Transformation RH des cabinets - Damien Charrier, Delphine Buisson, Philippe Barré cover
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Pod'miel by AGIRIS

Transformation RH des cabinets - Damien Charrier, Delphine Buisson, Philippe Barré

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1h01 |12/11/2025
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Description

Et si la vraie transformation des cabinets était humaine ?


Découvrez comment les cabinets d’expertise comptable évoluent face aux enjeux humains, managériaux et organisationnels.


Dans ce podcast signé AGIRIS, des experts partagent leurs expériences et leurs conseils pour réussir la transformation RH :

  • comment lever les résistances au changement et mobiliser les équipes,

  • quelles compétences développer pour répondre aux nouvelles attentes des clients,

  • comment redéfinir les rôles au sein des cabinets à l’ère de la digitalisation,

  • et surtout, comment faire de l’humain le moteur de la transformation.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Frank Lascombes

    Bonjour à tous, je suis très heureux de vous accueillir sur cet épisode consacré à la transformation RH des cabinets. Imaginez un cabinet comptable il y a 30 ans. Les collaborateurs aligner des colonnes de chiffres, additionner, ressaisisser. Leurs valeurs se mesuraient à la rigueur, à la précision. Aujourd'hui, tout cela peut être fait par une machine en quelques secondes. Mais ce que la machine ne fera jamais, c'est écouter un dirigeant inquiet, comprendre l'histoire cachée derrière des comptes, détecter un signal faible dans une conversation, donner confiance pour prendre une décision. Cette dimension humaine... C'est le vrai cœur du métier. La transformation qui s'impose à la profession n'est pas seulement une révolution technologique. C'est une révolution de posture. Les équipes ne sont plus des producteurs de chiffres, elles deviennent des copilotes de la réussite des clients. Mais cette évolution ne se fera pas par les outils seuls. Elle passera surtout par l'accompagnement des collaborateurs pour qu'ils développent de nouvelles compétences changent de regard sur leur métier et trouvent leur place dans cette nouvelle dynamique. C'est une formidable opportunité, plus de temps pour conseiller, accompagner, anticiper, mais pour y arriver, il faut embarquer tout le monde, y compris ceux qui doutent, ceux qui craignent de perdre leur place, ceux qui n'ont pas encore trouvé leur rôle dans ce nouveau paysage. C'est tous ces sujets que je vous propose d'aborder aujourd'hui. Comment réussir cette transformation, pas seulement avec des outils, mais avec les femmes et les hommes qui font vivre les cabinets ? Comment lever les résistances, développer les compétences et donner envie à chacun de contribuer à la création de valeur ? Parce que la clé de la transformation est technologique, bien sûr, mais elle est surtout humaine. Pour en discuter aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir trois personnalités qui connaissent parfaitement la profession et ses défis. Je vais les laisser se présenter en 20 secondes chrono. Honneur aux dames, Delphine.

  • Delphine Buisson

    Bonjour tout le monde, je suis Delphine Buisson et ravie d'être avec vous pour échanger sur ces sujets assez passionnants, comme on passe de la réflexion à l'action.

  • Damien Charrier

    Bonjour Damien Charrier, je suis expert comptable en Normandie et je suis confronté au défi que tu viens d'exposer. Et puis je suis présent en qualité de président du Conseil national des experts comptables. Merci Damien.

  • Philippe Barré

    Bonjour Philippe Barré, je suis expert comptable en région parisienne et j'ai la particularité... d'avoir choisi de changer un peu de métier en accompagnant les experts comptables dans leur transformation, dans leur évolution, etc.

  • Frank Lascombes

    Merci beaucoup Philippe, merci beaucoup tous les trois. Donc sans plus attendre, ce que je vous propose c'est de rentrer dans le vif du sujet. On a beaucoup de choses à se dire aujourd'hui. Donc commençons, cette table ronde abordera trois points principaux. Comprendre et lever les résistances, premier point. Second point, redéfinir les rôles et développer les compétences. Et enfin, passer de l'intention à l'action. Parce qu'il y a un moment donné, comme on dit, il faut y aller. Donc comprendre et lever les résistances. On parle beaucoup de stratégie et d'outils, mais la première réalité de la transformation, ce sont les résistances humaines. Peur de perdre son rôle, manque de temps, sentiment d'être bousculé. Si on ne lève pas ses freins, aucun projet ne tient. Alors comment embarquer les équipes dès le départ ? Damien, selon toi, quels sont aujourd'hui les freins humains ? plus marquants dans la transformation des cabinets et comment l'ordre peut-il aider à les surmonter ?

  • Damien Charrier

    Bien sûr, il y a des résistances et je dirais que c'est normal parce qu'on est sur des mutations en profondeur et en fait l'inconnu ça fait toujours peur. En fait, il faut beaucoup accompagner, il faut redonner du sens, il faut redonner la clarté et c'est le rôle de chaque dirigeant de redonner les grandes directions de poser la stratégie. Une fois qu'on a dit ça, pour que les choses deviennent un peu plus concrètes, Il faut surtout former, et c'est ce que fait le Conseil national, c'est ce que font aussi les conseils régionaux, bien entendu. Et notamment, il y a un grand plan de formation qui existe, Profession comptable 2030. L'objectif de Profession comptable 2030, c'est justement de redonner une vision d'ensemble, de créer des parcours. Alors, les chiffres sont assez impressionnants, puisqu'il y a plus de 400 parcours actifs. Et depuis que ça existe, en fait, j'ai quelques chiffres à vous partager. On a déjà 3 800 professionnels qui ont été engagés et on est à 27 000 jours de formation. C'est quand même très significatif et je pense que c'est vraiment la prise de conscience que le changement, il est là. On est à moins d'un an de la facture électronique, donc il y a quand même des choses qui vont se passer dans le concret. Le hit parade des formations, c'est sans surprise, je dirais, cap durabilité. Donc voilà, c'est l'intégration effectivement de nouveaux enjeux. Et puis après, il y a le travail de la data pour développer les missions. Et le dernier, c'est organiser le cabinet autour de la facture électronique. Les deux derniers sujets, je pense que c'est vraiment sans surprise. Ce qu'on peut dire, c'est que derrière ces parcours, derrière ces chiffres, il y a une profession qui est en mouvement. Après, on va y revenir, je pense, dans la suite de nos échanges. Mais il faut agir sur ces leviers-là. Il faut agir également sur la prise en compte, plutôt du côté de l'expert comptable, manager, justement de cette dimension managériale des soft skills. Parce que tout ça aussi, ça va devenir des compétences qui sont déjà importantes dans les cabinets, mais qui vont être... d'autant plus importante pour les collaborateurs de demain, mais là aussi, on reviendra sur ces sujets.

  • Frank Lascombes

    Et quand tu parles de 3 800 professionnels qui ont participé à ce parcours, c'est à la fois experts comptables et collaborateurs ? Oui, bien sûr.

  • Damien Charrier

    La profession comptable 2030, ce n'est pas réservé aux experts comptables, c'est les experts comptables, les managers, les collaborateurs dans les cabinets, donc ça balaye effectivement assez large.

  • Frank Lascombes

    Et ce cadre durabilité, il n'y a pas eu un petit frein avec la loi Omnibus ? mais...

  • Damien Charrier

    Pas tant que ça. En fait, je pense que sur la durabilité, il y a des enjeux côté expertise comptable, il y a des enjeux côté compagnie des commissaires au compte. Et en fait, les experts comptables sont positionnés vraiment pour accompagner les entreprises, y compris les plus petites, sur des premiers pas en matière de durabilité, même si effectivement la contrainte s'est un peu éloignée. Par contre, on sait qu'il y a des demandes nouvelles qui viennent notamment des banques sur ces enjeux-là. Donc ça arrive par capillarité dans les entreprises.

  • Frank Lascombes

    et toi enfin À titre personnel et par rapport à l'institution que tu représentes, est-ce que tu constates une différence finalement de posture entre générations, entre tailles de structures, entre tailles de cabinets ou éventuellement même peut-être titre de mission ou pas du tout ?

  • Damien Charrier

    Oui et non. C'est-à-dire que je pense que tout le monde est concerné déjà, quelle que soit la taille de la structure. et je pense que dans les missions, pour répondre effectivement sur cet aspect-là, de manière très factuelle, je pense que les missions d'établissement, les missions de tenue, sont les missions qui vont être... modifié le plus rapidement par ces évolutions technologiques et sur lesquelles il y a vraiment besoin de se pencher parce que c'est encore aujourd'hui une partie très importante de l'activité des cabinets. Donc là-dessus, il faut effectivement bouger. Ce sera peut-être un peu moins le cas sur d'autres, encore que. Et puis sur les générations, il y a un effet générationnel, mais là aussi, je pense qu'il faut vraiment miser sur la complémentarité. Il ne faut pas imaginer que l'intelligence artificielle va se substituer à tout et on aura encore besoin de techniciens, et notamment de très bons techniciens dans les cabinets. et ça La technique, en fait, elle est souvent maîtrisée par les plus anciennes générations. Et je pense notamment aussi parce que, voilà, nous, on a aussi un volet emploi des seniors qui est important. Et en fait, on est plutôt là à essayer de retenir les compétences plutôt que, effectivement, se priver des compétences des anciens. Et puis, voilà, les jeunes sont peut-être un peu plus agiles avec les outils, encore que là-dessus, il n'y a pas de règles établies. Donc, voilà, je pense qu'il faut être attentif à ces... à ses aspects générationnels et construire la pyramide des âges. Quand on a plusieurs collaborateurs, il faut essayer de mixer un peu les générations. Je pense que ça, c'est important.

  • Frank Lascombes

    Je me tourne vers toi, Delphine. C'est vrai que tu as une expérience assez intéressante avec l'Umi School. Quand vous intervenez avec l'Umi School auprès des équipes, quelles sont les résistances que tu observes le plus souvent, le plus régulièrement ?

  • Delphine Buisson

    Quand ils entrent chez l'Umi School, ils sont déjà plus résistants.

  • Frank Lascombes

    Oui, ils ont déjà fait le port.

  • Delphine Buisson

    Oui, précisément, on est sur un public qui est au moins convaincu du fait qu'il faut pratiquer pour évoluer. C'est un dispositif qui est très complémentaire sur tout ce qui est fait par les instances. Et puis, voilà, divers dispositifs dans les groupements. Tous nos copains groupements, on travaille beaucoup là-dessus. L'UmiSchool, lui, vient adresser vraiment un sujet très spécifique et avec une pédagogie spécifique. Les nouveaux métiers m'ont orienté business. Nous, on est convaincus que la résistance, elle ne s'opère pas quand tu es bien présent. Damien, il parle de clarté, c'est un très joli mot, la clarté. Pour travailler sur le sujet des nouveaux métiers en lien avec les nouvelles missions, tu te rends compte que de façon très simple, il manque parfois un intitulé, une fiche de mission qui est en fait le pendant de la fiche de poste. En fait, la fiche mission, c'est pour le client, la fiche de poste, c'est pour les RH, mais elles doivent se retrouver absolument. Et c'est ce qui va rendre finalement à la fois le métier et donc la mission attractive. C'est aussi ce qui permet de redéfinir de façon très précise ta stratégie de l'offre. Donc, plutôt que d'aller chercher dans la granularité ultime qui est les compétences un peu comme un sac de billes, à travers l'UmiSchool, on va recréer des parcours métiers qui vont adresser des missions. Donc, on part toujours de la mission. On dit c'est quoi la mission au client ? Du coup, on ne se pose plus le problème du sens parce que le sens, il est dans la mission. Qu'est-ce qu'on fait ? Quelles valeurs on produit pour les clients ? Et au passage, il y a beaucoup de missions qui ont de l'impact en interne aussi. Et puis une fois que la mission est décrite, on va construire le parcours de formation. Et du coup, on prend le sujet à l'envers et après on forme donc à la mission. Après évidemment, tu as le protocole technique. la stack technologique et la stack comportementale. Du coup, on crée une sorte de cohérence pour que finalement des cohortes de personnes qui vont finalement embrasser ou habiller le même métier d'une façon, allez, à 80%, c'est la même chose. Le parcours qui tourne le plus aujourd'hui, enfin, on en a deux qui tournent très bien, c'est les intégrateurs, les welcomeers, les tech CSM. Tech, évidemment...

  • Damien Charrier

    Pour aborder les clients, en fait.

  • Delphine Buisson

    Les tech CSM, c'est ceux qui pilotent aujourd'hui le passage à la facture électronique, pour dire les choses simplement. eux, on voit bien, ils ont des profils assez différents. Ils comprennent très bien qu'ils sont le pivot pour aller, on va dire, compléter l'offre de tenue, ou en tout cas l'enrichir en la servicialisant. Ce n'est pas français ce que je raconte, mais c'est un peu ça. Si tu apportes du service à cette tenue qui va être très numérique, très digitale, tu peux conserver, voire même développer une partie de valeur et très vite appréhendable par le client. Et puis, d'un autre côté, tu gardes la maîtrise de ta donnée. donc tu peux aller voir gentiment vers du conseil, on va développer encore d'autres parcours. Mais l'idée, c'est vraiment de clarifier. Quand tu clarifies, les gens se sentent bien. Et c'est très intéressant de voir qu'on n'est pas dans la granularité des compétences, on n'est pas dans un petit sac de billes, mais on vient réassembler la cohérence de la mission, le management de ces gens-là, la valeur aussi facturable. Clairement, on travaille sur les prix, puisqu'on pense que quand on crée de la valeur, il faut qu'elle soit facturée.

  • Frank Lascombes

    Justement parce que forcément tu échanges beaucoup avec les dirigeants de cabinet qui quelque part arrivent à convaincre leurs collaborateurs de rentrer dans cette dynamique-là et qui les envoient du coup chez Lumiscool. Et justement par rapport à toutes tes discussions et tous les échanges que tu as avec eux, comment en fait s'ils arrivent à transformer finalement la peur du changement du collaborateur en envie de se transformer en fait ?

  • Delphine Buisson

    Alors tu dis deux choses importantes. D'abord on parle souvent de la peur du collaborateur. Moi je rencontre plutôt... dans les directions des gens qui n'ont pas statué, je ne veux pas dire qu'ils ont peur, mais qui n'ont pas statué sur leur stratégie de l'offre en fait. Une fois que la direction est très claire sur sa stratégie de l'offre, là j'ai une promo qui est la semaine prochaine où j'ai une entreprise qui m'envoie cinq personnes, une équipe entière sur la technologie à former, il n'y a pas de sujet en fait. Donc la résistance n'est pas du tout au niveau des équipes. Les équipes sont ravies d'être formées sur des métiers justement où ils n'ont pas eu de formation. Donc déjà pas de résistance. Et la deuxième chose que tu dis qui est très importante, Et non pas que les RH ne soient pas dans le game, il faut que les RH soient dedans. Nous, nos clients, c'est les dirigeants. C'est ceux qui décident de la stratégie de l'offre, en fait. Et les RH, ils disent merci quand la stratégie est posée, parce qu'ils peuvent enfin bosser. Mais ce n'est pas les RH qui vont nous envoyer les élèves. Et dans les apprenants, du reste, on a des parcours qui sont aussi pour les dirigeants. Enfin, je veux dire, en fonction de la mission, on a plein de profils très différents. Mais il faut que la direction, elle soit aux commandes, à la barre. de la stratégie de l'offre. Et si tu n'as pas réfléchi à ta stratégie de l'offre, dis autrement, comment tu construis ton chiffre d'affaires ? Tes clients, ils viennent te voir. Pourquoi ? De façon très précise. Ce que je n'y n'engage que moi. L'époque du full, full, full, où tu factures tout fou. Plus personne ne comprend rien. Tout flou, en fait. Je pense que ça, on va se guérir de ça. On va se guérir de ça.

  • Frank Lascombes

    Et aujourd'hui, parce que c'est vrai que vous avez aussi le sujet, pour l'avoir partagé avec toi, de l'Umi School. vous avez aussi des... des rituels d'équipe dans cette phase d'embarquement aussi, quelque part. Vous avez des outils justement pour qu'ils échangent, etc. Est-ce que tu peux m'en parler un peu plus ?

  • Delphine Buisson

    Dans notre proposition de valeur, encore une fois, l'idée, ce n'est pas de refaire ce qui est déjà fait et très bien fait par ailleurs. L'idée, elle était... Il y en a trois qui sont importantes. Déjà, c'est une école qui est ouverte à la profession. Je veux dire, ça va bien au-delà des groupes, des groupements. Il y a des indépendants. Et aujourd'hui, après deux ans d'existence, c'est déjà le cas. Il y a la moitié des élèves qui viennent d'ailleurs du groupe fondateur. Donc ça, c'est vraiment super. Deuxième chose, on adresse des gens qui viennent, des collaborateurs ou des gens qui sont déjà dans notre monde, mais on adresse aussi des gens qui arrivent d'ailleurs. Et ça, c'était aussi une de nos promesses. Alors, c'est encore mineur aujourd'hui, mais on veut que ça se développe. Là, par exemple, j'ai deux cas en tête où c'est des gens qui ont été recrutés avec des profils dits atypiques. Les deux, d'ailleurs, ils ont un parcours entrepreneur. Et ça, ça vient d'arriver chez nous. Et avec tout ce qui est en train d'être... mis hors-jeu par les grands du conseil, je pense qu'on va avoir des gens intéressants à recruter, qui auront envie de faire des choses dans des environnements sympas. Ça, c'est chez nous. Et donc, l'idée aussi, c'est que je te recrute, mais je ne te jette pas comme ça dans un grand bain sans être managé, etc. Je te mets en cohorte avec des copains qui font peu ou prou le même métier que toi, avec évidemment des variations, ce qui donne toute la richesse de ces parcours. Et en fait, une fois qu'on les met en cohorte, c'est aussi le principe de la pédagogie. On fait des kick-off où ils se rencontrent. On est en train de créer des banques de profils et de parcours, c'est ultra intéressant. Quand nos RH disent « Ah oui, mais ça, on voudrait bien, parce que la direction... » « Mais où est-ce qu'on les trouve ? » Je dis « Voilà, tu vois, je sors le jeu de cartes et je dis... » Tu as dix possibilités pour aller les chercher. Il y en a, ils sont dedans, il y en a, ils sont dehors. Et au fur et à mesure, comme ça, quand ils se retrouvent en cohorte de métiers, j'ai envie de dire qu'on commence à travailler sur le marketing des métiers, l'attractivité des métiers, en créant des cohortes de rôle-modèle. Et c'est ça qu'on cherche aussi. Ça peut paraître très ambitieux, mais après tout, il faut bien qu'on en ait de l'ambition. Et puis l'envie, elle est là. L'envie, elle est là. La résistance, je ne la vois pas. Ou alors les résistants, ils n'arrivent pas jusqu'à la porte, en fait. Et ça, par contre, le Miss School ne le fait pas. Ça, c'est le rôle de l'institution, des groupements. Chacun fait sa messe. L'initiation, c'est dans les églises. Voilà, c'est dans les chapelles. Donc moi, j'ai la mienne. C'est la même partie du travail. Mais après, l'autre partie du travail, moi, je prends les gens qui sont déjà prêts. et du coup les histoires de chapelle n'ont plus lieu d'être et là on passe à l'action

  • Frank Lascombes

    Alors je rebondis sur ce que tu disais Delphine, parce que c'est vrai que pendant qu'on discutait Damien, quand on préparait ce podcast et cet enregistrement, tu parlais aussi de la gestion des compétences sur lesquelles vous voulez travailler je crois avec l'institution.

  • Damien Charrier

    Si on parle gestion des compétences, effectivement, je pense que c'est un volet qui n'est encore pas très bien servi dans les cabinets, d'avoir une espèce de cartographie des compétences de ces collaborateurs, et notamment sur l'angle comportemental. Ils sont souvent assez bien ciblés sur l'aspect compétences techniques, par contre sur l'aspect comportemental, c'est moins évident. Donc on a imaginé un produit qui s'appelle le passeport collaborateur, et là on vient de lancer une enquête. Avant de se lancer concrètement dans le produit auprès de la profession, on a déjà, je crois, près de 800 experts comptables qui ont répondu. Et l'idée, c'est même un peu plus, on fait signe en régie que c'est un peu plus, on a dépassé la barre des mille. Et l'idée, c'est quoi ? C'est justement de pouvoir outiller tous les professionnels avec un outil de gestion des compétences. D'abord, on l'a focalisé sur des compétences qu'on a dites compétences socle. Donc les compétences socle, ça peut être quoi ? Ça peut être la cybersécurité, ça peut être le secret professionnel, la lutte anti-blanchiment. Ça permettra aussi qu'on arrête de se casser la tête sur des gens qu'on intègre dans les cabinets, et ça fait peut-être déjà un certain temps qu'ils sont dans les cabinets, et on ne sait même pas s'ils ont été formés sur des choses qui sont basiques et qui font partie du référentiel. Donc voilà, on a imaginé ce produit pour ça, et après effectivement ça peut devenir un peu une carte d'identité des compétences. Donc voilà ce qu'on est en train de faire au niveau du Conseil National. Philippe,

  • Frank Lascombes

    toi quand tu interviens concrètement dans les cabinets, Où se situe pour toi, selon toi, la résistance finalement la plus forte ? Tu constates qu'elle est plutôt chez les collaborateurs, les managers, les associés ?

  • Philippe Barré

    Les trois, en général. En fait, moi, quand j'interviens, j'interviens bien en amont par rapport à ce que vient de dire Delphine, puisque en fait, en général, quand moi j'interviens, les choses ne sont pas dites. Elles ne sont pas toujours clairement pensées ou en tout cas tellement clairement formalisées. Et donc en fait, que ce soit les... les associés, que ce soit les managers ou les collaborateurs, il y a quand même une grande part d'inconnus, il y a une grande part de découvertes, et évidemment, ça crée des résistances. D'une manière générale, comme le disait Damien tout à l'heure, les gens ont peur du changement, mais surtout de l'inconnu. Il se trouve qu'il y a une quinzaine d'années, j'ai repris mes études et j'ai fait des études de psychologie. Alors pas du tout pour bosser, parce que ça m'intéressait, pour le plaisir. Et en fait, dans mes travaux, dans ce que j'ai fait dans le cadre de ces études, J'avais des exercices à faire, des travaux, comme n'importe quel étudiant, et donc en fait j'ai comparé le profil psychologique d'un collaborateur comptable, avec ce qu'on appelle les préférences psychologiques d'un collaborateur comptable, entre guillemets normal, moyen, et les préférences psychologiques de quelqu'un qui aimait le changement. Alors je ne vais pas passer une demi-heure là-dessus, mais c'est facile, vous faites une photo et vous gardez le négatif. C'est-à-dire qu'un comptable, il aime ce qui est carré, organisé, précis, détaillé, ce qui est parfaitement organisé avec des délais, avec des objectifs, avec tout ça. Et la personne qui aime le changement, qui apprécie le changement, c'est quelqu'un qui aime l'inconnu, qui aime l'aventure, qui aime l'imprécision, qui aime rester dans l'ambiguïté, etc. C'est exactement le contraire du profil psychologique du comptable. Et donc moi, comme je n'accompagne que des cabinets d'expertise comptable, mon quotidien est parfois un peu compliqué. Pourquoi ? Parce que... Je ne sais pas si vous vous souvenez de la clôture du congrès de 2023, le congrès de Montpellier de l'Ordre. Pascal Pic, un paléo-anthropologue, était intervenu et en fait, quand on avait préparé cette intervention, il nous avait dit en fait que les êtres humains, c'est globalement des grands singes. Deux, trois détails près, mais c'est à peu près la même chose. Et en fait, le grand singe, je ne connais pas tous les grands singes, mais le chimpanzé, le gorille, le machin, il va dans les arbres et qu'est-ce qu'il fait ? Quand il est à une branche, il a envie de passer dans une autre branche. Mais il ne lâche jamais une branche sans avoir la suivante qui est identifiée. Parce que sinon, il va se lâcher, il va se ratatiner par terre et donc il va mal finir. Il n'est pas idiot. Eh bien, les collaborateurs, d'une manière générale, les salariés, c'est pareil. On leur demande, et moi je vois ça dans plein de cabinets, notamment des cabinets qui font beaucoup de tenues de comptabilité ou des missions traditionnelles, qui représentent encore les deux tiers du business des cabinets. Qu'est-ce qu'on constate ? Eh bien, on constate que c'est des collaborateurs qui font le même métier depuis... 3, 5, 10, 15, 20, 25 ans. Et en fait, ils ont acquis en ces 25 ans une maîtrise, une parfaite maîtrise, le geste métier, ils le maîtrisent sur le bout des doigts. Et donc, on leur dit dans ces moments de transition, dans ces moments de transformation, il va falloir que tu changes de métier. Pour faire quoi ? Je ne sais pas. Pour aller où ? Je ne sais pas. Et donc en fait, le problème, c'est que si c'est clair dans l'esprit du dirigeant, en gros, ce qu'il a envie de faire de son cabinet dans 10 ans, ou dans 5 ans ou dans 3 ans, c'est tout sauf clair pour le collaborateur qui va être chargé de faire des choses qu'il ne connaît pas. On demande à des gens qui sont arrivés au summum de leur expertise de passer... à un nouveau job, et là, ils sont au niveau zéro. C'est-à-dire qu'eux qui étaient la référence dans le métier, dans le cabinet, quand les petits jeunes qui arrivaient, qui allaient devenir apprentis d'ESCG, d'ESCG, etc., quand ils ne savaient pas, ils allaient voir telle ou telle personne. Sauf que demain, telle ou telle personne, elle ne connaîtra rien. Elle ne sait pas faire ce nouveau métier qu'elle n'a pas appris, donc elle ne sait pas trop en quoi il consiste. Et en fait, moi, j'ai vu des gens, je fais de nombreuses interventions dans les cabinets, dans les... sous forme de conférence d'une heure, une heure et demie. Donc une heure, une heure et demie, ça va très très vite. Et je me souviens avoir fait une intervention dans un cabinet d'une quinzaine, vingtaine de personnes. Et au bout d'un quart d'heure, j'expliquais ce qui se passe dans la profession. Et au bout d'un quart d'heure, j'ai une dame devant moi qui avait une cinquantaine d'années qui se met à pleurer, mais à chaudes larmes. Donc quand il y a 20 personnes dans une pièce et que la personne qui est devant vous se met à pleurer à chaudes larmes, ça déstabilise un peu. Donc en fait je me suis arrêté parce que c'était pas tenable Tout le monde, du coup, ne regardait qu'elle en se demandant ce qu'elle n'est pas. Enfin bon, je m'arrête donc. Je dis, on va prendre un verre d'eau, un café, machin. Et je vais voir cette dame. Je dis, mais qu'est-ce qui se passe ? C'est moi ? Elle dit, ben oui, vous avez dit que bientôt, il n'y aurait quasiment plus de tenue. Et en tout cas, plus de tenue humaine, entre guillemets. Et moi, je ne sais faire que la tenue humaine. Ça fait 25 ans que je suis dans ce cabinet. Et je ne sais faire que la tenue humaine. et je ne peux pas faire autre chose. Sauf que moi, je n'ai pas payé ma maison. Et puis j'ai des enfants qui n'ont pas fait leurs études. Donc ça veut dire que je pourrais pas finir de payer ma maison, on va être à la rue, mes enfants à cause de moi ne pourront pas faire d'études, et c'était fini. Parce qu'en fait, toutes les écoutilles étaient fermées, elle écoutait plus, elle entendait plus, j'avais beau dire ce que je voulais, elle m'écoutait plus. Et donc, pour faire très court, je lui ai dit, écoutez, faites-moi confiance encore un quart d'heure, et après on y va. J'ai fini ma conférence, on a fait la journée de travail pour justement identifier les métiers de demain, identifier, et on a commencé comme le disait Delphine, par identifier les business de demain, donc les missions parallèles, les missions complémentaires, etc. À la fin de la journée, elle avait la banane, et je finis toujours mes journées en disant, allez, le mot de la fin de cette dame, ça a été on s'y met quand ? Pourquoi ? Parce qu'elle avait compris qu'elle avait une utilité de main, elle savait ce qu'elle ferait comme métier, le métier, elle l'avait compris, elle l'avait identifié, elle était super contente de le faire, elle savait qu'elle y réussirait, et donc voilà. Et en fait, pour répondre à la question quand même, la principale résistance que l'on rencontre, C'est tout le monde, y compris les associés, très clairement. Il y a des cabinets, moi j'ai vu des cabinets qui se sont séparés parce qu'ils n'avaient pas le même projet à 5 ans. Et je l'ai vu pas qu'une fois. Donc ça arrive, mais quelque part, il vaut peut-être mieux qu'ils se séparent aujourd'hui avant qu'il y ait de la casse plutôt que dans 3 ans où ils ne seront plus du tout d'accord et ça finira mal. Mais en fait, c'est l'inconnu qui est le pire des ennemis. Quand les gens ne savent pas ce qu'ils vont devenir demain, ils ne peuvent pas être favorables. Et en fait, je dirais que c'est une réaction de survie. L'instinct de survie, pardon, qui fait qu'ils font tout pour empêcher que ça arrive, parce qu'ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés. Et en fait, on s'aperçoit que le jour où ils ont bien compris, ils deviennent moteurs dans le changement, et là, ils vont chez Delphine pour...

  • Frank Lascombes

    Ce que je retiens de ce que tu évoques, c'est qu'en fait, en réalité, si le cabinet n'a pas défini correctement son projet, sa stratégie, l'offre de services ou la proposition de valeur qu'il voulait offrir à ses clients, etc., finalement, tu n'offres pas aux collaborateurs cette fameuse branche. sur lequel il va pouvoir s'accrocher et lâcher l'autre main.

  • Philippe Barré

    C'est exactement ça. Quand on fait une conduite du changement, il y a quatre conditions pour réussir, quatre ingrédients. S'il en manque un, on va dans le mur. La première condition, c'est pourquoi on change ? Pourquoi est-ce qu'on est obligé de changer ? Là, ce n'est pas difficile, il se passe plein de choses, sauf qu'il faut l'expliquer. Moi, j'arrive des fois dans les cabinets où les collaborateurs, ils savent que la facture électronique va arriver, mais quelles sont les conséquences de la facture électronique ? Ils n'ont pas trop compris. L'IA, ils n'ont pas trop compris. et tout ce qui gravite en ce moment et toutes les nouveautés, ils ne savent pas trop. ce que ça implique. Deux, pour aller où ? C'est bien gentil. Quelle est la branche qu'on va rattraper ? Donc après, c'est quoi la deuxième branche ? On va lâcher une branche, on nous demande de lâcher une branche qui finalement n'existera plus dans un an ou deux, mais quelle est ma nouvelle branche ? Donc si on n'a pas ces deux premiers critères-là, il ne se passera rien. Troisièmement, avec qui ? On a besoin de tous les collaborateurs. Moi, je suis de ceux, je lis depuis quelques temps qu'il va falloir se débarrasser de l'essentiel des collaborateurs. Je suis totalement opposé à cette vision. Les collaborateurs qui ont envie et qui... acceptent de changer, on a de la place pour eux. Il faut évidemment inventer les nouveaux métiers, mais les nouveaux métiers, ça se trouve, la seule chose, c'est qu'il va falloir effectivement les former, les accompagner, etc. Et la dernière chose, c'est comment on fait pour y arriver ? Donc, comité de pilotage, feuille de route, je sais pas quoi. Mais s'il n'y a pas un de ces quatre ingrédients, on va parler de plein de choses, mais il ne se passera rien, et c'est là qu'on va perdre des collaborateurs, souvent les meilleurs. Quand on gère mal, c'est les bons qui s'en vont. Et d'ailleurs, quand on voit des collaborateurs qui quittent un cabinet parce qu'ils changent, C'est facile à savoir, est-ce que ça se passe bien ou mal ? Si c'est les bons qui s'en vont, c'est que ça se passe mal. si c'est les mauvaises et que ça se passe bien.

  • Frank Lascombes

    Thérèse, comme synthèse. Merci beaucoup à tous les trois. Je vous propose d'attaquer la seconde partie, donc redéfinir les rôles et développer les compétences. L'automatisation, à n'en pas douter, change la donne. Moins de saisie, plus d'accompagnement. Mais cela suppose une évolution de posture pour les collaborateurs qui ne sont pas... plus seulement des techniciens, mais de vrais copilotes pour leurs clients. Quelles compétences à développer et comment créer cette nouvelle dynamique ? C'est vrai qu'on a déjà évoqué pas mal de choses dans les propos liminaires, mais Delphine, finalement, quelles sont selon toi les compétences clés à développer pour que les collaborateurs passent du rôle de technicien à celui de copilote de leurs clients ? Ce qui change quand même beaucoup le paradigme.

  • Delphine Buisson

    Alors, déjà, copilote, c'est un parti pris. Il n'y aura pas que des postes de copilote dans l'avion. Je pense qu'il va rester des choses à faire en production, en modelage. Enfin, il y a pas mal de choses à faire. Déjà, peut-être si on arrivait à se mettre d'accord, tu vois, tout en haut, on a parlé de la stratégie de l'offre, qui va redéfinir les missions, etc. Et tout en bas, sur un socle de... Ce que j'appelle, moi, le contrat relationnel, ce qui, dans le fond, c'est les valeurs vécues et exprimées. C'est-à-dire, chez nous, on écoute, on sait ce que ça veut dire. Chez nous, on sait ce que c'est que l'assertivité. Chez nous, on sait ce que... Enfin, tu vois, avoir les valeurs comportementales, en fait, tu vois, les valeurs vécues, qui sont évidemment complètement incarnées par la direction, sinon ça ne marche pas, parce que c'est un entraînement, le comportement. Si, par exemple... Bon, ben voilà, vous allez avoir plein de temps, et là, il va falloir... prendre le téléphone et appeler les clients. Et là, je rejoins Philippe, panique à bord, mais ça, ce n'était pas mon métier, ce n'est pas mon métier. Et là, je parle juste de parler, je ne parle pas de conseiller. Ce sont des métiers très différents, en fait. Moi, j'ai déjà fait le métier, je le fais parfois, le métier de consultante, c'est extrêmement différent d'être consultant, d'être formateur, d'être conseiller, d'être analyste. Ce sont des métiers différents. Je pense qu'il y a un socle de compétences. qui va tourner vers l'ouverture. Ok, on ose se parler, on ose communiquer, on comprend à peu près la psychologie, comment s'est fait un humain. Et plus il y aura de machines, et plus on... Je vous invite, on s'invite à comprendre un peu plus ce que c'est qu'un être humain et comment ça fonctionne dans sa diversité. Donc tu as des compétences clés. Moi j'en ai souvent trois, on a tous ces... Mais voilà, quand tu sais écouter, quand tu sais... Alors être empathique, être empathique c'est quelque chose de très particulier. C'est juste... accepter qu'il y a des émotions qui sont des informations qui circulent dans la relation et savoir quoi faire avec ça. Ça n'a rien à voir avec la sympathie ou la compassion, qui sont des qualités morales par ailleurs, ou sociales. L'empathie, c'est juste ça. Quelle est donc l'information qui circule en ce moment entre nous, et qu'est-ce que je fais avec ça, non pas l'ignorer, ça existe. C'est de l'info qui existe. Écoute, empathie, qui est l'écoute des émotions, et l'assertivité, qui est cette capacité à parler. Parler,

  • Frank Lascombes

    Pas beaucoup plus. Et là, on a des opportunités parce que moi, j'aime beaucoup travailler avec des gens techniques, des ingénieurs, des techniciens. Ce n'est pas pour rien que je travaille depuis 14 ans avec les experts comptables. C'est qu'ils ne parlent pas pour rien dire souvent. Et c'est hyper intéressant dans ce monde où tout le monde blablate tellement pour dire si peu de choses dans le fond et en fond que des techniciens. Et finalement, avec une grammaire sujet-verbe-complément au niveau CP, c'est magnifique. Et on ne demande pas plus que ça. Je pense aussi qu'on renouera avec de l'écriture. Je pense qu'on va renouer avec des choses de base, la communication de base. Et ça, ça concerne probablement beaucoup les générations qui arrivent. Je vois, j'ai une équipe de jeunes en ce moment, le premier truc qu'on fait quand même, et ce n'est pas une histoire de niveau intellectuel, vous écrivez, vous apprenez à prendre le téléphone, et on débriefe, etc. Il faut retrouver, je crois, le plaisir simple de la relation, et en plus On n'est pas loin du bonheur, parce que c'est ça qu'ils aiment la plupart des gens. Quand tu dis, mais qu'est-ce que vous aimez dans ce métier-là ? Moi, j'en connais très peu qui disent la technique, la technique. Alors oui, on va retrouver ça chez des fiscalistes, chez des juristes. Mais au-delà de ça, la plupart des gens dans notre profession et dans les professions, ils aiment les gens, ils aiment leurs clients. Même des fois un peu trop. Oui, un peu trop. On dit, mais attends, toi t'es le fils ou t'es le client ? On passe beaucoup de temps avec eux. Mais beaucoup de temps, pourquoi ? Donc, l'amour de la relation. Il faut se connecter à ce plaisir d'être ensemble, de faire quelque chose pour, de rendre service et développer petit à petit ce socle-là de compétences humaines, relationnelles. Ça, c'est la base de la base. Et après, le génie de ces gens-là, c'est que, ce que tu disais Philippe, c'est que si tu organises et tu structures le changement, ils y vont. C'est juste qu'ils ne veulent pas aller dans la... Tu dis bon allez, tu sautes... Tu sautes de 15 mètres quelque part où tu ne vois pas le sol, je ne sais pas. Mais si tu montes le chemin, tu les embarques en fait. Dits autrement, ce sont des gens intelligents. Donc il faut donner envie et puis il faut être un peu cohérent dans la démarche qu'on leur propose.

