Face Ă  l’éruption du Nyiragongo, l’État a-t-il Ă©tĂ© Ă  la hauteur ? cover
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🎙Po Na Biso

Face Ă  l’éruption du Nyiragongo, l’État a-t-il Ă©tĂ© Ă  la hauteur ?

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03min |28/05/2021
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Des colonnes de civils jetĂ©es dans la rue, baluchon sur la tĂȘte. Parfois de nuit et sous la pluie. Parfois arrĂȘtĂ© par les postes-frontiĂšres. Des maisons dĂ©vorĂ©es par les flammes. Des bateaux pris d’assaut par des habitants qui tentent, dĂ©sespĂ©rĂ©ment, de se conformer Ă  l’ordre de quitter la ville
 Une fois encore, une fois de trop, les images de la dĂ©tresse des habitants de Goma Ă©taient rĂ©voltantes.

Cette fois, le dĂ©sastre n’a pas Ă©tĂ© causĂ© par un groupe armĂ©, comme en 2012, lorsque les rebelles du Mouvement du 23-Mars, avaient pris la ville. Il s' agit d’un dĂ©sastre naturel. Mais est-ce que cela signifie que les acteurs politiques ne portent aucune responsabilitĂ© dans la maniĂšre dont s’est dĂ©roulĂ©e cette tragĂ©die ?

Bonjour. Nous sommes le vendredi 28 mai et vous Ă©coutez le 15e numĂ©ro de Po na GEC, la capsule audio du Groupe d’études sur le Congo de l’UniversitĂ© de New-York, qui tente d’éclairer l’actualitĂ© de la RDC. Je suis Pierre Boisselet, le coordonateur du BaromĂštre sĂ©curitaire du Kivu, et cette semaine nous allons parler de la gestion de l’éruption du Volcan Nyiragongo.

Au cours de cet Ă©vĂ©nement, survenu samedi 22 mai, dans la soirĂ©e, et dans les jours qui ont suivi, la population a Ă©tĂ© largement livrĂ©e Ă  elle-mĂȘme, avec peu d’informations fiables et claires.

À la dĂ©charge des autoritĂ©s, le scĂ©nario qui s’est jouĂ©, avec ses multiples tremblements de terre postĂ©rieurs Ă  l'Ă©ruption, a dĂ©sarçonnĂ© jusqu’aux volcanologues les plus expĂ©rimentĂ©s. À l’heure oĂč nous enregistrons cette capsule, prĂšs d’une semaine aprĂšs le dĂ©but de l’éruption, les prĂ©visions ne font d’ailleurs toujours pas consensus : y aura-t-il de nouvelles coulĂ©es de lave ou non ? Toucheront-elles la ville ? Le lac Kivu ? Le gaz contenu dans ses eaux pourrait-il ĂȘtre libĂ©rĂ© ? Aucune de ces hypothĂšses ne semble totalement Ă©cartĂ©e.

Par ailleurs, les autoritĂ©s congolaises ne sont pas les seules Ă  avoir tĂątonnĂ© dans cette crise. Que dire, par exemple, de ce tweet postĂ© par la Monusco, le soir de l’éruption, et affirmant que la lave ne semblait pas se diriger vers la ville, alors que des maisons brĂ»laient dĂ©jĂ  Ă  sa pĂ©riphĂ©rie.

Pour autant, les autoritĂ©s ne pourront pas Ă©chapper Ă  certaines questions. Au Nord-Kivu, le risque volcanologique est connu depuis presque toujours. En 2002, la lave avait dĂ©jĂ  ravagĂ© une grande partie de la ville, ce qui avait amenĂ© Ă  la crĂ©ation de l’Observatoire volcanologique de Goma, ou OVG. 

Compte tenu de ces risques, le minimum n’aurait-il pas Ă©tĂ© d’avoir un plan d’évacuation fonctionnel ? Pourquoi les dispositifs d’alertes, comme les sirĂšnes, n’ont-elles pas fonctionnĂ© ? Des exercices permettant d’enseigner la conduite Ă  tenir en cas d’éruption n’auraient-ils pas dĂ» ĂȘtre mis en Ɠuvre comme cela se fait dans d’autres pays exposĂ©s Ă  ce type de risques ? Pourquoi les forces de l'ordre Ă©taient-elles invisibles dans les rues le 22 mai alors que le gouvernement dĂ©clarait l’activation de ce plan ? Pourquoi les financements de l’OVG Ă©taient-ils coupĂ©s depuis plusieurs mois ? L’Etat de siĂšge, en vigueur depuis le 6 mai, a-t-il vĂ©ritablement facilitĂ© la prise de dĂ©cision ?

