouard Moustic à la présentation de l’émission satirique Groland Le Zapoï sur Canal Plus. 

 



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    « Prends son numéro et appelle-le de ma part, c'est le meilleur » , avait-elle dit au sujet de ce médecin spécialiste du sommeil. Le sceptique, moi, j'avais épluché son compte Instagram qui compte plus de followers que j'en aurais jamais. Est-ce que c'était d'être passé à la télé qui lui avait rempli son cabinet pour les six prochains mois ? On n'allait pas être pressé pour décrocher un rendez-vous chez le docteur Sommeil. Mais j'y étais à présent. La salle d'attente, trois personnes assises sur des chaises en plexi bleu. Comme moi, sans doute, elles viennent m'endier quelques heures de sommeil en échange d'une consultation à tarif non conventionnel. Ça ne me ferait pas de mal de dormir un peu. Les derniers temps, j'avais repoussé jusqu'à l'absurde le moment de m'endormir. Une fois que je serais sorti de là, cette nuit, j'avais rendez-vous avec Dooley, comédienne, humoriste, stand-up-euse. Depuis le bout du couloir, une voix prononce mon nom. Je me lève et marche, direction le bureau du docteur Sommeil. Je rentre dans le bureau du tout-bip. Ses yeux sont rivés sur un écran d'ordinateur. Il m'annonce. « C'est pour ça que vous dormez pas. Il est là, votre problème. » Il tourne l'écran vers moi. Dessus, un graphique en dents de scie, mon cycle de sommeil enregistré deux semaines auparavant. Moi, je vois qu'une courbe au trait hystérique qui monte et descend continuellement. Je l'ai tout de suite prévenu. Hors de question que je ressorte de là avec une ordonnance pour des médocs. Stilnox, Imovan, Zolpidem. Tout le catalogue entier des somnifères, je l'ai déjà feuilleté et je ne le réouvrirai pas. Le docteur Sommeil est d'accord. Ces trucs-là, c'est jamais bon sur le long terme. Enfin, tout bip sérieux. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait vous convenir, m'a-t-il annoncé. Il m'a parlé d'une liste d'attente pour un protocole expérimental au Canada. Une nouvelle thérapie pour restaurer le sommeil en reconditionnant le cerveau grâce à l'intelligence artificielle. Trois à quatre séances, tout au plus, sous anesthésie générale. Des électrodes vissées au crâne pour envoyer du jus à plus ou moins vive intensité. Vous dormirez comme un bébé, après. M'a promis le docteur Sommeil, ses yeux pétillés comme le type qui voit s'approcher la fin du monde depuis la fenêtre de sa cuisine. Il m'a proposé d'envoyer mon dossier à Toronto. « Mon cycle de sommeil à l'agonie et moi, on pourrait intégrer le club très fermé des volontaires sélectionnés pour être cobayes. » « Hum, ouais, c'était pas sûr. » « Le cerveau, c'est quand même plus fragile qu'une machine à laver. Moins on y touche et mieux c'est, non ? » Il a souri. « Monsieur Rock, traverser la rue, c'est risqué aussi. Pourtant, on le fait bien tous les jours. » « À la tête que j'ai fait, il n'a pas insisté. » Ça semblait bien l'ennuyer de me laisser partir sans la moindre solution. Un tout bip qui passe à la télé. Je dois rester fidèle à son image de marque. Le docteur Sommeil s'est penché vers moi. Il a dit. Écoutez, pour ce mois-ci, je vais vous prescrire une boîte de Stilnox. Ce soir, j'avais donné rendez-vous à Dooley dans une brasserie. Je l'attendais.

  • Speaker #1

    Allô ? Vous êtes dans quel coin ? Comment ça en bas ? En bas d'où ? Ouais, je suis dans la brasserie. Ouais, exactement. Regardez, je tends la main. Je suis là. C'est bien. Bonjour. À la bise.

  • Speaker #2

    Bah ouais.

  • Speaker #1

    Vous en priez. Asseyez-vous.

  • Speaker #2

    Ça va bien ? Ça va, yo. Ouais. On peut se tutoyer ?

  • Speaker #1

    Alors on va faire ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    Mais toi tu me tutoies ?

  • Speaker #1

    Moi je ferai ce que je veux et vous,

  • Speaker #2

    vous allez faire un truc.

  • Speaker #1

    Vous allez faire absolument ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Comment s'est passée cette journée ?

  • Speaker #2

    Cette journée s'est passée. Je dois écrire des blagues, voilà. Je dois écrire des blagues et du coup j'hésite entre les sujets de blagues pour préparer d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Vous êtes en pleine tournée ?

  • Speaker #2

    Ouais, aussi. Demain je repars.

  • Speaker #1

    Vous serez où ?

  • Speaker #2

    À ma mère.

  • Speaker #1

    Vous savez où c'est ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas du tout.

  • Speaker #1

    Mais ça vous plaît ?

  • Speaker #2

    De tout ça ? C'est super de rencontrer des gens nouveaux. Par contre, c'est vrai qu'on n'a pas trop le temps de profiter.

  • Speaker #1

    Regardez-vous les avis du public une fois qu'ils sont venus à votre spectacle ?

  • Speaker #2

    Jamais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Je crois que je n'ai pas envie de savoir trop.

  • Speaker #1

    C'est qui la personne dont l'avis compte le plus alors ?

  • Speaker #2

    Ça dépend. En vrai, j'ai tellement d'amis que je crois que tous les avis comptent en fait.

  • Speaker #1

    Il y a des choses que vous avez changées grâce ou à cause de vos amis ?

  • Speaker #2

    Oui, bien sûr. Heureusement qu'ils sont là. Parce que moi, je suis un peu souvent toute seule dans ma tête. Donc si... Je vais souvent du point A au point Z sans faire les autres lettres. Oui, il faut me déchiffrer.

  • Speaker #1

    Et vous, vous arrivez à déchiffrer facilement les gens ?

  • Speaker #2

    Je crois, oui, mais on peut toujours se planter.

  • Speaker #1

    Par exemple, regardez. Moi, ce que j'aime ici, dans cette brasserie, c'est qu'on a l'impression d'être derrière la vitre d'un aquarium. Vous les observez, vous, les gens ?

  • Speaker #2

    Alors moi, déjà, je ne vois rien de loin.

  • Speaker #0

    Là,

  • Speaker #1

    on est très loin. Regardez, à 15 centimètres, il y a un mec qui parle avec sa copine.

  • Speaker #2

    En fait, je n'aime pas trop regarder les gens. Comme j'ai pris l'habitude de ne rien voir, j'ai pris l'habitude de ne pas regarder les gens. Du coup, peut-être que j'ai raté l'homme de ma vie comme ça. Peut-être qu'il y a quelqu'un qui m'a regardé un jour et que je l'ai regardé dans les yeux sans le voir.

  • Speaker #1

    Si c'était l'homme de votre vie, il serait venu quand même, non ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, peut-être qu'il était timide.

  • Speaker #1

    Ah, et vous, vous êtes timide ?

  • Speaker #2

    Oui, je suis hyper timide. On n'a pas l'impression que ça, mais je suis timide. Par exemple, si tu m'invites à une soirée et que tu me laisses dans le salon alors que je ne connais personne...

  • Speaker #1

    Il faut que les gens viennent vers vous.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais ça doit être compliqué, ça, parce que maintenant que vous avez la petite notoriété qui est arrivée, les gens peuvent venir vers vous pour de mauvaises raisons.

  • Speaker #2

    Oui, mais en vrai, c'est plutôt l'inverse dans mon cas. C'est-à-dire que, par exemple, je trouve qu'on rencontre moins de gens quand on a ça, moins facilement.

  • Speaker #1

    Parce que les gens qui ont la notoriété... Vous en parlez comme d'une maladie.

  • Speaker #2

    Non, mais ça l'est un peu.

  • Speaker #1

    Ça fait combien de temps que vous avez fait ça ? Ça fait combien de temps que vous avez réalisé que vous aviez ça ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Depuis le confinement, tu vois, un truc comme ça. Mais si tu veux, quand tu as cette maladie, les gens osent moins venir te parler spontanément. Même si tu rencontres quelqu'un sur une appli de rencontre ou n'importe quoi, il va te parler normalement. Une fois qu'il s'est quitté... Il y a un changement de comportement. Là, si on parle que de rencontres, je trouve que c'est plutôt un handicap.

  • Speaker #1

    Ça fait cinq fois que vous me parlez de rencontres déjà. D'un cours, d'aller vers l'autre.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas, c'est toi qui m'as dit, viens, regarde les gens et tout.

  • Speaker #1

    Vous savez ce qu'on va faire de cette nuit ? Est-ce que vous avez une idée ?

  • Speaker #2

    Non, aucune.

  • Speaker #1

    Et l'idée de ne pas savoir ce qui va se passer dans cinq, dix minutes, ça vous met dans quel état d'esprit ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'adore l'inconnu, donc plutôt cool. Je prévois jamais rien dans ma vie. Par exemple, quand je pars en vacances, je n'ai jamais de billet de retour. Après, en général, je n'ai pas réservé d'hôtel. Moi, j'aime bien la liberté, quoi. De faire ci ou ça. Mais rien n'est fixé dans le marbre. Tu vois, si demain, je change d'avis, je change d'avis, quoi.

  • Speaker #1

    Vous n'êtes pas forcément faite pour la vie de couple.

