- Speaker #0
Une fois j'étais au Laos, j'ai comme si j'avais reçu cette évidence que le silence était vital et qu'il nous manquait dans ce monde. Et je ne savais pas quelle forme ça allait prendre, mais je savais qu'à partir de maintenant, j'allais être en mission pour donner l'accès au silence.
- Speaker #1
Bonjour, c'est Marie et vous écoutez Beau Voyage, de l'ascension du Merapik au Népal, autour du monde en famille. Du road trip au Chili au bivouac en Inde dans les Pyrénées, vous entendrez des hommes et des femmes qui partagent leurs aventures hors des sentiers battus. Des aventuriers ordinaires qui vous racontent leurs aventures extraordinaires. À deux ou en tribu, à l'autre bout du monde ou en bas de chez eux, avec trois sous ou en claquant leur PEL, ces voyageurs nous confient leurs histoires, leurs galères, leurs bons plans et leurs coups de cœur. Sur Beau Voyage, nous allons vous prouver que l'aventure est partout et à la portée de tout le monde. Alors montez le son et venez rêver avec nous. Notre invité d'aujourd'hui s'appelle Jeanne Dujardin. Alors que sa carrière dans la pub est bien lancée, Jeanne, qui ne se sent plus en phase avec sa vie citadine, décide de tout plaquer pour partir sur les routes, explorer, se trouver. Elle se forme au massage traditionnel en Thaïlande, s'initie à la méditation et surtout se lance dans une retraite vipassana pendant dix jours. en Inde. Petite fille, Jeanne a toujours aimé se réfugier dans le silence. Elle en connaît les bienfaits, l'apaisement qu'il procure. Alors à son retour d'Inde, elle décide de créer sa propre formule pour permettre à ceux qui veulent tester les retraites silencieuses de ne pas casser leur PEL en allant jusqu'en Inde, mais de l'expérimenter ici en France ou un petit peu plus loin au Portugal. Pour Beau Voyage, elle nous raconte ses voyages et son changement de vie. Elle revient pour nous sur sa retraite vipassana et nous explique aussi sa passion pour le silence et ses bienfaits. Salut Jeanne !
- Speaker #0
Salut Marie !
- Speaker #1
Alors, est-ce que tu peux te présenter pour des gens qui ne te connaissent pas encore ?
- Speaker #0
Alors, je m'appelle Jeanne Lehmann, j'ai 34 ans et je suis la fondatrice de Silence. J'ai fondé Silence en 2019. C'est un mouvement qui permet de se reconnecter à soi grâce au silence et à la nature. Et donc, je facilite des espaces silencieux depuis et je suis aussi la maman du petit Salvador.
- Speaker #1
On va déjà parler voyage avant que tu nous parles silence. Évidemment, est-ce que toi, tu es une grande voyageuse ?
- Speaker #0
Je suis une grande voyageuse, oui. Je peux me définir comme ça. Je dirais que j'ai une approche du voyage qui a évolué ces dernières années. J'étais une baroudeuse, peut-être comme vous. J'ai cru voir aux quatre coins du monde, voyager dans tous les sens, dans tous les styles aussi de culture et de type de voyage. Et puis, depuis ces dernières années, je découvre le voyage à zéro kilomètre de moi. le voyage en moi.
- Speaker #1
Avec le silence, pourquoi tu t'es intéressée au silence ? Parce qu'en fait, finalement, des voyages intérieurs, il y a plein de manières de voyager à l'intérieur de soi. On parlait tout à l'heure, avant qu'on enregistre, de la méditation. Nous, on a interviewé, tu sais, Claire, qui a fait l'ayahuasca. J'ai l'impression qu'il y a plein de manières d'aller au fond de soi et de voyager. Mais toi, tu t'es intéressée au silence.
- Speaker #0
Mais justement, c'est peut-être les voyages qui m'ont amenée à ça, dans un monde où je me sentais un petit peu oppressée par... tant de bruit. J'ai remarqué que dans mes voyages, j'allais chercher la déconnexion, le dépaysement, le vide un petit peu. Donc j'ai voyagé pas mal en montagne, en forêt, en jungle et puis j'ai découvert le désert en 2016. Et ça, ça a été pour moi la rencontre avec le silence le plus pur qui soit. Et c'est à partir de ce moment-là que j'ai eu vraiment une rencontre avec le silence. Et j'ai découvert que... Pour voyager à l'intérieur, avant d'ajouter des choses, des techniques, des pratiques, des contenus, il fallait d'abord vider, d'abord nettoyer pour toucher à quelque chose d'authentique, à quelque chose de vrai. Et que ça, c'est à mes yeux le premier pas dans un voyage spirituel, dans une recherche de soi, c'est d'abord d'aller trouver ce qui se passe à l'intérieur, au niveau de l'essence.
- Speaker #1
Ce qui fait peur un peu d'ailleurs.
- Speaker #0
Ça peut faire peur et pourtant c'est... C'est l'origine de tout, c'est notre essence, notre être. C'est vrai que le bruit peut avoir un côté rassurant, puisqu'on est conditionnés aujourd'hui à avoir beaucoup d'informations, beaucoup d'échappatoires aussi, en comblant ce vide. Et ça peut donner un petit peu le vertige aussi d'aller à la rencontre de ce qui se passe à l'intérieur de soi. Mais ça reste un très beau voyage.
- Speaker #1
Elle ressemblait à quoi, ta vie d'avant, avant le silence ?
