Speaker #0Salut, je m'appelle Amy. Bienvenue dans mon carnet où je vous invite à découvrir l'univers de mes textes, mais également ceux qui m'inspirent. Pour cette première saison, j'ai choisi de vous lire mon roman Ulysse et Calypso. La composition de ce texte... Aînés du désir de réécrire l'histoire d'un amour légendaire. Alors, si vous le voulez bien, laissons-nous voguer, loin, très loin, bien après les crêtes des montagnes et l'immensité des mers, au cœur du monde, là où palpite l'île de Calypso. Épisode 8 Le départ d'Ulysse Hermès cherchait Calypso. Il devait l'avertir du départ d'Ulysse. La tâche ne lui plaisait guère. Expliquer à un cœur épris d'amour que le bien-aimé ou la bien-aimée allait lui être enlevée était une épreuve délicate. personnellement, il ne s'adonnait jamais à ce genre d'attachement, cette faiblesse du cœur. Alors qu'il glissait entre les pampres dorées, le messager aperçut bientôt Caria, la nymphe la plus clémente. Elle lui demanda d'une voix rude ce qu'il venait faire par ici. Le dieu aux rayons clairs répondit qu'il venait discuter avec Calypso. La nymphe l'observa d'un œil sombre. Elle ne paraissait pas être dans un bon jour. Hermès connaissait la réputation des nymphes lorsque la colère les prenait. Il continua donc son chemin. Les mains sur ses hanches généreuses, elle le défia du regard. Elle possédait ce corps qui affole les sens. Elle l'apostropha, exigeant de lui des excuses, mais il se défila comme il savait si bien le faire. Le fils de Zeus se doutait bien de quel événement Caria voulait lui parler, mais il ne désirait pas remuer le passé. Il avait possédé un souci. Il y avait un histoire de faiblesse entre les rochers moussueux des cascades. La nymphe l'avait cru enclin à un amour ardent. Elle avait goûté à ses belles paroles, à la puissance de sa bouche, de ses reins, puis il avait disparu. Les cœurs simples mélangent bien trop souvent l'impulsion du corps à l'impulsion du cœur, se dit-il. Après avoir marché quelque temps, il arriva près de la caverne. calypso était assis sur un petit banc de pierre et fumait paisiblement sous les rayons d'automne L'herbe suave grisait son esprit. Ses membres s'alanguissaient. Son âme flottait entre la terre et le ciel. Sans même lever la tête, elle s'adressa au visiteur. Nul besoin de prononcer un mot, ô fils de Zeus. Mon cœur connaît déjà le discours de tes lèvres. Hermès vint s'asseoir à ses côtés. Elle lui tendit un syrinx vaporeux.
Speaker #0Aujourd'hui, je n'ai pas l'âme belliqueuse, murmura-t-elle. Et il restait ainsi à regarder les nuages s'étirer dans le ciel. L'armée s'était heureux. Il n'avait pas eu besoin d'affronter Calypso. Elle ne semblait pas lui en vouloir, ou bien étaient-ce les vapeurs qui dissimulaient l'orage dans son cœur. De temps à autre, Hermès soupirait. Tout de même, ses ordres étaient bien ridicules. Si Ulysse était vraiment prisonnier, n'aurait-il pas, depuis longtemps déjà, trouvé une astuce pour quitter l'île de Calypso, lui que l'on surnommait l'homme aux mille ruses ? Athéna avait beau prétendre qu'Ulysse souffrait, le petit dieu commençait à en douter. Alors qu'il était accaparé par ses divers sentiments, Caria la nymphe la plus clémente apparut. Hermès se leva. Il était temps pour lui de partir. Puisque Calypso savait déjà tout, il ne lui était pas nécessaire de rester plus longtemps. Sa célérité habituelle était un peu engourdie par les vapeurs, mais il réussit à gagner l'azur plus vite que les foudres de Caria. La nymphe invectivait le ciel. Calypso la rassura. Elle n'était plus la seule que l'on avait trahi. La noblesse d'âme était une qualité rare, tant dans le ciel que sur la terre. Ils disent que mon amour pour toi était fou, que ton amour pour moi était faux. Ils ont gravé l'offense au frontispice de la rumeur. Laisseras-tu la foule parler ainsi de nos amours passés ? Laisseras-tu la fange et l'aigreur sculpter les yeux d'un destin trompeur ? Éprouverais-tu plus d'amour pour les dieux que pour celle qui déposa dans le creux de ton âme la rose d'or d'Aphrodite et l'ongan d'Asclepios ? Manquerais-tu de courage pour révéler au monde les discours de ton cœur ? Allons, qu'Athéna se réjouisse, qu'Alipso n'ait plus. La nymphe, autrefois douce et enveloppante, couvre maintenant d'un voile son visage d'opprobre. Éteignons