Speaker #0Coucou tout le monde, c'est Xulia. Je vous souhaite la bienvenue dans Carpediem. Aujourd'hui, c'est au tour du deuxième épisode de la série de l'été. Pour rappel, il s'agit d'une série rassemblant les célèbres huit contes en prose de Charles Perrault, paru en 1697 dans un recueil intitulé Les Contes de la Mère de l'Oye. Le conte du jour parle d'un sommeil qui dura cent ans. Vous l'aurez deviné, il s'agit bel et bien de La Belle au Bois dormant. Ce célèbre conte a maintes fois été adapté au cinéma. Mais connaissez-vous la vraie fin que Charles Perrault avait imaginée pour ce conte ? J'ai moi-même été surprise en me replongeant dans le récit de La princesse endormie. En effet, malgré ce que beaucoup croient, le réveil de la princesse ne conclut pas le conte. Je vous laisse donc avec la suite pour découvrir ou redécouvrir l'histoire de la belle au bois dormant. Bonne écoute ! Il était une fois un roi et une reine qui étaient si fâchés de n'avoir point d'enfant, si fâchés qu'on ne saurait dire. Ils allèrent à toutes les eaux du monde. Vœux, pèlerinages, menus dévotions, tout fut mis en œuvre et rien n'y faisait. Enfin pourtant, la reine devint grosse et accoucha d'une fille. On fit un beau baptême. On donna pour ma reine, la petite princesse, toutes les fées qu'on put trouver dans le pays. Il s'en trouva sept, afin que chacune d'elles lui faisant un don comme c'était la cour. des fées en ce temps-là, la princesse eut par ce moyen toutes les perfections imaginables. Après les cérémonies du baptême, toute la compagnie revint au palais du roi où il y avait un grand festin pour les fées. On mit devant chacune d'elles un couvert magnifique avec un étui d'or massif où il y avait une cuillère, une fourchette et un couteau de fin or garni de diamants et de rubis. Mais comme chacune prenait sa place à table, on vit entrer une vieille fée qu'on la vit. point prier, parce qu'il y avait plus de cinquante ans qu'elle n'était sortie d'une tour et qu'on la croyait morte ou enchantée. Le roi lui fit donner un couvert, mais il n'y eut pas moyen de lui donner un étui d'or comme aux autres, parce que l'on n'en avait fait faire que sept pour les sept fées. La vieille crut qu'on la méprisait et grommela quelques menaces entre ses dents. Une des jeunes fées qui se trouva auprès d'elle l'entendit et jugeant qu'elle pourrait donner quelques fâcheux dons à la petite princesse, Aladée, qu'on fut sortie de table, se cachait derrière la tapisserie afin de parler la dernière et de pouvoir réparer autant qu'il lui serait possible le mal que la vieille aurait fait. Cependant, les fées commencèrent à faire leurs dons à la princesse. La plus jeune lui donna pour don qu'elle serait la plus belle personne du monde, celle d'après qu'elle aurait de l'esprit comme un ange. La troisième, qu'elle aurait une grâce admirable à tout ce qu'elle ferait. La quatrième, qu'elle danserait parfaitement bien. La cinquième, qu'elle chanterait comme un rossignol. Et la sixième, qu'elle jouerait de toutes sortes d'instruments dans la dernière perfection. Le rang de la vieille fée étant venu, elle dit en branlant la tête encore plus de dépit que de vieillesse que la princesse se percerait la main d'un fuseau et qu'elle en mourrait. Ce terrible don fit frémir toute la compagnie, et il n'y eut personne qui ne pleurât. Dans ce moment, la jeune fée sortit de derrière la tapisserie et dit tout haut ces paroles. Rassurez-vous, roi et reine, votre fille n'en mourra pas. Il est vrai que je n'ai pas assez de puissance pour défaire entièrement ce que mon ancienne a fait. La princesse se percera à la main d'un fuseau. Mais au lieu d'en mourir, elle tombera seulement dans un profond sommeil qui durera cent ans, au bout desquels le fils d'un roi viendra la réveiller. Le roi, pour tâcher d'éviter le malheur annoncé par la vieille, fit publier aussitôt un édit par lequel il défendait à toutes personnes de filer au fuseau, ni d'avoir des fuseaux chez soi, sur peine de la vie. Au bout de quinze ou seize ans, le roi et la reine étant allés à une de leurs maisons de plaisance, il arriva que la jeune princesse, courant un jour dans le château et montant de chambre en chambre, alla jusqu'au haut d'un donjon dans un petit galeta où une bonne vieille était seule à filer sa quenouille. Cette bonne femme n'avait point ouï parler des défenses que le roi avait faites de filer au fuseau. Que