  • Delphine Buisson

    Justement, est-ce que tu peux nous partager par rapport à tout ce vécu finalement que vous avez avec le Miss School, est-ce que tu peux nous partager une réussite vraiment où la formation a vraiment transformé une culture d'équipe ?

  • Frank Lascombes

    Oui, alors là... comme on est en visible, mais j'ai un sourire parce que ça, ça me fait plaisir. Je vais reprendre mes welcomers. Ils ont des profils différents. Ça va de la super assistante de direction au data scientist, en passant. Il y a toute une panoplie de gens qui vont aller. Ils ont des points communs. Dans les points communs, qui sont des forces et des faiblesses, dans les points communs, ils aiment rendre service. Ils sont souvent bons pédagogues parce qu'ils aiment former. Et ils aiment aussi les trucs compliqués où ils vont trouver une solution. Dit autrement, ce sont à la fois des gens plutôt un peu timides ou réservés, c'est-à-dire pas des grandes gueules, si je le dis, excusez-moi l'expression. Et en même temps, le fait de vouloir rendre service, ils ont tendance à se faire un peu manger. Donc, il faut absolument qu'ils cadrent leur mission. Et pour le reste, ils ont le goût du challenge. Ils aiment les difficultés, en fait. Tu ne croirais pas des gens comme ça. Et donc, c'est hyper intéressant parce que... Quand on les fait parler, parce qu'on les met en situation, on les fait parler. Et ça commence par ça au début. On dit, tu vas te présenter, je veux comprendre qui tu es, ce que tu fais. Et entre le début, ça c'est un bootcamp de deux jours, entre le début et la fin, ça n'a plus rien à voir. Et au-delà de savoir expliquer de façon très claire, grammaire, niveau CP, ce qu'ils font, à quoi ils servent, etc. Ils ont surtout le plaisir de dire qui ils sont et la fierté. Et tout de suite après, tu as bon. Et alors on finit, elle est facturée cette mission. Nous, on voudrait bien, mais la direction ne veut pas. Ils n'osent pas. Je dis bon, allez, il faut peut-être faire une psychanalyse groupée au niveau de la profession, parce que facturer, on sait faire quand même. Dans mon groupement, je vois bien qu'ils facturent. Quand on dit que les experts n'ont pas d'imagination, c'est absolument faux. Les lignes de facture, c'est tout à fait étonnant. Mais là, une facture claire et facturer ce qui a vraiment de la valeur, mais évidemment qu'il faut oser. Donc, tu vois, transformation dans les comportements, il faut... pas grand-chose pour cranter, en fait. Et ça fait très plaisir, et moi, ça me donne, évidemment, beaucoup d'espoir. Est-ce que 100% iront ? Non, bien sûr que non. Il y a des gens qui ne se reconnaîtront pas. Mais est-ce que beaucoup peuvent y aller ? Ouais, clairement,

  • Delphine Buisson

    ouais. Oui, il faut être positif par rapport à ça. Je pense que c'est très clair. Alors, justement, Damien, le concept, c'est vrai, de collaborateurs augmentés, vous en parlez souvent, et ça revient souvent dans les communications au niveau du CNO. Comment le traduis-tu concrètement dans la pratique des cabinets ?

  • Damien Charrier

    Effectivement, ça fait partie des sujets qui sont abordés notamment au travers de la profession comptable 2030. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que quand on dit collaborateurs augmentés ou experts comptables augmentés, en fait, ce n'est pas remplacé. Et je pense que ça vient d'être dit de manière tout à fait juste. Les collaborateurs, les experts comptables, tout ce qui compose un cabinet, c'est d'abord des humains. Et ce sont des gens qui sont souvent profondément humains. Parce qu'on oublie quand même toute cette dimension psychologique qui est importante. Philippe en a parlé tout à l'heure. mais c'est vrai que L'écoute d'un chef d'entreprise qui traverse la vie d'un chef d'entreprise, c'est tout sauf linéaire. Il célèbre par moments des réussites et par moments des difficultés, parfois importantes. Et donc ça, il faut quelqu'un qui l'écoute. On a parlé d'empathie, ça fait parce qu'il y a des émotions. Et d'ailleurs, je pense à une petite anecdote de début de semaine, parce que j'ai un de mes clients qui est en grande difficulté et le collaborateur est allé un peu au-delà de l'empathie. C'est-à-dire qu'il a pris pour lui la détresse du client. Là aussi, je pense qu'on a des choses à travailler sur cette dimension psychologique. Après, j'aime beaucoup ce que disait Delphine sur le bon sens. Et peut-être vous livrer une autre anecdote. Comment fonctionnait le cabinet quand je suis arrivé dedans ? On avait des collaborateurs expérimentés qui faisaient des tournées de TVA. Évidemment, on ne fait plus ça parce que concrètement, on allait chez le client. Mais en fait, ce n'est pas tellement la tournée de TVA qui est intéressante. C'est ce qui se passait dans la tournée de TVA. C'est qu'en fait, ces collaborateurs qui voyaient leurs clients tous les mois, ils revenaient au cabinet avec des trucs du genre, tiens, j'ai vu le pharmacien, ce machin. Ces enfants vont partir en études. Donc en fait, il faut faire une étude prévisionnelle d'IRPP pour savoir si c'est mieux de le détacher ou pas. Si je dois démembrer un bien immobilier, parce que maintenant, on appelle ça la gestion de patrimoine. Parce qu'on s'est organisé, effectivement, et on a peut-être créé des lignes de facture aussi. Parce qu'il y a quand même de l'agilité, on va dire, chez les experts comptables. Mais je pense que c'est ça. Il va falloir revenir quand même de temps en temps aussi à des fondamentaux. Voilà, donc vous l'avez compris, le collaborateur augmenté, c'est effectivement celui qui va utiliser bien la technologie, et pour ça, il faut le former, pour se libérer du temps et rentrer effectivement dans quelque chose d'un peu plus actif en termes de relations clients. Après, ce n'est pas 100% des collaborateurs, ça a été dit aussi. Je pense qu'il faut aussi se dire qu'on va quand même avoir, c'est des profils de postes qu'on est en train de voir émerger, des gestionnaires de flux. et des gens qui vont contrôler la data. Et ça, ce n'est pas forcément des gens qui seront en relation avec les clients parce qu'ils seront peut-être moins à l'aise sur cette dimension-là. Mais par contre, on aura besoin de leur expertise pour qualifier toute cette data automatique qui va arriver dans le système d'information. Donc, ne faisons pas non plus de généralité. On a aussi besoin d'une diversité de compétences.

  • Delphine Buisson

    Alors, je vais profiter effectivement de ta qualité de président de l'institution sur ce sujet d'évolution, parce qu'on voit bien qu'effectivement... Il n'y a qu'à voir, depuis le temps qu'on échange autour de cette table, on voit bien quand même qu'il y a une transformation importante qui est en train de s'opérer. Comment préserver finalement l'identité et les valeurs de la profession dans cette évolution des métiers ?

  • Damien Charrier

    Les experts comptables, ils ont quoi dans leur patrimoine génétique ? Ils ont un serment et puis ils ont une devise. En fait, la devise, elle a été inventée il y a 80 ans. Et cette devise, c'est science, conscience, indépendance. Alors, ce qu'on peut se dire, c'est que la science, en fait, effectivement... elle va être un peu percutée par la technologie parce que ça va plus vite. Mais en même temps, depuis la généralisation d'Internet, on ne travaille déjà pas comme avant. On n'est plus des bibliothèques du code fiscal, en fait. Donc, c'est vrai que ça va encore s'accélérer avec l'IA. Et en même temps, il faut quand même se dire aussi que quand le BofIP, il n'est pas écrit, l'IA, elle ne va rien faire du tout, en fait. Et là, c'est l'expérience qui prend le relais. Donc, il ne faut pas aller trop vite, en fait, sur ces notions-là. Et puis après, les notions fondamentales, la conscience et l'indépendance, c'est toute la valeur ajoutée. c'est ce qui fait qu'un expert contact, prendre du recul dans une situation, enfin un expert comptable, un collaborateur en fait, il n'est pas influencé par son environnement, c'est ce qu'on lui demande en tout cas, et c'est ce que le client lui demande. Et donc ça, ça reste des valeurs qui sont, je dirais, encore plus centrales, parce que l'affluence de technologie, l'affluence d'information, elle peut mettre à mal ces dimensions-là, d'ailleurs dans la société d'une manière générale, parce que la génération des fake news, ce genre de choses, justement l'expert comptable et ses collaborateurs doivent se préserver de ça. Je pense que ces valeurs-là, elles sont extrêmement importantes.

  • Delphine Buisson

    Et c'est vrai que ce que je répète souvent, c'est vrai que surtout avec l'IA qui arrive, etc., c'est qu'il ne faut jamais oublier quand même que la profession a aussi un devoir de compétence, entre guillemets. Et du coup, à l'aune de l'IA et à l'aune de ces outils qui arrivent, attention aussi, parce que les collaborateurs, comme tout un chacun, on est tous confrontés à la techno dans nos univers, je dirais, personnels. parfois envie d'utiliser finalement ces outils-là. Et si on n'a pas, je dirais, des chartes au niveau du cabinet, des chartes comportementales par rapport aux outils, comment on les utilise, etc., ça peut quand même poser des vrais sujets. Parce que, bon, quelque part, le rendu au client, on engage concrètement sa signature et donc, du coup, sa responsabilité. C'est pour ça que je parle souvent de devoirs, de compétences par rapport à ça. Et c'est vrai qu'il ne faut quand même jamais l'oublier et jamais l'obéir. Moi, je voudrais faire un petit tour de table rapide en un mot. Vous prenez à la volée chacun comme il l'entend. Selon vous, quelle est la compétence incontournable du collaborateur de demain ?

  • Philippe Barré

    L'esprit critique. L'agilité.

  • Frank Lascombes

    La capacité à apprendre.

  • Delphine Buisson

    Oui. Intéressant.

  • Philippe Barré

    Mais parce qu'on devait en dire qu'un chacun.

  • Delphine Buisson

    Oui, tout à fait. C'était l'exercice. Merci de l'avoir accepté. C'était l'exercice. On va pouvoir passer à la troisième et dernière partie de ce podcast. Passer de l'intention à l'action. Parce que c'est vrai que là aussi, ce que je répète régulièrement, c'est que... Depuis un certain nombre d'années, on a beaucoup travaillé sur les constats, sur ce qui était en train d'arriver, sur tout ce qui pourrait éventuellement se passer. Maintenant, je pense qu'il est vraiment temps de passer à l'action, d'autant que le temps qui nous sépare de septembre 2026, qui est l'arrivée de la facture électronique, qui va, à n'en pas douter, être un déclencheur assez important d'un certain nombre de choses au niveau du cabinet, y compris des processus. C'est vrai que ce temps de passage à l'action, il est fondamental. Donc, comprendre les enjeux, c'est une chose. Les transformer en actions concrètes et durables, ça en est une autre. Quel rituel mettre en place ? Quel indicateur suivre ? Et par où commencer pour réussir une transformation dès demain matin dans un cabinet ? Alors, Philippe, toi, lorsqu'un cabinet, finalement, te demande par où commencer pour transformer son organisation, quelle première étape lui recommandes-tu systématiquement, en fait ?

  • Philippe Barré

    Alors en fait... Quand un cabinet appelle un consultant pour se transformer, la première étape, elle a déjà eu lieu. La première étape, c'est la prise de conscience par les dirigeants qu'il fallait faire quelque chose. Et c'est vrai, on en a tous conscience, que les experts comptables sont submergés, qu'ils ont toujours du court terme à gérer, qu'ils ne savent pas déléguer, qu'on a des problèmes de recrutement qui font qu'il y a plein de bonnes raisons et aussi plein de mauvaises. pour reporter à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui.

  • Delphine Buisson

    Le syndrome de la tête dans le guidon.

  • Philippe Barré

    C'est ça. C'est-à-dire qu'effectivement, on a beaucoup de cabinets où il y a un dirigeant qui est plus un super technicien qu'un dirigeant. Et c'est vrai que dans ces moments-là, dans les moments de transformation, quand ça tangue, je ne sais plus qui a dit, c'est quand on traverse une zone de turbulence qu'on voit la qualité du pilote. C'est vrai que sur les 30 dernières années, il y a eu des changements dans la profession. Mais on est passé à la DSN, on est passé à des choses comme ça. Alors c'était des changements, mais c'était des changements techniques. On ne changeait pas de métier, on ne changeait de logiciel, on changeait de choses comme ça. Mais le métier était le même, l'objectif était le même, etc. On était en plus sur du régalien à 60%, 70% de notre activité. Donc on n'avait pas de commercial à faire, puisque la prestation qu'on vendait était une prestation incontournable, obligatoire pour tout chef d'entreprise. Dieu merci, le français est d'une complexité inouïe. Quand ils sont députés ou sénateurs, je pense que c'est encore pire. Et donc, ils rajoutent une complexité chaque année encore plus forte. Et donc, c'est ce qui a fait que les experts comptables étaient incontournables et sont incontournables. Alors, on va dire, ils ont profité de la situation. Pas du tout. Ils ont fait le job dont on avait besoin, dont l'économie avait besoin, dont les chefs d'entreprise avaient besoin. Alors certes, ce qu'on a fait, c'est-à-dire faire des liasses fiscales, des bilans, des bulletins de paye, des machins, des bidules, ça n'a pas apporté une grande valeur ajoutée. aux dirigeants en tant que dirigeants, au sens où il n'a pas fait grandir son entreprise. Mais ça lui a quand même enlevé une sacrée épine du pied, parce que s'il n'avait pas fait ses liasses fiscales, etc., ça aurait été d'une complexité inouïe. Mais une fois qu'on a dit ça, ce qui se passe maintenant, ça ne ressemble pas à ce qui s'est passé jusqu'à maintenant. Parce que la tenue de comptabilité, elle va être faite en grande partie par des outils. Et donc, c'est le modèle économique qui est en jeu. Et ça, on ne l'a pas eu depuis très, très, très, très longtemps. Ce qui veut dire quoi ? Ce qui veut dire qu'il va falloir réinventer le cabinet. Et donc, quand on me sollicite pour accompagner un cabinet, la première des choses, c'est c'est quoi le cabinet au vendu ? Comment ça fonctionne, votre diagnostic ? Ce qui va bien, ce qui ne va pas bien ? Ce pour quoi vous êtes bon, ce pour quoi vous n'êtes pas très bon ? Qu'est-ce qui vous différencie les voisins ? Ou alors, est-ce que vous êtes tout à fait ordinaire ? Que ce soit péjoratif dans mon esprit, vous êtes un cabinet normal de 5, 10, 15 personnes, 20 personnes, 50 personnes. Bon, OK. Et alors après, c'est vous voulez aller où en ayant évidemment intégré. dans la réflexion tout ce qui va se passer. Parce qu'il y a des cabinets, au dernier congrès ou au congrès d'avant, il y avait encore, je ne sais plus combien, 10 ou 15% de cabinets qui disaient « mais moi dans les 5 ans, je continue comme avant » . Bon, donc ça veut dire qu'il y a quand même 10-15% de cabinets qui ne seront pas chers bientôt. Parce qu'effectivement, il y a peu de chances qu'ils aient une résistance aux événements qui vont se passer. Donc là, la question c'est « vous voulez aller où ? » Et évidemment la question d'après c'est « comment on y va ? » « comment on fait ? » etc. et si Qu'est-ce que vous voulez être dans 5 ans ? Avec évidemment une intégration des projets professionnels de chaque dirigeant qu'il faut intégrer dans le mixeur pour arriver à un projet d'entreprise qui soit un vrai projet d'entreprise et pas juste faire ce qu'on a fait depuis 25 ans. Et là le problème c'est qu'il faut inventer des nouveaux métiers, des nouvelles missions, enfin quand je dis métiers, prestations, des nouvelles missions qui n'ont pas le même modèle économique que les missions traditionnelles. Parce que moi, je suis très admiratif et sincèrement très admiratif pour les cabinets qui se lancent dans la gestion de patrimoine. Mais dans un cabinet de 20 personnes, quand il y a un ou deux associés et qui se lancent dans la gestion de patrimoine, qui va faire ces missions-là ? C'est la personne qui ne fera plus de saisie et de TVA ? Certainement pas. Donc, le dirigeant qui lui-même est déjà la tête dans le guidon, qui n'a pas le temps pour diriger son cabinet, qui va devoir transformer son cabinet, qui va devoir faire tout ça, alors bien sûr, c'est une porte de sortie, la gestion de patrimoine. Mais ça ne peut pas être la planche de salut du cabinet. Parce qu'en plus, la gestion de patrimoine, j'ai accompagné une carrière de cabinet qui en font. Le modèle économique, c'est on fait une belle mission tous les 2, 3, 4, 5 ans, 10 ans, 15 ans, mais on ne facture pas tous les mois. Et voilà, c'est pareil pour plein d'autres missions qui sont exceptionnelles. Donc les missions qu'il faut que les cabinets, et là, ça fait partie de mon job, que de les aider à trouver leur mission de demain, il faut quand même que ce soit adapté à leur équipe. Notamment les équipes qui vont perdre les missions traditionnelles de tenue, il faut que ce soit adapté aux clients. Quand vous avez des boulangers comme clients, des charcutiers, des électriciens, des consultants ou des médecins, ils ne vont pas acheter une mission de cybersécurité tous les deux ans. Donc ça veut dire qu'il faut quand même que la mission soit adaptée à la fois aux compétences qu'on a et aux clients qu'on a.

  • Delphine Buisson

    Et moi ce que je retiens aussi dans ce que tu disais au début, c'est que ça me semble important, c'est vraiment de répéter, parce que ça a été souvent le cas dans la profession que l'outil était la stratégie en fait. L'outil, on le sait, je dirais, dans les 10, 15, 20 dernières années, tu le disais très justement, on arrivait à solutionner finalement une contrainte supplémentaire technique qui arrivait, la DSN, etc. C'est vrai que l'outil, du coup, à chaque fois répondait finalement à ces exigences qui étaient portées au cabinet en termes de pratique. Et finalement, c'est devenu quelque chose d'acquis qu'en réalité... Finalement, la stratégie, c'est l'outil. Et donc, je me précipite au congrès, sur les sites des éditeurs dont nous sommes, et je m'équipe avec un outil. Et ça, assurément, ça ne pourra plus fonctionner comme ça.

  • Philippe Barré

    Alors, ça ne pourra plus fonctionner comme ça. Et c'est ça qui est très paradoxal. Parce que l'expert comptable, effectivement, avant même d'avoir une stratégie, il y a un éditeur, il y a quelques années, qui est assez connu, qui me racontait un jour, on prenait un café tous les deux, il me racontait qu'un tiers des outils qu'il vendait, notamment au congrès, n'étaient jamais ouverts. Parce que c'était des outils pour faire des nouvelles missions. Après, on est face à deux paradoxes par rapport aux outils. Le premier paradoxe, c'est que comme l'outil fait de plus en plus de choses, sur un gâteau qui constitue les honoraires de l'expert comptable, il est évident que la cote-part qui revient à l'outil augmente naturellement. S'il faisait 10% de la mission il y a 10 ans et qu'il en fait 70% aujourd'hui, il est un peu logique que le curseur évolue et que le prix de l'outil augmente par rapport à la contribution. de l'expert comptable. Et donc, en ayant remis tous nos œufs dans le même panier qui est le panier de l'outil, le résultat, c'est qu'évidemment, on a un problème de transfert de valeur, on a un problème de partage de la valeur, etc. Donc ça, c'est le premier paradoxe. Et les experts comptables trouvent que leurs éditeurs sont chers, mais malheureusement, il faut aussi comparer par rapport à ce qui a été fait. Moi, j'ai commencé il y a 35 ans, les bulletins de paye, on prenait un papier, on mettait brut montant, charge sociale sur le plafond, charge sociale sur le total, net. Et c'était fini. Et j'avais un patron qui m'avait dit, on ne va quand même pas faire de la paye, c'est un boulot de secrétariat. Aujourd'hui, c'est 14% du chiffre d'affaires de la profession. Et les outils, pour le coup, je crois qu'en matière d'outils en paye, on a eu quand même quelques moments un peu compliqués. Le deuxième paradoxe, c'est qu'on constate que les outils, sur certaines missions, font plein de choses, mais sur d'autres, ne feront pas le job. Et demain, les nouvelles missions, ce ne sont pas les outils. Je prends un exemple, reprenons l'exemple de la paye. On a un prestataire qui est super connu. qui n'est pas celui auquel vous pensez, qui est un prestataire 100% Internet qui a proposé de faire la paie depuis quelques années. Il a eu le prix de la meilleure start-up de LinkedIn, etc. Et en fait, il a capté plein de clients, parce qu'il n'était pas très cher au début. Il a piqué plein de clients aux experts comptables en matière de paie. Et je me souviens, les experts comptables, ils râlaient parce que leurs clients se tiraient. Alors, j'ai fait auditer des bulletins de paie réalisés par cet éditeur en disant, bon, les bulletins de paie doivent être faux. Eh bien, manque de bol, ils étaient justes. Et donc... A priori, c'était mal parti pour les experts comptables parce qu'ils étaient plus chers et les bulletins de paye de l'éditeur étaient bons. Et puis, depuis 3-4 ans, cet éditeur, il se casse la gueule. Il a fait deux plans sociaux, ses projets européens se sont concentrés sur la France, et même sur la France, ils ont perdu beaucoup de leur superbe. Et il y a plein de cabinets qui m'appellent et me disent « tu sais, j'avais perdu tous les bulletins de paye de 14 dossiers, etc. » Sur les 14, il y en a 6 ou 7 qui sont déjà revenus. Pourquoi ? Parce que la paye, c'est une complexité. La paye, c'est aussi des contrôles sociaux. Quand vous êtes en face d'un écran, il n'y a pas d'interlocuteur. Et donc, ça veut dire qu'il faut bien identifier les missions. Si on se met sur des missions qui sont 100% automatisables, évidemment, il n'y aura pas de place. Et on va se faire 100% remplacer par des logiciels. La jurisprudence récente nous est pas très favorable là-dessus. Donc il faut évidemment inventer des missions dans lesquelles l'humain est le cœur de la mission, pas le logiciel. On aura besoin du logiciel pour nous filer un coup de main, mais ça doit être qu'un coup de main.

  • Delphine Buisson

    Delphine, si un cabinet concrètement veut agir dès demain, finalement quelles sont pour toi les trois actions simples à mettre en place ?

  • Frank Lascombes

    En fait, c'est pas possible de répondre à cette question, parce que ça dépend d'où il part. Philippe, tu dis la question c'est savoir où je vais. Déjà c'est où je vais, où nous allons. puisqu'ils sont globalement des collèges de direction, ce qui rend les choses un peu plus complexes. Et j'ai envie de dire, c'est une époque en ce moment où la bonne question à te poser, c'est qui je suis et qu'est-ce que j'aime faire ? Parce qu'on parle de l'expert comptable comme si c'était... En fait, moi, j'en connais, comme vous, plein, beaucoup. Il n'y en a quand même pas deux qui se ressemblent et surtout, il n'y en a pas deux qui habillent le métier exactement de la même façon. Et donc, la première question, c'est qui on est et qu'est-ce qu'on va faire ? Partant de qui nous sommes, qui avons-nous envie de devenir ? Ça, c'est la première question. Après, la deuxième orientation, parce qu'on n'en parle pas, mais ça n'est pas neutre en ce moment, tous les sujets qu'on va mettre sous le mot financiarisation du moment vont avoir énormément d'impact entre aujourd'hui et demain sur ce qui va se passer dans la profession. Aujourd'hui, j'ai besoin de choisir, outre le fait de ce qu'on a ce que j'ai envie de faire ou ce qu'on a envie de faire collectivement, j'ai besoin de choisir le modèle d'exercice. Et le modèle d'exercice, il sera très différent. Et sans jugement de valeur, je peux choisir de rejoindre une marque, parce que je considère que la marque, elle va faire un certain nombre de choix que je n'aurais pas à faire, etc. Je peux choisir de rejoindre une technologie leader. Et là, je ne suis pas complètement d'accord avec vous sur la partie technologique, parce qu'on a aujourd'hui des technologies qui sont en train de devenir leader. Et je peux choisir de devenir, alors je ne vais pas dire sous-traitant d'une technologie, c'est peut-être un peu beaucoup, mais en tout cas de dire je vais suivre le mouvement imprimé par la technologie. Si l'opérateur dont tu viens de parler, Philippe, avait été un peu plus ouvert, ce qu'il n'était pas du tout, et qu'ils avaient mis l'humain qui allait bien avec, ils n'en seraient peut-être pas là aujourd'hui. Mais ce n'est pas le cas des technologies qu'on voit émerger, qui appréhendent à la fois une technologie très assertive. Et des gens qui vont se conglomérer autour, en fait, en termes d'offres de services, etc. Donc, tu peux aussi avoir un exercice de ce métier-là avec des technologies leaders. Tu peux... Alors ça, je ne sais pas trop ce que ça va donner, mais il faut peut-être qu'on arrête de se mentir. Si je fais rentrer des fonds d'investissement suffisamment de façon importante, il ne faut pas me raconter qu'une fois qu'on a vendu... Et encore une fois, il n'y a pas de jugement de valeur là-dedans. Je peux avoir envie de préparer ma retraite, de réaliser tout mon travail. Enfin, je veux dire, c'est très honorable. Mais je ne vois pas bien, quand on sait le travail qu'il y a à faire aujourd'hui dedans, ou alors il va falloir changer, ça ne suffit pas d'injecter de l'argent pour dire que le travail va se faire. Et moi, ça me hérisse un peu quand j'entends des plateformes de cabinets, des agrégats de machins, qui vont devenir des concentrateurs. Mais alors, d'accord, mais des concentrateurs de quoi ? De compte de résultats ? D'accord. Et donc ça, c'est un autre modèle. Je peux choisir, encore une fois, il n'y a pas de jugement à avoir, je peux décider de... de faire entrer, mais du coup, je ne suis plus aux commandes et je ne sais pas trop comment je vais gérer la transformation. En tout cas, ça va être une transformation assez financière, mais pourquoi pas ? Et puis après, il y a ce que j'appelle les entrepreneurs leaders. Voilà, ça, c'est ce que j'aime bien recruter chez Eurus. Et encore une fois, sans... Les autres,

  • Damien Charrier

    tu ne nous as pas présentés pour nous faire rêver. Nous, on est dans notre châtel, en fait.

  • Frank Lascombes

    Non, mais je peux comprendre qu'on n'ait pas envie, parce que j'en ai... Vous n'étiez pas enthousiaste. Je ne suis pas enthousiaste, parce que ce n'est pas ceux pour lesquels je travaille. Mais par ailleurs, quand j'ai un petit cabinet de mon groupe qui rejoint le très beau groupe Inextenso, qui sont des gens que j'aime beaucoup, etc. Mais parfait, et je comprends très bien ce qu'ils font. D'accord ? Je dis quand, en tout cas, il y a une place. Pour des entrepreneurs qui veulent garder la direction, et les groupements sont là pour les aider, l'institution, etc. Mais là, il y a effectivement du travail à faire. Et pourquoi pas faire rentrer des investisseurs, quels qu'ils soient, mais il faut avoir un projet à financer. Et donc, la troisième question, j'ai dit qui suis-je et qui sommes-nous collectivement avant de dire où allons-nous ? Quelle modalité d'exercice choisissons-nous collectivement ? Parce que c'est un vrai sujet qui se pose aujourd'hui et il faut faire un choix. Il faut faire un choix. Et la troisième chose, retour au client et à l'offre. Qu'est-ce qu'on vend ? Quelle est la valeur qu'on produit ? Et puis après, derrière, ça va être de la mise en place. Mais c'est assez passionnant. Là, pour le coup, c'est des petits pas. C'est un chantier après l'autre. C'est du chantier. Ça n'est pas impossible. Je suis sûre que tu connais, que nous connaissons tous. Moi, j'en ai dans mon groupe et j'en vois ailleurs. Je vois de très belles choses arriver. Ce n'est pas forcément des gens qui font du bruit, mais je vois des gens qui ont déjà passé le cap de la transformation. Tu le vois dans une enseigne, tu as le mot technologie qui apparaît sans complexe. Il y a plein de choses qui apparaissent comme ça. Et peu à peu, les transformations se font par les offres et par les métiers.

  • Delphine Buisson

    Mais il ne faut jamais oublier que ça, de toute façon, c'est le cas pour toutes les entreprises. Tout part du client et tout doit partir du client. Et en fait, c'est le client qui, quoi que lui en soit... nous donne la voie finalement quelque part de ce qu'on peut proposer et de ce qu'on doit proposer.

  • Frank Lascombes

    Que le client soit conscient ou pas.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait. Et c'est là où est la difficulté parce que justement, il faut savoir bien le questionner. Ou l'opportunité. Voilà, bien le questionner, bien être attentif aux opportunités ou signaux faibles éventuellement qu'il peut nous apporter pour pouvoir répondre au mieux à son besoin et lui apporter un maximum de bénéfices.

  • Philippe Barré

    Et c'est là-dessus où on n'a pas forcément été très bon. Parce qu'on n'en avait pas besoin et parce qu'on était submergé par le quotidien. Mais c'est là-dessus probablement que ça va beaucoup changer. Ça va beaucoup évoluer.

  • Delphine Buisson

    Damien, moi j'aimerais t'interroger. Alors à la fois finalement, en tant qu'expert comptable, dirigeant de cabinet, mais à la fois avec ta casquette de l'institution et de président de cette institution, finalement s'il y avait un seul conseil à un dirigeant de cabinet pour passer de la réflexion à l'action en 2025-2026, lequel serait-il pour toi ?

  • Damien Charrier

    Alors, je crois que la difficulté qu'on a dans la profession, ça m'a toujours marqué, c'est de conjuguer le temps court et le temps long. Le temps court, c'est celui de la production, et le temps long, c'est plutôt celui de la stratégie, de la planification et de la transformation. Juste un point d'attention, c'est que ça ne va pas s'arranger, parce qu'on va passer d'une comptabilité d'échéance, c'est ce qu'on sait faire depuis toujours, à des flux continus. Et donc, du coup, ce qu'on faisait avant entre deux échéances, si on ne s'organise pas différemment, on ne le fera plus du tout, puisqu'en fait, on sera en production continue. Donc voilà. C'est juste un petit préambule, mais qui me paraît important. Ensuite, on a quand même une chance importante, c'est qu'on a une date. On a une date, c'est le 1er septembre 2026, donc en fait, on n'a pas le choix. Donc, moi, le premier conseil, c'est que pour ceux qui n'auraient pas commencé, il faut s'appuyer sur la facture électronique pour s'en servir comme vecteur de transformation. Parce que c'est un super vecteur. Je donne quand même quelques chiffres, c'est que 22 000 experts comptables en France, 190 000 collaborateurs, donc on a 210 000 personnes qui travaillent au quotidien pour 3,5 millions d'entreprises. sur les 8 millions d'assujettis à la facture électronique. Donc il y a 50% du job de conversion qui repose sur les experts comptables. Donc appuyons-nous là-dessus pour accélérer la transformation. Ça c'est vraiment un point qui me paraît extrêmement important et c'est une vraie chance. Et le deuxième, c'est que de toute façon il faut déjà décider et si on a besoin d'un support méthodologique, il faut aller voir Delphine, il faut aller voir Philippe. Et bien sûr, les instances, les conseils régionaux qui font beaucoup sur le sujet, le Conseil national. Mais vraiment, je fais une différence entre exercer seul, parce que je fais une différence entre être seul et être isolé. Surtout, il ne faut pas rester isolé. Le rôle des instances, pour revenir sur la chapelle et la Cichaud-Prêchoir, c'est que le rôle des instances, c'est d'embarquer tout le monde. Donc, de donner les chances à tout le monde d'arriver à réussir cette transformation. Donc voilà, il y a plein de choses qui sont produites, il y a plein d'énergie qui est mise sur ce sujet-là. Donc vraiment, n'hésitez pas à aller voir les instances, n'hésitez pas à aller voir les syndicats ou les groupements. Il y a plein de façons d'y arriver en fait, mais il faut déjà effectivement commencer.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait, je pense que moi ce que je retiens de ce que tu viens de dire aussi, c'est qu'effectivement, il faut faire attention à la partie isolement, au côté isolement. Et d'ailleurs, l'Ordre a toujours, je dirais, fait son travail sur ce sujet-là, en sortant par exemple des guides, des groupements, des guides des réseaux. Parce que parfois, c'est vrai que ça peut être bien de pouvoir mutualiser des échanges, avoir des échanges avec ses consoeurs, ses confrères, pour se faire une idée. C'est important. Il ne faut quand même pas oublier, quand on regarde comment est construite la profession, qu'il y a quand même encore beaucoup de cabinets de moins de dix collaborateurs. Cette notion d'isolement peut être quand même importante.

  • Frank Lascombes

    Il est venu le temps de conclure quand même, parce que c'est vrai qu'on est bien ensemble. Je pense qu'on pourrait faire un podcast de deux heures sans difficulté sur ces sujets-là qui sont vraiment importants. Ce que vous avez entendu aujourd'hui, c'est que clairement, la transformation des cabinets n'est pas qu'une affaire de logiciel ou de process, mais une histoire d'hommes et de femmes, très clairement. La chance qu'on a avec ces outils, c'est qu'ils libèrent du temps, mais c'est ce que l'on fait de ce temps qui fait la différence. conseiller, accompagner, donner des bénéfices aux clients. Les outils finalement ne sont qu'un moyen, certes important, de le rendre possible. Nous avons aussi vu que cette transformation ne se décrète pas, elle s'accompagne pas à pas. Elle suppose d'écouter les résistances, de rassurer, de donner du sens. Elle suppose aussi de redéfinir les rôles, de former en continu, de créer des communautés d'apprentissage et de pratique. Chez Agiris, nous avons compris que nous devions nous aussi dépasser notre mission originale, et c'est notre transformation à nous, de dépasser cette mission de développeur d'outils. C'est la raison pour laquelle on a bâti de véritables programmes de transformation à destination des cabinets. Je vous laisse vous renseigner auprès de nos équipes qui vous accompagnent chaque jour sur le terrain. Enfin, cette transformation demande du courage managérial. Instaurer de nouveaux rituels, mesurer l'adhésion, célébrer les progrès, bref, agir concrètement pour embarquer toute l'équipe. Si je devais retenir une seule idée, c'est celle-ci, la technologie est un accélérateur, mais la vraie clé c'est l'humain. C'est en libérant l'énergie des collaborateurs que les cabinets deviendront non pas des producteurs de chiffres, mais de véritables copilotes de la réussite de leurs clients. L'idée étant de passer d'un cabinet qui fait à un cabinet qui accompagne, d'un cabinet prestataire à un cabinet partenaire. Merci à nos trois invités pour leurs éclairages. Merci à vous qui nous avez écoutés et de porter ce mouvement au cœur de vos cabinets. Je vous donne rendez-vous bientôt pour un nouvel épisode autour des enjeux de la transformation des cabinets. Merci pour votre écoute et à très vite.

