- Speaker #0
Mesdames et messieurs, bienvenue dans le premier épisode de la troisième saison du podcast Terre des érudits. Je suis Joubert Joseph. Dans ce premier numéro, je donne la parole à Kav-Alye Pierre. Mon invité est comédien, membre du collectif d'artistes Opaque-Voisin Lab. Kav-Alye a joué dans les plus importants festivals de théâtre en Haïti. Dans ce premier numéro de la troisième saison qui se déroule sur le thème le théâtre contemporain haïtien, nous allons parler du statut du comédien en Haïti.
- Speaker #1
"Bande annonce"
- Speaker #0
Bonjour Kav-Alye.
- Speaker #1
Bonjour Joubert.
- Speaker #0
Le comédien se retrouve confronté à un manque d'un cadre humain: absence de salle de spectacle, d'espace de transmission et de légitimation. Qu'est-ce que cela veut dire être comédien en Haïti aujourd'hui ?
- Speaker #1
Être comédien en Haïti, ça veut dire un paquet de choses, en même temps ça veut rien dire, quelque part. Parce qu'être comédien en Haïti, c'est faire dans la douleur. Quand même avec un brin de magie qu'on essaie de temps en temps, malgré les turbulences personnelles quotidiennes, mais quand même, on essaie d'alimenter sans relâche, même inconsciemment, ce peu de magie qui nous habite. Il est vrai qu'il y a un grand problème d'espace. un grand problème d'espace de légitimation. Techniquement, on est très limité. Mais bon, en tout cas pour moi, j'ai l'impression qu'à partir du moment où on se dit qu'on veut être comédien, on veut se faire voir dans le sens, représenter, donner à voir, il y a cette sensation qui te prend par les tripes et qui te laisse pas partir. C'est comme une lutte. tu te dis que c'est vrai qu'il n'y a pas de salle de spectacle, qu'il y a peut-être 4 ou 5 grands festivals qui reviennent chaque année sur une période de 10 à 12 mois. On est nombreux. Bon, pas assez, mais il n'y a pas de conservatoire. Il y a un théâtre national qui est quasiment pas fonctionnel, sinon sur papier. Et puis, chaque année, tu te retrouves en face d'une jeunesse en liesse qui... fréquente les lieux où on essaye de faire les représentations, que ce soit dans les bars-cafés, que ce soit à l'Institut français en Haïti. Bon, maintenant, il n'y a plus la focale. Et puis, tu te dis que quand même, avec ce climat-là, des gens s'essayent de mettre une ambiance ou de créer quelque chose qui peut leur appartenir. C'est fou. Et pour moi, c'est ça, en vrai. C'est faire dans la douleur, c'est créer dans la douleur, jouer dans la douleur. Et puis, tu te vois 5 ans, 10 ans, 20 ans après, dans un métier qui n'est pas reconnu légalement. Quand tu es en face de quelqu'un, tu lui dis que je suis comédien, il te dit, tu fais rire les gens ou tu es comédien ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Donc, il y a un vrai problème, il faut qu'on l'aborde sérieusement.
- Speaker #0
Comme tu viens de le dire, le métier de comédien n'est pas juridiquement régulier et sa professionnalisation marche avec une certaine précarité. Est-ce qu'un comédien peut vivre de son art ? Dans quelle mesure peut-il vivre de son art ?
