Mon cher Brice,
Après une semaine agitée de mes multiples vies, je prends enfin le temps de répondre à ta lettre sous ce soleil éblouissant de février. Tu le sais, j'ai le jeu franc et l'abordage frontal, même si je suis capable d'une diplomatie extrême, il y a des contextes qui m'invitent à ne pas tourner autour du pot. Nous nous connaissons peu et en même temps j'ai ce sentiment que tu es déjà mon ami. Je ressens un espace possible avec toi de confidence, de confiance et de respect. Nous nous taquinons joyeusement à chaque fois que nous nous croisons. Et cela m'évoque deux choses. La première c'est que je ne te fais pas peur. La seconde, c'est que tu ne me fais pas peur non plus. Cela peut te paraître évident dans les choses que tu vis. Pour ma part, je me méfie des hommes pour de très bonnes raisons, encore plus de ceux de notre génération, car malgré notre écart d'âge, nous sommes de la même. Et que je ne t'effraie pas est assez étonnant également, car en général, c'est l'image que l'on me renvoie : une femme indépendante et flippante. Les hommes sont en général vite embêtés de ne pas trouver les chemins habituels (paternalistes ou prédateurs) de communication avec une "bestiole" comme moi. Mais avec toi c'est simple et la franchise, me semble la base essentielle de cet échange, pour que nous puissions toustes deux aller à l'essentiel.
(Tu auras sans doute remarqué ce premier mot d'écriture inclusive, qui je suis certaine vient faire grincer ton cerveau académique, j'y reviendrai plus tard.)
Alors oui, je t'ai d'abord demandé si tu penses être féministe, car pour discuter du sujet de l'écriture inclusive il faut poser ses fondations. Je me souviens lorsque je t'ai donné la définition de CIS genre et de ta réaction. Tu pensais que ce terme était une insulte faite aux mâles blancs hétérosexuels. Je me suis alors dit que toutes ces notions, tous ces mots posés ne sont pas assez racontés et que toutes ces nouvelles notions vont très vite, pour que nous puissions nous entendre et continuer notre dialogue pour gagner l'égalité de genre dans notre monde. Ta réponse est d'une honnêteté sans faille. Et je ne me permettrai pas d'exagérer sur tes paradoxes, sauf pour en rire, ensemble ! Et oui, tu es à l'image de beaucoup de mes amis garçons, tu es" mon homme" pour être féministe mais tu n'es pas toujours sans transporter les clichés du genre et plutôt réfractaire à faire l'effort de se débarrasser de ces reflexes sexistes (oooooh on ne peut plus rire...-un pas glissant avant de me dire que je n'ai pas d'humour-). Et je te dirais que c'est normal, mais que c'est là que moi j'aimerais que ça bouge vois-tu. C'est hélas normal, car nous avons intégré le patriarcat depuis si longtemps (et pas depuis la préhistoire hein, la Guerre du Feu n'est pas un documentaire mais bien une fiction et l'histoire, enfin la pré-histoire que l'on veut bien se raconter,). Toi et moi aussi. Moi être bonne femme, si moi être bonne mère, bonne épouse et bonne tout court. Toi être bon mâle, si toi être fort, si toi être viril, si toi être courageux...
--- WOKE IN PROGRESS ---
Quand je t'ai rencontré je t'ai tout de suite aimé. Pas parce que tu es un homme. J'ai aimé la malice qui brille dans tes yeux, ton sourire innocent et ton esprit vif. Tu aurais parlé fort pour qu'on ne regarde que toi, dit « Quel enculé » ou « Je m’en bats les couilles », bourré à la Heineken, tu aurais roté entre deux gorgées, pété à pleins tubes, tu aurais senti le fennec mouillé... Je ne t'aurais peut-être, sûrement, pas aimé tout de suite -ou jamais-, car la vulgarité ce n'est pas mon truc et j'aime bien que tu sentes bon.
Pour répondre à ta chansonnette qui venait conclure ta première lettre (sur l'air d'Au clair de la lune) :
Déconstruit toi tout seul, tu es grand garçon
L'apprentissage autonome est preuve de raison
J'ai d'autres choses à faire, un enfant à nourrir,
Et je te fais confiance pour te reconstruire.
Bisous