faites-vous là, ma bonne femme ? dit la princesse. Je file, ma belle enfant, lui répondit la vieille qui ne la connaissait pas. Ah ! que cela est joli ! reprit la princesse. Comment faites-vous ? Donnez-moi que je vois si j'en ferai bien autant. Elle n'eut pas plutôt pris le fuseau que comme elle était fort vive, un peu étourdie, et que d'ailleurs l'arrêt des fées l'ordonnait ainsi, elle s'en perça la main et tomba évanouie. La bonne vieille, bien embarrassée, crie au secours. On vient de tous côtés, on jette de l'eau au visage de la princesse, on la délace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l'eau de la reine de Hongrie. Mais rien ne la faisait revenir. Alors le roi, qui était monté au bruit, se souvint de la prédiction des faits, et jugeant bien qu'il fallait que cela arriva, puisque les faits l'avaient dit, fit mettre la princesse dans le plus bel appartement du palais, sur un lit en broderie d'or et d'argent. On eût dit un ange, tant elle était belle, car son évanouissement n'avait pas ôté les couleurs vives de son teint, ses joues étaient incarnates et ses lèvres comme du corail. Elle avait seulement les yeux fermés, mais on l'entendait respirer doucement, ce qui faisait voir qu'elle n'était pas morte. Le roi ordonna qu'on la laissa dormir en repos, jusqu'à ce que son heure de se réveiller fût venue. La bonne fée qui lui avait sauvé la vie en la condamnant à dormir cent ans était dans le royaume de Matakhin, à douze mille lieues de là lorsque l'accident arriva à la princesse. Mais elle en fut avertie en un instant par un petit nain qui avait des bottes de sept lieues. C'était des bottes avec lesquelles on faisait sept lieues d'une seule enjambée. La fée partit aussitôt, et on la vit, au bout d'une heure, arriver dans un chariot tout de feu, traîné par des dragons. Le roi alla lui présenter la main à la descente du chariot. Elle approuva tout ce qu'il avait fait, mais comme elle était grandement prévoyante, elle pensa que quand la princesse viendrait à se réveiller, elle serait bien embarrassée toute seule dans ce vieux château : voici ce qu'elle fit. Elle toucha de sa baguette tout ce qui était dans ce château (hors le roi et la reine) : gouvernantes, filles d'honneur, femmes de chambre, gentilhommes, officiers, maîtres d'hôtel, cuisiniers, marmitons, galopins, gardes, suisses, pages, valets de pieds. Elle toucha aussi tous les chevaux qui étaient dans les écuries, avec les palefreniers, les gros mâtins de basse-cour, et la petite Pouffe, petite chienne de la princesse, qui était auprès d'elle sur son lit. Dès qu'elle les eut touchés, ils s'endormirent tous, pour ne se réveiller qu'en même temps que leur maîtresse, afin d'être tout prêts à la servir quand elle en aurait besoin. Les broches même, qui étaient au feu, toutes pleines de perdrix et de faisans sans dormir et le feu aussi. Tout cela se fit en un moment, les fées n'étaient pas longues à leurs besognes. Alors, le roi et la reine, après avoir baisé leur chère enfance en qu'elle s'éveilla, sortirent du château et firent publier des défenses à qui que ce soit d'en approcher. Ces défenses n'étaient pas nécessaires, car ils cruent dans un gardeur, tout autour du parc, une si grande quantité de grands arbres et de petits, de ronces et d'épines entrelacées les unes dans les autres, que bête ni homme n'y aurait pu passer, en sorte qu'on ne voyait plus que le haut des tours du château, encore n'était-ce que de bien loin. On ne doute à point que la fée n'eût fait là encore un tour de son métier, afin que la princesse, pendant qu'elle dormirait, n'eût rien à craindre des curieux. Au bout de cent ans, le fils du roi qui régnait alors, et qui était d'une autre famille que la princesse endormie, étant allé à la chasse de ce côté-là, demanda ce que c'était que les tours qu'il voyait au-dessus d'un grand bois fort épais. Chacun lui répondit selon qu'il avait tout y parler. Les uns disaient que c'était un vieux château où il revenait des esprits. Les autres, que tous les sorciers de la contrée, y faisaient leur sabbat. La plus commune opinion était qu'un ogre y demeurait et que là, il emportait tous les enfants qu'il pouvait attraper, pour les pouvoir manger à son aise et sans qu'on le pût suivre, ayant seul le pouvoir de se faire un passage au travers du bois. Le prince ne savait qu'en croire, lorsqu'un vieux paysan prit la parole et lui dit : Mon prince ! Il