Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186 cover
Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186 cover
Les Adultes de Demain : Réinventer l'enfance et l'éducation

Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186

Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186

52min |28/03/2024
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Les Adultes de Demain : Réinventer l'enfance et l'éducation

Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186

Ce que l'on devrait offrir à tous les enfants - Boris Cyrulnik - #186

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Description

✍️NOUVEAU : je lance un sondage pour mieux vous connaitre, aidez-moi à collecter le plus grand nombre de réponses : https://pnhxjl7nzh2.typeform.com/to/maw8xoC8


Ce moment-là, je l’attendais depuis longtemps : rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m’a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l’interroger sur ses réflexions autour de l’éducation et de la petite enfance.


Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons : neuropsychiatre, rescapé et orphelin de la Seconde Guerre Mondiale, pionnier de la résilience, auteur prolifique, acteur engagé pour la petite enfance, etc.

Cet échange m’a profondément marqué, on a parlé des guerres, de la violence même en éducation, de carence affective, et beaucoup d' enfants et des mamans. Boris est d’une incroyable générosité, bienveillance et humilité, et ça fait du bien.


Ressources :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition. Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ?

  • Speaker #0

    Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ce moment-là, je l'attendais depuis bien longtemps, rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m'a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l'interroger sur ses réflexions autour de l'éducation et de la petite enfance. Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons. neuropsychiatres, rescapés et orphelins de la seconde guerre mondiale, pionniers de la résilience, auteurs prolifiques acteurs engagés pour la petite enfance etc etc cet échange m'a profondément marqué, on a parlé de guerre, de violence mais aussi d'éducation, de carence affective et beaucoup des enfants et de leurs mamans Boris est d'une incroyable générosité bienveillance et humilité et ça fait tellement du bien je suis certaine que cet épisode va beaucoup vous plaire et je vous souhaite donc une très bonne écoute Bonjour Boris. Difficile de vous présenter en quelques mots, vous avez marqué notre siècle à travers votre travail et vos écrits, et notamment le dernier que j'ai dévoré, 40 voleurs en carence affective, bagarres animales et guerres humaines, aux éditions Odile Jacob. Vous avez aussi grandement contribué aux questions liées à l'enfance, et c'est ce qui m'amène à être avec vous aujourd'hui, dans le Sud, face à la mer. J'aimerais qu'on démarre tout de même avec un petit bout de votre histoire. Vous avez vécu, on le sait tous, une enfance marquée par l'épreuve et par la Seconde Guerre mondiale. En quoi cette expérience vous a donné envie de devenir psychiatre, mais aussi de vous intéresser aux enfants ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai démarré ma vie en perdant ma famille, en étant emprisonné à 6 ans, et en ayant compris qu'on voulait me tuer. Donc ce n'est pas un démarrage facile dans la vie, d'autant qu'ensuite, comme je n'avais plus de famille, je ne touchais pas de bourse. C'est un miracle, c'est invraisemblable que j'ai réussi à faire des études, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Mais c'est vrai que démarrer la vie en perdant sa famille pendant la guerre, alors que tout le monde s'entre-tuait, Ça m'a donné la rage de comprendre. Ou bien je ne m'en sortais pas, ce qui aurait été logique, ou bien si je voulais m'en sortir, il fallait absolument comprendre. C'était ma liberté, comprendre. Et ça m'a rendu complètement psychiatre, psychologue, en fait. C'est-à-dire que, et je me rends compte maintenant que j'arrive au dernier chapitre de ma vie, que je vois les mêmes phénomènes réapparaître, les mêmes mots, les mêmes... récits criminels, stupides, qui provoquent des engagements sur la planète entière, ça vraiment, je ne m'y attendais pas.

  • Speaker #0

    Vous parlez notamment dans votre livre de déserts affectifs durant votre enfance, que vous avez tenté d'atténuer grâce à la rencontre avec un chien. Et je sais que le monde animal s'est depuis intégré à votre manière de penser, à vos réflexions, de manière assez importante. Comment est-ce que le monde animal vous a permis ? de mieux comprendre l'espace humain ?

  • Speaker #1

    Dans les institutions d'après-guerre, où j'étais avant de retrouver la sœur de ma mère, dans ces institutions, le métier d'éducateur n'existait pas et les moniteurs avaient pour consigne de ne pas parler aux enfants, surtout aux garçons. Il fallait dresser les garçons, sinon ça allait devenir des bêtes sauvages. Donc les relations avec les adultes, c'était des relations... de mépris, de coups, de silence, et les seules relations humaines, je les avais avec des animaux, qui étaient une poésie extraordinaire. Il y avait des vols de fourmis, il y avait les oiseaux, et puis il y avait des chiens avec qui j'allais parler régulièrement, qui me faisaient la fête quand j'arrivais, et qui ne répétaient pas un mot de ce que je leur racontais.

  • Speaker #0

    Ça c'était important. Et en quoi justement le monde animal est venu vous aider dans votre travail ?

  • Speaker #1

    J'étais attiré par l'affection pour les animaux, puisque les adultes ne fournissaient pas d'affection. Donc j'étais attiré, mais intellectuellement, scientifiquement, dès les années d'après-guerre, il y avait énormément d'orphelins. En France il y en avait 300 000, mais sur la planète il y en avait je crois 10-12 millions. En Russie, en Pologne, en Europe centrale, en Allemagne, il y avait énormément d'orphelins. Et ces orphelins, les garçons surtout, ne survivaient que grâce à la violence. Et tout le monde se demandait pourquoi ces enfants privés de famille étaient violents. La réponse aujourd'hui elle est très simple, s'ils n'étaient pas violents, ils mourraient. La violence était une valeur adaptative et deux psychanalystes, Spitz, Anna Freud et un peu plus tard John Bowlby, mon maître, l'inventeur des théories de l'attachement, ont dit mais on ne peut pas faire d'expérimentation. avec les enfants humains, mais les animaux ont quelque chose à nous apprendre. Et en effet, ils ont constaté qu'il y avait des publications scientifiques très rigoureuses et très bien faites qui montraient que lorsqu'un être vivant, mammifère ou singe, chien, oiseau, est privé d'altérité, son cerveau est altéré, c'est-à-dire qu'un bébé, animal ou humain, Le sein ne peut bien fonctionner que s'il y a une altérité, c'est-à-dire une structure. Aujourd'hui, on appelle ça des niches écologiques. Mais en 1945, on appelait ça une altérité. L'altérité, quand tout va bien, c'est la mer, le foyer, la famille, l'école, le quartier. Mais là, ça n'allait pas bien. C'était la guerre, c'était le lendemain de guerre. Il n'y avait plus d'école et pour ces enfants-là, il n'y avait plus de famille. Les animaux... m'ont démontré qu'ils ne pouvaient se développer bien que s'il y avait une structure affective, éducative autour d'eux. Alors que quand j'étais enfant, quand un enfant se développait bien, on disait que c'était une bonne graine, et s'il se développait mal, on disait que c'était une mauvaise graine. Donc c'est une métaphore raciste, qui veut dire que parmi nous, il y aurait des gens de meilleure qualité que d'autres. La famille, la culture, l'école n'ont rien à voir là-dedans. C'est une métaphore raciste. Et ces travaux d'éthologie animale qui avaient commencé dans les années 30, qui étaient rigoureusement faits de manière scientifique, démontrés. Alors on n'avait pas de neuro-imagerie à cette époque-là, mais aujourd'hui la neuro-imagerie confirme qu'un animal, un être vivant, privé d'altérité, sain, devient dysfonctionnel. C'est-à-dire que les garçons ne survivaient à la privation d'affection que par la violence. Ce qu'on voit réapparaître de manière aiguë depuis 10, 15, 20 ans, même dans notre pays, où les garçons redeviennent d'une violence extrême parce que l'environnement est délabré pour des raisons culturelles, sociales ou politiques. L'environnement de nos enfants aujourd'hui est délabré et on se retrouve dans une situation comparable à la guerre de 40, où ces enfants sans foyer ne peuvent que devenir violents ou mourir.

  • Speaker #0

    Vous avez évoqué tout à l'heure les niches écologiques. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept ?

  • Speaker #1

    Alors, le premier à proposer ça, c'est un psychologue allemand, Brofen Brenner, mais on l'a repris dans tous mes groupes de recherche. Je propose de dire que tout mammifère, mais même les oiseaux qui ne sont pas des mammifères, ils ont des œufs, comme les mammifères. Il y a trois niches écologiques. Pour un mammifère humain, la première niche écologique, c'est le ventre des femmes. On est tous nés d'une femme. La deuxième niche écologique, c'est, après la naissance, le corps des femmes, les seins, l'odeur, la parole, la brillance des yeux, entourés. Il faut qu'une femme, une mère, ne soit pas seule. Si elle est entourée par celui que de mon temps on appelait un mari, je ne sais plus comment il faut dire aujourd'hui. il faut qu'il y ait une structure autour de la mer. Si la jeune mer est sécurisée, par une structure affective, un mari, une grand-mère, des copains, des copines, une structure affective autour d'elle, si elle est sécurisée, elle devient sécurisante pour le bébé qu'elle vient de mettre au monde. C'est préverbal. Ça c'est la deuxième niche écologique. Et la troisième niche écologique, c'est celle qui caractérise... Le monde humain, c'est le monde de l'artifice, l'outil et l'artifice du verbe qui commence dans l'utérus. C'est-à-dire que maintenant, les neurosciences, la neuro-imagerie, montrent que quand la mère parle, les hautes fréquences de sa voix sont filtrées par son corps et surtout par le liquide amniotique, alors qu'à l'inverse, les basses fréquences de sa voix sont très bien transmises par son corps. et surtout par le liquide amniotique. Et on a rendu observable à Toulon que lorsqu'elle parle, les basses fréquences de la voix viennent vibrer contre le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte. C'est-à-dire que lorsque la femme enceinte parle, c'est comme si elle caressait le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte, ce qui explique pourquoi, dans l'heure qui suit sa naissance, le bébé s'orientent vers la brillance des yeux de la mère, vers le mamelon et vers la voix maternelle qu'ils différencient de toute autre voix. Donc déjà, ils tissent avec sa mère. Alors, ce n'est pas encore sa mère, vous ne vexez pas à ce stade du développement, ce n'est pas encore une maman, c'est un objet sensoriel. Et ils tissent avec sa mère un objet de familiarité qui est le tranquillisant naturel. Si la mère est déprime, si elle est morte, si elle est maltraitée, si elle a la guerre, si son mari est violent, si elle a la violence, elle n'est pas bien. Or, quand on associe les recherches aujourd'hui, on se rend compte que les jeunes mères mettent au monde leur premier enfant, elles ont presque 32 ans. Le maximum de fécondabilité, c'est 25 ans. Un utérus de 32 ans, ce n'est pas la même cavité qu'un utérus de 25 ans. Ça marche bien, ça marche très souvent bien, mais ça doit déjà être un peu médicalisé, même si la plupart du temps, ça marche bien, mais il faut surveiller le diabète, l'hypertension, c'est un petit peu médicalisé. Donc la relation... est déjà changé. Ce n'est plus le mari, ce n'est plus la grand-mère, ce n'est plus la voisine, c'est le médecin. C'est la technique qui remplace la relation familiale affective. Et la troisième niche sensorielle, celle de la parole, le bébé reconnaît la voix et non pas encore la parole, mais plus tard il va parler entre le 20e et le 30e mois, et les mots. désormais vont désigner des objets proches, dans le contexte. Et ce n'est que vers la cinquième, sixième année que le développement du cerveau de l'enfant lui permet d'accéder au récit, c'est-à-dire quelles sont mes origines, quelle est ma religion, pourquoi est-ce que je suis né dans cette famille qui est chrétienne, qui est musulmane, qui est faite de paysans, qui est faite de marins, etc. Et là, on accède au récit. Donc on quitte la biologie pour entrer dans les déterminismes sociaux, culturels. Voilà les trois niches.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui est dysfonctionnel dans notre société aujourd'hui vis-à-vis de ces niches et des enfants ?

  • Speaker #1

    Ce qui est dysfonctionnel s'appelle dans les trois niches. Première niche, une femme enceinte stressée, sécrète, les substances du stress, qu'aujourd'hui on sait doser, qu'on savait doser après-guerre aussi, schématiquement c'est le cortisol. et l'adrénaline, les catécholamines. Si c'est un stress aigu, comme on le voit à l'échographie légale, si c'est un stress aigu, le bébé sursaute, et si c'est un stress aigu... Tout se remet en place dès que la mère est sécurisée. Donc même si le bébé a sursauté, c'est pas grave, il reprend son développement. Mais si c'est un stress chronique, le cortisol, les catécholamines, finissent par franchir la barrière du placenta. Et quand le bébé est éveillé, c'est-à-dire à peu près 4 heures par jour, chaque fois qu'il est stimulé, il déglutit du liquide amniotique bourré de cortisol et de substances du stress. toxiques pour son système nerveux, pour certaines zones de son système nerveux. Et avec Shaul Arel, à Tel Aviv, il a été le premier à montrer, pour une population de femmes palestiniennes et israéliennes qui consultaient dans les hôpitaux israéliens pour syndrome psychotraumatique, il a fait une population de 170 femmes stressées, pour ce qui consultait pour syndrome psychotraumatique. qui sont des souffrances continues, les gens qui souffrent de ça ne peuvent plus travailler, ils ne peuvent plus, ils ne pensent qu'à ça. Ils sont prisonniers du trauma et ces femmes-là ont mis au monde 170 bébés. Il a fait des neuro-imageries qui ont montré que ces 170 bébés avaient une atrophie des deux lobes préfrontaux, une atrophie des deux systèmes limbiques et une hypertrophie d'un noyau amygdalien. qui est le socle neurologique des émotions intenses, insupportables, de haine, de colère, de rage, de désespoir. C'est-à-dire que ça c'est un raisonnement écosystémique. Une altération du milieu, j'allais dire, quand j'ai écrit dans mon livre La guerre chronique de ces milieux aujourd'hui ce n'est plus une guerre chronique, c'est une guerre sur aiguë. La guerre, mais... Il y a bientôt la moitié de la population du monde aujourd'hui est en guerre. Alors nous, en France, on ne parle que des deux guerres qui nous préoccupent, l'Ukraine et le Proche-Orient. Mais il y a 183 guerres actuellement. C'est pareil pour tous les bébés et pour toutes les femmes enceintes du monde. Mais on ne parle que des deux guerres qui nous touchent, on ignore les autres. C'est-à-dire que ces femmes-là sont insécurisées. La résilience des neurones, dans les petites années, est très facile à déclencher. Dès qu'on sécurise la mère, les substances du stress ne sont plus sécrétées. En une nuit ou deux, le bébé recommence sa reconstruction neurologique. Donc la résilience neuronale, c'est contre-intuitif, c'est la plus facile à déclencher, il suffit de s'occuper de la mère. Qui va s'occuper de la mère ? Son mari, son père, son compagnon, sa grand-mère, ses copains, un système social bien organisé. Elle pourra consulter pour l'hypertension, pour le diabète, des copains, la socialisation, c'est très important. Dès qu'elle est sécurisée, le bébé se débrouille. Mais si on insécurise la mère, ce qui était une dysfonction cérébrale... va devenir une structure cérébrale. Et là, la résilience sera difficile à déclencher parce que le cerveau est sculpté, non pas par la mère, mais le cerveau est sculpté par le malheur de la mère, son mari, la guerre, la précarité sociale, un accident de la vie, etc.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que deviennent ces enfants une fois qu'ils ont vécu cette modification, cette modification de la structure cérébrale ? Qu'est-ce qu'on peut faire pour ces enfants ?

  • Speaker #1

    Il faut s'occuper de la mère. D'abord, les enfants se débrouilleront. Dès que la mère sera bien, les enfants vont se débrouiller. Plus on intervient tôt, plus la résilience est facile à déclencher. Donc, plus on intervient tard, plus la résilience sera difficile à déclencher. Alors ça, c'est des évaluations neurologiques qui ont été faites en Roumanie. où le dictateur Cheochescun avait isolé 170 000 enfants en isolement sensoriel total, comme Arlo Spitz l'avait fait pour des petits singes macaques dans les années 30. Ces singes étaient très altérés, on ne savait pas pourquoi. Et ils avaient les mêmes altérations que les petits roumains que j'ai vus, privés d'affection. Ils n'avaient que... Ils ne parlaient pas, personne ne leur parlait. Il puait, personne ne l'avait. Il ne souriait pas, personne ne souriait. Il n'avait que des activités auto-centrées. Mais quand les Romains se sont occupés d'eux, ils en ont récupéré 100 000. qui n'avaient pas été isolés intensément. Ils n'ont pas récupéré 70 000 enfants, ceux qui ont été isolés précocement, intensément, durablement. Donc on sait ce qu'il faut faire pour s'occuper des enfants dans les trois niches écologiques que je vous ai résumées.

  • Speaker #0

    Vous parlez dans votre dernier livre aussi de carence affective. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept et le lien que vous pouvez faire avec tout ce qu'on a dit avant ?

  • Speaker #1

    L'affect, c'est ce qui stimule le cerveau. Je suis content, certaines zones cérébrales, les zones de la récompense, passent au rouge, c'est-à-dire que les zones de la récompense, c'est schématiquement de l'hypothalamus à la face inférieure du lobe préfrontal. Ça veut dire que je me sens bien. C'est des neurones qui sécrètent beaucoup de sérotonine. ou de dopamine, qui sont les deux neuromédiateurs du bien-être, le plaisir d'agir et le plaisir d'entrer en relation. Si je suis seul, cette zone cérébrale n'est pas stimulée. Les enfants sont hébétés. Hébétés, ils n'apprennent rien. Et ils sont hébétés. Et si on les laisse seuls longtemps, la résilience sera de mauvaise qualité. Alors, les Roumains ont récupéré 100 000 enfants sur 170 000. parce qu'ils se sont, dès qu'ils ont pu s'occuper de ces enfants, ils ont fait des prouesses affectives. Ça consiste en quoi ? Ce que font toutes les mères quand elles sont bien. Parler, toucher, gronder, toileter, rigoler, s'amuser. C'est le plaisir de la mère, à condition qu'elle soit bien, qui fait que l'enfant est entouré par une niche sensorielle stimulante, il va bien se développer. Si la mère est morte, et si l'enfant est laissé seul, si la mère est maltraitée, si la mère est malade, si elle a guerre, la précarité sociale, la mère ne peut pas, n'a pas la force. Soit parce qu'elle est malade, soit parce qu'elle déprime, soit parce qu'elle est maltraitée, soit parce que le frigidaire est vide, soit parce que le compagnon est à la guerre et elle ne sait pas s'il va rentrer le soir même. Ce qu'on entend tous les jours aujourd'hui, c'est une phrase... que j'ai entendu quand j'étais gamin, que j'ai entendu quand j'ai travaillé au Liban pendant les 16 ans de guerre civile déclenchée par les Palestiniens et sauvée par Hafez el-Assad, qui les a chassés du sud du Liban, ce que tout le monde a oublié. Et dès que ces enfants-là, on réentend aujourd'hui les mêmes phrases. Quand papa... Quand mon mari, mon compagnon, part le matin, je suis dans l'angoisse jusqu'au soir parce que je ne sais pas s'il va revenir. Les substances du stress sont tout le temps sécrétées et le bébé se développe mal. Et la guerre est une fabrique de psychopathes. Pendant plusieurs générations, les garçons, plus que les filles, parce que les garçons réagissent par la violence alors que les filles réagissent par le câlin et la parole. Il y a plusieurs hypothèses. Quand elles sont malheureuses, elles se calinent, elles se font caliner ou elles parlent. Quand un garçon est malheureux, il se replie sur lui ou il explose. Et toutes les cultures, toutes les cultures ont utilisé cette différence de réaction entre les genres, comme on dit aujourd'hui, pour utiliser les garçons et les préparer à la guerre. à la violence, au travail, torture, 15 heures par jour, au fond des mines, ce que je n'ai pas connu, mais j'ai connu quand j'étais médecin au chantier naval de la Seine, 10 heures par jour des hommes qui ne voyaient la lumière du jour que deux mois par an, et qui ne parlaient jamais. Donc le fait qu'il y ait un déterminisme biologique n'exclut pas le déterminisme culturel. Les femmes aujourd'hui, les jeunes mères, mettent au monde leur premier bébé, elles ont presque 32 ans. Elles se sont développées comme jamais dans la culture occidentale. C'est la première fois depuis que votre grand-père et votre grand-mère, qui sont les mêmes que moi, monsieur et madame Sapiens, il y a 300 000 ans, on avait les mêmes grands-parents. C'est la première fois depuis 300 000 ans que les femmes ont la possibilité... de se développer comme des personnes, et non pas simplement comme des annexes de mari ou des porteuses d'enfants. Depuis deux, trois générations seulement, elles deviennent des personnes, parce que la culture a changé, parce que l'école est devenue un lieu de formation importante où les filles se débrouillent très bien, et malgré ça, il n'y a jamais eu autant de dépression périnatale. Comment vous expliquez ça ? La solitude, ces jeunes femmes actives qui font des études, qui bougent, qui se débrouillent, qui s'épanouissent, tout d'un coup elles se retrouvent seules avec un tyran domestique adoré qu'elles appellent le bébé. Et elles sont prisonnières du bébé. Le fait de mettre au monde un bébé, aujourd'hui, a incroyablement changé de signification. Jusqu'à la découverte de Simmelweis, Prophylaxie d'accouchement, 1861, les femmes avaient une espérance de vie de 36 ans. Elles avaient 13 grossesses par vie de femme pour donner 4 adultes, parce que la mortalité enfantine était énorme et les femmes suivaient. Les hommes vivaient plus longtemps, mais ils mouraient entre 45 et 60 ans. Les plus vieux mouraient à 60 ans. Mais quand un homme mourra à 60 ans, il pouvait faire deux ou trois mariages sans divorcer, tellement les femmes mourraient jeunes. Donc les conditions d'existence étaient très dures, et aujourd'hui notre culture qui permet le développement des femmes et des hommes a pour effet secondaire la solitude, et les femmes dépriment de plus en plus. Donc c'est des questions éducatives, culturelles, l'entourage. Il faut qu'il y ait une famille, un foyer, un village autour des jeunes mères pour qu'elles ne soient pas seules. Et à ce moment-là, depuis que, après notre rapport, depuis que le congé paternité a été un petit peu augmenté mais pas assez, comparé au Danemark, à l'Espagne ou à d'autres pays où le congé paternité est... et le congé parental est très augmenté, la dépression périnatale n'existe pratiquement plus. Elle a disparu en un an. Elle a pratiquement disparu en un an. Donc on sait ce qu'il faut faire. Il faut entourer la niche sensorielle, la niche écologique d'une mère pour qu'elle soit sécurisée et le bébé se débrouillera.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai qu'en France, on a l'impression que les bébés font face à plusieurs crises. Il y a, comme vous le disiez, des pressions qui touchent beaucoup de mères. Alors maintenant, on parle aussi de la crise du système de garde. Qu'est-ce que vous pensez de cette situation ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est un problème actuel. C'est qu'avant, il n'y a pas longtemps, il y a trois générations, il y a même en Italie, le divorce était interdit. Il y avait des couples très douloureux qui ne pouvaient pas. se séparer. Donc quand le divorce a été légal, ça a soulagé quelques familles, parce que quand les enfants se développent dans un conflit parental sur aiguille, ils ne se développent pas bien. Et quand, donc ça a été un progrès, et maintenant on est passé dans l'excès contraire, on prévoit que les jeunes couples aujourd'hui feront, dans leur aventure humaine, 4 ou 5 couples, 5 à 10 métiers différents. C'est-à-dire que c'est une instabilité affective très importante. Un cerveau ne peut être sculpté que s'il y a des moments de stabilité affective. Donc le divorce, la violence conjugale avant la parole, la séparation parentale avant la parole, schématiquement vingtième, on va dire troisième année, est une grave agression pour l'enfant. La séparation. parental parfois nécessaire. J'ai connu l'époque où, quand un homme était violent, et quand j'ai accompagné des femmes qui étaient obligées de s'enfuir avec leurs deux enfants parce que l'homme devenait pathologiquement violent, elles étaient condamnées pour abandon de domicile familial. La loi a changé, mais il n'y a pas longtemps que la loi a changé. Maintenant, c'est l'homme qui doit partir et qui doit, si possible, se faire soigner. Parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. La loi a changé, mais c'est récent ça. Donc ça veut dire que des lois, les structures familiales, qui étaient trop rigides il n'y a pas longtemps, deviennent trop labiles, trop instables maintenant. Il faudrait que les jeunes comprennent qu'il y a des périodes sensibles du développement des enfants où il faut, si on peut, faire l'effort de ne pas se séparer à la moindre occasion. Je le redis volontairement. parfois c'est nécessaire. J'ai eu des patients, des hommes paranoïaques, et là il fallait protéger la femme et les enfants. Ce que ne faisait pas notre ancien système légal. C'est les femmes qui étaient condamnées. Mais les femmes, ce n'est pas la première fois qu'elles sont victimes d'absurdités légales. C'est déjà arrivé. C'est en train de changer, mais le point faible de la culture de ceux qui ont 25 ans aujourd'hui, c'est on. peu peur.