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Comprendre et lever les résistances

    03:25

  • Rédéfinir les rôles et développer les compétances

    26:20

  • Passer de l'intention à l'action

    39:09

  • Conclusion

    58:40

Description

Et si la vraie transformation des cabinets était humaine ?


Découvrez comment les cabinets d’expertise comptable évoluent face aux enjeux humains, managériaux et organisationnels.


Dans ce podcast signé AGIRIS, des experts partagent leurs expériences et leurs conseils pour réussir la transformation RH :

  • comment lever les résistances au changement et mobiliser les équipes,

  • quelles compétences développer pour répondre aux nouvelles attentes des clients,

  • comment redéfinir les rôles au sein des cabinets à l’ère de la digitalisation,

  • et surtout, comment faire de l’humain le moteur de la transformation.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Frank Lascombes

    Bonjour à tous, je suis très heureux de vous accueillir sur cet épisode consacré à la transformation RH des cabinets. Imaginez un cabinet comptable il y a 30 ans. Les collaborateurs aligner des colonnes de chiffres, additionner, ressaisisser. Leurs valeurs se mesuraient à la rigueur, à la précision. Aujourd'hui, tout cela peut être fait par une machine en quelques secondes. Mais ce que la machine ne fera jamais, c'est écouter un dirigeant inquiet, comprendre l'histoire cachée derrière des comptes, détecter un signal faible dans une conversation, donner confiance pour prendre une décision. Cette dimension humaine... C'est le vrai cœur du métier. La transformation qui s'impose à la profession n'est pas seulement une révolution technologique. C'est une révolution de posture. Les équipes ne sont plus des producteurs de chiffres, elles deviennent des copilotes de la réussite des clients. Mais cette évolution ne se fera pas par les outils seuls. Elle passera surtout par l'accompagnement des collaborateurs pour qu'ils développent de nouvelles compétences changent de regard sur leur métier et trouvent leur place dans cette nouvelle dynamique. C'est une formidable opportunité, plus de temps pour conseiller, accompagner, anticiper, mais pour y arriver, il faut embarquer tout le monde, y compris ceux qui doutent, ceux qui craignent de perdre leur place, ceux qui n'ont pas encore trouvé leur rôle dans ce nouveau paysage. C'est tous ces sujets que je vous propose d'aborder aujourd'hui. Comment réussir cette transformation, pas seulement avec des outils, mais avec les femmes et les hommes qui font vivre les cabinets ? Comment lever les résistances, développer les compétences et donner envie à chacun de contribuer à la création de valeur ? Parce que la clé de la transformation est technologique, bien sûr, mais elle est surtout humaine. Pour en discuter aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir trois personnalités qui connaissent parfaitement la profession et ses défis. Je vais les laisser se présenter en 20 secondes chrono. Honneur aux dames, Delphine.

  • Delphine Buisson

    Bonjour tout le monde, je suis Delphine Buisson et ravie d'être avec vous pour échanger sur ces sujets assez passionnants, comme on passe de la réflexion à l'action.

  • Damien Charrier

    Bonjour Damien Charrier, je suis expert comptable en Normandie et je suis confronté au défi que tu viens d'exposer. Et puis je suis présent en qualité de président du Conseil national des experts comptables. Merci Damien.

  • Philippe Barré

    Bonjour Philippe Barré, je suis expert comptable en région parisienne et j'ai la particularité... d'avoir choisi de changer un peu de métier en accompagnant les experts comptables dans leur transformation, dans leur évolution, etc.

  • Frank Lascombes

    Merci beaucoup Philippe, merci beaucoup tous les trois. Donc sans plus attendre, ce que je vous propose c'est de rentrer dans le vif du sujet. On a beaucoup de choses à se dire aujourd'hui. Donc commençons, cette table ronde abordera trois points principaux. Comprendre et lever les résistances, premier point. Second point, redéfinir les rôles et développer les compétences. Et enfin, passer de l'intention à l'action. Parce qu'il y a un moment donné, comme on dit, il faut y aller. Donc comprendre et lever les résistances. On parle beaucoup de stratégie et d'outils, mais la première réalité de la transformation, ce sont les résistances humaines. Peur de perdre son rôle, manque de temps, sentiment d'être bousculé. Si on ne lève pas ses freins, aucun projet ne tient. Alors comment embarquer les équipes dès le départ ? Damien, selon toi, quels sont aujourd'hui les freins humains ? plus marquants dans la transformation des cabinets et comment l'ordre peut-il aider à les surmonter ?

  • Damien Charrier

    Bien sûr, il y a des résistances et je dirais que c'est normal parce qu'on est sur des mutations en profondeur et en fait l'inconnu ça fait toujours peur. En fait, il faut beaucoup accompagner, il faut redonner du sens, il faut redonner la clarté et c'est le rôle de chaque dirigeant de redonner les grandes directions de poser la stratégie. Une fois qu'on a dit ça, pour que les choses deviennent un peu plus concrètes, Il faut surtout former, et c'est ce que fait le Conseil national, c'est ce que font aussi les conseils régionaux, bien entendu. Et notamment, il y a un grand plan de formation qui existe, Profession comptable 2030. L'objectif de Profession comptable 2030, c'est justement de redonner une vision d'ensemble, de créer des parcours. Alors, les chiffres sont assez impressionnants, puisqu'il y a plus de 400 parcours actifs. Et depuis que ça existe, en fait, j'ai quelques chiffres à vous partager. On a déjà 3 800 professionnels qui ont été engagés et on est à 27 000 jours de formation. C'est quand même très significatif et je pense que c'est vraiment la prise de conscience que le changement, il est là. On est à moins d'un an de la facture électronique, donc il y a quand même des choses qui vont se passer dans le concret. Le hit parade des formations, c'est sans surprise, je dirais, cap durabilité. Donc voilà, c'est l'intégration effectivement de nouveaux enjeux. Et puis après, il y a le travail de la data pour développer les missions. Et le dernier, c'est organiser le cabinet autour de la facture électronique. Les deux derniers sujets, je pense que c'est vraiment sans surprise. Ce qu'on peut dire, c'est que derrière ces parcours, derrière ces chiffres, il y a une profession qui est en mouvement. Après, on va y revenir, je pense, dans la suite de nos échanges. Mais il faut agir sur ces leviers-là. Il faut agir également sur la prise en compte, plutôt du côté de l'expert comptable, manager, justement de cette dimension managériale des soft skills. Parce que tout ça aussi, ça va devenir des compétences qui sont déjà importantes dans les cabinets, mais qui vont être... d'autant plus importante pour les collaborateurs de demain, mais là aussi, on reviendra sur ces sujets.

  • Frank Lascombes

    Et quand tu parles de 3 800 professionnels qui ont participé à ce parcours, c'est à la fois experts comptables et collaborateurs ? Oui, bien sûr.

  • Damien Charrier

    La profession comptable 2030, ce n'est pas réservé aux experts comptables, c'est les experts comptables, les managers, les collaborateurs dans les cabinets, donc ça balaye effectivement assez large.

  • Frank Lascombes

    Et ce cadre durabilité, il n'y a pas eu un petit frein avec la loi Omnibus ? mais...

  • Damien Charrier

    Pas tant que ça. En fait, je pense que sur la durabilité, il y a des enjeux côté expertise comptable, il y a des enjeux côté compagnie des commissaires au compte. Et en fait, les experts comptables sont positionnés vraiment pour accompagner les entreprises, y compris les plus petites, sur des premiers pas en matière de durabilité, même si effectivement la contrainte s'est un peu éloignée. Par contre, on sait qu'il y a des demandes nouvelles qui viennent notamment des banques sur ces enjeux-là. Donc ça arrive par capillarité dans les entreprises.

  • Frank Lascombes

    et toi enfin À titre personnel et par rapport à l'institution que tu représentes, est-ce que tu constates une différence finalement de posture entre générations, entre tailles de structures, entre tailles de cabinets ou éventuellement même peut-être titre de mission ou pas du tout ?

  • Damien Charrier

    Oui et non. C'est-à-dire que je pense que tout le monde est concerné déjà, quelle que soit la taille de la structure. et je pense que dans les missions, pour répondre effectivement sur cet aspect-là, de manière très factuelle, je pense que les missions d'établissement, les missions de tenue, sont les missions qui vont être... modifié le plus rapidement par ces évolutions technologiques et sur lesquelles il y a vraiment besoin de se pencher parce que c'est encore aujourd'hui une partie très importante de l'activité des cabinets. Donc là-dessus, il faut effectivement bouger. Ce sera peut-être un peu moins le cas sur d'autres, encore que. Et puis sur les générations, il y a un effet générationnel, mais là aussi, je pense qu'il faut vraiment miser sur la complémentarité. Il ne faut pas imaginer que l'intelligence artificielle va se substituer à tout et on aura encore besoin de techniciens, et notamment de très bons techniciens dans les cabinets. et ça La technique, en fait, elle est souvent maîtrisée par les plus anciennes générations. Et je pense notamment aussi parce que, voilà, nous, on a aussi un volet emploi des seniors qui est important. Et en fait, on est plutôt là à essayer de retenir les compétences plutôt que, effectivement, se priver des compétences des anciens. Et puis, voilà, les jeunes sont peut-être un peu plus agiles avec les outils, encore que là-dessus, il n'y a pas de règles établies. Donc, voilà, je pense qu'il faut être attentif à ces... à ses aspects générationnels et construire la pyramide des âges. Quand on a plusieurs collaborateurs, il faut essayer de mixer un peu les générations. Je pense que ça, c'est important.

  • Frank Lascombes

    Je me tourne vers toi, Delphine. C'est vrai que tu as une expérience assez intéressante avec l'Umi School. Quand vous intervenez avec l'Umi School auprès des équipes, quelles sont les résistances que tu observes le plus souvent, le plus régulièrement ?

  • Delphine Buisson

    Quand ils entrent chez l'Umi School, ils sont déjà plus résistants.

  • Frank Lascombes

    Oui, ils ont déjà fait le port.

  • Delphine Buisson

    Oui, précisément, on est sur un public qui est au moins convaincu du fait qu'il faut pratiquer pour évoluer. C'est un dispositif qui est très complémentaire sur tout ce qui est fait par les instances. Et puis, voilà, divers dispositifs dans les groupements. Tous nos copains groupements, on travaille beaucoup là-dessus. L'UmiSchool, lui, vient adresser vraiment un sujet très spécifique et avec une pédagogie spécifique. Les nouveaux métiers m'ont orienté business. Nous, on est convaincus que la résistance, elle ne s'opère pas quand tu es bien présent. Damien, il parle de clarté, c'est un très joli mot, la clarté. Pour travailler sur le sujet des nouveaux métiers en lien avec les nouvelles missions, tu te rends compte que de façon très simple, il manque parfois un intitulé, une fiche de mission qui est en fait le pendant de la fiche de poste. En fait, la fiche mission, c'est pour le client, la fiche de poste, c'est pour les RH, mais elles doivent se retrouver absolument. Et c'est ce qui va rendre finalement à la fois le métier et donc la mission attractive. C'est aussi ce qui permet de redéfinir de façon très précise ta stratégie de l'offre. Donc, plutôt que d'aller chercher dans la granularité ultime qui est les compétences un peu comme un sac de billes, à travers l'UmiSchool, on va recréer des parcours métiers qui vont adresser des missions. Donc, on part toujours de la mission. On dit c'est quoi la mission au client ? Du coup, on ne se pose plus le problème du sens parce que le sens, il est dans la mission. Qu'est-ce qu'on fait ? Quelles valeurs on produit pour les clients ? Et au passage, il y a beaucoup de missions qui ont de l'impact en interne aussi. Et puis une fois que la mission est décrite, on va construire le parcours de formation. Et du coup, on prend le sujet à l'envers et après on forme donc à la mission. Après évidemment, tu as le protocole technique. la stack technologique et la stack comportementale. Du coup, on crée une sorte de cohérence pour que finalement des cohortes de personnes qui vont finalement embrasser ou habiller le même métier d'une façon, allez, à 80%, c'est la même chose. Le parcours qui tourne le plus aujourd'hui, enfin, on en a deux qui tournent très bien, c'est les intégrateurs, les welcomeers, les tech CSM. Tech, évidemment...

  • Damien Charrier

    Pour aborder les clients, en fait.

  • Delphine Buisson

    Les tech CSM, c'est ceux qui pilotent aujourd'hui le passage à la facture électronique, pour dire les choses simplement. eux, on voit bien, ils ont des profils assez différents. Ils comprennent très bien qu'ils sont le pivot pour aller, on va dire, compléter l'offre de tenue, ou en tout cas l'enrichir en la servicialisant. Ce n'est pas français ce que je raconte, mais c'est un peu ça. Si tu apportes du service à cette tenue qui va être très numérique, très digitale, tu peux conserver, voire même développer une partie de valeur et très vite appréhendable par le client. Et puis, d'un autre côté, tu gardes la maîtrise de ta donnée. donc tu peux aller voir gentiment vers du conseil, on va développer encore d'autres parcours. Mais l'idée, c'est vraiment de clarifier. Quand tu clarifies, les gens se sentent bien. Et c'est très intéressant de voir qu'on n'est pas dans la granularité des compétences, on n'est pas dans un petit sac de billes, mais on vient réassembler la cohérence de la mission, le management de ces gens-là, la valeur aussi facturable. Clairement, on travaille sur les prix, puisqu'on pense que quand on crée de la valeur, il faut qu'elle soit facturée.

  • Frank Lascombes

    Justement parce que forcément tu échanges beaucoup avec les dirigeants de cabinet qui quelque part arrivent à convaincre leurs collaborateurs de rentrer dans cette dynamique-là et qui les envoient du coup chez Lumiscool. Et justement par rapport à toutes tes discussions et tous les échanges que tu as avec eux, comment en fait s'ils arrivent à transformer finalement la peur du changement du collaborateur en envie de se transformer en fait ?

  • Delphine Buisson

    Alors tu dis deux choses importantes. D'abord on parle souvent de la peur du collaborateur. Moi je rencontre plutôt... dans les directions des gens qui n'ont pas statué, je ne veux pas dire qu'ils ont peur, mais qui n'ont pas statué sur leur stratégie de l'offre en fait. Une fois que la direction est très claire sur sa stratégie de l'offre, là j'ai une promo qui est la semaine prochaine où j'ai une entreprise qui m'envoie cinq personnes, une équipe entière sur la technologie à former, il n'y a pas de sujet en fait. Donc la résistance n'est pas du tout au niveau des équipes. Les équipes sont ravies d'être formées sur des métiers justement où ils n'ont pas eu de formation. Donc déjà pas de résistance. Et la deuxième chose que tu dis qui est très importante, Et non pas que les RH ne soient pas dans le game, il faut que les RH soient dedans. Nous, nos clients, c'est les dirigeants. C'est ceux qui décident de la stratégie de l'offre, en fait. Et les RH, ils disent merci quand la stratégie est posée, parce qu'ils peuvent enfin bosser. Mais ce n'est pas les RH qui vont nous envoyer les élèves. Et dans les apprenants, du reste, on a des parcours qui sont aussi pour les dirigeants. Enfin, je veux dire, en fonction de la mission, on a plein de profils très différents. Mais il faut que la direction, elle soit aux commandes, à la barre. de la stratégie de l'offre. Et si tu n'as pas réfléchi à ta stratégie de l'offre, dis autrement, comment tu construis ton chiffre d'affaires ? Tes clients, ils viennent te voir. Pourquoi ? De façon très précise. Ce que je n'y n'engage que moi. L'époque du full, full, full, où tu factures tout fou. Plus personne ne comprend rien. Tout flou, en fait. Je pense que ça, on va se guérir de ça. On va se guérir de ça.

  • Frank Lascombes

    Et aujourd'hui, parce que c'est vrai que vous avez aussi le sujet, pour l'avoir partagé avec toi, de l'Umi School. vous avez aussi des... des rituels d'équipe dans cette phase d'embarquement aussi, quelque part. Vous avez des outils justement pour qu'ils échangent, etc. Est-ce que tu peux m'en parler un peu plus ?

  • Delphine Buisson

    Dans notre proposition de valeur, encore une fois, l'idée, ce n'est pas de refaire ce qui est déjà fait et très bien fait par ailleurs. L'idée, elle était... Il y en a trois qui sont importantes. Déjà, c'est une école qui est ouverte à la profession. Je veux dire, ça va bien au-delà des groupes, des groupements. Il y a des indépendants. Et aujourd'hui, après deux ans d'existence, c'est déjà le cas. Il y a la moitié des élèves qui viennent d'ailleurs du groupe fondateur. Donc ça, c'est vraiment super. Deuxième chose, on adresse des gens qui viennent, des collaborateurs ou des gens qui sont déjà dans notre monde, mais on adresse aussi des gens qui arrivent d'ailleurs. Et ça, c'était aussi une de nos promesses. Alors, c'est encore mineur aujourd'hui, mais on veut que ça se développe. Là, par exemple, j'ai deux cas en tête où c'est des gens qui ont été recrutés avec des profils dits atypiques. Les deux, d'ailleurs, ils ont un parcours entrepreneur. Et ça, ça vient d'arriver chez nous. Et avec tout ce qui est en train d'être... mis hors-jeu par les grands du conseil, je pense qu'on va avoir des gens intéressants à recruter, qui auront envie de faire des choses dans des environnements sympas. Ça, c'est chez nous. Et donc, l'idée aussi, c'est que je te recrute, mais je ne te jette pas comme ça dans un grand bain sans être managé, etc. Je te mets en cohorte avec des copains qui font peu ou prou le même métier que toi, avec évidemment des variations, ce qui donne toute la richesse de ces parcours. Et en fait, une fois qu'on les met en cohorte, c'est aussi le principe de la pédagogie. On fait des kick-off où ils se rencontrent. On est en train de créer des banques de profils et de parcours, c'est ultra intéressant. Quand nos RH disent « Ah oui, mais ça, on voudrait bien, parce que la direction... » « Mais où est-ce qu'on les trouve ? » Je dis « Voilà, tu vois, je sors le jeu de cartes et je dis... » Tu as dix possibilités pour aller les chercher. Il y en a, ils sont dedans, il y en a, ils sont dehors. Et au fur et à mesure, comme ça, quand ils se retrouvent en cohorte de métiers, j'ai envie de dire qu'on commence à travailler sur le marketing des métiers, l'attractivité des métiers, en créant des cohortes de rôle-modèle. Et c'est ça qu'on cherche aussi. Ça peut paraître très ambitieux, mais après tout, il faut bien qu'on en ait de l'ambition. Et puis l'envie, elle est là. L'envie, elle est là. La résistance, je ne la vois pas. Ou alors les résistants, ils n'arrivent pas jusqu'à la porte, en fait. Et ça, par contre, le Miss School ne le fait pas. Ça, c'est le rôle de l'institution, des groupements. Chacun fait sa messe. L'initiation, c'est dans les églises. Voilà, c'est dans les chapelles. Donc moi, j'ai la mienne. C'est la même partie du travail. Mais après, l'autre partie du travail, moi, je prends les gens qui sont déjà prêts. et du coup les histoires de chapelle n'ont plus lieu d'être et là on passe à l'action

  • Frank Lascombes

    Alors je rebondis sur ce que tu disais Delphine, parce que c'est vrai que pendant qu'on discutait Damien, quand on préparait ce podcast et cet enregistrement, tu parlais aussi de la gestion des compétences sur lesquelles vous voulez travailler je crois avec l'institution.

  • Damien Charrier

    Si on parle gestion des compétences, effectivement, je pense que c'est un volet qui n'est encore pas très bien servi dans les cabinets, d'avoir une espèce de cartographie des compétences de ces collaborateurs, et notamment sur l'angle comportemental. Ils sont souvent assez bien ciblés sur l'aspect compétences techniques, par contre sur l'aspect comportemental, c'est moins évident. Donc on a imaginé un produit qui s'appelle le passeport collaborateur, et là on vient de lancer une enquête. Avant de se lancer concrètement dans le produit auprès de la profession, on a déjà, je crois, près de 800 experts comptables qui ont répondu. Et l'idée, c'est même un peu plus, on fait signe en régie que c'est un peu plus, on a dépassé la barre des mille. Et l'idée, c'est quoi ? C'est justement de pouvoir outiller tous les professionnels avec un outil de gestion des compétences. D'abord, on l'a focalisé sur des compétences qu'on a dites compétences socle. Donc les compétences socle, ça peut être quoi ? Ça peut être la cybersécurité, ça peut être le secret professionnel, la lutte anti-blanchiment. Ça permettra aussi qu'on arrête de se casser la tête sur des gens qu'on intègre dans les cabinets, et ça fait peut-être déjà un certain temps qu'ils sont dans les cabinets, et on ne sait même pas s'ils ont été formés sur des choses qui sont basiques et qui font partie du référentiel. Donc voilà, on a imaginé ce produit pour ça, et après effectivement ça peut devenir un peu une carte d'identité des compétences. Donc voilà ce qu'on est en train de faire au niveau du Conseil National. Philippe,

  • Frank Lascombes

    toi quand tu interviens concrètement dans les cabinets, Où se situe pour toi, selon toi, la résistance finalement la plus forte ? Tu constates qu'elle est plutôt chez les collaborateurs, les managers, les associés ?

  • Philippe Barré

    Les trois, en général. En fait, moi, quand j'interviens, j'interviens bien en amont par rapport à ce que vient de dire Delphine, puisque en fait, en général, quand moi j'interviens, les choses ne sont pas dites. Elles ne sont pas toujours clairement pensées ou en tout cas tellement clairement formalisées. Et donc en fait, que ce soit les... les associés, que ce soit les managers ou les collaborateurs, il y a quand même une grande part d'inconnus, il y a une grande part de découvertes, et évidemment, ça crée des résistances. D'une manière générale, comme le disait Damien tout à l'heure, les gens ont peur du changement, mais surtout de l'inconnu. Il se trouve qu'il y a une quinzaine d'années, j'ai repris mes études et j'ai fait des études de psychologie. Alors pas du tout pour bosser, parce que ça m'intéressait, pour le plaisir. Et en fait, dans mes travaux, dans ce que j'ai fait dans le cadre de ces études, J'avais des exercices à faire, des travaux, comme n'importe quel étudiant, et donc en fait j'ai comparé le profil psychologique d'un collaborateur comptable, avec ce qu'on appelle les préférences psychologiques d'un collaborateur comptable, entre guillemets normal, moyen, et les préférences psychologiques de quelqu'un qui aimait le changement. Alors je ne vais pas passer une demi-heure là-dessus, mais c'est facile, vous faites une photo et vous gardez le négatif. C'est-à-dire qu'un comptable, il aime ce qui est carré, organisé, précis, détaillé, ce qui est parfaitement organisé avec des délais, avec des objectifs, avec tout ça. Et la personne qui aime le changement, qui apprécie le changement, c'est quelqu'un qui aime l'inconnu, qui aime l'aventure, qui aime l'imprécision, qui aime rester dans l'ambiguïté, etc. C'est exactement le contraire du profil psychologique du comptable. Et donc moi, comme je n'accompagne que des cabinets d'expertise comptable, mon quotidien est parfois un peu compliqué. Pourquoi ? Parce que... Je ne sais pas si vous vous souvenez de la clôture du congrès de 2023, le congrès de Montpellier de l'Ordre. Pascal Pic, un paléo-anthropologue, était intervenu et en fait, quand on avait préparé cette intervention, il nous avait dit en fait que les êtres humains, c'est globalement des grands singes. Deux, trois détails près, mais c'est à peu près la même chose. Et en fait, le grand singe, je ne connais pas tous les grands singes, mais le chimpanzé, le gorille, le machin, il va dans les arbres et qu'est-ce qu'il fait ? Quand il est à une branche, il a envie de passer dans une autre branche. Mais il ne lâche jamais une branche sans avoir la suivante qui est identifiée. Parce que sinon, il va se lâcher, il va se ratatiner par terre et donc il va mal finir. Il n'est pas idiot. Eh bien, les collaborateurs, d'une manière générale, les salariés, c'est pareil. On leur demande, et moi je vois ça dans plein de cabinets, notamment des cabinets qui font beaucoup de tenues de comptabilité ou des missions traditionnelles, qui représentent encore les deux tiers du business des cabinets. Qu'est-ce qu'on constate ? Eh bien, on constate que c'est des collaborateurs qui font le même métier depuis... 3, 5, 10, 15, 20, 25 ans. Et en fait, ils ont acquis en ces 25 ans une maîtrise, une parfaite maîtrise, le geste métier, ils le maîtrisent sur le bout des doigts. Et donc, on leur dit dans ces moments de transition, dans ces moments de transformation, il va falloir que tu changes de métier. Pour faire quoi ? Je ne sais pas. Pour aller où ? Je ne sais pas. Et donc en fait, le problème, c'est que si c'est clair dans l'esprit du dirigeant, en gros, ce qu'il a envie de faire de son cabinet dans 10 ans, ou dans 5 ans ou dans 3 ans, c'est tout sauf clair pour le collaborateur qui va être chargé de faire des choses qu'il ne connaît pas. On demande à des gens qui sont arrivés au summum de leur expertise de passer... à un nouveau job, et là, ils sont au niveau zéro. C'est-à-dire qu'eux qui étaient la référence dans le métier, dans le cabinet, quand les petits jeunes qui arrivaient, qui allaient devenir apprentis d'ESCG, d'ESCG, etc., quand ils ne savaient pas, ils allaient voir telle ou telle personne. Sauf que demain, telle ou telle personne, elle ne connaîtra rien. Elle ne sait pas faire ce nouveau métier qu'elle n'a pas appris, donc elle ne sait pas trop en quoi il consiste. Et en fait, moi, j'ai vu des gens, je fais de nombreuses interventions dans les cabinets, dans les... sous forme de conférence d'une heure, une heure et demie. Donc une heure, une heure et demie, ça va très très vite. Et je me souviens avoir fait une intervention dans un cabinet d'une quinzaine, vingtaine de personnes. Et au bout d'un quart d'heure, j'expliquais ce qui se passe dans la profession. Et au bout d'un quart d'heure, j'ai une dame devant moi qui avait une cinquantaine d'années qui se met à pleurer, mais à chaudes larmes. Donc quand il y a 20 personnes dans une pièce et que la personne qui est devant vous se met à pleurer à chaudes larmes, ça déstabilise un peu. Donc en fait je me suis arrêté parce que c'était pas tenable Tout le monde, du coup, ne regardait qu'elle en se demandant ce qu'elle n'est pas. Enfin bon, je m'arrête donc. Je dis, on va prendre un verre d'eau, un café, machin. Et je vais voir cette dame. Je dis, mais qu'est-ce qui se passe ? C'est moi ? Elle dit, ben oui, vous avez dit que bientôt, il n'y aurait quasiment plus de tenue. Et en tout cas, plus de tenue humaine, entre guillemets. Et moi, je ne sais faire que la tenue humaine. Ça fait 25 ans que je suis dans ce cabinet. Et je ne sais faire que la tenue humaine. et je ne peux pas faire autre chose. Sauf que moi, je n'ai pas payé ma maison. Et puis j'ai des enfants qui n'ont pas fait leurs études. Donc ça veut dire que je pourrais pas finir de payer ma maison, on va être à la rue, mes enfants à cause de moi ne pourront pas faire d'études, et c'était fini. Parce qu'en fait, toutes les écoutilles étaient fermées, elle écoutait plus, elle entendait plus, j'avais beau dire ce que je voulais, elle m'écoutait plus. Et donc, pour faire très court, je lui ai dit, écoutez, faites-moi confiance encore un quart d'heure, et après on y va. J'ai fini ma conférence, on a fait la journée de travail pour justement identifier les métiers de demain, identifier, et on a commencé comme le disait Delphine, par identifier les business de demain, donc les missions parallèles, les missions complémentaires, etc. À la fin de la journée, elle avait la banane, et je finis toujours mes journées en disant, allez, le mot de la fin de cette dame, ça a été on s'y met quand ? Pourquoi ? Parce qu'elle avait compris qu'elle avait une utilité de main, elle savait ce qu'elle ferait comme métier, le métier, elle l'avait compris, elle l'avait identifié, elle était super contente de le faire, elle savait qu'elle y réussirait, et donc voilà. Et en fait, pour répondre à la question quand même, la principale résistance que l'on rencontre, C'est tout le monde, y compris les associés, très clairement. Il y a des cabinets, moi j'ai vu des cabinets qui se sont séparés parce qu'ils n'avaient pas le même projet à 5 ans. Et je l'ai vu pas qu'une fois. Donc ça arrive, mais quelque part, il vaut peut-être mieux qu'ils se séparent aujourd'hui avant qu'il y ait de la casse plutôt que dans 3 ans où ils ne seront plus du tout d'accord et ça finira mal. Mais en fait, c'est l'inconnu qui est le pire des ennemis. Quand les gens ne savent pas ce qu'ils vont devenir demain, ils ne peuvent pas être favorables. Et en fait, je dirais que c'est une réaction de survie. L'instinct de survie, pardon, qui fait qu'ils font tout pour empêcher que ça arrive, parce qu'ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés. Et en fait, on s'aperçoit que le jour où ils ont bien compris, ils deviennent moteurs dans le changement, et là, ils vont chez Delphine pour...

  • Frank Lascombes

    Ce que je retiens de ce que tu évoques, c'est qu'en fait, en réalité, si le cabinet n'a pas défini correctement son projet, sa stratégie, l'offre de services ou la proposition de valeur qu'il voulait offrir à ses clients, etc., finalement, tu n'offres pas aux collaborateurs cette fameuse branche. sur lequel il va pouvoir s'accrocher et lâcher l'autre main.

  • Philippe Barré

    C'est exactement ça. Quand on fait une conduite du changement, il y a quatre conditions pour réussir, quatre ingrédients. S'il en manque un, on va dans le mur. La première condition, c'est pourquoi on change ? Pourquoi est-ce qu'on est obligé de changer ? Là, ce n'est pas difficile, il se passe plein de choses, sauf qu'il faut l'expliquer. Moi, j'arrive des fois dans les cabinets où les collaborateurs, ils savent que la facture électronique va arriver, mais quelles sont les conséquences de la facture électronique ? Ils n'ont pas trop compris. L'IA, ils n'ont pas trop compris. et tout ce qui gravite en ce moment et toutes les nouveautés, ils ne savent pas trop. ce que ça implique. Deux, pour aller où ? C'est bien gentil. Quelle est la branche qu'on va rattraper ? Donc après, c'est quoi la deuxième branche ? On va lâcher une branche, on nous demande de lâcher une branche qui finalement n'existera plus dans un an ou deux, mais quelle est ma nouvelle branche ? Donc si on n'a pas ces deux premiers critères-là, il ne se passera rien. Troisièmement, avec qui ? On a besoin de tous les collaborateurs. Moi, je suis de ceux, je lis depuis quelques temps qu'il va falloir se débarrasser de l'essentiel des collaborateurs. Je suis totalement opposé à cette vision. Les collaborateurs qui ont envie et qui... acceptent de changer, on a de la place pour eux. Il faut évidemment inventer les nouveaux métiers, mais les nouveaux métiers, ça se trouve, la seule chose, c'est qu'il va falloir effectivement les former, les accompagner, etc. Et la dernière chose, c'est comment on fait pour y arriver ? Donc, comité de pilotage, feuille de route, je sais pas quoi. Mais s'il n'y a pas un de ces quatre ingrédients, on va parler de plein de choses, mais il ne se passera rien, et c'est là qu'on va perdre des collaborateurs, souvent les meilleurs. Quand on gère mal, c'est les bons qui s'en vont. Et d'ailleurs, quand on voit des collaborateurs qui quittent un cabinet parce qu'ils changent, C'est facile à savoir, est-ce que ça se passe bien ou mal ? Si c'est les bons qui s'en vont, c'est que ça se passe mal. si c'est les mauvaises et que ça se passe bien.

  • Frank Lascombes

    Thérèse, comme synthèse. Merci beaucoup à tous les trois. Je vous propose d'attaquer la seconde partie, donc redéfinir les rôles et développer les compétences. L'automatisation, à n'en pas douter, change la donne. Moins de saisie, plus d'accompagnement. Mais cela suppose une évolution de posture pour les collaborateurs qui ne sont pas... plus seulement des techniciens, mais de vrais copilotes pour leurs clients. Quelles compétences à développer et comment créer cette nouvelle dynamique ? C'est vrai qu'on a déjà évoqué pas mal de choses dans les propos liminaires, mais Delphine, finalement, quelles sont selon toi les compétences clés à développer pour que les collaborateurs passent du rôle de technicien à celui de copilote de leurs clients ? Ce qui change quand même beaucoup le paradigme.

  • Delphine Buisson

    Alors, déjà, copilote, c'est un parti pris. Il n'y aura pas que des postes de copilote dans l'avion. Je pense qu'il va rester des choses à faire en production, en modelage. Enfin, il y a pas mal de choses à faire. Déjà, peut-être si on arrivait à se mettre d'accord, tu vois, tout en haut, on a parlé de la stratégie de l'offre, qui va redéfinir les missions, etc. Et tout en bas, sur un socle de... Ce que j'appelle, moi, le contrat relationnel, ce qui, dans le fond, c'est les valeurs vécues et exprimées. C'est-à-dire, chez nous, on écoute, on sait ce que ça veut dire. Chez nous, on sait ce que c'est que l'assertivité. Chez nous, on sait ce que... Enfin, tu vois, avoir les valeurs comportementales, en fait, tu vois, les valeurs vécues, qui sont évidemment complètement incarnées par la direction, sinon ça ne marche pas, parce que c'est un entraînement, le comportement. Si, par exemple... Bon, ben voilà, vous allez avoir plein de temps, et là, il va falloir... prendre le téléphone et appeler les clients. Et là, je rejoins Philippe, panique à bord, mais ça, ce n'était pas mon métier, ce n'est pas mon métier. Et là, je parle juste de parler, je ne parle pas de conseiller. Ce sont des métiers très différents, en fait. Moi, j'ai déjà fait le métier, je le fais parfois, le métier de consultante, c'est extrêmement différent d'être consultant, d'être formateur, d'être conseiller, d'être analyste. Ce sont des métiers différents. Je pense qu'il y a un socle de compétences. qui va tourner vers l'ouverture. Ok, on ose se parler, on ose communiquer, on comprend à peu près la psychologie, comment s'est fait un humain. Et plus il y aura de machines, et plus on... Je vous invite, on s'invite à comprendre un peu plus ce que c'est qu'un être humain et comment ça fonctionne dans sa diversité. Donc tu as des compétences clés. Moi j'en ai souvent trois, on a tous ces... Mais voilà, quand tu sais écouter, quand tu sais... Alors être empathique, être empathique c'est quelque chose de très particulier. C'est juste... accepter qu'il y a des émotions qui sont des informations qui circulent dans la relation et savoir quoi faire avec ça. Ça n'a rien à voir avec la sympathie ou la compassion, qui sont des qualités morales par ailleurs, ou sociales. L'empathie, c'est juste ça. Quelle est donc l'information qui circule en ce moment entre nous, et qu'est-ce que je fais avec ça, non pas l'ignorer, ça existe. C'est de l'info qui existe. Écoute, empathie, qui est l'écoute des émotions, et l'assertivité, qui est cette capacité à parler. Parler,

  • Frank Lascombes

    Pas beaucoup plus. Et là, on a des opportunités parce que moi, j'aime beaucoup travailler avec des gens techniques, des ingénieurs, des techniciens. Ce n'est pas pour rien que je travaille depuis 14 ans avec les experts comptables. C'est qu'ils ne parlent pas pour rien dire souvent. Et c'est hyper intéressant dans ce monde où tout le monde blablate tellement pour dire si peu de choses dans le fond et en fond que des techniciens. Et finalement, avec une grammaire sujet-verbe-complément au niveau CP, c'est magnifique. Et on ne demande pas plus que ça. Je pense aussi qu'on renouera avec de l'écriture. Je pense qu'on va renouer avec des choses de base, la communication de base. Et ça, ça concerne probablement beaucoup les générations qui arrivent. Je vois, j'ai une équipe de jeunes en ce moment, le premier truc qu'on fait quand même, et ce n'est pas une histoire de niveau intellectuel, vous écrivez, vous apprenez à prendre le téléphone, et on débriefe, etc. Il faut retrouver, je crois, le plaisir simple de la relation, et en plus On n'est pas loin du bonheur, parce que c'est ça qu'ils aiment la plupart des gens. Quand tu dis, mais qu'est-ce que vous aimez dans ce métier-là ? Moi, j'en connais très peu qui disent la technique, la technique. Alors oui, on va retrouver ça chez des fiscalistes, chez des juristes. Mais au-delà de ça, la plupart des gens dans notre profession et dans les professions, ils aiment les gens, ils aiment leurs clients. Même des fois un peu trop. Oui, un peu trop. On dit, mais attends, toi t'es le fils ou t'es le client ? On passe beaucoup de temps avec eux. Mais beaucoup de temps, pourquoi ? Donc, l'amour de la relation. Il faut se connecter à ce plaisir d'être ensemble, de faire quelque chose pour, de rendre service et développer petit à petit ce socle-là de compétences humaines, relationnelles. Ça, c'est la base de la base. Et après, le génie de ces gens-là, c'est que, ce que tu disais Philippe, c'est que si tu organises et tu structures le changement, ils y vont. C'est juste qu'ils ne veulent pas aller dans la... Tu dis bon allez, tu sautes... Tu sautes de 15 mètres quelque part où tu ne vois pas le sol, je ne sais pas. Mais si tu montes le chemin, tu les embarques en fait. Dits autrement, ce sont des gens intelligents. Donc il faut donner envie et puis il faut être un peu cohérent dans la démarche qu'on leur propose.