  • Speaker #2

    Ah non, non. Moi, je n'ai jamais dit qu'il fallait vivre en couple. J'étais pas là, moi, le jour où ils ont décidé ça. Ah non, non, non. Moi, il est hors de question que je vive avec la personne que j'aime.

  • Speaker #1

    Ça vous le dites dès le début ?

  • Speaker #2

    Ouais, ouais. Enfin, pas des premiers rendez-vous, parce que le gars, il va angoisser, quand même. Enfin, une fois qu'on se dit qu'on est ensemble, si tu évoques l'idée d'habiter avec moi, je te dis instantanément que ça n'arrivera jamais. Mais jamais. Le quotidien tue. Moi...

  • Speaker #1

    Mais ça, c'est pas bien accepté. Je me rappelle d'une vie à qui j'avais dit, même l'héroïne dans un film n'est pas de tous les plans.

  • Speaker #2

    Ben oui.

  • Speaker #1

    Mais elle n'avait pas compris qu'elle soit coupée au montage à certains moments.

  • Speaker #2

    Oui, oui, mais je suis tout à fait d'accord avec toi. C'est-à-dire que tu vois, je veux dire, tu aimes les pêches melbares. C'est vraiment un dessert éclaté. Je ne sais pas pourquoi, parce qu'on est dans une brasserie. Mais tu aimes les pêches melbares. Je t'en sers tous les jours à midi. À un moment donné, tu vas dire, casse-toi avec ta pêche melbares.

  • Speaker #1

    Si vous deviez résumer votre vie sentimentale à un tableau Excel, vous savez quoi ?

  • Speaker #2

    C'est compliqué.

  • Speaker #1

    De votre fait ou de la personne en face ?

  • Speaker #2

    Je crois que c'est plutôt mes choix qui ne sont pas les bons. Non, parce que c'est quand même très cool en couple. On n'a pas grand-chose à me reprocher, à part le fait peut-être un petit peu trop d'indépendance. À part ça, je te laisse faire absolument tout ce que tu veux dans ta vie.

  • Speaker #1

    C'est peut-être ça le problème.

  • Speaker #2

    Non, moi...

  • Speaker #1

    Ils veulent un peu être serrés, non ? C'est pas que les hommes aiment la conquête aujourd'hui.

  • Speaker #2

    Mais oui, oui, j'ai bien remarqué que mes potes adoraient avoir des nanas un peu relous. C'est fou comme on s'attache souvent... À l'opposé de ce qu'on aimerait vraiment.

  • Speaker #1

    Et ça serait quoi votre opposé, vous ?

  • Speaker #2

    Mon opposé, ce serait quelqu'un de très rangé, avec des mocassins. Mais ça c'est pas possible du coup.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #2

    Non c'est une catastrophe. Ça revient à la mode là. Ouais c'est pas sexy quoi.

  • Speaker #1

    Vos parents ils sont toujours ensemble ?

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Ils sont aimés à la folie ?

  • Speaker #2

    Vous pensez ? Ils sont aimés à leur façon mais...

  • Speaker #1

    C'est quoi leur façon ?

  • Speaker #2

    C'est pas passionné quoi tu vois mais par contre ils s'aiment profondément. Mais c'est pas ça que je veux. Bah je les ai jamais vu s'embrasser ou se plaquer contre un mur quoi tu vois.

  • Speaker #1

    On ne fait pas ça forcément devant sa fille.

  • Speaker #2

    Oui, mais on vivait dans un 30 mètres carrés. Alors si tu veux, comme je n'avais pas de chambre, à un moment donné, j'aurais pu croiser un moment intime sans qu'il le veuille vraiment.

  • Speaker #1

    Donc vous voulez de l'amour comme au cinéma ou dans les romans ?

  • Speaker #2

    Oui, moi j'y crois à ça.

  • Speaker #1

    Vous avez quel âge aujourd'hui ?

  • Speaker #2

    C'est indiscret de demander ça. Oui,

  • Speaker #1

    mais c'est justement pour la raison pour laquelle je pose la question. 37, 38 ?

  • Speaker #2

    37.

  • Speaker #1

    Mais il tarde à venir alors !

  • Speaker #2

    Après, tu vois, imaginons, je l'aurais rencontré il y a 10 ans. Bon, très bien, super, mais il y a plein de rencontres que je n'aurais pas faites non plus. Des beaux gosses et tout, quoi.

  • Speaker #1

    Qui sont moqués, ça.

  • Speaker #2

    Mais moi, j'ai un souci, là, c'est que depuis genre 4-5 ans, il n'y a que des mecs de 10 ans de moins que moi qui viennent me voir et qui me draguent. Donc du coup, je ne sors qu'avec des mecs de 26-27 ans.

  • Speaker #1

    C'est votre genre ?

  • Speaker #2

    Ouais, C'est marrant parce que ça ne l'était pas forcément avant.

  • Speaker #1

    C'est une barrière ça, 10 ans d'écart ?

  • Speaker #2

    Non,

  • Speaker #1

    pas du tout. À partir de combien d'années sur le contrat, c'est une barrière ?

  • Speaker #2

    Je pense que ça commencera...

  • Speaker #1

    25 ans d'écart, est-ce que ça pèse ? Là,

  • Speaker #2

    moi, je pense que ça me dérangerait. Non, mais si tu m'enlèves 25 ans, la société, il a 12 ans. C'est compliqué.

  • Speaker #1

    Il y a plein de sujets que vous ne pourrez pas aborder.

  • Speaker #2

    Mais 10 ans, c'est que dalle. Ça dépend comment tu es dans ta tête. Moi j'ai des potes de 26 ans qui... J'ai un copain, il a 26 piges, il adore les nanas de 50 ans. Il aime ça, il a envie de tomber amoureux d'une meuf de 50 ans.

  • Speaker #1

    Histoire de revenu. Moi, ça a été longtemps une ambition de passer ma vie en peignoir toute la journée, attendre la femme de ma vie au bord de la piscine.

  • Speaker #2

    C'est ça qui l'excite. Sexuellement, il est attiré par les nanas de 50 balais, voire plus. Et toi, tu as quelqu'un ?

  • Speaker #1

    J'ai rencontré une fille, et puis au bout de trois semaines, elle m'a dit qu'elle partait au Mexique. Je me demande si ce n'est pas un prétexte pour...

  • Speaker #2

    Mais tu l'as rencontré vraiment ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    je l'ai vraiment rencontré. Ah, vous avez l'impression que je me fais des films dans ma tête ? Non,

  • Speaker #2

    mais peut-être que c'était un fake. Oui, oui, oui. Il y avait des sentiments ? Tu étais amoureux un peu ?

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi l'amour ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Elle m'envoyait des vidéos filmées sur son smartphone. Des selfies aussi, avec pour toile de fond, des monuments, des paysages. Quelques semaines avant, elle m'avait annoncé partir en voyage. Ouais, elle ne savait pas quand elle rentrerait. J'aurais bien voulu partir avec elle. Mais à chaque fois, c'est comme si mes pieds étaient pris dans le béton de la ville. Je suis resté là. Dans ses vidéos face caméra, elle me disait « Vous » . Ça ne m'était donc pas exclusivement adressé. C'était pas désagréable. Depuis mon canapé, voir cette fille à l'autre bout du monde jouer les guides touristiques. J'avais l'impression d'être devant un doc sur France 5 ou Arte. Seulement, après quelques jours passés là-bas... Quelque chose d'étrange a commencé à s'opérer. C'est difficilement explicable. Sur ses vidéos, j'avais l'impression que son visage se modifiait. D'abord sa bouche, puis un truc dans ses yeux, ensuite sa coupe de cheveux. Progressivement, son apparence s'éloignait de celle que j'avais connue avant son départ. C'était déroutant. Elle ne semblait rien remarquer de ce bouleversement. Environ quinze jours, elle ne s'était plus du tout la même femme. Le plus étrange, c'est qu'à mesure qu'elle se transformait, son visage me devenait de plus en plus familier. Un matin, j'ai ouvert sa dernière vidéo. Elle avait totalement disparu. À sa place, une autre femme s'exprimait face caméra au milieu des paysages. Je la connaissais. C'était Oslo. Qu'est-ce qu'elle foutait là, elle, à réapparaître d'un coup sur mon écran ? C'est pas comme si j'avais pas mis des années pour l'oublier. Peut-être tout simplement que j'étais devenu dingue. J'ai remonté le fil de discussion WhatsApp des jours précédents. Oslo était désormais présente sur toutes les vidéos. La même voix, les mêmes mimiques, sa gestuelle. Tout pareil comme à l'époque, avant qu'elle ne s'éclipse pour plus jamais donner de nouvelles. Je devais être fatigué. C'est du moins ce que je me suis dit sur le moment. La nuit d'après. Il était 3h30 quand mon téléphone s'est mis à vibrer. À cette heure-là, qui pouvait tenter de m'appeler ? Là ? Sur l'écran rétro-éclairé, le prénom d'Oslo est apparu. Avec Doulie, on avait quitté la brasserie. Il faisait bon, on s'était mis à marcher dans le quartier.

  • Speaker #2

    J'avais été à Barcelone.

  • Speaker #1

    Je sais, pendant combien d'années ?

  • Speaker #2

    Huit ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous êtes partie faire pendant huit ans ?

  • Speaker #2

    À la base, je voulais voir du pays et surtout arrêter de travailler la nuit.

  • Speaker #1

    Vous avez fait pas mal de petits boulots ?

  • Speaker #2

    Ouais. Par là ? Allez.

