- Speaker #0
Bonjour à toutes et à tous, j'espère que vous allez bien. Aujourd'hui, je me sens particulièrement privilégié d'enregistrer cet épisode. Pas seulement à cause de nos conditions de vie en Europe, ce qui est déjà un privilège en soi, mais surtout parce que j'ai la chance d'attendre mon micro à une personne aussi exceptionnelle que Julien Lyon. Julien est un coureur au talent immense qui, avec sa femme, a fondé un centre d'accueil pour les enfants au Kenya nommé Simba for Kids. Mais son parcours ne s'arrête pas là. Il a également eu l'idée ambitieuse de faire découvrir le trail running aux athlètes kényans. Depuis leur début dans cette discipline, les Millimani Runners, l'équipe qu'il a constituée, ont accumulé les victoires, les podiums et les places d'honneur sur des épreuves emblématiques estampillées Bayutembe, le Marathon du Mont-Blanc et la fameuse Sierzinale. La première fois que j'ai entendu parler de l'idée d'amener des coureurs africains dans le monde du trail et de l'ultra, c'était en lisant le livre Les ultraterrestres du journaliste Adarnan Finn. Depuis, il est clair que les Kenyans ont trouvé leur place dans ce sport. Et il ne serait pas étonnant de les voir triompher sur les plus grandes courses dans un avenir très proche. D'ailleurs, petite anecdote, Joëline Cepengheno a déjà marqué l'histoire en reportant l'édition 2024 de Sierzinale. Je vous souhaite une très belle écoute. Bienvenue dans Au-delà du mur, le podcast pour tous les passionnés de course, qu'il s'agisse de bitume, de nature ou de piste. Que vous soyez débutant ou coureur à guérit, nous explorons ensemble la préparation physique et mentale, la nutrition et la santé pour vous aider à atteindre vos objectifs. Si vous cherchez des conseils pratiques, des témoignages inspirants et des discussions captivantes, vous êtes au bon endroit. Préparez-vous, votre voyage au-delà du mur commence ici. Julien Lion, bonjour, comment ça va ?
- Speaker #1
Bonjour Hugo, ça va bien et toi ?
- Speaker #0
Merci, merci. Très chaud, très chaud. Je te remercie infiniment de me consacrer le temps. Comment elle est la météo aujourd'hui chez toi au Kenya ?
- Speaker #1
Alors là, en ce moment, c'est un peu la saison des pluies, donc on a un peu de brouillard. C'est un peu humide, comme ça, un temps humide où on sent que la pluie peut tomber à n'importe quel moment de la journée. Il n'y a pas beaucoup de soleil en ce moment.
- Speaker #0
Bon, je t'en enverrai un petit peu alors. Pour les gens qui ne te connaissent pas, est-ce que tu pourrais nous faire un curriculum vitae ? Qui est Julien Lion ?
- Speaker #1
Je vais essayer d'être bref. Je suis un jeune voix. J'ai 34 ans. Je suis marié avec une petite fille de 2 ans et demi. Je vis au Kenya maintenant. J'ai fait toute ma scolarité et mes études universitaires aussi à Genève et Lausanne. Je suis parti en 2017 au Kenya. Et puis, en fait, je me suis tellement plus là-bas que j'y suis resté plus ou moins à temps. complet maintenant, à temps plein. Je suis établi vraiment là-bas avec ma femme qui est kenyane. Et puis je coache une équipe de coureurs kenyans. J'ai plusieurs activités, donc ça c'est la principale maintenant. On a aussi créé une association humanitaire en 2019 avec mon épouse. Et puis on a d'autres projets de développement de tourisme dans la région. On accueille parfois des groupes. pour des stages, différents projets. Au Kenya, on a une vie bien occupée.
- Speaker #0
Effectivement, je l'entends en tout cas. Au niveau de ton palamaré sportif, qui est quand même très intéressant, tu as quand même des beaux achievements, comme disent les anglo-saxons. Tu as une carrière d'athlétisme derrière toi. Je n'ai pas envie d'être méchant et de dire que ta carrière est terminée, mais j'imagine que ton temps consacré à l'entraînement a quand même fortement diminué ces dernières années.