- Speaker #0
ma vie d'avant-avant, donc petite. Je dirais que la vie ne m'a pas gâtée. J'ai eu une enfance assez difficile. Surtout, c'était beaucoup d'interrogations et j'étais assez désenchantée par l'univers dans lequel j'évoluais. Je ne comprenais pas, j'avais beaucoup de doutes sur le sens de tout ça, c'est quoi la vie ? Je ne me reconnaissais pas non plus dans ce corps, dans cette incarnation. Et la nature a été pour moi un refuge. Je préférais les animaux que les humains. Je me sentais plus à l'aise à nager très loin dans la mer, parce que j'ai grandi en bord de mer, ou à être seule dans la forêt. C'est là que j'ai commencé à découvrir le silence, mais c'était plus comme une protection pour moi au début. J'ai le souvenir d'une enfance pas très heureuse. C'est comme si je m'étais créée un monde parallèle dans mes rêves, dans mon imagination, pour continuer d'avancer. comme une utopie. Et puis en grandissant, je suis passée par beaucoup de hauts et de bas émotionnels. Et ensuite, je suis rentrée dans un monde de bruit. Moi aussi, le bruit, ça a été cette agitation, cette activité. Je suis arrivée à Paris en 2011. À l'époque, je travaillais dans la publicité, j'étais directrice artistique. D'abord, j'étais en stage, etc. Ensuite, j'étais en agence de publicité. Et là, j'ai vraiment kiffé ma vie parisienne. Donc la culture, le monde, la fête. J'avais un scooter, je sillonnais Paris de long en large tous les jours. J'avais un agenda plein à craquer. Je n'avais pas une seconde pour moi. Je me souviens que mes colocs me disaient Mais tu pars encore ? Mais tu ne t'arrêtes jamais ? Et je dormais à peine. J'avais tellement de choses à faire, j'avais envie de croquer la vie. Cette période a eu ses limites, on va dire. Ça m'a un peu épuisée rapidement. Au bout de dix ans à Paris, je ne me sentais plus du tout à ma place, ça a été assez progressif. J'ai vraiment ressenti le besoin de déconnecter de tout ça et de me reconnecter à quelque chose de plus vrai.
- Speaker #1
Alors qu'est-ce que tu as fait ?
- Speaker #0
D'abord, j'ai senti arriver cet épuisement quelque part de cette vie à mille à l'heure. Et j'avais en parallèle de ça ma maman qui est professeure de yoga, donc j'avais accès à une spiritualité. Donc on allait chaque année... en ashram, faire des stages de yoga, de détoxification. Et quand je revenais à Paris, j'avais cette vie complètement à mille à l'heure. Et donc, j'ai eu un peu le cul entre deux chaises pendant plusieurs années. Et en 2018, je me suis dit, bon, là, je ne suis plus à ma place. Je travaillais à l'époque dans une grande agence de pub. Je me souviens, j'allais à pied au travail. Et donc, c'était rue du Chemin Vert. Et je me disais, mais ça, c'est pas du tout cohérent d'être dans un grand bâtiment, immeuble avec... Des bodyguards devant, les badges, les ascenseurs, les boutons partout, toutes ces machines. Et ça s'appelle Chemin Vert, mais qu'est-ce que je fous là ? Et je marchais le plus lentement possible, comme si je faisais un slow motion de la marche pour arriver le plus tard possible, parce que chaque minute dans ce bureau était une souffrance pour moi. Je pressais complètement. Et donc là, j'ai décidé de partir, de tout lâcher. Donc pour 99% de mon entourage, j'étais folle. J'avais pété les plombs, puisque j'avais un super... poste, un bon salaire, j'avais un crédit immobilier, donc qu'est-ce qui lui prend ? Mais je savais au fond de moi, il y avait une voix qui était plus forte que tout et qui me disait, là, il faut bouger, il faut partir, c'était une question de survie. Et donc, je suis partie et j'ai commencé par voyager. Donc, je suis partie en Amérique du Sud, je suis partie en Asie du Sud-Est pendant plusieurs mois, une fois que j'étais... Enfin, après plusieurs mois de voyage. Disons que j'étais un peu en quête de sens, donc je savais que je ne voulais plus du tout faire le métier de direction artistique, mais je cherchais un peu une voie plutôt branchée de nature, mais je ne savais pas du tout. J'ai expérimenté plein de choses, je me suis formée au massage thaïlandais, j'ai fait des cours de cuisine au Cambodge, j'ai fait différentes retraites bouddhistes. Une fois j'étais au Laos, j'ai comme si j'avais reçu cette évidence que le silence était vital. et qu'il nous manquait dans ce monde. Et je ne savais pas quelle forme ça allait prendre, mais je savais qu'à partir de maintenant, j'allais être en mission pour donner l'accès au silence.
- Speaker #1
Mais c'était quoi cette expérience là-haut ? C'était déjà à Vipassana ?
- Speaker #0
Non, j'étais juste au bord d'une cascade. C'est une ville qui est assez chargée spirituellement, ce qui s'appelle Blanc-Prabang. J'étais juste en nature et c'est à ce moment-là où j'étais seule, j'étais en paix avec moi-même. J'ai ressenti une joie et j'ai ressenti une grande clarté. un message à l'intérieur de moi qui me disait mais c'est ça la clé c'est en fait c'est le silence et cette nature c'est cette déconnexion qui te donne la joie qui te donne la paix qui donne du sens à tout et j'ai eu envie de partager ça et donc tu as fait quand même une retraite toi silencieuse avant de lancer dans un silence alors là dans ce voyage là j'ai fait une initiation dans les temples bouddhistes en thaïlande et propose pas mal de quelques jours comme ça en silence. Ensuite, j'ai eu cette idée de me mettre vraiment au travail pour créer des espaces de silence, et je ne savais pas quelle forme ça allait prendre. Juste après ça, j'ai entendu parler de vipassana. Vipassana, c'est une retraite, à la base c'est une technique de méditation, mais qui s'apprend sous forme d'une retraite de dix jours, où on est en silence pendant dix jours, et on médite dix heures par jour. Je suis partie en Inde, et j'ai fait vipassana, et ça a été... Une expérience magique, pour moi, magique et à la fois très difficile. Et quand je suis rentrée de Vipassana, je me suis dit, mais il faut que vous essayiez. Je voulais vraiment partager cette expérience, essayer de la faire vivre à d'autres. J'ai compris que chaque personne avait un prétexte pour ne pas faire Vipassana, parce que c'est quand même une expérience qui est très difficile, où on se réveille à 4h le matin, on médite pendant 10h par jour, on n'a pas le droit de lire, ni d'écrire, ni de regarder les gens. Ça ne disait pas, en tout cas quand j'en parlais autour de moi, personne ne sentait prêt. Et c'est après ça que j'ai eu l'idée de créer une retraite silence, en mixant cette pratique du silence, de la déconnexion digitale et du retour à soi, mais dans un contexte de plaisir. Parce que pour moi, le plaisir doit être partout, tout le temps. Et donc d'associer cette pratique avec des lieux jolis, confortables, de nature, avec un accompagnement. de pratiques autour du corps, d'activités de bien-être, etc. Et c'est là que j'ai créé la première retraite silence en 2019.
