Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206 cover
Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206 cover
Les Adultes de Demain

Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206

Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206

58min |26/09/2024
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Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206 cover
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Les Adultes de Demain

Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206

Eduquer, sans violence ni laxisme - Isabelle Filliozat - #206

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Description

Les faits d’actualité récents, où une enseignante fait preuve d’une violence inouïe auprès de l’une de ses élèves à la rentrée scolaire, fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant, depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu’une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l’enfant.


Isabelle Filliozat fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d’autoritarisme et d’obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteure, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J’ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faites aux enfants, des raisons expliquant l’urgence de changer notre regard sur les enfants et des manières dont nous pouvons réparer l’enfance blessée de nombreux adultes. C’est suite à la lecture de son dernier livre bilan “Éduquer : tout ce qu’il faut savoir”, que j’ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les points clés de l’éducation.


Quelques questions posées pendant l'interview :

  • Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Il semblerait qu’au regard des autres, être un parent autoritaire, capable de faire obéir son enfant, soit plus valorisé dans la société que d’être à son écoute et de respecter ses besoins. Pourquoi la parentalité positive ne fait-elle pas l'unanimité ? Avez-vous eu l’impression d’être jugée quand vous avez éduqué vos enfants de cette manière-là ?

  • Comment réagir selon vous lorsque l’on assiste à des scènes de violence contre des enfants dans la rue, chez des amis ?

  • Comment avez-vous vécu les attaques de ces dernières années à votre encontre mais aussi contre d’autres personnes défendant la parentalité positive ?

  • Comment de telles incompréhensions vis-à-vis de la parentalité positive ont-elles pu naître ? Les résultats des différentes études sur la parentalité positive prouvent systématiquement ses bienfaits sur le comportement des enfants, sur le stress des parents, sur les résultats académiques, etc. Pourquoi ces résultats sont-ils si peu reconnus ?

  • Que faire pour que notre société évolue plus vite à ce sujet ? Que doit-on changer dans notre manière de lutter contre les VEO, de défendre la parentalité positive, mais surtout dans la place que l’on réserve aux enfants dans la société ?


Ressources :




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises,

  • Speaker #1

    de la punition. Et on pense que c'est normal. Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle,

  • Speaker #0

    elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait,

  • Speaker #1

    l'éducation est la plus belle arme de paix.

  • Speaker #0

    Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ces images nous ont tous choqués. L'effet d'actualité récent où une enseignante utilise la violence auprès de l'une de ses élèves à la rentrée scolaire fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant... Depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu'une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l'enfant. Isabelle Fiosa fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d'autoritarisme et d'obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteur, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J'ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faite aux enfants, des raisons expliquant l'urgence de changer notre regard sur les enfants, et des manières dont nous pouvons réparer l'enfance blessée de nombreux adultes. C'est suite à la lecture de son dernier livre, presque un bilan, qui s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont, que j'ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les clés d'une éducation bienveillante. Je vous souhaite une bonne écoute. Bonjour Isabelle.

  • Speaker #1

    Bonjour Stéphanie, bonjour à tout le monde qui écoute.

  • Speaker #0

    Quel honneur de vous retrouver aujourd'hui pour la seconde fois au micro des adultes de demain. Un plaisir plus. Je le rappelle à chaque fois, mais c'est vrai que vous avez beaucoup inspiré l'éducation que mes parents ont offerte à mes frères et sœurs et moi. Je suis la quatrième d'une fratrie de cinq. Car oui, Isabelle, je suis certaine que vous avez contribué à améliorer la vie familiale de nombreuses personnes en diffusant les valeurs de la parentalité dites positives. Avant même de parler des méthodes ou des techniques, vous avez permis à des familles de s'éloigner de la culture de la punition, de l'obéissance et du rapport hiérarchique très vertical entre parents et enfants, pour se recentrer sur les besoins de l'enfant et sur le respect de leur développement. Alors aujourd'hui on se rend compte, puisque vous avez publié un nouveau livre que j'ai adoré, il s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont et qui propose un panorama de plus de 40 ans de vos recherches. Cet ouvrage démontre que l'éducation positive devrait être la voie à suivre. pour élever les enfants, en leur offrant à la fois un cadre et un environnement propices à un développement harmonieux. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre, qui semble dresser un véritable bilan de votre travail de ces dernières années ?

  • Speaker #1

    J'ai éprouvé le besoin d'écrire tout ça pour rectifier tout ce qui était dit. Parce qu'en fait, beaucoup de choses les deux dernières années ont été dites sur la parentalité positive. On voit écrit sous la plume de certains journalistes. toutes sortes de choses qui sont profondément fausses ou partiellement fausses ou légèrement erronées. Bref, c'est difficile pour les gens de s'y retrouver dans qu'est-ce qui est de la parentalité positive, qu'est-ce qui n'en est pas et qu'est-ce qui est vrai dans ce qui est dit et qu'est-ce qui ne l'est pas. Parce qu'il y a des choses vraies aussi qui sont dites, mais donc c'était un peu mélangé tout ça. Et je me suis dit mais ce n'est pas possible, je ne peux pas laisser dire toutes sortes de choses qui... qui sont profondément fausses. Donc ça me paraissait fondamental de rétablir ce qui me paraissait vraiment plus juste et d'étayer ça avec les recherches scientifiques. Donc il y a un gros travail dans ce livre de pouvoir retrouver les recherches scientifiques qui soutiennent ce que j'avance, qui soutiennent ce qu'est la parentalité positive.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est une forme de réponse aussi aux attaques que vous avez vécues ces dernières années à votre rencontre, mais aussi plus largement à toutes les personnes qui défendent la parentalité positive ?

  • Speaker #1

    C'est tout à fait une réponse, c'est vraiment comme ça que je le conçois, et c'est ce que je dis d'ailleurs dans l'introduction du livre. J'ai écrit ce livre en réponse pour clarifier les choses, et pour que vraiment on puisse enfin s'y retrouver dans cet espace de la parentalité dans lequel toutes sortes de choses sont dites.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui en France, malheureusement, il existe encore beaucoup de violences lorsqu'on parle d'éducation. Et j'aimerais comprendre ensemble ce contexte, assez paradoxal surtout quand on défend la parentalité positive. Donc selon le second baromètre sur les violences éducatives ordinaires porté par la Fondation pour l'enfance, 81% des parents reconnaissent avoir encore recours à différentes formes de violences éducatives ordinaires, VEO, contre 79% en 2022. C'est donc en augmentation. Pourtant, 45% des répondants sont conscients des effets néfastes et durables de ces violences sur la santé et le développement des enfants. Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vraiment une immense question Stéphanie. Et franchement, hélas, je n'en sais rien. Je ne sais pas. Ce qui fait que spécifiquement en France, nous avons conservé cette attitude-là. Il est vrai que nos gouvernements n'ont pas été très proactifs, ils n'ont pas assorti la loi qui a d'ailleurs eu beaucoup de mal à passer et qui est tellement légère qu'on dit juste il s'agit d'élever les enfants sans violence. Mais finalement à aucun moment on ne définit ce qu'est une violence et donc pour comprendre, pour savoir ce qu'est une violence, il faut aller fouiller jusque dans la Convention internationale des droits de l'enfant. Alors, il est vrai que normalement, cette Convention internationale des droits de l'enfant, elle est la loi en France. Mais voilà, tout le monde ne va pas la lire. Et donc, comme il n'y a pas eu de pédagogie autour de cette loi, comme la plupart des gens ne savent pas véritablement ce qu'est une violence et ce qui ne l'est pas. Et comme on a été éduqués comme ça, on continue comme ça. Et puis, il y a très peu d'accompagnement des parents. On a aussi un congé maternité et paternité qui sont extrêmement courts et donc on n'a pas vraiment le temps de tisser suffisamment d'attachements, d'apprendre à décoder les signaux de l'enfant, de construire un langage commun. Et du coup il y a très souvent des mauvaises compréhensions, des misconceptions, des interprétations et c'est comme si en France on se construisait le parent et l'enfant. l'un face à l'autre, quasiment en opposition. C'est d'ailleurs ce que disent les psychanalystes, puisque c'est même dans la doctrine psychanalytique, l'enfant va chercher systématiquement à prendre le pouvoir sur ses parents, à dominer ses parents, etc. Donc on est comme imbibé de cette culture dans laquelle l'enfant est un petit diable qu'il faut arriver à dompter. Et si... on n'arrive pas à le dompter, ça va devenir un enfant roi, etc. Et donc ce côté diable de lui risque de prendre toute la place. Et même si toute la science nous dit le contraire, la science nous dit que les enfants sont très empathiques depuis le début, qu'ils cherchent à se conformer, qu'ils cherchent à s'adapter, qu'ils cherchent à imiter les adultes, qu'ils cherchent à respecter les règles, sur le quotidien, quand on voit... constate que l'enfant ne fait pas exactement comme on s'attendait, comme on n'a pas pris l'habitude de réfléchir et qu'on ne sait pas finalement comment se développe un enfant. Jamais nulle part on apprend ce qui se passe dans le cerveau d'un enfant et comment le cerveau se développe. Donc on attend que ce soit un minuscule petit adulte et que dès l'âge de deux ans il sache mettre ses mains correctement sur la table, qu'il ne laisse pas tomber sa fourchette ou quoi que ce soit, qu'il mange correctement avec ça. Bref, on attend. tant des choses qui sont disproportionnées par rapport à l'âge des enfants. Et puis, comme on n'a pas pris l'habitude de construire ce langage commun et qu'on a cette culture d'opposition, on a tendance à interpréter le comportement de l'enfant. Ah, tu fais ça pour m'embêter. Tu fais ça contre moi. Et on se construit un peu dans une opposition de besoin. Et les 81% dont vous parlez, ce sont des parents qui disent avoir commis une violence éducative la semaine précédant l'enquête. Donc, ça montre à quel point c'est extrêmement répandu. Mais ces mêmes parents disent qu'ils aimeraient ne pas commettre de violence. Mais d'une part, ils ne savent pas, ils ne savent pas comment faire. Ils sont souvent démunis, mais ils ont souvent cette croyance qu'il est nécessaire que l'enfant obéisse. Et ça, c'est une dynamique qui n'existe peut-être, qui n'existe pas, par exemple en Allemagne ou dans les pays du Nord ou même en Espagne, etc. On n'est pas dans cette même nécessité que l'enfant obéisse et se conforme. Alors d'où est-ce que ça vient ? Je ne sais pas exactement. il est vrai que c'est une caractéristique française. Les Français sont connus pour crier plus que dans d'autres pays et pour être dans une approche des enfants où les enfants sont vécus comme pénibles à la base. On ne sait pas les gérer. Il faut qu'ils soient sages comme des images. On oublie qu'une image, ça ne parle pas. Une image, ce n'est pas vivant. Or, un enfant, c'est vivant. En Allemagne, les Allemands, c'est pas vivant. Ce ne sont pas des gens foufous, ce ne sont pas des gens qui font n'importe quoi dans leur vie. Au contraire, ce sont des gens qui sont hyper respectueux des règles. Leurs enfants sont très respectueux des règles, mais jamais on ne leur demande d'obéir au doigt et à l'œil comme on le demande en France. Ils bénéficient d'une bien plus grande liberté, de plus d'attachement parce qu'il y a un temps plus long avec les parents avant d'être mis dans des structures. Et ils ont... Ils sont plus encouragés à faire leurs expériences, à faire par eux-mêmes, dans les squares. On les voit prendre beaucoup plus de risques que les Français. Les Français, paradoxalement, à la fois sont sur le dos des enfants et non, ne fais pas ci, tu vas tomber, attention, ta-ta, ta-ta En fait, c'est du contrôle. Pour quelle raison ? Je ne sais pas exactement. À fouiller !

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez d'ailleurs nous rappeler ce que c'est une violence faite aux enfants ?

  • Speaker #1

    Une violence, de manière générale, j'aime bien la définition de Jean-Marie Muller, c'est l'usage de la force pour contraindre quelqu'un. Et en fait, la violence envers les enfants, c'est tout ce qui va faire mal à l'enfant et le contraindre. Alors, il y a des violences qui sont parfois utiles, ça n'empêche que c'est une violence, mais par exemple, on met la ceinture de sécurité, ça. on ne déroge pas là-dessus. Il est clair qu'on met la ceinture de sécurité. C'est intéressant de mesurer que quand on met la ceinture de sécurité à un enfant, un tout petit bébé par exemple, il va se rebeller. Parce qu'on a un besoin, tous les humains, on a un besoin de liberté et tout ce qui va entraver nos mouvements va engendrer du stress. Donc, est-ce qu'on l'appelle violence ou pas ? Oui et non. C'est-à-dire qu'on peut dire que ça fait violence et du coup, on va... écouter l'enfant et lui dire ah ben oui c'est carrément pas agréable et peut-être pour exercer moins cette violence on va lui donner de plus en plus de liberté c'est à dire dès qu'il va être capable de le faire on va lui demander de le faire lui même de mettre sa ceinture mais ça n'est pas parce que ça contraint l'enfant qu'on ne va pas le faire dans la parentalité positive il y a évidemment beaucoup de contraintes aussi on respecte les lois on respecte les règles on va juste accompagner l'enfant pour qu'il puisse le faire sans se sentir blessé, sans se sentir humilié, sans se sentir dévalorisé, sans avoir l'impression que c'est le parent qui décide et que lui n'a pas d'espace.

  • Speaker #0

    Ça me rappelle quelque chose qui s'est passé cet été. Sur Instagram, on m'a contactée puisque quelqu'un a vécu face à lui une violence extrême. Là, on parle vraiment de violence physique. Un enfant qui a été contraint dans une voiture après plusieurs coups. et qui m'a demandé comment est-ce qu'on réagit quand on voit un adulte violent envers un enfant.

  • Speaker #1

    C'est toujours extrêmement difficile et en même temps c'est vraiment important d'intervenir, d'agir et dans les pays du Nord, ils agissent, ils interviennent, ils s'entraident. C'est notre posture qui va faire toute la différence. Si on intervient en jugeant le parent, là il vaut mieux ne pas intervenir. C'est pour ça que dans les pays du Nord, c'est plus facile parce qu'il y a une ambiance générale de soutien mutuel et de conception de l'enfant qui n'est pas la même que chez nous. Chez nous, tout de suite, le parent qui se montre violent risque de se sentir, si on intervient, jugé. Et si nous, effectivement, on le juge et on lui dit mais monsieur, vous n'avez pas le droit de faire ça alors ça risque d'être blessant. et finalement ça va faire le contraire de ce qu'on espère. Donc allons-y. Alors il y a toutes sortes de façons de faire et donc c'est à chacun de trouver sa propre porte d'entrée. Ce qui me paraît marcher le mieux et ce que j'ai utilisé le plus et qui a le mieux fonctionné, c'est de partir avec une attitude d'empathie pour le parent. C'est-à-dire qu'au lieu de vouloir se précipiter vers l'enfant et protéger l'enfant, on va s'occuper du parent. Parce qu'en fait, le parent qui agresse son enfant, c'est un parent désespéré, c'est un parent qui se sent impuissant, c'est un parent qui n'en peut plus. Personne ne désire se montrer violent. On se montre violent. Quand on n'y arrive plus, quand on est dépassé, sauf évidemment quand on nous a raconté qu'il fallait faire ceci, faire cela, et donc on croit. Après, quelquefois, on justifie, on se dit oui, une gifle, ça ne fait pas de mal, enfermer un enfant dans sa chambre, c'est une punition, et c'est important de faire des punitions pour pouvoir permettre à l'enfant de comprendre, même si c'est faux, il y a des gens qui y croient. En dehors de ces moments-là, on va même... Quand les gens y croient, dur comme fer, on va prendre l'axe de l'empathie en pensant qu'ils ont besoin d'aide. Parce que quand vous arrivez avec cette offre, je peux vous aider, alors la plupart du temps, comme ce sont des Français, ils vont dire non. Voilà, on est dans une civilisation de chacun pour soi, individualisme forcené, je dois me débrouiller tout seul, etc. Donc la première réaction... de quelqu'un que vous cherchiez à lui porter sa valise ou son panier ou que vous preniez l'enfant pour aider, c'est mal vécu parce que notre société est tellement, tellement individualiste. Ça n'empêche qu'on le fait quand même et on y va. Et donc, on insiste et on peut insister, mais avec douceur et respect pour le parent et avec, à l'intérieur, je suis là pour vous fournir du soutien. Ça m'est arrivé dans le train de... dire, si vous voulez, moi je peux lui faire faire ses devoirs. Donc j'ai pris le gamin et on a fait les devoirs ensemble. Parce que voilà, ça disjonctait là, même on n'en pouvait plus. Et je comprends, parce que l'enfant avait des problèmes monstrueux pour apprendre. C'était extrêmement difficile pour lui. Des choses qui avaient l'air, mais qui étaient tellement simplissimes. Il ne les pigeait pas. Et donc voilà, j'ai observé ce qui se passait. J'ai vu qu'en fait, cet enfant avait la bouche ouverte en permanence. Il avait de gros, gros problèmes. de bouche, de respiration et donc d'oxygénation de son cerveau, etc. Donc j'ai pu en parler après à la maman. Mais surtout déjà, le simple fait de prendre soin de son enfant, elle pouvait respirer un petit peu et elle s'est sentie moins jugée. Alors je ne peux pas dire qu'elle ne s'est sentie pas jugée du tout, parce que forcément, elle se juge forcément aussi elle-même. Et d'ailleurs, elle s'est justifiée. Je lui ai dit, vous savez, j'ai tout essayé, j'ai tellement fait, etc. Il a vu tous les psy possibles, il a vu ah mais j'y arrive plus etc. Donc voilà, elle a pu se confier aussi. Donc la plupart des parents vont disjoncter se mettre à crier, frapper, punir, au moment où ils ne savent plus faire autrement. Si on est témoin de ça, on peut intervenir pour proposer du soutien, de l'aide et l'aider à faire autrement. On n'a pas toujours le temps, on n'a pas toujours l'espace, on peut au moins. donner un petit regard à l'enfant et aux parents, un regard tendre et non pas un regard jugeant. Rien qu'un regard, l'enfant s'en empare. Une fois, une adulte, quand elle était psychothérapeute, m'a raconté que quand elle était enfant, dans un train, sa mère lui hurlait dessus, et là, elle a rencontré le regard d'une femme. Elle a dit, dans son regard, j'ai lu que c'était pas ma faute. Et que c'était ma maman qui avait un problème. Et elle n'a rien dit. Mais ça m'a toujours portée. J'ai regardé ma maman différemment. Et j'ai arrêté d'être blessée à l'intérieur par ça. Ça a changé ma vie. Et donc je me suis dit, mais c'est incroyable. Un simple regard, ça peut soutenir.

  • Speaker #0

    Quand on se retrouve dans ces débats qu'on a souvent à table entre jeunes parents, lorsque l'on parle de violence, par exemple, on va parler... de la fessée, etc., de ces violences physiques, et que certains vont nous répondre Oh, moi j'ai pris quelques fessées, ça ne m'a pas tué. Regarde comment je suis devenue, etc. Qu'est-ce qu'on répond à ces gens-là ?

  • Speaker #1

    Ça dépend de la situation. Mais la plupart des gens sont devenus ce qu'ils sont devenus malgré les fessées. Et donc, ils vont bien sûr se justifier dans un premier temps. Donc, j'aime bien, de toute façon, ne jamais s'opposer. Si vous dites non, vous vous opposez, vous prenez un discours différent, il va y avoir juste de la bagarre. Et donc on commence par dire oui. Ah oui, tu as raison ! C'est ce qu'on disait avant. Avant que les neurosciences n'identifient ce que ça fait réellement, on croyait que ça ne faisait rien. Bien sûr, ça ne t'a pas tué. Heureusement, je suis contente que ça ne t'ait pas tué. Mais peut-être que ça a tué une petite partie en toi. Peut-être que de temps en temps, tu n'as pas l'aisance ou la confiance que tu pourrais avoir dans certaines situations. Peut-être que ça t'arrive de te soumettre face à un patron, face à quelqu'un de plus important. Et peut-être que, tiens, tu sais, j'avais repéré, tu m'avais parlé de ta difficulté avec l'autorité, peut-être que ça a un lien. Des choses comme ça.

  • Speaker #0

    Alors vous l'avez dit, les études scientifiques prouvent les résultats positifs de la parentalité que vous défendez, la parentalité positive. Pourquoi pour autant, cette parentalité-là ne fait-elle pas l'unanimité ?

  • Speaker #1

    Alors dans le reste du monde, elle fait l'unanimité, presque. Il y a bien sûr quelques personnes. qui vont, même dans le reste du monde, il y a quelques personnes qui vont continuer de militer pour la fessée, pour la punition, etc. Dans aucun pays, nulle part dans le monde, il y a une unité totale sur quelque chose. Il y en a qui sont pour la démocratie, il y en a qui sont pour l'autocratie. Et donc, dans la famille, c'est pareil. Et plus on a subi de blessures, plus on peut avoir tendance... à justifier la façon dont nos parents nous ont éduqués et donc à être dans cette parentalité davantage autoritaire.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, lorsqu'on parle de parentalité positive, en France, il y a souvent ce mythe de l'enfant roi, de l'enfant tyran. Qu'est-ce que vous avez à dire à ce sujet ?

  • Speaker #1

    Tellement de choses. Donc, j'explique bien dans le livre d'où ça vient. Et cette idée d'enfant roi et d'enfant tyran, alors là, est vraiment typiquement française parce qu'elle est liée à la psychanalyse. Et la psychanalyse reste vivante dans notre pays. Elle ne l'est plus, elle n'est plus enseignée dans les autres pays du monde, sauf peut-être en Argentine paraît-il. Mais aux États-Unis, au Canada, dans les grands pays du monde, on n'enseigne plus la psychanalyse. Aussi, on l'enseigne, mais en philosophie, mais pas en psychologie. En psychologie, maintenant, on sait que cette théorie... qui a été élaboré par Freud pour camoufler le fait que lui a subi des violences sexuelles dans son enfance, que son père a commis l'inceste sur, on ne sait pas sur lui, mais en tout cas sur sa soeur, son frère. Donc on sait ça aujourd'hui, mais en France on ne le sait pas. En France on ne dit rien et en France on suit cette doctrine psychanalytique qui dit que l'enfant vient au monde avec des pulsions. Et qu'il s'agit de mettre un terme à ces pulsions, de dire stop, de frustrer l'enfant pour qu'il apprenne à devenir un adulte raisonnable. Donc il s'agit de se castrer, castrer les pulsions, différentes castrations à différents âges, castrations anales, orales, etc. Les différentes castrations pour pouvoir enfin avoir intégré. ce qu'on appelle le principe de réalité. Donc, selon eux, un enfant vient au monde avec ses pulsions et il rencontre le principe de réalité et qu'il a besoin de rencontrer ce principe de réalité. Alors, voilà, dans la science, aujourd'hui, on part dans la théorie de l'attachement qui a accumulé les preuves scientifiques et qui dit qu'un enfant vient au monde avec des besoins. C'est un rapport. complètement différent. L'enfant ne vient pas au monde avec des pulsions qu'il va satisfaire au dépens de sa mère qui n'est qu'un objet de satisfaction. Là c'est complètement différent, l'enfant vient au monde avec des besoins et notamment des besoins affectifs et il a ce besoin de sécurité affective et la mère, le père, les parents sont des figures d'attachement qui vont assurer sa sécurité. Il a besoin de cette sécurité pour pouvoir prendre son envol et pour pouvoir s'épanouir. Donc c'est une perspective complètement différente, mais qui en France n'a pas encore pénétré complètement, ni dans les études de psychologie, ni dans le grand public suffisamment. Donc même si ça progresse quand même notablement, et notamment en psychiatrie maintenant, c'est clair que... La psychanalyse n'est plus enseignée en psychiatrie, mais c'est la théorie d'attachement qui est enseignée.

  • Speaker #0

    En quoi alors la parentalité positive n'est pas une forme de parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    La parentalité laxiste est une parentalité négative. La parentalité positive, elle est dite positive parce qu'elle obtient des résultats positifs pour l'enfant comme pour les parents. Et les études scientifiques montrent que quand on écoute les besoins de l'enfant, quand on co-régule les émotions de l'enfant, lorsque l'on pratique un certain nombre de fonctionnements... de compétences parentales, du coup, il y a des issues positives et donc du coup c'est défini comme une positive. Il y a plusieurs formes, il y a l'autoritarisme qui est une parentalité négative parce que l'autoritarisme a tendance à générer des enfants soit trop soumis et donc qui perdent confiance en eux, soit agressifs, qui développent des comportements débordants. C'est là que c'est paradoxal parce que ce sont souvent les autoritaires qui accusent les autres parents, soit disant positifs, de laisser tout faire aux enfants et que du coup ils vont avoir des comportements débordants, comme vous dites, rois et tyrans. Mais en réalité, ceux qui deviennent tyrans, ce ne sont pas ceux à qui on n'a pas posé de limite, c'est plutôt ceux à qui on a posé trop de limites de manière autoritaire. Donc il y a l'autoritarisme, il y a la démission totale. où là, le parent ne s'occupe absolument pas de l'enfant. Et donc, ça, évidemment que c'est aussi une parentalité dite négative parce que ça ne permet pas à un enfant de grandir. Et la parentalité laxiste, parentalité laxiste, c'est ne pas avoir d'attente envers son enfant. Je lui laisse tout faire. Oh, il apprendra bien tout seul. Et donc, je suis affectueux, mais parce que dans le je m'en fiche, il n'y a rien du tout. Là, dans le laxiste, on est quand même affectueux. mais c'est tout et il n'y a pas de règles, on laisse un peu l'anarchie faire et on pense que l'enfant va se développer tout seul. Et donc ça, c'est prouvé aussi scientifiquement que ça ne fonctionne pas et que les enfants sont un peu perdus et n'ont pas suffisamment de structures pour pouvoir se développer. Donc la parentalité positive, c'est ni le laxisme ni l'autoritarisme. C'est une saine autorité. Les enfants... ont envie de faire ce qui est bien. Ils ont envie de bien se comporter. À condition qu'on les respecte, ils vont respecter. En fait, les enfants nous imitent énormément.

  • Speaker #0

    Je le vois à la maison sur cette question des règles. Moi, j'ai un garçon qui a 18 mois. Et donc, il marche et on l'emmène dans la rue. Et on essaye de lui expliquer qu'il y a des endroits où il ne peut pas marcher, notamment sur la route. Et donc, on lui dit pas là. Et c'est vrai que maintenant, il est dans cette imitation où il nous montre les endroits. Il nous dit pas là, pas là. Et il a l'air hyper heureux de nous montrer que... Il a compris qu'il ne devait pas aller là.

  • Speaker #1

    Exactement. Les enfants sont friands de règles. Donc ça fait toujours drôle aux parents quand je dis ça, mais en réalité, les enfants adorent les règles. Ils aiment les respecter. Et ce qu'ils n'aiment pas, ce sont les ordres, les limites, les punitions, les impositions. Chaque fois qu'on est dans une dynamique tu fais comme ci ce n'est pas une règle. Ça, c'est un ordre. Et donc un ordre, tous les humains, sont construits pour résister aux ordres. Donc bien sûr, si vous formulez votre règle en termes de règles, non pas en termes de règles, je veux dire, mais en termes d'ordres, l'enfant va se rebeller. Mais si vous formulez la règle en termes de règles, c'est-à-dire une procédure, et c'est bien ce que vous faites en expliquant ici tu marches, ici tu ne marches pas, là tu es dans les bras, on donne le fonctionnement. Donc voici la procédure pour vivre. ensemble. La procédure pour vivre en communauté, c'est que dans telle situation, on dit merci, dans telle situation, on dit bonjour, etc. Et donc, on donne les informations. Du coup, l'enfant, il dit, c'est comme ça que fonctionne le monde. Moi, je veux y arriver, je veux le faire, je veux le faire correctement.