- Speaker #1
Là c'est un peu plus compliqué ces dernières années. Bref, j'étais champion suisse de plusieurs disciplines en 3000 mètres en salle, 10 kilomètres. Marathon je crois que je n'ai jamais gagné mais j'ai fait plusieurs fois deuxième. Aussi sur piste, un peu tout en fait. Mais j'étais surtout marathonien et semi-marathonien. Et puis je pense que le highlight de ma carrière ça reste quand même les championnats d'Europe à Amsterdam. où j'ai gagné le titre par équipe avec une 15e place en individuel. C'était vraiment chouette, un super souvenir pour moi encore aujourd'hui. Et puis maintenant, c'est vrai que je me concentre plus sur d'autres choses. J'adore toujours courir. Parfois, j'ai moins le temps. Et puis, je pense qu'on connaît tous cette sensation de quand on arrête de courir pendant quelques semaines, la reprise est très, très dure. Mais après, une fois que j'ai passé le cap, je retombe vite dans le truc et puis je redeviens vite addict à l'entraînement. Donc ça m'arrive encore de m'entraîner quand même, parfois beaucoup et parfois pas du tout.
- Speaker #0
Heureusement, tu t'entraînes quand même encore. Oui. Tu as découvert le Kenya, donc tu disais, il y a bien quelques années. Qu'est-ce qui t'a attiré dans ce pays ?
- Speaker #1
Bon, clairement, c'était lié à la course à pied, parce que la première fois que je suis allé, c'était en 2010. Ça fait 15 ans, bientôt un an. J'étais encore tout jeune, en première année du Nid, je me souviens. Et pendant les vacances, j'avais vraiment voulu aller voir Iten et le Kenya pour voir comment vivent ces coureurs kényans, comment ils s'entraînent. Et puis voilà, j'étais allé là-bas un mois et ça m'avait vraiment fasciné. Et puis maintenant, en fait, j'adore la vie là-bas, la culture, la simplicité, la jovialité des gens, l'aimabilité des gens et tout ça. C'est vraiment... vraiment inspirant. Je pense que j'ai beaucoup aussi changé depuis les sept dernières années que je suis là. Ça m'a aussi moi-même beaucoup changé. Et puis, je pense être devenu quelqu'un de meilleur. Et ouais, du coup, je me sens bien là-bas.
- Speaker #0
Toi qui vis justement, qui côtoies ce pays depuis ces quinze dernières années, tu ressens ce que je ressens moi aussi des fois. Bon, ça fait 34 ans que je suis en Suisse. Qu'est-ce que ça fait d'être un étranger parmi les locaux ?
- Speaker #1
Parfois, j'oublie presque que je suis un étranger. Mais non, c'est vrai que la première année où je me suis vraiment établi au Kenya, il y a eu un tout petit peu des doutes. Je me suis dit, tiens, est-ce que j'arriverais vraiment à me fondre dans le moule ? Et puis finalement, après la première année, passer un peu ce cap, ça a été. Et puis maintenant, en fait, j'ai tellement de projets ici. On travaille avec énormément de personnes aussi. Avec l'association, on a 15 employés. je coache une dizaine d'athlètes donc ça fait quand même beaucoup de monde qui sont proches sans être des amis c'est plus professionnel mais c'est des gens quand même très proches voilà ça fait que maintenant je me sens bien ici mais je vois ce que tu veux dire on est jamais vraiment tout à fait comme à la maison mais ce qui est assez drôle c'est que maintenant quand moi je reviens à Genève je me sens un peu perdu aussi pas forcément chez moi donc Je me sens plus chez moi maintenant ici qu'à Genève, étonnamment.
- Speaker #0
Je connais cette sensation. En 2019, il y a eu un basculement. Tu as parlé quand même de beaucoup de parties, de facettes de ton quotidien. 2019, c'est peut-être l'année, je pense, qui matérialise la plus grosse modification. C'est la création de cette association humanitaire avec ta femme.
- Speaker #1
Oui, exactement. Oui, exactement. Je me suis fait plusieurs fois la réflexion ces derniers temps. C'est vrai que Simba, ça a été un tournant. L'association s'appelle Simba for Kids. Ça a été un tournant à plein d'égards. C'est vrai que ça a été un tout petit peu la fin de ma carrière. On a créé l'association quand j'étais blessé. Je m'étais fait opérer des deux tendons d'Achille. J'en avais pour plusieurs mois de convalescence. Et là, c'est là où je me suis dit que je vais utiliser mon temps. à bon escient et puis essayer de faire des choses bien ici. Et puis en fait, c'est incroyable, déjà comme ça a fonctionné rapidement, et après, tout ce qui a culminé derrière. Ça veut dire que maintenant, je me rends compte que quasiment tout ce que je fais est quand même lié à Simba. Alors probablement que si j'avais fait d'autres choses, il y aurait eu d'autres choses qui seraient arrivées. Mais là, les connexions que j'ai avec les gens pour différents projets et tout ça, c'est souvent quand même l'ancrage, c'est Simba4Kids, c'est ça qui a fait qu'on s'est rencontrés. C'est assez drôle. Je vais dire que j'ai vraiment essayé de faire du bien autour de moi. Mais en retour, franchement, j'ai reçu 100 fois plus. C'est assez fou. Et puis du coup, moi, ça me motive encore plus à continuer là-dedans. On voit tout le bien que ça fait. Donc, c'est hyper motivant et vraiment enrichissant comme expérience.