- Speaker #1
Alors, il faut que tu nous racontes quand même, Vipassana, déjà, comment tu as trouvé où aller faire cette première retraite ? Parce qu'il y a peut-être des endroits où c'est mieux que d'autres. J'en sais rien, tu vois, moi, je n'ai jamais regardé. Moi, ça me fait assez peur, justement, ces jours de silence. Donc, j'ai envie que tu me racontes, un, comment tu as trouvé l'endroit et deux, qu'est-ce qui se passe quand tu arrives ? Tu vois, qui sont les autres avec toi ? Et toi, un peu tes premières impressions quand tu te retrouves là-bas ?
- Speaker #0
Moi, je me souviens déjà que j'avais créé Silence et je savais que je voulais me consacrer à ça. Et j'avais une voix à l'intérieur de moi qui me disait si tu n'y arrives pas, tu n'es pas légitime Donc déjà, j'avais un peu ce challenge à moi-même, je m'étais mis la barre haute. Et en fait, je dirais que ça s'est fait assez naturellement. Et je sens qu'encore une fois, j'ai été portée par la vie dans cette expérience de vipassana, parce que j'avais plutôt envie d'aller en Inde, puisque c'est quand même l'origine de ces enseignements-là. Bon évidemment, l'Inde c'est quand même un vivier, énergétiquement au niveau spirituel c'est très puissant, donc j'avais envie d'aller là-bas. Et j'ai cherché tout simplement en fonction de mes dates, et là c'était l'ashram Vipassana de Arunachala, qui est à côté de Thiluvannamalai, qui est une ville très connue dans le milieu spirituel, dans le yoga en particulier. Et donc je suis arrivée après à l'ashram, j'étais complètement stressée, il faut dire ce qui est, je ne connaissais pas, j'avais à peine 30 ans. Je suis arrivée là-bas en touc-touc, je me souviens, après avoir fait un trajet de bus très long. Et donc quand on arrive là-bas, c'est assez militaire parce qu'on sent que chaque semaine, ils ont des retraites qui s'enchaînent, qui s'enchaînent. Donc ce n'est pas un petit accueil sympa, c'est tu donnes tes affaires, téléphone, ordinateur, tout ce qui est connecté, tout ce qui est distraction, même si tu as du déodorant, du parfum, etc. Après, ça dépend des H-RAM, mais en tout cas, à la moins où j'étais. Ils te donnent un savon ayurvédique, un shampoing sec et basta. Je crois que tu as le droit de garder juste ton antifreeze. Et donc là, tu arrives dans une chambre que j'appellerais plutôt une cellule. On dirait vraiment une cellule de prison, minuscule. On était trois par chambre et dix superposés. Il n'y a pas de matelas, c'est plutôt genre une paillasse. Et la salle de bain, encore une fois, ça dépend des ashrams. Je sais qu'en France, c'est beaucoup plus. plus confortable, par exemple. Mais là-bas, il n'y avait pas de douche, il y avait juste un robinet avec un seau d'eau froide. Il y avait une moustiquaire parce qu'il y a plein d'insectes. Je me souviens qu'il y avait une grenouille dans les toilettes. Il y a pas mal d'araignées, de moustiques, plein de petites bébêtes. Et puis, l'idée, c'est vraiment d'avoir aucune distraction. Donc, même danser, faire du yoga ou prier, d'autres choses, c'est interdit. C'est vraiment juste méditer selon les enseignements qui sont délivrés là-bas. Et ça commence... très fort où en fait on est tout de suite dans le silence, il n'y a pas de présentations qui sont faites, je crois qu'on a juste une heure ou deux le temps de préparer de poser nos affaires et d'atterrir donc on parle à peine et là moi dans l'endroit où j'étais on était à peu près 200.
- Speaker #1
Quand tu t'es installée dans ta chambre, t'as au moins eu le temps de demander à tes colocs comment ils s'appelaient, d'où ils venaient etc ou même pas t'as même pas eu de conversation avec eux ?
- Speaker #0
Ouais, si, rapidement. J'étais avec une Canadienne et une Japonaise. Mais la Canadienne, au bout de deux jours, elle est partie. Elle n'a pas tenu le choc. Et après, c'était très minimal, puisqu'on n'a pas le droit de se regarder. Donc, on s'est vité au maximum. Alors, vite, dans le silence, il y a une routine qui se met en place. On se fait comprendre que moi, je me douche avant, toi, tu te douches après. Et puis, aucun échange. Et parfois, on se dit, mince, je dois avoir l'air vraiment pas sympa, parce que tu peux pas dire pardon, par exemple, si tu lui fermes la porte devant elle. Faut même pas dire les petits mots réflexes. Mais il y avait une connexion quand même dans l'invisible, où on se voyait, on était à côté, on se soutenait. Et ça s'est très bien passé, on a gardé un lien après. Mais bon, c'était pas très bavard, quoi.
- Speaker #1
Vous étiez 200, donc comment ça commence ? Alors, comment on te dit rendez-vous dans telle salle ? Parce qu'il y a quand même des mots, en fait. Les gens qui organisent, eux, ils te parlent ?
