Speaker #0Il y a quelques mois, au détour d'une interview, j'ai découvert l'auteur américaine Roxane Gay. Elle y évoquait entre autres son recueil de nouvelles Bad Feminist. J'avoue, je n'ai pas encore lu le livre, mais depuis cette interview, je cogite. Alors je vous emmène pour la question existentielle de la semaine. Est-ce que je suis une mauvaise féministe ? Moi c'est Viviane, et ça, c'est Corpus Royot, le podcast hors normes. Avant même de savoir si je suis une bonne ou une mauvaise féministe, ça serait peut-être déjà pas mal de définir si je suis une féministe. On va donc commencer par une définition. Je ne sors pas mon petit Larousse, mais je vais aller sur le site de l'Organisation des Nations Unies, qui dit Le féminisme est un mouvement qui vise à établir et à défendre les droits et des opportunités égales pour les femmes dans les domaines économiques, sociaux et politiques. Il s'agit de promouvoir l'égalité des sexes et de lutter. contre les discriminations basées sur le genre. Ok, donc il est important de rappeler qu'être féministe, ce n'est pas détester les hommes. Car on a bien tendance à avoir cette image-là du féminisme, de par le côté militant et des fois agressif, la dépiction du féminisme dans la pop culture, et encore plus aujourd'hui si on fait la contrebalance avec le mouvement masculiniste, qui explose sur les réseaux sociaux. Et oui, là il y a un problème. Parce que le terme masculiniste, ça veut bien dire la même chose que féministe. mais pour le genre masculin. Et donc, tous ces grands cons qu'on voit sur les réseaux sociaux qui disent que la femme, sa place, c'est dans la cuisine et qu'elle ne doit être que dominée, ce ne sont pas des masculinistes en fait, ce sont des misogynes, car ils ne sont pas en quête d'égalité, mais bien de domination. Et comme la langue française est bien faite, oui, il existe bien un pendant féminin à la misogynie, le fait de détester les hommes et de les mépriser, c'est la misandrie. Alors là, je vous rassure, c'est un terme qu'on entend tellement peu souvent, que j'ai dû aller chercher sur internet pour le sortir. Et pourtant, je devrais le savoir, parce que je l'ai été pendant très longtemps moi-même. Comme je ne veux pas que cette déclaration soit considérée comme une énième blague, je vais prendre le temps de me poser dessus. Car oui, je viens littéralement de faire un coming out, en reconnaissant que j'ai été une grosse connasse, et que pendant une période de ma vie, j'ai dénigré une bonne partie de la population, juste pour ce qu'ils étaient. Moi qui tiens tellement à mon individualité, je ne me rendais pas compte que je mettais les hommes dans une case. Mais vous allez peut-être me dire, Oui, mais c'est normal que tu n'aimes pas les hommes, tu es une femme. Bah en fait non, c'est pas normal. Comme je dis toujours, les choses sont pas binaires. C'est pas forcément le bien versus le mal, le ying versus le yang, les hommes contre les femmes. Bon, si on met de côté cette notion de haine et de dominance, et qu'on revient à cette quête d'égalité. Eh bien, je vais vous décevoir, mais je me suis jamais considérée comme une féministe. Et je pense que c'est ça qui fait de moi une féministe, justement. Je m'explique. Je pense que c'est vers 15-16 ans que j'ai vraiment pris conscience de la notion de genre. Je ne sais pas s'il y a vraiment eu un élément déclencheur, je pense que c'était plutôt une accumulation d'éléments, c'est-à-dire plusieurs années déjà à subir les règles, de voir mes potes mecs sortir comme ils voulaient, alors que moi, fille, je ne pouvais pas rentrer à n'importe quelle heure, ou alors que tout tournait autour des hormones et des relations amoureuses et du sexe. Enfin bon, à 16 ans, j'ai commencé à me border les seins parce que j'en avais marre d'être une fille. Je voulais être un mec pour avoir les mêmes droits et les mêmes chances qu'un mec. Mais le problème, ce n'était pas mon corps en tant que tel, c'était les possibilités que j'avais en tant que fille. Et puis, avec mon cerveau d'adolescente, j'ai eu une espèce de fulgurance. J'ai retourné le problème. Certes, j'étais une femme, mais en France et dans les années 2000. Donc c'est-à-dire que légalement, rien ne m'empêchait de faire exactement comme un homme. Et que la seule limitation que j'avais à agir comme un homme, à bénéficier des mêmes droits qu'un homme, eh bien c'était moi-même. J'ai donc enlevé ma barrière mentale et j'ai agi comme je le voulais. Comme on dit aujourd'hui. J'ai agi avec la même confiance qu'un homme blanc moyen. Car rappelons-le, en France, les hommes et les femmes ont les mêmes droits, les seules limites qu'il y a sont culturelles. Et j'ai donc vécu, et je vis donc toujours, selon le principe de qui je suis et mes capacités, et pas mon genre. Donc non, je ne me considère pas comme une féministe parce que je n'ai jamais pris mon genre en considération dans mes actions, mais en même temps, je suis une féministe parce que oui, je suis une femme, et je vis et je pr... promeut au quotidien le fait que j'ai les mêmes droits qu'un homme. Mais même si ça ressemble du féminisme, ça ne suffit pas à faire de moi une bonne féministe. Maintenant je me rends compte qu'il faut que je fasse un pas supplémentaire. Il est temps d'ouvrir sa gueule, parce qu'il y a des pays où les droits ne sont pas les mêmes pour les hommes et les femmes. Et que même en France, la norme sociale est encore si importante qu'on a souvent l'impression que les droits ne sont pas les mêmes pour les hommes et les femmes. Donc répétons encore une fois pour ceux qui sont au fond de la classe et qui n'ont pas bien suivi. C'est écrit dans notre constitution que nous sommes tous égaux en droit, les normes et tout le reste, on s'en fout. Bon, ça m'intéresse quand même de savoir ce que vous avez pensé de cet épisode. Alors, likez, partagez, commentez, et je vous retrouve sur Instagram, ad corpus riot, pour discuter constitution, discrimination et ping-pong. Et si vous êtes toujours là, vous savez que je vous kiffe.