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Déclic ou des claques ?

“Ingénieurs et chercheurs doivent intégrer les contraintes liées au dérèglement climatique dans leur travail.”

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43min |23/04/2024
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Description

Sans actions pour réduire la croissance de l’impact environnemental du numérique, son empreinte carbone pourrait tripler entre 2020 et 2050*. 

Face aux enjeux du dérèglement climatique, le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur s'engage pour trouver des solutions : écoconception, mutualisation, sensibilisation…Et de tous les corps de métiers, celui des ingénieurs semble particulièrement concerné. 

C’est pour évoquer la place du numérique responsable au sein d’une école d’ingénieurs et de la recherche que nous recevons deux enseignants-chercheurs de l’école Polytech Montpellier : Michel Robert, actuellement directeur du CINES, et Jean-Louis Bantignies, chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable de l’école et du réseau Polytech.

Une interview qui revient sur les engagements RSE de l’école, mais aussi sur le rôle des ingénieurs dans la transition écologique et l’attractivité du sujet du NR auprès des étudiants et des chercheurs.

Pour aller plus loin :  


Un podcast produit par le Groupe Isia , 1re entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable.

Éditorial & réalisation : Aparté Studio

Habillage & postproduction : Thibault Faucard & Bastien Nicolai


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #0

    Déclic ou déclac ? Vous entrez dans la boîte à idées sonores du numérique responsable. Un podcast où nos invités jettent un coup d'œil dans le rétroviseur et nous partagent leur expérience suite à la mise en place d'une démarche numérique responsable au sein de leur organisation. Leurs inspirations, leurs succès, leurs ratés, mais aussi des pépites, des exemples concrets comme autant d'invitations à leur emboîter le pas. Retrouvez tous les mois une nouvelle interview sans détour qui, je l'espère, vous convaincra que oui, le numérique responsable, c'est possible et accessible à tous. Déclic ou des claques ? Un podcast produit par le Groupe Isia, première entreprise et ESN labellisée numérique responsable. Entre défis, menaces et opportunités, le monde numérique est complexe et paradoxal. Sa réalité physique porte des conséquences environnementales, sociétales et énergétiques croissantes qu'il est urgent de mesurer, d'analyser et de résorber. Face à ces enjeux, les nouvelles générations développent une conscience écologique et sociale de plus en plus forte. Depuis quelques années, la transition numérique est devenue un axe stratégique du développement des établissements du supérieur, même si, nous le verrons, les choses ne sont pas si simples. Si le sujet transcende les corps de métier, il paraît en tout cas incontournable à celui d'ingénieur, puisqu'il fait partie de ceux qui peuvent contribuer à faire du numérique notre meilleur allié face aux dérèglements climatiques dans les prochaines années. Dans cet épisode, nous allons évoquer la place du numérique responsable au sein d'une école d'ingénieurs et de celle de la recherche. Nous allons aussi parler éco-conception, IA, éthique, mutualisation, puissance de calcul, bref, tout un programme. Et le choix des invités du jour n'est pas tout à fait innocent, puisque le campus de l'école que je reçois aujourd'hui a été foulé par plusieurs collaborateurs du groupe ISIA. Il n'est d'ailleurs pas rare d'en croiser certains qui interviennent régulièrement auprès des étudiants pour les former au sujet de l'UNR. C'est donc avec une curiosité teintée d'une certaine nostalgie que j'accueille Michel Robert et Jean-Louis Bantini de l'école Polytech Montpellier. Avec 15 écoles publiques et 4 écoles associées, plus de 17 000 élèves en formation et 90 000 ingénieurs en activité, Le groupe Polytech est l'un des plus grands réseaux d'écoles d'ingénieurs en France. Le campus de Montpellier, créé il y a plus de 40 ans, propose quant à lui 9 spécialités d'ingénieurs, parmi lesquelles l'informatique, la microélectronique ou les sciences de l'eau. Quelques mots maintenant sur mes invités. Après un doctorat sur les accélérateurs de particules, Jean-Louis est devenu enseignant-chercheur à l'Université de Montpellier en 2000, où il s'est intéressé à la relation entre structure et propriété physique de nanomatériaux. En 2009, il rejoint Polytech en tant que professeur au sein du département matériaux. Il est aujourd'hui chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable pour l'école et le réseau Polytech. Michel, de son côté, est professeur de microélectronique et actuellement en détachement comme directeur du CINES, le Centre Informatique National de l'Enseignement Supérieur. Ses travaux de recherche actuels concernent les enjeux liés à la sobriété numérique et notamment à la réduction de l'empreinte carbone des data centers. Bonjour à vous deux.

  • #1

    Bonjour.

  • #0

    Aujourd'hui, ce n'est donc pas un, mais deux invités que j'ai le plaisir de recevoir, mais vous n'allez pas échapper à notre première question habituelle. Quand avez-vous eu le déclic qu'à force de cliquer, on allait se prendre des claques ? Jean-Louis, je te laisse commencer.

  • #1

    Alors, je suis un peu déformé par le fait que je sois enseignant et que je suis un petit peu les choses. On dit, quand on parle de ces questions de transition écologique à nos élèves, que le gros problème, c'est ce qu'on appelle la grande accélération. C'est qu'aujourd'hui, on voit que si les indicateurs liés à l'activité socio-économique divergent, les impacts environnementaux aussi divergent de manière exponentielle. Et dans ce cadre-là, quand on regarde la place du numérique, le numérique, c'est pareil, c'est une très grande accélération. On parle de 9% de progression par an. À l'horizon 2040, on parle de 7% de l'empreinte carbone nationale. Alors qu'aujourd'hui elle est autour de 2,5%, donc je dirais que ces choses-là, j'en ai pris conscience de manière aiguë, ces dernières années en particulier, lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la mise en place de cours sur ces aspects-là, typiquement depuis une dizaine d'années.

  • #2

    En ce qui me concerne, il se trouve que mes travaux sont au cœur de ce monde numérique. Je travaille sur les architectures et la conception des circuits et des systèmes intégrés, matériel logiciel, microélectronique. Il y a une vingtaine d'années, j'étais toujours intéressé par des travaux menés en Suisse, au CESM Neuchâtel, où les acteurs travaillaient sur de la très faible consommation pour l'industrie horlogère ou d'autres applications. Et donc... ces sujets m'intéressaient. Et il se trouve qu'un des projets de recherche que j'ai pu mener au LIRM consiste à consister, et consiste toujours d'ailleurs, à réfléchir à, non pas à l'optimisation en vitesse du calcul, mais à l'optimisation en faire un calcul à énergie minimum. Et ça, ça a donné lieu à des plateformes qui permettent aujourd'hui de faire du calcul sous des panneaux photovoltaïques. Et donc, j'ai pris conscience, à partir du numérique, effectivement, donc c'est peut-être un peu l'inverse de Jean-Louis, des grands enjeux environnementaux, c'est-à-dire les impacts énergétiques, mais aussi les problèmes de ressources, les problèmes d'impact carbone, etc.

  • #0

    Au sein de Polytech, vous dites mener une politique volontariste en matière de numérique responsable. Est-ce que vous pouvez commencer par nous détailler ce qui est prévu en matière d'enseignement sur le sujet ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, au niveau de Polytech, il y a eu une évolution qui est plutôt significative pour les cours liés au numérique responsable. Je parle ici plus particulièrement des aspects numériques. Tout d'abord, au niveau transversal, dans le cadre du stock de formation pour tous les élèves, en tout sur les aspects transition écologique et développement soutenable, c'est une centaine d'heures. Et dans ce cadre-là, pour ce qui est du département numérique transversal, il y a un cours dédié. au numérique responsable. Il y a un deuxième niveau, c'est qu'on a souhaité, dans le cadre de cours transversaux qu'on met en place, dès le début de la formation disciplinaire, en troisième année, alors c'est dédié spécifiquement à la compréhension des enjeux de transition écologique par l'effet scientifique, et bien dans ce cadre-là, il y a un projet qui est lié à une initiation à l'éco-conception. Et là, spécifiquement, Pour nos jeunes qui sont plutôt dans les filières électroniques et numériques, ils ont une première introduction à une analyse de cycle de vie monocritère pour un petit appareil qui leur parle beaucoup, c'est un iPad. Pourquoi un iPad ? Parce que ces jeunes, lorsqu'ils arrivent à l'école, on leur donne tous un iPad pour suivre l'ensemble de la formation sur les trois ans. Alors maintenant, il y a aussi des choses évidemment qui se mettent en place dans le cadre des filières plus dédiées au numérique. La question de la sobriété numérique et sobriété énergétique est abordée dans les cours d'ALGO, en particulier via un bilan carbone qui est fait sur plusieurs types d'algorithmes. Il y a aussi dans le cadre des travaux dirigés d'économie, Des étudiants qui réalisent des exposés et des débats doivent intégrer une réflexion sur le développement durable et le développement soutenable. Dans le cadre des enseignements de quatrième année, toujours pour ces mêmes étudiants, alors là il y a un cours spécifiquement d'une quinzaine d'heures qui est dédié au management responsable. Alors là on parle à la fois de développement durable, mais aussi plus spécifiquement de son incarnation dans l'entreprise au travers de la RSE. Et là on a six heures sur le numérique responsable, sur la politique de l'entreprise, les implications des EPI, une introduction au label numérique responsable. 3 heures sur le management responsable et encore 6 heures plus transfert SAC sur les aspects liés à la santé, à la sécurité, au travail, avec les enjeux de réglementation, toute la politique SST. Concernant les fresques, dès l'année prochaine, dans le cadre d'une introduction par la sensibilisation aux grands enjeux de transition, on proposait jusqu'à maintenant la fresque du climat. L'année prochaine, il sera proposé à tous les élèves, s'ils le souhaitent, de la remplacer par la fresque du numérique responsable. Et de la même manière, dans le cadre de notre programme pluriannuel de conférences, chaque année, il y a au moins une voire deux conférences qui sont dédiées au numérique responsable.

  • #0

    Ce qui est très intéressant, c'est que les écoles d'ingénieurs promeuvent par nature la multidisciplinarité, de la thermodynamique à la microbiologie. Vos étudiants suivent un parcours très varié. Est-ce que vous diriez que le NR est parvenu à se faire une place au milieu de tous ces enseignements aujourd'hui ?

  • #2

    De toute façon, dans le domaine numérique, on va parler d'éléments fondamentaux interdisciplinaires. Et donc ça, ça rassemble quand même les étudiants, parce que le mot numérique... Il faut bien sûr explorer ces facettes matérielles et donc tout ce qui est réseau, tout ce qui est terminaux, tout ce qui est data center. Et le point commun, il faut de l'eau, il faut des ressources, il faut de l'énergie, il y a de la fabrication, il y a de l'utilisation, il y a une analyse du cycle de vie, notamment pour la fin de vie. Et ça, pour moi, ce sont les fondamentaux, c'est l'ADN de tout ingénieur, quelle que soit sa formation. Et il se trouve qu'évidemment, tous les ingénieurs sont des utilisateurs d'objets connectés, mais aussi d'ordinateurs, de calculs, de modélisations. Donc tous ces éléments... qui, à mon avis, font partie d'un socle. quelles que soient les formations, et puis chacun s'adapte. Mais il est évident que dans une école d'ingénieur, il y a évidemment des projets à réaliser et que les cahiers des charges de ces projets évoluent aujourd'hui en prenant en compte évidemment toutes ces considérations.

  • #1

    Le numérique est un excellent support pour introduire les aspects empreintes, parce qu'on voit quand même que du point de vue de la symbolique, on s'attend à un doublement de la consommation d'eau, de gaz à effet de serre, de l'énergie, des ressources d'ici 2035 sur ces aspects-là. Et ça leur parle tous.

  • #2

    Je compléterai en regardant aussi le fait que nos étudiants sont des citoyens. Donc l'objectif de la formation, c'est aussi de les sensibiliser à la question de biens communs. Et pour moi, le numérique, c'est un flux chez soi, le flux Internet, mais au même titre que le flux énergétique, que les besoins en consommation d'eau. Donc derrière, c'est des capteurs, c'est des mesures. Et insister sur le fait que ce soit l'eau, l'énergie électrique ou le flux Internet, le monde est fini et qu'à un moment donné, il faut réguler ses usages. On régule nos consommations d'eau l'été, d'énergie l'hiver, et le monde numérique, par contre, il n'y a pas de saison, c'est tout le temps. Et ça, se rapprocher de son quotidien et vivre aussi en considérant les aspects bien communs font partie aussi de la culture citoyenne, je pense effectivement de toutes les formations et bien entendu des écoles d'ingénieurs.

  • #0

    Alors, nous avons parlé offre de formation, je voudrais maintenant parler demande. Je suis tombée sur un sondage publié par le Réseau français étudiant pour le développement durable. Selon lui, 78% des étudiants considèrent qu'un établissement qui prend en compte les enjeux environnementaux est plus attractif que les autres. Est-ce que de votre côté, vous constatez un intérêt croissant de vos étudiants pour la thématique de la transition numérique ? Est-ce qu'ils sont nombreux et nombreux à vouloir y consacrer tout ou partie de leur carrière ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, je ne suis plus mitigé. Je ne sais pas si c'est lié à notre manière de proposer la formation ou si c'est lié à l'appétit des étudiants pour ces aspects-là. Ce que je remarque, c'est qu'on a un programme de conférences annuel qui est assez significatif. On parle de dix événements par an. Typiquement, Polytech Montpellier, c'est 1400 étudiants. On pourrait s'attendre que pour ces conférences, sur les grands enjeux, que ce soit le numérique, responsable ou des choses plus transversales. Nos amphis explosent, nos amphis ils n'explosent pas. Et je ne mesure pas bien quelle en est la raison. On les interroge beaucoup sur ces aspects-là, on fait des sondages, et typiquement, moi, le sondage que j'ai, l'idée que j'ai en tête, c'est que c'est plutôt 30% des jeunes qui sont réellement intéressés par ces questions-là. Après, on a une trentaine de pourcents qui sont dans un ventre creux, et puis... clairement une trentaine de pourcents qui marquent un désintérêt qui peut être assez significatif. Par contre, ce qui est assez nouveau, les premières générations à qui on a fait passer la phrase du climat, pour certains, ils étaient un peu angoissés. Aujourd'hui... Il y a une espèce de fatalisme qui les rend d'ailleurs plutôt décontractés par rapport au sujet. Ils nous disent finalement qu'on ne voit pas bien quelles sont les solutions. Donc on va continuer à faire comme avant. Et ça c'est un des problèmes. Parfois notre capacité faible à leur proposer d'engager l'action pour faire des choses significatives. Par contre, un des points clés, c'est qu'ils ont toujours des opinions sur le sujet, beaucoup d'informations. Mais... Finalement, quand on discute avec eux de manière un peu solide, ils n'ont pas de connaissances consolidées sur la base d'essais scientifiques. Et ça, c'est un problème. Et je voudrais venir sur une initiative qui avait été faite par notre département d'Anglais. en particulier auprès des filières numériques et électroniques qui ne sont pas toujours facilement mobilisables sur ces questions-là. Eh bien, ils les ont fait travailler sur le sujet du numérique responsable et ça a donné lieu à des projets qu'ils ont ensuite soutenus. Et j'étais présent dans le cadre de ces soutenances. Et ce que j'ai vu dans ce cadre-là, c'est que leur regard changeait complètement. Quand on leur laissait le temps d'avoir une appropriation des sujets, des questions et de leurs complexités, d'un seul coup, leur regard changeait complètement. Donc peut-être que dans ce cadre-là, finalement, il y a pas mal d'espoir. Donc je dirais qu'il y a un accord de principe sur lequel il faut travailler la question. Il y a un aspect un petit peu schizophrène lié aux pratiques. Et puis, il y a peut-être l'espoir lié au fait qu'il faut peut-être changer nous aussi, nous remettre en cause sur la manière d'appréhender ces questions, parce que j'ai cet exemple, dans le cadre des projets, dans le cadre des cours d'engrais, qui était vraiment intéressant.

  • #2

    C'est un débat qui n'est pas simple puisque les enseignants font partie de générations plus anciennes que les étudiants, je veux dire, par construction. Et effectivement, on peut aussi nous reprocher nos propres usages et nos propres impacts sur la planète. On a affaire à des générations où moi je pense que le vecteur important c'est de les sensibiliser sur les usages, montrer ce que sont des usages utiles ou futiles, et surtout on est dans des formations scientifiques, apprendre à modéliser, à calculer avec la plus grande rigueur possible. de façon à pouvoir effectivement prendre conscience sur des sujets pratiques de ses propres impacts. Vous parlez de la question de l'entrée à l'école, des étudiants, leur motivation, mais ce qui va compter aussi, c'est la sortie et ce qui les motive pour poursuivre leur carrière professionnelle. On voit bien que là aussi, il y a des changements de comportement par rapport à ce qu'est le travail, ce que sont les entreprises plus ou moins vertueuses, etc.

  • #0

    L'un des sujets sur lesquels se distingue votre école, c'est celui de l'inclusion et de la diversité, qui comprend notamment le taux de boursier, d'alternant, le montant des frais de scolarité et la parité. Est-ce que vous pouvez m'en dire plus là-dessus ?

  • #1

    Oui, tout à fait. Ce critère lié à l'inclusion et à la diversité, c'est évidemment important pour l'école. Ça fait partie d'un des piliers stratégiques de l'école, qu'on appelle pilier de développement durable et de responsabilité sociétale. Dans ce cadre-là, on a un chargé de mission spécifiquement qui s'occupe du pilier social. Alors, il y a des conférences qui sont organisées chaque année, des tables rondes. La dernière, c'était au début du mois, c'était sur la place des femmes dans le domaine de la recherche. Et puis, on a différents chargés de mission dans l'école sur des aspects comme le handicap ou encore sur les aspects des violences sexuelles et sexistes. Donc, en effet, c'est des points éminemment importants pour nous.

  • #0

    Entre 2020 et 2021, Polytech Montpellier et trois autres grandes écoles ont été accompagnées dans le cadre de l'opération Campus Responsable. Au programme, neuf mois d'accompagnement, une session de formation pour les porteurs de projets et des moments d'échange et de travaux collectifs. Quel bilan tirez-vous de ce dispositif ?

  • #1

    2020, à l'époque de Campus Responsable, c'est une époque où on est assez bien identifié parce que finalement on a été parmi les dix premières écoles qui ont eu le label des DRS. sur lequel Campus Responsable était très présent comme acteur. et on se posait beaucoup de questions sur la place du numérique responsable, alors pas évidemment dans les filières dédiées au numérique, mais dans le cadre de l'enseignement transversal pour les départements hors spécialité électronique numérique. Et je dirais que l'accompagnement et les interactions avec les professionnels qu'on a rencontrés dans le cadre de ce projet nous ont beaucoup aidés, déjà à voir que les questions qu'on se posait finalement, on se les posait tous, et en particulier ça a permis de se rendre compte qu'on était vraiment au début de quelque chose. Dans l'école, on s'est intéressé très tôt à l'éco-conception et on avait été frappé par le caractère macroscopique des inventaires techniques qui étaient faits en amont des calculs d'impact, par exemple pour quantifier l'impact du numérique. Et puis ça d'ailleurs nous a donné des envies, quand je fais le bilan finalement, un des points clés c'est que ça nous a donné envie de faire des projets d'éco-conception. dédié au numérique et en particulier à la fin de ce projet, c'est 2021 ou 2022, je crois que c'est 2022, on a mis en place un projet industriel de fin d'étude, pluridépartement, où on a fait travailler un étudiant du département matériaux, qui connaissait bien l'éco-conception, un étudiant électronicien, et un étudiant informaticien pour travailler la question de l'impact des solutions informatiques, donc des iPads qui étaient proposés à tous nos jeunes lorsqu'ils arrivaient en formation. Et donc la question qu'on s'était posée, c'était finalement, est-ce qu'on peut quantifier l'impact, alors plutôt motocritère, sur l'aspect gaz à effet de serre, l'impact de la formation de l'étudiant à la mise à disposition d'un iPad. Et ça en utilisant des outils d'ACV professionnels, académiques, qu'on connaissait bien. et je dirais que c'était assez intéressant parce que ça a permis à nos jeunes de pouvoir appréhender ce type de projet de manière pour le coup complètement transdisciplinaire donc je dirais que c'est grâce à ce type de projet porté par Campus Responsable que finalement on a peut-être un peu en avance de phase par rapport à ce qu'on aurait fait normalement on a commencé à intéresser à ces questions-là

  • #0

    Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la recherche et de l'innovation. Vous êtes tous les deux très impliqués sur le sujet, notamment toi Michel à travers tes fonctions de directeur du CINES. Aujourd'hui, quel est le niveau d'attractivité des enjeux du NR dans ce monde de la recherche ?

