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Mesdames

Hiratsuka Raichō : insoumise et solaire

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23min |13/10/2025
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23min |13/10/2025
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Description

Au Japon du début du XXᵉ siècle, où les femmes n’avaient ni voix ni place dans la sphère publique, une jeune fille au tempérament indomptable ose dire non. Née Haru, devenue Hiratsuka Raichō, elle fonde le premier journal féministe japonais, revendique la liberté sexuelle et s’engage pour le droit de vote des femmes.
Dans cet épisode, on plonge dans le parcours de cette journaliste et penseuse avant-gardiste, entre rébellion intime, luttes collectives et contradictions d’une époque.
De Tokyo à Nagoya, du Seitō à la Fédération démocratique des femmes, Raichō incarne la force tranquille d’un féminisme qui cherche déjà à faire briller à nouveau le soleil des femmes. ☀️


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La bise.




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous pouvez me appeler une pute si vous voulez, c'est bon, je n'en ai pas vraiment peur. On a le droit de choisir avec qui on a le sexe et on a le droit de dire non. Vous êtes en train de vous effrayer des femmes et de vous demander. Si ce n'était pas moi, qui ? Si ce n'était pas maintenant, quand ? Accepter que vous soyez une femme comme raison pour faire ou ne faire rien. Ne silenciez pas cette voix. Déclarons en l'air, c'est ce que je veux. Faire une révolution de désir. Je crois que les femmes peuvent apporter beaucoup à notre société. Maintenant qu'elles ont le sentiment qu'elles ont un rôle à jouer, elles peuvent pouvoir épanouir leur personnalité comme elles le souhaitent. Bonjour, bonsoir à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Mesdames. Aujourd'hui, on va encore voyager, vous et moi, n'est-ce pas ? C'est super. Dans un pays où je n'ai pas encore eu la chance d'aller, mais qui me fascine depuis que je suis ado, comme beaucoup d'ados nés dans les années 90, je pense. On a tous peut-être eu notre période Japon-mania, puisque c'est de ce pays dont on va parler aujourd'hui. Bon, après, moi, ça a vite été remplacé par la Corée, une fois que je suis arrivée Peut-être fin collège, début lycée, mais j'ai toujours été un peu la weeboss du coin avec les mangas, les animés, etc. Bon, évidemment, quand j'ai vieilli, je me suis intéressée à un peu plus de choses plus larges, on va dire. J'ai aussi une de mes très proches amies qui vit au Japon et qui est mariée, etc. Depuis un petit temps maintenant. Donc, c'est un pays que j'aimerais beaucoup visiter un jour. et c'est un pays aussi qui est quand même... plutôt connue pour pas être hyper en avance sur les droits des femmes. Non pas qu'il n'y ait aucune avancée, mais on est quand même dans un pays qui est assez traditionnaliste, j'ai envie de dire, je ne sais pas si c'est le bon terme, qui est assez conservateur aussi quand même, et où il y a des attentes très fortes, une pression très forte envers les femmes, que ce soit au niveau de la maternité, que ce soit dans le monde du travail. Et du coup, je me suis demandé s'il y avait quand même aussi des figures féministes féministe dans un pays où il y a autant de pression envers les femmes. Et, surprise, surprise, il y en a ! Et donc aujourd'hui, on va parler d'une journaliste féministe libertaire du Japon du début du XXe siècle. Donc ça va permettre aussi, voilà, d'avoir un peu plus de data sur un personnage féministe, enfin, une personnalité féministe emblématique du Japon. On va parler de Hiratsuka Raisho, s'appelle en réalité Haru, et elle est née en 1886 à Tokyo. Elle est la plus jeune de deux sœurs au sein d'une famille plutôt bourgeoise, avec une mère au foyer, ancienne danseuse et musicienne, très ancrée dans les valeurs traditionnelles du Japon de l'époque, et un père qu'on pourrait aujourd'hui appeler un self-made man. C'était un ancien samouraï devenu haut fonctionnaire. Il a un peu gravi les échelons tout seul à la force de ses gros bras, si vous voulez. C'était un homme qui tenait son foyer d'une main de fer, puisque la jeune Haru a rapidement reçu une éducation très stricte. de la part de ses parents et surtout de la part de son père. D'ailleurs, si la mère d'Aru n'était plus chanteuse ni danseuse à partir de la naissance de ses enfants, c'est bien parce que son mari lui avait quand même formellement interdit. Par contre, à force de voyager pour son travail, le père d'Aru parlait très bien l'allemand et il avait une vision assez particulière de l'Occident à une époque où le Japon était très fermé sur le monde extérieur. Cette connaissance, ça lui a permis de donner une éducation plus particulière, plus singulière à ses enfants. en les envoyant à l'école très tôt, en tout cas très tôt pour l'époque au Japon, et en les habillant dans des styles beaucoup plus occidentaux que les enfants japonais classiques. C'était donc une éducation quand même assez stricte, mais avec une espèce d'ouverture sur le monde, c'est assez particulier pour l'époque. La petite Haru va grandir avec une particularité physique. Elle a des cordes vocales naturellement plus faibles que la moyenne, et elle ne peut donc pas lever la voix très très fort. On va le voir. au fur et à mesure de l'épisode, mais c'est plutôt marrant d'imaginer ça de la part d'une femme qui va littéralement se faire entendre pour des positions assez radicales sur les droits des femmes dans une société japonaise ultra conservatrice. La petite Haru est aussi plutôt bonne élève. Pas très étonnant, on va dire, vu l'éducation du daron. Elle est entourée d'énormément de femmes, dont sa grand-mère de qui elle est très proche. Elle développe un sacré caractère d'ailleurs, à tel point qu'on l'appellera le garçon manqué de la famille. Très vite, elle va aussi se sentir en décalage par rapport à sa sœur. mais aussi par rapport à tous les autres enfants, toutes les autres enfants et adolescentes japonaises de son entourage. C'est une petite fille qui s'ennuie, elle prête pas trop d'importance à son apparence, ni aux attentes que sa famille pourrait et a eues d'elle en tant que femme japonaise. À l'école, elle réunit un peu les autres têtes brûlées de sa classe et ensemble, elle forme rapidement la petite bande de copines qu'elle va appeler sa bande de pirates et... Toute cette bande refuse de se conformer au rôle des adolescentes, jeunes femmes, slash femmes traditionnelles comme leur propre maman, et en criant sur tous les toits qu'elles refusent le mariage traditionnel. Donc à leur âge et dans la société japonaise de l'époque, c'est quand même assez osé, on va dire. Après le lycée, Haru, elle n'a aucune difficulté à l'école, donc elle va demander à aller tout naturellement à l'université. Jusqu'alors... ses parents ne lui avaient pas dit grand-chose sur l'école. On va dire qu'ils lui avaient donné une éducation plutôt stricte et qu'elle avait le droit d'aller à l'école pour un peu se développer, comme les autres enfants. Et puis, comme elle avait des bonnes notes, ses parents étaient même plutôt fiers d'elle. Mais là, on va avoir un petit problème. Parce que jusqu'au lycée, apprendre l'étape de multiplication et un bout de l'histoire du Japon, c'est super. Mais à la fac, on parle d'éducation un peu plus large où on commence à avoir des opinions. sur les choses telles que la politique et la géographie. Et trop d'apprentissage sur ces sujets pour une femme, ça peut vite être très mal vu. En effet, jusque-là, on va dire qu'au collège, en plus des tables de multiplication, etc., on pouvait aussi apprendre un peu quelques petits messages de propagande par-ci par-là sur les rôles genrés et sur la grandeur de son pays. À la fac, on va plutôt réfléchir, construire sa pensée critique, organiser ses pensées et travailler sur des sujets de fond. Et aux yeux du père de Haru, c'est vraiment pas fait pour la femme japonaise digne de ce nom et donc il va refuser à sa fille l'entrée à l'université. Mais Haru, c'est quelqu'un qui a la tête dure, elle a très envie d'apprendre, donc elle va quand même s'inscrire en Tsum Tsum malgré l'interdiction de son père. Il va finir par l'apprendre et face à l'obstination de sa fille, il va céder en acceptant son inscription mais en lui demandant de changer de parcours pour un parcours un peu plus traditionnel en termes d'enseignement. Et donc, c'est fini pour les sciences et la littérature que souhaitait étudier Haru, qui va se retrouver à l'université féminine du Japon. Là-bas, on enseigne principalement à des veuves, à d'anciennes professeurs, à des femmes mariées qui vivent à la campagne. Bref, des femmes un peu têtues sur les études, un petit peu en dehors de la ville, en dehors de la société active, à qui on ne sait pas trop quoi donner, où on ne sait pas trop où les envoyer. et qu'on va les placer du coup dans ces fosses. universités chrétiennes qui ont été souvent créées par des missionnaires. D'ailleurs, les études qu'on fait là-bas ne sont pas notées. Il n'y a même pas d'examen à passer à la fin. Les livres sont interdits. Donc, imaginez bien qu'une université où les livres sont interdits, l'objectif est quand même plutôt clair. Et c'est tout simplement pour éviter aux femmes d'avoir la mauvaise idée de s'éduquer par elles-mêmes. Et donc vu que ces universités sont quand même chrétiennes avant tout, on y apprend aussi des bonnes valeurs bien religieuses et donc des bonnes valeurs de rôle genré. Dans cet établissement, Haru aura droit à quelques cours de droit et de chimie, mais surtout beaucoup de cours qu'on va appeler les cours pour les femmes, et donc qui sont des cours de couture, des cours de cuisine, tout pour être la bonne épouse à la sortie de l'établissement. Cela dit, et quand même pour un peu donner l'illusion, d'être dans une vraie université, à la fin des études, on demandait aux étudiantes de rendre un genre de mémoire pour valider leur parcours. Bon, sauf que ce mémoire, il ne portait pas sur la géopolitique du Japon, mais plutôt sur les bonnes valeurs qui font une bonne épouse et une bonne mère. Donc même là, c'était un petit peu perdu d'avance. Haru ne va évidemment pas se plaire dans cet établissement. Elle va sécher la plupart des cours et elle ne rendra pas un mémoire dans les conditions attendues puisqu'elle rendra un travail complètement hors sujet. sur le sens de la vie, sur la philo et sur un mouvement un petit peu sympa qu'elle vient de découvrir et qui lui plaît bien, le bouddhisme. Donc, rendre un mémoire sur le bouddhisme et sur le sens de la vie dans une université où on vous apprend à être une bonne maman, on va dire que ça passe un peu moyen. En fait, ces études qui sont faites pour devenir la parfaite épouse, ça va l'emmener dans une direction complètement opposée. Vous savez, il y a un peu des gens qui réagissent soit par mimétisme, enfin on va dire... soit qui adoptent directement les choses, soit qui vont foncer complètement dans le mur opposé. Et Haru, elle va faire partie de cette deuxième catégorie de personnes. Et par instinct de rébellion un peu contre ses valeurs, elle va se plonger assez vite dans les travaux d'hommes et de femmes qui vont défendre justement les droits des femmes. En 1906, elle obtient quand même son diplôme et elle retourne chez ses parents dans le but de devenir sténographe. Elle va vivre un peu chez ses parents, prendre des cours d'anglais, travailler finalement comme sténographe et se rapprocher en parallèle d'un Cercle littéraire. Dans ce cercle littéraire, il y a un homme très important dans la vie d'Aru qui s'appelle Morita Soe. C'est un homme beaucoup plus âgé, déjà marié, mais avec qui elle aura une relation un petit peu passionnée, passionnelle. fusionnelle, on ne sait pas trop, mais en tout cas, ce qu'on sait, c'est que ce sera assez intense pour qu'elle s'enfuit avec lui à 24 ans. Ils vont vite se faire griller et être retrouvés par la police et ça va être un très gros scandale pour Haru et surtout pour son père qui, je vous le rappelle, est un haut fonctionnaire. Après avoir été retrouvé par la police et ramené gentiment à la maison, un an plus tard, Haru va fonder le journal Saito. D'ailleurs, c'est intéressant parce que c'est sa mère qui va couvrir les frais d'impression du premier numéro. Saito, pour ce journal, c'est la traduction de Blue Stalking qui fait référence en fait à un mouvement littéraire de femmes du 18ème qui était un mouvement non conforme et qui revendiquait l'égalité. Donc la couleur du journal est annoncée. Pour ce journal, elle va prendre un pseudonyme qui est donc le nom que je vous ai annoncé en début d'épisode, Raisho Hiratsuka. Ça peut vouloir dire deux choses. Raisho Hiratsuka en japonais, ça peut vouloir dire oiseau tonnerre ou Loi des neiges. Voilà. Ce qui est le plus connu sur ce journal, c'est la première ligne du premier numéro, qui est « Au début, la femme était véritablement le soleil, une personne authentique. Elle est désormais la lune, une lune blafarde et maladive, dépendante d'une autre, reflétant l'éclat d'une autre. » Donc là, encore une fois, vous comprenez rapidement où est-ce que le journal va aller. Le