  • Speaker #0

    Se stabiliser et stabiliser le développement d'un enfant, c'est-à-dire tisser le lien d'attachement si on se sépare tous les deux ans. Pour tisser le lien d'attachement sécurisant, il faut qu'il y ait au moins une stabilité affective pour qu'on puisse tisser le lien d'attachement. Et actuellement, on voit que les jeunes vivent dans des ruptures incessantes dont ils souffrent. et donc s'ouvrent les enfants.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que vous pensez en termes de sécurité affective pour les enfants, des modes de garde type les crèches ? Est-ce qu'elles permettent aujourd'hui de répondre aux sécurités affectives qui sont si nécessaires pour les bébés et qui sont souvent mis très jeunes dans ces structures ?

  • Speaker #0

    Alors si, sur le papier on sait ce qu'il faut faire, il faudrait augmenter tous les métiers de la petite enfance, assistantes maternelles, crèches, ce qu'ont fait les allemands qui culpabilisaient les mères il n'y a pas longtemps encore en disant si votre enfant se développe mal c'est parce que vous travaillez, vous n'êtes pas consacré à votre enfant donc les mères étaient culpabilisées, beaucoup y croyaient et ils ont renversé la politique éducative et maintenant ils ont développé des crèches comme savent le faire les allemands c'est à dire c'est impeccablement organisé c'est très rapide Et ils ont amélioré la formation des métiers de la petite enfance. Et les enfants, les bébés préverbaux, ont besoin d'un système familial à multiples attachements. Il faut qu'il y ait la mère, inévitablement, puisque c'est elle qui porte les enfants, et c'est elle qui marque les premières empreintes dans le cerveau et dans le psychisme du bébé en développement. Donc la mère, c'est la figure d'attachement primordiale. ça veut pas dire unique ça veut dire qu'il faut qu'ils aient une autre figure d'attachement de mon temps on dit que c'était le père maintenant ça peut être un autre homme ça peut être une grand mère qui joue le rôle du père ça peut être une autre femme qui joue le rôle du pain du père une femme qui joue le rôle du père vous avez bien entendu et les femmes homosexuelles se débrouillent très bien les enfants se débrouillent très bien peut-être Peut-être même mieux que les hétérosexuels. Mais actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de moins en moins de jeunes qui s'orientent vers les métiers de la petite enfance, qui sont fatigants et pas très bien payés. Ils n'ont pas la formation. qui pourrait les rendre intéressés par les métiers de la petite enfance. Je donne des formations, des instituts de petite enfance, on voit des dames qui adorent, qui adoraient ce métier, on voit des dames... qui sont à la retraite depuis très longtemps, qui viennent assister aux cours pour qu'on parle encore des bébés. Ça a enchanté leur vie. Et ça existe de moins en moins. Donc on voit qu'il y a de moins en moins de métiers de la petite âme. de moins en moins formés et aux états unis où n'importe qui garde n'importe quel enfant avec des enfants surnombre dans des espaces trop petit avec des gardiens sans formation les bébés deviennent inconsolables et violents des garçons plus que les filles il y avait les bébés garçons ne réagissent pas la frustration de la même manière que les bébés filles et comme je le disais tout à l'heure cette violence La violence des réactions des garçons est utilisée par toutes les cultures pour en faire des soldats, des guerriers, pour faire la guerre qu'on voit se développer. Et c'est ce qui explique que les bébés américains sursautent, ne sont pas consolables, pour un rien, ils ne contrôlent pas leurs émotions. Les filles contrôlent mieux leurs émotions. Elles ont plus d'émotions que les garçons, mais elles les contrôlent mieux que les garçons parce qu'elles chargent des câlins plus que les garçons. Et elles parlent plutôt. et mieux que les garçons. Donc elles ont des modes de régulation émotionnelle plus efficaces que les garçons. Et puis quand elles sont vieilles, quand elles sont grandes, quand un garçon leur casse les pieds, au lieu de réagir par la violence, elles téléphonent à la meilleure amie et elles descendent avec des mots le garçon qu'elles ne peuvent pas descendre avec leurs petits poings. Donc ça veut dire que les modes de défense ne sont pas les mêmes chez les garçons et chez les filles. Et ça pose le problème qu'on voit, C'est un garçon violent. font le vide autour d'eux à la crèche, personne ne les sécurise parce que c'est des gardiens d'enfants, ce ne sont pas des accueils éducatifs, ce sont des gardiennes d'enfants. Parfois, elles les mettent devant le mur pour qu'ils s'endorment. Elles mettent la chaise du bébé, elles leur donnent un biberon, et le bébé, il n'y a pas de stimulation, il s'endort. Ce n'est pas un accueil éducatif. Et on voit ces garçons-là à la crèche, ils battent. Ils tapent, ils mordent, ils s'isolent, les autres enfants les évitent. À l'école, ils n'ont pas de copains, ils ne parlent pas, ils s'isolent encore plus. Et quand arrivent les émotions intenses de l'adolescence, c'est un pays où tout le monde est armé, vous connaissez la suite. Ils rentrent dans le lycée, dans l'école, dans le lieu de leur humiliation, et ils tuent. On sait ce qu'il faut faire. Les américains ne le font pas, les danois le font bien, les espagnols le font de mieux en mieux, les québécois le font de mieux en mieux, et la violence des garçons diminue beaucoup. Parce que l'affectivité, la familiarité, c'est notre tranquillisant naturel. Quand on est en sécurité affective avec un copain, avec sa femme, avec son homme... on n'a pas besoin de tranquillisant. Notre culture détruit ces tranquillisants naturels à cause de l'instabilité affective des parents, à cause de l'instabilité sociale des jeunes qui ne font plus de métier. Le développement personnel est devenu une telle valeur qu'ils refusent de faire des métiers de sacrifice. Les femmes refusent de se laisser sacrifier. Ça fait partie de leur développement personnel. les hommes se laissent de moins en moins héroïsés, ce qui était une manière aussi de les mener au sacrifice, comme on le voit aujourd'hui dans les pays avec ce tragique retour de la guerre, où on recommence à sacrifier les hommes, mais on voit que de plus en plus de jeunes hommes ne se laissent plus héroïsés, et on voit que la désertion qui était la honte de la guerre de 40, un homme qui désertait perdait. l'estime de sa fiancée ou de sa mère c'est la honte de la famille aujourd'hui quand en ukraine ou en russie un homme déserte toute sa famille l'aide la culture a complètement changé et

  • Speaker #1

    ça me fait penser à une phrase que j'ai souillé dans votre livre vous dites pendant des millénaires les méthodes éducatives ont été d'une incroyable brutalité Mais comme vous le dites, cette violence n'a toujours malheureusement pas disparu. On le voit à travers certaines méthodes éducatives ou même, comme vous le disiez, avec le développement des guerres. Pourquoi est-ce que l'être humain, malgré toutes ses connaissances, reste autant dans la violence ?

  • Speaker #0

    Parce que l'être humain... a failli disparaître plusieurs fois. Quand il y avait des changements climatiques, des glaciations, les feuilles, les fruits disparaissaient, l'herbe, le petit gibier disparaissait. Et il y a au moins deux périodes où il y avait presque plus de squelettes humains sur la planète. L'espèce humaine n'était pas en voie de disparition, elle était pratiquement disparue. Et qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas disparu ? L'invention des armes, des outils et la parole. L'invention des armes, le silex taillé, collé sur un pieu, emmanché sur un pieu, et des hommes beaucoup moins forts que des chevaux, beaucoup moins forts que des mammouths, beaucoup moins forts que la plupart des animaux, ont tué des animaux grâce à la caractéristique de la condition humaine, l'artifice de l'outil, l'artifice du verbe. On a plus. fabriqué du social, on a pu avec des mots, la violence des hommes a été encouragée pour tuer des animaux bien plus fort qu'eux. On a retrouvé un silex avec un pieu enfoncé dans le coeur d'un mammouth. C'est à dire qu'un petit homme, je ne sais pas combien de fois inférieur au mammouth, s'est glissé entre ses pattes. Et je pense que toute la famille, le clan, il n'y avait pas de famille mais il y avait des clans de 150 à 150 personnes, ils ont dû manger pendant plusieurs semaines. mettre la viande au froid et puis ils ont survécu grâce à la violence des hommes la violence a été une valeur adaptative la plupart des frontières sont le résultat de guerre les aristocrates se sont emparés grâce à la violence et ils ont fait des pays des nations S'il y a des cartographies de religion, il y a des zones musulmanes, des zones chrétiennes, c'est parce qu'il y a eu des guerres de religion. Si on parle français en France, c'est parce que la République française a interdit le patois, le breton, le basque et toutes les langues, et qui étaient gravement punis. Les enfants qui parlaient le basque ou le breton à l'école étaient humiliés et punis violemment. C'est la violence qui a fabriqué du social, notamment la violence des hommes, la violence physique des hommes. Et la violence des hommes et l'entrave des femmes. Les femmes, ce qu'on voit réapparaître dans les guerres aujourd'hui, ou la charte du Hamas, une femme participe à la guerre quand elle met au monde des fils. Quand elles leur apprennent la foi, et quand elles leur apprennent, de façon à ce qu'ils apprennent le métier des armes, pour tuer les juifs. C'est publié partout. Ça ne provoque pas d'indignation. La violence que je croyais combattue, qu'on a combattue. Pendant deux, trois générations, j'ai vraiment cru que ça ne reviendrait jamais. Et ce que je viens de dire, on prouve que ça revient. tout le pays.

  • Speaker #1

    Dans votre livre, vous invitez à proposer plusieurs récits aux enfants. Lesquels seraient-ils par exemple ?

  • Speaker #0

    Plusieurs récits ? Quand un enfant arrive à l'âge des récits, il a 5, 6, 7 ans, selon le développement de son système nerveux et selon les structures familiales. Il y a des familles où on parle beaucoup et on raconte. On est provençaux depuis le XVIIe siècle. Les enfants adorent ça. On est marins. depuis je ne sais pas combien de temps, on est musulman, on est chrétien, ça intéresse beaucoup les enfants. Mais si on présente un seul récit, il n'y a qu'un seul Dieu, c'est un langage totalitaire. C'est-à-dire que ça arrête l'empathie, il n'y a qu'un seul Dieu, le mien, les autres sont des mécréants, comme le disait les catholiques, qui méritent la mort. Les chrétiens qui ont été pas mal persécutés à cause du langage totalitaire sont devenus totalitaires aussi, l'inquisition, le colonialisme, et actuellement on voit que beaucoup de récits sont totalitaires, totalitaires religieux, totalitaires idéologiques, le communisme, le nazisme, totalitaires économiques. Il n'y a qu'une seule bonne économie, c'est celle de mon chef. Et quand il n'y a qu'un seul récit, on se retrouve prisonnier d'un langage totalitaire, totalement explicatif. Tous ceux qui ne croient pas comme moi, tous ceux qui ne croient pas comme moi, et qui ne pensent pas comme moi, méritent la mort. Ce qu'on voit réapparaître dans toutes les guerres qu'on nous raconte, ou auxquelles j'ai assisté, je suis stupéfait de voir à quel point on forme les enfants dans l'île de la mort. ignorance totale d'une autre religion, d'une autre culture, alors que le théâtre grec avait pour fonction justement de présenter les problèmes de la cité. Les comédiens devaient mettre en scène, jouer sur la scène, les problèmes de la cité et les citoyens devaient en débattre et ensuite y voter. C'était le point de départ, le théâtre a été le point de départ de la démocratie.... Les Espagnols avaient inventé les Disputaciones, c'est-à-dire la plus célèbre, c'est la Disputation de Valadolid, où avant la Disputation de Valadolid, on pensait que les Indiens n'étaient pas des êtres humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas la même couleur de peau que nous, c'est bien la preuve qu'ils ne sont pas humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas les mêmes dieux que nous, ils adorent des sculptures en bois hideuses. C'est bien la preuve que ce n'est pas des êtres humains, disait-on. Il y a donc eu une disputation, et quand on pensait que ce n'était pas des êtres humains, on pouvait les tuer, ce n'était pas des êtres humains. Pas de culpabilité, on pouvait les atteler pour les faire travailler, on pouvait les dépecer quand ils étaient tués. Ce n'était pas des êtres humains, ce n'était pas un crime. Dès l'instant où la disputation de Valadolid leur a accordé une âme, Parce qu'ils ont éclaté de rire, parce que les prêtres se sont bagarrés entre eux, ils ont roulé par terre et tout le monde a éclaté de rire. Les indiens ont éclaté de rire. On avait la preuve que c'était les êtres humains, parce que le propre de l'homme, c'est le rire. Donc ils ont eu une âme de justesse. On ne pouvait plus les atteler, on ne pouvait plus les dépecer, si on les tuait, ça devenait un crime, puisqu'ils avaient une âme, il fallait les baptiser. Changement culturel à cause, grâce à une disparition de la culture. réputation démocratique. Actuellement, on voit que dans des écoles religieuses, religieuses sacrées ou religieuses profanes, ou religieuses économiques, je crois que le néolibéralisme Capitalisme, la loi du marché, c'est la seule loi valable. Il y a des gens qui soutiennent ça. C'est un langage totalitaire. On ne présente pas le monde de l'autre. Donc si les autres meurent, si les autres sont dans des carences humanitaires terrifiantes comme au Yémen actuellement, je n'en ai rien à faire. Je m'en fous éperdument. Je ne sais même pas qu'ils meurent. Je ne sais même pas qu'ils souffrent. C'est un arrêt total. de l'empathie à cause de la construction de récits totalitaires l'arrêt total de l'empathie c'est ce qui caractérise la perversion seul mon désir compte oui mais elle maintenant elle est malheureuse oui mais moi j'ai passé un bon quart d'heure oui mais elle regarde dans quel état elle est ah oui mais moi qu'est ce que je me suis marré Voilà des raisonnements pervers, sexuels, c'est des raisonnements de pervers sociaux, culturels, qu'on entend actuellement dans tous les conflits au Proche-Orient ou en Europe. Je suis frappé de voir à quel point les belligérants ignorent-on des malheurs de l'autre. Ils s'en foutent éperdument, ça ne les concerne pas. Ce sont des cultures qui sont devenues perverses à cause d'un langage totalitaire.

  • Speaker #1

    C'est tout de même assez anxiogène je trouve aujourd'hui de devenir parent dans notre société. Qu'est-ce que vous auriez à dire à tous les parents qui nous écoutent et qui souhaitent offrir à tous les bébés un bon départ dans l'existence ?

  • Speaker #0

    Ma réponse est claire. Faites un village. Dans un village, il y a la mère, puisque c'est elle qui porte les enfants, il y a son compagnon, sa compagne, il y a des copains, on peut confier le bébé à un accueil éducatif, à une école. Faites un village avec l'école du village. Si vous êtes croyante avec l'église, la mosquée, ça fait partie de la structuration, ça fait partie de la culture, la spiritualité fait partie de la condition humaine et la religion fait partie de la religion. provoque des dilutions familiales qui aggravent les 4 ou 5 couples des parents. Alors on se voit par Zoom pour l'anniversaire, pour Noël si on est chrétien, c'est pas une relation, c'est une communication, c'est pas une relation. Faites un village, si vous êtes malade, il y aura une autre femme, le jeune père avancé, actuellement découvrent la fatigue et le bonheur de s'occuper d'un bébé, c'est la première fois dans l'histoire des hommes que les hommes peuvent s'attacher à un bébé. Avant, ils étaient chefs de famille, mais ils n'étaient jamais dans leur famille. C'était les femmes. qui n'était pas chef de famille, qui faisait tout dans la famille. C'était encore une absurdité légale qui a duré depuis tout le temps, et qui a été votée en 1804. Le père était le représentant de Napoléon dans la famille. Mais il n'était jamais là. C'était une absurdité légale qui a organisé notre culture pendant deux siècles. Si vous voulez moins souffrir, si vous voulez éviter le burn-out des femmes, actuellement, elles veulent travailler, elles veulent mettre au monde 1,67 enfants, je ne sais pas comment elles font, elles veulent s'en occuper le mieux qu'elles peuvent, c'est pas possible. Il y a bien des moments où il faut qu'elles soufflent un peu. Si elles veulent tout faire tout le temps, elles courent au burn-out. Si on organise un village autour de la jeune mère, elle pourra partir un jour ou deux, elle pourra partir travailler, elle pourra partir en vacances. Il y aura toujours une structure autour du bébé et le bébé au contraire va en bénéficier. Parce qu'il apprendra un style affectif avec sa figure d'attachement primordiale, mais il apprendra qu'il y a une autre manière d'aimer avec une autre figure d'attachement, une autre manière d'aimer avec le métier de la petite. enfance avec le moniteur de sport avec le prêtre avec il y aura plein de manières d'aimer ça va ouvrir son esprit ça va ouvrir son empathie il ne sera pas il ne deviendra pas totalitaire j'ai une dernière question c'est la question rituelle du podcast comme

  • Speaker #1

    vous le savez il s'appelle les adultes de demain qu'est ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui les futurs adultes de demain alors je leur dirais fabriquer inventer

  • Speaker #0

    un village, on ne peut pas vivre seul. Quand on vit seul, vivre seul, c'est la mort psychique. Donc on est contraint à vivre avec les autres. Mais vivre avec les autres, c'est parfois l'enfer. Donc vous avez le choix entre la mort et l'enfer. Sauf si vous faites un village avec des copains, des professionnels, des prêtres, des musiciens, des sportifs. Et à ce moment-là, vous limiterez beaucoup la casse. Et d'ailleurs, tous les rapports que je suis en train de lire actuellement sur la psychiatrie de demain soulignent... l'importance de la psychoéducation. La mère n'est pas seule, la mère doit être entourée avec une stabilité suffisante quand c'est possible et à ce moment là elle sera heureuse et les enfants qu'elles mettront au monde seront heureux eux aussi. Voilà c'est facile.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Boris, à très bientôt. Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast. Ils laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général. Ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt. pour un nouvel épisode.

