Speaker #1Face à la maladie grave de son parent, il est important de comprendre que les enfants ont des représentations de la maladie qui ne sont pas du tout les nôtres. Un enfant a horreur du vide. Très tôt, et surtout quand il est jeune et qu'il n'a pas accès aux informations que peuvent avoir les adolescents par exemple en utilisant internet et différents moteurs de recherche, l'enfant qui ne supporte pas l'incertitude ni le hasard va développer une énergie considérable pour essayer de décrypter tous les événements de vie. qu'il subit, et essayer de leur donner du sens, en fonction de la valeur qu'il leur accorde. Autrement dit, lorsque son parent est malade, gravement malade, qu'il voit bien qu'il y a des bouleversements dans son quotidien, il va poser des gestions, s'il a l'impression qu'il a une petite chance d'être entendu. et s'il n'a pas de réponse ou s'il n'ose pas poser des questions parce qu'il sent ses parents trop submergés il va se faire lui-même des théories, c'est-à-dire des explications pour essayer de comprendre ce qu'il passe en s'appuyant sur ce qu'il voit ce qu'il entend et ce qu'il vit et nos enfants, les oreilles qui traînent bien souvent, ils captent des petits mots, des petites choses des attitudes et c'est un petit peu comme un patchwork où il va méticuleusement assembler les multiples informations qu'il a pu obtenir pour essayer de donner du sens à ce qu'il se passe autour de lui et par rapport à notre sujet, à la maladie grave de son part. Et l'enfant va déployer une énergie fantastique pour essayer de comprendre, essayer de traduire, de donner du sens. face à cette maladie qui s'impose dans sa vie, et d'autant plus qu'on ne lui a pas donné d'explication, parce qu'encore une fois, bien souvent, pensant bien faire, les parents n'en parlent pas. Il va développer ce que certains auteurs ont appelé le travail de la maladie. Et ce travail se traduit par différentes étapes qu'on pourrait... assimilé à des étapes de deuil au sens de perte, c'est-à-dire qu'il avait sa vie, son quotidien, et tout d'un coup tout cela est transformé, il doit s'adapter, il doit vivre avec toutes ces pertes qui s'imposent à lui. Et pour cela, l'enfant utilise une certaine logique qui est propre au monde de l'enfant, c'est souvent quand on est adulte, on a oublié ce mode de fonctionnement-là, et cette logique, elle est basée sur des théories. Face à la maladie, l'enfant développe des théories, Les théories infantiles que l'on va retrouver sont différents types. La première théorie, et la plus fréquente au niveau de l'élaboration, c'est celle du traumatisme. C'est-à-dire que l'enfant pense que la maladie est un accident. Il n'y a pas du tout dans ces cas-là de notion de responsabilité, ni de notion de punition ou de sanction. c'est la faute à pas de chance, la maladie vient frapper son parent, mais c'est aussi une théorie qu'il peut développer quand il est lui-même malade, où il n'y a pas la recherche d'un responsable. La deuxième théorie, qui apparaît assez régulièrement également, c'est celle de la punition. L'enfant est convaincu. que la maladie de son parent est imposée, s'impose à son parent, à lui-même, à toute la famille, en raison d'une faute. Et bien souvent, il se convainc que c'est lui le responsable. Ça, c'est un processus psychique particulièrement complexe à comprendre et très important à repérer, parce que l'enfant n'ira pas dire à ses proches Maman est malade à cause de moi ou Papa est malade à cause de moi mais il va grandir avec cette conviction-là. Et si jamais la maladie est la plus forte et que le parent décède, il sera convaincu, il va véritablement... grandir avec cette idée que le parent est décédé à cause de lui. Il y a une autre théorie qui apparaît principalement quand l'enfant à 7-8 ans commence à raisonner davantage qu'un plus petit parce qu'il a acquis des capacités cognitives qu'un enfant très jeune n'a pas. C'est la théorie de la transmission familiale. Alors cette théorie, pour certains parents, elle n'est pas une théorie, c'est une réalité parce que la maladie est génétique. Mais c'est une théorie que l'on a également pour tout type de maladie. avec cette conviction encore pour l'enfant que la maladie va se transmettre. Papa a un cancer, je vais avoir un cancer. Papa a telle maladie dégénérative, je vais avoir cette maladie dégénérative. Maman a telle maladie chronique, je vais l'avoir. Alors, c'est important d'avoir en tête cette notion de contamination de la maladie et de la crainte de l'enfant d'être contaminé par la maladie de son parent, parce que ça peut expliquer certaines fois que les enfants n'osent plus aller faire un câlin à leurs parents. malade, n'osent plus aller le voir parce qu'ils ont peur d'attraper cette maladie. Donc au moment de l'annonce que nous avons vue dans l'épisode précédent, c'est aussi très important d'expliquer à l'enfant que telle maladie ne s'attrape pas. Même des maladies génétiques, elles ne sont pas contagieuses au sens où je fais un câlin, je vais l'attraper. L'enfant est peut-être porteur du gêne, c'est quelque chose qu'il faut lui expliquer, qu'il faut travailler avec les professionnels de santé, mais... La dimension de contamination de transmission va avoir une incidence très forte quand l'enfant est submergé par cette croyance dans les liens qu'il a avec son parent. Même si la maladie est génétique, il est important d'expliquer à l'enfant que cela n'empêche pas les liens, les contacts, les câlins avec le parent malade. Et dans les autres cas de maladie, il est important pour les parents, malades et non malades, de savoir que l'enfant peut craindre d'être lui-même touché par la maladie. Nous voyons là encore toute l'importance de parler à notre enfant quand il y a une maladie grave dans la famille, en particulier quand elle touche le parent, pour lui permettre de ne pas être submergé. par tout ce qui peut l'envahir de croyances et de théories. Lui parler, c'est ce qui va le réconforter, même si la maladie est très grave, ce qui va permettre de maintenir ce lien de confiance fondamental pour l'aider à grandir le plus sereinement possible.