magazine slash journal aborde des problématiques jamais vues pour la société japonaise de l'époque, à savoir La sexualité, la chasteté, l'avortement. Et en parallèle, Raichu commence à vivre ouvertement une liaison avec un amant plus jeune qu'elle, un artiste du nom de Hiroshi Okumura, avec qui elle aura deux enfants hors mariage. Donc, sa vie a pris un virage attendu quand vous écoutez l'épisode, mais complètement inattendu pour une femme japonaise de l'époque. Avec des thèmes choquants comme l'avortement et la sexualité, vous vous en doutez, mais le magazine va connaître de nombreuses censures au Japon. Ça va vite ! quitte souler Haru, qu'on lui mette autant de bâtons dans les roues, et elle va finalement décider de se retirer de la rédaction en 1915. Et même si une autre femme du nom de Noe Ito, une anarchiste, autrice et féminine japonaise, va tenter de reprendre le journal pour continuer à le faire vivre, ça va tomber un petit peu dans l'oubli. Donc ce journal, c'est le premier et le plus gros pas d'Haru. dans son féminisme, puisque c'est vraiment un canal concret qu'elle va lancer après avoir vécu dans une famille très traditionnelle et avoir suivi des études qui lui ont profondément confirmé le fait qu'elle n'était pas du tout en accord avec la façon dont on traitait les femmes et avec ce qu'on attendait des femmes dans la société japonaise du XXe. Mais malgré le fait qu'elle se retire de la rédaction parce qu'elle en a marre, quand on lui censure tous ses articles, elle ne va pas s'arrêter là. Le Saito, c'était donc sa première réaction féministe publique. Mais elle va rester active et très concernée par le droit des femmes japonaises. En 1920, donc cinq ans après s'être retirée du journal, Haru va enquêter sur les conditions des femmes dans les usines textile de Nagoya. Là, vous allez vous dire, c'est très niche. Mais je vais devoir faire une petite parenthèse pour vous expliquer pourquoi c'est important. Nagoya, c'est une grande ville au centre du Japon située dans la préfecture d'Aishi. Dans les années 20, Nagoya, c'est surtout une grande ville industrielle et commerciale qui va baser toute son économie sur trois choses, la céramique, le portuaire et le textile. Le coton, notamment, est un des premiers grands secteurs industriels mécanisés du Japon et c'est un des premiers secteurs où on aura des équipements plus modernes qui vont permettre d'absorber une grande partie de la main-d'œuvre humaine. pour développer les exportations et le commerce international du textile au Japon. Mais même en ayant l'aide de machines, c'était une si grosse partie de leur économie qu'on estimait à peu près entre 6 et 7% la main-d'œuvre industrielle japonaise dédiée au textile, ce qui reste quand même très important. Maintenant, je reboucle avec notre madame du jour. Après le journal, elle va décider de se pencher sur la situation des femmes dans ses nombreuses usines textiles. puisqu'elle représente quand même un sacré pourcentage de la main d'oeuvre au Japon. Et une fois qu'elle va commencer à enquêter dans ces usines, elle va découvrir des conditions de travail absolument catastrophiques avec beaucoup de très jeunes filles au contact de machines hyper dangereuses. Ça va la révolter et elle va fonder l'association de la femme nouvelle en collaboration avec d'autres japonaises féministes de l'époque concernées par cette situation. Sauf que, officiellement, cette association de la femme nouvelle n'a pas le droit d'exister. Et oui, puisque la création d'associations féministes va à l'encontre de la loi japonaise de l'époque qui interdisait aux femmes d'adhérer à des organisations politiques et surtout la tenue de réunions à caractère féministe. Autant vous dire que son assaut, ça va vite pas avoir le droit d'exister. Et c'est là que Haru va comprendre quelque chose de très important. En fait, pour défendre les femmes dans le milieu textile, il va falloir créer cette fameuse association qui porte le combat. Mais pour créer cette association et être un minimum prise au sérieux, il faut que les japonaises aient d'abord le droit de la créer et pour ça, il faut qu'elles puissent voter la création d'une loi qui permet de faire d'ouvrir une association. Et donc pour ça, il faut qu'elle puisse être incluse dans la vie politique. Et donc pour être incluse dans la vie politique, il faut pouvoir faire entendre sa voix. Et là, ça va passer par le nouveau combat que va porter Haru, c'est-à-dire le suffrage féminin pour les japonaises. Le droit de vote des femmes, c'est un sujet très peu abordé au Japon dans les années 20, slash les années 30. Jusqu'à maintenant, de toute façon, c'est simple. Les femmes japonaises, elles étaient interdites de toute activité politique organisée. Ce qui met à l'eau quand même pas mal de façons de faire avancer la société dans le bon sens. Grâce à toutes les actions de Haru et d'une autre japonaise qui s'appelle Ishikawa Fusae, une autre femme féministe, le gouvernement va abroger la loi interdisant aux femmes d'assister à des réunions politiques deux ans plus tard, en 1922. Par contre, elles n'ont toujours pas le droit de vote ni d'élection, simplement d'assister à des réunions politiques organisées. Pour vous retracer rapidos l'histoire du droit de vote des femmes au Japon, en 1925, le Japon adopte le suffrage universel masculin qui permet à tous les hommes de plus de 25 ans de voter. Après une petite montée du militarisme et du nationalisme dans les années 30, plus la seconde guerre mondiale qui passe par là, les mouvements féministes sont sévèrement réprimés et les japonaises n'obtiendront le droit de vote qu'en 1945. Pour vous resituer un petit peu là où on est à Roux, elle commence à s'intéresser à ce combat dans les années 30. Donc on n'y est pas encore au droit de vote des femmes. Dans son combat pour le suffrage des japonaises, Haru va quand même nous faire un petit écart, puisqu'elle va aussi mener une campagne qui sera très controversée, puisqu'elle va proposer l'interdiction aux hommes possédant une maladie vénérienne de se marier. Si je vous donne cet exemple, c'est parce qu'il est parfait pour montrer, encore une fois, qu'on n'est pas tout blanc ou tout noir dans une histoire, qu'on n'est pas tout gentil ou tout méchant, et que c'est pas parce qu'on porte globalement des combats qui font avancer les droits des femmes toute sa vie, qu'on ne peut pas avoir deux, trois petites idées un peu moins coolos sur ce qu'on va appeler la race japonaise et qui est un des autres très grands problèmes du Japon, à savoir l'espèce de truc qu'ils avaient avec ce sang pur japonais, mais qu'ont aussi, par exemple, les Coréens, si on va par là. En fait, Haru, elle avait beau être pour le droit de vote des Japonaises, elle avait quand même ce truc de race japonaise, comme quoi on peut être féministe. et un peu raciste, puisqu'elle pensait que la propagation des maladies vénériennes aurait un effet néfaste sur les japonaises, mais aussi les japonais, qu'on disait de race. Ça, c'est ce qu'on appelle de l'eugénisme, et c'est grosso modo ce qui va désigner les différentes pratiques trouvées au cours de l'histoire pour essayer de sélectionner le patrimoine génétique de l'espèce humaine, et ne conserver finalement que les êtres humains qu'on considère comme étant supérieurs, quoi, en gros. Donc, c'est une pensée qui est très problématique et qui fait aussi partie de cette femme. quand bien même elle a livré des combats très très importants dans les droits des femmes japonaises. Voilà, donc petit à petit, dans les 20 années qui vont suivre cette enquête dans les usines textiles, entre 1930 et 1950, Haru va petit à petit disparaître de la vie publique. Déjà, elle a beau livrer des combats qui sont louables, elle reste criblée de dettes, puisque le militantisme ça paye pas fort au Japon dans les années 30, et elle a un mari qui est très très malade. C'est une femme qui reste engagée, elle... Elle continue d'écrire des conférences, des papiers par-ci par-là, mais elle va se retirer un petit peu, globalement, de ce qu'on pourrait appeler la vie politique. Après la Seconde Guerre mondiale, et grâce à toutes les conférences qu'elle a données et tous les écrits qu'elle a quand même pu produire toute sa vie, elle va devenir un personnage public à travers le Mouvement pour la Paix. Elle devient aussi membre de la Fédération démocratique internationale des femmes. Et en 1950, après le début de la guerre de Corée, elle va voyager avec... plein d'autres activistes pour défendre des valeurs de neutralité et de paix au Japon, mais aussi et plus largement dans le monde. Elle reste quand même assez intéressée par la politique et elle se positionnera toute sa vie en faveur du droit de vote des femmes. Jusqu'à ses 80 ans, on va la retrouver au premier rang des manifestations du mouvement des femmes japonaises. Et c'est en 1971, après une vie d'écrit et de lutte pour la paix et les droits des femmes, que Haru slash Reisho va s'éteindre le stylo à la main. Si on a autant d'informations, sur sa vie, son parcours, ses engagements, c'est qu'elle a laissé derrière elle une très belle biographie qui commence par une phrase pour laquelle elle a été connue et... qui fait partie des premières fois où elle a probablement pris la plume, c'est « Au début, la femme était le soleil » . Aujourd'hui, son travail pour les droits des femmes continue d'inspirer, et pas uniquement au Japon, mais aussi beaucoup plus largement. Je pense que ce qui est intéressant dans son histoire, c'est de noter qu'au final, elle n'a jamais vraiment été seule. Dans un monde où on se divise, beaucoup, et où on a un peu parfois l'impression qu'on mène chacun les combats de notre côté, Haru slash Raichu, je ne sais pas trop comment l'appeler, si c'est avant ou après son éveil féministe, on va dire. Elle nous rappelle que le nombre, mine de rien, ça compte. Et que des combats comme le féminisme, ça reste aussi et avant tout des combats collectifs. Avec d'autres féministes japonaises, parfois américaines, elle a pu lancer des papiers, puisqu'elle n'était pas la seule rédactrice, évidemment. Elle a pu enquêter, elle a pu soulever des problématiques, problématique, elle a pu s'engager dans le droit de vote des femmes. Elle a pu essayer d'avoir une carrière politique, si on peut appeler ça comme ça. Mais toute sa vie, ça reflète un besoin collectif de faire bouger les choses. Et au Japon, à ce moment-là, c'était quand même via la littérature qu'on pouvait espérer toucher un public un peu plus large. Comme je vous l'ai dit, les Japonaises n'auront le droit de vote qu'après la Seconde Guerre mondiale en 1945. Et même si les combats féministes japonais actuels peuvent parfois nous paraître un petit peu en décalage avec les nôtres, ou en tout cas assez éloignée de notre quotidien, c'est ce que je vous disais en début d'épisode, c'est toujours intéressant et inspirant de se rappeler qu'en tant que femme, peu importe finalement que certains pays aient l'impression d'être plus lents en termes d'avancée, déjà il faut se rappeler qu'on ne part pas tous du même point. C'est une des thématiques que j'aimerais bien aborder un jour dans un épisode peut-être un petit peu plus spécial, mais il y a quand même ce côté de, en fait, on ne part pas du même point de départ. Euh... en ce qui concerne l'amélioration de la vie des femmes et de l'obtention de leurs droits. Et le Japon, comme d'autres pays d'Asie, ça a été des pays très ancrés dans le confucianisme notamment. Et le confucianisme, on pourra en reparler, mais c'est quelque chose qui met les femmes dans des cases très précises dont il est difficile de sortir. Et c'est surtout aussi des pays qui ont longtemps été très fermés sur eux-mêmes pour des raisons notamment politiques, d'invasions, etc. Et ça explique aussi pourquoi les petites victoires ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Et je trouve quand même important de se rappeler qu'au bout du compte, on partage quand même tout un point commun, que ce soit nous, moi, vous, les japonaises, peu importe, mais c'est quand même le fait d'être des femmes et d'être globalement victime du patriarcat. Et donc, on est un peu toutes en train de regarder dans la même direction techniquement et que c'est important du coup de se rappeler qu'on se bat pour ses droits certes, mais pour aussi pour le droit de toutes les femmes. Et je pense que c'est ce qui est important de rappeler dans le combat de cette femme-là, de Haru. Comprendre ce qui se passe dans d'autres pays, dans d'autres cultures, dans d'autres époques aussi, ça ne peut, à mon sens, qu'améliorer la situation pour toutes et tous, d'ailleurs. Voilà. Si le travail de... En tout cas, si la vie de Haru slash de Raisho Hiratsuka vous intéresse, déjà, il y a sa biographie. qui est probablement connu et disponible. Et il y a tout plein d'articles et de vidéos en ligne sur elle qui peuvent vous permettre aussi de mettre un visage sur le nom et d'en savoir un petit peu plus sur la société japonaise du XXe. Voilà, donc on commence un petit peu dans Mesdames à tenter des portraits, on va dire, plus worldwide. Donc j'espère que ça vous aura plu. Et puis on se retrouve très vite dans un prochain épisode de Mesdames. Salut !