Description

✍️NOUVEAU : je lance un sondage pour mieux vous connaitre, aidez-moi à collecter le plus grand nombre de réponses : https://pnhxjl7nzh2.typeform.com/to/maw8xoC8


Ce moment-là, je l’attendais depuis longtemps : rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m’a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l’interroger sur ses réflexions autour de l’éducation et de la petite enfance.


Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons : neuropsychiatre, rescapé et orphelin de la Seconde Guerre Mondiale, pionnier de la résilience, auteur prolifique, acteur engagé pour la petite enfance, etc.

Cet échange m’a profondément marqué, on a parlé des guerres, de la violence même en éducation, de carence affective, et beaucoup d' enfants et des mamans. Boris est d’une incroyable générosité, bienveillance et humilité, et ça fait du bien.


Ressources :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition. Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ?

  • Speaker #0

    Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ce moment-là, je l'attendais depuis bien longtemps, rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m'a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l'interroger sur ses réflexions autour de l'éducation et de la petite enfance. Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons. neuropsychiatres, rescapés et orphelins de la seconde guerre mondiale, pionniers de la résilience, auteurs prolifiques acteurs engagés pour la petite enfance etc etc cet échange m'a profondément marqué, on a parlé de guerre, de violence mais aussi d'éducation, de carence affective et beaucoup des enfants et de leurs mamans Boris est d'une incroyable générosité bienveillance et humilité et ça fait tellement du bien je suis certaine que cet épisode va beaucoup vous plaire et je vous souhaite donc une très bonne écoute Bonjour Boris. Difficile de vous présenter en quelques mots, vous avez marqué notre siècle à travers votre travail et vos écrits, et notamment le dernier que j'ai dévoré, 40 voleurs en carence affective, bagarres animales et guerres humaines, aux éditions Odile Jacob. Vous avez aussi grandement contribué aux questions liées à l'enfance, et c'est ce qui m'amène à être avec vous aujourd'hui, dans le Sud, face à la mer. J'aimerais qu'on démarre tout de même avec un petit bout de votre histoire. Vous avez vécu, on le sait tous, une enfance marquée par l'épreuve et par la Seconde Guerre mondiale. En quoi cette expérience vous a donné envie de devenir psychiatre, mais aussi de vous intéresser aux enfants ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai démarré ma vie en perdant ma famille, en étant emprisonné à 6 ans, et en ayant compris qu'on voulait me tuer. Donc ce n'est pas un démarrage facile dans la vie, d'autant qu'ensuite, comme je n'avais plus de famille, je ne touchais pas de bourse. C'est un miracle, c'est invraisemblable que j'ai réussi à faire des études, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Mais c'est vrai que démarrer la vie en perdant sa famille pendant la guerre, alors que tout le monde s'entre-tuait, Ça m'a donné la rage de comprendre. Ou bien je ne m'en sortais pas, ce qui aurait été logique, ou bien si je voulais m'en sortir, il fallait absolument comprendre. C'était ma liberté, comprendre. Et ça m'a rendu complètement psychiatre, psychologue, en fait. C'est-à-dire que, et je me rends compte maintenant que j'arrive au dernier chapitre de ma vie, que je vois les mêmes phénomènes réapparaître, les mêmes mots, les mêmes... récits criminels, stupides, qui provoquent des engagements sur la planète entière, ça vraiment, je ne m'y attendais pas.

  • Speaker #0

    Vous parlez notamment dans votre livre de déserts affectifs durant votre enfance, que vous avez tenté d'atténuer grâce à la rencontre avec un chien. Et je sais que le monde animal s'est depuis intégré à votre manière de penser, à vos réflexions, de manière assez importante. Comment est-ce que le monde animal vous a permis ? de mieux comprendre l'espace humain ?

  • Speaker #1

    Dans les institutions d'après-guerre, où j'étais avant de retrouver la sœur de ma mère, dans ces institutions, le métier d'éducateur n'existait pas et les moniteurs avaient pour consigne de ne pas parler aux enfants, surtout aux garçons. Il fallait dresser les garçons, sinon ça allait devenir des bêtes sauvages. Donc les relations avec les adultes, c'était des relations... de mépris, de coups, de silence, et les seules relations humaines, je les avais avec des animaux, qui étaient une poésie extraordinaire. Il y avait des vols de fourmis, il y avait les oiseaux, et puis il y avait des chiens avec qui j'allais parler régulièrement, qui me faisaient la fête quand j'arrivais, et qui ne répétaient pas un mot de ce que je leur racontais.

  • Speaker #0

    Ça c'était important. Et en quoi justement le monde animal est venu vous aider dans votre travail ?

  • Speaker #1

    J'étais attiré par l'affection pour les animaux, puisque les adultes ne fournissaient pas d'affection. Donc j'étais attiré, mais intellectuellement, scientifiquement, dès les années d'après-guerre, il y avait énormément d'orphelins. En France il y en avait 300 000, mais sur la planète il y en avait je crois 10-12 millions. En Russie, en Pologne, en Europe centrale, en Allemagne, il y avait énormément d'orphelins. Et ces orphelins, les garçons surtout, ne survivaient que grâce à la violence. Et tout le monde se demandait pourquoi ces enfants privés de famille étaient violents. La réponse aujourd'hui elle est très simple, s'ils n'étaient pas violents, ils mourraient. La violence était une valeur adaptative et deux psychanalystes, Spitz, Anna Freud et un peu plus tard John Bowlby, mon maître, l'inventeur des théories de l'attachement, ont dit mais on ne peut pas faire d'expérimentation. avec les enfants humains, mais les animaux ont quelque chose à nous apprendre. Et en effet, ils ont constaté qu'il y avait des publications scientifiques très rigoureuses et très bien faites qui montraient que lorsqu'un être vivant, mammifère ou singe, chien, oiseau, est privé d'altérité, son cerveau est altéré, c'est-à-dire qu'un bébé, animal ou humain, Le sein ne peut bien fonctionner que s'il y a une altérité, c'est-à-dire une structure. Aujourd'hui, on appelle ça des niches écologiques. Mais en 1945, on appelait ça une altérité. L'altérité, quand tout va bien, c'est la mer, le foyer, la famille, l'école, le quartier. Mais là, ça n'allait pas bien. C'était la guerre, c'était le lendemain de guerre. Il n'y avait plus d'école et pour ces enfants-là, il n'y avait plus de famille. Les animaux... m'ont démontré qu'ils ne pouvaient se développer bien que s'il y avait une structure affective, éducative autour d'eux. Alors que quand j'étais enfant, quand un enfant se développait bien, on disait que c'était une bonne graine, et s'il se développait mal, on disait que c'était une mauvaise graine. Donc c'est une métaphore raciste, qui veut dire que parmi nous, il y aurait des gens de meilleure qualité que d'autres. La famille, la culture, l'école n'ont rien à voir là-dedans. C'est une métaphore raciste. Et ces travaux d'éthologie animale qui avaient commencé dans les années 30, qui étaient rigoureusement faits de manière scientifique, démontrés. Alors on n'avait pas de neuro-imagerie à cette époque-là, mais aujourd'hui la neuro-imagerie confirme qu'un animal, un être vivant, privé d'altérité, sain, devient dysfonctionnel. C'est-à-dire que les garçons ne survivaient à la privation d'affection que par la violence. Ce qu'on voit réapparaître de manière aiguë depuis 10, 15, 20 ans, même dans notre pays, où les garçons redeviennent d'une violence extrême parce que l'environnement est délabré pour des raisons culturelles, sociales ou politiques. L'environnement de nos enfants aujourd'hui est délabré et on se retrouve dans une situation comparable à la guerre de 40, où ces enfants sans foyer ne peuvent que devenir violents ou mourir.

  • Speaker #0

    Vous avez évoqué tout à l'heure les niches écologiques. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept ?

  • Speaker #1

    Alors, le premier à proposer ça, c'est un psychologue allemand, Brofen Brenner, mais on l'a repris dans tous mes groupes de recherche. Je propose de dire que tout mammifère, mais même les oiseaux qui ne sont pas des mammifères, ils ont des œufs, comme les mammifères. Il y a trois niches écologiques. Pour un mammifère humain, la première niche écologique, c'est le ventre des femmes. On est tous nés d'une femme. La deuxième niche écologique, c'est, après la naissance, le corps des femmes, les seins, l'odeur, la parole, la brillance des yeux, entourés. Il faut qu'une femme, une mère, ne soit pas seule. Si elle est entourée par celui que de mon temps on appelait un mari, je ne sais plus comment il faut dire aujourd'hui. il faut qu'il y ait une structure autour de la mer. Si la jeune mer est sécurisée, par une structure affective, un mari, une grand-mère, des copains, des copines, une structure affective autour d'elle, si elle est sécurisée, elle devient sécurisante pour le bébé qu'elle vient de mettre au monde. C'est préverbal. Ça c'est la deuxième niche écologique. Et la troisième niche écologique, c'est celle qui caractérise... Le monde humain, c'est le monde de l'artifice, l'outil et l'artifice du verbe qui commence dans l'utérus. C'est-à-dire que maintenant, les neurosciences, la neuro-imagerie, montrent que quand la mère parle, les hautes fréquences de sa voix sont filtrées par son corps et surtout par le liquide amniotique, alors qu'à l'inverse, les basses fréquences de sa voix sont très bien transmises par son corps. et surtout par le liquide amniotique. Et on a rendu observable à Toulon que lorsqu'elle parle, les basses fréquences de la voix viennent vibrer contre le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte. C'est-à-dire que lorsque la femme enceinte parle, c'est comme si elle caressait le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte, ce qui explique pourquoi, dans l'heure qui suit sa naissance, le bébé s'orientent vers la brillance des yeux de la mère, vers le mamelon et vers la voix maternelle qu'ils différencient de toute autre voix. Donc déjà, ils tissent avec sa mère. Alors, ce n'est pas encore sa mère, vous ne vexez pas à ce stade du développement, ce n'est pas encore une maman, c'est un objet sensoriel. Et ils tissent avec sa mère un objet de familiarité qui est le tranquillisant naturel. Si la mère est déprime, si elle est morte, si elle est maltraitée, si elle a la guerre, si son mari est violent, si elle a la violence, elle n'est pas bien. Or, quand on associe les recherches aujourd'hui, on se rend compte que les jeunes mères mettent au monde leur premier enfant, elles ont presque 32 ans. Le maximum de fécondabilité, c'est 25 ans. Un utérus de 32 ans, ce n'est pas la même cavité qu'un utérus de 25 ans. Ça marche bien, ça marche très souvent bien, mais ça doit déjà être un peu médicalisé, même si la plupart du temps, ça marche bien, mais il faut surveiller le diabète, l'hypertension, c'est un petit peu médicalisé. Donc la relation... est déjà changé. Ce n'est plus le mari, ce n'est plus la grand-mère, ce n'est plus la voisine, c'est le médecin. C'est la technique qui remplace la relation familiale affective. Et la troisième niche sensorielle, celle de la parole, le bébé reconnaît la voix et non pas encore la parole, mais plus tard il va parler entre le 20e et le 30e mois, et les mots. désormais vont désigner des objets proches, dans le contexte. Et ce n'est que vers la cinquième, sixième année que le développement du cerveau de l'enfant lui permet d'accéder au récit, c'est-à-dire quelles sont mes origines, quelle est ma religion, pourquoi est-ce que je suis né dans cette famille qui est chrétienne, qui est musulmane, qui est faite de paysans, qui est faite de marins, etc. Et là, on accède au récit. Donc on quitte la biologie pour entrer dans les déterminismes sociaux, culturels. Voilà les trois niches.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui est dysfonctionnel dans notre société aujourd'hui vis-à-vis de ces niches et des enfants ?

  • Speaker #1

    Ce qui est dysfonctionnel s'appelle dans les trois niches. Première niche, une femme enceinte stressée, sécrète, les substances du stress, qu'aujourd'hui on sait doser, qu'on savait doser après-guerre aussi, schématiquement c'est le cortisol. et l'adrénaline, les catécholamines. Si c'est un stress aigu, comme on le voit à l'échographie légale, si c'est un stress aigu, le bébé sursaute, et si c'est un stress aigu... Tout se remet en place dès que la mère est sécurisée. Donc même si le bébé a sursauté, c'est pas grave, il reprend son développement. Mais si c'est un stress chronique, le cortisol, les catécholamines, finissent par franchir la barrière du placenta. Et quand le bébé est éveillé, c'est-à-dire à peu près 4 heures par jour, chaque fois qu'il est stimulé, il déglutit du liquide amniotique bourré de cortisol et de substances du stress. toxiques pour son système nerveux, pour certaines zones de son système nerveux. Et avec Shaul Arel, à Tel Aviv, il a été le premier à montrer, pour une population de femmes palestiniennes et israéliennes qui consultaient dans les hôpitaux israéliens pour syndrome psychotraumatique, il a fait une population de 170 femmes stressées, pour ce qui consultait pour syndrome psychotraumatique. qui sont des souffrances continues, les gens qui souffrent de ça ne peuvent plus travailler, ils ne peuvent plus, ils ne pensent qu'à ça. Ils sont prisonniers du trauma et ces femmes-là ont mis au monde 170 bébés. Il a fait des neuro-imageries qui ont montré que ces 170 bébés avaient une atrophie des deux lobes préfrontaux, une atrophie des deux systèmes limbiques et une hypertrophie d'un noyau amygdalien. qui est le socle neurologique des émotions intenses, insupportables, de haine, de colère, de rage, de désespoir. C'est-à-dire que ça c'est un raisonnement écosystémique. Une altération du milieu, j'allais dire, quand j'ai écrit dans mon livre La guerre chronique de ces milieux aujourd'hui ce n'est plus une guerre chronique, c'est une guerre sur aiguë. La guerre, mais... Il y a bientôt la moitié de la population du monde aujourd'hui est en guerre. Alors nous, en France, on ne parle que des deux guerres qui nous préoccupent, l'Ukraine et le Proche-Orient. Mais il y a 183 guerres actuellement. C'est pareil pour tous les bébés et pour toutes les femmes enceintes du monde. Mais on ne parle que des deux guerres qui nous touchent, on ignore les autres. C'est-à-dire que ces femmes-là sont insécurisées. La résilience des neurones, dans les petites années, est très facile à déclencher. Dès qu'on sécurise la mère, les substances du stress ne sont plus sécrétées. En une nuit ou deux, le bébé recommence sa reconstruction neurologique. Donc la résilience neuronale, c'est contre-intuitif, c'est la plus facile à déclencher, il suffit de s'occuper de la mère. Qui va s'occuper de la mère ? Son mari, son père, son compagnon, sa grand-mère, ses copains, un système social bien organisé. Elle pourra consulter pour l'hypertension, pour le diabète, des copains, la socialisation, c'est très important. Dès qu'elle est sécurisée, le bébé se débrouille. Mais si on insécurise la mère, ce qui était une dysfonction cérébrale... va devenir une structure cérébrale. Et là, la résilience sera difficile à déclencher parce que le cerveau est sculpté, non pas par la mère, mais le cerveau est sculpté par le malheur de la mère, son mari, la guerre, la précarité sociale, un accident de la vie, etc.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que deviennent ces enfants une fois qu'ils ont vécu cette modification, cette modification de la structure cérébrale ? Qu'est-ce qu'on peut faire pour ces enfants ?

  • Speaker #1

    Il faut s'occuper de la mère. D'abord, les enfants se débrouilleront. Dès que la mère sera bien, les enfants vont se débrouiller. Plus on intervient tôt, plus la résilience est facile à déclencher. Donc, plus on intervient tard, plus la résilience sera difficile à déclencher. Alors ça, c'est des évaluations neurologiques qui ont été faites en Roumanie. où le dictateur Cheochescun avait isolé 170 000 enfants en isolement sensoriel total, comme Arlo Spitz l'avait fait pour des petits singes macaques dans les années 30. Ces singes étaient très altérés, on ne savait pas pourquoi. Et ils avaient les mêmes altérations que les petits roumains que j'ai vus, privés d'affection. Ils n'avaient que... Ils ne parlaient pas, personne ne leur parlait. Il puait, personne ne l'avait. Il ne souriait pas, personne ne souriait. Il n'avait que des activités auto-centrées. Mais quand les Romains se sont occupés d'eux, ils en ont récupéré 100 000. qui n'avaient pas été isolés intensément. Ils n'ont pas récupéré 70 000 enfants, ceux qui ont été isolés précocement, intensément, durablement. Donc on sait ce qu'il faut faire pour s'occuper des enfants dans les trois niches écologiques que je vous ai résumées.

  • Speaker #0

    Vous parlez dans votre dernier livre aussi de carence affective. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept et le lien que vous pouvez faire avec tout ce qu'on a dit avant ?

  • Speaker #1

    L'affect, c'est ce qui stimule le cerveau. Je suis content, certaines zones cérébrales, les zones de la récompense, passent au rouge, c'est-à-dire que les zones de la récompense, c'est schématiquement de l'hypothalamus à la face inférieure du lobe préfrontal. Ça veut dire que je me sens bien. C'est des neurones qui sécrètent beaucoup de sérotonine. ou de dopamine, qui sont les deux neuromédiateurs du bien-être, le plaisir d'agir et le plaisir d'entrer en relation. Si je suis seul, cette zone cérébrale n'est pas stimulée. Les enfants sont hébétés. Hébétés, ils n'apprennent rien. Et ils sont hébétés. Et si on les laisse seuls longtemps, la résilience sera de mauvaise qualité. Alors, les Roumains ont récupéré 100 000 enfants sur 170 000. parce qu'ils se sont, dès qu'ils ont pu s'occuper de ces enfants, ils ont fait des prouesses affectives. Ça consiste en quoi ? Ce que font toutes les mères quand elles sont bien. Parler, toucher, gronder, toileter, rigoler, s'amuser. C'est le plaisir de la mère, à condition qu'elle soit bien, qui fait que l'enfant est entouré par une niche sensorielle stimulante, il va bien se développer. Si la mère est morte, et si l'enfant est laissé seul, si la mère est maltraitée, si la mère est malade, si elle a guerre, la précarité sociale, la mère ne peut pas, n'a pas la force. Soit parce qu'elle est malade, soit parce qu'elle déprime, soit parce qu'elle est maltraitée, soit parce que le frigidaire est vide, soit parce que le compagnon est à la guerre et elle ne sait pas s'il va rentrer le soir même. Ce qu'on entend tous les jours aujourd'hui, c'est une phrase... que j'ai entendu quand j'étais gamin, que j'ai entendu quand j'ai travaillé au Liban pendant les 16 ans de guerre civile déclenchée par les Palestiniens et sauvée par Hafez el-Assad, qui les a chassés du sud du Liban, ce que tout le monde a oublié. Et dès que ces enfants-là, on réentend aujourd'hui les mêmes phrases. Quand papa... Quand mon mari, mon compagnon, part le matin, je suis dans l'angoisse jusqu'au soir parce que je ne sais pas s'il va revenir. Les substances du stress sont tout le temps sécrétées et le bébé se développe mal. Et la guerre est une fabrique de psychopathes. Pendant plusieurs générations, les garçons, plus que les filles, parce que les garçons réagissent par la violence alors que les filles réagissent par le câlin et la parole. Il y a plusieurs hypothèses. Quand elles sont malheureuses, elles se calinent, elles se font caliner ou elles parlent. Quand un garçon est malheureux, il se replie sur lui ou il explose. Et toutes les cultures, toutes les cultures ont utilisé cette différence de réaction entre les genres, comme on dit aujourd'hui, pour utiliser les garçons et les préparer à la guerre. à la violence, au travail, torture, 15 heures par jour, au fond des mines, ce que je n'ai pas connu, mais j'ai connu quand j'étais médecin au chantier naval de la Seine, 10 heures par jour des hommes qui ne voyaient la lumière du jour que deux mois par an, et qui ne parlaient jamais. Donc le fait qu'il y ait un déterminisme biologique n'exclut pas le déterminisme culturel. Les femmes aujourd'hui, les jeunes mères, mettent au monde leur premier bébé, elles ont presque 32 ans. Elles se sont développées comme jamais dans la culture occidentale. C'est la première fois depuis que votre grand-père et votre grand-mère, qui sont les mêmes que moi, monsieur et madame Sapiens, il y a 300 000 ans, on avait les mêmes grands-parents. C'est la première fois depuis 300 000 ans que les femmes ont la possibilité... de se développer comme des personnes, et non pas simplement comme des annexes de mari ou des porteuses d'enfants. Depuis deux, trois générations seulement, elles deviennent des personnes, parce que la culture a changé, parce que l'école est devenue un lieu de formation importante où les filles se débrouillent très bien, et malgré ça, il n'y a jamais eu autant de dépression périnatale. Comment vous expliquez ça ? La solitude, ces jeunes femmes actives qui font des études, qui bougent, qui se débrouillent, qui s'épanouissent, tout d'un coup elles se retrouvent seules avec un tyran domestique adoré qu'elles appellent le bébé. Et elles sont prisonnières du bébé. Le fait de mettre au monde un bébé, aujourd'hui, a incroyablement changé de signification. Jusqu'à la découverte de Simmelweis, Prophylaxie d'accouchement, 1861, les femmes avaient une espérance de vie de 36 ans. Elles avaient 13 grossesses par vie de femme pour donner 4 adultes, parce que la mortalité enfantine était énorme et les femmes suivaient. Les hommes vivaient plus longtemps, mais ils mouraient entre 45 et 60 ans. Les plus vieux mouraient à 60 ans. Mais quand un homme mourra à 60 ans, il pouvait faire deux ou trois mariages sans divorcer, tellement les femmes mourraient jeunes. Donc les conditions d'existence étaient très dures, et aujourd'hui notre culture qui permet le développement des femmes et des hommes a pour effet secondaire la solitude, et les femmes dépriment de plus en plus. Donc c'est des questions éducatives, culturelles, l'entourage. Il faut qu'il y ait une famille, un foyer, un village autour des jeunes mères pour qu'elles ne soient pas seules. Et à ce moment-là, depuis que, après notre rapport, depuis que le congé paternité a été un petit peu augmenté mais pas assez, comparé au Danemark, à l'Espagne ou à d'autres pays où le congé paternité est... et le congé parental est très augmenté, la dépression périnatale n'existe pratiquement plus. Elle a disparu en un an. Elle a pratiquement disparu en un an. Donc on sait ce qu'il faut faire. Il faut entourer la niche sensorielle, la niche écologique d'une mère pour qu'elle soit sécurisée et le bébé se débrouillera.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai qu'en France, on a l'impression que les bébés font face à plusieurs crises. Il y a, comme vous le disiez, des pressions qui touchent beaucoup de mères. Alors maintenant, on parle aussi de la crise du système de garde. Qu'est-ce que vous pensez de cette situation ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est un problème actuel. C'est qu'avant, il n'y a pas longtemps, il y a trois générations, il y a même en Italie, le divorce était interdit. Il y avait des couples très douloureux qui ne pouvaient pas. se séparer. Donc quand le divorce a été légal, ça a soulagé quelques familles, parce que quand les enfants se développent dans un conflit parental sur aiguille, ils ne se développent pas bien. Et quand, donc ça a été un progrès, et maintenant on est passé dans l'excès contraire, on prévoit que les jeunes couples aujourd'hui feront, dans leur aventure humaine, 4 ou 5 couples, 5 à 10 métiers différents. C'est-à-dire que c'est une instabilité affective très importante. Un cerveau ne peut être sculpté que s'il y a des moments de stabilité affective. Donc le divorce, la violence conjugale avant la parole, la séparation parentale avant la parole, schématiquement vingtième, on va dire troisième année, est une grave agression pour l'enfant. La séparation. parental parfois nécessaire. J'ai connu l'époque où, quand un homme était violent, et quand j'ai accompagné des femmes qui étaient obligées de s'enfuir avec leurs deux enfants parce que l'homme devenait pathologiquement violent, elles étaient condamnées pour abandon de domicile familial. La loi a changé, mais il n'y a pas longtemps que la loi a changé. Maintenant, c'est l'homme qui doit partir et qui doit, si possible, se faire soigner. Parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. La loi a changé, mais c'est récent ça. Donc ça veut dire que des lois, les structures familiales, qui étaient trop rigides il n'y a pas longtemps, deviennent trop labiles, trop instables maintenant. Il faudrait que les jeunes comprennent qu'il y a des périodes sensibles du développement des enfants où il faut, si on peut, faire l'effort de ne pas se séparer à la moindre occasion. Je le redis volontairement. parfois c'est nécessaire. J'ai eu des patients, des hommes paranoïaques, et là il fallait protéger la femme et les enfants. Ce que ne faisait pas notre ancien système légal. C'est les femmes qui étaient condamnées. Mais les femmes, ce n'est pas la première fois qu'elles sont victimes d'absurdités légales. C'est déjà arrivé. C'est en train de changer, mais le point faible de la culture de ceux qui ont 25 ans aujourd'hui, c'est on. peu peur.

