- Speaker #0
Bonjour à tous et bienvenue dans ce deuxième épisode de Club Tisane. Qu'est-ce que je suis contente de faire ce deuxième épisode. Aujourd'hui, on est dans une nouvelle résidence. On est dans la résidence Océane à Paris, dans le 19e arrondissement. Et regardez qui j'ai avec moi autour de cette table. Qui j'ai avec moi, et c'est plutôt où je suis, puisque je me suis un petit peu incrustée chez vous, finalement, aujourd'hui. On est très très très heureux d'être accompagnés aujourd'hui par deux magnifiques personnes. On a... Raymond et Marie-Jo. On peut les applaudir.
- Speaker #1
Bienvenue à Marie-Jo.
- Speaker #0
Et vous avez du public, parce que vous ne voyez pas vous, ici à la maison, peut-être que vous nous regardez en podcast, enfin, que vous nous écoutez, pardon, en podcast audio sur Amazon, Apple Podcast, qu'importe, ou peut-être que vous nous regardez sur YouTube, mais vous ne voyez pas tout ce public qu'il y a derrière, et croyez-moi, il y a pas mal de résidents qui sont là pour admirer ce podcast. Alors, on a donc, comme je vous disais, on a Raymond et on a Marie-Jo qui sont avec nous aujourd'hui, mais pas que ! Puisqu'on a aussi quelqu'un qui ne fait pas du tout partie de la résidence.
- Speaker #2
Ou alors, je ne suis pas au courant.
- Speaker #0
Toi, tu n'es pas encore à la résidence.
- Speaker #2
Pas encore, mais je vais peut-être louer une chambre pour la nuit si ça se passe bien.
- Speaker #0
Parce que c'est quand même bien sympa. On est arrivé depuis une heure, on se marre, on est très bien accueillis et on a hâte de vous présenter nos invités du jour. Raymond Desmarijoux, merci d'avoir accepté notre invitation d'être avec nous aujourd'hui. Pourquoi vous avez accepté de faire partie de ce podcast ? Pourquoi vous avez dit oui ?
- Speaker #3
Tout simplement parce que pour moi, c'était une aventure. possible, je ne connaissais pas le milieu de la télévision et j'avais très envie de participer à une audition.
- Speaker #0
C'est génial !
- Speaker #1
Et moi, tout simplement parce qu'on est rentré dans ma chambre, j'ai vu arriver notre directrice que je respecte infiniment et puis deux autres personnes, je crois. Ils m'ont demandé sans explication comme ça, est-ce que vous accepteriez ? Et j'ai dit oui, et à ce moment-là, elles sont reparties. Et c'est là que j'ai vu arriver deux beaux jeunes gens.
- Speaker #0
Deux beaux garçons.
- Speaker #1
Deux beaux garçons,
- Speaker #0
voilà. Voilà, vous saviez que vous aviez fait le bon choix.
- Speaker #1
Donc, je me suis dit maintenant, mais depuis, je ne savais pas du tout ce qui allait se passer. J'ai la surprise, mais pourquoi pas ?
- Speaker #0
Bien sûr, des belles expériences, même à votre âge. On va en discuter, on va pouvoir discuter. On va discuter de plein de sujets avec vous aujourd'hui, de votre vie aujourd'hui, mais aussi de ce que vous avez vécu. de votre vie professionnelle, de la résidence, de ce que vous aimiez faire, de ce que vous aimez faire aujourd'hui. Et on va aussi comparer avec notre génération, puisqu'on est de la même génération avec Flo. On a une trentaine d'années, on en a un petit peu plus, mais on a une trentaine d'années, on va dire, tous les deux.
- Speaker #1
Je pourrais être mes petits-enfants. Oui. Mes petits-enfants. Parce que moi, mes enfants ont 57 ans.
- Speaker #0
Ah ouais, ma maman a une soixantaine d'années. Donc oui, effectivement, je pourrais être votre petite fille. Moi, je n'ai plus de grands-parents. J'ai malheureusement plus de grands-parents. Donc, c'est toujours très émouvant pour moi de pouvoir échanger dans ces épisodes de Club Tizane. Ça me rappelle des moments passés avec mes grands-parents que j'ai fondamentalement adorés. Je garde des souvenirs merveilleux et très, très précieux. Donc, je suis très heureuse aujourd'hui et je risque d'être très émue. aussi, je vous le dis, je suis très sensible. C'est pas grave. Je préfère vous le dire tout de suite. Alors, est-ce qu'on peut démarrer par comment ça se passe la vie aujourd'hui ? Comment ça se passe votre vie aujourd'hui dans cette résidence ? Ça ressemble à quoi vos journées ?
- Speaker #3
Moi, je suis quand même relativement récente à la résidence Océane, puisque je suis arrivée en octobre 2024, début octobre 2024.
- Speaker #0
Donc, ça ne fait même pas un an que vous êtes là ?
- Speaker #3
Non, et c'est un choix personnel. Étant donné que je me retrouvais toute seule à mon domicile, un appartement certes très agréable, dans le cinquième arrondissement de Paris, non loin de la mosquée du Panthéon. Mais je m'y trouvais trop seule. J'ai des enfants, il y en a un qui est dans le sud-ouest. Ma fille est sur Paris, mais a un job très prenant. Donc je ne voyais pratiquement personne, sauf pour les courses. Il y en avait qui me faisaient, enfin ma fille me faisait les courses en fin de semaine. Donc je me suis dit pourquoi pas. Et j'avais des souvenirs dans cet appartement, des souvenirs trop douloureux. D'accord. Mon mari avait été très malade. Je suis veuve, c'est sous-entendu. Et j'avais perdu ma dernière fille dans cet appartement, donc de maladie. Donc j'ai voulu le quitter. Il y avait trop de souvenirs. Vous aviez le souvenir,
- Speaker #0
toi.
- Speaker #3
Oui. Et puis je me suis dit pourquoi pas, je me lance. Ce n'était pas mon truc, en fait, l'EHPAD, pas du tout. Mais quand je suis arrivée, je me sentais un petit peu perdue. Et au fur et à mesure... J'ai fait un petit peu, j'ai constaté qu'il y avait beaucoup d'activités sportives et beaucoup d'activités culturelles et d'autres animations qui sont faites aussi par Madame la psychologue.
- Speaker #0
Est-ce que vous avez trouvé de la compagnie ici ? Oui,
- Speaker #3
alors pas les premiers temps, mais je dois dire que j'ai eu, si je puis dire, un petit coup de foudre pour une résidente qui est ici, c'est Madame le Bastard, Andrea.
- Speaker #0
Ah bah oui, ça s'applaudit !
- Speaker #3
Une personne charmante, simple, qui est à l'écoute, et malgré son âge, tout le monde avance en âge, j'ai trouvé beaucoup de sincérité. Alors maintenant, il y en a d'autres. Il y a surtout Raymond, Mme Raymond Pannier. J'apprécie beaucoup pour son intelligence et sa culture.
- Speaker #2
C'est une belle présentation. C'est beau !
- Speaker #0
C'est très beau, c'est très beau de dire ça. Alors justement, vous, Raymond, vous êtes là depuis combien de temps ? Marie-Jo est là depuis à peu près, on va dire, 6-8 mois.
- Speaker #1
Moi, je suis arrivée du mois de septembre.
- Speaker #3
Ah,
- Speaker #1
vous êtes arrivée ensemble. Je suis arrivée le 13 septembre, moi.
- Speaker #0
D'accord. Et vous êtes arrivée dans quelles circonstances ?
- Speaker #1
Pour moi, horrible. Je quittais en 4 jours la maison dans laquelle je suis née et que je n'avais pas quitté. Waouh. Oui. Waouh.
- Speaker #0
Beaucoup d'émotions, j'imagine.
- Speaker #1
Beaucoup d'émotions. Mais mes enfants étant en province, ma fille en Bretagne et mon fils dans le sud, j'étais tombée deux fois en huit jours. Je n'avais rien de cassé. Donc c'était miraculeux. Ils se sont déplacés, ils ont vu la chambre ici. Ils m'ont dit « Maman, c'est là que tu vas » . Oui, mes enfants. J'ai tout laissé, vous m'entendez ? Mes bagues, tout. J'adorais les bagues, je ne sais même pas où je les ai mises. Et j'en suis là. Et ici, je suis arrivée, j'étais...
- Speaker #0
tellement las moralement que pendant au moins trois mois je suis restée dans ma chambre sans rien faire sans rien dire et sans lire alors que je sais puisque j'ai eu l'occasion de parler avec vous juste avant le début de l'enregistrement du podcast que la lecture c'est très important pour vous donc ça veut dire beaucoup au but au bout de trois mois un beau jour j'ai
- Speaker #1
commencé à prendre un livre et puis j'ai recommencé à lire et alors là maintenant que je suis seul dans ma chambre et que je fais ce que je veux. Je passe mes journées à lire. L'autre jour, j'ai lu un bouquin dans la journée.
- Speaker #0
Ah, c'est fou ! Ah oui, quand même ! Oui, oui. Je crois que Flo, il met plusieurs mois, non ?
