Comment l'art aide les jeunes à grandir et guérir ? Daphné Kauffmann - #198 cover
Comment l'art aide les jeunes à grandir et guérir ? Daphné Kauffmann - #198 cover
Les Adultes de Demain

Comment l'art aide les jeunes à grandir et guérir ? Daphné Kauffmann - #198

Comment l'art aide les jeunes à grandir et guérir ? Daphné Kauffmann - #198

33min |27/06/2024
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Description

Et si l’art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir ? Daphné Kauffmann connaît bien ce sujet, puisqu’après son métier d’enseignante, de journaliste mais aussi d’artiste, elle se consacre aujourd’hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif, à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l’art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d’une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu, les Ateliers 62, que j’admire tant.


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Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition.

  • Speaker #1

    Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #0

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup, il dit tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Descleves, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Et si l'art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir les enfants ? Daphne Kaufmann connaît bien ce sujet, puisqu'après son métier d'enseignante, de journaliste mais aussi d'artiste, elle se consacre aujourd'hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons évidemment parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l'art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d'une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu qu'est les Ateliers 62, que j'admire tant. Je vous souhaite une bonne écoute. Hello Daphné.

  • Speaker #0

    Salut Stéphanie.

  • Speaker #1

    Je te retrouve aujourd'hui dans les locaux de ton tiers lieu dédié à l'épanouissement des jeunes grâce à la pratique artistique. Il s'agit des Ateliers 62, on est exactement dans le 14e arrondissement de Paris. Et en plus de cette casquette d'entrepreneur, tu as été dans ta vie artiste, journaliste, romancière, formatrice et enseignante. Beaucoup de choses. Qu'est-ce qui t'a amené dans ton parcours de vie à t'intéresser au rapport des jeunes à l'art et à la culture ?

  • Speaker #0

    Déjà, je suis très heureuse de participer au podcast quand même, je le dis, parce que je suis une auditrice fervente. Donc, je suis très contente et très honorée. En fait, depuis, moi j'ai eu la chance très jeune d'avoir des parents. et surtout une maman qui attachait de l'importance aux pratiques artistiques en loisirs, je précise. Et donc depuis toute petite, c'était le sport, la danse, moi je fais beaucoup de danse. Et ensuite il est arrivé un âge où elle m'a dit, ma mère m'a dit, de quel instrument est-ce que tu aimerais jouer ? Donc elle ne m'a pas dit, est-ce que tu aimerais faire de la musique ? Elle m'a dit, quel est l'instrument que tu aimerais choisir ? Et on avait un piano à la maison, et moi je trouvais que le piano c'était trop facile, donc j'ai dit la guitare électrique. Je viens de le préciser. Alors, c'est important. Et en fait, pour ma mère, mais pour mon père aussi, toutes les activités extrascolaires étaient très importantes. En plus, je pense qu'ils ont dû remarquer que très tôt... J'aimais bien me mettre sur le vent de la scène, par exemple tous les spectacles, j'adorais ça. Donc ils ont entretenu ça. Mais c'était vraiment loisir. C'était pas quelque chose, c'était pas une voie professionnelle. Pas de bol, moi je voulais jouer de la guitare électrique pour être une rockstar. Ils ne le savaient pas encore. Mais tout ça pour dire que je baignais dedans. Et l'écriture aussi, très vite. Moi je lisais beaucoup depuis toute petite. Et en fait je me suis rendue compte que je me posais plein de questions. Et j'avais soit des réponses ou en tout cas je trouvais à travers les romans que je lisais les mêmes questionnements et c'était assez rassurant finalement. Donc voilà je baignais là-dedans et parfois quand j'étais au collège je pouvais me coucher à 2h du matin parce que je lisais, j'écoutais de la musique. Voilà tout ce qui était art et culture était très très présent depuis ma petite enfance. Les expos, je m'intéressais à toutes ces choses-là parce que je pense que depuis toute petite on m'a ouverte à ça et je pense que c'est essentiel.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui t'a rapprochée du sujet des jeunes et de l'éducation ?

  • Speaker #0

    Alors, je pense que... Parce que moi, j'ai fait des études de lettres et je voulais surtout pas être prof. Donc ça, c'est sûr. J'y suis venue de manière complètement... détournée, mais on m'a déjà posé cette question, donc j'y réfléchis entre temps, et en fait je pense que c'est parce que j'ai très bonne mémoire, mais j'ai vraiment une très très bonne mémoire de l'enfance c'est-à-dire par exemple je vois quand on en parle avec mon frère lui il ne se souvient de rien, et je me souviens très très bien de ma petite enfance, de mon enfance, et très bien de mon adolescence et donc je pense que finalement pour moi c'est pas si loin, ou en tout cas c'est dans un tiroir que je peux ouvrir facilement et donc quand j'ai commencé à quand j'ai enseigné au collège et que j'ai rencontré des jeunes, et en plus J'enseignais toujours dans le privé, dans des collèges un peu alternatifs, avec des pédagogies un peu différentes. Et donc tout de suite je me suis rendue compte que les questions qui se posaient, je me posais les mêmes, et que parfois ça peut être vraiment difficile. C'est-à-dire que, par exemple, tout bête, mais on se rend compte qu'on meurt, on se rend compte qu'il y a la guerre, que l'être humain n'est pas cool en fait, mais donc moi je ne suis pas cool non plus. Et toutes ces questions, moi je me rappelle quand j'étais ado, mais en pré-ado, très jeune, ça pouvait m'empêcher de dormir, j'étais angoissée. Et donc je les voyais, ces jeunes-là, et je me suis dit mais... Je peux déjà en parler avec eux, et je trouvais ça hyper intéressant parce qu'ils ont Internet, ils ont tout ce que moi je n'avais pas. Et à travers le dialogue, ça m'a vraiment intéressée. Il faut dire que je m'intéresse beaucoup aux gens. Puisque quand j'écris, j'observe beaucoup l'être humain me passionne, et comme ça je peux créer des personnages, mais les jeunes encore plus, parce qu'ils sont vraiment à un moment, c'est entre chien et loup, ils sont au moment vraiment où il ne suffit pas grand chose, ils sont sur un fil, et en fonction du vent, ça peut basculer d'un endroit à un autre, et nous, si on peut les aider, c'est top. Et il se trouve que... Je ne sais pas comment, alors ça c'est quelque chose que je dois avoir. J'arrive à leur parler et on arrive à avoir un lien de confiance assez facilement. Donc autant s'en servir.

  • Speaker #1

    Justement, tu as créé un lieu inédit dédié aux jeunes, les Ateliers 62. Est-ce que tu pourrais nous expliquer comment tu es arrivée à créer cette structure pas comme les autres ?

  • Speaker #0

    En fait, moi je viens de la musique et de l'écriture. Et comme je t'ai dit tout à l'heure, je voulais pas être une rockstar, j'étais sûre que j'allais être une rockstar, c'était mes convaincus. Donc là on a une de mes guitares derrière. Et donc j'ai fait beaucoup de chants, j'ai beaucoup tourné, etc. Et puis à un moment donné, ensuite j'étais journaliste, j'ai écrit des livres, et puis je suis arrivée progressivement à la formation de journaliste et ensuite à être prof. Et puis j'ai travaillé dans un collège privé où on m'a attribué énormément de tâches. Donc j'étais en même temps prof, en même temps responsable du collège, prof principale, j'avais des classes de première, des classes de terminale, j'étais responsable du parcours art-études, de l'option théâtre, bon bref, donc au bout d'un moment, pouf, ça a... Ou plutôt tu ! Donc au bout d'un moment, c'était vraiment surmenage, on va dire, je dis pas burn-out parce que je connais des gens qui sont en burn-out, je pense que c'était plus sévère que moi, mais voilà, surmenage, donc je vais voir mon médecin, et il me dit... Bon, vous ne touchez plus à vos mails, il faut faire uniquement des choses qui vous plaisent. Et tout de suite, je me suis dit, je vais me remettre à la musique, parce que j'avais arrêté, je n'avais plus le temps. Et donc, j'ai recommencé à jouer la guitare, à chanter, etc. Et au moment de retourner au boulot, au bout d'un mois, j'ai voyagé aussi, j'ai pris du recul. Je pense que j'avais repris le travail depuis un jour ou deux. Et là, je passe dans le 14e, sur le chemin du boulot, je passe devant la rue de la Tombissoire, au numéro 62. Il y avait une ancienne pizzeria à emporter. espèce de vieux boui-boui, et je vois Alloué sur la vitrine, avec un numéro de téléphone, et franchement, de manière presque inconsciente, j'appelle, je ne cherchais rien du tout, j'appelle, je tombe sur un agent immobilier très sympa, qui était dans le quartier, moi j'avais une heure de trou, comme on dit, et donc il me fait visiter ce local, il y avait deux salles, une salle sur rue, une salle à l'arrière, et puis une cave voûtée, et je ne sais pas, là tout de suite, c'est une espèce de vision, Tout de suite, je me suis dit, mais voilà, en fait, j'ai envie de créer un lieu pour proposer des cours de musique et des cours d'écriture. C'était vraiment les deux pratiques que je maîtrisais le mieux. Et j'ai appelé mon mari, je lui ai dit, je sais ce que je fais, le pauvre. Franchement, mais en même temps, il voulait que j'aille bien et que je fasse quelque chose qui me plaise. Et donc, à partir de là, j'ai commencé à imaginer le lieu. Donc, mon mari étant architecte. On a fait, donc ça c'était au mois de mai, on a fait les travaux l'été et tout de suite j'avais tout le projet en tête, c'est-à-dire autour de la musique et l'écriture. J'arrivais pas à trouver le dénominateur commun. Et en fait j'ai vu, c'est pour ça que c'est très important à travers le dialogue, quand on a un projet de dialoguer avec les gens, parce que j'ai parlé avec un ami dans la com, et je lui ai dit mais voilà moi j'aimerais monter des cours d'écriture créative, et en même temps de la guitare, et en même temps du chant, mais j'arrive pas à trouver, et lui me dit bah expression artistique. Ah ouais, c'est vrai, t'as raison. Et donc voilà, j'ai monté, il fallait que je trouve un nom très vite. Et donc je lui ai dit, on est au 72 rue de la Tombissoire, atelier c'est chouette, atelier 62. Et donc la rentrée, on a commencé à accueillir, on avait trois ou quatre jeunes au départ, qui étaient mes anciens élèves. Et puis petit à petit, et en discutant avec eux, on a fait écriture de scénario, et puis ensuite on s'est dit, on va pouvoir faire écriture narrative. Et puis ensuite, au début c'est moi qui enseignais le chant, il faut savoir, je ne suis pas du tout prof d'octobre. Maintenant on a une super prof de chant, Camille, qui est venue visiter les locaux Relat en Bissoire et qui m'a proposé d'être prof. Mais c'est parti de rien en fait, c'est curieux. Mais je pense que… Très souvent, en fait, on ne se rend pas compte du cheminement que les idées font à l'intérieur de notre esprit et tout se construit en fait. Et ensuite, quand on est devant la feuille blanche, il ne suffit pas grand-chose, c'est un petit déclencheur et ça sort.

  • Speaker #1

    L'une des particularités de ton lieu, c'est que tu accueilles beaucoup de jeunes en phobie scolaire. Pourquoi est-ce que tu penses que l'expression artistique peut sauver ces jeunes-là ?

  • Speaker #0

    Alors je pense que c'est essentiel et pareil, j'ai moi-même des souvenirs de moments où j'allais pas très bien. J'avais la chance entre guillemets de ne pas avoir internet ni les réseaux sociaux. Mais c'est très important parce que déjà on se rend compte que d'autres ont exprimé des choses, des pensées, des mal-être. Alors moi je lisais énormément de poésie. Et donc évidemment, quand on lit les poèmes de Rimbaud, voilà, 17 ans, on se dit Waouh, lui, il avait déjà tout ça en tête, donc finalement, moi, ça va pas si mal, en fait. Mais à travers des personnages de romans, voilà, on se dit... je pense, c'est idiot, mais je pense aux Grands Maulnes, des romans comme ça qui m'ont marquée quand j'étais ado, et qui posent des questions, qui n'apportent pas de réponses, mais qui posent des questions, au journal d'Anne Frank par exemple. Et donc on n'est pas tout seul, on se dit voilà, il y a plein de gens intelligents qui se sont posés les mêmes questions. Donc d'une part, je pense que la lecture, l'écriture, très tôt, moi je rédigeais un journal, c'est hyper salutaire de pouvoir mettre par écrit, et puis même d'écouter de la musique, de jouer de la musique, et puis de... Quand on ne va pas bien, on prend sa guitare et puis tout d'un coup, on ne pense à rien. Et ça, c'est vraiment génial. Hop là, on éteint le cerveau. Récemment encore, j'ai encore fait cette expérience d'aller à une expo, ce que je devrais faire plus souvent. Mais tout d'un coup, on est, moi qui viens du son, on vit vraiment l'expérience d'une exposition visuelle. Et pareil, on a le cerveau qui est complètement... On remet le compteur à zéro. Et moi je m'en suis rendue compte assez jeune de ça, de cette chance. Et je pense que pour les jeunes, c'est très très important de pouvoir faire le vide. de pouvoir avoir un moment où ils se posent, parce que là, actuellement, leur cerveau est sans cesse sollicité tout le temps, tout le temps, tout le temps, et de pouvoir avoir des moments de rien qui sont comblés par exprimer ce qu'ils ont en eux, se rendre compte qu'ils ne sont pas seuls. Moi, je privilégie énormément, et ici, aux Ateliers 62, c'est vraiment partie de notre ADN, la rencontre. C'est-à-dire que c'est chouette de faire de la musique à la maison, d'écrire à la maison, de dessiner à la maison, mais quand on est ensemble, on se rend compte qu'on n'est pas tout seul, on en parle, on échange sur ces pratiques, et de là, on se rend compte qu'on a les mêmes questionnements, qu'on a les mêmes peurs. Et je pense que c'est très très important, il faut que tout ça sorte, il faut exprimer tout ça, et ça peut vraiment devenir une aide. Et en ce qui concerne les élèves... en refus anxieux ou en phobie scolaire ou en décrochage ou en raccrochage plutôt, c'est important parce qu'ils sont isolés chez eux, avec leur téléphone souvent. Et en fait, il y a un moment où, pour plusieurs raisons, ils ne peuvent plus aller à l'école. Moi, je parle plus d'allergie, en fait. C'est-à-dire que c'est comme un... Alors moi, je suis sujette au vertige et je sais qu'à un moment donné, si j'ai une crise de vertige, il n'y a rien à faire. Et quand on me voit, on a vraiment l'impression que je deviens folle. C'est-à-dire que je commence à trembler partout, à pleurer. Et en plus, après, on a vraiment la haine. C'est-à-dire qu'ensuite, il faut s'isoler parce que ça nous énerve d'être comme ça. Et j'établis un peu ce parallèle. J'en ai beaucoup parlé aux jeunes. Et ils m'expliquent que pour X raisons, ils n'ont plus envie d'y aller. Et puis, le lendemain, toujours pas. Et à un moment donné, les parents insistent. Et pour expliquer aux parents que vraiment ce n'est pas possible, ils n'ont pas d'autres moyens que de faire des crises. Ça peut devenir très très violent. Et souvent, ce n'est pas forcément les parents, mais c'est souvent interprété comme de l'hyper-anxiété, de l'agressivité, de la violence. Ensuite on les emmène voir le psy ou voir le psychiatre. Et puis ensuite, malheureusement, parfois, ils entrent en milieu hospitalier et ils deviennent phobiques. Et donc ça devient une maladie. Et moi je trouve que ce qu'on propose ici, ce que j'aimerais, c'est que ces jeunes puissent venir avant. C'est-à-dire au moment où ils n'ont plus envie d'aller en classe, qu'est-ce qu'ils ont d'autre comme choix à part rester seul à la maison, ce qui n'est pas top, aller à l'école, mais ça ce n'est pas possible. sortir, mais ils ne vont pas aller dans les cafés, ce sont des jeunes, ils sont mineurs, donc nous ce qu'on leur propose, c'est déjà de venir aux ateliers, juste venir, ils prennent un café, ils prennent un chocolat, ils sont entre eux, ils sont très peu nombreux, on discute, moi je suis toujours là, et puis ensuite, l'après-midi, on leur propose, on leur dit, nous on a des ateliers du chant, de l'écriture créative, art plastique, théâtre, si tu as envie, Et si tu as envie de rencontrer d'autres jeunes à un moment donné, tu peux t'inscrire et venir. Et parfois, ils vont venir au bout d'une semaine, parfois un mois, deux mois, parfois un an. Mais ce qui est important, c'est juste de semer la petite graine et de dire, nous on est là, et un jour, si tu veux, si tu n'as pas envie d'aller voir ton psy, ton médecin, et encore moins ton prof, il y a d'autres jeunes, et tu peux venir et tu discutes, et en plus, c'est beau. Et ça, c'est important. Ce n'est pas un endroit tout poussiéreux. Et pour eux... Déjà quand ils entrent, moi je sais que le jour de l'inauguration, j'ai vu des élèves, je sais qu'ils sont en phobie scolaire, et de se rendre compte qu'on a fait tout ça pour eux, finalement, déjà ça les touche. Ils ont envie de revenir et ils s'ouvrent peu à peu. Et c'est super important.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais un exemple d'élève qui serait venu après une phobie scolaire et qui s'en serait sorti grâce à cette expérience artistique ?