  • Delphine Buisson

    Justement, est-ce que tu peux nous partager par rapport à tout ce vécu finalement que vous avez avec le Miss School, est-ce que tu peux nous partager une réussite vraiment où la formation a vraiment transformé une culture d'équipe ?

  • Frank Lascombes

    Oui, alors là... comme on est en visible, mais j'ai un sourire parce que ça, ça me fait plaisir. Je vais reprendre mes welcomers. Ils ont des profils différents. Ça va de la super assistante de direction au data scientist, en passant. Il y a toute une panoplie de gens qui vont aller. Ils ont des points communs. Dans les points communs, qui sont des forces et des faiblesses, dans les points communs, ils aiment rendre service. Ils sont souvent bons pédagogues parce qu'ils aiment former. Et ils aiment aussi les trucs compliqués où ils vont trouver une solution. Dit autrement, ce sont à la fois des gens plutôt un peu timides ou réservés, c'est-à-dire pas des grandes gueules, si je le dis, excusez-moi l'expression. Et en même temps, le fait de vouloir rendre service, ils ont tendance à se faire un peu manger. Donc, il faut absolument qu'ils cadrent leur mission. Et pour le reste, ils ont le goût du challenge. Ils aiment les difficultés, en fait. Tu ne croirais pas des gens comme ça. Et donc, c'est hyper intéressant parce que... Quand on les fait parler, parce qu'on les met en situation, on les fait parler. Et ça commence par ça au début. On dit, tu vas te présenter, je veux comprendre qui tu es, ce que tu fais. Et entre le début, ça c'est un bootcamp de deux jours, entre le début et la fin, ça n'a plus rien à voir. Et au-delà de savoir expliquer de façon très claire, grammaire, niveau CP, ce qu'ils font, à quoi ils servent, etc. Ils ont surtout le plaisir de dire qui ils sont et la fierté. Et tout de suite après, tu as bon. Et alors on finit, elle est facturée cette mission. Nous, on voudrait bien, mais la direction ne veut pas. Ils n'osent pas. Je dis bon, allez, il faut peut-être faire une psychanalyse groupée au niveau de la profession, parce que facturer, on sait faire quand même. Dans mon groupement, je vois bien qu'ils facturent. Quand on dit que les experts n'ont pas d'imagination, c'est absolument faux. Les lignes de facture, c'est tout à fait étonnant. Mais là, une facture claire et facturer ce qui a vraiment de la valeur, mais évidemment qu'il faut oser. Donc, tu vois, transformation dans les comportements, il faut... pas grand-chose pour cranter, en fait. Et ça fait très plaisir, et moi, ça me donne, évidemment, beaucoup d'espoir. Est-ce que 100% iront ? Non, bien sûr que non. Il y a des gens qui ne se reconnaîtront pas. Mais est-ce que beaucoup peuvent y aller ? Ouais, clairement,

  • Delphine Buisson

    ouais. Oui, il faut être positif par rapport à ça. Je pense que c'est très clair. Alors, justement, Damien, le concept, c'est vrai, de collaborateurs augmentés, vous en parlez souvent, et ça revient souvent dans les communications au niveau du CNO. Comment le traduis-tu concrètement dans la pratique des cabinets ?

  • Damien Charrier

    Effectivement, ça fait partie des sujets qui sont abordés notamment au travers de la profession comptable 2030. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que quand on dit collaborateurs augmentés ou experts comptables augmentés, en fait, ce n'est pas remplacé. Et je pense que ça vient d'être dit de manière tout à fait juste. Les collaborateurs, les experts comptables, tout ce qui compose un cabinet, c'est d'abord des humains. Et ce sont des gens qui sont souvent profondément humains. Parce qu'on oublie quand même toute cette dimension psychologique qui est importante. Philippe en a parlé tout à l'heure. mais c'est vrai que L'écoute d'un chef d'entreprise qui traverse la vie d'un chef d'entreprise, c'est tout sauf linéaire. Il célèbre par moments des réussites et par moments des difficultés, parfois importantes. Et donc ça, il faut quelqu'un qui l'écoute. On a parlé d'empathie, ça fait parce qu'il y a des émotions. Et d'ailleurs, je pense à une petite anecdote de début de semaine, parce que j'ai un de mes clients qui est en grande difficulté et le collaborateur est allé un peu au-delà de l'empathie. C'est-à-dire qu'il a pris pour lui la détresse du client. Là aussi, je pense qu'on a des choses à travailler sur cette dimension psychologique. Après, j'aime beaucoup ce que disait Delphine sur le bon sens. Et peut-être vous livrer une autre anecdote. Comment fonctionnait le cabinet quand je suis arrivé dedans ? On avait des collaborateurs expérimentés qui faisaient des tournées de TVA. Évidemment, on ne fait plus ça parce que concrètement, on allait chez le client. Mais en fait, ce n'est pas tellement la tournée de TVA qui est intéressante. C'est ce qui se passait dans la tournée de TVA. C'est qu'en fait, ces collaborateurs qui voyaient leurs clients tous les mois, ils revenaient au cabinet avec des trucs du genre, tiens, j'ai vu le pharmacien, ce machin. Ces enfants vont partir en études. Donc en fait, il faut faire une étude prévisionnelle d'IRPP pour savoir si c'est mieux de le détacher ou pas. Si je dois démembrer un bien immobilier, parce que maintenant, on appelle ça la gestion de patrimoine. Parce qu'on s'est organisé, effectivement, et on a peut-être créé des lignes de facture aussi. Parce qu'il y a quand même de l'agilité, on va dire, chez les experts comptables. Mais je pense que c'est ça. Il va falloir revenir quand même de temps en temps aussi à des fondamentaux. Voilà, donc vous l'avez compris, le collaborateur augmenté, c'est effectivement celui qui va utiliser bien la technologie, et pour ça, il faut le former, pour se libérer du temps et rentrer effectivement dans quelque chose d'un peu plus actif en termes de relations clients. Après, ce n'est pas 100% des collaborateurs, ça a été dit aussi. Je pense qu'il faut aussi se dire qu'on va quand même avoir, c'est des profils de postes qu'on est en train de voir émerger, des gestionnaires de flux. et des gens qui vont contrôler la data. Et ça, ce n'est pas forcément des gens qui seront en relation avec les clients parce qu'ils seront peut-être moins à l'aise sur cette dimension-là. Mais par contre, on aura besoin de leur expertise pour qualifier toute cette data automatique qui va arriver dans le système d'information. Donc, ne faisons pas non plus de généralité. On a aussi besoin d'une diversité de compétences.

  • Delphine Buisson

    Alors, je vais profiter effectivement de ta qualité de président de l'institution sur ce sujet d'évolution, parce qu'on voit bien qu'effectivement... Il n'y a qu'à voir, depuis le temps qu'on échange autour de cette table, on voit bien quand même qu'il y a une transformation importante qui est en train de s'opérer. Comment préserver finalement l'identité et les valeurs de la profession dans cette évolution des métiers ?

  • Damien Charrier

    Les experts comptables, ils ont quoi dans leur patrimoine génétique ? Ils ont un serment et puis ils ont une devise. En fait, la devise, elle a été inventée il y a 80 ans. Et cette devise, c'est science, conscience, indépendance. Alors, ce qu'on peut se dire, c'est que la science, en fait, effectivement... elle va être un peu percutée par la technologie parce que ça va plus vite. Mais en même temps, depuis la généralisation d'Internet, on ne travaille déjà pas comme avant. On n'est plus des bibliothèques du code fiscal, en fait. Donc, c'est vrai que ça va encore s'accélérer avec l'IA. Et en même temps, il faut quand même se dire aussi que quand le BofIP, il n'est pas écrit, l'IA, elle ne va rien faire du tout, en fait. Et là, c'est l'expérience qui prend le relais. Donc, il ne faut pas aller trop vite, en fait, sur ces notions-là. Et puis après, les notions fondamentales, la conscience et l'indépendance, c'est toute la valeur ajoutée. c'est ce qui fait qu'un expert contact, prendre du recul dans une situation, enfin un expert comptable, un collaborateur en fait, il n'est pas influencé par son environnement, c'est ce qu'on lui demande en tout cas, et c'est ce que le client lui demande. Et donc ça, ça reste des valeurs qui sont, je dirais, encore plus centrales, parce que l'affluence de technologie, l'affluence d'information, elle peut mettre à mal ces dimensions-là, d'ailleurs dans la société d'une manière générale, parce que la génération des fake news, ce genre de choses, justement l'expert comptable et ses collaborateurs doivent se préserver de ça. Je pense que ces valeurs-là, elles sont extrêmement importantes.

  • Delphine Buisson

    Et c'est vrai que ce que je répète souvent, c'est vrai que surtout avec l'IA qui arrive, etc., c'est qu'il ne faut jamais oublier quand même que la profession a aussi un devoir de compétence, entre guillemets. Et du coup, à l'aune de l'IA et à l'aune de ces outils qui arrivent, attention aussi, parce que les collaborateurs, comme tout un chacun, on est tous confrontés à la techno dans nos univers, je dirais, personnels. parfois envie d'utiliser finalement ces outils-là. Et si on n'a pas, je dirais, des chartes au niveau du cabinet, des chartes comportementales par rapport aux outils, comment on les utilise, etc., ça peut quand même poser des vrais sujets. Parce que, bon, quelque part, le rendu au client, on engage concrètement sa signature et donc, du coup, sa responsabilité. C'est pour ça que je parle souvent de devoirs, de compétences par rapport à ça. Et c'est vrai qu'il ne faut quand même jamais l'oublier et jamais l'obéir. Moi, je voudrais faire un petit tour de table rapide en un mot. Vous prenez à la volée chacun comme il l'entend. Selon vous, quelle est la compétence incontournable du collaborateur de demain ?

  • Philippe Barré

    L'esprit critique. L'agilité.

  • Frank Lascombes

    La capacité à apprendre.

  • Delphine Buisson

    Oui. Intéressant.

  • Philippe Barré

    Mais parce qu'on devait en dire qu'un chacun.

  • Delphine Buisson

    Oui, tout à fait. C'était l'exercice. Merci de l'avoir accepté. C'était l'exercice. On va pouvoir passer à la troisième et dernière partie de ce podcast. Passer de l'intention à l'action. Parce que c'est vrai que là aussi, ce que je répète régulièrement, c'est que... Depuis un certain nombre d'années, on a beaucoup travaillé sur les constats, sur ce qui était en train d'arriver, sur tout ce qui pourrait éventuellement se passer. Maintenant, je pense qu'il est vraiment temps de passer à l'action, d'autant que le temps qui nous sépare de septembre 2026, qui est l'arrivée de la facture électronique, qui va, à n'en pas douter, être un déclencheur assez important d'un certain nombre de choses au niveau du cabinet, y compris des processus. C'est vrai que ce temps de passage à l'action, il est fondamental. Donc, comprendre les enjeux, c'est une chose. Les transformer en actions concrètes et durables, ça en est une autre. Quel rituel mettre en place ? Quel indicateur suivre ? Et par où commencer pour réussir une transformation dès demain matin dans un cabinet ? Alors, Philippe, toi, lorsqu'un cabinet, finalement, te demande par où commencer pour transformer son organisation, quelle première étape lui recommandes-tu systématiquement, en fait ?

  • Philippe Barré

    Alors en fait... Quand un cabinet appelle un consultant pour se transformer, la première étape, elle a déjà eu lieu. La première étape, c'est la prise de conscience par les dirigeants qu'il fallait faire quelque chose. Et c'est vrai, on en a tous conscience, que les experts comptables sont submergés, qu'ils ont toujours du court terme à gérer, qu'ils ne savent pas déléguer, qu'on a des problèmes de recrutement qui font qu'il y a plein de bonnes raisons et aussi plein de mauvaises. pour reporter à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui.

  • Delphine Buisson

    Le syndrome de la tête dans le guidon.

  • Philippe Barré

    C'est ça. C'est-à-dire qu'effectivement, on a beaucoup de cabinets où il y a un dirigeant qui est plus un super technicien qu'un dirigeant. Et c'est vrai que dans ces moments-là, dans les moments de transformation, quand ça tangue, je ne sais plus qui a dit, c'est quand on traverse une zone de turbulence qu'on voit la qualité du pilote. C'est vrai que sur les 30 dernières années, il y a eu des changements dans la profession. Mais on est passé à la DSN, on est passé à des choses comme ça. Alors c'était des changements, mais c'était des changements techniques. On ne changeait pas de métier, on ne changeait de logiciel, on changeait de choses comme ça. Mais le métier était le même, l'objectif était le même, etc. On était en plus sur du régalien à 60%, 70% de notre activité. Donc on n'avait pas de commercial à faire, puisque la prestation qu'on vendait était une prestation incontournable, obligatoire pour tout chef d'entreprise. Dieu merci, le français est d'une complexité inouïe. Quand ils sont députés ou sénateurs, je pense que c'est encore pire. Et donc, ils rajoutent une complexité chaque année encore plus forte. Et donc, c'est ce qui a fait que les experts comptables étaient incontournables et sont incontournables. Alors, on va dire, ils ont profité de la situation. Pas du tout. Ils ont fait le job dont on avait besoin, dont l'économie avait besoin, dont les chefs d'entreprise avaient besoin. Alors certes, ce qu'on a fait, c'est-à-dire faire des liasses fiscales, des bilans, des bulletins de paye, des machins, des bidules, ça n'a pas apporté une grande valeur ajoutée. aux dirigeants en tant que dirigeants, au sens où il n'a pas fait grandir son entreprise. Mais ça lui a quand même enlevé une sacrée épine du pied, parce que s'il n'avait pas fait ses liasses fiscales, etc., ça aurait été d'une complexité inouïe. Mais une fois qu'on a dit ça, ce qui se passe maintenant, ça ne ressemble pas à ce qui s'est passé jusqu'à maintenant. Parce que la tenue de comptabilité, elle va être faite en grande partie par des outils. Et donc, c'est le modèle économique qui est en jeu. Et ça, on ne l'a pas eu depuis très, très, très, très longtemps. Ce qui veut dire quoi ? Ce qui veut dire qu'il va falloir réinventer le cabinet. Et donc, quand on me sollicite pour accompagner un cabinet, la première des choses, c'est c'est quoi le cabinet au vendu ? Comment ça fonctionne, votre diagnostic ? Ce qui va bien, ce qui ne va pas bien ? Ce pour quoi vous êtes bon, ce pour quoi vous n'êtes pas très bon ? Qu'est-ce qui vous différencie les voisins ? Ou alors, est-ce que vous êtes tout à fait ordinaire ? Que ce soit péjoratif dans mon esprit, vous êtes un cabinet normal de 5, 10, 15 personnes, 20 personnes, 50 personnes. Bon, OK. Et alors après, c'est vous voulez aller où en ayant évidemment intégré. dans la réflexion tout ce qui va se passer. Parce qu'il y a des cabinets, au dernier congrès ou au congrès d'avant, il y avait encore, je ne sais plus combien, 10 ou 15% de cabinets qui disaient « mais moi dans les 5 ans, je continue comme avant » . Bon, donc ça veut dire qu'il y a quand même 10-15% de cabinets qui ne seront pas chers bientôt. Parce qu'effectivement, il y a peu de chances qu'ils aient une résistance aux événements qui vont se passer. Donc là, la question c'est « vous voulez aller où ? » Et évidemment la question d'après c'est « comment on y va ? » « comment on fait ? » etc. et si Qu'est-ce que vous voulez être dans 5 ans ? Avec évidemment une intégration des projets professionnels de chaque dirigeant qu'il faut intégrer dans le mixeur pour arriver à un projet d'entreprise qui soit un vrai projet d'entreprise et pas juste faire ce qu'on a fait depuis 25 ans. Et là le problème c'est qu'il faut inventer des nouveaux métiers, des nouvelles missions, enfin quand je dis métiers, prestations, des nouvelles missions qui n'ont pas le même modèle économique que les missions traditionnelles. Parce que moi, je suis très admiratif et sincèrement très admiratif pour les cabinets qui se lancent dans la gestion de patrimoine. Mais dans un cabinet de 20 personnes, quand il y a un ou deux associés et qui se lancent dans la gestion de patrimoine, qui va faire ces missions-là ? C'est la personne qui ne fera plus de saisie et de TVA ? Certainement pas. Donc, le dirigeant qui lui-même est déjà la tête dans le guidon, qui n'a pas le temps pour diriger son cabinet, qui va devoir transformer son cabinet, qui va devoir faire tout ça, alors bien sûr, c'est une porte de sortie, la gestion de patrimoine. Mais ça ne peut pas être la planche de salut du cabinet. Parce qu'en plus, la gestion de patrimoine, j'ai accompagné une carrière de cabinet qui en font. Le modèle économique, c'est on fait une belle mission tous les 2, 3, 4, 5 ans, 10 ans, 15 ans, mais on ne facture pas tous les mois. Et voilà, c'est pareil pour plein d'autres missions qui sont exceptionnelles. Donc les missions qu'il faut que les cabinets, et là, ça fait partie de mon job, que de les aider à trouver leur mission de demain, il faut quand même que ce soit adapté à leur équipe. Notamment les équipes qui vont perdre les missions traditionnelles de tenue, il faut que ce soit adapté aux clients. Quand vous avez des boulangers comme clients, des charcutiers, des électriciens, des consultants ou des médecins, ils ne vont pas acheter une mission de cybersécurité tous les deux ans. Donc ça veut dire qu'il faut quand même que la mission soit adaptée à la fois aux compétences qu'on a et aux clients qu'on a.

  • Delphine Buisson

    Et moi ce que je retiens aussi dans ce que tu disais au début, c'est que ça me semble important, c'est vraiment de répéter, parce que ça a été souvent le cas dans la profession que l'outil était la stratégie en fait. L'outil, on le sait, je dirais, dans les 10, 15, 20 dernières années, tu le disais très justement, on arrivait à solutionner finalement une contrainte supplémentaire technique qui arrivait, la DSN, etc. C'est vrai que l'outil, du coup, à chaque fois répondait finalement à ces exigences qui étaient portées au cabinet en termes de pratique. Et finalement, c'est devenu quelque chose d'acquis qu'en réalité... Finalement, la stratégie, c'est l'outil. Et donc, je me précipite au congrès, sur les sites des éditeurs dont nous sommes, et je m'équipe avec un outil. Et ça, assurément, ça ne pourra plus fonctionner comme ça.

  • Philippe Barré

    Alors, ça ne pourra plus fonctionner comme ça. Et c'est ça qui est très paradoxal. Parce que l'expert comptable, effectivement, avant même d'avoir une stratégie, il y a un éditeur, il y a quelques années, qui est assez connu, qui me racontait un jour, on prenait un café tous les deux, il me racontait qu'un tiers des outils qu'il vendait, notamment au congrès, n'étaient jamais ouverts. Parce que c'était des outils pour faire des nouvelles missions. Après, on est face à deux paradoxes par rapport aux outils. Le premier paradoxe, c'est que comme l'outil fait de plus en plus de choses, sur un gâteau qui constitue les honoraires de l'expert comptable, il est évident que la cote-part qui revient à l'outil augmente naturellement. S'il faisait 10% de la mission il y a 10 ans et qu'il en fait 70% aujourd'hui, il est un peu logique que le curseur évolue et que le prix de l'outil augmente par rapport à la contribution. de l'expert comptable. Et donc, en ayant remis tous nos œufs dans le même panier qui est le panier de l'outil, le résultat, c'est qu'évidemment, on a un problème de transfert de valeur, on a un problème de partage de la valeur, etc. Donc ça, c'est le premier paradoxe. Et les experts comptables trouvent que leurs éditeurs sont chers, mais malheureusement, il faut aussi comparer par rapport à ce qui a été fait. Moi, j'ai commencé il y a 35 ans, les bulletins de paye, on prenait un papier, on mettait brut montant, charge sociale sur le plafond, charge sociale sur le total, net. Et c'était fini. Et j'avais un patron qui m'avait dit, on ne va quand même pas faire de la paye, c'est un boulot de secrétariat. Aujourd'hui, c'est 14% du chiffre d'affaires de la profession. Et les outils, pour le coup, je crois qu'en matière d'outils en paye, on a eu quand même quelques moments un peu compliqués. Le deuxième paradoxe, c'est qu'on constate que les outils, sur certaines missions, font plein de choses, mais sur d'autres, ne feront pas le job. Et demain, les nouvelles missions, ce ne sont pas les outils. Je prends un exemple, reprenons l'exemple de la paye. On a un prestataire qui est super connu. qui n'est pas celui auquel vous pensez, qui est un prestataire 100% Internet qui a proposé de faire la paie depuis quelques années. Il a eu le prix de la meilleure start-up de LinkedIn, etc. Et en fait, il a capté plein de clients, parce qu'il n'était pas très cher au début. Il a piqué plein de clients aux experts comptables en matière de paie. Et je me souviens, les experts comptables, ils râlaient parce que leurs clients se tiraient. Alors, j'ai fait auditer des bulletins de paie réalisés par cet éditeur en disant, bon, les bulletins de paie doivent être faux. Eh bien, manque de bol, ils étaient justes. Et donc... A priori, c'était mal parti pour les experts comptables parce qu'ils étaient plus chers et les bulletins de paye de l'éditeur étaient bons. Et puis, depuis 3-4 ans, cet éditeur, il se casse la gueule. Il a fait deux plans sociaux, ses projets européens se sont concentrés sur la France, et même sur la France, ils ont perdu beaucoup de leur superbe. Et il y a plein de cabinets qui m'appellent et me disent « tu sais, j'avais perdu tous les bulletins de paye de 14 dossiers, etc. » Sur les 14, il y en a 6 ou 7 qui sont déjà revenus. Pourquoi ? Parce que la paye, c'est une complexité. La paye, c'est aussi des contrôles sociaux. Quand vous êtes en face d'un écran, il n'y a pas d'interlocuteur. Et donc, ça veut dire qu'il faut bien identifier les missions. Si on se met sur des missions qui sont 100% automatisables, évidemment, il n'y aura pas de place. Et on va se faire 100% remplacer par des logiciels. La jurisprudence récente nous est pas très favorable là-dessus. Donc il faut évidemment inventer des missions dans lesquelles l'humain est le cœur de la mission, pas le logiciel. On aura besoin du logiciel pour nous filer un coup de main, mais ça doit être qu'un coup de main.

  • Delphine Buisson

    Delphine, si un cabinet concrètement veut agir dès demain, finalement quelles sont pour toi les trois actions simples à mettre en place ?

  • Frank Lascombes

    En fait, c'est pas possible de répondre à cette question, parce que ça dépend d'où il part. Philippe, tu dis la question c'est savoir où je vais. Déjà c'est où je vais, où nous allons. puisqu'ils sont globalement des collèges de direction, ce qui rend les choses un peu plus complexes. Et j'ai envie de dire, c'est une époque en ce moment où la bonne question à te poser, c'est qui je suis et qu'est-ce que j'aime faire ? Parce qu'on parle de l'expert comptable comme si c'était... En fait, moi, j'en connais, comme vous, plein, beaucoup. Il n'y en a quand même pas deux qui se ressemblent et surtout, il n'y en a pas deux qui habillent le métier exactement de la même façon. Et donc, la première question, c'est qui on est et qu'est-ce qu'on va faire ? Partant de qui nous sommes, qui avons-nous envie de devenir ? Ça, c'est la première question. Après, la deuxième orientation, parce qu'on n'en parle pas, mais ça n'est pas neutre en ce moment, tous les sujets qu'on va mettre sous le mot financiarisation du moment vont avoir énormément d'impact entre aujourd'hui et demain sur ce qui va se passer dans la profession. Aujourd'hui, j'ai besoin de choisir, outre le fait de ce qu'on a ce que j'ai envie de faire ou ce qu'on a envie de faire collectivement, j'ai besoin de choisir le modèle d'exercice. Et le modèle d'exercice, il sera très différent. Et sans jugement de valeur, je peux choisir de rejoindre une marque, parce que je considère que la marque, elle va faire un certain nombre de choix que je n'aurais pas à faire, etc. Je peux choisir de rejoindre une technologie leader. Et là, je ne suis pas complètement d'accord avec vous sur la partie technologique, parce qu'on a aujourd'hui des technologies qui sont en train de devenir leader. Et je peux choisir de devenir, alors je ne vais pas dire sous-traitant d'une technologie, c'est peut-être un peu beaucoup, mais en tout cas de dire je vais suivre le mouvement imprimé par la technologie. Si l'opérateur dont tu viens de parler, Philippe, avait été un peu plus ouvert, ce qu'il n'était pas du tout, et qu'ils avaient mis l'humain qui allait bien avec, ils n'en seraient peut-être pas là aujourd'hui. Mais ce n'est pas le cas des technologies qu'on voit émerger, qui appréhendent à la fois une technologie très assertive. Et des gens qui vont se conglomérer autour, en fait, en termes d'offres de services, etc. Donc, tu peux aussi avoir un exercice de ce métier-là avec des technologies leaders. Tu peux... Alors ça, je ne sais pas trop ce que ça va donner, mais il faut peut-être qu'on arrête de se mentir. Si je fais rentrer des fonds d'investissement suffisamment de façon importante, il ne faut pas me raconter qu'une fois qu'on a vendu... Et encore une fois, il n'y a pas de jugement de valeur là-dedans. Je peux avoir envie de préparer ma retraite, de réaliser tout mon travail. Enfin, je veux dire, c'est très honorable. Mais je ne vois pas bien, quand on sait le travail qu'il y a à faire aujourd'hui dedans, ou alors il va falloir changer, ça ne suffit pas d'injecter de l'argent pour dire que le travail va se faire. Et moi, ça me hérisse un peu quand j'entends des plateformes de cabinets, des agrégats de machins, qui vont devenir des concentrateurs. Mais alors, d'accord, mais des concentrateurs de quoi ? De compte de résultats ? D'accord. Et donc ça, c'est un autre modèle. Je peux choisir, encore une fois, il n'y a pas de jugement à avoir, je peux décider de... de faire entrer, mais du coup, je ne suis plus aux commandes et je ne sais pas trop comment je vais gérer la transformation. En tout cas, ça va être une transformation assez financière, mais pourquoi pas ? Et puis après, il y a ce que j'appelle les entrepreneurs leaders. Voilà, ça, c'est ce que j'aime bien recruter chez Eurus. Et encore une fois, sans... Les autres,

  • Damien Charrier

    tu ne nous as pas présentés pour nous faire rêver. Nous, on est dans notre châtel, en fait.

  • Frank Lascombes

    Non, mais je peux comprendre qu'on n'ait pas envie, parce que j'en ai... Vous n'étiez pas enthousiaste. Je ne suis pas enthousiaste, parce que ce n'est pas ceux pour lesquels je travaille. Mais par ailleurs, quand j'ai un petit cabinet de mon groupe qui rejoint le très beau groupe Inextenso, qui sont des gens que j'aime beaucoup, etc. Mais parfait, et je comprends très bien ce qu'ils font. D'accord ? Je dis quand, en tout cas, il y a une place. Pour des entrepreneurs qui veulent garder la direction, et les groupements sont là pour les aider, l'institution, etc. Mais là, il y a effectivement du travail à faire. Et pourquoi pas faire rentrer des investisseurs, quels qu'ils soient, mais il faut avoir un projet à financer. Et donc, la troisième question, j'ai dit qui suis-je et qui sommes-nous collectivement avant de dire où allons-nous ? Quelle modalité d'exercice choisissons-nous collectivement ? Parce que c'est un vrai sujet qui se pose aujourd'hui et il faut faire un choix. Il faut faire un choix. Et la troisième chose, retour au client et à l'offre. Qu'est-ce qu'on vend ? Quelle est la valeur qu'on produit ? Et puis après, derrière, ça va être de la mise en place. Mais c'est assez passionnant. Là, pour le coup, c'est des petits pas. C'est un chantier après l'autre. C'est du chantier. Ça n'est pas impossible. Je suis sûre que tu connais, que nous connaissons tous. Moi, j'en ai dans mon groupe et j'en vois ailleurs. Je vois de très belles choses arriver. Ce n'est pas forcément des gens qui font du bruit, mais je vois des gens qui ont déjà passé le cap de la transformation. Tu le vois dans une enseigne, tu as le mot technologie qui apparaît sans complexe. Il y a plein de choses qui apparaissent comme ça. Et peu à peu, les transformations se font par les offres et par les métiers.

  • Delphine Buisson

    Mais il ne faut jamais oublier que ça, de toute façon, c'est le cas pour toutes les entreprises. Tout part du client et tout doit partir du client. Et en fait, c'est le client qui, quoi que lui en soit... nous donne la voie finalement quelque part de ce qu'on peut proposer et de ce qu'on doit proposer.

  • Frank Lascombes

    Que le client soit conscient ou pas.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait. Et c'est là où est la difficulté parce que justement, il faut savoir bien le questionner. Ou l'opportunité. Voilà, bien le questionner, bien être attentif aux opportunités ou signaux faibles éventuellement qu'il peut nous apporter pour pouvoir répondre au mieux à son besoin et lui apporter un maximum de bénéfices.

  • Philippe Barré

    Et c'est là-dessus où on n'a pas forcément été très bon. Parce qu'on n'en avait pas besoin et parce qu'on était submergé par le quotidien. Mais c'est là-dessus probablement que ça va beaucoup changer. Ça va beaucoup évoluer.

  • Delphine Buisson

    Damien, moi j'aimerais t'interroger. Alors à la fois finalement, en tant qu'expert comptable, dirigeant de cabinet, mais à la fois avec ta casquette de l'institution et de président de cette institution, finalement s'il y avait un seul conseil à un dirigeant de cabinet pour passer de la réflexion à l'action en 2025-2026, lequel serait-il pour toi ?

  • Damien Charrier

    Alors, je crois que la difficulté qu'on a dans la profession, ça m'a toujours marqué, c'est de conjuguer le temps court et le temps long. Le temps court, c'est celui de la production, et le temps long, c'est plutôt celui de la stratégie, de la planification et de la transformation. Juste un point d'attention, c'est que ça ne va pas s'arranger, parce qu'on va passer d'une comptabilité d'échéance, c'est ce qu'on sait faire depuis toujours, à des flux continus. Et donc, du coup, ce qu'on faisait avant entre deux échéances, si on ne s'organise pas différemment, on ne le fera plus du tout, puisqu'en fait, on sera en production continue. Donc voilà. C'est juste un petit préambule, mais qui me paraît important. Ensuite, on a quand même une chance importante, c'est qu'on a une date. On a une date, c'est le 1er septembre 2026, donc en fait, on n'a pas le choix. Donc, moi, le premier conseil, c'est que pour ceux qui n'auraient pas commencé, il faut s'appuyer sur la facture électronique pour s'en servir comme vecteur de transformation. Parce que c'est un super vecteur. Je donne quand même quelques chiffres, c'est que 22 000 experts comptables en France, 190 000 collaborateurs, donc on a 210 000 personnes qui travaillent au quotidien pour 3,5 millions d'entreprises. sur les 8 millions d'assujettis à la facture électronique. Donc il y a 50% du job de conversion qui repose sur les experts comptables. Donc appuyons-nous là-dessus pour accélérer la transformation. Ça c'est vraiment un point qui me paraît extrêmement important et c'est une vraie chance. Et le deuxième, c'est que de toute façon il faut déjà décider et si on a besoin d'un support méthodologique, il faut aller voir Delphine, il faut aller voir Philippe. Et bien sûr, les instances, les conseils régionaux qui font beaucoup sur le sujet, le Conseil national. Mais vraiment, je fais une différence entre exercer seul, parce que je fais une différence entre être seul et être isolé. Surtout, il ne faut pas rester isolé. Le rôle des instances, pour revenir sur la chapelle et la Cichaud-Prêchoir, c'est que le rôle des instances, c'est d'embarquer tout le monde. Donc, de donner les chances à tout le monde d'arriver à réussir cette transformation. Donc voilà, il y a plein de choses qui sont produites, il y a plein d'énergie qui est mise sur ce sujet-là. Donc vraiment, n'hésitez pas à aller voir les instances, n'hésitez pas à aller voir les syndicats ou les groupements. Il y a plein de façons d'y arriver en fait, mais il faut déjà effectivement commencer.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait, je pense que moi ce que je retiens de ce que tu viens de dire aussi, c'est qu'effectivement, il faut faire attention à la partie isolement, au côté isolement. Et d'ailleurs, l'Ordre a toujours, je dirais, fait son travail sur ce sujet-là, en sortant par exemple des guides, des groupements, des guides des réseaux. Parce que parfois, c'est vrai que ça peut être bien de pouvoir mutualiser des échanges, avoir des échanges avec ses consoeurs, ses confrères, pour se faire une idée. C'est important. Il ne faut quand même pas oublier, quand on regarde comment est construite la profession, qu'il y a quand même encore beaucoup de cabinets de moins de dix collaborateurs. Cette notion d'isolement peut être quand même importante.

  • Frank Lascombes

    Il est venu le temps de conclure quand même, parce que c'est vrai qu'on est bien ensemble. Je pense qu'on pourrait faire un podcast de deux heures sans difficulté sur ces sujets-là qui sont vraiment importants. Ce que vous avez entendu aujourd'hui, c'est que clairement, la transformation des cabinets n'est pas qu'une affaire de logiciel ou de process, mais une histoire d'hommes et de femmes, très clairement. La chance qu'on a avec ces outils, c'est qu'ils libèrent du temps, mais c'est ce que l'on fait de ce temps qui fait la différence. conseiller, accompagner, donner des bénéfices aux clients. Les outils finalement ne sont qu'un moyen, certes important, de le rendre possible. Nous avons aussi vu que cette transformation ne se décrète pas, elle s'accompagne pas à pas. Elle suppose d'écouter les résistances, de rassurer, de donner du sens. Elle suppose aussi de redéfinir les rôles, de former en continu, de créer des communautés d'apprentissage et de pratique. Chez Agiris, nous avons compris que nous devions nous aussi dépasser notre mission originale, et c'est notre transformation à nous, de dépasser cette mission de développeur d'outils. C'est la raison pour laquelle on a bâti de véritables programmes de transformation à destination des cabinets. Je vous laisse vous renseigner auprès de nos équipes qui vous accompagnent chaque jour sur le terrain. Enfin, cette transformation demande du courage managérial. Instaurer de nouveaux rituels, mesurer l'adhésion, célébrer les progrès, bref, agir concrètement pour embarquer toute l'équipe. Si je devais retenir une seule idée, c'est celle-ci, la technologie est un accélérateur, mais la vraie clé c'est l'humain. C'est en libérant l'énergie des collaborateurs que les cabinets deviendront non pas des producteurs de chiffres, mais de véritables copilotes de la réussite de leurs clients. L'idée étant de passer d'un cabinet qui fait à un cabinet qui accompagne, d'un cabinet prestataire à un cabinet partenaire. Merci à nos trois invités pour leurs éclairages. Merci à vous qui nous avez écoutés et de porter ce mouvement au cœur de vos cabinets. Je vous donne rendez-vous bientôt pour un nouvel épisode autour des enjeux de la transformation des cabinets. Merci pour votre écoute et à très vite.