- Speaker #0
Alors, au début, oui, il y a une équipe d'accueil qui sont là à l'accueil. Après, c'est eux qui s'occupent de servir à manger. Il y a un staff, je crois, d'ailleurs, qui sont bénévoles, si je ne dis pas de bêtises, ou alors c'est des résidents de l'HRAM. En fait, on a des numéros. Tu es numéro 28, et tu as ton numéro sur la porte. Donc, c'est très organisé comme ça. Et il n'y a pas beaucoup de communication, puisque rapidement... Oui, tu peux emprunter des vêtements, des habits très simples, blancs, confortables. Tu remplis un formulaire et très vite, on t'amène à la chambre et c'est fini. Et donc, il y a la ségrégation hommes-femmes. Donc, il y a un bâtiment pour les hommes et un bâtiment pour les femmes. Et on ne se croise jamais. Donc, il y a juste le hall de méditation où là, il y a deux rangées à peu près équivalentes. Pour le coup, il y a aussi beaucoup d'hommes. Puisque dans plein d'autres retraites en Europe, on se rend compte qu'il y a 81% de femmes. Mais là, il y a quand même beaucoup d'hommes. Il y a beaucoup de locaux, donc c'est beaucoup. beaucoup d'Indiens. Je l'ai fait après au Sri Lanka, il y avait beaucoup de Sri Lankais. Mais il y a des gens qui viennent du monde entier. D'ailleurs, le dernier jour, j'ai acheté un livre Vipassana et j'ai demandé à toutes les femmes d'écrire leur nom et leur pays. Et là, j'ai le truc Japon, Russie, Slovénie, tout. Vraiment, le monde entier. Dans mes souvenirs, on est placés et au premier rang de ce hall de méditation, il y a les plus expérimentés, qui montrent l'exemple. Et ce qui est incroyable, c'est que souvent, c'est des personnes qui sont assez âgées. vraiment, parfois vraiment très âgées. Je me souviens de femmes, moi, qui me bouleversaient. C'est des femmes qui avaient le dos tout courbé, qui n'avaient plus de dents et qui étaient des indiennes qui avaient l'air d'avoir autour de 90 ans, voire plus, et qui restent là, immobiles, pendant 10 heures par jour. Ça, ça porte quand même, quand tu te dis mais j'ai mal aux genoux, moi et tu les vois, elles, dans cette grâce, ou qui ont l'air de pouvoir rester là pendant des vies. Oui, c'est une expérience très difficile, en même temps très belle, très bouleversante. Clairement, on passe par plein d'étages. Je dirais qu'au début, on se dit, je ne vais jamais y arriver. Le temps est tellement long. Quand le gong sonne à 4h et ils viennent. Ce n'est pas optionnel. Il n'y a aucun rendez-vous qui est optionnel.
- Speaker #1
Comment ça se passe, les journées ?
- Speaker #0
On se réveille à 4h, dans mes souvenirs. Et à 4h30, il faut être à la méditation. Ensuite, il y a 10h dans la journée. C'est des périodes de temps. Soit c'est 1h30, soit 2h. où on est dans le hall en méditation et on ne doit pas parler ni bouger. On peut aller aux toilettes uniquement. Mais c'est ça, il y a des moments où on est guidé par un professeur qui est là. C'est en anglais, ça dépend des endroits, mais je me souviens que c'était en tamoul, parce que dans le sud-est de l'Inde, il y avait tamoul et anglais. Je me souviens qu'il y a des casques pour les personnes qui ne parlent pas anglais. Par exemple, il y a des versions japonaises. Il y a vraiment dans toutes les langues, pour que ce soit vraiment ouvert à tous. Il y a un premier repas qui est à 6h du matin, donc après la première pratique du matin, petit déjeuner. Ensuite, on repart méditer. Et la journée, c'est vraiment... On ne fait que méditer, en fait. Il y a quelques moments de temps libre où là, tu te balades en marche méditative, mais ce n'est pas non plus des jardins luxuriants. C'est très minimal, donc une petite cour. Ou alors, moi, je dormais parce que j'étais crevée. C'est long, 10h par jour. Et je crois qu'on médite comme ça jusqu'à 21h. Et ça s'enchaîne, et ça s'enchaîne, et ça s'enchaîne.
- Speaker #1
Qu'est-ce que tu ressens quand tu médites comme ça ? Il y a tout qui t'arrive dans la tête ?
- Speaker #0
Il y a tout. C'est vraiment la rencontre avec les pensées et les techniques de méditation qui te sont enseignées. C'est de se détacher de la pensée. Les premiers jours, en gros, l'enseignement de Vipassana, pendant les premiers jours, tu apprends à respirer, à observer ta respiration. La deuxième phase dans Vipassana, c'est le body scan, le scan corporel, où là, on t'apprend. Apprends à placer ton attention sur les zones du corps, du sommet du crâne jusqu'au bas des pieds, et descendre, remonter, descendre, remonter, en amenant ta conscience sur chaque zone du corps. Et la troisième étape, ça c'est sur les 24-48 dernières heures, il me semble, c'est Meta. Donc là, c'est de ressentir l'amour à l'intérieur de toi, l'amour pour toi, et ensuite de le disperser autour de toi et dans le monde, de le diffuser. Et ensuite, de faire le combo de ces trois méthodes-là, qui est la technique. complète de vipassana. Moi, j'ai toujours l'impression que le silence, en fait, ça vient révéler toute la poussière qu'on met sous le tapis. Au quotidien, on a tendance à zapper. Bon, j'ai un problème, je zappe. Je vais aller scroller deux minutes pour ne pas penser à ça, pour oublier ci, mettre de la musique, écouter un podcast. On a tout plein de techniques de stimuli extérieurs qui nous permettent de ne pas voir la vérité. Et vipassana, ça veut dire voir les choses telles qu'elles sont réellement. Donc, pour aller purifier l'esprit, pour aller nettoyer ça, d'abord, il faut en prendre conscience. Donc la phase de prise de conscience, elle n'est pas évidente. Parce que moi, je me rappelle que j'avais des pensées, et plus tu te dis je ne veux pas y penser, plus ça revient, ça revient, ça revient, ça revient. Tu penses à ton passé, tu penses à des personnes, tu as l'impression que c'est des pensées parasites qui viennent te visiter. Mais je ne veux pas penser à ça, je suis en Inde en train de faire Vipassana, pourquoi je pense à ce mec ? Et en fait, c'est comme plein de petits nœuds sur la toile de notre vie qu'on a l'occasion d'aller explorer pour les démêler un par un. Donc c'est pas hyper confortable et pourtant il y a une alternance de moments vraiment inconfortables et de moments de grâce où tu sens que cet état de calme qui est tellement présent, cette énergie collective aussi d'être avec des dizaines et des dizaines de personnes qui sont là en silence, dans la grâce de cet état vraiment en soi, immobile, ça crée vraiment un apaisement incroyable. Et puis ce qu'on apprend avec Vipassana, c'est de rester dans l'inconfort et de dépasser cet inconfort.