Et comment comprendre que les autoritĂ©s aient pris le temps de nommer les nouveaux chefs des villes et territoires du Nord-Kivu et de l’Ituri le 26 mai alors qu’elles avaient, sous les yeux, depuis la veille, un rapport trĂšs inquiĂ©tant de l’OVG, pour les gens.

Le gouverneur militaire de la ville Constant Ndima Kongba a finalement dĂ©cidĂ©, d’évacuer 10 des 18 quartiers de la ville. On peut lui reconnaĂźtre d’avoir pris une dĂ©cision logique au vu des scĂ©narios exposĂ©s par l’OVG. 

Mais cette initiative a Ă©tĂ© mise en Ɠuvre dans une grande confusion. L’annonce a Ă©tĂ© faite au milieu de la nuit. Des ordres et contre-ordres sur les Ă©vacuations lacustres, et les destinations recommandĂ©es ont Ă©tĂ© prononcĂ©s. Et un manque criant d’infrastructures attendait les dĂ©placĂ©s Ă  leur points d’arrivĂ©e, comme Ă  Sake. Ceci pourrait gĂ©nĂ©rer d’autres difficultĂ©s. 

Ces dĂ©faillances devraient amener l’État Ă  un sĂ©rieux examen de conscience sur sa dĂ©sorganisation et ses prioritĂ©s. Afin que, lors de la prochaine Ă©ruption, la ville de Goma soit enfin prĂȘte.

Pour recevoir Po na GEC chaque vendredi sur votre téléphone, rejoignez notre fil WhatsApp en envoyant « GEC », G, E, C, au +243 894 110 542. A trÚs vite !

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Des colonnes de civils jetĂ©es dans la rue, baluchon sur la tĂȘte. Parfois de nuit et sous la pluie. Parfois arrĂȘtĂ© par les postes-frontiĂšres. Des maisons dĂ©vorĂ©es par les flammes. Des bateaux pris d’assaut par des habitants qui tentent, dĂ©sespĂ©rĂ©ment, de se conformer Ă  l’ordre de quitter la ville
 Une fois encore, une fois de trop, les images de la dĂ©tresse des habitants de Goma Ă©taient rĂ©voltantes.

Cette fois, le dĂ©sastre n’a pas Ă©tĂ© causĂ© par un groupe armĂ©, comme en 2012, lorsque les rebelles du Mouvement du 23-Mars, avaient pris la ville. Il s' agit d’un dĂ©sastre naturel. Mais est-ce que cela signifie que les acteurs politiques ne portent aucune responsabilitĂ© dans la maniĂšre dont s’est dĂ©roulĂ©e cette tragĂ©die ?

Bonjour. Nous sommes le vendredi 28 mai et vous Ă©coutez le 15e numĂ©ro de Po na GEC, la capsule audio du Groupe d’études sur le Congo de l’UniversitĂ© de New-York, qui tente d’éclairer l’actualitĂ© de la RDC. Je suis Pierre Boisselet, le coordonateur du BaromĂštre sĂ©curitaire du Kivu, et cette semaine nous allons parler de la gestion de l’éruption du Volcan Nyiragongo.

Au cours de cet Ă©vĂ©nement, survenu samedi 22 mai, dans la soirĂ©e, et dans les jours qui ont suivi, la population a Ă©tĂ© largement livrĂ©e Ă  elle-mĂȘme, avec peu d’informations fiables et claires.

À la dĂ©charge des autoritĂ©s, le scĂ©nario qui s’est jouĂ©, avec ses multiples tremblements de terre postĂ©rieurs Ă  l'Ă©ruption, a dĂ©sarçonnĂ© jusqu’aux volcanologues les plus expĂ©rimentĂ©s. À l’heure oĂč nous enregistrons cette capsule, prĂšs d’une semaine aprĂšs le dĂ©but de l’éruption, les prĂ©visions ne font d’ailleurs toujours pas consensus : y aura-t-il de nouvelles coulĂ©es de lave ou non ? Toucheront-elles la ville ? Le lac Kivu ? Le gaz contenu dans ses eaux pourrait-il ĂȘtre libĂ©rĂ© ? Aucune de ces hypothĂšses ne semble totalement Ă©cartĂ©e.

Par ailleurs, les autoritĂ©s congolaises ne sont pas les seules Ă  avoir tĂątonnĂ© dans cette crise. Que dire, par exemple, de ce tweet postĂ© par la Monusco, le soir de l’éruption, et affirmant que la lave ne semblait pas se diriger vers la ville, alors que des maisons brĂ»laient dĂ©jĂ  Ă  sa pĂ©riphĂ©rie.