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Comprendre et lever les résistances

    03:25

  • Rédéfinir les rôles et développer les compétances

    26:20

  • Passer de l'intention à l'action

    39:09

  • Conclusion

    58:40

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Description

Et si la vraie transformation des cabinets était humaine ?


Découvrez comment les cabinets d’expertise comptable évoluent face aux enjeux humains, managériaux et organisationnels.


Dans ce podcast signé AGIRIS, des experts partagent leurs expériences et leurs conseils pour réussir la transformation RH :

  • comment lever les résistances au changement et mobiliser les équipes,

  • quelles compétences développer pour répondre aux nouvelles attentes des clients,

  • comment redéfinir les rôles au sein des cabinets à l’ère de la digitalisation,

  • et surtout, comment faire de l’humain le moteur de la transformation.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Frank Lascombes

    Bonjour à tous, je suis très heureux de vous accueillir sur cet épisode consacré à la transformation RH des cabinets. Imaginez un cabinet comptable il y a 30 ans. Les collaborateurs aligner des colonnes de chiffres, additionner, ressaisisser. Leurs valeurs se mesuraient à la rigueur, à la précision. Aujourd'hui, tout cela peut être fait par une machine en quelques secondes. Mais ce que la machine ne fera jamais, c'est écouter un dirigeant inquiet, comprendre l'histoire cachée derrière des comptes, détecter un signal faible dans une conversation, donner confiance pour prendre une décision. Cette dimension humaine... C'est le vrai cœur du métier. La transformation qui s'impose à la profession n'est pas seulement une révolution technologique. C'est une révolution de posture. Les équipes ne sont plus des producteurs de chiffres, elles deviennent des copilotes de la réussite des clients. Mais cette évolution ne se fera pas par les outils seuls. Elle passera surtout par l'accompagnement des collaborateurs pour qu'ils développent de nouvelles compétences changent de regard sur leur métier et trouvent leur place dans cette nouvelle dynamique. C'est une formidable opportunité, plus de temps pour conseiller, accompagner, anticiper, mais pour y arriver, il faut embarquer tout le monde, y compris ceux qui doutent, ceux qui craignent de perdre leur place, ceux qui n'ont pas encore trouvé leur rôle dans ce nouveau paysage. C'est tous ces sujets que je vous propose d'aborder aujourd'hui. Comment réussir cette transformation, pas seulement avec des outils, mais avec les femmes et les hommes qui font vivre les cabinets ? Comment lever les résistances, développer les compétences et donner envie à chacun de contribuer à la création de valeur ? Parce que la clé de la transformation est technologique, bien sûr, mais elle est surtout humaine. Pour en discuter aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir trois personnalités qui connaissent parfaitement la profession et ses défis. Je vais les laisser se présenter en 20 secondes chrono. Honneur aux dames, Delphine.

  • Delphine Buisson

    Bonjour tout le monde, je suis Delphine Buisson et ravie d'être avec vous pour échanger sur ces sujets assez passionnants, comme on passe de la réflexion à l'action.

  • Damien Charrier

    Bonjour Damien Charrier, je suis expert comptable en Normandie et je suis confronté au défi que tu viens d'exposer. Et puis je suis présent en qualité de président du Conseil national des experts comptables. Merci Damien.

  • Philippe Barré

    Bonjour Philippe Barré, je suis expert comptable en région parisienne et j'ai la particularité... d'avoir choisi de changer un peu de métier en accompagnant les experts comptables dans leur transformation, dans leur évolution, etc.

  • Frank Lascombes

    Merci beaucoup Philippe, merci beaucoup tous les trois. Donc sans plus attendre, ce que je vous propose c'est de rentrer dans le vif du sujet. On a beaucoup de choses à se dire aujourd'hui. Donc commençons, cette table ronde abordera trois points principaux. Comprendre et lever les résistances, premier point. Second point, redéfinir les rôles et développer les compétences. Et enfin, passer de l'intention à l'action. Parce qu'il y a un moment donné, comme on dit, il faut y aller. Donc comprendre et lever les résistances. On parle beaucoup de stratégie et d'outils, mais la première réalité de la transformation, ce sont les résistances humaines. Peur de perdre son rôle, manque de temps, sentiment d'être bousculé. Si on ne lève pas ses freins, aucun projet ne tient. Alors comment embarquer les équipes dès le départ ? Damien, selon toi, quels sont aujourd'hui les freins humains ? plus marquants dans la transformation des cabinets et comment l'ordre peut-il aider à les surmonter ?

  • Damien Charrier

    Bien sûr, il y a des résistances et je dirais que c'est normal parce qu'on est sur des mutations en profondeur et en fait l'inconnu ça fait toujours peur. En fait, il faut beaucoup accompagner, il faut redonner du sens, il faut redonner la clarté et c'est le rôle de chaque dirigeant de redonner les grandes directions de poser la stratégie. Une fois qu'on a dit ça, pour que les choses deviennent un peu plus concrètes, Il faut surtout former, et c'est ce que fait le Conseil national, c'est ce que font aussi les conseils régionaux, bien entendu. Et notamment, il y a un grand plan de formation qui existe, Profession comptable 2030. L'objectif de Profession comptable 2030, c'est justement de redonner une vision d'ensemble, de créer des parcours. Alors, les chiffres sont assez impressionnants, puisqu'il y a plus de 400 parcours actifs. Et depuis que ça existe, en fait, j'ai quelques chiffres à vous partager. On a déjà 3 800 professionnels qui ont été engagés et on est à 27 000 jours de formation. C'est quand même très significatif et je pense que c'est vraiment la prise de conscience que le changement, il est là. On est à moins d'un an de la facture électronique, donc il y a quand même des choses qui vont se passer dans le concret. Le hit parade des formations, c'est sans surprise, je dirais, cap durabilité. Donc voilà, c'est l'intégration effectivement de nouveaux enjeux. Et puis après, il y a le travail de la data pour développer les missions. Et le dernier, c'est organiser le cabinet autour de la facture électronique. Les deux derniers sujets, je pense que c'est vraiment sans surprise. Ce qu'on peut dire, c'est que derrière ces parcours, derrière ces chiffres, il y a une profession qui est en mouvement. Après, on va y revenir, je pense, dans la suite de nos échanges. Mais il faut agir sur ces leviers-là. Il faut agir également sur la prise en compte, plutôt du côté de l'expert comptable, manager, justement de cette dimension managériale des soft skills. Parce que tout ça aussi, ça va devenir des compétences qui sont déjà importantes dans les cabinets, mais qui vont être... d'autant plus importante pour les collaborateurs de demain, mais là aussi, on reviendra sur ces sujets.

  • Frank Lascombes

    Et quand tu parles de 3 800 professionnels qui ont participé à ce parcours, c'est à la fois experts comptables et collaborateurs ? Oui, bien sûr.

  • Damien Charrier

    La profession comptable 2030, ce n'est pas réservé aux experts comptables, c'est les experts comptables, les managers, les collaborateurs dans les cabinets, donc ça balaye effectivement assez large.

  • Frank Lascombes

    Et ce cadre durabilité, il n'y a pas eu un petit frein avec la loi Omnibus ? mais...

  • Damien Charrier

    Pas tant que ça. En fait, je pense que sur la durabilité, il y a des enjeux côté expertise comptable, il y a des enjeux côté compagnie des commissaires au compte. Et en fait, les experts comptables sont positionnés vraiment pour accompagner les entreprises, y compris les plus petites, sur des premiers pas en matière de durabilité, même si effectivement la contrainte s'est un peu éloignée. Par contre, on sait qu'il y a des demandes nouvelles qui viennent notamment des banques sur ces enjeux-là. Donc ça arrive par capillarité dans les entreprises.

  • Frank Lascombes

    et toi enfin À titre personnel et par rapport à l'institution que tu représentes, est-ce que tu constates une différence finalement de posture entre générations, entre tailles de structures, entre tailles de cabinets ou éventuellement même peut-être titre de mission ou pas du tout ?

  • Damien Charrier

    Oui et non. C'est-à-dire que je pense que tout le monde est concerné déjà, quelle que soit la taille de la structure. et je pense que dans les missions, pour répondre effectivement sur cet aspect-là, de manière très factuelle, je pense que les missions d'établissement, les missions de tenue, sont les missions qui vont être... modifié le plus rapidement par ces évolutions technologiques et sur lesquelles il y a vraiment besoin de se pencher parce que c'est encore aujourd'hui une partie très importante de l'activité des cabinets. Donc là-dessus, il faut effectivement bouger. Ce sera peut-être un peu moins le cas sur d'autres, encore que. Et puis sur les générations, il y a un effet générationnel, mais là aussi, je pense qu'il faut vraiment miser sur la complémentarité. Il ne faut pas imaginer que l'intelligence artificielle va se substituer à tout et on aura encore besoin de techniciens, et notamment de très bons techniciens dans les cabinets. et ça La technique, en fait, elle est souvent maîtrisée par les plus anciennes générations. Et je pense notamment aussi parce que, voilà, nous, on a aussi un volet emploi des seniors qui est important. Et en fait, on est plutôt là à essayer de retenir les compétences plutôt que, effectivement, se priver des compétences des anciens. Et puis, voilà, les jeunes sont peut-être un peu plus agiles avec les outils, encore que là-dessus, il n'y a pas de règles établies. Donc, voilà, je pense qu'il faut être attentif à ces... à ses aspects générationnels et construire la pyramide des âges. Quand on a plusieurs collaborateurs, il faut essayer de mixer un peu les générations. Je pense que ça, c'est important.

  • Frank Lascombes

    Je me tourne vers toi, Delphine. C'est vrai que tu as une expérience assez intéressante avec l'Umi School. Quand vous intervenez avec l'Umi School auprès des équipes, quelles sont les résistances que tu observes le plus souvent, le plus régulièrement ?

  • Delphine Buisson

    Quand ils entrent chez l'Umi School, ils sont déjà plus résistants.

  • Frank Lascombes

    Oui, ils ont déjà fait le port.

  • Delphine Buisson

    Oui, précisément, on est sur un public qui est au moins convaincu du fait qu'il faut pratiquer pour évoluer. C'est un dispositif qui est très complémentaire sur tout ce qui est fait par les instances. Et puis, voilà, divers dispositifs dans les groupements. Tous nos copains groupements, on travaille beaucoup là-dessus. L'UmiSchool, lui, vient adresser vraiment un sujet très spécifique et avec une pédagogie spécifique. Les nouveaux métiers m'ont orienté business. Nous, on est convaincus que la résistance, elle ne s'opère pas quand tu es bien présent. Damien, il parle de clarté, c'est un très joli mot, la clarté. Pour travailler sur le sujet des nouveaux métiers en lien avec les nouvelles missions, tu te rends compte que de façon très simple, il manque parfois un intitulé, une fiche de mission qui est en fait le pendant de la fiche de poste. En fait, la fiche mission, c'est pour le client, la fiche de poste, c'est pour les RH, mais elles doivent se retrouver absolument. Et c'est ce qui va rendre finalement à la fois le métier et donc la mission attractive. C'est aussi ce qui permet de redéfinir de façon très précise ta stratégie de l'offre. Donc, plutôt que d'aller chercher dans la granularité ultime qui est les compétences un peu comme un sac de billes, à travers l'UmiSchool, on va recréer des parcours métiers qui vont adresser des missions. Donc, on part toujours de la mission. On dit c'est quoi la mission au client ? Du coup, on ne se pose plus le problème du sens parce que le sens, il est dans la mission. Qu'est-ce qu'on fait ? Quelles valeurs on produit pour les clients ? Et au passage, il y a beaucoup de missions qui ont de l'impact en interne aussi. Et puis une fois que la mission est décrite, on va construire le parcours de formation. Et du coup, on prend le sujet à l'envers et après on forme donc à la mission. Après évidemment, tu as le protocole technique. la stack technologique et la stack comportementale. Du coup, on crée une sorte de cohérence pour que finalement des cohortes de personnes qui vont finalement embrasser ou habiller le même métier d'une façon, allez, à 80%, c'est la même chose. Le parcours qui tourne le plus aujourd'hui, enfin, on en a deux qui tournent très bien, c'est les intégrateurs, les welcomeers, les tech CSM. Tech, évidemment...

  • Damien Charrier

    Pour aborder les clients, en fait.

  • Delphine Buisson

    Les tech CSM, c'est ceux qui pilotent aujourd'hui le passage à la facture électronique, pour dire les choses simplement. eux, on voit bien, ils ont des profils assez différents. Ils comprennent très bien qu'ils sont le pivot pour aller, on va dire, compléter l'offre de tenue, ou en tout cas l'enrichir en la servicialisant. Ce n'est pas français ce que je raconte, mais c'est un peu ça. Si tu apportes du service à cette tenue qui va être très numérique, très digitale, tu peux conserver, voire même développer une partie de valeur et très vite appréhendable par le client. Et puis, d'un autre côté, tu gardes la maîtrise de ta donnée. donc tu peux aller voir gentiment vers du conseil, on va développer encore d'autres parcours. Mais l'idée, c'est vraiment de clarifier. Quand tu clarifies, les gens se sentent bien. Et c'est très intéressant de voir qu'on n'est pas dans la granularité des compétences, on n'est pas dans un petit sac de billes, mais on vient réassembler la cohérence de la mission, le management de ces gens-là, la valeur aussi facturable. Clairement, on travaille sur les prix, puisqu'on pense que quand on crée de la valeur, il faut qu'elle soit facturée.

  • Frank Lascombes

    Justement parce que forcément tu échanges beaucoup avec les dirigeants de cabinet qui quelque part arrivent à convaincre leurs collaborateurs de rentrer dans cette dynamique-là et qui les envoient du coup chez Lumiscool. Et justement par rapport à toutes tes discussions et tous les échanges que tu as avec eux, comment en fait s'ils arrivent à transformer finalement la peur du changement du collaborateur en envie de se transformer en fait ?

  • Delphine Buisson

    Alors tu dis deux choses importantes. D'abord on parle souvent de la peur du collaborateur. Moi je rencontre plutôt... dans les directions des gens qui n'ont pas statué, je ne veux pas dire qu'ils ont peur, mais qui n'ont pas statué sur leur stratégie de l'offre en fait. Une fois que la direction est très claire sur sa stratégie de l'offre, là j'ai une promo qui est la semaine prochaine où j'ai une entreprise qui m'envoie cinq personnes, une équipe entière sur la technologie à former, il n'y a pas de sujet en fait. Donc la résistance n'est pas du tout au niveau des équipes. Les équipes sont ravies d'être formées sur des métiers justement où ils n'ont pas eu de formation. Donc déjà pas de résistance. Et la deuxième chose que tu dis qui est très importante, Et non pas que les RH ne soient pas dans le game, il faut que les RH soient dedans. Nous, nos clients, c'est les dirigeants. C'est ceux qui décident de la stratégie de l'offre, en fait. Et les RH, ils disent merci quand la stratégie est posée, parce qu'ils peuvent enfin bosser. Mais ce n'est pas les RH qui vont nous envoyer les élèves. Et dans les apprenants, du reste, on a des parcours qui sont aussi pour les dirigeants. Enfin, je veux dire, en fonction de la mission, on a plein de profils très différents. Mais il faut que la direction, elle soit aux commandes, à la barre. de la stratégie de l'offre. Et si tu n'as pas réfléchi à ta stratégie de l'offre, dis autrement, comment tu construis ton chiffre d'affaires ? Tes clients, ils viennent te voir. Pourquoi ? De façon très précise. Ce que je n'y n'engage que moi. L'époque du full, full, full, où tu factures tout fou. Plus personne ne comprend rien. Tout flou, en fait. Je pense que ça, on va se guérir de ça. On va se guérir de ça.

  • Frank Lascombes

    Et aujourd'hui, parce que c'est vrai que vous avez aussi le sujet, pour l'avoir partagé avec toi, de l'Umi School. vous avez aussi des... des rituels d'équipe dans cette phase d'embarquement aussi, quelque part. Vous avez des outils justement pour qu'ils échangent, etc. Est-ce que tu peux m'en parler un peu plus ?

  • Delphine Buisson

    Dans notre proposition de valeur, encore une fois, l'idée, ce n'est pas de refaire ce qui est déjà fait et très bien fait par ailleurs. L'idée, elle était... Il y en a trois qui sont importantes. Déjà, c'est une école qui est ouverte à la profession. Je veux dire, ça va bien au-delà des groupes, des groupements. Il y a des indépendants. Et aujourd'hui, après deux ans d'existence, c'est déjà le cas. Il y a la moitié des élèves qui viennent d'ailleurs du groupe fondateur. Donc ça, c'est vraiment super. Deuxième chose, on adresse des gens qui viennent, des collaborateurs ou des gens qui sont déjà dans notre monde, mais on adresse aussi des gens qui arrivent d'ailleurs. Et ça, c'était aussi une de nos promesses. Alors, c'est encore mineur aujourd'hui, mais on veut que ça se développe. Là, par exemple, j'ai deux cas en tête où c'est des gens qui ont été recrutés avec des profils dits atypiques. Les deux, d'ailleurs, ils ont un parcours entrepreneur. Et ça, ça vient d'arriver chez nous. Et avec tout ce qui est en train d'être... mis hors-jeu par les grands du conseil, je pense qu'on va avoir des gens intéressants à recruter, qui auront envie de faire des choses dans des environnements sympas. Ça, c'est chez nous. Et donc, l'idée aussi, c'est que je te recrute, mais je ne te jette pas comme ça dans un grand bain sans être managé, etc. Je te mets en cohorte avec des copains qui font peu ou prou le même métier que toi, avec évidemment des variations, ce qui donne toute la richesse de ces parcours. Et en fait, une fois qu'on les met en cohorte, c'est aussi le principe de la pédagogie. On fait des kick-off où ils se rencontrent. On est en train de créer des banques de profils et de parcours, c'est ultra intéressant. Quand nos RH disent « Ah oui, mais ça, on voudrait bien, parce que la direction... » « Mais où est-ce qu'on les trouve ? » Je dis « Voilà, tu vois, je sors le jeu de cartes et je dis... » Tu as dix possibilités pour aller les chercher. Il y en a, ils sont dedans, il y en a, ils sont dehors. Et au fur et à mesure, comme ça, quand ils se retrouvent en cohorte de métiers, j'ai envie de dire qu'on commence à travailler sur le marketing des métiers, l'attractivité des métiers, en créant des cohortes de rôle-modèle. Et c'est ça qu'on cherche aussi. Ça peut paraître très ambitieux, mais après tout, il faut bien qu'on en ait de l'ambition. Et puis l'envie, elle est là. L'envie, elle est là. La résistance, je ne la vois pas. Ou alors les résistants, ils n'arrivent pas jusqu'à la porte, en fait. Et ça, par contre, le Miss School ne le fait pas. Ça, c'est le rôle de l'institution, des groupements. Chacun fait sa messe. L'initiation, c'est dans les églises. Voilà, c'est dans les chapelles. Donc moi, j'ai la mienne. C'est la même partie du travail. Mais après, l'autre partie du travail, moi, je prends les gens qui sont déjà prêts. et du coup les histoires de chapelle n'ont plus lieu d'être et là on passe à l'action

  • Frank Lascombes

    Alors je rebondis sur ce que tu disais Delphine, parce que c'est vrai que pendant qu'on discutait Damien, quand on préparait ce podcast et cet enregistrement, tu parlais aussi de la gestion des compétences sur lesquelles vous voulez travailler je crois avec l'institution.

  • Damien Charrier

    Si on parle gestion des compétences, effectivement, je pense que c'est un volet qui n'est encore pas très bien servi dans les cabinets, d'avoir une espèce de cartographie des compétences de ces collaborateurs, et notamment sur l'angle comportemental. Ils sont souvent assez bien ciblés sur l'aspect compétences techniques, par contre sur l'aspect comportemental, c'est moins évident. Donc on a imaginé un produit qui s'appelle le passeport collaborateur, et là on vient de lancer une enquête. Avant de se lancer concrètement dans le produit auprès de la profession, on a déjà, je crois, près de 800 experts comptables qui ont répondu. Et l'idée, c'est même un peu plus, on fait signe en régie que c'est un peu plus, on a dépassé la barre des mille. Et l'idée, c'est quoi ? C'est justement de pouvoir outiller tous les professionnels avec un outil de gestion des compétences. D'abord, on l'a focalisé sur des compétences qu'on a dites compétences socle. Donc les compétences socle, ça peut être quoi ? Ça peut être la cybersécurité, ça peut être le secret professionnel, la lutte anti-blanchiment. Ça permettra aussi qu'on arrête de se casser la tête sur des gens qu'on intègre dans les cabinets, et ça fait peut-être déjà un certain temps qu'ils sont dans les cabinets, et on ne sait même pas s'ils ont été formés sur des choses qui sont basiques et qui font partie du référentiel. Donc voilà, on a imaginé ce produit pour ça, et après effectivement ça peut devenir un peu une carte d'identité des compétences. Donc voilà ce qu'on est en train de faire au niveau du Conseil National. Philippe,

  • Frank Lascombes

    toi quand tu interviens concrètement dans les cabinets, Où se situe pour toi, selon toi, la résistance finalement la plus forte ? Tu constates qu'elle est plutôt chez les collaborateurs, les managers, les associés ?

  • Philippe Barré

    Les trois, en général. En fait, moi, quand j'interviens, j'interviens bien en amont par rapport à ce que vient de dire Delphine, puisque en fait, en général, quand moi j'interviens, les choses ne sont pas dites. Elles ne sont pas toujours clairement pensées ou en tout cas tellement clairement formalisées. Et donc en fait, que ce soit les... les associés, que ce soit les managers ou les collaborateurs, il y a quand même une grande part d'inconnus, il y a une grande part de découvertes, et évidemment, ça crée des résistances. D'une manière générale, comme le disait Damien tout à l'heure, les gens ont peur du changement, mais surtout de l'inconnu. Il se trouve qu'il y a une quinzaine d'années, j'ai repris mes études et j'ai fait des études de psychologie. Alors pas du tout pour bosser, parce que ça m'intéressait, pour le plaisir. Et en fait, dans mes travaux, dans ce que j'ai fait dans le cadre de ces études, J'avais des exercices à faire, des travaux, comme n'importe quel étudiant, et donc en fait j'ai comparé le profil psychologique d'un collaborateur comptable, avec ce qu'on appelle les préférences psychologiques d'un collaborateur comptable, entre guillemets normal, moyen, et les préférences psychologiques de quelqu'un qui aimait le changement. Alors je ne vais pas passer une demi-heure là-dessus, mais c'est facile, vous faites une photo et vous gardez le négatif. C'est-à-dire qu'un comptable, il aime ce qui est carré, organisé, précis, détaillé, ce qui est parfaitement organisé avec des délais, avec des objectifs, avec tout ça. Et la personne qui aime le changement, qui apprécie le changement, c'est quelqu'un qui aime l'inconnu, qui aime l'aventure, qui aime l'imprécision, qui aime rester dans l'ambiguïté, etc. C'est exactement le contraire du profil psychologique du comptable. Et donc moi, comme je n'accompagne que des cabinets d'expertise comptable, mon quotidien est parfois un peu compliqué. Pourquoi ? Parce que... Je ne sais pas si vous vous souvenez de la clôture du congrès de 2023, le congrès de Montpellier de l'Ordre. Pascal Pic, un paléo-anthropologue, était intervenu et en fait, quand on avait préparé cette intervention, il nous avait dit en fait que les êtres humains, c'est globalement des grands singes. Deux, trois détails près, mais c'est à peu près la même chose. Et en fait, le grand singe, je ne connais pas tous les grands singes, mais le chimpanzé, le gorille, le machin, il va dans les arbres et qu'est-ce qu'il fait ? Quand il est à une branche, il a envie de passer dans une autre branche. Mais il ne lâche jamais une branche sans avoir la suivante qui est identifiée. Parce que sinon, il va se lâcher, il va se ratatiner par terre et donc il va mal finir. Il n'est pas idiot. Eh bien, les collaborateurs, d'une manière générale, les salariés, c'est pareil. On leur demande, et moi je vois ça dans plein de cabinets, notamment des cabinets qui font beaucoup de tenues de comptabilité ou des missions traditionnelles, qui représentent encore les deux tiers du business des cabinets. Qu'est-ce qu'on constate ? Eh bien, on constate que c'est des collaborateurs qui font le même métier depuis... 3, 5, 10, 15, 20, 25 ans. Et en fait, ils ont acquis en ces 25 ans une maîtrise, une parfaite maîtrise, le geste métier, ils le maîtrisent sur le bout des doigts. Et donc, on leur dit dans ces moments de transition, dans ces moments de transformation, il va falloir que tu changes de métier. Pour faire quoi ? Je ne sais pas. Pour aller où ? Je ne sais pas. Et donc en fait, le problème, c'est que si c'est clair dans l'esprit du dirigeant, en gros, ce qu'il a envie de faire de son cabinet dans 10 ans, ou dans 5 ans ou dans 3 ans, c'est tout sauf clair pour le collaborateur qui va être chargé de faire des choses qu'il ne connaît pas. On demande à des gens qui sont arrivés au summum de leur expertise de passer... à un nouveau job, et là, ils sont au niveau zéro. C'est-à-dire qu'eux qui étaient la référence dans le métier, dans le cabinet, quand les petits jeunes qui arrivaient, qui allaient devenir apprentis d'ESCG, d'ESCG, etc., quand ils ne savaient pas, ils allaient voir telle ou telle personne. Sauf que demain, telle ou telle personne, elle ne connaîtra rien. Elle ne sait pas faire ce nouveau métier qu'elle n'a pas appris, donc elle ne sait pas trop en quoi il consiste. Et en fait, moi, j'ai vu des gens, je fais de nombreuses interventions dans les cabinets, dans les... sous forme de conférence d'une heure, une heure et demie. Donc une heure, une heure et demie, ça va très très vite. Et je me souviens avoir fait une intervention dans un cabinet d'une quinzaine, vingtaine de personnes. Et au bout d'un quart d'heure, j'expliquais ce qui se passe dans la profession. Et au bout d'un quart d'heure, j'ai une dame devant moi qui avait une cinquantaine d'années qui se met à pleurer, mais à chaudes larmes. Donc quand il y a 20 personnes dans une pièce et que la personne qui est devant vous se met à pleurer à chaudes larmes, ça déstabilise un peu. Donc en fait je me suis arrêté parce que c'était pas tenable Tout le monde, du coup, ne regardait qu'elle en se demandant ce qu'elle n'est pas. Enfin bon, je m'arrête donc. Je dis, on va prendre un verre d'eau, un café, machin. Et je vais voir cette dame. Je dis, mais qu'est-ce qui se passe ? C'est moi ? Elle dit, ben oui, vous avez dit que bientôt, il n'y aurait quasiment plus de tenue. Et en tout cas, plus de tenue humaine, entre guillemets. Et moi, je ne sais faire que la tenue humaine. Ça fait 25 ans que je suis dans ce cabinet. Et je ne sais faire que la tenue humaine. et je ne peux pas faire autre chose. Sauf que moi, je n'ai pas payé ma maison. Et puis j'ai des enfants qui n'ont pas fait leurs études. Donc ça veut dire que je pourrais pas finir de payer ma maison, on va être à la rue, mes enfants à cause de moi ne pourront pas faire d'études, et c'était fini. Parce qu'en fait, toutes les écoutilles étaient fermées, elle écoutait plus, elle entendait plus, j'avais beau dire ce que je voulais, elle m'écoutait plus. Et donc, pour faire très court, je lui ai dit, écoutez, faites-moi confiance encore un quart d'heure, et après on y va. J'ai fini ma conférence, on a fait la journée de travail pour justement identifier les métiers de demain, identifier, et on a commencé comme le disait Delphine, par identifier les business de demain, donc les missions parallèles, les missions complémentaires, etc. À la fin de la journée, elle avait la banane, et je finis toujours mes journées en disant, allez, le mot de la fin de cette dame, ça a été on s'y met quand ? Pourquoi ? Parce qu'elle avait compris qu'elle avait une utilité de main, elle savait ce qu'elle ferait comme métier, le métier, elle l'avait compris, elle l'avait identifié, elle était super contente de le faire, elle savait qu'elle y réussirait, et donc voilà. Et en fait, pour répondre à la question quand même, la principale résistance que l'on rencontre, C'est tout le monde, y compris les associés, très clairement. Il y a des cabinets, moi j'ai vu des cabinets qui se sont séparés parce qu'ils n'avaient pas le même projet à 5 ans. Et je l'ai vu pas qu'une fois. Donc ça arrive, mais quelque part, il vaut peut-être mieux qu'ils se séparent aujourd'hui avant qu'il y ait de la casse plutôt que dans 3 ans où ils ne seront plus du tout d'accord et ça finira mal. Mais en fait, c'est l'inconnu qui est le pire des ennemis. Quand les gens ne savent pas ce qu'ils vont devenir demain, ils ne peuvent pas être favorables. Et en fait, je dirais que c'est une réaction de survie. L'instinct de survie, pardon, qui fait qu'ils font tout pour empêcher que ça arrive, parce qu'ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés. Et en fait, on s'aperçoit que le jour où ils ont bien compris, ils deviennent moteurs dans le changement, et là, ils vont chez Delphine pour...

  • Frank Lascombes

    Ce que je retiens de ce que tu évoques, c'est qu'en fait, en réalité, si le cabinet n'a pas défini correctement son projet, sa stratégie, l'offre de services ou la proposition de valeur qu'il voulait offrir à ses clients, etc., finalement, tu n'offres pas aux collaborateurs cette fameuse branche. sur lequel il va pouvoir s'accrocher et lâcher l'autre main.

  • Philippe Barré

    C'est exactement ça. Quand on fait une conduite du changement, il y a quatre conditions pour réussir, quatre ingrédients. S'il en manque un, on va dans le mur. La première condition, c'est pourquoi on change ? Pourquoi est-ce qu'on est obligé de changer ? Là, ce n'est pas difficile, il se passe plein de choses, sauf qu'il faut l'expliquer. Moi, j'arrive des fois dans les cabinets où les collaborateurs, ils savent que la facture électronique va arriver, mais quelles sont les conséquences de la facture électronique ? Ils n'ont pas trop compris. L'IA, ils n'ont pas trop compris. et tout ce qui gravite en ce moment et toutes les nouveautés, ils ne savent pas trop. ce que ça implique. Deux, pour aller où ? C'est bien gentil. Quelle est la branche qu'on va rattraper ? Donc après, c'est quoi la deuxième branche ? On va lâcher une branche, on nous demande de lâcher une branche qui finalement n'existera plus dans un an ou deux, mais quelle est ma nouvelle branche ? Donc si on n'a pas ces deux premiers critères-là, il ne se passera rien. Troisièmement, avec qui ? On a besoin de tous les collaborateurs. Moi, je suis de ceux, je lis depuis quelques temps qu'il va falloir se débarrasser de l'essentiel des collaborateurs. Je suis totalement opposé à cette vision. Les collaborateurs qui ont envie et qui... acceptent de changer, on a de la place pour eux. Il faut évidemment inventer les nouveaux métiers, mais les nouveaux métiers, ça se trouve, la seule chose, c'est qu'il va falloir effectivement les former, les accompagner, etc. Et la dernière chose, c'est comment on fait pour y arriver ? Donc, comité de pilotage, feuille de route, je sais pas quoi. Mais s'il n'y a pas un de ces quatre ingrédients, on va parler de plein de choses, mais il ne se passera rien, et c'est là qu'on va perdre des collaborateurs, souvent les meilleurs. Quand on gère mal, c'est les bons qui s'en vont. Et d'ailleurs, quand on voit des collaborateurs qui quittent un cabinet parce qu'ils changent, C'est facile à savoir, est-ce que ça se passe bien ou mal ? Si c'est les bons qui s'en vont, c'est que ça se passe mal. si c'est les mauvaises et que ça se passe bien.

  • Frank Lascombes

    Thérèse, comme synthèse. Merci beaucoup à tous les trois. Je vous propose d'attaquer la seconde partie, donc redéfinir les rôles et développer les compétences. L'automatisation, à n'en pas douter, change la donne. Moins de saisie, plus d'accompagnement. Mais cela suppose une évolution de posture pour les collaborateurs qui ne sont pas... plus seulement des techniciens, mais de vrais copilotes pour leurs clients. Quelles compétences à développer et comment créer cette nouvelle dynamique ? C'est vrai qu'on a déjà évoqué pas mal de choses dans les propos liminaires, mais Delphine, finalement, quelles sont selon toi les compétences clés à développer pour que les collaborateurs passent du rôle de technicien à celui de copilote de leurs clients ? Ce qui change quand même beaucoup le paradigme.

  • Delphine Buisson

    Alors, déjà, copilote, c'est un parti pris. Il n'y aura pas que des postes de copilote dans l'avion. Je pense qu'il va rester des choses à faire en production, en modelage. Enfin, il y a pas mal de choses à faire. Déjà, peut-être si on arrivait à se mettre d'accord, tu vois, tout en haut, on a parlé de la stratégie de l'offre, qui va redéfinir les missions, etc. Et tout en bas, sur un socle de... Ce que j'appelle, moi, le contrat relationnel, ce qui, dans le fond, c'est les valeurs vécues et exprimées. C'est-à-dire, chez nous, on écoute, on sait ce que ça veut dire. Chez nous, on sait ce que c'est que l'assertivité. Chez nous, on sait ce que... Enfin, tu vois, avoir les valeurs comportementales, en fait, tu vois, les valeurs vécues, qui sont évidemment complètement incarnées par la direction, sinon ça ne marche pas, parce que c'est un entraînement, le comportement. Si, par exemple... Bon, ben voilà, vous allez avoir plein de temps, et là, il va falloir... prendre le téléphone et appeler les clients. Et là, je rejoins Philippe, panique à bord, mais ça, ce n'était pas mon métier, ce n'est pas mon métier. Et là, je parle juste de parler, je ne parle pas de conseiller. Ce sont des métiers très différents, en fait. Moi, j'ai déjà fait le métier, je le fais parfois, le métier de consultante, c'est extrêmement différent d'être consultant, d'être formateur, d'être conseiller, d'être analyste. Ce sont des métiers différents. Je pense qu'il y a un socle de compétences. qui va tourner vers l'ouverture. Ok, on ose se parler, on ose communiquer, on comprend à peu près la psychologie, comment s'est fait un humain. Et plus il y aura de machines, et plus on... Je vous invite, on s'invite à comprendre un peu plus ce que c'est qu'un être humain et comment ça fonctionne dans sa diversité. Donc tu as des compétences clés. Moi j'en ai souvent trois, on a tous ces... Mais voilà, quand tu sais écouter, quand tu sais... Alors être empathique, être empathique c'est quelque chose de très particulier. C'est juste... accepter qu'il y a des émotions qui sont des informations qui circulent dans la relation et savoir quoi faire avec ça. Ça n'a rien à voir avec la sympathie ou la compassion, qui sont des qualités morales par ailleurs, ou sociales. L'empathie, c'est juste ça. Quelle est donc l'information qui circule en ce moment entre nous, et qu'est-ce que je fais avec ça, non pas l'ignorer, ça existe. C'est de l'info qui existe. Écoute, empathie, qui est l'écoute des émotions, et l'assertivité, qui est cette capacité à parler. Parler,

  • Frank Lascombes

    Pas beaucoup plus. Et là, on a des opportunités parce que moi, j'aime beaucoup travailler avec des gens techniques, des ingénieurs, des techniciens. Ce n'est pas pour rien que je travaille depuis 14 ans avec les experts comptables. C'est qu'ils ne parlent pas pour rien dire souvent. Et c'est hyper intéressant dans ce monde où tout le monde blablate tellement pour dire si peu de choses dans le fond et en fond que des techniciens. Et finalement, avec une grammaire sujet-verbe-complément au niveau CP, c'est magnifique. Et on ne demande pas plus que ça. Je pense aussi qu'on renouera avec de l'écriture. Je pense qu'on va renouer avec des choses de base, la communication de base. Et ça, ça concerne probablement beaucoup les générations qui arrivent. Je vois, j'ai une équipe de jeunes en ce moment, le premier truc qu'on fait quand même, et ce n'est pas une histoire de niveau intellectuel, vous écrivez, vous apprenez à prendre le téléphone, et on débriefe, etc. Il faut retrouver, je crois, le plaisir simple de la relation, et en plus On n'est pas loin du bonheur, parce que c'est ça qu'ils aiment la plupart des gens. Quand tu dis, mais qu'est-ce que vous aimez dans ce métier-là ? Moi, j'en connais très peu qui disent la technique, la technique. Alors oui, on va retrouver ça chez des fiscalistes, chez des juristes. Mais au-delà de ça, la plupart des gens dans notre profession et dans les professions, ils aiment les gens, ils aiment leurs clients. Même des fois un peu trop. Oui, un peu trop. On dit, mais attends, toi t'es le fils ou t'es le client ? On passe beaucoup de temps avec eux. Mais beaucoup de temps, pourquoi ? Donc, l'amour de la relation. Il faut se connecter à ce plaisir d'être ensemble, de faire quelque chose pour, de rendre service et développer petit à petit ce socle-là de compétences humaines, relationnelles. Ça, c'est la base de la base. Et après, le génie de ces gens-là, c'est que, ce que tu disais Philippe, c'est que si tu organises et tu structures le changement, ils y vont. C'est juste qu'ils ne veulent pas aller dans la... Tu dis bon allez, tu sautes... Tu sautes de 15 mètres quelque part où tu ne vois pas le sol, je ne sais pas. Mais si tu montes le chemin, tu les embarques en fait. Dits autrement, ce sont des gens intelligents. Donc il faut donner envie et puis il faut être un peu cohérent dans la démarche qu'on leur propose.