y a plus de cinquante ans que j'ai ouï dire à mon père qu'il y avait dans ce château une princesse, la plus belle du monde, qu'elle y devait dormir cent ans et qu'elle serait réveillée par le fils d'un roi à qui elle était réservée. Le jeune prince à ce discours se sentit tout de feu. Il crut sans balancer qu'il mettrait fin à une si belle aventure et poussé par l'amour et par la gloire, il résolut de voir sur le champ ce qui en était. À peine s'avança-t-il vers le bois, que tous ces grands arbres, ces ronces et ces épines s'écartèrent d'elles-mêmes pour le laisser passer. Il marcha vers le château, qu'il voyait au bout d'une grande avenue où il entra. Et, ce qui le surprit un peu, il vit que personne de ces gens ne l'avait pu suivre parce que les arbres s'étaient rapprochés dès qu'il avait été passé. Il ne laissa pas de continuer son chemin. Un prince jeune et amoureux et toujours vaillant. Il entra dans une grande avant-cour où tout ce qu'il vit d'abord était capable de le glacer de crainte. C'était un silence. Affreux ! L'image de la mort s'y présentait partout, et ce n'étaient que des corps étendus d'hommes et d'animaux qui paraissaient morts. Ils reconnus pourtant bien au nez bourgeonné et à la face vermeille des Suisses qu'ils n'étaient qu'endormis, et leur tasse où il y avait encore quelques gouttes de vin montrait assez qu'ils s'étaient endormis en buvant. Il passe une grande cour pavée de marbre, il monte l'escalier, il entre dans la salle des gardes qui étaient rangées en haie, la carabine sur l'épaule et ronflant de leur mieux. Il traverse plusieurs chambres pleines de gentilhommes et de dames, dormant tous, les uns debout, les autres assis. Il entre dans une chambre toute dorée et il voit sur un lit dont les rideaux étaient ouverts de tous côtés, le plus beau spectacle qu'il eût jamais vu, une princesse qui paraissait avoir quinze ou seize ans, et dont l'éclat resplendissant avait quelque chose de lumineux et de divin. Il s'approcha en tremblant et en admirant, et se mit à genoux auprès d'elle. Alors, comme la fin de l'enchantement était venue, la princesse s'éveilla, et le regardant avec des yeux plus tendres qu'une première vue ne semblait le permettre, Est-ce vous mon prince ? lui dit-elle. Vous vous êtes bien fait attendre ? Le prince, charmé de ses paroles, et plus encore de la manière dont elles étaient dites, ne savait comment lui témoigner sa joie et sa reconnaissance. Il l'assura qu'il l'aimait plus que lui-même. Ses discours furent mal rangés, ils en plurent davantage. Peu d'éloquence, beaucoup d'amour. Il était plus embarrassé qu'elle, et l'on ne doit pas s'en étonner, elle avait eu le temps de songer à ce qu'elle aurait à lui dire, car il y a apparence, l'histoire n'en dit pourtant rien, que la bonne fée, pendant un si long sommeil, lui avait procuré le plaisir des songes agréables. Enfin, il y avait quatre heures qu'ils se parlaient, et ils ne s'étaient pas encore dit la moitié des choses qu'ils avaient à se dire. Cependant, tout le palais s'était réveillé avec la princesse, chacun songeait à faire sa charge, et comme ils n'étaient pas tous amoureux, Il mourait de faim. La dame d'honneur, pressée comme les autres, s'impatienta et dit tout au à la princesse que la viande était servie. Le prince aida la princesse à se lever. Elle était toute habillée et fort magnifiquement. Mais il se garda bien de lui dire qu'elle était habillée comme ma mère grand et qu'elle avait un collet monté. Elle n'en était pas moins belle. Ils passèrent dans un salon de miroir et y soupèrent, servis par les officiers de la princesse. Les violons et les hautsbois jouèrent de vieilles pièces, mais excellentes. Quoiqu'il y eut près de cent ans qu'on ne les joua plus, et après souper sans perdre de temps, le grand aumônier les maria dans la chapelle du château, et la dame d'honneur leur tira le rideau. Ils dormirent peu, la princesse n'en avait pas grand besoin, et le prince la quitta dès le matin pour retourner à la ville où son père devait être en peine de lui. Le prince lui dit qu'en chassant, il s'était perdu dans la forêt et qu'il avait couché dans la hutte d'un charbonnier qui lui avait fait manger du pain noir et du fromage. Le roi son père, qui était un bonhomme, le crut, mais sa mère n'en fut pas bien persuadée, et voyant qu'il allait presque tous les jours à la chasse et qu'il avait toujours une raison en main