Speaker #1Dans cet épisode, je vous propose d'aborder la question que les troubles que les enfants peuvent présenter lorsqu'un de leurs parents est très gravement malade. C'est important d'en parler parce que bien souvent la maladie, et d'autant plus quand elle est extrêmement grave, va venir totalement bouleverser le rythme de la famille et la priorité est à juste titre posée sur et auprès du parent qui est malade. Ce qui fait que les enfants s'adaptent, se suradaptent et essayent bien souvent... de trouver des stratégies pour continuer de vivre du mieux possible avec cette maladie qui prend beaucoup de place. Certains enfants vont développer ce qu'on appelle une hyperadaptation. et dans certains cas on parlera même d'enfants adultomorphes, c'est-à-dire que des tout-petits de 7-8 ans peuvent se mettre à agir, à organiser le quotidien, préparer les repas, faire leur passage, alors que ça n'est pas du tout de leur âge, pour essayer de venir en relais, en soutien à leurs parents malades. et lorsqu'il y a un couple, à l'autre parent qui est mobilisé par la maladie de son conjoint. Donc cette responsabilité est très fréquente, surtout quand il y a des fratries où tout d'un coup l'enfant de 7-8 ans se trouve responsable du tout petit de 3 ans, alors que sans la maladie, bien évidemment, cela n'aurait jamais été le cas. Donc certains enfants vont développer cette hyper-adaptation, un développement qu'on appelle en faux-self comme s'ils n'étaient pas touchés. Ils sont hyper-matures, ils se rendent compte que ça sert et que ça réconforte le parent malade et l'autre parent. Donc ils développent cette personnalité-là, ce mode de fonctionnement-là. Et certaines fois pendant des années, et certaines fois, même une fois adulte, ils continuent avec des... tentative de contrôle, entre guillemets, de la maladie, des aléas, des choses qui peuvent ne pas fonctionner, qui peuvent entraîner un bouleversement. Ce sont des enfants souvent très hyper vigilants par rapport au monde extérieur. Et ce sont des enfants pour lesquels les adultes ne vont pas forcément prêter attention, mais au contraire, plutôt être extrêmement rassurés, voire très valorisants. en les remerciant de toute l'attention qu'ils ont, en mettant en avant le fait qu'ils sont très responsables et en les valorisant par rapport à tout ce qu'ils font à la maison et tout ce qu'ils font auprès de leur fratrie, par exemple. Il y a bien souvent des enfants qui vont manifester leur angoisse, leur inquiétude et leur tentative de se rassurer sur la présence de l'autre parent en ayant des comportements que l'on appelle, et c'est quelque chose que l'on a déjà vu, externalisés. C'est-à-dire les enfants qui vont devenir... absolument insupportables, qui vont faire du bruit, qui ne vont plus obéir, qui vont transgresser, qui ne vont plus travailler à l'école, qui vont décrocher, qui vont fuguer, qui vont casser, qui vont se blesser. La sur-accidentologie, c'est vraiment quelque chose que l'on peut constater dans les services d'urgence pédiatrique. Quand un enfant vient très régulièrement, parce qu'il s'est cassé le bras, il s'est cassé la jambe, il s'est ouvert le crâne, ou un tas d'autres choses de blessures de ce type-là, C'est assez fréquent que l'on constate que dans l'environnement proche, fratrie ou parent, un des leurs est gravement malade. Donc on voit bien que ces troubles extrêmement visibles ont une efficacité, c'est qu'ils vont mobiliser l'attitude de l'autre parent. Et pour l'enfant, cela lui permet de se rassurer sur le fait que le parent est là. Mais d'un autre côté, le parent qui est déjà malade ou s'il s'agit de l'autre parent qui est déjà très mobilisé par son conjoint malade, la disponibilité à avoir pour accompagner son enfant aux urgences est indispensable, mais en effet très difficile. Il peut y avoir de l'énervement par rapport à ce type de comportement qui viennent créer de l'angoisse, de l'inquiétude, qui prennent beaucoup de temps pour la prise en charge et qui épuisent encore davantage le parent malade et l'autre parent. Il est vraiment important de rester calme et de comprendre que c'est une façon pour l'enfant d'exprimer son anxiété, ses peurs et son sentiment d'insécurité. et son inquiétude à être abandonné. Même si tous les parents ont mis en place ce qu'il fallait pour l'accompagner du mieux possible, dans certains cas, pour l'enfant, il reste une inquiétude. Et le comportement, les mots M-A-U-X sont chez l'enfant le principal vecteur support à sa détresse et à sa souffrance psychique. Enfin, il y a tous ces enfants qui ont un parent extrêmement malade, gravement malade, qui vont prendre sur eux et présenter ce que l'on appelle les troubles internalisés, qu'ils sont très peu visibles. Et ces enfants-là sont très calmes. Par contre, ils ne jouent plus, ils n'ont plus de projet, ils n'ont plus envie de faire des activités qu'ils aimaient faire, ils ne veulent plus quitter leurs parents. Certaines fois, il y a des troubles anxieux scolaires qui se développent, ils ne veulent plus aller à l'école parce qu'ils craignent que leurs parents ne soient encore plus malades s'ils ne sont pas à ses côtés. Face à tous ces troubles pour les parents, à la fois le parent malade et l'autre parent ou les proches, c'est extrêmement difficile de se dire que l'enfant est touché, lui aussi, de façon collatérale, qu'il est blessé psychiquement par la maladie de son parent. Mais le savoir, le reconnaître, c'est extrêmement important parce que cela nous évite de ne pas prendre en charge tous ces comportements qui peuvent être des signes d'une véritable détresse psychologique de l'enfant. rester calme, ne pas le punir, même s'il est absolument insupportable, essayer de l'aider à mettre des mots sur ses émotions, lui parler, et surtout le rassurer sur le fait qu'il n'est pas seul, que l'on est là avec lui, qu'il ne sera jamais seul, quoi qu'il arrive. C'est vraiment ce lien-là qui est vital pour permettre à un enfant de grandir, d'avoir confiance en lui et en l'autre, et ce, quelles que soient les épreuves de la vie.