- Speaker #2
Moi, oui. Parfois, je ne lis pas pendant une semaine, moi. Je ne me souviens pas, du coup, je relis le chapitre. Du coup,
- Speaker #3
tu n'apportes jamais.
- Speaker #0
Oui. Comme quoi, il faut savoir se laisser un petit peu de temps pour prendre des nouvelles marques. Comment vous vous sentez ?
- Speaker #3
Oui, aujourd'hui, oui, nettement mieux. Je fais quand même quatre fois par semaine du sport, comme je vous l'ai dit. Ça, ça va.
- Speaker #2
Et vous faites quoi du coup comme sport ?
- Speaker #3
De la gymnastique, renforcement musculaire des bras avec des haltères. J'en suis à 3 kg. Oui, il faut.
- Speaker #0
C'est génial.
- Speaker #3
Il faut. Renforcement musculaire des jambes. Après, il y a l'équilibre, le parcours d'équilibre. Tout ça, c'est organisé par une professeure de gymnastique de prénom Nada. Je lui rends hommage aussi pour ses cours.
- Speaker #1
C'est quand même un milieu médicalisé, un milieu où on sait que quand on va là, Et je le répète devant toute l'Assemblée, je n'attends qu'une chose, que le bon Dieu m'appelle.
- Speaker #0
C'est vrai.
- Speaker #1
Il ne veut pas venir, il ne veut pas venir.
- Speaker #0
Non mais ça c'est intéressant, si on va en discuter, on peut bien sûr en parler de ce sujet-là, et vous avez le droit de ne pas forcément être d'accord. Nous j'espère qu'on en est bien sûr le plus loin possible. Mais vous avez quel rapport vous Raymond avec la mort ?
- Speaker #1
Si vous voulez, ce rapport, on était petits. On était à la campagne, donc les morts c'était très loin, il fallait en avoir peur, vous savez, comme du fond d'un fantôme. Et la première mort que j'ai eue, c'était ma maman, qui est morte d'une crise cardiaque, elle avait 60 ans.
- Speaker #0
Et vous, vous aviez quel âge lorsque vous avez perdu votre mère ?
- Speaker #1
27 ans. Donc pour elle, pour moi si vous voulez, elle est morte la nuit à la maison, elle rentrait de l'hôpital, où les médecins nous avaient dit, elle ira bien, et elle est partie dans la nuit. pour nous c'était un choc terrible moi elle est morte en 62 je m'en suis jamais remise et j'ai toujours eu dans ma vie un coin triste de moi même qui était le coin de la perte de ma maman mais bien sûr et ça je le dis là en toute simplicité mais c'était exactement ça et c'est pour ça que quand je travaillais j'avais des moments de tristesse où je ne disais rien à personne nous on pensait que j'avais une chose et de la tête si vous voulez or c'était voilà J'arrête là.
- Speaker #0
Non, mais vous avez raison. C'est normal. Bien sûr, bien sûr. Est-ce qu'on arrive, pour être très transparente, moi j'ai perdu mon oncle que je considérais comme mon papa, il y a quelques mois, maintenant années, et on me dit souvent, est-ce que tu penses que tu as fait ton deuil ? Et en fait, j'ai du mal à comprendre cette phrase.
- Speaker #1
Le terme, il n'est pas bien.
- Speaker #0
On est d'accord. Alors, si je dois y répondre...
- Speaker #1
On ne fait pas son deuil de quelqu'un.
- Speaker #0
Est-ce que je crois qu'on n'arrive pas à faire le deuil de quelqu'un ?
- Speaker #3
Je suis tout à fait d'accord avec vous.
- Speaker #0
C'est vrai ? Qu'est-ce que vous en pensez, Marie-Jo ?
- Speaker #3
Moi, je ne demande pas à partir dans l'immédiat. Au contraire, j'ai trop peur, non pas de la mort, de la souffrance. Et c'est passé un peu à l'état obsessionnel chez moi. Je ne voudrais pas effectivement que ça arrive trop vite. Et surtout sans souffrance, j'ai vu mon mari souffrir, ça me suffit. Ma fille, ça me suffit amplement. Mes parents, enfin ma mère non, elle n'a pas souffert, mais bon, elle est décédée aussi. Mais moi, par rapport à la mort, j'essaie au contraire de me dire qu'il faut vivre et vivre le mieux possible. Qu'il faut avoir la volonté d'essayer de sortir de l'eau. Il n'y aurait pas eu d'activité, non, j'étais noyée.
- Speaker #0
C'est vrai que vous m'en avez parlé aussi, moi, juste avant qu'on démarre le tournage, vous me parliez des activités, mais parce que vous aussi, vous êtes en charge de certaines activités.
- Speaker #3
J'anime des réunions le dimanche. Et éventuellement, en semaine, quand il y a un pont, pour justement dire aux résidents, venez, il y a des choses qui se passent, qui se font. Et ne restez pas repliés sur vous-mêmes dans vos chambres. C'est pour ça que je vais chercher. Je vais la chercher parce qu'elle ne trouve personne. Je vais la chercher. Mais moi, je vais te dire quelque chose. Quand je vais te chercher, c'est avec tout mon cœur. Je sais. C'est comme si tu étais sans fauteuil pour moi. Je fais abstraction du fauteuil même si je le pousse. Et oui, parce que c'est une personne adorable comme tant d'autres. Donc pour faire une distinction, pourquoi la mettre de côté ? Certainement pas. Et ça c'est valable pour les personnes qui sont au fauteuil. Je le dis pour Michel et d'autres personnes. Voilà, j'ai beaucoup d'affection pour vous.
- Speaker #2
Justement, vous aimez bien dire ce que vous pensez. Vous nous avez dit la première fois qu'on s'est rencontrés que vous n'aimiez pas du tout le nom de l'émission, le Club Tizane.
- Speaker #3
Oui. Bon,
- Speaker #0
allez-y, videz votre sac. Alors,
- Speaker #3
si vous me le permettez, je vais quand même aborder ce petit sujet. Non,
- Speaker #0
on vous le permet. Même si nous, on adore ce nom Club Tizane, on est à deux doigts de se dire qu'on s'est confus. Alors,
- Speaker #3
Club Tizane, pour moi, je vais peut-être faire rire l'Assemblée. On imagine soit le petit pépé, soit la petite mémé dans son fauteuil à la maison. avec trois coussins dans le dos, un coussin sur les genoux, un mouchoir enrhumé, éternuant je ne sais combien de fois.
- Speaker #2
Mouchoir en tissu, bien sûr.
- Speaker #3
Et prenant une tisane. Ce n'est pas l'image suffisamment flatteuse pour la résidence Océane. La résidence Océane mérite beaucoup mieux.
- Speaker #0
C'est beau, c'est très beau. Oh, dis donc ! On était si fiers de notre nom, si fiers de notre logo. Regardez, on était si fiers de tout.
- Speaker #2
Là, il faudrait faire et imprimer les tasses. Non, mais écoutez !
- Speaker #1
Non, ce serait dommage.
- Speaker #2
Et alors, quel autre nom ?
- Speaker #3
Gourmand. Club Gourmand. Club Gourmand.
- Speaker #2
Ah oui.
- Speaker #0
Ok. Pourquoi est-ce qu'on est très gourmand dans les maisons de retrait ?
- Speaker #3
Écoutez, on a un goûter tous les après-midi. Ah,
- Speaker #0
ça j'adore. Je pourrais venir. Là, je serais bien à ma place. Bon, on a bien entendu en tout cas ce que vous pensez sur Club Tisane. On le prend. On va voir ce qu'on en fait. Oui, voilà. Bon, en tout cas, on le...
- Speaker #3
Je crois que c'est un peu tard maintenant pour changer.
- Speaker #1
Eh bien, si, on peut mettre Club Tisane et autres.
- Speaker #3
Alors,
- Speaker #0
pas mal. Enco.
- Speaker #1
Club Tisane Enco, voilà.
- Speaker #0
Bon, là, ça y est. Le monde est là. Club Tisane Enco, c'est parti. On va faire réimprimer des tasses. Moi, j'aimerais bien qu'on parle un petit peu de votre jeunesse.
- Speaker #3
Que vais-je pouvoir dire sans me noyer dans des détails qui n'ont pas d'importance ?
- Speaker #0
Vous avez grandi dans quel schéma familial ?
- Speaker #3
J'ai eu, effectivement... J'ai eu le bonheur d'être auprès de mes parents, donc j'ai mené une vie quand même particulièrement protégée. Ok. Oui. Donc peut-être d'ailleurs, peut-être même trop protégée.
- Speaker #0
Dans quel sens ? Pourquoi vous dites ça ?
- Speaker #3
C'est-à-dire que mon père ne supportait pas de me voir, évidemment par la suite, partir avec des amis en vacances. Donc je suis toujours partie avec ma famille. D'accord. Et ça m'a étouffée un peu.
- Speaker #0
Alors c'est vrai que nous, les générations d'aujourd'hui, on part.