  • Speaker #1

    Quel petit boulot qui va laisser le meilleur souvenir, vous ?

  • Speaker #2

    J'ai adoré travailler la nuit, en vrai. C'était un peu la fête tous les jours, même si c'est des boulots très durs. C'était très chouette, mais on bossait de 19h à 7h du matin, 7 jours sur 7.

  • Speaker #1

    Tu étais quoi ?

  • Speaker #2

    J'ai un peu fait tous les métiers là-bas. J'étais au vestiaire au premier, et après j'avais 17 ans. Et après, je suis passée barman.

  • Speaker #1

    C'est stratégique le vestiaire. C'est très stratégique.

  • Speaker #2

    C'est très stratégique, il faut se faufiler. C'est mieux d'être petit quand on fait le vestiaire. Enfin, ça dépend des endroits. Mais disons que dans les endroits où j'ai travaillé, dans des cales à bateau. J'ai fait le vestiaire dans pas mal d'endroits à Paris.

  • Speaker #1

    Donc ça, c'était les meilleurs souvenirs ? Le plus mauvais ?

  • Speaker #2

    Je ne sais pas. Je crois que vendeuse de fringues, ça ne m'a pas passionnée. Alors que j'adore les fringues, tu vois. Moi, tu me dirais, je m'éclatais quand même. Mais je me faisais un peu chier. En fait, je n'aime pas avoir un patron. Donc la nuit, ton patron, il picole, il s'en fout. quand même un peu de chill quoi tu vois alors que dans un magasin de fringues bah tu vois t'as des horaires bah très tôt déjà je déteste le matin et puis t'as un chef qui veut qu'il ait du rendement quoi moi ça je suis pas très compète j'aime pas la compète j'aime pas tu sais il faisait des concours du meilleur vendeur je déteste ça je préfère laisser gagner les autres et montrer que j'en ai rien à foutre parce que J'aime pas ce que ça véhicule. et moi avoir la paix quoi.

  • Speaker #1

    Et vous me dites ça alors vous travaillez dans le show business, dans l'industrie du spectacle.

  • Speaker #2

    Je t'aime mais...

  • Speaker #1

    C'est friand de lit les humoristes entre eux ou on se tire la bourre quand même ?

  • Speaker #2

    Non, moi je trouve que... Non, moi je trouve qu'on s'en sort plutôt pas mal. Après je sais que je suis pas compétitrice là-dedans et je sais que ça peut me porter préjudice parce que je sais pas aller dans des trucs par intérêt. Je sais pas aller demander. En général dans toutes les soirées. Tu me verras discuter en général avec les mecs de la sécu ou le mec au bar. Mais c'est rarement les personnes qui vont me donner le premier rôle.

  • Speaker #1

    Donc là, on est ce soir à Belleville, sur un banc public, entre des sanisettes, des dames qui vont de leur corps, un camion poubelle qui est en train de faire...

  • Speaker #2

    C'est un peu l'histoire de ma vie.

  • Speaker #1

    J'ai lu une interview de vous, vous disiez, je descendais dans la rue, je m'asseyais sur un banc et des inconnus m'ont raconté leurs histoires, leurs problèmes.

  • Speaker #2

    Enfin non, je ne m'asseyais pas sur des bancs en attendant des gens qui venaient me raconter.

  • Speaker #1

    Ou ailleurs, disons.

  • Speaker #2

    Non, non, je pense que cette interview a été très...

  • Speaker #1

    Je l'ai confondue avec Anne Roumanoff, pardonnez-moi, désolé.

  • Speaker #2

    Non, je m'asseyais beaucoup avec les mecs qui vivaient dans la rue, je discutais des heures avec eux. Mais sinon, oui, il y avait ce phénomène qui faisait que pendant longtemps... Des gens que je croisais au boulot ou quoi, on s'échangeait les numéros, parce qu'il y avait une petite connexion, mais amicale, mais si tu veux pas plus que ça. Et ces gens m'appelaient pour me raconter des problèmes existentiels.

  • Speaker #1

    Mais des problèmes comme quoi ? Des problèmes de couple, des problèmes d'argent ?

  • Speaker #2

    Des problèmes plus profonds que ça, des problèmes de dépression, d'envie de suicide.

  • Speaker #1

    Et ils disaient que vous étiez la bonne personne pour éviter le suicide.

  • Speaker #2

    Oui, apparemment.

  • Speaker #1

    Donc vous avez sauvé pas mal de vies.

  • Speaker #2

    Oui, je crois.

  • Speaker #1

    En étant à l'écoute.

  • Speaker #2

    Oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Dans une de ses interviews, vous avez parlé d'un gars qui s'appelait Momo.

  • Speaker #2

    Oui, Momo. C'est un mec qui habitait dans la rue. Enfin, qui habitait. Je l'ai rencontré sur le premier jour de rue. Et il était très touchant. Parce qu'il avait perdu sa femme. Enfin, sa femme l'avait larguée. Il avait perdu son boulot.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il avait fait ? Il a gringolé ?

  • Speaker #2

    Je ne sais plus du tout l'histoire dans son intégralité. Mais en tout cas, je l'ai vu moi, lui, dégringoler. Ça abîme la rue. Ça abîme très rapidement. Je pense que même pas si une semaine dans la rue, t'aurais pu avoir une gueule.

  • Speaker #1

    Vous, c'est l'époque où vous étiez émancipée. Vous étiez partie de chez vos parents à 14 ans. Vous aviez votre petit appartement. Vous faisiez votre vie.

  • Speaker #2

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous l'avez dit sciemment, je vais rencontrer des gens à la marge. Ou c'est les gens à la marge qui sont venus vers vous ?

  • Speaker #2

    Non, c'est juste que je pense qu'on se faisait un petit sourire et puis qu'à un moment donné, on se mettait à discuter, tu vois. Tu les croises tous les soirs, tous les matins. Il y a un eye contact. Il y a un lien qui se crée, quoi.

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il est devenu quoi, Momo ?

  • Speaker #2

    Je pense qu'il est mort, Momo. Je doute qu'il ait survécu à tout ça, parce qu'à la fin, il n'allait pas bien du tout. En quoi ? En 3-4 ans. Tu sais que j'ai voulu faire, pendant le confinement... Assitant social ? Mais non, je voulais faire SOS à détresse amitié, là, tu vois. Le truc où les gens t'appellent, parce que moi je suis insomniaque. Je me disais, bon, les gens ne font rien de la journée, alors j'écrivais un peu des blagues, tu vois. Mais du coup, je me disais la nuit. Je pourrais faire ça. J'ai l'impression qu'il fallait faire tout un entretien, répondre à des questionnaires.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que vous diriez, vous, si vous aviez été dans cette configuration de répondre à des gens qui sont désespérés au-delà de toute attente, et qui vous disent...

  • Speaker #2

    Moi, je leur demanderais s'ils ont un rêve et de me parler de leur rêve. Tu vois, il faut se raccrocher à des trucs positifs et à des projections sur l'avenir. Parce qu'en vrai, quand t'es pas bien, t'as juste envie que ça s'arrête. Et tu ne vois pas au-delà de la situation du présent. Donc du coup, je pense qu'il faut arriver à se projeter sur des trucs positifs de l'avenir.

  • Speaker #1

    Oui, vous êtes arrivé de vous dire, si je ne suis pas là demain, ce n'est pas grave.

  • Speaker #2

    Bien évidemment, mais 150 fois. Mais encore il y a une semaine. Enfin, il y a même trois jours. Moi, ça m'arrive souvent d'être à un balcon et de regarder en bas et de me dire, oui, bon, pourquoi pas.

  • Speaker #1

    Mais vous avez un traitement pour ça.

  • Speaker #2

    Non, mais je crois que c'est assez sain. Je ne sais plus, quelqu'un m'avait dit que c'était assez sain de penser au suicide. Il est toujours là. Toujours de ce monde. Il y avait eu des études de fête. Tu n'as jamais regardé le métro arriver ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je ne pourrais pas pousser cette personne devant pour prendre ma place tout à l'heure ?

  • Speaker #2

    C'est un putain de psychopathe. Voilà ce que t'es.

  • Speaker #1

    Vous faites quoi la nuit habituellement, quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Je fais de la merde. Tu vois, je scrolle sur les réseaux, je regarde des conneries dont je ne me souviens pas deux minutes après.

  • Speaker #1

    Mais jusqu'à quelle heure ?

  • Speaker #2

    Ça peut être loin.

  • Speaker #1

    Dormir vraiment pas ?

  • Speaker #2

    J'ai du mal, j'ai vraiment du mal à m'endormir. Si tu ne me donnes rien du tout, pas de cachet, pas de CBD, rien, je ne dors pas avant 6h du matin.

  • Speaker #1

    Il y a quelque chose qui me déprime énormément, surtout à cette saison, c'est quand tu as... 5, 5h30, on commence à entendre le chant des oiseaux, on n'est toujours pas endormis.

  • Speaker #2

    C'est une horreur, je déteste les oiseaux, j'ai envie de les buter.

  • Speaker #1

    Si vous ne dormez pas, vous avez beaucoup de difficultés. Depuis quand vous ne dormez pas ?

  • Speaker #2

    Depuis toujours. Depuis toujours moi aussi. Jamais dormi.

  • Speaker #1

    Les bainsos, les bainsos de diazépine, c'est la seule drogue que j'ai connu. Ah oui, oui. Et j'adorais ça.

  • Speaker #2

    Ben oui, ça aide.