- Speaker #0
Et qu'est-ce qui a fait que tu as justement bifurqué sur un centre d'accueil pour enfants plutôt que sur autre chose dans un premier temps ?
- Speaker #1
À l'époque, je me souviens qu'il y avait… Bien sûr, je voyais tous ces coureurs et tout ça, mais je crois que j'avais un peu un trop-plein. En plus de la blessure, j'avais quand même un surentraînement un peu en parallèle, ce qui est souvent le cas, je pense, des gens blessés parce que c'est des périodes un peu difficiles où l'entraînement devient beaucoup plus dur avec des douleurs. Et du coup, j'avais un peu un trop-plein de courses. Je me souviens que pendant une année, pratiquement, je n'avais plus envie d'entendre parler de course. J'arrêtais de suivre les Diamond League à la télé, les marathons. Je ne suivais plus. J'avais besoin d'un peu couper avec tout ça. Et puis voilà, moi j'ai fait quand même une formation d'ancien élan de sport dans un deuxième temps. Et puis voilà, pour moi les enfants c'est quand même quelque chose, j'ai toujours eu cette accroche depuis 2008 je crois. En 2008 j'ai commencé déjà à être entraîneur au Stade Genève jusqu'en 2016. Et puis ensuite, quand je suis parti au Kenya, justement, j'avais un peu ce manque. Il n'y avait plus ces enfants que je ne côtoyais plus. J'ai aussi enseigné à l'école pendant quelques années en tant que remplaçant pour les cours de sport, quand j'étais encore semi-pro. Et puis voilà, c'était un peu cette attache aux enfants, cette envie de faire un truc avec des enfants. Et puis il y avait un besoin énorme là-dedans. Donc c'était aussi assez naturel de dire, OK, on va faire quelque chose pour les enfants. L'idée, ça a été de faire un centre parascolaire où les enfants peuvent venir jouer, s'amuser, manger aussi, pendant tous les jours en dehors de l'école, pendant les vacances et les week-ends.
- Speaker #0
Vous savez combien d'enfants dans ce centre ?
- Speaker #1
C'est libre, en fait, il n'y a pas de nombre limite. On en a eu jusqu'à 222, le record, je crois, inofficiel, c'est ça. Donc parfois jusqu'à 200. En général, pendant les vacances, c'est 150 enfants qui viennent tous les jours. Pendant la période scolaire, il y en a plutôt une cinquantaine qui viennent jouer après les cours. Et puis pendant les week-ends, c'est un petit peu entre deux. C'est entre 50 et 150 selon la météo, selon les obligations qu'ils ont aussi à la maison, etc.
- Speaker #0
Ça fait quand même une très, très grande quantité d'enfants. Donc... Là, on ne parle pas d'un accueil extrascolaire avec 2-3 enfants. C'est vraiment 160... Enfin, c'est 200 enfants. Donc, j'imagine qu'au niveau structurel, vous ne pouvez pas juste compter sur la gentillesse du voisin qui va surveiller les deux gamins. Comment est-ce que vous avez mis en place cette structure ?
- Speaker #1
Ça a grandi petit à petit. Et puis, c'est pour ça que je disais, on a quand même 15 employés en tout parce que 200 enfants, effectivement, c'est beaucoup de temps, surtout qu'aussi on les nourrit. Donc... Pour cuisiner pour 200 enfants, ça demande déjà 2-3 personnes qui s'occupent de ça. Après, pour s'occuper de toutes les activités, il y a aussi des personnes qui font le gardiennage, la sécurité, tout ça. L'équipe, ça grandit chaque année. On a commencé en 2019, on a construit en 2020 le centre. On a terminé, je crois, la construction en 2021. Et puis depuis, ça a grandi en fait. En 2020, on avait commencé en utilisant les locaux d'une école à côté. Donc là, il n'y avait qu'une trentaine d'enfants. Et puis dès qu'on a ouvert, c'était plutôt une cinquantaine. Et puis voilà, en fait, ça a grandi, grandi, parce que c'est quelque chose qui est gratuit, qui est ouvert à tous. Et donc ça se propage avec le bouche à oreille. Les enfants en parlent entre eux. De plus en plus de familles connaissent Simba. Maintenant, je pense quasiment tout le monde connaît Simba. Après, là, je pense qu'on a... On a probablement atteint la capacité maximale déjà du terrain de 100 enfants, c'est déjà vraiment beaucoup. Et puis, on ne pourra pas aller beaucoup plus loin. Et aussi, ce qui limite un peu les enfants de venir, c'est qu'ils habitent de plus en plus loin. Du coup, là maintenant, on a des enfants qui marchent 3-4 kilomètres pour venir. C'est aussi pour ça qu'on a réalisé l'importance d'offrir les repas de midi, parce que sinon, ça limitait vraiment trop aux enfants très proches. En plus de ça, c'était une grande aide pour les familles. Voilà, ça permet aux enfants qui habitent à 3-4 km de marcher une demi-heure, une heure le matin pour venir, et puis de remarcher le soir, et puis on nourrit à midi, et à 16h, il y a aussi une collation. Donc voilà.