  • Speaker #0

    Heureusement, et on est super fiers, j'en ai plein, mais vraiment plein. Et c'est le genre d'anecdotes, j'y pense régulièrement, c'est génial, je pense le matin, je suis là, mais... Et je ne me dis pas du tout, je n'en tire aucune gloire. Je suis fière parce que juste, voilà, je suis fière d'eux, mais... Il y en a plein, plein, plein. Et je ne sais pas, par exemple, je pense à une jeune fille qui est venue quand on était rue de la Tombissoire, qui était complètement... Elle était vraiment, j'ai coutume de dire cabossée par l'éducation nationale, enfin par un système qui ne lui convenait pas, mais franchement, elle était presque fracassée. C'est-à-dire qu'elle était en souffrance physique, vraiment, et toute recroquevillée sur elle-même. Et je me souviens, en plus, elle avait un look très prononcé, un peu gothique, avec du maquillage pas possible. Et elle essaie d'intégrer une école privée et on lui avait dit non à cause de son look. Déjà, ça je m'en rappelle, ça m'avait marqué. Et pourtant, une école qui est un peu à pédagogie alternative, ils avaient dit non, elle va faire peur aux autres. Déjà, ok. Et donc elle vient. Et elle a commencé tout doucement. Au début, c'était l'écriture créative, parce que en général, ça marche assez bien. Et donc, elle écrivait ce qu'elle ressentait. Et puis ensuite, elle a fait du chant, elle a fait de la guitare. Et petit à petit, je l'ai vue... C'est génial de les voir s'ouvrir, grandir. Et donc maintenant, elle fait des études de psycho. Et maintenant, elle fait de l'orfèvrerie. On en a une autre qui est arrivée en terminale et qui n'allait pas bien du tout, qui était ultra stressée, sous pression, par le lycée, par cours sup, le bac. Elle a lâché l'affaire et maintenant elle a un sourire et elle chante divinement bien. Elle vient d'être prise dans une école de comédie musicale. Mais surtout, de les voir sourire, il suffit parfois d'un mois. C'est ça qui est dingue. On en a plein plein plein, beaucoup de jeunes filles, c'est vrai, mais ce que j'aimerais dire surtout, c'est que je me rends compte que nous ce qu'on leur propose finalement, c'est un lieu. une sorte de terreau fertile où ils peuvent pousser. Parce qu'après, en fait, ils grandissent. Et souvent, c'est à un moment donné, on oublie... C'est pour ça que c'est très délicat de dire Tu es phobique parce que ça leur met une étiquette, T'es malade Ils ne sont pas phobiques, je pense. Ils traversent l'adolescence, ils se posent des questions, ils se rendent compte que le système scolaire n'a aucun sens. Et on ne peut pas leur jeter la pierre, parce que franchement, quand on y pense, parfois, la manière dont... En tout cas, dont... dont c'est fait ici en France, il y a vraiment un problème de sens. Et puis ensuite, ils se rendent compte que le monde a plein d'autres choses à leur apporter, qu'à travers la rencontre, l'échange, ils peuvent apprendre plein de choses. Et en fait, juste, ils grandissent. Et nous, tout ce qu'on fait, c'est qu'on leur propose un espace à l'abri où ils peuvent grandir et s'épanouir. Et finalement, on ne fait pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu penses que l'art, la culture, toutes ces formes de créativité sont faites pour tous les jeunes ?

  • Speaker #0

    Oui, à 200%, je suis sûre. Faites, en tout cas, ça peut les aider, ça peut les intéresser. Alors après, parfois on se rend compte depuis tout petit qu'ils ont une appétence pour tel ou tel instrument, ou pour le dessin, mais je suis convaincue qu'il n'y a même pas besoin de savoir. Par exemple, je parlais du dessin ou de l'écriture, il y a des jeunes qui pensent qu'ils ne savent pas dessiner. L'écriture je leur dis mais tu écris, ils me disent ah non mais de toute façon je suis nulle en français, je dis non mais je ne parle pas du français, je parle de l'écriture. Et parfois ne pas savoir dessiner, ne pas être bon en français, au contraire ça leur permet de s'exprimer de manière plus libre. Moi je sais qu'encore maintenant parfois je participe à des ateliers d'écriture, c'est très très difficile d'essayer de ne pas bien faire. Et je dessine, moi je peux te dessiner... C'est pas une chaise, je peux très bien dessiner une chaise, mais par contre si tu me demandes d'exprimer quelque chose à travers le dessin, alors là c'est catastrophique. Et donc parfois ceux qui ne maîtrisent pas, au contraire, c'est ceux qui arrivent à exprimer. Et ensuite quand on regarde ce qu'ils font, il y en a, ils font un trait et waouh, ils ont mis toutes leurs émotions, toutes leurs identités dans ce trait. Et je pense que les pratiques artistiques sont vraiment faites pour tous, mais d'ailleurs jeunes ou moins jeunes. Et en tout cas... ça peut les aider. Parce qu'ils sortent quelque chose qu'ils ont en eux. Il ne faut pas que ça reste à l'intérieur, parce que sinon ça te bouffe de l'intérieur.

  • Speaker #1

    Toi qui connais bien cet enseignement de l'art, qu'est-ce que tu penses aujourd'hui de la manière dont il est enseigné à l'école ?

  • Speaker #0

    Je préfère en rire. Franchement, il y a des moments dans la vie où on se dit, est-ce que je vais rire ou est-ce que je vais pleurer ? Là, aujourd'hui, je suis en forme, je suis avec toi, je suis contente. Franchement, non mais j'en ris parce que là, il y a une image qui me vient à l'esprit de... Je ne sais plus comment il s'appelait mon prof de musique quand j'étais au collège. Et nous, on avait la flûte à bec. Alors la flûte à bec, franchement, c'est une torture pour les élèves, je pense pour les profs, pour les parents, parce que quand on doit répéter la flûte à bec, non mais franchement, la flûte à bec, résumer la musique à la flûte à bec au cours de musique à l'école, c'est pas possible. Mais bon, indépendamment de ce traumatisme que je peux avoir avec la flûte à bec, je pense que déjà une heure comme ça dans un cadre scolaire, c'est mieux que rien. mais je pense que ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant. Alors, une heure, c'est mieux que rien, mais surtout dans le cadre scolaire, dans la salle de classe. Moi, je pense que ce n'est pas la bonne idée. C'est-à-dire qu'il faut sortir les pratiques artistiques de la salle de classe. Les jeunes ici, là, on est actuellement dans un studio de musique. Ils sont fous quand ils arrivent dans un studio avec des instruments, où ils peuvent chanter super fort. Dans la salle de classe, déjà, le chant, c'est compliqué. Pareil pour ce qui est des arts visuels. Il faut qu'il y ait un vrai atelier. Alors moi j'ai eu la chance, quand j'allais à l'école, il y avait un atelier, il y avait un laboratoire de musique. Mais le plus important, je trouve, c'est... Et j'ai une amie que je vais citer, Anne Bordorieux, qui est devenue amie, qui a créé un collège qui s'appelle le Collège Prévédiago, qui a tout compris, parce que les collégiens ne font pas de musique, ils ne font pas d'art plastique, mais ils le font, ils ont deux heures et demie l'après-midi dédié à ces pratiques. Et la première chose que je trouve dingue, c'est la note. Ils vont être notés en musique, ils vont être notés en dessin sur une heure, où ils ont dû dessiner un truc. Déjà, moi je suis contre la note et ces formes d'évaluation que je trouve pas du tout adaptées, mais c'est absurde de mettre une note sur 10, sur 20, sur un dessin, sur... Enfin, je sais pas, moi j'aimerais voir les critères d'évaluation, parce qu'il y en a en plus. Mais ça colle pas, c'est pas possible. en fait, il ne devrait pas y avoir de notes, il devrait y avoir juste des encouragements. Ok, bah oui, t'as réussi aujourd'hui, t'as réussi à chanter devant tes camarades. Waouh, bah là t'as 20 sur 20, quoi. Tout de suite. Donc c'est bien, c'est bien de proposer des enseignements artistiques, mais je pense que ça devrait être fait différemment. Mais je pense que beaucoup de choses devraient être faites différemment à l'école.

  • Speaker #1

    Ça c'est sûr. Alors toi, tu connais bien un parcours... qui est pourtant assez méconnu, je trouve, c'est le parcours art-études. Alors, on connaît beaucoup en France le parcours sport-études. Comment se fait-il que le parcours art-études soit moins connu ? Est-ce que tu connais la proportion d'élèves qui le suivent en France ? Enfin, je suppose que le chiffre est difficile à trouver, mais est-ce que c'est quelque chose qui est beaucoup proposé aux élèves ? Et toi, quelle est ton expérience de cette formule différente de la scolarité en France ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, moi j'ai eu la chance de travailler pour un établissement qui m'a proposé de développer justement le parcours art-études. Il proposait le fameux parcours sport-études et on m'a demandé par rapport à ce que j'avais fait, mon parcours, est-ce que tu peux développer ça ? Donc je l'ai fait avec mon bon sens, j'avais de la chance, c'était un établissement privé, donc assez ouvert. Alors en fait, c'est un rythme scolaire qui va s'adapter. à une pratique assidue du sport ou une pratique assidue des arts, entre guillemets. Donc ça peut être les arts visuels, ça peut être la musique, le théâtre. Alors ça, c'est proposé au collège, puisqu'il y a les chams, chades. Donc au collège, il peut y avoir des jeunes qui ont des horaires aménagés, qui leur permettent de faire plus de théâtre, plus de musique. Et ça, c'est super. Et ça, dans plein de collèges publics, il y a ces parcours-là. Le problème, c'est qu'après, au lycée, Il y en a beaucoup moins. Il y a quelques lycées à horaires aménagés, pareil. Et ces lycées-là, en tout cas, sont beaucoup plus orientés sport-études. Alors, ma réponse au fait qu'on connaisse mieux le sport-études que l'art-études, c'est que les horaires aménagés pour les sportifs, c'est souvent pour les sportifs de haut niveau. C'est-à-dire que ce sont un peu les athlètes de demain. Et donc, ils vont un peu faire rayonner la France, rayonner l'établissement aussi. Donc forcément, on va les pousser à... Voilà, on a un joueur de tennis qui est très prometteur. On va lui permettre de... Je suis hyper cynique, parce que je suis en forme aujourd'hui. Mais ce que je veux dire par là, c'est que, en ce qui concerne les pratiques artistiques, ce n'est pas du tout le même... le même schéma parce qu'on peut avoir un artiste de haut niveau, mais qu'est-ce que ça veut dire en fait ? Ça ne veut pas dire grand-chose. Et en plus de ça, je pense que le art-étude devrait permettre au contraire à chacun de pouvoir s'exprimer. Et puis essayer parfois des pratiques artistiques et essayer d'en faire beaucoup. C'est-à-dire que par exemple on a des jeunes, ils ont envie comme moi à leur âge, ils disent moi je vais être une rockstar, ça va être mon métier. Ok, va faire 8 heures de musique comme ça tous les après-midi. On va voir si vraiment... Alors que le sport c'est autre chose. Le sport c'est vraiment ta voix. Il y a aussi les élèves qui sont en sport études. Je pense au départ déjà, ils sont plus disciplinés, ils sont plus cadrés, donc c'est plus facile entre guillemets. Les élèves artistes, le cadre, franchement, c'est pas la même chose. Donc c'est beaucoup plus compliqué pour l'école de gérer entre guillemets, enfin en tout cas de pouvoir leur permettre d'avoir une scolarité adaptée. Donc je pense que c'est pour ça qu'il y en a moins.

  • Speaker #1

    Pour conclure un peu tout ce que tu viens de dire, est-ce que tu pourrais... Nous résumer pourquoi selon toi l'art et la culture sont essentiels dans le quotidien des enfants et des jeunes ?

  • Speaker #0

    Alors l'art et la culture sont essentiels parce que ça apporte une ouverture. ça permet de nourrir sa curiosité. Tous les enfants sont curieux. Tous, tous. Mais il faut juste les stimuler. C'est-à-dire que même un petit enfant, et moi je ne suis pas une spécialiste de la petite enfance, mais je vois, j'observe, si on met un enfant toute la journée assis sur sa chaise bébé face à un mur, il ne fera rien. Mais il faut les stimuler et les occuper. Et par l'art et la culture, on nourrit cette curiosité. Et en plus de ça, on leur permet d'avoir quand même une base qui va leur servir toute leur vie. Moi, je sais que j'ai cette chance inouïe d'avoir une mère qui était archéologue. Et donc, il me traînait dans les musées. Et parfois, je n'avais pas envie d'y aller. J'en avais pas le bol. Surtout les musées d'art et traditions populaires. partout où on allait, on devait se taper le musée d'art et de tradition populaire, avec les costumes et tout, de chaque village. Il n'empêche que, parfois, il faut un petit peu forcer, et après, ça reste. Et après, ça permet d'avoir des références, d'avoir la ref, comme ils disent. Mais, par exemple, la lecture, la mythologie grecque, la mythologie romaine, l'ancienne Égypte, la Bible, tout ça, ce sont des histoires. qu'on peut comprendre et ensuite ça nous permet dans nos études de nous construire notre propre culture. C'est hyper important. Et le fait de pratiquer en plus, ça booste la confiance. C'est l'essentiel la confiance. Et je rajouterais aussi qu'il y a une chose, on ne met pas assez l'accent sur le travail collectif. C'est-à-dire que moi je pense que... Oui, l'art et la culture, c'est aller voir des expos, pratiquer la musique, tout ça c'est essentiel, mais le faire ensemble, c'est hyper important. En musique, comprendre qu'on fait partie d'un tout. C'est une leçon de vie, je pense. C'est-à-dire que faire partie d'un orchestre ou d'un groupe de musique, c'est génial parce qu'on se rend compte que si on ne fait pas sa note au moment voulu, tout se casse la figure. Et ça, c'est hyper important au niveau des valeurs fondamentales. C'est-à-dire que dans la vie active, ensuite on fait partie d'une entreprise, d'un groupe de travail, d'une association. Et c'est hyper valorisant de se dire, Moi, si je n'apporte pas ma petite pierre à l'édifice, ça ne va pas marcher. Et là, c'est le travail collectif, le vivre ensemble, la co-responsabilité. Ce sont des valeurs essentielles et l'entraide. Et je pense que par les pratiques artistiques, on peut comprendre ça très très tôt. Parce qu'il n'y a pas besoin des mots. Moi j'ai le souvenir, quand j'étais... je pense que c'était dernière année de maternelle, j'ai une bonne mémoire, et on a construit une mosaïque dans toute la classe, tous ensemble, on avait nos petits carrés là, on avait chacun des couleurs, et c'est génial de le faire ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aimerais rajouter quelque chose sur les ateliers 62 avant qu'on se quitte ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que je suis en plein dans ce chantier, en fait on a une... On a un nouveau programme qu'on ouvre dès maintenant, mais surtout à partir de septembre, qui est destiné aux jeunes après le bac. On propose une année de césure, fort de cette expérience auprès des jeunes. En discutant avec eux, on a monté ensemble une année de césure qui est créative et artistique, pour nourrir la curiosité, pour surtout faire une pause, arrêter la pression. C'est un programme qui n'a pas de notes, qui n'a pas d'évaluation. et qui propose des ateliers de géopolitique, philo, de questions d'environnement, le matin et des pratiques artistiques l'après-midi, pour un petit peu penser à autre chose et permettre de mieux se connaître et faire des choix qui nous ressemblent. Donc voilà, on a appelé ça le PIC, le programme interculturel et créatif. Et on lance, c'est pas du tout la pub, mais c'est parce que c'est chouette, c'est vraiment bien. Et ce qui est intéressant... Pour terminer, c'est que sur l'année de césure, j'ai interrogé les jeunes. La première chose, quand je leur ai dit qu'est-ce qui vous semble vraiment important ? ils m'ont tous dit un emploi du temps Donc c'est intéressant parce que l'année de césure, c'est génial, le projet, c'est génial, mais il faut qu'il y ait un cadre. Et nous, on l'a vraiment construit avec eux. Donc pour en savoir plus... Il faut venir nous voir.

  • Speaker #1

    Je partagerai évidemment tous les liens. Alors, tu la connais, la dernière question. Tu sais que le podcast s'appelle Les Adules de Demain. Qu'est-ce que tu souhaiterais aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Je leur souhaite d'être dans l'action, surtout. Et de faire tous d'être acteurs de leur vie. de vivre et non pas d'exister. Voilà. Qu'ils soient dans la vie et pas dans l'existence. C'est-à-dire qu'ils fassent des choses. Parce qu'il faut faire. C'est très très important. Il ne faut pas faire bien, il faut faire. Et je leur souhaite d'être vraiment acteurs de leur propre vie.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Daphné.