- Speaker #3
beaucoup plus facilement. Je me suis vengée par la suite.
- Speaker #0
On a hâte d'en savoir plus. Raymond, de vos souvenirs d'enfance, qu'est-ce que vous en avez ?
- Speaker #1
Je suis née en janvier 1936. La guerre s'est déclarée en 1939. J'ai vécu une guerre avec... Un papa qui travaillait et qui gagnait trois fois rien, une maman qui était là avec six enfants, Villa Manin, où dans une maison où pour 55 mètres carrés, on était les parents plus cinq enfants. Et donc après la guerre, je me rappelle en 44, si en 44, je veux te dire un truc, je me rappelle très bien, c'est la libération de Paris, quand les cloches ont sonné partout et que moi du bas en bas de la villa, Alors que nos parents ne voulaient surtout pas qu'on sorte pour ne pas prendre un coup de revolver. Il y avait dans le boulevard Sérurier qui partait, il y avait les Allemands qui partaient d'un côté et les Américains qui arrivaient de l'autre. Et ça, ça m'est toujours resté.
- Speaker #0
Des événements traumatisants ?
- Speaker #3
Oui,
- Speaker #2
quand même. Vous avez des souvenirs un peu précis de juste des trois ans de guerre ? Parce que vous étiez jeune.
- Speaker #1
Oui, mais enfin... Quand en 1944, les Américains bombardaient la gare de triage de la chapelle, de la maison, par une fenêtre du premier étage, on voyait les avions qui arrivaient, avec les bombes qui bombardaient, qui tombaient sur la gare de triage. Et on s'était dit, d'ailleurs il y en a eu deux qui sont tombés, à côté de chez nous, à l'église.
- Speaker #0
C'est fou, on a du mal à se rendre compte quand même que ça s'est passé il n'y a pas si longtemps que ça. Oui, mais vous êtes encore là pour nous le raconter.
- Speaker #1
Absolument.
- Speaker #0
C'est dingue. À quel âge vous avez commencé à voyager ?
- Speaker #1
À voyager vraiment ? Oui. À 18 ans, quand j'ai eu des sous.
- Speaker #0
Et votre première destination, Raymond, vous êtes allé où ?
- Speaker #1
Je pense que je suis parti avec ma sœur aînée. Nous sommes partis chez des amis en Italie.
- Speaker #2
Et du coup, vous y êtes allé en train, en Italie ?
- Speaker #1
En Italie, absolument. Vous y allez en train ? Toute la nuit ? Trois jours ? Non.
- Speaker #2
Oh non.
- Speaker #1
Pour l'honneur de l'Italie, c'était... On partait le soir, donc on dormait toute la nuit. À l'époque, il y avait des trains couchettes. Oui. Des trains couchettes.
- Speaker #0
C'est encore aujourd'hui. C'est assez rare,
- Speaker #1
mais ça se remet. Voilà, mes premières vacances.
- Speaker #0
Est-ce qu'aujourd'hui, c'est un regret pour vous deux de ne peut-être pas avoir beaucoup voyagé, de ne pas avoir vu le monde ?
- Speaker #1
Oui, pour moi, c'est le seul. Vous aussi ? Moi, c'est le seul regret.
- Speaker #0
C'est un des regrets du monde ?
- Speaker #1
C'est presque le seul qui m'a fait regretter d'avoir l'âge plus jeune.
- Speaker #0
Le pays que vous auriez rêvé visiter ? S'il y en a un en particulier ? Ou une culture, peut-être ?
- Speaker #1
Non, n'importe quelle. D'accord.
- Speaker #0
Et vous, Marie-Jo ? À quel âge vous avez commencé à voyager ?
- Speaker #3
C'était avec mes parents. On allait souvent dans la forêt noire parce que c'était moins cher qu'en France, déjà. On commençait à l'époque.
- Speaker #2
C'est où la forêt noire ?
- Speaker #3
Comment ?
- Speaker #2
La forêt noire, c'est où ? Oh,
- Speaker #1
dis donc, la Géorgie !
- Speaker #3
La Géorgie !
- Speaker #1
La géographie !
- Speaker #3
En Allemagne !
- Speaker #2
J'allais le dire !
- Speaker #3
Vous avez, connaissez-vous Freudenstadt, Triber et d'autres localités ?
- Speaker #0
C'était moins cher de partir en France.
- Speaker #3
Ah oui, oui, nettement moins cher. Et les hôtels étaient beaucoup plus confortables.
- Speaker #2
Déjà, moi, je trouve que c'est impressionnant parce que déjà, vous êtes allé hors France. Moi, je sais que mon grand-père n'est jamais allé au-delà de la France. Il est allé dans le sud et tout ça, mais c'est tout. Il n'a pas visité plus que ça.
- Speaker #3
Moi, je suis allée aussi en Italie, à Florence. J'avais 20 ans. J'ai beaucoup aimé, beaucoup visité. J'aimerais d'ailleurs pouvoir y retourner, mais point d'interrogation.
- Speaker #0
Qu'est-ce qui vous en empêche aujourd'hui ?
- Speaker #3
L'aspect financier. D'accord. Donc, voilà. Mais bon, je suis allée aussi en Andalousie, à Grenade, la Lambra, visite de la Lambra. Ça, c'était avec mon mari. Donc, je suis allée en Belgique, en Suisse, en Allemagne, une partie de l'Allemagne, en Espagne, en Italie. Mais l'Italie, j'aimerais bien pouvoir... Je ne connais pas Rome. Je ne connais pas Venise.
- Speaker #0
Alors vous parliez de votre mari, vous avez rencontré votre mari, à quel âge ? Est-ce que c'était facile ?
- Speaker #3
Je me suis mariée à l'âge de 23 ans.
- Speaker #0
Ah ouais, c'est vrai que c'est jeune par rapport à nous aujourd'hui.
- Speaker #3
C'est trop jeune.
- Speaker #0
Ah vous pensez que c'est trop jeune ?
- Speaker #2
Oui. Ah mais ça c'est un bon débat ça.
- Speaker #0
Ouais c'est un très bon débat.
- Speaker #2
Parce que vous vous êtes rencontré à quel âge ?
- Speaker #3
On s'est rencontré peu de temps avant, ça a été un mariage vite fait bien fait.
- Speaker #2
C'est-à-dire ?
- Speaker #3
Vite fait, bien fait, parce que j'attendais un enfant.
- Speaker #2
Et du coup...
- Speaker #3
Oui, vis-à-vis de mon père, il fallait que je me marie. D'accord. Mon père, c'était un catholique, un fervent catholique. Mais je considère que si les jeunes, actuellement, se marient plus tard, c'est bien. Se marient ou pas, parce que le mariage... Bien sûr,
- Speaker #0
c'est plus obligatoire. Effectivement, ce n'est pas parce que...
- Speaker #3
C'est dépassé comme notion.
- Speaker #0
C'est en tant qu'enfant qu'on est obligé.
- Speaker #3
Oui, voilà, exactement. Moi, je suis très libérale, très tolérante. j'ai pas tabou. Non, je suis comme je suis et j'aime bien être comme je suis.
- Speaker #0
Bien sûr. Raymond, vous vous êtes marié aussi ?
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
À quel âge ?
- Speaker #1
28 ans.
- Speaker #0
Ah, donc ce qui était un peu tard à l'époque.
- Speaker #3
C'est mieux.
- Speaker #1
À l'époque de ma jeunesse... mes camarades d'école, puis après que j'ai côtoyé, allaient danser. Mais nous, on avait tellement soif de culture à la maison que nous, on allait à Connaissance du Monde.
- Speaker #2
C'est quoi Connaissance du Monde ?
- Speaker #1
C'était à l'époque. Maintenant, évidemment, vous avez des films qui passent tous les jours. Moi, je regarde 24 heures sur 24. À l'époque, c'était des explorateurs qui partaient, qui filmaient et qui arrivaient à... la salle pliède, ils faisaient une conférence avec ce qu'ils avaient vu, ce qu'ils filmaient. Donc ça s'appelait connaissance du monde, car à l'époque on ne connaissait pas le monde.
- Speaker #0
Comment vous avez rencontré votre mari ?
- Speaker #1
Tout à fait par hasard, dans mon travail. C'est-à-dire que moi j'étais comptable dans une boîte, et mes patrons avaient entrepris de faire des travaux. Lui, il était commis d'entreprise dans une société d'ébénisterie et tout. Donc, il surveillait les travaux.
- Speaker #0
Je vois venir la petite histoire, là.
- Speaker #1
Et comme moi, c'est moi qui payais les factures, donc il venait me demander. Et un jour, il m'a demandé si on pouvait sortir.
- Speaker #2
Il a moins surveillé les travaux. Il avait une distraction.
- Speaker #1
Ah si ! Il a surveillé les travaux, mon cher. Parce que malgré nos 28 ans, vous savez ce qu'il m'a dit ? Il m'a dit, écoutez, moi je veux bien sortir avec vous, mais j'ai un chantier chez mon frère, il faut que je finisse ce chantier avant. Donc pendant deux semaines de suite, pas question de sortir, il allait faire les peintures.