- Speaker #0
Tu as dit quelque chose d'essentiel, extrêmement important, tu as dit que c'était gratuit.
- Speaker #1
Mais du coup,
- Speaker #0
comment est-ce que vous financez ce centre ? Tu as gagné la loterie ?
- Speaker #1
Non, alors c'est des dons de beaucoup de particuliers, beaucoup de... Beaucoup de jeunes voix quand même, mais aussi de Suisses en général, des Français aussi. En fait, on a une antenne, on a créé un Simba Forkit France, une antenne française, pour que les Français puissent aussi donner. On en a plus aussi. Il y a aussi quelques autres nationalités. Il y a des Canadiens aussi qui sont des sponsors, des parents d'enfants. On a un système de parrainage aussi. Donc c'est surtout des particuliers, un petit peu des entreprises. Il y a aussi nos fidèles... plus d'aides sponsors comme l'Institut Florimont, c'est l'école où j'ai travaillé pendant quelques années. J'ai aussi étudié là-bas, donc il y avait un lien. Et puis eux, depuis le début, chaque année, ils font des récoltes de fonds via différents projets et ils nous aident. Donc c'est vraiment un ensemble de choses qui fait qu'on a des dons, qui nous permettent de payer tout le personnel et de financer les repas aux enfants et tous les projets autour qu'on fait. Donc, c'est vraiment grâce à ça. Il y a aussi une course maintenant qui s'appelle la Simba Run. Il y a deux fatales par justement un papa qui était venu avec ses deux enfants, qui avait vu ce qu'on a fait. Puis après, il a dit, je vais organiser une course. Comme ça, les bénéfices chaque année, ça permettra de vous aider. Donc, c'est vraiment un ensemble de choses. Et je dirais que c'est assez stable. Ça grandit un petit peu les dons, mais c'est stable. Et puis ça nous permet de faire tout ça, et puis on gère les projets par rapport aux dons qu'on reçoit. Donc plus on a de dons, plus on peut faire de projets.
- Speaker #0
Comment est-ce que tu vois avec le recul, toi, avec tes yeux peut-être de jeune voix, cinq ans après la création de ce centre, comment, si tu mets un pas de côté, comment est-ce que tu visualises le chemin parcouru ?
- Speaker #1
Ça a été vraiment incroyable, en fait. Comme j'ai dit avant, ça a été une expérience... très très très forte on s'est investi en 2019, 2020, 2021 avec ma femme c'était 7 jours sur 7 c'était du matin au soir je repense souvent à 22h avant d'éteindre la lumière et d'aller se coucher on était encore en train de parler de Simba for Kids qu'est-ce qu'on va faire c'était vraiment hyper prenant et puis beaucoup de responsabilités parce que comme je l'ai expliqué avant les gens... faisait des dons et puis moi je me sentais quand même une grande responsabilité de bien utiliser ces dons et pas d'avoir de gaspillage donc vraiment on faisait aussi attention à chaque dépense donc c'était vraiment hyper prenant et maintenant moi l'impression que j'ai, je sais pas si ma femme a exactement la même impression mais c'est que Simba for Kids ça reste quand même en quelque sorte notre premier bébé et puis Luna maintenant notre petite fille c'est la deuxième alors voilà c'est pas comparable mais Ça a été comme un bébé. C'est vrai que c'est quelque chose qui a une attache sentimentale pour nous, clairement, s'il m'a forti de mon nom. C'est quelque chose qu'on aimerait vraiment qui soit durable. Mais l'aventure, elle a été incroyable depuis ces cinq dernières années. Je pense vraiment que c'est la plus belle chose que j'ai faite de ma vie. Ma femme aussi, probablement. Et puis, c'est la chose que je regrette le moins d'avoir faite. C'est vraiment génial.