Pour autant, les autoritĂ©s ne pourront pas Ă©chapper Ă  certaines questions. Au Nord-Kivu, le risque volcanologique est connu depuis presque toujours. En 2002, la lave avait dĂ©jĂ  ravagĂ© une grande partie de la ville, ce qui avait amenĂ© Ă  la crĂ©ation de l’Observatoire volcanologique de Goma, ou OVG. 

Compte tenu de ces risques, le minimum n’aurait-il pas Ă©tĂ© d’avoir un plan d’évacuation fonctionnel ? Pourquoi les dispositifs d’alertes, comme les sirĂšnes, n’ont-elles pas fonctionnĂ© ? Des exercices permettant d’enseigner la conduite Ă  tenir en cas d’éruption n’auraient-ils pas dĂ» ĂȘtre mis en Ɠuvre comme cela se fait dans d’autres pays exposĂ©s Ă  ce type de risques ? Pourquoi les forces de l'ordre Ă©taient-elles invisibles dans les rues le 22 mai alors que le gouvernement dĂ©clarait l’activation de ce plan ? Pourquoi les financements de l’OVG Ă©taient-ils coupĂ©s depuis plusieurs mois ? L’Etat de siĂšge, en vigueur depuis le 6 mai, a-t-il vĂ©ritablement facilitĂ© la prise de dĂ©cision ?

Et comment comprendre que les autoritĂ©s aient pris le temps de nommer les nouveaux chefs des villes et territoires du Nord-Kivu et de l’Ituri le 26 mai alors qu’elles avaient, sous les yeux, depuis la veille, un rapport trĂšs inquiĂ©tant de l’OVG, pour les gens.

Le gouverneur militaire de la ville Constant Ndima Kongba a finalement dĂ©cidĂ©, d’évacuer 10 des 18 quartiers de la ville. On peut lui reconnaĂźtre d’avoir pris une dĂ©cision logique au vu des scĂ©narios exposĂ©s par l’OVG. 

Mais cette initiative a Ă©tĂ© mise en Ɠuvre dans une grande confusion. L’annonce a Ă©tĂ© faite au milieu de la nuit. Des ordres et contre-ordres sur les Ă©vacuations lacustres, et les destinations recommandĂ©es ont Ă©tĂ© prononcĂ©s. Et un manque criant d’infrastructures attendait les dĂ©placĂ©s Ă  leur points d’arrivĂ©e, comme Ă  Sake. Ceci pourrait gĂ©nĂ©rer d’autres difficultĂ©s. 

Ces dĂ©faillances devraient amener l’État Ă  un sĂ©rieux examen de conscience sur sa dĂ©sorganisation et ses prioritĂ©s. Afin que, lors de la prochaine Ă©ruption, la ville de Goma soit enfin prĂȘte.

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 Une fois encore, une fois de trop, les images de la dĂ©tresse des habitants de Goma Ă©taient rĂ©voltantes.

Cette fois, le dĂ©sastre n’a pas Ă©tĂ© causĂ© par un groupe armĂ©, comme en 2012, lorsque les rebelles du Mouvement du 23-Mars, avaient pris la ville. Il s' agit d’un dĂ©sastre naturel. Mais est-ce que cela signifie que les acteurs politiques ne portent aucune responsabilitĂ© dans la maniĂšre dont s’est dĂ©roulĂ©e cette tragĂ©die ?

Bonjour. Nous sommes le vendredi 28 mai et vous Ă©coutez le 15e numĂ©ro de Po na GEC, la capsule audio du Groupe d’études sur le Congo de l’UniversitĂ© de New-York, qui tente d’éclairer l’actualitĂ© de la RDC. Je suis Pierre Boisselet, le coordonateur du BaromĂštre sĂ©curitaire du Kivu, et cette semaine nous allons parler de la gestion de l’éruption du Volcan Nyiragongo.

Au cours de cet Ă©vĂ©nement, survenu samedi 22 mai, dans la soirĂ©e, et dans les jours qui ont suivi, la population a Ă©tĂ© largement livrĂ©e Ă  elle-mĂȘme, avec peu d’informations fiables et claires.

À la dĂ©charge des autoritĂ©s, le scĂ©nario qui s’est jouĂ©, avec ses multiples tremblements de terre postĂ©rieurs Ă  l'Ă©ruption, a dĂ©sarçonnĂ© jusqu’aux volcanologues les plus expĂ©rimentĂ©s. À l’heure oĂč nous enregistrons cette capsule, prĂšs d’une semaine aprĂšs le dĂ©but de l’éruption, les prĂ©visions ne font d’ailleurs toujours pas consensus : y aura-t-il de nouvelles coulĂ©es de lave ou non ? Toucheront-elles la ville ? Le lac Kivu ? Le gaz contenu dans ses eaux pourrait-il ĂȘtre libĂ©rĂ© ? Aucune de ces hypothĂšses ne semble totalement Ă©cartĂ©e.