Description

Au Japon du début du XXᵉ siècle, où les femmes n’avaient ni voix ni place dans la sphère publique, une jeune fille au tempérament indomptable ose dire non. Née Haru, devenue Hiratsuka Raichō, elle fonde le premier journal féministe japonais, revendique la liberté sexuelle et s’engage pour le droit de vote des femmes.
Dans cet épisode, on plonge dans le parcours de cette journaliste et penseuse avant-gardiste, entre rébellion intime, luttes collectives et contradictions d’une époque.
De Tokyo à Nagoya, du Seitō à la Fédération démocratique des femmes, Raichō incarne la force tranquille d’un féminisme qui cherche déjà à faire briller à nouveau le soleil des femmes. ☀️


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La bise.




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous pouvez me appeler une pute si vous voulez, c'est bon, je n'en ai pas vraiment peur. On a le droit de choisir avec qui on a le sexe et on a le droit de dire non. Vous êtes en train de vous effrayer des femmes et de vous demander. Si ce n'était pas moi, qui ? Si ce n'était pas maintenant, quand ? Accepter que vous soyez une femme comme raison pour faire ou ne faire rien. Ne silenciez pas cette voix. Déclarons en l'air, c'est ce que je veux. Faire une révolution de désir. Je crois que les femmes peuvent apporter beaucoup à notre société. Maintenant qu'elles ont le sentiment qu'elles ont un rôle à jouer, elles peuvent pouvoir épanouir leur personnalité comme elles le souhaitent. Bonjour, bonsoir à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Mesdames. Aujourd'hui, on va encore voyager, vous et moi, n'est-ce pas ? C'est super. Dans un pays où je n'ai pas encore eu la chance d'aller, mais qui me fascine depuis que je suis ado, comme beaucoup d'ados nés dans les années 90, je pense. On a tous peut-être eu notre période Japon-mania, puisque c'est de ce pays dont on va parler aujourd'hui. Bon, après, moi, ça a vite été remplacé par la Corée, une fois que je suis arrivée Peut-être fin collège, début lycée, mais j'ai toujours été un peu la weeboss du coin avec les mangas, les animés, etc. Bon, évidemment, quand j'ai vieilli, je me suis intéressée à un peu plus de choses plus larges, on va dire. J'ai aussi une de mes très proches amies qui vit au Japon et qui est mariée, etc. Depuis un petit temps maintenant. Donc, c'est un pays que j'aimerais beaucoup visiter un jour. et c'est un pays aussi qui est quand même... plutôt connue pour pas être hyper en avance sur les droits des femmes. Non pas qu'il n'y ait aucune avancée, mais on est quand même dans un pays qui est assez traditionnaliste, j'ai envie de dire, je ne sais pas si c'est le bon terme, qui est assez conservateur aussi quand même, et où il y a des attentes très fortes, une pression très forte envers les femmes, que ce soit au niveau de la maternité, que ce soit dans le monde du travail. Et du coup, je me suis demandé s'il y avait quand même aussi des figures féministes féministe dans un pays où il y a autant de pression envers les femmes. Et, surprise, surprise, il y en a ! Et donc aujourd'hui, on va parler d'une journaliste féministe libertaire du Japon du début du XXe siècle. Donc ça va permettre aussi, voilà, d'avoir un peu plus de data sur un personnage féministe, enfin, une personnalité féministe emblématique du Japon. On va parler de Hiratsuka Raisho, s'appelle en réalité Haru, et elle est née en 1886 à Tokyo. Elle est la plus jeune de deux sœurs au sein d'une famille plutôt bourgeoise, avec une mère au foyer, ancienne danseuse et musicienne, très ancrée dans les valeurs traditionnelles du Japon de l'époque, et un père qu'on pourrait aujourd'hui appeler un self-made man. C'était un ancien samouraï devenu haut fonctionnaire. Il a un peu gravi les échelons tout seul à la force de ses gros bras, si vous voulez. C'était un homme qui tenait son foyer d'une main de fer, puisque la jeune Haru a rapidement reçu une éducation très stricte. de la part de ses parents et surtout de la part de son père. D'ailleurs, si la mère d'Aru n'était plus chanteuse ni danseuse à partir de la naissance de ses enfants, c'est bien parce que son mari lui avait quand même formellement interdit. Par contre, à force de voyager pour son travail, le père d'Aru parlait très bien l'allemand et il avait une vision assez particulière de l'Occident à une époque où le Japon était très fermé sur le monde extérieur. Cette connaissance, ça lui a permis de donner une éducation plus particulière, plus singulière à ses enfants. en les envoyant à l'école très tôt, en tout cas très tôt pour l'époque au Japon, et en les habillant dans des styles beaucoup plus occidentaux que les enfants japonais classiques. C'était donc une éducation quand même assez stricte, mais avec une espèce d'ouverture sur le monde, c'est assez particulier pour l'époque. La petite Haru va grandir avec une particularité physique. Elle a des cordes vocales naturellement plus faibles que la moyenne, et elle ne peut donc pas lever la voix très très fort. On va le voir. au fur et à mesure de l'épisode, mais c'est plutôt marrant d'imaginer ça de la part d'une femme qui va littéralement se faire entendre pour des positions assez radicales sur les droits des femmes dans une société japonaise ultra conservatrice. La petite Haru est aussi plutôt bonne élève. Pas très étonnant, on va dire, vu l'éducation du daron. Elle est entourée d'énormément de femmes, dont sa grand-mère de qui elle est très proche. Elle développe un sacré caractère d'ailleurs, à tel point qu'on l'appellera le garçon manqué de la famille. Très vite, elle va aussi se sentir en décalage par rapport à sa sœur. mais aussi par rapport à tous les autres enfants, toutes les autres enfants et adolescentes japonaises de son entourage. C'est une petite fille qui s'ennuie, elle prête pas trop d'importance à son apparence, ni aux attentes que sa famille pourrait et a eues d'elle en tant que femme japonaise. À l'école, elle réunit un peu les autres têtes brûlées de sa classe et ensemble, elle forme rapidement la petite bande de copines qu'elle va appeler sa bande de pirates et... Toute cette bande refuse de se conformer au rôle des adolescentes, jeunes femmes, slash femmes traditionnelles comme leur propre maman, et en criant sur tous les toits qu'elles refusent le mariage traditionnel. Donc à leur âge et dans la société japonaise de l'époque, c'est quand même assez osé, on va dire. Après le lycée, Haru, elle n'a aucune difficulté à l'école, donc elle va demander à aller tout naturellement à l'université. Jusqu'alors... ses parents ne lui avaient pas dit grand-chose sur l'école. On va dire qu'ils lui avaient donné une éducation plutôt stricte et qu'elle avait le droit d'aller à l'école pour un peu se développer, comme les autres enfants. Et puis, comme elle avait des bonnes notes, ses parents étaient même plutôt fiers d'elle. Mais là, on va avoir un petit problème. Parce que jusqu'au lycée, apprendre l'étape de multiplication et un bout de l'histoire du Japon, c'est super. Mais à la fac, on parle d'éducation un peu plus large où on commence à avoir des opinions. sur les choses telles que la politique et la géographie. Et trop d'apprentissage sur ces sujets pour une femme, ça peut vite être très mal vu. En effet, jusque-là, on va dire qu'au collège, en plus des tables de multiplication, etc., on pouvait aussi apprendre un peu quelques petits messages de propagande par-ci par-là sur les rôles genrés et sur la grandeur de son pays. À la fac, on va plutôt réfléchir, construire sa pensée critique, organiser ses pensées et travailler sur des sujets de fond. Et aux yeux du père de Haru, c'est vraiment pas fait pour la femme japonaise digne de ce nom et donc il va refuser à sa fille l'entrée à l'université. Mais Haru, c'est quelqu'un qui a la tête dure, elle a très envie d'apprendre, donc elle va quand même s'inscrire en Tsum Tsum malgré l'interdiction de son père. Il va finir par l'apprendre et face à l'obstination de sa fille, il va céder en acceptant son inscription mais en lui demandant de changer de parcours pour un parcours un peu plus traditionnel en termes d'enseignement. Et donc, c'est fini pour les sciences et la littérature que souhaitait étudier Haru, qui va se retrouver à l'université féminine du Japon. Là-bas, on enseigne principalement à des veuves, à d'anciennes professeurs, à des femmes mariées qui vivent à la campagne. Bref, des femmes un peu têtues sur les études, un petit peu en dehors de la ville, en dehors de la société active, à qui on ne sait pas trop quoi donner, où on ne sait pas trop où les envoyer. et qu'on va les placer du coup dans ces fosses. universités chrétiennes qui ont été souvent créées par des missionnaires. D'ailleurs, les études qu'on fait là-bas ne sont pas notées. Il n'y a même pas d'examen à passer à la fin. Les livres sont interdits. Donc, imaginez bien qu'une université où les livres sont interdits, l'objectif est quand même plutôt clair. Et c'est tout simplement pour éviter aux femmes d'avoir la mauvaise idée de s'éduquer par elles-mêmes. Et donc vu que ces universités sont quand même chrétiennes avant tout, on y apprend aussi des bonnes valeurs bien religieuses et donc des bonnes valeurs de rôle genré. Dans cet établissement, Haru aura droit à quelques cours de droit et de chimie, mais surtout beaucoup de cours qu'on va appeler les cours pour les femmes, et donc qui sont des cours de couture, des cours de cuisine, tout pour être la bonne épouse à la sortie de l'établissement. Cela dit, et quand même pour un peu donner l'illusion, d'être dans une vraie université, à la fin des études, on demandait aux étudiantes de rendre un genre de mémoire pour valider leur parcours. Bon, sauf que ce mémoire, il ne portait pas sur la géopolitique du Japon, mais plutôt sur les bonnes valeurs qui font une bonne épouse et une bonne mère. Donc même là, c'était un petit peu perdu d'avance. Haru ne va évidemment pas se plaire dans cet établissement. Elle va sécher la plupart des cours et elle ne rendra pas un mémoire dans les conditions attendues puisqu'elle rendra un travail complètement hors sujet. sur le sens de la vie, sur la philo et sur un mouvement un petit peu sympa qu'elle vient de découvrir et qui lui plaît bien, le bouddhisme. Donc, rendre un mémoire sur le bouddhisme et sur le sens de la vie dans une université où on vous apprend à être une bonne maman, on va dire que ça passe un peu moyen. En fait, ces études qui sont faites pour devenir la parfaite épouse, ça va l'emmener dans une direction complètement opposée. Vous savez, il y a un peu des gens qui réagissent soit par mimétisme, enfin on va dire... soit qui adoptent directement les choses, soit qui vont foncer complètement dans le mur opposé. Et Haru, elle va faire partie de cette deuxième catégorie de personnes. Et par instinct de rébellion un peu contre ses valeurs, elle va se plonger assez vite dans les travaux d'hommes et de femmes qui vont défendre justement les droits des femmes. En 1906, elle obtient quand même son diplôme et elle retourne chez ses parents dans le but de devenir sténographe. Elle va vivre un peu chez ses parents, prendre des cours d'anglais, travailler finalement comme sténographe et se rapprocher en parallèle d'un Cercle littéraire. Dans ce cercle littéraire, il y a un homme très important dans la vie d'Aru qui s'appelle Morita Soe. C'est un homme beaucoup plus âgé, déjà marié, mais avec qui elle aura une relation un petit peu passionnée, passionnelle. fusionnelle, on ne sait pas trop, mais en tout cas, ce qu'on sait, c'est que ce sera assez intense pour qu'elle s'enfuit avec lui à 24 ans. Ils vont vite se faire griller et être retrouvés par la police et ça va être un très gros scandale pour Haru et surtout pour son père qui, je vous le rappelle, est un haut fonctionnaire. Après avoir été retrouvé par la police et ramené gentiment à la maison, un an plus tard, Haru va fonder le journal Saito. D'ailleurs, c'est intéressant parce que c'est sa mère qui va couvrir les frais d'impression du premier numéro. Saito, pour ce journal, c'est la traduction de Blue Stalking qui fait référence en fait à un mouvement littéraire de femmes du 18ème qui était un mouvement non conforme et qui revendiquait l'égalité. Donc la couleur du journal est annoncée. Pour ce journal, elle va prendre un pseudonyme qui est donc le nom que je vous ai annoncé en début d'épisode, Raisho Hiratsuka. Ça peut vouloir dire deux choses. Raisho Hiratsuka en japonais, ça peut vouloir dire oiseau tonnerre ou Loi des neiges. Voilà. Ce qui est le plus connu sur ce journal, c'est la première ligne du premier numéro, qui est « Au début, la femme était véritablement le soleil, une personne authentique. Elle est désormais la lune, une lune blafarde et maladive, dépendante d'une autre, reflétant l'éclat d'une autre. » Donc là, encore une fois, vous comprenez rapidement où est-ce que le journal va aller. Le magazine slash journal aborde des problématiques jamais vues pour la société japonaise de l'époque, à savoir La sexualité, la chasteté, l'avortement. Et