  • Speaker #0

    Se stabiliser et stabiliser le développement d'un enfant, c'est-à-dire tisser le lien d'attachement si on se sépare tous les deux ans. Pour tisser le lien d'attachement sécurisant, il faut qu'il y ait au moins une stabilité affective pour qu'on puisse tisser le lien d'attachement. Et actuellement, on voit que les jeunes vivent dans des ruptures incessantes dont ils souffrent. et donc s'ouvrent les enfants.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que vous pensez en termes de sécurité affective pour les enfants, des modes de garde type les crèches ? Est-ce qu'elles permettent aujourd'hui de répondre aux sécurités affectives qui sont si nécessaires pour les bébés et qui sont souvent mis très jeunes dans ces structures ?

  • Speaker #0

    Alors si, sur le papier on sait ce qu'il faut faire, il faudrait augmenter tous les métiers de la petite enfance, assistantes maternelles, crèches, ce qu'ont fait les allemands qui culpabilisaient les mères il n'y a pas longtemps encore en disant si votre enfant se développe mal c'est parce que vous travaillez, vous n'êtes pas consacré à votre enfant donc les mères étaient culpabilisées, beaucoup y croyaient et ils ont renversé la politique éducative et maintenant ils ont développé des crèches comme savent le faire les allemands c'est à dire c'est impeccablement organisé c'est très rapide Et ils ont amélioré la formation des métiers de la petite enfance. Et les enfants, les bébés préverbaux, ont besoin d'un système familial à multiples attachements. Il faut qu'il y ait la mère, inévitablement, puisque c'est elle qui porte les enfants, et c'est elle qui marque les premières empreintes dans le cerveau et dans le psychisme du bébé en développement. Donc la mère, c'est la figure d'attachement primordiale. ça veut pas dire unique ça veut dire qu'il faut qu'ils aient une autre figure d'attachement de mon temps on dit que c'était le père maintenant ça peut être un autre homme ça peut être une grand mère qui joue le rôle du père ça peut être une autre femme qui joue le rôle du pain du père une femme qui joue le rôle du père vous avez bien entendu et les femmes homosexuelles se débrouillent très bien les enfants se débrouillent très bien peut-être Peut-être même mieux que les hétérosexuels. Mais actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de moins en moins de jeunes qui s'orientent vers les métiers de la petite enfance, qui sont fatigants et pas très bien payés. Ils n'ont pas la formation. qui pourrait les rendre intéressés par les métiers de la petite enfance. Je donne des formations, des instituts de petite enfance, on voit des dames qui adorent, qui adoraient ce métier, on voit des dames... qui sont à la retraite depuis très longtemps, qui viennent assister aux cours pour qu'on parle encore des bébés. Ça a enchanté leur vie. Et ça existe de moins en moins. Donc on voit qu'il y a de moins en moins de métiers de la petite âme. de moins en moins formés et aux états unis où n'importe qui garde n'importe quel enfant avec des enfants surnombre dans des espaces trop petit avec des gardiens sans formation les bébés deviennent inconsolables et violents des garçons plus que les filles il y avait les bébés garçons ne réagissent pas la frustration de la même manière que les bébés filles et comme je le disais tout à l'heure cette violence La violence des réactions des garçons est utilisée par toutes les cultures pour en faire des soldats, des guerriers, pour faire la guerre qu'on voit se développer. Et c'est ce qui explique que les bébés américains sursautent, ne sont pas consolables, pour un rien, ils ne contrôlent pas leurs émotions. Les filles contrôlent mieux leurs émotions. Elles ont plus d'émotions que les garçons, mais elles les contrôlent mieux que les garçons parce qu'elles chargent des câlins plus que les garçons. Et elles parlent plutôt. et mieux que les garçons. Donc elles ont des modes de régulation émotionnelle plus efficaces que les garçons. Et puis quand elles sont vieilles, quand elles sont grandes, quand un garçon leur casse les pieds, au lieu de réagir par la violence, elles téléphonent à la meilleure amie et elles descendent avec des mots le garçon qu'elles ne peuvent pas descendre avec leurs petits poings. Donc ça veut dire que les modes de défense ne sont pas les mêmes chez les garçons et chez les filles. Et ça pose le problème qu'on voit, C'est un garçon violent. font le vide autour d'eux à la crèche, personne ne les sécurise parce que c'est des gardiens d'enfants, ce ne sont pas des accueils éducatifs, ce sont des gardiennes d'enfants. Parfois, elles les mettent devant le mur pour qu'ils s'endorment. Elles mettent la chaise du bébé, elles leur donnent un biberon, et le bébé, il n'y a pas de stimulation, il s'endort. Ce n'est pas un accueil éducatif. Et on voit ces garçons-là à la crèche, ils battent. Ils tapent, ils mordent, ils s'isolent, les autres enfants les évitent. À l'école, ils n'ont pas de copains, ils ne parlent pas, ils s'isolent encore plus. Et quand arrivent les émotions intenses de l'adolescence, c'est un pays où tout le monde est armé, vous connaissez la suite. Ils rentrent dans le lycée, dans l'école, dans le lieu de leur humiliation, et ils tuent. On sait ce qu'il faut faire. Les américains ne le font pas, les danois le font bien, les espagnols le font de mieux en mieux, les québécois le font de mieux en mieux, et la violence des garçons diminue beaucoup. Parce que l'affectivité, la familiarité, c'est notre tranquillisant naturel. Quand on est en sécurité affective avec un copain, avec sa femme, avec son homme... on n'a pas besoin de tranquillisant. Notre culture détruit ces tranquillisants naturels à cause de l'instabilité affective des parents, à cause de l'instabilité sociale des jeunes qui ne font plus de métier. Le développement personnel est devenu une telle valeur qu'ils refusent de faire des métiers de sacrifice. Les femmes refusent de se laisser sacrifier. Ça fait partie de leur développement personnel. les hommes se laissent de moins en moins héroïsés, ce qui était une manière aussi de les mener au sacrifice, comme on le voit aujourd'hui dans les pays avec ce tragique retour de la guerre, où on recommence à sacrifier les hommes, mais on voit que de plus en plus de jeunes hommes ne se laissent plus héroïsés, et on voit que la désertion qui était la honte de la guerre de 40, un homme qui désertait perdait. l'estime de sa fiancée ou de sa mère c'est la honte de la famille aujourd'hui quand en ukraine ou en russie un homme déserte toute sa famille l'aide la culture a complètement changé et

  • Speaker #1

    ça me fait penser à une phrase que j'ai souillé dans votre livre vous dites pendant des millénaires les méthodes éducatives ont été d'une incroyable brutalité Mais comme vous le dites, cette violence n'a toujours malheureusement pas disparu. On le voit à travers certaines méthodes éducatives ou même, comme vous le disiez, avec le développement des guerres. Pourquoi est-ce que l'être humain, malgré toutes ses connaissances, reste autant dans la violence ?

  • Speaker #0

    Parce que l'être humain... a failli disparaître plusieurs fois. Quand il y avait des changements climatiques, des glaciations, les feuilles, les fruits disparaissaient, l'herbe, le petit gibier disparaissait. Et il y a au moins deux périodes où il y avait presque plus de squelettes humains sur la planète. L'espèce humaine n'était pas en voie de disparition, elle était pratiquement disparue. Et qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas disparu ? L'invention des armes, des outils et la parole. L'invention des armes, le silex taillé, collé sur un pieu, emmanché sur un pieu, et des hommes beaucoup moins forts que des chevaux, beaucoup moins forts que des mammouths, beaucoup moins forts que la plupart des animaux, ont tué des animaux grâce à la caractéristique de la condition humaine, l'artifice de l'outil, l'artifice du verbe. On a plus. fabriqué du social, on a pu avec des mots, la violence des hommes a été encouragée pour tuer des animaux bien plus fort qu'eux. On a retrouvé un silex avec un pieu enfoncé dans le coeur d'un mammouth. C'est à dire qu'un petit homme, je ne sais pas combien de fois inférieur au mammouth, s'est glissé entre ses pattes. Et je pense que toute la famille, le clan, il n'y avait pas de famille mais il y avait des clans de 150 à 150 personnes, ils ont dû manger pendant plusieurs semaines. mettre la viande au froid et puis ils ont survécu grâce à la violence des hommes la violence a été une valeur adaptative la plupart des frontières sont le résultat de guerre les aristocrates se sont emparés grâce à la violence et ils ont fait des pays des nations S'il y a des cartographies de religion, il y a des zones musulmanes, des zones chrétiennes, c'est parce qu'il y a eu des guerres de religion. Si on parle français en France, c'est parce que la République française a interdit le patois, le breton, le basque et toutes les langues, et qui étaient gravement punis. Les enfants qui parlaient le basque ou le breton à l'école étaient humiliés et punis violemment. C'est la violence qui a fabriqué du social, notamment la violence des hommes, la violence physique des hommes. Et la violence des hommes et l'entrave des femmes. Les femmes, ce qu'on voit réapparaître dans les guerres aujourd'hui, ou la charte du Hamas, une femme participe à la guerre quand elle met au monde des fils. Quand elles leur apprennent la foi, et quand elles leur apprennent, de façon à ce qu'ils apprennent le métier des armes, pour tuer les juifs. C'est publié partout. Ça ne provoque pas d'indignation. La violence que je croyais combattue, qu'on a combattue. Pendant deux, trois générations, j'ai vraiment cru que ça ne reviendrait jamais. Et ce que je viens de dire, on prouve que ça revient. tout le pays.

  • Speaker #1

    Dans votre livre, vous invitez à proposer plusieurs récits aux enfants. Lesquels seraient-ils par exemple ?

  • Speaker #0

    Plusieurs récits ? Quand un enfant arrive à l'âge des récits, il a 5, 6, 7 ans, selon le développement de son système nerveux et selon les structures familiales. Il y a des familles où on parle beaucoup et on raconte. On est provençaux depuis le XVIIe siècle. Les enfants adorent ça. On est marins. depuis je ne sais pas combien de temps, on est musulman, on est chrétien, ça intéresse beaucoup les enfants. Mais si on présente un seul récit, il n'y a qu'un seul Dieu, c'est un langage totalitaire. C'est-à-dire que ça arrête l'empathie, il n'y a qu'un seul Dieu, le mien, les autres sont des mécréants, comme le disait les catholiques, qui méritent la mort. Les chrétiens qui ont été pas mal persécutés à cause du langage totalitaire sont devenus totalitaires aussi, l'inquisition, le colonialisme, et actuellement on voit que beaucoup de récits sont totalitaires, totalitaires religieux, totalitaires idéologiques, le communisme, le nazisme, totalitaires économiques. Il n'y a qu'une seule bonne économie, c'est celle de mon chef. Et quand il n'y a qu'un seul récit, on se retrouve prisonnier d'un langage totalitaire, totalement explicatif. Tous ceux qui ne croient pas comme moi, tous ceux qui ne croient pas comme moi, et qui ne pensent pas comme moi, méritent la mort. Ce qu'on voit réapparaître dans toutes les guerres qu'on nous raconte, ou auxquelles j'ai assisté, je suis stupéfait de voir à quel point on forme les enfants dans l'île de la mort. ignorance totale d'une autre religion, d'une autre culture, alors que le théâtre grec avait pour fonction justement de présenter les problèmes de la cité. Les comédiens devaient mettre en scène, jouer sur la scène, les problèmes de la cité et les citoyens devaient en débattre et ensuite y voter. C'était le point de départ, le théâtre a été le point de départ de la démocratie.... Les Espagnols avaient inventé les Disputaciones, c'est-à-dire la plus célèbre, c'est la Disputation de Valadolid, où avant la Disputation de Valadolid, on pensait que les Indiens n'étaient pas des êtres humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas la même couleur de peau que nous, c'est bien la preuve qu'ils ne sont pas humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas les mêmes dieux que nous, ils adorent des sculptures en bois hideuses. C'est bien la preuve que ce n'est pas des êtres humains, disait-on. Il y a donc eu une disputation, et quand on pensait que ce n'était pas des êtres humains, on pouvait les tuer, ce n'était pas des êtres humains. Pas de culpabilité, on pouvait les atteler pour les faire travailler, on pouvait les dépecer quand ils étaient tués. Ce n'était pas des êtres humains, ce n'était pas un crime. Dès l'instant où la disputation de Valadolid leur a accordé une âme, Parce qu'ils ont éclaté de rire, parce que les prêtres se sont bagarrés entre eux, ils ont roulé par terre et tout le monde a éclaté de rire. Les indiens ont éclaté de rire. On avait la preuve que c'était les êtres humains, parce que le propre de l'homme, c'est le rire. Donc ils ont eu une âme de justesse. On ne pouvait plus les atteler, on ne pouvait plus les dépecer, si on les tuait, ça devenait un crime, puisqu'ils avaient une âme, il fallait les baptiser. Changement culturel à cause, grâce à une disparition de la culture. réputation démocratique. Actuellement, on voit que dans des écoles religieuses, religieuses sacrées ou religieuses profanes, ou religieuses économiques, je crois que le néolibéralisme Capitalisme, la loi du marché, c'est la seule loi valable. Il y a des gens qui soutiennent ça. C'est un langage totalitaire. On ne présente pas le monde de l'autre. Donc si les autres meurent, si les autres sont dans des carences humanitaires terrifiantes comme au Yémen actuellement, je n'en ai rien à faire. Je m'en fous éperdument. Je ne sais même pas qu'ils meurent. Je ne sais même pas qu'ils souffrent. C'est un arrêt total. de l'empathie à cause de la construction de récits totalitaires l'arrêt total de l'empathie c'est ce qui caractérise la perversion seul mon désir compte oui mais elle maintenant elle est malheureuse oui mais moi j'ai passé un bon quart d'heure oui mais elle regarde dans quel état elle est ah oui mais moi qu'est ce que je me suis marré Voilà des raisonnements pervers, sexuels, c'est des raisonnements de pervers sociaux, culturels, qu'on entend actuellement dans tous les conflits au Proche-Orient ou en Europe. Je suis frappé de voir à quel point les belligérants ignorent-on des malheurs de l'autre. Ils s'en foutent éperdument, ça ne les concerne pas. Ce sont des cultures qui sont devenues perverses à cause d'un langage totalitaire.

  • Speaker #1

    C'est tout de même assez anxiogène je trouve aujourd'hui de devenir parent dans notre société. Qu'est-ce que vous auriez à dire à tous les parents qui nous écoutent et qui souhaitent offrir à tous les bébés un bon départ dans l'existence ?

  • Speaker #0

    Ma réponse est claire. Faites un village. Dans un village, il y a la mère, puisque c'est elle qui porte les enfants, il y a son compagnon, sa compagne, il y a des copains, on peut confier le bébé à un accueil éducatif, à une école. Faites un village avec l'école du village. Si vous êtes croyante avec l'église, la mosquée, ça fait partie de la structuration, ça fait partie de la culture, la spiritualité fait partie de la condition humaine et la religion fait partie de la religion. provoque des dilutions familiales qui aggravent les 4 ou 5 couples des parents. Alors on se voit par Zoom pour l'anniversaire, pour Noël si on est chrétien, c'est pas une relation, c'est une communication, c'est pas une relation. Faites un village, si vous êtes malade, il y aura une autre femme, le jeune père avancé, actuellement découvrent la fatigue et le bonheur de s'occuper d'un bébé, c'est la première fois dans l'histoire des hommes que les hommes peuvent s'attacher à un bébé. Avant, ils étaient chefs de famille, mais ils n'étaient jamais dans leur famille. C'était les femmes. qui n'était pas chef de famille, qui faisait tout dans la famille. C'était encore une absurdité légale qui a duré depuis tout le temps, et qui a été votée en 1804. Le père était le représentant de Napoléon dans la famille. Mais il n'était jamais là. C'était une absurdité légale qui a organisé notre culture pendant deux siècles. Si vous voulez moins souffrir, si vous voulez éviter le burn-out des femmes, actuellement, elles veulent travailler, elles veulent mettre au monde 1,67 enfants, je ne sais pas comment elles font, elles veulent s'en occuper le mieux qu'elles peuvent, c'est pas possible. Il y a bien des moments où il faut qu'elles soufflent un peu. Si elles veulent tout faire tout le temps, elles courent au burn-out. Si on organise un village autour de la jeune mère, elle pourra partir un jour ou deux, elle pourra partir travailler, elle pourra partir en vacances. Il y aura toujours une structure autour du bébé et le bébé au contraire va en bénéficier. Parce qu'il apprendra un style affectif avec sa figure d'attachement primordiale, mais il apprendra qu'il y a une autre manière d'aimer avec une autre figure d'attachement, une autre manière d'aimer avec le métier de la petite. enfance avec le moniteur de sport avec le prêtre avec il y aura plein de manières d'aimer ça va ouvrir son esprit ça va ouvrir son empathie il ne sera pas il ne deviendra pas totalitaire j'ai une dernière question c'est la question rituelle du podcast comme

  • Speaker #1

    vous le savez il s'appelle les adultes de demain qu'est ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui les futurs adultes de demain alors je leur dirais fabriquer inventer

  • Speaker #0

    un village, on ne peut pas vivre seul. Quand on vit seul, vivre seul, c'est la mort psychique. Donc on est contraint à vivre avec les autres. Mais vivre avec les autres, c'est parfois l'enfer. Donc vous avez le choix entre la mort et l'enfer. Sauf si vous faites un village avec des copains, des professionnels, des prêtres, des musiciens, des sportifs. Et à ce moment-là, vous limiterez beaucoup la casse. Et d'ailleurs, tous les rapports que je suis en train de lire actuellement sur la psychiatrie de demain soulignent... l'importance de la psychoéducation. La mère n'est pas seule, la mère doit être entourée avec une stabilité suffisante quand c'est possible et à ce moment là elle sera heureuse et les enfants qu'elles mettront au monde seront heureux eux aussi. Voilà c'est facile.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Boris, à très bientôt. Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast. Ils laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général. Ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt. pour un nouvel épisode.