Par ailleurs, les autoritĂ©s congolaises ne sont pas les seules Ă  avoir tĂątonnĂ© dans cette crise. Que dire, par exemple, de ce tweet postĂ© par la Monusco, le soir de l’éruption, et affirmant que la lave ne semblait pas se diriger vers la ville, alors que des maisons brĂ»laient dĂ©jĂ  Ă  sa pĂ©riphĂ©rie.

Pour autant, les autoritĂ©s ne pourront pas Ă©chapper Ă  certaines questions. Au Nord-Kivu, le risque volcanologique est connu depuis presque toujours. En 2002, la lave avait dĂ©jĂ  ravagĂ© une grande partie de la ville, ce qui avait amenĂ© Ă  la crĂ©ation de l’Observatoire volcanologique de Goma, ou OVG. 

Compte tenu de ces risques, le minimum n’aurait-il pas Ă©tĂ© d’avoir un plan d’évacuation fonctionnel ? Pourquoi les dispositifs d’alertes, comme les sirĂšnes, n’ont-elles pas fonctionnĂ© ? Des exercices permettant d’enseigner la conduite Ă  tenir en cas d’éruption n’auraient-ils pas dĂ» ĂȘtre mis en Ɠuvre comme cela se fait dans d’autres pays exposĂ©s Ă  ce type de risques ? Pourquoi les forces de l'ordre Ă©taient-elles invisibles dans les rues le 22 mai alors que le gouvernement dĂ©clarait l’activation de ce plan ? Pourquoi les financements de l’OVG Ă©taient-ils coupĂ©s depuis plusieurs mois ? L’Etat de siĂšge, en vigueur depuis le 6 mai, a-t-il vĂ©ritablement facilitĂ© la prise de dĂ©cision ?

Et comment comprendre que les autoritĂ©s aient pris le temps de nommer les nouveaux chefs des villes et territoires du Nord-Kivu et de l’Ituri le 26 mai alors qu’elles avaient, sous les yeux, depuis la veille, un rapport trĂšs inquiĂ©tant de l’OVG, pour les gens.

Le gouverneur militaire de la ville Constant Ndima Kongba a finalement dĂ©cidĂ©, d’évacuer 10 des 18 quartiers de la ville. On peut lui reconnaĂźtre d’avoir pris une dĂ©cision logique au vu des scĂ©narios exposĂ©s par l’OVG. 

Mais cette initiative a Ă©tĂ© mise en Ɠuvre dans une grande confusion. L’annonce a Ă©tĂ© faite au milieu de la nuit. Des ordres et contre-ordres sur les Ă©vacuations lacustres, et les destinations recommandĂ©es ont Ă©tĂ© prononcĂ©s. Et un manque criant d’infrastructures attendait les dĂ©placĂ©s Ă  leur points d’arrivĂ©e, comme Ă  Sake. Ceci pourrait gĂ©nĂ©rer d’autres difficultĂ©s. 

Ces dĂ©faillances devraient amener l’État Ă  un sĂ©rieux examen de conscience sur sa dĂ©sorganisation et ses prioritĂ©s. Afin que, lors de la prochaine Ă©ruption, la ville de Goma soit enfin prĂȘte.

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Des colonnes de civils jetĂ©es dans la rue, baluchon sur la tĂȘte. Parfois de nuit et sous la pluie. Parfois arrĂȘtĂ© par les postes-frontiĂšres. Des maisons dĂ©vorĂ©es par les flammes. Des bateaux pris d’assaut par des habitants qui tentent, dĂ©sespĂ©rĂ©ment, de se conformer Ă  l’ordre de quitter la ville
 Une fois encore, une fois de trop, les images de la dĂ©tresse des habitants de Goma Ă©taient rĂ©voltantes.

Cette fois, le dĂ©sastre n’a pas Ă©tĂ© causĂ© par un groupe armĂ©, comme en 2012, lorsque les rebelles du Mouvement du 23-Mars, avaient pris la ville. Il s' agit d’un dĂ©sastre naturel. Mais est-ce que cela signifie que les acteurs politiques ne portent aucune responsabilitĂ© dans la maniĂšre dont s’est dĂ©roulĂ©e cette tragĂ©die ?