- Speaker #0
Et comment vous avez annoncé à vos parents à l'époque que vous aviez rencontré quelqu'un ?
- Speaker #1
Moi, ma maman venait de mourir, donc j'étais avec mon papa. Donc j'étais heureuse, si vous voulez. Et puis ça s'est fini. Et lui,
- Speaker #0
il était aussi ?
- Speaker #1
Lui, oui. On avait à peu près, on a eu pratiquement la même enfance. Nous, on était cinq enfants, pas de sous, un papa avec un... Petit salaire. Et lui, quatre enfants, pas de sous. Un papa qui travaille au gaz de France. On a eu la même enfance. Et c'est pour ça que ça a si bien marché tous les deux.
- Speaker #0
On fait tout un chemin avec vous dans votre vie. Effectivement, vous nous parliez de votre maman, de votre mari. Comment s'appelait votre mari ?
- Speaker #1
Serge.
- Speaker #0
De Serge, de votre mari. Marie-Jo, comment vous avez rencontré votre mari ? Comment ? Comment vous avez rencontré votre mari ?
- Speaker #3
Mon mari, ça va peut-être vous faire rire d'ailleurs. Allez-y ! Donc moi, comment j'ai rencontré mon mari ? Voilà, c'était un samedi soir.
- Speaker #0
J'adore.
- Speaker #3
J'avais décidé de sortir.
- Speaker #1
Après le turban.
- Speaker #3
C'était la maison, c'était la brimade. Je lui ai dit à mon père, je sors ce soir.
- Speaker #0
Donc vous étiez un enfant un peu rebelle ?
- Speaker #2
Un peu, oui.
- Speaker #3
Un petit peu, un petit peu.
- Speaker #2
Et vous aviez quel âge ?
- Speaker #3
En classe, non.
- Speaker #2
Vous aviez quel âge à ce moment-là ?
- Speaker #3
J'avais, je ne sais pas, 17, 18 ans, quelque chose comme ça, 19 ans. Je me suis dit la bonne affaire, j'ai quartier libre samedi et j'avais rendez-vous avec un copain. Bon, je n'avais pas dit ça à mon père, bien sûr.
- Speaker #0
Ah, vous aviez menti.
- Speaker #3
Non.
- Speaker #0
Et vous vous souvenez du mensonge ? Rendez-vous avec une copine ?
- Speaker #3
Oui, tu sais, j'ai des copines qui… Facile,
- Speaker #0
classique.
- Speaker #3
De toute façon, un classique. Un quart d'heure se passe, une demi-heure, trois quarts d'heure, personne. Je me suis dit, ça c'est l'horreur. Pour moi, le samedi soir va être à l'eau, complètement. J'étais furieuse.
- Speaker #1
Ceci s'appelle un lapin. J'allais dire.
- Speaker #3
J'étais furieuse. Arrivent trois jeunes, et puis qui commencent à parler avec moi. Trois garçons. Ah, trois garçons. Oui, oui, qui venaient de l'école supérieure des télécoms. Ah oui, c'est le lapin. Le fameux. C'est pas drôle, pour un samedi soir. Je me dis, comment ça m'embêtait, cela. Puis au bout d'un moment, ils me disent, qu'est-ce que vous faites ? Je lui dis, écoutez, qu'est-ce que vous faites, vous ? Il me dit, on va danser, on va dîner dans un restaurant U. Je lui dis, peu importe, moi, je m'en moque. Pour une fois, je ne connaissais pas, moi. On y mange très mal, d'ailleurs. Mais enfin, c'est comme ça. Enfin, on y mangeait très mal. Donc là,
- Speaker #0
vous partez avec trois inconnus. Oui. Mais qui ont l'air sympas. Oui. On se dit, pourquoi pas ?
- Speaker #3
Qui ont l'air sympas. Je me suis dit, qu'est-ce que je risque, après tout ?
- Speaker #1
À l'époque, c'était possible. Et après,
- Speaker #0
c'est vrai ce que vous dites, Raymond, vous avez raison. À l'époque, c'était possible. Je pense qu'aujourd'hui,
- Speaker #3
il faut éviter.
- Speaker #0
Mais vous avez raison.
- Speaker #3
On est allé après, je m'en souviens très bien. C'est un club qui doit exister. C'était une boîte de nuit de jazz. Parce que j'adorais le jazz. Et les trois aussi appréciaient ces morceaux de jazz. On a dansé toute la nuit avec un, deux et l'autre aussi. Puis à un moment donné, il y en a un qui m'empoigne. Je me dis, flûte. Je préférais l'autre avec les yeux bleus. Je me suis dit tant pis pour les yeux bleus, je l'ai un peu regretté celui-là quand même. Et celui avec qui j'ai dansé finalement est devenu mon mari. Oh,
- Speaker #0
c'est fou !
- Speaker #2
Comment il s'appelait ?
- Speaker #3
Didier.
- Speaker #0
Et vous vous êtes mariés combien de temps après votre rencontre avec Didier ?
- Speaker #3
Quatre mois après.
- Speaker #2
Ah oui ?
- Speaker #0
Quelle rapidité !
- Speaker #3
Je vous ai dit que c'était express. Ah oui, c'était express. C'est mariage express.
- Speaker #1
Parce que vous aviez fait un bébé. Oui.
- Speaker #3
Un peu que je ne suis pas sage, moi.
- Speaker #1
Non, pire. Allez. À l'époque. Je suis pas sûre du tout. À l'époque,
- Speaker #3
c'était la solution du Dieu. Ça fait une histoire après.
- Speaker #1
C'est sûr.
- Speaker #3
Ça, c'est autre chose.
- Speaker #0
Vous avez eu combien d'enfants ?
- Speaker #3
J'en avais trois, j'en ai plus que deux.
- Speaker #0
Vous en avez perdu un ?
- Speaker #3
Oui.
- Speaker #0
Quand vous aviez quel âge ?
- Speaker #3
La dernière, je l'ai eue à 43 ans. C'était ma petite chérie et elle est partie.
- Speaker #0
On pense à elle.
- Speaker #3
Très dur. Bien sûr. Elle me disait toujours, « Ah, t'es l'amour de ma vie. » Tu as le mot de ma vie ? Ah bah oui, c'est comme ça.
- Speaker #0
Vous l'avez perdu dans quelles circonstances ?
- Speaker #3
de maladie d'impurpura fulminans. C'est une méningite très grave. D'accord. Autre chose que... C'est plus grave qu'une méningite. D'accord. Elle est morte à la maison, je vous l'ai dit. De toute façon, je ne vais pas revenir là-dessus. Mais bon, c'est comme ça. Ainsi va la vie. Je ne suis pas la seule.
- Speaker #0
Où est-ce que vous trouvez... Vous êtes solaire. Vous êtes belle. Je vous l'ai dit. La première chose que je vous ai dite en vous voyant, vous êtes belle, vous êtes solaire. Vous dégagez quelque chose de bon et on sent que vous avez envie de rassembler. Malgré les drames que vous avez vécu, vous avez toujours eu ce caractère-là ?
- Speaker #3
Non, pas toujours, parce que quand j'étais petite, j'étais très timide. C'est fou de te dire ça ! J'étais obligée de dire moi-même. Quand j'étais petite, j'étais très timide, c'est vrai. J'étais une élève modèle, appliquée, faisant bien les choses, etc. Mais j'étais rebelle à la maison. École,
- Speaker #0
mais à la maison.
- Speaker #3
Non, je piquais des colères, pas possible. Je me roulais par terre.
- Speaker #2
Ah, le...
- Speaker #0
Le fameux !
- Speaker #2
Le fameux.
- Speaker #3
Ah oui ! Quand je voulais quelque chose.
- Speaker #2
Et vous l'aviez généralement ?
- Speaker #3
Oui.
- Speaker #0
Vraiment, vous avez eu des jumeaux ?
- Speaker #1
Oui, tout à fait par hasard. Pourquoi des jumeaux ? Je n'en sais rien. Parce que, comment dirais-je, quand je me suis trouvée enceinte, les chevaux allaient voir le tout-vible. Première fois, bon, rien. La deuxième fois, il me dit, mais Madame Pannier, vous attendez des jumeaux ? Et je lui...
- Speaker #0
C'est le choc ?
- Speaker #1
Oui, et je lui réponds, mais docteur, ce n'est pas possible ! Il n'y en a jamais eu dans la famille.
- Speaker #0
C'est quoi d'avoir des jumeaux ? Ça ressemble à quoi, une jeune maman qui a des jumeaux ?
- Speaker #1
Il y a 57 ans, je peux vous dire que ce n'était pas de la tarte. On a eu deux ans avec mon mari. Deux ans très durs. Très, très durs parce que...
- Speaker #2
Deux fois plus de biberons.
- Speaker #1
Douze biberons par jour.
- Speaker #2
Douze ?
- Speaker #1
Deux fois six, ça fait douze.
- Speaker #2
Ah oui, oui. C'est beaucoup.
