Speaker #0Bonjour à tous, chers élèves et chers amis du site aufonddelaclasse.com ! Dans cet épisode, nous allons voir que dans la pièce On ne badine pas avec l'amour plutôt que de jeu de la parole, on a plutôt une tragédie de la parole. Alors en effet, dans la pièce de Moutet On ne badine pas avec l'amour si les personnages sans aucun doute jouent... avec la parole et ont donc des jeux de la parole, comme le dit le parcours du programme, eh bien on assiste plutôt à ce qui ressemble à une tragédie de la parole. Alors qu'est-ce que ça veut dire ? Cette tragédie de la parole humaine, en fait, c'est le premier niveau d'une vision très tragique de l'existence que développe Musset dans cette pièce et qu'on va développer dans cet épisode et dans les épisodes suivants. Et cette tragédie de la parole, ça signifie en fait que le langage qui est censé permettre aux hommes de communiquer, et de se comprendre, eh bien, devient au contraire un obstacle à la vérité des relations humaines, comme si la parole humaine, le langage humain, eh bien, était un empêchement, nous empêchait tous de nous dire la vérité de ce qu'il y a au fond de notre cœur. C'est l'impossibilité d'une parole pure. Et on peut dire que la pièce, elle met en scène cet échec fondamental de toute communication authentique. Alors, évidemment, c'est pas très gai, et c'est pour ça qu'on peut dire que c'est une... tragédie parce que ça veut dire qu'on ne peut pas sortir de ça et que les êtres humains et bien même s'il voulait se parler communiquer de manière authentique entre eux et bien ne le pourrait pas pour le démontrer on peut s'appuyer sur différentes choses et d'abord sur le fait que les personnages de la pièce de musée apparaissent prisonniers de discours qu'on leur a appris qui ne montre donc pas leur authenticité camille parle le langage du couvent est d'ailleurs perdicant le dénonce en disant à la scène 5 de l'acte 2 Ah, comme elle t'ont fait la leçon ! Et il critique les paroles de femmes qui lui sont chuchotées par les religieuses, alors qu'elle devrait être une jeune fille innocente qui dit ce qu'elle veut, qui est authentique dans sa manière de s'exprimer et de communiquer. Mais ce n'est pas le cas. Elle parle le langage du couvent. Et Perdicant, lui-même, même s'il dénonce ce qui arrive chez Camille, eh bien, il est présenté aussi, en fait, comme une sorte de perroquet de l'université. Et ça, c'est dès le début de la pièce, puisqu'il est annoncé dans la scène 1 de l'acte 1 comme la bouche toute pleine de façon de parler si belle et si fleurie qu'on ne sait que lui répondre les trois quarts du temps. Et en fait, c'est le latin qui est un peu symbolique de tout ça, puisqu'il ne voit pas, je cite encore le texte de l'acte 1 scène 1, il ne voit pas un brin d'herbe à terre qu'il ne vous dise comment cela s'appelle en latin. Et donc, il est incapable de regarder la nature de manière... directe, sans passer par quelque chose qu'il a appris. Et ici, le latin est symbolique de cette culture, de cette connaissance, mais qui n'est pas vue comme quelque chose de totalement positif, puisque c'est ce qui empêche l'authenticité de s'exprimer, c'est-à-dire la parole naturelle. C'est une parole qui est apprise, qui est construite, qui n'est donc pas le moi authentique de Perdicant ou de Camille. Et bien sûr, ça contraste avec la parole naturelle. de Rosette, parce que Rosette, elle incarne précisément une parole pure, précisément d'ailleurs parce qu'elle ne sait pas lire. Elle dit elle-même à la scène 3 de l'acte 2, je n'ai guère d'esprit et je m'en aperçois bien aussitôt que je veux dire quelque chose. Mais vous voyez, ce n'est pas quelque chose de négatif, ça. C'est même quelque chose de positif. C'est la parole naturelle qui contraste avec ce qui est artificiel, appris et empêche chez Perdicant et Camille l'authenticité. La parole pure. Et d'ailleurs, Rosette comprend de manière instinctive cette différence. Elle dit, par exemple, à la scène 3 de l'acte 2, Des mots sont des mots et des baisers sont des baisers Et vous voyez, cette phrase toute simple, en fait, montre une compréhension instinctive des choses. Et sa simplicité, à elle, à Rosette, souligne l'artificialité des autres. Les belles dames savent leur affaire selon qu'on leur baise la main droite ou la main gauche C'est dans la scène 3 de l'acte 2. Et... L'éducation de ce fait est présentée dans la pièce de Musset comme une corruption du langage, comme un processus qui va faire pourrir l'usage qu'on peut avoir de manière naturelle du langage. C'est une force, l'éducation, qui dénature le langage naturel. Et on le voit dès le début par la symétrie. des deux institutions dont je vous parlais juste avant, qui sont justement corruptrices de ce qui était au départ une belle nature, c'est Ô Sainte Église catholique ça c'est pour Camille bien sûr, et qui est repris ensuite dans la scène 2 de l'acte 3 par Ô Sainte Université de Paris Et donc ces exclamations parallèles dénoncent les deux systèmes qui ont façonné les protagonistes principaux, Camille et Perdicant, et qui les ont donc rendus... artificielle. D'ailleurs, ces savoirs artificiels sont très critiqués. Perdicant