- Speaker #1
Oui, un comédien peut vivre de son art. Sur papier, dans les pays du nord ou comme dans certains du sud, c'est normal. Mais en fait, en Haïti, il y a un vrai problème de... régularisation de système. Par exemple, il n'y a pas de syndicat de comédiens. Je dis ça comme ça, mais au Québec ou à Montréal, il y a des syndicats de comédiens qui regroupent les techniciens genre régisseurs de lumière, de son et autres gens techniques pour les arts de la scène. Et puis, ça leur permet de s'organiser au mieux. et de pouvoir s'accentuer sur des problèmes qui, je dirais, sont à même de ronger ce métier petit à petit. Ici en Haïti, lorsqu'on est sur un projet, par exemple, on te dit que le cachet est estimé à 10 godes, par exemple. Et ces 10 godes-là, ils se repartissent entre les frais de répétition, de transport. et puis le cachet pour les représentations. Ici, il y en a plusieurs. Et maintenant, certains projets ne payent pas tout ça ou ne prennent pas en compte tout ça. Il y a un autre problème qu'il faut toucher. Il n'y a pas d'assurance pour les comédiens. Donc, c'est tellement précaire. Si tu es sur scène et que tu te casses, Un orteil, c'est pratiquement à tes frais que tu seras à l'hôpital. Quand même, pour essayer d'essuyer le visage des gens, pour éviter qu'on leur blâme, ils vont quand même t'aider à faire quelque chose. Mais dans le contrat que tu signes, c'est stipulé qu'il n'y a pas d'assurance et s'il t'arrive quelque chose, ils ne sont pas responsables. Et pour moi, être comédien dans une situation pareille en Haïti et vivre de son art, dire que je ne fais que ça, Mais vraiment, rien que ça comme métier. Et puis, espérer que, bon, peut-être demain, s'assurer que si on tombe malade et qu'on pourra aller à l'hôpital sans se gratter la tête et tout gérer. Quand tu as des festivals qui reviennent chaque 10-12 mois, qu'il n'y a pas de salles de spectacle, qu'il faut aller frapper à la porte de certaines organisations ou des ambassades qui... qui ont des petits cachets de projets pour des projets comme les projets de théâtre ou de culture en gros, on est plusieurs à aller frapper à ces portes-là. Et comme on est plusieurs, ils vont quand même choisir entre les têtes qui viennent. Et les têtes qui viennent, elles ont des noms et les noms pèsent. Cavalier, ce n'est pas Joubert. Donc forcément, si je viens avec un projet vers... X et que Joubert lui aussi vient avec un projet qui est estimé à environ 10 000 dollars et que moi mon petit projet il est à 5 ou 4 000 dollars même si ça c'est pas un gros paquet, ils vont quand même me dire que bon voilà on n'a pas ça ou bien on n'embrasse pas ce genre de projet du coup, être comédien, vivre dans l'incertitude, on est presque une centaine à s'engouffrer à Port-au-Prince, là où il n'y a pas de salle de spectacle, les représentations se font rares de plus en plus. Et espérer vivre de ça, en tout cas, il faut être quand même sur la lune.
- Speaker #0
Le théâtre haïtien contemporain Nous allons revenir à une question fondamentale que tu as effleurée dans ta première réponse. Tu as parlé du problème du manque d'espace de légitimation et de transmission du savoir théâtral. Qu'est-ce qu'on peut se dire, comédien ?
- Speaker #1
J'aurais bien préféré que tu me poses cette question en latin, Joubert. Ouais, blague, ne sais pas, mais c'est tellement difficile. D'une part, il y a... Bon, déjà, on peut dire que le théâtre, c'est... C'est quelque chose qui part d'une culture savante. Savante dans le sens où, prenons par exemple Haïti. À partir des années 1800-1900 jusqu'en 1956, cette période qui est, entre guillemets, considérée comme la période contemporaine de la littérature et tout, il y a Franck Fouché et Félix Morisseau-Leroy qui ont fait... tous deux, mais à leur manière, une sorte de plaidoiré pour un théâtre populaire, un théâtre en créole. Alors qu'avant ça, tout, mais vraiment quasiment tous les textes étaient en français, où les représentations, les montages de textes, c'était que du français. Et puis, ces deux messieurs-là, ils se sont mis à travailler dur, à proposer, et enfin... On peut dire vers les années 70 et 80, la dramaturgie haïtienne a commencé à avoir un autre souffle. Vraiment un autre souffle. On peut voir ça chez Syto Cavé, par exemple, qui écrit beaucoup en créole, des pièces en créole. Et je dis tout ça, c'est pour te dire que le théâtre haïtien a connu une certaine clôture. Bon, à un moment donné, il était considéré comme une... théâtre de clôture. Et à partir du moment où le théâtre haïtien surtout a commencé à investir les rues, ça a permis au peuple haïtien à lui aussi investir cet espace qui, à un moment donné, va proposer une parole sur sa vie quotidienne, sur ses problématisations, sur ses motifs et des comme peuple. Et maintenant, ça se fait à partir d'une base, je peux dire qui est scellée entre le vaudou et le créole. Comment dire Un haïtien qui fait du théâtre dans l'artibonite, qui n'a pas eu des cours de théâtre, qui ne connaît pas les grandes théories qui viennent du nord comme du sud, qui n'a pas fait de conservatoire ou n'a jamais suivi un atelier et puis qui se réclame d'être comédien parce qu'il peut-être fait rire à des gens. Il a l'opportunité de se tenir face à un public et de proposer de faire un geste théâtral. Même si ça peut être considéré comme un geste pré-théâtral dans le sens de Frank Fouché. Et puis, je vais aller un peu plus loin avec la démocratisation des réseaux sociaux. Par exemple, on prend TikTok maintenant où il y a plein de gens, plein de jeunes. qui ont des pages, qui proposent, qui font des trucs, que ce soit pour faire rire, que ce soit pour dire quelque chose. En tout cas, moi, j'ai ma mère qui souvent me parle de gens que je ne connais pas. Mais après, j'essaie d'aller chercher et je vois que ces gens-là, ils se réclament d'être comédiens. Leur hashtag, c'est comédie. Et sur les réseaux sociaux, on les reconnaît à partir de ça. mais vraiment à partir de ça je ne suis pas pour un clivage entre que ce soit les générations, que ce soit les formes de faire parce que le théâtre n'a pas toujours été quelque chose qui se fait à partir d'une seule tête, d'une seule langue et d'un seul regard et c'est pour ça que le théâtre a surtout une histoire très longue et variée en même temps euh... Donc, pour moi, Jessy Fra est comédien tout comme, je peux dire, Estalov est comédien. Mais bien sûr, à eux deux, ils ont quelque chose de différent dans leur proposition, dans leur manière d'accéder au faire et à la représentation. Donc, en gros, pour moi, je... En tout cas, pour moi, je n'ai pas encore l'aisance de... statuer sur ce qui fait que quelqu'un soit comédien ou pas.