- Speaker #0
Une fois que tu as... Tu m'as offert justement la transition pour parler du troisième bébé. Une fois que tu as créé la fondation Simba4Kids, tu as eu ton premier enfant, ta petite Luna. À quel moment tu t'es dit, je vais passer à autre chose et je vais mettre mes talents de coureur ou peut-être d'entraîneur au service des Kenyans locaux ? Comment est-ce que le petit blanc va apprendre aux Kenyans à courir différemment ou en tout cas être meilleur ?
- Speaker #1
C'était en fait, là aussi c'est ça qui est drôle, c'était via Simba parce qu'on a accueilli en 2021 l'équipe de France de Trail, donc l'entraîneur national, celui qui est aujourd'hui l'entraîneur national de Trail, Adrien Séguret, et puis Sakram et puis d'autres de l'équipe de France. Ils sont venus à Simba. Donc à Simba, il y a aussi des chambres justement, normalement c'est plutôt pour des volontaires, mais parfois c'est comme là, c'était l'équipe de France, mais c'était des... des sportifs volontaires, c'est-à-dire qu'à côté de leurs entraînements, ils ont quand même fait des projets, notamment de construire une maison pour une famille, et puis après, l'année d'après, ils sont revenus, et puis ils ont fait un enclos pour des moutons, et puis ils ont offert quelques moutons à une famille. Donc voilà, c'est important quand les gens viennent à Simba qu'il y ait cette accroche humanitaire quand même, c'est des gens qui veulent aider. Et donc, c'est ça qui a fait le lien. C'est-à-dire que j'ai vu cette équipe de France de trail s'entraîner pendant deux semaines. J'ai beaucoup échangé avec eux. Et donc là, ils m'ont dit, j'ai beaucoup discuté avec eux. Et on me disait, mais c'est incroyable que les Cagnans ne fassent pas de trail, en fait. Et je me suis dit, bon, ben voilà, c'est vrai qu'ils ont tout pour. Les gars, les trailers français m'ont confirmé qu'effectivement, sans doute que si les Cagnans se préparaient, ils domineraient aussi les courses de trail. Et donc, moi, je me suis dit, tiens, c'est quand même un chouette projet. Ça, c'est un truc, ça m'intéresse. d'amener des Kenyans comme tu disais avant je ne peux pas leur apprendre à courir ils savent mieux que moi comment se préparer pour un marathon ils ont beaucoup d'expertise maintenant pour du trail c'est quand même un autre sport je l'ai découvert d'ailleurs encore plus au fil des années ça fait 3 ans maintenant c'est vraiment un sport complètement différent que nous marathoniens je me mets dans le lot on minimise beaucoup et on a l'impression que c'est facile et que les gens sont fort que sur marathon, mais honnêtement, non. Kipchoge, s'il venait faire un trail, il aurait du mal parce que c'est vraiment un sport complètement différent. Donc voilà, là, je pense que j'ai pu apporter pas mal. J'ai appris aussi moi-même parce que je n'étais pas du tout trailer, donc j'ai beaucoup appris sur le terrain. Je progresse chaque année encore dans mon coaching, je pense. Et puis voilà, c'est ça qui a fait le petit déclic, c'était cette rencontre. Et après, moi aussi, je suis quelqu'un qui a toujours besoin de nouveaux projets, de nouvelles aventures. Donc une fois que j'avais... lancer Simba, que le paquebot il était il était lancé après ça faisait trois ans comme 2019-2021, j'ai aussi eu besoin de faire un peu autre chose, de mettre mon énergie ailleurs, ça veut pas dire que j'ai arrêté Simba mais j'ai réduit et c'est bien lancé et puis ma femme gère énormément maintenant mais moi je me suis mis à fond du coup dans le lancement des équipes qui s'appelle maintenant les Mini-Money Runners
- Speaker #0
Ça veut dire quoi les Mille Maniers Runners ?
- Speaker #1
Mille Maniers, ça veut dire montagne. Le nom, c'est pour ça qu'on l'a décidé comme ça. Ça veut dire, en Swahili, ça veut dire les coureurs des montagnes. D'une part parce qu'on habite dans les montagnes. Les gens qui voient un peu ça dans les médias, on a l'impression que c'est vraiment pour le marathon. Mais en fait, c'est vraiment sur un plateau très très vallonné et à flanc de falaise de la vallée du Rift qui est 1200 mètres de déniveau. niveaux les plus bas. Donc il y a vraiment beaucoup de terrains de jeu. Donc voilà, on a décidé d'appeler le nom Coureurs de Montagne.
- Speaker #0
L'idée était extrêmement satisfaisante, effectivement. Donc toi, tu aimes les challenges, mais si on se resitue quand même dans le contexte du Kenya, en tout cas de la vue occidentale, le Kenya, c'est un pays de coureurs de fond, c'est pas un pays où il y a des gens qui font du trade. Donc comment est-ce que tu as réussi à convaincre les gens de venir vers toi ?