  • Speaker #0

    Merci à toi.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

Et si l’art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir ? Daphné Kauffmann connaît bien ce sujet, puisqu’après son métier d’enseignante, de journaliste mais aussi d’artiste, elle se consacre aujourd’hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif, à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l’art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d’une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu, les Ateliers 62, que j’admire tant.


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Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition.

  • Speaker #1

    Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #0

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup, il dit tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Descleves, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Et si l'art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir les enfants ? Daphne Kaufmann connaît bien ce sujet, puisqu'après son métier d'enseignante, de journaliste mais aussi d'artiste, elle se consacre aujourd'hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons évidemment parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l'art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d'une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu qu'est les Ateliers 62, que j'admire tant. Je vous souhaite une bonne écoute. Hello Daphné.

  • Speaker #0

    Salut Stéphanie.

  • Speaker #1

    Je te retrouve aujourd'hui dans les locaux de ton tiers lieu dédié à l'épanouissement des jeunes grâce à la pratique artistique. Il s'agit des Ateliers 62, on est exactement dans le 14e arrondissement de Paris. Et en plus de cette casquette d'entrepreneur, tu as été dans ta vie artiste, journaliste, romancière, formatrice et enseignante. Beaucoup de choses. Qu'est-ce qui t'a amené dans ton parcours de vie à t'intéresser au rapport des jeunes à l'art et à la culture ?

  • Speaker #0

    Déjà, je suis très heureuse de participer au podcast quand même, je le dis, parce que je suis une auditrice fervente. Donc, je suis très contente et très honorée. En fait, depuis, moi j'ai eu la chance très jeune d'avoir des parents. et surtout une maman qui attachait de l'importance aux pratiques artistiques en loisirs, je précise. Et donc depuis toute petite, c'était le sport, la danse, moi je fais beaucoup de danse. Et ensuite il est arrivé un âge où elle m'a dit, ma mère m'a dit, de quel instrument est-ce que tu aimerais jouer ? Donc elle ne m'a pas dit, est-ce que tu aimerais faire de la musique ? Elle m'a dit, quel est l'instrument que tu aimerais choisir ? Et on avait un piano à la maison, et moi je trouvais que le piano c'était trop facile, donc j'ai dit la guitare électrique. Je viens de le préciser. Alors, c'est important. Et en fait, pour ma mère, mais pour mon père aussi, toutes les activités extrascolaires étaient très importantes. En plus, je pense qu'ils ont dû remarquer que très tôt... J'aimais bien me mettre sur le vent de la scène, par exemple tous les spectacles, j'adorais ça. Donc ils ont entretenu ça. Mais c'était vraiment loisir. C'était pas quelque chose, c'était pas une voie professionnelle. Pas de bol, moi je voulais jouer de la guitare électrique pour être une rockstar. Ils ne le savaient pas encore. Mais tout ça pour dire que je baignais dedans. Et l'écriture aussi, très vite. Moi je lisais beaucoup depuis toute petite. Et en fait je me suis rendue compte que je me posais plein de questions. Et j'avais soit des réponses ou en tout cas je trouvais à travers les romans que je lisais les mêmes questionnements et c'était assez rassurant finalement. Donc voilà je baignais là-dedans et parfois quand j'étais au collège je pouvais me coucher à 2h du matin parce que je lisais, j'écoutais de la musique. Voilà tout ce qui était art et culture était très très présent depuis ma petite enfance. Les expos, je m'intéressais à toutes ces choses-là parce que je pense que depuis toute petite on m'a ouverte à ça et je pense que c'est essentiel.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui t'a rapprochée du sujet des jeunes et de l'éducation ?

  • Speaker #0

    Alors, je pense que... Parce que moi, j'ai fait des études de lettres et je voulais surtout pas être prof. Donc ça, c'est sûr. J'y suis venue de manière complètement... détournée, mais on m'a déjà posé cette question, donc j'y réfléchis entre temps, et en fait je pense que c'est parce que j'ai très bonne mémoire, mais j'ai vraiment une très très bonne mémoire de l'enfance c'est-à-dire par exemple je vois quand on en parle avec mon frère lui il ne se souvient de rien, et je me souviens très très bien de ma petite enfance, de mon enfance, et très bien de mon adolescence et donc je pense que finalement pour moi c'est pas si loin, ou en tout cas c'est dans un tiroir que je peux ouvrir facilement et donc quand j'ai commencé à quand j'ai enseigné au collège et que j'ai rencontré des jeunes, et en plus J'enseignais toujours dans le privé, dans des collèges un peu alternatifs, avec des pédagogies un peu différentes. Et donc tout de suite je me suis rendue compte que les questions qui se posaient, je me posais les mêmes, et que parfois ça peut être vraiment difficile. C'est-à-dire que, par exemple, tout bête, mais on se rend compte qu'on meurt, on se rend compte qu'il y a la guerre, que l'être humain n'est pas cool en fait, mais donc moi je ne suis pas cool non plus. Et toutes ces questions, moi je me rappelle quand j'étais ado, mais en pré-ado, très jeune, ça pouvait m'empêcher de dormir, j'étais angoissée. Et donc je les voyais, ces jeunes-là, et je me suis dit mais... Je peux déjà en parler avec eux, et je trouvais ça hyper intéressant parce qu'ils ont Internet, ils ont tout ce que moi je n'avais pas. Et à travers le dialogue, ça m'a vraiment intéressée. Il faut dire que je m'intéresse beaucoup aux gens. Puisque quand j'écris, j'observe beaucoup l'être humain me passionne, et comme ça je peux créer des personnages, mais les jeunes encore plus, parce qu'ils sont vraiment à un moment, c'est entre chien et loup, ils sont au moment vraiment où il ne suffit pas grand chose, ils sont sur un fil, et en fonction du vent, ça peut basculer d'un endroit à un autre, et nous, si on peut les aider, c'est top. Et il se trouve que... Je ne sais pas comment, alors ça c'est quelque chose que je dois avoir. J'arrive à leur parler et on arrive à avoir un lien de confiance assez facilement. Donc autant s'en servir.

  • Speaker #1

    Justement, tu as créé un lieu inédit dédié aux jeunes, les Ateliers 62. Est-ce que tu pourrais nous expliquer comment tu es arrivée à créer cette structure pas comme les autres ?

  • Speaker #0

    En fait, moi je viens de la musique et de l'écriture. Et comme je t'ai dit tout à l'heure, je voulais pas être une rockstar, j'étais sûre que j'allais être une rockstar, c'était mes convaincus. Donc là on a une de mes guitares derrière. Et donc j'ai fait beaucoup de chants, j'ai beaucoup tourné, etc. Et puis à un moment donné, ensuite j'étais journaliste, j'ai écrit des livres, et puis je suis arrivée progressivement à la formation de journaliste et ensuite à être prof. Et puis j'ai travaillé dans un collège privé où on m'a attribué énormément de tâches. Donc j'étais en même temps prof, en même temps responsable du collège, prof principale, j'avais des classes de première, des classes de terminale, j'étais responsable du parcours art-études, de l'option théâtre, bon bref, donc au bout d'un moment, pouf, ça a... Ou plutôt tu ! Donc au bout d'un moment, c'était vraiment surmenage, on va dire, je dis pas burn-out parce que je connais des gens qui sont en burn-out, je pense que c'était plus sévère que moi, mais voilà, surmenage, donc je vais voir mon médecin, et il me dit... Bon, vous ne touchez plus à vos mails, il faut faire uniquement des choses qui vous plaisent. Et tout de suite, je me suis dit, je vais me remettre à la musique, parce que j'avais arrêté, je n'avais plus le temps. Et donc, j'ai recommencé à jouer la guitare, à chanter, etc. Et au moment de retourner au boulot, au bout d'un mois, j'ai voyagé aussi, j'ai pris du recul. Je pense que j'avais repris le travail depuis un jour ou deux. Et là, je passe dans le 14e, sur le chemin du boulot, je passe devant la rue de la Tombissoire, au numéro 62. Il y avait une ancienne pizzeria à emporter. espèce de vieux boui-boui, et je vois Alloué sur la vitrine, avec un numéro de téléphone, et franchement, de manière presque inconsciente, j'appelle, je ne cherchais rien du tout, j'appelle, je tombe sur un agent immobilier très sympa, qui était dans le quartier, moi j'avais une heure de trou, comme on dit, et donc il me fait visiter ce local, il y avait deux salles, une salle sur rue, une salle à l'arrière, et puis une cave voûtée, et je ne sais pas, là tout de suite, c'est une espèce de vision, Tout de suite, je me suis dit, mais voilà, en fait, j'ai envie de créer un lieu pour proposer des cours de musique et des cours d'écriture. C'était vraiment les deux pratiques que je maîtrisais le mieux. Et j'ai appelé mon mari, je lui ai dit, je sais ce que je fais, le pauvre. Franchement, mais en même temps, il voulait que j'aille bien et que je fasse quelque chose qui me plaise. Et donc, à partir de là, j'ai commencé à imaginer le lieu. Donc, mon mari étant architecte. On a fait, donc ça c'était au mois de mai, on a fait les travaux l'été et tout de suite j'avais tout le projet en tête, c'est-à-dire autour de la musique et l'écriture. J'arrivais pas à trouver le dénominateur commun. Et en fait j'ai vu, c'est pour ça que c'est très important à travers le dialogue, quand on a un projet de dialoguer avec les gens, parce que j'ai parlé avec un ami dans la com, et je lui ai dit mais voilà moi j'aimerais monter des cours d'écriture créative, et en même temps de la guitare, et en même temps du chant, mais j'arrive pas à trouver, et lui me dit bah expression artistique. Ah ouais, c'est vrai, t'as raison. Et donc voilà, j'ai monté, il fallait que je trouve un nom très vite. Et donc je lui ai dit, on est au 72 rue de la Tombissoire, atelier c'est chouette, atelier 62. Et donc la rentrée, on a commencé à accueillir, on avait trois ou quatre jeunes au départ, qui étaient mes anciens élèves. Et puis petit à petit, et en discutant avec eux, on a fait écriture de scénario, et puis ensuite on s'est dit, on va pouvoir faire écriture narrative. Et puis ensuite, au début c'est moi qui enseignais le chant, il faut savoir, je ne suis pas du tout prof d'octobre. Maintenant on a une super prof de chant, Camille, qui est venue visiter les locaux Relat en Bissoire et qui m'a proposé d'être prof. Mais c'est parti de rien en fait, c'est curieux. Mais je pense que… Très souvent, en fait, on ne se rend pas compte du cheminement que les idées font à l'intérieur de notre esprit et tout se construit en fait. Et ensuite, quand on est devant la feuille blanche, il ne suffit pas grand-chose, c'est un petit déclencheur et ça sort.

  • Speaker #1

    L'une des particularités de ton lieu, c'est que tu accueilles beaucoup de jeunes en phobie scolaire. Pourquoi est-ce que tu penses que l'expression artistique peut sauver ces jeunes-là ?

  • Speaker #0

    Alors je pense que c'est essentiel et pareil, j'ai moi-même des souvenirs de moments où j'allais pas très bien. J'avais la chance entre guillemets de ne pas avoir internet ni les réseaux sociaux. Mais c'est très important parce que déjà on se rend compte que d'autres ont exprimé des choses, des pensées, des mal-être. Alors moi je lisais énormément de poésie. Et donc évidemment, quand on lit les poèmes de Rimbaud, voilà, 17 ans, on se dit Waouh, lui, il avait déjà tout ça en tête, donc finalement, moi, ça va pas si mal, en fait. Mais à travers des personnages de romans, voilà, on se dit... je pense, c'est idiot, mais je pense aux Grands Maulnes, des romans comme ça qui m'ont marquée quand j'étais ado, et qui posent des questions, qui n'apportent pas de réponses, mais qui posent des questions, au journal d'Anne Frank par exemple. Et donc on n'est pas tout seul, on se dit voilà, il y a plein de gens intelligents qui se sont posés les mêmes questions. Donc d'une part, je pense que la lecture, l'écriture, très tôt, moi je rédigeais un journal, c'est hyper salutaire de pouvoir mettre par écrit, et puis même d'écouter de la musique, de jouer de la musique, et puis de... Quand on ne va pas bien, on prend sa guitare et puis tout d'un coup, on ne pense à rien. Et ça, c'est vraiment génial. Hop là, on éteint le cerveau. Récemment encore, j'ai encore fait cette expérience d'aller à une expo, ce que je devrais faire plus souvent. Mais tout d'un coup, on est, moi qui viens du son, on vit vraiment l'expérience d'une exposition visuelle. Et pareil, on a le cerveau qui est complètement... On remet le compteur à zéro. Et moi je m'en suis rendue compte assez jeune de ça, de cette chance. Et je pense que pour les jeunes, c'est très très important de pouvoir faire le vide. de pouvoir avoir un moment où ils se posent, parce que là, actuellement, leur cerveau est sans cesse sollicité tout le temps, tout le temps, tout le temps, et de pouvoir avoir des moments de rien qui sont comblés par exprimer ce qu'ils ont en eux, se rendre compte qu'ils ne sont pas seuls. Moi, je privilégie énormément, et ici, aux Ateliers 62, c'est vraiment partie de notre ADN, la rencontre. C'est-à-dire que c'est chouette de faire de la musique à la maison, d'écrire à la maison, de dessiner à la maison, mais quand on est ensemble, on se rend compte qu'on n'est pas tout seul, on en parle, on échange sur ces pratiques, et de là, on se rend compte qu'on a les mêmes questionnements, qu'on a les mêmes peurs. Et je pense que c'est très très important, il faut que tout ça sorte, il faut exprimer tout ça, et ça peut vraiment devenir une aide. Et en ce qui concerne les élèves... en refus anxieux ou en phobie scolaire ou en décrochage ou en raccrochage plutôt, c'est important parce qu'ils sont isolés chez eux, avec leur téléphone souvent. Et en fait, il y a un moment où, pour plusieurs raisons, ils ne peuvent plus aller à l'école. Moi, je parle plus d'allergie, en fait. C'est-à-dire que c'est comme un... Alors moi, je suis sujette au vertige et je sais qu'à un moment donné, si j'ai une crise de vertige, il n'y a rien à faire. Et quand on me voit, on a vraiment l'impression que je deviens folle. C'est-à-dire que je commence à trembler partout, à pleurer. Et en plus, après, on a vraiment la haine. C'est-à-dire qu'ensuite, il faut s'isoler parce que ça nous énerve d'être comme ça. Et j'établis un peu ce parallèle. J'en ai beaucoup parlé aux jeunes. Et ils m'expliquent que pour X raisons, ils n'ont plus envie d'y aller. Et puis, le lendemain, toujours pas. Et à un moment donné, les parents insistent. Et pour expliquer aux parents que vraiment ce n'est pas possible, ils n'ont pas d'autres moyens que de faire des crises. Ça peut devenir très très violent. Et souvent, ce n'est pas forcément les parents, mais c'est souvent interprété comme de l'hyper-anxiété, de l'agressivité, de la violence. Ensuite on les emmène voir le psy ou voir le psychiatre. Et puis ensuite, malheureusement, parfois, ils entrent en milieu hospitalier et ils deviennent phobiques. Et donc ça devient une maladie. Et moi je trouve que ce qu'on propose ici, ce que j'aimerais, c'est que ces jeunes puissent venir avant. C'est-à-dire au moment où ils n'ont plus envie d'aller en classe, qu'est-ce qu'ils ont d'autre comme choix à part rester seul à la maison, ce qui n'est pas top, aller à l'école, mais ça ce n'est pas possible. sortir, mais ils ne vont pas aller dans les cafés, ce sont des jeunes, ils sont mineurs, donc nous ce qu'on leur propose, c'est déjà de venir aux ateliers, juste venir, ils prennent un café, ils prennent un chocolat, ils sont entre eux, ils sont très peu nombreux, on discute, moi je suis toujours là, et puis ensuite, l'après-midi, on leur propose, on leur dit, nous on a des ateliers du chant, de l'écriture créative, art plastique, théâtre, si tu as envie, Et si tu as envie de rencontrer d'autres jeunes à un moment donné, tu peux t'inscrire et venir. Et parfois, ils vont venir au bout d'une semaine, parfois un mois, deux mois, parfois un an. Mais ce qui est important, c'est juste de semer la petite graine et de dire, nous on est là, et un jour, si tu veux, si tu n'as pas envie d'aller voir ton psy, ton médecin, et encore moins ton prof, il y a d'autres jeunes, et tu peux venir et tu discutes, et en plus, c'est beau. Et ça, c'est important. Ce n'est pas un endroit tout poussiéreux. Et pour eux... Déjà quand ils entrent, moi je sais que le jour de l'inauguration, j'ai vu des élèves, je sais qu'ils sont en phobie scolaire, et de se rendre compte qu'on a fait tout ça pour eux, finalement, déjà ça les touche. Ils ont envie de revenir et ils s'ouvrent peu à peu. Et c'est super important.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais un exemple d'élève qui serait venu après une phobie scolaire et qui s'en serait sorti grâce à cette expérience artistique ?