en parallèle, Raichu commence à vivre ouvertement une liaison avec un amant plus jeune qu'elle, un artiste du nom de Hiroshi Okumura, avec qui elle aura deux enfants hors mariage. Donc, sa vie a pris un virage attendu quand vous écoutez l'épisode, mais complètement inattendu pour une femme japonaise de l'époque. Avec des thèmes choquants comme l'avortement et la sexualité, vous vous en doutez, mais le magazine va connaître de nombreuses censures au Japon. Ça va vite ! quitte souler Haru, qu'on lui mette autant de bâtons dans les roues, et elle va finalement décider de se retirer de la rédaction en 1915. Et même si une autre femme du nom de Noe Ito, une anarchiste, autrice et féminine japonaise, va tenter de reprendre le journal pour continuer à le faire vivre, ça va tomber un petit peu dans l'oubli. Donc ce journal, c'est le premier et le plus gros pas d'Haru. dans son féminisme, puisque c'est vraiment un canal concret qu'elle va lancer après avoir vécu dans une famille très traditionnelle et avoir suivi des études qui lui ont profondément confirmé le fait qu'elle n'était pas du tout en accord avec la façon dont on traitait les femmes et avec ce qu'on attendait des femmes dans la société japonaise du XXe. Mais malgré le fait qu'elle se retire de la rédaction parce qu'elle en a marre, quand on lui censure tous ses articles, elle ne va pas s'arrêter là. Le Saito, c'était donc sa première réaction féministe publique. Mais elle va rester active et très concernée par le droit des femmes japonaises. En 1920, donc cinq ans après s'être retirée du journal, Haru va enquêter sur les conditions des femmes dans les usines textile de Nagoya. Là, vous allez vous dire, c'est très niche. Mais je vais devoir faire une petite parenthèse pour vous expliquer pourquoi c'est important. Nagoya, c'est une grande ville au centre du Japon située dans la préfecture d'Aishi. Dans les années 20, Nagoya, c'est surtout une grande ville industrielle et commerciale qui va baser toute son économie sur trois choses, la céramique, le portuaire et le textile. Le coton, notamment, est un des premiers grands secteurs industriels mécanisés du Japon et c'est un des premiers secteurs où on aura des équipements plus modernes qui vont permettre d'absorber une grande partie de la main-d'œuvre humaine. pour développer les exportations et le commerce international du textile au Japon. Mais même en ayant l'aide de machines, c'était une si grosse partie de leur économie qu'on estimait à peu près entre 6 et 7% la main-d'œuvre industrielle japonaise dédiée au textile, ce qui reste quand même très important. Maintenant, je reboucle avec notre madame du jour. Après le journal, elle va décider de se pencher sur la situation des femmes dans ses nombreuses usines textiles. puisqu'elle représente quand même un sacré pourcentage de la main d'oeuvre au Japon. Et une fois qu'elle va commencer à enquêter dans ces usines, elle va découvrir des conditions de travail absolument catastrophiques avec beaucoup de très jeunes filles au contact de machines hyper dangereuses. Ça va la révolter et elle va fonder l'association de la femme nouvelle en collaboration avec d'autres japonaises féministes de l'époque concernées par cette situation. Sauf que, officiellement, cette association de la femme nouvelle n'a pas le droit d'exister. Et oui, puisque la création d'associations féministes va à l'encontre de la loi japonaise de l'époque qui interdisait aux femmes d'adhérer à des organisations politiques et surtout la tenue de réunions à caractère féministe. Autant vous dire que son assaut, ça va vite pas avoir le droit d'exister. Et c'est là que Haru va comprendre quelque chose de très important. En fait, pour défendre les femmes dans le milieu textile, il va falloir créer cette fameuse association qui porte le combat. Mais pour créer cette association et être un minimum prise au sérieux, il faut que les japonaises aient d'abord le droit de la créer et pour ça, il faut qu'elles puissent voter la création d'une loi qui permet de faire d'ouvrir une association. Et donc pour ça, il faut qu'elle puisse être incluse dans la vie politique. Et donc pour être incluse dans la vie politique, il faut pouvoir faire entendre sa voix. Et là, ça va passer par le nouveau combat que va porter Haru, c'est-à-dire le suffrage féminin pour les japonaises. Le droit de vote des femmes, c'est un sujet très peu abordé au Japon dans les années 20, slash les années 30. Jusqu'à maintenant, de toute façon, c'est simple. Les femmes japonaises, elles étaient interdites de toute activité politique organisée. Ce qui met à l'eau quand même pas mal de façons de faire avancer la société dans le bon sens. Grâce à toutes les actions de Haru et d'une autre japonaise qui s'appelle Ishikawa Fusae, une autre femme féministe, le gouvernement va abroger la loi interdisant aux femmes d'assister à des réunions politiques deux ans plus tard, en 1922. Par contre, elles n'ont toujours pas le droit de vote ni d'élection, simplement d'assister à des réunions politiques organisées. Pour vous retracer rapidos l'histoire du droit de vote des femmes au Japon, en 1925, le Japon adopte le suffrage universel masculin qui permet à tous les hommes de plus de 25 ans de voter. Après une petite montée du militarisme et du nationalisme dans les années 30, plus la seconde guerre mondiale qui passe par là, les mouvements féministes sont sévèrement réprimés et les japonaises n'obtiendront le droit de vote qu'en 1945. Pour vous resituer un petit peu là où on est à Roux, elle commence à s'intéresser à ce combat dans les années 30. Donc on n'y est pas encore au droit de vote des femmes. Dans son combat pour le suffrage des japonaises, Haru va quand même nous faire un petit écart, puisqu'elle va aussi mener une campagne qui sera très controversée, puisqu'elle va proposer l'interdiction aux hommes possédant une maladie vénérienne de se marier. Si je vous donne cet exemple, c'est parce qu'il est parfait pour montrer, encore une fois, qu'on n'est pas tout blanc ou tout noir dans une histoire, qu'on n'est pas tout gentil ou tout méchant, et que c'est pas parce qu'on porte globalement des combats qui font avancer les droits des femmes toute sa vie, qu'on ne peut pas avoir deux, trois petites idées un peu moins coolos sur ce qu'on va appeler la race japonaise et qui est un des autres très grands problèmes du Japon, à savoir l'espèce de truc qu'ils avaient avec ce sang pur japonais, mais qu'ont aussi, par exemple, les Coréens, si on va par là. En fait, Haru, elle avait beau être pour le droit de vote des Japonaises, elle avait quand même ce truc de race japonaise, comme quoi on peut être féministe. et un peu raciste, puisqu'elle pensait que la propagation des maladies vénériennes aurait un effet néfaste sur les japonaises, mais aussi les japonais, qu'on disait de race. Ça, c'est ce qu'on appelle de l'eugénisme, et c'est grosso modo ce qui va désigner les différentes pratiques trouvées au cours de l'histoire pour essayer de sélectionner le patrimoine génétique de l'espèce humaine, et ne conserver finalement que les êtres humains qu'on considère comme étant supérieurs, quoi, en gros. Donc, c'est une pensée qui est très problématique et qui fait aussi partie de cette femme. quand bien même elle a livré des combats très très importants dans les droits des femmes japonaises. Voilà, donc petit à petit, dans les 20 années qui vont suivre cette enquête dans les usines textiles, entre 1930 et 1950, Haru va petit à petit disparaître de la vie publique. Déjà, elle a beau livrer des combats qui sont louables, elle reste criblée de dettes, puisque le militantisme ça paye pas fort au Japon dans les années 30, et elle a un mari qui est très très malade. C'est une femme qui reste engagée, elle... Elle continue d'écrire des conférences, des papiers par-ci par-là, mais elle va se retirer un petit peu, globalement, de ce qu'on pourrait appeler la vie politique. Après la Seconde Guerre mondiale, et grâce à toutes les conférences qu'elle a données et tous les écrits qu'elle a quand même pu produire toute sa vie, elle va devenir un personnage public à travers le Mouvement pour la Paix. Elle devient aussi membre de la Fédération démocratique internationale des femmes. Et en 1950, après le début de la guerre de Corée, elle va voyager avec... plein d'autres activistes pour défendre des valeurs de neutralité et de paix au Japon, mais aussi et plus largement dans le monde. Elle reste quand même assez intéressée par la politique et elle se positionnera toute sa vie en faveur du droit de vote des femmes. Jusqu'à ses 80 ans, on va la retrouver au premier rang des manifestations du mouvement des femmes japonaises. Et c'est en 1971, après une vie d'écrit et de lutte pour la paix et les droits des femmes, que Haru slash Reisho va s'éteindre le stylo à la main. Si on a autant d'informations, sur sa vie, son parcours, ses engagements, c'est qu'elle a laissé derrière elle une très belle biographie qui commence par une phrase pour laquelle elle a été connue et... qui fait partie des premières fois où elle a probablement pris la plume, c'est « Au début, la femme était le soleil » . Aujourd'hui, son travail pour les droits des femmes continue d'inspirer, et pas uniquement au Japon, mais aussi beaucoup plus largement. Je pense que ce qui est intéressant dans son histoire, c'est de noter qu'au final, elle n'a jamais vraiment été seule. Dans un monde où on se divise, beaucoup, et où on a un peu parfois l'impression qu'on mène chacun les combats de notre côté, Haru slash Raichu, je ne sais pas trop comment l'appeler, si c'est avant ou après son éveil féministe, on va dire. Elle nous rappelle que le nombre, mine de rien, ça compte. Et que des combats comme le féminisme, ça reste aussi et avant tout des combats collectifs. Avec d'autres féministes japonaises, parfois américaines, elle a pu lancer des papiers, puisqu'elle n'était pas la seule rédactrice, évidemment. Elle a pu enquêter, elle a pu soulever des problématiques, problématique, elle a pu s'engager dans le droit de vote des femmes. Elle a pu essayer d'avoir une carrière politique, si on peut appeler ça comme ça. Mais toute sa vie, ça reflète un besoin collectif de faire bouger les choses. Et au Japon, à ce moment-là, c'était quand même via la littérature qu'on pouvait espérer toucher un public un peu plus large. Comme je vous l'ai dit, les Japonaises n'auront le droit de vote qu'après la Seconde Guerre mondiale en 1945. Et même si les combats féministes japonais actuels peuvent parfois nous paraître un petit peu en décalage avec les nôtres, ou en tout cas assez éloignée de notre quotidien, c'est ce que je vous disais en début d'épisode, c'est toujours intéressant et inspirant de se rappeler qu'en tant que femme, peu importe finalement que certains pays aient l'impression d'être plus lents en termes d'avancée, déjà il faut se rappeler qu'on ne part pas tous du même point. C'est une des thématiques que j'aimerais bien aborder un jour dans un épisode peut-être un petit peu plus spécial, mais il y a quand même ce côté de, en fait, on ne part pas du même point de départ. Euh... en ce qui concerne l'amélioration de la vie des femmes et de l'obtention de leurs droits. Et le Japon, comme d'autres pays d'Asie, ça a été des pays très ancrés dans le confucianisme notamment. Et le confucianisme, on pourra en reparler, mais c'est quelque chose qui met les femmes dans des cases très précises dont il est difficile de sortir. Et c'est surtout aussi des pays qui ont longtemps été très fermés sur eux-mêmes pour des raisons notamment politiques, d'invasions, etc. Et ça explique aussi pourquoi les petites victoires ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Et je trouve quand même important de se rappeler qu'au bout du compte, on partage quand même tout un point commun, que ce soit nous, moi, vous, les japonaises, peu importe, mais c'est quand même le fait d'être des femmes et d'être globalement victime du patriarcat. Et donc, on est un peu toutes en train de regarder dans la même direction techniquement et que c'est important du coup de se rappeler qu'on se bat pour ses droits certes, mais pour aussi pour le droit de toutes les femmes. Et je pense que c'est ce qui est important de rappeler dans le combat de cette femme-là, de Haru. Comprendre ce qui se passe dans d'autres pays, dans d'autres cultures, dans d'autres époques aussi, ça ne peut, à mon sens, qu'améliorer la situation pour toutes et tous, d'ailleurs. Voilà. Si le travail de... En tout cas, si la vie de Haru slash de Raisho Hiratsuka vous intéresse, déjà, il y a sa biographie. qui est probablement connu et disponible. Et il y a tout plein d'articles et de vidéos en ligne sur elle qui peuvent vous permettre aussi de mettre un visage sur le nom et d'en savoir un petit peu plus sur la société japonaise du XXe. Voilà, donc on commence un petit peu dans Mesdames à tenter des portraits, on va dire, plus worldwide. Donc j'espère que ça vous aura plu. Et puis on se retrouve très vite dans un prochain épisode de Mesdames. Salut !