  • Speaker #0

    Pourquoi pensez-vous qu'il y a eu une telle association entre parentalité positive et parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est juste de la désinformation qui est menée par les autoritaires. Un parent autoritaire ou des professionnels qui sont dans cette dynamique de vouloir être dans cet autoritarisme sont dans une espèce de...

  • Speaker #0

    Il y en a même qui utilisent le mot de croisade pour tenter de maintenir ce cap. Et donc, c'est la critique facile. Après, il peut y avoir aussi des interprétations superficielles de la part des gens. Parce que, comme je disais qu'il n'y a pas eu beaucoup de pédagogie autour de la loi qui dit que c'est important d'élever les enfants sans violence, il peut aussi y avoir des conceptions un peu superficielles. En disant, ne mettons pas, il ne faut pas donner d'ordre aux enfants, alors du coup, on laisse tout faire. Ou alors, quand on dit non à un enfant, ça le stresse, alors du coup, je ne veux pas stresser mon enfant et du coup, je lui laisse tout faire. Non, tout à l'heure, je vous ai dit, non, on lui met la ceinture de sécurité. De temps en temps, il veut un deuxième bonbon, non, stop. Alors, c'est vrai que si on utilise un stop plutôt que non, mais on va quand même freiner, on va quand même organiser. Et c'est vraiment extrêmement important. Il y a des règles, mais des parents qui ont entendu un truc, lu un petit article, peuvent avoir une impression comme ça superficielle en disant je vais être gentil. Mais en fait, le vrai problème, c'est quoi ? Le vrai problème, c'est qu'eux-mêmes, quand ils étaient enfants, ils avaient des parents autoritaires. Ils ne veulent pas faire ça. Ils n'ont pas appris à faire différemment. Et du coup, ils sont juste, je ne veux pas être autoritaire. Et comme ils ne se sont pas sentis toujours aimés inconditionnellement par leurs parents, ils peuvent craindre que leur enfant ne les aime pas. Et quand on craint que son enfant ne vous aime pas, on va essayer de lui faire plaisir. Et donc vous avez toutes sortes de parents qui croient, qui peut-être se racontent qu'ils sont dans la parentalité positive, mais en fait ça n'est pas de la parentalité positive, c'est juste qu'ils ne disent pas non parce qu'ils ont peur que leur enfant... ne les aiment plus s'ils leur refusent un bonbon, une heure de télé ou ceci ou cela.

  • Speaker #1

    Et ça, vous le rappelez très bien dans votre livre, c'est très bien démontré. Il semblerait que notre culture peine aussi à évoluer sur les questions d'éducation à cause du manque de temps, vous l'avez dit, et de valorisation que l'on réserve au fait de s'occuper de ses enfants en France. Il faut du temps pour s'informer, pour déconstruire les schémas de pensée hérités de son enfance et de sa propre éducation, et pour résister aux automatismes. et aussi aux critiques extérieures. Et ça, je trouve qu'on le retrouve beaucoup en France. Alors, pouvoir passer du temps de qualité avec ses enfants, en France, ça semble être presque un luxe. Aujourd'hui, vous l'avez rappelé, les congés de parentalité sont extrêmement courts. Comment est-ce qu'on pourrait changer cela ? Comment est-ce qu'on pourrait donner davantage envie aux adultes de passer du temps de qualité avec leurs enfants, quand bien même ils sont contraints par la société ?

  • Speaker #0

    Merci Stéphanie pour ce focus sur le désir parce que c'est vrai le souci c'est que toute la société va sans arrêt nous raconter que les enfants c'est pénible pendant les vacances oh là là on se prend la tête on a les enfants toute la journée c'est horrible vivement la rentrée parce que là au moins quelqu'un s'occupe d'eux toute la journée oh il y a la télé je peux les mettre devant la télé ils vont pas me saouler donc il y a tout ce discours ambiant euh qui est vraiment problématique. Et donc, on a à aimer nos enfants différemment. Mais c'est vrai que c'est plus facile d'aimer ses enfants quand ça se passe bien. Et donc, quand on sait maîtriser quelques compétences de parentalité qui permettent que ça se passe plus facilement. Parce que si on se dispute en permanence, si on ne sait pas comment faire pour qu'il mette ses chaussures, pour dormir, on est débordé. La plupart des parents d'aujourd'hui, quand ils sont parents pour la première fois, n'ont jamais eu un bébé dans les bras. Dans le temps, on s'occupait toujours des soeurs, des frères, des cousins, des cousines, etc. On vivait avec des bébés. De nos jours, ben non. Ce qui fait que, déjà, dès la base, on saisit le petit bébé comme une poupée. On le positionne comme un poupon au sein. Et du coup, évidemment, on a des crevasses parce que c'est pas comme ça qu'on devrait positionner le bébé. Donc ça commence très mal. Et on n'a pas de transmission. plus de transmission et du coup, il y a plein de choses qu'on ne sait pas faire. Et du coup, c'est compliqué. Donc, ce serait vraiment utile d'avoir des films, d'avoir des livres, plus d'informations, faciles d'accès, qui permettent de voir comment ça se passe. C'est dans ce sens-là qu'on a fait ce film sur les mille premiers jours avec Boris Cyrulnik, Nathalie Vicariini et Antoine Guédonnet. où on va les quatre experts dans les familles pour accompagner les parents et leur permettre de regarder différemment leur enfant. C'est ça en fait, c'est ce qu'ils ont fait dans les pays du Nord, c'est ce qu'ils ont fait en Allemagne. C'est plus de temps, non seulement des congés plus importants, mais beaucoup d'activités. parents-enfants, pour petit à petit aussi fournir aux parents des compétences. C'est l'idée des Maisons des 1000 premiers jours. Quant à la commission des 1000 jours, on a eu cette idée de faire des Maisons des 1000 jours. C'est vraiment un lieu, un centre où on peut aller dès la grossesse et on va être accompagné pendant un an. On peut pendant une fois par semaine être en groupe avec d'autres parents, d'autres parents qui ont des enfants du même âge, pouvoir... partager, dire ce qui se passe, vider nos émotions parce que c'est parfois dur, et aussi apprendre des choses sur le développement de l'enfant, apprendre des compétences, comment on fait ceci, comment on fait cela. Tout ça peut nous étayer et faire qu'on a du coup envie. Plus on est avec un enfant, plus on a envie d'être avec un enfant parce que plus on est avec un enfant, mieux on le connaît. Et plus on le connaît, plus nos langages, on sait identifier le besoin qu'il a, on sait y répondre, et donc tout coule beaucoup mieux. À partir du moment où on ne se voit pas, on ne se voit pas assez, on n'a pas le temps de connecter suffisamment. Et un enfant qui est déconnecté, il va forcément, du fait de la théorie d'attachement, il va forcément être plus demandeur, plus exigeant, plus agressif, plus... Et du coup, nous, on est en déstabilisation et hop, finalement, si on regarde le temps qu'on passe avec nos enfants, quelquefois, on se rend compte, mais zut, j'ai passé toute ma journée à le contrôler, mais finalement, on n'a pas eu de relation véritable. Donc, c'est un peu l'idée, ce serait de changer tout ça. Ce qui m'a intriguée, parce que dans les autres pays, on travaille aussi, c'est que depuis les années 50, dans tous les autres pays, en Europe, le temps passé avec les enfants a augmenté. En France, il a diminué depuis les années 50. Or, vous parliez de l'imposition de la société, mais on n'a plus que 35 heures de travail. Dans les années 50, c'était plutôt 45-50. Donc, qu'est-ce qui s'est passé ? On travaille moins, mais on est moins aussi avec les enfants. Donc, c'est une question de choix individuel.

  • Speaker #1

    Et sur les informations, c'est vrai que moi, je suis totalement pour... développer davantage de ressources qui soient à disposition gratuitement et de manière nombreuse aux parents. Je le vois par exemple quand on se prépare à l'accouchement, on a le droit à six cours de préparation à l'accouchement pour un moment dans la vie du bébé et de la maman et du partenaire.

  • Speaker #0

    C'est important,

  • Speaker #1

    il ne faut pas faire moins. Mais c'est vrai que c'est dingue, une fois qu'on se retrouve avec un enfant entre les bras,

  • Speaker #0

    il n'y a plus rien. Mais c'est pour ça que les maisons des 1000 jours se développent, elles répondent vraiment à un besoin. Et j'invite chaque maman à se rapprocher de la maison des 1000 jours la plus proche. J'espère que dans un avenir proche, de plus en plus proche, ce sera comme en Australie où il y en aura dans tous les quartiers. Aujourd'hui, on a petit à petit, ils s'en construisent un par ville à peu près, mais ça répond à un vrai besoin. Et ça marche tellement bien que je pense que ça va aller vite.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'on aurait pu se dire que l'État, le gouvernement ne semblent pas encore prendre suffisamment au sérieux cette situation en termes d'éducation, en termes d'enfance, si on se compare par exemple au fameux pays nordique. Comment est-ce que nous, alors là je prends ma casquette un peu militante, dans la société civile, on pourrait changer les choses pour changer ces mentalités vis-à-vis de la relation entre parents et enfants ?

  • Speaker #0

    C'est vraiment quelque chose d'individuel du coup, c'est-à-dire qu'on a besoin de continuer de militer. On continue d'exiger d'entraîner, d'en parler davantage et faire respecter nos droits déjà parce qu'il y a de nombreux droits déjà pour les parents, notamment pour les mamans allaitantes dans les entreprises et ces droits ne sont pas toujours respectés. Donc déjà, au moins faire respecter les droits déjà acquis et continuer de militer pour en avoir davantage. Et puis c'est surtout commencer à réaliser que nous sommes parents. Et que notre vie de parent, elle est importante. Et que nous ne devrions pas être obligés de quitter notre vie de parent pour faire une vie de bon professionnel, que finalement, dans la plupart et de plus en plus d'entreprises le réalisent. Ce sont beaucoup des parents qui sont les salariés. Et parmi les salariés, il y en a forcément un bon nombre, des parents ou des aidants de manière générale. Et donc les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à intégrer cette dimension. Parce qu'en réalité, quand un parent est sécurisé dans son rôle de parent, lorsque les choses lui sont facilitées, notamment au niveau des horaires, mais aussi... Lorsque c'est reconnu qu'il a le droit d'être parent et que le fait d'être parent ne lui enlève pas quelque chose dans sa carrière, alors il va travailler davantage, travailler mieux, travailler plus efficacement. Donc les labels pour les entreprises qui respectent les parents se développent. Donc on peut tout à fait inciter son entreprise à aller vers ces labels-là et à se rappeler que plus un salarié est heureux, mieux il travaille.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait totalement sens. On va faire un petit pas de côté sur ces sujets culturels d'éducation en France pour parler d'une partie de votre livre, moi, qui m'a beaucoup intéressée, interpellée. Vous parlez du poids des psychotraumas de notre enfance sur notre santé physique, psychique et sociale. Est-ce que vous pourriez revenir là-dessus ?

  • Speaker #0

    Oui, le psychotrauma, c'est lorsque... Il y a trauma lorsqu'un événement va dépasser nos capacités d'adaptation. Le stress, c'est l'effort d'adaptation de l'organisme à toute situation. Donc, on se stresse sans arrêt. Le stress, c'est positif. Dans notre société, on le vit souvent comme négatif. Et d'ailleurs, je ne veux pas stresser mon enfant. Mais si, le stress, c'est juste un effort d'adaptation. Donc, le stress, c'est OK. Il y a le stress positif. Plus on est stressé, d'ailleurs. Plus on réussit, aux Jeux Olympiques, ils ont réussi à dépasser leur capacité parce que c'était super stressant d'être dans la compétition et avec tout ce monde tout autour, etc. Donc, le stress est excitant et fournit de l'énergie. Donc, le stress n'est pas négatif en soi. Il y a le stress positif, il y a le stress tolérable, c'est-à-dire je vis quelque chose d'un petit peu difficile, ça demande plus d'énergie pour monter la colline. Mais hop, j'y arrive et... J'arrive à ce que mon métabolisme à l'intérieur de mon corps s'équilibre. Et il y a le stress dit toxique qui va devenir le trauma. Là, c'est quand l'événement ou la pente a monté, la pente a grimpé. C'est trop dur et du coup, ça dépasse mes capacités d'adaptation. Donc, il y a trauma chaque fois qu'on ne peut pas réussir. à s'adapter à une situation. Donc, il y a trauma lorsqu'il y a un earthquake, ça me vient en anglais, un tremblement de terre, lorsqu'il y a un événement cataclysmique extérieur, une guerre, tout ça, ça fait effectivement, ce sont des événements traumatiques. Il y a les gros événements traumatiques, un viol est aussi un événement traumatique, l'inceste. Encore plus parce qu'il y a cette dimension de soumission où on faisait confiance à la personne et on est trahi dans sa confiance. Donc là, c'est un stress vraiment lié à la trahison en plus. Et puis, c'est le trauma lié à un événement identifié qui dépasse mes capacités. Ou qu'est-ce qui se passe dans le cerveau à ce moment-là ? Le cerveau réagit et... Et quand c'est vraiment trop dur, qu'on ne peut pas réussir à s'adapter, il y a quelque chose qui disjoncte, qui fait qu'on ne mémorise pas. Donc on va effacer l'événement et ça s'appelle l'amnésie traumatique, on l'efface. Et en même temps, il risque d'y avoir des flashbacks de ce moment-là, des irruptions de nos émotions qui reviennent. Et quand on a vécu par exemple les bombardements, le moindre... tonnerre qui arrive va réveiller et donc on est absolument paniqué, etc. Ça réveille, c'est pas le tonnerre qui nous fait peur, c'est que le tonnerre réveille les mémoires traumatiques de la guerre. Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que ça, c'est une forme de trauma mais qu'il y a aussi autre chose qui va dépasser les capacités d'adaptation d'un enfant notamment, c'est lorsqu'il y a plein de Petits événements qui vont se succéder et qui ne permettent pas à l'enfant de revenir. Punir une fois un enfant, aucun problème. Le punir tous les jours, très régulièrement. Le dévaloriser, le taper, l'humilier, lui dire tu es nul, tu es lamentable, lui dire des choses méchantes régulièrement. Petit à petit, ça sape sa confiance en lui et petit à petit, il n'arrive plus à revenir et être vraiment lui-même. Et de la même manière, il va occulter. Tout ça, il va juste garder le sentiment d'humiliation, la soumission, et il va souvent se suradapter, devenir sage comme une image. C'est pour ça que c'est toujours louche, quelqu'un de sage comme une image. Et puis de temps en temps, on va devenir violente contre son frère, contre quelqu'un de plus faible que lui. Il peut y avoir aussi des réactions qui vont sortir. Le trauma, c'est lorsque quelque chose se passe qui nous fait mal. Mais c'est aussi quand ce qui devrait nous faire du bien n'est pas là. Et Gabor Maté l'a très bien montré, ce médecin spécialiste des addictions et spécialiste du trauma, qui nous dit que tout humain a besoin d'affection, d'amour inconditionnel. Et lorsqu'on est pris par une émotion, on a absolument besoin d'être entendu. reconnu et d'être accompagné dans notre émotion. Et donc, si un enfant de, par exemple, 3 ans se met à pleurer, hurler, et qu'il n'y a pas un adulte à ce moment-là qui vient pour le prendre dans les bras, pour le câliner, pour l'aider à canaliser ce trop plein d'émotions, ça va faire trauma. Parce que ça n'est pas quelque chose de négatif qui arrive, qui ne permet pas de s'adapter. Mais c'est quelque chose qu'il aurait dû recevoir pour pouvoir grandir normalement et qui a manqué. Donc nos manques font aussi trauma. Chaque fois qu'on envoie un enfant dans sa chambre, à la place d'écouter ce qui se passe pour lui, quand il pleure, quand il crie, quand il a un comportement débordant, chaque fois qu'on n'écoute pas, qu'on ne fournit pas un accueil inconditionnel à l'enfant, eh bien... On met une pierre, là encore, une fois, ne suffit pas pour traumatiser un enfant. Mais lorsque ça se répète régulièrement, alors oui, ça devient traumatisme. Dire que c'est, on épuise les capacités de résistance de l'enfant.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il est possible de guérir l'enfant blessé qu'on a été lorsqu'on a vécu ces psychotraumas et qu'on est adulte, une fois qu'on décide en plus de devenir parent ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, oui, oui, oui, oui, oui, cent fois oui, oui, on peut guérir. Et il y a de plus en plus de thérapies efficaces pour soigner le trauma. Il y a eu toutes sortes de thérapies dans le passé. On vient de très, très loin. En 1981, il était écrit dans le manuel de psychiatrie officiel que le trauma était très rare et que, par exemple, l'inceste n'existait pour les femmes qu'une sur une. un million vivaient l'inceste. Et que de toute façon, avoir des relations sexuelles avec son père était plutôt quelque chose qui allait vous permettre d'être mieux intégré dans votre vie d'adulte. Donc voilà la conception du trauma en 1981. C'est pas si vieux que ça. Elle était là, quoi. Donc il y avait très peu de thérapies qui se préoccupaient de soigner le trauma. Alors moi, je faisais partie déjà à l'époque de la branche des thérapies humanistes qui... prenait en compte le trauma et donc j'ai travaillé sur le trauma à la suite aussi d'Alice Miller etc. où on mesurait l'impact du trauma sur la vie de tout un chacun et donc j'ai déjà travaillé sur le plan émotionnel à libérer le corps parce qu'en fait le trauma il s'inscrit dans le corps et donc il y a aujourd'hui multitude de thérapies il y a des thérapies corporelles un peu comme celles que je pratiquais et des thérapies qui s'occupent de d'exprimer les émotions, d'autres thérapies qui vont être dans la libération des sensations, qui vont permettre de remettre en route le nerf vague, de vraiment rééquilibrer tout ce système sensoriel. Il y a le MDR, il y a la thérapie mosaïque, il y a l'EFT, il y a de plus en plus de thérapies non-invasives, parce que ce qu'on sait aujourd'hui, c'est qu'il n'est pas nécessaire de revivre le trauma pour le guérir. Il n'est même pas nécessaire de le... dire, de le parler et souvent même faire raconter à quelqu'un son événement traumatique risque de le retraumatiser. Donc on avance maintenant. Depuis quelques années, on est de plus en plus conscients, on étudie le traumatisme un peu sous tous ses angles et on sait de mieux en mieux travailler sur cette question du trauma. On travaille sur le soin du trauma, comment guérir du trauma. Et il y a un mouvement mondial, et je mène ce mouvement à Marseille avec quelques amis, où on veut transformer la ville de Marseille en faire une ville non violente, une ville informée sur le trauma. Et donc ce mouvement des villes informées sur le trauma, c'est une façon de... d'embarquer toute une population. Parce que, quelquefois, c'est dur. Même aujourd'hui, un parent qui est dans la parentalité positive, il a non seulement à gérer son enfant, mais à gérer tous les jugements des gens, puisque aujourd'hui, malheureusement, la majeure partie des gens sont encore dans une parentalité violente et autoritariste. Donc, c'est oui, tu devrais quand même le faire se tenir mieux, il gêne tout le monde, là, tu sais, ton enfant gêne Bref, il y a tout ce poids-là. Et tant qu'on n'a pas compris et la théorie de l'attachement et le développement du cerveau d'un enfant et comment ça fonctionne, le stress, le trauma, quels sont les besoins d'un enfant, comment on va répondre, comment on co-régule les émotions d'un enfant, on sera toujours démuni, il y aura toujours des gens qui vont nous juger comme ça. Donc il s'agit vraiment de transformer toute la population et transformer le regard d'une population. Si au lieu de dire mais c'est pas bien d'avoir fait ça. On dit mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? C'est-à-dire au lieu de jugement systématique sur quelqu'un, mais assieds-toi, fais ceci, fais cela, du contrôle systématique et de la punition, retourner son regard et dire mais si tu fais ça comme ça, c'est qu'il s'est passé quelque chose pour toi. Quel est le nœud dans ton cœur ? Et du coup, ça change complètement le regard. Et donc, on voudrait apprendre comme ça tous ensemble à repérer ce qu'est un trauma. Comment ça nous impacte ? Parce que la prévalence du trauma est phénoménale. On sait aujourd'hui que deux personnes sur trois ont vécu au moins un trauma dans leur vie. Et une personne sur huit, on a vécu plus de quatre. Quand on a vécu plus de quatre traumatismes dans sa vie, on risque fort d'avoir des problèmes d'addiction, des problèmes cardiaques, des problèmes de métabolisme, d'être obèse, d'avoir des problèmes de santé de manière générale. Des problèmes relationnels, des problèmes émotionnels, la vie est vraiment plus compliquée. Donc on a besoin de pouvoir mesurer cette prévalence et de réaliser que quelqu'un qui n'est pas sympa, qui dysfonctionne, qui exagère, qui ne se comporte pas correctement, c'est probablement quelqu'un qui a été traumatisé. Et si on l'aide, si on lui fournit le soutien dont il a besoin, ça va tout changer. Ça peut changer son image de lui-même, ça peut lui donner envie de s'améliorer, ça peut lui donner envie de changer. Et puis, si on peut éviter de le retraumatiser. Parce qu'aujourd'hui, globalement, il y a un moment où même je m'en porte un peu dans le livre, et je dis que c'est quand même assez terrible qu'à l'école par exemple, quand on sait qu'il y a probablement trois enfants par classe qui ont subi l'inceste. et qu'on voit qu'un enfant a des comportements débordants, on va le punir, on va l'exclure même. Mais à quel moment on se demande si peut-être celui qui a des comportements débordants, il lui est arrivé quelque chose ? Parce que si vos parents vous frappent à la maison, si vous êtes violés, si vous subissez du traumatisme, si vos parents ne vous enseignent pas à réguler vos émotions, si vous vous enfermez dans votre chambre, dès qu'il se passe quelque chose d'émotionnel à l'intérieur de vous, vous ne savez pas comment faire. Et toute cette boule d'émotion, toute cette boule de tension à l'intérieur de vous, elle éclate en classe. Mais du coup, c'est double punition. Quand on punit l'enfant et puis on le renvoie chez lui, en quoi est-ce que c'est aidant ? En quoi est-ce que ça lui permet de soigner ce qui se passe à l'intérieur ? Donc c'est vraiment changer le regard de la société. Et je suis... Moi, je prône zéro tolérance. C'est pour ça, vraiment, quand on me dit que je suis laxiste, que je laisse tout faire, trop permissive. Non, c'est zéro tolérance. Un pas de côté, une insulte, stop. Qu'est-ce qui se passe ? D'où vient cette insulte ? Et on cherche à comprendre, donner du sens et à réparer. Parce qu'on veut vivre ensemble. On veut vivre en communauté. On veut que ça se passe bien. Et on veut construire suffisamment... d'authenticité dans les relations, suffisamment de confiance dans les relations, suffisamment de sécurité relationnelle, émotionnelle, de sécurité affective pour tout un chacun. Quand un humain a cette sécurité affective, il se développe. Un enfant qui bénéficie de sécurité affective, une bonne sécurité affective solide à l'intérieur, il va bosser, il va s'intéresser, il va se développer. il va réussir. Alors quand je dis ça, attention, ce n'est pas magique. Et dans notre société, Il y a aussi toutes sortes de problèmes que j'aborde un tout petit peu dans ce livre. J'aborderai plus dans d'autres livres. Mais il y a des gros problèmes sociaux. Il y a des gros problèmes de nourriture. Les enfants d'aujourd'hui mangent beaucoup trop de plats transformés et donc qui posent des problèmes sur leurs microbiotes et qui leur fait être dans ces réactions extrêmes d'intolérance à la frustration, etc. C'est-à-dire que l'intolérance à la frustration, ce n'est pas forcément seulement... Le manque de limites de la part des parents, c'est très souvent parce que le microbiote de l'enfant est complètement sans dessus-dessous et que l'enfant ne sait pas gérer, ne peut pas réussir à réguler ses émotions. Le nombre d'enfants qui respirent par la bouche aujourd'hui est phénoménal et ça c'est pas normal non plus. Le nombre d'enfants qui sont trop assis, qui ne bougent plus, qui ne courent plus. Aujourd'hui les enfants ne courent plus, ils sont là assis avec leurs tablettes et ils ont... perdu 25% de capacité cardiaque. C'est énorme. Ils courent moins vite qu'avant, ils vont moins dehors, ils sont de plus en plus myopes parce qu'on a besoin d'être à l'extérieur pour pouvoir... C'est la lumière de l'extérieur qui aide l'œil à grandir. Si on n'est pas suffisamment exposé à la lumière externe, la lumière du jour, on devient myope. Quand on devient myope, ça génère des peurs parce qu'on ne voit pas bien les profondeurs, on ne voit plus bien les choses. Et donc du coup, On peut aussi avoir des difficultés à l'école. Bref, c'est tout un ensemble. Donc, il ne faut pas faire reposer tout sur les parents ne sont pas assez autoritaires, les profs ne sont pas assez autoritaires, etc. Il y a une réalité aujourd'hui. Les enfants d'aujourd'hui ne sont plus de d'hier. Ça, c'est clair. Les enfants d'aujourd'hui font beaucoup plus de crises. Ils sont intolérants à la frustration. Ils sont à la fois plus mous et plus toniques. Pas plus toniques, mais plus débordants. Donc oui, c'est un problème. Mais le problème, il n'est pas. ce n'est pas une question d'autorité, c'est vraiment une question d'environnement. Et nous avons besoin de prendre en compte cette dimension d'environnement.

  • Speaker #1

    C'est ça, et c'est ce que je trouve qui est essentiel dans votre ouvrage, c'est que vous rappelez tous ces éléments-là, et aussi ça nous rappelle à tous à quel point l'enfance est aussi une période extrêmement sensible, fragile et complexe, et à quel point il est nécessaire d'être informé à ce sujet. On va malheureusement devoir se quitter. Isabelle, j'ai une dernière question, c'est ma question rituelle dans le podcast, vous le savez, il s'appelle Les adultes de demain Qu'est-ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Eh bien, paradoxalement, je souhaite juste qu'ils soient le plus enfants possible et d'avoir la permission d'être enfants. Parce que je me suis rendu compte, je disais beaucoup, vous êtes les adultes de demain, et puis je me suis dit mais stop, en fait il y en a marre de faire tout aujourd'hui en fonction de quels adultes ils vont devenir demain. Plus chaque étape de vie est pleine et répond à leurs besoins, plus chaque future étape de la vie sera aussi harmonieuse. Et donc, ce que je leur souhaite à chacun, c'est que leurs besoins d'enfants soient respectés et qu'ils puissent avoir le droit de vivre leur vie d'enfant un maximum.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Isabelle. Je rappelle que votre livre s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont. Un livre qui devrait être mis entre les mains de tous les parents et futurs parents. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci Stéphane.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des Adules de Demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

Les faits d’actualité récents, où une enseignante fait preuve d’une violence inouïe auprès de l’une de ses élèves à la rentrée scolaire, fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant, depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu’une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l’enfant.


Isabelle Filliozat fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d’autoritarisme et d’obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteure, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J’ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faites aux enfants, des raisons expliquant l’urgence de changer notre regard sur les enfants et des manières dont nous pouvons réparer l’enfance blessée de nombreux adultes. C’est suite à la lecture de son dernier livre bilan “Éduquer : tout ce qu’il faut savoir”, que j’ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les points clés de l’éducation.