- Speaker #1
Tu n'as pas le droit de t'allonger, tu es toujours assise dans la même position, tu ne bouges pas.
- Speaker #0
Au début, on doit être assis. Au début, tu décroisses tes jambes, tu les recroises, tu te masses les pieds, parce que ça fait mal en fait, vraiment, d'être en méditation. Je suppose que peut-être les gens qui nous écoutent ont déjà fait une demi-heure, une heure max, mais quand tu fais dix heures, franchement, tu as l'impression que tes rotules vont exploser. Et au bout de, je crois que c'est le 6 ou 7ème jour, on t'invite à ne plus bouger. Ça commence par une heure et après ça s'allonge et puis ensuite ils invitent à ne plus bouger jusqu'à la fin du stage, d'essayer de rester vraiment immobile. Il y a des moments où tu te dis mais je ne peux pas, là je dois bouger la jambe. Et ce qui est intéressant dans cette pratique-là, après on est accompagné par des guidances, des enseignements, c'est de... ne pas réagir à ce que ton mental te dit de faire. Parce qu'on a tellement tendance à... Tu vois, si une mouche vient se poser sur ton front, pouf, tu la retires tout de suite. Et là, si tu observes la mouche, tu la sens, et t'attends un petit peu avant de tout de suite réagir, qu'est-ce qui se passe ? Elle part. Et ça, c'est la rencontre avec l'impermanence des choses. L'impermanence des choses, c'est un des grands enseignements dans Vipassana, c'est ce qu'on apprend. à observer c'est que tout est éphémère, que tout passe, que la douleur dans le genou elle va passer, que cette pensée qui revient et qui revient elle aussi elle passe. Si là tu sens un état de tristesse, ça va passer puisque la vie c'est une alternance de différentes sensations, de différentes émotions et plutôt que de s'accrocher à cette pensée ou à cette sensation, juste l'observer sans réagir, sans commenter et tout passe. Et ça, c'est magique quand on arrive à ressentir cette impermanence des choses, puisque c'est bien beau de réaliser ça dans la méditation, mais à la limite, on s'en fiche. L'important, c'est de savoir décliner cet enseignement-là sur les choses de la vie courante.
- Speaker #1
Bien sûr, c'est que ça te serve après, quoi.
- Speaker #0
Voilà. Nos états, nos événements, nos hauts et nos bas, tout passe, en fait.
- Speaker #1
Si t'as un coup de mou, si vraiment t'en peux plus, il y a des gens qui sont là pour t'aider, si t'as envie de te lever, d'aller crier dehors, si tu brises ce silence, ou si justement à un moment t'en peux plus,
- Speaker #0
hop,
- Speaker #1
tu sors du game.
- Speaker #0
Alors je sais pas s'il y a des personnes qui se font virer, moi j'ai pas vu ça, en tout cas, il y a des gens qui partent parce qu'ils peuvent plus, ça, ça arrive, j'ai entendu beaucoup de témoignages, et puis ma coloc, même la canadienne, qui avait arrêté au bout de deux, trois jours. Mais non, il y a des espaces d'échange avec le professeur. il y a des possibilités de poser des questions d'échanger, d'être accompagné quand même
- Speaker #1
Et comment on casse le silence comme un peu on casse un jeûne ?
- Speaker #0
Il s'encombre pas de beaucoup d'enrobage en fait dans Vipassana il n'y a même pas une sonnerie ou quoi c'est juste la fin, c'est le dernier jour et je crois qu'on n'est même pas félicité enfin c'est... il y a plein de conseils aussi pour revenir à la vie doucement On ressent surtout la joie collective d'avoir affronté ça. C'est magique. Mais dans mes souvenirs, non, c'est pas progressif comme un jeune. D'abord, tu reprends juste les végétaux. Et après,
- Speaker #1
il y a juste un bonjour.
- Speaker #0
C'est vrai que ce qui est intéressant dans Vipassana, mais moi, je le vois aussi dans les retraites silence que j'organise, c'est qu'entre le moment où tu as envie d'exprimer quelque chose, parce qu'on est tellement habitués à... donner vie à nos pensées tout de suite avec de la parole, parce que la parole est débridée, on parle, on parle, on parle. Quand tu ne peux pas faire ça, tu te rends compte qu'il y a une prise de recul par rapport à ce que tu allais dire, que ce soit un jugement, un commentaire, une remarque, une demande, quelque chose. Et ça passe, ça aussi. Et après, avec le recul, tu te dis, mais pourquoi j'allais vraiment dire ça si j'avais pu le dire ? Et j'ai beaucoup de retours sur expérience de personnes qui me disent, à un moment, je... J'avais vraiment envie de commenter quelque chose ou de faire une remarque. Et le lendemain, je me disais, j'aurais été débile de le faire, en fait. Tu prends du recul par rapport à l'ego.
- Speaker #1
Et alors, quand tu arrêtes le silence, tu parles un peu avec ta coloc, quand même. Tu as envie d'échanger avec les gens avec qui tu as fait cette expérience ? Ou bien tu prends tes affaires et tu t'en vas ?
- Speaker #0
Ça, c'est vraiment unique. C'est différent pour chaque personne. Chacun a son process. Déjà, c'est très sensible de reprendre la parole après plusieurs jours en silence comme ça. déjà ça fait bizarre physiquement parce que les cordes vocales sont complètement en repos et c'est beaucoup d'émotion aussi de reprendre la parole parce que il y a eu une privation justement de la parole et dans Vipassana en plus on n'a pas le droit d'écrire donc vraiment il y a beaucoup de choses certaines personnes vont avoir envie de connecter justement d'aller poser plein de questions, échanger et d'autres personnes ont besoin de rester dans leur bulle parce que c'est il faut vraiment intégrer tout ça et puis moi je sais que j'étais pas spécialement, j'ai papoté un petit peu évidemment, mais j'étais pas spécialement appelée au collectif. J'avais vraiment envie d'écrire ce qui s'est passé. Je me souviens que j'ai enregistré aussi des audios. J'avais besoin que ça décante, en fait, de digérer ça. Je suis restée plusieurs jours après, toute seule, dans cet état complètement méditatif. Ouais, ça prend du temps aussi. C'est pas anodin, et puis on peut pas revenir tout de suite à une vie normale.