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Description

Au Japon du début du XXᵉ siècle, où les femmes n’avaient ni voix ni place dans la sphère publique, une jeune fille au tempérament indomptable ose dire non. Née Haru, devenue Hiratsuka Raichō, elle fonde le premier journal féministe japonais, revendique la liberté sexuelle et s’engage pour le droit de vote des femmes.
Dans cet épisode, on plonge dans le parcours de cette journaliste et penseuse avant-gardiste, entre rébellion intime, luttes collectives et contradictions d’une époque.
De Tokyo à Nagoya, du Seitō à la Fédération démocratique des femmes, Raichō incarne la force tranquille d’un féminisme qui cherche déjà à faire briller à nouveau le soleil des femmes. ☀️


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La bise.




Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous pouvez me appeler une pute si vous voulez, c'est bon, je n'en ai pas vraiment peur. On a le droit de choisir avec qui on a le sexe et on a le droit de dire non. Vous êtes en train de vous effrayer des femmes et de vous demander. Si ce n'était pas moi, qui ? Si ce n'était pas maintenant, quand ? Accepter que vous soyez une femme comme raison pour faire ou ne faire rien. Ne silenciez pas cette voix. Déclarons en l'air, c'est ce que je veux. Faire une révolution de désir. Je crois que les femmes peuvent apporter beaucoup à notre société. Maintenant qu'elles ont le sentiment qu'elles ont un rôle à jouer, elles peuvent pouvoir épanouir leur personnalité comme elles le souhaitent. Bonjour, bonsoir à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Mesdames. Aujourd'hui, on va encore voyager, vous et moi, n'est-ce pas ? C'est super. Dans un pays où je n'ai pas encore eu la chance d'aller, mais qui me fascine depuis que je suis ado, comme beaucoup d'ados nés dans les années 90, je pense. On a tous peut-être eu notre période Japon-mania, puisque c'est de ce pays dont on va parler aujourd'hui. Bon, après, moi, ça a vite été remplacé par la Corée, une fois que je suis arrivée Peut-être fin collège, début lycée, mais j'ai toujours été un peu la weeboss du coin avec les mangas, les animés, etc. Bon, évidemment, quand j'ai vieilli, je me suis intéressée à un peu plus de choses plus larges, on va dire. J'ai aussi une de mes très proches amies qui vit au Japon et qui est mariée, etc. Depuis un petit temps maintenant. Donc, c'est un pays que j'aimerais beaucoup visiter un jour. et c'est un pays aussi qui est quand même... plutôt connue pour pas être hyper en avance sur les droits des femmes. Non pas qu'il n'y ait aucune avancée, mais on est quand même dans un pays qui est assez traditionnaliste, j'ai envie de dire, je ne sais pas si c'est le bon terme, qui est assez conservateur aussi quand même, et où il y a des attentes très fortes, une pression très forte envers les femmes, que ce soit au niveau de la maternité, que ce soit dans le monde du travail. Et du coup, je me suis demandé s'il y avait quand même aussi des figures féministes féministe dans un pays où il y a autant de pression envers les femmes. Et, surprise, surprise, il y en a ! Et donc aujourd'hui, on va parler d'une journaliste féministe libertaire du Japon du début du XXe siècle. Donc ça va permettre aussi, voilà, d'avoir un peu plus de data sur un personnage féministe, enfin, une personnalité féministe emblématique du Japon. On va parler de Hiratsuka Raisho, s'appelle en réalité Haru, et elle est née en 1886 à Tokyo. Elle est la plus jeune de deux sœurs au sein d'une famille plutôt bourgeoise, avec une mère au foyer, ancienne danseuse et musicienne, très ancrée dans les valeurs traditionnelles du Japon de l'époque, et un père qu'on pourrait aujourd'hui appeler un self-made man. C'était un ancien samouraï devenu haut fonctionnaire. Il a un peu gravi les échelons tout seul à la force de ses gros bras, si vous voulez. C'était un homme qui tenait son foyer d'une main de fer, puisque la jeune Haru a rapidement reçu une éducation très stricte. de la part de ses parents et surtout de la part de son père. D'ailleurs, si la mère d'Aru n'était plus chanteuse ni danseuse à partir de la naissance de ses enfants, c'est bien parce que son mari lui avait quand même formellement interdit. Par contre, à force de voyager pour son travail, le père d'Aru parlait très bien l'allemand et il avait une vision assez particulière de l'Occident à une époque où le Japon était très fermé sur le monde extérieur. Cette connaissance, ça lui a permis de donner une éducation plus particulière, plus singulière à ses enfants. en les envoyant à l'école très tôt, en tout cas très tôt pour l'époque au Japon, et en les habillant dans des styles beaucoup plus occidentaux que les enfants japonais classiques. C'était donc une éducation quand même assez stricte, mais avec une espèce d'ouverture sur le monde, c'est assez particulier pour l'époque. La petite Haru va grandir avec une particularité physique. Elle a des cordes vocales naturellement plus faibles que la moyenne, et elle ne peut donc pas lever la voix très très fort. On va le voir. au fur et à mesure de l'épisode, mais c'est plutôt marrant d'imaginer ça de la part d'une femme qui va littéralement se faire entendre pour des positions assez radicales sur les droits des femmes dans une société japonaise ultra conservatrice. La petite Haru est aussi plutôt bonne élève. Pas très étonnant, on va dire, vu l'éducation du daron. Elle est entourée d'énormément de femmes, dont sa grand-mère de qui elle est très proche. Elle développe un sacré caractère d'ailleurs, à tel point qu'on l'appellera le garçon manqué de la famille. Très vite, elle va aussi se sentir en décalage par rapport à sa sœur. mais aussi par rapport à tous les autres enfants, toutes les autres enfants et adolescentes japonaises de son entourage. C'est une petite fille qui s'ennuie, elle prête pas trop d'importance à son apparence, ni aux attentes que sa famille pourrait et a eues d'elle en tant que femme japonaise. À l'école, elle réunit un peu les autres têtes brûlées de sa classe et ensemble, elle forme rapidement la petite bande de copines qu'elle va appeler sa bande de pirates et... Toute cette bande refuse de se conformer au rôle des adolescentes, jeunes femmes, slash femmes traditionnelles comme leur propre maman, et en criant sur tous les toits qu'elles refusent le mariage traditionnel. Donc à leur âge et dans la société japonaise de l'époque, c'est quand même assez osé, on va dire. Après le lycée, Haru, elle n'a aucune difficulté à l'école, donc elle va demander à aller tout naturellement à l'université. Jusqu'alors... ses parents ne lui avaient pas dit grand-chose sur l'école. On va dire qu'ils lui avaient donné une éducation plutôt stricte et qu'elle avait le droit d'aller à l'école pour un peu se développer, comme les autres enfants. Et puis, comme elle avait des bonnes notes, ses parents étaient même plutôt fiers d'elle. Mais là, on va avoir un petit problème. Parce que jusqu'au lycée, apprendre l'étape de multiplication et un bout de l'histoire du Japon, c'est super. Mais à la fac, on parle d'éducation un peu plus large où on commence à avoir des opinions. sur les choses telles que la politique et la géographie. Et trop d'apprentissage sur ces sujets pour une femme, ça peut vite être très mal vu. En effet, jusque-là, on va dire qu'au collège, en plus des tables de multiplication, etc., on pouvait aussi apprendre un peu quelques petits messages de propagande par-ci par-là sur les rôles genrés et sur la grandeur de son pays. À la fac, on va plutôt réfléchir, construire sa pensée critique, organiser ses pensées et travailler sur des sujets de fond. Et aux yeux du père de Haru, c'est vraiment pas fait pour la femme japonaise digne de ce nom et donc il va refuser à sa fille l'entrée à l'université. Mais Haru, c'est quelqu'un qui a la tête dure, elle a très envie d'apprendre, donc elle va quand même s'inscrire en Tsum Tsum malgré l'interdiction de son père. Il va finir par l'apprendre et face à l'obstination de sa fille, il va céder en acceptant son inscription mais en lui demandant de changer de parcours pour un parcours un peu plus traditionnel en termes d'enseignement. Et donc, c'est fini pour les sciences et la littérature que souhaitait étudier Haru, qui va se retrouver à l'université féminine du Japon. Là-bas, on enseigne principalement à des veuves, à d'anciennes professeurs, à des femmes mariées qui vivent à la campagne. Bref, des femmes un peu têtues sur les études, un petit peu en dehors de la ville, en dehors de la société active, à qui on ne sait pas trop quoi donner, où on ne sait pas trop où les envoyer. et qu'on va les placer du coup dans ces fosses. universités chrétiennes qui ont été souvent créées par des missionnaires. D'ailleurs, les études qu'on fait là-bas ne sont pas notées. Il n'y a même pas d'examen à passer à la fin. Les livres sont interdits. Donc, imaginez bien qu'une université où les livres sont interdits, l'objectif est quand même plutôt clair. Et c'est tout simplement pour éviter aux femmes d'avoir la mauvaise idée de s'éduquer par elles-mêmes. Et donc vu que ces universités sont quand même chrétiennes avant tout, on y apprend aussi des bonnes valeurs bien religieuses et donc des bonnes valeurs de rôle genré. Dans cet établissement, Haru aura droit à quelques cours de droit et de chimie, mais surtout beaucoup de cours qu'on va appeler les cours pour les femmes, et donc qui sont des cours de couture, des cours de cuisine, tout pour être la bonne épouse à la sortie de l'établissement. Cela dit, et quand même pour un peu donner l'illusion, d'être dans une vraie université, à la fin des études, on demandait aux étudiantes de rendre un genre de mémoire pour valider leur parcours. Bon, sauf que ce mémoire, il ne portait pas sur la géopolitique du Japon, mais plutôt sur les bonnes valeurs qui font une bonne épouse et une bonne mère. Donc même là, c'était un petit peu perdu d'avance. Haru ne va évidemment pas se plaire dans cet établissement. Elle va sécher la plupart des cours et elle ne rendra pas un mémoire dans les conditions attendues puisqu'elle rendra un travail complètement hors sujet. sur le sens de la vie, sur la philo et sur un mouvement un petit peu sympa qu'elle vient de découvrir et qui lui plaît bien, le bouddhisme. Donc, rendre un mémoire sur le bouddhisme et sur le sens de la vie dans une université où on vous apprend à être une bonne maman, on va dire que ça passe un peu moyen. En fait, ces études qui sont faites pour devenir la parfaite épouse, ça va l'emmener dans une direction complètement opposée. Vous savez, il y a un peu des gens qui réagissent soit par mimétisme, enfin on va dire... soit qui adoptent directement les choses, soit qui vont foncer complètement dans le mur opposé. Et Haru, elle va faire partie de cette deuxième catégorie de personnes. Et par instinct de rébellion un peu contre ses valeurs, elle va se plonger assez vite dans les travaux d'hommes et de femmes qui vont défendre justement les droits des femmes. En 1906, elle obtient quand même son diplôme et elle retourne chez ses parents dans le but de devenir sténographe. Elle va vivre un peu chez ses parents, prendre des cours d'anglais, travailler finalement comme sténographe et se rapprocher en parallèle d'un Cercle littéraire. Dans ce cercle littéraire, il y a un homme très important dans la vie d'Aru qui s'appelle Morita Soe. C'est un homme beaucoup plus âgé, déjà marié, mais avec qui elle aura une relation un petit peu passionnée, passionnelle. fusionnelle, on ne sait pas trop, mais en tout cas, ce qu'on sait, c'est que ce sera assez intense pour qu'elle s'enfuit avec lui à 24 ans. Ils vont vite se faire griller et être retrouvés par la police et ça va être un très gros scandale pour Haru et surtout pour son père qui, je vous le rappelle, est un haut fonctionnaire. Après avoir été retrouvé par la police et ramené gentiment à la maison, un an plus tard, Haru va fonder le journal Saito. D'ailleurs, c'est intéressant parce que c'est sa mère qui va couvrir les frais d'impression du premier numéro. Saito, pour ce journal, c'est la traduction de Blue Stalking qui fait référence en fait à un mouvement littéraire de femmes du 18ème qui était un mouvement non conforme et qui revendiquait l'égalité. Donc la couleur du journal est annoncée. Pour ce journal, elle va prendre un pseudonyme qui est donc le nom que je vous ai annoncé en début d'épisode, Raisho Hiratsuka. Ça peut vouloir dire deux choses. Raisho Hiratsuka en japonais, ça peut vouloir dire oiseau tonnerre ou Loi des neiges. Voilà. Ce qui est le plus connu sur ce journal, c'est la première ligne du premier numéro, qui est « Au début, la femme était véritablement le soleil, une personne authentique. Elle est désormais la lune, une lune blafarde et maladive, dépendante d'une autre, reflétant l'éclat d'une autre. » Donc là, encore une fois, vous comprenez rapidement où est-ce que le journal va aller. Le magazine slash journal aborde des problématiques jamais vues pour la société japonaise de l'époque, à savoir La sexualité, la