Quelques questions posées pendant l'interview :

  • Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Il semblerait qu’au regard des autres, être un parent autoritaire, capable de faire obéir son enfant, soit plus valorisé dans la société que d’être à son écoute et de respecter ses besoins. Pourquoi la parentalité positive ne fait-elle pas l'unanimité ? Avez-vous eu l’impression d’être jugée quand vous avez éduqué vos enfants de cette manière-là ?

  • Comment réagir selon vous lorsque l’on assiste à des scènes de violence contre des enfants dans la rue, chez des amis ?

  • Comment avez-vous vécu les attaques de ces dernières années à votre encontre mais aussi contre d’autres personnes défendant la parentalité positive ?

  • Comment de telles incompréhensions vis-à-vis de la parentalité positive ont-elles pu naître ? Les résultats des différentes études sur la parentalité positive prouvent systématiquement ses bienfaits sur le comportement des enfants, sur le stress des parents, sur les résultats académiques, etc. Pourquoi ces résultats sont-ils si peu reconnus ?

  • Que faire pour que notre société évolue plus vite à ce sujet ? Que doit-on changer dans notre manière de lutter contre les VEO, de défendre la parentalité positive, mais surtout dans la place que l’on réserve aux enfants dans la société ?


Ressources :




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises,

  • Speaker #1

    de la punition. Et on pense que c'est normal. Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle,

  • Speaker #0

    elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait,

  • Speaker #1

    l'éducation est la plus belle arme de paix.

  • Speaker #0

    Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ces images nous ont tous choqués. L'effet d'actualité récent où une enseignante utilise la violence auprès de l'une de ses élèves à la rentrée scolaire fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant... Depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu'une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l'enfant. Isabelle Fiosa fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d'autoritarisme et d'obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteur, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J'ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faite aux enfants, des raisons expliquant l'urgence de changer notre regard sur les enfants, et des manières dont nous pouvons réparer l'enfance blessée de nombreux adultes. C'est suite à la lecture de son dernier livre, presque un bilan, qui s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont, que j'ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les clés d'une éducation bienveillante. Je vous souhaite une bonne écoute. Bonjour Isabelle.

  • Speaker #1

    Bonjour Stéphanie, bonjour à tout le monde qui écoute.

  • Speaker #0

    Quel honneur de vous retrouver aujourd'hui pour la seconde fois au micro des adultes de demain. Un plaisir plus. Je le rappelle à chaque fois, mais c'est vrai que vous avez beaucoup inspiré l'éducation que mes parents ont offerte à mes frères et sœurs et moi. Je suis la quatrième d'une fratrie de cinq. Car oui, Isabelle, je suis certaine que vous avez contribué à améliorer la vie familiale de nombreuses personnes en diffusant les valeurs de la parentalité dites positives. Avant même de parler des méthodes ou des techniques, vous avez permis à des familles de s'éloigner de la culture de la punition, de l'obéissance et du rapport hiérarchique très vertical entre parents et enfants, pour se recentrer sur les besoins de l'enfant et sur le respect de leur développement. Alors aujourd'hui on se rend compte, puisque vous avez publié un nouveau livre que j'ai adoré, il s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont et qui propose un panorama de plus de 40 ans de vos recherches. Cet ouvrage démontre que l'éducation positive devrait être la voie à suivre. pour élever les enfants, en leur offrant à la fois un cadre et un environnement propices à un développement harmonieux. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre, qui semble dresser un véritable bilan de votre travail de ces dernières années ?

  • Speaker #1

    J'ai éprouvé le besoin d'écrire tout ça pour rectifier tout ce qui était dit. Parce qu'en fait, beaucoup de choses les deux dernières années ont été dites sur la parentalité positive. On voit écrit sous la plume de certains journalistes. toutes sortes de choses qui sont profondément fausses ou partiellement fausses ou légèrement erronées. Bref, c'est difficile pour les gens de s'y retrouver dans qu'est-ce qui est de la parentalité positive, qu'est-ce qui n'en est pas et qu'est-ce qui est vrai dans ce qui est dit et qu'est-ce qui ne l'est pas. Parce qu'il y a des choses vraies aussi qui sont dites, mais donc c'était un peu mélangé tout ça. Et je me suis dit mais ce n'est pas possible, je ne peux pas laisser dire toutes sortes de choses qui... qui sont profondément fausses. Donc ça me paraissait fondamental de rétablir ce qui me paraissait vraiment plus juste et d'étayer ça avec les recherches scientifiques. Donc il y a un gros travail dans ce livre de pouvoir retrouver les recherches scientifiques qui soutiennent ce que j'avance, qui soutiennent ce qu'est la parentalité positive.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est une forme de réponse aussi aux attaques que vous avez vécues ces dernières années à votre rencontre, mais aussi plus largement à toutes les personnes qui défendent la parentalité positive ?

  • Speaker #1

    C'est tout à fait une réponse, c'est vraiment comme ça que je le conçois, et c'est ce que je dis d'ailleurs dans l'introduction du livre. J'ai écrit ce livre en réponse pour clarifier les choses, et pour que vraiment on puisse enfin s'y retrouver dans cet espace de la parentalité dans lequel toutes sortes de choses sont dites.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui en France, malheureusement, il existe encore beaucoup de violences lorsqu'on parle d'éducation. Et j'aimerais comprendre ensemble ce contexte, assez paradoxal surtout quand on défend la parentalité positive. Donc selon le second baromètre sur les violences éducatives ordinaires porté par la Fondation pour l'enfance, 81% des parents reconnaissent avoir encore recours à différentes formes de violences éducatives ordinaires, VEO, contre 79% en 2022. C'est donc en augmentation. Pourtant, 45% des répondants sont conscients des effets néfastes et durables de ces violences sur la santé et le développement des enfants. Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vraiment une immense question Stéphanie. Et franchement, hélas, je n'en sais rien. Je ne sais pas. Ce qui fait que spécifiquement en France, nous avons conservé cette attitude-là. Il est vrai que nos gouvernements n'ont pas été très proactifs, ils n'ont pas assorti la loi qui a d'ailleurs eu beaucoup de mal à passer et qui est tellement légère qu'on dit juste il s'agit d'élever les enfants sans violence. Mais finalement à aucun moment on ne définit ce qu'est une violence et donc pour comprendre, pour savoir ce qu'est une violence, il faut aller fouiller jusque dans la Convention internationale des droits de l'enfant. Alors, il est vrai que normalement, cette Convention internationale des droits de l'enfant, elle est la loi en France. Mais voilà, tout le monde ne va pas la lire. Et donc, comme il n'y a pas eu de pédagogie autour de cette loi, comme la plupart des gens ne savent pas véritablement ce qu'est une violence et ce qui ne l'est pas. Et comme on a été éduqués comme ça, on continue comme ça. Et puis, il y a très peu d'accompagnement des parents. On a aussi un congé maternité et paternité qui sont extrêmement courts et donc on n'a pas vraiment le temps de tisser suffisamment d'attachements, d'apprendre à décoder les signaux de l'enfant, de construire un langage commun. Et du coup il y a très souvent des mauvaises compréhensions, des misconceptions, des interprétations et c'est comme si en France on se construisait le parent et l'enfant. l'un face à l'autre, quasiment en opposition. C'est d'ailleurs ce que disent les psychanalystes, puisque c'est même dans la doctrine psychanalytique, l'enfant va chercher systématiquement à prendre le pouvoir sur ses parents, à dominer ses parents, etc. Donc on est comme imbibé de cette culture dans laquelle l'enfant est un petit diable qu'il faut arriver à dompter. Et si... on n'arrive pas à le dompter, ça va devenir un enfant roi, etc. Et donc ce côté diable de lui risque de prendre toute la place. Et même si toute la science nous dit le contraire, la science nous dit que les enfants sont très empathiques depuis le début, qu'ils cherchent à se conformer, qu'ils cherchent à s'adapter, qu'ils cherchent à imiter les adultes, qu'ils cherchent à respecter les règles, sur le quotidien, quand on voit... constate que l'enfant ne fait pas exactement comme on s'attendait, comme on n'a pas pris l'habitude de réfléchir et qu'on ne sait pas finalement comment se développe un enfant. Jamais nulle part on apprend ce qui se passe dans le cerveau d'un enfant et comment le cerveau se développe. Donc on attend que ce soit un minuscule petit adulte et que dès l'âge de deux ans il sache mettre ses mains correctement sur la table, qu'il ne laisse pas tomber sa fourchette ou quoi que ce soit, qu'il mange correctement avec ça. Bref, on attend. tant des choses qui sont disproportionnées par rapport à l'âge des enfants. Et puis, comme on n'a pas pris l'habitude de construire ce langage commun et qu'on a cette culture d'opposition, on a tendance à interpréter le comportement de l'enfant. Ah, tu fais ça pour m'embêter. Tu fais ça contre moi. Et on se construit un peu dans une opposition de besoin. Et les 81% dont vous parlez, ce sont des parents qui disent avoir commis une violence éducative la semaine précédant l'enquête. Donc, ça montre à quel point c'est extrêmement répandu. Mais ces mêmes parents disent qu'ils aimeraient ne pas commettre de violence. Mais d'une part, ils ne savent pas, ils ne savent pas comment faire. Ils sont souvent démunis, mais ils ont souvent cette croyance qu'il est nécessaire que l'enfant obéisse. Et ça, c'est une dynamique qui n'existe peut-être, qui n'existe pas, par exemple en Allemagne ou dans les pays du Nord ou même en Espagne, etc. On n'est pas dans cette même nécessité que l'enfant obéisse et se conforme. Alors d'où est-ce que ça vient ? Je ne sais pas exactement. il est vrai que c'est une caractéristique française. Les Français sont connus pour crier plus que dans d'autres pays et pour être dans une approche des enfants où les enfants sont vécus comme pénibles à la base. On ne sait pas les gérer. Il faut qu'ils soient sages comme des images. On oublie qu'une image, ça ne parle pas. Une image, ce n'est pas vivant. Or, un enfant, c'est vivant. En Allemagne, les Allemands, c'est pas vivant. Ce ne sont pas des gens foufous, ce ne sont pas des gens qui font n'importe quoi dans leur vie. Au contraire, ce sont des gens qui sont hyper respectueux des règles. Leurs enfants sont très respectueux des règles, mais jamais on ne leur demande d'obéir au doigt et à l'œil comme on le demande en France. Ils bénéficient d'une bien plus grande liberté, de plus d'attachement parce qu'il y a un temps plus long avec les parents avant d'être mis dans des structures. Et ils ont... Ils sont plus encouragés à faire leurs expériences, à faire par eux-mêmes, dans les squares. On les voit prendre beaucoup plus de risques que les Français. Les Français, paradoxalement, à la fois sont sur le dos des enfants et non, ne fais pas ci, tu vas tomber, attention, ta-ta, ta-ta En fait, c'est du contrôle. Pour quelle raison ? Je ne sais pas exactement. À fouiller !

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez d'ailleurs nous rappeler ce que c'est une violence faite aux enfants ?

  • Speaker #1

    Une violence, de manière générale, j'aime bien la définition de Jean-Marie Muller, c'est l'usage de la force pour contraindre quelqu'un. Et en fait, la violence envers les enfants, c'est tout ce qui va faire mal à l'enfant et le contraindre. Alors, il y a des violences qui sont parfois utiles, ça n'empêche que c'est une violence, mais par exemple, on met la ceinture de sécurité, ça. on ne déroge pas là-dessus. Il est clair qu'on met la ceinture de sécurité. C'est intéressant de mesurer que quand on met la ceinture de sécurité à un enfant, un tout petit bébé par exemple, il va se rebeller. Parce qu'on a un besoin, tous les humains, on a un besoin de liberté et tout ce qui va entraver nos mouvements va engendrer du stress. Donc, est-ce qu'on l'appelle violence ou pas ? Oui et non. C'est-à-dire qu'on peut dire que ça fait violence et du coup, on va... écouter l'enfant et lui dire ah ben oui c'est carrément pas agréable et peut-être pour exercer moins cette violence on va lui donner de plus en plus de liberté c'est à dire dès qu'il va être capable de le faire on va lui demander de le faire lui même de mettre sa ceinture mais ça n'est pas parce que ça contraint l'enfant qu'on ne va pas le faire dans la parentalité positive il y a évidemment beaucoup de contraintes aussi on respecte les lois on respecte les règles on va juste accompagner l'enfant pour qu'il puisse le faire sans se sentir blessé, sans se sentir humilié, sans se sentir dévalorisé, sans avoir l'impression que c'est le parent qui décide et que lui n'a pas d'espace.

  • Speaker #0

    Ça me rappelle quelque chose qui s'est passé cet été. Sur Instagram, on m'a contactée puisque quelqu'un a vécu face à lui une violence extrême. Là, on parle vraiment de violence physique. Un enfant qui a été contraint dans une voiture après plusieurs coups. et qui m'a demandé comment est-ce qu'on réagit quand on voit un adulte violent envers un enfant.

  • Speaker #1

    C'est toujours extrêmement difficile et en même temps c'est vraiment important d'intervenir, d'agir et dans les pays du Nord, ils agissent, ils interviennent, ils s'entraident. C'est notre posture qui va faire toute la différence. Si on intervient en jugeant le parent, là il vaut mieux ne pas intervenir. C'est pour ça que dans les pays du Nord, c'est plus facile parce qu'il y a une ambiance générale de soutien mutuel et de conception de l'enfant qui n'est pas la même que chez nous. Chez nous, tout de suite, le parent qui se montre violent risque de se sentir, si on intervient, jugé. Et si nous, effectivement, on le juge et on lui dit mais monsieur, vous n'avez pas le droit de faire ça alors ça risque d'être blessant. et finalement ça va faire le contraire de ce qu'on espère. Donc allons-y. Alors il y a toutes sortes de façons de faire et donc c'est à chacun de trouver sa propre porte d'entrée. Ce qui me paraît marcher le mieux et ce que j'ai utilisé le plus et qui a le mieux fonctionné, c'est de partir avec une attitude d'empathie pour le parent. C'est-à-dire qu'au lieu de vouloir se précipiter vers l'enfant et protéger l'enfant, on va s'occuper du parent. Parce qu'en fait, le parent qui agresse son enfant, c'est un parent désespéré, c'est un parent qui se sent impuissant, c'est un parent qui n'en peut plus. Personne ne désire se montrer violent. On se montre violent. Quand on n'y arrive plus, quand on est dépassé, sauf évidemment quand on nous a raconté qu'il fallait faire ceci, faire cela, et donc on croit. Après, quelquefois, on justifie, on se dit oui, une gifle, ça ne fait pas de mal, enfermer un enfant dans sa chambre, c'est une punition, et c'est important de faire des punitions pour pouvoir permettre à l'enfant de comprendre, même si c'est faux, il y a des gens qui y croient. En dehors de ces moments-là, on va même... Quand les gens y croient, dur comme fer, on va prendre l'axe de l'empathie en pensant qu'ils ont besoin d'aide. Parce que quand vous arrivez avec cette offre, je peux vous aider, alors la plupart du temps, comme ce sont des Français, ils vont dire non. Voilà, on est dans une civilisation de chacun pour soi, individualisme forcené, je dois me débrouiller tout seul, etc. Donc la première réaction... de quelqu'un que vous cherchiez à lui porter sa valise ou son panier ou que vous preniez l'enfant pour aider, c'est mal vécu parce que notre société est tellement, tellement individualiste. Ça n'empêche qu'on le fait quand même et on y va. Et donc, on insiste et on peut insister, mais avec douceur et respect pour le parent et avec, à l'intérieur, je suis là pour vous fournir du soutien. Ça m'est arrivé dans le train de... dire, si vous voulez, moi je peux lui faire faire ses devoirs. Donc j'ai pris le gamin et on a fait les devoirs ensemble. Parce que voilà, ça disjonctait là, même on n'en pouvait plus. Et je comprends, parce que l'enfant avait des problèmes monstrueux pour apprendre. C'était extrêmement difficile pour lui. Des choses qui avaient l'air, mais qui étaient tellement simplissimes. Il ne les pigeait pas. Et donc voilà, j'ai observé ce qui se passait. J'ai vu qu'en fait, cet enfant avait la bouche ouverte en permanence. Il avait de gros, gros problèmes. de bouche, de respiration et donc d'oxygénation de son cerveau, etc. Donc j'ai pu en parler après à la maman. Mais surtout déjà, le simple fait de prendre soin de son enfant, elle pouvait respirer un petit peu et elle s'est sentie moins jugée. Alors je ne peux pas dire qu'elle ne s'est sentie pas jugée du tout, parce que forcément, elle se juge forcément aussi elle-même. Et d'ailleurs, elle s'est justifiée. Je lui ai dit, vous savez, j'ai tout essayé, j'ai tellement fait, etc. Il a vu tous les psy possibles, il a vu ah mais j'y arrive plus etc. Donc voilà, elle a pu se confier aussi. Donc la plupart des parents vont disjoncter se mettre à crier, frapper, punir, au moment où ils ne savent plus faire autrement. Si on est témoin de ça, on peut intervenir pour proposer du soutien, de l'aide et l'aider à faire autrement. On n'a pas toujours le temps, on n'a pas toujours l'espace, on peut au moins. donner un petit regard à l'enfant et aux parents, un regard tendre et non pas un regard jugeant. Rien qu'un regard, l'enfant s'en empare. Une fois, une adulte, quand elle était psychothérapeute, m'a raconté que quand elle était enfant, dans un train, sa mère lui hurlait dessus, et là, elle a rencontré le regard d'une femme. Elle a dit, dans son regard, j'ai lu que c'était pas ma faute. Et que c'était ma maman qui avait un problème. Et elle n'a rien dit. Mais ça m'a toujours portée. J'ai regardé ma maman différemment. Et j'ai arrêté d'être blessée à l'intérieur par ça. Ça a changé ma vie. Et donc je me suis dit, mais c'est incroyable. Un simple regard, ça peut soutenir.

  • Speaker #0

    Quand on se retrouve dans ces débats qu'on a souvent à table entre jeunes parents, lorsque l'on parle de violence, par exemple, on va parler... de la fessée, etc., de ces violences physiques, et que certains vont nous répondre Oh, moi j'ai pris quelques fessées, ça ne m'a pas tué. Regarde comment je suis devenue, etc. Qu'est-ce qu'on répond à ces gens-là ?

  • Speaker #1

    Ça dépend de la situation. Mais la plupart des gens sont devenus ce qu'ils sont devenus malgré les fessées. Et donc, ils vont bien sûr se justifier dans un premier temps. Donc, j'aime bien, de toute façon, ne jamais s'opposer. Si vous dites non, vous vous opposez, vous prenez un discours différent, il va y avoir juste de la bagarre. Et donc on commence par dire oui. Ah oui, tu as raison ! C'est ce qu'on disait avant. Avant que les neurosciences n'identifient ce que ça fait réellement, on croyait que ça ne faisait rien. Bien sûr, ça ne t'a pas tué. Heureusement, je suis contente que ça ne t'ait pas tué. Mais peut-être que ça a tué une petite partie en toi. Peut-être que de temps en temps, tu n'as pas l'aisance ou la confiance que tu pourrais avoir dans certaines situations. Peut-être que ça t'arrive de te soumettre face à un patron, face à quelqu'un de plus important. Et peut-être que, tiens, tu sais, j'avais repéré, tu m'avais parlé de ta difficulté avec l'autorité, peut-être que ça a un lien. Des choses comme ça.

  • Speaker #0

    Alors vous l'avez dit, les études scientifiques prouvent les résultats positifs de la parentalité que vous défendez, la parentalité positive. Pourquoi pour autant, cette parentalité-là ne fait-elle pas l'unanimité ?

  • Speaker #1

    Alors dans le reste du monde, elle fait l'unanimité, presque. Il y a bien sûr quelques personnes. qui vont, même dans le reste du monde, il y a quelques personnes qui vont continuer de militer pour la fessée, pour la punition, etc. Dans aucun pays, nulle part dans le monde, il y a une unité totale sur quelque chose. Il y en a qui sont pour la démocratie, il y en a qui sont pour l'autocratie. Et donc, dans la famille, c'est pareil. Et plus on a subi de blessures, plus on peut avoir tendance... à justifier la façon dont nos parents nous ont éduqués et donc à être dans cette parentalité davantage autoritaire.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, lorsqu'on parle de parentalité positive, en France, il y a souvent ce mythe de l'enfant roi, de l'enfant tyran. Qu'est-ce que vous avez à dire à ce sujet ?

  • Speaker #1

    Tellement de choses. Donc, j'explique bien dans le livre d'où ça vient. Et cette idée d'enfant roi et d'enfant tyran, alors là, est vraiment typiquement française parce qu'elle est liée à la psychanalyse. Et la psychanalyse reste vivante dans notre pays. Elle ne l'est plus, elle n'est plus enseignée dans les autres pays du monde, sauf peut-être en Argentine paraît-il. Mais aux États-Unis, au Canada, dans les grands pays du monde, on n'enseigne plus la psychanalyse. Aussi, on l'enseigne, mais en philosophie, mais pas en psychologie. En psychologie, maintenant, on sait que cette théorie... qui a été élaboré par Freud pour camoufler le fait que lui a subi des violences sexuelles dans son enfance, que son père a commis l'inceste sur, on ne sait pas sur lui, mais en tout cas sur sa soeur, son frère. Donc on sait ça aujourd'hui, mais en France on ne le sait pas. En France on ne dit rien et en France on suit cette doctrine psychanalytique qui dit que l'enfant vient au monde avec des pulsions. Et qu'il s'agit de mettre un terme à ces pulsions, de dire stop, de frustrer l'enfant pour qu'il apprenne à devenir un adulte raisonnable. Donc il s'agit de se castrer, castrer les pulsions, différentes castrations à différents âges, castrations anales, orales, etc. Les différentes castrations pour pouvoir enfin avoir intégré. ce qu'on appelle le principe de réalité. Donc, selon eux, un enfant vient au monde avec ses pulsions et il rencontre le principe de réalité et qu'il a besoin de rencontrer ce principe de réalité. Alors, voilà, dans la science, aujourd'hui, on part dans la théorie de l'attachement qui a accumulé les preuves scientifiques et qui dit qu'un enfant vient au monde avec des besoins. C'est un rapport. complètement différent. L'enfant ne vient pas au monde avec des pulsions qu'il va satisfaire au dépens de sa mère qui n'est qu'un objet de satisfaction. Là c'est complètement différent, l'enfant vient au monde avec des besoins et notamment des besoins affectifs et il a ce besoin de sécurité affective et la mère, le père, les parents sont des figures d'attachement qui vont assurer sa sécurité. Il a besoin de cette sécurité pour pouvoir prendre son envol et pour pouvoir s'épanouir. Donc c'est une perspective complètement différente, mais qui en France n'a pas encore pénétré complètement, ni dans les études de psychologie, ni dans le grand public suffisamment. Donc même si ça progresse quand même notablement, et notamment en psychiatrie maintenant, c'est clair que... La psychanalyse n'est plus enseignée en psychiatrie, mais c'est la théorie d'attachement qui est enseignée.

  • Speaker #0

    En quoi alors la parentalité positive n'est pas une forme de parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    La parentalité laxiste est une parentalité négative. La parentalité positive, elle est dite positive parce qu'elle obtient des résultats positifs pour l'enfant comme pour les parents. Et les études scientifiques montrent que quand on écoute les besoins de l'enfant, quand on co-régule les émotions de l'enfant, lorsque l'on pratique un certain nombre de fonctionnements... de compétences parentales, du coup, il y a des issues positives et donc du coup c'est défini comme une positive. Il y a plusieurs formes, il y a l'autoritarisme qui est une parentalité négative parce que l'autoritarisme a tendance à générer des enfants soit trop soumis et donc qui perdent confiance en eux, soit agressifs, qui développent des comportements débordants. C'est là que c'est paradoxal parce que ce sont souvent les autoritaires qui accusent les autres parents, soit disant positifs, de laisser tout faire aux enfants et que du coup ils vont avoir des comportements débordants, comme vous dites, rois et tyrans. Mais en réalité, ceux qui deviennent tyrans, ce ne sont pas ceux à qui on n'a pas posé de limite, c'est plutôt ceux à qui on a posé trop de limites de manière autoritaire. Donc il y a l'autoritarisme, il y a la démission totale. où là, le parent ne s'occupe absolument pas de l'enfant. Et donc, ça, évidemment que c'est aussi une parentalité dite négative parce que ça ne permet pas à un enfant de grandir. Et la parentalité laxiste, parentalité laxiste, c'est ne pas avoir d'attente envers son enfant. Je lui laisse tout faire. Oh, il apprendra bien tout seul. Et donc, je suis affectueux, mais parce que dans le je m'en fiche, il n'y a rien du tout. Là, dans le laxiste, on est quand même affectueux. mais c'est tout et il n'y a pas de règles, on laisse un peu l'anarchie faire et on pense que l'enfant va se développer tout seul. Et donc ça, c'est prouvé aussi scientifiquement que ça ne fonctionne pas et que les enfants sont un peu perdus et n'ont pas suffisamment de structures pour pouvoir se développer. Donc la parentalité positive, c'est ni le laxisme ni l'autoritarisme. C'est une saine autorité. Les enfants... ont envie de faire ce qui est bien. Ils ont envie de bien se comporter. À condition qu'on les respecte, ils vont respecter. En fait, les enfants nous imitent énormément.

  • Speaker #0

    Je le vois à la maison sur cette question des règles. Moi, j'ai un garçon qui a 18 mois. Et donc, il marche et on l'emmène dans la rue. Et on essaye de lui expliquer qu'il y a des endroits où il ne peut pas marcher, notamment sur la route. Et donc, on lui dit pas là. Et c'est vrai que maintenant, il est dans cette imitation où il nous montre les endroits. Il nous dit pas là, pas là. Et il a l'air hyper heureux de nous montrer que... Il a compris qu'il ne devait pas aller là.

  • Speaker #1

    Exactement. Les enfants sont friands de règles. Donc ça fait toujours drôle aux parents quand je dis ça, mais en réalité, les enfants adorent les règles. Ils aiment les respecter. Et ce qu'ils n'aiment pas, ce sont les ordres, les limites, les punitions, les impositions. Chaque fois qu'on est dans une dynamique tu fais comme ci ce n'est pas une règle. Ça, c'est un ordre. Et donc un ordre, tous les humains, sont construits pour résister aux ordres. Donc bien sûr, si vous formulez votre règle en termes de règles, non pas en termes de règles, je veux dire, mais en termes d'ordres, l'enfant va se rebeller. Mais si vous formulez la règle en termes de règles, c'est-à-dire une procédure, et c'est bien ce que vous faites en expliquant ici tu marches, ici tu ne marches pas, là tu es dans les bras, on donne le fonctionnement. Donc voici la procédure pour vivre. ensemble. La procédure pour vivre en communauté, c'est que dans telle situation, on dit merci, dans telle situation, on dit bonjour, etc. Et donc, on donne les informations. Du coup, l'enfant, il dit, c'est comme ça que fonctionne le monde. Moi, je veux y arriver, je veux le faire, je veux le faire correctement.

  • Speaker #0

    Pourquoi pensez-vous qu'il y a eu une telle association entre parentalité positive et parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est juste de la désinformation qui est menée par les autoritaires. Un parent autoritaire ou des professionnels qui sont dans cette dynamique de vouloir être dans cet autoritarisme sont dans une espèce de...