  • Speaker #1

    Non mais j'aimais bien le moment avant, vous savez, j'en prenais un et je me mettais à appeler des gens, souvent des filles.

  • Speaker #2

    Tu prenais quoi ? Tu prenais pas du Seresta ? Je prenais du Stilnok.

  • Speaker #1

    J'avais un médecin.

  • Speaker #2

    Ça donne la tchatche, le synox ?

  • Speaker #1

    Non, c'était pas la tchatche.

  • Speaker #2

    Mais t'étais sous,

  • Speaker #1

    quoi. La discussion glissait un peu. Et j'avais eu l'angoisse d'appeler ma grand-mère. Parce que le lendemain, je regardais qui j'avais appelé. J'ai dit, pourquoi je l'ai appelée à cette heure-là ?

  • Speaker #2

    T'avais peur d'avoir chiné ta grand-mère ?

  • Speaker #1

    Et j'ai arrêté pour ça. Ah oui ?

  • Speaker #2

    Ça te sortait de ton contrôle, quoi. T'es contrôle fric ?

  • Speaker #1

    Je ?

  • Speaker #2

    T'es contrôle fric toi ?

  • Speaker #1

    Contrôle fric ?

  • Speaker #2

    Contrôle fric.

  • Speaker #1

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #2

    Ça veut dire genre, t'aimes bien tout contrôler.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez pris longtemps, vous, des bains de jour ?

  • Speaker #2

    Moi, je continue à en prendre, je prends l'hexanaque.

  • Speaker #1

    Et alors, vous appelez des gens quand...

  • Speaker #2

    Non, pas du tout.

  • Speaker #1

    Vous n'avez jamais appelé des gens pendant que...

  • Speaker #2

    Je sais que... Je crois qu'à mes 22 ans, j'ai appelé la dernière personne sous l'emprise de l'alcool. Genre, j'étais bourrée en soirée, et j'ai appelé, pas un ex, mais un mec avec qui c'était en train de se finir. Je l'ai appelé pour la énième fois, parce que ça m'était déjà arrivé plein de fois, d'appeler pour le coup des ex, un ex en particulier. Et je me souviens, je revoyais mon portail, je me disais, putain, on a parlé deux heures, et je me disais, mais je ne me souviendrai de rien de ce qu'on avait dit. Et ça a été la fois trop, je me souviens, j'avais 22 piges, j'étais au Canary, je crois. Et je me suis dit, plus jamais, jamais, jamais, je n'appellerai. je n'utiliserai mon téléphone quand je suis bourrée ou dans un état de conscience modifié.

  • Speaker #1

    Vous êtes tenue à cette promesse.

  • Speaker #2

    Je suis tenue à cette promesse, c'est-à-dire que mon cerveau a été reprogrammé pour ne jamais appeler qui que ce soit quand je ne suis plus moi-même. À 100%. Donc du coup, ouais, je ne vais pas arrêter le Xernax.

  • Speaker #1

    Vous aimez faire des trucs inutiles dans la vie ?

  • Speaker #2

    Ouais, moi je fais souvent des trucs inutiles. J'ai une idée.

  • Speaker #1

    « Un taxi. »

  • Speaker #2

    « Ah bon ? » « Ouais. »

  • Speaker #0

    Ça me fait bizarre d'être dehors à cette heure-là. Ces derniers temps, mes soirées, je les avais passées enfermées dans un studio de radio, au septième étage d'une roue de hamster posée à plat. à l'ouest de la ville. Durant deux heures quotidiennement, j'écoutais des gens au téléphone me raconter leur vie. Ça devait être la veille avant que mon émission s'arrête. Marie-Lou, 12 ans, bientôt 13, venait de débarquer sur l'antenne. Huit mois déjà qu'elle écoutait l'émission depuis qu'un jour, zappant la FM, elle était tombée dessus par hasard. Désormais, la nuit tombée, elle s'abreuvait des histoires des autres avant de fermer les yeux et s'endormir. Marie-Lou. déléguée de classe de cinquième, avait le tempérament affirmé d'une gamine qui sait qu'on doit attendre quelque chose de la vie si on veut que ça arrive vraiment. Elle, plus tard, elle aimerait bien être journaliste, politique ou judiciaire. Elle hésitait encore. Bolubile, authentique surtout. Depuis quelques minutes qu'elle avait commencé à parler, Marie-Lou, moi, j'étais retourné dans ma chambre d'ado. assis sur mon lit une place. Je patientais, fébrile. Depuis de longues minutes déjà, j'étais accroché au téléphone. Ce téléphone fixe, préhistorique, qu'avaient mes parents quand j'étais gosse. J'avais tiré des kilomètres de câble jusqu'à ma piaule. Refermer la porte pour pas les réveiller. Je m'en souviens de cette nuit-là, et comme si c'était il y a une heure. J'attendais mon tour, fixant l'affiche accrochée au mur au-dessus de mon lit. Mad Max, un dit plongiligne, combinaison de cuir et casque, brandissant arme à feu sur un bolide noir fonçant toute allure dans ma direction. À l'horloge de mon radio-réveil, déjà minuit passé, le lendemain à huit heures, j'avais cours d'histoire avec M. Aubert. Il y aurait un terreau écrit sur la Première Guerre mondiale. Mais je m'en foutais. Demain, c'était loin. L'important ? Qu'est-ce qui allait se passer dans les prochaines minutes ? Bientôt, ce serait à moi. Faudrait que je sois bon. Quand le disque à la radio fut terminé, dans le combiné téléphonique, j'ai entendu une voix qui s'adressait à moi. Cette même voix que j'écoutais à la radio depuis des mois, chaque soir, dans l'obscurité, venait de me poser une question. « T'as quel âge ? Tu t'appelles comment ? » J'ai pris une grande respiration. Et mes yeux plantés dans ceux de Mad Max, j'ai dit... Moi, je m'appelle Johan. J'ai 12 ans. Avec Doulie, on a pris un taxi. Direction le centre de la ville.

  • Speaker #2

    C'est quoi d'autre que métier ?

  • Speaker #1

    Le problème, c'est que je n'ai jamais fait de métier, jamais fait que de la radio.

  • Speaker #2

    Toujours fait que de la radio.

  • Speaker #1

    Ce qui n'est pas un métier en soi.

  • Speaker #2

    Ben si, attends.

  • Speaker #1

    Non, non, non.

  • Speaker #2

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Vous faites un vrai métier ?

  • Speaker #2

    Ben ouais, sinon... C'est des métiers, ouais. C'est des vrais métiers. J'ai bien vu la gueule de mes emplois du temps, j'estime que c'est un vrai métier, oui.

  • Speaker #1

    Vous travaillez beaucoup ?

  • Speaker #2

    Je travaille énormément.

  • Speaker #1

    Vous êtes fatiguée en ce moment ?

  • Speaker #2

    Très.

  • Speaker #0

    Ça ne se voit pas.

  • Speaker #2

    C'est gentil.

  • Speaker #0

    Enfin, ça ne s'entend pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est dégueulasse.

  • Speaker #1

    Mais ça n'a jamais aussi bien marché pour vous,

  • Speaker #0

    là ?

  • Speaker #2

    Je ne me rends pas vraiment compte, en fait. Oui, ça marche bien.

  • Speaker #1

    Il y a un indice pour savoir.

  • Speaker #2

    Ah ouais ? C'est vrai ?

  • Speaker #1

    Dans quelques jours, on va déclarer ses impôts.

  • Speaker #2

    Ah ouais, ça c'est une catastrophe ça. C'est dégueulasse, parce que moi je suis dans une espèce de marge où en fait je suis dans la tranche la plus haute de ma catégorie.

  • Speaker #0

    Enfin tu vois ce que je veux dire, moi j'y comprends rien à ces conneries mais si tu veux en fait je paye beaucoup trop par rapport à ce que je gagne quoi. En fait c'est juste...

  • Speaker #1

    Donc vous payez trop d'impôts quoi ?

  • Speaker #0

    Un peu trop ouais par rapport à ce que je gagne ouais.

  • Speaker #1

    Vous êtes avec une bande du maris de gauche.

  • Speaker #0

    Ouais mais moi je suis pas politisée tu sais.

  • Speaker #1

    C'est important pour vous l'argent ?

  • Speaker #0

    Non, c'est important de pas se prendre la tête mais j'ai pas de... j'attache pas plus d'importance que ça. D'ailleurs si tu vois la gueule des mecs avec qui je suis... Tu comprendras que je n'y attache aucune importance.

  • Speaker #1

    Vous en faites quoi alors ?

  • Speaker #0

    J'aide beaucoup des gens dans ma famille. Et puis, quand je peux inviter des potes, ça me fait plaisir.

  • Speaker #1

    Vous êtes économe ?

  • Speaker #0

    Non, pas du tout. Je suis un panier percé, c'est une catastrophe.

  • Speaker #1

    Vous n'avez pas l'angoisse de ce qui va se passer demain ?

  • Speaker #0

    Oui, je l'ai l'angoisse, mais comme je n'ai vécu avec rien, du coup, je n'ai juste pas envie de revivre avec rien. Mais je sais que c'est possible de survivre, en tout cas.

  • Speaker #1

    Comment on vit ? Avec rien, justement ?