- Speaker #1
Les couches, à l'époque, il n'y avait pas tout ce qu'on a maintenant. Bien sûr. Donc, les couches. J'avais une femme de ménage qui venait et qui me lavait toutes les couches. On lavait les couches à la main. En plus, les couches, on ne pouvait pas les faire bouillir. Ça filait. Les gamins, ça a une peau très fragile. Donc, ça leur donnait des rougeurs. Donc, il fallait les laver. Oh là là, je ne me suis dit plus jamais ça.
- Speaker #0
C'est vrai que malheureusement, on ne contrôle pas. Je me pose une question. Je me permets de rebondir. Financièrement, quand on a deux enfants, c'est aussi deux fois plus de dépenses.
- Speaker #1
Quand vous vous retrouvez avec. marié depuis deux ans, une maison sur la tête, endetté, donc très endetté, plus des jumeaux avec lesquels on ne peut pas travailler, eh bien on compte. On compte, on compte. Pendant deux ans, on compte.
- Speaker #2
Et vous vouliez plusieurs enfants ou pas ?
- Speaker #1
Moi, non. J'avais même dit que je ne voulais pas d'enfants. Vous savez pourquoi ?
- Speaker #2
Non.
- Speaker #1
Parce que j'avais une admiration sans borne pour ma maman, qui avait eu six enfants, et je l'avais vue toute sa vie avant de mourir. ne donnait que pour ses enfants, jamais pensé à elle. Et je m'étais dit, jamais je ne pourrais faire ce que ma maman a fait pour nous. Et puis le bon Dieu, Père Sandam, il m'a puni, parce que non seulement j'en ai eu un, j'en ai eu deux à la fois. Il s'est dit, comme ça, tu en auras moins d'eux. Ils étaient prématurés. Donc j'ai accouché à 7 mois et demi, et mes enfants sont partis à l'hôpital Beaujour. Je ne les ai pas vus. Je les ai vus, ils avaient 15 jours. C'était de ma faute, c'est parce que j'étais tellement fatiguée. J'arrivais pas à me lever. Non, non, c'est deux années épouvantables.
- Speaker #0
Qu'est-ce que vous faisiez comme travail ?
- Speaker #1
J'étais comptable, l'horrible comptable.
- Speaker #0
Vous l'aviez dit, oui, pardon. L'horrible comptable ?
- Speaker #1
Parce que la comptable dans une société, c'est elle qui râle tout le temps parce qu'il y a trop de factures.
- Speaker #0
C'est toujours pareil aujourd'hui, c'est vrai.
- Speaker #1
Bien sûr. Je prends un peu la même chose. Bien sûr. Donc, voilà.
- Speaker #0
Marie-Jo, qu'est-ce que vous faisiez comme travail ?
- Speaker #3
J'ai enseigné en... en milieu scolaire, en collège, donc à des élèves un petit peu difficiles, un établissement qui était situé en REP, ex-ZEP, qui était une zone d'éducation prioritaire, un réseau d'éducation prioritaire. Où là, je me suis épanouie parce que c'était des jeunes qui étaient en difficulté, mais on arrivait quand même à en tirer quelque chose. À partir du moment où on était suffisamment psychologue et qu'on aménageait un peu son programme, compte tenu de l'auditoire.
- Speaker #0
On arrivait à les intéresser. Il ne fallait pas faire un cours didactique. Il fallait aménager le cours pour les intéresser. C'était surtout ça, en fait.
- Speaker #1
C'est quand même assez surprise. Je n'aurais pas été étonnée si vous m'aviez dit « je n'ai pas travaillé, j'ai élevé mes enfants » . C'est vrai qu'à votre époque, il y a quand même beaucoup de femmes qui ne travaillaient pas et c'est loin d'être un jugement. Mais le mari allait travailler, la femme restait à la maison.
- Speaker #0
Je n'aurais jamais voulu rester à la maison.
- Speaker #1
Vous avez toute votre vie travaillé. Est-ce que vous considérez ça comme une chance ? Vous avez été différente quand même de beaucoup de femmes de votre époque ?
- Speaker #0
C'était une chance, mais je n'ai jamais réfléchi au fait de ne pas pouvoir travailler.
- Speaker #1
Vous êtes quand même d'accord avec moi qu'à votre époque, bien sûr qu'il y avait des femmes qui travaillaient, mais ce n'était pas comme aujourd'hui.
- Speaker #0
Il ne faut pas dire cela. Je pense qu'à mon époque aussi, il y avait déjà pas mal de femmes qui travaillaient, qui voulaient être émancipées, qui voulaient gagner leur vie.
- Speaker #2
C'est ce que j'allais vous dire.
- Speaker #0
s'assurer. Et puis moi, j'aurais voulu tellement voyager, comme je l'ai dit tout à l'heure. C'est comme ça, mais on ne fait pas. Ce n'est pas tracé.
- Speaker #1
Non, bien sûr, mais nous, l'image qu'on a en tout cas de votre époque, c'est peut-être des informations qu'on nous donne.
- Speaker #0
C'est des informations qui sont fausses.
- Speaker #1
C'est très intéressant de le savoir.
- Speaker #3
Ça dépend de nos connaissances aussi. Moi, je sais que ma grand-mère est beaucoup restée avec ma mère, ses enfants. Mais par contre, c'est elle qui gérait tout à la maison. Et mon grand-père n'est pas du tout organisé. Donc c'est elle qui se dit, ce midi c'est ça, on fait ça, ce week-end c'est là.
- Speaker #0
Mais excusez-moi, vous voyez, même ma mère, elle a travaillé pour être indépendante vis-à-vis de mon père. Elle donnait des cours de piano à domicile et elle s'épanouissait dans son métier. Je pense que c'est une femme qui l'a fait pour être indépendante. et avoir son indépendance financière.
- Speaker #1
Vous avez vu aussi ça de votre côté ? Je l'avais vu et mon père qui était ratin comme pas deux,
- Speaker #0
qui travaillait. Ah oui, tant pis pour les hommes, ils ne sont pas tous comme ça, heureusement. Mais je suis désolée.
- Speaker #2
Vous avez peut-être laissé un bon petit capital.
- Speaker #0
Non, je l'ai bouffé le capital.
- Speaker #1
Ah ben ça c'est intéressant ça. Est-ce que vous avez eu un héritage et est-ce que vous allez laisser un héritage à vos enfants ? Ou est-ce que vous n'avez pas envie de laisser ?
- Speaker #0
Non, alors moi je... Non, je vous dis que...
- Speaker #1
Il n'y a aucun jugement,
- Speaker #0
évidemment. J'espère qu'il n'y a aucun jugement, parce que oui, j'ai hérité de mon père, mais j'ai craqué l'argent. D'accord. Ce qui n'est pas bien, en fait, en voiture.
- Speaker #1
Ce n'est pas bien, vous savez le droit d'avoir.
- Speaker #0
La folie des voitures. J'aimais les voitures, donc on achetait des voitures, et on changeait, et on rachetait des voitures. Et puis on achetait autre chose, mais pas des tableaux de maître ni des choses complètement folles. Mais j'aurais pu me dispenser de changer de voiture aussi souvent. Maintenant, je pense honnêtement. C'est comme ça. Et maintenant, les enfants, mis à part le fait que ma pension me permet de payer la résidence ici, parce que c'est quand même une certaine somme. Moi maintenant, les enfants n'auront rien, mais tant pis. C'est comme ça, ils n'auront rien, ils n'auront rien. Ils ont eu de l'affection déjà, c'est pas mal.
- Speaker #1
C'est énorme.
- Speaker #0
L'affection, il y en a qui n'en ont pas.
- Speaker #1
Bien sûr, je suis d'accord avec vous.
- Speaker #0
Il y a des pauvres enfants qui sont maltraités. Je veux dire que l'affection, ça n'a pas de prix l'affection.
- Speaker #2
Avec mon mari, on avait quand même bien travaillé. On a eu tous les deux, à la fin de notre carrière, un bon chèque qu'on avait mis de côté. et qui me sert pour le moment, il s'en va pour Océane. Et j'en ai encore pour un an. Et après, j'ai ma maison, ma maison de la vie de la madame que j'ai laissée, qui vaut un certain prix.
- Speaker #1
Que vous n'avez toujours pas vendue ?
- Speaker #2
Non, parce qu'il faut déjà la vider. Et après la vendre. Mais si je reste ici, c'est pour ça que je me dis, je ne vais pas rester là dix ans. Parce que là, au bout de dix ans, il n'y aura carrément plus rien. Alors que si je mourais dans les six mois, ce serait bien. Parce que dans les six mois, ça serait encore sur mes revenus. Parce que j'ai une bonne retraite et la réversion de mon mari. Mais ça ne suffit pas. Un an de retraite à payer la...
- Speaker #3
Ça se voit que vous avez été comptable. Ça va vite.
- Speaker #1
Alors moi, j'aime bien comparer, c'est vrai, nos générations. Et j'ai une petite question pour vous. Quel a été votre secret ? pour avoir une relation si longue avec vos maris.