  • Speaker #0

    Il y en a même qui utilisent le mot de croisade pour tenter de maintenir ce cap. Et donc, c'est la critique facile. Après, il peut y avoir aussi des interprétations superficielles de la part des gens. Parce que, comme je disais qu'il n'y a pas eu beaucoup de pédagogie autour de la loi qui dit que c'est important d'élever les enfants sans violence, il peut aussi y avoir des conceptions un peu superficielles. En disant, ne mettons pas, il ne faut pas donner d'ordre aux enfants, alors du coup, on laisse tout faire. Ou alors, quand on dit non à un enfant, ça le stresse, alors du coup, je ne veux pas stresser mon enfant et du coup, je lui laisse tout faire. Non, tout à l'heure, je vous ai dit, non, on lui met la ceinture de sécurité. De temps en temps, il veut un deuxième bonbon, non, stop. Alors, c'est vrai que si on utilise un stop plutôt que non, mais on va quand même freiner, on va quand même organiser. Et c'est vraiment extrêmement important. Il y a des règles, mais des parents qui ont entendu un truc, lu un petit article, peuvent avoir une impression comme ça superficielle en disant je vais être gentil. Mais en fait, le vrai problème, c'est quoi ? Le vrai problème, c'est qu'eux-mêmes, quand ils étaient enfants, ils avaient des parents autoritaires. Ils ne veulent pas faire ça. Ils n'ont pas appris à faire différemment. Et du coup, ils sont juste, je ne veux pas être autoritaire. Et comme ils ne se sont pas sentis toujours aimés inconditionnellement par leurs parents, ils peuvent craindre que leur enfant ne les aime pas. Et quand on craint que son enfant ne vous aime pas, on va essayer de lui faire plaisir. Et donc vous avez toutes sortes de parents qui croient, qui peut-être se racontent qu'ils sont dans la parentalité positive, mais en fait ça n'est pas de la parentalité positive, c'est juste qu'ils ne disent pas non parce qu'ils ont peur que leur enfant... ne les aiment plus s'ils leur refusent un bonbon, une heure de télé ou ceci ou cela.

  • Speaker #1

    Et ça, vous le rappelez très bien dans votre livre, c'est très bien démontré. Il semblerait que notre culture peine aussi à évoluer sur les questions d'éducation à cause du manque de temps, vous l'avez dit, et de valorisation que l'on réserve au fait de s'occuper de ses enfants en France. Il faut du temps pour s'informer, pour déconstruire les schémas de pensée hérités de son enfance et de sa propre éducation, et pour résister aux automatismes. et aussi aux critiques extérieures. Et ça, je trouve qu'on le retrouve beaucoup en France. Alors, pouvoir passer du temps de qualité avec ses enfants, en France, ça semble être presque un luxe. Aujourd'hui, vous l'avez rappelé, les congés de parentalité sont extrêmement courts. Comment est-ce qu'on pourrait changer cela ? Comment est-ce qu'on pourrait donner davantage envie aux adultes de passer du temps de qualité avec leurs enfants, quand bien même ils sont contraints par la société ?

  • Speaker #0

    Merci Stéphanie pour ce focus sur le désir parce que c'est vrai le souci c'est que toute la société va sans arrêt nous raconter que les enfants c'est pénible pendant les vacances oh là là on se prend la tête on a les enfants toute la journée c'est horrible vivement la rentrée parce que là au moins quelqu'un s'occupe d'eux toute la journée oh il y a la télé je peux les mettre devant la télé ils vont pas me saouler donc il y a tout ce discours ambiant euh qui est vraiment problématique. Et donc, on a à aimer nos enfants différemment. Mais c'est vrai que c'est plus facile d'aimer ses enfants quand ça se passe bien. Et donc, quand on sait maîtriser quelques compétences de parentalité qui permettent que ça se passe plus facilement. Parce que si on se dispute en permanence, si on ne sait pas comment faire pour qu'il mette ses chaussures, pour dormir, on est débordé. La plupart des parents d'aujourd'hui, quand ils sont parents pour la première fois, n'ont jamais eu un bébé dans les bras. Dans le temps, on s'occupait toujours des soeurs, des frères, des cousins, des cousines, etc. On vivait avec des bébés. De nos jours, ben non. Ce qui fait que, déjà, dès la base, on saisit le petit bébé comme une poupée. On le positionne comme un poupon au sein. Et du coup, évidemment, on a des crevasses parce que c'est pas comme ça qu'on devrait positionner le bébé. Donc ça commence très mal. Et on n'a pas de transmission. plus de transmission et du coup, il y a plein de choses qu'on ne sait pas faire. Et du coup, c'est compliqué. Donc, ce serait vraiment utile d'avoir des films, d'avoir des livres, plus d'informations, faciles d'accès, qui permettent de voir comment ça se passe. C'est dans ce sens-là qu'on a fait ce film sur les mille premiers jours avec Boris Cyrulnik, Nathalie Vicariini et Antoine Guédonnet. où on va les quatre experts dans les familles pour accompagner les parents et leur permettre de regarder différemment leur enfant. C'est ça en fait, c'est ce qu'ils ont fait dans les pays du Nord, c'est ce qu'ils ont fait en Allemagne. C'est plus de temps, non seulement des congés plus importants, mais beaucoup d'activités. parents-enfants, pour petit à petit aussi fournir aux parents des compétences. C'est l'idée des Maisons des 1000 premiers jours. Quant à la commission des 1000 jours, on a eu cette idée de faire des Maisons des 1000 jours. C'est vraiment un lieu, un centre où on peut aller dès la grossesse et on va être accompagné pendant un an. On peut pendant une fois par semaine être en groupe avec d'autres parents, d'autres parents qui ont des enfants du même âge, pouvoir... partager, dire ce qui se passe, vider nos émotions parce que c'est parfois dur, et aussi apprendre des choses sur le développement de l'enfant, apprendre des compétences, comment on fait ceci, comment on fait cela. Tout ça peut nous étayer et faire qu'on a du coup envie. Plus on est avec un enfant, plus on a envie d'être avec un enfant parce que plus on est avec un enfant, mieux on le connaît. Et plus on le connaît, plus nos langages, on sait identifier le besoin qu'il a, on sait y répondre, et donc tout coule beaucoup mieux. À partir du moment où on ne se voit pas, on ne se voit pas assez, on n'a pas le temps de connecter suffisamment. Et un enfant qui est déconnecté, il va forcément, du fait de la théorie d'attachement, il va forcément être plus demandeur, plus exigeant, plus agressif, plus... Et du coup, nous, on est en déstabilisation et hop, finalement, si on regarde le temps qu'on passe avec nos enfants, quelquefois, on se rend compte, mais zut, j'ai passé toute ma journée à le contrôler, mais finalement, on n'a pas eu de relation véritable. Donc, c'est un peu l'idée, ce serait de changer tout ça. Ce qui m'a intriguée, parce que dans les autres pays, on travaille aussi, c'est que depuis les années 50, dans tous les autres pays, en Europe, le temps passé avec les enfants a augmenté. En France, il a diminué depuis les années 50. Or, vous parliez de l'imposition de la société, mais on n'a plus que 35 heures de travail. Dans les années 50, c'était plutôt 45-50. Donc, qu'est-ce qui s'est passé ? On travaille moins, mais on est moins aussi avec les enfants. Donc, c'est une question de choix individuel.

  • Speaker #1

    Et sur les informations, c'est vrai que moi, je suis totalement pour... développer davantage de ressources qui soient à disposition gratuitement et de manière nombreuse aux parents. Je le vois par exemple quand on se prépare à l'accouchement, on a le droit à six cours de préparation à l'accouchement pour un moment dans la vie du bébé et de la maman et du partenaire.

  • Speaker #0

    C'est important,

  • Speaker #1

    il ne faut pas faire moins. Mais c'est vrai que c'est dingue, une fois qu'on se retrouve avec un enfant entre les bras,

  • Speaker #0

    il n'y a plus rien. Mais c'est pour ça que les maisons des 1000 jours se développent, elles répondent vraiment à un besoin. Et j'invite chaque maman à se rapprocher de la maison des 1000 jours la plus proche. J'espère que dans un avenir proche, de plus en plus proche, ce sera comme en Australie où il y en aura dans tous les quartiers. Aujourd'hui, on a petit à petit, ils s'en construisent un par ville à peu près, mais ça répond à un vrai besoin. Et ça marche tellement bien que je pense que ça va aller vite.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'on aurait pu se dire que l'État, le gouvernement ne semblent pas encore prendre suffisamment au sérieux cette situation en termes d'éducation, en termes d'enfance, si on se compare par exemple au fameux pays nordique. Comment est-ce que nous, alors là je prends ma casquette un peu militante, dans la société civile, on pourrait changer les choses pour changer ces mentalités vis-à-vis de la relation entre parents et enfants ?

  • Speaker #0

    C'est vraiment quelque chose d'individuel du coup, c'est-à-dire qu'on a besoin de continuer de militer. On continue d'exiger d'entraîner, d'en parler davantage et faire respecter nos droits déjà parce qu'il y a de nombreux droits déjà pour les parents, notamment pour les mamans allaitantes dans les entreprises et ces droits ne sont pas toujours respectés. Donc déjà, au moins faire respecter les droits déjà acquis et continuer de militer pour en avoir davantage. Et puis c'est surtout commencer à réaliser que nous sommes parents. Et que notre vie de parent, elle est importante. Et que nous ne devrions pas être obligés de quitter notre vie de parent pour faire une vie de bon professionnel, que finalement, dans la plupart et de plus en plus d'entreprises le réalisent. Ce sont beaucoup des parents qui sont les salariés. Et parmi les salariés, il y en a forcément un bon nombre, des parents ou des aidants de manière générale. Et donc les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à intégrer cette dimension. Parce qu'en réalité, quand un parent est sécurisé dans son rôle de parent, lorsque les choses lui sont facilitées, notamment au niveau des horaires, mais aussi... Lorsque c'est reconnu qu'il a le droit d'être parent et que le fait d'être parent ne lui enlève pas quelque chose dans sa carrière, alors il va travailler davantage, travailler mieux, travailler plus efficacement. Donc les labels pour les entreprises qui respectent les parents se développent. Donc on peut tout à fait inciter son entreprise à aller vers ces labels-là et à se rappeler que plus un salarié est heureux, mieux il travaille.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait totalement sens. On va faire un petit pas de côté sur ces sujets culturels d'éducation en France pour parler d'une partie de votre livre, moi, qui m'a beaucoup intéressée, interpellée. Vous parlez du poids des psychotraumas de notre enfance sur notre santé physique, psychique et sociale. Est-ce que vous pourriez revenir là-dessus ?

  • Speaker #0

    Oui, le psychotrauma, c'est lorsque... Il y a trauma lorsqu'un événement va dépasser nos capacités d'adaptation. Le stress, c'est l'effort d'adaptation de l'organisme à toute situation. Donc, on se stresse sans arrêt. Le stress, c'est positif. Dans notre société, on le vit souvent comme négatif. Et d'ailleurs, je ne veux pas stresser mon enfant. Mais si, le stress, c'est juste un effort d'adaptation. Donc, le stress, c'est OK. Il y a le stress positif. Plus on est stressé, d'ailleurs. Plus on réussit, aux Jeux Olympiques, ils ont réussi à dépasser leur capacité parce que c'était super stressant d'être dans la compétition et avec tout ce monde tout autour, etc. Donc, le stress est excitant et fournit de l'énergie. Donc, le stress n'est pas négatif en soi. Il y a le stress positif, il y a le stress tolérable, c'est-à-dire je vis quelque chose d'un petit peu difficile, ça demande plus d'énergie pour monter la colline. Mais hop, j'y arrive et... J'arrive à ce que mon métabolisme à l'intérieur de mon corps s'équilibre. Et il y a le stress dit toxique qui va devenir le trauma. Là, c'est quand l'événement ou la pente a monté, la pente a grimpé. C'est trop dur et du coup, ça dépasse mes capacités d'adaptation. Donc, il y a trauma chaque fois qu'on ne peut pas réussir. à s'adapter à une situation. Donc, il y a trauma lorsqu'il y a un earthquake, ça me vient en anglais, un tremblement de terre, lorsqu'il y a un événement cataclysmique extérieur, une guerre, tout ça, ça fait effectivement, ce sont des événements traumatiques. Il y a les gros événements traumatiques, un viol est aussi un événement traumatique, l'inceste. Encore plus parce qu'il y a cette dimension de soumission où on faisait confiance à la personne et on est trahi dans sa confiance. Donc là, c'est un stress vraiment lié à la trahison en plus. Et puis, c'est le trauma lié à un événement identifié qui dépasse mes capacités. Ou qu'est-ce qui se passe dans le cerveau à ce moment-là ? Le cerveau réagit et... Et quand c'est vraiment trop dur, qu'on ne peut pas réussir à s'adapter, il y a quelque chose qui disjoncte, qui fait qu'on ne mémorise pas. Donc on va effacer l'événement et ça s'appelle l'amnésie traumatique, on l'efface. Et en même temps, il risque d'y avoir des flashbacks de ce moment-là, des irruptions de nos émotions qui reviennent. Et quand on a vécu par exemple les bombardements, le moindre... tonnerre qui arrive va réveiller et donc on est absolument paniqué, etc. Ça réveille, c'est pas le tonnerre qui nous fait peur, c'est que le tonnerre réveille les mémoires traumatiques de la guerre. Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que ça, c'est une forme de trauma mais qu'il y a aussi autre chose qui va dépasser les capacités d'adaptation d'un enfant notamment, c'est lorsqu'il y a plein de Petits événements qui vont se succéder et qui ne permettent pas à l'enfant de revenir. Punir une fois un enfant, aucun problème. Le punir tous les jours, très régulièrement. Le dévaloriser, le taper, l'humilier, lui dire tu es nul, tu es lamentable, lui dire des choses méchantes régulièrement. Petit à petit, ça sape sa confiance en lui et petit à petit, il n'arrive plus à revenir et être vraiment lui-même. Et de la même manière, il va occulter. Tout ça, il va juste garder le sentiment d'humiliation, la soumission, et il va souvent se suradapter, devenir sage comme une image. C'est pour ça que c'est toujours louche, quelqu'un de sage comme une image. Et puis de temps en temps, on va devenir violente contre son frère, contre quelqu'un de plus faible que lui. Il peut y avoir aussi des réactions qui vont sortir. Le trauma, c'est lorsque quelque chose se passe qui nous fait mal. Mais c'est aussi quand ce qui devrait nous faire du bien n'est pas là. Et Gabor Maté l'a très bien montré, ce médecin spécialiste des addictions et spécialiste du trauma, qui nous dit que tout humain a besoin d'affection, d'amour inconditionnel. Et lorsqu'on est pris par une émotion, on a absolument besoin d'être entendu. reconnu et d'être accompagné dans notre émotion. Et donc, si un enfant de, par exemple, 3 ans se met à pleurer, hurler, et qu'il n'y a pas un adulte à ce moment-là qui vient pour le prendre dans les bras, pour le câliner, pour l'aider à canaliser ce trop plein d'émotions, ça va faire trauma. Parce que ça n'est pas quelque chose de négatif qui arrive, qui ne permet pas de s'adapter. Mais c'est quelque chose qu'il aurait dû recevoir pour pouvoir grandir normalement et qui a manqué. Donc nos manques font aussi trauma. Chaque fois qu'on envoie un enfant dans sa chambre, à la place d'écouter ce qui se passe pour lui, quand il pleure, quand il crie, quand il a un comportement débordant, chaque fois qu'on n'écoute pas, qu'on ne fournit pas un accueil inconditionnel à l'enfant, eh bien... On met une pierre, là encore, une fois, ne suffit pas pour traumatiser un enfant. Mais lorsque ça se répète régulièrement, alors oui, ça devient traumatisme. Dire que c'est, on épuise les capacités de résistance de l'enfant.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il est possible de guérir l'enfant blessé qu'on a été lorsqu'on a vécu ces psychotraumas et qu'on est adulte, une fois qu'on décide en plus de devenir parent ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, oui, oui, oui, oui, oui, cent fois oui, oui, on peut guérir. Et il y a de plus en plus de thérapies efficaces pour soigner le trauma. Il y a eu toutes sortes de thérapies dans le passé. On vient de très, très loin. En 1981, il était écrit dans le manuel de psychiatrie officiel que le trauma était très rare et que, par exemple, l'inceste n'existait pour les femmes qu'une sur une. un million vivaient l'inceste. Et que de toute façon, avoir des relations sexuelles avec son père était plutôt quelque chose qui allait vous permettre d'être mieux intégré dans votre vie d'adulte. Donc voilà la conception du trauma en 1981. C'est pas si vieux que ça. Elle était là, quoi. Donc il y avait très peu de thérapies qui se préoccupaient de soigner le trauma. Alors moi, je faisais partie déjà à l'époque de la branche des thérapies humanistes qui... prenait en compte le trauma et donc j'ai travaillé sur le trauma à la suite aussi d'Alice Miller etc. où on mesurait l'impact du trauma sur la vie de tout un chacun et donc j'ai déjà travaillé sur le plan émotionnel à libérer le corps parce qu'en fait le trauma il s'inscrit dans le corps et donc il y a aujourd'hui multitude de thérapies il y a des thérapies corporelles un peu comme celles que je pratiquais et des thérapies qui s'occupent de d'exprimer les émotions, d'autres thérapies qui vont être dans la libération des sensations, qui vont permettre de remettre en route le nerf vague, de vraiment rééquilibrer tout ce système sensoriel. Il y a le MDR, il y a la thérapie mosaïque, il y a l'EFT, il y a de plus en plus de thérapies non-invasives, parce que ce qu'on sait aujourd'hui, c'est qu'il n'est pas nécessaire de revivre le trauma pour le guérir. Il n'est même pas nécessaire de le... dire, de le parler et souvent même faire raconter à quelqu'un son événement traumatique risque de le retraumatiser. Donc on avance maintenant. Depuis quelques années, on est de plus en plus conscients, on étudie le traumatisme un peu sous tous ses angles et on sait de mieux en mieux travailler sur cette question du trauma. On travaille sur le soin du trauma, comment guérir du trauma. Et il y a un mouvement mondial, et je mène ce mouvement à Marseille avec quelques amis, où on veut transformer la ville de Marseille en faire une ville non violente, une ville informée sur le trauma. Et donc ce mouvement des villes informées sur le trauma, c'est une façon de... d'embarquer toute une population. Parce que, quelquefois, c'est dur. Même aujourd'hui, un parent qui est dans la parentalité positive, il a non seulement à gérer son enfant, mais à gérer tous les jugements des gens, puisque aujourd'hui, malheureusement, la majeure partie des gens sont encore dans une parentalité violente et autoritariste. Donc, c'est oui, tu devrais quand même le faire se tenir mieux, il gêne tout le monde, là, tu sais, ton enfant gêne Bref, il y a tout ce poids-là. Et tant qu'on n'a pas compris et la théorie de l'attachement et le développement du cerveau d'un enfant et comment ça fonctionne, le stress, le trauma, quels sont les besoins d'un enfant, comment on va répondre, comment on co-régule les émotions d'un enfant, on sera toujours démuni, il y aura toujours des gens qui vont nous juger comme ça. Donc il s'agit vraiment de transformer toute la population et transformer le regard d'une population. Si au lieu de dire mais c'est pas bien d'avoir fait ça. On dit mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? C'est-à-dire au lieu de jugement systématique sur quelqu'un, mais assieds-toi, fais ceci, fais cela, du contrôle systématique et de la punition, retourner son regard et dire mais si tu fais ça comme ça, c'est qu'il s'est passé quelque chose pour toi. Quel est le nœud dans ton cœur ? Et du coup, ça change complètement le regard. Et donc, on voudrait apprendre comme ça tous ensemble à repérer ce qu'est un trauma. Comment ça nous impacte ? Parce que la prévalence du trauma est phénoménale. On sait aujourd'hui que deux personnes sur trois ont vécu au moins un trauma dans leur vie. Et une personne sur huit, on a vécu plus de quatre. Quand on a vécu plus de quatre traumatismes dans sa vie, on risque fort d'avoir des problèmes d'addiction, des problèmes cardiaques, des problèmes de métabolisme, d'être obèse, d'avoir des problèmes de santé de manière générale. Des problèmes relationnels, des problèmes émotionnels, la vie est vraiment plus compliquée. Donc on a besoin de pouvoir mesurer cette prévalence et de réaliser que quelqu'un qui n'est pas sympa, qui dysfonctionne, qui exagère, qui ne se comporte pas correctement, c'est probablement quelqu'un qui a été traumatisé. Et si on l'aide, si on lui fournit le soutien dont il a besoin, ça va tout changer. Ça peut changer son image de lui-même, ça peut lui donner envie de s'améliorer, ça peut lui donner envie de changer. Et puis, si on peut éviter de le retraumatiser. Parce qu'aujourd'hui, globalement, il y a un moment où même je m'en porte un peu dans le livre, et je dis que c'est quand même assez terrible qu'à l'école par exemple, quand on sait qu'il y a probablement trois enfants par classe qui ont subi l'inceste. et qu'on voit qu'un enfant a des comportements débordants, on va le punir, on va l'exclure même. Mais à quel moment on se demande si peut-être celui qui a des comportements débordants, il lui est arrivé quelque chose ? Parce que si vos parents vous frappent à la maison, si vous êtes violés, si vous subissez du traumatisme, si vos parents ne vous enseignent pas à réguler vos émotions, si vous vous enfermez dans votre chambre, dès qu'il se passe quelque chose d'émotionnel à l'intérieur de vous, vous ne savez pas comment faire. Et toute cette boule d'émotion, toute cette boule de tension à l'intérieur de vous, elle éclate en classe. Mais du coup, c'est double punition. Quand on punit l'enfant et puis on le renvoie chez lui, en quoi est-ce que c'est aidant ? En quoi est-ce que ça lui permet de soigner ce qui se passe à l'intérieur ? Donc c'est vraiment changer le regard de la société. Et je suis... Moi, je prône zéro tolérance. C'est pour ça, vraiment, quand on me dit que je suis laxiste, que je laisse tout faire, trop permissive. Non, c'est zéro tolérance. Un pas de côté, une insulte, stop. Qu'est-ce qui se passe ? D'où vient cette insulte ? Et on cherche à comprendre, donner du sens et à réparer. Parce qu'on veut vivre ensemble. On veut vivre en communauté. On veut que ça se passe bien. Et on veut construire suffisamment... d'authenticité dans les relations, suffisamment de confiance dans les relations, suffisamment de sécurité relationnelle, émotionnelle, de sécurité affective pour tout un chacun. Quand un humain a cette sécurité affective, il se développe. Un enfant qui bénéficie de sécurité affective, une bonne sécurité affective solide à l'intérieur, il va bosser, il va s'intéresser, il va se développer. il va réussir. Alors quand je dis ça, attention, ce n'est pas magique. Et dans notre société, Il y a aussi toutes sortes de problèmes que j'aborde un tout petit peu dans ce livre. J'aborderai plus dans d'autres livres. Mais il y a des gros problèmes sociaux. Il y a des gros problèmes de nourriture. Les enfants d'aujourd'hui mangent beaucoup trop de plats transformés et donc qui posent des problèmes sur leurs microbiotes et qui leur fait être dans ces réactions extrêmes d'intolérance à la frustration, etc. C'est-à-dire que l'intolérance à la frustration, ce n'est pas forcément seulement... Le manque de limites de la part des parents, c'est très souvent parce que le microbiote de l'enfant est complètement sans dessus-dessous et que l'enfant ne sait pas gérer, ne peut pas réussir à réguler ses émotions. Le nombre d'enfants qui respirent par la bouche aujourd'hui est phénoménal et ça c'est pas normal non plus. Le nombre d'enfants qui sont trop assis, qui ne bougent plus, qui ne courent plus. Aujourd'hui les enfants ne courent plus, ils sont là assis avec leurs tablettes et ils ont... perdu 25% de capacité cardiaque. C'est énorme. Ils courent moins vite qu'avant, ils vont moins dehors, ils sont de plus en plus myopes parce qu'on a besoin d'être à l'extérieur pour pouvoir... C'est la lumière de l'extérieur qui aide l'œil à grandir. Si on n'est pas suffisamment exposé à la lumière externe, la lumière du jour, on devient myope. Quand on devient myope, ça génère des peurs parce qu'on ne voit pas bien les profondeurs, on ne voit plus bien les choses. Et donc du coup, On peut aussi avoir des difficultés à l'école. Bref, c'est tout un ensemble. Donc, il ne faut pas faire reposer tout sur les parents ne sont pas assez autoritaires, les profs ne sont pas assez autoritaires, etc. Il y a une réalité aujourd'hui. Les enfants d'aujourd'hui ne sont plus de d'hier. Ça, c'est clair. Les enfants d'aujourd'hui font beaucoup plus de crises. Ils sont intolérants à la frustration. Ils sont à la fois plus mous et plus toniques. Pas plus toniques, mais plus débordants. Donc oui, c'est un problème. Mais le problème, il n'est pas. ce n'est pas une question d'autorité, c'est vraiment une question d'environnement. Et nous avons besoin de prendre en compte cette dimension d'environnement.

  • Speaker #1

    C'est ça, et c'est ce que je trouve qui est essentiel dans votre ouvrage, c'est que vous rappelez tous ces éléments-là, et aussi ça nous rappelle à tous à quel point l'enfance est aussi une période extrêmement sensible, fragile et complexe, et à quel point il est nécessaire d'être informé à ce sujet. On va malheureusement devoir se quitter. Isabelle, j'ai une dernière question, c'est ma question rituelle dans le podcast, vous le savez, il s'appelle Les adultes de demain Qu'est-ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Eh bien, paradoxalement, je souhaite juste qu'ils soient le plus enfants possible et d'avoir la permission d'être enfants. Parce que je me suis rendu compte, je disais beaucoup, vous êtes les adultes de demain, et puis je me suis dit mais stop, en fait il y en a marre de faire tout aujourd'hui en fonction de quels adultes ils vont devenir demain. Plus chaque étape de vie est pleine et répond à leurs besoins, plus chaque future étape de la vie sera aussi harmonieuse. Et donc, ce que je leur souhaite à chacun, c'est que leurs besoins d'enfants soient respectés et qu'ils puissent avoir le droit de vivre leur vie d'enfant un maximum.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Isabelle. Je rappelle que votre livre s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont. Un livre qui devrait être mis entre les mains de tous les parents et futurs parents. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci Stéphane.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des Adules de Demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

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Description

Les faits d’actualité récents, où une enseignante fait preuve d’une violence inouïe auprès de l’une de ses élèves à la rentrée scolaire, fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant, depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu’une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l’enfant.


Isabelle Filliozat fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d’autoritarisme et d’obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteure, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J’ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faites aux enfants, des raisons expliquant l’urgence de changer notre regard sur les enfants et des manières dont nous pouvons réparer l’enfance blessée de nombreux adultes. C’est suite à la lecture de son dernier livre bilan “Éduquer : tout ce qu’il faut savoir”, que j’ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les points clés de l’éducation.


Quelques questions posées pendant l'interview :

  • Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Il semblerait qu’au regard des autres, être un parent autoritaire, capable de faire obéir son enfant, soit plus valorisé dans la société que d’être à son écoute et de respecter ses besoins. Pourquoi la parentalité positive ne fait-elle pas l'unanimité ? Avez-vous eu l’impression d’être jugée quand vous avez éduqué vos enfants de cette manière-là ?

  • Comment réagir selon vous lorsque l’on assiste à des scènes de violence contre des enfants dans la rue, chez des amis ?

  • Comment avez-vous vécu les attaques de ces dernières années à votre encontre mais aussi contre d’autres personnes défendant la parentalité positive ?

  • Comment de telles incompréhensions vis-à-vis de la parentalité positive ont-elles pu naître ? Les résultats des différentes études sur la parentalité positive prouvent systématiquement ses bienfaits sur le comportement des enfants, sur le stress des parents, sur les résultats académiques, etc. Pourquoi ces résultats sont-ils si peu reconnus ?