  • Speaker #0

    On survit. Il y a des gens qui n'y arrivent pas. Malheureusement. Mais parce que je pense que quand tu as perdu le moral de tout, tu es un peu... Quand tu n'as vraiment pas le moral... C'est pour ça qu'il y a des gens qui jugent beaucoup, des gens qui ne s'en sortent pas. Mais je crois que ces gens-là n'ont jamais été dans ces situations. Ils pensent avoir galéré un peu parce que leur père ou leur mère a arrêté de leur donner de l'argent de poche ou j'en sais rien. Et ils se disent qu'ils ont vécu la galère. Mais la galère, c'est tout mélangé, c'est tout en même temps. C'est-à-dire que tu n'as pas le moral, tu n'as pas d'oseille, tu n'as pas d'appart, tu n'as rien, tu n'as pas d'amis. Je pense que les gens qui jugent, ils ne se sont jamais retrouvés confrontés à cette situation. d'avoir rien, pas une main tendue. Là, du coup, va toi trouver l'énergie à l'intérieur de toi pour t'en sortir. C'est pas forcément évident. Mais je crois que j'irai au soleil si je suis dans la merde, tu vois.

  • Speaker #1

    J'ai vu ces gens-là qui font la queue pour aller dans ce... C'est quoi ?

  • Speaker #0

    Moi, je fais pas la queue.

  • Speaker #1

    Vous faites jamais la queue, vous ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Vous passez devant les gens ?

  • Speaker #0

    Non, c'est pas ça. Je dis que je fais pas la queue. C'est-à-dire que j'ai jamais fait la queue. S'il y a la queue, ça me saoule. Même 10 minutes, ça me saoule de faire une queue. Je vais dans un autre endroit.

  • Speaker #1

    Vous avez vu ce que c'est comme un resto ? Comment ils appellent ces trucs-là ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est des plats en sauce, des plats traditionnels, avec des toutes petites portions. Ce qui fait le bouillon.

  • Speaker #0

    Oui, je sais, ça fait beaucoup la queue au bouillon.

  • Speaker #1

    Truc bobo par excellence.

  • Speaker #0

    Je n'y suis jamais allée, parce qu'il y a la queue.

  • Speaker #1

    Parce qu'il y a la queue ?

  • Speaker #0

    Pour manger un oeuf mimosa, ça ne m'intéresse pas.

  • Speaker #1

    Il y a vraiment une très très longue...

  • Speaker #0

    C'est surtout qu'il y a de la bouffe à peu près à tous les 3 mètres.

  • Speaker #1

    Vous ferez ça toute votre vie, vous pensez ?

  • Speaker #0

    Oui, je pense. Je me vois pas... J'ai quand même fait pas mal d'autres trucs.

  • Speaker #1

    Mais dans votre spectacle, il y a beaucoup de vous, beaucoup de votre vie.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Vous avez l'angoisse de vous dire qu'est-ce que je vais raconter dans le deuxième, le troisième, le quatrième ?

  • Speaker #0

    Là, là, j'ai plus de spectacle. Dans deux mois, j'ai plus de spectacle. Donc non, j'ai jamais l'angoisse. Enfin, j'ai l'angoisse parce qu'il faut que je réécrive des trucs très drôles, mais par contre, en termes de matière. Je n'ai pas de manque de matière à raconter. Après, il faut savoir les mettre en blague et que ça fasse un bon spectacle. Mais par contre, en termes d'inspiration, de trucs à raconter, non, ce n'est pas un gros souci pour moi.

  • Speaker #1

    Ça vous arrive d'être sur scène certains soirs et votre tête n'est pas là ?

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Donc vous déroulez en automatique ?

  • Speaker #0

    Non, c'est des moments, ce n'est pas surtout le spectacle quand même.

  • Speaker #1

    Ça peut durer combien de temps ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, c'est un tunnel. Tu ne veux pas savoir combien de temps il a duré.

  • Speaker #1

    Donc là, les gens payent pour voir un robot dévier du texte.

  • Speaker #0

    Mais pas du tout. Ça peut durer une minute. Une minute, tout d'un coup, je ne sais pas, tu penses à un truc. Moi, ça m'est arrivé de perdre un ami très proche, par exemple, une heure avant le spectacle. Bon, ben, j'ai du mal à être concentrée dans le spectacle. Si tu veux, j'étais dans un tunnel de lui. C'est compliqué d'être tout le temps à 100%. Merci. Focus quand dans ta vie perso il t'arrive des trucs compliqués à gérer. C'est dur de mettre tout entre parenthèses, tout ça parce que t'es en train de bosser. T'effaces pas tout ce que tu fais ou tout ce que tu vis dans ta vie.

  • Speaker #1

    La scène ça reste un endroit comme n'importe quel autre endroit de la vie ?

  • Speaker #0

    C'est un endroit où je suis bien mais je suis pas sûre que tu puisses contrôler ton cerveau à ce point là. J'aimerais bien mais il fait ce qu'il veut. Il est indépendant. Il vit sa vie. Il vit sa vie.

  • Speaker #1

    Il vit trop sa vie, pour toi, votre cerveau ?

  • Speaker #0

    Oui, un peu trop. Moi, j'aimerais bien qu'il y ait un truc pour le débrancher. Je pense que les insomniaques moulinent trop, qui réfléchissent trop. C'est souvent ton cerveau qui fait que tu n'arrives pas à te relaxer.

  • Speaker #1

    Vous savez où on va ? Non. On va dans un endroit où les gens payent le soir pour s'enfermer dans un endroit et se vider la tête.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Mais c'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que ça peut être ce genre de choses ?

  • Speaker #0

    Une boîte de nuit ?

  • Speaker #1

    On se vide vraiment la tête dans une boîte de nuit ?

  • Speaker #0

    Bah si tu picole et que tu danses, ouais. Même sans picole d'ailleurs. Danser, ça vide la tête. Chanter aussi. T'as déjà chanté ?

  • Speaker #1

    Ça m'arrive, oui.

  • Speaker #0

    Mais tout seul ?

  • Speaker #1

    Chez moi.

  • Speaker #0

    Et t'aimes bien ça ?

  • Speaker #1

    Quand j'écoute France Info, pour ne pas entendre toutes les infos qu'il y a justement.

  • Speaker #0

    Ah oui ? Tu mets un truc et tu chantes par dessus pour ne pas le mettre ?

  • Speaker #1

    Pour ne pas entendre, oui. Ah oui, c'est vrai, c'est une ligne. Je vous ai dit, je ne suis pas très pragmatique. Tout ce qui est pratique me rebute.

  • Speaker #0

    Ah oui, je vois ça. Et vous,

  • Speaker #1

    vous êtes très pratico-pratique.

  • Speaker #0

    Non, j'ai appris à me démerder, quoi. Oui, on me démerde aussi.

  • Speaker #1

    Regardez, on a commandé un Uber, on arrive dans un endroit.

  • Speaker #0

    Je suis très impressionnée. Oui. C'est là ? Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est là ? Ah oui, d'accord, ok. Eh bien, je vous remercie. Merci à vous.

  • Speaker #0

    Ça me donne faim.

  • Speaker #1

    Vous voulez manger un truc ?

  • Speaker #0

    J'ai très faim.

  • Speaker #1

    Je crois que c'est là. Bonsoir.

  • Speaker #0

    Bonsoir. Ah, Fury Room.

  • Speaker #1

    Vous connaissez ce truc-là ?

  • Speaker #0

    C'est un truc où tu défonces des trucs.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en fait, quelle utilité ça peut avoir, ça, dans la vraie vie ?

  • Speaker #0

    Je n'en sais rien, il faut être énervé, quoi.

  • Speaker #1

    Pensez.

  • Speaker #0

    On a toute une rage à l'intérieur. Non, tu n'as pas de rage à l'intérieur ? C'est... Des gens qui t'ont fait du mal.

  • Speaker #1

    Ah oui, ça c'est une bonne idée ça. Donner des prénoms à des objets et ensuite s'occuper d'eux.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Et vous, vous en avez beaucoup des rancœurs ?

  • Speaker #0

    Oui, j'en ai pas mal. Ecoutez,

  • Speaker #1

    rentrez, je vous en prie.

  • Speaker #0

    Après vous. Allez.

  • Speaker #1

    Bonsoir. Johan, à réserver. Alors expliquez-nous...

  • Speaker #0

    Ah mais faut mettre des combis et tout ?

  • Speaker #1

    Ouais c'est exactement ça, on va pouvoir vous équiper.

  • Speaker #0

    Putain c'est pas la force.

  • Speaker #1

    On est obligé de mettre des combis ? Ouais. Franchement ouais bah... Le but c'est de faire un peu orange mécanique. Habillez-nous.

  • Speaker #0

    J'ai pas envie d'être là,

  • Speaker #1

    c'est vraiment pour toi que je fais ça ? Pourquoi c'est dit... S'il y a un problème,

  • Speaker #0

    parce que...

  • Speaker #1

    Vous signez sans regarder le truc. Moi je m'en fous.

  • Speaker #0

    Non ? Hop, très bien. C'est vous ?

  • Speaker #1

    C'est ça y est on...

  • Speaker #0

    Duri et Johan c'est ça Johan ? courage on doit enlever les manteaux et tout merci il faut changer de chaussure aussi ?

  • Speaker #1

    avec une combinaison ça va être magnifique c'est assez saillant, c'est pour moi ?

  • Speaker #0

    c'est un jogging on va voir ça les ans dessous vous savez,

  • Speaker #1

    vous ne savez absolument pas ce qu'on a laissé en arrivant ici Ça, c'est quoi ? Ah oui, avec une visière, oui. C'est à ce point-là dangereux de rentrer dans ce genre de pièce ? Vous savez, on peut rentrer et ne rien casser. Je ne suis pas pour l'ultra-violence.