- Speaker #1
Comment tu as transposé cette expérience à notre vie européenne et où tout le monde n'a pas dix jours ? En tout cas, tout le monde ne peut pas prendre forcément ce luxe de partir. Comment toi, tu as transposé cette expérience pas loin de chez nous ?
- Speaker #0
J'ai commencé par réduire la durée. Comme tu l'as dit, dix jours, c'est vrai que c'est beaucoup. Je crois que la première retraite, c'était cinq jours, cinq jours, quatre nuits. Et rendre ça aussi géographiquement plus accessible. Donc en France, les premières années, je ne travaille qu'en France. Ajouter un élément pour moi qui est primordial, qui a été ma plus grande enseignante dans toutes ces années d'exploration de moi, c'est la nature. Donc ça, c'est vraiment le pilier. Quand je choisis un lieu pour les retraites, c'est cet accès à la nature. et si possible sauvage et vaste. Donc choisir des lieux de nature et des endroits qui soient confortables. Parce que je trouve que c'est déjà un challenge de rester en silence, de sortir de sa zone de confort, de vivre ça. Mais si en plus il faut vivre des inconforts, comme se laver avec un seau d'eau, ça devient un peu complexe quand même. Donc ramener du confort, ramener de la douceur, de l'accompagnement.
- Speaker #1
Mais tu penses que ça ne fait pas partie quand même de... Quand tu me racontais ton expérience en Inde, est-ce que toute cette sobriété, en tout cas, qui finalement, nous, on dit inconfort, mais en fait, c'est le moins possible de divertissement et de plaisir dans ce que tu racontes de ton expérience de vipassana, est-ce que ce n'est pas ça qui t'amène à cet état de très différent, en fait ? Est-ce que le confort permet d'arriver quand même dans le même état ?
- Speaker #0
Oui, oui. C'est vrai que je dirais que c'est du niveau 3, en fait, de coupler l'expérience. d'être seule, d'être en silence. En plus, tu ne regardes pas les autres. Et en plus, tu vis le minimalisme absolu. Alors oui, c'est un vrai retour à l'essentiel, puisque au final, on peut se laver avec un verre d'eau, avec un seau d'eau, pardon. On peut dormir sur une paillasse. Mais c'est que ça complexifie les choses et c'est faisable. Et bien sûr, ça enrichit l'expérience d'une certaine manière, mais je crois aussi que ça la rend inabordable. pour certaines personnes. Moi, ce que j'ai eu envie aussi, c'est que ce soit accessible, que ça soit ouvert à tous et que ça ne semble pas réservé à une élite ou à des gens qui sont prêts, qui sont vraiment expérimentés. Moi, je vois dans les retraites, silence, il n'y en a pas beaucoup qui semblent intéressés par Vipassana, qui semblent prêts. Ça leur fait vraiment peur. Il y en a quelques-uns. Il y en a quelques-uns d'ailleurs qui viennent en silence avec moi pour se préparer à Vipassana.
- Speaker #1
Comment ça se passe quand on vient faire une retraite silence chez toi aujourd'hui ?
- Speaker #0
Les retraites, c'est entre trois et six jours. Aujourd'hui, ça se passe soit en France, soit au Portugal. Donc, on est dans des lieux... beau dans des lieux vraiment de nature sans que ce soit luxueux, c'est plutôt simple mais c'est un luxe de simplicité en fait. Moi j'ai aussi pour parti pris de rendre ces retraites là accessibles à différents budgets donc il y a toujours des hébergements très simples voire du camping ou des dortoirs et puis des chambres partagées et des hébergements plus premium pour les personnes qui peuvent se faire plaisir et on commence toujours les retraites par un temps convivial. Donc pour atterrir, pour rassurer, pour connecter aussi les uns avec les autres. Et puisque je les appelle les silencieux, les participants. Donc les silencieux, les silencieuses, ils ont des questions. Ils viennent aussi avec leurs intentions et leurs bagages. Donc d'abord, on se dépose et il y a un vrai temps pour ça. Souvent, il y a un premier repas aussi qui est échangé. Et ensuite, dès le premier soir, on rentre dans le silence pour une période continue. et ininterrompues de plusieurs jours selon la durée de la retraite. Là, je suis rentrée la semaine dernière de six jours en silence. Donc, on a commencé le premier soir jusqu'au dernier jour. Le premier soir, les personnes laissent leur téléphone. Donc, moi, j'ai un panier, une corbeille dans lequel je récupère les téléphones. Dans certaines retraites strictes, c'est obligatoire. Vipassana, on te confisque le téléphone. Moi, je dis toujours que ce n'est pas obligatoire, mais c'est très fortement suggéré. Puisque c'est dur aussi pour certaines personnes de laisser. Donc moi, je propose aussi de rester joignable pour les personnes qui ont vraiment besoin d'être contactées. Par exemple, s'il y a des mamans d'enfants en bas âge ou des proches qui sont malades, etc. Moi, je reste joignable et ça m'arrive d'être contactée en urgence, mais c'est assez rare quand même. Dès le premier soir, on rentre dans ce silence et là, les journées sont ponctuées d'accompagnement. d'activités autour du corps, d'activités de bien-être. Donc on fait du yoga, de la méditation, beaucoup de respiration, on danse. Et il y a des temps d'enseignement, de partage d'enseignements spirituels, autour des valeurs, de la conscience, des outils pour ramener vraiment de la présence dans notre vie, des exercices pour se reconnecter à la nature. Et voilà, on est accompagnés comme ça. Donc à la fois, c'est une expérience qui est très intime, avec soi-même, très personnelle. Et en même temps, ce qui est beau, c'est l'énergie du groupe qui se crée au-delà des mots. Ils ressentent vraiment l'énergie collective et il y a des liens qui se créent entre eux, même s'ils n'ont pas le droit de parler.
- Speaker #1
Ils ont le droit de se regarder chez toi ou pas ?