  • Delphine Buisson

    Justement, est-ce que tu peux nous partager par rapport à tout ce vécu finalement que vous avez avec le Miss School, est-ce que tu peux nous partager une réussite vraiment où la formation a vraiment transformé une culture d'équipe ?

  • Frank Lascombes

    Oui, alors là... comme on est en visible, mais j'ai un sourire parce que ça, ça me fait plaisir. Je vais reprendre mes welcomers. Ils ont des profils différents. Ça va de la super assistante de direction au data scientist, en passant. Il y a toute une panoplie de gens qui vont aller. Ils ont des points communs. Dans les points communs, qui sont des forces et des faiblesses, dans les points communs, ils aiment rendre service. Ils sont souvent bons pédagogues parce qu'ils aiment former. Et ils aiment aussi les trucs compliqués où ils vont trouver une solution. Dit autrement, ce sont à la fois des gens plutôt un peu timides ou réservés, c'est-à-dire pas des grandes gueules, si je le dis, excusez-moi l'expression. Et en même temps, le fait de vouloir rendre service, ils ont tendance à se faire un peu manger. Donc, il faut absolument qu'ils cadrent leur mission. Et pour le reste, ils ont le goût du challenge. Ils aiment les difficultés, en fait. Tu ne croirais pas des gens comme ça. Et donc, c'est hyper intéressant parce que... Quand on les fait parler, parce qu'on les met en situation, on les fait parler. Et ça commence par ça au début. On dit, tu vas te présenter, je veux comprendre qui tu es, ce que tu fais. Et entre le début, ça c'est un bootcamp de deux jours, entre le début et la fin, ça n'a plus rien à voir. Et au-delà de savoir expliquer de façon très claire, grammaire, niveau CP, ce qu'ils font, à quoi ils servent, etc. Ils ont surtout le plaisir de dire qui ils sont et la fierté. Et tout de suite après, tu as bon. Et alors on finit, elle est facturée cette mission. Nous, on voudrait bien, mais la direction ne veut pas. Ils n'osent pas. Je dis bon, allez, il faut peut-être faire une psychanalyse groupée au niveau de la profession, parce que facturer, on sait faire quand même. Dans mon groupement, je vois bien qu'ils facturent. Quand on dit que les experts n'ont pas d'imagination, c'est absolument faux. Les lignes de facture, c'est tout à fait étonnant. Mais là, une facture claire et facturer ce qui a vraiment de la valeur, mais évidemment qu'il faut oser. Donc, tu vois, transformation dans les comportements, il faut... pas grand-chose pour cranter, en fait. Et ça fait très plaisir, et moi, ça me donne, évidemment, beaucoup d'espoir. Est-ce que 100% iront ? Non, bien sûr que non. Il y a des gens qui ne se reconnaîtront pas. Mais est-ce que beaucoup peuvent y aller ? Ouais, clairement,

  • Delphine Buisson

    ouais. Oui, il faut être positif par rapport à ça. Je pense que c'est très clair. Alors, justement, Damien, le concept, c'est vrai, de collaborateurs augmentés, vous en parlez souvent, et ça revient souvent dans les communications au niveau du CNO. Comment le traduis-tu concrètement dans la pratique des cabinets ?

  • Damien Charrier

    Effectivement, ça fait partie des sujets qui sont abordés notamment au travers de la profession comptable 2030. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que quand on dit collaborateurs augmentés ou experts comptables augmentés, en fait, ce n'est pas remplacé. Et je pense que ça vient d'être dit de manière tout à fait juste. Les collaborateurs, les experts comptables, tout ce qui compose un cabinet, c'est d'abord des humains. Et ce sont des gens qui sont souvent profondément humains. Parce qu'on oublie quand même toute cette dimension psychologique qui est importante. Philippe en a parlé tout à l'heure. mais c'est vrai que L'écoute d'un chef d'entreprise qui traverse la vie d'un chef d'entreprise, c'est tout sauf linéaire. Il célèbre par moments des réussites et par moments des difficultés, parfois importantes. Et donc ça, il faut quelqu'un qui l'écoute. On a parlé d'empathie, ça fait parce qu'il y a des émotions. Et d'ailleurs, je pense à une petite anecdote de début de semaine, parce que j'ai un de mes clients qui est en grande difficulté et le collaborateur est allé un peu au-delà de l'empathie. C'est-à-dire qu'il a pris pour lui la détresse du client. Là aussi, je pense qu'on a des choses à travailler sur cette dimension psychologique. Après, j'aime beaucoup ce que disait Delphine sur le bon sens. Et peut-être vous livrer une autre anecdote. Comment fonctionnait le cabinet quand je suis arrivé dedans ? On avait des collaborateurs expérimentés qui faisaient des tournées de TVA. Évidemment, on ne fait plus ça parce que concrètement, on allait chez le client. Mais en fait, ce n'est pas tellement la tournée de TVA qui est intéressante. C'est ce qui se passait dans la tournée de TVA. C'est qu'en fait, ces collaborateurs qui voyaient leurs clients tous les mois, ils revenaient au cabinet avec des trucs du genre, tiens, j'ai vu le pharmacien, ce machin. Ces enfants vont partir en études. Donc en fait, il faut faire une étude prévisionnelle d'IRPP pour savoir si c'est mieux de le détacher ou pas. Si je dois démembrer un bien immobilier, parce que maintenant, on appelle ça la gestion de patrimoine. Parce qu'on s'est organisé, effectivement, et on a peut-être créé des lignes de facture aussi. Parce qu'il y a quand même de l'agilité, on va dire, chez les experts comptables. Mais je pense que c'est ça. Il va falloir revenir quand même de temps en temps aussi à des fondamentaux. Voilà, donc vous l'avez compris, le collaborateur augmenté, c'est effectivement celui qui va utiliser bien la technologie, et pour ça, il faut le former, pour se libérer du temps et rentrer effectivement dans quelque chose d'un peu plus actif en termes de relations clients. Après, ce n'est pas 100% des collaborateurs, ça a été dit aussi. Je pense qu'il faut aussi se dire qu'on va quand même avoir, c'est des profils de postes qu'on est en train de voir émerger, des gestionnaires de flux. et des gens qui vont contrôler la data. Et ça, ce n'est pas forcément des gens qui seront en relation avec les clients parce qu'ils seront peut-être moins à l'aise sur cette dimension-là. Mais par contre, on aura besoin de leur expertise pour qualifier toute cette data automatique qui va arriver dans le système d'information. Donc, ne faisons pas non plus de généralité. On a aussi besoin d'une diversité de compétences.

  • Delphine Buisson

    Alors, je vais profiter effectivement de ta qualité de président de l'institution sur ce sujet d'évolution, parce qu'on voit bien qu'effectivement... Il n'y a qu'à voir, depuis le temps qu'on échange autour de cette table, on voit bien quand même qu'il y a une transformation importante qui est en train de s'opérer. Comment préserver finalement l'identité et les valeurs de la profession dans cette évolution des métiers ?

  • Damien Charrier

    Les experts comptables, ils ont quoi dans leur patrimoine génétique ? Ils ont un serment et puis ils ont une devise. En fait, la devise, elle a été inventée il y a 80 ans. Et cette devise, c'est science, conscience, indépendance. Alors, ce qu'on peut se dire, c'est que la science, en fait, effectivement... elle va être un peu percutée par la technologie parce que ça va plus vite. Mais en même temps, depuis la généralisation d'Internet, on ne travaille déjà pas comme avant. On n'est plus des bibliothèques du code fiscal, en fait. Donc, c'est vrai que ça va encore s'accélérer avec l'IA. Et en même temps, il faut quand même se dire aussi que quand le BofIP, il n'est pas écrit, l'IA, elle ne va rien faire du tout, en fait. Et là, c'est l'expérience qui prend le relais. Donc, il ne faut pas aller trop vite, en fait, sur ces notions-là. Et puis après, les notions fondamentales, la conscience et l'indépendance, c'est toute la valeur ajoutée. c'est ce qui fait qu'un expert contact, prendre du recul dans une situation, enfin un expert comptable, un collaborateur en fait, il n'est pas influencé par son environnement, c'est ce qu'on lui demande en tout cas, et c'est ce que le client lui demande. Et donc ça, ça reste des valeurs qui sont, je dirais, encore plus centrales, parce que l'affluence de technologie, l'affluence d'information, elle peut mettre à mal ces dimensions-là, d'ailleurs dans la société d'une manière générale, parce que la génération des fake news, ce genre de choses, justement l'expert comptable et ses collaborateurs doivent se préserver de ça. Je pense que ces valeurs-là, elles sont extrêmement importantes.

  • Delphine Buisson

    Et c'est vrai que ce que je répète souvent, c'est vrai que surtout avec l'IA qui arrive, etc., c'est qu'il ne faut jamais oublier quand même que la profession a aussi un devoir de compétence, entre guillemets. Et du coup, à l'aune de l'IA et à l'aune de ces outils qui arrivent, attention aussi, parce que les collaborateurs, comme tout un chacun, on est tous confrontés à la techno dans nos univers, je dirais, personnels. parfois envie d'utiliser finalement ces outils-là. Et si on n'a pas, je dirais, des chartes au niveau du cabinet, des chartes comportementales par rapport aux outils, comment on les utilise, etc., ça peut quand même poser des vrais sujets. Parce que, bon, quelque part, le rendu au client, on engage concrètement sa signature et donc, du coup, sa responsabilité. C'est pour ça que je parle souvent de devoirs, de compétences par rapport à ça. Et c'est vrai qu'il ne faut quand même jamais l'oublier et jamais l'obéir. Moi, je voudrais faire un petit tour de table rapide en un mot. Vous prenez à la volée chacun comme il l'entend. Selon vous, quelle est la compétence incontournable du collaborateur de demain ?

  • Philippe Barré

    L'esprit critique. L'agilité.

  • Frank Lascombes

    La capacité à apprendre.

  • Delphine Buisson

    Oui. Intéressant.

  • Philippe Barré

    Mais parce qu'on devait en dire qu'un chacun.

  • Delphine Buisson

    Oui, tout à fait. C'était l'exercice. Merci de l'avoir accepté. C'était l'exercice. On va pouvoir passer à la troisième et dernière partie de ce podcast. Passer de l'intention à l'action. Parce que c'est vrai que là aussi, ce que je répète régulièrement, c'est que... Depuis un certain nombre d'années, on a beaucoup travaillé sur les constats, sur ce qui était en train d'arriver, sur tout ce qui pourrait éventuellement se passer. Maintenant, je pense qu'il est vraiment temps de passer à l'action, d'autant que le temps qui nous sépare de septembre 2026, qui est l'arrivée de la facture électronique, qui va, à n'en pas douter, être un déclencheur assez important d'un certain nombre de choses au niveau du cabinet, y compris des processus. C'est vrai que ce temps de passage à l'action, il est fondamental. Donc, comprendre les enjeux, c'est une chose. Les transformer en actions concrètes et durables, ça en est une autre. Quel rituel mettre en place ? Quel indicateur suivre ? Et par où commencer pour réussir une transformation dès demain matin dans un cabinet ? Alors, Philippe, toi, lorsqu'un cabinet, finalement, te demande par où commencer pour transformer son organisation, quelle première étape lui recommandes-tu systématiquement, en fait ?

  • Philippe Barré

    Alors en fait... Quand un cabinet appelle un consultant pour se transformer, la première étape, elle a déjà eu lieu. La première étape, c'est la prise de conscience par les dirigeants qu'il fallait faire quelque chose. Et c'est vrai, on en a tous conscience, que les experts comptables sont submergés, qu'ils ont toujours du court terme à gérer, qu'ils ne savent pas déléguer, qu'on a des problèmes de recrutement qui font qu'il y a plein de bonnes raisons et aussi plein de mauvaises. pour reporter à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui.

  • Delphine Buisson

    Le syndrome de la tête dans le guidon.

  • Philippe Barré

    C'est ça. C'est-à-dire qu'effectivement, on a beaucoup de cabinets où il y a un dirigeant qui est plus un super technicien qu'un dirigeant. Et c'est vrai que dans ces moments-là, dans les moments de transformation, quand ça tangue, je ne sais plus qui a dit, c'est quand on traverse une zone de turbulence qu'on voit la qualité du pilote. C'est vrai que sur les 30 dernières années, il y a eu des changements dans la profession. Mais on est passé à la DSN, on est passé à des choses comme ça. Alors c'était des changements, mais c'était des changements techniques. On ne changeait pas de métier, on ne changeait de logiciel, on changeait de choses comme ça. Mais le métier était le même, l'objectif était le même, etc. On était en plus sur du régalien à 60%, 70% de notre activité. Donc on n'avait pas de commercial à faire, puisque la prestation qu'on vendait était une prestation incontournable, obligatoire pour tout chef d'entreprise. Dieu merci, le français est d'une complexité inouïe. Quand ils sont députés ou sénateurs, je pense que c'est encore pire. Et donc, ils rajoutent une complexité chaque année encore plus forte. Et donc, c'est ce qui a fait que les experts comptables étaient incontournables et sont incontournables. Alors, on va dire, ils ont profité de la situation. Pas du tout. Ils ont fait le job dont on avait besoin, dont l'économie avait besoin, dont les chefs d'entreprise avaient besoin. Alors certes, ce qu'on a fait, c'est-à-dire faire des liasses fiscales, des bilans, des bulletins de paye, des machins, des bidules, ça n'a pas apporté une grande valeur ajoutée. aux dirigeants en tant que dirigeants, au sens où il n'a pas fait grandir son entreprise. Mais ça lui a quand même enlevé une sacrée épine du pied, parce que s'il n'avait pas fait ses liasses fiscales, etc., ça aurait été d'une complexité inouïe. Mais une fois qu'on a dit ça, ce qui se passe maintenant, ça ne ressemble pas à ce qui s'est passé jusqu'à maintenant. Parce que la tenue de comptabilité, elle va être faite en grande partie par des outils. Et donc, c'est le modèle économique qui est en jeu. Et ça, on ne l'a pas eu depuis très, très, très, très longtemps. Ce qui veut dire quoi ? Ce qui veut dire qu'il va falloir réinventer le cabinet. Et donc, quand on me sollicite pour accompagner un cabinet, la première des choses, c'est c'est quoi le cabinet au vendu ? Comment ça fonctionne, votre diagnostic ? Ce qui va bien, ce qui ne va pas bien ? Ce pour quoi vous êtes bon, ce pour quoi vous n'êtes pas très bon ? Qu'est-ce qui vous différencie les voisins ? Ou alors, est-ce que vous êtes tout à fait ordinaire ? Que ce soit péjoratif dans mon esprit, vous êtes un cabinet normal de 5, 10, 15 personnes, 20 personnes, 50 personnes. Bon, OK. Et alors après, c'est vous voulez aller où en ayant évidemment intégré. dans la réflexion tout ce qui va se passer. Parce qu'il y a des cabinets, au dernier congrès ou au congrès d'avant, il y avait encore, je ne sais plus combien, 10 ou 15% de cabinets qui disaient « mais moi dans les 5 ans, je continue comme avant » . Bon, donc ça veut dire qu'il y a quand même 10-15% de cabinets qui ne seront pas chers bientôt. Parce qu'effectivement, il y a peu de chances qu'ils aient une résistance aux événements qui vont se passer. Donc là, la question c'est « vous voulez aller où ? » Et évidemment la question d'après c'est « comment on y va ? » « comment on fait ? » etc. et si Qu'est-ce que vous voulez être dans 5 ans ? Avec évidemment une intégration des projets professionnels de chaque dirigeant qu'il faut intégrer dans le mixeur pour arriver à un projet d'entreprise qui soit un vrai projet d'entreprise et pas juste faire ce qu'on a fait depuis 25 ans. Et là le problème c'est qu'il faut inventer des nouveaux métiers, des nouvelles missions, enfin quand je dis métiers, prestations, des nouvelles missions qui n'ont pas le même modèle économique que les missions traditionnelles. Parce que moi, je suis très admiratif et sincèrement très admiratif pour les cabinets qui se lancent dans la gestion de patrimoine. Mais dans un cabinet de 20 personnes, quand il y a un ou deux associés et qui se lancent dans la gestion de patrimoine, qui va faire ces missions-là ? C'est la personne qui ne fera plus de saisie et de TVA ? Certainement pas. Donc, le dirigeant qui lui-même est déjà la tête dans le guidon, qui n'a pas le temps pour diriger son cabinet, qui va devoir transformer son cabinet, qui va devoir faire tout ça, alors bien sûr, c'est une porte de sortie, la gestion de patrimoine. Mais ça ne peut pas être la planche de salut du cabinet. Parce qu'en plus, la gestion de patrimoine, j'ai accompagné une carrière de cabinet qui en font. Le modèle économique, c'est on fait une belle mission tous les 2, 3, 4, 5 ans, 10 ans, 15 ans, mais on ne facture pas tous les mois. Et voilà, c'est pareil pour plein d'autres missions qui sont exceptionnelles. Donc les missions qu'il faut que les cabinets, et là, ça fait partie de mon job, que de les aider à trouver leur mission de demain, il faut quand même que ce soit adapté à leur équipe. Notamment les équipes qui vont perdre les missions traditionnelles de tenue, il faut que ce soit adapté aux clients. Quand vous avez des boulangers comme clients, des charcutiers, des électriciens, des consultants ou des médecins, ils ne vont pas acheter une mission de cybersécurité tous les deux ans. Donc ça veut dire qu'il faut quand même que la mission soit adaptée à la fois aux compétences qu'on a et aux clients qu'on a.

  • Delphine Buisson

    Et moi ce que je retiens aussi dans ce que tu disais au début, c'est que ça me semble important, c'est vraiment de répéter, parce que ça a été souvent le cas dans la profession que l'outil était la stratégie en fait. L'outil, on le sait, je dirais, dans les 10, 15, 20 dernières années, tu le disais très justement, on arrivait à solutionner finalement une contrainte supplémentaire technique qui arrivait, la DSN, etc. C'est vrai que l'outil, du coup, à chaque fois répondait finalement à ces exigences qui étaient portées au cabinet en termes de pratique. Et finalement, c'est devenu quelque chose d'acquis qu'en réalité... Finalement, la stratégie, c'est l'outil. Et donc, je me précipite au congrès, sur les sites des éditeurs dont nous sommes, et je m'équipe avec un outil. Et ça, assurément, ça ne pourra plus fonctionner comme ça.

  • Philippe Barré

    Alors, ça ne pourra plus fonctionner comme ça. Et c'est ça qui est très paradoxal. Parce que l'expert comptable, effectivement, avant même d'avoir une stratégie, il y a un éditeur, il y a quelques années, qui est assez connu, qui me racontait un jour, on prenait un café tous les deux, il me racontait qu'un tiers des outils qu'il vendait, notamment au congrès, n'étaient jamais ouverts. Parce que c'était des outils pour faire des nouvelles missions. Après, on est face à deux paradoxes par rapport aux outils. Le premier paradoxe, c'est que comme l'outil fait de plus en plus de choses, sur un gâteau qui constitue les honoraires de l'expert comptable, il est évident que la cote-part qui revient à l'outil augmente naturellement. S'il faisait 10% de la mission il y a 10 ans et qu'il en fait 70% aujourd'hui, il est un peu logique que le curseur évolue et que le prix de l'outil augmente par rapport à la contribution. de l'expert comptable. Et donc, en ayant remis tous nos œufs dans le même panier qui est le panier de l'outil, le résultat, c'est qu'évidemment, on a un problème de transfert de valeur, on a un problème de partage de la valeur, etc. Donc ça, c'est le premier paradoxe. Et les experts comptables trouvent que leurs éditeurs sont chers, mais malheureusement, il faut aussi comparer par rapport à ce qui a été fait. Moi, j'ai commencé il y a 35 ans, les bulletins de paye, on prenait un papier, on mettait brut montant, charge sociale sur le plafond, charge sociale sur le total, net. Et c'était fini. Et j'avais un patron qui m'avait dit, on ne va quand même pas faire de la paye, c'est un boulot de secrétariat. Aujourd'hui, c'est 14% du chiffre d'affaires de la profession. Et les outils, pour le coup, je crois qu'en matière d'outils en paye, on a eu quand même quelques moments un peu compliqués. Le deuxième paradoxe, c'est qu'on constate que les outils, sur certaines missions, font plein de choses, mais sur d'autres, ne feront pas le job. Et demain, les nouvelles missions, ce ne sont pas les outils. Je prends un exemple, reprenons l'exemple de la paye. On a un prestataire qui est super connu. qui n'est pas celui auquel vous pensez, qui est un prestataire 100% Internet qui a proposé de faire la paie depuis quelques années. Il a eu le prix de la meilleure start-up de LinkedIn, etc. Et en fait, il a capté plein de clients, parce qu'il n'était pas très cher au début. Il a piqué plein de clients aux experts comptables en matière de paie. Et je me souviens, les experts comptables, ils râlaient parce que leurs clients se tiraient. Alors, j'ai fait auditer des bulletins de paie réalisés par cet éditeur en disant, bon, les bulletins de paie doivent être faux. Eh bien, manque de bol, ils étaient justes. Et donc... A priori, c'était mal parti pour les experts comptables parce qu'ils étaient plus chers et les bulletins de paye de l'éditeur étaient bons. Et puis, depuis 3-4 ans, cet éditeur, il se casse la gueule. Il a fait deux plans sociaux, ses projets européens se sont concentrés sur la France, et même sur la France, ils ont perdu beaucoup de leur superbe. Et il y a plein de cabinets qui m'appellent et me disent « tu sais, j'avais perdu tous les bulletins de paye de 14 dossiers, etc. » Sur les 14, il y en a 6 ou 7 qui sont déjà revenus. Pourquoi ? Parce que la paye, c'est une complexité. La paye, c'est aussi des contrôles sociaux. Quand vous êtes en face d'un écran, il n'y a pas d'interlocuteur. Et donc, ça veut dire qu'il faut bien identifier les missions. Si on se met sur des missions qui sont 100% automatisables, évidemment, il n'y aura pas de place. Et on va se faire 100% remplacer par des logiciels. La jurisprudence récente nous est pas très favorable là-dessus. Donc il faut évidemment inventer des missions dans lesquelles l'humain est le cœur de la mission, pas le logiciel. On aura besoin du logiciel pour nous filer un coup de main, mais ça doit être qu'un coup de main.

  • Delphine Buisson

    Delphine, si un cabinet concrètement veut agir dès demain, finalement quelles sont pour toi les trois actions simples à mettre en place ?

  • Frank Lascombes

    En fait, c'est pas possible de répondre à cette question, parce que ça dépend d'où il part. Philippe, tu dis la question c'est savoir où je vais. Déjà c'est où je vais, où nous allons. puisqu'ils sont globalement des collèges de direction, ce qui rend les choses un peu plus complexes. Et j'ai envie de dire, c'est une époque en ce moment où la bonne question à te poser, c'est qui je suis et qu'est-ce que j'aime faire ? Parce qu'on parle de l'expert comptable comme si c'était... En fait, moi, j'en connais, comme vous, plein, beaucoup. Il n'y en a quand même pas deux qui se ressemblent et surtout, il n'y en a pas deux qui habillent le métier exactement de la même façon. Et donc, la première question, c'est qui on est et qu'est-ce qu'on va faire ? Partant de qui nous sommes, qui avons-nous envie de devenir ? Ça, c'est la première question. Après, la deuxième orientation, parce qu'on n'en parle pas, mais ça n'est pas neutre en ce moment, tous les sujets qu'on va mettre sous le mot financiarisation du moment vont avoir énormément d'impact entre aujourd'hui et demain sur ce qui va se passer dans la profession. Aujourd'hui, j'ai besoin de choisir, outre le fait de ce qu'on a ce que j'ai envie de faire ou ce qu'on a envie de faire collectivement, j'ai besoin de choisir le modèle d'exercice. Et le modèle d'exercice, il sera très différent. Et sans jugement de valeur, je peux choisir de rejoindre une marque, parce que je considère que la marque, elle va faire un certain nombre de choix que je n'aurais pas à faire, etc. Je peux choisir de rejoindre une technologie leader. Et là, je ne suis pas complètement d'accord avec vous sur la partie technologique, parce qu'on a aujourd'hui des technologies qui sont en train de devenir leader. Et je peux choisir de devenir, alors je ne vais pas dire sous-traitant d'une technologie, c'est peut-être un peu beaucoup, mais en tout cas de dire je vais suivre le mouvement imprimé par la technologie. Si l'opérateur dont tu viens de parler, Philippe, avait été un peu plus ouvert, ce qu'il n'était pas du tout, et qu'ils avaient mis l'humain qui allait bien avec, ils n'en seraient peut-être pas là aujourd'hui. Mais ce n'est pas le cas des technologies qu'on voit émerger, qui appréhendent à la fois une technologie très assertive. Et des gens qui vont se conglomérer autour, en fait, en termes d'offres de services, etc. Donc, tu peux aussi avoir un exercice de ce métier-là avec des technologies leaders. Tu peux... Alors ça, je ne sais pas trop ce que ça va donner, mais il faut peut-être qu'on arrête de se mentir. Si je fais rentrer des fonds d'investissement suffisamment de façon importante, il ne faut pas me raconter qu'une fois qu'on a vendu... Et encore une fois, il n'y a pas de jugement de valeur là-dedans. Je peux avoir envie de préparer ma retraite, de réaliser tout mon travail. Enfin, je veux dire, c'est très honorable. Mais je ne vois pas bien, quand on sait le travail qu'il y a à faire aujourd'hui dedans, ou alors il va falloir changer, ça ne suffit pas d'injecter de l'argent pour dire que le travail va se faire. Et moi, ça me hérisse un peu quand j'entends des plateformes de cabinets, des agrégats de machins, qui vont devenir des concentrateurs. Mais alors, d'accord, mais des concentrateurs de quoi ? De compte de résultats ? D'accord. Et donc ça, c'est un autre modèle. Je peux choisir, encore une fois, il n'y a pas de jugement à avoir, je peux décider de... de faire entrer, mais du coup, je ne suis plus aux commandes et je ne sais pas trop comment je vais gérer la transformation. En tout cas, ça va être une transformation assez financière, mais pourquoi pas ? Et puis après, il y a ce que j'appelle les entrepreneurs leaders. Voilà, ça, c'est ce que j'aime bien recruter chez Eurus. Et encore une fois, sans... Les autres,

  • Damien Charrier

    tu ne nous as pas présentés pour nous faire rêver. Nous, on est dans notre châtel, en fait.

  • Frank Lascombes

    Non, mais je peux comprendre qu'on n'ait pas envie, parce que j'en ai... Vous n'étiez pas enthousiaste. Je ne suis pas enthousiaste, parce que ce n'est pas ceux pour lesquels je travaille. Mais par ailleurs, quand j'ai un petit cabinet de mon groupe qui rejoint le très beau groupe Inextenso, qui sont des gens que j'aime beaucoup, etc. Mais parfait, et je comprends très bien ce qu'ils font. D'accord ? Je dis quand, en tout cas, il y a une place. Pour des entrepreneurs qui veulent garder la direction, et les groupements sont là pour les aider, l'institution, etc. Mais là, il y a effectivement du travail à faire. Et pourquoi pas faire rentrer des investisseurs, quels qu'ils soient, mais il faut avoir un projet à financer. Et donc, la troisième question, j'ai dit qui suis-je et qui sommes-nous collectivement avant de dire où allons-nous ? Quelle modalité d'exercice choisissons-nous collectivement ? Parce que c'est un vrai sujet qui se pose aujourd'hui et il faut faire un choix. Il faut faire un choix. Et la troisième chose, retour au client et à l'offre. Qu'est-ce qu'on vend ? Quelle est la valeur qu'on produit ? Et puis après, derrière, ça va être de la mise en place. Mais c'est assez passionnant. Là, pour le coup, c'est des petits pas. C'est un chantier après l'autre. C'est du chantier. Ça n'est pas impossible. Je suis sûre que tu connais, que nous connaissons tous. Moi, j'en ai dans mon groupe et j'en vois ailleurs. Je vois de très belles choses arriver. Ce n'est pas forcément des gens qui font du bruit, mais je vois des gens qui ont déjà passé le cap de la transformation. Tu le vois dans une enseigne, tu as le mot technologie qui apparaît sans complexe. Il y a plein de choses qui apparaissent comme ça. Et peu à peu, les transformations se font par les offres et par les métiers.

  • Delphine Buisson

    Mais il ne faut jamais oublier que ça, de toute façon, c'est le cas pour toutes les entreprises. Tout part du client et tout doit partir du client. Et en fait, c'est le client qui, quoi que lui en soit... nous donne la voie finalement quelque part de ce qu'on peut proposer et de ce qu'on doit proposer.

  • Frank Lascombes

    Que le client soit conscient ou pas.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait. Et c'est là où est la difficulté parce que justement, il faut savoir bien le questionner. Ou l'opportunité. Voilà, bien le questionner, bien être attentif aux opportunités ou signaux faibles éventuellement qu'il peut nous apporter pour pouvoir répondre au mieux à son besoin et lui apporter un maximum de bénéfices.

  • Philippe Barré

    Et c'est là-dessus où on n'a pas forcément été très bon. Parce qu'on n'en avait pas besoin et parce qu'on était submergé par le quotidien. Mais c'est là-dessus probablement que ça va beaucoup changer. Ça va beaucoup évoluer.

  • Delphine Buisson

    Damien, moi j'aimerais t'interroger. Alors à la fois finalement, en tant qu'expert comptable, dirigeant de cabinet, mais à la fois avec ta casquette de l'institution et de président de cette institution, finalement s'il y avait un seul conseil à un dirigeant de cabinet pour passer de la réflexion à l'action en 2025-2026, lequel serait-il pour toi ?

  • Damien Charrier

    Alors, je crois que la difficulté qu'on a dans la profession, ça m'a toujours marqué, c'est de conjuguer le temps court et le temps long. Le temps court, c'est celui de la production, et le temps long, c'est plutôt celui de la stratégie, de la planification et de la transformation. Juste un point d'attention, c'est que ça ne va pas s'arranger, parce qu'on va passer d'une comptabilité d'échéance, c'est ce qu'on sait faire depuis toujours, à des flux continus. Et donc, du coup, ce qu'on faisait avant entre deux échéances, si on ne s'organise pas différemment, on ne le fera plus du tout, puisqu'en fait, on sera en production continue. Donc voilà. C'est juste un petit préambule, mais qui me paraît important. Ensuite, on a quand même une chance importante, c'est qu'on a une date. On a une date, c'est le 1er septembre 2026, donc en fait, on n'a pas le choix. Donc, moi, le premier conseil, c'est que pour ceux qui n'auraient pas commencé, il faut s'appuyer sur la facture électronique pour s'en servir comme vecteur de transformation. Parce que c'est un super vecteur. Je donne quand même quelques chiffres, c'est que 22 000 experts comptables en France, 190 000 collaborateurs, donc on a 210 000 personnes qui travaillent au quotidien pour 3,5 millions d'entreprises. sur les 8 millions d'assujettis à la facture électronique. Donc il y a 50% du job de conversion qui repose sur les experts comptables. Donc appuyons-nous là-dessus pour accélérer la transformation. Ça c'est vraiment un point qui me paraît extrêmement important et c'est une vraie chance. Et le deuxième, c'est que de toute façon il faut déjà décider et si on a besoin d'un support méthodologique, il faut aller voir Delphine, il faut aller voir Philippe. Et bien sûr, les instances, les conseils régionaux qui font beaucoup sur le sujet, le Conseil national. Mais vraiment, je fais une différence entre exercer seul, parce que je fais une différence entre être seul et être isolé. Surtout, il ne faut pas rester isolé. Le rôle des instances, pour revenir sur la chapelle et la Cichaud-Prêchoir, c'est que le rôle des instances, c'est d'embarquer tout le monde. Donc, de donner les chances à tout le monde d'arriver à réussir cette transformation. Donc voilà, il y a plein de choses qui sont produites, il y a plein d'énergie qui est mise sur ce sujet-là. Donc vraiment, n'hésitez pas à aller voir les instances, n'hésitez pas à aller voir les syndicats ou les groupements. Il y a plein de façons d'y arriver en fait, mais il faut déjà effectivement commencer.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait, je pense que moi ce que je retiens de ce que tu viens de dire aussi, c'est qu'effectivement, il faut faire attention à la partie isolement, au côté isolement. Et d'ailleurs, l'Ordre a toujours, je dirais, fait son travail sur ce sujet-là, en sortant par exemple des guides, des groupements, des guides des réseaux. Parce que parfois, c'est vrai que ça peut être bien de pouvoir mutualiser des échanges, avoir des échanges avec ses consoeurs, ses confrères, pour se faire une idée. C'est important. Il ne faut quand même pas oublier, quand on regarde comment est construite la profession, qu'il y a quand même encore beaucoup de cabinets de moins de dix collaborateurs. Cette notion d'isolement peut être quand même importante.

  • Frank Lascombes

    Il est venu le temps de conclure quand même, parce que c'est vrai qu'on est bien ensemble. Je pense qu'on pourrait faire un podcast de deux heures sans difficulté sur ces sujets-là qui sont vraiment importants. Ce que vous avez entendu aujourd'hui, c'est que clairement, la transformation des cabinets n'est pas qu'une affaire de logiciel ou de process, mais une histoire d'hommes et de femmes, très clairement. La chance qu'on a avec ces outils, c'est qu'ils libèrent du temps, mais c'est ce que l'on fait de ce temps qui fait la différence. conseiller, accompagner, donner des bénéfices aux clients. Les outils finalement ne sont qu'un moyen, certes important, de le rendre possible. Nous avons aussi vu que cette transformation ne se décrète pas, elle s'accompagne pas à pas. Elle suppose d'écouter les résistances, de rassurer, de donner du sens. Elle suppose aussi de redéfinir les rôles, de former en continu, de créer des communautés d'apprentissage et de pratique. Chez Agiris, nous avons compris que nous devions nous aussi dépasser notre mission originale, et c'est notre transformation à nous, de dépasser cette mission de développeur d'outils. C'est la raison pour laquelle on a bâti de véritables programmes de transformation à destination des cabinets. Je vous laisse vous renseigner auprès de nos équipes qui vous accompagnent chaque jour sur le terrain. Enfin, cette transformation demande du courage managérial. Instaurer de nouveaux rituels, mesurer l'adhésion, célébrer les progrès, bref, agir concrètement pour embarquer toute l'équipe. Si je devais retenir une seule idée, c'est celle-ci, la technologie est un accélérateur, mais la vraie clé c'est l'humain. C'est en libérant l'énergie des collaborateurs que les cabinets deviendront non pas des producteurs de chiffres, mais de véritables copilotes de la réussite de leurs clients. L'idée étant de passer d'un cabinet qui fait à un cabinet qui accompagne, d'un cabinet prestataire à un cabinet partenaire. Merci à nos trois invités pour leurs éclairages. Merci à vous qui nous avez écoutés et de porter ce mouvement au cœur de vos cabinets. Je vous donne rendez-vous bientôt pour un nouvel épisode autour des enjeux de la transformation des cabinets. Merci pour votre écoute et à très vite.

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Comprendre et lever les résistances

    03:25

  • Rédéfinir les rôles et développer les compétances

    26:20

  • Passer de l'intention à l'action

    39:09

  • Conclusion

    58:40

Description

Et si la vraie transformation des cabinets était humaine ?


