J’ai appris que vous persévériez dans votre quête. Jean-Paul Archie, au téléphone. C’est un ancien collaborateur d’Éric Losfeld au Terrain Vague. Puis de François Maspero à La Joie de lire. Le jeune Thorel l’avait furtivement croisé En 1976, à Toulouse. Jean-Paul Archie venait d’ouvrir une petite libraire, rue Gambetta...

Il y avait les deux prénoms sur la pierre grise. Benoît Paul. Ça convenait bien. Pour la dernière demeure d’un homme double. J’ai longuement regardé la tombe, les croix, le mur d’enclos, le bleu du ciel. Bel horizon nivernais dans cette éclaircie d’août...

Pour l’heure il n’est pas grand-chose. Et complétement paumé. Il ne sera pas ingénieur. Toujours ça de pris sur le malheur. Il est sur les routes. Petit-bourgeois en rupture de ban. Son errance intranquille ne trouve pas sa place...

Je pourrai vous en parler pendant des heures. De Christian Thorel...

L’homme habite là. Parmi ses fétiches. Nous sommes quelques jours avant Noël. Un soir de décembre 2012. C’est dans le petit bureau. Au premier étage du Nautilus. Ça se passe derrière la porte avec une vitre opaque. La grande table de travail, au fond, remplie de papiers en vrac, de livres empilés, de factures, bons de commande, enveloppes déchirées, courriers en cours, agendas noircis de rendez-vous, cartons d’invitation, listings, programmes d’éditions, catalogues...

Le texte qui suit est composé à partir de notes prises sur le motif, glanées entre les rayonnages d'une librairie toulousaine, un après-midi du mois de mai 2021, et de souvenirs tirés d'une fréquentation régulière et maintenant ancienne des établissements dédiées au commerce du livre...

Dans mes cahiers, cette note : Derrida disait que la mémoire est l’autre nom de l’avenir. Où et quand l’a-t-il dit ? Impossible de m’en souvenir. Mais si on mêle mémoire et avenir, cela m’évoque les élections de 81. Je n’avais pas encore mon permis et j’étais trop jeune pour voter. Ce soir-là, j’ai attendu que mon amoureux de l’époque – le premier – vienne me chercher pour aller faire la fête avec notre bande de copains...

Si j’ai passé plus de temps dans les salles de cinéma que dans les librairies, celles-ci demeurent des lieux que je n’ai jamais quittés depuis au moins mon adolescence, voire mon enfance. Peut-être est-ce parce que les maisons ou appartements de mes premières années étaient en partie tapissés de livres que je me suis senti très tôt « chez moi » dans les librairies...

La libraire de l’enseigne située sur les Lices G. Pompidou nous regardait à travers ses rayonnages, perchée sur un tabouret, lunettes de myope au milieu du nez. Plantées depuis quelques instants devant la vitrine, Ana et moi avons ricané comme des oies blanches, amusées par la couverture d’un livre dont je ne me rappelle plus le nom mais qui représentait un homme nu, de dos, dont les fesses grasses débordaient de son corps spongieux. ..

Dans cette dernière partie, on retrouve Hamadi, qui a désormais presque 50 ans, après la mort de ses parents.