Bonjour. Nous sommes le vendredi 28 mai et vous Ă©coutez le 15e numĂ©ro de Po na GEC, la capsule audio du Groupe d’études sur le Congo de l’UniversitĂ© de New-York, qui tente d’éclairer l’actualitĂ© de la RDC. Je suis Pierre Boisselet, le coordonateur du BaromĂštre sĂ©curitaire du Kivu, et cette semaine nous allons parler de la gestion de l’éruption du Volcan Nyiragongo.

Au cours de cet Ă©vĂ©nement, survenu samedi 22 mai, dans la soirĂ©e, et dans les jours qui ont suivi, la population a Ă©tĂ© largement livrĂ©e Ă  elle-mĂȘme, avec peu d’informations fiables et claires.

À la dĂ©charge des autoritĂ©s, le scĂ©nario qui s’est jouĂ©, avec ses multiples tremblements de terre postĂ©rieurs Ă  l'Ă©ruption, a dĂ©sarçonnĂ© jusqu’aux volcanologues les plus expĂ©rimentĂ©s. À l’heure oĂč nous enregistrons cette capsule, prĂšs d’une semaine aprĂšs le dĂ©but de l’éruption, les prĂ©visions ne font d’ailleurs toujours pas consensus : y aura-t-il de nouvelles coulĂ©es de lave ou non ? Toucheront-elles la ville ? Le lac Kivu ? Le gaz contenu dans ses eaux pourrait-il ĂȘtre libĂ©rĂ© ? Aucune de ces hypothĂšses ne semble totalement Ă©cartĂ©e.

Par ailleurs, les autoritĂ©s congolaises ne sont pas les seules Ă  avoir tĂątonnĂ© dans cette crise. Que dire, par exemple, de ce tweet postĂ© par la Monusco, le soir de l’éruption, et affirmant que la lave ne semblait pas se diriger vers la ville, alors que des maisons brĂ»laient dĂ©jĂ  Ă  sa pĂ©riphĂ©rie.

Pour autant, les autoritĂ©s ne pourront pas Ă©chapper Ă  certaines questions. Au Nord-Kivu, le risque volcanologique est connu depuis presque toujours. En 2002, la lave avait dĂ©jĂ  ravagĂ© une grande partie de la ville, ce qui avait amenĂ© Ă  la crĂ©ation de l’Observatoire volcanologique de Goma, ou OVG. 

Compte tenu de ces risques, le minimum n’aurait-il pas Ă©tĂ© d’avoir un plan d’évacuation fonctionnel ? Pourquoi les dispositifs d’alertes, comme les sirĂšnes, n’ont-elles pas fonctionnĂ© ? Des exercices permettant d’enseigner la conduite Ă  tenir en cas d’éruption n’auraient-ils pas dĂ» ĂȘtre mis en Ɠuvre comme cela se fait dans d’autres pays exposĂ©s Ă  ce type de risques ? Pourquoi les forces de l'ordre Ă©taient-elles invisibles dans les rues le 22 mai alors que le gouvernement dĂ©clarait l’activation de ce plan ? Pourquoi les financements de l’OVG Ă©taient-ils coupĂ©s depuis plusieurs mois ? L’Etat de siĂšge, en vigueur depuis le 6 mai, a-t-il vĂ©ritablement facilitĂ© la prise de dĂ©cision ?

Et comment comprendre que les autoritĂ©s aient pris le temps de nommer les nouveaux chefs des villes et territoires du Nord-Kivu et de l’Ituri le 26 mai alors qu’elles avaient, sous les yeux, depuis la veille, un rapport trĂšs inquiĂ©tant de l’OVG, pour les gens.

Le gouverneur militaire de la ville Constant Ndima Kongba a finalement dĂ©cidĂ©, d’évacuer 10 des 18 quartiers de la ville. On peut lui reconnaĂźtre d’avoir pris une dĂ©cision logique au vu des scĂ©narios exposĂ©s par l’OVG. 

Mais cette initiative a Ă©tĂ© mise en Ɠuvre dans une grande confusion. L’annonce a Ă©tĂ© faite au milieu de la nuit. Des ordres et contre-ordres sur les Ă©vacuations lacustres, et les destinations recommandĂ©es ont Ă©tĂ© prononcĂ©s. Et un manque criant d’infrastructures attendait les dĂ©placĂ©s Ă  leur points d’arrivĂ©e, comme Ă  Sake. Ceci pourrait gĂ©nĂ©rer d’autres difficultĂ©s. 

Ces dĂ©faillances devraient amener l’État Ă  un sĂ©rieux examen de conscience sur sa dĂ©sorganisation et ses prioritĂ©s. Afin que, lors de la prochaine Ă©ruption, la ville de Goma soit enfin prĂȘte.

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