Découvrez comment les cabinets d’expertise comptable évoluent face aux enjeux humains, managériaux et organisationnels.


Dans ce podcast signé AGIRIS, des experts partagent leurs expériences et leurs conseils pour réussir la transformation RH :

  • comment lever les résistances au changement et mobiliser les équipes,

  • quelles compétences développer pour répondre aux nouvelles attentes des clients,

  • comment redéfinir les rôles au sein des cabinets à l’ère de la digitalisation,

  • et surtout, comment faire de l’humain le moteur de la transformation.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Frank Lascombes

    Bonjour à tous, je suis très heureux de vous accueillir sur cet épisode consacré à la transformation RH des cabinets. Imaginez un cabinet comptable il y a 30 ans. Les collaborateurs aligner des colonnes de chiffres, additionner, ressaisisser. Leurs valeurs se mesuraient à la rigueur, à la précision. Aujourd'hui, tout cela peut être fait par une machine en quelques secondes. Mais ce que la machine ne fera jamais, c'est écouter un dirigeant inquiet, comprendre l'histoire cachée derrière des comptes, détecter un signal faible dans une conversation, donner confiance pour prendre une décision. Cette dimension humaine... C'est le vrai cœur du métier. La transformation qui s'impose à la profession n'est pas seulement une révolution technologique. C'est une révolution de posture. Les équipes ne sont plus des producteurs de chiffres, elles deviennent des copilotes de la réussite des clients. Mais cette évolution ne se fera pas par les outils seuls. Elle passera surtout par l'accompagnement des collaborateurs pour qu'ils développent de nouvelles compétences changent de regard sur leur métier et trouvent leur place dans cette nouvelle dynamique. C'est une formidable opportunité, plus de temps pour conseiller, accompagner, anticiper, mais pour y arriver, il faut embarquer tout le monde, y compris ceux qui doutent, ceux qui craignent de perdre leur place, ceux qui n'ont pas encore trouvé leur rôle dans ce nouveau paysage. C'est tous ces sujets que je vous propose d'aborder aujourd'hui. Comment réussir cette transformation, pas seulement avec des outils, mais avec les femmes et les hommes qui font vivre les cabinets ? Comment lever les résistances, développer les compétences et donner envie à chacun de contribuer à la création de valeur ? Parce que la clé de la transformation est technologique, bien sûr, mais elle est surtout humaine. Pour en discuter aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir trois personnalités qui connaissent parfaitement la profession et ses défis. Je vais les laisser se présenter en 20 secondes chrono. Honneur aux dames, Delphine.

  • Delphine Buisson

    Bonjour tout le monde, je suis Delphine Buisson et ravie d'être avec vous pour échanger sur ces sujets assez passionnants, comme on passe de la réflexion à l'action.

  • Damien Charrier

    Bonjour Damien Charrier, je suis expert comptable en Normandie et je suis confronté au défi que tu viens d'exposer. Et puis je suis présent en qualité de président du Conseil national des experts comptables. Merci Damien.

  • Philippe Barré

    Bonjour Philippe Barré, je suis expert comptable en région parisienne et j'ai la particularité... d'avoir choisi de changer un peu de métier en accompagnant les experts comptables dans leur transformation, dans leur évolution, etc.

  • Frank Lascombes

    Merci beaucoup Philippe, merci beaucoup tous les trois. Donc sans plus attendre, ce que je vous propose c'est de rentrer dans le vif du sujet. On a beaucoup de choses à se dire aujourd'hui. Donc commençons, cette table ronde abordera trois points principaux. Comprendre et lever les résistances, premier point. Second point, redéfinir les rôles et développer les compétences. Et enfin, passer de l'intention à l'action. Parce qu'il y a un moment donné, comme on dit, il faut y aller. Donc comprendre et lever les résistances. On parle beaucoup de stratégie et d'outils, mais la première réalité de la transformation, ce sont les résistances humaines. Peur de perdre son rôle, manque de temps, sentiment d'être bousculé. Si on ne lève pas ses freins, aucun projet ne tient. Alors comment embarquer les équipes dès le départ ? Damien, selon toi, quels sont aujourd'hui les freins humains ? plus marquants dans la transformation des cabinets et comment l'ordre peut-il aider à les surmonter ?

  • Damien Charrier

    Bien sûr, il y a des résistances et je dirais que c'est normal parce qu'on est sur des mutations en profondeur et en fait l'inconnu ça fait toujours peur. En fait, il faut beaucoup accompagner, il faut redonner du sens, il faut redonner la clarté et c'est le rôle de chaque dirigeant de redonner les grandes directions de poser la stratégie. Une fois qu'on a dit ça, pour que les choses deviennent un peu plus concrètes, Il faut surtout former, et c'est ce que fait le Conseil national, c'est ce que font aussi les conseils régionaux, bien entendu. Et notamment, il y a un grand plan de formation qui existe, Profession comptable 2030. L'objectif de Profession comptable 2030, c'est justement de redonner une vision d'ensemble, de créer des parcours. Alors, les chiffres sont assez impressionnants, puisqu'il y a plus de 400 parcours actifs. Et depuis que ça existe, en fait, j'ai quelques chiffres à vous partager. On a déjà 3 800 professionnels qui ont été engagés et on est à 27 000 jours de formation. C'est quand même très significatif et je pense que c'est vraiment la prise de conscience que le changement, il est là. On est à moins d'un an de la facture électronique, donc il y a quand même des choses qui vont se passer dans le concret. Le hit parade des formations, c'est sans surprise, je dirais, cap durabilité. Donc voilà, c'est l'intégration effectivement de nouveaux enjeux. Et puis après, il y a le travail de la data pour développer les missions. Et le dernier, c'est organiser le cabinet autour de la facture électronique. Les deux derniers sujets, je pense que c'est vraiment sans surprise. Ce qu'on peut dire, c'est que derrière ces parcours, derrière ces chiffres, il y a une profession qui est en mouvement. Après, on va y revenir, je pense, dans la suite de nos échanges. Mais il faut agir sur ces leviers-là. Il faut agir également sur la prise en compte, plutôt du côté de l'expert comptable, manager, justement de cette dimension managériale des soft skills. Parce que tout ça aussi, ça va devenir des compétences qui sont déjà importantes dans les cabinets, mais qui vont être... d'autant plus importante pour les collaborateurs de demain, mais là aussi, on reviendra sur ces sujets.

  • Frank Lascombes

    Et quand tu parles de 3 800 professionnels qui ont participé à ce parcours, c'est à la fois experts comptables et collaborateurs ? Oui, bien sûr.

  • Damien Charrier

    La profession comptable 2030, ce n'est pas réservé aux experts comptables, c'est les experts comptables, les managers, les collaborateurs dans les cabinets, donc ça balaye effectivement assez large.

  • Frank Lascombes

    Et ce cadre durabilité, il n'y a pas eu un petit frein avec la loi Omnibus ? mais...

  • Damien Charrier

    Pas tant que ça. En fait, je pense que sur la durabilité, il y a des enjeux côté expertise comptable, il y a des enjeux côté compagnie des commissaires au compte. Et en fait, les experts comptables sont positionnés vraiment pour accompagner les entreprises, y compris les plus petites, sur des premiers pas en matière de durabilité, même si effectivement la contrainte s'est un peu éloignée. Par contre, on sait qu'il y a des demandes nouvelles qui viennent notamment des banques sur ces enjeux-là. Donc ça arrive par capillarité dans les entreprises.

  • Frank Lascombes

    et toi enfin À titre personnel et par rapport à l'institution que tu représentes, est-ce que tu constates une différence finalement de posture entre générations, entre tailles de structures, entre tailles de cabinets ou éventuellement même peut-être titre de mission ou pas du tout ?

  • Damien Charrier

    Oui et non. C'est-à-dire que je pense que tout le monde est concerné déjà, quelle que soit la taille de la structure. et je pense que dans les missions, pour répondre effectivement sur cet aspect-là, de manière très factuelle, je pense que les missions d'établissement, les missions de tenue, sont les missions qui vont être... modifié le plus rapidement par ces évolutions technologiques et sur lesquelles il y a vraiment besoin de se pencher parce que c'est encore aujourd'hui une partie très importante de l'activité des cabinets. Donc là-dessus, il faut effectivement bouger. Ce sera peut-être un peu moins le cas sur d'autres, encore que. Et puis sur les générations, il y a un effet générationnel, mais là aussi, je pense qu'il faut vraiment miser sur la complémentarité. Il ne faut pas imaginer que l'intelligence artificielle va se substituer à tout et on aura encore besoin de techniciens, et notamment de très bons techniciens dans les cabinets. et ça La technique, en fait, elle est souvent maîtrisée par les plus anciennes générations. Et je pense notamment aussi parce que, voilà, nous, on a aussi un volet emploi des seniors qui est important. Et en fait, on est plutôt là à essayer de retenir les compétences plutôt que, effectivement, se priver des compétences des anciens. Et puis, voilà, les jeunes sont peut-être un peu plus agiles avec les outils, encore que là-dessus, il n'y a pas de règles établies. Donc, voilà, je pense qu'il faut être attentif à ces... à ses aspects générationnels et construire la pyramide des âges. Quand on a plusieurs collaborateurs, il faut essayer de mixer un peu les générations. Je pense que ça, c'est important.

  • Frank Lascombes

    Je me tourne vers toi, Delphine. C'est vrai que tu as une expérience assez intéressante avec l'Umi School. Quand vous intervenez avec l'Umi School auprès des équipes, quelles sont les résistances que tu observes le plus souvent, le plus régulièrement ?

  • Delphine Buisson

    Quand ils entrent chez l'Umi School, ils sont déjà plus résistants.

  • Frank Lascombes

    Oui, ils ont déjà fait le port.

  • Delphine Buisson

    Oui, précisément, on est sur un public qui est au moins convaincu du fait qu'il faut pratiquer pour évoluer. C'est un dispositif qui est très complémentaire sur tout ce qui est fait par les instances. Et puis, voilà, divers dispositifs dans les groupements. Tous nos copains groupements, on travaille beaucoup là-dessus. L'UmiSchool, lui, vient adresser vraiment un sujet très spécifique et avec une pédagogie spécifique. Les nouveaux métiers m'ont orienté business. Nous, on est convaincus que la résistance, elle ne s'opère pas quand tu es bien présent. Damien, il parle de clarté, c'est un très joli mot, la clarté. Pour travailler sur le sujet des nouveaux métiers en lien avec les nouvelles missions, tu te rends compte que de façon très simple, il manque parfois un intitulé, une fiche de mission qui est en fait le pendant de la fiche de poste. En fait, la fiche mission, c'est pour le client, la fiche de poste, c'est pour les RH, mais elles doivent se retrouver absolument. Et c'est ce qui va rendre finalement à la fois le métier et donc la mission attractive. C'est aussi ce qui permet de redéfinir de façon très précise ta stratégie de l'offre. Donc, plutôt que d'aller chercher dans la granularité ultime qui est les compétences un peu comme un sac de billes, à travers l'UmiSchool, on va recréer des parcours métiers qui vont adresser des missions. Donc, on part toujours de la mission. On dit c'est quoi la mission au client ? Du coup, on ne se pose plus le problème du sens parce que le sens, il est dans la mission. Qu'est-ce qu'on fait ? Quelles valeurs on produit pour les clients ? Et au passage, il y a beaucoup de missions qui ont de l'impact en interne aussi. Et puis une fois que la mission est décrite, on va construire le parcours de formation. Et du coup, on prend le sujet à l'envers et après on forme donc à la mission. Après évidemment, tu as le protocole technique. la stack technologique et la stack comportementale. Du coup, on crée une sorte de cohérence pour que finalement des cohortes de personnes qui vont finalement embrasser ou habiller le même métier d'une façon, allez, à 80%, c'est la même chose. Le parcours qui tourne le plus aujourd'hui, enfin, on en a deux qui tournent très bien, c'est les intégrateurs, les welcomeers, les tech CSM. Tech, évidemment...

  • Damien Charrier

    Pour aborder les clients, en fait.

  • Delphine Buisson

    Les tech CSM, c'est ceux qui pilotent aujourd'hui le passage à la facture électronique, pour dire les choses simplement. eux, on voit bien, ils ont des profils assez différents. Ils comprennent très bien qu'ils sont le pivot pour aller, on va dire, compléter l'offre de tenue, ou en tout cas l'enrichir en la servicialisant. Ce n'est pas français ce que je raconte, mais c'est un peu ça. Si tu apportes du service à cette tenue qui va être très numérique, très digitale, tu peux conserver, voire même développer une partie de valeur et très vite appréhendable par le client. Et puis, d'un autre côté, tu gardes la maîtrise de ta donnée. donc tu peux aller voir gentiment vers du conseil, on va développer encore d'autres parcours. Mais l'idée, c'est vraiment de clarifier. Quand tu clarifies, les gens se sentent bien. Et c'est très intéressant de voir qu'on n'est pas dans la granularité des compétences, on n'est pas dans un petit sac de billes, mais on vient réassembler la cohérence de la mission, le management de ces gens-là, la valeur aussi facturable. Clairement, on travaille sur les prix, puisqu'on pense que quand on crée de la valeur, il faut qu'elle soit facturée.

  • Frank Lascombes

    Justement parce que forcément tu échanges beaucoup avec les dirigeants de cabinet qui quelque part arrivent à convaincre leurs collaborateurs de rentrer dans cette dynamique-là et qui les envoient du coup chez Lumiscool. Et justement par rapport à toutes tes discussions et tous les échanges que tu as avec eux, comment en fait s'ils arrivent à transformer finalement la peur du changement du collaborateur en envie de se transformer en fait ?

  • Delphine Buisson

    Alors tu dis deux choses importantes. D'abord on parle souvent de la peur du collaborateur. Moi je rencontre plutôt... dans les directions des gens qui n'ont pas statué, je ne veux pas dire qu'ils ont peur, mais qui n'ont pas statué sur leur stratégie de l'offre en fait. Une fois que la direction est très claire sur sa stratégie de l'offre, là j'ai une promo qui est la semaine prochaine où j'ai une entreprise qui m'envoie cinq personnes, une équipe entière sur la technologie à former, il n'y a pas de sujet en fait. Donc la résistance n'est pas du tout au niveau des équipes. Les équipes sont ravies d'être formées sur des métiers justement où ils n'ont pas eu de formation. Donc déjà pas de résistance. Et la deuxième chose que tu dis qui est très importante, Et non pas que les RH ne soient pas dans le game, il faut que les RH soient dedans. Nous, nos clients, c'est les dirigeants. C'est ceux qui décident de la stratégie de l'offre, en fait. Et les RH, ils disent merci quand la stratégie est posée, parce qu'ils peuvent enfin bosser. Mais ce n'est pas les RH qui vont nous envoyer les élèves. Et dans les apprenants, du reste, on a des parcours qui sont aussi pour les dirigeants. Enfin, je veux dire, en fonction de la mission, on a plein de profils très différents. Mais il faut que la direction, elle soit aux commandes, à la barre. de la stratégie de l'offre. Et si tu n'as pas réfléchi à ta stratégie de l'offre, dis autrement, comment tu construis ton chiffre d'affaires ? Tes clients, ils viennent te voir. Pourquoi ? De façon très précise. Ce que je n'y n'engage que moi. L'époque du full, full, full, où tu factures tout fou. Plus personne ne comprend rien. Tout flou, en fait. Je pense que ça, on va se guérir de ça. On va se guérir de ça.

  • Frank Lascombes

    Et aujourd'hui, parce que c'est vrai que vous avez aussi le sujet, pour l'avoir partagé avec toi, de l'Umi School. vous avez aussi des... des rituels d'équipe dans cette phase d'embarquement aussi, quelque part. Vous avez des outils justement pour qu'ils échangent, etc. Est-ce que tu peux m'en parler un peu plus ?

  • Delphine Buisson

    Dans notre proposition de valeur, encore une fois, l'idée, ce n'est pas de refaire ce qui est déjà fait et très bien fait par ailleurs. L'idée, elle était... Il y en a trois qui sont importantes. Déjà, c'est une école qui est ouverte à la profession. Je veux dire, ça va bien au-delà des groupes, des groupements. Il y a des indépendants. Et aujourd'hui, après deux ans d'existence, c'est déjà le cas. Il y a la moitié des élèves qui viennent d'ailleurs du groupe fondateur. Donc ça, c'est vraiment super. Deuxième chose, on adresse des gens qui viennent, des collaborateurs ou des gens qui sont déjà dans notre monde, mais on adresse aussi des gens qui arrivent d'ailleurs. Et ça, c'était aussi une de nos promesses. Alors, c'est encore mineur aujourd'hui, mais on veut que ça se développe. Là, par exemple, j'ai deux cas en tête où c'est des gens qui ont été recrutés avec des profils dits atypiques. Les deux, d'ailleurs, ils ont un parcours entrepreneur. Et ça, ça vient d'arriver chez nous. Et avec tout ce qui est en train d'être... mis hors-jeu par les grands du conseil, je pense qu'on va avoir des gens intéressants à recruter, qui auront envie de faire des choses dans des environnements sympas. Ça, c'est chez nous. Et donc, l'idée aussi, c'est que je te recrute, mais je ne te jette pas comme ça dans un grand bain sans être managé, etc. Je te mets en cohorte avec des copains qui font peu ou prou le même métier que toi, avec évidemment des variations, ce qui donne toute la richesse de ces parcours. Et en fait, une fois qu'on les met en cohorte, c'est aussi le principe de la pédagogie. On fait des kick-off où ils se rencontrent. On est en train de créer des banques de profils et de parcours, c'est ultra intéressant. Quand nos RH disent « Ah oui, mais ça, on voudrait bien, parce que la direction... » « Mais où est-ce qu'on les trouve ? » Je dis « Voilà, tu vois, je sors le jeu de cartes et je dis... » Tu as dix possibilités pour aller les chercher. Il y en a, ils sont dedans, il y en a, ils sont dehors. Et au fur et à mesure, comme ça, quand ils se retrouvent en cohorte de métiers, j'ai envie de dire qu'on commence à travailler sur le marketing des métiers, l'attractivité des métiers, en créant des cohortes de rôle-modèle. Et c'est ça qu'on cherche aussi. Ça peut paraître très ambitieux, mais après tout, il faut bien qu'on en ait de l'ambition. Et puis l'envie, elle est là. L'envie, elle est là. La résistance, je ne la vois pas. Ou alors les résistants, ils n'arrivent pas jusqu'à la porte, en fait. Et ça, par contre, le Miss School ne le fait pas. Ça, c'est le rôle de l'institution, des groupements. Chacun fait sa messe. L'initiation, c'est dans les églises. Voilà, c'est dans les chapelles. Donc moi, j'ai la mienne. C'est la même partie du travail. Mais après, l'autre partie du travail, moi, je prends les gens qui sont déjà prêts. et du coup les histoires de chapelle n'ont plus lieu d'être et là on passe à l'action

  • Frank Lascombes

    Alors je rebondis sur ce que tu disais Delphine, parce que c'est vrai que pendant qu'on discutait Damien, quand on préparait ce podcast et cet enregistrement, tu parlais aussi de la gestion des compétences sur lesquelles vous voulez travailler je crois avec l'institution.

  • Damien Charrier

    Si on parle gestion des compétences, effectivement, je pense que c'est un volet qui n'est encore pas très bien servi dans les cabinets, d'avoir une espèce de cartographie des compétences de ces collaborateurs, et notamment sur l'angle comportemental. Ils sont souvent assez bien ciblés sur l'aspect compétences techniques, par contre sur l'aspect comportemental, c'est moins évident. Donc on a imaginé un produit qui s'appelle le passeport collaborateur, et là on vient de lancer une enquête. Avant de se lancer concrètement dans le produit auprès de la profession, on a déjà, je crois, près de 800 experts comptables qui ont répondu. Et l'idée, c'est même un peu plus, on fait signe en régie que c'est un peu plus, on a dépassé la barre des mille. Et l'idée, c'est quoi ? C'est justement de pouvoir outiller tous les professionnels avec un outil de gestion des compétences. D'abord, on l'a focalisé sur des compétences qu'on a dites compétences socle. Donc les compétences socle, ça peut être quoi ? Ça peut être la cybersécurité, ça peut être le secret professionnel, la lutte anti-blanchiment. Ça permettra aussi qu'on arrête de se casser la tête sur des gens qu'on intègre dans les cabinets, et ça fait peut-être déjà un certain temps qu'ils sont dans les cabinets, et on ne sait même pas s'ils ont été formés sur des choses qui sont basiques et qui font partie du référentiel. Donc voilà, on a imaginé ce produit pour ça, et après effectivement ça peut devenir un peu une carte d'identité des compétences. Donc voilà ce qu'on est en train de faire au niveau du Conseil National. Philippe,

  • Frank Lascombes

    toi quand tu interviens concrètement dans les cabinets, Où se situe pour toi, selon toi, la résistance finalement la plus forte ? Tu constates qu'elle est plutôt chez les collaborateurs, les managers, les associés ?

  • Philippe Barré

    Les trois, en général. En fait, moi, quand j'interviens, j'interviens bien en amont par rapport à ce que vient de dire Delphine, puisque en fait, en général, quand moi j'interviens, les choses ne sont pas dites. Elles ne sont pas toujours clairement pensées ou en tout cas tellement clairement formalisées. Et donc en fait, que ce soit les... les associés, que ce soit les managers ou les collaborateurs, il y a quand même une grande part d'inconnus, il y a une grande part de découvertes, et évidemment, ça crée des résistances. D'une manière générale, comme le disait Damien tout à l'heure, les gens ont peur du changement, mais surtout de l'inconnu. Il se trouve qu'il y a une quinzaine d'années, j'ai repris mes études et j'ai fait des études de psychologie. Alors pas du tout pour bosser, parce que ça m'intéressait, pour le plaisir. Et en fait, dans mes travaux, dans ce que j'ai fait dans le cadre de ces études, J'avais des exercices à faire, des travaux, comme n'importe quel étudiant, et donc en fait j'ai comparé le profil psychologique d'un collaborateur comptable, avec ce qu'on appelle les préférences psychologiques d'un collaborateur comptable, entre guillemets normal, moyen, et les préférences psychologiques de quelqu'un qui aimait le changement. Alors je ne vais pas passer une demi-heure là-dessus, mais c'est facile, vous faites une photo et vous gardez le négatif. C'est-à-dire qu'un comptable, il aime ce qui est carré, organisé, précis, détaillé, ce qui est parfaitement organisé avec des délais, avec des objectifs, avec tout ça. Et la personne qui aime le changement, qui apprécie le changement, c'est quelqu'un qui aime l'inconnu, qui aime l'aventure, qui aime l'imprécision, qui aime rester dans l'ambiguïté, etc. C'est exactement le contraire du profil psychologique du comptable. Et donc moi, comme je n'accompagne que des cabinets d'expertise comptable, mon quotidien est parfois un peu compliqué. Pourquoi ? Parce que... Je ne sais pas si vous vous souvenez de la clôture du congrès de 2023, le congrès de Montpellier de l'Ordre. Pascal Pic, un paléo-anthropologue, était intervenu et en fait, quand on avait préparé cette intervention, il nous avait dit en fait que les êtres humains, c'est globalement des grands singes. Deux, trois détails près, mais c'est à peu près la même chose. Et en fait, le grand singe, je ne connais pas tous les grands singes, mais le chimpanzé, le gorille, le machin, il va dans les arbres et qu'est-ce qu'il fait ? Quand il est à une branche, il a envie de passer dans une autre branche. Mais il ne lâche jamais une branche sans avoir la suivante qui est identifiée. Parce que sinon, il va se lâcher, il va se ratatiner par terre et donc il va mal finir. Il n'est pas idiot. Eh bien, les collaborateurs, d'une manière générale, les salariés, c'est pareil. On leur demande, et moi je vois ça dans plein de cabinets, notamment des cabinets qui font beaucoup de tenues de comptabilité ou des missions traditionnelles, qui représentent encore les deux tiers du business des cabinets. Qu'est-ce qu'on constate ? Eh bien, on constate que c'est des collaborateurs qui font le même métier depuis... 3, 5, 10, 15, 20, 25 ans. Et en fait, ils ont acquis en ces 25 ans une maîtrise, une parfaite maîtrise, le geste métier, ils le maîtrisent sur le bout des doigts. Et donc, on leur dit dans ces moments de transition, dans ces moments de transformation, il va falloir que tu changes de métier. Pour faire quoi ? Je ne sais pas. Pour aller où ? Je ne sais pas. Et donc en fait, le problème, c'est que si c'est clair dans l'esprit du dirigeant, en gros, ce qu'il a envie de faire de son cabinet dans 10 ans, ou dans 5 ans ou dans 3 ans, c'est tout sauf clair pour le collaborateur qui va être chargé de faire des choses qu'il ne connaît pas. On demande à des gens qui sont arrivés au summum de leur expertise de passer... à un nouveau job, et là, ils sont au niveau zéro. C'est-à-dire qu'eux qui étaient la référence dans le métier, dans le cabinet, quand les petits jeunes qui arrivaient, qui allaient devenir apprentis d'ESCG, d'ESCG, etc., quand ils ne savaient pas, ils allaient voir telle ou telle personne. Sauf que demain, telle ou telle personne, elle ne connaîtra rien. Elle ne sait pas faire ce nouveau métier qu'elle n'a pas appris, donc elle ne sait pas trop en quoi il consiste. Et en fait, moi, j'ai vu des gens, je fais de nombreuses interventions dans les cabinets, dans les... sous forme de conférence d'une heure, une heure et demie. Donc une heure, une heure et demie, ça va très très vite. Et je me souviens avoir fait une intervention dans un cabinet d'une quinzaine, vingtaine de personnes. Et au bout d'un quart d'heure, j'expliquais ce qui se passe dans la profession. Et au bout d'un quart d'heure, j'ai une dame devant moi qui avait une cinquantaine d'années qui se met à pleurer, mais à chaudes larmes. Donc quand il y a 20 personnes dans une pièce et que la personne qui est devant vous se met à pleurer à chaudes larmes, ça déstabilise un peu. Donc en fait je me suis arrêté parce que c'était pas tenable Tout le monde, du coup, ne regardait qu'elle en se demandant ce qu'elle n'est pas. Enfin bon, je m'arrête donc. Je dis, on va prendre un verre d'eau, un café, machin. Et je vais voir cette dame. Je dis, mais qu'est-ce qui se passe ? C'est moi ? Elle dit, ben oui, vous avez dit que bientôt, il n'y aurait quasiment plus de tenue. Et en tout cas, plus de tenue humaine, entre guillemets. Et moi, je ne sais faire que la tenue humaine. Ça fait 25 ans que je suis dans ce cabinet. Et je ne sais faire que la tenue humaine. et je ne peux pas faire autre chose. Sauf que moi, je n'ai pas payé ma maison. Et puis j'ai des enfants qui n'ont pas fait leurs études. Donc ça veut dire que je pourrais pas finir de payer ma maison, on va être à la rue, mes enfants à cause de moi ne pourront pas faire d'études, et c'était fini. Parce qu'en fait, toutes les écoutilles étaient fermées, elle écoutait plus, elle entendait plus, j'avais beau dire ce que je voulais, elle m'écoutait plus. Et donc, pour faire très court, je lui ai dit, écoutez, faites-moi confiance encore un quart d'heure, et après on y va. J'ai fini ma conférence, on a fait la journée de travail pour justement identifier les métiers de demain, identifier, et on a commencé comme le disait Delphine, par identifier les business de demain, donc les missions parallèles, les missions complémentaires, etc. À la fin de la journée, elle avait la banane, et je finis toujours mes journées en disant, allez, le mot de la fin de cette dame, ça a été on s'y met quand ? Pourquoi ? Parce qu'elle avait compris qu'elle avait une utilité de main, elle savait ce qu'elle ferait comme métier, le métier, elle l'avait compris, elle l'avait identifié, elle était super contente de le faire, elle savait qu'elle y réussirait, et donc voilà. Et en fait, pour répondre à la question quand même, la principale résistance que l'on rencontre, C'est tout le monde, y compris les associés, très clairement. Il y a des cabinets, moi j'ai vu des cabinets qui se sont séparés parce qu'ils n'avaient pas le même projet à 5 ans. Et je l'ai vu pas qu'une fois. Donc ça arrive, mais quelque part, il vaut peut-être mieux qu'ils se séparent aujourd'hui avant qu'il y ait de la casse plutôt que dans 3 ans où ils ne seront plus du tout d'accord et ça finira mal. Mais en fait, c'est l'inconnu qui est le pire des ennemis. Quand les gens ne savent pas ce qu'ils vont devenir demain, ils ne peuvent pas être favorables. Et en fait, je dirais que c'est une réaction de survie. L'instinct de survie, pardon, qui fait qu'ils font tout pour empêcher que ça arrive, parce qu'ils ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés. Et en fait, on s'aperçoit que le jour où ils ont bien compris, ils deviennent moteurs dans le changement, et là, ils vont chez Delphine pour...

  • Frank Lascombes

    Ce que je retiens de ce que tu évoques, c'est qu'en fait, en réalité, si le cabinet n'a pas défini correctement son projet, sa stratégie, l'offre de services ou la proposition de valeur qu'il voulait offrir à ses clients, etc., finalement, tu n'offres pas aux collaborateurs cette fameuse branche. sur lequel il va pouvoir s'accrocher et lâcher l'autre main.

  • Philippe Barré

    C'est exactement ça. Quand on fait une conduite du changement, il y a quatre conditions pour réussir, quatre ingrédients. S'il en manque un, on va dans le mur. La première condition, c'est pourquoi on change ? Pourquoi est-ce qu'on est obligé de changer ? Là, ce n'est pas difficile, il se passe plein de choses, sauf qu'il faut l'expliquer. Moi, j'arrive des fois dans les cabinets où les collaborateurs, ils savent que la facture électronique va arriver, mais quelles sont les conséquences de la facture électronique ? Ils n'ont pas trop compris. L'IA, ils n'ont pas trop compris. et tout ce qui gravite en ce moment et toutes les nouveautés, ils ne savent pas trop. ce que ça implique. Deux, pour aller où ? C'est bien gentil. Quelle est la branche qu'on va rattraper ? Donc après, c'est quoi la deuxième branche ? On va lâcher une branche, on nous demande de lâcher une branche qui finalement n'existera plus dans un an ou deux, mais quelle est ma nouvelle branche ? Donc si on n'a pas ces deux premiers critères-là, il ne se passera rien. Troisièmement, avec qui ? On a besoin de tous les collaborateurs. Moi, je suis de ceux, je lis depuis quelques temps qu'il va falloir se débarrasser de l'essentiel des collaborateurs. Je suis totalement opposé à cette vision. Les collaborateurs qui ont envie et qui... acceptent de changer, on a de la place pour eux. Il faut évidemment inventer les nouveaux métiers, mais les nouveaux métiers, ça se trouve, la seule chose, c'est qu'il va falloir effectivement les former, les accompagner, etc. Et la dernière chose, c'est comment on fait pour y arriver ? Donc, comité de pilotage, feuille de route, je sais pas quoi. Mais s'il n'y a pas un de ces quatre ingrédients, on va parler de plein de choses, mais il ne se passera rien, et c'est là qu'on va perdre des collaborateurs, souvent les meilleurs. Quand on gère mal, c'est les bons qui s'en vont. Et d'ailleurs, quand on voit des collaborateurs qui quittent un cabinet parce qu'ils changent, C'est facile à savoir, est-ce que ça se passe bien ou mal ? Si c'est les bons qui s'en vont, c'est que ça se passe mal. si c'est les mauvaises et que ça se passe bien.

  • Frank Lascombes

    Thérèse, comme synthèse. Merci beaucoup à tous les trois. Je vous propose d'attaquer la seconde partie, donc redéfinir les rôles et développer les compétences. L'automatisation, à n'en pas douter, change la donne. Moins de saisie, plus d'accompagnement. Mais cela suppose une évolution de posture pour les collaborateurs qui ne sont pas... plus seulement des techniciens, mais de vrais copilotes pour leurs clients. Quelles compétences à développer et comment créer cette nouvelle dynamique ? C'est vrai qu'on a déjà évoqué pas mal de choses dans les propos liminaires, mais Delphine, finalement, quelles sont selon toi les compétences clés à développer pour que les collaborateurs passent du rôle de technicien à celui de copilote de leurs clients ? Ce qui change quand même beaucoup le paradigme.

  • Delphine Buisson

    Alors, déjà, copilote, c'est un parti pris. Il n'y aura pas que des postes de copilote dans l'avion. Je pense qu'il va rester des choses à faire en production, en modelage. Enfin, il y a pas mal de choses à faire. Déjà, peut-être si on arrivait à se mettre d'accord, tu vois, tout en haut, on a parlé de la stratégie de l'offre, qui va redéfinir les missions, etc. Et tout en bas, sur un socle de... Ce que j'appelle, moi, le contrat relationnel, ce qui, dans le fond, c'est les valeurs vécues et exprimées. C'est-à-dire, chez nous, on écoute, on sait ce que ça veut dire. Chez nous, on sait ce que c'est que l'assertivité. Chez nous, on sait ce que... Enfin, tu vois, avoir les valeurs comportementales, en fait, tu vois, les valeurs vécues, qui sont évidemment complètement incarnées par la direction, sinon ça ne marche pas, parce que c'est un entraînement, le comportement. Si, par exemple... Bon, ben voilà, vous allez avoir plein de temps, et là, il va falloir... prendre le téléphone et appeler les clients. Et là, je rejoins Philippe, panique à bord, mais ça, ce n'était pas mon métier, ce n'est pas mon métier. Et là, je parle juste de parler, je ne parle pas de conseiller. Ce sont des métiers très différents, en fait. Moi, j'ai déjà fait le métier, je le fais parfois, le métier de consultante, c'est extrêmement différent d'être consultant, d'être formateur, d'être conseiller, d'être analyste. Ce sont des métiers différents. Je pense qu'il y a un socle de compétences. qui va tourner vers l'ouverture. Ok, on ose se parler, on ose communiquer, on comprend à peu près la psychologie, comment s'est fait un humain. Et plus il y aura de machines, et plus on... Je vous invite, on s'invite à comprendre un peu plus ce que c'est qu'un être humain et comment ça fonctionne dans sa diversité. Donc tu as des compétences clés. Moi j'en ai souvent trois, on a tous ces... Mais voilà, quand tu sais écouter, quand tu sais... Alors être empathique, être empathique c'est quelque chose de très particulier. C'est juste... accepter qu'il y a des émotions qui sont des informations qui circulent dans la relation et savoir quoi faire avec ça. Ça n'a rien à voir avec la sympathie ou la compassion, qui sont des qualités morales par ailleurs, ou sociales. L'empathie, c'est juste ça. Quelle est donc l'information qui circule en ce moment entre nous, et qu'est-ce que je fais avec ça, non pas l'ignorer, ça existe. C'est de l'info qui existe. Écoute, empathie, qui est l'écoute des émotions, et l'assertivité, qui est cette capacité à parler. Parler,

  • Frank Lascombes

    Pas beaucoup plus. Et là, on a des opportunités parce que moi, j'aime beaucoup travailler avec des gens techniques, des ingénieurs, des techniciens. Ce n'est pas pour rien que je travaille depuis 14 ans avec les experts comptables. C'est qu'ils ne parlent pas pour rien dire souvent. Et c'est hyper intéressant dans ce monde où tout le monde blablate tellement pour dire si peu de choses dans le fond et en fond que des techniciens. Et finalement, avec une grammaire sujet-verbe-complément au niveau CP, c'est magnifique. Et on ne demande pas plus que ça. Je pense aussi qu'on renouera avec de l'écriture. Je pense qu'on va renouer avec des choses de base, la communication de base. Et ça, ça concerne probablement beaucoup les générations qui arrivent. Je vois, j'ai une équipe de jeunes en ce moment, le premier truc qu'on fait quand même, et ce n'est pas une histoire de niveau intellectuel, vous écrivez, vous apprenez à prendre le téléphone, et on débriefe, etc. Il faut retrouver, je crois, le plaisir simple de la relation, et en plus On n'est pas loin du bonheur, parce que c'est ça qu'ils aiment la plupart des gens. Quand tu dis, mais qu'est-ce que vous aimez dans ce métier-là ? Moi, j'en connais très peu qui disent la technique, la technique. Alors oui, on va retrouver ça chez des fiscalistes, chez des juristes. Mais au-delà de ça, la plupart des gens dans notre profession et dans les professions, ils aiment les gens, ils aiment leurs clients. Même des fois un peu trop. Oui, un peu trop. On dit, mais attends, toi t'es le fils ou t'es le client ? On passe beaucoup de temps avec eux. Mais beaucoup de temps, pourquoi ? Donc, l'amour de la relation. Il faut se connecter à ce plaisir d'être ensemble, de faire quelque chose pour, de rendre service et développer petit à petit ce socle-là de compétences humaines, relationnelles. Ça, c'est la base de la base. Et après, le génie de ces gens-là, c'est que, ce que tu disais Philippe, c'est que si tu organises et tu structures le changement, ils y vont. C'est juste qu'ils ne veulent pas aller dans la... Tu dis bon allez, tu sautes... Tu sautes de 15 mètres quelque part où tu ne vois pas le sol, je ne sais pas. Mais si tu montes le chemin, tu les embarques en fait. Dits autrement, ce sont des gens intelligents. Donc il faut donner envie et puis il faut être un peu cohérent dans la démarche qu'on leur propose.