- Speaker #1
En fait, ils ne font pas de trail pour plusieurs raisons. Je pense que la première, c'est parce que personne ne leur en a donné l'opportunité. Il n'y a pas de course de trail ici au Kenya. On en a organisé une en début d'année, mais il n'y avait pas de course de trail au Kenya. Il y avait une méconnaissance aussi de ce sport et il n'y avait pas d'opportunité. C'est-à-dire qu'il y a quelques managers qui viennent au Kenya ici et qui recrutent des athlètes pour la route et ils organisent les courses pour eux. la route ou la piste, mais il n'y a personne qui s'est dit, tiens, on va essayer d'inviter des Canyons et puis de les préparer pour des courses de trail. Donc il y en a eu très très peu qui ont essayé Sierre-Zinab, parce que c'est un peu peut-être la course de trail la plus abordable pour les coureurs sur route. Et c'était des bons résultats, mais sans plus. Je parle d'avant 2021, parce que maintenant les choses ont un peu changé. Et hormis ça, il n'y avait pas, il n'y avait personne sur les trails. Là, on était à Verbier. Il y a dix jours, c'est la première fois qu'il y avait des Canyons Elite qui participaient. C'était aussi la première fois qu'il y avait un Canyon qui participait à une course Bayou TMB. Pourtant, Bayou TMB, c'est vraiment la Mecque, c'est la Formule 1 du trail. Il n'y avait jamais eu un Canyon Elite qui avait participé sur une course Bayou TMB. Et ça, c'est parce qu'en fait, ils n'avaient pas l'opportunité d'y aller. C'est-à-dire qu'un Canyon, pour y aller, il y a un course Canyon, il faut qu'il soit invité. Il faut qu'on lui organise son billet d'avion, son logement. Ils n'ont pas d'autonomie à ce niveau-là. Ils n'ont pas les moyens, les ressources financières non plus. Donc, il manquait ce déclic-là et la connaissance de ce sport-là.
- Speaker #0
Et au niveau de la préparation physique ou au niveau endurance, est-ce que le trail ou peut-être même par ricochet l'ultra, ce n'est pas quelque chose qui va peut-être amener les Canyons dans une zone qu'ils ne connaissent pas trop ?
- Speaker #1
Si, clairement, c'est vraiment très différent. Et honnêtement, je m'étais aussi fait un peu… En discutant avec l'équipe de France à l'époque, moi et eux, on pensait que ça serait plus facile. Je pense que les Canyons domineraient plus vite. Alors que là, je vois quand même, après trois ans, que ça prend du temps. Ça va prendre un petit peu de temps. Moi, je suis toujours autant convaincu qu'ils vont y arriver. On est vraiment certain qu'un canyon peut gagner l'UTMB s'il suffisamment se prépare. C'est ça le truc, c'est que les canyons sont très forts sur la route, mais parce qu'il y a un échantillon énorme, il y en a des milliers, peut-être 3-4 000 qui s'entraînent, et puis on voit du coup Kipchoge, etc., qui sont devant. Mais là, pour l'instant, pour le trail, on est encore vraiment au tout début. Il n'y en a que 3-4, je dirais, qui commencent à se préparer un petit peu pour les ultras, puis c'est le tout, tout début. Mais le jour où il y en a une vingtaine ou une cinquantaine qui prépare l'UTMB, je suis convaincu qu'un d'entre eux peut gagner. Mais c'est vrai que c'est un sport complètement différent et que ça va prendre du temps parce que ce n'est pas non plus en une année. Ça va être sur moyen terme, du 3, 4, 5 ans, 5, 10 ans même peut-être.
- Speaker #0
S'il est devenu une habitude de voir... des Kenyans ou des personnes africaines dominer les courses de fond. C'est quand même nettement moins habituel de voir des Africains en départ de trail. Comment est-ce que vous êtes perçu dans ces courses très blanches ?
- Speaker #1
L'accueil n'est pas si mal en réalité. Au début, il y a eu peut-être un peu une crainte. Mais finalement, plus on s'implante dedans, plus il y a quand même, je trouve, un intérêt vraiment assez grand des organisateurs, des médias, des gens en général, qui trouvent ça chouette en fait, qui trouvent l'idée cool et puis qui sont bienveillants avec cette idée. Donc on a reçu quand même des invitations à plusieurs courses en Europe, en France, en Suisse pour l'instant. Et puis c'est plutôt quelque chose qui augmente. Donc j'ai l'impression que l'intérêt général il augmente. Moi j'ai quand même régulièrement des journalistes qui me téléphonent pour parler de ce sujet, de l'arrivée des Cagnans dans le trail, donc je trouve ça assez cool. Et puis voilà, il y a un réel intérêt, puis on va voir ce que ça va donner. Mais je trouve que l'accueil est plutôt bien perçu. Après, on a reçu une ou deux fois des remarques un peu racistes, mais bon, je pense que c'est comme ça dans la société, il y a de tout. Et puis malheureusement, on est tombé une ou deux fois sur des gens... un peu raciste, mais ça reste vraiment une minorité extrême.