  • Que faire pour que notre société évolue plus vite à ce sujet ? Que doit-on changer dans notre manière de lutter contre les VEO, de défendre la parentalité positive, mais surtout dans la place que l’on réserve aux enfants dans la société ?


Ressources :




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises,

  • Speaker #1

    de la punition. Et on pense que c'est normal. Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle,

  • Speaker #0

    elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait,

  • Speaker #1

    l'éducation est la plus belle arme de paix.

  • Speaker #0

    Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ces images nous ont tous choqués. L'effet d'actualité récent où une enseignante utilise la violence auprès de l'une de ses élèves à la rentrée scolaire fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant... Depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu'une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l'enfant. Isabelle Fiosa fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d'autoritarisme et d'obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteur, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J'ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faite aux enfants, des raisons expliquant l'urgence de changer notre regard sur les enfants, et des manières dont nous pouvons réparer l'enfance blessée de nombreux adultes. C'est suite à la lecture de son dernier livre, presque un bilan, qui s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont, que j'ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les clés d'une éducation bienveillante. Je vous souhaite une bonne écoute. Bonjour Isabelle.

  • Speaker #1

    Bonjour Stéphanie, bonjour à tout le monde qui écoute.

  • Speaker #0

    Quel honneur de vous retrouver aujourd'hui pour la seconde fois au micro des adultes de demain. Un plaisir plus. Je le rappelle à chaque fois, mais c'est vrai que vous avez beaucoup inspiré l'éducation que mes parents ont offerte à mes frères et sœurs et moi. Je suis la quatrième d'une fratrie de cinq. Car oui, Isabelle, je suis certaine que vous avez contribué à améliorer la vie familiale de nombreuses personnes en diffusant les valeurs de la parentalité dites positives. Avant même de parler des méthodes ou des techniques, vous avez permis à des familles de s'éloigner de la culture de la punition, de l'obéissance et du rapport hiérarchique très vertical entre parents et enfants, pour se recentrer sur les besoins de l'enfant et sur le respect de leur développement. Alors aujourd'hui on se rend compte, puisque vous avez publié un nouveau livre que j'ai adoré, il s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont et qui propose un panorama de plus de 40 ans de vos recherches. Cet ouvrage démontre que l'éducation positive devrait être la voie à suivre. pour élever les enfants, en leur offrant à la fois un cadre et un environnement propices à un développement harmonieux. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre, qui semble dresser un véritable bilan de votre travail de ces dernières années ?

  • Speaker #1

    J'ai éprouvé le besoin d'écrire tout ça pour rectifier tout ce qui était dit. Parce qu'en fait, beaucoup de choses les deux dernières années ont été dites sur la parentalité positive. On voit écrit sous la plume de certains journalistes. toutes sortes de choses qui sont profondément fausses ou partiellement fausses ou légèrement erronées. Bref, c'est difficile pour les gens de s'y retrouver dans qu'est-ce qui est de la parentalité positive, qu'est-ce qui n'en est pas et qu'est-ce qui est vrai dans ce qui est dit et qu'est-ce qui ne l'est pas. Parce qu'il y a des choses vraies aussi qui sont dites, mais donc c'était un peu mélangé tout ça. Et je me suis dit mais ce n'est pas possible, je ne peux pas laisser dire toutes sortes de choses qui... qui sont profondément fausses. Donc ça me paraissait fondamental de rétablir ce qui me paraissait vraiment plus juste et d'étayer ça avec les recherches scientifiques. Donc il y a un gros travail dans ce livre de pouvoir retrouver les recherches scientifiques qui soutiennent ce que j'avance, qui soutiennent ce qu'est la parentalité positive.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est une forme de réponse aussi aux attaques que vous avez vécues ces dernières années à votre rencontre, mais aussi plus largement à toutes les personnes qui défendent la parentalité positive ?

  • Speaker #1

    C'est tout à fait une réponse, c'est vraiment comme ça que je le conçois, et c'est ce que je dis d'ailleurs dans l'introduction du livre. J'ai écrit ce livre en réponse pour clarifier les choses, et pour que vraiment on puisse enfin s'y retrouver dans cet espace de la parentalité dans lequel toutes sortes de choses sont dites.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui en France, malheureusement, il existe encore beaucoup de violences lorsqu'on parle d'éducation. Et j'aimerais comprendre ensemble ce contexte, assez paradoxal surtout quand on défend la parentalité positive. Donc selon le second baromètre sur les violences éducatives ordinaires porté par la Fondation pour l'enfance, 81% des parents reconnaissent avoir encore recours à différentes formes de violences éducatives ordinaires, VEO, contre 79% en 2022. C'est donc en augmentation. Pourtant, 45% des répondants sont conscients des effets néfastes et durables de ces violences sur la santé et le développement des enfants. Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vraiment une immense question Stéphanie. Et franchement, hélas, je n'en sais rien. Je ne sais pas. Ce qui fait que spécifiquement en France, nous avons conservé cette attitude-là. Il est vrai que nos gouvernements n'ont pas été très proactifs, ils n'ont pas assorti la loi qui a d'ailleurs eu beaucoup de mal à passer et qui est tellement légère qu'on dit juste il s'agit d'élever les enfants sans violence. Mais finalement à aucun moment on ne définit ce qu'est une violence et donc pour comprendre, pour savoir ce qu'est une violence, il faut aller fouiller jusque dans la Convention internationale des droits de l'enfant. Alors, il est vrai que normalement, cette Convention internationale des droits de l'enfant, elle est la loi en France. Mais voilà, tout le monde ne va pas la lire. Et donc, comme il n'y a pas eu de pédagogie autour de cette loi, comme la plupart des gens ne savent pas véritablement ce qu'est une violence et ce qui ne l'est pas. Et comme on a été éduqués comme ça, on continue comme ça. Et puis, il y a très peu d'accompagnement des parents. On a aussi un congé maternité et paternité qui sont extrêmement courts et donc on n'a pas vraiment le temps de tisser suffisamment d'attachements, d'apprendre à décoder les signaux de l'enfant, de construire un langage commun. Et du coup il y a très souvent des mauvaises compréhensions, des misconceptions, des interprétations et c'est comme si en France on se construisait le parent et l'enfant. l'un face à l'autre, quasiment en opposition. C'est d'ailleurs ce que disent les psychanalystes, puisque c'est même dans la doctrine psychanalytique, l'enfant va chercher systématiquement à prendre le pouvoir sur ses parents, à dominer ses parents, etc. Donc on est comme imbibé de cette culture dans laquelle l'enfant est un petit diable qu'il faut arriver à dompter. Et si... on n'arrive pas à le dompter, ça va devenir un enfant roi, etc. Et donc ce côté diable de lui risque de prendre toute la place. Et même si toute la science nous dit le contraire, la science nous dit que les enfants sont très empathiques depuis le début, qu'ils cherchent à se conformer, qu'ils cherchent à s'adapter, qu'ils cherchent à imiter les adultes, qu'ils cherchent à respecter les règles, sur le quotidien, quand on voit... constate que l'enfant ne fait pas exactement comme on s'attendait, comme on n'a pas pris l'habitude de réfléchir et qu'on ne sait pas finalement comment se développe un enfant. Jamais nulle part on apprend ce qui se passe dans le cerveau d'un enfant et comment le cerveau se développe. Donc on attend que ce soit un minuscule petit adulte et que dès l'âge de deux ans il sache mettre ses mains correctement sur la table, qu'il ne laisse pas tomber sa fourchette ou quoi que ce soit, qu'il mange correctement avec ça. Bref, on attend. tant des choses qui sont disproportionnées par rapport à l'âge des enfants. Et puis, comme on n'a pas pris l'habitude de construire ce langage commun et qu'on a cette culture d'opposition, on a tendance à interpréter le comportement de l'enfant. Ah, tu fais ça pour m'embêter. Tu fais ça contre moi. Et on se construit un peu dans une opposition de besoin. Et les 81% dont vous parlez, ce sont des parents qui disent avoir commis une violence éducative la semaine précédant l'enquête. Donc, ça montre à quel point c'est extrêmement répandu. Mais ces mêmes parents disent qu'ils aimeraient ne pas commettre de violence. Mais d'une part, ils ne savent pas, ils ne savent pas comment faire. Ils sont souvent démunis, mais ils ont souvent cette croyance qu'il est nécessaire que l'enfant obéisse. Et ça, c'est une dynamique qui n'existe peut-être, qui n'existe pas, par exemple en Allemagne ou dans les pays du Nord ou même en Espagne, etc. On n'est pas dans cette même nécessité que l'enfant obéisse et se conforme. Alors d'où est-ce que ça vient ? Je ne sais pas exactement. il est vrai que c'est une caractéristique française. Les Français sont connus pour crier plus que dans d'autres pays et pour être dans une approche des enfants où les enfants sont vécus comme pénibles à la base. On ne sait pas les gérer. Il faut qu'ils soient sages comme des images. On oublie qu'une image, ça ne parle pas. Une image, ce n'est pas vivant. Or, un enfant, c'est vivant. En Allemagne, les Allemands, c'est pas vivant. Ce ne sont pas des gens foufous, ce ne sont pas des gens qui font n'importe quoi dans leur vie. Au contraire, ce sont des gens qui sont hyper respectueux des règles. Leurs enfants sont très respectueux des règles, mais jamais on ne leur demande d'obéir au doigt et à l'œil comme on le demande en France. Ils bénéficient d'une bien plus grande liberté, de plus d'attachement parce qu'il y a un temps plus long avec les parents avant d'être mis dans des structures. Et ils ont... Ils sont plus encouragés à faire leurs expériences, à faire par eux-mêmes, dans les squares. On les voit prendre beaucoup plus de risques que les Français. Les Français, paradoxalement, à la fois sont sur le dos des enfants et non, ne fais pas ci, tu vas tomber, attention, ta-ta, ta-ta En fait, c'est du contrôle. Pour quelle raison ? Je ne sais pas exactement. À fouiller !

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez d'ailleurs nous rappeler ce que c'est une violence faite aux enfants ?

  • Speaker #1

    Une violence, de manière générale, j'aime bien la définition de Jean-Marie Muller, c'est l'usage de la force pour contraindre quelqu'un. Et en fait, la violence envers les enfants, c'est tout ce qui va faire mal à l'enfant et le contraindre. Alors, il y a des violences qui sont parfois utiles, ça n'empêche que c'est une violence, mais par exemple, on met la ceinture de sécurité, ça. on ne déroge pas là-dessus. Il est clair qu'on met la ceinture de sécurité. C'est intéressant de mesurer que quand on met la ceinture de sécurité à un enfant, un tout petit bébé par exemple, il va se rebeller. Parce qu'on a un besoin, tous les humains, on a un besoin de liberté et tout ce qui va entraver nos mouvements va engendrer du stress. Donc, est-ce qu'on l'appelle violence ou pas ? Oui et non. C'est-à-dire qu'on peut dire que ça fait violence et du coup, on va... écouter l'enfant et lui dire ah ben oui c'est carrément pas agréable et peut-être pour exercer moins cette violence on va lui donner de plus en plus de liberté c'est à dire dès qu'il va être capable de le faire on va lui demander de le faire lui même de mettre sa ceinture mais ça n'est pas parce que ça contraint l'enfant qu'on ne va pas le faire dans la parentalité positive il y a évidemment beaucoup de contraintes aussi on respecte les lois on respecte les règles on va juste accompagner l'enfant pour qu'il puisse le faire sans se sentir blessé, sans se sentir humilié, sans se sentir dévalorisé, sans avoir l'impression que c'est le parent qui décide et que lui n'a pas d'espace.

  • Speaker #0

    Ça me rappelle quelque chose qui s'est passé cet été. Sur Instagram, on m'a contactée puisque quelqu'un a vécu face à lui une violence extrême. Là, on parle vraiment de violence physique. Un enfant qui a été contraint dans une voiture après plusieurs coups. et qui m'a demandé comment est-ce qu'on réagit quand on voit un adulte violent envers un enfant.

  • Speaker #1

    C'est toujours extrêmement difficile et en même temps c'est vraiment important d'intervenir, d'agir et dans les pays du Nord, ils agissent, ils interviennent, ils s'entraident. C'est notre posture qui va faire toute la différence. Si on intervient en jugeant le parent, là il vaut mieux ne pas intervenir. C'est pour ça que dans les pays du Nord, c'est plus facile parce qu'il y a une ambiance générale de soutien mutuel et de conception de l'enfant qui n'est pas la même que chez nous. Chez nous, tout de suite, le parent qui se montre violent risque de se sentir, si on intervient, jugé. Et si nous, effectivement, on le juge et on lui dit mais monsieur, vous n'avez pas le droit de faire ça alors ça risque d'être blessant. et finalement ça va faire le contraire de ce qu'on espère. Donc allons-y. Alors il y a toutes sortes de façons de faire et donc c'est à chacun de trouver sa propre porte d'entrée. Ce qui me paraît marcher le mieux et ce que j'ai utilisé le plus et qui a le mieux fonctionné, c'est de partir avec une attitude d'empathie pour le parent. C'est-à-dire qu'au lieu de vouloir se précipiter vers l'enfant et protéger l'enfant, on va s'occuper du parent. Parce qu'en fait, le parent qui agresse son enfant, c'est un parent désespéré, c'est un parent qui se sent impuissant, c'est un parent qui n'en peut plus. Personne ne désire se montrer violent. On se montre violent. Quand on n'y arrive plus, quand on est dépassé, sauf évidemment quand on nous a raconté qu'il fallait faire ceci, faire cela, et donc on croit. Après, quelquefois, on justifie, on se dit oui, une gifle, ça ne fait pas de mal, enfermer un enfant dans sa chambre, c'est une punition, et c'est important de faire des punitions pour pouvoir permettre à l'enfant de comprendre, même si c'est faux, il y a des gens qui y croient. En dehors de ces moments-là, on va même... Quand les gens y croient, dur comme fer, on va prendre l'axe de l'empathie en pensant qu'ils ont besoin d'aide. Parce que quand vous arrivez avec cette offre, je peux vous aider, alors la plupart du temps, comme ce sont des Français, ils vont dire non. Voilà, on est dans une civilisation de chacun pour soi, individualisme forcené, je dois me débrouiller tout seul, etc. Donc la première réaction... de quelqu'un que vous cherchiez à lui porter sa valise ou son panier ou que vous preniez l'enfant pour aider, c'est mal vécu parce que notre société est tellement, tellement individualiste. Ça n'empêche qu'on le fait quand même et on y va. Et donc, on insiste et on peut insister, mais avec douceur et respect pour le parent et avec, à l'intérieur, je suis là pour vous fournir du soutien. Ça m'est arrivé dans le train de... dire, si vous voulez, moi je peux lui faire faire ses devoirs. Donc j'ai pris le gamin et on a fait les devoirs ensemble. Parce que voilà, ça disjonctait là, même on n'en pouvait plus. Et je comprends, parce que l'enfant avait des problèmes monstrueux pour apprendre. C'était extrêmement difficile pour lui. Des choses qui avaient l'air, mais qui étaient tellement simplissimes. Il ne les pigeait pas. Et donc voilà, j'ai observé ce qui se passait. J'ai vu qu'en fait, cet enfant avait la bouche ouverte en permanence. Il avait de gros, gros problèmes. de bouche, de respiration et donc d'oxygénation de son cerveau, etc. Donc j'ai pu en parler après à la maman. Mais surtout déjà, le simple fait de prendre soin de son enfant, elle pouvait respirer un petit peu et elle s'est sentie moins jugée. Alors je ne peux pas dire qu'elle ne s'est sentie pas jugée du tout, parce que forcément, elle se juge forcément aussi elle-même. Et d'ailleurs, elle s'est justifiée. Je lui ai dit, vous savez, j'ai tout essayé, j'ai tellement fait, etc. Il a vu tous les psy possibles, il a vu ah mais j'y arrive plus etc. Donc voilà, elle a pu se confier aussi. Donc la plupart des parents vont disjoncter se mettre à crier, frapper, punir, au moment où ils ne savent plus faire autrement. Si on est témoin de ça, on peut intervenir pour proposer du soutien, de l'aide et l'aider à faire autrement. On n'a pas toujours le temps, on n'a pas toujours l'espace, on peut au moins. donner un petit regard à l'enfant et aux parents, un regard tendre et non pas un regard jugeant. Rien qu'un regard, l'enfant s'en empare. Une fois, une adulte, quand elle était psychothérapeute, m'a raconté que quand elle était enfant, dans un train, sa mère lui hurlait dessus, et là, elle a rencontré le regard d'une femme. Elle a dit, dans son regard, j'ai lu que c'était pas ma faute. Et que c'était ma maman qui avait un problème. Et elle n'a rien dit. Mais ça m'a toujours portée. J'ai regardé ma maman différemment. Et j'ai arrêté d'être blessée à l'intérieur par ça. Ça a changé ma vie. Et donc je me suis dit, mais c'est incroyable. Un simple regard, ça peut soutenir.

  • Speaker #0

    Quand on se retrouve dans ces débats qu'on a souvent à table entre jeunes parents, lorsque l'on parle de violence, par exemple, on va parler... de la fessée, etc., de ces violences physiques, et que certains vont nous répondre Oh, moi j'ai pris quelques fessées, ça ne m'a pas tué. Regarde comment je suis devenue, etc. Qu'est-ce qu'on répond à ces gens-là ?

  • Speaker #1

    Ça dépend de la situation. Mais la plupart des gens sont devenus ce qu'ils sont devenus malgré les fessées. Et donc, ils vont bien sûr se justifier dans un premier temps. Donc, j'aime bien, de toute façon, ne jamais s'opposer. Si vous dites non, vous vous opposez, vous prenez un discours différent, il va y avoir juste de la bagarre. Et donc on commence par dire oui. Ah oui, tu as raison ! C'est ce qu'on disait avant. Avant que les neurosciences n'identifient ce que ça fait réellement, on croyait que ça ne faisait rien. Bien sûr, ça ne t'a pas tué. Heureusement, je suis contente que ça ne t'ait pas tué. Mais peut-être que ça a tué une petite partie en toi. Peut-être que de temps en temps, tu n'as pas l'aisance ou la confiance que tu pourrais avoir dans certaines situations. Peut-être que ça t'arrive de te soumettre face à un patron, face à quelqu'un de plus important. Et peut-être que, tiens, tu sais, j'avais repéré, tu m'avais parlé de ta difficulté avec l'autorité, peut-être que ça a un lien. Des choses comme ça.

  • Speaker #0

    Alors vous l'avez dit, les études scientifiques prouvent les résultats positifs de la parentalité que vous défendez, la parentalité positive. Pourquoi pour autant, cette parentalité-là ne fait-elle pas l'unanimité ?

  • Speaker #1

    Alors dans le reste du monde, elle fait l'unanimité, presque. Il y a bien sûr quelques personnes. qui vont, même dans le reste du monde, il y a quelques personnes qui vont continuer de militer pour la fessée, pour la punition, etc. Dans aucun pays, nulle part dans le monde, il y a une unité totale sur quelque chose. Il y en a qui sont pour la démocratie, il y en a qui sont pour l'autocratie. Et donc, dans la famille, c'est pareil. Et plus on a subi de blessures, plus on peut avoir tendance... à justifier la façon dont nos parents nous ont éduqués et donc à être dans cette parentalité davantage autoritaire.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, lorsqu'on parle de parentalité positive, en France, il y a souvent ce mythe de l'enfant roi, de l'enfant tyran. Qu'est-ce que vous avez à dire à ce sujet ?

  • Speaker #1

    Tellement de choses. Donc, j'explique bien dans le livre d'où ça vient. Et cette idée d'enfant roi et d'enfant tyran, alors là, est vraiment typiquement française parce qu'elle est liée à la psychanalyse. Et la psychanalyse reste vivante dans notre pays. Elle ne l'est plus, elle n'est plus enseignée dans les autres pays du monde, sauf peut-être en Argentine paraît-il. Mais aux États-Unis, au Canada, dans les grands pays du monde, on n'enseigne plus la psychanalyse. Aussi, on l'enseigne, mais en philosophie, mais pas en psychologie. En psychologie, maintenant, on sait que cette théorie... qui a été élaboré par Freud pour camoufler le fait que lui a subi des violences sexuelles dans son enfance, que son père a commis l'inceste sur, on ne sait pas sur lui, mais en tout cas sur sa soeur, son frère. Donc on sait ça aujourd'hui, mais en France on ne le sait pas. En France on ne dit rien et en France on suit cette doctrine psychanalytique qui dit que l'enfant vient au monde avec des pulsions. Et qu'il s'agit de mettre un terme à ces pulsions, de dire stop, de frustrer l'enfant pour qu'il apprenne à devenir un adulte raisonnable. Donc il s'agit de se castrer, castrer les pulsions, différentes castrations à différents âges, castrations anales, orales, etc. Les différentes castrations pour pouvoir enfin avoir intégré. ce qu'on appelle le principe de réalité. Donc, selon eux, un enfant vient au monde avec ses pulsions et il rencontre le principe de réalité et qu'il a besoin de rencontrer ce principe de réalité. Alors, voilà, dans la science, aujourd'hui, on part dans la théorie de l'attachement qui a accumulé les preuves scientifiques et qui dit qu'un enfant vient au monde avec des besoins. C'est un rapport. complètement différent. L'enfant ne vient pas au monde avec des pulsions qu'il va satisfaire au dépens de sa mère qui n'est qu'un objet de satisfaction. Là c'est complètement différent, l'enfant vient au monde avec des besoins et notamment des besoins affectifs et il a ce besoin de sécurité affective et la mère, le père, les parents sont des figures d'attachement qui vont assurer sa sécurité. Il a besoin de cette sécurité pour pouvoir prendre son envol et pour pouvoir s'épanouir. Donc c'est une perspective complètement différente, mais qui en France n'a pas encore pénétré complètement, ni dans les études de psychologie, ni dans le grand public suffisamment. Donc même si ça progresse quand même notablement, et notamment en psychiatrie maintenant, c'est clair que... La psychanalyse n'est plus enseignée en psychiatrie, mais c'est la théorie d'attachement qui est enseignée.

  • Speaker #0

    En quoi alors la parentalité positive n'est pas une forme de parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    La parentalité laxiste est une parentalité négative. La parentalité positive, elle est dite positive parce qu'elle obtient des résultats positifs pour l'enfant comme pour les parents. Et les études scientifiques montrent que quand on écoute les besoins de l'enfant, quand on co-régule les émotions de l'enfant, lorsque l'on pratique un certain nombre de fonctionnements... de compétences parentales, du coup, il y a des issues positives et donc du coup c'est défini comme une positive. Il y a plusieurs formes, il y a l'autoritarisme qui est une parentalité négative parce que l'autoritarisme a tendance à générer des enfants soit trop soumis et donc qui perdent confiance en eux, soit agressifs, qui développent des comportements débordants. C'est là que c'est paradoxal parce que ce sont souvent les autoritaires qui accusent les autres parents, soit disant positifs, de laisser tout faire aux enfants et que du coup ils vont avoir des comportements débordants, comme vous dites, rois et tyrans. Mais en réalité, ceux qui deviennent tyrans, ce ne sont pas ceux à qui on n'a pas posé de limite, c'est plutôt ceux à qui on a posé trop de limites de manière autoritaire. Donc il y a l'autoritarisme, il y a la démission totale. où là, le parent ne s'occupe absolument pas de l'enfant. Et donc, ça, évidemment que c'est aussi une parentalité dite négative parce que ça ne permet pas à un enfant de grandir. Et la parentalité laxiste, parentalité laxiste, c'est ne pas avoir d'attente envers son enfant. Je lui laisse tout faire. Oh, il apprendra bien tout seul. Et donc, je suis affectueux, mais parce que dans le je m'en fiche, il n'y a rien du tout. Là, dans le laxiste, on est quand même affectueux. mais c'est tout et il n'y a pas de règles, on laisse un peu l'anarchie faire et on pense que l'enfant va se développer tout seul. Et donc ça, c'est prouvé aussi scientifiquement que ça ne fonctionne pas et que les enfants sont un peu perdus et n'ont pas suffisamment de structures pour pouvoir se développer. Donc la parentalité positive, c'est ni le laxisme ni l'autoritarisme. C'est une saine autorité. Les enfants... ont envie de faire ce qui est bien. Ils ont envie de bien se comporter. À condition qu'on les respecte, ils vont respecter. En fait, les enfants nous imitent énormément.

  • Speaker #0

    Je le vois à la maison sur cette question des règles. Moi, j'ai un garçon qui a 18 mois. Et donc, il marche et on l'emmène dans la rue. Et on essaye de lui expliquer qu'il y a des endroits où il ne peut pas marcher, notamment sur la route. Et donc, on lui dit pas là. Et c'est vrai que maintenant, il est dans cette imitation où il nous montre les endroits. Il nous dit pas là, pas là. Et il a l'air hyper heureux de nous montrer que... Il a compris qu'il ne devait pas aller là.

  • Speaker #1

    Exactement. Les enfants sont friands de règles. Donc ça fait toujours drôle aux parents quand je dis ça, mais en réalité, les enfants adorent les règles. Ils aiment les respecter. Et ce qu'ils n'aiment pas, ce sont les ordres, les limites, les punitions, les impositions. Chaque fois qu'on est dans une dynamique tu fais comme ci ce n'est pas une règle. Ça, c'est un ordre. Et donc un ordre, tous les humains, sont construits pour résister aux ordres. Donc bien sûr, si vous formulez votre règle en termes de règles, non pas en termes de règles, je veux dire, mais en termes d'ordres, l'enfant va se rebeller. Mais si vous formulez la règle en termes de règles, c'est-à-dire une procédure, et c'est bien ce que vous faites en expliquant ici tu marches, ici tu ne marches pas, là tu es dans les bras, on donne le fonctionnement. Donc voici la procédure pour vivre. ensemble. La procédure pour vivre en communauté, c'est que dans telle situation, on dit merci, dans telle situation, on dit bonjour, etc. Et donc, on donne les informations. Du coup, l'enfant, il dit, c'est comme ça que fonctionne le monde. Moi, je veux y arriver, je veux le faire, je veux le faire correctement.

  • Speaker #0

    Pourquoi pensez-vous qu'il y a eu une telle association entre parentalité positive et parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est juste de la désinformation qui est menée par les autoritaires. Un parent autoritaire ou des professionnels qui sont dans cette dynamique de vouloir être dans cet autoritarisme sont dans une espèce de...

  • Speaker #0

    Il y en a même qui utilisent le mot de croisade pour tenter de maintenir ce cap. Et donc, c'est la critique facile. Après, il peut y avoir aussi des interprétations superficielles de la part des gens. Parce que, comme je disais qu'il n'y a pas eu beaucoup de pédagogie autour de la loi qui dit que c'est important d'élever les enfants sans violence, il peut aussi y avoir des conceptions un peu superficielles. En disant, ne mettons pas, il ne faut pas donner d'ordre aux enfants, alors du coup, on laisse tout faire. Ou alors, quand on dit non à un enfant, ça le stresse, alors du coup, je ne veux pas stresser mon enfant et du coup, je lui laisse tout faire. Non, tout à l'heure, je vous ai dit, non, on lui met la ceinture de sécurité. De temps en temps, il veut un deuxième bonbon, non, stop. Alors, c'est vrai que si on utilise un stop plutôt que non, mais on va quand même freiner, on va quand même organiser. Et c'est vraiment extrêmement important. Il y a des règles, mais des parents qui ont entendu un truc, lu un petit article, peuvent avoir une impression comme ça superficielle en disant je vais être gentil. Mais en fait, le vrai problème, c'est quoi ? Le vrai problème, c'est qu'eux-mêmes, quand ils étaient enfants, ils avaient des parents autoritaires. Ils ne veulent pas faire ça. Ils n'ont pas appris à faire différemment. Et du coup, ils sont juste, je ne veux pas être autoritaire. Et comme ils ne se sont pas sentis toujours aimés inconditionnellement par leurs parents, ils peuvent craindre que leur enfant ne les aime pas. Et quand on craint que son enfant ne vous aime pas, on va essayer de lui faire plaisir. Et donc vous avez toutes sortes de parents qui croient, qui peut-être se racontent qu'ils sont dans la parentalité positive, mais en fait ça n'est pas de la parentalité positive, c'est juste qu'ils ne disent pas non parce qu'ils ont peur que leur enfant... ne les aiment plus s'ils leur refusent un bonbon, une heure de télé ou ceci ou cela.