chasteté, l'avortement. Et en parallèle, Raichu commence à vivre ouvertement une liaison avec un amant plus jeune qu'elle, un artiste du nom de Hiroshi Okumura, avec qui elle aura deux enfants hors mariage. Donc, sa vie a pris un virage attendu quand vous écoutez l'épisode, mais complètement inattendu pour une femme japonaise de l'époque. Avec des thèmes choquants comme l'avortement et la sexualité, vous vous en doutez, mais le magazine va connaître de nombreuses censures au Japon. Ça va vite ! quitte souler Haru, qu'on lui mette autant de bâtons dans les roues, et elle va finalement décider de se retirer de la rédaction en 1915. Et même si une autre femme du nom de Noe Ito, une anarchiste, autrice et féminine japonaise, va tenter de reprendre le journal pour continuer à le faire vivre, ça va tomber un petit peu dans l'oubli. Donc ce journal, c'est le premier et le plus gros pas d'Haru. dans son féminisme, puisque c'est vraiment un canal concret qu'elle va lancer après avoir vécu dans une famille très traditionnelle et avoir suivi des études qui lui ont profondément confirmé le fait qu'elle n'était pas du tout en accord avec la façon dont on traitait les femmes et avec ce qu'on attendait des femmes dans la société japonaise du XXe. Mais malgré le fait qu'elle se retire de la rédaction parce qu'elle en a marre, quand on lui censure tous ses articles, elle ne va pas s'arrêter là. Le Saito, c'était donc sa première réaction féministe publique. Mais elle va rester active et très concernée par le droit des femmes japonaises. En 1920, donc cinq ans après s'être retirée du journal, Haru va enquêter sur les conditions des femmes dans les usines textile de Nagoya. Là, vous allez vous dire, c'est très niche. Mais je vais devoir faire une petite parenthèse pour vous expliquer pourquoi c'est important. Nagoya, c'est une grande ville au centre du Japon située dans la préfecture d'Aishi. Dans les années 20, Nagoya, c'est surtout une grande ville industrielle et commerciale qui va baser toute son économie sur trois choses, la céramique, le portuaire et le textile. Le coton, notamment, est un des premiers grands secteurs industriels mécanisés du Japon et c'est un des premiers secteurs où on aura des équipements plus modernes qui vont permettre d'absorber une grande partie de la main-d'œuvre humaine. pour développer les exportations et le commerce international du textile au Japon. Mais même en ayant l'aide de machines, c'était une si grosse partie de leur économie qu'on estimait à peu près entre 6 et 7% la main-d'œuvre industrielle japonaise dédiée au textile, ce qui reste quand même très important. Maintenant, je reboucle avec notre madame du jour. Après le journal, elle va décider de se pencher sur la situation des femmes dans ses nombreuses usines textiles. puisqu'elle représente quand même un sacré pourcentage de la main d'oeuvre au Japon. Et une fois qu'elle va commencer à enquêter dans ces usines, elle va découvrir des conditions de travail absolument catastrophiques avec beaucoup de très jeunes filles au contact de machines hyper dangereuses. Ça va la révolter et elle va fonder l'association de la femme nouvelle en collaboration avec d'autres japonaises féministes de l'époque concernées par cette situation. Sauf que, officiellement, cette association de la femme nouvelle n'a pas le droit d'exister. Et oui, puisque la création d'associations féministes va à l'encontre de la loi japonaise de l'époque qui interdisait aux femmes d'adhérer à des organisations politiques et surtout la tenue de réunions à caractère féministe. Autant vous dire que son assaut, ça va vite pas avoir le droit d'exister. Et c'est là que Haru va comprendre quelque chose de très important. En fait, pour défendre les femmes dans le milieu textile, il va falloir créer cette fameuse association qui porte le combat. Mais pour créer cette association et être un minimum prise au sérieux, il faut que les japonaises aient d'abord le droit de la créer et pour ça, il faut qu'elles puissent voter la création d'une loi qui permet de faire d'ouvrir une association. Et donc pour ça, il faut qu'elle puisse être incluse dans la vie politique. Et donc pour être incluse dans la vie politique, il faut pouvoir faire entendre sa voix. Et là, ça va passer par le nouveau combat que va porter Haru, c'est-à-dire le suffrage féminin pour les japonaises. Le droit de vote des femmes, c'est un sujet très peu abordé au Japon dans les années 20, slash les années 30. Jusqu'à maintenant, de toute façon, c'est simple. Les femmes japonaises, elles étaient interdites de toute activité politique organisée. Ce qui met à l'eau quand même pas mal de façons de faire avancer la société dans le bon sens. Grâce à toutes les actions de Haru et d'une autre japonaise qui s'appelle Ishikawa Fusae, une autre femme féministe, le gouvernement va abroger la loi interdisant aux femmes d'assister à des réunions politiques deux ans plus tard, en 1922. Par contre, elles n'ont toujours pas le droit de vote ni d'élection, simplement d'assister à des réunions politiques organisées. Pour vous retracer rapidos l'histoire du droit de vote des femmes au Japon, en 1925, le Japon adopte le suffrage universel masculin qui permet à tous les hommes de plus de 25 ans de voter. Après une petite montée du militarisme et du nationalisme dans les années 30, plus la seconde guerre mondiale qui passe par là, les mouvements féministes sont sévèrement réprimés et les japonaises n'obtiendront le droit de vote qu'en 1945. Pour vous resituer un petit peu là où on est à Roux, elle commence à s'intéresser à ce combat dans les années 30. Donc on n'y est pas encore au droit de vote des femmes. Dans son combat pour le suffrage des japonaises, Haru va quand même nous faire un petit écart, puisqu'elle va aussi mener une campagne qui sera très controversée, puisqu'elle va proposer l'interdiction aux hommes possédant une maladie vénérienne de se marier. Si je vous donne cet exemple, c'est parce qu'il est parfait pour montrer, encore une fois, qu'on n'est pas tout blanc ou tout noir dans une histoire, qu'on n'est pas tout gentil ou tout méchant, et que c'est pas parce qu'on porte globalement des combats qui font avancer les droits des femmes toute sa vie, qu'on ne peut pas avoir deux, trois petites idées un peu moins coolos sur ce qu'on va appeler la race japonaise et qui est un des autres très grands problèmes du Japon, à savoir l'espèce de truc qu'ils avaient avec ce sang pur japonais, mais qu'ont aussi, par exemple, les Coréens, si on va par là. En fait, Haru, elle avait beau être pour le droit de vote des Japonaises, elle avait quand même ce truc de race japonaise, comme quoi on peut être féministe. et un peu raciste, puisqu'elle pensait que la propagation des maladies vénériennes aurait un effet néfaste sur les japonaises, mais aussi les japonais, qu'on disait de race. Ça, c'est ce qu'on appelle de l'eugénisme, et c'est grosso modo ce qui va désigner les différentes pratiques trouvées au cours de l'histoire pour essayer de sélectionner le patrimoine génétique de l'espèce humaine, et ne conserver finalement que les êtres humains qu'on considère comme étant supérieurs, quoi, en gros. Donc, c'est une pensée qui est très problématique et qui fait aussi partie de cette femme. quand bien même elle a livré des combats très très importants dans les droits des femmes japonaises. Voilà, donc petit à petit, dans les 20 années qui vont suivre cette enquête dans les usines textiles, entre 1930 et 1950, Haru va petit à petit disparaître de la vie publique. Déjà, elle a beau livrer des combats qui sont louables, elle reste criblée de dettes, puisque le militantisme ça paye pas fort au Japon dans les années 30, et elle a un mari qui est très très malade. C'est une femme qui reste engagée, elle... Elle continue d'écrire des conférences, des papiers par-ci par-là, mais elle va se retirer un petit peu, globalement, de ce qu'on pourrait appeler la vie politique. Après la Seconde Guerre mondiale, et grâce à toutes les conférences qu'elle a données et tous les écrits qu'elle a quand même pu produire toute sa vie, elle va devenir un personnage public à travers le Mouvement pour la Paix. Elle devient aussi membre de la Fédération démocratique internationale des femmes. Et en 1950, après le début de la guerre de Corée, elle va voyager avec... plein d'autres activistes pour défendre des valeurs de neutralité et de paix au Japon, mais aussi et plus largement dans le monde. Elle reste quand même assez intéressée par la politique et elle se positionnera toute sa vie en faveur du droit de vote des femmes. Jusqu'à ses 80 ans, on va la retrouver au premier rang des manifestations du mouvement des femmes japonaises. Et c'est en 1971, après une vie d'écrit et de lutte pour la paix et les droits des femmes, que Haru slash Reisho va s'éteindre le stylo à la main. Si on a autant d'informations, sur sa vie, son parcours, ses engagements, c'est qu'elle a laissé derrière elle une très belle biographie qui commence par une phrase pour laquelle elle a été connue et... qui fait partie des premières fois où elle a probablement pris la plume, c'est « Au début, la femme était le soleil » . Aujourd'hui, son travail pour les droits des femmes continue d'inspirer, et pas uniquement au Japon, mais aussi beaucoup plus largement. Je pense que ce qui est intéressant dans son histoire, c'est de noter qu'au final, elle n'a jamais vraiment été seule. Dans un monde où on se divise, beaucoup, et où on a un peu parfois l'impression qu'on mène chacun les combats de notre côté, Haru slash Raichu, je ne sais pas trop comment l'appeler, si c'est avant ou après son éveil féministe, on va dire. Elle nous rappelle que le nombre, mine de rien, ça compte. Et que des combats comme le féminisme, ça reste aussi et avant tout des combats collectifs. Avec d'autres féministes japonaises, parfois américaines, elle a pu lancer des papiers, puisqu'elle n'était pas la seule rédactrice, évidemment. Elle a pu enquêter, elle a pu soulever des problématiques, problématique, elle a pu s'engager dans le droit de vote des femmes. Elle a pu essayer d'avoir une carrière politique, si on peut appeler ça comme ça. Mais toute sa vie, ça reflète un besoin collectif de faire bouger les choses. Et au Japon, à ce moment-là, c'était quand même via la littérature qu'on pouvait espérer toucher un public un peu plus large. Comme je vous l'ai dit, les Japonaises n'auront le droit de vote qu'après la Seconde Guerre mondiale en 1945. Et même si les combats féministes japonais actuels peuvent parfois nous paraître un petit peu en décalage avec les nôtres, ou en tout cas assez éloignée de notre quotidien, c'est ce que je vous disais en début d'épisode, c'est toujours intéressant et inspirant de se rappeler qu'en tant que femme, peu importe finalement que certains pays aient l'impression d'être plus lents en termes d'avancée, déjà il faut se rappeler qu'on ne part pas tous du même point. C'est une des thématiques que j'aimerais bien aborder un jour dans un épisode peut-être un petit peu plus spécial, mais il y a quand même ce côté de, en fait, on ne part pas du même point de départ. Euh... en ce qui concerne l'amélioration de la vie des femmes et de l'obtention de leurs droits. Et le Japon, comme d'autres pays d'Asie, ça a été des pays très ancrés dans le confucianisme notamment. Et le confucianisme, on pourra en reparler, mais c'est quelque chose qui met les femmes dans des cases très précises dont il est difficile de sortir. Et c'est surtout aussi des pays qui ont longtemps été très fermés sur eux-mêmes pour des raisons notamment politiques, d'invasions, etc. Et ça explique aussi pourquoi les petites victoires ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Et je trouve quand même important de se rappeler qu'au bout du compte, on partage quand même tout un point commun, que ce soit nous, moi, vous, les japonaises, peu importe, mais c'est quand même le fait d'être des femmes et d'être globalement victime du patriarcat. Et donc, on est un peu toutes en train de regarder dans la même direction techniquement et que c'est important du coup de se rappeler qu'on se bat pour ses droits certes, mais pour aussi pour le droit de toutes les femmes. Et je pense que c'est ce qui est important de rappeler dans le combat de cette femme-là, de Haru. Comprendre ce qui se passe dans d'autres pays, dans d'autres cultures, dans d'autres époques aussi, ça ne peut, à mon sens, qu'améliorer la situation pour toutes et tous, d'ailleurs. Voilà. Si le travail de... En tout cas, si la vie de Haru slash de Raisho Hiratsuka vous intéresse, déjà, il y a sa biographie. qui est probablement connu et disponible. Et il y a tout plein d'articles et de vidéos en ligne sur elle qui peuvent vous permettre aussi de mettre un visage sur le nom et d'en savoir un petit peu plus sur la société japonaise du XXe. Voilà, donc on commence un petit peu dans Mesdames à tenter des portraits, on va dire, plus worldwide. Donc j'espère que ça vous aura plu. Et puis on se retrouve très vite dans un prochain épisode de Mesdames. Salut !