  • #2

    Alors là, je pourrais répondre avec déjà quelques éléments sociétaux. Quand on fait de la recherche ou du développement industriel, il faut voir quand même qu'il y a un cadre juridique qui a pas mal évolué. Donc je citerai quand même la loi de 2020 dite AJEC sur l'anti-gaspillage pour une économie circulaire. Donc, tout est dans le titre. Évidemment, c'est là où on va trouver des concepts comme l'indice de réparabilité des équipements, etc. La loi sur le numérique responsable, qui date de 2021, qui vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique, elle est quand même extrêmement précise sur prendre conscience des impacts environnementaux, des aspects pratiques pour le renouvellement des terminaux. Voilà, donc tous ces éléments... qui peuvent être complétés par le cadre sur les données, par le cadre européen qui s'installe sur l'intelligence artificielle, montrent bien qu'il y a quand même des limites en cadre donné, quels que soient les éléments produits en recherche plus amont ou en recherche appliquée dans le secteur public ou le secteur privé. Ensuite, il est évident qu'il y a un engouement actuellement parce que la compétition entre les fabricants, on va dire du numérique, fait que le critère de consommation énergétique est primordial. Alors à l'origine, c'est évidemment pour le confort par rapport à l'autonomie des smartphones ou autres objets sur batterie, mais de plus en plus, tous les objets sont quelque part numériques, avec de plus en plus d'IA dans tous les domaines, sans exception. Donc je vais prendre un exemple, le véhicule autonome. Donc ça fait partie des grands enjeux actuels. Donc d'abord le véhicule électrique. C'est un choix de société, on va vers le tout électrique. Si vous rajoutez de l'autonomie, eh bien ça veut dire qu'il y aura beaucoup de capteurs, beaucoup d'électronique, beaucoup de logiciels embarqués et quelque part une communication pour les voitures autonomes avec des centres de données pour justement calculer les trajectoires. Eh bien, ça veut dire qu'une voiture autonome, elle aura deux pompes. La pompe à mobilité, pour les batteries, et la pompe à énergie qu'on ne mesure pas aujourd'hui. Donc, c'est des sujets quand même assez sensibles. C'est-à-dire toute cette consommation par rapport aux usages. Donc, personnellement, je pense qu'une voiture électrique autonome individuelle, évidemment, ça pose des problèmes majeurs d'impact. Si c'est objet mutualisé, c'est autre chose. Dans ce que je veux dire... c'est qu'on va dans une société où, d'une part, les impacts de tout ce qu'on va imaginer sont primordiaux, et en même temps, bien sûr, je dirige le CINES, on a un des calculateurs les plus performants au monde, en termes de performance de calcul, on va parler de pétaflops, c'est-à-dire de millions de milliards d'instructions par seconde. Enfin, sa première caractéristique, c'est d'être actuellement le calculateur en production le plus sobre au monde. et pourtant c'est 1,3 MW. Par contre, évidemment qu'on le mutualise à la communauté des chercheurs et autres, et pour vous donner un exemple par rapport aux interactions entre la recherche et la modélisation et le calcul, c'est aujourd'hui ce que va offrir le CINES, c'est non simplement une infrastructure, mais aussi des retours sur les performances énergétiques et le bilan carbone de chaque calcul. Donc ça veut dire que cette sensibilisation dans la recherche, elle est partout. On peut citer aussi le Labo 1.5 avec qui on travaille, justement pour essayer, parce que les constructeurs sont un var d'informations en général, lorsqu'on veut calculer les bilans carbone. Parce que ces bilans carbone, il faut aller les chercher jusqu'au niveau des composants de la fabrication. Voilà, donc ce que je veux dire, c'est que ces questions de numérique insensable concernent... Tous les secteurs de la recherche, les deux variables, mais dans les cœurs de métiers, bien sûr, se posent des questions d'utilisation des moyens de calcul, justement, pour accompagner, par exemple, les rapports du GIEC. Ces rapports, aujourd'hui, existent parce qu'il y a eu des mesures, des modisations, des calculs qui sont là. Tout ce qui est, évidemment, un pas de carbone, et donc la relation avec les forêts sur la planète, tout ça se modélise, tout ça se calcule. Donc, on est vraiment avec des enjeux. qui mixe les enjeux de calcul et de données. Et voilà, il s'agit de trouver le bon équilibre en montrant en quoi la recherche sur ces sujets peut être utile par rapport aux impacts sociétaux. J'ai cité par exemple les véhicules autonomes. Et en même temps, évidemment, prendre conscience des usages futiles. Je vais quand même en citer quelques-uns. Évidemment qu'on est dans un monde avec des règles économiques. Enfin... Est-ce qu'on a réellement besoin dans nos usages de la 5G, de la 6G ? L'autre usage futile qui fait l'objet de beaucoup de communication, les GAFAM investissent des dizaines de milliards actuellement sur des centres de données, des centres de calcul pour les sujets liés à l'intelligence artificielle qui va bouleverser, et on le voit bien dans le quotidien. Mais derrière, il y a un coût énergétique. Le métavers, qui sont ces environnements virtuels, nécessite des moyens, je dirais, colossaux de calcul et de bilan génétique. Il est évident que cette régulation est nécessaire. Un chercheur, comme un élève ingénieur et un futur ingénieur, doivent considérer dans leurs activités ces cahiers des charges. Moi, j'ai appris beaucoup, justement, je continue de me former, c'est ça qui est essentiel, parce que j'ai des bases, j'ai une formation d'ingénieur. Enfin, l'analyse du cycle de vie, ce n'est pas un gadget, c'est la réalité du monde dans lequel on est, et ça s'applique à tous les domaines.

  • #0

    Sur cette thématique de l'intelligence artificielle, est-ce que tu dirais que les enjeux du numérique responsable parviennent à émerger ? Au milieu de toutes ces innovations, de tous ces chantiers en cours ?

  • #2

    Pas encore, vraiment. Je pense que déjà, on a un rendez-vous qui est un peu paradoxal, c'est 2030. 2030, c'est en même temps solliciter toute la matière grise de notre pays pour la compétitivité et donc tous les enjeux industriels. Et en même temps, c'est un rendez-vous pour le climat. Et quelque part, il faudrait quand même bien corréler les deux, ce qui n'est pas toujours le cas. Donc ça, c'est un premier point. Ensuite, par rapport à l'intelligence artificielle, on commence à avoir des retours sur les phases d'apprentissage qui consomment énormément. Là, on vient de faire au CINES avec des acteurs français l'apprentissage pour les sciences juridiques, ce qu'on appelle un LLM, à 7 milliards de paramètres. Donc tout ça, ça consomme de l'énergie et ramené à des outils… comme OpenAI, ChatGPT et tout ce qui existe aujourd'hui. Le rapport IA Ambition pour la France donne quelques chiffres qu'on commence à voir. Par exemple, le poids de l'IA, c'est l'équivalent pour les calculs d'un pays comme la Suède. Alors que ce soit les calculs pour l'apprentissage ou ce qu'on appelle les inférences, c'est-à-dire ensuite pour les applications. On sait que le numérique, à l'échelle mondiale, c'est les impacts de 3-4 fois la France. Donc l'intelligence artificielle va évidemment avoir des impacts. une fois de plus il va falloir réglementer un certain nombre de choses je dirais des aspects liés à la protection de nos modes de vie mais en même temps donc aux enjeux liés à la sobriété

  • #0

    Alors justement, sur cet enjeu de la réglementation, je voudrais citer le grand baromètre de la transition écologique qui a été publié en 2021 par le collectif Pour un réveil écologique. Il recense les mesures mises en place par les écoles et universités en termes d'intégration des enjeux de transition écologique et sociale dans leur formation et leur fonctionnement. Il tire quatre grandes conclusions. L'écologie est de plus en plus présente dans les formations. Les stratégies des établissements manquent de cohérence. Les écoles et universités manquent de moyens humains et financiers pour traiter le sujet. Et enfin, un plan national est nécessaire pour embarquer tous les établissements dans la dynamique. Michel, toi qui as une vue nationale sur ces enjeux, que peux-tu dire sur ce dernier point, celui de la création d'un plan national ?

  • #2

    Je pense qu'il faut être assez prudent, puisque des plans nationaux, il y en a beaucoup, notamment un sur l'intelligence artificielle que je viens d'évoquer. J'aurais tendance à dire déjà un petit coup dans la rétroviseur. Regardons ce qui s'est passé dans les années 70. On a eu quand même des lanceurs d'alerte qui n'ont pas été entendus. Voilà, il faut dire clairement, on a perdu un demi-siècle, et notamment les scientifiques, puisque quelque part, il y a des choses qui avaient déjà été mises en évidence de manière plus ou moins politique. Mais en tout cas, ces rapports existent, je pense aux rapports Midos notamment, et à diverses contributions. Donc aujourd'hui, bien sûr qu'il y a un réveil. et j'allais dire que je parlais de ce rendez-vous de 2030, il est à la fois écologique et il porte l'ambition industrielle, il est évident que je vois mal une industrie aujourd'hui progresser sans prendre en compte ses enjeux. Donc pour moi, c'est d'abord une prise de conscience sociétale, évidemment qui passe dans la formation, avant l'université, à l'université, dans les écoles. Et ensuite, bien sûr, il y a la formation des formateurs, il ne faut pas négliger. Ce n'est pas forcément développer de nouveaux cours, de nouvelles formations.

  • #0

    C'est injecter ces préoccupations, j'allais dire dans chaque enseignement, parce que quelque part, on est tous confrontés à ces sujets. Donc, un plan national, oui, de sensibilisation, oui, pour donner des moyens supplémentaires, mais quelque part, c'est aussi apprendre à mutualiser, à mettre en œuvre ces pratiques.

  • #1

    Je suis complètement d'accord avec Michel quand il dit qu'il faut regarder dans le rétroviseur, mais du point de vue de la loi, c'est aussi intéressant de regarder dans le rétroviseur. L'article 55 du Grenelle de l'environnement de 2009, il y a déjà énormément de choses à l'intérieur, mais finalement derrière, vous avez une communauté de l'enseignement supérieur au niveau national qui se structure. C'est le début de ce qu'on appelle les rencontres des référents développement durable de l'enseignement supérieur. Ça s'est structuré de manière assez remarquable. Les écoles, les universités ont envoyé des référents dans le cadre de rencontres nationales. C'était porté par la conférence des présidents d'universités, c'était comporté par la conférence des grandes écoles. Et finalement, au bout de quelques années... Eh bien, on se rendait compte qu'il ne se passait pas grand-chose. Et des lois, il y en a eu d'autres. La loi de 2020 qui, pour cette nouvelle mission de l'enseignement supérieur sur la formation aux enjeux de transition écologique, c'est une loi importante. Et puis derrière, Michel en a parlé, la loi climat résilience, la loi AGEC, la loi RIN, pour parler du numérique responsable. Finalement, là où les choses ont commencé à changer, c'est très très récemment. C'est le plan climat de diversité et transition écologique de l'enseignement supérieur de la recherche qui a été publié en novembre 2022. Et là, pour le coup, je pense qu'on veut parler d'un plan. parce que là vous avez un certain nombre d'objectifs et d'actions avec des indicateurs et des jalons qui sont très clairs, il y en a 24. Ce qui manquait précédemment c'était que vous ayez des lettres de cadrage et là il y a des lettres de cadrage et ces lettres de cadrage sont très claires et imposent, alors invitent mais ne sont pas loin d'imposer à tous les établissements de mettre en place des chengya directeurs pour la transition écologique et ça s'est décliné. Dans une logique qui est effectivement celle du plan vert, issu du Grenelle de l'environnement, sur les cinq piliers. A la fois la gouvernance, à la fois les aspects liés à la formation, à la recherche, à l'empreinte des établissements. Obligation quand même à l'horizon, je crois 2025, de faire un bilan carbone dans tous les établissements, c'est pas rien. Et à la fois sur le pilier social. Et par exemple pour la formation, aujourd'hui nos universités, nos écoles sont complètement en marche parce que... Il y a une demande de mettre en place 30 heures d'enseignement au niveau licence, donc très tôt, il y a urgence, obligation de mettre 30 heures avec certification pour tous les élèves du supérieur sur les enjeux de transition écologique et de responsabilité sociétale. La formation des formateurs dont a parlé Michel, c'est le deuxième étage de la fusée. On est aujourd'hui dans le cadre des groupes de travail du ministère sur la mise en place des grandes recommandations sur la formation des formateurs parce qu'on sait bien que l'enjeu c'est d'intégrer ces aspects liés aux enjeux de transition écologique dans toutes les formations disciplinaires. Vous voyez, ça c'est tout récent, parce que c'est des lettres de cadrage qui sont de juin 2023. Mais je dirais que de ce point de vue-là, les choses bougent. Et les choses bougent pourquoi ? Parce qu'il y a le cadrage, sinon il faut des décrets. Et c'est ce qui a manqué précédemment, le manque de décrets. Je dirais qu'il y a un autre point quand même qui fait bouger, mais alors là spécifiquement les écoles d'ingénieurs. Et ça c'est complètement supranational. C'est finalement la dynamique qui a été initiée au niveau des réglementations européennes. Avant 1994, il n'y a pas de réglementation européenne environnementale. Puis il y en a une première sur la prise en compte des impacts liés au packaging. Et puis ensuite, on voit une augmentation des réglementations environnementales et qui est amusante. C'est aussi une grande accélération, c'est une véritable exponentielle. Donc je dirais que ça, ça positionne les entreprises et de fait, un peu plus tard, ça positionne aussi nos formations pour répondre à ces besoins.

  • #0

    Je voudrais rajouter un point. Il me semble important, au-delà de la formation, d'introduire beaucoup plus de débats dans les établissements, portés par des étudiants, portés par des conférenciers. Moi-même, je fais beaucoup de conférences sur ce sujet de mérite responsable. J'ai dû en faire une trentaine depuis trois, quatre ans. Et je pense qu'il y a beaucoup d'initiatives à prendre, mais le débat pour moi est central parce que c'est ce qui permet d'expliquer les limites, les dérives et donc ensuite prendre les bonnes décisions plutôt que de faire des effets d'annonce comme on peut le voir actuellement avec certains politiques.

  • #2

    Lorsque nous avons échangé ensemble en amont de cette interview, vous disiez que l'intégration du NR au sein de votre école était, je cite, un chantier ouvert Est-ce que vous pourriez nous citer, selon vous, les paramètres clés à avoir en tête pour pouvoir avancer sur le sujet ?

  • #0

    Moi, dans ma pratique, ce que je peux dire, effectivement, moi je suis au cœur des enjeux numériques, mais enfin, d'abord, il y a l'impulsion d'un directeur. Le directeur de Polytech s'engage vivement, et donc ça c'est un point, Polytech Montpellier. Ensuite, Jean-Louis anime un groupe de travail hebdomadaire. Tous les vendredis, les collègues se réunissent pendant une heure, une heure et demie, pour justement tester des idées, mettre en place tous ces processus. Il y a un investissement de quelques personnes, et notre ambition, c'est de tirer les autres enseignants, évidemment les étudiants qui participent. Donc, ça ne s'est pas fait un jour, mais quelque part, ça me serait important. Ça va sur des choses aussi simples, je répète. Un bâtiment dans un campus, ça consomme. Ça consomme de l'eau, de l'électricité et du numérique. Qu'est-ce qu'on mesure ? Ce n'est pas toujours simple. Quand on mutualise ou pas, c'est les locaux dans des campus universitaires très grands. Donc, il y a besoin de ce niveau de responsabilisation et toujours cette alternance entre le local et le global. Le local dans une formation jusqu'au global à Polytech. Le local d'une infrastructure qui accueille les étudiants de Polytech au sein de l'Université de Montpellier. Et en même temps, bien sûr, je vais prendre ces exemples qui me semblent très importants. Le rapport de l'ADEME, les derniers rapports sont extrêmement précis, sauf sur certains points. Par exemple, le local c'est la France, le global c'est la planète. Ce qu'on a mesuré sur la consommation d'Atacenter, c'est la consommation d'Atacenter français. mais à part qu'il n'y a pas de frontières dans les flux numériques. Donc si on veut avoir des approches, je dirais, bien précises d'un sujet donné, c'est ce qui compte actuellement, c'est les intercenteurs, les chefs de la planète. Il y a des choses qu'on mesure moins, si ce n'est les trafics Internet entrant et sortant de notre pays. C'est basculement entre le local qui peut être l'attitude d'une personne face à l'environnement numérique jusqu'à la collectivité d'une école, d'un établissement, d'un pays. Voilà, c'est tout ce qui doit nous faire vibrer. Et je répète, il y a quand même pas mal de supports, pas mal de sites Internet. Je pense à SheetProject, GreenIT, l'Institut numérique responsable, l'ADEME. Voilà, il y a une richesse aussi importante. Cette information, elle est là. Il faut la mettre en pratique. Et donc, tous ces éléments, c'est des engagements à toutes les échelles.

  • #2

    Pour clore cette interview, je voudrais vous demander comment vous définiriez le rôle de l'ingénieur à l'heure de la frénésie numérique. Lorsque vous en parlez à vos étudiants, par exemple, quel message vous leur transmettez sur le sujet ?

  • #1

    C'est la tarte à la crème, ces aspects-là. Mais je dirais qu'au-delà de l'expertise technique, notre mission première, c'est de former des jeunes avec une expertise technique reconnue dans leur domaine de compétences. Je crois qu'un des points clés, c'est que l'ingénieur doit se poser quand même les questions du service rendu. des solutions proposées en les contextualisant sur les limites planétaires. Et ces limites planétaires, elles sont de plus en plus fortes. En ce sens, très probablement, un des points clés, c'est de faire revenir peut-être de manière un peu plus significative des aspects liés à l'éthique de l'ingénieur. On voit bien que lorsqu'on discute avec nos jeunes, parfois on est très effrayé par le caractère égocentrique de ces jeunes qui sont issus finalement de l'éducation, souvent... Pour ceux qui ont eu la chance d'avoir été un petit peu des enfants rois, éduqués avec une consommation à outrance, et je crois que dans ce cadre-là, il y a vraiment un point clé qui est, à mon sens, qu'ils puissent exercer leur sens des responsabilités dans le cadre de leur fonction professionnelle et peut-être même, Ardès, poser la question de renoncer si les dynamiques proposées sont incompatibles avec les enjeux de l'immunité planétaire. Et le dernier point, je le répète, je le dis tout le temps à mes jeunes, interrogez-vous sur le service rendu d'une solution que vous proposez. Est-ce que finalement, le service rendu, il n'est déjà pas rendu par un autre produit existant ? À mon avis, ce sont des points importants pour l'ingénieur qui est formé aujourd'hui et qui rentre sur le marché du travail.

  • #0

    Alors en ce qui me concerne, j'ai une formation d'ingénieur et je dirais que ce que j'ai appris, c'est une formation de base. Et c'est parce que j'ai une formation de base solide, qui va des mathématiques à la physique, que j'ai pu m'adapter relativement facilement à un sujet nouveau qui est le numérique récent sain. Voilà, donc je dirais que c'est ce qu'on attend de la formation des ingénieurs et il ne faut pas rajouter trop d'options avec tous les effets de mode associés. Je dirais qu'il faut aussi distinguer les émotions de la raison. On le voit sur l'arrivée des outils d'IA générative. Oui, il y a beaucoup d'émotions, on peut s'interroger sur les impacts de l'IA. Enfin, il faut aussi comprendre ses enjeux, ses limites et évidemment ses impacts sociétaux. Donc, c'est ce qu'on attend d'un ingénieur. Ensuite, je pense que l'ingénieur doit avoir la curiosité dans sa formation de s'intéresser aux enjeux sociaux. Pour le numérique, je crois que c'est assez simple. Le numérique est remède et poison, donc tout est affaire de dosage. Et pour comprendre ça, il faut apprendre à modéliser, à calculer. Il faut bien distinguer évidemment le monde réel du monde virtuel. Ce monde virtuel qui est la face cachée de l'iceberg, qui a quand même un impact énorme. et bien sûr, comme je l'ai dit, les enjeux utiles et futiles. Et moi, mon message est extrêmement optimiste. Il y a des défis, il y a beaucoup de menaces, mais énormément d'opportunités. Et moi, ce que j'attends des ingénieurs, c'est de la créativité, de l'innovation. Voilà, donc je crois que... Notre planète a traversé au travers des âges plusieurs révolutions, révolution industrielle, révolution électrique. La révolution numérique qu'on annonce depuis une cinquantaine d'années, je crois qu'on est au cœur. Ça s'accélère en plus, mais à raison de plus pour prendre le recul qu'il faut. Donc tout ça pour moi, c'est ce qui fait qu'on a besoin de plus d'ingénieurs encore, des ingénieurs responsables, et je crois que c'est le message principal à faire passer aujourd'hui sur le sujet numérique responsable.

  • #2

    Plus d'ingénieurs responsables, c'est le message sur lequel nous allons rester aujourd'hui. Nous l'avons vu, le NR est un sujet de plus en plus présent dans le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur en France, notamment sous l'impulsion d'écoles comme la vôtre, mais le chemin reste encore long. Entre angoisse, fatalisme et indifférence, les thématiques du développement durable peinent parfois à atteindre les étudiants. Pour reprendre la formule de Michel, le numérique est à la fois remède et poison, tout est question de dosage, mais difficile de doser quand le sujet avance si vite. Je pense ici notamment à l'intelligence artificielle. Heureusement, il y a des bonnes nouvelles. On peut par exemple citer le label DDRS, décroché par Polytech Montpellier, qui fait partie des initiatives qui permettent de se poser les bonnes questions et de véritablement passer à l'action. On peut aussi penser aux avancées technologiques vertueuses, comme le nouveau supercalculateur du Cines, qui permet à la recherche publique française d'allier grande puissance de calcul et faible consommation énergétique. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de transdisciplinarité scientifique. Pour faire face aux défis de notre siècle, il semblerait qu'il faille faire entrer en jeu des sciences un peu moins exactes, celles de l'éthique et de la philosophie. Merci à nos auditrices et auditeurs de nous avoir écoutés jusqu'au bout. Si ce podcast vous plaît, n'hésitez pas à vous abonner, à nous laisser des étoiles et à en parler autour de vous, sur vos réseaux ou à votre prochaine pause café. Pour marquer la fin de sa première saison, des clics ou des claques vous donnent bientôt rendez-vous avec des invités bien particuliers. Un podcast produit par le groupe ISIA, première entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable, réalisé par Apartheid Studio, accompagné de Bastien Nicolai et Thibaut Faucard à la technique. A bientôt !

