Speaker #0Le voleur de dieu. Un violent coup de pied dans la porte qui ne résiste pas et un froid glacial s'engouffre dans la pièce en même temps qu'igore trozik le policier le vieux pasteur sursaute il savait bien qu'un jour ou l'autre cela devait arriver dans cette russie qui persécute les chrétiens il ne conservait guère d'illusion sur le sort qu'on lui réservait tôt ou tard il perdrait sa liberté mais qu'importe la prison lorsque l'amour de jésus brûle au plus profond de votre cœur le policier se plante devant lui ramassez vos affaires je vous emmène le vieux pasteur connaît la triste réputation du policier. Il sait que celui-ci ne connaît pas la pitié. Affecté aux affaires religieuses, c'est à cause de son zèle que des centaines de chrétiens croupissent en prison. Avec la brusquerie qui le caractérise, le visiteur commence à fouiller la pièce de fond en comble. Dites, vous n'êtes pas frileux ! Comment peut-on habiter un logement aussi mal chauffé ? Voulez-vous du thé ? Pour vous réchauffer, propose le vieux pasteur de sa voix douce. Igor Trosik hésite. Il est en service commandé. Et le règlement lui interdit d'accepter quoi que ce soit de ses victimes. Mais il fait si froid dans la petite pièce. Va pour une tasse de thé ! grommelle-t-il entre ses dents. Le pasteur prépare alors deux tasses du sucre et sort quelques gâteaux d'une boîte en fer. Vous l'aimez fort ? Plutôt ! répond le policier tout en continuant à fouiller. En même temps, méfiant, il suit les faits et gestes du fragile pasteur. Soudain ! dans sa brusquerie il fait tomber d'une étagère un livre c'est un recueil de vieux cantiques qui rebondit pour s'arrêter ouvert sur la table machinalement le policier y jette un coup d'oeil ô seigneur j'ai vu ton martyr et mon âme a frémi d'horreur et c'est pour moi pauvre pêcheur que à la lecture de ces quelques lignes surgit dans la mémoire d'igore trosik un flot de souvenirs ses paroles mais sa maman les lui chantait quand il était petit ah oui sa maman le seul être qui l'ait jamais aimée il est tiré de ses pensées par la voix du pasteur Voulez-vous que nous chantions ce cantique ensemble ? Le policier sursaute. Comme si on l'avait démasqué ! Assez de vos bondieuseries ! siffle-t-il entre ses dents. Saisissant la tasse de thé qu'on lui tend, il continue de sa voix brusque. Évidemment ! Comme tout le monde ! Vous me prenez pour un monstre ! Un monstre ? Non, mais un malheureux qui pense que... personne ne l'aime. Igor Trozik part d'un rire contraint. Allons, vieux corbeau, tu ne me feras pas croire que je suis tellement aimable ! Assis sur un tabouret, le vieux pasteur remue pensivement son thé dans sa tasse ébréchée. Enfin, il ajoute, C'est vrai ce que vous dites, mais c'est justement là Que Dieu nous étonne ! Aimez des vauriens comme vous et moi ? C'est vrai, Dieu vous aime, il vous aime même tout particulièrement. Vous vous moquez de moi ! hurle le policier en se levant brusquement. Attention, vous allez renverser votre thé ! ajoute doucement son interlocuteur. Rasseyez-vous, car je vous parle très sérieusement. C'est à cause de sales types comme vous et moi que Dieu a envoyé Jésus-Christ, son Fils unique, dans le monde, afin que quiconque, croit-on lui, ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle. par la brèche que les paroles du cantique ont ouverte d'autres souvenirs s'engouffrent dans le coeur d'igore trosik commissaire poursuit le pasteur de sa voix chaude et douce je vais vous dire ce que vous êtes vraiment vous êtes un voleur c'en est trop pour le policier D'un bond, il est debout, blême de rage, la main crispée sur la crosse de son revolver, l'air menaçant. Il s'approche du frêle pasteur, toujours assis sur son tabouret. Vous osez ! suffoque-t-il. Moi, un voleur ! Et qui ai-je volé ? Dieu, répond le vieux pasteur, toujours aussi tranquillement. Voyez-vous, Jésus-Christ est mort pour nos péchés, pour les vôtres comme aussi pour les miens. Quand on refuse de les lui donner, on les lui vole. Le policier laisse tomber son arme. Dieu veut me sauver ? Mais regardez-moi donc ! J'en ai tué du monde ! Aussi, votre sacré croix ! Non, ce n'est pas pour moi ! Le pasteur boit son thé à petites gorgées. Faites-en encore dix fois plus ! Mais n'oubliez jamais que l'amour de Dieu sera toujours plus grand que votre méchanceté. Cette fois, Igor Trozik ne répond rien. Comment pourrait-il lutter contre les paroles du fragile pasteur assis sur son tabouret et buvant son thé ? Depuis longtemps, aucune réunion de prière n'a été autant marquée par la grâce de Dieu que celle qui a eu lieu le soir même et à laquelle assiste le vieux pasteur accompagné d'Igor Trozik. Oui, la miséricorde de Dieu est vraiment pour tous. Pour les très grands pécheurs, Jésus reste un très grand sauveur. Car le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus. Évangile selon Luc, chapitre 19, verset 10. Là où le péché abondait, la grâce a surabondé. Épitre aux Romains, chapitre 5, verset 20.