- Speaker #0
Nous avons parlé au début d'un manque d'espace de légitimation, d'espace de transmission et d'une quasi-absence de salles de spectacle en Haïti. Il n'y a que deux festivals majeurs de théâtre, le festival Quatre Chemins et le festival En Lisant, deux festivals auxquels tu as joué d'ailleurs. Est-ce que c'est suffisant selon toi ?
- Speaker #1
Ce ne sera jamais suffisant d'avoir deux festivals qui s'alignent sur la même période. À un moment donné, je pense que c'est entre 2017, si je ne m'abuse pas, et 2020, après 2021, la pandémie. En lisant, ça se faisait en juillet. Et l'équipe du festival a eu la brillante idée de décaler un peu. de s'aligner sur la même période, tout juste après le Festival Quatre Chemins. Toujours après la pandémie, quelque chose qui m'avait chéri, c'est qu'il y avait un enchaînement de festivals. C'est comme à chaque clôture de festival, s'annonçait l'ouverture d'un autre. C'est comme Festival X se termine aujourd'hui, et aujourd'hui même, au cours du spectacle et de la présentation, on annonce que... Festival Y ouvre ses portes aujourd'hui. Et comme ça, on avait eu au moins cinq festivals entre novembre et décembre. Ça a été beaucoup. Mais comme le public avait soif, après avoir passé, je ne sais pas, mais environ trois ou quatre mois confinés, c'était vraiment dur de ne pas accepter une proposition pareille. Mais cette... Cette intrication entre les festivals a un coût, je dirais, même physique et mental. Oui, on a toujours besoin d'essouffler, on a toujours besoin de se divertir, mais regarde, tu viens d'un festival, ça dure deux semaines, et après, tu tombes dans un autre, comme par magie peut-être, et encore deux semaines, les spectacles se font en quatre heures. Ça se termine vers 6h. 6h et on se rencontre. Quand je dis on, pratiquement on se connaît. Il y a les pauses bières. Il faut faire au moins les barattons. C'est épuisant quelque part. Faire un mois à faire du baraton, un mois à aller regarder des spectacles, c'est possible qu'on n'arrive même pas à avoir une vraie discussion sur tel ou tel spectacle. Parce qu'on est envahi par... par un flux de propositions et il n'y a pas de salle de spectacle. Il n'y a qu'environ trois ou quatre espaces qu'on peut considérer comme des espaces qui sont, entre guillemets, aptes à recevoir des spectacles de théâtre, de danse ou autre. Ça fait que le comédien ou le performeur ou le danseur, il est limité, limité dans ce qu'il fait, limité dans le temps qu'il a à... à préparer son truc. Vivre comme ça, comme artiste, des arts de la scène, c'est vraiment quelque chose de bidon. Et c'est crasseux. Mais ça ne dépend pas vraiment des festivals ou des organisateurs de festivals, quelque part. C'est tout le pays qui se retrouve dans la crasse. Si on met le cap sur l'Ekaila maintenant, on ne va pas trouver une salle de spectacle. Il n'y a que l'Alliance française ou bien une salle, un auditorium dans un hôtel qui n'est pas fait pour ça. Et tu vois, dernièrement, j'ai eu une discussion avec un ami et on parlait de la capacité d'un comédien haïtien à se faire valoir à l'étranger. Mais c'est vraiment une lutte. C'est comme un boxeur qui... qui cherchent les punches à donner. Tu arrives sur une scène frontale avec lumière, vraiment rigide lumière, et salle de spectacle avec au moins 400 sièges. Tu n'es pas habitué à tout ça. Tu as l'habitude de jouer en face d'un public qui est estimé peut-être à 100 personnes. Et comment se sentir ? Est-ce que c'est dans la gloire que tu es dans la représentation ? Ou si ? Dans la réflexion, même en jouant, tu te dis que, est-ce que ce n'est pas un monde qui est en face de moi ? Peut-être que quand j'étais en Haïti, je jouais que pour ma famille. Et maintenant, se retrouver face à un public aussi large, sur une scène dont tu n'as pas l'habitude de fréquenter, pour les déplacements, avec tout ce qu'il faut avoir dans une salle de spectacle, ça donne à réfléchir.