- Speaker #0
Et au niveau, justement, du palmarès des Millie Mani Runners, tu disais qu'il y avait, vous avez participé il y a quelques semaines au trail de Véruvier-Saint-Bernard-Bahut-Ambé. Sierre Zina, l'an dernier, il y avait également un des athlètes qui avait eu un bon résultat. Lors du marathon du Mont-Blanc, justement, ils étaient respectivement 4e et 5e, je crois. au niveau du classement. Donc ça veut dire que les distances, en tout cas jusque vers le marathon, ça commence justement à devenir une distance qui est prometteuse. Et au niveau du palmarès, c'est quoi un peu la suite ? Qu'est-ce que vous nous mijotez pour la suite ?
- Speaker #1
Là, il y a Skarsgård qui arrive très vite, dans trois semaines. Là, on va venir avec une femme et deux hommes. Honnêtement, je vais un peu casser la surprise, mais la femme, j'ai beaucoup, beaucoup d'attentes pour elle. Je pense qu'elle va être très, très, très forte et surprendre beaucoup de monde, surtout que c'est sa première course en Europe. Elle s'appelle Joelyne Chepengeno. Donc, elle est encore vraiment inconnue puisqu'elle n'est jamais sortie du Kenya. Mais elle est vraiment incroyable aux entraînements. Elle est très, très proche des hommes, en fait. Donc, ça, ça me conforte bien sur sa forme. Et puis, je suis vraiment certain qu'elle va être pas surprenante. Les hommes, c'est ceux qui ont fait le quatrième et cinquième du Mont-Blanc, donc j'espère qu'ils vont continuer. C'est toujours hyper compétitif. Le pionnier, ça sera encore plus. Ce n'est pas facile, mais ce serait chouette qu'on ait quand même un ou deux athlètes dans le top 5, plus cette femme. Et puis ensuite, à moyen terme, l'idée, c'est quand même d'avoir certains qui se spécialisent sur des ultras, pas forcément tous. Ceux qui aiment bien les marathons, ils peuvent... tout à fait rester sur des distances marathon au format Golden Trail, Series, etc. Et puis d'autres qui ont un peu plus d'attrait pour le long, ils sont déjà un peu préparés et ils ont envie de tester des distances un peu plus longues. Donc l'idée, ça sera de passer sur du 100 km l'année prochaine et idéalement 100 miles dans deux ans.
- Speaker #0
L'histoire, en tout cas au niveau du trail, elle reste encore à continuer. C'est une aventure, comme tu disais, qui est relativement jeune. Donc à moyen terme, on devrait voir de plus en plus de teams qui vont débarquer. Donc il y a les Mini Money Runners, il y a l'équipe aussi Run Together. J'imagine que c'est un peu des concurrents qui ont une approche différente, comme on avait pu en parler lors de la première discussion qu'on a eue. Mais on voit effectivement qu'il y a de plus en plus un engouement en tout cas. une volonté de panacher et de remettre à niveau, rabattre les cartes au niveau du trail dans le monde. Oui, exactement. J'espère qu'il y aura un développement parce que s'il y en a un, j'aurais été un peu à l'initiative de ça. Et puis, je pense que c'est plutôt sain quand il y a de la concurrence. Et puis, je pense que le plus il y aura de gagnants qui se mettront au trail, le mieux ça sera. Maintenant, je suis pareil. Je ne suis pas certain que ça va se faire très rapidement. J'ai l'impression qu'il y aura un peu en deux temps. D'une part, parce qu'en fait, ce n'est pas facile de… Ce n'est pas si facile parce qu'il y a tout cet aspect de formation. C'est-à-dire que sur la route, on peut prendre n'importe quel coureur lui-même et lui dire prépare-toi pour du marathon Il se prépare de son côté et on l'envoie au marathon de Munich, de Salzbourg, de Genève, de je ne sais pas où. Et puis, il gagne normalement. Là, sur le trail, il y a quand même cet aspect d'entraînement qui est complètement différent où ils ont moins d'expertise, ils ont besoin d'un… encore plus besoin d'un coach sur le terrain pour les guider. Et c'est là où je me pose la question, est-ce que vraiment il y a des gens qui vont venir s'installer au Kenya pour coacher des équipes de Kenyans comme je l'ai fait ? Je ne suis pas certain, mais ça serait chouette si c'est le cas. Et aussi l'intérêt des marques. Il faut voir si les marques ont vraiment un intérêt de sponsoriser des équipes kenyanes comme on l'a. À voir, oui. C'est quelque chose qui est encore en interrogation.