pour s'excuser quand il avait couché deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu'il n'eût quelque amourette, car il vécut avec la princesse plus de deux ans entiers. et en eut deux enfants, dont le premier, qui fut une fille, fut nommé l'Aurore, et le second un fils qu'on nomma le Jour, parce qu'il paraissait encore plus beau que sa sœur. La reine dit plusieurs fois à son fils pour le faire expliquer qu'il fallait se contenter dans la vie, mais il n'osa jamais se fier à elle de son secret. Il la craignait, quoiqu'il l'aima, car elle était de race aux Grèces, et le roi ne l'avait épousée qu'à cause de ses grands biens. On disait même tout bas à la cour, qu'elle avait les inclinations des ogres et qu'en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde à se retenir de se jeter sur eux. Ainsi le prince ne voulut jamais rien dire. Mais quand le roi fut mort, ce qui arriva au bout de deux ans, et qu'il se vit le maître, il déclara publiquement son mariage et alla en grande cérémonie guérir la reine sa femme dans son château. On lui fit une entrée magnifique dans la ville capitale où elle entra au milieu de ses deux enfants. Quelques temps après, le roi alla faire la guerre à l'empereur quant à la butte son voisin. Il laissa la régence du royaume à la reine sa mère et lui recommanda fort sa femme et ses enfants. Il devait être à la guerre tout l'été et dès qu'il fut parti, la reine mère envoya sa brue et ses enfants à une maison de campagne dans les bois pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie. Elle y alla quelques jours après et dit un soir à son maître d'hôtel Je veux manger demain à mon dîner la petite Aurore. Oh, madame, dit le maître d'hôtel, je le veux, dit la reine, et elle le dit d'un ton d'ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche. Et je la veux manger à la sauce Robert. Ce pauvre homme, voyant bien qu'il ne fallait pas se jouer à une ogresse, prit son grand couteau et monta à la chambre de la petite aurore. Elle avait pour l'or quatre ans et vint en sautant et en riant se jeter à son cou et lui demander du bonbon. Il se mit à pleurer. Le couteau lui tomba des mains et il alla dans la basse-cour couper la gorge à un petit agneau et lui fit une si bonne sauce que sa maîtresse l'assura qu'elle n'avait jamais rien mangé de si bon. Il avait emporté en même temps la petite aurore et l'avait donnée à sa femme pour la cacher dans le logement qu'elle avait au fond de la basse-cour. Huit jours après, la méchante reine dit à son maître d'hôtel Je veux manger à mon souper le petit Jour. Il ne répliqua pas, résolu de la tromper comme l'autre fois. Il alla chercher le petit Jour et le trouva avec un petit fleuret à la main dont il faisait des armes avec un gros singe. Il n'avait pourtant que trois ans. Il le porta à sa femme qui le cacha avec la petite Aurore et donna à la place du petit Jour un petit chevraud fort tendre que le grès trouva admirablement bon. Cela était fort bien allé jusque-là. Mais un soir, cette méchante reine dit au maître d'hôtel, Je veux manger la reine à la même sauce que ses enfants. Ce fut alors que le pauvre maître d'hôtel désespéra de la pouvoir encore tromper. La jeune reine avait vingt ans passé, sans compter les cent ans qu'elle avait dormi. Sa peau était un peu dure, quoique belle et blanche. Et le moyen de trouver dans la ménagerie une bête aussi dure que cela ? Il prit la résolution, pour sauver sa vie, de couper la gorge à la reine et monta dans sa chambre dans l'intention de n'en pas faire à deux fois. Il s'excitait à la fureur, entra, le poignard à la main, dans la chambre de la jeune reine. Il ne voulut pourtant point la surprendre et il lui dit avec beaucoup de respect l'ordre qu'il avait reçu de la reine mère. Faites votre devoir, lui dit-elle en lui tendant le cou, exécutez l'ordre qu'on vous a donné, j'irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants que j'ai tant aimés, car elle les croyait morts depuis qu'on les avait enlevés sans lui rien dire. Non, non, madame, lui répondit le pauvre maître d'hôtel tout attendri, vous ne mourrez point et vous ne laisserez pas d'aller revoir vos enfants, mais ce sera chez moi où je les ai cachés, et je tromperai encore la reine en lui faisant manger une jeune biche en votre place. Il l'amena aussitôt à sa chambre, où la laissant embrasser ses enfants et pleurer avec eux, il alla accommoder une