- Speaker #2
Un amour éternel entre lui et moi.
- Speaker #1
Vous étiez amoureux et amoureuse tout le long de votre relation.
- Speaker #2
Absolument. On n'aurait jamais quitté la maison ensemble sans partir la main dans la main. Et j'avais une voisine en face qui nous regardait et elle me disait toujours, tiens. Je t'ai vu et je me suis dit, tiens, ça y est, les amoureux s'en vont. Et les amoureux, c'était mon mari et moi.
- Speaker #3
C'était quoi votre surnom dans le couple ?
- Speaker #2
Minou. Minou.
- Speaker #1
C'est beau.
- Speaker #2
C'est quand il m'a dit, maintenant, j'arrête de travailler, on va travailler dans la maison. Trois jours après, il avait une radio des poumons qui disait qu'il y avait un cancer, qu'il n'était même pas opérable. Et il était parti six mois après.
- Speaker #1
Comment vous avez vécu ces six mois avant son départ ?
- Speaker #2
Les six mois avant son départ, c'est six mois de... Pour moi, je ne les ai pas vécues.
- Speaker #1
Vous avez survécu ?
- Speaker #3
Oui.
- Speaker #2
Et alors après, si je vous disais... Je me livre encore moi, mais tant pis, ce n'est pas grave. Si vous me disiez que du jour du décès de mon mari, je n'ai pas pu pleurer. Tant et si bien que les gens devaient se dire, mais elle est insensible. Et de ce jour, je n'ai jamais pleuré. Je ne peux pas pleurer. Pourquoi ? Ça fait 22 ans, je ne sais pas. Ça fait 22 ans que tout ce que j'ai pu vivre, au fond de moi, sans pleurer.
- Speaker #3
Est-ce que les 6 mois, les fameux 6 mois, ça vous a aidé à vous préparer ou pas du tout ?
- Speaker #2
Oui, parce que si vous voulez, je savais que les médecins avaient dit... J'ai un beau-frère qui est médecin. Et il avait dit... Il n'est pas question de faire souffrir mon beau-frère. Il faut le soigner, mais il n'est pas question de le faire souffrir. Donc, partant de là, les médecins lui avaient dit, docteur, il en a entre six mois et un an, mais un an, c'est le maximum. Six mois après, il est parti. Mais l'avantage qu'il a eu de partir au bout de six mois, c'est qu'alors qu'il était en chimio, et ça, c'est épouvantable, parce que maintenant, c'est bien la chimio. Mais c'est rien par rapport à ce qu'on vivait à l'époque. Il fallait voir. Et comment dirais-je ? Il avait de très beaux cheveux. Et son inquiétude, c'était de perdre ses cheveux. Et grâce à Dieu, merci Seigneur, il est parti avec ses cheveux. Maintenant, je me tais, je ne dis plus rien. Non,
- Speaker #1
mais non, au contraire, vous êtes très intéressante et c'est très touchant. Et je pense qu'aussi, ce podcast permet à tous les gens qui nous regardent sur YouTube ou qui nous écoutent en podcast audio d'être... plus proche de vous, de s'imaginer ce que ça pouvait être à votre époque.
- Speaker #2
Oui, tout ce que comporte toute une vie.
- Speaker #1
Bien sûr. Tous les souvenirs de vie. Et même pour vous, je pense que c'est... Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est une thérapie, loin de là, mais je pense que c'est aussi important pour vous de peut-être passer des messages, de dire ce que vous avez sur le cœur. Cette vidéo, peut-être que vos enfants, vos petits-enfants vont la voir, vont vous regarder. C'est une vidéo qui va rester.
- Speaker #0
Écoutez, moi, en ce qui me concerne, je suis restée mariée 55 ans, voire même plus. Mais mon mariage, c'était surtout de l'affection, de la tendresse.
- Speaker #1
De l'habitude, peut-être.
- Speaker #0
Ce n'était pas de l'amour, pour des raisons très personnelles que je ne vais pas évoquer ici. Donc, pourquoi je suis restée avec lui ? Tout simplement, c'est un peu idiot d'ailleurs. Mais pour ne pas le laisser parce qu'il avait vécu dans sa jeunesse un drame de par sa mère.
- Speaker #1
Et vous nous disiez que sa maman était partie.
- Speaker #0
Sa maman s'était suicidée et donc il a été marqué à vie par ce drame en fait.
- Speaker #1
Vous avez pris soin de lui finalement. Comment ? Vous avez pris soin de lui en restant avec lui. Oui,
- Speaker #0
tout à fait. Oui, enfin oui et non parce qu'il y avait des moments où je m'échappais moi. J'étais très indépendante. Je ne veux pas dire par là que je n'étais pas avec lui, mais j'avais ma façon à moi de vivre.
- Speaker #1
Avec vos maris, quel était le sujet ? Je vais en venir à toi aussi, Flo. De toute façon, tu peux réfléchir à ta réponse. Quel était le sujet de dispute le plus courant que vous aviez avec vos maris ? Raymond,
- Speaker #0
vous l'avez tout de suite. Je ne voudrais pas dire,
- Speaker #1
mais vous l'avez tout de suite.
- Speaker #2
Parce que je n'ai pas eu une seule dispute avec mon mari.
- Speaker #1
C'est beau.
- Speaker #0
Ça, c'est beau.
- Speaker #2
J'ai des voisins avec qui j'ai discuté après sa mort. qui m'ont dit que ce n'était pas possible, qu'on ne pouvait pas ne pas se disputer. J'ai dit non, on ne s'est jamais disputé avec mon mari. Parce que moi, j'étais un peu sous-poulet en tant que capricorne, et lui, il apaisait. C'était une vierge.
- Speaker #3
Et parfois, vous n'aviez pas envie quand même un petit peu, sur un petit détail, il a changé la chaîne alors que c'était pas tant donné.
- Speaker #0
Non,
- Speaker #2
je crois qu'une vie de couple,
- Speaker #0
il ne faut pas s'arrêter à des petits détails.
- Speaker #2
Moi, c'était quelqu'un que j'adorais, il n'y a pas de doute.
- Speaker #0
Moi, je me suis sentie prisonnière quand je me suis mariée. C'est pour ça que je voudrais insister sur le fait que je me suis mariée trop tôt, c'est trop tard maintenant pour revenir en arrière.
- Speaker #1
C'est un beau message aussi, peut-être,
- Speaker #0
pour les gens qui ne sont pas très jeunes. Mais je pense que c'est valable pour les jeunes de se dire, ah ben non, si j'ai 22, 23 ans, 24, 25 ans, il faut que je me marie. Surtout pas.
- Speaker #1
Alors venez, on essaie de comparer un petit peu nos couples de notre génération avec votre génération. Moi, je fais quand même beaucoup de choses avec mon compagnon, mais c'est lui qui cuisine le plus. Est-ce que ce serait bien ? Il cuisine beaucoup plus que...
- Speaker #0
Moi, je n'ai pratiquement jamais cuisiné, j'ai horreur de ça.
- Speaker #1
Votre mari cuisinait ? Oui. À l'époque, déjà, les hommes cuisinaient. Votre mari, Raymond ?
- Speaker #2
Mon mari, pas beaucoup parce que, comment dirais-je, le soir, je rentrais beaucoup plus tôt que lui. Et je vais vous dire, il m'énervait dans la cuisine.
- Speaker #1
Pourquoi ?
- Speaker #2
Parce que...
- Speaker #1
Il mettait trop de sel, peu de poivre.
- Speaker #0
Pardon. Il était trop lent.
- Speaker #2
Oh non, c'était trop compliqué pour lui.
- Speaker #3
C'était quoi une soirée idéale ? La soirée que vous adoriez passer avec votre mari. Le basique, pas forcément. Moi, je sais que j'aime bien faire un petit restaurant, manger un bon repas. Et après, juste devant la télé, une petite série sous le plaid. Tranquillou.
- Speaker #1
Le petit plaid, la petite tisane parfois.
- Speaker #3
Pas de tisane. Ah, pas de club tisane.
- Speaker #1
Pas de club tisane.
- Speaker #3
Pas de tisane.
- Speaker #0
Surtout pas.
- Speaker #2
Pas de tisane. Non, mais il y a aussi des...
- Speaker #1
Vous avez des soirées préférées ?
- Speaker #2
Il y a aussi des soirées avec des amis qu'on aime beaucoup. Ou de la famille.
- Speaker #3
Et quand vous étiez tous les deux, vous faisiez quoi le soir ?
- Speaker #2
Si vous voulez, je vais vous faire rire. Un soir, une fois ou deux, je l'ai emmené au cinéma. J'adorais le cinéma. Donc j'allais au cinéma. Il est venu avec moi une fois. Un quart d'heure après, ils rentrent. Je vous jure que c'est vrai.
- Speaker #1
C'est très soporifique, le cinéma, encore aujourd'hui. Raymond, on m'emmène au cinéma. Quinze minutes plus tard, je dors. Je suis désolée. Moi,
- Speaker #3
je ne peux pas.