- Speaker #1
Et dans un cerveau en ébullition comme le tien, c'est quoi la suite ?
- Speaker #0
Moi je suis un ambitieux, donc j'ai envie qu'on gagne tout, qu'on soit la meilleure équipe du monde, qu'il y ait des coureurs champions du monde, qu'il y ait des coureurs qui gagnent les plus grandes courses du monde, ce serait vraiment un rêve qui se réalise pour les Mini Mani Runners. Moi ce qui m'anime à chaque fois c'est vraiment de... de voir l'impact que ça a sur ces athlètes, sur ces gens, un peu dans le prolongement de Simba, où je vois l'impact que ça a sur les enfants. Là, moi, ce qui m'anime, et c'est ça qui me donne l'énergie, c'est de voir que quand un athlète va à Sierre-Zénal ou au Marathon du Mont-Blanc ou ailleurs, et puis qu'il gagne la course, il gagne, je ne sais pas moi, 5 000, 6 000 euros, et puis ça lui permet d'acheter un terrain, de lancer un business, ça lui... Vraiment, il change de vie. Sa vie change. Et ça, je trouve ça incroyable. Donc, ce n'est pas comme nous, quand on gagne Cersinal, ça met un peu de peur dans les épinards, mais ça ne change pas de notre vie. Eux, vraiment, le Cégnon, je trouve ça génial parce que c'est un rêve pour eux et c'est un truc qu'on prépare pendant des mois. Et après, quand ça se réalise, tout d'un coup, la vie de l'athlète, elle peut changer. Ça veut dire que ça a aussi un impact sur sa famille, sa femme, ses enfants, ses parents, ses cousins. ces neveux nièces. Je trouve ça vraiment beau et j'espère qu'on aura un impact comme ça, un rayonnement quand même grand. Au-delà de ça, on a plein de projets. On a des projets avec Simba aussi de faire une académie de course pour les jeunes. Ça n'existe pas trop au Kenya, donc il y a un fossé entre les jeunes qui commencent la course à pied et les professionnels qui sont plusieurs années. Du coup, il y a beaucoup de jeunes qui se blessent. Il n'y a pas vraiment d'encadrement pour eux. Et puis, il y a beaucoup de jeunes qui se découragent. Donc, je pense qu'il y a quand même un peu de gâchis. Et il y a aussi des valeurs qui manquent parfois. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de cadres de pages. Il y a plusieurs problématiques. Mais on va faire ça à Ximba. Et puis sinon, on a aussi d'autres projets immobiliers plutôt. Mais c'est une autre histoire.
- Speaker #1
On fera des pointages réguliers justement pour voir où est-ce que tu en es. de ta to-do list, en tout cas de ta roadmap.
- Speaker #0
Exactement. Tant qu'on aime, on ne compte pas. Quand on aime,
- Speaker #1
c'est ça. Effectivement. Les prochaines séances, je rappelle, c'est Cierzynal dans deux semaines. Ce sera les week-ends du 10 août. Cet épisode-là sortira après Cierzynal. J'aurai l'occasion, dans le cadre de l'introduction, d'annoncer qui c'est qui l'aura gagné. J'espère que ce sera ton atout. les minimes, donc je te tiens les pouces, et puis bravo, franchement bravo c'est quand même admirable d'entendre ton histoire et puis la cohérence et puis voir le nombre de choses et de portes et d'opportunités qui s'offrent à toi simplement parce que t'as voulu faire quelque chose de bien en faveur des autres, c'est totalement mérité donc je te dis vraiment bravo je mettrai le lien vers l'association justement Simba for Kids pour toutes celles et ceux qui souhaitent soutenir cette merveilleuse association. Et puis j'espère vraiment un jour avoir la chance de pouvoir amener mes enfants pour qu'ils puissent voir comme c'est beau.
- Speaker #0
Oui, avec grand plaisir, ce sera chouette. Je ne connais personne qui a regretté d'être venu. vivre cette aventure au Kenya. C'est une garantie de succès.
- Speaker #1
Voilà, sans garantie satisfaite ou remboursée. Merci beaucoup Julien et puis je pense qu'il y a entraînement aujourd'hui donc je vais te laisser tranquille.
- Speaker #0
Merci beaucoup Hugo,
- Speaker #1
à bientôt.
- Speaker #2
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