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✍️NOUVEAU : je lance un sondage pour mieux vous connaitre, aidez-moi à collecter le plus grand nombre de réponses : https://pnhxjl7nzh2.typeform.com/to/maw8xoC8


Ce moment-là, je l’attendais depuis longtemps : rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m’a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l’interroger sur ses réflexions autour de l’éducation et de la petite enfance.


Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons : neuropsychiatre, rescapé et orphelin de la Seconde Guerre Mondiale, pionnier de la résilience, auteur prolifique, acteur engagé pour la petite enfance, etc.

Cet échange m’a profondément marqué, on a parlé des guerres, de la violence même en éducation, de carence affective, et beaucoup d' enfants et des mamans. Boris est d’une incroyable générosité, bienveillance et humilité, et ça fait du bien.


Ressources :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition. Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ?

  • Speaker #0

    Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ce moment-là, je l'attendais depuis bien longtemps, rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m'a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l'interroger sur ses réflexions autour de l'éducation et de la petite enfance. Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons. neuropsychiatres, rescapés et orphelins de la seconde guerre mondiale, pionniers de la résilience, auteurs prolifiques acteurs engagés pour la petite enfance etc etc cet échange m'a profondément marqué, on a parlé de guerre, de violence mais aussi d'éducation, de carence affective et beaucoup des enfants et de leurs mamans Boris est d'une incroyable générosité bienveillance et humilité et ça fait tellement du bien je suis certaine que cet épisode va beaucoup vous plaire et je vous souhaite donc une très bonne écoute Bonjour Boris. Difficile de vous présenter en quelques mots, vous avez marqué notre siècle à travers votre travail et vos écrits, et notamment le dernier que j'ai dévoré, 40 voleurs en carence affective, bagarres animales et guerres humaines, aux éditions Odile Jacob. Vous avez aussi grandement contribué aux questions liées à l'enfance, et c'est ce qui m'amène à être avec vous aujourd'hui, dans le Sud, face à la mer. J'aimerais qu'on démarre tout de même avec un petit bout de votre histoire. Vous avez vécu, on le sait tous, une enfance marquée par l'épreuve et par la Seconde Guerre mondiale. En quoi cette expérience vous a donné envie de devenir psychiatre, mais aussi de vous intéresser aux enfants ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai démarré ma vie en perdant ma famille, en étant emprisonné à 6 ans, et en ayant compris qu'on voulait me tuer. Donc ce n'est pas un démarrage facile dans la vie, d'autant qu'ensuite, comme je n'avais plus de famille, je ne touchais pas de bourse. C'est un miracle, c'est invraisemblable que j'ai réussi à faire des études, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Mais c'est vrai que démarrer la vie en perdant sa famille pendant la guerre, alors que tout le monde s'entre-tuait, Ça m'a donné la rage de comprendre. Ou bien je ne m'en sortais pas, ce qui aurait été logique, ou bien si je voulais m'en sortir, il fallait absolument comprendre. C'était ma liberté, comprendre. Et ça m'a rendu complètement psychiatre, psychologue, en fait. C'est-à-dire que, et je me rends compte maintenant que j'arrive au dernier chapitre de ma vie, que je vois les mêmes phénomènes réapparaître, les mêmes mots, les mêmes... récits criminels, stupides, qui provoquent des engagements sur la planète entière, ça vraiment, je ne m'y attendais pas.

  • Speaker #0

    Vous parlez notamment dans votre livre de déserts affectifs durant votre enfance, que vous avez tenté d'atténuer grâce à la rencontre avec un chien. Et je sais que le monde animal s'est depuis intégré à votre manière de penser, à vos réflexions, de manière assez importante. Comment est-ce que le monde animal vous a permis ? de mieux comprendre l'espace humain ?

  • Speaker #1

    Dans les institutions d'après-guerre, où j'étais avant de retrouver la sœur de ma mère, dans ces institutions, le métier d'éducateur n'existait pas et les moniteurs avaient pour consigne de ne pas parler aux enfants, surtout aux garçons. Il fallait dresser les garçons, sinon ça allait devenir des bêtes sauvages. Donc les relations avec les adultes, c'était des relations... de mépris, de coups, de silence, et les seules relations humaines, je les avais avec des animaux, qui étaient une poésie extraordinaire. Il y avait des vols de fourmis, il y avait les oiseaux, et puis il y avait des chiens avec qui j'allais parler régulièrement, qui me faisaient la fête quand j'arrivais, et qui ne répétaient pas un mot de ce que je leur racontais.

  • Speaker #0

    Ça c'était important. Et en quoi justement le monde animal est venu vous aider dans votre travail ?

  • Speaker #1

    J'étais attiré par l'affection pour les animaux, puisque les adultes ne fournissaient pas d'affection. Donc j'étais attiré, mais intellectuellement, scientifiquement, dès les années d'après-guerre, il y avait énormément d'orphelins. En France il y en avait 300 000, mais sur la planète il y en avait je crois 10-12 millions. En Russie, en Pologne, en Europe centrale, en Allemagne, il y avait énormément d'orphelins. Et ces orphelins, les garçons surtout, ne survivaient que grâce à la violence. Et tout le monde se demandait pourquoi ces enfants privés de famille étaient violents. La réponse aujourd'hui elle est très simple, s'ils n'étaient pas violents, ils mourraient. La violence était une valeur adaptative et deux psychanalystes, Spitz, Anna Freud et un peu plus tard John Bowlby, mon maître, l'inventeur des théories de l'attachement, ont dit mais on ne peut pas faire d'expérimentation. avec les enfants humains, mais les animaux ont quelque chose à nous apprendre. Et en effet, ils ont constaté qu'il y avait des publications scientifiques très rigoureuses et très bien faites qui montraient que lorsqu'un être vivant, mammifère ou singe, chien, oiseau, est privé d'altérité, son cerveau est altéré, c'est-à-dire qu'un bébé, animal ou humain, Le sein ne peut bien fonctionner que s'il y a une altérité, c'est-à-dire une structure. Aujourd'hui, on appelle ça des niches écologiques. Mais en 1945, on appelait ça une altérité. L'altérité, quand tout va bien, c'est la mer, le foyer, la famille, l'école, le quartier. Mais là, ça n'allait pas bien. C'était la guerre, c'était le lendemain de guerre. Il n'y avait plus d'école et pour ces enfants-là, il n'y avait plus de famille. Les animaux... m'ont démontré qu'ils ne pouvaient se développer bien que s'il y avait une structure affective, éducative autour d'eux. Alors que quand j'étais enfant, quand un enfant se développait bien, on disait que c'était une bonne graine, et s'il se développait mal, on disait que c'était une mauvaise graine. Donc c'est une métaphore raciste, qui veut dire que parmi nous, il y aurait des gens de meilleure qualité que d'autres. La famille, la culture, l'école n'ont rien à voir là-dedans. C'est une métaphore raciste. Et ces travaux d'éthologie animale qui avaient commencé dans les années 30, qui étaient rigoureusement faits de manière scientifique, démontrés. Alors on n'avait pas de neuro-imagerie à cette époque-là, mais aujourd'hui la neuro-imagerie confirme qu'un animal, un être vivant, privé d'altérité, sain, devient dysfonctionnel. C'est-à-dire que les garçons ne survivaient à la privation d'affection que par la violence. Ce qu'on voit réapparaître de manière aiguë depuis 10, 15, 20 ans, même dans notre pays, où les garçons redeviennent d'une violence extrême parce que l'environnement est délabré pour des raisons culturelles, sociales ou politiques. L'environnement de nos enfants aujourd'hui est délabré et on se retrouve dans une situation comparable à la guerre de 40, où ces enfants sans foyer ne peuvent que devenir violents ou mourir.

  • Speaker #0

    Vous avez évoqué tout à l'heure les niches écologiques. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept ?

  • Speaker #1

    Alors, le premier à proposer ça, c'est un psychologue allemand, Brofen Brenner, mais on l'a repris dans tous mes groupes de recherche. Je propose de dire que tout mammifère, mais même les oiseaux qui ne sont pas des mammifères, ils ont des œufs, comme les mammifères. Il y a trois niches écologiques. Pour un mammifère humain, la première niche écologique, c'est le ventre des femmes. On est tous nés d'une femme. La deuxième niche écologique, c'est, après la naissance, le corps des femmes, les seins, l'odeur, la parole, la brillance des yeux, entourés. Il faut qu'une femme, une mère, ne soit pas seule. Si elle est entourée par celui que de mon temps on appelait un mari, je ne sais plus comment il faut dire aujourd'hui. il faut qu'il y ait une structure autour de la mer. Si la jeune mer est sécurisée, par une structure affective, un mari, une grand-mère, des copains, des copines, une structure affective autour d'elle, si elle est sécurisée, elle devient sécurisante pour le bébé qu'elle vient de mettre au monde. C'est préverbal. Ça c'est la deuxième niche écologique. Et la troisième niche écologique, c'est celle qui caractérise... Le monde humain, c'est le monde de l'artifice, l'outil et l'artifice du verbe qui commence dans l'utérus. C'est-à-dire que maintenant, les neurosciences, la neuro-imagerie, montrent que quand la mère parle, les hautes fréquences de sa voix sont filtrées par son corps et surtout par le liquide amniotique, alors qu'à l'inverse, les basses fréquences de sa voix sont très bien transmises par son corps. et surtout par le liquide amniotique. Et on a rendu observable à Toulon que lorsqu'elle parle, les basses fréquences de la voix viennent vibrer contre le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte. C'est-à-dire que lorsque la femme enceinte parle, c'est comme si elle caressait le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte, ce qui explique pourquoi, dans l'heure qui suit sa naissance, le bébé s'orientent vers la brillance des yeux de la mère, vers le mamelon et vers la voix maternelle qu'ils différencient de toute autre voix. Donc déjà, ils tissent avec sa mère. Alors, ce n'est pas encore sa mère, vous ne vexez pas à ce stade du développement, ce n'est pas encore une maman, c'est un objet sensoriel. Et ils tissent avec sa mère un objet de familiarité qui est le tranquillisant naturel. Si la mère est déprime, si elle est morte, si elle est maltraitée, si elle a la guerre, si son mari est violent, si elle a la violence, elle n'est pas bien. Or, quand on associe les recherches aujourd'hui, on se rend compte que les jeunes mères mettent au monde leur premier enfant, elles ont presque 32 ans. Le maximum de fécondabilité, c'est 25 ans. Un utérus de 32 ans, ce n'est pas la même cavité qu'un utérus de 25 ans. Ça marche bien, ça marche très souvent bien, mais ça doit déjà être un peu médicalisé, même si la plupart du temps, ça marche bien, mais il faut surveiller le diabète, l'hypertension, c'est un petit peu médicalisé. Donc la relation... est déjà changé. Ce n'est plus le mari, ce n'est plus la grand-mère, ce n'est plus la voisine, c'est le médecin. C'est la technique qui remplace la relation familiale affective. Et la troisième niche sensorielle, celle de la parole, le bébé reconnaît la voix et non pas encore la parole, mais plus tard il va parler entre le 20e et le 30e mois, et les mots. désormais vont désigner des objets proches, dans le contexte. Et ce n'est que vers la cinquième, sixième année que le développement du cerveau de l'enfant lui permet d'accéder au récit, c'est-à-dire quelles sont mes origines, quelle est ma religion, pourquoi est-ce que je suis né dans cette famille qui est chrétienne, qui est musulmane, qui est faite de paysans, qui est faite de marins, etc. Et là, on accède au récit. Donc on quitte la biologie pour entrer dans les déterminismes sociaux, culturels. Voilà les trois niches.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui est dysfonctionnel dans notre société aujourd'hui vis-à-vis de ces niches et des enfants ?

  • Speaker #1

    Ce qui est dysfonctionnel s'appelle dans les trois niches. Première niche, une femme enceinte stressée, sécrète, les substances du stress, qu'aujourd'hui on sait doser, qu'on savait doser après-guerre aussi, schématiquement c'est le cortisol. et l'adrénaline, les catécholamines. Si c'est un stress aigu, comme on le voit à l'échographie légale, si c'est un stress aigu, le bébé sursaute, et si c'est un stress aigu... Tout se remet en place dès que la mère est sécurisée. Donc même si le bébé a sursauté, c'est pas grave, il reprend son développement. Mais si c'est un stress chronique, le cortisol, les catécholamines, finissent par franchir la barrière du placenta. Et quand le bébé est éveillé, c'est-à-dire à peu près 4 heures par jour, chaque fois qu'il est stimulé, il déglutit du liquide amniotique bourré de cortisol et de substances du stress. toxiques pour son système nerveux, pour certaines zones de son système nerveux. Et avec Shaul Arel, à Tel Aviv, il a été le premier à montrer, pour une population de femmes palestiniennes et israéliennes qui consultaient dans les hôpitaux israéliens pour syndrome psychotraumatique, il a fait une population de 170 femmes stressées, pour ce qui consultait pour syndrome psychotraumatique. qui sont des souffrances continues, les gens qui souffrent de ça ne peuvent plus travailler, ils ne peuvent plus, ils ne pensent qu'à ça. Ils sont prisonniers du trauma et ces femmes-là ont mis au monde 170 bébés. Il a fait des neuro-imageries qui ont montré que ces 170 bébés avaient une atrophie des deux lobes préfrontaux, une atrophie des deux systèmes limbiques et une hypertrophie d'un noyau amygdalien. qui est le socle neurologique des émotions intenses, insupportables, de haine, de colère, de rage, de désespoir. C'est-à-dire que ça c'est un raisonnement écosystémique. Une altération du milieu, j'allais dire, quand j'ai écrit dans mon livre La guerre chronique de ces milieux aujourd'hui ce n'est plus une guerre chronique, c'est une guerre sur aiguë. La guerre, mais... Il y a bientôt la moitié de la population du monde aujourd'hui est en guerre. Alors nous, en France, on ne parle que des deux guerres qui nous préoccupent, l'Ukraine et le Proche-Orient. Mais il y a 183 guerres actuellement. C'est pareil pour tous les bébés et pour toutes les femmes enceintes du monde. Mais on ne parle que des deux guerres qui nous touchent, on ignore les autres. C'est-à-dire que ces femmes-là sont insécurisées. La résilience des neurones, dans les petites années, est très facile à déclencher. Dès qu'on sécurise la mère, les substances du stress ne sont plus sécrétées. En une nuit ou deux, le bébé recommence sa reconstruction neurologique. Donc la résilience neuronale, c'est contre-intuitif, c'est la plus facile à déclencher, il suffit de s'occuper de la mère. Qui va s'occuper de la mère ? Son mari, son père, son compagnon, sa grand-mère, ses copains, un système social bien organisé. Elle pourra consulter pour l'hypertension, pour le diabète, des copains, la socialisation, c'est très important. Dès qu'elle est sécurisée, le bébé se débrouille. Mais si on insécurise la mère, ce qui était une dysfonction cérébrale... va devenir une structure cérébrale. Et là, la résilience sera difficile à déclencher parce que le cerveau est sculpté, non pas par la mère, mais le cerveau est sculpté par le malheur de la mère, son mari, la guerre, la précarité sociale, un accident de la vie, etc.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que deviennent ces enfants une fois qu'ils ont vécu cette modification, cette modification de la structure cérébrale ? Qu'est-ce qu'on peut faire pour ces enfants ?

  • Speaker #1

    Il faut s'occuper de la mère. D'abord, les enfants se débrouilleront. Dès que la mère sera bien, les enfants vont se débrouiller. Plus on intervient tôt, plus la résilience est facile à déclencher. Donc, plus on intervient tard, plus la résilience sera difficile à déclencher. Alors ça, c'est des évaluations neurologiques qui ont été faites en Roumanie. où le dictateur Cheochescun avait isolé 170 000 enfants en isolement sensoriel total, comme Arlo Spitz l'avait fait pour des petits singes macaques dans les années 30. Ces singes étaient très altérés, on ne savait pas pourquoi. Et ils avaient les mêmes altérations que les petits roumains que j'ai vus, privés d'affection. Ils n'avaient que... Ils ne parlaient pas, personne ne leur parlait. Il puait, personne ne l'avait. Il ne souriait pas, personne ne souriait. Il n'avait que des activités auto-centrées. Mais quand les Romains se sont occupés d'eux, ils en ont récupéré 100 000. qui n'avaient pas été isolés intensément. Ils n'ont pas récupéré 70 000 enfants, ceux qui ont été isolés précocement, intensément, durablement. Donc on sait ce qu'il faut faire pour s'occuper des enfants dans les trois niches écologiques que je vous ai résumées.

  • Speaker #0

    Vous parlez dans votre dernier livre aussi de carence affective. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept et le lien que vous pouvez faire avec tout ce qu'on a dit avant ?

  • Speaker #1

    L'affect, c'est ce qui stimule le cerveau. Je suis content, certaines zones cérébrales, les zones de la récompense, passent au rouge, c'est-à-dire que les zones de la récompense, c'est schématiquement de l'hypothalamus à la face inférieure du lobe préfrontal. Ça veut dire que je me sens bien. C'est des neurones qui sécrètent beaucoup de sérotonine. ou de dopamine, qui sont les deux neuromédiateurs du bien-être, le plaisir d'agir et le plaisir d'entrer en relation. Si je suis seul, cette zone cérébrale n'est pas stimulée. Les enfants sont hébétés. Hébétés, ils n'apprennent rien. Et ils sont hébétés. Et si on les laisse seuls longtemps, la résilience sera de mauvaise qualité. Alors, les Roumains ont récupéré 100 000 enfants sur 170 000. parce qu'ils se sont, dès qu'ils ont pu s'occuper de ces enfants, ils ont fait des prouesses affectives. Ça consiste en quoi ? Ce que font toutes les mères quand elles sont bien. Parler, toucher, gronder, toileter, rigoler, s'amuser. C'est le plaisir de la mère, à condition qu'elle soit bien, qui fait que l'enfant est entouré par une niche sensorielle stimulante, il va bien se développer. Si la mère est morte, et si l'enfant est laissé seul, si la mère est maltraitée, si la mère est malade, si elle a guerre, la précarité sociale, la mère ne peut pas, n'a pas la force. Soit parce qu'elle est malade, soit parce qu'elle déprime, soit parce qu'elle est maltraitée, soit parce que le frigidaire est vide, soit parce que le compagnon est à la guerre et elle ne sait pas s'il va rentrer le soir même. Ce qu'on entend tous les jours aujourd'hui, c'est une phrase... que j'ai entendu quand j'étais gamin, que j'ai entendu quand j'ai travaillé au Liban pendant les 16 ans de guerre civile déclenchée par les Palestiniens et sauvée par Hafez el-Assad, qui les a chassés du sud du Liban, ce que tout le monde a oublié. Et dès que ces enfants-là, on réentend aujourd'hui les mêmes phrases. Quand papa... Quand mon mari, mon compagnon, part le matin, je suis dans l'angoisse jusqu'au soir parce que je ne sais pas s'il va revenir. Les substances du stress sont tout le temps sécrétées et le bébé se développe mal. Et la guerre est une fabrique de psychopathes. Pendant plusieurs générations, les garçons, plus que les filles, parce que les garçons réagissent par la violence alors que les filles réagissent par le câlin et la parole. Il y a plusieurs hypothèses. Quand elles sont malheureuses, elles se calinent, elles se font caliner ou elles parlent. Quand un garçon est malheureux, il se replie sur lui ou il explose. Et toutes les cultures, toutes les cultures ont utilisé cette différence de réaction entre les genres, comme on dit aujourd'hui, pour utiliser les garçons et les préparer à la guerre. à la violence, au travail, torture, 15 heures par jour, au fond des mines, ce que je n'ai pas connu, mais j'ai connu quand j'étais médecin au chantier naval de la Seine, 10 heures par jour des hommes qui ne voyaient la lumière du jour que deux mois par an, et qui ne parlaient jamais. Donc le fait qu'il y ait un déterminisme biologique n'exclut pas le déterminisme culturel. Les femmes aujourd'hui, les jeunes mères, mettent au monde leur premier bébé, elles ont presque 32 ans. Elles se sont développées comme jamais dans la culture occidentale. C'est la première fois depuis que votre grand-père et votre grand-mère, qui sont les mêmes que moi, monsieur et madame Sapiens, il y a 300 000 ans, on avait les mêmes grands-parents. C'est la première fois depuis 300 000 ans que les femmes ont la possibilité... de se développer comme des personnes, et non pas simplement comme des annexes de mari ou des porteuses d'enfants. Depuis deux, trois générations seulement, elles deviennent des personnes, parce que la culture a changé, parce que l'école est devenue un lieu de formation importante où les filles se débrouillent très bien, et malgré ça, il n'y a jamais eu autant de dépression périnatale. Comment vous expliquez ça ? La solitude, ces jeunes femmes actives qui font des études, qui bougent, qui se débrouillent, qui s'épanouissent, tout d'un coup elles se retrouvent seules avec un tyran domestique adoré qu'elles appellent le bébé. Et elles sont prisonnières du bébé. Le fait de mettre au monde un bébé, aujourd'hui, a incroyablement changé de signification. Jusqu'à la découverte de Simmelweis, Prophylaxie d'accouchement, 1861, les femmes avaient une espérance de vie de 36 ans. Elles avaient 13 grossesses par vie de femme pour donner 4 adultes, parce que la mortalité enfantine était énorme et les femmes suivaient. Les hommes vivaient plus longtemps, mais ils mouraient entre 45 et 60 ans. Les plus vieux mouraient à 60 ans. Mais quand un homme mourra à 60 ans, il pouvait faire deux ou trois mariages sans divorcer, tellement les femmes mourraient jeunes. Donc les conditions d'existence étaient très dures, et aujourd'hui notre culture qui permet le développement des femmes et des hommes a pour effet secondaire la solitude, et les femmes dépriment de plus en plus. Donc c'est des questions éducatives, culturelles, l'entourage. Il faut qu'il y ait une famille, un foyer, un village autour des jeunes mères pour qu'elles ne soient pas seules. Et à ce moment-là, depuis que, après notre rapport, depuis que le congé paternité a été un petit peu augmenté mais pas assez, comparé au Danemark, à l'Espagne ou à d'autres pays où le congé paternité est... et le congé parental est très augmenté, la dépression périnatale n'existe pratiquement plus. Elle a disparu en un an. Elle a pratiquement disparu en un an. Donc on sait ce qu'il faut faire. Il faut entourer la niche sensorielle, la niche écologique d'une mère pour qu'elle soit sécurisée et le bébé se débrouillera.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai qu'en France, on a l'impression que les bébés font face à plusieurs crises. Il y a, comme vous le disiez, des pressions qui touchent beaucoup de mères. Alors maintenant, on parle aussi de la crise du système de garde. Qu'est-ce que vous pensez de cette situation ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est un problème actuel. C'est qu'avant, il n'y a pas longtemps, il y a trois générations, il y a même en Italie, le divorce était interdit. Il y avait des couples très douloureux qui ne pouvaient pas. se séparer. Donc quand le divorce a été légal, ça a soulagé quelques familles, parce que quand les enfants se développent dans un conflit parental sur aiguille, ils ne se développent pas bien. Et quand, donc ça a été un progrès, et maintenant on est passé dans l'excès contraire, on prévoit que les jeunes couples aujourd'hui feront, dans leur aventure humaine, 4 ou 5 couples, 5 à 10 métiers différents. C'est-à-dire que c'est une instabilité affective très importante. Un cerveau ne peut être sculpté que s'il y a des moments de stabilité affective. Donc le divorce, la violence conjugale avant la parole, la séparation parentale avant la parole, schématiquement vingtième, on va dire troisième année, est une grave agression pour l'enfant. La séparation. parental parfois nécessaire. J'ai connu l'époque où, quand un homme était violent, et quand j'ai accompagné des femmes qui étaient obligées de s'enfuir avec leurs deux enfants parce que l'homme devenait pathologiquement violent, elles étaient condamnées pour abandon de domicile familial. La loi a changé, mais il n'y a pas longtemps que la loi a changé. Maintenant, c'est l'homme qui doit partir et qui doit, si possible, se faire soigner. Parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. La loi a changé, mais c'est récent ça. Donc ça veut dire que des lois, les structures familiales, qui étaient trop rigides il n'y a pas longtemps, deviennent trop labiles, trop instables maintenant. Il faudrait que les jeunes comprennent qu'il y a des périodes sensibles du développement des enfants où il faut, si on peut, faire l'effort de ne pas se séparer à la moindre occasion. Je le redis volontairement. parfois c'est nécessaire. J'ai eu des patients, des hommes paranoïaques, et là il fallait protéger la femme et les enfants. Ce que ne faisait pas notre ancien système légal. C'est les femmes qui étaient condamnées. Mais les femmes, ce n'est pas la première fois qu'elles sont victimes d'absurdités légales. C'est déjà arrivé. C'est en train de changer, mais le point faible de la culture de ceux qui ont 25 ans aujourd'hui, c'est on. peu peur.