  • Speaker #0

    Tu ne vas pas avoir le choix, tu vas être obligé de bousiller des trucs.

  • Speaker #1

    C'est parti. Donc, on descend là dans la pièce en... C'est quoi, dans une cave ? D'accord. Donc, une fois à l'intérieur, on est enfermé. Ah, vous êtes enfermé, oui. D'accord. Vous êtes où, Doulie ? Ah oui, ils n'ont pas fait semblant de tout péter les précédents.

  • Speaker #0

    But the baseball must... pour utiliser pour casser. Quand vous voulez jeter des bouteilles. Il faut casser ça ? Oui. Ah, tu peux éclater la télé ? Oui, ça se peut. C'est vrai ? Ah oui.

  • Speaker #1

    Déjà, c'est plus intéressant.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci vraiment.

  • Speaker #0

    Tu expulses toute cette violence que tu entoures. Attends, j'ai envie d'éclater cette bouteille.

  • Speaker #1

    Ce n'est pas le problème du matériel.

  • Speaker #0

    On l'a lancé.

  • Speaker #1

    Regardez, le lard de bien péter une bouteille.

  • Speaker #0

    Allez !

  • Speaker #1

    Là vous pensez à quelqu'un ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Descendez bien votre visière.

  • Speaker #0

    C'est pas bien là.

  • Speaker #1

    C'est nul. Moi je serais vous, j'attaquerais directement l'écran. Elle n'a peut-être pas semblant. L'écran d'ordinateur aussi, vous lui avez donné un prénom mental ?

  • Speaker #0

    Non, là ça me fait un peu de soude.

  • Speaker #1

    C'est quoi c'est une bouteille ? C'est du petit chablis.

  • Speaker #0

    Le chablis il va sauter.

  • Speaker #1

    Hop là ! C'est que du matériel informatique.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est vraiment le moment d'utiliser un pied de biche.

  • Speaker #1

    La tour PC, j'ai l'impression qu'elle vous fait de l'œil.

  • Speaker #0

    Attends, j'entends la musique. Ça aide. T'écoutes quoi comme musique,

  • Speaker #1

    toi ? J'aurais bien aimé qu'on fasse ça sur du Luan. Non. Et ben voilà ! C'est vrai que ça fait du bien !

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'on commence à y prendre goût ! Toi, comme tu n'es pas du tout violente, tu vas peut-être complètement briller !

  • Speaker #1

    Wow ! Regardez ! Ça, c'est du vino blanco !

  • Speaker #0

    Tu vas jouer gentil, là !

  • Speaker #1

    Alors attendez, la bouteille qu'on casse après une relation de vivant ?

  • Speaker #0

    Non ! Et on l'attend seulement ? Non, je vais faire une relation d'une nuit !

  • Speaker #1

    Tu vas l'attendre d'une nuit ?

  • Speaker #0

    D'une nuit ! Surtout que vous êtes vénère !

  • Speaker #1

    C'est la nuit et pas... Nuit c'est combien d'heures ?

  • Speaker #0

    8 heures ! C'est déjà 2 heures ? Ah ah ah ah ! Je vous dis, y'a aucune raison de faire ce que vous voulez ! Ah ah ah ! Laisse-moi ! Bah oui, je suis énervée !

  • Speaker #1

    Vous êtes rentré le bouchon dans le doigt.

  • Speaker #0

    C'est trop dur ça !

  • Speaker #1

    Ah vous reprenez le pied de biche ! Regarde, la tour d'ordinateur... Ça c'est acheté chez Sercouf à tous les coups !

  • Speaker #0

    Il faut que tu y ailles !

  • Speaker #1

    Je me demande combien de gens passent chaque nuit dans cet endroit pour péter des trucs comme on les pète là.

  • Speaker #0

    Je ne sais pas. J'avais entendu parler, mais je n'y étais jamais allée.

  • Speaker #1

    Parce que vous n'êtes pas curieuse ?

  • Speaker #0

    Non, parce que je crois que j'avais lu que tu ne pouvais péter qu'une télé ou quoi. Moi, je voulais tout bousiller.

  • Speaker #1

    Mais dans l'absolu, quel est l'objet qui n'est pas présent dans cette salle que vous adoreriez défoncer ?

  • Speaker #0

    Un mur.

  • Speaker #1

    C'est très beau ce que vous faites.

  • Speaker #0

    Je peux shooter le mannequin ? Comment ? A toi, un peu.

  • Speaker #1

    Faire des votes prog, Julie.

  • Speaker #0

    Faire mon choix. Je peux en faire.

  • Speaker #1

    Bon, écoutez, euh... Non, mais ne ramassez pas tout. Vous êtes très bien élevés, enfin.

  • Speaker #0

    Attention, la bouteille de champagne, grand potentiel.

  • Speaker #1

    brise bien une bouteille de champagne et la hynocène un petit potentiel pas mal recherche que j'ai vu on comprend pas ce qu'ils ont foutu aux jeux olympiques de paris vous aurez pu introduire cette mission on va pas la rialer d'où il est C'est super. Je crois que ça lui a plu. C'est vrai ? Oui, contre toute attente. Oui, c'est vrai. C'est vrai que ça fait réfléchir.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait du bien.

  • Speaker #1

    Vous dites ça parce que vous êtes bien élevée.

  • Speaker #0

    Oui. Non,

  • Speaker #1

    mais si, vous êtes super bien élevée. Qu'est-ce qui pourrait égaler la sensation qui a été la vôtre dans cette pièce, dans la vie saine et réelle ?

  • Speaker #0

    Un énervement. Mais ça m'est arrivé, moi j'étais un peu plus... Moi, j'ai du mal avec les objets. Tu sais, par exemple, si une télé ne marche pas.

  • Speaker #1

    Tu peux la casser ? Oui. Vous allez voir votre ordinateur différent après en avoir pété un comme vous l'avez fait il y a un instant.

  • Speaker #0

    Non. Mais des fois, j'ai envie de l'éclater.

  • Speaker #1

    Pourquoi vous ne le faites pas ? Je veux dire, vous avez les moyens, Manon.

  • Speaker #0

    Non, c'est un peu dommage, même si tu peux t'en racheter un. J'étais beaucoup plus agressive avec les objets quand j'avais vraiment pas d'oseille. C'est vrai ? J'ai pété des télés, ouais.

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que le programme vous plaisait pas ?

  • Speaker #0

    Non, parce qu'il marchait pas.

  • Speaker #1

    Et ça, quand vous étiez gamine ?

  • Speaker #0

    Non, non, dans... ado, quoi.

  • Speaker #1

    Il est déjà battu ?

  • Speaker #0

    Non.

  • Speaker #1

    Par Françard Diz ou par Zénithu ?

  • Speaker #0

    Non, parce que des fois, je rêve de déclater la gueule à quelqu'un qui l'aurait cherché, quand même. Il y a des gens qui méritent qu'on leur éclate la gueule.

  • Speaker #1

    Dans votre vie, par le passé.

  • Speaker #0

    Oui. Oui, j'aimerais bien, tu vois, si je vois une embrouille arriver, pouvoir dégommer le gars qui fout la merde. Ça, ça me ferait un bien fou, mais je pense que je n'ai pas la force.

  • Speaker #1

    Vous prendriez le mec, un mec ou une fille ? Ça serait qui ?

  • Speaker #0

    Peu importe.

  • Speaker #1

    L'engendrer ?

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    oui. Vous prendriez la personne par le call-back ?

  • Speaker #0

    Je lui éclaterais la gueule vraiment. Ça dépend de ce qu'il est en train de faire. Si, par exemple...

  • Speaker #1

    Il fait tomber un papier gras par terre, par exemple, ça mérite.

  • Speaker #0

    Non, non.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il mériterait qu'il reçoive votre poing dans la figure ?

  • Speaker #0

    Un violon de meuf, tu lui dis, tu l'attrapes et tu le dégommes. Tu vois ? Là, c'est un gros kiff, quoi.

  • Speaker #1

    Il vous est arrivé, vous, de vous retrouver dans des situations où vous étiez impuissante et vous aviez justement la range en vous ?

  • Speaker #0

    Je me suis fait beaucoup agresser, mais je suis toujours sortie par la tchatche. Donc, je n'ai jamais eu à me battre. Mais j'ai cette rage en moi qui fait que je pense que si vraiment tu touches à quelqu'un que j'aime, je pense que je suis capable de... de t'éclater. Je pense que même si je n'ai pas la force pour, je pense que la force, elle se décuple quand tu es très, très, très énervé. Donc si on touche à quelqu'un que tu aimes, je pense que tu es capable de buter quelqu'un même s'il est plus grand que toi.

  • Speaker #1

    Ça pourrait vous faire peur. On se dit parfois, j'ai peur de passer à l'acte.

  • Speaker #0

    Si la personne mérite vraiment, c'est-à-dire que si quelqu'un a buté ma mère, par exemple, elle mérite de mourir. Donc elle mourra.

  • Speaker #1

    Nécessité fait loi. S'il y avait quelque chose d'injuste, de dramatique, vous pourriez justement aller...

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Quelles qu'en soient les conséquences après.

  • Speaker #0

    Oui. Je peux faire croupir en prison, mais je ne laisserai pas quelqu'un qui a tué quelqu'un que j'aime en vie, vivre sa vie.

  • Speaker #1

    Vous vous rendez compte qu'on est en train de dire tout ça, règlement de compte, justice soi-même, avec du bon reggae en fond sonore.