Description

Sans actions pour réduire la croissance de l’impact environnemental du numérique, son empreinte carbone pourrait tripler entre 2020 et 2050*. 

Face aux enjeux du dérèglement climatique, le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur s'engage pour trouver des solutions : écoconception, mutualisation, sensibilisation…Et de tous les corps de métiers, celui des ingénieurs semble particulièrement concerné. 

C’est pour évoquer la place du numérique responsable au sein d’une école d’ingénieurs et de la recherche que nous recevons deux enseignants-chercheurs de l’école Polytech Montpellier : Michel Robert, actuellement directeur du CINES, et Jean-Louis Bantignies, chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable de l’école et du réseau Polytech.

Une interview qui revient sur les engagements RSE de l’école, mais aussi sur le rôle des ingénieurs dans la transition écologique et l’attractivité du sujet du NR auprès des étudiants et des chercheurs.

Pour aller plus loin :  


Un podcast produit par le Groupe Isia , 1re entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable.

Éditorial & réalisation : Aparté Studio

Habillage & postproduction : Thibault Faucard & Bastien Nicolai


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #0

    Déclic ou déclac ? Vous entrez dans la boîte à idées sonores du numérique responsable. Un podcast où nos invités jettent un coup d'œil dans le rétroviseur et nous partagent leur expérience suite à la mise en place d'une démarche numérique responsable au sein de leur organisation. Leurs inspirations, leurs succès, leurs ratés, mais aussi des pépites, des exemples concrets comme autant d'invitations à leur emboîter le pas. Retrouvez tous les mois une nouvelle interview sans détour qui, je l'espère, vous convaincra que oui, le numérique responsable, c'est possible et accessible à tous. Déclic ou des claques ? Un podcast produit par le Groupe Isia, première entreprise et ESN labellisée numérique responsable. Entre défis, menaces et opportunités, le monde numérique est complexe et paradoxal. Sa réalité physique porte des conséquences environnementales, sociétales et énergétiques croissantes qu'il est urgent de mesurer, d'analyser et de résorber. Face à ces enjeux, les nouvelles générations développent une conscience écologique et sociale de plus en plus forte. Depuis quelques années, la transition numérique est devenue un axe stratégique du développement des établissements du supérieur, même si, nous le verrons, les choses ne sont pas si simples. Si le sujet transcende les corps de métier, il paraît en tout cas incontournable à celui d'ingénieur, puisqu'il fait partie de ceux qui peuvent contribuer à faire du numérique notre meilleur allié face aux dérèglements climatiques dans les prochaines années. Dans cet épisode, nous allons évoquer la place du numérique responsable au sein d'une école d'ingénieurs et de celle de la recherche. Nous allons aussi parler éco-conception, IA, éthique, mutualisation, puissance de calcul, bref, tout un programme. Et le choix des invités du jour n'est pas tout à fait innocent, puisque le campus de l'école que je reçois aujourd'hui a été foulé par plusieurs collaborateurs du groupe ISIA. Il n'est d'ailleurs pas rare d'en croiser certains qui interviennent régulièrement auprès des étudiants pour les former au sujet de l'UNR. C'est donc avec une curiosité teintée d'une certaine nostalgie que j'accueille Michel Robert et Jean-Louis Bantini de l'école Polytech Montpellier. Avec 15 écoles publiques et 4 écoles associées, plus de 17 000 élèves en formation et 90 000 ingénieurs en activité, Le groupe Polytech est l'un des plus grands réseaux d'écoles d'ingénieurs en France. Le campus de Montpellier, créé il y a plus de 40 ans, propose quant à lui 9 spécialités d'ingénieurs, parmi lesquelles l'informatique, la microélectronique ou les sciences de l'eau. Quelques mots maintenant sur mes invités. Après un doctorat sur les accélérateurs de particules, Jean-Louis est devenu enseignant-chercheur à l'Université de Montpellier en 2000, où il s'est intéressé à la relation entre structure et propriété physique de nanomatériaux. En 2009, il rejoint Polytech en tant que professeur au sein du département matériaux. Il est aujourd'hui chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable pour l'école et le réseau Polytech. Michel, de son côté, est professeur de microélectronique et actuellement en détachement comme directeur du CINES, le Centre Informatique National de l'Enseignement Supérieur. Ses travaux de recherche actuels concernent les enjeux liés à la sobriété numérique et notamment à la réduction de l'empreinte carbone des data centers. Bonjour à vous deux.

  • #1

    Bonjour.

  • #0

    Aujourd'hui, ce n'est donc pas un, mais deux invités que j'ai le plaisir de recevoir, mais vous n'allez pas échapper à notre première question habituelle. Quand avez-vous eu le déclic qu'à force de cliquer, on allait se prendre des claques ? Jean-Louis, je te laisse commencer.

  • #1

    Alors, je suis un peu déformé par le fait que je sois enseignant et que je suis un petit peu les choses. On dit, quand on parle de ces questions de transition écologique à nos élèves, que le gros problème, c'est ce qu'on appelle la grande accélération. C'est qu'aujourd'hui, on voit que si les indicateurs liés à l'activité socio-économique divergent, les impacts environnementaux aussi divergent de manière exponentielle. Et dans ce cadre-là, quand on regarde la place du numérique, le numérique, c'est pareil, c'est une très grande accélération. On parle de 9% de progression par an. À l'horizon 2040, on parle de 7% de l'empreinte carbone nationale. Alors qu'aujourd'hui elle est autour de 2,5%, donc je dirais que ces choses-là, j'en ai pris conscience de manière aiguë, ces dernières années en particulier, lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la mise en place de cours sur ces aspects-là, typiquement depuis une dizaine d'années.

  • #2

    En ce qui me concerne, il se trouve que mes travaux sont au cœur de ce monde numérique. Je travaille sur les architectures et la conception des circuits et des systèmes intégrés, matériel logiciel, microélectronique. Il y a une vingtaine d'années, j'étais toujours intéressé par des travaux menés en Suisse, au CESM Neuchâtel, où les acteurs travaillaient sur de la très faible consommation pour l'industrie horlogère ou d'autres applications. Et donc... ces sujets m'intéressaient. Et il se trouve qu'un des projets de recherche que j'ai pu mener au LIRM consiste à consister, et consiste toujours d'ailleurs, à réfléchir à, non pas à l'optimisation en vitesse du calcul, mais à l'optimisation en faire un calcul à énergie minimum. Et ça, ça a donné lieu à des plateformes qui permettent aujourd'hui de faire du calcul sous des panneaux photovoltaïques. Et donc, j'ai pris conscience, à partir du numérique, effectivement, donc c'est peut-être un peu l'inverse de Jean-Louis, des grands enjeux environnementaux, c'est-à-dire les impacts énergétiques, mais aussi les problèmes de ressources, les problèmes d'impact carbone, etc.

  • #0

    Au sein de Polytech, vous dites mener une politique volontariste en matière de numérique responsable. Est-ce que vous pouvez commencer par nous détailler ce qui est prévu en matière d'enseignement sur le sujet ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, au niveau de Polytech, il y a eu une évolution qui est plutôt significative pour les cours liés au numérique responsable. Je parle ici plus particulièrement des aspects numériques. Tout d'abord, au niveau transversal, dans le cadre du stock de formation pour tous les élèves, en tout sur les aspects transition écologique et développement soutenable, c'est une centaine d'heures. Et dans ce cadre-là, pour ce qui est du département numérique transversal, il y a un cours dédié. au numérique responsable. Il y a un deuxième niveau, c'est qu'on a souhaité, dans le cadre de cours transversaux qu'on met en place, dès le début de la formation disciplinaire, en troisième année, alors c'est dédié spécifiquement à la compréhension des enjeux de transition écologique par l'effet scientifique, et bien dans ce cadre-là, il y a un projet qui est lié à une initiation à l'éco-conception. Et là, spécifiquement, Pour nos jeunes qui sont plutôt dans les filières électroniques et numériques, ils ont une première introduction à une analyse de cycle de vie monocritère pour un petit appareil qui leur parle beaucoup, c'est un iPad. Pourquoi un iPad ? Parce que ces jeunes, lorsqu'ils arrivent à l'école, on leur donne tous un iPad pour suivre l'ensemble de la formation sur les trois ans. Alors maintenant, il y a aussi des choses évidemment qui se mettent en place dans le cadre des filières plus dédiées au numérique. La question de la sobriété numérique et sobriété énergétique est abordée dans les cours d'ALGO, en particulier via un bilan carbone qui est fait sur plusieurs types d'algorithmes. Il y a aussi dans le cadre des travaux dirigés d'économie, Des étudiants qui réalisent des exposés et des débats doivent intégrer une réflexion sur le développement durable et le développement soutenable. Dans le cadre des enseignements de quatrième année, toujours pour ces mêmes étudiants, alors là il y a un cours spécifiquement d'une quinzaine d'heures qui est dédié au management responsable. Alors là on parle à la fois de développement durable, mais aussi plus spécifiquement de son incarnation dans l'entreprise au travers de la RSE. Et là on a six heures sur le numérique responsable, sur la politique de l'entreprise, les implications des EPI, une introduction au label numérique responsable. 3 heures sur le management responsable et encore 6 heures plus transfert SAC sur les aspects liés à la santé, à la sécurité, au travail, avec les enjeux de réglementation, toute la politique SST. Concernant les fresques, dès l'année prochaine, dans le cadre d'une introduction par la sensibilisation aux grands enjeux de transition, on proposait jusqu'à maintenant la fresque du climat. L'année prochaine, il sera proposé à tous les élèves, s'ils le souhaitent, de la remplacer par la fresque du numérique responsable. Et de la même manière, dans le cadre de notre programme pluriannuel de conférences, chaque année, il y a au moins une voire deux conférences qui sont dédiées au numérique responsable.

  • #0

    Ce qui est très intéressant, c'est que les écoles d'ingénieurs promeuvent par nature la multidisciplinarité, de la thermodynamique à la microbiologie. Vos étudiants suivent un parcours très varié. Est-ce que vous diriez que le NR est parvenu à se faire une place au milieu de tous ces enseignements aujourd'hui ?

  • #2

    De toute façon, dans le domaine numérique, on va parler d'éléments fondamentaux interdisciplinaires. Et donc ça, ça rassemble quand même les étudiants, parce que le mot numérique... Il faut bien sûr explorer ces facettes matérielles et donc tout ce qui est réseau, tout ce qui est terminaux, tout ce qui est data center. Et le point commun, il faut de l'eau, il faut des ressources, il faut de l'énergie, il y a de la fabrication, il y a de l'utilisation, il y a une analyse du cycle de vie, notamment pour la fin de vie. Et ça, pour moi, ce sont les fondamentaux, c'est l'ADN de tout ingénieur, quelle que soit sa formation. Et il se trouve qu'évidemment, tous les ingénieurs sont des utilisateurs d'objets connectés, mais aussi d'ordinateurs, de calculs, de modélisations. Donc tous ces éléments... qui, à mon avis, font partie d'un socle. quelles que soient les formations, et puis chacun s'adapte. Mais il est évident que dans une école d'ingénieur, il y a évidemment des projets à réaliser et que les cahiers des charges de ces projets évoluent aujourd'hui en prenant en compte évidemment toutes ces considérations.

  • #1

    Le numérique est un excellent support pour introduire les aspects empreintes, parce qu'on voit quand même que du point de vue de la symbolique, on s'attend à un doublement de la consommation d'eau, de gaz à effet de serre, de l'énergie, des ressources d'ici 2035 sur ces aspects-là. Et ça leur parle tous.

  • #2

    Je compléterai en regardant aussi le fait que nos étudiants sont des citoyens. Donc l'objectif de la formation, c'est aussi de les sensibiliser à la question de biens communs. Et pour moi, le numérique, c'est un flux chez soi, le flux Internet, mais au même titre que le flux énergétique, que les besoins en consommation d'eau. Donc derrière, c'est des capteurs, c'est des mesures. Et insister sur le fait que ce soit l'eau, l'énergie électrique ou le flux Internet, le monde est fini et qu'à un moment donné, il faut réguler ses usages. On régule nos consommations d'eau l'été, d'énergie l'hiver, et le monde numérique, par contre, il n'y a pas de saison, c'est tout le temps. Et ça, se rapprocher de son quotidien et vivre aussi en considérant les aspects bien communs font partie aussi de la culture citoyenne, je pense effectivement de toutes les formations et bien entendu des écoles d'ingénieurs.

  • #0

    Alors, nous avons parlé offre de formation, je voudrais maintenant parler demande. Je suis tombée sur un sondage publié par le Réseau français étudiant pour le développement durable. Selon lui, 78% des étudiants considèrent qu'un établissement qui prend en compte les enjeux environnementaux est plus attractif que les autres. Est-ce que de votre côté, vous constatez un intérêt croissant de vos étudiants pour la thématique de la transition numérique ? Est-ce qu'ils sont nombreux et nombreux à vouloir y consacrer tout ou partie de leur carrière ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, je ne suis plus mitigé. Je ne sais pas si c'est lié à notre manière de proposer la formation ou si c'est lié à l'appétit des étudiants pour ces aspects-là. Ce que je remarque, c'est qu'on a un programme de conférences annuel qui est assez significatif. On parle de dix événements par an. Typiquement, Polytech Montpellier, c'est 1400 étudiants. On pourrait s'attendre que pour ces conférences, sur les grands enjeux, que ce soit le numérique, responsable ou des choses plus transversales. Nos amphis explosent, nos amphis ils n'explosent pas. Et je ne mesure pas bien quelle en est la raison. On les interroge beaucoup sur ces aspects-là, on fait des sondages, et typiquement, moi, le sondage que j'ai, l'idée que j'ai en tête, c'est que c'est plutôt 30% des jeunes qui sont réellement intéressés par ces questions-là. Après, on a une trentaine de pourcents qui sont dans un ventre creux, et puis... clairement une trentaine de pourcents qui marquent un désintérêt qui peut être assez significatif. Par contre, ce qui est assez nouveau, les premières générations à qui on a fait passer la phrase du climat, pour certains, ils étaient un peu angoissés. Aujourd'hui... Il y a une espèce de fatalisme qui les rend d'ailleurs plutôt décontractés par rapport au sujet. Ils nous disent finalement qu'on ne voit pas bien quelles sont les solutions. Donc on va continuer à faire comme avant. Et ça c'est un des problèmes. Parfois notre capacité faible à leur proposer d'engager l'action pour faire des choses significatives. Par contre, un des points clés, c'est qu'ils ont toujours des opinions sur le sujet, beaucoup d'informations. Mais... Finalement, quand on discute avec eux de manière un peu solide, ils n'ont pas de connaissances consolidées sur la base d'essais scientifiques. Et ça, c'est un problème. Et je voudrais venir sur une initiative qui avait été faite par notre département d'Anglais. en particulier auprès des filières numériques et électroniques qui ne sont pas toujours facilement mobilisables sur ces questions-là. Eh bien, ils les ont fait travailler sur le sujet du numérique responsable et ça a donné lieu à des projets qu'ils ont ensuite soutenus. Et j'étais présent dans le cadre de ces soutenances. Et ce que j'ai vu dans ce cadre-là, c'est que leur regard changeait complètement. Quand on leur laissait le temps d'avoir une appropriation des sujets, des questions et de leurs complexités, d'un seul coup, leur regard changeait complètement. Donc peut-être que dans ce cadre-là, finalement, il y a pas mal d'espoir. Donc je dirais qu'il y a un accord de principe sur lequel il faut travailler la question. Il y a un aspect un petit peu schizophrène lié aux pratiques. Et puis, il y a peut-être l'espoir lié au fait qu'il faut peut-être changer nous aussi, nous remettre en cause sur la manière d'appréhender ces questions, parce que j'ai cet exemple, dans le cadre des projets, dans le cadre des cours d'engrais, qui était vraiment intéressant.

  • #2

    C'est un débat qui n'est pas simple puisque les enseignants font partie de générations plus anciennes que les étudiants, je veux dire, par construction. Et effectivement, on peut aussi nous reprocher nos propres usages et nos propres impacts sur la planète. On a affaire à des générations où moi je pense que le vecteur important c'est de les sensibiliser sur les usages, montrer ce que sont des usages utiles ou futiles, et surtout on est dans des formations scientifiques, apprendre à modéliser, à calculer avec la plus grande rigueur possible. de façon à pouvoir effectivement prendre conscience sur des sujets pratiques de ses propres impacts. Vous parlez de la question de l'entrée à l'école, des étudiants, leur motivation, mais ce qui va compter aussi, c'est la sortie et ce qui les motive pour poursuivre leur carrière professionnelle. On voit bien que là aussi, il y a des changements de comportement par rapport à ce qu'est le travail, ce que sont les entreprises plus ou moins vertueuses, etc.

  • #0

    L'un des sujets sur lesquels se distingue votre école, c'est celui de l'inclusion et de la diversité, qui comprend notamment le taux de boursier, d'alternant, le montant des frais de scolarité et la parité. Est-ce que vous pouvez m'en dire plus là-dessus ?

  • #1

    Oui, tout à fait. Ce critère lié à l'inclusion et à la diversité, c'est évidemment important pour l'école. Ça fait partie d'un des piliers stratégiques de l'école, qu'on appelle pilier de développement durable et de responsabilité sociétale. Dans ce cadre-là, on a un chargé de mission spécifiquement qui s'occupe du pilier social. Alors, il y a des conférences qui sont organisées chaque année, des tables rondes. La dernière, c'était au début du mois, c'était sur la place des femmes dans le domaine de la recherche. Et puis, on a différents chargés de mission dans l'école sur des aspects comme le handicap ou encore sur les aspects des violences sexuelles et sexistes. Donc, en effet, c'est des points éminemment importants pour nous.

  • #0

    Entre 2020 et 2021, Polytech Montpellier et trois autres grandes écoles ont été accompagnées dans le cadre de l'opération Campus Responsable. Au programme, neuf mois d'accompagnement, une session de formation pour les porteurs de projets et des moments d'échange et de travaux collectifs. Quel bilan tirez-vous de ce dispositif ?

  • #1

    2020, à l'époque de Campus Responsable, c'est une époque où on est assez bien identifié parce que finalement on a été parmi les dix premières écoles qui ont eu le label des DRS. sur lequel Campus Responsable était très présent comme acteur. et on se posait beaucoup de questions sur la place du numérique responsable, alors pas évidemment dans les filières dédiées au numérique, mais dans le cadre de l'enseignement transversal pour les départements hors spécialité électronique numérique. Et je dirais que l'accompagnement et les interactions avec les professionnels qu'on a rencontrés dans le cadre de ce projet nous ont beaucoup aidés, déjà à voir que les questions qu'on se posait finalement, on se les posait tous, et en particulier ça a permis de se rendre compte qu'on était vraiment au début de quelque chose. Dans l'école, on s'est intéressé très tôt à l'éco-conception et on avait été frappé par le caractère macroscopique des inventaires techniques qui étaient faits en amont des calculs d'impact, par exemple pour quantifier l'impact du numérique. Et puis ça d'ailleurs nous a donné des envies, quand je fais le bilan finalement, un des points clés c'est que ça nous a donné envie de faire des projets d'éco-conception. dédié au numérique et en particulier à la fin de ce projet, c'est 2021 ou 2022, je crois que c'est 2022, on a mis en place un projet industriel de fin d'étude, pluridépartement, où on a fait travailler un étudiant du département matériaux, qui connaissait bien l'éco-conception, un étudiant électronicien, et un étudiant informaticien pour travailler la question de l'impact des solutions informatiques, donc des iPads qui étaient proposés à tous nos jeunes lorsqu'ils arrivaient en formation. Et donc la question qu'on s'était posée, c'était finalement, est-ce qu'on peut quantifier l'impact, alors plutôt motocritère, sur l'aspect gaz à effet de serre, l'impact de la formation de l'étudiant à la mise à disposition d'un iPad. Et ça en utilisant des outils d'ACV professionnels, académiques, qu'on connaissait bien. et je dirais que c'était assez intéressant parce que ça a permis à nos jeunes de pouvoir appréhender ce type de projet de manière pour le coup complètement transdisciplinaire donc je dirais que c'est grâce à ce type de projet porté par Campus Responsable que finalement on a peut-être un peu en avance de phase par rapport à ce qu'on aurait fait normalement on a commencé à intéresser à ces questions-là

  • #0

    Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la recherche et de l'innovation. Vous êtes tous les deux très impliqués sur le sujet, notamment toi Michel à travers tes fonctions de directeur du CINES. Aujourd'hui, quel est le niveau d'attractivité des enjeux du NR dans ce monde de la recherche ?

