Speaker #0Bonjour, bienvenue dans ce nouveau podcast d'Apprendre la Philosophie. Dans cet épisode, nous allons nous demander s'il faut rechercher le bonheur. Je vais vous expliquer une citation de Schopenhauer, extraite de son œuvre, Le Monde comme Volonté et comme Représentation. Selon Schopenhauer, je cite, « La vie est aussi, comme un pendule, de la souffrance à l'ennui. » Que veut-il dire par là ? Schopenhauer peut être considéré comme un philosophe plutôt pessimiste quant à notre capacité à être heureux. Paradoxalement, selon lui, c'est notamment parce que nous recherchons constamment le bonheur que nous ne l'atteignons jamais. En d'autres termes, le désir apparaît pour Schopenhauer comme un obstacle au bonheur. Et ce, parce que le désir nous rend constamment insatisfaits. En effet, Schopenhauer, inspiré en cela par le bouddhisme, considère que le désir est cause de souffrance, et que désirer être heureux nous garantit de ne jamais l'être. Pourquoi cela ? Car tout désir est inquiétude et manque. Si nous désirons quelque chose, c'est que nous ne l'avons pas, ou craignons de le perdre. Alors, on peut considérer que le désir est souffrance. Schopenhauer dit « La vie oscille comme un pendule de la souffrance à l'ennui » . Cela signifie que dans notre vie, nous sommes constamment soit en train de désirer, c'est-à-dire de souffrir pour lui, soit en train de nous ennuyer, car finalement nous avons tendance à être rapidement lassés de ce que nous avons obtenu. Cet ennui laisse alors place à un nouveau désir qui nous fait souffrir jusqu'à ce qu'il soit satisfait, et alors rapidement nous retombons dans l'ennui. C'est ce qu'il explique plus longuement dans un texte, donc je vais vous lire un extrait. Je cite. et elle est parcimonieusement mesurée. Mais ce contentement suprême n'est lui-même qu'apparent. Le désir satisfait fait place aussitôt à un nouveau désir. Le premier est déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue. La satisfaction d'aucun souhait ne peut procurer de contentement durable et inaltérable. C'est comme l'aumône qu'on jette à un mendiant. Elle lui sauve aujourd'hui la vie pour prolonger sa misère jusqu'à demain. Tant que notre conscience est remplie par notre volonté, tant que nous sommes asservis à la pulsion du désir, aux espérances et aux craintes continuelles qu'il fait naître, tant que nous sommes sujets du vouloir, il n'y a pour nous ni bonheur durable, ni repos. Chopinoha, le monde comme volonté et comme représentation. Alors, faut-il désirer ou rechercher le bonheur pour Schopenhauer ? Si notre désir est d'être heureux, alors nous allons nous dire que nous serons heureux quand nous aurons ce travail, ou cette maison, ou rencontrer la bonne personne. Dans tous les cas, nous reportons le moment d'être heureux à plus tard, quand nous aurons ceci ou cela. Mais une fois que nous l'avons, nous n'en sommes plus satisfaits, et il nous faut encore autre chose pour être heureux. Si bien que finalement, Désirer le bonheur ou espérer atteindre plus tard le bonheur est un leurre qui nous garantit de ne jamais l'atteindre. Il faudrait sans doute mieux pour Schopenhauer se satisfaire de ce que nous avons et trouver des raisons d'être heureux aujourd'hui. Mais là encore c'est une chose difficile car nous avons tendance, selon lui, à sentir beaucoup plus la douleur que le bonheur. Pourquoi défend-il cette idée ? Selon lui, notre organisme est conçu pour sentir la douleur car elle est une alerte qui nous maintient en vie. La douleur a une utilité. En revanche, le bonheur passe rapidement inaperçu car il doit plutôt être défini négativement comme une absence de douleur. Cette absence, nous ne la remarquons plus très rapidement. C'est pourquoi nous nous rendons souvent compte que nous étions heureux quand nous perdons ce bonheur. Alors ? La douleur que nous ressentons est d'autant plus grande que nous nous étions habitués à ce bonheur. Il le dit notamment dans ce texte, je cite Que notre vie était heureuse, c'est ce dont nous nous apercevons qu'au moment où ces jours heureux ont fait place à des jours malheureux. Autant les jouissances augmentent, autant diminue l'aptitude à les goûter. Le plaisir devenu habitude n'est plus éprouvé comme tel, mais par là même grandit la faculté de ressentir la souffrance. Car la disparition d'un plaisir habituel cause une impression douloureuse. Ainsi, la possession accroît la mesure de nos besoins, et du même coup, la capacité de ressentir la douleur. Le cours des heures est d'autant plus rapide qu'elles sont agréables, d'autant plus lents qu'elles sont plus pénibles, car le chagrin, et non le plaisir, est l'élément positif dont la présence se fait remarquer. De même, nous avons conscience du temps dans les moments d'ennui, non dans les instants agréables. Ces deux faits prouvent que la partie la plus heureuse de notre existence est celle où nous la sentons le moins. Vous voyez donc que pour Schopenhauer, nous ne pouvons pas réellement atteindre le bonheur. D'une part car le désir est plutôt un obstacle au bonheur, et d'autre part car notre nature même nous incline à ne pas ressentir réellement la satisfaction quand nous l'avons. Ou plutôt... nous avons une certaine tendance à nous habituer à cette absence de douleur qui fait que, finalement, nous n'y prêtons absolument plus attention. Néanmoins, Schopenhauer pense qu'il est possible de rendre sa vie moins pénible en suivant certaines règles qui nous garantissent de limiter les souffrances que nous infligeons aux autres et à nous-mêmes. Ces carnets contenaient 50 règles. En voici quelques-unes. Il conseille, dans la règle 2, d'éviter d'être jaloux et de susciter la jalousie. Je cite, En effet, selon lui, la jalousie est un poison qui nous rendra toujours malheureux. Par ailleurs, Schopenhauer conseille, dans la règle 3, de faire ce que nous avons naturellement envie de faire. On ne peut pas longtemps forcer sa nature, selon lui. et mieux vaut se consacrer à un domaine dans lequel nous avons des facilités et un certain enthousiasme. Je cite « En effet, de même que les poissons ne sont bien que dans l'eau, l'oiseau seulement dans l'air, la taupe uniquement sous terre, ainsi chaque homme ne se sent bien que dans l'atmosphère appropriée pour lui. » Fermez les guillemets. Règle numéro 6, ouvrez les guillemets, faire de bon cœur ce qu'on peut. et souffrir de bon cœur ce qu'on doit. Fermez les guillemets. Règle 8. Limitez le cercle de ces relations. On offre ainsi moins de prise au malheur. Règle 48. Le bonheur appartient à ceux qui se suffisent à eux-mêmes. Voilà pour cet épisode. J'espère qu'il vous aura aidé à mieux comprendre Chopin-Noir. Si vous voulez davantage de contenu sur le thème du bonheur, Je vous invite à vous rendre sur mon blogue Apprendre la Philosophie. Excellente journée à vous.