  • Speaker #0

    Ouais mais je déteste le reggae.

  • Speaker #1

    No woman, no cry.

  • Speaker #0

    J'aime pas le reggae.

  • Speaker #1

    Moi non plus je déteste ça, c'est un merdique. C'est vrai qu'on aurait pu péter des trucs sur du reggae.

  • Speaker #0

    Ouais ouais c'est vrai.

  • Speaker #1

    Vous, vous avez voulu la facilité du métal.

  • Speaker #0

    Mais c'est vrai que si tu m'avais mis du reggae je crois que j'aurais été encore plus énervée.

  • Speaker #1

    On aurait dû faire ça sur du reggae.

  • Speaker #0

    On s'en va ? Allez y alors.

  • Speaker #1

    « C'était vachement bien. Je vais recommander ça à ma mère. Elle en a besoin en ce moment. » Je ne saurais pas dire quand ça avait commencé. Les filles de cette ville s'étaient mises à porter des chaussettes blanches à l'intérieur de mon cassin aux semelles trop épaisses. Comme on compte les moutons avant de s'endormir, je tiens la comptabilité de celles que je croise sur mon chemin. Onze depuis le début de la soirée. Qui décide de ça ? La mode. Le même pouvoir de persuasion autoritaire qu'un cachet. glissé dans le verre d'une inconnue en boîte de nuit. Avec Doulie, on a quitté la Fury Room, rue Blondel. On vient de passer devant un monument en restauration. Enveloppé d'une bâche XXL, il exhibe une chanteuse qui fait la moue pour mieux vendre le sac à main qu'elle porte autour du bras. Si c'est à moi qu'on avait proposé la pub, combien d'années-lumière est-ce que je pourrais tenir avec tout ce fric-là, sans rien avoir à foutre, devant les vitrines d'un grand magasin ? Une famille de Roumains allongés sur des matelas ne dort pas encore. L'un des gamins rit devant une vidéo sur un smartphone. J'entends les sons d'un cartoon. On marche dans la rue tous les deux sans destination définie. Quelle conclusion on peut tirer de cette expérience ? Si expérience il y a.

  • Speaker #0

    La conclusion c'est que j'ai vu un peu de violence contre toi et que je suis assez contente. Parce que j'ai l'impression que ça t'a quand même un peu plu.

  • Speaker #1

    Je me suis aperçu que je pouvais y avoir du bad boy en moi.

  • Speaker #0

    Mais ouais, c'est ça qui me plaît.

  • Speaker #1

    Vous avez remarqué que ce soir, cette nuit, contrairement à beaucoup de mes condisciples journalistes et animateurs, on n'a pas parlé de drogue avec vous.

  • Speaker #0

    C'est bien ça, ça me plaît.

  • Speaker #1

    Vous n'en avez pas marre d'ailleurs.

  • Speaker #0

    Je sais que ça a aidé beaucoup de gens, donc tant mieux. Parce que ça a aidé beaucoup de junkies à se dire qu'il y avait un après. Mais d'ailleurs, je ne l'ai même pas fait dans ce but-là. Je l'ai fait à la base pour désacraliser un peu la mauvaise image qu'on pouvait avoir des gens qui consommaient. Dans le sens où ce ne sont pas des gens à mépriser. C'est juste des gens qui ont bossé.

  • Speaker #1

    C'est toujours votre grand-mère, vous ?

  • Speaker #0

    Non, je l'aimais très fort.

  • Speaker #1

    C'était quel genre de fille, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    C'était une femme incroyable. Elle aurait pu avoir 25 ans quand elle avait 80 ans. Elle avait le cerveau de quelqu'un de 25 ans.

  • Speaker #1

    C'est elle qui vous a trouvé un médecin et qui vous a sorti de là ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Comment ça se fait que ce soit votre grand-mère qui vous a sorti ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas, il y a ma mère aussi qui était dans le coup.

  • Speaker #1

    Pourquoi c'était une femme formidable, votre grand-mère ?

  • Speaker #0

    Parce qu'elle comprenait tout et elle était très éduquée. Mais elle s'en foutait. Je crois que c'était quelqu'un de très moderne pour sa génération.

  • Speaker #1

    Elle fait quoi de sa vie ?

  • Speaker #0

    C'est une très bonne question, ça. Putain, dans quoi elle a bossé ? Parce que moi, j'ai toujours connu à la retraite. Elle s'est beaucoup occupée de ses gamins, surtout, je crois. Elle en avait quatre, quand même. Mais on s'entendait très bien. Je regrette de ne pas avoir été à jeun quand elle est partie. Parce que moi, j'étais dans le dur quand elle est partie. Et franchement, ça m'aurait fait plaisir qu'elle voit tout ça. Parce qu'elle aurait aimé. En plus, j'adorais son rire. Et si j'avais entendu son rire dans la salle, je pense qu'elle aurait dit « Oh, quand même ! » sur certaines vannes.

  • Speaker #1

    Tu as vu où on est, là ?

  • Speaker #0

    On est dans une rue.

  • Speaker #1

    On est à un numéro de la rue la plus mythique de Paris.

  • Speaker #0

    Rue Saint-Denis.

  • Speaker #1

    Avec tous ses commerces de proximité.

  • Speaker #0

    Miss Bonbon, Le Mirage, Jorge. Love shop.

  • Speaker #1

    Love shop.

  • Speaker #0

    Tu vas des fois dans des love shop ?

  • Speaker #1

    Vous êtes déjà allé dans des love shop ?

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    C'est très longtemps que je ne suis pas rentré dans un...

  • Speaker #0

    C'est vrai ?

  • Speaker #1

    A quelle occasion vous êtes déjà rentré, vous, dans ce genre de truc ?

  • Speaker #0

    Pour acheter des trucs, quoi.

  • Speaker #1

    Oui, ça j'imagine.

  • Speaker #0

    Oui, oui, non, moi j'y vais, s'il faut, il y a les quoi. Mais c'est marrant d'y aller avec ton mec aussi. Tu passes devant un sex shop, tu y vas, ça attire l'œil. Tu veux aller au sex shop ?

  • Speaker #1

    Peut-être non, juste regarder la vitrine. Tu sais, moi, je suis un garçon très prune. Qu'est-ce qui vous fait marrer ?

  • Speaker #0

    C'est ce mot, prude.

  • Speaker #1

    Quoi ?

  • Speaker #0

    Ça ne me fait rien.

  • Speaker #1

    Ça pourrait être un titre pour votre prochain spectacle, prude ? Avec votre photo dessus,

  • Speaker #0

    ça serait cool. Tu vois, un petit gars de Tour Eiffel. Un souvenir inoubliable, tu vois ?

  • Speaker #1

    Tu as vu l'affiche en dessous ? Black Empire, une vraie lady doit savoir cacher son jeu.

  • Speaker #0

    C'est un rouge à lèvres vibromasseur.

  • Speaker #1

    On dirait ma belle-sœur.

  • Speaker #0

    T'as qu'à faire une photo. Comme ça, tu lui envoies. Tu lui dis tu m'avais caché ça ?

  • Speaker #1

    Non, je pense que ça va pas améliorer nos relations.

  • Speaker #0

    Non ? C'est déjà compliqué ?

  • Speaker #1

    Vous pensez qu'il y a qui derrière le rideau ?

  • Speaker #0

    L'homme de ma vie ?

  • Speaker #1

    Allez, on va voir. Allez, juste, on jette le museau.

  • Speaker #0

    Allez,

  • Speaker #1

    un rideau bleu. Quelle texture.

  • Speaker #0

    Il est en latex. Tu vois ? Il me soit. C'est dommage qu'il n'y ait pas de...

  • Speaker #1

    Il est phallus.

  • Speaker #0

    C'est dommage qu'il n'y ait pas de photo. Est-ce que tu te sens à l'aise ?

  • Speaker #1

    Ce qui est gênant, et c'est souvent aussi ça, peut-être dans les relations, c'est que ce qu'on imagine, ce qu'on projette avant de consommer est parfois plus fort que ce qu'on voit une fois qu'on rentre. Alors peut-être que je suis trop cérébrale.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est souvent ça.

  • Speaker #1

    Qu'il y a des menottes. Dès que vous voyez quelque chose, qu'est-ce que dans tous ces objets qui sont autour de nous, vous pourriez voir figurer sur votre cheminée, chez vous, dans votre appartement, salon, cuisine ?

  • Speaker #0

    Ah ben, je ne vais pas foutre ça sur une... J'ai une étagère, enfin. Ça,

  • Speaker #1

    c'est quoi ?

  • Speaker #0

    C'est une laisse, chérie.

  • Speaker #1

    Il y a des affiches au plafond.

  • Speaker #0

    T'as un fouet. Pas très. Non.

  • Speaker #1

    Il y a des cagoules. Il y a toujours des cagoules. Cagoule résille.

  • Speaker #0

    Ça, ça peut être un peu sexy, tu vois, cette espèce d'ensemble avec des lanières en cuir.

  • Speaker #1

    La marque est jolie. Kalida.

  • Speaker #0

    Kalida. Est-ce que tu vois ça ? Ça tu vois tu pourrais essayer un jour, c'est des petits anneaux vibrants, bon c'est pas dingo.

  • Speaker #1

    Vous avez des mecs qui ont utilisé des trucs comme ça ?

  • Speaker #0

    Ouais, ça m'est... il y a longtemps j'ai utilisé ça.