- Speaker #1
Tu ne peux pas dormir au cinéma ?
- Speaker #3
Et puis moi, ça m'énerve.
- Speaker #1
Les gens qui payent 12 euros pour un cinéma.
- Speaker #3
Non, mais souvent, les gens qui s'endorment, en plus, demandent après, il s'est passé quoi ?
- Speaker #0
Ben voilà, exactement. Il y en a qui le font. Il y en a qui le disent.
- Speaker #2
Donc, si vous voulez, je lui ai dit, ce n'est pas la peine que tu viennes au cinéma avec moi. Donc, j'allais au cinéma toute seule, ou le samedi après-midi, ou le dimanche après-midi. Et puis, tout allait bien.
- Speaker #1
Ça coûtait combien de places de cinéma à votre époque ? Vous vous en souvenez ?
- Speaker #2
Alors moi, je me rappelle de la place de cinéma parce que c'était ma soeur aînée. qui nous la payait, on allait au Gaumont Palace, qui n'existe plus il y a longtemps. Et c'était à l'époque 2 francs 50.
- Speaker #3
Je ne sais pas faire la conversion.
- Speaker #1
2 francs 50 ? Aujourd'hui, c'est 12 euros.
- Speaker #0
C'est 12 euros.
- Speaker #1
Je ne m'abuse d'une place de cinéma.
- Speaker #3
Moi, un peu plus, je crois.
- Speaker #1
Voir parfois 15 euros. 15 euros, c'est 100 francs.
- Speaker #2
Oui, alors que là, c'était 2 francs 50. Oui.
- Speaker #3
Aujourd'hui, à ce prix-là, on a 2 popcorns.
- Speaker #1
Même pas. On n'a même pas de pop-corn. C'est incroyable. Quel est votre conseil ? Il y a certainement plein de jeunes couples qui nous écoutent.
- Speaker #2
Pas ici. Non, pas ici.
- Speaker #1
Est-ce que vous avez un conseil à donner aux jeunes couples d'aujourd'hui ?
- Speaker #0
Alors, oui, un conseil. Soit vous vous mariez, mais pas trop tôt.
- Speaker #1
Le mariage, en ce moment. Soit,
- Speaker #0
effectivement, vous avez une compagne ou un compagnon. Moi, je suis très ouverte à toutes les eventualités. Après, une question de réciprocité, un échange, il faut bien s'entendre. Si on ne s'entend pas, ce n'est pas la peine de se séparer.
- Speaker #1
Ce que j'entends, c'est que le partage dans un couple, c'est hyper important.
- Speaker #2
Le partage, oui.
- Speaker #0
Ne pas avoir aussi un compagnon radin.
- Speaker #1
C'est mieux si l'autre n'est pas radin.
- Speaker #0
Pas trop d'égoïsme non plus, penser à l'autre. Et ne pas étouffer l'autre aussi.
- Speaker #3
La jalousie ?
- Speaker #0
Non, je ne suis pas d'accord. Je n'ai jamais été jalouse de ma vie.
- Speaker #3
Est-ce qu'il faut une petite jalousie quand même dans un couple ?
- Speaker #0
Non, certainement pas. Certainement pas. Ou alors, il faut que ce soit subtil. Subtil.
- Speaker #1
Parfois, la jalousie peut montrer, prouver à l'autre de l'intérêt. On peut avoir... Moi, je sais que ça peut m'arriver. J'aime bien quand parfois mon compagnon me dit « Tu t'es fait draguer ? » Et je lui dis « Non, ne t'inquiète pas, il n'y a que toi qui compte. » Je me dis qu'il y a un petit intérêt quand même.
- Speaker #2
Vous voyez ce que je veux dire ? Moi, ça m'amusait.
- Speaker #1
C'est plus près comme de l'amusement.
- Speaker #2
Quand on faisait nos courses, mon mari était avec moi et avec mes amis, deux amis qu'on avait, qui étaient les marraines des enfants. Et mon mari, son plaisir, c'était de draguer les jeunes caissières. Moi, ça m'amusait follement.
- Speaker #1
C'est drôle.
- Speaker #2
Ça peut être amusant.
- Speaker #1
Ça peut être amusant. C'est-à-dire ?
- Speaker #2
C'est-à-dire que je...
- Speaker #3
Vous aviez totalement confiance quoi en fait.
- Speaker #2
Bien sûr et puis la fille elle était mal à l'aise comme tout.
- Speaker #0
Ah oui, c'est ça qui est très drôle.
- Speaker #2
Elle était mal à l'aise comme tout.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #2
Et alors je repartais, je disais… Ça y est, t'étais content. T'as bien fait ton truc.
- Speaker #3
Et s'il se faisait draguer, vous étiez flatté, du coup ?
- Speaker #2
Écoutez, je ne vais pas dire. Il ne se faisait pas tellement draguer parce qu'il n'avait rien d'un Apollon.
- Speaker #1
Raymond, est-ce que vous, vous avez un conseil à donner aux jeunes couples ?
- Speaker #2
S'aimer. Et s'aimer plus. Pensez toujours que vous aimez plus celui avec qui vous êtes ou celle avec qui vous êtes. Mais s'aimer, s'aimer, s'aimer, se donner de l'amour, avec tout ce que ça comporte.
- Speaker #1
Qu'est-ce que ça comporte ?
- Speaker #2
Ça comporte, comme je dis à mes enfants, que quand vous êtes en société, il y a des choses que vous ne faites pas. Alors que quand vous êtes chez vous et dans votre intimité, vous n'avez aucune retenue à avoir avec la personne que vous aimez à partir du moment où vous l'aimez.
- Speaker #1
Vous disiez souvent « je t'aime » .
- Speaker #2
Oui. Et je l'ai dit aussi beaucoup, beaucoup à mes enfants. Et je le dis encore à mes enfants. Parce qu'on avait des grands-parents qui étaient de la Haute-Vienne, qui aimaient leurs enfants, mais qui ne savaient pas dire « je t'aime » . Même mes parents. Moi, j'ai pris, pour la première fois de ma vie, à 20 ans, j'ai pris ma maman par le cou, et je l'ai embrassée, elle s'est retournée et m'a dit « qu'est-ce qui te prend ? » Je n'ai jamais recommencé. elle est partie 6 mois après
- Speaker #1
Vous avez l'impression de vous être trop retenue ? Vous avez beaucoup dit je t'aime, vous Marie-Jo ?
- Speaker #0
Non, je ne l'ai jamais dit.
- Speaker #3
Ah, vous ne lui avez pas dit ?
- Speaker #1
À votre mari et à vos enfants ?
- Speaker #0
Je ne sais pas.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Je ne peux pas vous répondre.
- Speaker #1
Il y a aussi des caractères qui disent moins je t'aime ?
- Speaker #0
Il y a des choses que, si vous voulez, ma sensibilité est là, elle est présente. Évidemment, peut-être qu'on ne l'aperçoit pas, toujours. Ça dépend de qui est en face de la personne. Mais je n'éprouve pas le besoin. de dire je t'aime, qu'est-ce que ça veut dire d'abord je t'aime ? Moi je vais poser la question, qu'est-ce que c'est aimer quelqu'un ? Je voudrais savoir qu'on me donne une définition.
- Speaker #1
Alors je vous laisse répondre.
- Speaker #2
Je vais vous dire la réponse de comment il s'appelait l'écrivain. Aimer ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction.
- Speaker #0
C'est vrai. Maintenant il faut savoir aussi regarder ensemble dans la même direction. C'est un problème de personne et de personnalité. Je crois que l'attirance est très importante. Comment ?
- Speaker #2
Il n'était pas beau.
- Speaker #0
C'est vrai ?
- Speaker #2
Oh non !
- Speaker #0
C'est si drôle ! Ça ne veut rien dire.
- Speaker #2
Si, ça veut dire. Ah bon ? Oui, parce que quand je l'ai présenté les premières fois, on m'a dit, tu aurais pu en trouver un autre.
- Speaker #1
C'est drôle.
- Speaker #3
C'est vrai. Du coup, c'est quoi qui vous a... Qu'est-ce qui vous a attiré le plus ? C'est son humour ? C'est son...
- Speaker #2
C'était le destin, mon cher ami. Vous ne faites rien contre votre destin. Moi, j'étais catholique, pas vraiment pratiquante, mais si quand même. Eh bien, lui, vous savez ce qu'il était. Eh bien, il était protestant.
- Speaker #3
Et malgré ça, pas de dispute.
- Speaker #2
Non.
- Speaker #1
Et beaucoup d'amour.
- Speaker #2
Et beaucoup d'amour, beaucoup d'amour. Et après, ces deux jeux, ces deux enfants qu'on a eu ensemble, ça a été pendant deux ans... On a vécu pour eux, si vous voulez. Et non, au lieu de nous séparer, ce qui ne pourrait plus être le cas, ça nous soudait complètement. C'était vraiment deux enfants tellement gentils, tellement mignons. Les premiers temps, on leur avait acheté un grand lit et on les couchait des bêches. Un à gauche, l'autre à droite. Vous voyez ? Donc voilà, des choses comme ça. Non, je vais vous dire, après, cette fois-ci, je me tais. j'ai eu une vie heureuse parce que je n'ai pas eu de gros les deux gros chagrins de ma vie c'est ma maman et mon mari alors vous dites que vous avez eu une vie heureuse quel est votre plus beau souvenir de vie ?