biche que la reine mangea à son souper, avec le même appétit que si c'eût été la jeune reine. Elle était bien contente de sa cruauté, et elle se préparait à dire au roi, à son retour, que les loups enragés avaient mangé la reine, sa femme et ses deux enfants. Un soir qu'elle rôdait à son ordinaire dans les cours et basses cours du château pour y halener quelque viande fraîche, elle entendit dans une salle le petit Jour qui pleurait parce que la reine, sa mère, le voulait faire fouetter à cause qu'il avait été méchant. Et elle entendit aussi la petite Aurore qui demandait pardon pour son frère. L'ogresse reconnut la voix de la reine et de ses enfants et, furieuse d'avoir été trompée, elle commanda dès le lendemain matin avec une voix épouvantable qui faisait trembler tout le monde qu'on apporta au milieu de la cour une grande cuve qu'elle fit remplir de vipères, de crapauds, de couleuvres et de serpents pour y faire jeter la reine et ses enfants, le maître d'hôtel, sa femme et sa servante. Elle avait donné l'ordre de les amener les mains liées derrière le dos. Ils étaient là, et les bourreaux se préparaient à les jeter dans la cuve, lorsque le roi, qu'on n'attendait pas si tôt, entra dans la cour à cheval. Il était venu en poste, et demanda tout étonné ce que voulait dire cet horrible spectacle. Personne n'osait l'en instruire, quand l'ogresse, enragée de voir ce qu'elle voyait, se jeta elle-même, la tête la première dans la cuve, et fut dévorée, en un instant, par les vilaines bêtes qu'elle y avait fait mettre. Le roi ne laissa pas d'en être fâché, elle était sa mère, mais il s'en consola bientôt avec sa belle-femme et ses enfants. Et voilà, nous arrivons à la fin de cet épisode, mais avant de terminer, nous conclurons avec la moralité du conte. Attendre quelques temps pour avoir un époux, riche, bien fait, galant et doux, la chose est assez naturelle. Mais l'attendre cent ans et toujours en dormant, on ne trouve plus de femelle qui dormit si tranquillement. La fable semble encore vouloir nous faire entendre que souvent de l'hymen, les agréables nœuds, pour être différés n'en sont pas moins heureux et qu'on ne perd rien pour attendre. Mais le sexe avec tant d'ardeur aspire à la foi conjugale que je n'ai pas la force ni le cœur. de lui prêcher cette morale. Comme toutes les moralités des contes de Charles Perrault, chacune a plusieurs manières d'être interprétée. Ici, on comprend que la patience est une vertu qui se perd. Si vous étiez sûr qu'en patientant quelques temps, vous trouveriez la personne idéale, seriez-vous prêt à le faire ? Perrault affirme dans la moralité que la chose est assez naturelle. Cependant, il nuance son propos en disant qu'il n'est plus personne qui soit prête à attendre 100 ans dans cet objectif-là. Selon Charles Perrault, Un mariage qui s'est fait attendre n'a pas moins de chances d'être heureux qu'un autre. Pourtant, il souligne à la fin de sa fable que les femmes de son époque désirant fortement se marier, il n'a pas l'énergie de leur prêcher cette morale. Dans un autre temps, bien que la moralité prône la patience, le comte ne reflète-t-il plutôt pas un certain empressement de la part de la princesse ? Par exemple, lorsqu'elle prend le fuseau, Perrault ne la décrit-il pas comme étant fort vive et un peu étourdie ? Pour terminer, contrairement à d'autres versions de ce conte comme dans celle des frères Grimm, le conte se divise en deux parties. La première, pour laquelle la moralité s'applique, a pour protagoniste la princesse, tandis que la deuxième a pour protagoniste l'ogresse, soit la mère du prince. Autre bizarrerie, La Belle au bois dormant est un conte qui sort un peu du lot de par sa structure narrative, car il y a un changement de personnage principal au cours du récit. Comme je vous le disais, l'histoire soulève d'autres questions et nous mène à réfléchir aux liens entre la moralité et le récit. Mais peut-être était cela le but de ce conte, nous faire réfléchir, nous, en tant que lecteurs. Qu'en pensez-vous ? Quel message vous suggère ce conte ? Si vous voulez en apprendre plus, je vous ai ajouté un article que j'ai trouvé pertinent sur les contradictions dans La Belle au bois dormant. Nous arrivons à la fin de cet épisode, j'espère que cela vous aura plu. Nous nous retrouverons bientôt pour un prochain conte de Charles Perrault. C'était Carpediem et vous avez écouté Xulia. Bye !