  • #2

    Alors là, je pourrais répondre avec déjà quelques éléments sociétaux. Quand on fait de la recherche ou du développement industriel, il faut voir quand même qu'il y a un cadre juridique qui a pas mal évolué. Donc je citerai quand même la loi de 2020 dite AJEC sur l'anti-gaspillage pour une économie circulaire. Donc, tout est dans le titre. Évidemment, c'est là où on va trouver des concepts comme l'indice de réparabilité des équipements, etc. La loi sur le numérique responsable, qui date de 2021, qui vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique, elle est quand même extrêmement précise sur prendre conscience des impacts environnementaux, des aspects pratiques pour le renouvellement des terminaux. Voilà, donc tous ces éléments... qui peuvent être complétés par le cadre sur les données, par le cadre européen qui s'installe sur l'intelligence artificielle, montrent bien qu'il y a quand même des limites en cadre donné, quels que soient les éléments produits en recherche plus amont ou en recherche appliquée dans le secteur public ou le secteur privé. Ensuite, il est évident qu'il y a un engouement actuellement parce que la compétition entre les fabricants, on va dire du numérique, fait que le critère de consommation énergétique est primordial. Alors à l'origine, c'est évidemment pour le confort par rapport à l'autonomie des smartphones ou autres objets sur batterie, mais de plus en plus, tous les objets sont quelque part numériques, avec de plus en plus d'IA dans tous les domaines, sans exception. Donc je vais prendre un exemple, le véhicule autonome. Donc ça fait partie des grands enjeux actuels. Donc d'abord le véhicule électrique. C'est un choix de société, on va vers le tout électrique. Si vous rajoutez de l'autonomie, eh bien ça veut dire qu'il y aura beaucoup de capteurs, beaucoup d'électronique, beaucoup de logiciels embarqués et quelque part une communication pour les voitures autonomes avec des centres de données pour justement calculer les trajectoires. Eh bien, ça veut dire qu'une voiture autonome, elle aura deux pompes. La pompe à mobilité, pour les batteries, et la pompe à énergie qu'on ne mesure pas aujourd'hui. Donc, c'est des sujets quand même assez sensibles. C'est-à-dire toute cette consommation par rapport aux usages. Donc, personnellement, je pense qu'une voiture électrique autonome individuelle, évidemment, ça pose des problèmes majeurs d'impact. Si c'est objet mutualisé, c'est autre chose. Dans ce que je veux dire... c'est qu'on va dans une société où, d'une part, les impacts de tout ce qu'on va imaginer sont primordiaux, et en même temps, bien sûr, je dirige le CINES, on a un des calculateurs les plus performants au monde, en termes de performance de calcul, on va parler de pétaflops, c'est-à-dire de millions de milliards d'instructions par seconde. Enfin, sa première caractéristique, c'est d'être actuellement le calculateur en production le plus sobre au monde. et pourtant c'est 1,3 MW. Par contre, évidemment qu'on le mutualise à la communauté des chercheurs et autres, et pour vous donner un exemple par rapport aux interactions entre la recherche et la modélisation et le calcul, c'est aujourd'hui ce que va offrir le CINES, c'est non simplement une infrastructure, mais aussi des retours sur les performances énergétiques et le bilan carbone de chaque calcul. Donc ça veut dire que cette sensibilisation dans la recherche, elle est partout. On peut citer aussi le Labo 1.5 avec qui on travaille, justement pour essayer, parce que les constructeurs sont un var d'informations en général, lorsqu'on veut calculer les bilans carbone. Parce que ces bilans carbone, il faut aller les chercher jusqu'au niveau des composants de la fabrication. Voilà, donc ce que je veux dire, c'est que ces questions de numérique insensable concernent... Tous les secteurs de la recherche, les deux variables, mais dans les cœurs de métiers, bien sûr, se posent des questions d'utilisation des moyens de calcul, justement, pour accompagner, par exemple, les rapports du GIEC. Ces rapports, aujourd'hui, existent parce qu'il y a eu des mesures, des modisations, des calculs qui sont là. Tout ce qui est, évidemment, un pas de carbone, et donc la relation avec les forêts sur la planète, tout ça se modélise, tout ça se calcule. Donc, on est vraiment avec des enjeux. qui mixe les enjeux de calcul et de données. Et voilà, il s'agit de trouver le bon équilibre en montrant en quoi la recherche sur ces sujets peut être utile par rapport aux impacts sociétaux. J'ai cité par exemple les véhicules autonomes. Et en même temps, évidemment, prendre conscience des usages futiles. Je vais quand même en citer quelques-uns. Évidemment qu'on est dans un monde avec des règles économiques. Enfin... Est-ce qu'on a réellement besoin dans nos usages de la 5G, de la 6G ? L'autre usage futile qui fait l'objet de beaucoup de communication, les GAFAM investissent des dizaines de milliards actuellement sur des centres de données, des centres de calcul pour les sujets liés à l'intelligence artificielle qui va bouleverser, et on le voit bien dans le quotidien. Mais derrière, il y a un coût énergétique. Le métavers, qui sont ces environnements virtuels, nécessite des moyens, je dirais, colossaux de calcul et de bilan génétique. Il est évident que cette régulation est nécessaire. Un chercheur, comme un élève ingénieur et un futur ingénieur, doivent considérer dans leurs activités ces cahiers des charges. Moi, j'ai appris beaucoup, justement, je continue de me former, c'est ça qui est essentiel, parce que j'ai des bases, j'ai une formation d'ingénieur. Enfin, l'analyse du cycle de vie, ce n'est pas un gadget, c'est la réalité du monde dans lequel on est, et ça s'applique à tous les domaines.

  • #0

    Sur cette thématique de l'intelligence artificielle, est-ce que tu dirais que les enjeux du numérique responsable parviennent à émerger ? Au milieu de toutes ces innovations, de tous ces chantiers en cours ?

  • #2

    Pas encore, vraiment. Je pense que déjà, on a un rendez-vous qui est un peu paradoxal, c'est 2030. 2030, c'est en même temps solliciter toute la matière grise de notre pays pour la compétitivité et donc tous les enjeux industriels. Et en même temps, c'est un rendez-vous pour le climat. Et quelque part, il faudrait quand même bien corréler les deux, ce qui n'est pas toujours le cas. Donc ça, c'est un premier point. Ensuite, par rapport à l'intelligence artificielle, on commence à avoir des retours sur les phases d'apprentissage qui consomment énormément. Là, on vient de faire au CINES avec des acteurs français l'apprentissage pour les sciences juridiques, ce qu'on appelle un LLM, à 7 milliards de paramètres. Donc tout ça, ça consomme de l'énergie et ramené à des outils… comme OpenAI, ChatGPT et tout ce qui existe aujourd'hui. Le rapport IA Ambition pour la France donne quelques chiffres qu'on commence à voir. Par exemple, le poids de l'IA, c'est l'équivalent pour les calculs d'un pays comme la Suède. Alors que ce soit les calculs pour l'apprentissage ou ce qu'on appelle les inférences, c'est-à-dire ensuite pour les applications. On sait que le numérique, à l'échelle mondiale, c'est les impacts de 3-4 fois la France. Donc l'intelligence artificielle va évidemment avoir des impacts. une fois de plus il va falloir réglementer un certain nombre de choses je dirais des aspects liés à la protection de nos modes de vie mais en même temps donc aux enjeux liés à la sobriété

  • #0

    Alors justement, sur cet enjeu de la réglementation, je voudrais citer le grand baromètre de la transition écologique qui a été publié en 2021 par le collectif Pour un réveil écologique. Il recense les mesures mises en place par les écoles et universités en termes d'intégration des enjeux de transition écologique et sociale dans leur formation et leur fonctionnement. Il tire quatre grandes conclusions. L'écologie est de plus en plus présente dans les formations. Les stratégies des établissements manquent de cohérence. Les écoles et universités manquent de moyens humains et financiers pour traiter le sujet. Et enfin, un plan national est nécessaire pour embarquer tous les établissements dans la dynamique. Michel, toi qui as une vue nationale sur ces enjeux, que peux-tu dire sur ce dernier point, celui de la création d'un plan national ?

  • #2

    Je pense qu'il faut être assez prudent, puisque des plans nationaux, il y en a beaucoup, notamment un sur l'intelligence artificielle que je viens d'évoquer. J'aurais tendance à dire déjà un petit coup dans la rétroviseur. Regardons ce qui s'est passé dans les années 70. On a eu quand même des lanceurs d'alerte qui n'ont pas été entendus. Voilà, il faut dire clairement, on a perdu un demi-siècle, et notamment les scientifiques, puisque quelque part, il y a des choses qui avaient déjà été mises en évidence de manière plus ou moins politique. Mais en tout cas, ces rapports existent, je pense aux rapports Midos notamment, et à diverses contributions. Donc aujourd'hui, bien sûr qu'il y a un réveil. et j'allais dire que je parlais de ce rendez-vous de 2030, il est à la fois écologique et il porte l'ambition industrielle, il est évident que je vois mal une industrie aujourd'hui progresser sans prendre en compte ses enjeux. Donc pour moi, c'est d'abord une prise de conscience sociétale, évidemment qui passe dans la formation, avant l'université, à l'université, dans les écoles. Et ensuite, bien sûr, il y a la formation des formateurs, il ne faut pas négliger. Ce n'est pas forcément développer de nouveaux cours, de nouvelles formations.

  • #0

    C'est injecter ces préoccupations, j'allais dire dans chaque enseignement, parce que quelque part, on est tous confrontés à ces sujets. Donc, un plan national, oui, de sensibilisation, oui, pour donner des moyens supplémentaires, mais quelque part, c'est aussi apprendre à mutualiser, à mettre en œuvre ces pratiques.

  • #1

    Je suis complètement d'accord avec Michel quand il dit qu'il faut regarder dans le rétroviseur, mais du point de vue de la loi, c'est aussi intéressant de regarder dans le rétroviseur. L'article 55 du Grenelle de l'environnement de 2009, il y a déjà énormément de choses à l'intérieur, mais finalement derrière, vous avez une communauté de l'enseignement supérieur au niveau national qui se structure. C'est le début de ce qu'on appelle les rencontres des référents développement durable de l'enseignement supérieur. Ça s'est structuré de manière assez remarquable. Les écoles, les universités ont envoyé des référents dans le cadre de rencontres nationales. C'était porté par la conférence des présidents d'universités, c'était comporté par la conférence des grandes écoles. Et finalement, au bout de quelques années... Eh bien, on se rendait compte qu'il ne se passait pas grand-chose. Et des lois, il y en a eu d'autres. La loi de 2020 qui, pour cette nouvelle mission de l'enseignement supérieur sur la formation aux enjeux de transition écologique, c'est une loi importante. Et puis derrière, Michel en a parlé, la loi climat résilience, la loi AGEC, la loi RIN, pour parler du numérique responsable. Finalement, là où les choses ont commencé à changer, c'est très très récemment. C'est le plan climat de diversité et transition écologique de l'enseignement supérieur de la recherche qui a été publié en novembre 2022. Et là, pour le coup, je pense qu'on veut parler d'un plan. parce que là vous avez un certain nombre d'objectifs et d'actions avec des indicateurs et des jalons qui sont très clairs, il y en a 24. Ce qui manquait précédemment c'était que vous ayez des lettres de cadrage et là il y a des lettres de cadrage et ces lettres de cadrage sont très claires et imposent, alors invitent mais ne sont pas loin d'imposer à tous les établissements de mettre en place des chengya directeurs pour la transition écologique et ça s'est décliné. Dans une logique qui est effectivement celle du plan vert, issu du Grenelle de l'environnement, sur les cinq piliers. A la fois la gouvernance, à la fois les aspects liés à la formation, à la recherche, à l'empreinte des établissements. Obligation quand même à l'horizon, je crois 2025, de faire un bilan carbone dans tous les établissements, c'est pas rien. Et à la fois sur le pilier social. Et par exemple pour la formation, aujourd'hui nos universités, nos écoles sont complètement en marche parce que... Il y a une demande de mettre en place 30 heures d'enseignement au niveau licence, donc très tôt, il y a urgence, obligation de mettre 30 heures avec certification pour tous les élèves du supérieur sur les enjeux de transition écologique et de responsabilité sociétale. La formation des formateurs dont a parlé Michel, c'est le deuxième étage de la fusée. On est aujourd'hui dans le cadre des groupes de travail du ministère sur la mise en place des grandes recommandations sur la formation des formateurs parce qu'on sait bien que l'enjeu c'est d'intégrer ces aspects liés aux enjeux de transition écologique dans toutes les formations disciplinaires. Vous voyez, ça c'est tout récent, parce que c'est des lettres de cadrage qui sont de juin 2023. Mais je dirais que de ce point de vue-là, les choses bougent. Et les choses bougent pourquoi ? Parce qu'il y a le cadrage, sinon il faut des décrets. Et c'est ce qui a manqué précédemment, le manque de décrets. Je dirais qu'il y a un autre point quand même qui fait bouger, mais alors là spécifiquement les écoles d'ingénieurs. Et ça c'est complètement supranational. C'est finalement la dynamique qui a été initiée au niveau des réglementations européennes. Avant 1994, il n'y a pas de réglementation européenne environnementale. Puis il y en a une première sur la prise en compte des impacts liés au packaging. Et puis ensuite, on voit une augmentation des réglementations environnementales et qui est amusante. C'est aussi une grande accélération, c'est une véritable exponentielle. Donc je dirais que ça, ça positionne les entreprises et de fait, un peu plus tard, ça positionne aussi nos formations pour répondre à ces besoins.

  • #0

    Je voudrais rajouter un point. Il me semble important, au-delà de la formation, d'introduire beaucoup plus de débats dans les établissements, portés par des étudiants, portés par des conférenciers. Moi-même, je fais beaucoup de conférences sur ce sujet de mérite responsable. J'ai dû en faire une trentaine depuis trois, quatre ans. Et je pense qu'il y a beaucoup d'initiatives à prendre, mais le débat pour moi est central parce que c'est ce qui permet d'expliquer les limites, les dérives et donc ensuite prendre les bonnes décisions plutôt que de faire des effets d'annonce comme on peut le voir actuellement avec certains politiques.

  • #2

    Lorsque nous avons échangé ensemble en amont de cette interview, vous disiez que l'intégration du NR au sein de votre école était, je cite, un chantier ouvert Est-ce que vous pourriez nous citer, selon vous, les paramètres clés à avoir en tête pour pouvoir avancer sur le sujet ?

  • #0

    Moi, dans ma pratique, ce que je peux dire, effectivement, moi je suis au cœur des enjeux numériques, mais enfin, d'abord, il y a l'impulsion d'un directeur. Le directeur de Polytech s'engage vivement, et donc ça c'est un point, Polytech Montpellier. Ensuite, Jean-Louis anime un groupe de travail hebdomadaire. Tous les vendredis, les collègues se réunissent pendant une heure, une heure et demie, pour justement tester des idées, mettre en place tous ces processus. Il y a un investissement de quelques personnes, et notre ambition, c'est de tirer les autres enseignants, évidemment les étudiants qui participent. Donc, ça ne s'est pas fait un jour, mais quelque part, ça me serait important. Ça va sur des choses aussi simples, je répète. Un bâtiment dans un campus, ça consomme. Ça consomme de l'eau, de l'électricité et du numérique. Qu'est-ce qu'on mesure ? Ce n'est pas toujours simple. Quand on mutualise ou pas, c'est les locaux dans des campus universitaires très grands. Donc, il y a besoin de ce niveau de responsabilisation et toujours cette alternance entre le local et le global. Le local dans une formation jusqu'au global à Polytech. Le local d'une infrastructure qui accueille les étudiants de Polytech au sein de l'Université de Montpellier. Et en même temps, bien sûr, je vais prendre ces exemples qui me semblent très importants. Le rapport de l'ADEME, les derniers rapports sont extrêmement précis, sauf sur certains points. Par exemple, le local c'est la France, le global c'est la planète. Ce qu'on a mesuré sur la consommation d'Atacenter, c'est la consommation d'Atacenter français. mais à part qu'il n'y a pas de frontières dans les flux numériques. Donc si on veut avoir des approches, je dirais, bien précises d'un sujet donné, c'est ce qui compte actuellement, c'est les intercenteurs, les chefs de la planète. Il y a des choses qu'on mesure moins, si ce n'est les trafics Internet entrant et sortant de notre pays. C'est basculement entre le local qui peut être l'attitude d'une personne face à l'environnement numérique jusqu'à la collectivité d'une école, d'un établissement, d'un pays. Voilà, c'est tout ce qui doit nous faire vibrer. Et je répète, il y a quand même pas mal de supports, pas mal de sites Internet. Je pense à SheetProject, GreenIT, l'Institut numérique responsable, l'ADEME. Voilà, il y a une richesse aussi importante. Cette information, elle est là. Il faut la mettre en pratique. Et donc, tous ces éléments, c'est des engagements à toutes les échelles.

  • #2

    Pour clore cette interview, je voudrais vous demander comment vous définiriez le rôle de l'ingénieur à l'heure de la frénésie numérique. Lorsque vous en parlez à vos étudiants, par exemple, quel message vous leur transmettez sur le sujet ?

  • #1

    C'est la tarte à la crème, ces aspects-là. Mais je dirais qu'au-delà de l'expertise technique, notre mission première, c'est de former des jeunes avec une expertise technique reconnue dans leur domaine de compétences. Je crois qu'un des points clés, c'est que l'ingénieur doit se poser quand même les questions du service rendu. des solutions proposées en les contextualisant sur les limites planétaires. Et ces limites planétaires, elles sont de plus en plus fortes. En ce sens, très probablement, un des points clés, c'est de faire revenir peut-être de manière un peu plus significative des aspects liés à l'éthique de l'ingénieur. On voit bien que lorsqu'on discute avec nos jeunes, parfois on est très effrayé par le caractère égocentrique de ces jeunes qui sont issus finalement de l'éducation, souvent... Pour ceux qui ont eu la chance d'avoir été un petit peu des enfants rois, éduqués avec une consommation à outrance, et je crois que dans ce cadre-là, il y a vraiment un point clé qui est, à mon sens, qu'ils puissent exercer leur sens des responsabilités dans le cadre de leur fonction professionnelle et peut-être même, Ardès, poser la question de renoncer si les dynamiques proposées sont incompatibles avec les enjeux de l'immunité planétaire. Et le dernier point, je le répète, je le dis tout le temps à mes jeunes, interrogez-vous sur le service rendu d'une solution que vous proposez. Est-ce que finalement, le service rendu, il n'est déjà pas rendu par un autre produit existant ? À mon avis, ce sont des points importants pour l'ingénieur qui est formé aujourd'hui et qui rentre sur le marché du travail.

  • #0

    Alors en ce qui me concerne, j'ai une formation d'ingénieur et je dirais que ce que j'ai appris, c'est une formation de base. Et c'est parce que j'ai une formation de base solide, qui va des mathématiques à la physique, que j'ai pu m'adapter relativement facilement à un sujet nouveau qui est le numérique récent sain. Voilà, donc je dirais que c'est ce qu'on attend de la formation des ingénieurs et il ne faut pas rajouter trop d'options avec tous les effets de mode associés. Je dirais qu'il faut aussi distinguer les émotions de la raison. On le voit sur l'arrivée des outils d'IA générative. Oui, il y a beaucoup d'émotions, on peut s'interroger sur les impacts de l'IA. Enfin, il faut aussi comprendre ses enjeux, ses limites et évidemment ses impacts sociétaux. Donc, c'est ce qu'on attend d'un ingénieur. Ensuite, je pense que l'ingénieur doit avoir la curiosité dans sa formation de s'intéresser aux enjeux sociaux. Pour le numérique, je crois que c'est assez simple. Le numérique est remède et poison, donc tout est affaire de dosage. Et pour comprendre ça, il faut apprendre à modéliser, à calculer. Il faut bien distinguer évidemment le monde réel du monde virtuel. Ce monde virtuel qui est la face cachée de l'iceberg, qui a quand même un impact énorme. et bien sûr, comme je l'ai dit, les enjeux utiles et futiles. Et moi, mon message est extrêmement optimiste. Il y a des défis, il y a beaucoup de menaces, mais énormément d'opportunités. Et moi, ce que j'attends des ingénieurs, c'est de la créativité, de l'innovation. Voilà, donc je crois que... Notre planète a traversé au travers des âges plusieurs révolutions, révolution industrielle, révolution électrique. La révolution numérique qu'on annonce depuis une cinquantaine d'années, je crois qu'on est au cœur. Ça s'accélère en plus, mais à raison de plus pour prendre le recul qu'il faut. Donc tout ça pour moi, c'est ce qui fait qu'on a besoin de plus d'ingénieurs encore, des ingénieurs responsables, et je crois que c'est le message principal à faire passer aujourd'hui sur le sujet numérique responsable.

  • #2

    Plus d'ingénieurs responsables, c'est le message sur lequel nous allons rester aujourd'hui. Nous l'avons vu, le NR est un sujet de plus en plus présent dans le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur en France, notamment sous l'impulsion d'écoles comme la vôtre, mais le chemin reste encore long. Entre angoisse, fatalisme et indifférence, les thématiques du développement durable peinent parfois à atteindre les étudiants. Pour reprendre la formule de Michel, le numérique est à la fois remède et poison, tout est question de dosage, mais difficile de doser quand le sujet avance si vite. Je pense ici notamment à l'intelligence artificielle. Heureusement, il y a des bonnes nouvelles. On peut par exemple citer le label DDRS, décroché par Polytech Montpellier, qui fait partie des initiatives qui permettent de se poser les bonnes questions et de véritablement passer à l'action. On peut aussi penser aux avancées technologiques vertueuses, comme le nouveau supercalculateur du Cines, qui permet à la recherche publique française d'allier grande puissance de calcul et faible consommation énergétique. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de transdisciplinarité scientifique. Pour faire face aux défis de notre siècle, il semblerait qu'il faille faire entrer en jeu des sciences un peu moins exactes, celles de l'éthique et de la philosophie. Merci à nos auditrices et auditeurs de nous avoir écoutés jusqu'au bout. Si ce podcast vous plaît, n'hésitez pas à vous abonner, à nous laisser des étoiles et à en parler autour de vous, sur vos réseaux ou à votre prochaine pause café. Pour marquer la fin de sa première saison, des clics ou des claques vous donnent bientôt rendez-vous avec des invités bien particuliers. Un podcast produit par le groupe ISIA, première entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable, réalisé par Apartheid Studio, accompagné de Bastien Nicolai et Thibaut Faucard à la technique. A bientôt !