- Speaker #0
le plus beau souvenir de ma vie je pense que malgré tout c'est là quand même où je peux dire que j'ai aimé mes enfants Il y en a deux, peut-être. La naissance de ma fille, que j'ai toujours, bien sûr. Mais c'est très curieux parce qu'on passe par différents sentiments. Moi, j'avais 23 ans. Mon mari en avait 22. On était jeunes. Rentrer avec un bébé à la maison, moi, je sais que ma mère l'a donné, je lui ai donné pendant un mois. Je me disais, qu'est-ce que je vais faire avec cette petite chose ? Et puis elle m'empoisonne, elle pleure, etc. Il faut la changer. Ça me dérangeait. C'est pour ça que je dis que les enfants, il ne faut pas en avoir trop tôt non plus.
- Speaker #1
Si on parle un petit peu de la résidence dans laquelle on est aujourd'hui, la résidence Océane, alors moi j'ai été très surprise, quand je suis arrivée dans cette résidence, la première chose que j'ai vue, c'est un salon de coiffure. On ne se dit pas forcément que la première chose sur laquelle on va tomber dans une résidence comme celle-ci, c'est sur un salon de coiffure.
- Speaker #3
Et il y a tout le temps du monde.
- Speaker #0
Et l'accueil est particulièrement chaleureux.
- Speaker #1
Vous voulez remercier quelqu'un peut-être Marie-Jo ?
- Speaker #0
Comment ?
- Speaker #1
Vous voulez remercier quelqu'un du salon de coiffure, comme elle s'appelle la dame du salon de coiffure ? Agnès. Bon, on le remercie Agnès. C'est Agnès qui vous a coiffé aujourd'hui ?
- Speaker #2
Ça fait 11 ans. Oui, oui, il y a Ken. Fou ! C'est elle aussi qui m'a coiffé.
- Speaker #1
Alors, attendez, racontez-nous, j'adore. Vous êtes allée ce matin, du coup, chez le coiffeur,
- Speaker #2
comme vous faites peut-être toutes les semaines ? Absolument. Non,
- Speaker #0
je ne fais pas toutes les semaines pour toujours la même raison, en fait. Donc là,
- Speaker #1
pour le tournage ?
- Speaker #0
J'ai évoqué. Non, même pas, ça correspondait au jour du tournage. Mais je ne l'ai pas fait volontairement.
- Speaker #1
C'est important pour vous de rester coquette ?
- Speaker #0
Oui, très.
- Speaker #1
Pourquoi ?
- Speaker #0
C'est ma façon à moi de me respecter déjà. La propreté, l'habillement, changer de tenue, se regarder dans la glace et se dire, bon, t'es pas trop mal encore.
- Speaker #1
Vous êtes très belle.
- Speaker #0
Bon, ça va, t'es acceptable. Bon, t'as un peu mal au genou, mais enfin, bon, bref, tu fais avec.
- Speaker #1
Vraiment, vous étiez aussi, vous aimiez vous maquiller.
- Speaker #2
Oui, je ne me maquillais pas. Le rouge à lèvres. Mais si vous voulez, moi, c'était dans une petite société. Et en tant que comptable, je recevais beaucoup de clientèle. Donc, j'étais classique. Donc, le coiffeur, le lundi, comme ça, j'étais coiffée toute la semaine.
- Speaker #1
Ah, bien !
- Speaker #2
Belle idée ! Oui, absolument. D'ailleurs, j'avais donné l'idée à mes petites collègues qui se disaient, pourquoi on va le samedi pour être à la maison, alors que si on est le lundi ? Et après, on faisait le lundi. Et les chaussures aussi. les chaussures. Si vous êtes bien coiffé et avec une belle paire de chaussures, vous pouvez passer n'importe où.
- Speaker #1
C'est toujours le cas aujourd'hui. Je suis d'accord avec vous.
- Speaker #0
C'est important pour une femme.
- Speaker #3
Moi, ça me fascine parce que j'ai l'impression que vous alliez beaucoup plus chez le coiffeur que notre génération. C'est sûr.
- Speaker #2
La génération, elles n'y vont pas, les filles. Plus elles sont mal coiffées, mieux elles sont.
- Speaker #0
Alors, pour notre défense,
- Speaker #1
le coiffeur est très cher.
- Speaker #0
Le coiffeur n'est pas donné ?
- Speaker #1
Je pense que le coiffeur a augmenté. Tout a augmenté.
- Speaker #0
Mais quand il est résidente, il y a Madame le Bastard qui va chez le coiffeur ou qui fait venir sa coiffeuse. C'est quelqu'un, effectivement, qui prend soin de sa personne, qui se met du rouge à lèvres. Madame Isabelle Assouline aussi se maquille, s'arrange bien. Vous avez Jocelyne aussi qui s'arrange très bien, qui a des tenues vestimentaires variées. Oui, mais c'est important.
- Speaker #1
Tout le monde a son nom de compliment. C'est magnifique.
- Speaker #0
Je ne veux pas oublier qui que ce soit.
- Speaker #1
C'est beau.
- Speaker #0
Oui, donc je suis très sensible au travail qu'effectuent ici à Océane les aides-soignantes et les infirmières.
- Speaker #2
Bravo d'en parler. Oui,
- Speaker #0
parce que ce sont des personnes qui ont un salaire qui, à mon avis, ne correspond pas à leur valeur. Et qui ont un travail remarquable.
- Speaker #2
Et qui ont leur valeur morale.
- Speaker #1
Justement, c'est super que vous en parliez. Quel est leur travail au quotidien avec vous ? Qu'est-ce qu'elles font exactement ?
- Speaker #0
Moi, personnellement, rien. Parce que moi, je me suis fiée à moi-même. Mais elles ont un travail difficile. Quand quelqu'un est malade ou handicapé, il faut faire la toilette intégralement. Il faut accompagner la personne aux toilettes. Il faut s'en occuper après. Et je tiens à terminer en les remerciant de tout mon cœur d'avoir eu la gentillesse et la patience de nous écouter. Merci à vous et à tout à l'heure.
- Speaker #1
Vous auriez presque pu faire ma conclusion. Moi, j'ai une dernière question à vous poser avant de... Avant de vous quitter aujourd'hui et de terminer cet épisode 2 de Club Tizane, quel est le meilleur conseil qu'on vous a donné dans votre vie et que vous aimeriez donner aujourd'hui aux gens qui nous regardent ou qui nous écoutent ?
- Speaker #0
Être à l'écoute.
- Speaker #1
Justement.
- Speaker #2
Et puis travail.
- Speaker #0
Être à l'écoute et considérer le travail des autres avec beaucoup de respect.
- Speaker #2
Exactement.
- Speaker #3
Eh bien, merci beaucoup en tout cas. C'était un plaisir de partager ce moment avec vous.
- Speaker #2
Merci Jean-Claude.
- Speaker #3
On va devoir changer de nom, malheureusement, ce ne sera plus le Club Tizane.
- Speaker #1
Mais on va rajouter Enco. Enco. Oui,
- Speaker #2
le petit zèle Enco. Ça vous va ?
- Speaker #0
Oui, c'est mieux.
- Speaker #1
Merci beaucoup de nous avoir accueillis chez vous, parce qu'on est ici chez vous. Ça a été un vrai plaisir. Je pense que Flo va se joindre à moi, d'échanger avec vous, d'en apprendre plus sur vous, personnellement, sur vous, votre génération.
- Speaker #0
Merci à vous. Et sur Océane aussi.
- Speaker #1
Sur Océane, bien sûr, qui, on l'entend, est une maison dans laquelle vous vous sentez bien, une résidence dans laquelle vous êtes… Oui,
- Speaker #2
oui.
- Speaker #1
Vous êtes… bien traité et que vous respectez et ça fait très plaisir de l'entendre. En tout cas, merci à tous de nous avoir suivis, peut-être sur YouTube, peut-être en podcast audio. N'hésitez pas à mettre un petit commentaire, à vous abonner à la chaîne, ça va nous aider beaucoup pour le référencement. Pareil, si vous nous écoutez en podcast audio, peut-être au sport, peut-être sur la route, peut-être en train de faire votre ménage à la maison.
- Speaker #2
C'est la chaîne YouTube.
- Speaker #1
Tout à fait, sur la chaîne YouTube. YouTube, YouTube, on peut dire ce qu'on veut. En tout cas, Merci beaucoup. C'était un plaisir d'échanger avec vous. Merci, Flo.
- Speaker #3
Avec plaisir. Merci à vous.
- Speaker #0
Merci à vous aussi.
- Speaker #1
Merci. Et on vous retrouve, je l'espère, très vite pour un troisième épisode de Club Tizane & Co.