Description

Au Japon du début du XXᵉ siècle, où les femmes n’avaient ni voix ni place dans la sphère publique, une jeune fille au tempérament indomptable ose dire non. Née Haru, devenue Hiratsuka Raichō, elle fonde le premier journal féministe japonais, revendique la liberté sexuelle et s’engage pour le droit de vote des femmes.
Dans cet épisode, on plonge dans le parcours de cette journaliste et penseuse avant-gardiste, entre rébellion intime, luttes collectives et contradictions d’une époque.
De Tokyo à Nagoya, du Seitō à la Fédération démocratique des femmes, Raichō incarne la force tranquille d’un féminisme qui cherche déjà à faire briller à nouveau le soleil des femmes. ☀️


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La bise.




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Transcription

  • Speaker #0

    Vous pouvez me appeler une pute si vous voulez, c'est bon, je n'en ai pas vraiment peur. On a le droit de choisir avec qui on a le sexe et on a le droit de dire non. Vous êtes en train de vous effrayer des femmes et de vous demander. Si ce n'était pas moi, qui ? Si ce n'était pas maintenant, quand ? Accepter que vous soyez une femme comme raison pour faire ou ne faire rien. Ne silenciez pas cette voix. Déclarons en l'air, c'est ce que je veux. Faire une révolution de désir. Je crois que les femmes peuvent apporter beaucoup à notre société. Maintenant qu'elles ont le sentiment qu'elles ont un rôle à jouer, elles peuvent pouvoir épanouir leur personnalité comme elles le souhaitent. Bonjour, bonsoir à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Mesdames. Aujourd'hui, on va encore voyager, vous et moi, n'est-ce pas ? C'est super. Dans un pays où je n'ai pas encore eu la chance d'aller, mais qui me fascine depuis que je suis ado, comme beaucoup d'ados nés dans les années 90, je pense. On a tous peut-être eu notre période Japon-mania, puisque c'est de ce pays dont on va parler aujourd'hui. Bon, après, moi, ça a vite été remplacé par la Corée, une fois que je suis arrivée Peut-être fin collège, début lycée, mais j'ai toujours été un peu la weeboss du coin avec les mangas, les animés, etc. Bon, évidemment, quand j'ai vieilli, je me suis intéressée à un peu plus de choses plus larges, on va dire. J'ai aussi une de mes très proches amies qui vit au Japon et qui est mariée, etc. Depuis un petit temps maintenant. Donc, c'est un pays que j'aimerais beaucoup visiter un jour. et c'est un pays aussi qui est quand même... plutôt connue pour pas être hyper en avance sur les droits des femmes. Non pas qu'il n'y ait aucune avancée, mais on est quand même dans un pays qui est assez traditionnaliste, j'ai envie de dire, je ne sais pas si c'est le bon terme, qui est assez conservateur aussi quand même, et où il y a des attentes très fortes, une pression très forte envers les femmes, que ce soit au niveau de la maternité, que ce soit dans le monde du travail. Et du coup, je me suis demandé s'il y avait quand même aussi des figures féministes féministe dans un pays où il y a autant de pression envers les femmes. Et, surprise, surprise, il y en a ! Et donc aujourd'hui, on va parler d'une journaliste féministe libertaire du Japon du début du XXe siècle. Donc ça va permettre aussi, voilà, d'avoir un peu plus de data sur un personnage féministe, enfin, une personnalité féministe emblématique du Japon. On va parler de Hiratsuka Raisho, s'appelle en réalité Haru, et elle est née en 1886 à Tokyo. Elle est la plus jeune de deux sœurs au sein d'une famille plutôt bourgeoise, avec une mère au foyer, ancienne danseuse et musicienne, très ancrée dans les valeurs traditionnelles du Japon de l'époque, et un père qu'on pourrait aujourd'hui appeler un self-made man. C'était un ancien samouraï devenu haut fonctionnaire. Il a un peu gravi les échelons tout seul à la force de ses gros bras, si vous voulez. C'était un homme qui tenait son foyer d'une main de fer, puisque la jeune Haru a rapidement reçu une éducation très stricte. de la part de ses parents et surtout de la part de son père. D'ailleurs, si la mère d'Aru n'était plus chanteuse ni danseuse à partir de la naissance de ses enfants, c'est bien parce que son mari lui avait quand même formellement interdit. Par contre, à force de voyager pour son travail, le père d'Aru parlait très bien l'allemand et il avait une vision assez particulière de l'Occident à une époque où le Japon était très fermé sur le monde extérieur. Cette connaissance, ça lui a permis de donner une éducation plus particulière, plus singulière à ses enfants. en les envoyant à l'école très tôt, en tout cas très tôt pour l'époque au Japon, et en les habillant dans des styles beaucoup plus occidentaux que les enfants japonais classiques. C'était donc une éducation quand même assez stricte, mais avec une espèce d'ouverture sur le monde, c'est assez particulier pour l'époque. La petite Haru va grandir avec une particularité physique. Elle a des cordes vocales naturellement plus faibles que la moyenne, et elle ne peut donc pas lever la voix très très fort. On va le voir. au fur et à mesure de l'épisode, mais c'est plutôt marrant d'imaginer ça de la part d'une femme qui va littéralement se faire entendre pour des positions assez radicales sur les droits des femmes dans une société japonaise ultra conservatrice. La petite Haru est aussi plutôt bonne élève. Pas très étonnant, on va dire, vu l'éducation du daron. Elle est entourée d'énormément de femmes, dont sa grand-mère de qui elle est très proche. Elle développe un sacré caractère d'ailleurs, à tel point qu'on l'appellera le garçon manqué de la famille. Très vite, elle va aussi se sentir en décalage par rapport à sa sœur. mais aussi par rapport à tous les autres enfants, toutes les autres enfants et adolescentes japonaises de son entourage. C'est une petite fille qui s'ennuie, elle prête pas trop d'importance à son apparence, ni aux attentes que sa famille pourrait et a eues d'elle en tant que femme japonaise. À l'école, elle réunit un peu les autres têtes brûlées de sa classe et ensemble, elle forme rapidement la petite bande de copines qu'elle va appeler sa bande de pirates et... Toute cette bande refuse de se conformer au rôle des adolescentes, jeunes femmes, slash femmes traditionnelles comme leur propre maman, et en criant sur tous les toits qu'elles refusent le mariage traditionnel. Donc à leur âge et dans la société japonaise de l'époque, c'est quand même assez osé, on va dire. Après le lycée, Haru, elle n'a aucune difficulté à l'école, donc elle va demander à aller tout naturellement à l'université. Jusqu'alors... ses parents ne lui avaient pas dit grand-chose sur l'école. On va dire qu'ils lui avaient donné une éducation plutôt stricte et qu'elle avait le droit d'aller à l'école pour un peu se développer, comme les autres enfants. Et puis, comme elle avait des bonnes notes, ses parents étaient même plutôt fiers d'elle. Mais là, on va avoir un petit problème. Parce que jusqu'au lycée, apprendre l'étape de multiplication et un bout de l'histoire du Japon, c'est super. Mais à la fac, on parle d'éducation un peu plus large où on commence à avoir des opinions. sur les choses telles que la politique et la géographie. Et trop d'apprentissage sur ces sujets pour une femme, ça peut vite être très mal vu. En effet, jusque-là, on va dire qu'au collège, en plus des tables de multiplication, etc., on pouvait aussi apprendre un peu quelques petits messages de propagande par-ci par-là sur les rôles genrés et sur la grandeur de son pays. À la fac, on va plutôt réfléchir, construire sa pensée critique, organiser ses pensées et travailler sur des sujets de fond. Et aux yeux du père de Haru, c'est vraiment pas fait pour la femme japonaise digne de ce nom et donc il va refuser à sa fille l'entrée à l'université. Mais Haru, c'est quelqu'un qui a la tête dure, elle a très envie d'apprendre, donc elle va quand même s'inscrire en Tsum Tsum malgré l'interdiction de son père. Il va finir par l'apprendre et face à l'obstination de sa fille, il va céder en acceptant son inscription mais en lui demandant de changer de parcours pour un parcours un peu plus traditionnel en termes d'enseignement. Et donc, c'est fini pour les sciences et la littérature que souhaitait étudier Haru, qui va se retrouver à l'université féminine du Japon. Là-bas, on enseigne principalement à des veuves, à d'anciennes professeurs, à des femmes mariées qui vivent à la campagne. Bref, des femmes un peu têtues sur les études, un petit peu en dehors de la ville, en dehors de la société active, à qui on ne sait pas trop quoi donner, où on ne sait pas trop où les envoyer. et qu'on va les placer du coup dans ces fosses. universités chrétiennes qui ont été souvent créées par des missionnaires. D'ailleurs, les études qu'on fait là-bas ne sont pas notées. Il n'y a même pas d'examen à passer à la fin. Les livres sont interdits. Donc, imaginez bien qu'une université où les livres sont interdits, l'objectif est quand même plutôt clair. Et c'est tout simplement pour éviter aux femmes d'avoir la mauvaise idée de s'éduquer par elles-mêmes. Et donc vu que ces universités sont quand même chrétiennes avant tout, on y apprend aussi des bonnes valeurs bien religieuses et donc des bonnes valeurs de rôle genré. Dans cet établissement, Haru aura droit à quelques cours de droit et de chimie, mais surtout beaucoup de cours qu'on va appeler les cours pour les femmes, et donc qui sont des cours de couture, des cours de cuisine, tout pour être la bonne épouse à la sortie de l'établissement. Cela dit, et quand même pour un peu donner l'illusion, d'être dans une vraie université, à la fin des études, on demandait aux étudiantes de rendre un genre de mémoire pour valider leur parcours. Bon, sauf que ce mémoire, il ne portait pas sur la géopolitique du Japon, mais plutôt sur les bonnes valeurs qui font une bonne épouse et une bonne mère. Donc même là, c'était un petit peu perdu d'avance. Haru ne va évidemment pas se plaire dans cet établissement. Elle va sécher la plupart des cours et elle ne rendra pas un mémoire dans les conditions attendues puisqu'elle rendra un travail complètement hors sujet. sur le sens de la vie, sur la philo et sur un mouvement un petit peu sympa qu'elle vient de découvrir et qui lui plaît bien, le bouddhisme. Donc, rendre un mémoire sur le bouddhisme et sur le sens de la vie dans une université où on vous apprend à être une bonne maman, on va dire que ça passe un peu moyen. En fait, ces études qui sont faites pour devenir la parfaite épouse, ça va l'emmener dans une direction complètement opposée. Vous savez, il y a un peu des gens qui réagissent soit par mimétisme, enfin on va dire... soit qui adoptent directement les choses, soit qui vont foncer complètement dans le mur opposé. Et Haru, elle va faire partie de cette deuxième catégorie de personnes. Et par instinct de rébellion un peu contre ses valeurs, elle va se plonger assez vite dans les travaux d'hommes et de femmes qui vont défendre justement les droits des femmes. En 1906, elle obtient quand même son diplôme et elle retourne chez ses parents dans le but de devenir sténographe. Elle va vivre un peu chez ses parents, prendre des cours d'anglais, travailler finalement comme sténographe et se rapprocher en parallèle d'un Cercle littéraire. Dans ce cercle littéraire, il y a un homme très important dans la vie d'Aru qui s'appelle Morita Soe. C'est un homme beaucoup plus âgé, déjà marié, mais avec qui elle aura une relation un petit peu passionnée, passionnelle. fusionnelle, on ne sait pas trop, mais en tout cas, ce qu'on sait, c'est que ce sera assez intense pour qu'elle s'enfuit avec lui à 24 ans. Ils vont vite se faire griller et être retrouvés par la police et ça va être un très gros scandale pour Haru et surtout pour son père qui, je vous le rappelle, est un haut fonctionnaire. Après avoir été retrouvé par la police et ramené gentiment à la maison, un an plus tard, Haru va fonder le journal Saito. D'ailleurs, c'est intéressant parce que c'est sa mère qui va couvrir les frais d'impression du premier numéro. Saito, pour ce journal, c'est la traduction de Blue Stalking qui fait référence en fait à un mouvement littéraire de femmes du 18ème qui était un mouvement non conforme et qui revendiquait l'égalité. Donc la couleur du journal est annoncée. Pour ce journal, elle va prendre un pseudonyme qui est donc le nom que je vous ai annoncé en début d'épisode, Raisho Hiratsuka. Ça peut vouloir dire deux choses. Raisho Hiratsuka en japonais, ça peut vouloir dire oiseau tonnerre ou Loi des neiges. Voilà. Ce qui est le plus connu sur ce journal, c'est la première ligne du premier numéro, qui est « Au début, la femme était véritablement le soleil, une personne authentique. Elle est désormais la lune, une lune blafarde et maladive, dépendante d'une autre, reflétant l'éclat d'une autre. » Donc là, encore une fois, vous comprenez rapidement où est-ce que le journal va aller. Le magazine slash journal aborde des problématiques jamais vues pour la société japonaise de l'époque, à savoir La sexualité, la chasteté, l'avortement. Et en