  • Speaker #0

    Heureusement, et on est super fiers, j'en ai plein, mais vraiment plein. Et c'est le genre d'anecdotes, j'y pense régulièrement, c'est génial, je pense le matin, je suis là, mais... Et je ne me dis pas du tout, je n'en tire aucune gloire. Je suis fière parce que juste, voilà, je suis fière d'eux, mais... Il y en a plein, plein, plein. Et je ne sais pas, par exemple, je pense à une jeune fille qui est venue quand on était rue de la Tombissoire, qui était complètement... Elle était vraiment, j'ai coutume de dire cabossée par l'éducation nationale, enfin par un système qui ne lui convenait pas, mais franchement, elle était presque fracassée. C'est-à-dire qu'elle était en souffrance physique, vraiment, et toute recroquevillée sur elle-même. Et je me souviens, en plus, elle avait un look très prononcé, un peu gothique, avec du maquillage pas possible. Et elle essaie d'intégrer une école privée et on lui avait dit non à cause de son look. Déjà, ça je m'en rappelle, ça m'avait marqué. Et pourtant, une école qui est un peu à pédagogie alternative, ils avaient dit non, elle va faire peur aux autres. Déjà, ok. Et donc elle vient. Et elle a commencé tout doucement. Au début, c'était l'écriture créative, parce que en général, ça marche assez bien. Et donc, elle écrivait ce qu'elle ressentait. Et puis ensuite, elle a fait du chant, elle a fait de la guitare. Et petit à petit, je l'ai vue... C'est génial de les voir s'ouvrir, grandir. Et donc maintenant, elle fait des études de psycho. Et maintenant, elle fait de l'orfèvrerie. On en a une autre qui est arrivée en terminale et qui n'allait pas bien du tout, qui était ultra stressée, sous pression, par le lycée, par cours sup, le bac. Elle a lâché l'affaire et maintenant elle a un sourire et elle chante divinement bien. Elle vient d'être prise dans une école de comédie musicale. Mais surtout, de les voir sourire, il suffit parfois d'un mois. C'est ça qui est dingue. On en a plein plein plein, beaucoup de jeunes filles, c'est vrai, mais ce que j'aimerais dire surtout, c'est que je me rends compte que nous ce qu'on leur propose finalement, c'est un lieu. une sorte de terreau fertile où ils peuvent pousser. Parce qu'après, en fait, ils grandissent. Et souvent, c'est à un moment donné, on oublie... C'est pour ça que c'est très délicat de dire Tu es phobique parce que ça leur met une étiquette, T'es malade Ils ne sont pas phobiques, je pense. Ils traversent l'adolescence, ils se posent des questions, ils se rendent compte que le système scolaire n'a aucun sens. Et on ne peut pas leur jeter la pierre, parce que franchement, quand on y pense, parfois, la manière dont... En tout cas, dont... dont c'est fait ici en France, il y a vraiment un problème de sens. Et puis ensuite, ils se rendent compte que le monde a plein d'autres choses à leur apporter, qu'à travers la rencontre, l'échange, ils peuvent apprendre plein de choses. Et en fait, juste, ils grandissent. Et nous, tout ce qu'on fait, c'est qu'on leur propose un espace à l'abri où ils peuvent grandir et s'épanouir. Et finalement, on ne fait pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu penses que l'art, la culture, toutes ces formes de créativité sont faites pour tous les jeunes ?

  • Speaker #0

    Oui, à 200%, je suis sûre. Faites, en tout cas, ça peut les aider, ça peut les intéresser. Alors après, parfois on se rend compte depuis tout petit qu'ils ont une appétence pour tel ou tel instrument, ou pour le dessin, mais je suis convaincue qu'il n'y a même pas besoin de savoir. Par exemple, je parlais du dessin ou de l'écriture, il y a des jeunes qui pensent qu'ils ne savent pas dessiner. L'écriture je leur dis mais tu écris, ils me disent ah non mais de toute façon je suis nulle en français, je dis non mais je ne parle pas du français, je parle de l'écriture. Et parfois ne pas savoir dessiner, ne pas être bon en français, au contraire ça leur permet de s'exprimer de manière plus libre. Moi je sais qu'encore maintenant parfois je participe à des ateliers d'écriture, c'est très très difficile d'essayer de ne pas bien faire. Et je dessine, moi je peux te dessiner... C'est pas une chaise, je peux très bien dessiner une chaise, mais par contre si tu me demandes d'exprimer quelque chose à travers le dessin, alors là c'est catastrophique. Et donc parfois ceux qui ne maîtrisent pas, au contraire, c'est ceux qui arrivent à exprimer. Et ensuite quand on regarde ce qu'ils font, il y en a, ils font un trait et waouh, ils ont mis toutes leurs émotions, toutes leurs identités dans ce trait. Et je pense que les pratiques artistiques sont vraiment faites pour tous, mais d'ailleurs jeunes ou moins jeunes. Et en tout cas... ça peut les aider. Parce qu'ils sortent quelque chose qu'ils ont en eux. Il ne faut pas que ça reste à l'intérieur, parce que sinon ça te bouffe de l'intérieur.

  • Speaker #1

    Toi qui connais bien cet enseignement de l'art, qu'est-ce que tu penses aujourd'hui de la manière dont il est enseigné à l'école ?

  • Speaker #0

    Je préfère en rire. Franchement, il y a des moments dans la vie où on se dit, est-ce que je vais rire ou est-ce que je vais pleurer ? Là, aujourd'hui, je suis en forme, je suis avec toi, je suis contente. Franchement, non mais j'en ris parce que là, il y a une image qui me vient à l'esprit de... Je ne sais plus comment il s'appelait mon prof de musique quand j'étais au collège. Et nous, on avait la flûte à bec. Alors la flûte à bec, franchement, c'est une torture pour les élèves, je pense pour les profs, pour les parents, parce que quand on doit répéter la flûte à bec, non mais franchement, la flûte à bec, résumer la musique à la flûte à bec au cours de musique à l'école, c'est pas possible. Mais bon, indépendamment de ce traumatisme que je peux avoir avec la flûte à bec, je pense que déjà une heure comme ça dans un cadre scolaire, c'est mieux que rien. mais je pense que ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant. Alors, une heure, c'est mieux que rien, mais surtout dans le cadre scolaire, dans la salle de classe. Moi, je pense que ce n'est pas la bonne idée. C'est-à-dire qu'il faut sortir les pratiques artistiques de la salle de classe. Les jeunes ici, là, on est actuellement dans un studio de musique. Ils sont fous quand ils arrivent dans un studio avec des instruments, où ils peuvent chanter super fort. Dans la salle de classe, déjà, le chant, c'est compliqué. Pareil pour ce qui est des arts visuels. Il faut qu'il y ait un vrai atelier. Alors moi j'ai eu la chance, quand j'allais à l'école, il y avait un atelier, il y avait un laboratoire de musique. Mais le plus important, je trouve, c'est... Et j'ai une amie que je vais citer, Anne Bordorieux, qui est devenue amie, qui a créé un collège qui s'appelle le Collège Prévédiago, qui a tout compris, parce que les collégiens ne font pas de musique, ils ne font pas d'art plastique, mais ils le font, ils ont deux heures et demie l'après-midi dédié à ces pratiques. Et la première chose que je trouve dingue, c'est la note. Ils vont être notés en musique, ils vont être notés en dessin sur une heure, où ils ont dû dessiner un truc. Déjà, moi je suis contre la note et ces formes d'évaluation que je trouve pas du tout adaptées, mais c'est absurde de mettre une note sur 10, sur 20, sur un dessin, sur... Enfin, je sais pas, moi j'aimerais voir les critères d'évaluation, parce qu'il y en a en plus. Mais ça colle pas, c'est pas possible. en fait, il ne devrait pas y avoir de notes, il devrait y avoir juste des encouragements. Ok, bah oui, t'as réussi aujourd'hui, t'as réussi à chanter devant tes camarades. Waouh, bah là t'as 20 sur 20, quoi. Tout de suite. Donc c'est bien, c'est bien de proposer des enseignements artistiques, mais je pense que ça devrait être fait différemment. Mais je pense que beaucoup de choses devraient être faites différemment à l'école.

  • Speaker #1

    Ça c'est sûr. Alors toi, tu connais bien un parcours... qui est pourtant assez méconnu, je trouve, c'est le parcours art-études. Alors, on connaît beaucoup en France le parcours sport-études. Comment se fait-il que le parcours art-études soit moins connu ? Est-ce que tu connais la proportion d'élèves qui le suivent en France ? Enfin, je suppose que le chiffre est difficile à trouver, mais est-ce que c'est quelque chose qui est beaucoup proposé aux élèves ? Et toi, quelle est ton expérience de cette formule différente de la scolarité en France ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, moi j'ai eu la chance de travailler pour un établissement qui m'a proposé de développer justement le parcours art-études. Il proposait le fameux parcours sport-études et on m'a demandé par rapport à ce que j'avais fait, mon parcours, est-ce que tu peux développer ça ? Donc je l'ai fait avec mon bon sens, j'avais de la chance, c'était un établissement privé, donc assez ouvert. Alors en fait, c'est un rythme scolaire qui va s'adapter. à une pratique assidue du sport ou une pratique assidue des arts, entre guillemets. Donc ça peut être les arts visuels, ça peut être la musique, le théâtre. Alors ça, c'est proposé au collège, puisqu'il y a les chams, chades. Donc au collège, il peut y avoir des jeunes qui ont des horaires aménagés, qui leur permettent de faire plus de théâtre, plus de musique. Et ça, c'est super. Et ça, dans plein de collèges publics, il y a ces parcours-là. Le problème, c'est qu'après, au lycée, Il y en a beaucoup moins. Il y a quelques lycées à horaires aménagés, pareil. Et ces lycées-là, en tout cas, sont beaucoup plus orientés sport-études. Alors, ma réponse au fait qu'on connaisse mieux le sport-études que l'art-études, c'est que les horaires aménagés pour les sportifs, c'est souvent pour les sportifs de haut niveau. C'est-à-dire que ce sont un peu les athlètes de demain. Et donc, ils vont un peu faire rayonner la France, rayonner l'établissement aussi. Donc forcément, on va les pousser à... Voilà, on a un joueur de tennis qui est très prometteur. On va lui permettre de... Je suis hyper cynique, parce que je suis en forme aujourd'hui. Mais ce que je veux dire par là, c'est que, en ce qui concerne les pratiques artistiques, ce n'est pas du tout le même... le même schéma parce qu'on peut avoir un artiste de haut niveau, mais qu'est-ce que ça veut dire en fait ? Ça ne veut pas dire grand-chose. Et en plus de ça, je pense que le art-étude devrait permettre au contraire à chacun de pouvoir s'exprimer. Et puis essayer parfois des pratiques artistiques et essayer d'en faire beaucoup. C'est-à-dire que par exemple on a des jeunes, ils ont envie comme moi à leur âge, ils disent moi je vais être une rockstar, ça va être mon métier. Ok, va faire 8 heures de musique comme ça tous les après-midi. On va voir si vraiment... Alors que le sport c'est autre chose. Le sport c'est vraiment ta voix. Il y a aussi les élèves qui sont en sport études. Je pense au départ déjà, ils sont plus disciplinés, ils sont plus cadrés, donc c'est plus facile entre guillemets. Les élèves artistes, le cadre, franchement, c'est pas la même chose. Donc c'est beaucoup plus compliqué pour l'école de gérer entre guillemets, enfin en tout cas de pouvoir leur permettre d'avoir une scolarité adaptée. Donc je pense que c'est pour ça qu'il y en a moins.

  • Speaker #1

    Pour conclure un peu tout ce que tu viens de dire, est-ce que tu pourrais... Nous résumer pourquoi selon toi l'art et la culture sont essentiels dans le quotidien des enfants et des jeunes ?

  • Speaker #0

    Alors l'art et la culture sont essentiels parce que ça apporte une ouverture. ça permet de nourrir sa curiosité. Tous les enfants sont curieux. Tous, tous. Mais il faut juste les stimuler. C'est-à-dire que même un petit enfant, et moi je ne suis pas une spécialiste de la petite enfance, mais je vois, j'observe, si on met un enfant toute la journée assis sur sa chaise bébé face à un mur, il ne fera rien. Mais il faut les stimuler et les occuper. Et par l'art et la culture, on nourrit cette curiosité. Et en plus de ça, on leur permet d'avoir quand même une base qui va leur servir toute leur vie. Moi, je sais que j'ai cette chance inouïe d'avoir une mère qui était archéologue. Et donc, il me traînait dans les musées. Et parfois, je n'avais pas envie d'y aller. J'en avais pas le bol. Surtout les musées d'art et traditions populaires. partout où on allait, on devait se taper le musée d'art et de tradition populaire, avec les costumes et tout, de chaque village. Il n'empêche que, parfois, il faut un petit peu forcer, et après, ça reste. Et après, ça permet d'avoir des références, d'avoir la ref, comme ils disent. Mais, par exemple, la lecture, la mythologie grecque, la mythologie romaine, l'ancienne Égypte, la Bible, tout ça, ce sont des histoires. qu'on peut comprendre et ensuite ça nous permet dans nos études de nous construire notre propre culture. C'est hyper important. Et le fait de pratiquer en plus, ça booste la confiance. C'est l'essentiel la confiance. Et je rajouterais aussi qu'il y a une chose, on ne met pas assez l'accent sur le travail collectif. C'est-à-dire que moi je pense que... Oui, l'art et la culture, c'est aller voir des expos, pratiquer la musique, tout ça c'est essentiel, mais le faire ensemble, c'est hyper important. En musique, comprendre qu'on fait partie d'un tout. C'est une leçon de vie, je pense. C'est-à-dire que faire partie d'un orchestre ou d'un groupe de musique, c'est génial parce qu'on se rend compte que si on ne fait pas sa note au moment voulu, tout se casse la figure. Et ça, c'est hyper important au niveau des valeurs fondamentales. C'est-à-dire que dans la vie active, ensuite on fait partie d'une entreprise, d'un groupe de travail, d'une association. Et c'est hyper valorisant de se dire, Moi, si je n'apporte pas ma petite pierre à l'édifice, ça ne va pas marcher. Et là, c'est le travail collectif, le vivre ensemble, la co-responsabilité. Ce sont des valeurs essentielles et l'entraide. Et je pense que par les pratiques artistiques, on peut comprendre ça très très tôt. Parce qu'il n'y a pas besoin des mots. Moi j'ai le souvenir, quand j'étais... je pense que c'était dernière année de maternelle, j'ai une bonne mémoire, et on a construit une mosaïque dans toute la classe, tous ensemble, on avait nos petits carrés là, on avait chacun des couleurs, et c'est génial de le faire ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aimerais rajouter quelque chose sur les ateliers 62 avant qu'on se quitte ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que je suis en plein dans ce chantier, en fait on a une... On a un nouveau programme qu'on ouvre dès maintenant, mais surtout à partir de septembre, qui est destiné aux jeunes après le bac. On propose une année de césure, fort de cette expérience auprès des jeunes. En discutant avec eux, on a monté ensemble une année de césure qui est créative et artistique, pour nourrir la curiosité, pour surtout faire une pause, arrêter la pression. C'est un programme qui n'a pas de notes, qui n'a pas d'évaluation. et qui propose des ateliers de géopolitique, philo, de questions d'environnement, le matin et des pratiques artistiques l'après-midi, pour un petit peu penser à autre chose et permettre de mieux se connaître et faire des choix qui nous ressemblent. Donc voilà, on a appelé ça le PIC, le programme interculturel et créatif. Et on lance, c'est pas du tout la pub, mais c'est parce que c'est chouette, c'est vraiment bien. Et ce qui est intéressant... Pour terminer, c'est que sur l'année de césure, j'ai interrogé les jeunes. La première chose, quand je leur ai dit qu'est-ce qui vous semble vraiment important ? ils m'ont tous dit un emploi du temps Donc c'est intéressant parce que l'année de césure, c'est génial, le projet, c'est génial, mais il faut qu'il y ait un cadre. Et nous, on l'a vraiment construit avec eux. Donc pour en savoir plus... Il faut venir nous voir.

  • Speaker #1

    Je partagerai évidemment tous les liens. Alors, tu la connais, la dernière question. Tu sais que le podcast s'appelle Les Adules de Demain. Qu'est-ce que tu souhaiterais aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Je leur souhaite d'être dans l'action, surtout. Et de faire tous d'être acteurs de leur vie. de vivre et non pas d'exister. Voilà. Qu'ils soient dans la vie et pas dans l'existence. C'est-à-dire qu'ils fassent des choses. Parce qu'il faut faire. C'est très très important. Il ne faut pas faire bien, il faut faire. Et je leur souhaite d'être vraiment acteurs de leur propre vie.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Daphné.