- Speaker #0
Alors moi, je propose différentes profondeurs dans la pratique du silence. Ce qui est commun à tous, c'est l'arrêt de la parole. Et ensuite, je leur propose d'aller plus loin en évitant les interactions. Parce qu'il y a des silencieux qui vont avoir envie de rester entre eux, de se faire des sourires, des regards. se faire des blagues en silence, etc. Mais l'idée, ce n'est pas non plus d'imiter la parole avec une alternative, sinon on passe un petit peu à côté. Et ensuite, je propose pour ceux qui souhaitent garder le regard vers le bas, s'ils veulent vraiment être encore plus à l'intérieur d'eux, en expliquant bien qu'il n'y aura pas de jugement, que sur lui, il est moins sympa qu'un tel, puisque de toute façon, on se parle avant et on se parle après, donc ils ont le temps de connecter. Et c'est juste qu'ils sont là de leur plein gré, ils sont là de manière responsable pour vivre une expérience. Et généralement, tout le monde joue le jeu, en fait. Tout le monde respecte. Alors, au début, il y a quelques gaffes, des mots qui sortent tout seuls, des oups des gens qui oublient, puisqu'on a tellement l'habitude de parler. Mais très vite, il y a cette harmonie qui se crée dans le groupe. Et ce que je trouve vraiment très beau dans les retraites, c'est l'équilibre qui se crée dans les différentes personnalités. Parce que quand on est dans un groupe, on peut très vite identifier. les personnalités, il y a le rigolo, le bavard, il y a la personne un peu effacée. Voilà, c'est un peu les étiquettes des rôles que chacun joue dans une société. Et là, il y a une harmonie qui se crée puisque tout le monde est à l'unisson dans ce silence et ça rend les choses très gracieuses.
- Speaker #1
Ça donne envie. Oh là là, j'ai trop envie de venir. Et donc, on peut le faire pour trois jours.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Extraordinaire. Et alors, est-ce que toi, quand tu le fais chez toi, le silence, en tout cas quand toi, tu organises ? Tu joues aussi le jeu ou toi tu bosses et le soir tu appelles ton mari et tu fais des bisous à ton fils ?
- Speaker #0
Alors moi déjà, je vais vous faire une confession, c'est que moi je rêve d'être une silencieuse. Je l'ai été en vie passée, mais ce n'est pas les mêmes conditions. Je guide, je facilite les espaces, donc je ne peux pas être en silence. Je partage différents ateliers, je guide les méditations, le yoga, donc je parle. Souvent on est en binôme, soit je fais des retraites seule ou en binôme. Et donc, on est les seuls qui parlons. Voilà, l'équipe. Et j'ai la chance de co-animer souvent avec mon chéri, avec Jonathan. Donc on est ensemble. Lui, on s'est rencontrés dans une retraite au silence où il participait. Et lui, il est enseignant de méditation et il est écrivain, notamment sur la pratique du bonheur. Et on a vite décidé de travailler ensemble. On a organisé la première fois il y a quatre ans, une première retraite où moi, je créais cet environnement silencieux. qui est magnifique aussi pour recevoir des enseignements. Et puis lui, il proposait toutes ces pratiques autour du bonheur qu'il a créé. C'est très complémentaire. Donc aujourd'hui, on travaille ensemble, pas sur toutes les retraites, mais très souvent.
- Speaker #1
Donc le soir, tu débriefes.
- Speaker #0
On est ensemble, on est très connectés au process quand même. Et puis, si tu veux, il y a cet état qui est tellement calme, il y a une telle quiétude aussi dans l'énergie. que nous, on vit le truc même si on parle, parce qu'on travaille et puis on crée aussi au fil de l'eau, en fonction de l'énergie, en fonction du groupe, en fonction de nos inspirations. On est vraiment au service de la retraite, mais ça nous met dans un état quand même, il y a moins de conversations superflues, autant que possible, on est sans les téléphones, évidemment, et puis on profite du cadre.
- Speaker #1
Il y a des gens qui ont déjà craqué pendant tes retraites ?
- Speaker #0
Alors c'est... arrivé, il y a eu quelques craquages. Une fois qu'ils sont dans le silence, il y a une fiche sur laquelle ils peuvent communiquer s'ils ont besoin, s'il y a des questions, s'il y a des remarques, des besoins, etc. Puisque je trouve que c'est assez enfermant quand même d'avoir aucune possibilité de partager. Donc ça, c'est utilisé pour les éventuels échanges assez superflus. Et je dis aussi que si vraiment ça chahute trop, si c'est trop... trop dur, moi voilà, on n'est pas en prison, on peut ouvrir le silence, moi je suis disponible pour échanger, pour parler. Et en effet, dans ce processus de silence, il y a vraiment des vagues aussi au niveau émotionnel. On peut passer par des états sublimes et puis des états très durs, comme moi ce que j'ai vécu pendant Vipassana, où en fait on vient prendre conscience de choses qu'on avait enfouies et ça peut faire remonter des choses. Pour aller vers la lumière, il faut d'abord aller à la rencontre. compte de ses ombres. Donc, c'est sûr qu'il peut y avoir des moments très challengeants. La plupart du temps, l'invitation, c'est de faire confiance au silence, de faire confiance au process. Et si ça ne j'ai pas eu trop, les gens arrivent à trouver les ressources à l'intérieur d'eux. L'objectif de cette retraite, c'est vraiment de responsabiliser sur notre évolution personnelle, de ne pas mettre dans les mains de quelques enseignants que ce soit, de quelques pratiques que ce soit, leur bonheur. mais de faire comprendre que tout est là à l'intérieur d'eux et de rappeler encore et encore qu'en fait, il s'agit plutôt de déconstruire et d'aller à la rencontre de ce qui est, de ce qui a toujours été, que tout est là déjà en eux, plutôt que de balancer plein de techniques, de pratiques, de gourouiser. Moi, je viens justement défaire le gourou spirituel, de faire comprendre. que toutes les ressources sont en eux. Et généralement, quand il y a des moments qui chahutent comme ça, ils arrivent à trouver les réponses à l'intérieur d'eux. Mais c'est vrai que c'est arrivé, oui, c'est arrivé que ça chahute tellement qu'on vient de fondre en larmes dans mes bras. Mais cette personne était restée finalement et le lendemain, ça allait déjà mieux. Et sinon, ça arrive très rarement, mais que moi, je sois contactée s'il y a vraiment des urgences familiales. L'année dernière, j'ai la fille d'une des participantes qui a commencé à avoir des contractions qui voulaient dire à sa mère qu'elle était en train d'accoucher. Donc là, j'étais obligée de rompre le silence et de dire à cette silencieuse, voilà, j'ai ta fille qui m'a contactée. Donc on était prêtes à ce qu'elle parte et qu'elle aille auprès de sa fille. Et finalement, les contractions se sont arrêtées et elle n'a pas accouché, donc elle a pu rester. Mais c'est assez rare. Généralement, c'est quand même très doux.