parallèle, Raichu commence à vivre ouvertement une liaison avec un amant plus jeune qu'elle, un artiste du nom de Hiroshi Okumura, avec qui elle aura deux enfants hors mariage. Donc, sa vie a pris un virage attendu quand vous écoutez l'épisode, mais complètement inattendu pour une femme japonaise de l'époque. Avec des thèmes choquants comme l'avortement et la sexualité, vous vous en doutez, mais le magazine va connaître de nombreuses censures au Japon. Ça va vite ! quitte souler Haru, qu'on lui mette autant de bâtons dans les roues, et elle va finalement décider de se retirer de la rédaction en 1915. Et même si une autre femme du nom de Noe Ito, une anarchiste, autrice et féminine japonaise, va tenter de reprendre le journal pour continuer à le faire vivre, ça va tomber un petit peu dans l'oubli. Donc ce journal, c'est le premier et le plus gros pas d'Haru. dans son féminisme, puisque c'est vraiment un canal concret qu'elle va lancer après avoir vécu dans une famille très traditionnelle et avoir suivi des études qui lui ont profondément confirmé le fait qu'elle n'était pas du tout en accord avec la façon dont on traitait les femmes et avec ce qu'on attendait des femmes dans la société japonaise du XXe. Mais malgré le fait qu'elle se retire de la rédaction parce qu'elle en a marre, quand on lui censure tous ses articles, elle ne va pas s'arrêter là. Le Saito, c'était donc sa première réaction féministe publique. Mais elle va rester active et très concernée par le droit des femmes japonaises. En 1920, donc cinq ans après s'être retirée du journal, Haru va enquêter sur les conditions des femmes dans les usines textile de Nagoya. Là, vous allez vous dire, c'est très niche. Mais je vais devoir faire une petite parenthèse pour vous expliquer pourquoi c'est important. Nagoya, c'est une grande ville au centre du Japon située dans la préfecture d'Aishi. Dans les années 20, Nagoya, c'est surtout une grande ville industrielle et commerciale qui va baser toute son économie sur trois choses, la céramique, le portuaire et le textile. Le coton, notamment, est un des premiers grands secteurs industriels mécanisés du Japon et c'est un des premiers secteurs où on aura des équipements plus modernes qui vont permettre d'absorber une grande partie de la main-d'œuvre humaine. pour développer les exportations et le commerce international du textile au Japon. Mais même en ayant l'aide de machines, c'était une si grosse partie de leur économie qu'on estimait à peu près entre 6 et 7% la main-d'œuvre industrielle japonaise dédiée au textile, ce qui reste quand même très important. Maintenant, je reboucle avec notre madame du jour. Après le journal, elle va décider de se pencher sur la situation des femmes dans ses nombreuses usines textiles. puisqu'elle représente quand même un sacré pourcentage de la main d'oeuvre au Japon. Et une fois qu'elle va commencer à enquêter dans ces usines, elle va découvrir des conditions de travail absolument catastrophiques avec beaucoup de très jeunes filles au contact de machines hyper dangereuses. Ça va la révolter et elle va fonder l'association de la femme nouvelle en collaboration avec d'autres japonaises féministes de l'époque concernées par cette situation. Sauf que, officiellement, cette association de la femme nouvelle n'a pas le droit d'exister. Et oui, puisque la création d'associations féministes va à l'encontre de la loi japonaise de l'époque qui interdisait aux femmes d'adhérer à des organisations politiques et surtout la tenue de réunions à caractère féministe. Autant vous dire que son assaut, ça va vite pas avoir le droit d'exister. Et c'est là que Haru va comprendre quelque chose de très important. En fait, pour défendre les femmes dans le milieu textile, il va falloir créer cette fameuse association qui porte le combat. Mais pour créer cette association et être un minimum prise au sérieux, il faut que les japonaises aient d'abord le droit de la créer et pour ça, il faut qu'elles puissent voter la création d'une loi qui permet de faire d'ouvrir une association. Et donc pour ça, il faut qu'elle puisse être incluse dans la vie politique. Et donc pour être incluse dans la vie politique, il faut pouvoir faire entendre sa voix. Et là, ça va passer par le nouveau combat que va porter Haru, c'est-à-dire le suffrage féminin pour les japonaises. Le droit de vote des femmes, c'est un sujet très peu abordé au Japon dans les années 20, slash les années 30. Jusqu'à maintenant, de toute façon, c'est simple. Les femmes japonaises, elles étaient interdites de toute activité politique organisée. Ce qui met à l'eau quand même pas mal de façons de faire avancer la société dans le bon sens. Grâce à toutes les actions de Haru et d'une autre japonaise qui s'appelle Ishikawa Fusae, une autre femme féministe, le gouvernement va abroger la loi interdisant aux femmes d'assister à des réunions politiques deux ans plus tard, en 1922. Par contre, elles n'ont toujours pas le droit de vote ni d'élection, simplement d'assister à des réunions politiques organisées. Pour vous retracer rapidos l'histoire du droit de vote des femmes au Japon, en 1925, le Japon adopte le suffrage universel masculin qui permet à tous les hommes de plus de 25 ans de voter. Après une petite montée du militarisme et du nationalisme dans les années 30, plus la seconde guerre mondiale qui passe par là, les mouvements féministes sont sévèrement réprimés et les japonaises n'obtiendront le droit de vote qu'en 1945. Pour vous resituer un petit peu là où on est à Roux, elle commence à s'intéresser à ce combat dans les années 30. Donc on n'y est pas encore au droit de vote des femmes. Dans son combat pour le suffrage des japonaises, Haru va quand même nous faire un petit écart, puisqu'elle va aussi mener une campagne qui sera très controversée, puisqu'elle va proposer l'interdiction aux hommes possédant une maladie vénérienne de se marier. Si je vous donne cet exemple, c'est parce qu'il est parfait pour montrer, encore une fois, qu'on n'est pas tout blanc ou tout noir dans une histoire, qu'on n'est pas tout gentil ou tout méchant, et que c'est pas parce qu'on porte globalement des combats qui font avancer les droits des femmes toute sa vie, qu'on ne peut pas avoir deux, trois petites idées un peu moins coolos sur ce qu'on va appeler la race japonaise et qui est un des autres très grands problèmes du Japon, à savoir l'espèce de truc qu'ils avaient avec ce sang pur japonais, mais qu'ont aussi, par exemple, les Coréens, si on va par là. En fait, Haru, elle avait beau être pour le droit de vote des Japonaises, elle avait quand même ce truc de race japonaise, comme quoi on peut être féministe. et un peu raciste, puisqu'elle pensait que la propagation des maladies vénériennes aurait un effet néfaste sur les japonaises, mais aussi les japonais, qu'on disait de race. Ça, c'est ce qu'on appelle de l'eugénisme, et c'est grosso modo ce qui va désigner les différentes pratiques trouvées au cours de l'histoire pour essayer de sélectionner le patrimoine génétique de l'espèce humaine, et ne conserver finalement que les êtres humains qu'on considère comme étant supérieurs, quoi, en gros. Donc, c'est une pensée qui est très problématique et qui fait aussi partie de cette femme. quand bien même elle a livré des combats très très importants dans les droits des femmes japonaises. Voilà, donc petit à petit, dans les 20 années qui vont suivre cette enquête dans les usines textiles, entre 1930 et 1950, Haru va petit à petit disparaître de la vie publique. Déjà, elle a beau livrer des combats qui sont louables, elle reste criblée de dettes, puisque le militantisme ça paye pas fort au Japon dans les années 30, et elle a un mari qui est très très malade. C'est une femme qui reste engagée, elle... Elle continue d'écrire des conférences, des papiers par-ci par-là, mais elle va se retirer un petit peu, globalement, de ce qu'on pourrait appeler la vie politique. Après la Seconde Guerre mondiale, et grâce à toutes les conférences qu'elle a données et tous les écrits qu'elle a quand même pu produire toute sa vie, elle va devenir un personnage public à travers le Mouvement pour la Paix. Elle devient aussi membre de la Fédération démocratique internationale des femmes. Et en 1950, après le début de la guerre de Corée, elle va voyager avec... plein d'autres activistes pour défendre des valeurs de neutralité et de paix au Japon, mais aussi et plus largement dans le monde. Elle reste quand même assez intéressée par la politique et elle se positionnera toute sa vie en faveur du droit de vote des femmes. Jusqu'à ses 80 ans, on va la retrouver au premier rang des manifestations du mouvement des femmes japonaises. Et c'est en 1971, après une vie d'écrit et de lutte pour la paix et les droits des femmes, que Haru slash Reisho va s'éteindre le stylo à la main. Si on a autant d'informations, sur sa vie, son parcours, ses engagements, c'est qu'elle a laissé derrière elle une très belle biographie qui commence par une phrase pour laquelle elle a été connue et... qui fait partie des premières fois où elle a probablement pris la plume, c'est « Au début, la femme était le soleil » . Aujourd'hui, son travail pour les droits des femmes continue d'inspirer, et pas uniquement au Japon, mais aussi beaucoup plus largement. Je pense que ce qui est intéressant dans son histoire, c'est de noter qu'au final, elle n'a jamais vraiment été seule. Dans un monde où on se divise, beaucoup, et où on a un peu parfois l'impression qu'on mène chacun les combats de notre côté, Haru slash Raichu, je ne sais pas trop comment l'appeler, si c'est avant ou après son éveil féministe, on va dire. Elle nous rappelle que le nombre, mine de rien, ça compte. Et que des combats comme le féminisme, ça reste aussi et avant tout des combats collectifs. Avec d'autres féministes japonaises, parfois américaines, elle a pu lancer des papiers, puisqu'elle n'était pas la seule rédactrice, évidemment. Elle a pu enquêter, elle a pu soulever des problématiques, problématique, elle a pu s'engager dans le droit de vote des femmes. Elle a pu essayer d'avoir une carrière politique, si on peut appeler ça comme ça. Mais toute sa vie, ça reflète un besoin collectif de faire bouger les choses. Et au Japon, à ce moment-là, c'était quand même via la littérature qu'on pouvait espérer toucher un public un peu plus large. Comme je vous l'ai dit, les Japonaises n'auront le droit de vote qu'après la Seconde Guerre mondiale en 1945. Et même si les combats féministes japonais actuels peuvent parfois nous paraître un petit peu en décalage avec les nôtres, ou en tout cas assez éloignée de notre quotidien, c'est ce que je vous disais en début d'épisode, c'est toujours intéressant et inspirant de se rappeler qu'en tant que femme, peu importe finalement que certains pays aient l'impression d'être plus lents en termes d'avancée, déjà il faut se rappeler qu'on ne part pas tous du même point. C'est une des thématiques que j'aimerais bien aborder un jour dans un épisode peut-être un petit peu plus spécial, mais il y a quand même ce côté de, en fait, on ne part pas du même point de départ. Euh... en ce qui concerne l'amélioration de la vie des femmes et de l'obtention de leurs droits. Et le Japon, comme d'autres pays d'Asie, ça a été des pays très ancrés dans le confucianisme notamment. Et le confucianisme, on pourra en reparler, mais c'est quelque chose qui met les femmes dans des cases très précises dont il est difficile de sortir. Et c'est surtout aussi des pays qui ont longtemps été très fermés sur eux-mêmes pour des raisons notamment politiques, d'invasions, etc. Et ça explique aussi pourquoi les petites victoires ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Et je trouve quand même important de se rappeler qu'au bout du compte, on partage quand même tout un point commun, que ce soit nous, moi, vous, les japonaises, peu importe, mais c'est quand même le fait d'être des femmes et d'être globalement victime du patriarcat. Et donc, on est un peu toutes en train de regarder dans la même direction techniquement et que c'est important du coup de se rappeler qu'on se bat pour ses droits certes, mais pour aussi pour le droit de toutes les femmes. Et je pense que c'est ce qui est important de rappeler dans le combat de cette femme-là, de Haru. Comprendre ce qui se passe dans d'autres pays, dans d'autres cultures, dans d'autres époques aussi, ça ne peut, à mon sens, qu'améliorer la situation pour toutes et tous, d'ailleurs. Voilà. Si le travail de... En tout cas, si la vie de Haru slash de Raisho Hiratsuka vous intéresse, déjà, il y a sa biographie. qui est probablement connu et disponible. Et il y a tout plein d'articles et de vidéos en ligne sur elle qui peuvent vous permettre aussi de mettre un visage sur le nom et d'en savoir un petit peu plus sur la société japonaise du XXe. Voilà, donc on commence un petit peu dans Mesdames à tenter des portraits, on va dire, plus worldwide. Donc j'espère que ça vous aura plu. Et puis on se retrouve très vite dans un prochain épisode de Mesdames. Salut !

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