  • Speaker #0

    Se stabiliser et stabiliser le développement d'un enfant, c'est-à-dire tisser le lien d'attachement si on se sépare tous les deux ans. Pour tisser le lien d'attachement sécurisant, il faut qu'il y ait au moins une stabilité affective pour qu'on puisse tisser le lien d'attachement. Et actuellement, on voit que les jeunes vivent dans des ruptures incessantes dont ils souffrent. et donc s'ouvrent les enfants.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que vous pensez en termes de sécurité affective pour les enfants, des modes de garde type les crèches ? Est-ce qu'elles permettent aujourd'hui de répondre aux sécurités affectives qui sont si nécessaires pour les bébés et qui sont souvent mis très jeunes dans ces structures ?

  • Speaker #0

    Alors si, sur le papier on sait ce qu'il faut faire, il faudrait augmenter tous les métiers de la petite enfance, assistantes maternelles, crèches, ce qu'ont fait les allemands qui culpabilisaient les mères il n'y a pas longtemps encore en disant si votre enfant se développe mal c'est parce que vous travaillez, vous n'êtes pas consacré à votre enfant donc les mères étaient culpabilisées, beaucoup y croyaient et ils ont renversé la politique éducative et maintenant ils ont développé des crèches comme savent le faire les allemands c'est à dire c'est impeccablement organisé c'est très rapide Et ils ont amélioré la formation des métiers de la petite enfance. Et les enfants, les bébés préverbaux, ont besoin d'un système familial à multiples attachements. Il faut qu'il y ait la mère, inévitablement, puisque c'est elle qui porte les enfants, et c'est elle qui marque les premières empreintes dans le cerveau et dans le psychisme du bébé en développement. Donc la mère, c'est la figure d'attachement primordiale. ça veut pas dire unique ça veut dire qu'il faut qu'ils aient une autre figure d'attachement de mon temps on dit que c'était le père maintenant ça peut être un autre homme ça peut être une grand mère qui joue le rôle du père ça peut être une autre femme qui joue le rôle du pain du père une femme qui joue le rôle du père vous avez bien entendu et les femmes homosexuelles se débrouillent très bien les enfants se débrouillent très bien peut-être Peut-être même mieux que les hétérosexuels. Mais actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de moins en moins de jeunes qui s'orientent vers les métiers de la petite enfance, qui sont fatigants et pas très bien payés. Ils n'ont pas la formation. qui pourrait les rendre intéressés par les métiers de la petite enfance. Je donne des formations, des instituts de petite enfance, on voit des dames qui adorent, qui adoraient ce métier, on voit des dames... qui sont à la retraite depuis très longtemps, qui viennent assister aux cours pour qu'on parle encore des bébés. Ça a enchanté leur vie. Et ça existe de moins en moins. Donc on voit qu'il y a de moins en moins de métiers de la petite âme. de moins en moins formés et aux états unis où n'importe qui garde n'importe quel enfant avec des enfants surnombre dans des espaces trop petit avec des gardiens sans formation les bébés deviennent inconsolables et violents des garçons plus que les filles il y avait les bébés garçons ne réagissent pas la frustration de la même manière que les bébés filles et comme je le disais tout à l'heure cette violence La violence des réactions des garçons est utilisée par toutes les cultures pour en faire des soldats, des guerriers, pour faire la guerre qu'on voit se développer. Et c'est ce qui explique que les bébés américains sursautent, ne sont pas consolables, pour un rien, ils ne contrôlent pas leurs émotions. Les filles contrôlent mieux leurs émotions. Elles ont plus d'émotions que les garçons, mais elles les contrôlent mieux que les garçons parce qu'elles chargent des câlins plus que les garçons. Et elles parlent plutôt. et mieux que les garçons. Donc elles ont des modes de régulation émotionnelle plus efficaces que les garçons. Et puis quand elles sont vieilles, quand elles sont grandes, quand un garçon leur casse les pieds, au lieu de réagir par la violence, elles téléphonent à la meilleure amie et elles descendent avec des mots le garçon qu'elles ne peuvent pas descendre avec leurs petits poings. Donc ça veut dire que les modes de défense ne sont pas les mêmes chez les garçons et chez les filles. Et ça pose le problème qu'on voit, C'est un garçon violent. font le vide autour d'eux à la crèche, personne ne les sécurise parce que c'est des gardiens d'enfants, ce ne sont pas des accueils éducatifs, ce sont des gardiennes d'enfants. Parfois, elles les mettent devant le mur pour qu'ils s'endorment. Elles mettent la chaise du bébé, elles leur donnent un biberon, et le bébé, il n'y a pas de stimulation, il s'endort. Ce n'est pas un accueil éducatif. Et on voit ces garçons-là à la crèche, ils battent. Ils tapent, ils mordent, ils s'isolent, les autres enfants les évitent. À l'école, ils n'ont pas de copains, ils ne parlent pas, ils s'isolent encore plus. Et quand arrivent les émotions intenses de l'adolescence, c'est un pays où tout le monde est armé, vous connaissez la suite. Ils rentrent dans le lycée, dans l'école, dans le lieu de leur humiliation, et ils tuent. On sait ce qu'il faut faire. Les américains ne le font pas, les danois le font bien, les espagnols le font de mieux en mieux, les québécois le font de mieux en mieux, et la violence des garçons diminue beaucoup. Parce que l'affectivité, la familiarité, c'est notre tranquillisant naturel. Quand on est en sécurité affective avec un copain, avec sa femme, avec son homme... on n'a pas besoin de tranquillisant. Notre culture détruit ces tranquillisants naturels à cause de l'instabilité affective des parents, à cause de l'instabilité sociale des jeunes qui ne font plus de métier. Le développement personnel est devenu une telle valeur qu'ils refusent de faire des métiers de sacrifice. Les femmes refusent de se laisser sacrifier. Ça fait partie de leur développement personnel. les hommes se laissent de moins en moins héroïsés, ce qui était une manière aussi de les mener au sacrifice, comme on le voit aujourd'hui dans les pays avec ce tragique retour de la guerre, où on recommence à sacrifier les hommes, mais on voit que de plus en plus de jeunes hommes ne se laissent plus héroïsés, et on voit que la désertion qui était la honte de la guerre de 40, un homme qui désertait perdait. l'estime de sa fiancée ou de sa mère c'est la honte de la famille aujourd'hui quand en ukraine ou en russie un homme déserte toute sa famille l'aide la culture a complètement changé et

  • Speaker #1

    ça me fait penser à une phrase que j'ai souillé dans votre livre vous dites pendant des millénaires les méthodes éducatives ont été d'une incroyable brutalité Mais comme vous le dites, cette violence n'a toujours malheureusement pas disparu. On le voit à travers certaines méthodes éducatives ou même, comme vous le disiez, avec le développement des guerres. Pourquoi est-ce que l'être humain, malgré toutes ses connaissances, reste autant dans la violence ?

  • Speaker #0

    Parce que l'être humain... a failli disparaître plusieurs fois. Quand il y avait des changements climatiques, des glaciations, les feuilles, les fruits disparaissaient, l'herbe, le petit gibier disparaissait. Et il y a au moins deux périodes où il y avait presque plus de squelettes humains sur la planète. L'espèce humaine n'était pas en voie de disparition, elle était pratiquement disparue. Et qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas disparu ? L'invention des armes, des outils et la parole. L'invention des armes, le silex taillé, collé sur un pieu, emmanché sur un pieu, et des hommes beaucoup moins forts que des chevaux, beaucoup moins forts que des mammouths, beaucoup moins forts que la plupart des animaux, ont tué des animaux grâce à la caractéristique de la condition humaine, l'artifice de l'outil, l'artifice du verbe. On a plus. fabriqué du social, on a pu avec des mots, la violence des hommes a été encouragée pour tuer des animaux bien plus fort qu'eux. On a retrouvé un silex avec un pieu enfoncé dans le coeur d'un mammouth. C'est à dire qu'un petit homme, je ne sais pas combien de fois inférieur au mammouth, s'est glissé entre ses pattes. Et je pense que toute la famille, le clan, il n'y avait pas de famille mais il y avait des clans de 150 à 150 personnes, ils ont dû manger pendant plusieurs semaines. mettre la viande au froid et puis ils ont survécu grâce à la violence des hommes la violence a été une valeur adaptative la plupart des frontières sont le résultat de guerre les aristocrates se sont emparés grâce à la violence et ils ont fait des pays des nations S'il y a des cartographies de religion, il y a des zones musulmanes, des zones chrétiennes, c'est parce qu'il y a eu des guerres de religion. Si on parle français en France, c'est parce que la République française a interdit le patois, le breton, le basque et toutes les langues, et qui étaient gravement punis. Les enfants qui parlaient le basque ou le breton à l'école étaient humiliés et punis violemment. C'est la violence qui a fabriqué du social, notamment la violence des hommes, la violence physique des hommes. Et la violence des hommes et l'entrave des femmes. Les femmes, ce qu'on voit réapparaître dans les guerres aujourd'hui, ou la charte du Hamas, une femme participe à la guerre quand elle met au monde des fils. Quand elles leur apprennent la foi, et quand elles leur apprennent, de façon à ce qu'ils apprennent le métier des armes, pour tuer les juifs. C'est publié partout. Ça ne provoque pas d'indignation. La violence que je croyais combattue, qu'on a combattue. Pendant deux, trois générations, j'ai vraiment cru que ça ne reviendrait jamais. Et ce que je viens de dire, on prouve que ça revient. tout le pays.

  • Speaker #1

    Dans votre livre, vous invitez à proposer plusieurs récits aux enfants. Lesquels seraient-ils par exemple ?

  • Speaker #0

    Plusieurs récits ? Quand un enfant arrive à l'âge des récits, il a 5, 6, 7 ans, selon le développement de son système nerveux et selon les structures familiales. Il y a des familles où on parle beaucoup et on raconte. On est provençaux depuis le XVIIe siècle. Les enfants adorent ça. On est marins. depuis je ne sais pas combien de temps, on est musulman, on est chrétien, ça intéresse beaucoup les enfants. Mais si on présente un seul récit, il n'y a qu'un seul Dieu, c'est un langage totalitaire. C'est-à-dire que ça arrête l'empathie, il n'y a qu'un seul Dieu, le mien, les autres sont des mécréants, comme le disait les catholiques, qui méritent la mort. Les chrétiens qui ont été pas mal persécutés à cause du langage totalitaire sont devenus totalitaires aussi, l'inquisition, le colonialisme, et actuellement on voit que beaucoup de récits sont totalitaires, totalitaires religieux, totalitaires idéologiques, le communisme, le nazisme, totalitaires économiques. Il n'y a qu'une seule bonne économie, c'est celle de mon chef. Et quand il n'y a qu'un seul récit, on se retrouve prisonnier d'un langage totalitaire, totalement explicatif. Tous ceux qui ne croient pas comme moi, tous ceux qui ne croient pas comme moi, et qui ne pensent pas comme moi, méritent la mort. Ce qu'on voit réapparaître dans toutes les guerres qu'on nous raconte, ou auxquelles j'ai assisté, je suis stupéfait de voir à quel point on forme les enfants dans l'île de la mort. ignorance totale d'une autre religion, d'une autre culture, alors que le théâtre grec avait pour fonction justement de présenter les problèmes de la cité. Les comédiens devaient mettre en scène, jouer sur la scène, les problèmes de la cité et les citoyens devaient en débattre et ensuite y voter. C'était le point de départ, le théâtre a été le point de départ de la démocratie.... Les Espagnols avaient inventé les Disputaciones, c'est-à-dire la plus célèbre, c'est la Disputation de Valadolid, où avant la Disputation de Valadolid, on pensait que les Indiens n'étaient pas des êtres humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas la même couleur de peau que nous, c'est bien la preuve qu'ils ne sont pas humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas les mêmes dieux que nous, ils adorent des sculptures en bois hideuses. C'est bien la preuve que ce n'est pas des êtres humains, disait-on. Il y a donc eu une disputation, et quand on pensait que ce n'était pas des êtres humains, on pouvait les tuer, ce n'était pas des êtres humains. Pas de culpabilité, on pouvait les atteler pour les faire travailler, on pouvait les dépecer quand ils étaient tués. Ce n'était pas des êtres humains, ce n'était pas un crime. Dès l'instant où la disputation de Valadolid leur a accordé une âme, Parce qu'ils ont éclaté de rire, parce que les prêtres se sont bagarrés entre eux, ils ont roulé par terre et tout le monde a éclaté de rire. Les indiens ont éclaté de rire. On avait la preuve que c'était les êtres humains, parce que le propre de l'homme, c'est le rire. Donc ils ont eu une âme de justesse. On ne pouvait plus les atteler, on ne pouvait plus les dépecer, si on les tuait, ça devenait un crime, puisqu'ils avaient une âme, il fallait les baptiser. Changement culturel à cause, grâce à une disparition de la culture. réputation démocratique. Actuellement, on voit que dans des écoles religieuses, religieuses sacrées ou religieuses profanes, ou religieuses économiques, je crois que le néolibéralisme Capitalisme, la loi du marché, c'est la seule loi valable. Il y a des gens qui soutiennent ça. C'est un langage totalitaire. On ne présente pas le monde de l'autre. Donc si les autres meurent, si les autres sont dans des carences humanitaires terrifiantes comme au Yémen actuellement, je n'en ai rien à faire. Je m'en fous éperdument. Je ne sais même pas qu'ils meurent. Je ne sais même pas qu'ils souffrent. C'est un arrêt total. de l'empathie à cause de la construction de récits totalitaires l'arrêt total de l'empathie c'est ce qui caractérise la perversion seul mon désir compte oui mais elle maintenant elle est malheureuse oui mais moi j'ai passé un bon quart d'heure oui mais elle regarde dans quel état elle est ah oui mais moi qu'est ce que je me suis marré Voilà des raisonnements pervers, sexuels, c'est des raisonnements de pervers sociaux, culturels, qu'on entend actuellement dans tous les conflits au Proche-Orient ou en Europe. Je suis frappé de voir à quel point les belligérants ignorent-on des malheurs de l'autre. Ils s'en foutent éperdument, ça ne les concerne pas. Ce sont des cultures qui sont devenues perverses à cause d'un langage totalitaire.

  • Speaker #1

    C'est tout de même assez anxiogène je trouve aujourd'hui de devenir parent dans notre société. Qu'est-ce que vous auriez à dire à tous les parents qui nous écoutent et qui souhaitent offrir à tous les bébés un bon départ dans l'existence ?

  • Speaker #0

    Ma réponse est claire. Faites un village. Dans un village, il y a la mère, puisque c'est elle qui porte les enfants, il y a son compagnon, sa compagne, il y a des copains, on peut confier le bébé à un accueil éducatif, à une école. Faites un village avec l'école du village. Si vous êtes croyante avec l'église, la mosquée, ça fait partie de la structuration, ça fait partie de la culture, la spiritualité fait partie de la condition humaine et la religion fait partie de la religion. provoque des dilutions familiales qui aggravent les 4 ou 5 couples des parents. Alors on se voit par Zoom pour l'anniversaire, pour Noël si on est chrétien, c'est pas une relation, c'est une communication, c'est pas une relation. Faites un village, si vous êtes malade, il y aura une autre femme, le jeune père avancé, actuellement découvrent la fatigue et le bonheur de s'occuper d'un bébé, c'est la première fois dans l'histoire des hommes que les hommes peuvent s'attacher à un bébé. Avant, ils étaient chefs de famille, mais ils n'étaient jamais dans leur famille. C'était les femmes. qui n'était pas chef de famille, qui faisait tout dans la famille. C'était encore une absurdité légale qui a duré depuis tout le temps, et qui a été votée en 1804. Le père était le représentant de Napoléon dans la famille. Mais il n'était jamais là. C'était une absurdité légale qui a organisé notre culture pendant deux siècles. Si vous voulez moins souffrir, si vous voulez éviter le burn-out des femmes, actuellement, elles veulent travailler, elles veulent mettre au monde 1,67 enfants, je ne sais pas comment elles font, elles veulent s'en occuper le mieux qu'elles peuvent, c'est pas possible. Il y a bien des moments où il faut qu'elles soufflent un peu. Si elles veulent tout faire tout le temps, elles courent au burn-out. Si on organise un village autour de la jeune mère, elle pourra partir un jour ou deux, elle pourra partir travailler, elle pourra partir en vacances. Il y aura toujours une structure autour du bébé et le bébé au contraire va en bénéficier. Parce qu'il apprendra un style affectif avec sa figure d'attachement primordiale, mais il apprendra qu'il y a une autre manière d'aimer avec une autre figure d'attachement, une autre manière d'aimer avec le métier de la petite. enfance avec le moniteur de sport avec le prêtre avec il y aura plein de manières d'aimer ça va ouvrir son esprit ça va ouvrir son empathie il ne sera pas il ne deviendra pas totalitaire j'ai une dernière question c'est la question rituelle du podcast comme

  • Speaker #1

    vous le savez il s'appelle les adultes de demain qu'est ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui les futurs adultes de demain alors je leur dirais fabriquer inventer

  • Speaker #0

    un village, on ne peut pas vivre seul. Quand on vit seul, vivre seul, c'est la mort psychique. Donc on est contraint à vivre avec les autres. Mais vivre avec les autres, c'est parfois l'enfer. Donc vous avez le choix entre la mort et l'enfer. Sauf si vous faites un village avec des copains, des professionnels, des prêtres, des musiciens, des sportifs. Et à ce moment-là, vous limiterez beaucoup la casse. Et d'ailleurs, tous les rapports que je suis en train de lire actuellement sur la psychiatrie de demain soulignent... l'importance de la psychoéducation. La mère n'est pas seule, la mère doit être entourée avec une stabilité suffisante quand c'est possible et à ce moment là elle sera heureuse et les enfants qu'elles mettront au monde seront heureux eux aussi. Voilà c'est facile.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Boris, à très bientôt. Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast. Ils laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général. Ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt. pour un nouvel épisode.

Description

✍️NOUVEAU : je lance un sondage pour mieux vous connaitre, aidez-moi à collecter le plus grand nombre de réponses : https://pnhxjl7nzh2.typeform.com/to/maw8xoC8


Ce moment-là, je l’attendais depuis longtemps : rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m’a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l’interroger sur ses réflexions autour de l’éducation et de la petite enfance.


Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons : neuropsychiatre, rescapé et orphelin de la Seconde Guerre Mondiale, pionnier de la résilience, auteur prolifique, acteur engagé pour la petite enfance, etc.

Cet échange m’a profondément marqué, on a parlé des guerres, de la violence même en éducation, de carence affective, et beaucoup d' enfants et des mamans. Boris est d’une incroyable générosité, bienveillance et humilité, et ça fait du bien.


Ressources :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition. Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ?

  • Speaker #0

    Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ce moment-là, je l'attendais depuis bien longtemps, rencontrer le grand Boris Cyrulnik. Boris m'a donné rendez-vous chez lui, dans le Sud, pour l'interroger sur ses réflexions autour de l'éducation et de la petite enfance. Vous connaissez certainement Boris Cyrulnik de plusieurs façons. neuropsychiatres, rescapés et orphelins de la seconde guerre mondiale, pionniers de la résilience, auteurs prolifiques acteurs engagés pour la petite enfance etc etc cet échange m'a profondément marqué, on a parlé de guerre, de violence mais aussi d'éducation, de carence affective et beaucoup des enfants et de leurs mamans Boris est d'une incroyable générosité bienveillance et humilité et ça fait tellement du bien je suis certaine que cet épisode va beaucoup vous plaire et je vous souhaite donc une très bonne écoute Bonjour Boris. Difficile de vous présenter en quelques mots, vous avez marqué notre siècle à travers votre travail et vos écrits, et notamment le dernier que j'ai dévoré, 40 voleurs en carence affective, bagarres animales et guerres humaines, aux éditions Odile Jacob. Vous avez aussi grandement contribué aux questions liées à l'enfance, et c'est ce qui m'amène à être avec vous aujourd'hui, dans le Sud, face à la mer. J'aimerais qu'on démarre tout de même avec un petit bout de votre histoire. Vous avez vécu, on le sait tous, une enfance marquée par l'épreuve et par la Seconde Guerre mondiale. En quoi cette expérience vous a donné envie de devenir psychiatre, mais aussi de vous intéresser aux enfants ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai démarré ma vie en perdant ma famille, en étant emprisonné à 6 ans, et en ayant compris qu'on voulait me tuer. Donc ce n'est pas un démarrage facile dans la vie, d'autant qu'ensuite, comme je n'avais plus de famille, je ne touchais pas de bourse. C'est un miracle, c'est invraisemblable que j'ai réussi à faire des études, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Mais c'est vrai que démarrer la vie en perdant sa famille pendant la guerre, alors que tout le monde s'entre-tuait, Ça m'a donné la rage de comprendre. Ou bien je ne m'en sortais pas, ce qui aurait été logique, ou bien si je voulais m'en sortir, il fallait absolument comprendre. C'était ma liberté, comprendre. Et ça m'a rendu complètement psychiatre, psychologue, en fait. C'est-à-dire que, et je me rends compte maintenant que j'arrive au dernier chapitre de ma vie, que je vois les mêmes phénomènes réapparaître, les mêmes mots, les mêmes... récits criminels, stupides, qui provoquent des engagements sur la planète entière, ça vraiment, je ne m'y attendais pas.

  • Speaker #0

    Vous parlez notamment dans votre livre de déserts affectifs durant votre enfance, que vous avez tenté d'atténuer grâce à la rencontre avec un chien. Et je sais que le monde animal s'est depuis intégré à votre manière de penser, à vos réflexions, de manière assez importante. Comment est-ce que le monde animal vous a permis ? de mieux comprendre l'espace humain ?

  • Speaker #1

    Dans les institutions d'après-guerre, où j'étais avant de retrouver la sœur de ma mère, dans ces institutions, le métier d'éducateur n'existait pas et les moniteurs avaient pour consigne de ne pas parler aux enfants, surtout aux garçons. Il fallait dresser les garçons, sinon ça allait devenir des bêtes sauvages. Donc les relations avec les adultes, c'était des relations... de mépris, de coups, de silence, et les seules relations humaines, je les avais avec des animaux, qui étaient une poésie extraordinaire. Il y avait des vols de fourmis, il y avait les oiseaux, et puis il y avait des chiens avec qui j'allais parler régulièrement, qui me faisaient la fête quand j'arrivais, et qui ne répétaient pas un mot de ce que je leur racontais.

  • Speaker #0

    Ça c'était important. Et en quoi justement le monde animal est venu vous aider dans votre travail ?

  • Speaker #1

    J'étais attiré par l'affection pour les animaux, puisque les adultes ne fournissaient pas d'affection. Donc j'étais attiré, mais intellectuellement, scientifiquement, dès les années d'après-guerre, il y avait énormément d'orphelins. En France il y en avait 300 000, mais sur la planète il y en avait je crois 10-12 millions. En Russie, en Pologne, en Europe centrale, en Allemagne, il y avait énormément d'orphelins. Et ces orphelins, les garçons surtout, ne survivaient que grâce à la violence. Et tout le monde se demandait pourquoi ces enfants privés de famille étaient violents. La réponse aujourd'hui elle est très simple, s'ils n'étaient pas violents, ils mourraient. La violence était une valeur adaptative et deux psychanalystes, Spitz, Anna Freud et un peu plus tard John Bowlby, mon maître, l'inventeur des théories de l'attachement, ont dit mais on ne peut pas faire d'expérimentation. avec les enfants humains, mais les animaux ont quelque chose à nous apprendre. Et en effet, ils ont constaté qu'il y avait des publications scientifiques très rigoureuses et très bien faites qui montraient que lorsqu'un être vivant, mammifère ou singe, chien, oiseau, est privé d'altérité, son cerveau est altéré, c'est-à-dire qu'un bébé, animal ou humain, Le sein ne peut bien fonctionner que s'il y a une altérité, c'est-à-dire une structure. Aujourd'hui, on appelle ça des niches écologiques. Mais en 1945, on appelait ça une altérité. L'altérité, quand tout va bien, c'est la mer, le foyer, la famille, l'école, le quartier. Mais là, ça n'allait pas bien. C'était la guerre, c'était le lendemain de guerre. Il n'y avait plus d'école et pour ces enfants-là, il n'y avait plus de famille. Les animaux... m'ont démontré qu'ils ne pouvaient se développer bien que s'il y avait une structure affective, éducative autour d'eux. Alors que quand j'étais enfant, quand un enfant se développait bien, on disait que c'était une bonne graine, et s'il se développait mal, on disait que c'était une mauvaise graine. Donc c'est une métaphore raciste, qui veut dire que parmi nous, il y aurait des gens de meilleure qualité que d'autres. La famille, la culture, l'école n'ont rien à voir là-dedans. C'est une métaphore raciste. Et ces travaux d'éthologie animale qui avaient commencé dans les années 30, qui étaient rigoureusement faits de manière scientifique, démontrés. Alors on n'avait pas de neuro-imagerie à cette époque-là, mais aujourd'hui la neuro-imagerie confirme qu'un animal, un être vivant, privé d'altérité, sain, devient dysfonctionnel. C'est-à-dire que les garçons ne survivaient à la privation d'affection que par la violence. Ce qu'on voit réapparaître de manière aiguë depuis 10, 15, 20 ans, même dans notre pays, où les garçons redeviennent d'une violence extrême parce que l'environnement est délabré pour des raisons culturelles, sociales ou politiques. L'environnement de nos enfants aujourd'hui est délabré et on se retrouve dans une situation comparable à la guerre de 40, où ces enfants sans foyer ne peuvent que devenir violents ou mourir.

  • Speaker #0

    Vous avez évoqué tout à l'heure les niches écologiques. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept ?

  • Speaker #1

    Alors, le premier à proposer ça, c'est un psychologue allemand, Brofen Brenner, mais on l'a repris dans tous mes groupes de recherche. Je propose de dire que tout mammifère, mais même les oiseaux qui ne sont pas des mammifères, ils ont des œufs, comme les mammifères. Il y a trois niches écologiques. Pour un mammifère humain, la première niche écologique, c'est le ventre des femmes. On est tous nés d'une femme. La deuxième niche écologique, c'est, après la naissance, le corps des femmes, les seins, l'odeur, la parole, la brillance des yeux, entourés. Il faut qu'une femme, une mère, ne soit pas seule. Si elle est entourée par celui que de mon temps on appelait un mari, je ne sais plus comment il faut dire aujourd'hui. il faut qu'il y ait une structure autour de la mer. Si la jeune mer est sécurisée, par une structure affective, un mari, une grand-mère, des copains, des copines, une structure affective autour d'elle, si elle est sécurisée, elle devient sécurisante pour le bébé qu'elle vient de mettre au monde. C'est préverbal. Ça c'est la deuxième niche écologique. Et la troisième niche écologique, c'est celle qui caractérise... Le monde humain, c'est le monde de l'artifice, l'outil et l'artifice du verbe qui commence dans l'utérus. C'est-à-dire que maintenant, les neurosciences, la neuro-imagerie, montrent que quand la mère parle, les hautes fréquences de sa voix sont filtrées par son corps et surtout par le liquide amniotique, alors qu'à l'inverse, les basses fréquences de sa voix sont très bien transmises par son corps. et surtout par le liquide amniotique. Et on a rendu observable à Toulon que lorsqu'elle parle, les basses fréquences de la voix viennent vibrer contre le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte. C'est-à-dire que lorsque la femme enceinte parle, c'est comme si elle caressait le front, la bouche et les mains du bébé qu'elle porte, ce qui explique pourquoi, dans l'heure qui suit sa naissance, le bébé s'orientent vers la brillance des yeux de la mère, vers le mamelon et vers la voix maternelle qu'ils différencient de toute autre voix. Donc déjà, ils tissent avec sa mère. Alors, ce n'est pas encore sa mère, vous ne vexez pas à ce stade du développement, ce n'est pas encore une maman, c'est un objet sensoriel. Et ils tissent avec sa mère un objet de familiarité qui est le tranquillisant naturel. Si la mère est déprime, si elle est morte, si elle est maltraitée, si elle a la guerre, si son mari est violent, si elle a la violence, elle n'est pas bien. Or, quand on associe les recherches aujourd'hui, on se rend compte que les jeunes mères mettent au monde leur premier enfant, elles ont presque 32 ans. Le maximum de fécondabilité, c'est 25 ans. Un utérus de 32 ans, ce n'est pas la même cavité qu'un utérus de 25 ans. Ça marche bien, ça marche très souvent bien, mais ça doit déjà être un peu médicalisé, même si la plupart du temps, ça marche bien, mais il faut surveiller le diabète, l'hypertension, c'est un petit peu médicalisé. Donc la relation... est déjà changé. Ce n'est plus le mari, ce n'est plus la grand-mère, ce n'est plus la voisine, c'est le médecin. C'est la technique qui remplace la relation familiale affective. Et la troisième niche sensorielle, celle de la parole, le bébé reconnaît la voix et non pas encore la parole, mais plus tard il va parler entre le 20e et le 30e mois, et les mots. désormais vont désigner des objets proches, dans le contexte. Et ce n'est que vers la cinquième, sixième année que le développement du cerveau de l'enfant lui permet d'accéder au récit, c'est-à-dire quelles sont mes origines, quelle est ma religion, pourquoi est-ce que je suis né dans cette famille qui est chrétienne, qui est musulmane, qui est faite de paysans, qui est faite de marins, etc. Et là, on accède au récit. Donc on quitte la biologie pour entrer dans les déterminismes sociaux, culturels. Voilà les trois niches.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui est dysfonctionnel dans notre société aujourd'hui vis-à-vis de ces niches et des enfants ?

  • Speaker #1

    Ce qui est dysfonctionnel s'appelle dans les trois niches. Première niche, une femme enceinte stressée, sécrète, les substances du stress, qu'aujourd'hui on sait doser, qu'on savait doser après-guerre aussi, schématiquement c'est le cortisol. et l'adrénaline, les catécholamines. Si c'est un stress aigu, comme on le voit à l'échographie légale, si c'est un stress aigu, le bébé sursaute, et si c'est un stress aigu... Tout se remet en place dès que la mère est sécurisée. Donc même si le bébé a sursauté, c'est pas grave, il reprend son développement. Mais si c'est un stress chronique, le cortisol, les catécholamines, finissent par franchir la barrière du placenta. Et quand le bébé est éveillé, c'est-à-dire à peu près 4 heures par jour, chaque fois qu'il est stimulé, il déglutit du liquide amniotique bourré de cortisol et de substances du stress. toxiques pour son système nerveux, pour certaines zones de son système nerveux. Et avec Shaul Arel, à Tel Aviv, il a été le premier à montrer, pour une population de femmes palestiniennes et israéliennes qui consultaient dans les hôpitaux israéliens pour syndrome psychotraumatique, il a fait une population de 170 femmes stressées, pour ce qui consultait pour syndrome psychotraumatique. qui sont des souffrances continues, les gens qui souffrent de ça ne peuvent plus travailler, ils ne peuvent plus, ils ne pensent qu'à ça. Ils sont prisonniers du trauma et ces femmes-là ont mis au monde 170 bébés. Il a fait des neuro-imageries qui ont montré que ces 170 bébés avaient une atrophie des deux lobes préfrontaux, une atrophie des deux systèmes limbiques et une hypertrophie d'un noyau amygdalien. qui est le socle neurologique des émotions intenses, insupportables, de haine, de colère, de rage, de désespoir. C'est-à-dire que ça c'est un raisonnement écosystémique. Une altération du milieu, j'allais dire, quand j'ai écrit dans mon livre La guerre chronique de ces milieux aujourd'hui ce n'est plus une guerre chronique, c'est une guerre sur aiguë. La guerre, mais... Il y a bientôt la moitié de la population du monde aujourd'hui est en guerre. Alors nous, en France, on ne parle que des deux guerres qui nous préoccupent, l'Ukraine et le Proche-Orient. Mais il y a 183 guerres actuellement. C'est pareil pour tous les bébés et pour toutes les femmes enceintes du monde. Mais on ne parle que des deux guerres qui nous touchent, on ignore les autres. C'est-à-dire que ces femmes-là sont insécurisées. La résilience des neurones, dans les petites années, est très facile à déclencher. Dès qu'on sécurise la mère, les substances du stress ne sont plus sécrétées. En une nuit ou deux, le bébé recommence sa reconstruction neurologique. Donc la résilience neuronale, c'est contre-intuitif, c'est la plus facile à déclencher, il suffit de s'occuper de la mère. Qui va s'occuper de la mère ? Son mari, son père, son compagnon, sa grand-mère, ses copains, un système social bien organisé. Elle pourra consulter pour l'hypertension, pour le diabète, des copains, la socialisation, c'est très important. Dès qu'elle est sécurisée, le bébé se débrouille. Mais si on insécurise la mère, ce qui était une dysfonction cérébrale... va devenir une structure cérébrale. Et là, la résilience sera difficile à déclencher parce que le cerveau est sculpté, non pas par la mère, mais le cerveau est sculpté par le malheur de la mère, son mari, la guerre, la précarité sociale, un accident de la vie, etc.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que deviennent ces enfants une fois qu'ils ont vécu cette modification, cette modification de la structure cérébrale ? Qu'est-ce qu'on peut faire pour ces enfants ?

  • Speaker #1

    Il faut s'occuper de la mère. D'abord, les enfants se débrouilleront. Dès que la mère sera bien, les enfants vont se débrouiller. Plus on intervient tôt, plus la résilience est facile à déclencher. Donc, plus on intervient tard, plus la résilience sera difficile à déclencher. Alors ça, c'est des évaluations neurologiques qui ont été faites en Roumanie. où le dictateur Cheochescun avait isolé 170 000 enfants en isolement sensoriel total, comme Arlo Spitz l'avait fait pour des petits singes macaques dans les années 30. Ces singes étaient très altérés, on ne savait pas pourquoi. Et ils avaient les mêmes altérations que les petits roumains que j'ai vus, privés d'affection. Ils n'avaient que... Ils ne parlaient pas, personne ne leur parlait. Il puait, personne ne l'avait. Il ne souriait pas, personne ne souriait. Il n'avait que des activités auto-centrées. Mais quand les Romains se sont occupés d'eux, ils en ont récupéré 100 000. qui n'avaient pas été isolés intensément. Ils n'ont pas récupéré 70 000 enfants, ceux qui ont été isolés précocement, intensément, durablement. Donc on sait ce qu'il faut faire pour s'occuper des enfants dans les trois niches écologiques que je vous ai résumées.

  • Speaker #0

    Vous parlez dans votre dernier livre aussi de carence affective. Est-ce que vous pourriez revenir sur ce concept et le lien que vous pouvez faire avec tout ce qu'on a dit avant ?

  • Speaker #1

    L'affect, c'est ce qui stimule le cerveau. Je suis content, certaines zones cérébrales, les zones de la récompense, passent au rouge, c'est-à-dire que les zones de la récompense, c'est schématiquement de l'hypothalamus à la face inférieure du lobe préfrontal. Ça veut dire que je me sens bien. C'est des neurones qui sécrètent beaucoup de sérotonine. ou de dopamine, qui sont les deux neuromédiateurs du bien-être, le plaisir d'agir et le plaisir d'entrer en relation. Si je suis seul, cette zone cérébrale n'est pas stimulée. Les enfants sont hébétés. Hébétés, ils n'apprennent rien. Et ils sont hébétés. Et si on les laisse seuls longtemps, la résilience sera de mauvaise qualité. Alors, les Roumains ont récupéré 100 000 enfants sur 170 000. parce qu'ils se sont, dès qu'ils ont pu s'occuper de ces enfants, ils ont fait des prouesses affectives. Ça consiste en quoi ? Ce que font toutes les mères quand elles sont bien. Parler, toucher, gronder, toileter, rigoler, s'amuser. C'est le plaisir de la mère, à condition qu'elle soit bien, qui fait que l'enfant est entouré par une niche sensorielle stimulante, il va bien se développer. Si la mère est morte, et si l'enfant est laissé seul, si la mère est maltraitée, si la mère est malade, si elle a guerre, la précarité sociale, la mère ne peut pas, n'a pas la force. Soit parce qu'elle est malade, soit parce qu'elle déprime, soit parce qu'elle est maltraitée, soit parce que le frigidaire est vide, soit parce que le compagnon est à la guerre et elle ne sait pas s'il va rentrer le soir même. Ce qu'on entend tous les jours aujourd'hui, c'est une phrase... que j'ai entendu quand j'étais gamin, que j'ai entendu quand j'ai travaillé au Liban pendant les 16 ans de guerre civile déclenchée par les Palestiniens et sauvée par Hafez el-Assad, qui les a chassés du sud du Liban, ce que tout le monde a oublié. Et dès que ces enfants-là, on réentend aujourd'hui les mêmes phrases. Quand papa... Quand mon mari, mon compagnon, part le matin, je suis dans l'angoisse jusqu'au soir parce que je ne sais pas s'il va revenir. Les substances du stress sont tout le temps sécrétées et le bébé se développe mal. Et la guerre est une fabrique de psychopathes. Pendant plusieurs générations, les garçons, plus que les filles, parce que les garçons réagissent par la violence alors que les filles réagissent par le câlin et la parole. Il y a plusieurs hypothèses. Quand elles sont malheureuses, elles se calinent, elles se font caliner ou elles parlent. Quand un garçon est malheureux, il se replie sur lui ou il explose. Et toutes les cultures, toutes les cultures ont utilisé cette différence de réaction entre les genres, comme on dit aujourd'hui, pour utiliser les garçons et les préparer à la guerre. à la violence, au travail, torture, 15 heures par jour, au fond des mines, ce que je n'ai pas connu, mais j'ai connu quand j'étais médecin au chantier naval de la Seine, 10 heures par jour des hommes qui ne voyaient la lumière du jour que deux mois par an, et qui ne parlaient jamais. Donc le fait qu'il y ait un déterminisme biologique n'exclut pas le déterminisme culturel. Les femmes aujourd'hui, les jeunes mères, mettent au monde leur premier bébé, elles ont presque 32 ans. Elles se sont développées comme jamais dans la culture occidentale. C'est la première fois depuis que votre grand-père et votre grand-mère, qui sont les mêmes que moi, monsieur et madame Sapiens, il y a 300 000 ans, on avait les mêmes grands-parents. C'est la première fois depuis 300 000 ans que les femmes ont la possibilité... de se développer comme des personnes, et non pas simplement comme des annexes de mari ou des porteuses d'enfants. Depuis deux, trois générations seulement, elles deviennent des personnes, parce que la culture a changé, parce que l'école est devenue un lieu de formation importante où les filles se débrouillent très bien, et malgré ça, il n'y a jamais eu autant de dépression périnatale. Comment vous expliquez ça ? La solitude, ces jeunes femmes actives qui font des études, qui bougent, qui se débrouillent, qui s'épanouissent, tout d'un coup elles se retrouvent seules avec un tyran domestique adoré qu'elles appellent le bébé. Et elles sont prisonnières du bébé. Le fait de mettre au monde un bébé, aujourd'hui, a incroyablement changé de signification. Jusqu'à la découverte de Simmelweis, Prophylaxie d'accouchement, 1861, les femmes avaient une espérance de vie de 36 ans. Elles avaient 13 grossesses par vie de femme pour donner 4 adultes, parce que la mortalité enfantine était énorme et les femmes suivaient. Les hommes vivaient plus longtemps, mais ils mouraient entre 45 et 60 ans. Les plus vieux mouraient à 60 ans. Mais quand un homme mourra à 60 ans, il pouvait faire deux ou trois mariages sans divorcer, tellement les femmes mourraient jeunes. Donc les conditions d'existence étaient très dures, et aujourd'hui notre culture qui permet le développement des femmes et des hommes a pour effet secondaire la solitude, et les femmes dépriment de plus en plus. Donc c'est des questions éducatives, culturelles, l'entourage. Il faut qu'il y ait une famille, un foyer, un village autour des jeunes mères pour qu'elles ne soient pas seules. Et à ce moment-là, depuis que, après notre rapport, depuis que le congé paternité a été un petit peu augmenté mais pas assez, comparé au Danemark, à l'Espagne ou à d'autres pays où le congé paternité est... et le congé parental est très augmenté, la dépression périnatale n'existe pratiquement plus. Elle a disparu en un an. Elle a pratiquement disparu en un an. Donc on sait ce qu'il faut faire. Il faut entourer la niche sensorielle, la niche écologique d'une mère pour qu'elle soit sécurisée et le bébé se débrouillera.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai qu'en France, on a l'impression que les bébés font face à plusieurs crises. Il y a, comme vous le disiez, des pressions qui touchent beaucoup de mères. Alors maintenant, on parle aussi de la crise du système de garde. Qu'est-ce que vous pensez de cette situation ?