  • Speaker #1

    Je trouve ça très propre pour un endroit...

  • Speaker #0

    Mais c'est... ça a toujours été un peu comme ça.

  • Speaker #1

    Ah il y a le rayon vidéo, lesbienne, solo nylon, fétiche.

  • Speaker #0

    Ah ouais mais là on est old school quoi, c'est des DVD carrément. Bah il est petit hein.

  • Speaker #1

    C'est marrant.

  • Speaker #0

    Alors ça tu vois, ça je pourrais pas par contre.

  • Speaker #1

    De quoi ?

  • Speaker #0

    Ben un gueux de ceinture, c'est-à-dire que là ça veut dire que techniquement... Non.

  • Speaker #1

    L'emballage a l'air heureuse.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, mais... Non, non, mais c'est pas mon délire.

  • Speaker #1

    J'observe que c'est quand même grandement vide, pourtant on est un vendredi soir.

  • Speaker #0

    Ouais, mais...

  • Speaker #1

    Et en revanche, les gels de lubrifiant, c'est à l'américaine, c'est des Ectolid. Soir.

  • Speaker #0

    Et là t'as du Popper, tu vois.

  • Speaker #1

    Vous êtes là depuis combien de temps ? Vous gérez le magasin depuis combien de temps ? Ah oui, pardon. D'accord. Bonne nuit. Ça vous fait marrer. Pensez de constater qu'on est rentrés et il n'y avait pas l'homme de votre vie.

  • Speaker #0

    C'était une cata. Il n'y avait vraiment qu'un mec et c'était le vendeur.

  • Speaker #1

    Que j'ai trouvé très prude.

  • Speaker #0

    Oui, lui aussi était très prude.

  • Speaker #1

    En fait, il a pensé que je lui brandissais un gomme miché.

  • Speaker #0

    Peut-être.

  • Speaker #1

    Comment vous imaginez, vous, dans 20 ans ?

  • Speaker #0

    Peut-être plus là.

  • Speaker #1

    Ça fait quoi ? Ça ne fait pas beaucoup si vous n'êtes plus là dans 20 ans.

  • Speaker #0

    Oui, mais je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas. J'espère être comblée de tout ce que j'avais envie de faire dans cette vie dans 20 ans.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que, avant de mourir, vous aimeriez absolument faire que vous n'avez pas encore fait ?

  • Speaker #0

    Il y a plein de trucs en fait. J'ai envie de passer mon permis bateau, savoir ce que c'est l'amour véritable, d'aimer et d'être aimé à la même puissance. Permis bateau parce que j'adorerais avoir mon permis moto.

  • Speaker #1

    Vous foutez dans la même phrase, le permis bateau et l'amour vrai.

  • Speaker #0

    Ouais.

  • Speaker #1

    Il n'y a qu'à Dubaï que les gens font des phrases comme ça.

  • Speaker #0

    Je suis peut-être un cerveau dubaïote, qu'est-ce que tu veux ? J'adorerais passer mon permis moto, mais j'ai peur de tuer des gens, donc non. Et... un voyage quoi. Visiter à peu près tous les pays que j'ai envie de voir dans ma vie. Ouais. Aimer la vie, être heureuse.

  • Speaker #1

    C'est difficile ça d'être heureuse. Ouais. Vous êtes heureuse aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    Ça va, tu vois, il y a pire. Ça c'est pas une réponse. Mais je pense qu'il y a mieux. Ouais, mais franchement, ça va. Ça va, je peux pas me plaindre.

  • Speaker #1

    Alors qu'est-ce qui manque ? Le plus du plus, c'est l'amour ?

  • Speaker #0

    Ouais, je crois.

  • Speaker #1

    Vous accepteriez si on vous proposait de changer de cerveau ? On dirait, tu seras sûrement plus heureuse, mais on te change le cerveau. Ou on change des trucs comme ça, des connexions neuronales. Oui,

  • Speaker #0

    mais tu me donnes quoi comme cerveau à la place ?

  • Speaker #1

    Je connais un mec à courbe voix qui fait des trucs, un peu de mécanique, tout ça, enfin, il se démerdera. Je serais heureuse.

  • Speaker #0

    Mais je serais heureuse. Oui,

  • Speaker #1

    comme dans l'au-dessus d'un lit de coucou à la fin.

  • Speaker #0

    Non, j'ai trop bossé sur ce cerveau pour en changer.

  • Speaker #1

    Vous n'allez même pas aller voir un psy, vous appelez ça travailler.

  • Speaker #0

    Ben ouais, c'est l'école de la vie chérie. Nous sommes fraîchis de revenir à un stade genre où il y a plein de subtilités de la vie que je ne capte pas, tu vois.

  • Speaker #1

    Je l'avais dit tout à l'heure, il y a de grandes chances pour que quand on comprend beaucoup de choses, on soit moins heureux que ceux qui en comprennent moins.

  • Speaker #0

    Mais moi mon but c'est d'être heureuse avec ce cerveau. Tu crois que c'est impossible ?

  • Speaker #1

    Soit que la réponse est derrière le rideau du love and shop.

  • Speaker #0

    Ben ça va finir là, ça va se finir comme ça cette histoire.

  • Speaker #1

    J'ai reçu un SMS. C'est l'écrivain imaginaire. « Tu fais quoi, là ? J'ai un truc à fêter. Tu viens ? » À cette heure-là, je sais où il est. Au Master Poulet. Un euro le pilon, deux cinquante la cuisse avec sauce offerte Ausha, ouvert jusqu'à cinq heures du matin. Devant, toujours du monde qui attend. Des jeunes, majoritairement. Casquettes, sacoches, verres fumés. Tous patientent pour de la volaille frite. Dans la file d'attente, ça sent le faux poulet et la vraie weed. L'écrivain imaginaire est assis sur une chaise de jardin, sur le trottoir qui fait terrasse. Il mange son poulet. Rivé sur son smartphone, il regarde une chaîne info où les intervenants refont le monde en s'engueulant. C'est distrayant. Il suit ça comme ses parents regardaient au théâtre ce soir. « Je m'assois. » je demande. « Alors qu'est-ce qu'on fait ? T'as rencontré quelqu'un ? » Il hausse les épaules. « Tu comptes ? » il m'interroge. « Tu comptes faire quoi, toi, quand ça va être la fin du monde ? » Ces derniers temps, il a que ça à la bouche, la fin du monde. Ce serait sa revanche. Cette nuit, il en a encore contre ce vieil éditeur qui lui tourne autour depuis des mois. Il lui fait croire qu'il publiera son roman, alors que c'est tout autre chose chez lui qui l'intéresse. « C'est ces connards qui servent à rien dans leur bureau, là. Crois-moi bien qu'avec l'intelligence artificielle, bientôt, ils seront tous dehors. Et quand ils auront perdu leur job, on verra. » Ça lui fait marrer. Enfin, pas tout à fait. « Tu vois, pour vivre seul avec Quedal, il faut le mode d'emploi. Moi, je l'ai. » « Tu viens ? Je vais te montrer là où j'habite maintenant. » Nous voilà partis. Assis au fond d'un bus, on sort de la ville pour s'enfoncer en grande banlieue. Quand je repose le pied à terre, il est déjà quatre heures passées. Où est-ce qu'on est ? Où est-ce qu'on va ? Je sais pas. « Tu vas voir, c'est ouf ! » m'annonce l'écrivain dans un regain d'énergie. On passe devant des lotissements, des résidences. Aux façades, plus une lumière. Tout le monde qui dort. Les rues sont vides. Après dix minutes, comme ça, il s'arrête l'écrivain. « C'est là ! » qui me dit tout fier la gueule enfarinée. On est devant une barre d'immeubles désaffectée. Longs grillages qui courent devant. Un panneau dessus pour indiquer la destruction prochaine du HLM. Voilà qui soulève le grillage. Avance quelques mètres avant de se retourner vers moi. « Qu'est-ce que tu fous, putain ? Tu viens ? » Voilà ce qu'on est venu fêter. L'écrivain imaginaire mène désormais la grande vie d'un squatter. Au huitième et dernier étage, cloisons, appartements, tout a été préalablement détruit. Au sol, il reste encore des petits bouts de mur. Plusieurs centaines de mètres carrés pour lui tout seul, l'écrivain, avec vue panoramique sur la ville au loin. « S'emmerde pas ? » je l'entends qui me dit. « Qu'est-ce que t'en penses ? C'est pas mal, non ? C'est pas Stéphane Plaza qui m'aurait trouvé ça. On est seul. Tout en haut de cette barre HLM. Bientôt le jour qui va se lever. La vue est dingue. C'est beau, mais en même temps c'est comme si tout était bientôt fini. Comme si pour de bon on l'a répété cette fin du monde. Avant les autres. Juste pour prendre nos marques. S'il avait raison, l'écrivain. Si l'homme du futur, le vrai, celui qui survivra, c'était lui. Man Max au RSA. On l'a fait, Macrémaillère, ou pas ? De son sac à dos, il sort deux boîtes de Red Bull. En euphorie, le voilà qui gueule. « Santé ! » C'est la première fois que je le vois, l'écrivain, qui semble apaisé. À mon tour, je lève ma boîte d'énergie drink. Je regarde droit devant, comme on le fait pour un vœu le jour de l'an. « Bonne fin du monde à nous. »

  • Speaker #0

    Yann Roque

  • Speaker #1

    Rindu,

  • Speaker #0

    journal d'un insomniac. Vos oreilles s'égarent dans la nuit.

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