  • Speaker #0

    Merci à toi.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

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Description

Et si l’art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir ? Daphné Kauffmann connaît bien ce sujet, puisqu’après son métier d’enseignante, de journaliste mais aussi d’artiste, elle se consacre aujourd’hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif, à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l’art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d’une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu, les Ateliers 62, que j’admire tant.


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Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition.

  • Speaker #1

    Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #0

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup, il dit tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Descleves, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Et si l'art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir les enfants ? Daphne Kaufmann connaît bien ce sujet, puisqu'après son métier d'enseignante, de journaliste mais aussi d'artiste, elle se consacre aujourd'hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons évidemment parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l'art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d'une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu qu'est les Ateliers 62, que j'admire tant. Je vous souhaite une bonne écoute. Hello Daphné.

  • Speaker #0

    Salut Stéphanie.

  • Speaker #1

    Je te retrouve aujourd'hui dans les locaux de ton tiers lieu dédié à l'épanouissement des jeunes grâce à la pratique artistique. Il s'agit des Ateliers 62, on est exactement dans le 14e arrondissement de Paris. Et en plus de cette casquette d'entrepreneur, tu as été dans ta vie artiste, journaliste, romancière, formatrice et enseignante. Beaucoup de choses. Qu'est-ce qui t'a amené dans ton parcours de vie à t'intéresser au rapport des jeunes à l'art et à la culture ?

  • Speaker #0

    Déjà, je suis très heureuse de participer au podcast quand même, je le dis, parce que je suis une auditrice fervente. Donc, je suis très contente et très honorée. En fait, depuis, moi j'ai eu la chance très jeune d'avoir des parents. et surtout une maman qui attachait de l'importance aux pratiques artistiques en loisirs, je précise. Et donc depuis toute petite, c'était le sport, la danse, moi je fais beaucoup de danse. Et ensuite il est arrivé un âge où elle m'a dit, ma mère m'a dit, de quel instrument est-ce que tu aimerais jouer ? Donc elle ne m'a pas dit, est-ce que tu aimerais faire de la musique ? Elle m'a dit, quel est l'instrument que tu aimerais choisir ? Et on avait un piano à la maison, et moi je trouvais que le piano c'était trop facile, donc j'ai dit la guitare électrique. Je viens de le préciser. Alors, c'est important. Et en fait, pour ma mère, mais pour mon père aussi, toutes les activités extrascolaires étaient très importantes. En plus, je pense qu'ils ont dû remarquer que très tôt... J'aimais bien me mettre sur le vent de la scène, par exemple tous les spectacles, j'adorais ça. Donc ils ont entretenu ça. Mais c'était vraiment loisir. C'était pas quelque chose, c'était pas une voie professionnelle. Pas de bol, moi je voulais jouer de la guitare électrique pour être une rockstar. Ils ne le savaient pas encore. Mais tout ça pour dire que je baignais dedans. Et l'écriture aussi, très vite. Moi je lisais beaucoup depuis toute petite. Et en fait je me suis rendue compte que je me posais plein de questions. Et j'avais soit des réponses ou en tout cas je trouvais à travers les romans que je lisais les mêmes questionnements et c'était assez rassurant finalement. Donc voilà je baignais là-dedans et parfois quand j'étais au collège je pouvais me coucher à 2h du matin parce que je lisais, j'écoutais de la musique. Voilà tout ce qui était art et culture était très très présent depuis ma petite enfance. Les expos, je m'intéressais à toutes ces choses-là parce que je pense que depuis toute petite on m'a ouverte à ça et je pense que c'est essentiel.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui t'a rapprochée du sujet des jeunes et de l'éducation ?

  • Speaker #0

    Alors, je pense que... Parce que moi, j'ai fait des études de lettres et je voulais surtout pas être prof. Donc ça, c'est sûr. J'y suis venue de manière complètement... détournée, mais on m'a déjà posé cette question, donc j'y réfléchis entre temps, et en fait je pense que c'est parce que j'ai très bonne mémoire, mais j'ai vraiment une très très bonne mémoire de l'enfance c'est-à-dire par exemple je vois quand on en parle avec mon frère lui il ne se souvient de rien, et je me souviens très très bien de ma petite enfance, de mon enfance, et très bien de mon adolescence et donc je pense que finalement pour moi c'est pas si loin, ou en tout cas c'est dans un tiroir que je peux ouvrir facilement et donc quand j'ai commencé à quand j'ai enseigné au collège et que j'ai rencontré des jeunes, et en plus J'enseignais toujours dans le privé, dans des collèges un peu alternatifs, avec des pédagogies un peu différentes. Et donc tout de suite je me suis rendue compte que les questions qui se posaient, je me posais les mêmes, et que parfois ça peut être vraiment difficile. C'est-à-dire que, par exemple, tout bête, mais on se rend compte qu'on meurt, on se rend compte qu'il y a la guerre, que l'être humain n'est pas cool en fait, mais donc moi je ne suis pas cool non plus. Et toutes ces questions, moi je me rappelle quand j'étais ado, mais en pré-ado, très jeune, ça pouvait m'empêcher de dormir, j'étais angoissée. Et donc je les voyais, ces jeunes-là, et je me suis dit mais... Je peux déjà en parler avec eux, et je trouvais ça hyper intéressant parce qu'ils ont Internet, ils ont tout ce que moi je n'avais pas. Et à travers le dialogue, ça m'a vraiment intéressée. Il faut dire que je m'intéresse beaucoup aux gens. Puisque quand j'écris, j'observe beaucoup l'être humain me passionne, et comme ça je peux créer des personnages, mais les jeunes encore plus, parce qu'ils sont vraiment à un moment, c'est entre chien et loup, ils sont au moment vraiment où il ne suffit pas grand chose, ils sont sur un fil, et en fonction du vent, ça peut basculer d'un endroit à un autre, et nous, si on peut les aider, c'est top. Et il se trouve que... Je ne sais pas comment, alors ça c'est quelque chose que je dois avoir. J'arrive à leur parler et on arrive à avoir un lien de confiance assez facilement. Donc autant s'en servir.

  • Speaker #1

    Justement, tu as créé un lieu inédit dédié aux jeunes, les Ateliers 62. Est-ce que tu pourrais nous expliquer comment tu es arrivée à créer cette structure pas comme les autres ?

  • Speaker #0

    En fait, moi je viens de la musique et de l'écriture. Et comme je t'ai dit tout à l'heure, je voulais pas être une rockstar, j'étais sûre que j'allais être une rockstar, c'était mes convaincus. Donc là on a une de mes guitares derrière. Et donc j'ai fait beaucoup de chants, j'ai beaucoup tourné, etc. Et puis à un moment donné, ensuite j'étais journaliste, j'ai écrit des livres, et puis je suis arrivée progressivement à la formation de journaliste et ensuite à être prof. Et puis j'ai travaillé dans un collège privé où on m'a attribué énormément de tâches. Donc j'étais en même temps prof, en même temps responsable du collège, prof principale, j'avais des classes de première, des classes de terminale, j'étais responsable du parcours art-études, de l'option théâtre, bon bref, donc au bout d'un moment, pouf, ça a... Ou plutôt tu ! Donc au bout d'un moment, c'était vraiment surmenage, on va dire, je dis pas burn-out parce que je connais des gens qui sont en burn-out, je pense que c'était plus sévère que moi, mais voilà, surmenage, donc je vais voir mon médecin, et il me dit... Bon, vous ne touchez plus à vos mails, il faut faire uniquement des choses qui vous plaisent. Et tout de suite, je me suis dit, je vais me remettre à la musique, parce que j'avais arrêté, je n'avais plus le temps. Et donc, j'ai recommencé à jouer la guitare, à chanter, etc. Et au moment de retourner au boulot, au bout d'un mois, j'ai voyagé aussi, j'ai pris du recul. Je pense que j'avais repris le travail depuis un jour ou deux. Et là, je passe dans le 14e, sur le chemin du boulot, je passe devant la rue de la Tombissoire, au numéro 62. Il y avait une ancienne pizzeria à emporter. espèce de vieux boui-boui, et je vois Alloué sur la vitrine, avec un numéro de téléphone, et franchement, de manière presque inconsciente, j'appelle, je ne cherchais rien du tout, j'appelle, je tombe sur un agent immobilier très sympa, qui était dans le quartier, moi j'avais une heure de trou, comme on dit, et donc il me fait visiter ce local, il y avait deux salles, une salle sur rue, une salle à l'arrière, et puis une cave voûtée, et je ne sais pas, là tout de suite, c'est une espèce de vision, Tout de suite, je me suis dit, mais voilà, en fait, j'ai envie de créer un lieu pour proposer des cours de musique et des cours d'écriture. C'était vraiment les deux pratiques que je maîtrisais le mieux. Et j'ai appelé mon mari, je lui ai dit, je sais ce que je fais, le pauvre. Franchement, mais en même temps, il voulait que j'aille bien et que je fasse quelque chose qui me plaise. Et donc, à partir de là, j'ai commencé à imaginer le lieu. Donc, mon mari étant architecte. On a fait, donc ça c'était au mois de mai, on a fait les travaux l'été et tout de suite j'avais tout le projet en tête, c'est-à-dire autour de la musique et l'écriture. J'arrivais pas à trouver le dénominateur commun. Et en fait j'ai vu, c'est pour ça que c'est très important à travers le dialogue, quand on a un projet de dialoguer avec les gens, parce que j'ai parlé avec un ami dans la com, et je lui ai dit mais voilà moi j'aimerais monter des cours d'écriture créative, et en même temps de la guitare, et en même temps du chant, mais j'arrive pas à trouver, et lui me dit bah expression artistique. Ah ouais, c'est vrai, t'as raison. Et donc voilà, j'ai monté, il fallait que je trouve un nom très vite. Et donc je lui ai dit, on est au 72 rue de la Tombissoire, atelier c'est chouette, atelier 62. Et donc la rentrée, on a commencé à accueillir, on avait trois ou quatre jeunes au départ, qui étaient mes anciens élèves. Et puis petit à petit, et en discutant avec eux, on a fait écriture de scénario, et puis ensuite on s'est dit, on va pouvoir faire écriture narrative. Et puis ensuite, au début c'est moi qui enseignais le chant, il faut savoir, je ne suis pas du tout prof d'octobre. Maintenant on a une super prof de chant, Camille, qui est venue visiter les locaux Relat en Bissoire et qui m'a proposé d'être prof. Mais c'est parti de rien en fait, c'est curieux. Mais je pense que… Très souvent, en fait, on ne se rend pas compte du cheminement que les idées font à l'intérieur de notre esprit et tout se construit en fait. Et ensuite, quand on est devant la feuille blanche, il ne suffit pas grand-chose, c'est un petit déclencheur et ça sort.

  • Speaker #1

    L'une des particularités de ton lieu, c'est que tu accueilles beaucoup de jeunes en phobie scolaire. Pourquoi est-ce que tu penses que l'expression artistique peut sauver ces jeunes-là ?

  • Speaker #0

    Alors je pense que c'est essentiel et pareil, j'ai moi-même des souvenirs de moments où j'allais pas très bien. J'avais la chance entre guillemets de ne pas avoir internet ni les réseaux sociaux. Mais c'est très important parce que déjà on se rend compte que d'autres ont exprimé des choses, des pensées, des mal-être. Alors moi je lisais énormément de poésie. Et donc évidemment, quand on lit les poèmes de Rimbaud, voilà, 17 ans, on se dit Waouh, lui, il avait déjà tout ça en tête, donc finalement, moi, ça va pas si mal, en fait. Mais à travers des personnages de romans, voilà, on se dit... je pense, c'est idiot, mais je pense aux Grands Maulnes, des romans comme ça qui m'ont marquée quand j'étais ado, et qui posent des questions, qui n'apportent pas de réponses, mais qui posent des questions, au journal d'Anne Frank par exemple. Et donc on n'est pas tout seul, on se dit voilà, il y a plein de gens intelligents qui se sont posés les mêmes questions. Donc d'une part, je pense que la lecture, l'écriture, très tôt, moi je rédigeais un journal, c'est hyper salutaire de pouvoir mettre par écrit, et puis même d'écouter de la musique, de jouer de la musique, et puis de... Quand on ne va pas bien, on prend sa guitare et puis tout d'un coup, on ne pense à rien. Et ça, c'est vraiment génial. Hop là, on éteint le cerveau. Récemment encore, j'ai encore fait cette expérience d'aller à une expo, ce que je devrais faire plus souvent. Mais tout d'un coup, on est, moi qui viens du son, on vit vraiment l'expérience d'une exposition visuelle. Et pareil, on a le cerveau qui est complètement... On remet le compteur à zéro. Et moi je m'en suis rendue compte assez jeune de ça, de cette chance. Et je pense que pour les jeunes, c'est très très important de pouvoir faire le vide. de pouvoir avoir un moment où ils se posent, parce que là, actuellement, leur cerveau est sans cesse sollicité tout le temps, tout le temps, tout le temps, et de pouvoir avoir des moments de rien qui sont comblés par exprimer ce qu'ils ont en eux, se rendre compte qu'ils ne sont pas seuls. Moi, je privilégie énormément, et ici, aux Ateliers 62, c'est vraiment partie de notre ADN, la rencontre. C'est-à-dire que c'est chouette de faire de la musique à la maison, d'écrire à la maison, de dessiner à la maison, mais quand on est ensemble, on se rend compte qu'on n'est pas tout seul, on en parle, on échange sur ces pratiques, et de là, on se rend compte qu'on a les mêmes questionnements, qu'on a les mêmes peurs. Et je pense que c'est très très important, il faut que tout ça sorte, il faut exprimer tout ça, et ça peut vraiment devenir une aide. Et en ce qui concerne les élèves... en refus anxieux ou en phobie scolaire ou en décrochage ou en raccrochage plutôt, c'est important parce qu'ils sont isolés chez eux, avec leur téléphone souvent. Et en fait, il y a un moment où, pour plusieurs raisons, ils ne peuvent plus aller à l'école. Moi, je parle plus d'allergie, en fait. C'est-à-dire que c'est comme un... Alors moi, je suis sujette au vertige et je sais qu'à un moment donné, si j'ai une crise de vertige, il n'y a rien à faire. Et quand on me voit, on a vraiment l'impression que je deviens folle. C'est-à-dire que je commence à trembler partout, à pleurer. Et en plus, après, on a vraiment la haine. C'est-à-dire qu'ensuite, il faut s'isoler parce que ça nous énerve d'être comme ça. Et j'établis un peu ce parallèle. J'en ai beaucoup parlé aux jeunes. Et ils m'expliquent que pour X raisons, ils n'ont plus envie d'y aller. Et puis, le lendemain, toujours pas. Et à un moment donné, les parents insistent. Et pour expliquer aux parents que vraiment ce n'est pas possible, ils n'ont pas d'autres moyens que de faire des crises. Ça peut devenir très très violent. Et souvent, ce n'est pas forcément les parents, mais c'est souvent interprété comme de l'hyper-anxiété, de l'agressivité, de la violence. Ensuite on les emmène voir le psy ou voir le psychiatre. Et puis ensuite, malheureusement, parfois, ils entrent en milieu hospitalier et ils deviennent phobiques. Et donc ça devient une maladie. Et moi je trouve que ce qu'on propose ici, ce que j'aimerais, c'est que ces jeunes puissent venir avant. C'est-à-dire au moment où ils n'ont plus envie d'aller en classe, qu'est-ce qu'ils ont d'autre comme choix à part rester seul à la maison, ce qui n'est pas top, aller à l'école, mais ça ce n'est pas possible. sortir, mais ils ne vont pas aller dans les cafés, ce sont des jeunes, ils sont mineurs, donc nous ce qu'on leur propose, c'est déjà de venir aux ateliers, juste venir, ils prennent un café, ils prennent un chocolat, ils sont entre eux, ils sont très peu nombreux, on discute, moi je suis toujours là, et puis ensuite, l'après-midi, on leur propose, on leur dit, nous on a des ateliers du chant, de l'écriture créative, art plastique, théâtre, si tu as envie, Et si tu as envie de rencontrer d'autres jeunes à un moment donné, tu peux t'inscrire et venir. Et parfois, ils vont venir au bout d'une semaine, parfois un mois, deux mois, parfois un an. Mais ce qui est important, c'est juste de semer la petite graine et de dire, nous on est là, et un jour, si tu veux, si tu n'as pas envie d'aller voir ton psy, ton médecin, et encore moins ton prof, il y a d'autres jeunes, et tu peux venir et tu discutes, et en plus, c'est beau. Et ça, c'est important. Ce n'est pas un endroit tout poussiéreux. Et pour eux... Déjà quand ils entrent, moi je sais que le jour de l'inauguration, j'ai vu des élèves, je sais qu'ils sont en phobie scolaire, et de se rendre compte qu'on a fait tout ça pour eux, finalement, déjà ça les touche. Ils ont envie de revenir et ils s'ouvrent peu à peu. Et c'est super important.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais un exemple d'élève qui serait venu après une phobie scolaire et qui s'en serait sorti grâce à cette expérience artistique ?