  • Speaker #1

    Et ça, vous le rappelez très bien dans votre livre, c'est très bien démontré. Il semblerait que notre culture peine aussi à évoluer sur les questions d'éducation à cause du manque de temps, vous l'avez dit, et de valorisation que l'on réserve au fait de s'occuper de ses enfants en France. Il faut du temps pour s'informer, pour déconstruire les schémas de pensée hérités de son enfance et de sa propre éducation, et pour résister aux automatismes. et aussi aux critiques extérieures. Et ça, je trouve qu'on le retrouve beaucoup en France. Alors, pouvoir passer du temps de qualité avec ses enfants, en France, ça semble être presque un luxe. Aujourd'hui, vous l'avez rappelé, les congés de parentalité sont extrêmement courts. Comment est-ce qu'on pourrait changer cela ? Comment est-ce qu'on pourrait donner davantage envie aux adultes de passer du temps de qualité avec leurs enfants, quand bien même ils sont contraints par la société ?

  • Speaker #0

    Merci Stéphanie pour ce focus sur le désir parce que c'est vrai le souci c'est que toute la société va sans arrêt nous raconter que les enfants c'est pénible pendant les vacances oh là là on se prend la tête on a les enfants toute la journée c'est horrible vivement la rentrée parce que là au moins quelqu'un s'occupe d'eux toute la journée oh il y a la télé je peux les mettre devant la télé ils vont pas me saouler donc il y a tout ce discours ambiant euh qui est vraiment problématique. Et donc, on a à aimer nos enfants différemment. Mais c'est vrai que c'est plus facile d'aimer ses enfants quand ça se passe bien. Et donc, quand on sait maîtriser quelques compétences de parentalité qui permettent que ça se passe plus facilement. Parce que si on se dispute en permanence, si on ne sait pas comment faire pour qu'il mette ses chaussures, pour dormir, on est débordé. La plupart des parents d'aujourd'hui, quand ils sont parents pour la première fois, n'ont jamais eu un bébé dans les bras. Dans le temps, on s'occupait toujours des soeurs, des frères, des cousins, des cousines, etc. On vivait avec des bébés. De nos jours, ben non. Ce qui fait que, déjà, dès la base, on saisit le petit bébé comme une poupée. On le positionne comme un poupon au sein. Et du coup, évidemment, on a des crevasses parce que c'est pas comme ça qu'on devrait positionner le bébé. Donc ça commence très mal. Et on n'a pas de transmission. plus de transmission et du coup, il y a plein de choses qu'on ne sait pas faire. Et du coup, c'est compliqué. Donc, ce serait vraiment utile d'avoir des films, d'avoir des livres, plus d'informations, faciles d'accès, qui permettent de voir comment ça se passe. C'est dans ce sens-là qu'on a fait ce film sur les mille premiers jours avec Boris Cyrulnik, Nathalie Vicariini et Antoine Guédonnet. où on va les quatre experts dans les familles pour accompagner les parents et leur permettre de regarder différemment leur enfant. C'est ça en fait, c'est ce qu'ils ont fait dans les pays du Nord, c'est ce qu'ils ont fait en Allemagne. C'est plus de temps, non seulement des congés plus importants, mais beaucoup d'activités. parents-enfants, pour petit à petit aussi fournir aux parents des compétences. C'est l'idée des Maisons des 1000 premiers jours. Quant à la commission des 1000 jours, on a eu cette idée de faire des Maisons des 1000 jours. C'est vraiment un lieu, un centre où on peut aller dès la grossesse et on va être accompagné pendant un an. On peut pendant une fois par semaine être en groupe avec d'autres parents, d'autres parents qui ont des enfants du même âge, pouvoir... partager, dire ce qui se passe, vider nos émotions parce que c'est parfois dur, et aussi apprendre des choses sur le développement de l'enfant, apprendre des compétences, comment on fait ceci, comment on fait cela. Tout ça peut nous étayer et faire qu'on a du coup envie. Plus on est avec un enfant, plus on a envie d'être avec un enfant parce que plus on est avec un enfant, mieux on le connaît. Et plus on le connaît, plus nos langages, on sait identifier le besoin qu'il a, on sait y répondre, et donc tout coule beaucoup mieux. À partir du moment où on ne se voit pas, on ne se voit pas assez, on n'a pas le temps de connecter suffisamment. Et un enfant qui est déconnecté, il va forcément, du fait de la théorie d'attachement, il va forcément être plus demandeur, plus exigeant, plus agressif, plus... Et du coup, nous, on est en déstabilisation et hop, finalement, si on regarde le temps qu'on passe avec nos enfants, quelquefois, on se rend compte, mais zut, j'ai passé toute ma journée à le contrôler, mais finalement, on n'a pas eu de relation véritable. Donc, c'est un peu l'idée, ce serait de changer tout ça. Ce qui m'a intriguée, parce que dans les autres pays, on travaille aussi, c'est que depuis les années 50, dans tous les autres pays, en Europe, le temps passé avec les enfants a augmenté. En France, il a diminué depuis les années 50. Or, vous parliez de l'imposition de la société, mais on n'a plus que 35 heures de travail. Dans les années 50, c'était plutôt 45-50. Donc, qu'est-ce qui s'est passé ? On travaille moins, mais on est moins aussi avec les enfants. Donc, c'est une question de choix individuel.

  • Speaker #1

    Et sur les informations, c'est vrai que moi, je suis totalement pour... développer davantage de ressources qui soient à disposition gratuitement et de manière nombreuse aux parents. Je le vois par exemple quand on se prépare à l'accouchement, on a le droit à six cours de préparation à l'accouchement pour un moment dans la vie du bébé et de la maman et du partenaire.

  • Speaker #0

    C'est important,

  • Speaker #1

    il ne faut pas faire moins. Mais c'est vrai que c'est dingue, une fois qu'on se retrouve avec un enfant entre les bras,

  • Speaker #0

    il n'y a plus rien. Mais c'est pour ça que les maisons des 1000 jours se développent, elles répondent vraiment à un besoin. Et j'invite chaque maman à se rapprocher de la maison des 1000 jours la plus proche. J'espère que dans un avenir proche, de plus en plus proche, ce sera comme en Australie où il y en aura dans tous les quartiers. Aujourd'hui, on a petit à petit, ils s'en construisent un par ville à peu près, mais ça répond à un vrai besoin. Et ça marche tellement bien que je pense que ça va aller vite.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'on aurait pu se dire que l'État, le gouvernement ne semblent pas encore prendre suffisamment au sérieux cette situation en termes d'éducation, en termes d'enfance, si on se compare par exemple au fameux pays nordique. Comment est-ce que nous, alors là je prends ma casquette un peu militante, dans la société civile, on pourrait changer les choses pour changer ces mentalités vis-à-vis de la relation entre parents et enfants ?

  • Speaker #0

    C'est vraiment quelque chose d'individuel du coup, c'est-à-dire qu'on a besoin de continuer de militer. On continue d'exiger d'entraîner, d'en parler davantage et faire respecter nos droits déjà parce qu'il y a de nombreux droits déjà pour les parents, notamment pour les mamans allaitantes dans les entreprises et ces droits ne sont pas toujours respectés. Donc déjà, au moins faire respecter les droits déjà acquis et continuer de militer pour en avoir davantage. Et puis c'est surtout commencer à réaliser que nous sommes parents. Et que notre vie de parent, elle est importante. Et que nous ne devrions pas être obligés de quitter notre vie de parent pour faire une vie de bon professionnel, que finalement, dans la plupart et de plus en plus d'entreprises le réalisent. Ce sont beaucoup des parents qui sont les salariés. Et parmi les salariés, il y en a forcément un bon nombre, des parents ou des aidants de manière générale. Et donc les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à intégrer cette dimension. Parce qu'en réalité, quand un parent est sécurisé dans son rôle de parent, lorsque les choses lui sont facilitées, notamment au niveau des horaires, mais aussi... Lorsque c'est reconnu qu'il a le droit d'être parent et que le fait d'être parent ne lui enlève pas quelque chose dans sa carrière, alors il va travailler davantage, travailler mieux, travailler plus efficacement. Donc les labels pour les entreprises qui respectent les parents se développent. Donc on peut tout à fait inciter son entreprise à aller vers ces labels-là et à se rappeler que plus un salarié est heureux, mieux il travaille.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait totalement sens. On va faire un petit pas de côté sur ces sujets culturels d'éducation en France pour parler d'une partie de votre livre, moi, qui m'a beaucoup intéressée, interpellée. Vous parlez du poids des psychotraumas de notre enfance sur notre santé physique, psychique et sociale. Est-ce que vous pourriez revenir là-dessus ?

  • Speaker #0

    Oui, le psychotrauma, c'est lorsque... Il y a trauma lorsqu'un événement va dépasser nos capacités d'adaptation. Le stress, c'est l'effort d'adaptation de l'organisme à toute situation. Donc, on se stresse sans arrêt. Le stress, c'est positif. Dans notre société, on le vit souvent comme négatif. Et d'ailleurs, je ne veux pas stresser mon enfant. Mais si, le stress, c'est juste un effort d'adaptation. Donc, le stress, c'est OK. Il y a le stress positif. Plus on est stressé, d'ailleurs. Plus on réussit, aux Jeux Olympiques, ils ont réussi à dépasser leur capacité parce que c'était super stressant d'être dans la compétition et avec tout ce monde tout autour, etc. Donc, le stress est excitant et fournit de l'énergie. Donc, le stress n'est pas négatif en soi. Il y a le stress positif, il y a le stress tolérable, c'est-à-dire je vis quelque chose d'un petit peu difficile, ça demande plus d'énergie pour monter la colline. Mais hop, j'y arrive et... J'arrive à ce que mon métabolisme à l'intérieur de mon corps s'équilibre. Et il y a le stress dit toxique qui va devenir le trauma. Là, c'est quand l'événement ou la pente a monté, la pente a grimpé. C'est trop dur et du coup, ça dépasse mes capacités d'adaptation. Donc, il y a trauma chaque fois qu'on ne peut pas réussir. à s'adapter à une situation. Donc, il y a trauma lorsqu'il y a un earthquake, ça me vient en anglais, un tremblement de terre, lorsqu'il y a un événement cataclysmique extérieur, une guerre, tout ça, ça fait effectivement, ce sont des événements traumatiques. Il y a les gros événements traumatiques, un viol est aussi un événement traumatique, l'inceste. Encore plus parce qu'il y a cette dimension de soumission où on faisait confiance à la personne et on est trahi dans sa confiance. Donc là, c'est un stress vraiment lié à la trahison en plus. Et puis, c'est le trauma lié à un événement identifié qui dépasse mes capacités. Ou qu'est-ce qui se passe dans le cerveau à ce moment-là ? Le cerveau réagit et... Et quand c'est vraiment trop dur, qu'on ne peut pas réussir à s'adapter, il y a quelque chose qui disjoncte, qui fait qu'on ne mémorise pas. Donc on va effacer l'événement et ça s'appelle l'amnésie traumatique, on l'efface. Et en même temps, il risque d'y avoir des flashbacks de ce moment-là, des irruptions de nos émotions qui reviennent. Et quand on a vécu par exemple les bombardements, le moindre... tonnerre qui arrive va réveiller et donc on est absolument paniqué, etc. Ça réveille, c'est pas le tonnerre qui nous fait peur, c'est que le tonnerre réveille les mémoires traumatiques de la guerre. Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que ça, c'est une forme de trauma mais qu'il y a aussi autre chose qui va dépasser les capacités d'adaptation d'un enfant notamment, c'est lorsqu'il y a plein de Petits événements qui vont se succéder et qui ne permettent pas à l'enfant de revenir. Punir une fois un enfant, aucun problème. Le punir tous les jours, très régulièrement. Le dévaloriser, le taper, l'humilier, lui dire tu es nul, tu es lamentable, lui dire des choses méchantes régulièrement. Petit à petit, ça sape sa confiance en lui et petit à petit, il n'arrive plus à revenir et être vraiment lui-même. Et de la même manière, il va occulter. Tout ça, il va juste garder le sentiment d'humiliation, la soumission, et il va souvent se suradapter, devenir sage comme une image. C'est pour ça que c'est toujours louche, quelqu'un de sage comme une image. Et puis de temps en temps, on va devenir violente contre son frère, contre quelqu'un de plus faible que lui. Il peut y avoir aussi des réactions qui vont sortir. Le trauma, c'est lorsque quelque chose se passe qui nous fait mal. Mais c'est aussi quand ce qui devrait nous faire du bien n'est pas là. Et Gabor Maté l'a très bien montré, ce médecin spécialiste des addictions et spécialiste du trauma, qui nous dit que tout humain a besoin d'affection, d'amour inconditionnel. Et lorsqu'on est pris par une émotion, on a absolument besoin d'être entendu. reconnu et d'être accompagné dans notre émotion. Et donc, si un enfant de, par exemple, 3 ans se met à pleurer, hurler, et qu'il n'y a pas un adulte à ce moment-là qui vient pour le prendre dans les bras, pour le câliner, pour l'aider à canaliser ce trop plein d'émotions, ça va faire trauma. Parce que ça n'est pas quelque chose de négatif qui arrive, qui ne permet pas de s'adapter. Mais c'est quelque chose qu'il aurait dû recevoir pour pouvoir grandir normalement et qui a manqué. Donc nos manques font aussi trauma. Chaque fois qu'on envoie un enfant dans sa chambre, à la place d'écouter ce qui se passe pour lui, quand il pleure, quand il crie, quand il a un comportement débordant, chaque fois qu'on n'écoute pas, qu'on ne fournit pas un accueil inconditionnel à l'enfant, eh bien... On met une pierre, là encore, une fois, ne suffit pas pour traumatiser un enfant. Mais lorsque ça se répète régulièrement, alors oui, ça devient traumatisme. Dire que c'est, on épuise les capacités de résistance de l'enfant.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il est possible de guérir l'enfant blessé qu'on a été lorsqu'on a vécu ces psychotraumas et qu'on est adulte, une fois qu'on décide en plus de devenir parent ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, oui, oui, oui, oui, oui, cent fois oui, oui, on peut guérir. Et il y a de plus en plus de thérapies efficaces pour soigner le trauma. Il y a eu toutes sortes de thérapies dans le passé. On vient de très, très loin. En 1981, il était écrit dans le manuel de psychiatrie officiel que le trauma était très rare et que, par exemple, l'inceste n'existait pour les femmes qu'une sur une. un million vivaient l'inceste. Et que de toute façon, avoir des relations sexuelles avec son père était plutôt quelque chose qui allait vous permettre d'être mieux intégré dans votre vie d'adulte. Donc voilà la conception du trauma en 1981. C'est pas si vieux que ça. Elle était là, quoi. Donc il y avait très peu de thérapies qui se préoccupaient de soigner le trauma. Alors moi, je faisais partie déjà à l'époque de la branche des thérapies humanistes qui... prenait en compte le trauma et donc j'ai travaillé sur le trauma à la suite aussi d'Alice Miller etc. où on mesurait l'impact du trauma sur la vie de tout un chacun et donc j'ai déjà travaillé sur le plan émotionnel à libérer le corps parce qu'en fait le trauma il s'inscrit dans le corps et donc il y a aujourd'hui multitude de thérapies il y a des thérapies corporelles un peu comme celles que je pratiquais et des thérapies qui s'occupent de d'exprimer les émotions, d'autres thérapies qui vont être dans la libération des sensations, qui vont permettre de remettre en route le nerf vague, de vraiment rééquilibrer tout ce système sensoriel. Il y a le MDR, il y a la thérapie mosaïque, il y a l'EFT, il y a de plus en plus de thérapies non-invasives, parce que ce qu'on sait aujourd'hui, c'est qu'il n'est pas nécessaire de revivre le trauma pour le guérir. Il n'est même pas nécessaire de le... dire, de le parler et souvent même faire raconter à quelqu'un son événement traumatique risque de le retraumatiser. Donc on avance maintenant. Depuis quelques années, on est de plus en plus conscients, on étudie le traumatisme un peu sous tous ses angles et on sait de mieux en mieux travailler sur cette question du trauma. On travaille sur le soin du trauma, comment guérir du trauma. Et il y a un mouvement mondial, et je mène ce mouvement à Marseille avec quelques amis, où on veut transformer la ville de Marseille en faire une ville non violente, une ville informée sur le trauma. Et donc ce mouvement des villes informées sur le trauma, c'est une façon de... d'embarquer toute une population. Parce que, quelquefois, c'est dur. Même aujourd'hui, un parent qui est dans la parentalité positive, il a non seulement à gérer son enfant, mais à gérer tous les jugements des gens, puisque aujourd'hui, malheureusement, la majeure partie des gens sont encore dans une parentalité violente et autoritariste. Donc, c'est oui, tu devrais quand même le faire se tenir mieux, il gêne tout le monde, là, tu sais, ton enfant gêne Bref, il y a tout ce poids-là. Et tant qu'on n'a pas compris et la théorie de l'attachement et le développement du cerveau d'un enfant et comment ça fonctionne, le stress, le trauma, quels sont les besoins d'un enfant, comment on va répondre, comment on co-régule les émotions d'un enfant, on sera toujours démuni, il y aura toujours des gens qui vont nous juger comme ça. Donc il s'agit vraiment de transformer toute la population et transformer le regard d'une population. Si au lieu de dire mais c'est pas bien d'avoir fait ça. On dit mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? C'est-à-dire au lieu de jugement systématique sur quelqu'un, mais assieds-toi, fais ceci, fais cela, du contrôle systématique et de la punition, retourner son regard et dire mais si tu fais ça comme ça, c'est qu'il s'est passé quelque chose pour toi. Quel est le nœud dans ton cœur ? Et du coup, ça change complètement le regard. Et donc, on voudrait apprendre comme ça tous ensemble à repérer ce qu'est un trauma. Comment ça nous impacte ? Parce que la prévalence du trauma est phénoménale. On sait aujourd'hui que deux personnes sur trois ont vécu au moins un trauma dans leur vie. Et une personne sur huit, on a vécu plus de quatre. Quand on a vécu plus de quatre traumatismes dans sa vie, on risque fort d'avoir des problèmes d'addiction, des problèmes cardiaques, des problèmes de métabolisme, d'être obèse, d'avoir des problèmes de santé de manière générale. Des problèmes relationnels, des problèmes émotionnels, la vie est vraiment plus compliquée. Donc on a besoin de pouvoir mesurer cette prévalence et de réaliser que quelqu'un qui n'est pas sympa, qui dysfonctionne, qui exagère, qui ne se comporte pas correctement, c'est probablement quelqu'un qui a été traumatisé. Et si on l'aide, si on lui fournit le soutien dont il a besoin, ça va tout changer. Ça peut changer son image de lui-même, ça peut lui donner envie de s'améliorer, ça peut lui donner envie de changer. Et puis, si on peut éviter de le retraumatiser. Parce qu'aujourd'hui, globalement, il y a un moment où même je m'en porte un peu dans le livre, et je dis que c'est quand même assez terrible qu'à l'école par exemple, quand on sait qu'il y a probablement trois enfants par classe qui ont subi l'inceste. et qu'on voit qu'un enfant a des comportements débordants, on va le punir, on va l'exclure même. Mais à quel moment on se demande si peut-être celui qui a des comportements débordants, il lui est arrivé quelque chose ? Parce que si vos parents vous frappent à la maison, si vous êtes violés, si vous subissez du traumatisme, si vos parents ne vous enseignent pas à réguler vos émotions, si vous vous enfermez dans votre chambre, dès qu'il se passe quelque chose d'émotionnel à l'intérieur de vous, vous ne savez pas comment faire. Et toute cette boule d'émotion, toute cette boule de tension à l'intérieur de vous, elle éclate en classe. Mais du coup, c'est double punition. Quand on punit l'enfant et puis on le renvoie chez lui, en quoi est-ce que c'est aidant ? En quoi est-ce que ça lui permet de soigner ce qui se passe à l'intérieur ? Donc c'est vraiment changer le regard de la société. Et je suis... Moi, je prône zéro tolérance. C'est pour ça, vraiment, quand on me dit que je suis laxiste, que je laisse tout faire, trop permissive. Non, c'est zéro tolérance. Un pas de côté, une insulte, stop. Qu'est-ce qui se passe ? D'où vient cette insulte ? Et on cherche à comprendre, donner du sens et à réparer. Parce qu'on veut vivre ensemble. On veut vivre en communauté. On veut que ça se passe bien. Et on veut construire suffisamment... d'authenticité dans les relations, suffisamment de confiance dans les relations, suffisamment de sécurité relationnelle, émotionnelle, de sécurité affective pour tout un chacun. Quand un humain a cette sécurité affective, il se développe. Un enfant qui bénéficie de sécurité affective, une bonne sécurité affective solide à l'intérieur, il va bosser, il va s'intéresser, il va se développer. il va réussir. Alors quand je dis ça, attention, ce n'est pas magique. Et dans notre société, Il y a aussi toutes sortes de problèmes que j'aborde un tout petit peu dans ce livre. J'aborderai plus dans d'autres livres. Mais il y a des gros problèmes sociaux. Il y a des gros problèmes de nourriture. Les enfants d'aujourd'hui mangent beaucoup trop de plats transformés et donc qui posent des problèmes sur leurs microbiotes et qui leur fait être dans ces réactions extrêmes d'intolérance à la frustration, etc. C'est-à-dire que l'intolérance à la frustration, ce n'est pas forcément seulement... Le manque de limites de la part des parents, c'est très souvent parce que le microbiote de l'enfant est complètement sans dessus-dessous et que l'enfant ne sait pas gérer, ne peut pas réussir à réguler ses émotions. Le nombre d'enfants qui respirent par la bouche aujourd'hui est phénoménal et ça c'est pas normal non plus. Le nombre d'enfants qui sont trop assis, qui ne bougent plus, qui ne courent plus. Aujourd'hui les enfants ne courent plus, ils sont là assis avec leurs tablettes et ils ont... perdu 25% de capacité cardiaque. C'est énorme. Ils courent moins vite qu'avant, ils vont moins dehors, ils sont de plus en plus myopes parce qu'on a besoin d'être à l'extérieur pour pouvoir... C'est la lumière de l'extérieur qui aide l'œil à grandir. Si on n'est pas suffisamment exposé à la lumière externe, la lumière du jour, on devient myope. Quand on devient myope, ça génère des peurs parce qu'on ne voit pas bien les profondeurs, on ne voit plus bien les choses. Et donc du coup, On peut aussi avoir des difficultés à l'école. Bref, c'est tout un ensemble. Donc, il ne faut pas faire reposer tout sur les parents ne sont pas assez autoritaires, les profs ne sont pas assez autoritaires, etc. Il y a une réalité aujourd'hui. Les enfants d'aujourd'hui ne sont plus de d'hier. Ça, c'est clair. Les enfants d'aujourd'hui font beaucoup plus de crises. Ils sont intolérants à la frustration. Ils sont à la fois plus mous et plus toniques. Pas plus toniques, mais plus débordants. Donc oui, c'est un problème. Mais le problème, il n'est pas. ce n'est pas une question d'autorité, c'est vraiment une question d'environnement. Et nous avons besoin de prendre en compte cette dimension d'environnement.

  • Speaker #1

    C'est ça, et c'est ce que je trouve qui est essentiel dans votre ouvrage, c'est que vous rappelez tous ces éléments-là, et aussi ça nous rappelle à tous à quel point l'enfance est aussi une période extrêmement sensible, fragile et complexe, et à quel point il est nécessaire d'être informé à ce sujet. On va malheureusement devoir se quitter. Isabelle, j'ai une dernière question, c'est ma question rituelle dans le podcast, vous le savez, il s'appelle Les adultes de demain Qu'est-ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Eh bien, paradoxalement, je souhaite juste qu'ils soient le plus enfants possible et d'avoir la permission d'être enfants. Parce que je me suis rendu compte, je disais beaucoup, vous êtes les adultes de demain, et puis je me suis dit mais stop, en fait il y en a marre de faire tout aujourd'hui en fonction de quels adultes ils vont devenir demain. Plus chaque étape de vie est pleine et répond à leurs besoins, plus chaque future étape de la vie sera aussi harmonieuse. Et donc, ce que je leur souhaite à chacun, c'est que leurs besoins d'enfants soient respectés et qu'ils puissent avoir le droit de vivre leur vie d'enfant un maximum.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Isabelle. Je rappelle que votre livre s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont. Un livre qui devrait être mis entre les mains de tous les parents et futurs parents. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci Stéphane.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des Adules de Demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

Description

Les faits d’actualité récents, où une enseignante fait preuve d’une violence inouïe auprès de l’une de ses élèves à la rentrée scolaire, fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant, depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu’une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l’enfant.


Isabelle Filliozat fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d’autoritarisme et d’obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteure, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J’ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faites aux enfants, des raisons expliquant l’urgence de changer notre regard sur les enfants et des manières dont nous pouvons réparer l’enfance blessée de nombreux adultes. C’est suite à la lecture de son dernier livre bilan “Éduquer : tout ce qu’il faut savoir”, que j’ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les points clés de l’éducation.


Quelques questions posées pendant l'interview :

  • Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Il semblerait qu’au regard des autres, être un parent autoritaire, capable de faire obéir son enfant, soit plus valorisé dans la société que d’être à son écoute et de respecter ses besoins. Pourquoi la parentalité positive ne fait-elle pas l'unanimité ? Avez-vous eu l’impression d’être jugée quand vous avez éduqué vos enfants de cette manière-là ?

  • Comment réagir selon vous lorsque l’on assiste à des scènes de violence contre des enfants dans la rue, chez des amis ?

  • Comment avez-vous vécu les attaques de ces dernières années à votre encontre mais aussi contre d’autres personnes défendant la parentalité positive ?

  • Comment de telles incompréhensions vis-à-vis de la parentalité positive ont-elles pu naître ? Les résultats des différentes études sur la parentalité positive prouvent systématiquement ses bienfaits sur le comportement des enfants, sur le stress des parents, sur les résultats académiques, etc. Pourquoi ces résultats sont-ils si peu reconnus ?

  • Que faire pour que notre société évolue plus vite à ce sujet ? Que doit-on changer dans notre manière de lutter contre les VEO, de défendre la parentalité positive, mais surtout dans la place que l’on réserve aux enfants dans la société ?


Ressources :




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    On a une culture, nous, françaises,

  • Speaker #1

    de la punition. Et on pense que c'est normal. Pourquoi est-ce qu'on exclut un enfant de l'école ? Parce qu'il est différent. Des outils comme l'intelligence artificielle,

  • Speaker #0

    elles ne posent pas réellement de nouvelles questions. Elles posent d'anciennes questions auxquelles on n'a pas répondu depuis longtemps. Comme Maria Montessori le disait,

  • Speaker #1

    l'éducation est la plus belle arme de paix.