- Speaker #0
Cavalier, l'art visuel est aujourd'hui introduit dans le théâtre. Je veux parler du théâtre contemporain. Quels sont les nouveaux métiers de la scène avec, je pourrais dire, l'avènement du théâtre contemporain ?
- Speaker #1
Bon, pendant ces dernières années, je peux dire, surtout en Haïti, L'art contemporain en général a beaucoup évolué, que ce soit dans les arts de la scène, les arts visuels. Ce qui est intéressant, c'est qu'au croisement de ces disciplines naît quelque chose de fort. Bien sûr qu'on est en hauteur, mais très en hauteur. Avoir une pièce qui se joue avec une projection de vidéo, c'est quelque chose qui se fait depuis plus de 20 ans. Mais... Le faire en Haïti maintenant, déjà il faut avoir la salle, il faut avoir le matériel pour ça. Bon, quelquefois, quelquefois on les a, mais pas tout le temps. Et donc, je peux dire que l'avènement du théâtre contemporain en Haïti a deux choses intéressantes qu'il propose. En termes d'écriture, premièrement, parce qu'on a une génération d'auteurs, d'autrices. de dramaturge qui est assez convaincante et là je parle de la génération de Andrise Pierre, Jean d'Amérique, Luis Bernard Henry, Djevens, ouais c'est une très belle génération qui écrit beaucoup et leur voix leur proposition sont entendues surtout dans le monde francophone et... Si je passe maintenant sur les propositions scéniques, donc oui, les arts de la scène, par exemple, avec Kettly Noel, qui a fait un grand coup avec les arts de la performance. Lorsqu'elle a installé son festival en Haïti en 2017, je crois, PAPAP Port-au-Prince Art Performance. C'est à partir de ce festival que moi, j'ai eu mon premier atelier sur la performance et ce qui m'a permis aujourd'hui, ou me permet encore d'être performeur. Et à un moment donné, là je fais un petit coup d'œil à ta question en off, à un moment donné, j'ai été un peu plus performeur que comédien. Ça je le dis. Je le dis, bon, pas bêtement, mais je suis revenu... En fait, j'ai commencé avec le théâtre. Et j'avais fait une pause entre l'école et les autres parcours que j'avais à faire. Et lorsque je suis entré par la petite porte de la performance, on a, et quand je dis on a, c'est Chinaldio San René, Jasmine, Augustin... Février, Gertrude Hugues, Azor et Sterling Tatai et moi, on a monté notre petite compagnie, Si Hortan, et pendant environ trois ans, j'ai fait de la scène rien qu'en tant que performeur. Et c'est un peu tard que je suis revenu vers le théâtre en tant que comédien. Et c'était pour moi un vrai challenge. un vrai challenge de renouer avec le théâtre pur et dur, je dis ça comme ça, pour essayer d'établir une différence entre la performance et le théâtre. Et comme je suis très ancré dans la performance, ça m'a amené vers le théâtre performatif. Et du coup, aujourd'hui, je suis comédien, et vraiment comédien. Parce que mes dernières liaisons avec une scène, ce n'est qu'à partir du théâtre. Et Dieu merci, quelque chose que je voulais faire, ça fait environ peut-être 8 à 5 ans, c'était ce qu'on appelle seul en scène être sur scène dans un monologue, rien que moi. faire mon truc et j'ai eu l'opportunité de le faire sous une mise en scène de Février Gertrude Hug avec une pièce qu'il a écrite c'est le bruit des hommes qui chutent donc pour moi les arts de la scène pour revenir à ta question les arts de la scène, les arts contemporains en Haïti ils sont sur une voie qui promet... Mais c'est vraiment une grande promesse malgré les problèmes qu'on connaît ces derniers temps. Mais il faut quand même espérer et on espère grand.