- Speaker #1
Mais c'est génial parce qu'en fait, c'est pas... Je trouve que tu as vraiment transposé Vipassana, qui n'est quand même pas pour tout le monde et qui est dur, en fait, ce que tu disais, à notre vie d'aujourd'hui. Donc, en fait, les gens qui viennent chez toi ne sont pas des gens, des fous de yoga ou des gens déjà très entraînés spirituellement, qui déjà méditent, etc. C'est vraiment n'importe qui peut venir tenter l'expérience chez toi aujourd'hui.
- Speaker #0
Il y a vraiment de tout. Ce que je cherche à créer aussi, c'est une expérience de simplicité, quelque chose de... de démocratiser ces pratiques-là, puisque moi, je vais chercher mon inspiration dans des choses qui sont parfois complexes et pointues, et vraiment de venir... simplifier tout ça parce que ça devrait vraiment être accessible à tous. Je dis toujours que le silence est une ressource qui nous appartient à tous. Donc oui, il y a des personnes qui sont vraiment très débutantes. C'est ça qui est beau, c'est que par la simplicité, je pense, des messages que j'emploie pour parler de cette expérience-là, on peut venir chercher des personnes qui ne se sentent pas, par exemple, attirées par des concepts complexes de yoga, de certaines cultures, etc., de venir juste sur le silence, la santé, le bonheur, c'est des choses très abordables. Donc, il y a des beginners qui font leur premier pas avec silence. Il y a aussi des personnes qui sont très expérimentées, des personnes plus ou moins expérimentées, mais ce que je retrouve beaucoup, et ça, c'est vrai que je le vois comme une grande chance, de pouvoir réaccompagner des personnes qui sont un petit peu perdues. parce que dans ce charabia spirituel qui explose sur les réseaux sociaux, il y a beaucoup de réappropriation culturelle, il y a beaucoup de gourous, il y a beaucoup de mots. C'est vrai qu'il y a de quoi se perdre dans toute cette matière. Et on peut être perdu aussi sous des masques, des apparences de personnes qui savent gérer les mots. Le mot manipulation est peut-être un peu fort, mais c'est vrai qu'on peut quand même trouver... Je trouve qu'il y a pas mal d'autoproclamations. de gourous qui ne sont pas forcément à leur place. Et il y a des gens qui se laissent avoir aussi parce que quand on commence à chercher un petit peu, à vouloir explorer ce milieu spirituel, c'est parce que souvent, c'est après un événement où on est en quête de sens, où on peut être un peu bousculé par la vie, un peu perdu. Il y a une certaine vulnérabilité aussi de vouloir aller à cette rencontre-là. Et je trouve qu'il y a de quoi se perdre aujourd'hui avec tout ce qui existe. C'est vrai qu'il y a six ans, quand j'ai commencé avec Silence, il y avait beaucoup moins de contenu par rapport à ça. Et aujourd'hui, c'est une grosse pizza.
- Speaker #1
Oui, c'est compliqué. Non, mais tu as carrément raison. Et c'est pour ça que moi aussi, je suis contente de donner la parole à des gens comme toi qui sont professionnels du voyage intérieur et qui ont les pieds sur terre en même temps. Je trouve que c'est quand même super important. Et j'ai une dernière question pour toi. Est-ce que je viens avec mon amoureux ou pas faire Silence ? Ou est-ce qu'on vient tout seul ?
- Speaker #0
Ça, c'est vraiment très beau, les couples qui viennent ensemble. Mais même les duos, que ce soit mère-fille, amis, mais les amoureux, bien sûr. Il y a comme une re-rencontre dans le silence. Alors bien sûr, c'est un peu plus challengeant si tu viens avec quelqu'un, puisque on se connaît, donc on est habitué à parler. Et c'est beaucoup plus dur qu'avec un groupe d'inconnus. Mais la plupart des gens jouent le jeu et en fait, ils se redécouvrent, ils se redévoilent et ils s'observent aussi avec plus de recul. Et c'est très beau. Dans la dernière retraite, j'avais deux couples. Et j'avais aussi un couple de deux meilleures amies qui étaient là. Et en fait, ils ont été émerveillés de se voir, mais avec la distance. De se voir évoluer. Ça donne une autre perspective qui est très belle. Et après, je ne suis pas dans leur intimité. Mais je pense aussi que se redécouvrir dans l'intimité, en silence, c'est quelque chose de très beau pour les couples. J'ai aussi... eu la sensation que certains retombaient en amour d'une autre manière.
- Speaker #1
On dort ensemble si on vient à deux ou pas ?
- Speaker #0
Alors, c'est des lits séparés. Les lits séparés, mais oui, ils peuvent partager les jambes. Et il y a aussi, là, j'avais un couple qui ont pris chacun une chambre pour vraiment pas être ensemble. Oui, c'est assez libre. C'est assez libre, les hommes et les femmes peuvent cohabiter, il n'y a pas de problème.
- Speaker #1
Bon, trop bien. Je vais directement prendre des places. Franchement, j'ai trop envie de venir. Merci beaucoup. C'était extra, j'ai appris plein de trucs. Et longue vie à Silence, parce que c'est vraiment génial ce que vous faites. Merci beaucoup.
- Speaker #0
Merci, sois la bienvenue.
- Speaker #1
C'est la fin. Merci mille fois de nous avoir écoutés jusqu'au bout. J'espère que vous aussi, vous avez voyagé. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à nous laisser 5 étoiles sur Apple Podcasts et un petit commentaire. On attend avec impatience vos retours et vos impressions. Et si vous aussi, vous avez envie de nous raconter un extraordinaire voyage ou une aventure au bout de votre rue, envoyez-nous un petit message sur Instagram. À très vite, merci et à bientôt !