  • Delphine Buisson

    Justement, est-ce que tu peux nous partager par rapport à tout ce vécu finalement que vous avez avec le Miss School, est-ce que tu peux nous partager une réussite vraiment où la formation a vraiment transformé une culture d'équipe ?

  • Frank Lascombes

    Oui, alors là... comme on est en visible, mais j'ai un sourire parce que ça, ça me fait plaisir. Je vais reprendre mes welcomers. Ils ont des profils différents. Ça va de la super assistante de direction au data scientist, en passant. Il y a toute une panoplie de gens qui vont aller. Ils ont des points communs. Dans les points communs, qui sont des forces et des faiblesses, dans les points communs, ils aiment rendre service. Ils sont souvent bons pédagogues parce qu'ils aiment former. Et ils aiment aussi les trucs compliqués où ils vont trouver une solution. Dit autrement, ce sont à la fois des gens plutôt un peu timides ou réservés, c'est-à-dire pas des grandes gueules, si je le dis, excusez-moi l'expression. Et en même temps, le fait de vouloir rendre service, ils ont tendance à se faire un peu manger. Donc, il faut absolument qu'ils cadrent leur mission. Et pour le reste, ils ont le goût du challenge. Ils aiment les difficultés, en fait. Tu ne croirais pas des gens comme ça. Et donc, c'est hyper intéressant parce que... Quand on les fait parler, parce qu'on les met en situation, on les fait parler. Et ça commence par ça au début. On dit, tu vas te présenter, je veux comprendre qui tu es, ce que tu fais. Et entre le début, ça c'est un bootcamp de deux jours, entre le début et la fin, ça n'a plus rien à voir. Et au-delà de savoir expliquer de façon très claire, grammaire, niveau CP, ce qu'ils font, à quoi ils servent, etc. Ils ont surtout le plaisir de dire qui ils sont et la fierté. Et tout de suite après, tu as bon. Et alors on finit, elle est facturée cette mission. Nous, on voudrait bien, mais la direction ne veut pas. Ils n'osent pas. Je dis bon, allez, il faut peut-être faire une psychanalyse groupée au niveau de la profession, parce que facturer, on sait faire quand même. Dans mon groupement, je vois bien qu'ils facturent. Quand on dit que les experts n'ont pas d'imagination, c'est absolument faux. Les lignes de facture, c'est tout à fait étonnant. Mais là, une facture claire et facturer ce qui a vraiment de la valeur, mais évidemment qu'il faut oser. Donc, tu vois, transformation dans les comportements, il faut... pas grand-chose pour cranter, en fait. Et ça fait très plaisir, et moi, ça me donne, évidemment, beaucoup d'espoir. Est-ce que 100% iront ? Non, bien sûr que non. Il y a des gens qui ne se reconnaîtront pas. Mais est-ce que beaucoup peuvent y aller ? Ouais, clairement,

  • Delphine Buisson

    ouais. Oui, il faut être positif par rapport à ça. Je pense que c'est très clair. Alors, justement, Damien, le concept, c'est vrai, de collaborateurs augmentés, vous en parlez souvent, et ça revient souvent dans les communications au niveau du CNO. Comment le traduis-tu concrètement dans la pratique des cabinets ?

  • Damien Charrier

    Effectivement, ça fait partie des sujets qui sont abordés notamment au travers de la profession comptable 2030. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que quand on dit collaborateurs augmentés ou experts comptables augmentés, en fait, ce n'est pas remplacé. Et je pense que ça vient d'être dit de manière tout à fait juste. Les collaborateurs, les experts comptables, tout ce qui compose un cabinet, c'est d'abord des humains. Et ce sont des gens qui sont souvent profondément humains. Parce qu'on oublie quand même toute cette dimension psychologique qui est importante. Philippe en a parlé tout à l'heure. mais c'est vrai que L'écoute d'un chef d'entreprise qui traverse la vie d'un chef d'entreprise, c'est tout sauf linéaire. Il célèbre par moments des réussites et par moments des difficultés, parfois importantes. Et donc ça, il faut quelqu'un qui l'écoute. On a parlé d'empathie, ça fait parce qu'il y a des émotions. Et d'ailleurs, je pense à une petite anecdote de début de semaine, parce que j'ai un de mes clients qui est en grande difficulté et le collaborateur est allé un peu au-delà de l'empathie. C'est-à-dire qu'il a pris pour lui la détresse du client. Là aussi, je pense qu'on a des choses à travailler sur cette dimension psychologique. Après, j'aime beaucoup ce que disait Delphine sur le bon sens. Et peut-être vous livrer une autre anecdote. Comment fonctionnait le cabinet quand je suis arrivé dedans ? On avait des collaborateurs expérimentés qui faisaient des tournées de TVA. Évidemment, on ne fait plus ça parce que concrètement, on allait chez le client. Mais en fait, ce n'est pas tellement la tournée de TVA qui est intéressante. C'est ce qui se passait dans la tournée de TVA. C'est qu'en fait, ces collaborateurs qui voyaient leurs clients tous les mois, ils revenaient au cabinet avec des trucs du genre, tiens, j'ai vu le pharmacien, ce machin. Ces enfants vont partir en études. Donc en fait, il faut faire une étude prévisionnelle d'IRPP pour savoir si c'est mieux de le détacher ou pas. Si je dois démembrer un bien immobilier, parce que maintenant, on appelle ça la gestion de patrimoine. Parce qu'on s'est organisé, effectivement, et on a peut-être créé des lignes de facture aussi. Parce qu'il y a quand même de l'agilité, on va dire, chez les experts comptables. Mais je pense que c'est ça. Il va falloir revenir quand même de temps en temps aussi à des fondamentaux. Voilà, donc vous l'avez compris, le collaborateur augmenté, c'est effectivement celui qui va utiliser bien la technologie, et pour ça, il faut le former, pour se libérer du temps et rentrer effectivement dans quelque chose d'un peu plus actif en termes de relations clients. Après, ce n'est pas 100% des collaborateurs, ça a été dit aussi. Je pense qu'il faut aussi se dire qu'on va quand même avoir, c'est des profils de postes qu'on est en train de voir émerger, des gestionnaires de flux. et des gens qui vont contrôler la data. Et ça, ce n'est pas forcément des gens qui seront en relation avec les clients parce qu'ils seront peut-être moins à l'aise sur cette dimension-là. Mais par contre, on aura besoin de leur expertise pour qualifier toute cette data automatique qui va arriver dans le système d'information. Donc, ne faisons pas non plus de généralité. On a aussi besoin d'une diversité de compétences.

  • Delphine Buisson

    Alors, je vais profiter effectivement de ta qualité de président de l'institution sur ce sujet d'évolution, parce qu'on voit bien qu'effectivement... Il n'y a qu'à voir, depuis le temps qu'on échange autour de cette table, on voit bien quand même qu'il y a une transformation importante qui est en train de s'opérer. Comment préserver finalement l'identité et les valeurs de la profession dans cette évolution des métiers ?

  • Damien Charrier

    Les experts comptables, ils ont quoi dans leur patrimoine génétique ? Ils ont un serment et puis ils ont une devise. En fait, la devise, elle a été inventée il y a 80 ans. Et cette devise, c'est science, conscience, indépendance. Alors, ce qu'on peut se dire, c'est que la science, en fait, effectivement... elle va être un peu percutée par la technologie parce que ça va plus vite. Mais en même temps, depuis la généralisation d'Internet, on ne travaille déjà pas comme avant. On n'est plus des bibliothèques du code fiscal, en fait. Donc, c'est vrai que ça va encore s'accélérer avec l'IA. Et en même temps, il faut quand même se dire aussi que quand le BofIP, il n'est pas écrit, l'IA, elle ne va rien faire du tout, en fait. Et là, c'est l'expérience qui prend le relais. Donc, il ne faut pas aller trop vite, en fait, sur ces notions-là. Et puis après, les notions fondamentales, la conscience et l'indépendance, c'est toute la valeur ajoutée. c'est ce qui fait qu'un expert contact, prendre du recul dans une situation, enfin un expert comptable, un collaborateur en fait, il n'est pas influencé par son environnement, c'est ce qu'on lui demande en tout cas, et c'est ce que le client lui demande. Et donc ça, ça reste des valeurs qui sont, je dirais, encore plus centrales, parce que l'affluence de technologie, l'affluence d'information, elle peut mettre à mal ces dimensions-là, d'ailleurs dans la société d'une manière générale, parce que la génération des fake news, ce genre de choses, justement l'expert comptable et ses collaborateurs doivent se préserver de ça. Je pense que ces valeurs-là, elles sont extrêmement importantes.

  • Delphine Buisson

    Et c'est vrai que ce que je répète souvent, c'est vrai que surtout avec l'IA qui arrive, etc., c'est qu'il ne faut jamais oublier quand même que la profession a aussi un devoir de compétence, entre guillemets. Et du coup, à l'aune de l'IA et à l'aune de ces outils qui arrivent, attention aussi, parce que les collaborateurs, comme tout un chacun, on est tous confrontés à la techno dans nos univers, je dirais, personnels. parfois envie d'utiliser finalement ces outils-là. Et si on n'a pas, je dirais, des chartes au niveau du cabinet, des chartes comportementales par rapport aux outils, comment on les utilise, etc., ça peut quand même poser des vrais sujets. Parce que, bon, quelque part, le rendu au client, on engage concrètement sa signature et donc, du coup, sa responsabilité. C'est pour ça que je parle souvent de devoirs, de compétences par rapport à ça. Et c'est vrai qu'il ne faut quand même jamais l'oublier et jamais l'obéir. Moi, je voudrais faire un petit tour de table rapide en un mot. Vous prenez à la volée chacun comme il l'entend. Selon vous, quelle est la compétence incontournable du collaborateur de demain ?

  • Philippe Barré

    L'esprit critique. L'agilité.

  • Frank Lascombes

    La capacité à apprendre.

  • Delphine Buisson

    Oui. Intéressant.

  • Philippe Barré

    Mais parce qu'on devait en dire qu'un chacun.

  • Delphine Buisson

    Oui, tout à fait. C'était l'exercice. Merci de l'avoir accepté. C'était l'exercice. On va pouvoir passer à la troisième et dernière partie de ce podcast. Passer de l'intention à l'action. Parce que c'est vrai que là aussi, ce que je répète régulièrement, c'est que... Depuis un certain nombre d'années, on a beaucoup travaillé sur les constats, sur ce qui était en train d'arriver, sur tout ce qui pourrait éventuellement se passer. Maintenant, je pense qu'il est vraiment temps de passer à l'action, d'autant que le temps qui nous sépare de septembre 2026, qui est l'arrivée de la facture électronique, qui va, à n'en pas douter, être un déclencheur assez important d'un certain nombre de choses au niveau du cabinet, y compris des processus. C'est vrai que ce temps de passage à l'action, il est fondamental. Donc, comprendre les enjeux, c'est une chose. Les transformer en actions concrètes et durables, ça en est une autre. Quel rituel mettre en place ? Quel indicateur suivre ? Et par où commencer pour réussir une transformation dès demain matin dans un cabinet ? Alors, Philippe, toi, lorsqu'un cabinet, finalement, te demande par où commencer pour transformer son organisation, quelle première étape lui recommandes-tu systématiquement, en fait ?

  • Philippe Barré

    Alors en fait... Quand un cabinet appelle un consultant pour se transformer, la première étape, elle a déjà eu lieu. La première étape, c'est la prise de conscience par les dirigeants qu'il fallait faire quelque chose. Et c'est vrai, on en a tous conscience, que les experts comptables sont submergés, qu'ils ont toujours du court terme à gérer, qu'ils ne savent pas déléguer, qu'on a des problèmes de recrutement qui font qu'il y a plein de bonnes raisons et aussi plein de mauvaises. pour reporter à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui.

  • Delphine Buisson

    Le syndrome de la tête dans le guidon.

  • Philippe Barré

    C'est ça. C'est-à-dire qu'effectivement, on a beaucoup de cabinets où il y a un dirigeant qui est plus un super technicien qu'un dirigeant. Et c'est vrai que dans ces moments-là, dans les moments de transformation, quand ça tangue, je ne sais plus qui a dit, c'est quand on traverse une zone de turbulence qu'on voit la qualité du pilote. C'est vrai que sur les 30 dernières années, il y a eu des changements dans la profession. Mais on est passé à la DSN, on est passé à des choses comme ça. Alors c'était des changements, mais c'était des changements techniques. On ne changeait pas de métier, on ne changeait de logiciel, on changeait de choses comme ça. Mais le métier était le même, l'objectif était le même, etc. On était en plus sur du régalien à 60%, 70% de notre activité. Donc on n'avait pas de commercial à faire, puisque la prestation qu'on vendait était une prestation incontournable, obligatoire pour tout chef d'entreprise. Dieu merci, le français est d'une complexité inouïe. Quand ils sont députés ou sénateurs, je pense que c'est encore pire. Et donc, ils rajoutent une complexité chaque année encore plus forte. Et donc, c'est ce qui a fait que les experts comptables étaient incontournables et sont incontournables. Alors, on va dire, ils ont profité de la situation. Pas du tout. Ils ont fait le job dont on avait besoin, dont l'économie avait besoin, dont les chefs d'entreprise avaient besoin. Alors certes, ce qu'on a fait, c'est-à-dire faire des liasses fiscales, des bilans, des bulletins de paye, des machins, des bidules, ça n'a pas apporté une grande valeur ajoutée. aux dirigeants en tant que dirigeants, au sens où il n'a pas fait grandir son entreprise. Mais ça lui a quand même enlevé une sacrée épine du pied, parce que s'il n'avait pas fait ses liasses fiscales, etc., ça aurait été d'une complexité inouïe. Mais une fois qu'on a dit ça, ce qui se passe maintenant, ça ne ressemble pas à ce qui s'est passé jusqu'à maintenant. Parce que la tenue de comptabilité, elle va être faite en grande partie par des outils. Et donc, c'est le modèle économique qui est en jeu. Et ça, on ne l'a pas eu depuis très, très, très, très longtemps. Ce qui veut dire quoi ? Ce qui veut dire qu'il va falloir réinventer le cabinet. Et donc, quand on me sollicite pour accompagner un cabinet, la première des choses, c'est c'est quoi le cabinet au vendu ? Comment ça fonctionne, votre diagnostic ? Ce qui va bien, ce qui ne va pas bien ? Ce pour quoi vous êtes bon, ce pour quoi vous n'êtes pas très bon ? Qu'est-ce qui vous différencie les voisins ? Ou alors, est-ce que vous êtes tout à fait ordinaire ? Que ce soit péjoratif dans mon esprit, vous êtes un cabinet normal de 5, 10, 15 personnes, 20 personnes, 50 personnes. Bon, OK. Et alors après, c'est vous voulez aller où en ayant évidemment intégré. dans la réflexion tout ce qui va se passer. Parce qu'il y a des cabinets, au dernier congrès ou au congrès d'avant, il y avait encore, je ne sais plus combien, 10 ou 15% de cabinets qui disaient « mais moi dans les 5 ans, je continue comme avant » . Bon, donc ça veut dire qu'il y a quand même 10-15% de cabinets qui ne seront pas chers bientôt. Parce qu'effectivement, il y a peu de chances qu'ils aient une résistance aux événements qui vont se passer. Donc là, la question c'est « vous voulez aller où ? » Et évidemment la question d'après c'est « comment on y va ? » « comment on fait ? » etc. et si Qu'est-ce que vous voulez être dans 5 ans ? Avec évidemment une intégration des projets professionnels de chaque dirigeant qu'il faut intégrer dans le mixeur pour arriver à un projet d'entreprise qui soit un vrai projet d'entreprise et pas juste faire ce qu'on a fait depuis 25 ans. Et là le problème c'est qu'il faut inventer des nouveaux métiers, des nouvelles missions, enfin quand je dis métiers, prestations, des nouvelles missions qui n'ont pas le même modèle économique que les missions traditionnelles. Parce que moi, je suis très admiratif et sincèrement très admiratif pour les cabinets qui se lancent dans la gestion de patrimoine. Mais dans un cabinet de 20 personnes, quand il y a un ou deux associés et qui se lancent dans la gestion de patrimoine, qui va faire ces missions-là ? C'est la personne qui ne fera plus de saisie et de TVA ? Certainement pas. Donc, le dirigeant qui lui-même est déjà la tête dans le guidon, qui n'a pas le temps pour diriger son cabinet, qui va devoir transformer son cabinet, qui va devoir faire tout ça, alors bien sûr, c'est une porte de sortie, la gestion de patrimoine. Mais ça ne peut pas être la planche de salut du cabinet. Parce qu'en plus, la gestion de patrimoine, j'ai accompagné une carrière de cabinet qui en font. Le modèle économique, c'est on fait une belle mission tous les 2, 3, 4, 5 ans, 10 ans, 15 ans, mais on ne facture pas tous les mois. Et voilà, c'est pareil pour plein d'autres missions qui sont exceptionnelles. Donc les missions qu'il faut que les cabinets, et là, ça fait partie de mon job, que de les aider à trouver leur mission de demain, il faut quand même que ce soit adapté à leur équipe. Notamment les équipes qui vont perdre les missions traditionnelles de tenue, il faut que ce soit adapté aux clients. Quand vous avez des boulangers comme clients, des charcutiers, des électriciens, des consultants ou des médecins, ils ne vont pas acheter une mission de cybersécurité tous les deux ans. Donc ça veut dire qu'il faut quand même que la mission soit adaptée à la fois aux compétences qu'on a et aux clients qu'on a.

  • Delphine Buisson

    Et moi ce que je retiens aussi dans ce que tu disais au début, c'est que ça me semble important, c'est vraiment de répéter, parce que ça a été souvent le cas dans la profession que l'outil était la stratégie en fait. L'outil, on le sait, je dirais, dans les 10, 15, 20 dernières années, tu le disais très justement, on arrivait à solutionner finalement une contrainte supplémentaire technique qui arrivait, la DSN, etc. C'est vrai que l'outil, du coup, à chaque fois répondait finalement à ces exigences qui étaient portées au cabinet en termes de pratique. Et finalement, c'est devenu quelque chose d'acquis qu'en réalité... Finalement, la stratégie, c'est l'outil. Et donc, je me précipite au congrès, sur les sites des éditeurs dont nous sommes, et je m'équipe avec un outil. Et ça, assurément, ça ne pourra plus fonctionner comme ça.

  • Philippe Barré

    Alors, ça ne pourra plus fonctionner comme ça. Et c'est ça qui est très paradoxal. Parce que l'expert comptable, effectivement, avant même d'avoir une stratégie, il y a un éditeur, il y a quelques années, qui est assez connu, qui me racontait un jour, on prenait un café tous les deux, il me racontait qu'un tiers des outils qu'il vendait, notamment au congrès, n'étaient jamais ouverts. Parce que c'était des outils pour faire des nouvelles missions. Après, on est face à deux paradoxes par rapport aux outils. Le premier paradoxe, c'est que comme l'outil fait de plus en plus de choses, sur un gâteau qui constitue les honoraires de l'expert comptable, il est évident que la cote-part qui revient à l'outil augmente naturellement. S'il faisait 10% de la mission il y a 10 ans et qu'il en fait 70% aujourd'hui, il est un peu logique que le curseur évolue et que le prix de l'outil augmente par rapport à la contribution. de l'expert comptable. Et donc, en ayant remis tous nos œufs dans le même panier qui est le panier de l'outil, le résultat, c'est qu'évidemment, on a un problème de transfert de valeur, on a un problème de partage de la valeur, etc. Donc ça, c'est le premier paradoxe. Et les experts comptables trouvent que leurs éditeurs sont chers, mais malheureusement, il faut aussi comparer par rapport à ce qui a été fait. Moi, j'ai commencé il y a 35 ans, les bulletins de paye, on prenait un papier, on mettait brut montant, charge sociale sur le plafond, charge sociale sur le total, net. Et c'était fini. Et j'avais un patron qui m'avait dit, on ne va quand même pas faire de la paye, c'est un boulot de secrétariat. Aujourd'hui, c'est 14% du chiffre d'affaires de la profession. Et les outils, pour le coup, je crois qu'en matière d'outils en paye, on a eu quand même quelques moments un peu compliqués. Le deuxième paradoxe, c'est qu'on constate que les outils, sur certaines missions, font plein de choses, mais sur d'autres, ne feront pas le job. Et demain, les nouvelles missions, ce ne sont pas les outils. Je prends un exemple, reprenons l'exemple de la paye. On a un prestataire qui est super connu. qui n'est pas celui auquel vous pensez, qui est un prestataire 100% Internet qui a proposé de faire la paie depuis quelques années. Il a eu le prix de la meilleure start-up de LinkedIn, etc. Et en fait, il a capté plein de clients, parce qu'il n'était pas très cher au début. Il a piqué plein de clients aux experts comptables en matière de paie. Et je me souviens, les experts comptables, ils râlaient parce que leurs clients se tiraient. Alors, j'ai fait auditer des bulletins de paie réalisés par cet éditeur en disant, bon, les bulletins de paie doivent être faux. Eh bien, manque de bol, ils étaient justes. Et donc... A priori, c'était mal parti pour les experts comptables parce qu'ils étaient plus chers et les bulletins de paye de l'éditeur étaient bons. Et puis, depuis 3-4 ans, cet éditeur, il se casse la gueule. Il a fait deux plans sociaux, ses projets européens se sont concentrés sur la France, et même sur la France, ils ont perdu beaucoup de leur superbe. Et il y a plein de cabinets qui m'appellent et me disent « tu sais, j'avais perdu tous les bulletins de paye de 14 dossiers, etc. » Sur les 14, il y en a 6 ou 7 qui sont déjà revenus. Pourquoi ? Parce que la paye, c'est une complexité. La paye, c'est aussi des contrôles sociaux. Quand vous êtes en face d'un écran, il n'y a pas d'interlocuteur. Et donc, ça veut dire qu'il faut bien identifier les missions. Si on se met sur des missions qui sont 100% automatisables, évidemment, il n'y aura pas de place. Et on va se faire 100% remplacer par des logiciels. La jurisprudence récente nous est pas très favorable là-dessus. Donc il faut évidemment inventer des missions dans lesquelles l'humain est le cœur de la mission, pas le logiciel. On aura besoin du logiciel pour nous filer un coup de main, mais ça doit être qu'un coup de main.

  • Delphine Buisson

    Delphine, si un cabinet concrètement veut agir dès demain, finalement quelles sont pour toi les trois actions simples à mettre en place ?

  • Frank Lascombes

    En fait, c'est pas possible de répondre à cette question, parce que ça dépend d'où il part. Philippe, tu dis la question c'est savoir où je vais. Déjà c'est où je vais, où nous allons. puisqu'ils sont globalement des collèges de direction, ce qui rend les choses un peu plus complexes. Et j'ai envie de dire, c'est une époque en ce moment où la bonne question à te poser, c'est qui je suis et qu'est-ce que j'aime faire ? Parce qu'on parle de l'expert comptable comme si c'était... En fait, moi, j'en connais, comme vous, plein, beaucoup. Il n'y en a quand même pas deux qui se ressemblent et surtout, il n'y en a pas deux qui habillent le métier exactement de la même façon. Et donc, la première question, c'est qui on est et qu'est-ce qu'on va faire ? Partant de qui nous sommes, qui avons-nous envie de devenir ? Ça, c'est la première question. Après, la deuxième orientation, parce qu'on n'en parle pas, mais ça n'est pas neutre en ce moment, tous les sujets qu'on va mettre sous le mot financiarisation du moment vont avoir énormément d'impact entre aujourd'hui et demain sur ce qui va se passer dans la profession. Aujourd'hui, j'ai besoin de choisir, outre le fait de ce qu'on a ce que j'ai envie de faire ou ce qu'on a envie de faire collectivement, j'ai besoin de choisir le modèle d'exercice. Et le modèle d'exercice, il sera très différent. Et sans jugement de valeur, je peux choisir de rejoindre une marque, parce que je considère que la marque, elle va faire un certain nombre de choix que je n'aurais pas à faire, etc. Je peux choisir de rejoindre une technologie leader. Et là, je ne suis pas complètement d'accord avec vous sur la partie technologique, parce qu'on a aujourd'hui des technologies qui sont en train de devenir leader. Et je peux choisir de devenir, alors je ne vais pas dire sous-traitant d'une technologie, c'est peut-être un peu beaucoup, mais en tout cas de dire je vais suivre le mouvement imprimé par la technologie. Si l'opérateur dont tu viens de parler, Philippe, avait été un peu plus ouvert, ce qu'il n'était pas du tout, et qu'ils avaient mis l'humain qui allait bien avec, ils n'en seraient peut-être pas là aujourd'hui. Mais ce n'est pas le cas des technologies qu'on voit émerger, qui appréhendent à la fois une technologie très assertive. Et des gens qui vont se conglomérer autour, en fait, en termes d'offres de services, etc. Donc, tu peux aussi avoir un exercice de ce métier-là avec des technologies leaders. Tu peux... Alors ça, je ne sais pas trop ce que ça va donner, mais il faut peut-être qu'on arrête de se mentir. Si je fais rentrer des fonds d'investissement suffisamment de façon importante, il ne faut pas me raconter qu'une fois qu'on a vendu... Et encore une fois, il n'y a pas de jugement de valeur là-dedans. Je peux avoir envie de préparer ma retraite, de réaliser tout mon travail. Enfin, je veux dire, c'est très honorable. Mais je ne vois pas bien, quand on sait le travail qu'il y a à faire aujourd'hui dedans, ou alors il va falloir changer, ça ne suffit pas d'injecter de l'argent pour dire que le travail va se faire. Et moi, ça me hérisse un peu quand j'entends des plateformes de cabinets, des agrégats de machins, qui vont devenir des concentrateurs. Mais alors, d'accord, mais des concentrateurs de quoi ? De compte de résultats ? D'accord. Et donc ça, c'est un autre modèle. Je peux choisir, encore une fois, il n'y a pas de jugement à avoir, je peux décider de... de faire entrer, mais du coup, je ne suis plus aux commandes et je ne sais pas trop comment je vais gérer la transformation. En tout cas, ça va être une transformation assez financière, mais pourquoi pas ? Et puis après, il y a ce que j'appelle les entrepreneurs leaders. Voilà, ça, c'est ce que j'aime bien recruter chez Eurus. Et encore une fois, sans... Les autres,

  • Damien Charrier

    tu ne nous as pas présentés pour nous faire rêver. Nous, on est dans notre châtel, en fait.

  • Frank Lascombes

    Non, mais je peux comprendre qu'on n'ait pas envie, parce que j'en ai... Vous n'étiez pas enthousiaste. Je ne suis pas enthousiaste, parce que ce n'est pas ceux pour lesquels je travaille. Mais par ailleurs, quand j'ai un petit cabinet de mon groupe qui rejoint le très beau groupe Inextenso, qui sont des gens que j'aime beaucoup, etc. Mais parfait, et je comprends très bien ce qu'ils font. D'accord ? Je dis quand, en tout cas, il y a une place. Pour des entrepreneurs qui veulent garder la direction, et les groupements sont là pour les aider, l'institution, etc. Mais là, il y a effectivement du travail à faire. Et pourquoi pas faire rentrer des investisseurs, quels qu'ils soient, mais il faut avoir un projet à financer. Et donc, la troisième question, j'ai dit qui suis-je et qui sommes-nous collectivement avant de dire où allons-nous ? Quelle modalité d'exercice choisissons-nous collectivement ? Parce que c'est un vrai sujet qui se pose aujourd'hui et il faut faire un choix. Il faut faire un choix. Et la troisième chose, retour au client et à l'offre. Qu'est-ce qu'on vend ? Quelle est la valeur qu'on produit ? Et puis après, derrière, ça va être de la mise en place. Mais c'est assez passionnant. Là, pour le coup, c'est des petits pas. C'est un chantier après l'autre. C'est du chantier. Ça n'est pas impossible. Je suis sûre que tu connais, que nous connaissons tous. Moi, j'en ai dans mon groupe et j'en vois ailleurs. Je vois de très belles choses arriver. Ce n'est pas forcément des gens qui font du bruit, mais je vois des gens qui ont déjà passé le cap de la transformation. Tu le vois dans une enseigne, tu as le mot technologie qui apparaît sans complexe. Il y a plein de choses qui apparaissent comme ça. Et peu à peu, les transformations se font par les offres et par les métiers.

  • Delphine Buisson

    Mais il ne faut jamais oublier que ça, de toute façon, c'est le cas pour toutes les entreprises. Tout part du client et tout doit partir du client. Et en fait, c'est le client qui, quoi que lui en soit... nous donne la voie finalement quelque part de ce qu'on peut proposer et de ce qu'on doit proposer.

  • Frank Lascombes

    Que le client soit conscient ou pas.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait. Et c'est là où est la difficulté parce que justement, il faut savoir bien le questionner. Ou l'opportunité. Voilà, bien le questionner, bien être attentif aux opportunités ou signaux faibles éventuellement qu'il peut nous apporter pour pouvoir répondre au mieux à son besoin et lui apporter un maximum de bénéfices.

  • Philippe Barré

    Et c'est là-dessus où on n'a pas forcément été très bon. Parce qu'on n'en avait pas besoin et parce qu'on était submergé par le quotidien. Mais c'est là-dessus probablement que ça va beaucoup changer. Ça va beaucoup évoluer.

  • Delphine Buisson

    Damien, moi j'aimerais t'interroger. Alors à la fois finalement, en tant qu'expert comptable, dirigeant de cabinet, mais à la fois avec ta casquette de l'institution et de président de cette institution, finalement s'il y avait un seul conseil à un dirigeant de cabinet pour passer de la réflexion à l'action en 2025-2026, lequel serait-il pour toi ?

  • Damien Charrier

    Alors, je crois que la difficulté qu'on a dans la profession, ça m'a toujours marqué, c'est de conjuguer le temps court et le temps long. Le temps court, c'est celui de la production, et le temps long, c'est plutôt celui de la stratégie, de la planification et de la transformation. Juste un point d'attention, c'est que ça ne va pas s'arranger, parce qu'on va passer d'une comptabilité d'échéance, c'est ce qu'on sait faire depuis toujours, à des flux continus. Et donc, du coup, ce qu'on faisait avant entre deux échéances, si on ne s'organise pas différemment, on ne le fera plus du tout, puisqu'en fait, on sera en production continue. Donc voilà. C'est juste un petit préambule, mais qui me paraît important. Ensuite, on a quand même une chance importante, c'est qu'on a une date. On a une date, c'est le 1er septembre 2026, donc en fait, on n'a pas le choix. Donc, moi, le premier conseil, c'est que pour ceux qui n'auraient pas commencé, il faut s'appuyer sur la facture électronique pour s'en servir comme vecteur de transformation. Parce que c'est un super vecteur. Je donne quand même quelques chiffres, c'est que 22 000 experts comptables en France, 190 000 collaborateurs, donc on a 210 000 personnes qui travaillent au quotidien pour 3,5 millions d'entreprises. sur les 8 millions d'assujettis à la facture électronique. Donc il y a 50% du job de conversion qui repose sur les experts comptables. Donc appuyons-nous là-dessus pour accélérer la transformation. Ça c'est vraiment un point qui me paraît extrêmement important et c'est une vraie chance. Et le deuxième, c'est que de toute façon il faut déjà décider et si on a besoin d'un support méthodologique, il faut aller voir Delphine, il faut aller voir Philippe. Et bien sûr, les instances, les conseils régionaux qui font beaucoup sur le sujet, le Conseil national. Mais vraiment, je fais une différence entre exercer seul, parce que je fais une différence entre être seul et être isolé. Surtout, il ne faut pas rester isolé. Le rôle des instances, pour revenir sur la chapelle et la Cichaud-Prêchoir, c'est que le rôle des instances, c'est d'embarquer tout le monde. Donc, de donner les chances à tout le monde d'arriver à réussir cette transformation. Donc voilà, il y a plein de choses qui sont produites, il y a plein d'énergie qui est mise sur ce sujet-là. Donc vraiment, n'hésitez pas à aller voir les instances, n'hésitez pas à aller voir les syndicats ou les groupements. Il y a plein de façons d'y arriver en fait, mais il faut déjà effectivement commencer.

  • Delphine Buisson

    Tout à fait, je pense que moi ce que je retiens de ce que tu viens de dire aussi, c'est qu'effectivement, il faut faire attention à la partie isolement, au côté isolement. Et d'ailleurs, l'Ordre a toujours, je dirais, fait son travail sur ce sujet-là, en sortant par exemple des guides, des groupements, des guides des réseaux. Parce que parfois, c'est vrai que ça peut être bien de pouvoir mutualiser des échanges, avoir des échanges avec ses consoeurs, ses confrères, pour se faire une idée. C'est important. Il ne faut quand même pas oublier, quand on regarde comment est construite la profession, qu'il y a quand même encore beaucoup de cabinets de moins de dix collaborateurs. Cette notion d'isolement peut être quand même importante.

  • Frank Lascombes

    Il est venu le temps de conclure quand même, parce que c'est vrai qu'on est bien ensemble. Je pense qu'on pourrait faire un podcast de deux heures sans difficulté sur ces sujets-là qui sont vraiment importants. Ce que vous avez entendu aujourd'hui, c'est que clairement, la transformation des cabinets n'est pas qu'une affaire de logiciel ou de process, mais une histoire d'hommes et de femmes, très clairement. La chance qu'on a avec ces outils, c'est qu'ils libèrent du temps, mais c'est ce que l'on fait de ce temps qui fait la différence. conseiller, accompagner, donner des bénéfices aux clients. Les outils finalement ne sont qu'un moyen, certes important, de le rendre possible. Nous avons aussi vu que cette transformation ne se décrète pas, elle s'accompagne pas à pas. Elle suppose d'écouter les résistances, de rassurer, de donner du sens. Elle suppose aussi de redéfinir les rôles, de former en continu, de créer des communautés d'apprentissage et de pratique. Chez Agiris, nous avons compris que nous devions nous aussi dépasser notre mission originale, et c'est notre transformation à nous, de dépasser cette mission de développeur d'outils. C'est la raison pour laquelle on a bâti de véritables programmes de transformation à destination des cabinets. Je vous laisse vous renseigner auprès de nos équipes qui vous accompagnent chaque jour sur le terrain. Enfin, cette transformation demande du courage managérial. Instaurer de nouveaux rituels, mesurer l'adhésion, célébrer les progrès, bref, agir concrètement pour embarquer toute l'équipe. Si je devais retenir une seule idée, c'est celle-ci, la technologie est un accélérateur, mais la vraie clé c'est l'humain. C'est en libérant l'énergie des collaborateurs que les cabinets deviendront non pas des producteurs de chiffres, mais de véritables copilotes de la réussite de leurs clients. L'idée étant de passer d'un cabinet qui fait à un cabinet qui accompagne, d'un cabinet prestataire à un cabinet partenaire. Merci à nos trois invités pour leurs éclairages. Merci à vous qui nous avez écoutés et de porter ce mouvement au cœur de vos cabinets. Je vous donne rendez-vous bientôt pour un nouvel épisode autour des enjeux de la transformation des cabinets. Merci pour votre écoute et à très vite.

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Comprendre et lever les résistances

    03:25

  • Rédéfinir les rôles et développer les compétances

    26:20

  • Passer de l'intention à l'action

    39:09

  • Conclusion

    58:40

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