Ray, le savoir botanique, je n'en sais pas si long, mon révérend, je trouve qu'elle sent bon, voilà tout, dit-elle d'une fleur dans la scène 2 de l'acte 1, en rejetant en quelque sorte le savoir botanique qu'on lui demande de développer. Il dit, non, non, non, peu importe, je trouve qu'elle sent bon. Comme si, finalement, ce savoir n'était pas aussi intéressant. que la sensation pure. Voilà, ils sont bons et c'est tout. Et d'ailleurs, Perdicant, dans la scène 4 de l'acte 1, affirme que la nature enseigne la plus belle science de tous, de toutes, l'oubli de ce qu'on sait. Et donc ce qu'il faudrait faire dans l'idéal, dans un monde utopique, c'est oublier tout ce qu'on sait, pour avoir un accès direct à la nature, aux choses et aux autres, bien sûr, dans le cadre de l'amour. Les façons si belles et si fleuries de parler, Elles sont présentées en fait comme un masque qui empêche la communication directe avec le monde extérieur et avec les autres humains, en particulier pour Perdicant avec Camille. Et on est donc tout le temps dans cette pièce dans une quête d'une parole vraie. C'est très fréquent de trouver des tentatives de retrouver une expression authentique. Et si vous regardez un certain nombre d'expressions qui souvent marquent... à la lecture de cette pièce, ce sont celles des moments de confession, par exemple, où il est question de montrer son cœur à nu dans la scène 5 de l'acte 2. Montrer son cœur à nu, ça veut dire que ça ne doit pas passer par le langage, parce que le langage nous empêche justement de dire ce qu'il y a au fond de notre cœur. C'est le rejet des artifices. Je ne suis pas assez jeune pour m'amuser de mes poupées. L'aspiration aussi à une communication directe. Perdicant, te souviens-tu de notre enfance ? dit Camille dans la scène 5 de l'acte 2. Peut-être que ce qui fait le lien entre Musset, le dramaturge, l'homme de théâtre, et le poète, c'est que c'est le lyrisme poétique, finalement, les grandes tirades passionnées, qui cherchent à recomposer, à retrouver ce langage vrai. Et il y en a beaucoup, des grandes tirades passionnées. et en particulier celle sur l'amour dans la scène 5 de l'acte 2. Tous les hommes sont menteurs, etc. Et on pourrait citer aussi l'aveu final dans une simplicité qui est totale, qui est déchirante. Insensé que nous sommes, nous nous aimons. Et bien sûr, le cri qui, à la fin de la pièce, remplace les mots. Puisque à la fin, finalement, ce cri montre l'échec final de la parole. Puisque le dernier dialogue... réduit à sa plus simple expression, dans un échange minimal et absolument terrible. Camille qui dit elle est morte, adieu Perdicant Et Perdicant reprend son dernier cri m'a fait frémir jusqu'aux entrailles Et Camille reprend non, non, Seigneur Dieu Et c'est la mort de Rosette en fait qui interrompt toute possibilité de s'exprimer, de dire. Et le silence final finalement. on peut dire qu'il dit davantage que les mots. On peut d'ailleurs évoquer un autre point sur cet échec du langage, c'est le recours au langage du corps. Parce qu'après tout, c'est un langage aussi, mais qui ne passe pas par la parole. Et la dimension physique de cette pièce, si vous l'imaginez ou si vous l'avez vue sur scène, montre comment la pièce cherche à dépasser l'échec du langage par d'autres formes d'expression, ce qui renforce évidemment aussi cette idée de tragédie de la parole. On peut citer quelques exemples. Le refus initial du contact physique par Camille au début, quand elle lui dit excusez-moi Quand les mots échouent, en fait, le corps prend le relais. Et Perdicand avec Rosette, qui dit qu'elle ne parle pas la même langue que lui, eh bien, essaye de se rapprocher d'elle. Et c'est le baiser qui est le langage ultime. Il est refusé au début, c'est ce que je vous disais à l'instant, dans la scène 2 de l'acte 1. Excusez-moi Et ces baisers deviennent le symbole de la réconciliation finale. Et le geste désespéré de Camille qui plonge dans la fontaine pour récupérer la bague, ce geste-là dit aussi beaucoup plus que tous les discours. Et c'est aussi du langage corporel. C'est la précipitation du corps de Camille, aussi dans la dernière scène, qui court voir Rosette, qui traduit beaucoup plus que ce que les mots, finalement, ne peuvent plus dire à ce moment-là. Et on voit donc bien que c'est une tragédie de la parole humaine qu'on a dans cette pièce de Mussel. Ça n'est pas seulement un jeu sympathique, amusant, du badinage léger. En fait, ça, c'était le premier niveau. Mais... C'est finalement, si on parle de la parole, une tragédie de la parole. C'est-à-dire une pièce qui nous montre que la parole humaine est incapable d'exprimer la vérité des cœurs et le langage qui est censé nous permettre de communiquer, de nous comprendre entre nous, devient finalement le contraire, c'est-à-dire un obstacle à la vérité des relations humaines. Voilà en tout cas ce que je souhaitais partager avec vous. Sur cette manière de lire On ne badine pas avec l'amour comme une tragédie de la parole, vous pouvez retrouver un certain nombre de choses sur le site internet Othanda Custom. Je vous dis merci beaucoup de m'avoir écouté et à très bientôt. Ciao ciao !