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Description

Sans actions pour réduire la croissance de l’impact environnemental du numérique, son empreinte carbone pourrait tripler entre 2020 et 2050*. 

Face aux enjeux du dérèglement climatique, le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur s'engage pour trouver des solutions : écoconception, mutualisation, sensibilisation…Et de tous les corps de métiers, celui des ingénieurs semble particulièrement concerné. 

C’est pour évoquer la place du numérique responsable au sein d’une école d’ingénieurs et de la recherche que nous recevons deux enseignants-chercheurs de l’école Polytech Montpellier : Michel Robert, actuellement directeur du CINES, et Jean-Louis Bantignies, chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable de l’école et du réseau Polytech.

Une interview qui revient sur les engagements RSE de l’école, mais aussi sur le rôle des ingénieurs dans la transition écologique et l’attractivité du sujet du NR auprès des étudiants et des chercheurs.

Pour aller plus loin :  


Un podcast produit par le Groupe Isia , 1re entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable.

Éditorial & réalisation : Aparté Studio

Habillage & postproduction : Thibault Faucard & Bastien Nicolai


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #0

    Déclic ou déclac ? Vous entrez dans la boîte à idées sonores du numérique responsable. Un podcast où nos invités jettent un coup d'œil dans le rétroviseur et nous partagent leur expérience suite à la mise en place d'une démarche numérique responsable au sein de leur organisation. Leurs inspirations, leurs succès, leurs ratés, mais aussi des pépites, des exemples concrets comme autant d'invitations à leur emboîter le pas. Retrouvez tous les mois une nouvelle interview sans détour qui, je l'espère, vous convaincra que oui, le numérique responsable, c'est possible et accessible à tous. Déclic ou des claques ? Un podcast produit par le Groupe Isia, première entreprise et ESN labellisée numérique responsable. Entre défis, menaces et opportunités, le monde numérique est complexe et paradoxal. Sa réalité physique porte des conséquences environnementales, sociétales et énergétiques croissantes qu'il est urgent de mesurer, d'analyser et de résorber. Face à ces enjeux, les nouvelles générations développent une conscience écologique et sociale de plus en plus forte. Depuis quelques années, la transition numérique est devenue un axe stratégique du développement des établissements du supérieur, même si, nous le verrons, les choses ne sont pas si simples. Si le sujet transcende les corps de métier, il paraît en tout cas incontournable à celui d'ingénieur, puisqu'il fait partie de ceux qui peuvent contribuer à faire du numérique notre meilleur allié face aux dérèglements climatiques dans les prochaines années. Dans cet épisode, nous allons évoquer la place du numérique responsable au sein d'une école d'ingénieurs et de celle de la recherche. Nous allons aussi parler éco-conception, IA, éthique, mutualisation, puissance de calcul, bref, tout un programme. Et le choix des invités du jour n'est pas tout à fait innocent, puisque le campus de l'école que je reçois aujourd'hui a été foulé par plusieurs collaborateurs du groupe ISIA. Il n'est d'ailleurs pas rare d'en croiser certains qui interviennent régulièrement auprès des étudiants pour les former au sujet de l'UNR. C'est donc avec une curiosité teintée d'une certaine nostalgie que j'accueille Michel Robert et Jean-Louis Bantini de l'école Polytech Montpellier. Avec 15 écoles publiques et 4 écoles associées, plus de 17 000 élèves en formation et 90 000 ingénieurs en activité, Le groupe Polytech est l'un des plus grands réseaux d'écoles d'ingénieurs en France. Le campus de Montpellier, créé il y a plus de 40 ans, propose quant à lui 9 spécialités d'ingénieurs, parmi lesquelles l'informatique, la microélectronique ou les sciences de l'eau. Quelques mots maintenant sur mes invités. Après un doctorat sur les accélérateurs de particules, Jean-Louis est devenu enseignant-chercheur à l'Université de Montpellier en 2000, où il s'est intéressé à la relation entre structure et propriété physique de nanomatériaux. En 2009, il rejoint Polytech en tant que professeur au sein du département matériaux. Il est aujourd'hui chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable pour l'école et le réseau Polytech. Michel, de son côté, est professeur de microélectronique et actuellement en détachement comme directeur du CINES, le Centre Informatique National de l'Enseignement Supérieur. Ses travaux de recherche actuels concernent les enjeux liés à la sobriété numérique et notamment à la réduction de l'empreinte carbone des data centers. Bonjour à vous deux.

  • #1

    Bonjour.

  • #0

    Aujourd'hui, ce n'est donc pas un, mais deux invités que j'ai le plaisir de recevoir, mais vous n'allez pas échapper à notre première question habituelle. Quand avez-vous eu le déclic qu'à force de cliquer, on allait se prendre des claques ? Jean-Louis, je te laisse commencer.

  • #1

    Alors, je suis un peu déformé par le fait que je sois enseignant et que je suis un petit peu les choses. On dit, quand on parle de ces questions de transition écologique à nos élèves, que le gros problème, c'est ce qu'on appelle la grande accélération. C'est qu'aujourd'hui, on voit que si les indicateurs liés à l'activité socio-économique divergent, les impacts environnementaux aussi divergent de manière exponentielle. Et dans ce cadre-là, quand on regarde la place du numérique, le numérique, c'est pareil, c'est une très grande accélération. On parle de 9% de progression par an. À l'horizon 2040, on parle de 7% de l'empreinte carbone nationale. Alors qu'aujourd'hui elle est autour de 2,5%, donc je dirais que ces choses-là, j'en ai pris conscience de manière aiguë, ces dernières années en particulier, lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la mise en place de cours sur ces aspects-là, typiquement depuis une dizaine d'années.

  • #2

    En ce qui me concerne, il se trouve que mes travaux sont au cœur de ce monde numérique. Je travaille sur les architectures et la conception des circuits et des systèmes intégrés, matériel logiciel, microélectronique. Il y a une vingtaine d'années, j'étais toujours intéressé par des travaux menés en Suisse, au CESM Neuchâtel, où les acteurs travaillaient sur de la très faible consommation pour l'industrie horlogère ou d'autres applications. Et donc... ces sujets m'intéressaient. Et il se trouve qu'un des projets de recherche que j'ai pu mener au LIRM consiste à consister, et consiste toujours d'ailleurs, à réfléchir à, non pas à l'optimisation en vitesse du calcul, mais à l'optimisation en faire un calcul à énergie minimum. Et ça, ça a donné lieu à des plateformes qui permettent aujourd'hui de faire du calcul sous des panneaux photovoltaïques. Et donc, j'ai pris conscience, à partir du numérique, effectivement, donc c'est peut-être un peu l'inverse de Jean-Louis, des grands enjeux environnementaux, c'est-à-dire les impacts énergétiques, mais aussi les problèmes de ressources, les problèmes d'impact carbone, etc.

  • #0

    Au sein de Polytech, vous dites mener une politique volontariste en matière de numérique responsable. Est-ce que vous pouvez commencer par nous détailler ce qui est prévu en matière d'enseignement sur le sujet ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, au niveau de Polytech, il y a eu une évolution qui est plutôt significative pour les cours liés au numérique responsable. Je parle ici plus particulièrement des aspects numériques. Tout d'abord, au niveau transversal, dans le cadre du stock de formation pour tous les élèves, en tout sur les aspects transition écologique et développement soutenable, c'est une centaine d'heures. Et dans ce cadre-là, pour ce qui est du département numérique transversal, il y a un cours dédié. au numérique responsable. Il y a un deuxième niveau, c'est qu'on a souhaité, dans le cadre de cours transversaux qu'on met en place, dès le début de la formation disciplinaire, en troisième année, alors c'est dédié spécifiquement à la compréhension des enjeux de transition écologique par l'effet scientifique, et bien dans ce cadre-là, il y a un projet qui est lié à une initiation à l'éco-conception. Et là, spécifiquement, Pour nos jeunes qui sont plutôt dans les filières électroniques et numériques, ils ont une première introduction à une analyse de cycle de vie monocritère pour un petit appareil qui leur parle beaucoup, c'est un iPad. Pourquoi un iPad ? Parce que ces jeunes, lorsqu'ils arrivent à l'école, on leur donne tous un iPad pour suivre l'ensemble de la formation sur les trois ans. Alors maintenant, il y a aussi des choses évidemment qui se mettent en place dans le cadre des filières plus dédiées au numérique. La question de la sobriété numérique et sobriété énergétique est abordée dans les cours d'ALGO, en particulier via un bilan carbone qui est fait sur plusieurs types d'algorithmes. Il y a aussi dans le cadre des travaux dirigés d'économie, Des étudiants qui réalisent des exposés et des débats doivent intégrer une réflexion sur le développement durable et le développement soutenable. Dans le cadre des enseignements de quatrième année, toujours pour ces mêmes étudiants, alors là il y a un cours spécifiquement d'une quinzaine d'heures qui est dédié au management responsable. Alors là on parle à la fois de développement durable, mais aussi plus spécifiquement de son incarnation dans l'entreprise au travers de la RSE. Et là on a six heures sur le numérique responsable, sur la politique de l'entreprise, les implications des EPI, une introduction au label numérique responsable. 3 heures sur le management responsable et encore 6 heures plus transfert SAC sur les aspects liés à la santé, à la sécurité, au travail, avec les enjeux de réglementation, toute la politique SST. Concernant les fresques, dès l'année prochaine, dans le cadre d'une introduction par la sensibilisation aux grands enjeux de transition, on proposait jusqu'à maintenant la fresque du climat. L'année prochaine, il sera proposé à tous les élèves, s'ils le souhaitent, de la remplacer par la fresque du numérique responsable. Et de la même manière, dans le cadre de notre programme pluriannuel de conférences, chaque année, il y a au moins une voire deux conférences qui sont dédiées au numérique responsable.

  • #0

    Ce qui est très intéressant, c'est que les écoles d'ingénieurs promeuvent par nature la multidisciplinarité, de la thermodynamique à la microbiologie. Vos étudiants suivent un parcours très varié. Est-ce que vous diriez que le NR est parvenu à se faire une place au milieu de tous ces enseignements aujourd'hui ?

  • #2

    De toute façon, dans le domaine numérique, on va parler d'éléments fondamentaux interdisciplinaires. Et donc ça, ça rassemble quand même les étudiants, parce que le mot numérique... Il faut bien sûr explorer ces facettes matérielles et donc tout ce qui est réseau, tout ce qui est terminaux, tout ce qui est data center. Et le point commun, il faut de l'eau, il faut des ressources, il faut de l'énergie, il y a de la fabrication, il y a de l'utilisation, il y a une analyse du cycle de vie, notamment pour la fin de vie. Et ça, pour moi, ce sont les fondamentaux, c'est l'ADN de tout ingénieur, quelle que soit sa formation. Et il se trouve qu'évidemment, tous les ingénieurs sont des utilisateurs d'objets connectés, mais aussi d'ordinateurs, de calculs, de modélisations. Donc tous ces éléments... qui, à mon avis, font partie d'un socle. quelles que soient les formations, et puis chacun s'adapte. Mais il est évident que dans une école d'ingénieur, il y a évidemment des projets à réaliser et que les cahiers des charges de ces projets évoluent aujourd'hui en prenant en compte évidemment toutes ces considérations.

  • #1

    Le numérique est un excellent support pour introduire les aspects empreintes, parce qu'on voit quand même que du point de vue de la symbolique, on s'attend à un doublement de la consommation d'eau, de gaz à effet de serre, de l'énergie, des ressources d'ici 2035 sur ces aspects-là. Et ça leur parle tous.

  • #2

    Je compléterai en regardant aussi le fait que nos étudiants sont des citoyens. Donc l'objectif de la formation, c'est aussi de les sensibiliser à la question de biens communs. Et pour moi, le numérique, c'est un flux chez soi, le flux Internet, mais au même titre que le flux énergétique, que les besoins en consommation d'eau. Donc derrière, c'est des capteurs, c'est des mesures. Et insister sur le fait que ce soit l'eau, l'énergie électrique ou le flux Internet, le monde est fini et qu'à un moment donné, il faut réguler ses usages. On régule nos consommations d'eau l'été, d'énergie l'hiver, et le monde numérique, par contre, il n'y a pas de saison, c'est tout le temps. Et ça, se rapprocher de son quotidien et vivre aussi en considérant les aspects bien communs font partie aussi de la culture citoyenne, je pense effectivement de toutes les formations et bien entendu des écoles d'ingénieurs.

  • #0

    Alors, nous avons parlé offre de formation, je voudrais maintenant parler demande. Je suis tombée sur un sondage publié par le Réseau français étudiant pour le développement durable. Selon lui, 78% des étudiants considèrent qu'un établissement qui prend en compte les enjeux environnementaux est plus attractif que les autres. Est-ce que de votre côté, vous constatez un intérêt croissant de vos étudiants pour la thématique de la transition numérique ? Est-ce qu'ils sont nombreux et nombreux à vouloir y consacrer tout ou partie de leur carrière ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, je ne suis plus mitigé. Je ne sais pas si c'est lié à notre manière de proposer la formation ou si c'est lié à l'appétit des étudiants pour ces aspects-là. Ce que je remarque, c'est qu'on a un programme de conférences annuel qui est assez significatif. On parle de dix événements par an. Typiquement, Polytech Montpellier, c'est 1400 étudiants. On pourrait s'attendre que pour ces conférences, sur les grands enjeux, que ce soit le numérique, responsable ou des choses plus transversales. Nos amphis explosent, nos amphis ils n'explosent pas. Et je ne mesure pas bien quelle en est la raison. On les interroge beaucoup sur ces aspects-là, on fait des sondages, et typiquement, moi, le sondage que j'ai, l'idée que j'ai en tête, c'est que c'est plutôt 30% des jeunes qui sont réellement intéressés par ces questions-là. Après, on a une trentaine de pourcents qui sont dans un ventre creux, et puis... clairement une trentaine de pourcents qui marquent un désintérêt qui peut être assez significatif. Par contre, ce qui est assez nouveau, les premières générations à qui on a fait passer la phrase du climat, pour certains, ils étaient un peu angoissés. Aujourd'hui... Il y a une espèce de fatalisme qui les rend d'ailleurs plutôt décontractés par rapport au sujet. Ils nous disent finalement qu'on ne voit pas bien quelles sont les solutions. Donc on va continuer à faire comme avant. Et ça c'est un des problèmes. Parfois notre capacité faible à leur proposer d'engager l'action pour faire des choses significatives. Par contre, un des points clés, c'est qu'ils ont toujours des opinions sur le sujet, beaucoup d'informations. Mais... Finalement, quand on discute avec eux de manière un peu solide, ils n'ont pas de connaissances consolidées sur la base d'essais scientifiques. Et ça, c'est un problème. Et je voudrais venir sur une initiative qui avait été faite par notre département d'Anglais. en particulier auprès des filières numériques et électroniques qui ne sont pas toujours facilement mobilisables sur ces questions-là. Eh bien, ils les ont fait travailler sur le sujet du numérique responsable et ça a donné lieu à des projets qu'ils ont ensuite soutenus. Et j'étais présent dans le cadre de ces soutenances. Et ce que j'ai vu dans ce cadre-là, c'est que leur regard changeait complètement. Quand on leur laissait le temps d'avoir une appropriation des sujets, des questions et de leurs complexités, d'un seul coup, leur regard changeait complètement. Donc peut-être que dans ce cadre-là, finalement, il y a pas mal d'espoir. Donc je dirais qu'il y a un accord de principe sur lequel il faut travailler la question. Il y a un aspect un petit peu schizophrène lié aux pratiques. Et puis, il y a peut-être l'espoir lié au fait qu'il faut peut-être changer nous aussi, nous remettre en cause sur la manière d'appréhender ces questions, parce que j'ai cet exemple, dans le cadre des projets, dans le cadre des cours d'engrais, qui était vraiment intéressant.

  • #2

    C'est un débat qui n'est pas simple puisque les enseignants font partie de générations plus anciennes que les étudiants, je veux dire, par construction. Et effectivement, on peut aussi nous reprocher nos propres usages et nos propres impacts sur la planète. On a affaire à des générations où moi je pense que le vecteur important c'est de les sensibiliser sur les usages, montrer ce que sont des usages utiles ou futiles, et surtout on est dans des formations scientifiques, apprendre à modéliser, à calculer avec la plus grande rigueur possible. de façon à pouvoir effectivement prendre conscience sur des sujets pratiques de ses propres impacts. Vous parlez de la question de l'entrée à l'école, des étudiants, leur motivation, mais ce qui va compter aussi, c'est la sortie et ce qui les motive pour poursuivre leur carrière professionnelle. On voit bien que là aussi, il y a des changements de comportement par rapport à ce qu'est le travail, ce que sont les entreprises plus ou moins vertueuses, etc.

  • #0

    L'un des sujets sur lesquels se distingue votre école, c'est celui de l'inclusion et de la diversité, qui comprend notamment le taux de boursier, d'alternant, le montant des frais de scolarité et la parité. Est-ce que vous pouvez m'en dire plus là-dessus ?

  • #1

    Oui, tout à fait. Ce critère lié à l'inclusion et à la diversité, c'est évidemment important pour l'école. Ça fait partie d'un des piliers stratégiques de l'école, qu'on appelle pilier de développement durable et de responsabilité sociétale. Dans ce cadre-là, on a un chargé de mission spécifiquement qui s'occupe du pilier social. Alors, il y a des conférences qui sont organisées chaque année, des tables rondes. La dernière, c'était au début du mois, c'était sur la place des femmes dans le domaine de la recherche. Et puis, on a différents chargés de mission dans l'école sur des aspects comme le handicap ou encore sur les aspects des violences sexuelles et sexistes. Donc, en effet, c'est des points éminemment importants pour nous.

  • #0

    Entre 2020 et 2021, Polytech Montpellier et trois autres grandes écoles ont été accompagnées dans le cadre de l'opération Campus Responsable. Au programme, neuf mois d'accompagnement, une session de formation pour les porteurs de projets et des moments d'échange et de travaux collectifs. Quel bilan tirez-vous de ce dispositif ?

  • #1

    2020, à l'époque de Campus Responsable, c'est une époque où on est assez bien identifié parce que finalement on a été parmi les dix premières écoles qui ont eu le label des DRS. sur lequel Campus Responsable était très présent comme acteur. et on se posait beaucoup de questions sur la place du numérique responsable, alors pas évidemment dans les filières dédiées au numérique, mais dans le cadre de l'enseignement transversal pour les départements hors spécialité électronique numérique. Et je dirais que l'accompagnement et les interactions avec les professionnels qu'on a rencontrés dans le cadre de ce projet nous ont beaucoup aidés, déjà à voir que les questions qu'on se posait finalement, on se les posait tous, et en particulier ça a permis de se rendre compte qu'on était vraiment au début de quelque chose. Dans l'école, on s'est intéressé très tôt à l'éco-conception et on avait été frappé par le caractère macroscopique des inventaires techniques qui étaient faits en amont des calculs d'impact, par exemple pour quantifier l'impact du numérique. Et puis ça d'ailleurs nous a donné des envies, quand je fais le bilan finalement, un des points clés c'est que ça nous a donné envie de faire des projets d'éco-conception. dédié au numérique et en particulier à la fin de ce projet, c'est 2021 ou 2022, je crois que c'est 2022, on a mis en place un projet industriel de fin d'étude, pluridépartement, où on a fait travailler un étudiant du département matériaux, qui connaissait bien l'éco-conception, un étudiant électronicien, et un étudiant informaticien pour travailler la question de l'impact des solutions informatiques, donc des iPads qui étaient proposés à tous nos jeunes lorsqu'ils arrivaient en formation. Et donc la question qu'on s'était posée, c'était finalement, est-ce qu'on peut quantifier l'impact, alors plutôt motocritère, sur l'aspect gaz à effet de serre, l'impact de la formation de l'étudiant à la mise à disposition d'un iPad. Et ça en utilisant des outils d'ACV professionnels, académiques, qu'on connaissait bien. et je dirais que c'était assez intéressant parce que ça a permis à nos jeunes de pouvoir appréhender ce type de projet de manière pour le coup complètement transdisciplinaire donc je dirais que c'est grâce à ce type de projet porté par Campus Responsable que finalement on a peut-être un peu en avance de phase par rapport à ce qu'on aurait fait normalement on a commencé à intéresser à ces questions-là

  • #0

    Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la recherche et de l'innovation. Vous êtes tous les deux très impliqués sur le sujet, notamment toi Michel à travers tes fonctions de directeur du CINES. Aujourd'hui, quel est le niveau d'attractivité des enjeux du NR dans ce monde de la recherche ?