  • Speaker #0

    Michel Onfray a cette phrase que j'aime beaucoup,

  • Speaker #1

    il dit que tous les enfants sont des philosophes et certains adultes le demeurent. Nos enfants deviennent comme nous les voyons, nos enfants deviennent comme ils nous voient. Prenons le temps de réfléchir à ce qu'on veut pour demain.

  • Speaker #0

    Bienvenue sur le podcast Les Adules de Demain. Je m'appelle Stéphanie Desclebbes, je suis entrepreneur et surtout une actrice engagée pour l'enfance. Dans ce podcast, je donne la voix à celles et ceux qui changent le monde grâce à l'éducation. Pour en savoir plus sur mes dernières actualités, rendez-vous sur le compte Insta at Les Adules de Demain ou sur mon compte perso LinkedIn. Pour retrouver un condensé des meilleurs moments du podcast, Je vous laisse découvrir le livre Offrir le meilleur aux enfants aux éditions Atier, que j'ai co-écrit avec ma mère Sylvie Descleb, que vous entendrez beaucoup dans ce podcast. Allez, je laisse place à un nouvel épisode. Ces images nous ont tous choqués. L'effet d'actualité récent où une enseignante utilise la violence auprès de l'une de ses élèves à la rentrée scolaire fait preuve encore une fois de notre culture française de la domination des adultes vis-à-vis des enfants. Pourtant... Depuis de nombreuses années, des grandes personnalités françaises nous prouvent qu'une autre éducation est possible, loin des punitions, de la violence et au plus près des besoins de l'enfant. Isabelle Fiosa fait partie de ces grandes figures qui ont tant fait pour faire évoluer notre société si empreinte de ce besoin d'autoritarisme et d'obéissance envers les enfants. Psychothérapeute, conférencière, auteur, Isabelle est avant tout une grande défenseuse des droits des enfants. J'ai voulu comprendre dans cette interview les mécanismes néfastes de la violence faite aux enfants, des raisons expliquant l'urgence de changer notre regard sur les enfants, et des manières dont nous pouvons réparer l'enfance blessée de nombreux adultes. C'est suite à la lecture de son dernier livre, presque un bilan, qui s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont, que j'ai ressenti le besoin avec Isabelle de refaire le point sur les clés d'une éducation bienveillante. Je vous souhaite une bonne écoute. Bonjour Isabelle.

  • Speaker #1

    Bonjour Stéphanie, bonjour à tout le monde qui écoute.

  • Speaker #0

    Quel honneur de vous retrouver aujourd'hui pour la seconde fois au micro des adultes de demain. Un plaisir plus. Je le rappelle à chaque fois, mais c'est vrai que vous avez beaucoup inspiré l'éducation que mes parents ont offerte à mes frères et sœurs et moi. Je suis la quatrième d'une fratrie de cinq. Car oui, Isabelle, je suis certaine que vous avez contribué à améliorer la vie familiale de nombreuses personnes en diffusant les valeurs de la parentalité dites positives. Avant même de parler des méthodes ou des techniques, vous avez permis à des familles de s'éloigner de la culture de la punition, de l'obéissance et du rapport hiérarchique très vertical entre parents et enfants, pour se recentrer sur les besoins de l'enfant et sur le respect de leur développement. Alors aujourd'hui on se rend compte, puisque vous avez publié un nouveau livre que j'ai adoré, il s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont et qui propose un panorama de plus de 40 ans de vos recherches. Cet ouvrage démontre que l'éducation positive devrait être la voie à suivre. pour élever les enfants, en leur offrant à la fois un cadre et un environnement propices à un développement harmonieux. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre, qui semble dresser un véritable bilan de votre travail de ces dernières années ?

  • Speaker #1

    J'ai éprouvé le besoin d'écrire tout ça pour rectifier tout ce qui était dit. Parce qu'en fait, beaucoup de choses les deux dernières années ont été dites sur la parentalité positive. On voit écrit sous la plume de certains journalistes. toutes sortes de choses qui sont profondément fausses ou partiellement fausses ou légèrement erronées. Bref, c'est difficile pour les gens de s'y retrouver dans qu'est-ce qui est de la parentalité positive, qu'est-ce qui n'en est pas et qu'est-ce qui est vrai dans ce qui est dit et qu'est-ce qui ne l'est pas. Parce qu'il y a des choses vraies aussi qui sont dites, mais donc c'était un peu mélangé tout ça. Et je me suis dit mais ce n'est pas possible, je ne peux pas laisser dire toutes sortes de choses qui... qui sont profondément fausses. Donc ça me paraissait fondamental de rétablir ce qui me paraissait vraiment plus juste et d'étayer ça avec les recherches scientifiques. Donc il y a un gros travail dans ce livre de pouvoir retrouver les recherches scientifiques qui soutiennent ce que j'avance, qui soutiennent ce qu'est la parentalité positive.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est une forme de réponse aussi aux attaques que vous avez vécues ces dernières années à votre rencontre, mais aussi plus largement à toutes les personnes qui défendent la parentalité positive ?

  • Speaker #1

    C'est tout à fait une réponse, c'est vraiment comme ça que je le conçois, et c'est ce que je dis d'ailleurs dans l'introduction du livre. J'ai écrit ce livre en réponse pour clarifier les choses, et pour que vraiment on puisse enfin s'y retrouver dans cet espace de la parentalité dans lequel toutes sortes de choses sont dites.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui en France, malheureusement, il existe encore beaucoup de violences lorsqu'on parle d'éducation. Et j'aimerais comprendre ensemble ce contexte, assez paradoxal surtout quand on défend la parentalité positive. Donc selon le second baromètre sur les violences éducatives ordinaires porté par la Fondation pour l'enfance, 81% des parents reconnaissent avoir encore recours à différentes formes de violences éducatives ordinaires, VEO, contre 79% en 2022. C'est donc en augmentation. Pourtant, 45% des répondants sont conscients des effets néfastes et durables de ces violences sur la santé et le développement des enfants. Pourquoi sommes-nous encore si autoritaires, sévères et parfois violents vis-à-vis des enfants en France ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vraiment une immense question Stéphanie. Et franchement, hélas, je n'en sais rien. Je ne sais pas. Ce qui fait que spécifiquement en France, nous avons conservé cette attitude-là. Il est vrai que nos gouvernements n'ont pas été très proactifs, ils n'ont pas assorti la loi qui a d'ailleurs eu beaucoup de mal à passer et qui est tellement légère qu'on dit juste il s'agit d'élever les enfants sans violence. Mais finalement à aucun moment on ne définit ce qu'est une violence et donc pour comprendre, pour savoir ce qu'est une violence, il faut aller fouiller jusque dans la Convention internationale des droits de l'enfant. Alors, il est vrai que normalement, cette Convention internationale des droits de l'enfant, elle est la loi en France. Mais voilà, tout le monde ne va pas la lire. Et donc, comme il n'y a pas eu de pédagogie autour de cette loi, comme la plupart des gens ne savent pas véritablement ce qu'est une violence et ce qui ne l'est pas. Et comme on a été éduqués comme ça, on continue comme ça. Et puis, il y a très peu d'accompagnement des parents. On a aussi un congé maternité et paternité qui sont extrêmement courts et donc on n'a pas vraiment le temps de tisser suffisamment d'attachements, d'apprendre à décoder les signaux de l'enfant, de construire un langage commun. Et du coup il y a très souvent des mauvaises compréhensions, des misconceptions, des interprétations et c'est comme si en France on se construisait le parent et l'enfant. l'un face à l'autre, quasiment en opposition. C'est d'ailleurs ce que disent les psychanalystes, puisque c'est même dans la doctrine psychanalytique, l'enfant va chercher systématiquement à prendre le pouvoir sur ses parents, à dominer ses parents, etc. Donc on est comme imbibé de cette culture dans laquelle l'enfant est un petit diable qu'il faut arriver à dompter. Et si... on n'arrive pas à le dompter, ça va devenir un enfant roi, etc. Et donc ce côté diable de lui risque de prendre toute la place. Et même si toute la science nous dit le contraire, la science nous dit que les enfants sont très empathiques depuis le début, qu'ils cherchent à se conformer, qu'ils cherchent à s'adapter, qu'ils cherchent à imiter les adultes, qu'ils cherchent à respecter les règles, sur le quotidien, quand on voit... constate que l'enfant ne fait pas exactement comme on s'attendait, comme on n'a pas pris l'habitude de réfléchir et qu'on ne sait pas finalement comment se développe un enfant. Jamais nulle part on apprend ce qui se passe dans le cerveau d'un enfant et comment le cerveau se développe. Donc on attend que ce soit un minuscule petit adulte et que dès l'âge de deux ans il sache mettre ses mains correctement sur la table, qu'il ne laisse pas tomber sa fourchette ou quoi que ce soit, qu'il mange correctement avec ça. Bref, on attend. tant des choses qui sont disproportionnées par rapport à l'âge des enfants. Et puis, comme on n'a pas pris l'habitude de construire ce langage commun et qu'on a cette culture d'opposition, on a tendance à interpréter le comportement de l'enfant. Ah, tu fais ça pour m'embêter. Tu fais ça contre moi. Et on se construit un peu dans une opposition de besoin. Et les 81% dont vous parlez, ce sont des parents qui disent avoir commis une violence éducative la semaine précédant l'enquête. Donc, ça montre à quel point c'est extrêmement répandu. Mais ces mêmes parents disent qu'ils aimeraient ne pas commettre de violence. Mais d'une part, ils ne savent pas, ils ne savent pas comment faire. Ils sont souvent démunis, mais ils ont souvent cette croyance qu'il est nécessaire que l'enfant obéisse. Et ça, c'est une dynamique qui n'existe peut-être, qui n'existe pas, par exemple en Allemagne ou dans les pays du Nord ou même en Espagne, etc. On n'est pas dans cette même nécessité que l'enfant obéisse et se conforme. Alors d'où est-ce que ça vient ? Je ne sais pas exactement. il est vrai que c'est une caractéristique française. Les Français sont connus pour crier plus que dans d'autres pays et pour être dans une approche des enfants où les enfants sont vécus comme pénibles à la base. On ne sait pas les gérer. Il faut qu'ils soient sages comme des images. On oublie qu'une image, ça ne parle pas. Une image, ce n'est pas vivant. Or, un enfant, c'est vivant. En Allemagne, les Allemands, c'est pas vivant. Ce ne sont pas des gens foufous, ce ne sont pas des gens qui font n'importe quoi dans leur vie. Au contraire, ce sont des gens qui sont hyper respectueux des règles. Leurs enfants sont très respectueux des règles, mais jamais on ne leur demande d'obéir au doigt et à l'œil comme on le demande en France. Ils bénéficient d'une bien plus grande liberté, de plus d'attachement parce qu'il y a un temps plus long avec les parents avant d'être mis dans des structures. Et ils ont... Ils sont plus encouragés à faire leurs expériences, à faire par eux-mêmes, dans les squares. On les voit prendre beaucoup plus de risques que les Français. Les Français, paradoxalement, à la fois sont sur le dos des enfants et non, ne fais pas ci, tu vas tomber, attention, ta-ta, ta-ta En fait, c'est du contrôle. Pour quelle raison ? Je ne sais pas exactement. À fouiller !

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pourriez d'ailleurs nous rappeler ce que c'est une violence faite aux enfants ?

  • Speaker #1

    Une violence, de manière générale, j'aime bien la définition de Jean-Marie Muller, c'est l'usage de la force pour contraindre quelqu'un. Et en fait, la violence envers les enfants, c'est tout ce qui va faire mal à l'enfant et le contraindre. Alors, il y a des violences qui sont parfois utiles, ça n'empêche que c'est une violence, mais par exemple, on met la ceinture de sécurité, ça. on ne déroge pas là-dessus. Il est clair qu'on met la ceinture de sécurité. C'est intéressant de mesurer que quand on met la ceinture de sécurité à un enfant, un tout petit bébé par exemple, il va se rebeller. Parce qu'on a un besoin, tous les humains, on a un besoin de liberté et tout ce qui va entraver nos mouvements va engendrer du stress. Donc, est-ce qu'on l'appelle violence ou pas ? Oui et non. C'est-à-dire qu'on peut dire que ça fait violence et du coup, on va... écouter l'enfant et lui dire ah ben oui c'est carrément pas agréable et peut-être pour exercer moins cette violence on va lui donner de plus en plus de liberté c'est à dire dès qu'il va être capable de le faire on va lui demander de le faire lui même de mettre sa ceinture mais ça n'est pas parce que ça contraint l'enfant qu'on ne va pas le faire dans la parentalité positive il y a évidemment beaucoup de contraintes aussi on respecte les lois on respecte les règles on va juste accompagner l'enfant pour qu'il puisse le faire sans se sentir blessé, sans se sentir humilié, sans se sentir dévalorisé, sans avoir l'impression que c'est le parent qui décide et que lui n'a pas d'espace.

  • Speaker #0

    Ça me rappelle quelque chose qui s'est passé cet été. Sur Instagram, on m'a contactée puisque quelqu'un a vécu face à lui une violence extrême. Là, on parle vraiment de violence physique. Un enfant qui a été contraint dans une voiture après plusieurs coups. et qui m'a demandé comment est-ce qu'on réagit quand on voit un adulte violent envers un enfant.

  • Speaker #1

    C'est toujours extrêmement difficile et en même temps c'est vraiment important d'intervenir, d'agir et dans les pays du Nord, ils agissent, ils interviennent, ils s'entraident. C'est notre posture qui va faire toute la différence. Si on intervient en jugeant le parent, là il vaut mieux ne pas intervenir. C'est pour ça que dans les pays du Nord, c'est plus facile parce qu'il y a une ambiance générale de soutien mutuel et de conception de l'enfant qui n'est pas la même que chez nous. Chez nous, tout de suite, le parent qui se montre violent risque de se sentir, si on intervient, jugé. Et si nous, effectivement, on le juge et on lui dit mais monsieur, vous n'avez pas le droit de faire ça alors ça risque d'être blessant. et finalement ça va faire le contraire de ce qu'on espère. Donc allons-y. Alors il y a toutes sortes de façons de faire et donc c'est à chacun de trouver sa propre porte d'entrée. Ce qui me paraît marcher le mieux et ce que j'ai utilisé le plus et qui a le mieux fonctionné, c'est de partir avec une attitude d'empathie pour le parent. C'est-à-dire qu'au lieu de vouloir se précipiter vers l'enfant et protéger l'enfant, on va s'occuper du parent. Parce qu'en fait, le parent qui agresse son enfant, c'est un parent désespéré, c'est un parent qui se sent impuissant, c'est un parent qui n'en peut plus. Personne ne désire se montrer violent. On se montre violent. Quand on n'y arrive plus, quand on est dépassé, sauf évidemment quand on nous a raconté qu'il fallait faire ceci, faire cela, et donc on croit. Après, quelquefois, on justifie, on se dit oui, une gifle, ça ne fait pas de mal, enfermer un enfant dans sa chambre, c'est une punition, et c'est important de faire des punitions pour pouvoir permettre à l'enfant de comprendre, même si c'est faux, il y a des gens qui y croient. En dehors de ces moments-là, on va même... Quand les gens y croient, dur comme fer, on va prendre l'axe de l'empathie en pensant qu'ils ont besoin d'aide. Parce que quand vous arrivez avec cette offre, je peux vous aider, alors la plupart du temps, comme ce sont des Français, ils vont dire non. Voilà, on est dans une civilisation de chacun pour soi, individualisme forcené, je dois me débrouiller tout seul, etc. Donc la première réaction... de quelqu'un que vous cherchiez à lui porter sa valise ou son panier ou que vous preniez l'enfant pour aider, c'est mal vécu parce que notre société est tellement, tellement individualiste. Ça n'empêche qu'on le fait quand même et on y va. Et donc, on insiste et on peut insister, mais avec douceur et respect pour le parent et avec, à l'intérieur, je suis là pour vous fournir du soutien. Ça m'est arrivé dans le train de... dire, si vous voulez, moi je peux lui faire faire ses devoirs. Donc j'ai pris le gamin et on a fait les devoirs ensemble. Parce que voilà, ça disjonctait là, même on n'en pouvait plus. Et je comprends, parce que l'enfant avait des problèmes monstrueux pour apprendre. C'était extrêmement difficile pour lui. Des choses qui avaient l'air, mais qui étaient tellement simplissimes. Il ne les pigeait pas. Et donc voilà, j'ai observé ce qui se passait. J'ai vu qu'en fait, cet enfant avait la bouche ouverte en permanence. Il avait de gros, gros problèmes. de bouche, de respiration et donc d'oxygénation de son cerveau, etc. Donc j'ai pu en parler après à la maman. Mais surtout déjà, le simple fait de prendre soin de son enfant, elle pouvait respirer un petit peu et elle s'est sentie moins jugée. Alors je ne peux pas dire qu'elle ne s'est sentie pas jugée du tout, parce que forcément, elle se juge forcément aussi elle-même. Et d'ailleurs, elle s'est justifiée. Je lui ai dit, vous savez, j'ai tout essayé, j'ai tellement fait, etc. Il a vu tous les psy possibles, il a vu ah mais j'y arrive plus etc. Donc voilà, elle a pu se confier aussi. Donc la plupart des parents vont disjoncter se mettre à crier, frapper, punir, au moment où ils ne savent plus faire autrement. Si on est témoin de ça, on peut intervenir pour proposer du soutien, de l'aide et l'aider à faire autrement. On n'a pas toujours le temps, on n'a pas toujours l'espace, on peut au moins. donner un petit regard à l'enfant et aux parents, un regard tendre et non pas un regard jugeant. Rien qu'un regard, l'enfant s'en empare. Une fois, une adulte, quand elle était psychothérapeute, m'a raconté que quand elle était enfant, dans un train, sa mère lui hurlait dessus, et là, elle a rencontré le regard d'une femme. Elle a dit, dans son regard, j'ai lu que c'était pas ma faute. Et que c'était ma maman qui avait un problème. Et elle n'a rien dit. Mais ça m'a toujours portée. J'ai regardé ma maman différemment. Et j'ai arrêté d'être blessée à l'intérieur par ça. Ça a changé ma vie. Et donc je me suis dit, mais c'est incroyable. Un simple regard, ça peut soutenir.

  • Speaker #0

    Quand on se retrouve dans ces débats qu'on a souvent à table entre jeunes parents, lorsque l'on parle de violence, par exemple, on va parler... de la fessée, etc., de ces violences physiques, et que certains vont nous répondre Oh, moi j'ai pris quelques fessées, ça ne m'a pas tué. Regarde comment je suis devenue, etc. Qu'est-ce qu'on répond à ces gens-là ?

  • Speaker #1

    Ça dépend de la situation. Mais la plupart des gens sont devenus ce qu'ils sont devenus malgré les fessées. Et donc, ils vont bien sûr se justifier dans un premier temps. Donc, j'aime bien, de toute façon, ne jamais s'opposer. Si vous dites non, vous vous opposez, vous prenez un discours différent, il va y avoir juste de la bagarre. Et donc on commence par dire oui. Ah oui, tu as raison ! C'est ce qu'on disait avant. Avant que les neurosciences n'identifient ce que ça fait réellement, on croyait que ça ne faisait rien. Bien sûr, ça ne t'a pas tué. Heureusement, je suis contente que ça ne t'ait pas tué. Mais peut-être que ça a tué une petite partie en toi. Peut-être que de temps en temps, tu n'as pas l'aisance ou la confiance que tu pourrais avoir dans certaines situations. Peut-être que ça t'arrive de te soumettre face à un patron, face à quelqu'un de plus important. Et peut-être que, tiens, tu sais, j'avais repéré, tu m'avais parlé de ta difficulté avec l'autorité, peut-être que ça a un lien. Des choses comme ça.

  • Speaker #0

    Alors vous l'avez dit, les études scientifiques prouvent les résultats positifs de la parentalité que vous défendez, la parentalité positive. Pourquoi pour autant, cette parentalité-là ne fait-elle pas l'unanimité ?

  • Speaker #1

    Alors dans le reste du monde, elle fait l'unanimité, presque. Il y a bien sûr quelques personnes. qui vont, même dans le reste du monde, il y a quelques personnes qui vont continuer de militer pour la fessée, pour la punition, etc. Dans aucun pays, nulle part dans le monde, il y a une unité totale sur quelque chose. Il y en a qui sont pour la démocratie, il y en a qui sont pour l'autocratie. Et donc, dans la famille, c'est pareil. Et plus on a subi de blessures, plus on peut avoir tendance... à justifier la façon dont nos parents nous ont éduqués et donc à être dans cette parentalité davantage autoritaire.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, lorsqu'on parle de parentalité positive, en France, il y a souvent ce mythe de l'enfant roi, de l'enfant tyran. Qu'est-ce que vous avez à dire à ce sujet ?

  • Speaker #1

    Tellement de choses. Donc, j'explique bien dans le livre d'où ça vient. Et cette idée d'enfant roi et d'enfant tyran, alors là, est vraiment typiquement française parce qu'elle est liée à la psychanalyse. Et la psychanalyse reste vivante dans notre pays. Elle ne l'est plus, elle n'est plus enseignée dans les autres pays du monde, sauf peut-être en Argentine paraît-il. Mais aux États-Unis, au Canada, dans les grands pays du monde, on n'enseigne plus la psychanalyse. Aussi, on l'enseigne, mais en philosophie, mais pas en psychologie. En psychologie, maintenant, on sait que cette théorie... qui a été élaboré par Freud pour camoufler le fait que lui a subi des violences sexuelles dans son enfance, que son père a commis l'inceste sur, on ne sait pas sur lui, mais en tout cas sur sa soeur, son frère. Donc on sait ça aujourd'hui, mais en France on ne le sait pas. En France on ne dit rien et en France on suit cette doctrine psychanalytique qui dit que l'enfant vient au monde avec des pulsions. Et qu'il s'agit de mettre un terme à ces pulsions, de dire stop, de frustrer l'enfant pour qu'il apprenne à devenir un adulte raisonnable. Donc il s'agit de se castrer, castrer les pulsions, différentes castrations à différents âges, castrations anales, orales, etc. Les différentes castrations pour pouvoir enfin avoir intégré. ce qu'on appelle le principe de réalité. Donc, selon eux, un enfant vient au monde avec ses pulsions et il rencontre le principe de réalité et qu'il a besoin de rencontrer ce principe de réalité. Alors, voilà, dans la science, aujourd'hui, on part dans la théorie de l'attachement qui a accumulé les preuves scientifiques et qui dit qu'un enfant vient au monde avec des besoins. C'est un rapport. complètement différent. L'enfant ne vient pas au monde avec des pulsions qu'il va satisfaire au dépens de sa mère qui n'est qu'un objet de satisfaction. Là c'est complètement différent, l'enfant vient au monde avec des besoins et notamment des besoins affectifs et il a ce besoin de sécurité affective et la mère, le père, les parents sont des figures d'attachement qui vont assurer sa sécurité. Il a besoin de cette sécurité pour pouvoir prendre son envol et pour pouvoir s'épanouir. Donc c'est une perspective complètement différente, mais qui en France n'a pas encore pénétré complètement, ni dans les études de psychologie, ni dans le grand public suffisamment. Donc même si ça progresse quand même notablement, et notamment en psychiatrie maintenant, c'est clair que... La psychanalyse n'est plus enseignée en psychiatrie, mais c'est la théorie d'attachement qui est enseignée.

  • Speaker #0

    En quoi alors la parentalité positive n'est pas une forme de parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    La parentalité laxiste est une parentalité négative. La parentalité positive, elle est dite positive parce qu'elle obtient des résultats positifs pour l'enfant comme pour les parents. Et les études scientifiques montrent que quand on écoute les besoins de l'enfant, quand on co-régule les émotions de l'enfant, lorsque l'on pratique un certain nombre de fonctionnements... de compétences parentales, du coup, il y a des issues positives et donc du coup c'est défini comme une positive. Il y a plusieurs formes, il y a l'autoritarisme qui est une parentalité négative parce que l'autoritarisme a tendance à générer des enfants soit trop soumis et donc qui perdent confiance en eux, soit agressifs, qui développent des comportements débordants. C'est là que c'est paradoxal parce que ce sont souvent les autoritaires qui accusent les autres parents, soit disant positifs, de laisser tout faire aux enfants et que du coup ils vont avoir des comportements débordants, comme vous dites, rois et tyrans. Mais en réalité, ceux qui deviennent tyrans, ce ne sont pas ceux à qui on n'a pas posé de limite, c'est plutôt ceux à qui on a posé trop de limites de manière autoritaire. Donc il y a l'autoritarisme, il y a la démission totale. où là, le parent ne s'occupe absolument pas de l'enfant. Et donc, ça, évidemment que c'est aussi une parentalité dite négative parce que ça ne permet pas à un enfant de grandir. Et la parentalité laxiste, parentalité laxiste, c'est ne pas avoir d'attente envers son enfant. Je lui laisse tout faire. Oh, il apprendra bien tout seul. Et donc, je suis affectueux, mais parce que dans le je m'en fiche, il n'y a rien du tout. Là, dans le laxiste, on est quand même affectueux. mais c'est tout et il n'y a pas de règles, on laisse un peu l'anarchie faire et on pense que l'enfant va se développer tout seul. Et donc ça, c'est prouvé aussi scientifiquement que ça ne fonctionne pas et que les enfants sont un peu perdus et n'ont pas suffisamment de structures pour pouvoir se développer. Donc la parentalité positive, c'est ni le laxisme ni l'autoritarisme. C'est une saine autorité. Les enfants... ont envie de faire ce qui est bien. Ils ont envie de bien se comporter. À condition qu'on les respecte, ils vont respecter. En fait, les enfants nous imitent énormément.

  • Speaker #0

    Je le vois à la maison sur cette question des règles. Moi, j'ai un garçon qui a 18 mois. Et donc, il marche et on l'emmène dans la rue. Et on essaye de lui expliquer qu'il y a des endroits où il ne peut pas marcher, notamment sur la route. Et donc, on lui dit pas là. Et c'est vrai que maintenant, il est dans cette imitation où il nous montre les endroits. Il nous dit pas là, pas là. Et il a l'air hyper heureux de nous montrer que... Il a compris qu'il ne devait pas aller là.

  • Speaker #1

    Exactement. Les enfants sont friands de règles. Donc ça fait toujours drôle aux parents quand je dis ça, mais en réalité, les enfants adorent les règles. Ils aiment les respecter. Et ce qu'ils n'aiment pas, ce sont les ordres, les limites, les punitions, les impositions. Chaque fois qu'on est dans une dynamique tu fais comme ci ce n'est pas une règle. Ça, c'est un ordre. Et donc un ordre, tous les humains, sont construits pour résister aux ordres. Donc bien sûr, si vous formulez votre règle en termes de règles, non pas en termes de règles, je veux dire, mais en termes d'ordres, l'enfant va se rebeller. Mais si vous formulez la règle en termes de règles, c'est-à-dire une procédure, et c'est bien ce que vous faites en expliquant ici tu marches, ici tu ne marches pas, là tu es dans les bras, on donne le fonctionnement. Donc voici la procédure pour vivre. ensemble. La procédure pour vivre en communauté, c'est que dans telle situation, on dit merci, dans telle situation, on dit bonjour, etc. Et donc, on donne les informations. Du coup, l'enfant, il dit, c'est comme ça que fonctionne le monde. Moi, je veux y arriver, je veux le faire, je veux le faire correctement.

  • Speaker #0

    Pourquoi pensez-vous qu'il y a eu une telle association entre parentalité positive et parentalité laxiste ?