la flamme, ramassons la cire et buvons aux larmes amères de la passion. Cette nuit-là, sans reprendre son souffle, le vent secoua les hautes cimes jusqu'à l'aube. Cette nuit-là, les étoiles qui veillaient sur les amants changèrent d'humour. Cette nuit-là, les déesses et les dieux s'étaient entendus. Ce fut dès lors la dernière nuit. Calypso en voulait à Ulysse, Ulysse en voulait à Calypso, et ils firent l'amour avec dans leur cœur des remontrances amères et un sentiment puissant d'hostilité. L'union charnelle devenait vide de sens, ils dansaient l'un contre l'autre, non plus l'un avec l'autre. Il y avait finalement une désunion totale. Athéna s'en réjouissait. Elle veillait à ce que le sentiment de cette dernière nuit reste ancré dans la mémoire d'Ulysse. Ce fut là peut-être la chance des amants. Lorsqu'ils eurent accédé à ce qu'il semblait être une sorte de jouissance, leur corps, leur esprit, leur cœur s'apaisèrent tristement, mais leurs âmes, par-delà la chair, restèrent enlacées. Ce que le ciel un jour a réuni, rien au monde ne saurait une nouvelle fois le séparer. Le lendemain, Ulysse rejoignit la mer. Son radeau de fortune glissa sur les flancs. Calypso n'assista pas à son départ. Quelques nymphes au loin avaient agité une main en guise d'adieu, et il partit comme il était venu, seul et éprouvé. Il observa avidement les côtes de l'île. Son regard cherchait Calypso, mais aucune silhouette n'émergea de l'oucher. Il contempla les crêtes blanches des vagues s'écrasant sur les falaises. Il se dit qu'il n'avait jamais aimé une femme comme il l'avait aimée. Son cœur hurlait de revenir vers elle, mais sa raison était plus forte. Ulysse baillonna la souffrance. Il tourna le dos fermement à l'île. Ce n'était plus qu'un lointain souvenir. Son cœur avait survécu au traumatisme de la guerre. Il se dit qu'il saurait bien survivre à un chagrin d'amour. Puis il fixa l'horizon et rêva au rocher des Tacs. Où sont tes yeux d'argent, d'or et de rubis ? Où sont, ma bien-aimée, tous nos jours et nos nuits ? Où sont tous nos sourires, nos sourires enflammés, et nos rires et nos joies, et nos baisers sacrés ? Où sont toutes nos promesses d'amour et d'espoir, qui semblent maintenant glisser vers le soir ? L'astre de la nuit a quitté notre terre, quand l'astre du jour est tombé dans la mer. je veux te retrouver ici ou bien ailleurs les âmes séparées n'attendent qu'un jour meilleur alors sur une mer d'étals à l'onde apaisée nous voguerons ensemble ma bien-aimée Ce matin-là, Calypso s'était faite discrète. Personne n'avait voulu déranger sa solitude. Comme une ombre, elle s'était glissée à travers les bois jusqu'à la côte. Elle désirait tant le voir une dernière fois. Lui dire combien il lui manquerait, combien il lui serait difficile de vivre sans lui. Mais elle garda le silence. Elle avait toujours détesté les adieux. Et cet adieu était le plus terrible de tous. Les pieds nus, elle courut sur la terre gelée. Elle hissa son corps jusqu'à la cime d'un pin. De là, elle vit la mer. Puis Ulysse tournait vers l'horizon sans un regard pour elle. Les immortels venaient de lui dérober ce qu'elle avait de plus cher au monde. Elle frappa l'arbre sur lequel elle se tenait. Toute la colère qu'elle avait tenté de maîtriser s'accrocha là-haut entre les branches résineuses et les aiguilles de pin. Elle resta plusieurs jours sans manger ni boire. Ses compagnes la cherchèrent sur toute l'île. Elles hurlèrent son nom, mais elle ne répondit pas. Les arbres, les plantes, les animaux respectèrent son silence, et nul ne vint révéler l'endroit où la nymphe s'était retirée. Calypso pensa qu'Ulysse avait bien été prompt à donner sa réponse. Elle descendit lentement jusqu'à la terre. La tête lui tournait. L'estomac vrillait. Des nausées secouaient sa gorge. Elle ne pouvait plus respirer, son souffle semblait s'arrêter à mi-chemin. Elle était épuisée. Elle but quelques perles de rosée à la surface d'une fougère et croqua dans une pomme qu'elle ramassa dans un champ. Puis, elle entra dans sa caverne pour s'endormir profondément. Les nymphes la veillèrent à tour de rôle. Elle maintenait non loin de sa couche un feu de laurier, de touillat et de sauge, dont les vapeurs aidaient à éclaircir les pensées et à retrouver la vigueur nécessaire pour affronter les épreuves de la vie.