  • Speaker #0

    Heureusement, et on est super fiers, j'en ai plein, mais vraiment plein. Et c'est le genre d'anecdotes, j'y pense régulièrement, c'est génial, je pense le matin, je suis là, mais... Et je ne me dis pas du tout, je n'en tire aucune gloire. Je suis fière parce que juste, voilà, je suis fière d'eux, mais... Il y en a plein, plein, plein. Et je ne sais pas, par exemple, je pense à une jeune fille qui est venue quand on était rue de la Tombissoire, qui était complètement... Elle était vraiment, j'ai coutume de dire cabossée par l'éducation nationale, enfin par un système qui ne lui convenait pas, mais franchement, elle était presque fracassée. C'est-à-dire qu'elle était en souffrance physique, vraiment, et toute recroquevillée sur elle-même. Et je me souviens, en plus, elle avait un look très prononcé, un peu gothique, avec du maquillage pas possible. Et elle essaie d'intégrer une école privée et on lui avait dit non à cause de son look. Déjà, ça je m'en rappelle, ça m'avait marqué. Et pourtant, une école qui est un peu à pédagogie alternative, ils avaient dit non, elle va faire peur aux autres. Déjà, ok. Et donc elle vient. Et elle a commencé tout doucement. Au début, c'était l'écriture créative, parce que en général, ça marche assez bien. Et donc, elle écrivait ce qu'elle ressentait. Et puis ensuite, elle a fait du chant, elle a fait de la guitare. Et petit à petit, je l'ai vue... C'est génial de les voir s'ouvrir, grandir. Et donc maintenant, elle fait des études de psycho. Et maintenant, elle fait de l'orfèvrerie. On en a une autre qui est arrivée en terminale et qui n'allait pas bien du tout, qui était ultra stressée, sous pression, par le lycée, par cours sup, le bac. Elle a lâché l'affaire et maintenant elle a un sourire et elle chante divinement bien. Elle vient d'être prise dans une école de comédie musicale. Mais surtout, de les voir sourire, il suffit parfois d'un mois. C'est ça qui est dingue. On en a plein plein plein, beaucoup de jeunes filles, c'est vrai, mais ce que j'aimerais dire surtout, c'est que je me rends compte que nous ce qu'on leur propose finalement, c'est un lieu. une sorte de terreau fertile où ils peuvent pousser. Parce qu'après, en fait, ils grandissent. Et souvent, c'est à un moment donné, on oublie... C'est pour ça que c'est très délicat de dire Tu es phobique parce que ça leur met une étiquette, T'es malade Ils ne sont pas phobiques, je pense. Ils traversent l'adolescence, ils se posent des questions, ils se rendent compte que le système scolaire n'a aucun sens. Et on ne peut pas leur jeter la pierre, parce que franchement, quand on y pense, parfois, la manière dont... En tout cas, dont... dont c'est fait ici en France, il y a vraiment un problème de sens. Et puis ensuite, ils se rendent compte que le monde a plein d'autres choses à leur apporter, qu'à travers la rencontre, l'échange, ils peuvent apprendre plein de choses. Et en fait, juste, ils grandissent. Et nous, tout ce qu'on fait, c'est qu'on leur propose un espace à l'abri où ils peuvent grandir et s'épanouir. Et finalement, on ne fait pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu penses que l'art, la culture, toutes ces formes de créativité sont faites pour tous les jeunes ?

  • Speaker #0

    Oui, à 200%, je suis sûre. Faites, en tout cas, ça peut les aider, ça peut les intéresser. Alors après, parfois on se rend compte depuis tout petit qu'ils ont une appétence pour tel ou tel instrument, ou pour le dessin, mais je suis convaincue qu'il n'y a même pas besoin de savoir. Par exemple, je parlais du dessin ou de l'écriture, il y a des jeunes qui pensent qu'ils ne savent pas dessiner. L'écriture je leur dis mais tu écris, ils me disent ah non mais de toute façon je suis nulle en français, je dis non mais je ne parle pas du français, je parle de l'écriture. Et parfois ne pas savoir dessiner, ne pas être bon en français, au contraire ça leur permet de s'exprimer de manière plus libre. Moi je sais qu'encore maintenant parfois je participe à des ateliers d'écriture, c'est très très difficile d'essayer de ne pas bien faire. Et je dessine, moi je peux te dessiner... C'est pas une chaise, je peux très bien dessiner une chaise, mais par contre si tu me demandes d'exprimer quelque chose à travers le dessin, alors là c'est catastrophique. Et donc parfois ceux qui ne maîtrisent pas, au contraire, c'est ceux qui arrivent à exprimer. Et ensuite quand on regarde ce qu'ils font, il y en a, ils font un trait et waouh, ils ont mis toutes leurs émotions, toutes leurs identités dans ce trait. Et je pense que les pratiques artistiques sont vraiment faites pour tous, mais d'ailleurs jeunes ou moins jeunes. Et en tout cas... ça peut les aider. Parce qu'ils sortent quelque chose qu'ils ont en eux. Il ne faut pas que ça reste à l'intérieur, parce que sinon ça te bouffe de l'intérieur.

  • Speaker #1

    Toi qui connais bien cet enseignement de l'art, qu'est-ce que tu penses aujourd'hui de la manière dont il est enseigné à l'école ?

  • Speaker #0

    Je préfère en rire. Franchement, il y a des moments dans la vie où on se dit, est-ce que je vais rire ou est-ce que je vais pleurer ? Là, aujourd'hui, je suis en forme, je suis avec toi, je suis contente. Franchement, non mais j'en ris parce que là, il y a une image qui me vient à l'esprit de... Je ne sais plus comment il s'appelait mon prof de musique quand j'étais au collège. Et nous, on avait la flûte à bec. Alors la flûte à bec, franchement, c'est une torture pour les élèves, je pense pour les profs, pour les parents, parce que quand on doit répéter la flûte à bec, non mais franchement, la flûte à bec, résumer la musique à la flûte à bec au cours de musique à l'école, c'est pas possible. Mais bon, indépendamment de ce traumatisme que je peux avoir avec la flûte à bec, je pense que déjà une heure comme ça dans un cadre scolaire, c'est mieux que rien. mais je pense que ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant. Alors, une heure, c'est mieux que rien, mais surtout dans le cadre scolaire, dans la salle de classe. Moi, je pense que ce n'est pas la bonne idée. C'est-à-dire qu'il faut sortir les pratiques artistiques de la salle de classe. Les jeunes ici, là, on est actuellement dans un studio de musique. Ils sont fous quand ils arrivent dans un studio avec des instruments, où ils peuvent chanter super fort. Dans la salle de classe, déjà, le chant, c'est compliqué. Pareil pour ce qui est des arts visuels. Il faut qu'il y ait un vrai atelier. Alors moi j'ai eu la chance, quand j'allais à l'école, il y avait un atelier, il y avait un laboratoire de musique. Mais le plus important, je trouve, c'est... Et j'ai une amie que je vais citer, Anne Bordorieux, qui est devenue amie, qui a créé un collège qui s'appelle le Collège Prévédiago, qui a tout compris, parce que les collégiens ne font pas de musique, ils ne font pas d'art plastique, mais ils le font, ils ont deux heures et demie l'après-midi dédié à ces pratiques. Et la première chose que je trouve dingue, c'est la note. Ils vont être notés en musique, ils vont être notés en dessin sur une heure, où ils ont dû dessiner un truc. Déjà, moi je suis contre la note et ces formes d'évaluation que je trouve pas du tout adaptées, mais c'est absurde de mettre une note sur 10, sur 20, sur un dessin, sur... Enfin, je sais pas, moi j'aimerais voir les critères d'évaluation, parce qu'il y en a en plus. Mais ça colle pas, c'est pas possible. en fait, il ne devrait pas y avoir de notes, il devrait y avoir juste des encouragements. Ok, bah oui, t'as réussi aujourd'hui, t'as réussi à chanter devant tes camarades. Waouh, bah là t'as 20 sur 20, quoi. Tout de suite. Donc c'est bien, c'est bien de proposer des enseignements artistiques, mais je pense que ça devrait être fait différemment. Mais je pense que beaucoup de choses devraient être faites différemment à l'école.

  • Speaker #1

    Ça c'est sûr. Alors toi, tu connais bien un parcours... qui est pourtant assez méconnu, je trouve, c'est le parcours art-études. Alors, on connaît beaucoup en France le parcours sport-études. Comment se fait-il que le parcours art-études soit moins connu ? Est-ce que tu connais la proportion d'élèves qui le suivent en France ? Enfin, je suppose que le chiffre est difficile à trouver, mais est-ce que c'est quelque chose qui est beaucoup proposé aux élèves ? Et toi, quelle est ton expérience de cette formule différente de la scolarité en France ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, moi j'ai eu la chance de travailler pour un établissement qui m'a proposé de développer justement le parcours art-études. Il proposait le fameux parcours sport-études et on m'a demandé par rapport à ce que j'avais fait, mon parcours, est-ce que tu peux développer ça ? Donc je l'ai fait avec mon bon sens, j'avais de la chance, c'était un établissement privé, donc assez ouvert. Alors en fait, c'est un rythme scolaire qui va s'adapter. à une pratique assidue du sport ou une pratique assidue des arts, entre guillemets. Donc ça peut être les arts visuels, ça peut être la musique, le théâtre. Alors ça, c'est proposé au collège, puisqu'il y a les chams, chades. Donc au collège, il peut y avoir des jeunes qui ont des horaires aménagés, qui leur permettent de faire plus de théâtre, plus de musique. Et ça, c'est super. Et ça, dans plein de collèges publics, il y a ces parcours-là. Le problème, c'est qu'après, au lycée, Il y en a beaucoup moins. Il y a quelques lycées à horaires aménagés, pareil. Et ces lycées-là, en tout cas, sont beaucoup plus orientés sport-études. Alors, ma réponse au fait qu'on connaisse mieux le sport-études que l'art-études, c'est que les horaires aménagés pour les sportifs, c'est souvent pour les sportifs de haut niveau. C'est-à-dire que ce sont un peu les athlètes de demain. Et donc, ils vont un peu faire rayonner la France, rayonner l'établissement aussi. Donc forcément, on va les pousser à... Voilà, on a un joueur de tennis qui est très prometteur. On va lui permettre de... Je suis hyper cynique, parce que je suis en forme aujourd'hui. Mais ce que je veux dire par là, c'est que, en ce qui concerne les pratiques artistiques, ce n'est pas du tout le même... le même schéma parce qu'on peut avoir un artiste de haut niveau, mais qu'est-ce que ça veut dire en fait ? Ça ne veut pas dire grand-chose. Et en plus de ça, je pense que le art-étude devrait permettre au contraire à chacun de pouvoir s'exprimer. Et puis essayer parfois des pratiques artistiques et essayer d'en faire beaucoup. C'est-à-dire que par exemple on a des jeunes, ils ont envie comme moi à leur âge, ils disent moi je vais être une rockstar, ça va être mon métier. Ok, va faire 8 heures de musique comme ça tous les après-midi. On va voir si vraiment... Alors que le sport c'est autre chose. Le sport c'est vraiment ta voix. Il y a aussi les élèves qui sont en sport études. Je pense au départ déjà, ils sont plus disciplinés, ils sont plus cadrés, donc c'est plus facile entre guillemets. Les élèves artistes, le cadre, franchement, c'est pas la même chose. Donc c'est beaucoup plus compliqué pour l'école de gérer entre guillemets, enfin en tout cas de pouvoir leur permettre d'avoir une scolarité adaptée. Donc je pense que c'est pour ça qu'il y en a moins.

  • Speaker #1

    Pour conclure un peu tout ce que tu viens de dire, est-ce que tu pourrais... Nous résumer pourquoi selon toi l'art et la culture sont essentiels dans le quotidien des enfants et des jeunes ?

  • Speaker #0

    Alors l'art et la culture sont essentiels parce que ça apporte une ouverture. ça permet de nourrir sa curiosité. Tous les enfants sont curieux. Tous, tous. Mais il faut juste les stimuler. C'est-à-dire que même un petit enfant, et moi je ne suis pas une spécialiste de la petite enfance, mais je vois, j'observe, si on met un enfant toute la journée assis sur sa chaise bébé face à un mur, il ne fera rien. Mais il faut les stimuler et les occuper. Et par l'art et la culture, on nourrit cette curiosité. Et en plus de ça, on leur permet d'avoir quand même une base qui va leur servir toute leur vie. Moi, je sais que j'ai cette chance inouïe d'avoir une mère qui était archéologue. Et donc, il me traînait dans les musées. Et parfois, je n'avais pas envie d'y aller. J'en avais pas le bol. Surtout les musées d'art et traditions populaires. partout où on allait, on devait se taper le musée d'art et de tradition populaire, avec les costumes et tout, de chaque village. Il n'empêche que, parfois, il faut un petit peu forcer, et après, ça reste. Et après, ça permet d'avoir des références, d'avoir la ref, comme ils disent. Mais, par exemple, la lecture, la mythologie grecque, la mythologie romaine, l'ancienne Égypte, la Bible, tout ça, ce sont des histoires. qu'on peut comprendre et ensuite ça nous permet dans nos études de nous construire notre propre culture. C'est hyper important. Et le fait de pratiquer en plus, ça booste la confiance. C'est l'essentiel la confiance. Et je rajouterais aussi qu'il y a une chose, on ne met pas assez l'accent sur le travail collectif. C'est-à-dire que moi je pense que... Oui, l'art et la culture, c'est aller voir des expos, pratiquer la musique, tout ça c'est essentiel, mais le faire ensemble, c'est hyper important. En musique, comprendre qu'on fait partie d'un tout. C'est une leçon de vie, je pense. C'est-à-dire que faire partie d'un orchestre ou d'un groupe de musique, c'est génial parce qu'on se rend compte que si on ne fait pas sa note au moment voulu, tout se casse la figure. Et ça, c'est hyper important au niveau des valeurs fondamentales. C'est-à-dire que dans la vie active, ensuite on fait partie d'une entreprise, d'un groupe de travail, d'une association. Et c'est hyper valorisant de se dire, Moi, si je n'apporte pas ma petite pierre à l'édifice, ça ne va pas marcher. Et là, c'est le travail collectif, le vivre ensemble, la co-responsabilité. Ce sont des valeurs essentielles et l'entraide. Et je pense que par les pratiques artistiques, on peut comprendre ça très très tôt. Parce qu'il n'y a pas besoin des mots. Moi j'ai le souvenir, quand j'étais... je pense que c'était dernière année de maternelle, j'ai une bonne mémoire, et on a construit une mosaïque dans toute la classe, tous ensemble, on avait nos petits carrés là, on avait chacun des couleurs, et c'est génial de le faire ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aimerais rajouter quelque chose sur les ateliers 62 avant qu'on se quitte ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que je suis en plein dans ce chantier, en fait on a une... On a un nouveau programme qu'on ouvre dès maintenant, mais surtout à partir de septembre, qui est destiné aux jeunes après le bac. On propose une année de césure, fort de cette expérience auprès des jeunes. En discutant avec eux, on a monté ensemble une année de césure qui est créative et artistique, pour nourrir la curiosité, pour surtout faire une pause, arrêter la pression. C'est un programme qui n'a pas de notes, qui n'a pas d'évaluation. et qui propose des ateliers de géopolitique, philo, de questions d'environnement, le matin et des pratiques artistiques l'après-midi, pour un petit peu penser à autre chose et permettre de mieux se connaître et faire des choix qui nous ressemblent. Donc voilà, on a appelé ça le PIC, le programme interculturel et créatif. Et on lance, c'est pas du tout la pub, mais c'est parce que c'est chouette, c'est vraiment bien. Et ce qui est intéressant... Pour terminer, c'est que sur l'année de césure, j'ai interrogé les jeunes. La première chose, quand je leur ai dit qu'est-ce qui vous semble vraiment important ? ils m'ont tous dit un emploi du temps Donc c'est intéressant parce que l'année de césure, c'est génial, le projet, c'est génial, mais il faut qu'il y ait un cadre. Et nous, on l'a vraiment construit avec eux. Donc pour en savoir plus... Il faut venir nous voir.

  • Speaker #1

    Je partagerai évidemment tous les liens. Alors, tu la connais, la dernière question. Tu sais que le podcast s'appelle Les Adules de Demain. Qu'est-ce que tu souhaiterais aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Je leur souhaite d'être dans l'action, surtout. Et de faire tous d'être acteurs de leur vie. de vivre et non pas d'exister. Voilà. Qu'ils soient dans la vie et pas dans l'existence. C'est-à-dire qu'ils fassent des choses. Parce qu'il faut faire. C'est très très important. Il ne faut pas faire bien, il faut faire. Et je leur souhaite d'être vraiment acteurs de leur propre vie.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Daphné.

  • Speaker #0

    Merci à toi.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

Et si l’art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir ? Daphné Kauffmann connaît bien ce sujet, puisqu’après son métier d’enseignante, de journaliste mais aussi d’artiste, elle se consacre aujourd’hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif, à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l’art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d’une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu, les Ateliers 62, que j’admire tant.


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Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises, de la punition.

  • Speaker #1

    Et on pense que c'est normal.