- Speaker #0
Tu es comédien, tu as des modèles. Est-ce que tu peux faire une liste de comédiens qui t'ont le plus marqué dans le théâtre contemporain ?
- Speaker #1
Tiens, surtout. Ah ben, c'est difficile. C'est difficile. J'ai vu beaucoup de spectacles, j'ai vu pas mal de comédiens parce que tu t'as à un moment donné, quand tu te dis que tu veux faire ce métier, en Haïti, la première chose qu'il faut faire, c'est faire ce qu'on appelle le pied poudré. Là, tu passes de spectacle en spectacle, tu vois beaucoup de comédiens, de comédiennes. Et en tout cas, moi, j'ai... J'ai un comédien que j'affectionne beaucoup, c'est Staloff Trop Fort, que j'affectionne beaucoup. Mais pour être sincère, je ne pourrais pas faire une liste, même pas un top 3. Parce que côté affection, il y a ceux que j'affectionne beaucoup, ceux que j'affectionne le moins, mais que j'affectionne quand même. Mais par contre, en vrai, il y a Kettia Vaïnadine, il y a Miracson Sainval, il y a Lesly Maxi. Un grand coup de chapeau à Lesly. C'est mon premier metteur en scène. C'est mon premier metteur en scène. À l'époque, je faisais partie de l'atelier de création Recif Création, qu'il dirige encore. Oui, il y a aussi la dame, elle a joué dans un film, Katiana Milford. Katiana Milford, oui, Zombie Child, je l'adore beaucoup. Oui, c'est ça.
- Speaker #0
Laisse-moi te poser une question banale. Quel avenir pour un comédien haïtien ?
- Speaker #1
L'avenir ? L'avenir qui nous sépare, l'avenir, l'avenir, l'avenir. L'avenir pour un comédien haïtien, c'est flou. C'est horrible à dire, mais c'est flou. J'ai vu que Acte, école de théâtre, ça joue aussi, propose des masterclass. Et dernièrement, j'ai été voir un spectacle qu'ils ont dû concocter après un masterclass. C'était sous la direction de Stéphanie François et Emmanuela Bazile. Et sur la scène, il y avait beaucoup de monde. Ce n'est pas beaucoup de monde dans le sens que la scène était remplie, mais j'étais ébahi de voir combien de gens, comment les gens sont enthousiastes de participer, d'aller apprendre à comment jouer, de participer à des masterclass sur le théâtre. Pour un métier qui est, je ne vais pas dire décrié, mais qui a laissé pour compte, qui veut dire ce qu'il veut dire en termes de représentation sociale en Haïti et savoir que pour un masterclass, les gens se font la queue. Et dans les communications, on a l'impression que ACT fait en sorte de dire que venez vite, les places sont limitées. Et c'est vrai, les places sont limitées. On ne peut pas faire un masterclass avec 100 personnes. Et quand même, là j'ai un ami qui participe à un autre masterclass et il m'a dit que la salle où on fait les répètes, elle est bondée. Elle est bondée de monde. et se poser la question, quel avenir pour un comédien en Haïti ? Est-ce qu'il faut vraiment répondre ? Est-ce qu'il faut aller chercher la réponse dans la bouche des comédiens ou de ceux qui sont enthousiastes à devenir comédien ? Est-ce qu'ils s'inscrivent dans une démarche de tirer quelque chose, que ce soit d'économique ou de social, de ce métier, ou est-ce qu'ils le font pour l'intime, pour se parler à eux-mêmes ? pour une discussion franche et sincère à soi. En tout cas, moi, comme je le dis tantôt, je suis entré dans le théâtre et j'y suis resté par cette sensation qui m'habite et cette magie que ça me promet. Je ne sais pas si tout comédien le ressent ou peut le ressentir. Mais en tout cas, je crois qu'une fois qu'on est investi, qu'on est habité par... par cette magie, par cette poésie des corps, de la voix, de l'interprétation du partage, de l'entraide parce qu'il y a de l'entraide aussi sur scène on est plus capable de faire ma sœur hier en tout cas pour moi c'est ça même si l'avenir est incertain on se dit qu'on est comédien on le fait par amour et par passion
- Speaker #0
Je précise que tu es poète, dramaturge, metteur en scène, performeur et artiste conceptuel. Tu en es à peu près un sous-tuvis, tu as étudié l'anthroposociologie à la faculté d'éthnologie et parallèlement tu as fait des études sur la migration et la diversité sexuelle. Kav-Alye Pierre, merci d'avoir été avec nous. Merci à tous et à toutes. A bientôt pour un prochain épisode.