  • #2

    Alors là, je pourrais répondre avec déjà quelques éléments sociétaux. Quand on fait de la recherche ou du développement industriel, il faut voir quand même qu'il y a un cadre juridique qui a pas mal évolué. Donc je citerai quand même la loi de 2020 dite AJEC sur l'anti-gaspillage pour une économie circulaire. Donc, tout est dans le titre. Évidemment, c'est là où on va trouver des concepts comme l'indice de réparabilité des équipements, etc. La loi sur le numérique responsable, qui date de 2021, qui vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique, elle est quand même extrêmement précise sur prendre conscience des impacts environnementaux, des aspects pratiques pour le renouvellement des terminaux. Voilà, donc tous ces éléments... qui peuvent être complétés par le cadre sur les données, par le cadre européen qui s'installe sur l'intelligence artificielle, montrent bien qu'il y a quand même des limites en cadre donné, quels que soient les éléments produits en recherche plus amont ou en recherche appliquée dans le secteur public ou le secteur privé. Ensuite, il est évident qu'il y a un engouement actuellement parce que la compétition entre les fabricants, on va dire du numérique, fait que le critère de consommation énergétique est primordial. Alors à l'origine, c'est évidemment pour le confort par rapport à l'autonomie des smartphones ou autres objets sur batterie, mais de plus en plus, tous les objets sont quelque part numériques, avec de plus en plus d'IA dans tous les domaines, sans exception. Donc je vais prendre un exemple, le véhicule autonome. Donc ça fait partie des grands enjeux actuels. Donc d'abord le véhicule électrique. C'est un choix de société, on va vers le tout électrique. Si vous rajoutez de l'autonomie, eh bien ça veut dire qu'il y aura beaucoup de capteurs, beaucoup d'électronique, beaucoup de logiciels embarqués et quelque part une communication pour les voitures autonomes avec des centres de données pour justement calculer les trajectoires. Eh bien, ça veut dire qu'une voiture autonome, elle aura deux pompes. La pompe à mobilité, pour les batteries, et la pompe à énergie qu'on ne mesure pas aujourd'hui. Donc, c'est des sujets quand même assez sensibles. C'est-à-dire toute cette consommation par rapport aux usages. Donc, personnellement, je pense qu'une voiture électrique autonome individuelle, évidemment, ça pose des problèmes majeurs d'impact. Si c'est objet mutualisé, c'est autre chose. Dans ce que je veux dire... c'est qu'on va dans une société où, d'une part, les impacts de tout ce qu'on va imaginer sont primordiaux, et en même temps, bien sûr, je dirige le CINES, on a un des calculateurs les plus performants au monde, en termes de performance de calcul, on va parler de pétaflops, c'est-à-dire de millions de milliards d'instructions par seconde. Enfin, sa première caractéristique, c'est d'être actuellement le calculateur en production le plus sobre au monde. et pourtant c'est 1,3 MW. Par contre, évidemment qu'on le mutualise à la communauté des chercheurs et autres, et pour vous donner un exemple par rapport aux interactions entre la recherche et la modélisation et le calcul, c'est aujourd'hui ce que va offrir le CINES, c'est non simplement une infrastructure, mais aussi des retours sur les performances énergétiques et le bilan carbone de chaque calcul. Donc ça veut dire que cette sensibilisation dans la recherche, elle est partout. On peut citer aussi le Labo 1.5 avec qui on travaille, justement pour essayer, parce que les constructeurs sont un var d'informations en général, lorsqu'on veut calculer les bilans carbone. Parce que ces bilans carbone, il faut aller les chercher jusqu'au niveau des composants de la fabrication. Voilà, donc ce que je veux dire, c'est que ces questions de numérique insensable concernent... Tous les secteurs de la recherche, les deux variables, mais dans les cœurs de métiers, bien sûr, se posent des questions d'utilisation des moyens de calcul, justement, pour accompagner, par exemple, les rapports du GIEC. Ces rapports, aujourd'hui, existent parce qu'il y a eu des mesures, des modisations, des calculs qui sont là. Tout ce qui est, évidemment, un pas de carbone, et donc la relation avec les forêts sur la planète, tout ça se modélise, tout ça se calcule. Donc, on est vraiment avec des enjeux. qui mixe les enjeux de calcul et de données. Et voilà, il s'agit de trouver le bon équilibre en montrant en quoi la recherche sur ces sujets peut être utile par rapport aux impacts sociétaux. J'ai cité par exemple les véhicules autonomes. Et en même temps, évidemment, prendre conscience des usages futiles. Je vais quand même en citer quelques-uns. Évidemment qu'on est dans un monde avec des règles économiques. Enfin... Est-ce qu'on a réellement besoin dans nos usages de la 5G, de la 6G ? L'autre usage futile qui fait l'objet de beaucoup de communication, les GAFAM investissent des dizaines de milliards actuellement sur des centres de données, des centres de calcul pour les sujets liés à l'intelligence artificielle qui va bouleverser, et on le voit bien dans le quotidien. Mais derrière, il y a un coût énergétique. Le métavers, qui sont ces environnements virtuels, nécessite des moyens, je dirais, colossaux de calcul et de bilan génétique. Il est évident que cette régulation est nécessaire. Un chercheur, comme un élève ingénieur et un futur ingénieur, doivent considérer dans leurs activités ces cahiers des charges. Moi, j'ai appris beaucoup, justement, je continue de me former, c'est ça qui est essentiel, parce que j'ai des bases, j'ai une formation d'ingénieur. Enfin, l'analyse du cycle de vie, ce n'est pas un gadget, c'est la réalité du monde dans lequel on est, et ça s'applique à tous les domaines.

  • #0

    Sur cette thématique de l'intelligence artificielle, est-ce que tu dirais que les enjeux du numérique responsable parviennent à émerger ? Au milieu de toutes ces innovations, de tous ces chantiers en cours ?

  • #2

    Pas encore, vraiment. Je pense que déjà, on a un rendez-vous qui est un peu paradoxal, c'est 2030. 2030, c'est en même temps solliciter toute la matière grise de notre pays pour la compétitivité et donc tous les enjeux industriels. Et en même temps, c'est un rendez-vous pour le climat. Et quelque part, il faudrait quand même bien corréler les deux, ce qui n'est pas toujours le cas. Donc ça, c'est un premier point. Ensuite, par rapport à l'intelligence artificielle, on commence à avoir des retours sur les phases d'apprentissage qui consomment énormément. Là, on vient de faire au CINES avec des acteurs français l'apprentissage pour les sciences juridiques, ce qu'on appelle un LLM, à 7 milliards de paramètres. Donc tout ça, ça consomme de l'énergie et ramené à des outils… comme OpenAI, ChatGPT et tout ce qui existe aujourd'hui. Le rapport IA Ambition pour la France donne quelques chiffres qu'on commence à voir. Par exemple, le poids de l'IA, c'est l'équivalent pour les calculs d'un pays comme la Suède. Alors que ce soit les calculs pour l'apprentissage ou ce qu'on appelle les inférences, c'est-à-dire ensuite pour les applications. On sait que le numérique, à l'échelle mondiale, c'est les impacts de 3-4 fois la France. Donc l'intelligence artificielle va évidemment avoir des impacts. une fois de plus il va falloir réglementer un certain nombre de choses je dirais des aspects liés à la protection de nos modes de vie mais en même temps donc aux enjeux liés à la sobriété

  • #0

    Alors justement, sur cet enjeu de la réglementation, je voudrais citer le grand baromètre de la transition écologique qui a été publié en 2021 par le collectif Pour un réveil écologique. Il recense les mesures mises en place par les écoles et universités en termes d'intégration des enjeux de transition écologique et sociale dans leur formation et leur fonctionnement. Il tire quatre grandes conclusions. L'écologie est de plus en plus présente dans les formations. Les stratégies des établissements manquent de cohérence. Les écoles et universités manquent de moyens humains et financiers pour traiter le sujet. Et enfin, un plan national est nécessaire pour embarquer tous les établissements dans la dynamique. Michel, toi qui as une vue nationale sur ces enjeux, que peux-tu dire sur ce dernier point, celui de la création d'un plan national ?

  • #2

    Je pense qu'il faut être assez prudent, puisque des plans nationaux, il y en a beaucoup, notamment un sur l'intelligence artificielle que je viens d'évoquer. J'aurais tendance à dire déjà un petit coup dans la rétroviseur. Regardons ce qui s'est passé dans les années 70. On a eu quand même des lanceurs d'alerte qui n'ont pas été entendus. Voilà, il faut dire clairement, on a perdu un demi-siècle, et notamment les scientifiques, puisque quelque part, il y a des choses qui avaient déjà été mises en évidence de manière plus ou moins politique. Mais en tout cas, ces rapports existent, je pense aux rapports Midos notamment, et à diverses contributions. Donc aujourd'hui, bien sûr qu'il y a un réveil. et j'allais dire que je parlais de ce rendez-vous de 2030, il est à la fois écologique et il porte l'ambition industrielle, il est évident que je vois mal une industrie aujourd'hui progresser sans prendre en compte ses enjeux. Donc pour moi, c'est d'abord une prise de conscience sociétale, évidemment qui passe dans la formation, avant l'université, à l'université, dans les écoles. Et ensuite, bien sûr, il y a la formation des formateurs, il ne faut pas négliger. Ce n'est pas forcément développer de nouveaux cours, de nouvelles formations.

  • #0

    C'est injecter ces préoccupations, j'allais dire dans chaque enseignement, parce que quelque part, on est tous confrontés à ces sujets. Donc, un plan national, oui, de sensibilisation, oui, pour donner des moyens supplémentaires, mais quelque part, c'est aussi apprendre à mutualiser, à mettre en œuvre ces pratiques.

  • #1

    Je suis complètement d'accord avec Michel quand il dit qu'il faut regarder dans le rétroviseur, mais du point de vue de la loi, c'est aussi intéressant de regarder dans le rétroviseur. L'article 55 du Grenelle de l'environnement de 2009, il y a déjà énormément de choses à l'intérieur, mais finalement derrière, vous avez une communauté de l'enseignement supérieur au niveau national qui se structure. C'est le début de ce qu'on appelle les rencontres des référents développement durable de l'enseignement supérieur. Ça s'est structuré de manière assez remarquable. Les écoles, les universités ont envoyé des référents dans le cadre de rencontres nationales. C'était porté par la conférence des présidents d'universités, c'était comporté par la conférence des grandes écoles. Et finalement, au bout de quelques années... Eh bien, on se rendait compte qu'il ne se passait pas grand-chose. Et des lois, il y en a eu d'autres. La loi de 2020 qui, pour cette nouvelle mission de l'enseignement supérieur sur la formation aux enjeux de transition écologique, c'est une loi importante. Et puis derrière, Michel en a parlé, la loi climat résilience, la loi AGEC, la loi RIN, pour parler du numérique responsable. Finalement, là où les choses ont commencé à changer, c'est très très récemment. C'est le plan climat de diversité et transition écologique de l'enseignement supérieur de la recherche qui a été publié en novembre 2022. Et là, pour le coup, je pense qu'on veut parler d'un plan. parce que là vous avez un certain nombre d'objectifs et d'actions avec des indicateurs et des jalons qui sont très clairs, il y en a 24. Ce qui manquait précédemment c'était que vous ayez des lettres de cadrage et là il y a des lettres de cadrage et ces lettres de cadrage sont très claires et imposent, alors invitent mais ne sont pas loin d'imposer à tous les établissements de mettre en place des chengya directeurs pour la transition écologique et ça s'est décliné. Dans une logique qui est effectivement celle du plan vert, issu du Grenelle de l'environnement, sur les cinq piliers. A la fois la gouvernance, à la fois les aspects liés à la formation, à la recherche, à l'empreinte des établissements. Obligation quand même à l'horizon, je crois 2025, de faire un bilan carbone dans tous les établissements, c'est pas rien. Et à la fois sur le pilier social. Et par exemple pour la formation, aujourd'hui nos universités, nos écoles sont complètement en marche parce que... Il y a une demande de mettre en place 30 heures d'enseignement au niveau licence, donc très tôt, il y a urgence, obligation de mettre 30 heures avec certification pour tous les élèves du supérieur sur les enjeux de transition écologique et de responsabilité sociétale. La formation des formateurs dont a parlé Michel, c'est le deuxième étage de la fusée. On est aujourd'hui dans le cadre des groupes de travail du ministère sur la mise en place des grandes recommandations sur la formation des formateurs parce qu'on sait bien que l'enjeu c'est d'intégrer ces aspects liés aux enjeux de transition écologique dans toutes les formations disciplinaires. Vous voyez, ça c'est tout récent, parce que c'est des lettres de cadrage qui sont de juin 2023. Mais je dirais que de ce point de vue-là, les choses bougent. Et les choses bougent pourquoi ? Parce qu'il y a le cadrage, sinon il faut des décrets. Et c'est ce qui a manqué précédemment, le manque de décrets. Je dirais qu'il y a un autre point quand même qui fait bouger, mais alors là spécifiquement les écoles d'ingénieurs. Et ça c'est complètement supranational. C'est finalement la dynamique qui a été initiée au niveau des réglementations européennes. Avant 1994, il n'y a pas de réglementation européenne environnementale. Puis il y en a une première sur la prise en compte des impacts liés au packaging. Et puis ensuite, on voit une augmentation des réglementations environnementales et qui est amusante. C'est aussi une grande accélération, c'est une véritable exponentielle. Donc je dirais que ça, ça positionne les entreprises et de fait, un peu plus tard, ça positionne aussi nos formations pour répondre à ces besoins.

  • #0

    Je voudrais rajouter un point. Il me semble important, au-delà de la formation, d'introduire beaucoup plus de débats dans les établissements, portés par des étudiants, portés par des conférenciers. Moi-même, je fais beaucoup de conférences sur ce sujet de mérite responsable. J'ai dû en faire une trentaine depuis trois, quatre ans. Et je pense qu'il y a beaucoup d'initiatives à prendre, mais le débat pour moi est central parce que c'est ce qui permet d'expliquer les limites, les dérives et donc ensuite prendre les bonnes décisions plutôt que de faire des effets d'annonce comme on peut le voir actuellement avec certains politiques.

  • #2

    Lorsque nous avons échangé ensemble en amont de cette interview, vous disiez que l'intégration du NR au sein de votre école était, je cite, un chantier ouvert Est-ce que vous pourriez nous citer, selon vous, les paramètres clés à avoir en tête pour pouvoir avancer sur le sujet ?

  • #0

    Moi, dans ma pratique, ce que je peux dire, effectivement, moi je suis au cœur des enjeux numériques, mais enfin, d'abord, il y a l'impulsion d'un directeur. Le directeur de Polytech s'engage vivement, et donc ça c'est un point, Polytech Montpellier. Ensuite, Jean-Louis anime un groupe de travail hebdomadaire. Tous les vendredis, les collègues se réunissent pendant une heure, une heure et demie, pour justement tester des idées, mettre en place tous ces processus. Il y a un investissement de quelques personnes, et notre ambition, c'est de tirer les autres enseignants, évidemment les étudiants qui participent. Donc, ça ne s'est pas fait un jour, mais quelque part, ça me serait important. Ça va sur des choses aussi simples, je répète. Un bâtiment dans un campus, ça consomme. Ça consomme de l'eau, de l'électricité et du numérique. Qu'est-ce qu'on mesure ? Ce n'est pas toujours simple. Quand on mutualise ou pas, c'est les locaux dans des campus universitaires très grands. Donc, il y a besoin de ce niveau de responsabilisation et toujours cette alternance entre le local et le global. Le local dans une formation jusqu'au global à Polytech. Le local d'une infrastructure qui accueille les étudiants de Polytech au sein de l'Université de Montpellier. Et en même temps, bien sûr, je vais prendre ces exemples qui me semblent très importants. Le rapport de l'ADEME, les derniers rapports sont extrêmement précis, sauf sur certains points. Par exemple, le local c'est la France, le global c'est la planète. Ce qu'on a mesuré sur la consommation d'Atacenter, c'est la consommation d'Atacenter français. mais à part qu'il n'y a pas de frontières dans les flux numériques. Donc si on veut avoir des approches, je dirais, bien précises d'un sujet donné, c'est ce qui compte actuellement, c'est les intercenteurs, les chefs de la planète. Il y a des choses qu'on mesure moins, si ce n'est les trafics Internet entrant et sortant de notre pays. C'est basculement entre le local qui peut être l'attitude d'une personne face à l'environnement numérique jusqu'à la collectivité d'une école, d'un établissement, d'un pays. Voilà, c'est tout ce qui doit nous faire vibrer. Et je répète, il y a quand même pas mal de supports, pas mal de sites Internet. Je pense à SheetProject, GreenIT, l'Institut numérique responsable, l'ADEME. Voilà, il y a une richesse aussi importante. Cette information, elle est là. Il faut la mettre en pratique. Et donc, tous ces éléments, c'est des engagements à toutes les échelles.

  • #2

    Pour clore cette interview, je voudrais vous demander comment vous définiriez le rôle de l'ingénieur à l'heure de la frénésie numérique. Lorsque vous en parlez à vos étudiants, par exemple, quel message vous leur transmettez sur le sujet ?

  • #1

    C'est la tarte à la crème, ces aspects-là. Mais je dirais qu'au-delà de l'expertise technique, notre mission première, c'est de former des jeunes avec une expertise technique reconnue dans leur domaine de compétences. Je crois qu'un des points clés, c'est que l'ingénieur doit se poser quand même les questions du service rendu. des solutions proposées en les contextualisant sur les limites planétaires. Et ces limites planétaires, elles sont de plus en plus fortes. En ce sens, très probablement, un des points clés, c'est de faire revenir peut-être de manière un peu plus significative des aspects liés à l'éthique de l'ingénieur. On voit bien que lorsqu'on discute avec nos jeunes, parfois on est très effrayé par le caractère égocentrique de ces jeunes qui sont issus finalement de l'éducation, souvent... Pour ceux qui ont eu la chance d'avoir été un petit peu des enfants rois, éduqués avec une consommation à outrance, et je crois que dans ce cadre-là, il y a vraiment un point clé qui est, à mon sens, qu'ils puissent exercer leur sens des responsabilités dans le cadre de leur fonction professionnelle et peut-être même, Ardès, poser la question de renoncer si les dynamiques proposées sont incompatibles avec les enjeux de l'immunité planétaire. Et le dernier point, je le répète, je le dis tout le temps à mes jeunes, interrogez-vous sur le service rendu d'une solution que vous proposez. Est-ce que finalement, le service rendu, il n'est déjà pas rendu par un autre produit existant ? À mon avis, ce sont des points importants pour l'ingénieur qui est formé aujourd'hui et qui rentre sur le marché du travail.

  • #0

    Alors en ce qui me concerne, j'ai une formation d'ingénieur et je dirais que ce que j'ai appris, c'est une formation de base. Et c'est parce que j'ai une formation de base solide, qui va des mathématiques à la physique, que j'ai pu m'adapter relativement facilement à un sujet nouveau qui est le numérique récent sain. Voilà, donc je dirais que c'est ce qu'on attend de la formation des ingénieurs et il ne faut pas rajouter trop d'options avec tous les effets de mode associés. Je dirais qu'il faut aussi distinguer les émotions de la raison. On le voit sur l'arrivée des outils d'IA générative. Oui, il y a beaucoup d'émotions, on peut s'interroger sur les impacts de l'IA. Enfin, il faut aussi comprendre ses enjeux, ses limites et évidemment ses impacts sociétaux. Donc, c'est ce qu'on attend d'un ingénieur. Ensuite, je pense que l'ingénieur doit avoir la curiosité dans sa formation de s'intéresser aux enjeux sociaux. Pour le numérique, je crois que c'est assez simple. Le numérique est remède et poison, donc tout est affaire de dosage. Et pour comprendre ça, il faut apprendre à modéliser, à calculer. Il faut bien distinguer évidemment le monde réel du monde virtuel. Ce monde virtuel qui est la face cachée de l'iceberg, qui a quand même un impact énorme. et bien sûr, comme je l'ai dit, les enjeux utiles et futiles. Et moi, mon message est extrêmement optimiste. Il y a des défis, il y a beaucoup de menaces, mais énormément d'opportunités. Et moi, ce que j'attends des ingénieurs, c'est de la créativité, de l'innovation. Voilà, donc je crois que... Notre planète a traversé au travers des âges plusieurs révolutions, révolution industrielle, révolution électrique. La révolution numérique qu'on annonce depuis une cinquantaine d'années, je crois qu'on est au cœur. Ça s'accélère en plus, mais à raison de plus pour prendre le recul qu'il faut. Donc tout ça pour moi, c'est ce qui fait qu'on a besoin de plus d'ingénieurs encore, des ingénieurs responsables, et je crois que c'est le message principal à faire passer aujourd'hui sur le sujet numérique responsable.

  • #2

    Plus d'ingénieurs responsables, c'est le message sur lequel nous allons rester aujourd'hui. Nous l'avons vu, le NR est un sujet de plus en plus présent dans le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur en France, notamment sous l'impulsion d'écoles comme la vôtre, mais le chemin reste encore long. Entre angoisse, fatalisme et indifférence, les thématiques du développement durable peinent parfois à atteindre les étudiants. Pour reprendre la formule de Michel, le numérique est à la fois remède et poison, tout est question de dosage, mais difficile de doser quand le sujet avance si vite. Je pense ici notamment à l'intelligence artificielle. Heureusement, il y a des bonnes nouvelles. On peut par exemple citer le label DDRS, décroché par Polytech Montpellier, qui fait partie des initiatives qui permettent de se poser les bonnes questions et de véritablement passer à l'action. On peut aussi penser aux avancées technologiques vertueuses, comme le nouveau supercalculateur du Cines, qui permet à la recherche publique française d'allier grande puissance de calcul et faible consommation énergétique. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de transdisciplinarité scientifique. Pour faire face aux défis de notre siècle, il semblerait qu'il faille faire entrer en jeu des sciences un peu moins exactes, celles de l'éthique et de la philosophie. Merci à nos auditrices et auditeurs de nous avoir écoutés jusqu'au bout. Si ce podcast vous plaît, n'hésitez pas à vous abonner, à nous laisser des étoiles et à en parler autour de vous, sur vos réseaux ou à votre prochaine pause café. Pour marquer la fin de sa première saison, des clics ou des claques vous donnent bientôt rendez-vous avec des invités bien particuliers. Un podcast produit par le groupe ISIA, première entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable, réalisé par Apartheid Studio, accompagné de Bastien Nicolai et Thibaut Faucard à la technique. A bientôt !