  • Speaker #1

    Alors ça, c'est un problème actuel. C'est qu'avant, il n'y a pas longtemps, il y a trois générations, il y a même en Italie, le divorce était interdit. Il y avait des couples très douloureux qui ne pouvaient pas. se séparer. Donc quand le divorce a été légal, ça a soulagé quelques familles, parce que quand les enfants se développent dans un conflit parental sur aiguille, ils ne se développent pas bien. Et quand, donc ça a été un progrès, et maintenant on est passé dans l'excès contraire, on prévoit que les jeunes couples aujourd'hui feront, dans leur aventure humaine, 4 ou 5 couples, 5 à 10 métiers différents. C'est-à-dire que c'est une instabilité affective très importante. Un cerveau ne peut être sculpté que s'il y a des moments de stabilité affective. Donc le divorce, la violence conjugale avant la parole, la séparation parentale avant la parole, schématiquement vingtième, on va dire troisième année, est une grave agression pour l'enfant. La séparation. parental parfois nécessaire. J'ai connu l'époque où, quand un homme était violent, et quand j'ai accompagné des femmes qui étaient obligées de s'enfuir avec leurs deux enfants parce que l'homme devenait pathologiquement violent, elles étaient condamnées pour abandon de domicile familial. La loi a changé, mais il n'y a pas longtemps que la loi a changé. Maintenant, c'est l'homme qui doit partir et qui doit, si possible, se faire soigner. Parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. La loi a changé, mais c'est récent ça. Donc ça veut dire que des lois, les structures familiales, qui étaient trop rigides il n'y a pas longtemps, deviennent trop labiles, trop instables maintenant. Il faudrait que les jeunes comprennent qu'il y a des périodes sensibles du développement des enfants où il faut, si on peut, faire l'effort de ne pas se séparer à la moindre occasion. Je le redis volontairement. parfois c'est nécessaire. J'ai eu des patients, des hommes paranoïaques, et là il fallait protéger la femme et les enfants. Ce que ne faisait pas notre ancien système légal. C'est les femmes qui étaient condamnées. Mais les femmes, ce n'est pas la première fois qu'elles sont victimes d'absurdités légales. C'est déjà arrivé. C'est en train de changer, mais le point faible de la culture de ceux qui ont 25 ans aujourd'hui, c'est on. peu peur.

  • Speaker #0

    Se stabiliser et stabiliser le développement d'un enfant, c'est-à-dire tisser le lien d'attachement si on se sépare tous les deux ans. Pour tisser le lien d'attachement sécurisant, il faut qu'il y ait au moins une stabilité affective pour qu'on puisse tisser le lien d'attachement. Et actuellement, on voit que les jeunes vivent dans des ruptures incessantes dont ils souffrent. et donc s'ouvrent les enfants.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que vous pensez en termes de sécurité affective pour les enfants, des modes de garde type les crèches ? Est-ce qu'elles permettent aujourd'hui de répondre aux sécurités affectives qui sont si nécessaires pour les bébés et qui sont souvent mis très jeunes dans ces structures ?

  • Speaker #0

    Alors si, sur le papier on sait ce qu'il faut faire, il faudrait augmenter tous les métiers de la petite enfance, assistantes maternelles, crèches, ce qu'ont fait les allemands qui culpabilisaient les mères il n'y a pas longtemps encore en disant si votre enfant se développe mal c'est parce que vous travaillez, vous n'êtes pas consacré à votre enfant donc les mères étaient culpabilisées, beaucoup y croyaient et ils ont renversé la politique éducative et maintenant ils ont développé des crèches comme savent le faire les allemands c'est à dire c'est impeccablement organisé c'est très rapide Et ils ont amélioré la formation des métiers de la petite enfance. Et les enfants, les bébés préverbaux, ont besoin d'un système familial à multiples attachements. Il faut qu'il y ait la mère, inévitablement, puisque c'est elle qui porte les enfants, et c'est elle qui marque les premières empreintes dans le cerveau et dans le psychisme du bébé en développement. Donc la mère, c'est la figure d'attachement primordiale. ça veut pas dire unique ça veut dire qu'il faut qu'ils aient une autre figure d'attachement de mon temps on dit que c'était le père maintenant ça peut être un autre homme ça peut être une grand mère qui joue le rôle du père ça peut être une autre femme qui joue le rôle du pain du père une femme qui joue le rôle du père vous avez bien entendu et les femmes homosexuelles se débrouillent très bien les enfants se débrouillent très bien peut-être Peut-être même mieux que les hétérosexuels. Mais actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de moins en moins de jeunes qui s'orientent vers les métiers de la petite enfance, qui sont fatigants et pas très bien payés. Ils n'ont pas la formation. qui pourrait les rendre intéressés par les métiers de la petite enfance. Je donne des formations, des instituts de petite enfance, on voit des dames qui adorent, qui adoraient ce métier, on voit des dames... qui sont à la retraite depuis très longtemps, qui viennent assister aux cours pour qu'on parle encore des bébés. Ça a enchanté leur vie. Et ça existe de moins en moins. Donc on voit qu'il y a de moins en moins de métiers de la petite âme. de moins en moins formés et aux états unis où n'importe qui garde n'importe quel enfant avec des enfants surnombre dans des espaces trop petit avec des gardiens sans formation les bébés deviennent inconsolables et violents des garçons plus que les filles il y avait les bébés garçons ne réagissent pas la frustration de la même manière que les bébés filles et comme je le disais tout à l'heure cette violence La violence des réactions des garçons est utilisée par toutes les cultures pour en faire des soldats, des guerriers, pour faire la guerre qu'on voit se développer. Et c'est ce qui explique que les bébés américains sursautent, ne sont pas consolables, pour un rien, ils ne contrôlent pas leurs émotions. Les filles contrôlent mieux leurs émotions. Elles ont plus d'émotions que les garçons, mais elles les contrôlent mieux que les garçons parce qu'elles chargent des câlins plus que les garçons. Et elles parlent plutôt. et mieux que les garçons. Donc elles ont des modes de régulation émotionnelle plus efficaces que les garçons. Et puis quand elles sont vieilles, quand elles sont grandes, quand un garçon leur casse les pieds, au lieu de réagir par la violence, elles téléphonent à la meilleure amie et elles descendent avec des mots le garçon qu'elles ne peuvent pas descendre avec leurs petits poings. Donc ça veut dire que les modes de défense ne sont pas les mêmes chez les garçons et chez les filles. Et ça pose le problème qu'on voit, C'est un garçon violent. font le vide autour d'eux à la crèche, personne ne les sécurise parce que c'est des gardiens d'enfants, ce ne sont pas des accueils éducatifs, ce sont des gardiennes d'enfants. Parfois, elles les mettent devant le mur pour qu'ils s'endorment. Elles mettent la chaise du bébé, elles leur donnent un biberon, et le bébé, il n'y a pas de stimulation, il s'endort. Ce n'est pas un accueil éducatif. Et on voit ces garçons-là à la crèche, ils battent. Ils tapent, ils mordent, ils s'isolent, les autres enfants les évitent. À l'école, ils n'ont pas de copains, ils ne parlent pas, ils s'isolent encore plus. Et quand arrivent les émotions intenses de l'adolescence, c'est un pays où tout le monde est armé, vous connaissez la suite. Ils rentrent dans le lycée, dans l'école, dans le lieu de leur humiliation, et ils tuent. On sait ce qu'il faut faire. Les américains ne le font pas, les danois le font bien, les espagnols le font de mieux en mieux, les québécois le font de mieux en mieux, et la violence des garçons diminue beaucoup. Parce que l'affectivité, la familiarité, c'est notre tranquillisant naturel. Quand on est en sécurité affective avec un copain, avec sa femme, avec son homme... on n'a pas besoin de tranquillisant. Notre culture détruit ces tranquillisants naturels à cause de l'instabilité affective des parents, à cause de l'instabilité sociale des jeunes qui ne font plus de métier. Le développement personnel est devenu une telle valeur qu'ils refusent de faire des métiers de sacrifice. Les femmes refusent de se laisser sacrifier. Ça fait partie de leur développement personnel. les hommes se laissent de moins en moins héroïsés, ce qui était une manière aussi de les mener au sacrifice, comme on le voit aujourd'hui dans les pays avec ce tragique retour de la guerre, où on recommence à sacrifier les hommes, mais on voit que de plus en plus de jeunes hommes ne se laissent plus héroïsés, et on voit que la désertion qui était la honte de la guerre de 40, un homme qui désertait perdait. l'estime de sa fiancée ou de sa mère c'est la honte de la famille aujourd'hui quand en ukraine ou en russie un homme déserte toute sa famille l'aide la culture a complètement changé et

  • Speaker #1

    ça me fait penser à une phrase que j'ai souillé dans votre livre vous dites pendant des millénaires les méthodes éducatives ont été d'une incroyable brutalité Mais comme vous le dites, cette violence n'a toujours malheureusement pas disparu. On le voit à travers certaines méthodes éducatives ou même, comme vous le disiez, avec le développement des guerres. Pourquoi est-ce que l'être humain, malgré toutes ses connaissances, reste autant dans la violence ?

  • Speaker #0

    Parce que l'être humain... a failli disparaître plusieurs fois. Quand il y avait des changements climatiques, des glaciations, les feuilles, les fruits disparaissaient, l'herbe, le petit gibier disparaissait. Et il y a au moins deux périodes où il y avait presque plus de squelettes humains sur la planète. L'espèce humaine n'était pas en voie de disparition, elle était pratiquement disparue. Et qu'est-ce qui fait qu'on n'a pas disparu ? L'invention des armes, des outils et la parole. L'invention des armes, le silex taillé, collé sur un pieu, emmanché sur un pieu, et des hommes beaucoup moins forts que des chevaux, beaucoup moins forts que des mammouths, beaucoup moins forts que la plupart des animaux, ont tué des animaux grâce à la caractéristique de la condition humaine, l'artifice de l'outil, l'artifice du verbe. On a plus. fabriqué du social, on a pu avec des mots, la violence des hommes a été encouragée pour tuer des animaux bien plus fort qu'eux. On a retrouvé un silex avec un pieu enfoncé dans le coeur d'un mammouth. C'est à dire qu'un petit homme, je ne sais pas combien de fois inférieur au mammouth, s'est glissé entre ses pattes. Et je pense que toute la famille, le clan, il n'y avait pas de famille mais il y avait des clans de 150 à 150 personnes, ils ont dû manger pendant plusieurs semaines. mettre la viande au froid et puis ils ont survécu grâce à la violence des hommes la violence a été une valeur adaptative la plupart des frontières sont le résultat de guerre les aristocrates se sont emparés grâce à la violence et ils ont fait des pays des nations S'il y a des cartographies de religion, il y a des zones musulmanes, des zones chrétiennes, c'est parce qu'il y a eu des guerres de religion. Si on parle français en France, c'est parce que la République française a interdit le patois, le breton, le basque et toutes les langues, et qui étaient gravement punis. Les enfants qui parlaient le basque ou le breton à l'école étaient humiliés et punis violemment. C'est la violence qui a fabriqué du social, notamment la violence des hommes, la violence physique des hommes. Et la violence des hommes et l'entrave des femmes. Les femmes, ce qu'on voit réapparaître dans les guerres aujourd'hui, ou la charte du Hamas, une femme participe à la guerre quand elle met au monde des fils. Quand elles leur apprennent la foi, et quand elles leur apprennent, de façon à ce qu'ils apprennent le métier des armes, pour tuer les juifs. C'est publié partout. Ça ne provoque pas d'indignation. La violence que je croyais combattue, qu'on a combattue. Pendant deux, trois générations, j'ai vraiment cru que ça ne reviendrait jamais. Et ce que je viens de dire, on prouve que ça revient. tout le pays.

  • Speaker #1

    Dans votre livre, vous invitez à proposer plusieurs récits aux enfants. Lesquels seraient-ils par exemple ?

  • Speaker #0

    Plusieurs récits ? Quand un enfant arrive à l'âge des récits, il a 5, 6, 7 ans, selon le développement de son système nerveux et selon les structures familiales. Il y a des familles où on parle beaucoup et on raconte. On est provençaux depuis le XVIIe siècle. Les enfants adorent ça. On est marins. depuis je ne sais pas combien de temps, on est musulman, on est chrétien, ça intéresse beaucoup les enfants. Mais si on présente un seul récit, il n'y a qu'un seul Dieu, c'est un langage totalitaire. C'est-à-dire que ça arrête l'empathie, il n'y a qu'un seul Dieu, le mien, les autres sont des mécréants, comme le disait les catholiques, qui méritent la mort. Les chrétiens qui ont été pas mal persécutés à cause du langage totalitaire sont devenus totalitaires aussi, l'inquisition, le colonialisme, et actuellement on voit que beaucoup de récits sont totalitaires, totalitaires religieux, totalitaires idéologiques, le communisme, le nazisme, totalitaires économiques. Il n'y a qu'une seule bonne économie, c'est celle de mon chef. Et quand il n'y a qu'un seul récit, on se retrouve prisonnier d'un langage totalitaire, totalement explicatif. Tous ceux qui ne croient pas comme moi, tous ceux qui ne croient pas comme moi, et qui ne pensent pas comme moi, méritent la mort. Ce qu'on voit réapparaître dans toutes les guerres qu'on nous raconte, ou auxquelles j'ai assisté, je suis stupéfait de voir à quel point on forme les enfants dans l'île de la mort. ignorance totale d'une autre religion, d'une autre culture, alors que le théâtre grec avait pour fonction justement de présenter les problèmes de la cité. Les comédiens devaient mettre en scène, jouer sur la scène, les problèmes de la cité et les citoyens devaient en débattre et ensuite y voter. C'était le point de départ, le théâtre a été le point de départ de la démocratie.... Les Espagnols avaient inventé les Disputaciones, c'est-à-dire la plus célèbre, c'est la Disputation de Valadolid, où avant la Disputation de Valadolid, on pensait que les Indiens n'étaient pas des êtres humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas la même couleur de peau que nous, c'est bien la preuve qu'ils ne sont pas humains. La preuve, c'est qu'ils n'ont pas les mêmes dieux que nous, ils adorent des sculptures en bois hideuses. C'est bien la preuve que ce n'est pas des êtres humains, disait-on. Il y a donc eu une disputation, et quand on pensait que ce n'était pas des êtres humains, on pouvait les tuer, ce n'était pas des êtres humains. Pas de culpabilité, on pouvait les atteler pour les faire travailler, on pouvait les dépecer quand ils étaient tués. Ce n'était pas des êtres humains, ce n'était pas un crime. Dès l'instant où la disputation de Valadolid leur a accordé une âme, Parce qu'ils ont éclaté de rire, parce que les prêtres se sont bagarrés entre eux, ils ont roulé par terre et tout le monde a éclaté de rire. Les indiens ont éclaté de rire. On avait la preuve que c'était les êtres humains, parce que le propre de l'homme, c'est le rire. Donc ils ont eu une âme de justesse. On ne pouvait plus les atteler, on ne pouvait plus les dépecer, si on les tuait, ça devenait un crime, puisqu'ils avaient une âme, il fallait les baptiser. Changement culturel à cause, grâce à une disparition de la culture. réputation démocratique. Actuellement, on voit que dans des écoles religieuses, religieuses sacrées ou religieuses profanes, ou religieuses économiques, je crois que le néolibéralisme Capitalisme, la loi du marché, c'est la seule loi valable. Il y a des gens qui soutiennent ça. C'est un langage totalitaire. On ne présente pas le monde de l'autre. Donc si les autres meurent, si les autres sont dans des carences humanitaires terrifiantes comme au Yémen actuellement, je n'en ai rien à faire. Je m'en fous éperdument. Je ne sais même pas qu'ils meurent. Je ne sais même pas qu'ils souffrent. C'est un arrêt total. de l'empathie à cause de la construction de récits totalitaires l'arrêt total de l'empathie c'est ce qui caractérise la perversion seul mon désir compte oui mais elle maintenant elle est malheureuse oui mais moi j'ai passé un bon quart d'heure oui mais elle regarde dans quel état elle est ah oui mais moi qu'est ce que je me suis marré Voilà des raisonnements pervers, sexuels, c'est des raisonnements de pervers sociaux, culturels, qu'on entend actuellement dans tous les conflits au Proche-Orient ou en Europe. Je suis frappé de voir à quel point les belligérants ignorent-on des malheurs de l'autre. Ils s'en foutent éperdument, ça ne les concerne pas. Ce sont des cultures qui sont devenues perverses à cause d'un langage totalitaire.

  • Speaker #1

    C'est tout de même assez anxiogène je trouve aujourd'hui de devenir parent dans notre société. Qu'est-ce que vous auriez à dire à tous les parents qui nous écoutent et qui souhaitent offrir à tous les bébés un bon départ dans l'existence ?

  • Speaker #0

    Ma réponse est claire. Faites un village. Dans un village, il y a la mère, puisque c'est elle qui porte les enfants, il y a son compagnon, sa compagne, il y a des copains, on peut confier le bébé à un accueil éducatif, à une école. Faites un village avec l'école du village. Si vous êtes croyante avec l'église, la mosquée, ça fait partie de la structuration, ça fait partie de la culture, la spiritualité fait partie de la condition humaine et la religion fait partie de la religion. provoque des dilutions familiales qui aggravent les 4 ou 5 couples des parents. Alors on se voit par Zoom pour l'anniversaire, pour Noël si on est chrétien, c'est pas une relation, c'est une communication, c'est pas une relation. Faites un village, si vous êtes malade, il y aura une autre femme, le jeune père avancé, actuellement découvrent la fatigue et le bonheur de s'occuper d'un bébé, c'est la première fois dans l'histoire des hommes que les hommes peuvent s'attacher à un bébé. Avant, ils étaient chefs de famille, mais ils n'étaient jamais dans leur famille. C'était les femmes. qui n'était pas chef de famille, qui faisait tout dans la famille. C'était encore une absurdité légale qui a duré depuis tout le temps, et qui a été votée en 1804. Le père était le représentant de Napoléon dans la famille. Mais il n'était jamais là. C'était une absurdité légale qui a organisé notre culture pendant deux siècles. Si vous voulez moins souffrir, si vous voulez éviter le burn-out des femmes, actuellement, elles veulent travailler, elles veulent mettre au monde 1,67 enfants, je ne sais pas comment elles font, elles veulent s'en occuper le mieux qu'elles peuvent, c'est pas possible. Il y a bien des moments où il faut qu'elles soufflent un peu. Si elles veulent tout faire tout le temps, elles courent au burn-out. Si on organise un village autour de la jeune mère, elle pourra partir un jour ou deux, elle pourra partir travailler, elle pourra partir en vacances. Il y aura toujours une structure autour du bébé et le bébé au contraire va en bénéficier. Parce qu'il apprendra un style affectif avec sa figure d'attachement primordiale, mais il apprendra qu'il y a une autre manière d'aimer avec une autre figure d'attachement, une autre manière d'aimer avec le métier de la petite. enfance avec le moniteur de sport avec le prêtre avec il y aura plein de manières d'aimer ça va ouvrir son esprit ça va ouvrir son empathie il ne sera pas il ne deviendra pas totalitaire j'ai une dernière question c'est la question rituelle du podcast comme

  • Speaker #1

    vous le savez il s'appelle les adultes de demain qu'est ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui les futurs adultes de demain alors je leur dirais fabriquer inventer

  • Speaker #0

    un village, on ne peut pas vivre seul. Quand on vit seul, vivre seul, c'est la mort psychique. Donc on est contraint à vivre avec les autres. Mais vivre avec les autres, c'est parfois l'enfer. Donc vous avez le choix entre la mort et l'enfer. Sauf si vous faites un village avec des copains, des professionnels, des prêtres, des musiciens, des sportifs. Et à ce moment-là, vous limiterez beaucoup la casse. Et d'ailleurs, tous les rapports que je suis en train de lire actuellement sur la psychiatrie de demain soulignent... l'importance de la psychoéducation. La mère n'est pas seule, la mère doit être entourée avec une stabilité suffisante quand c'est possible et à ce moment là elle sera heureuse et les enfants qu'elles mettront au monde seront heureux eux aussi. Voilà c'est facile.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Boris, à très bientôt. Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast. Ils laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général. Ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt. pour un nouvel épisode.

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