  • Speaker #1

    Je pense que c'est juste de la désinformation qui est menée par les autoritaires. Un parent autoritaire ou des professionnels qui sont dans cette dynamique de vouloir être dans cet autoritarisme sont dans une espèce de...

  • Speaker #0

    Il y en a même qui utilisent le mot de croisade pour tenter de maintenir ce cap. Et donc, c'est la critique facile. Après, il peut y avoir aussi des interprétations superficielles de la part des gens. Parce que, comme je disais qu'il n'y a pas eu beaucoup de pédagogie autour de la loi qui dit que c'est important d'élever les enfants sans violence, il peut aussi y avoir des conceptions un peu superficielles. En disant, ne mettons pas, il ne faut pas donner d'ordre aux enfants, alors du coup, on laisse tout faire. Ou alors, quand on dit non à un enfant, ça le stresse, alors du coup, je ne veux pas stresser mon enfant et du coup, je lui laisse tout faire. Non, tout à l'heure, je vous ai dit, non, on lui met la ceinture de sécurité. De temps en temps, il veut un deuxième bonbon, non, stop. Alors, c'est vrai que si on utilise un stop plutôt que non, mais on va quand même freiner, on va quand même organiser. Et c'est vraiment extrêmement important. Il y a des règles, mais des parents qui ont entendu un truc, lu un petit article, peuvent avoir une impression comme ça superficielle en disant je vais être gentil. Mais en fait, le vrai problème, c'est quoi ? Le vrai problème, c'est qu'eux-mêmes, quand ils étaient enfants, ils avaient des parents autoritaires. Ils ne veulent pas faire ça. Ils n'ont pas appris à faire différemment. Et du coup, ils sont juste, je ne veux pas être autoritaire. Et comme ils ne se sont pas sentis toujours aimés inconditionnellement par leurs parents, ils peuvent craindre que leur enfant ne les aime pas. Et quand on craint que son enfant ne vous aime pas, on va essayer de lui faire plaisir. Et donc vous avez toutes sortes de parents qui croient, qui peut-être se racontent qu'ils sont dans la parentalité positive, mais en fait ça n'est pas de la parentalité positive, c'est juste qu'ils ne disent pas non parce qu'ils ont peur que leur enfant... ne les aiment plus s'ils leur refusent un bonbon, une heure de télé ou ceci ou cela.

  • Speaker #1

    Et ça, vous le rappelez très bien dans votre livre, c'est très bien démontré. Il semblerait que notre culture peine aussi à évoluer sur les questions d'éducation à cause du manque de temps, vous l'avez dit, et de valorisation que l'on réserve au fait de s'occuper de ses enfants en France. Il faut du temps pour s'informer, pour déconstruire les schémas de pensée hérités de son enfance et de sa propre éducation, et pour résister aux automatismes. et aussi aux critiques extérieures. Et ça, je trouve qu'on le retrouve beaucoup en France. Alors, pouvoir passer du temps de qualité avec ses enfants, en France, ça semble être presque un luxe. Aujourd'hui, vous l'avez rappelé, les congés de parentalité sont extrêmement courts. Comment est-ce qu'on pourrait changer cela ? Comment est-ce qu'on pourrait donner davantage envie aux adultes de passer du temps de qualité avec leurs enfants, quand bien même ils sont contraints par la société ?

  • Speaker #0

    Merci Stéphanie pour ce focus sur le désir parce que c'est vrai le souci c'est que toute la société va sans arrêt nous raconter que les enfants c'est pénible pendant les vacances oh là là on se prend la tête on a les enfants toute la journée c'est horrible vivement la rentrée parce que là au moins quelqu'un s'occupe d'eux toute la journée oh il y a la télé je peux les mettre devant la télé ils vont pas me saouler donc il y a tout ce discours ambiant euh qui est vraiment problématique. Et donc, on a à aimer nos enfants différemment. Mais c'est vrai que c'est plus facile d'aimer ses enfants quand ça se passe bien. Et donc, quand on sait maîtriser quelques compétences de parentalité qui permettent que ça se passe plus facilement. Parce que si on se dispute en permanence, si on ne sait pas comment faire pour qu'il mette ses chaussures, pour dormir, on est débordé. La plupart des parents d'aujourd'hui, quand ils sont parents pour la première fois, n'ont jamais eu un bébé dans les bras. Dans le temps, on s'occupait toujours des soeurs, des frères, des cousins, des cousines, etc. On vivait avec des bébés. De nos jours, ben non. Ce qui fait que, déjà, dès la base, on saisit le petit bébé comme une poupée. On le positionne comme un poupon au sein. Et du coup, évidemment, on a des crevasses parce que c'est pas comme ça qu'on devrait positionner le bébé. Donc ça commence très mal. Et on n'a pas de transmission. plus de transmission et du coup, il y a plein de choses qu'on ne sait pas faire. Et du coup, c'est compliqué. Donc, ce serait vraiment utile d'avoir des films, d'avoir des livres, plus d'informations, faciles d'accès, qui permettent de voir comment ça se passe. C'est dans ce sens-là qu'on a fait ce film sur les mille premiers jours avec Boris Cyrulnik, Nathalie Vicariini et Antoine Guédonnet. où on va les quatre experts dans les familles pour accompagner les parents et leur permettre de regarder différemment leur enfant. C'est ça en fait, c'est ce qu'ils ont fait dans les pays du Nord, c'est ce qu'ils ont fait en Allemagne. C'est plus de temps, non seulement des congés plus importants, mais beaucoup d'activités. parents-enfants, pour petit à petit aussi fournir aux parents des compétences. C'est l'idée des Maisons des 1000 premiers jours. Quant à la commission des 1000 jours, on a eu cette idée de faire des Maisons des 1000 jours. C'est vraiment un lieu, un centre où on peut aller dès la grossesse et on va être accompagné pendant un an. On peut pendant une fois par semaine être en groupe avec d'autres parents, d'autres parents qui ont des enfants du même âge, pouvoir... partager, dire ce qui se passe, vider nos émotions parce que c'est parfois dur, et aussi apprendre des choses sur le développement de l'enfant, apprendre des compétences, comment on fait ceci, comment on fait cela. Tout ça peut nous étayer et faire qu'on a du coup envie. Plus on est avec un enfant, plus on a envie d'être avec un enfant parce que plus on est avec un enfant, mieux on le connaît. Et plus on le connaît, plus nos langages, on sait identifier le besoin qu'il a, on sait y répondre, et donc tout coule beaucoup mieux. À partir du moment où on ne se voit pas, on ne se voit pas assez, on n'a pas le temps de connecter suffisamment. Et un enfant qui est déconnecté, il va forcément, du fait de la théorie d'attachement, il va forcément être plus demandeur, plus exigeant, plus agressif, plus... Et du coup, nous, on est en déstabilisation et hop, finalement, si on regarde le temps qu'on passe avec nos enfants, quelquefois, on se rend compte, mais zut, j'ai passé toute ma journée à le contrôler, mais finalement, on n'a pas eu de relation véritable. Donc, c'est un peu l'idée, ce serait de changer tout ça. Ce qui m'a intriguée, parce que dans les autres pays, on travaille aussi, c'est que depuis les années 50, dans tous les autres pays, en Europe, le temps passé avec les enfants a augmenté. En France, il a diminué depuis les années 50. Or, vous parliez de l'imposition de la société, mais on n'a plus que 35 heures de travail. Dans les années 50, c'était plutôt 45-50. Donc, qu'est-ce qui s'est passé ? On travaille moins, mais on est moins aussi avec les enfants. Donc, c'est une question de choix individuel.

  • Speaker #1

    Et sur les informations, c'est vrai que moi, je suis totalement pour... développer davantage de ressources qui soient à disposition gratuitement et de manière nombreuse aux parents. Je le vois par exemple quand on se prépare à l'accouchement, on a le droit à six cours de préparation à l'accouchement pour un moment dans la vie du bébé et de la maman et du partenaire.

  • Speaker #0

    C'est important,

  • Speaker #1

    il ne faut pas faire moins. Mais c'est vrai que c'est dingue, une fois qu'on se retrouve avec un enfant entre les bras,

  • Speaker #0

    il n'y a plus rien. Mais c'est pour ça que les maisons des 1000 jours se développent, elles répondent vraiment à un besoin. Et j'invite chaque maman à se rapprocher de la maison des 1000 jours la plus proche. J'espère que dans un avenir proche, de plus en plus proche, ce sera comme en Australie où il y en aura dans tous les quartiers. Aujourd'hui, on a petit à petit, ils s'en construisent un par ville à peu près, mais ça répond à un vrai besoin. Et ça marche tellement bien que je pense que ça va aller vite.

  • Speaker #1

    C'est vrai qu'on aurait pu se dire que l'État, le gouvernement ne semblent pas encore prendre suffisamment au sérieux cette situation en termes d'éducation, en termes d'enfance, si on se compare par exemple au fameux pays nordique. Comment est-ce que nous, alors là je prends ma casquette un peu militante, dans la société civile, on pourrait changer les choses pour changer ces mentalités vis-à-vis de la relation entre parents et enfants ?

  • Speaker #0

    C'est vraiment quelque chose d'individuel du coup, c'est-à-dire qu'on a besoin de continuer de militer. On continue d'exiger d'entraîner, d'en parler davantage et faire respecter nos droits déjà parce qu'il y a de nombreux droits déjà pour les parents, notamment pour les mamans allaitantes dans les entreprises et ces droits ne sont pas toujours respectés. Donc déjà, au moins faire respecter les droits déjà acquis et continuer de militer pour en avoir davantage. Et puis c'est surtout commencer à réaliser que nous sommes parents. Et que notre vie de parent, elle est importante. Et que nous ne devrions pas être obligés de quitter notre vie de parent pour faire une vie de bon professionnel, que finalement, dans la plupart et de plus en plus d'entreprises le réalisent. Ce sont beaucoup des parents qui sont les salariés. Et parmi les salariés, il y en a forcément un bon nombre, des parents ou des aidants de manière générale. Et donc les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à intégrer cette dimension. Parce qu'en réalité, quand un parent est sécurisé dans son rôle de parent, lorsque les choses lui sont facilitées, notamment au niveau des horaires, mais aussi... Lorsque c'est reconnu qu'il a le droit d'être parent et que le fait d'être parent ne lui enlève pas quelque chose dans sa carrière, alors il va travailler davantage, travailler mieux, travailler plus efficacement. Donc les labels pour les entreprises qui respectent les parents se développent. Donc on peut tout à fait inciter son entreprise à aller vers ces labels-là et à se rappeler que plus un salarié est heureux, mieux il travaille.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait totalement sens. On va faire un petit pas de côté sur ces sujets culturels d'éducation en France pour parler d'une partie de votre livre, moi, qui m'a beaucoup intéressée, interpellée. Vous parlez du poids des psychotraumas de notre enfance sur notre santé physique, psychique et sociale. Est-ce que vous pourriez revenir là-dessus ?

  • Speaker #0

    Oui, le psychotrauma, c'est lorsque... Il y a trauma lorsqu'un événement va dépasser nos capacités d'adaptation. Le stress, c'est l'effort d'adaptation de l'organisme à toute situation. Donc, on se stresse sans arrêt. Le stress, c'est positif. Dans notre société, on le vit souvent comme négatif. Et d'ailleurs, je ne veux pas stresser mon enfant. Mais si, le stress, c'est juste un effort d'adaptation. Donc, le stress, c'est OK. Il y a le stress positif. Plus on est stressé, d'ailleurs. Plus on réussit, aux Jeux Olympiques, ils ont réussi à dépasser leur capacité parce que c'était super stressant d'être dans la compétition et avec tout ce monde tout autour, etc. Donc, le stress est excitant et fournit de l'énergie. Donc, le stress n'est pas négatif en soi. Il y a le stress positif, il y a le stress tolérable, c'est-à-dire je vis quelque chose d'un petit peu difficile, ça demande plus d'énergie pour monter la colline. Mais hop, j'y arrive et... J'arrive à ce que mon métabolisme à l'intérieur de mon corps s'équilibre. Et il y a le stress dit toxique qui va devenir le trauma. Là, c'est quand l'événement ou la pente a monté, la pente a grimpé. C'est trop dur et du coup, ça dépasse mes capacités d'adaptation. Donc, il y a trauma chaque fois qu'on ne peut pas réussir. à s'adapter à une situation. Donc, il y a trauma lorsqu'il y a un earthquake, ça me vient en anglais, un tremblement de terre, lorsqu'il y a un événement cataclysmique extérieur, une guerre, tout ça, ça fait effectivement, ce sont des événements traumatiques. Il y a les gros événements traumatiques, un viol est aussi un événement traumatique, l'inceste. Encore plus parce qu'il y a cette dimension de soumission où on faisait confiance à la personne et on est trahi dans sa confiance. Donc là, c'est un stress vraiment lié à la trahison en plus. Et puis, c'est le trauma lié à un événement identifié qui dépasse mes capacités. Ou qu'est-ce qui se passe dans le cerveau à ce moment-là ? Le cerveau réagit et... Et quand c'est vraiment trop dur, qu'on ne peut pas réussir à s'adapter, il y a quelque chose qui disjoncte, qui fait qu'on ne mémorise pas. Donc on va effacer l'événement et ça s'appelle l'amnésie traumatique, on l'efface. Et en même temps, il risque d'y avoir des flashbacks de ce moment-là, des irruptions de nos émotions qui reviennent. Et quand on a vécu par exemple les bombardements, le moindre... tonnerre qui arrive va réveiller et donc on est absolument paniqué, etc. Ça réveille, c'est pas le tonnerre qui nous fait peur, c'est que le tonnerre réveille les mémoires traumatiques de la guerre. Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que ça, c'est une forme de trauma mais qu'il y a aussi autre chose qui va dépasser les capacités d'adaptation d'un enfant notamment, c'est lorsqu'il y a plein de Petits événements qui vont se succéder et qui ne permettent pas à l'enfant de revenir. Punir une fois un enfant, aucun problème. Le punir tous les jours, très régulièrement. Le dévaloriser, le taper, l'humilier, lui dire tu es nul, tu es lamentable, lui dire des choses méchantes régulièrement. Petit à petit, ça sape sa confiance en lui et petit à petit, il n'arrive plus à revenir et être vraiment lui-même. Et de la même manière, il va occulter. Tout ça, il va juste garder le sentiment d'humiliation, la soumission, et il va souvent se suradapter, devenir sage comme une image. C'est pour ça que c'est toujours louche, quelqu'un de sage comme une image. Et puis de temps en temps, on va devenir violente contre son frère, contre quelqu'un de plus faible que lui. Il peut y avoir aussi des réactions qui vont sortir. Le trauma, c'est lorsque quelque chose se passe qui nous fait mal. Mais c'est aussi quand ce qui devrait nous faire du bien n'est pas là. Et Gabor Maté l'a très bien montré, ce médecin spécialiste des addictions et spécialiste du trauma, qui nous dit que tout humain a besoin d'affection, d'amour inconditionnel. Et lorsqu'on est pris par une émotion, on a absolument besoin d'être entendu. reconnu et d'être accompagné dans notre émotion. Et donc, si un enfant de, par exemple, 3 ans se met à pleurer, hurler, et qu'il n'y a pas un adulte à ce moment-là qui vient pour le prendre dans les bras, pour le câliner, pour l'aider à canaliser ce trop plein d'émotions, ça va faire trauma. Parce que ça n'est pas quelque chose de négatif qui arrive, qui ne permet pas de s'adapter. Mais c'est quelque chose qu'il aurait dû recevoir pour pouvoir grandir normalement et qui a manqué. Donc nos manques font aussi trauma. Chaque fois qu'on envoie un enfant dans sa chambre, à la place d'écouter ce qui se passe pour lui, quand il pleure, quand il crie, quand il a un comportement débordant, chaque fois qu'on n'écoute pas, qu'on ne fournit pas un accueil inconditionnel à l'enfant, eh bien... On met une pierre, là encore, une fois, ne suffit pas pour traumatiser un enfant. Mais lorsque ça se répète régulièrement, alors oui, ça devient traumatisme. Dire que c'est, on épuise les capacités de résistance de l'enfant.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il est possible de guérir l'enfant blessé qu'on a été lorsqu'on a vécu ces psychotraumas et qu'on est adulte, une fois qu'on décide en plus de devenir parent ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, oui, oui, oui, oui, oui, cent fois oui, oui, on peut guérir. Et il y a de plus en plus de thérapies efficaces pour soigner le trauma. Il y a eu toutes sortes de thérapies dans le passé. On vient de très, très loin. En 1981, il était écrit dans le manuel de psychiatrie officiel que le trauma était très rare et que, par exemple, l'inceste n'existait pour les femmes qu'une sur une. un million vivaient l'inceste. Et que de toute façon, avoir des relations sexuelles avec son père était plutôt quelque chose qui allait vous permettre d'être mieux intégré dans votre vie d'adulte. Donc voilà la conception du trauma en 1981. C'est pas si vieux que ça. Elle était là, quoi. Donc il y avait très peu de thérapies qui se préoccupaient de soigner le trauma. Alors moi, je faisais partie déjà à l'époque de la branche des thérapies humanistes qui... prenait en compte le trauma et donc j'ai travaillé sur le trauma à la suite aussi d'Alice Miller etc. où on mesurait l'impact du trauma sur la vie de tout un chacun et donc j'ai déjà travaillé sur le plan émotionnel à libérer le corps parce qu'en fait le trauma il s'inscrit dans le corps et donc il y a aujourd'hui multitude de thérapies il y a des thérapies corporelles un peu comme celles que je pratiquais et des thérapies qui s'occupent de d'exprimer les émotions, d'autres thérapies qui vont être dans la libération des sensations, qui vont permettre de remettre en route le nerf vague, de vraiment rééquilibrer tout ce système sensoriel. Il y a le MDR, il y a la thérapie mosaïque, il y a l'EFT, il y a de plus en plus de thérapies non-invasives, parce que ce qu'on sait aujourd'hui, c'est qu'il n'est pas nécessaire de revivre le trauma pour le guérir. Il n'est même pas nécessaire de le... dire, de le parler et souvent même faire raconter à quelqu'un son événement traumatique risque de le retraumatiser. Donc on avance maintenant. Depuis quelques années, on est de plus en plus conscients, on étudie le traumatisme un peu sous tous ses angles et on sait de mieux en mieux travailler sur cette question du trauma. On travaille sur le soin du trauma, comment guérir du trauma. Et il y a un mouvement mondial, et je mène ce mouvement à Marseille avec quelques amis, où on veut transformer la ville de Marseille en faire une ville non violente, une ville informée sur le trauma. Et donc ce mouvement des villes informées sur le trauma, c'est une façon de... d'embarquer toute une population. Parce que, quelquefois, c'est dur. Même aujourd'hui, un parent qui est dans la parentalité positive, il a non seulement à gérer son enfant, mais à gérer tous les jugements des gens, puisque aujourd'hui, malheureusement, la majeure partie des gens sont encore dans une parentalité violente et autoritariste. Donc, c'est oui, tu devrais quand même le faire se tenir mieux, il gêne tout le monde, là, tu sais, ton enfant gêne Bref, il y a tout ce poids-là. Et tant qu'on n'a pas compris et la théorie de l'attachement et le développement du cerveau d'un enfant et comment ça fonctionne, le stress, le trauma, quels sont les besoins d'un enfant, comment on va répondre, comment on co-régule les émotions d'un enfant, on sera toujours démuni, il y aura toujours des gens qui vont nous juger comme ça. Donc il s'agit vraiment de transformer toute la population et transformer le regard d'une population. Si au lieu de dire mais c'est pas bien d'avoir fait ça. On dit mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? C'est-à-dire au lieu de jugement systématique sur quelqu'un, mais assieds-toi, fais ceci, fais cela, du contrôle systématique et de la punition, retourner son regard et dire mais si tu fais ça comme ça, c'est qu'il s'est passé quelque chose pour toi. Quel est le nœud dans ton cœur ? Et du coup, ça change complètement le regard. Et donc, on voudrait apprendre comme ça tous ensemble à repérer ce qu'est un trauma. Comment ça nous impacte ? Parce que la prévalence du trauma est phénoménale. On sait aujourd'hui que deux personnes sur trois ont vécu au moins un trauma dans leur vie. Et une personne sur huit, on a vécu plus de quatre. Quand on a vécu plus de quatre traumatismes dans sa vie, on risque fort d'avoir des problèmes d'addiction, des problèmes cardiaques, des problèmes de métabolisme, d'être obèse, d'avoir des problèmes de santé de manière générale. Des problèmes relationnels, des problèmes émotionnels, la vie est vraiment plus compliquée. Donc on a besoin de pouvoir mesurer cette prévalence et de réaliser que quelqu'un qui n'est pas sympa, qui dysfonctionne, qui exagère, qui ne se comporte pas correctement, c'est probablement quelqu'un qui a été traumatisé. Et si on l'aide, si on lui fournit le soutien dont il a besoin, ça va tout changer. Ça peut changer son image de lui-même, ça peut lui donner envie de s'améliorer, ça peut lui donner envie de changer. Et puis, si on peut éviter de le retraumatiser. Parce qu'aujourd'hui, globalement, il y a un moment où même je m'en porte un peu dans le livre, et je dis que c'est quand même assez terrible qu'à l'école par exemple, quand on sait qu'il y a probablement trois enfants par classe qui ont subi l'inceste. et qu'on voit qu'un enfant a des comportements débordants, on va le punir, on va l'exclure même. Mais à quel moment on se demande si peut-être celui qui a des comportements débordants, il lui est arrivé quelque chose ? Parce que si vos parents vous frappent à la maison, si vous êtes violés, si vous subissez du traumatisme, si vos parents ne vous enseignent pas à réguler vos émotions, si vous vous enfermez dans votre chambre, dès qu'il se passe quelque chose d'émotionnel à l'intérieur de vous, vous ne savez pas comment faire. Et toute cette boule d'émotion, toute cette boule de tension à l'intérieur de vous, elle éclate en classe. Mais du coup, c'est double punition. Quand on punit l'enfant et puis on le renvoie chez lui, en quoi est-ce que c'est aidant ? En quoi est-ce que ça lui permet de soigner ce qui se passe à l'intérieur ? Donc c'est vraiment changer le regard de la société. Et je suis... Moi, je prône zéro tolérance. C'est pour ça, vraiment, quand on me dit que je suis laxiste, que je laisse tout faire, trop permissive. Non, c'est zéro tolérance. Un pas de côté, une insulte, stop. Qu'est-ce qui se passe ? D'où vient cette insulte ? Et on cherche à comprendre, donner du sens et à réparer. Parce qu'on veut vivre ensemble. On veut vivre en communauté. On veut que ça se passe bien. Et on veut construire suffisamment... d'authenticité dans les relations, suffisamment de confiance dans les relations, suffisamment de sécurité relationnelle, émotionnelle, de sécurité affective pour tout un chacun. Quand un humain a cette sécurité affective, il se développe. Un enfant qui bénéficie de sécurité affective, une bonne sécurité affective solide à l'intérieur, il va bosser, il va s'intéresser, il va se développer. il va réussir. Alors quand je dis ça, attention, ce n'est pas magique. Et dans notre société, Il y a aussi toutes sortes de problèmes que j'aborde un tout petit peu dans ce livre. J'aborderai plus dans d'autres livres. Mais il y a des gros problèmes sociaux. Il y a des gros problèmes de nourriture. Les enfants d'aujourd'hui mangent beaucoup trop de plats transformés et donc qui posent des problèmes sur leurs microbiotes et qui leur fait être dans ces réactions extrêmes d'intolérance à la frustration, etc. C'est-à-dire que l'intolérance à la frustration, ce n'est pas forcément seulement... Le manque de limites de la part des parents, c'est très souvent parce que le microbiote de l'enfant est complètement sans dessus-dessous et que l'enfant ne sait pas gérer, ne peut pas réussir à réguler ses émotions. Le nombre d'enfants qui respirent par la bouche aujourd'hui est phénoménal et ça c'est pas normal non plus. Le nombre d'enfants qui sont trop assis, qui ne bougent plus, qui ne courent plus. Aujourd'hui les enfants ne courent plus, ils sont là assis avec leurs tablettes et ils ont... perdu 25% de capacité cardiaque. C'est énorme. Ils courent moins vite qu'avant, ils vont moins dehors, ils sont de plus en plus myopes parce qu'on a besoin d'être à l'extérieur pour pouvoir... C'est la lumière de l'extérieur qui aide l'œil à grandir. Si on n'est pas suffisamment exposé à la lumière externe, la lumière du jour, on devient myope. Quand on devient myope, ça génère des peurs parce qu'on ne voit pas bien les profondeurs, on ne voit plus bien les choses. Et donc du coup, On peut aussi avoir des difficultés à l'école. Bref, c'est tout un ensemble. Donc, il ne faut pas faire reposer tout sur les parents ne sont pas assez autoritaires, les profs ne sont pas assez autoritaires, etc. Il y a une réalité aujourd'hui. Les enfants d'aujourd'hui ne sont plus de d'hier. Ça, c'est clair. Les enfants d'aujourd'hui font beaucoup plus de crises. Ils sont intolérants à la frustration. Ils sont à la fois plus mous et plus toniques. Pas plus toniques, mais plus débordants. Donc oui, c'est un problème. Mais le problème, il n'est pas. ce n'est pas une question d'autorité, c'est vraiment une question d'environnement. Et nous avons besoin de prendre en compte cette dimension d'environnement.

  • Speaker #1

    C'est ça, et c'est ce que je trouve qui est essentiel dans votre ouvrage, c'est que vous rappelez tous ces éléments-là, et aussi ça nous rappelle à tous à quel point l'enfance est aussi une période extrêmement sensible, fragile et complexe, et à quel point il est nécessaire d'être informé à ce sujet. On va malheureusement devoir se quitter. Isabelle, j'ai une dernière question, c'est ma question rituelle dans le podcast, vous le savez, il s'appelle Les adultes de demain Qu'est-ce que vous souhaiteriez aux enfants d'aujourd'hui, les futurs adultes de demain ?

  • Speaker #0

    Eh bien, paradoxalement, je souhaite juste qu'ils soient le plus enfants possible et d'avoir la permission d'être enfants. Parce que je me suis rendu compte, je disais beaucoup, vous êtes les adultes de demain, et puis je me suis dit mais stop, en fait il y en a marre de faire tout aujourd'hui en fonction de quels adultes ils vont devenir demain. Plus chaque étape de vie est pleine et répond à leurs besoins, plus chaque future étape de la vie sera aussi harmonieuse. Et donc, ce que je leur souhaite à chacun, c'est que leurs besoins d'enfants soient respectés et qu'ils puissent avoir le droit de vivre leur vie d'enfant un maximum.

  • Speaker #1

    Merci infiniment Isabelle. Je rappelle que votre livre s'appelle Éduquer tout ce qu'il faut savoir aux éditions Robert Laffont. Un livre qui devrait être mis entre les mains de tous les parents et futurs parents. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci Stéphane.

  • Speaker #1

    Merci infiniment d'avoir écouté cet épisode. J'aimerais prendre le temps de remercier tous ceux qui s'abonnent à la chaîne du podcast, qui laissent des avis et des notes sur Apple Podcast ou Spotify. Ça paraît rien, mais ça fait toute la différence pour faire connaître notre travail qui est complètement indépendant. Pour me retrouver, je vous rappelle que vous pouvez aller sur le compte Instagram des Adules de Demain ou sur mon compte LinkedIn perso. N'hésitez pas à me partager vos retours sur cet épisode ou sur le podcast en général, ça fait tellement du bien de vous lire. Je vous dis à très bientôt pour un nouvel épisode.

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