Description

Sans actions pour réduire la croissance de l’impact environnemental du numérique, son empreinte carbone pourrait tripler entre 2020 et 2050*. 

Face aux enjeux du dérèglement climatique, le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur s'engage pour trouver des solutions : écoconception, mutualisation, sensibilisation…Et de tous les corps de métiers, celui des ingénieurs semble particulièrement concerné. 

C’est pour évoquer la place du numérique responsable au sein d’une école d’ingénieurs et de la recherche que nous recevons deux enseignants-chercheurs de l’école Polytech Montpellier : Michel Robert, actuellement directeur du CINES, et Jean-Louis Bantignies, chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable de l’école et du réseau Polytech.

Une interview qui revient sur les engagements RSE de l’école, mais aussi sur le rôle des ingénieurs dans la transition écologique et l’attractivité du sujet du NR auprès des étudiants et des chercheurs.

Pour aller plus loin :  


Un podcast produit par le Groupe Isia , 1re entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable.

Éditorial & réalisation : Aparté Studio

Habillage & postproduction : Thibault Faucard & Bastien Nicolai


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • #0

    Déclic ou déclac ? Vous entrez dans la boîte à idées sonores du numérique responsable. Un podcast où nos invités jettent un coup d'œil dans le rétroviseur et nous partagent leur expérience suite à la mise en place d'une démarche numérique responsable au sein de leur organisation. Leurs inspirations, leurs succès, leurs ratés, mais aussi des pépites, des exemples concrets comme autant d'invitations à leur emboîter le pas. Retrouvez tous les mois une nouvelle interview sans détour qui, je l'espère, vous convaincra que oui, le numérique responsable, c'est possible et accessible à tous. Déclic ou des claques ? Un podcast produit par le Groupe Isia, première entreprise et ESN labellisée numérique responsable. Entre défis, menaces et opportunités, le monde numérique est complexe et paradoxal. Sa réalité physique porte des conséquences environnementales, sociétales et énergétiques croissantes qu'il est urgent de mesurer, d'analyser et de résorber. Face à ces enjeux, les nouvelles générations développent une conscience écologique et sociale de plus en plus forte. Depuis quelques années, la transition numérique est devenue un axe stratégique du développement des établissements du supérieur, même si, nous le verrons, les choses ne sont pas si simples. Si le sujet transcende les corps de métier, il paraît en tout cas incontournable à celui d'ingénieur, puisqu'il fait partie de ceux qui peuvent contribuer à faire du numérique notre meilleur allié face aux dérèglements climatiques dans les prochaines années. Dans cet épisode, nous allons évoquer la place du numérique responsable au sein d'une école d'ingénieurs et de celle de la recherche. Nous allons aussi parler éco-conception, IA, éthique, mutualisation, puissance de calcul, bref, tout un programme. Et le choix des invités du jour n'est pas tout à fait innocent, puisque le campus de l'école que je reçois aujourd'hui a été foulé par plusieurs collaborateurs du groupe ISIA. Il n'est d'ailleurs pas rare d'en croiser certains qui interviennent régulièrement auprès des étudiants pour les former au sujet de l'UNR. C'est donc avec une curiosité teintée d'une certaine nostalgie que j'accueille Michel Robert et Jean-Louis Bantini de l'école Polytech Montpellier. Avec 15 écoles publiques et 4 écoles associées, plus de 17 000 élèves en formation et 90 000 ingénieurs en activité, Le groupe Polytech est l'un des plus grands réseaux d'écoles d'ingénieurs en France. Le campus de Montpellier, créé il y a plus de 40 ans, propose quant à lui 9 spécialités d'ingénieurs, parmi lesquelles l'informatique, la microélectronique ou les sciences de l'eau. Quelques mots maintenant sur mes invités. Après un doctorat sur les accélérateurs de particules, Jean-Louis est devenu enseignant-chercheur à l'Université de Montpellier en 2000, où il s'est intéressé à la relation entre structure et propriété physique de nanomatériaux. En 2009, il rejoint Polytech en tant que professeur au sein du département matériaux. Il est aujourd'hui chargé de mission pour les questions de transition écologique et développement soutenable pour l'école et le réseau Polytech. Michel, de son côté, est professeur de microélectronique et actuellement en détachement comme directeur du CINES, le Centre Informatique National de l'Enseignement Supérieur. Ses travaux de recherche actuels concernent les enjeux liés à la sobriété numérique et notamment à la réduction de l'empreinte carbone des data centers. Bonjour à vous deux.

  • #1

    Bonjour.

  • #0

    Aujourd'hui, ce n'est donc pas un, mais deux invités que j'ai le plaisir de recevoir, mais vous n'allez pas échapper à notre première question habituelle. Quand avez-vous eu le déclic qu'à force de cliquer, on allait se prendre des claques ? Jean-Louis, je te laisse commencer.

  • #1

    Alors, je suis un peu déformé par le fait que je sois enseignant et que je suis un petit peu les choses. On dit, quand on parle de ces questions de transition écologique à nos élèves, que le gros problème, c'est ce qu'on appelle la grande accélération. C'est qu'aujourd'hui, on voit que si les indicateurs liés à l'activité socio-économique divergent, les impacts environnementaux aussi divergent de manière exponentielle. Et dans ce cadre-là, quand on regarde la place du numérique, le numérique, c'est pareil, c'est une très grande accélération. On parle de 9% de progression par an. À l'horizon 2040, on parle de 7% de l'empreinte carbone nationale. Alors qu'aujourd'hui elle est autour de 2,5%, donc je dirais que ces choses-là, j'en ai pris conscience de manière aiguë, ces dernières années en particulier, lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la mise en place de cours sur ces aspects-là, typiquement depuis une dizaine d'années.

  • #2

    En ce qui me concerne, il se trouve que mes travaux sont au cœur de ce monde numérique. Je travaille sur les architectures et la conception des circuits et des systèmes intégrés, matériel logiciel, microélectronique. Il y a une vingtaine d'années, j'étais toujours intéressé par des travaux menés en Suisse, au CESM Neuchâtel, où les acteurs travaillaient sur de la très faible consommation pour l'industrie horlogère ou d'autres applications. Et donc... ces sujets m'intéressaient. Et il se trouve qu'un des projets de recherche que j'ai pu mener au LIRM consiste à consister, et consiste toujours d'ailleurs, à réfléchir à, non pas à l'optimisation en vitesse du calcul, mais à l'optimisation en faire un calcul à énergie minimum. Et ça, ça a donné lieu à des plateformes qui permettent aujourd'hui de faire du calcul sous des panneaux photovoltaïques. Et donc, j'ai pris conscience, à partir du numérique, effectivement, donc c'est peut-être un peu l'inverse de Jean-Louis, des grands enjeux environnementaux, c'est-à-dire les impacts énergétiques, mais aussi les problèmes de ressources, les problèmes d'impact carbone, etc.

  • #0

    Au sein de Polytech, vous dites mener une politique volontariste en matière de numérique responsable. Est-ce que vous pouvez commencer par nous détailler ce qui est prévu en matière d'enseignement sur le sujet ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, au niveau de Polytech, il y a eu une évolution qui est plutôt significative pour les cours liés au numérique responsable. Je parle ici plus particulièrement des aspects numériques. Tout d'abord, au niveau transversal, dans le cadre du stock de formation pour tous les élèves, en tout sur les aspects transition écologique et développement soutenable, c'est une centaine d'heures. Et dans ce cadre-là, pour ce qui est du département numérique transversal, il y a un cours dédié. au numérique responsable. Il y a un deuxième niveau, c'est qu'on a souhaité, dans le cadre de cours transversaux qu'on met en place, dès le début de la formation disciplinaire, en troisième année, alors c'est dédié spécifiquement à la compréhension des enjeux de transition écologique par l'effet scientifique, et bien dans ce cadre-là, il y a un projet qui est lié à une initiation à l'éco-conception. Et là, spécifiquement, Pour nos jeunes qui sont plutôt dans les filières électroniques et numériques, ils ont une première introduction à une analyse de cycle de vie monocritère pour un petit appareil qui leur parle beaucoup, c'est un iPad. Pourquoi un iPad ? Parce que ces jeunes, lorsqu'ils arrivent à l'école, on leur donne tous un iPad pour suivre l'ensemble de la formation sur les trois ans. Alors maintenant, il y a aussi des choses évidemment qui se mettent en place dans le cadre des filières plus dédiées au numérique. La question de la sobriété numérique et sobriété énergétique est abordée dans les cours d'ALGO, en particulier via un bilan carbone qui est fait sur plusieurs types d'algorithmes. Il y a aussi dans le cadre des travaux dirigés d'économie, Des étudiants qui réalisent des exposés et des débats doivent intégrer une réflexion sur le développement durable et le développement soutenable. Dans le cadre des enseignements de quatrième année, toujours pour ces mêmes étudiants, alors là il y a un cours spécifiquement d'une quinzaine d'heures qui est dédié au management responsable. Alors là on parle à la fois de développement durable, mais aussi plus spécifiquement de son incarnation dans l'entreprise au travers de la RSE. Et là on a six heures sur le numérique responsable, sur la politique de l'entreprise, les implications des EPI, une introduction au label numérique responsable. 3 heures sur le management responsable et encore 6 heures plus transfert SAC sur les aspects liés à la santé, à la sécurité, au travail, avec les enjeux de réglementation, toute la politique SST. Concernant les fresques, dès l'année prochaine, dans le cadre d'une introduction par la sensibilisation aux grands enjeux de transition, on proposait jusqu'à maintenant la fresque du climat. L'année prochaine, il sera proposé à tous les élèves, s'ils le souhaitent, de la remplacer par la fresque du numérique responsable. Et de la même manière, dans le cadre de notre programme pluriannuel de conférences, chaque année, il y a au moins une voire deux conférences qui sont dédiées au numérique responsable.

  • #0

    Ce qui est très intéressant, c'est que les écoles d'ingénieurs promeuvent par nature la multidisciplinarité, de la thermodynamique à la microbiologie. Vos étudiants suivent un parcours très varié. Est-ce que vous diriez que le NR est parvenu à se faire une place au milieu de tous ces enseignements aujourd'hui ?

  • #2

    De toute façon, dans le domaine numérique, on va parler d'éléments fondamentaux interdisciplinaires. Et donc ça, ça rassemble quand même les étudiants, parce que le mot numérique... Il faut bien sûr explorer ces facettes matérielles et donc tout ce qui est réseau, tout ce qui est terminaux, tout ce qui est data center. Et le point commun, il faut de l'eau, il faut des ressources, il faut de l'énergie, il y a de la fabrication, il y a de l'utilisation, il y a une analyse du cycle de vie, notamment pour la fin de vie. Et ça, pour moi, ce sont les fondamentaux, c'est l'ADN de tout ingénieur, quelle que soit sa formation. Et il se trouve qu'évidemment, tous les ingénieurs sont des utilisateurs d'objets connectés, mais aussi d'ordinateurs, de calculs, de modélisations. Donc tous ces éléments... qui, à mon avis, font partie d'un socle. quelles que soient les formations, et puis chacun s'adapte. Mais il est évident que dans une école d'ingénieur, il y a évidemment des projets à réaliser et que les cahiers des charges de ces projets évoluent aujourd'hui en prenant en compte évidemment toutes ces considérations.

  • #1

    Le numérique est un excellent support pour introduire les aspects empreintes, parce qu'on voit quand même que du point de vue de la symbolique, on s'attend à un doublement de la consommation d'eau, de gaz à effet de serre, de l'énergie, des ressources d'ici 2035 sur ces aspects-là. Et ça leur parle tous.

  • #2

    Je compléterai en regardant aussi le fait que nos étudiants sont des citoyens. Donc l'objectif de la formation, c'est aussi de les sensibiliser à la question de biens communs. Et pour moi, le numérique, c'est un flux chez soi, le flux Internet, mais au même titre que le flux énergétique, que les besoins en consommation d'eau. Donc derrière, c'est des capteurs, c'est des mesures. Et insister sur le fait que ce soit l'eau, l'énergie électrique ou le flux Internet, le monde est fini et qu'à un moment donné, il faut réguler ses usages. On régule nos consommations d'eau l'été, d'énergie l'hiver, et le monde numérique, par contre, il n'y a pas de saison, c'est tout le temps. Et ça, se rapprocher de son quotidien et vivre aussi en considérant les aspects bien communs font partie aussi de la culture citoyenne, je pense effectivement de toutes les formations et bien entendu des écoles d'ingénieurs.

  • #0

    Alors, nous avons parlé offre de formation, je voudrais maintenant parler demande. Je suis tombée sur un sondage publié par le Réseau français étudiant pour le développement durable. Selon lui, 78% des étudiants considèrent qu'un établissement qui prend en compte les enjeux environnementaux est plus attractif que les autres. Est-ce que de votre côté, vous constatez un intérêt croissant de vos étudiants pour la thématique de la transition numérique ? Est-ce qu'ils sont nombreux et nombreux à vouloir y consacrer tout ou partie de leur carrière ?

  • #1

    Sur cet aspect-là, je ne suis plus mitigé. Je ne sais pas si c'est lié à notre manière de proposer la formation ou si c'est lié à l'appétit des étudiants pour ces aspects-là. Ce que je remarque, c'est qu'on a un programme de conférences annuel qui est assez significatif. On parle de dix événements par an. Typiquement, Polytech Montpellier, c'est 1400 étudiants. On pourrait s'attendre que pour ces conférences, sur les grands enjeux, que ce soit le numérique, responsable ou des choses plus transversales. Nos amphis explosent, nos amphis ils n'explosent pas. Et je ne mesure pas bien quelle en est la raison. On les interroge beaucoup sur ces aspects-là, on fait des sondages, et typiquement, moi, le sondage que j'ai, l'idée que j'ai en tête, c'est que c'est plutôt 30% des jeunes qui sont réellement intéressés par ces questions-là. Après, on a une trentaine de pourcents qui sont dans un ventre creux, et puis... clairement une trentaine de pourcents qui marquent un désintérêt qui peut être assez significatif. Par contre, ce qui est assez nouveau, les premières générations à qui on a fait passer la phrase du climat, pour certains, ils étaient un peu angoissés. Aujourd'hui... Il y a une espèce de fatalisme qui les rend d'ailleurs plutôt décontractés par rapport au sujet. Ils nous disent finalement qu'on ne voit pas bien quelles sont les solutions. Donc on va continuer à faire comme avant. Et ça c'est un des problèmes. Parfois notre capacité faible à leur proposer d'engager l'action pour faire des choses significatives. Par contre, un des points clés, c'est qu'ils ont toujours des opinions sur le sujet, beaucoup d'informations. Mais... Finalement, quand on discute avec eux de manière un peu solide, ils n'ont pas de connaissances consolidées sur la base d'essais scientifiques. Et ça, c'est un problème. Et je voudrais venir sur une initiative qui avait été faite par notre département d'Anglais. en particulier auprès des filières numériques et électroniques qui ne sont pas toujours facilement mobilisables sur ces questions-là. Eh bien, ils les ont fait travailler sur le sujet du numérique responsable et ça a donné lieu à des projets qu'ils ont ensuite soutenus. Et j'étais présent dans le cadre de ces soutenances. Et ce que j'ai vu dans ce cadre-là, c'est que leur regard changeait complètement. Quand on leur laissait le temps d'avoir une appropriation des sujets, des questions et de leurs complexités, d'un seul coup, leur regard changeait complètement. Donc peut-être que dans ce cadre-là, finalement, il y a pas mal d'espoir. Donc je dirais qu'il y a un accord de principe sur lequel il faut travailler la question. Il y a un aspect un petit peu schizophrène lié aux pratiques. Et puis, il y a peut-être l'espoir lié au fait qu'il faut peut-être changer nous aussi, nous remettre en cause sur la manière d'appréhender ces questions, parce que j'ai cet exemple, dans le cadre des projets, dans le cadre des cours d'engrais, qui était vraiment intéressant.

  • #2

    C'est un débat qui n'est pas simple puisque les enseignants font partie de générations plus anciennes que les étudiants, je veux dire, par construction. Et effectivement, on peut aussi nous reprocher nos propres usages et nos propres impacts sur la planète. On a affaire à des générations où moi je pense que le vecteur important c'est de les sensibiliser sur les usages, montrer ce que sont des usages utiles ou futiles, et surtout on est dans des formations scientifiques, apprendre à modéliser, à calculer avec la plus grande rigueur possible. de façon à pouvoir effectivement prendre conscience sur des sujets pratiques de ses propres impacts. Vous parlez de la question de l'entrée à l'école, des étudiants, leur motivation, mais ce qui va compter aussi, c'est la sortie et ce qui les motive pour poursuivre leur carrière professionnelle. On voit bien que là aussi, il y a des changements de comportement par rapport à ce qu'est le travail, ce que sont les entreprises plus ou moins vertueuses, etc.

  • #0

    L'un des sujets sur lesquels se distingue votre école, c'est celui de l'inclusion et de la diversité, qui comprend notamment le taux de boursier, d'alternant, le montant des frais de scolarité et la parité. Est-ce que vous pouvez m'en dire plus là-dessus ?

  • #1

    Oui, tout à fait. Ce critère lié à l'inclusion et à la diversité, c'est évidemment important pour l'école. Ça fait partie d'un des piliers stratégiques de l'école, qu'on appelle pilier de développement durable et de responsabilité sociétale. Dans ce cadre-là, on a un chargé de mission spécifiquement qui s'occupe du pilier social. Alors, il y a des conférences qui sont organisées chaque année, des tables rondes. La dernière, c'était au début du mois, c'était sur la place des femmes dans le domaine de la recherche. Et puis, on a différents chargés de mission dans l'école sur des aspects comme le handicap ou encore sur les aspects des violences sexuelles et sexistes. Donc, en effet, c'est des points éminemment importants pour nous.

  • #0

    Entre 2020 et 2021, Polytech Montpellier et trois autres grandes écoles ont été accompagnées dans le cadre de l'opération Campus Responsable. Au programme, neuf mois d'accompagnement, une session de formation pour les porteurs de projets et des moments d'échange et de travaux collectifs. Quel bilan tirez-vous de ce dispositif ?

  • #1

    2020, à l'époque de Campus Responsable, c'est une époque où on est assez bien identifié parce que finalement on a été parmi les dix premières écoles qui ont eu le label des DRS. sur lequel Campus Responsable était très présent comme acteur. et on se posait beaucoup de questions sur la place du numérique responsable, alors pas évidemment dans les filières dédiées au numérique, mais dans le cadre de l'enseignement transversal pour les départements hors spécialité électronique numérique. Et je dirais que l'accompagnement et les interactions avec les professionnels qu'on a rencontrés dans le cadre de ce projet nous ont beaucoup aidés, déjà à voir que les questions qu'on se posait finalement, on se les posait tous, et en particulier ça a permis de se rendre compte qu'on était vraiment au début de quelque chose. Dans l'école, on s'est intéressé très tôt à l'éco-conception et on avait été frappé par le caractère macroscopique des inventaires techniques qui étaient faits en amont des calculs d'impact, par exemple pour quantifier l'impact du numérique. Et puis ça d'ailleurs nous a donné des envies, quand je fais le bilan finalement, un des points clés c'est que ça nous a donné envie de faire des projets d'éco-conception. dédié au numérique et en particulier à la fin de ce projet, c'est 2021 ou 2022, je crois que c'est 2022, on a mis en place un projet industriel de fin d'étude, pluridépartement, où on a fait travailler un étudiant du département matériaux, qui connaissait bien l'éco-conception, un étudiant électronicien, et un étudiant informaticien pour travailler la question de l'impact des solutions informatiques, donc des iPads qui étaient proposés à tous nos jeunes lorsqu'ils arrivaient en formation. Et donc la question qu'on s'était posée, c'était finalement, est-ce qu'on peut quantifier l'impact, alors plutôt motocritère, sur l'aspect gaz à effet de serre, l'impact de la formation de l'étudiant à la mise à disposition d'un iPad. Et ça en utilisant des outils d'ACV professionnels, académiques, qu'on connaissait bien. et je dirais que c'était assez intéressant parce que ça a permis à nos jeunes de pouvoir appréhender ce type de projet de manière pour le coup complètement transdisciplinaire donc je dirais que c'est grâce à ce type de projet porté par Campus Responsable que finalement on a peut-être un peu en avance de phase par rapport à ce qu'on aurait fait normalement on a commencé à intéresser à ces questions-là

  • #0

    Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la recherche et de l'innovation. Vous êtes tous les deux très impliqués sur le sujet, notamment toi Michel à travers tes fonctions de directeur du CINES. Aujourd'hui, quel est le niveau d'attractivité des enjeux du NR dans ce monde de la recherche ?