  • Speaker #0

    Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle, elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait, l'éducation est la plus belle arme de paix. Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup, il dit tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Descleves, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Et si l'art et la culture avaient le pouvoir de faire grandir et souvent de guérir les enfants ? Daphne Kaufmann connaît bien ce sujet, puisqu'après son métier d'enseignante, de journaliste mais aussi d'artiste, elle se consacre aujourd'hui aux Ateliers 62, un tiers-lieu fondé pour les jeunes, pour leur permettre de développer leur potentiel créatif à l'écart de tous les maux qui les entourent. Nous avons évidemment parlé de phobie scolaire et du pouvoir de guérison de l'art pour ces jeunes qui souffrent, des bénéfices d'une pratique artistique dès le plus jeune âge et des prouesses de ce lieu qu'est les Ateliers 62, que j'admire tant. Je vous souhaite une bonne écoute. Hello Daphné.

  • Speaker #0

    Salut Stéphanie.

  • Speaker #1

    Je te retrouve aujourd'hui dans les locaux de ton tiers lieu dédié à l'épanouissement des jeunes grâce à la pratique artistique. Il s'agit des Ateliers 62, on est exactement dans le 14e arrondissement de Paris. Et en plus de cette casquette d'entrepreneur, tu as été dans ta vie artiste, journaliste, romancière, formatrice et enseignante. Beaucoup de choses. Qu'est-ce qui t'a amené dans ton parcours de vie à t'intéresser au rapport des jeunes à l'art et à la culture ?

  • Speaker #0

    Déjà, je suis très heureuse de participer au podcast quand même, je le dis, parce que je suis une auditrice fervente. Donc, je suis très contente et très honorée. En fait, depuis, moi j'ai eu la chance très jeune d'avoir des parents. et surtout une maman qui attachait de l'importance aux pratiques artistiques en loisirs, je précise. Et donc depuis toute petite, c'était le sport, la danse, moi je fais beaucoup de danse. Et ensuite il est arrivé un âge où elle m'a dit, ma mère m'a dit, de quel instrument est-ce que tu aimerais jouer ? Donc elle ne m'a pas dit, est-ce que tu aimerais faire de la musique ? Elle m'a dit, quel est l'instrument que tu aimerais choisir ? Et on avait un piano à la maison, et moi je trouvais que le piano c'était trop facile, donc j'ai dit la guitare électrique. Je viens de le préciser. Alors, c'est important. Et en fait, pour ma mère, mais pour mon père aussi, toutes les activités extrascolaires étaient très importantes. En plus, je pense qu'ils ont dû remarquer que très tôt... J'aimais bien me mettre sur le vent de la scène, par exemple tous les spectacles, j'adorais ça. Donc ils ont entretenu ça. Mais c'était vraiment loisir. C'était pas quelque chose, c'était pas une voie professionnelle. Pas de bol, moi je voulais jouer de la guitare électrique pour être une rockstar. Ils ne le savaient pas encore. Mais tout ça pour dire que je baignais dedans. Et l'écriture aussi, très vite. Moi je lisais beaucoup depuis toute petite. Et en fait je me suis rendue compte que je me posais plein de questions. Et j'avais soit des réponses ou en tout cas je trouvais à travers les romans que je lisais les mêmes questionnements et c'était assez rassurant finalement. Donc voilà je baignais là-dedans et parfois quand j'étais au collège je pouvais me coucher à 2h du matin parce que je lisais, j'écoutais de la musique. Voilà tout ce qui était art et culture était très très présent depuis ma petite enfance. Les expos, je m'intéressais à toutes ces choses-là parce que je pense que depuis toute petite on m'a ouverte à ça et je pense que c'est essentiel.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui t'a rapprochée du sujet des jeunes et de l'éducation ?

  • Speaker #0

    Alors, je pense que... Parce que moi, j'ai fait des études de lettres et je voulais surtout pas être prof. Donc ça, c'est sûr. J'y suis venue de manière complètement... détournée, mais on m'a déjà posé cette question, donc j'y réfléchis entre temps, et en fait je pense que c'est parce que j'ai très bonne mémoire, mais j'ai vraiment une très très bonne mémoire de l'enfance c'est-à-dire par exemple je vois quand on en parle avec mon frère lui il ne se souvient de rien, et je me souviens très très bien de ma petite enfance, de mon enfance, et très bien de mon adolescence et donc je pense que finalement pour moi c'est pas si loin, ou en tout cas c'est dans un tiroir que je peux ouvrir facilement et donc quand j'ai commencé à quand j'ai enseigné au collège et que j'ai rencontré des jeunes, et en plus J'enseignais toujours dans le privé, dans des collèges un peu alternatifs, avec des pédagogies un peu différentes. Et donc tout de suite je me suis rendue compte que les questions qui se posaient, je me posais les mêmes, et que parfois ça peut être vraiment difficile. C'est-à-dire que, par exemple, tout bête, mais on se rend compte qu'on meurt, on se rend compte qu'il y a la guerre, que l'être humain n'est pas cool en fait, mais donc moi je ne suis pas cool non plus. Et toutes ces questions, moi je me rappelle quand j'étais ado, mais en pré-ado, très jeune, ça pouvait m'empêcher de dormir, j'étais angoissée. Et donc je les voyais, ces jeunes-là, et je me suis dit mais... Je peux déjà en parler avec eux, et je trouvais ça hyper intéressant parce qu'ils ont Internet, ils ont tout ce que moi je n'avais pas. Et à travers le dialogue, ça m'a vraiment intéressée. Il faut dire que je m'intéresse beaucoup aux gens. Puisque quand j'écris, j'observe beaucoup l'être humain me passionne, et comme ça je peux créer des personnages, mais les jeunes encore plus, parce qu'ils sont vraiment à un moment, c'est entre chien et loup, ils sont au moment vraiment où il ne suffit pas grand chose, ils sont sur un fil, et en fonction du vent, ça peut basculer d'un endroit à un autre, et nous, si on peut les aider, c'est top. Et il se trouve que... Je ne sais pas comment, alors ça c'est quelque chose que je dois avoir. J'arrive à leur parler et on arrive à avoir un lien de confiance assez facilement. Donc autant s'en servir.

  • Speaker #1

    Justement, tu as créé un lieu inédit dédié aux jeunes, les Ateliers 62. Est-ce que tu pourrais nous expliquer comment tu es arrivée à créer cette structure pas comme les autres ?

  • Speaker #0

    En fait, moi je viens de la musique et de l'écriture. Et comme je t'ai dit tout à l'heure, je voulais pas être une rockstar, j'étais sûre que j'allais être une rockstar, c'était mes convaincus. Donc là on a une de mes guitares derrière. Et donc j'ai fait beaucoup de chants, j'ai beaucoup tourné, etc. Et puis à un moment donné, ensuite j'étais journaliste, j'ai écrit des livres, et puis je suis arrivée progressivement à la formation de journaliste et ensuite à être prof. Et puis j'ai travaillé dans un collège privé où on m'a attribué énormément de tâches. Donc j'étais en même temps prof, en même temps responsable du collège, prof principale, j'avais des classes de première, des classes de terminale, j'étais responsable du parcours art-études, de l'option théâtre, bon bref, donc au bout d'un moment, pouf, ça a... Ou plutôt tu ! Donc au bout d'un moment, c'était vraiment surmenage, on va dire, je dis pas burn-out parce que je connais des gens qui sont en burn-out, je pense que c'était plus sévère que moi, mais voilà, surmenage, donc je vais voir mon médecin, et il me dit... Bon, vous ne touchez plus à vos mails, il faut faire uniquement des choses qui vous plaisent. Et tout de suite, je me suis dit, je vais me remettre à la musique, parce que j'avais arrêté, je n'avais plus le temps. Et donc, j'ai recommencé à jouer la guitare, à chanter, etc. Et au moment de retourner au boulot, au bout d'un mois, j'ai voyagé aussi, j'ai pris du recul. Je pense que j'avais repris le travail depuis un jour ou deux. Et là, je passe dans le 14e, sur le chemin du boulot, je passe devant la rue de la Tombissoire, au numéro 62. Il y avait une ancienne pizzeria à emporter. espèce de vieux boui-boui, et je vois Alloué sur la vitrine, avec un numéro de téléphone, et franchement, de manière presque inconsciente, j'appelle, je ne cherchais rien du tout, j'appelle, je tombe sur un agent immobilier très sympa, qui était dans le quartier, moi j'avais une heure de trou, comme on dit, et donc il me fait visiter ce local, il y avait deux salles, une salle sur rue, une salle à l'arrière, et puis une cave voûtée, et je ne sais pas, là tout de suite, c'est une espèce de vision, Tout de suite, je me suis dit, mais voilà, en fait, j'ai envie de créer un lieu pour proposer des cours de musique et des cours d'écriture. C'était vraiment les deux pratiques que je maîtrisais le mieux. Et j'ai appelé mon mari, je lui ai dit, je sais ce que je fais, le pauvre. Franchement, mais en même temps, il voulait que j'aille bien et que je fasse quelque chose qui me plaise. Et donc, à partir de là, j'ai commencé à imaginer le lieu. Donc, mon mari étant architecte. On a fait, donc ça c'était au mois de mai, on a fait les travaux l'été et tout de suite j'avais tout le projet en tête, c'est-à-dire autour de la musique et l'écriture. J'arrivais pas à trouver le dénominateur commun. Et en fait j'ai vu, c'est pour ça que c'est très important à travers le dialogue, quand on a un projet de dialoguer avec les gens, parce que j'ai parlé avec un ami dans la com, et je lui ai dit mais voilà moi j'aimerais monter des cours d'écriture créative, et en même temps de la guitare, et en même temps du chant, mais j'arrive pas à trouver, et lui me dit bah expression artistique. Ah ouais, c'est vrai, t'as raison. Et donc voilà, j'ai monté, il fallait que je trouve un nom très vite. Et donc je lui ai dit, on est au 72 rue de la Tombissoire, atelier c'est chouette, atelier 62. Et donc la rentrée, on a commencé à accueillir, on avait trois ou quatre jeunes au départ, qui étaient mes anciens élèves. Et puis petit à petit, et en discutant avec eux, on a fait écriture de scénario, et puis ensuite on s'est dit, on va pouvoir faire écriture narrative. Et puis ensuite, au début c'est moi qui enseignais le chant, il faut savoir, je ne suis pas du tout prof d'octobre. Maintenant on a une super prof de chant, Camille, qui est venue visiter les locaux Relat en Bissoire et qui m'a proposé d'être prof. Mais c'est parti de rien en fait, c'est curieux. Mais je pense que… Très souvent, en fait, on ne se rend pas compte du cheminement que les idées font à l'intérieur de notre esprit et tout se construit en fait. Et ensuite, quand on est devant la feuille blanche, il ne suffit pas grand-chose, c'est un petit déclencheur et ça sort.

  • Speaker #1

    L'une des particularités de ton lieu, c'est que tu accueilles beaucoup de jeunes en phobie scolaire. Pourquoi est-ce que tu penses que l'expression artistique peut sauver ces jeunes-là ?

  • Speaker #0

    Alors je pense que c'est essentiel et pareil, j'ai moi-même des souvenirs de moments où j'allais pas très bien. J'avais la chance entre guillemets de ne pas avoir internet ni les réseaux sociaux. Mais c'est très important parce que déjà on se rend compte que d'autres ont exprimé des choses, des pensées, des mal-être. Alors moi je lisais énormément de poésie. Et donc évidemment, quand on lit les poèmes de Rimbaud, voilà, 17 ans, on se dit Waouh, lui, il avait déjà tout ça en tête, donc finalement, moi, ça va pas si mal, en fait. Mais à travers des personnages de romans, voilà, on se dit... je pense, c'est idiot, mais je pense aux Grands Maulnes, des romans comme ça qui m'ont marquée quand j'étais ado, et qui posent des questions, qui n'apportent pas de réponses, mais qui posent des questions, au journal d'Anne Frank par exemple. Et donc on n'est pas tout seul, on se dit voilà, il y a plein de gens intelligents qui se sont posés les mêmes questions. Donc d'une part, je pense que la lecture, l'écriture, très tôt, moi je rédigeais un journal, c'est hyper salutaire de pouvoir mettre par écrit, et puis même d'écouter de la musique, de jouer de la musique, et puis de... Quand on ne va pas bien, on prend sa guitare et puis tout d'un coup, on ne pense à rien. Et ça, c'est vraiment génial. Hop là, on éteint le cerveau. Récemment encore, j'ai encore fait cette expérience d'aller à une expo, ce que je devrais faire plus souvent. Mais tout d'un coup, on est, moi qui viens du son, on vit vraiment l'expérience d'une exposition visuelle. Et pareil, on a le cerveau qui est complètement... On remet le compteur à zéro. Et moi je m'en suis rendue compte assez jeune de ça, de cette chance. Et je pense que pour les jeunes, c'est très très important de pouvoir faire le vide. de pouvoir avoir un moment où ils se posent, parce que là, actuellement, leur cerveau est sans cesse sollicité tout le temps, tout le temps, tout le temps, et de pouvoir avoir des moments de rien qui sont comblés par exprimer ce qu'ils ont en eux, se rendre compte qu'ils ne sont pas seuls. Moi, je privilégie énormément, et ici, aux Ateliers 62, c'est vraiment partie de notre ADN, la rencontre. C'est-à-dire que c'est chouette de faire de la musique à la maison, d'écrire à la maison, de dessiner à la maison, mais quand on est ensemble, on se rend compte qu'on n'est pas tout seul, on en parle, on échange sur ces pratiques, et de là, on se rend compte qu'on a les mêmes questionnements, qu'on a les mêmes peurs. Et je pense que c'est très très important, il faut que tout ça sorte, il faut exprimer tout ça, et ça peut vraiment devenir une aide. Et en ce qui concerne les élèves... en refus anxieux ou en phobie scolaire ou en décrochage ou en raccrochage plutôt, c'est important parce qu'ils sont isolés chez eux, avec leur téléphone souvent. Et en fait, il y a un moment où, pour plusieurs raisons, ils ne peuvent plus aller à l'école. Moi, je parle plus d'allergie, en fait. C'est-à-dire que c'est comme un... Alors moi, je suis sujette au vertige et je sais qu'à un moment donné, si j'ai une crise de vertige, il n'y a rien à faire. Et quand on me voit, on a vraiment l'impression que je deviens folle. C'est-à-dire que je commence à trembler partout, à pleurer. Et en plus, après, on a vraiment la haine. C'est-à-dire qu'ensuite, il faut s'isoler parce que ça nous énerve d'être comme ça. Et j'établis un peu ce parallèle. J'en ai beaucoup parlé aux jeunes. Et ils m'expliquent que pour X raisons, ils n'ont plus envie d'y aller. Et puis, le lendemain, toujours pas. Et à un moment donné, les parents insistent. Et pour expliquer aux parents que vraiment ce n'est pas possible, ils n'ont pas d'autres moyens que de faire des crises. Ça peut devenir très très violent. Et souvent, ce n'est pas forcément les parents, mais c'est souvent interprété comme de l'hyper-anxiété, de l'agressivité, de la violence. Ensuite on les emmène voir le psy ou voir le psychiatre. Et puis ensuite, malheureusement, parfois, ils entrent en milieu hospitalier et ils deviennent phobiques. Et donc ça devient une maladie. Et moi je trouve que ce qu'on propose ici, ce que j'aimerais, c'est que ces jeunes puissent venir avant. C'est-à-dire au moment où ils n'ont plus envie d'aller en classe, qu'est-ce qu'ils ont d'autre comme choix à part rester seul à la maison, ce qui n'est pas top, aller à l'école, mais ça ce n'est pas possible. sortir, mais ils ne vont pas aller dans les cafés, ce sont des jeunes, ils sont mineurs, donc nous ce qu'on leur propose, c'est déjà de venir aux ateliers, juste venir, ils prennent un café, ils prennent un chocolat, ils sont entre eux, ils sont très peu nombreux, on discute, moi je suis toujours là, et puis ensuite, l'après-midi, on leur propose, on leur dit, nous on a des ateliers du chant, de l'écriture créative, art plastique, théâtre, si tu as envie, Et si tu as envie de rencontrer d'autres jeunes à un moment donné, tu peux t'inscrire et venir. Et parfois, ils vont venir au bout d'une semaine, parfois un mois, deux mois, parfois un an. Mais ce qui est important, c'est juste de semer la petite graine et de dire, nous on est là, et un jour, si tu veux, si tu n'as pas envie d'aller voir ton psy, ton médecin, et encore moins ton prof, il y a d'autres jeunes, et tu peux venir et tu discutes, et en plus, c'est beau. Et ça, c'est important. Ce n'est pas un endroit tout poussiéreux. Et pour eux... Déjà quand ils entrent, moi je sais que le jour de l'inauguration, j'ai vu des élèves, je sais qu'ils sont en phobie scolaire, et de se rendre compte qu'on a fait tout ça pour eux, finalement, déjà ça les touche. Ils ont envie de revenir et ils s'ouvrent peu à peu. Et c'est super important.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aurais un exemple d'élève qui serait venu après une phobie scolaire et qui s'en serait sorti grâce à cette expérience artistique ?