  • #2

    Alors là, je pourrais répondre avec déjà quelques éléments sociétaux. Quand on fait de la recherche ou du développement industriel, il faut voir quand même qu'il y a un cadre juridique qui a pas mal évolué. Donc je citerai quand même la loi de 2020 dite AJEC sur l'anti-gaspillage pour une économie circulaire. Donc, tout est dans le titre. Évidemment, c'est là où on va trouver des concepts comme l'indice de réparabilité des équipements, etc. La loi sur le numérique responsable, qui date de 2021, qui vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique, elle est quand même extrêmement précise sur prendre conscience des impacts environnementaux, des aspects pratiques pour le renouvellement des terminaux. Voilà, donc tous ces éléments... qui peuvent être complétés par le cadre sur les données, par le cadre européen qui s'installe sur l'intelligence artificielle, montrent bien qu'il y a quand même des limites en cadre donné, quels que soient les éléments produits en recherche plus amont ou en recherche appliquée dans le secteur public ou le secteur privé. Ensuite, il est évident qu'il y a un engouement actuellement parce que la compétition entre les fabricants, on va dire du numérique, fait que le critère de consommation énergétique est primordial. Alors à l'origine, c'est évidemment pour le confort par rapport à l'autonomie des smartphones ou autres objets sur batterie, mais de plus en plus, tous les objets sont quelque part numériques, avec de plus en plus d'IA dans tous les domaines, sans exception. Donc je vais prendre un exemple, le véhicule autonome. Donc ça fait partie des grands enjeux actuels. Donc d'abord le véhicule électrique. C'est un choix de société, on va vers le tout électrique. Si vous rajoutez de l'autonomie, eh bien ça veut dire qu'il y aura beaucoup de capteurs, beaucoup d'électronique, beaucoup de logiciels embarqués et quelque part une communication pour les voitures autonomes avec des centres de données pour justement calculer les trajectoires. Eh bien, ça veut dire qu'une voiture autonome, elle aura deux pompes. La pompe à mobilité, pour les batteries, et la pompe à énergie qu'on ne mesure pas aujourd'hui. Donc, c'est des sujets quand même assez sensibles. C'est-à-dire toute cette consommation par rapport aux usages. Donc, personnellement, je pense qu'une voiture électrique autonome individuelle, évidemment, ça pose des problèmes majeurs d'impact. Si c'est objet mutualisé, c'est autre chose. Dans ce que je veux dire... c'est qu'on va dans une société où, d'une part, les impacts de tout ce qu'on va imaginer sont primordiaux, et en même temps, bien sûr, je dirige le CINES, on a un des calculateurs les plus performants au monde, en termes de performance de calcul, on va parler de pétaflops, c'est-à-dire de millions de milliards d'instructions par seconde. Enfin, sa première caractéristique, c'est d'être actuellement le calculateur en production le plus sobre au monde. et pourtant c'est 1,3 MW. Par contre, évidemment qu'on le mutualise à la communauté des chercheurs et autres, et pour vous donner un exemple par rapport aux interactions entre la recherche et la modélisation et le calcul, c'est aujourd'hui ce que va offrir le CINES, c'est non simplement une infrastructure, mais aussi des retours sur les performances énergétiques et le bilan carbone de chaque calcul. Donc ça veut dire que cette sensibilisation dans la recherche, elle est partout. On peut citer aussi le Labo 1.5 avec qui on travaille, justement pour essayer, parce que les constructeurs sont un var d'informations en général, lorsqu'on veut calculer les bilans carbone. Parce que ces bilans carbone, il faut aller les chercher jusqu'au niveau des composants de la fabrication. Voilà, donc ce que je veux dire, c'est que ces questions de numérique insensable concernent... Tous les secteurs de la recherche, les deux variables, mais dans les cœurs de métiers, bien sûr, se posent des questions d'utilisation des moyens de calcul, justement, pour accompagner, par exemple, les rapports du GIEC. Ces rapports, aujourd'hui, existent parce qu'il y a eu des mesures, des modisations, des calculs qui sont là. Tout ce qui est, évidemment, un pas de carbone, et donc la relation avec les forêts sur la planète, tout ça se modélise, tout ça se calcule. Donc, on est vraiment avec des enjeux. qui mixe les enjeux de calcul et de données. Et voilà, il s'agit de trouver le bon équilibre en montrant en quoi la recherche sur ces sujets peut être utile par rapport aux impacts sociétaux. J'ai cité par exemple les véhicules autonomes. Et en même temps, évidemment, prendre conscience des usages futiles. Je vais quand même en citer quelques-uns. Évidemment qu'on est dans un monde avec des règles économiques. Enfin... Est-ce qu'on a réellement besoin dans nos usages de la 5G, de la 6G ? L'autre usage futile qui fait l'objet de beaucoup de communication, les GAFAM investissent des dizaines de milliards actuellement sur des centres de données, des centres de calcul pour les sujets liés à l'intelligence artificielle qui va bouleverser, et on le voit bien dans le quotidien. Mais derrière, il y a un coût énergétique. Le métavers, qui sont ces environnements virtuels, nécessite des moyens, je dirais, colossaux de calcul et de bilan génétique. Il est évident que cette régulation est nécessaire. Un chercheur, comme un élève ingénieur et un futur ingénieur, doivent considérer dans leurs activités ces cahiers des charges. Moi, j'ai appris beaucoup, justement, je continue de me former, c'est ça qui est essentiel, parce que j'ai des bases, j'ai une formation d'ingénieur. Enfin, l'analyse du cycle de vie, ce n'est pas un gadget, c'est la réalité du monde dans lequel on est, et ça s'applique à tous les domaines.

  • #0

    Sur cette thématique de l'intelligence artificielle, est-ce que tu dirais que les enjeux du numérique responsable parviennent à émerger ? Au milieu de toutes ces innovations, de tous ces chantiers en cours ?

  • #2

    Pas encore, vraiment. Je pense que déjà, on a un rendez-vous qui est un peu paradoxal, c'est 2030. 2030, c'est en même temps solliciter toute la matière grise de notre pays pour la compétitivité et donc tous les enjeux industriels. Et en même temps, c'est un rendez-vous pour le climat. Et quelque part, il faudrait quand même bien corréler les deux, ce qui n'est pas toujours le cas. Donc ça, c'est un premier point. Ensuite, par rapport à l'intelligence artificielle, on commence à avoir des retours sur les phases d'apprentissage qui consomment énormément. Là, on vient de faire au CINES avec des acteurs français l'apprentissage pour les sciences juridiques, ce qu'on appelle un LLM, à 7 milliards de paramètres. Donc tout ça, ça consomme de l'énergie et ramené à des outils… comme OpenAI, ChatGPT et tout ce qui existe aujourd'hui. Le rapport IA Ambition pour la France donne quelques chiffres qu'on commence à voir. Par exemple, le poids de l'IA, c'est l'équivalent pour les calculs d'un pays comme la Suède. Alors que ce soit les calculs pour l'apprentissage ou ce qu'on appelle les inférences, c'est-à-dire ensuite pour les applications. On sait que le numérique, à l'échelle mondiale, c'est les impacts de 3-4 fois la France. Donc l'intelligence artificielle va évidemment avoir des impacts. une fois de plus il va falloir réglementer un certain nombre de choses je dirais des aspects liés à la protection de nos modes de vie mais en même temps donc aux enjeux liés à la sobriété

  • #0

    Alors justement, sur cet enjeu de la réglementation, je voudrais citer le grand baromètre de la transition écologique qui a été publié en 2021 par le collectif Pour un réveil écologique. Il recense les mesures mises en place par les écoles et universités en termes d'intégration des enjeux de transition écologique et sociale dans leur formation et leur fonctionnement. Il tire quatre grandes conclusions. L'écologie est de plus en plus présente dans les formations. Les stratégies des établissements manquent de cohérence. Les écoles et universités manquent de moyens humains et financiers pour traiter le sujet. Et enfin, un plan national est nécessaire pour embarquer tous les établissements dans la dynamique. Michel, toi qui as une vue nationale sur ces enjeux, que peux-tu dire sur ce dernier point, celui de la création d'un plan national ?

  • #2

    Je pense qu'il faut être assez prudent, puisque des plans nationaux, il y en a beaucoup, notamment un sur l'intelligence artificielle que je viens d'évoquer. J'aurais tendance à dire déjà un petit coup dans la rétroviseur. Regardons ce qui s'est passé dans les années 70. On a eu quand même des lanceurs d'alerte qui n'ont pas été entendus. Voilà, il faut dire clairement, on a perdu un demi-siècle, et notamment les scientifiques, puisque quelque part, il y a des choses qui avaient déjà été mises en évidence de manière plus ou moins politique. Mais en tout cas, ces rapports existent, je pense aux rapports Midos notamment, et à diverses contributions. Donc aujourd'hui, bien sûr qu'il y a un réveil. et j'allais dire que je parlais de ce rendez-vous de 2030, il est à la fois écologique et il porte l'ambition industrielle, il est évident que je vois mal une industrie aujourd'hui progresser sans prendre en compte ses enjeux. Donc pour moi, c'est d'abord une prise de conscience sociétale, évidemment qui passe dans la formation, avant l'université, à l'université, dans les écoles. Et ensuite, bien sûr, il y a la formation des formateurs, il ne faut pas négliger. Ce n'est pas forcément développer de nouveaux cours, de nouvelles formations.

  • #0

    C'est injecter ces préoccupations, j'allais dire dans chaque enseignement, parce que quelque part, on est tous confrontés à ces sujets. Donc, un plan national, oui, de sensibilisation, oui, pour donner des moyens supplémentaires, mais quelque part, c'est aussi apprendre à mutualiser, à mettre en œuvre ces pratiques.

  • #1

    Je suis complètement d'accord avec Michel quand il dit qu'il faut regarder dans le rétroviseur, mais du point de vue de la loi, c'est aussi intéressant de regarder dans le rétroviseur. L'article 55 du Grenelle de l'environnement de 2009, il y a déjà énormément de choses à l'intérieur, mais finalement derrière, vous avez une communauté de l'enseignement supérieur au niveau national qui se structure. C'est le début de ce qu'on appelle les rencontres des référents développement durable de l'enseignement supérieur. Ça s'est structuré de manière assez remarquable. Les écoles, les universités ont envoyé des référents dans le cadre de rencontres nationales. C'était porté par la conférence des présidents d'universités, c'était comporté par la conférence des grandes écoles. Et finalement, au bout de quelques années... Eh bien, on se rendait compte qu'il ne se passait pas grand-chose. Et des lois, il y en a eu d'autres. La loi de 2020 qui, pour cette nouvelle mission de l'enseignement supérieur sur la formation aux enjeux de transition écologique, c'est une loi importante. Et puis derrière, Michel en a parlé, la loi climat résilience, la loi AGEC, la loi RIN, pour parler du numérique responsable. Finalement, là où les choses ont commencé à changer, c'est très très récemment. C'est le plan climat de diversité et transition écologique de l'enseignement supérieur de la recherche qui a été publié en novembre 2022. Et là, pour le coup, je pense qu'on veut parler d'un plan. parce que là vous avez un certain nombre d'objectifs et d'actions avec des indicateurs et des jalons qui sont très clairs, il y en a 24. Ce qui manquait précédemment c'était que vous ayez des lettres de cadrage et là il y a des lettres de cadrage et ces lettres de cadrage sont très claires et imposent, alors invitent mais ne sont pas loin d'imposer à tous les établissements de mettre en place des chengya directeurs pour la transition écologique et ça s'est décliné. Dans une logique qui est effectivement celle du plan vert, issu du Grenelle de l'environnement, sur les cinq piliers. A la fois la gouvernance, à la fois les aspects liés à la formation, à la recherche, à l'empreinte des établissements. Obligation quand même à l'horizon, je crois 2025, de faire un bilan carbone dans tous les établissements, c'est pas rien. Et à la fois sur le pilier social. Et par exemple pour la formation, aujourd'hui nos universités, nos écoles sont complètement en marche parce que... Il y a une demande de mettre en place 30 heures d'enseignement au niveau licence, donc très tôt, il y a urgence, obligation de mettre 30 heures avec certification pour tous les élèves du supérieur sur les enjeux de transition écologique et de responsabilité sociétale. La formation des formateurs dont a parlé Michel, c'est le deuxième étage de la fusée. On est aujourd'hui dans le cadre des groupes de travail du ministère sur la mise en place des grandes recommandations sur la formation des formateurs parce qu'on sait bien que l'enjeu c'est d'intégrer ces aspects liés aux enjeux de transition écologique dans toutes les formations disciplinaires. Vous voyez, ça c'est tout récent, parce que c'est des lettres de cadrage qui sont de juin 2023. Mais je dirais que de ce point de vue-là, les choses bougent. Et les choses bougent pourquoi ? Parce qu'il y a le cadrage, sinon il faut des décrets. Et c'est ce qui a manqué précédemment, le manque de décrets. Je dirais qu'il y a un autre point quand même qui fait bouger, mais alors là spécifiquement les écoles d'ingénieurs. Et ça c'est complètement supranational. C'est finalement la dynamique qui a été initiée au niveau des réglementations européennes. Avant 1994, il n'y a pas de réglementation européenne environnementale. Puis il y en a une première sur la prise en compte des impacts liés au packaging. Et puis ensuite, on voit une augmentation des réglementations environnementales et qui est amusante. C'est aussi une grande accélération, c'est une véritable exponentielle. Donc je dirais que ça, ça positionne les entreprises et de fait, un peu plus tard, ça positionne aussi nos formations pour répondre à ces besoins.

  • #0

    Je voudrais rajouter un point. Il me semble important, au-delà de la formation, d'introduire beaucoup plus de débats dans les établissements, portés par des étudiants, portés par des conférenciers. Moi-même, je fais beaucoup de conférences sur ce sujet de mérite responsable. J'ai dû en faire une trentaine depuis trois, quatre ans. Et je pense qu'il y a beaucoup d'initiatives à prendre, mais le débat pour moi est central parce que c'est ce qui permet d'expliquer les limites, les dérives et donc ensuite prendre les bonnes décisions plutôt que de faire des effets d'annonce comme on peut le voir actuellement avec certains politiques.

  • #2

    Lorsque nous avons échangé ensemble en amont de cette interview, vous disiez que l'intégration du NR au sein de votre école était, je cite, un chantier ouvert Est-ce que vous pourriez nous citer, selon vous, les paramètres clés à avoir en tête pour pouvoir avancer sur le sujet ?

  • #0

    Moi, dans ma pratique, ce que je peux dire, effectivement, moi je suis au cœur des enjeux numériques, mais enfin, d'abord, il y a l'impulsion d'un directeur. Le directeur de Polytech s'engage vivement, et donc ça c'est un point, Polytech Montpellier. Ensuite, Jean-Louis anime un groupe de travail hebdomadaire. Tous les vendredis, les collègues se réunissent pendant une heure, une heure et demie, pour justement tester des idées, mettre en place tous ces processus. Il y a un investissement de quelques personnes, et notre ambition, c'est de tirer les autres enseignants, évidemment les étudiants qui participent. Donc, ça ne s'est pas fait un jour, mais quelque part, ça me serait important. Ça va sur des choses aussi simples, je répète. Un bâtiment dans un campus, ça consomme. Ça consomme de l'eau, de l'électricité et du numérique. Qu'est-ce qu'on mesure ? Ce n'est pas toujours simple. Quand on mutualise ou pas, c'est les locaux dans des campus universitaires très grands. Donc, il y a besoin de ce niveau de responsabilisation et toujours cette alternance entre le local et le global. Le local dans une formation jusqu'au global à Polytech. Le local d'une infrastructure qui accueille les étudiants de Polytech au sein de l'Université de Montpellier. Et en même temps, bien sûr, je vais prendre ces exemples qui me semblent très importants. Le rapport de l'ADEME, les derniers rapports sont extrêmement précis, sauf sur certains points. Par exemple, le local c'est la France, le global c'est la planète. Ce qu'on a mesuré sur la consommation d'Atacenter, c'est la consommation d'Atacenter français. mais à part qu'il n'y a pas de frontières dans les flux numériques. Donc si on veut avoir des approches, je dirais, bien précises d'un sujet donné, c'est ce qui compte actuellement, c'est les intercenteurs, les chefs de la planète. Il y a des choses qu'on mesure moins, si ce n'est les trafics Internet entrant et sortant de notre pays. C'est basculement entre le local qui peut être l'attitude d'une personne face à l'environnement numérique jusqu'à la collectivité d'une école, d'un établissement, d'un pays. Voilà, c'est tout ce qui doit nous faire vibrer. Et je répète, il y a quand même pas mal de supports, pas mal de sites Internet. Je pense à SheetProject, GreenIT, l'Institut numérique responsable, l'ADEME. Voilà, il y a une richesse aussi importante. Cette information, elle est là. Il faut la mettre en pratique. Et donc, tous ces éléments, c'est des engagements à toutes les échelles.

  • #2

    Pour clore cette interview, je voudrais vous demander comment vous définiriez le rôle de l'ingénieur à l'heure de la frénésie numérique. Lorsque vous en parlez à vos étudiants, par exemple, quel message vous leur transmettez sur le sujet ?

  • #1

    C'est la tarte à la crème, ces aspects-là. Mais je dirais qu'au-delà de l'expertise technique, notre mission première, c'est de former des jeunes avec une expertise technique reconnue dans leur domaine de compétences. Je crois qu'un des points clés, c'est que l'ingénieur doit se poser quand même les questions du service rendu. des solutions proposées en les contextualisant sur les limites planétaires. Et ces limites planétaires, elles sont de plus en plus fortes. En ce sens, très probablement, un des points clés, c'est de faire revenir peut-être de manière un peu plus significative des aspects liés à l'éthique de l'ingénieur. On voit bien que lorsqu'on discute avec nos jeunes, parfois on est très effrayé par le caractère égocentrique de ces jeunes qui sont issus finalement de l'éducation, souvent... Pour ceux qui ont eu la chance d'avoir été un petit peu des enfants rois, éduqués avec une consommation à outrance, et je crois que dans ce cadre-là, il y a vraiment un point clé qui est, à mon sens, qu'ils puissent exercer leur sens des responsabilités dans le cadre de leur fonction professionnelle et peut-être même, Ardès, poser la question de renoncer si les dynamiques proposées sont incompatibles avec les enjeux de l'immunité planétaire. Et le dernier point, je le répète, je le dis tout le temps à mes jeunes, interrogez-vous sur le service rendu d'une solution que vous proposez. Est-ce que finalement, le service rendu, il n'est déjà pas rendu par un autre produit existant ? À mon avis, ce sont des points importants pour l'ingénieur qui est formé aujourd'hui et qui rentre sur le marché du travail.

  • #0

    Alors en ce qui me concerne, j'ai une formation d'ingénieur et je dirais que ce que j'ai appris, c'est une formation de base. Et c'est parce que j'ai une formation de base solide, qui va des mathématiques à la physique, que j'ai pu m'adapter relativement facilement à un sujet nouveau qui est le numérique récent sain. Voilà, donc je dirais que c'est ce qu'on attend de la formation des ingénieurs et il ne faut pas rajouter trop d'options avec tous les effets de mode associés. Je dirais qu'il faut aussi distinguer les émotions de la raison. On le voit sur l'arrivée des outils d'IA générative. Oui, il y a beaucoup d'émotions, on peut s'interroger sur les impacts de l'IA. Enfin, il faut aussi comprendre ses enjeux, ses limites et évidemment ses impacts sociétaux. Donc, c'est ce qu'on attend d'un ingénieur. Ensuite, je pense que l'ingénieur doit avoir la curiosité dans sa formation de s'intéresser aux enjeux sociaux. Pour le numérique, je crois que c'est assez simple. Le numérique est remède et poison, donc tout est affaire de dosage. Et pour comprendre ça, il faut apprendre à modéliser, à calculer. Il faut bien distinguer évidemment le monde réel du monde virtuel. Ce monde virtuel qui est la face cachée de l'iceberg, qui a quand même un impact énorme. et bien sûr, comme je l'ai dit, les enjeux utiles et futiles. Et moi, mon message est extrêmement optimiste. Il y a des défis, il y a beaucoup de menaces, mais énormément d'opportunités. Et moi, ce que j'attends des ingénieurs, c'est de la créativité, de l'innovation. Voilà, donc je crois que... Notre planète a traversé au travers des âges plusieurs révolutions, révolution industrielle, révolution électrique. La révolution numérique qu'on annonce depuis une cinquantaine d'années, je crois qu'on est au cœur. Ça s'accélère en plus, mais à raison de plus pour prendre le recul qu'il faut. Donc tout ça pour moi, c'est ce qui fait qu'on a besoin de plus d'ingénieurs encore, des ingénieurs responsables, et je crois que c'est le message principal à faire passer aujourd'hui sur le sujet numérique responsable.

  • #2

    Plus d'ingénieurs responsables, c'est le message sur lequel nous allons rester aujourd'hui. Nous l'avons vu, le NR est un sujet de plus en plus présent dans le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur en France, notamment sous l'impulsion d'écoles comme la vôtre, mais le chemin reste encore long. Entre angoisse, fatalisme et indifférence, les thématiques du développement durable peinent parfois à atteindre les étudiants. Pour reprendre la formule de Michel, le numérique est à la fois remède et poison, tout est question de dosage, mais difficile de doser quand le sujet avance si vite. Je pense ici notamment à l'intelligence artificielle. Heureusement, il y a des bonnes nouvelles. On peut par exemple citer le label DDRS, décroché par Polytech Montpellier, qui fait partie des initiatives qui permettent de se poser les bonnes questions et de véritablement passer à l'action. On peut aussi penser aux avancées technologiques vertueuses, comme le nouveau supercalculateur du Cines, qui permet à la recherche publique française d'allier grande puissance de calcul et faible consommation énergétique. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de transdisciplinarité scientifique. Pour faire face aux défis de notre siècle, il semblerait qu'il faille faire entrer en jeu des sciences un peu moins exactes, celles de l'éthique et de la philosophie. Merci à nos auditrices et auditeurs de nous avoir écoutés jusqu'au bout. Si ce podcast vous plaît, n'hésitez pas à vous abonner, à nous laisser des étoiles et à en parler autour de vous, sur vos réseaux ou à votre prochaine pause café. Pour marquer la fin de sa première saison, des clics ou des claques vous donnent bientôt rendez-vous avec des invités bien particuliers. Un podcast produit par le groupe ISIA, première entreprise et ESN labellisée Numérique Responsable, réalisé par Apartheid Studio, accompagné de Bastien Nicolai et Thibaut Faucard à la technique. A bientôt !

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