  • Speaker #0

    Heureusement, et on est super fiers, j'en ai plein, mais vraiment plein. Et c'est le genre d'anecdotes, j'y pense régulièrement, c'est génial, je pense le matin, je suis là, mais... Et je ne me dis pas du tout, je n'en tire aucune gloire. Je suis fière parce que juste, voilà, je suis fière d'eux, mais... Il y en a plein, plein, plein. Et je ne sais pas, par exemple, je pense à une jeune fille qui est venue quand on était rue de la Tombissoire, qui était complètement... Elle était vraiment, j'ai coutume de dire cabossée par l'éducation nationale, enfin par un système qui ne lui convenait pas, mais franchement, elle était presque fracassée. C'est-à-dire qu'elle était en souffrance physique, vraiment, et toute recroquevillée sur elle-même. Et je me souviens, en plus, elle avait un look très prononcé, un peu gothique, avec du maquillage pas possible. Et elle essaie d'intégrer une école privée et on lui avait dit non à cause de son look. Déjà, ça je m'en rappelle, ça m'avait marqué. Et pourtant, une école qui est un peu à pédagogie alternative, ils avaient dit non, elle va faire peur aux autres. Déjà, ok. Et donc elle vient. Et elle a commencé tout doucement. Au début, c'était l'écriture créative, parce que en général, ça marche assez bien. Et donc, elle écrivait ce qu'elle ressentait. Et puis ensuite, elle a fait du chant, elle a fait de la guitare. Et petit à petit, je l'ai vue... C'est génial de les voir s'ouvrir, grandir. Et donc maintenant, elle fait des études de psycho. Et maintenant, elle fait de l'orfèvrerie. On en a une autre qui est arrivée en terminale et qui n'allait pas bien du tout, qui était ultra stressée, sous pression, par le lycée, par cours sup, le bac. Elle a lâché l'affaire et maintenant elle a un sourire et elle chante divinement bien. Elle vient d'être prise dans une école de comédie musicale. Mais surtout, de les voir sourire, il suffit parfois d'un mois. C'est ça qui est dingue. On en a plein plein plein, beaucoup de jeunes filles, c'est vrai, mais ce que j'aimerais dire surtout, c'est que je me rends compte que nous ce qu'on leur propose finalement, c'est un lieu. une sorte de terreau fertile où ils peuvent pousser. Parce qu'après, en fait, ils grandissent. Et souvent, c'est à un moment donné, on oublie... C'est pour ça que c'est très délicat de dire Tu es phobique parce que ça leur met une étiquette, T'es malade Ils ne sont pas phobiques, je pense. Ils traversent l'adolescence, ils se posent des questions, ils se rendent compte que le système scolaire n'a aucun sens. Et on ne peut pas leur jeter la pierre, parce que franchement, quand on y pense, parfois, la manière dont... En tout cas, dont... dont c'est fait ici en France, il y a vraiment un problème de sens. Et puis ensuite, ils se rendent compte que le monde a plein d'autres choses à leur apporter, qu'à travers la rencontre, l'échange, ils peuvent apprendre plein de choses. Et en fait, juste, ils grandissent. Et nous, tout ce qu'on fait, c'est qu'on leur propose un espace à l'abri où ils peuvent grandir et s'épanouir. Et finalement, on ne fait pas grand-chose.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu penses que l'art, la culture, toutes ces formes de créativité sont faites pour tous les jeunes ?

  • Speaker #0

    Oui, à 200%, je suis sûre. Faites, en tout cas, ça peut les aider, ça peut les intéresser. Alors après, parfois on se rend compte depuis tout petit qu'ils ont une appétence pour tel ou tel instrument, ou pour le dessin, mais je suis convaincue qu'il n'y a même pas besoin de savoir. Par exemple, je parlais du dessin ou de l'écriture, il y a des jeunes qui pensent qu'ils ne savent pas dessiner. L'écriture je leur dis mais tu écris, ils me disent ah non mais de toute façon je suis nulle en français, je dis non mais je ne parle pas du français, je parle de l'écriture. Et parfois ne pas savoir dessiner, ne pas être bon en français, au contraire ça leur permet de s'exprimer de manière plus libre. Moi je sais qu'encore maintenant parfois je participe à des ateliers d'écriture, c'est très très difficile d'essayer de ne pas bien faire. Et je dessine, moi je peux te dessiner... C'est pas une chaise, je peux très bien dessiner une chaise, mais par contre si tu me demandes d'exprimer quelque chose à travers le dessin, alors là c'est catastrophique. Et donc parfois ceux qui ne maîtrisent pas, au contraire, c'est ceux qui arrivent à exprimer. Et ensuite quand on regarde ce qu'ils font, il y en a, ils font un trait et waouh, ils ont mis toutes leurs émotions, toutes leurs identités dans ce trait. Et je pense que les pratiques artistiques sont vraiment faites pour tous, mais d'ailleurs jeunes ou moins jeunes. Et en tout cas... ça peut les aider. Parce qu'ils sortent quelque chose qu'ils ont en eux. Il ne faut pas que ça reste à l'intérieur, parce que sinon ça te bouffe de l'intérieur.

  • Speaker #1

    Toi qui connais bien cet enseignement de l'art, qu'est-ce que tu penses aujourd'hui de la manière dont il est enseigné à l'école ?

  • Speaker #0

    Je préfère en rire. Franchement, il y a des moments dans la vie où on se dit, est-ce que je vais rire ou est-ce que je vais pleurer ? Là, aujourd'hui, je suis en forme, je suis avec toi, je suis contente. Franchement, non mais j'en ris parce que là, il y a une image qui me vient à l'esprit de... Je ne sais plus comment il s'appelait mon prof de musique quand j'étais au collège. Et nous, on avait la flûte à bec. Alors la flûte à bec, franchement, c'est une torture pour les élèves, je pense pour les profs, pour les parents, parce que quand on doit répéter la flûte à bec, non mais franchement, la flûte à bec, résumer la musique à la flûte à bec au cours de musique à l'école, c'est pas possible. Mais bon, indépendamment de ce traumatisme que je peux avoir avec la flûte à bec, je pense que déjà une heure comme ça dans un cadre scolaire, c'est mieux que rien. mais je pense que ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant. Alors, une heure, c'est mieux que rien, mais surtout dans le cadre scolaire, dans la salle de classe. Moi, je pense que ce n'est pas la bonne idée. C'est-à-dire qu'il faut sortir les pratiques artistiques de la salle de classe. Les jeunes ici, là, on est actuellement dans un studio de musique. Ils sont fous quand ils arrivent dans un studio avec des instruments, où ils peuvent chanter super fort. Dans la salle de classe, déjà, le chant, c'est compliqué. Pareil pour ce qui est des arts visuels. Il faut qu'il y ait un vrai atelier. Alors moi j'ai eu la chance, quand j'allais à l'école, il y avait un atelier, il y avait un laboratoire de musique. Mais le plus important, je trouve, c'est... Et j'ai une amie que je vais citer, Anne Bordorieux, qui est devenue amie, qui a créé un collège qui s'appelle le Collège Prévédiago, qui a tout compris, parce que les collégiens ne font pas de musique, ils ne font pas d'art plastique, mais ils le font, ils ont deux heures et demie l'après-midi dédié à ces pratiques. Et la première chose que je trouve dingue, c'est la note. Ils vont être notés en musique, ils vont être notés en dessin sur une heure, où ils ont dû dessiner un truc. Déjà, moi je suis contre la note et ces formes d'évaluation que je trouve pas du tout adaptées, mais c'est absurde de mettre une note sur 10, sur 20, sur un dessin, sur... Enfin, je sais pas, moi j'aimerais voir les critères d'évaluation, parce qu'il y en a en plus. Mais ça colle pas, c'est pas possible. en fait, il ne devrait pas y avoir de notes, il devrait y avoir juste des encouragements. Ok, bah oui, t'as réussi aujourd'hui, t'as réussi à chanter devant tes camarades. Waouh, bah là t'as 20 sur 20, quoi. Tout de suite. Donc c'est bien, c'est bien de proposer des enseignements artistiques, mais je pense que ça devrait être fait différemment. Mais je pense que beaucoup de choses devraient être faites différemment à l'école.

  • Speaker #1

    Ça c'est sûr. Alors toi, tu connais bien un parcours... qui est pourtant assez méconnu, je trouve, c'est le parcours art-études. Alors, on connaît beaucoup en France le parcours sport-études. Comment se fait-il que le parcours art-études soit moins connu ? Est-ce que tu connais la proportion d'élèves qui le suivent en France ? Enfin, je suppose que le chiffre est difficile à trouver, mais est-ce que c'est quelque chose qui est beaucoup proposé aux élèves ? Et toi, quelle est ton expérience de cette formule différente de la scolarité en France ?

  • Speaker #0

    Alors déjà, moi j'ai eu la chance de travailler pour un établissement qui m'a proposé de développer justement le parcours art-études. Il proposait le fameux parcours sport-études et on m'a demandé par rapport à ce que j'avais fait, mon parcours, est-ce que tu peux développer ça ? Donc je l'ai fait avec mon bon sens, j'avais de la chance, c'était un établissement privé, donc assez ouvert. Alors en fait, c'est un rythme scolaire qui va s'adapter. à une pratique assidue du sport ou une pratique assidue des arts, entre guillemets. Donc ça peut être les arts visuels, ça peut être la musique, le théâtre. Alors ça, c'est proposé au collège, puisqu'il y a les chams, chades. Donc au collège, il peut y avoir des jeunes qui ont des horaires aménagés, qui leur permettent de faire plus de théâtre, plus de musique. Et ça, c'est super. Et ça, dans plein de collèges publics, il y a ces parcours-là. Le problème, c'est qu'après, au lycée, Il y en a beaucoup moins. Il y a quelques lycées à horaires aménagés, pareil. Et ces lycées-là, en tout cas, sont beaucoup plus orientés sport-études. Alors, ma réponse au fait qu'on connaisse mieux le sport-études que l'art-études, c'est que les horaires aménagés pour les sportifs, c'est souvent pour les sportifs de haut niveau. C'est-à-dire que ce sont un peu les athlètes de demain. Et donc, ils vont un peu faire rayonner la France, rayonner l'établissement aussi. Donc forcément, on va les pousser à... Voilà, on a un joueur de tennis qui est très prometteur. On va lui permettre de... Je suis hyper cynique, parce que je suis en forme aujourd'hui. Mais ce que je veux dire par là, c'est que, en ce qui concerne les pratiques artistiques, ce n'est pas du tout le même... le même schéma parce qu'on peut avoir un artiste de haut niveau, mais qu'est-ce que ça veut dire en fait ? Ça ne veut pas dire grand-chose. Et en plus de ça, je pense que le art-étude devrait permettre au contraire à chacun de pouvoir s'exprimer. Et puis essayer parfois des pratiques artistiques et essayer d'en faire beaucoup. C'est-à-dire que par exemple on a des jeunes, ils ont envie comme moi à leur âge, ils disent moi je vais être une rockstar, ça va être mon métier. Ok, va faire 8 heures de musique comme ça tous les après-midi. On va voir si vraiment... Alors que le sport c'est autre chose. Le sport c'est vraiment ta voix. Il y a aussi les élèves qui sont en sport études. Je pense au départ déjà, ils sont plus disciplinés, ils sont plus cadrés, donc c'est plus facile entre guillemets. Les élèves artistes, le cadre, franchement, c'est pas la même chose. Donc c'est beaucoup plus compliqué pour l'école de gérer entre guillemets, enfin en tout cas de pouvoir leur permettre d'avoir une scolarité adaptée. Donc je pense que c'est pour ça qu'il y en a moins.

  • Speaker #1

    Pour conclure un peu tout ce que tu viens de dire, est-ce que tu pourrais... Nous résumer pourquoi selon toi l'art et la culture sont essentiels dans le quotidien des enfants et des jeunes ?

  • Speaker #0

    Alors l'art et la culture sont essentiels parce que ça apporte une ouverture. ça permet de nourrir sa curiosité. Tous les enfants sont curieux. Tous, tous. Mais il faut juste les stimuler. C'est-à-dire que même un petit enfant, et moi je ne suis pas une spécialiste de la petite enfance, mais je vois, j'observe, si on met un enfant toute la journée assis sur sa chaise bébé face à un mur, il ne fera rien. Mais il faut les stimuler et les occuper. Et par l'art et la culture, on nourrit cette curiosité. Et en plus de ça, on leur permet d'avoir quand même une base qui va leur servir toute leur vie. Moi, je sais que j'ai cette chance inouïe d'avoir une mère qui était archéologue. Et donc, il me traînait dans les musées. Et parfois, je n'avais pas envie d'y aller. J'en avais pas le bol. Surtout les musées d'art et traditions populaires. partout où on allait, on devait se taper le musée d'art et de tradition populaire, avec les costumes et tout, de chaque village. Il n'empêche que, parfois, il faut un petit peu forcer, et après, ça reste. Et après, ça permet d'avoir des références, d'avoir la ref, comme ils disent. Mais, par exemple, la lecture, la mythologie grecque, la mythologie romaine, l'ancienne Égypte, la Bible, tout ça, ce sont des histoires. qu'on peut comprendre et ensuite ça nous permet dans nos études de nous construire notre propre culture. C'est hyper important. Et le fait de pratiquer en plus, ça booste la confiance. C'est l'essentiel la confiance. Et je rajouterais aussi qu'il y a une chose, on ne met pas assez l'accent sur le travail collectif. C'est-à-dire que moi je pense que... Oui, l'art et la culture, c'est aller voir des expos, pratiquer la musique, tout ça c'est essentiel, mais le faire ensemble, c'est hyper important. En musique, comprendre qu'on fait partie d'un tout. C'est une leçon de vie, je pense. C'est-à-dire que faire partie d'un orchestre ou d'un groupe de musique, c'est génial parce qu'on se rend compte que si on ne fait pas sa note au moment voulu, tout se casse la figure. Et ça, c'est hyper important au niveau des valeurs fondamentales. C'est-à-dire que dans la vie active, ensuite on fait partie d'une entreprise, d'un groupe de travail, d'une association. Et c'est hyper valorisant de se dire, Moi, si je n'apporte pas ma petite pierre à l'édifice, ça ne va pas marcher. Et là, c'est le travail collectif, le vivre ensemble, la co-responsabilité. Ce sont des valeurs essentielles et l'entraide. Et je pense que par les pratiques artistiques, on peut comprendre ça très très tôt. Parce qu'il n'y a pas besoin des mots. Moi j'ai le souvenir, quand j'étais... je pense que c'était dernière année de maternelle, j'ai une bonne mémoire, et on a construit une mosaïque dans toute la classe, tous ensemble, on avait nos petits carrés là, on avait chacun des couleurs, et c'est génial de le faire ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu aimerais rajouter quelque chose sur les ateliers 62 avant qu'on se quitte ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que je suis en plein dans ce chantier, en fait on a une... On a un nouveau programme qu'on ouvre dès maintenant, mais surtout à partir de septembre, qui est destiné aux jeunes après le bac. On propose une année de césure, fort de cette expérience auprès des jeunes. En discutant avec eux, on a monté ensemble une année de césure qui est créative et artistique, pour nourrir la curiosité, pour surtout faire une pause, arrêter la pression. C'est un programme qui n'a pas de notes, qui n'a pas d'évaluation. et qui propose des ateliers de géopolitique, philo, de questions d'environnement, le matin et des pratiques artistiques l'après-midi, pour un petit peu penser à autre chose et permettre de mieux se connaître et faire des choix qui nous ressemblent. Donc voilà, on a appelé ça le PIC, le programme interculturel et créatif. Et on lance, c'est pas du tout la pub, mais c'est parce que c'est chouette, c'est vraiment bien. Et ce qui est intéressant... Pour terminer, c'est que sur l'année de césure, j'ai interrogé les jeunes. La première chose, quand je leur ai dit qu'est-ce qui vous semble vraiment important ? ils m'ont tous dit un emploi du temps Donc c'est intéressant parce que l'année de césure, c'est génial, le projet, c'est génial, mais il faut qu'il y ait un cadre. Et nous, on l'a vraiment construit avec eux. Donc pour en savoir plus... Il faut venir nous voir.

  • Speaker #1

    Je partagerai évidemment tous les liens. Alors, tu la connais, la dernière question. Tu sais que le podcast s'appelle Les Adules de Demain. Qu'est-ce que tu souhaiterais aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Je leur souhaite d'être dans l'action, surtout. Et de faire tous d'être acteurs de leur vie. de vivre et non pas d'exister. Voilà. Qu'ils soient dans la vie et pas dans l'existence. C'est-à-dire qu'ils fassent des choses. Parce qu'il faut faire. C'est très très important. Il ne faut pas faire bien, il faut faire. Et je leur souhaite d'être vraiment acteurs de leur propre vie.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Daphné.

  • Speaker #0

    Merci à toi.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des adultes de demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

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