- Speaker #0
Bonjour à tous, je suis Hortense Leluc et vous écoutez Décodeur, le podcast dans lequel j'échange avec des pros de la déco. Il y a plusieurs formats d'émissions qui tournent, stylé, archi-cool, le club ou les rencontres comme l'épisode qui va suivre, dans lequel un architecte ou un designer, une marque que vous aimez ou que vous allez découvrir, un entrepreneur ou un créatif va nous parler de sa manière de travailler, de ses produits. de son savoir-faire, sa vision, ses inspirations, bref, de l'envers du décor qu'on ne soupçonne pas toujours. Et c'est ça la force du podcast, on prend le temps, on va plus loin, on décortique, on apprend, on comprend, il y a une forme d'intimité, de complicité et d'authenticité à laquelle je tiens beaucoup. Merci d'être si nombreux à écouter. Si vous venez de découvrir le podcast, bienvenue, n'oubliez pas de cliquer sur s'abonner pour ne pas rater les prochains épisodes et si mon invité vous... plaît, surtout n'hésitez pas à partager l'épisode en story ou à mettre 5 étoiles, tout ça m'aide beaucoup à me faire connaître encore plus. Bonjour à tous, aujourd'hui je vous parle d'un nouvel acteur qui vient d'arriver dans le monde de la déco et du design, Source Édition. Une maison fondée par Isabelle de Ponfilly et Joséphine Burzaki, un duo mère-fille qui réédite fidèlement des pièces iconiques de designers. L'idée étant de préserver le patrimoine du design tout en lui redonnant une place vivante et actuelle dans nos intérieurs. Bonjour Isabelle, bonjour Joséphine, bonjour Hortense. On va beaucoup utiliser le mot réédition donc peut-être qu'on peut expliquer ce qu'est une réédition aux auditeurs.
- Speaker #1
Alors une réédition est en fait une nouvelle fabrication d'un objet, d'une création qui a existé dans le passé et en fait on parle aussi d'édition nous concernant parce que Merci.
- Speaker #2
Je te laisse terminer parce qu'en fait certains de nos produits ont été dessinés dans les années 50 à 70 mais n'ont jamais été édités.
- Speaker #0
Ah oui d'accord.
- Speaker #1
En fait ce qui nous intéresse c'est la période vraiment début 50 à fin
- Speaker #0
70. J'allais vous demander pourquoi vous êtes intéressée particulièrement à cette période là ?
- Speaker #2
En fait c'est un choix de ma part parce que j'étais marchande vintage de ces années là, donc début 50 à fin 70. et c'est vraiment ma période de prédilection en design puisque je trouve que c'est le moment où il y a eu le plus de créations innovantes et avec tous ces nouveaux matériaux aussi qui existaient, toutes ces nouvelles formes qui ont apparu et c'était très joyeux.
- Speaker #0
C'est quoi comme période si on peut décrire un peu comme style ? Parce qu'en plus 50 et 70 c'est pas la même chose.
- Speaker #2
Oui, effectivement. Donc là pour notre première collection d'ailleurs on est beaucoup plus fin 60, début 70. Donc c'est toutes ces formes rondes, toutes ces formes ludiques aussi, les objets qui peuvent avoir plusieurs utilités.
- Speaker #1
Voilà, c'était l'usage primaire. Effectivement, c'était une période après-guerre, bien après-guerre, qui était très joyeuse. Et en fait, il y a eu une créativité incroyable, une grande liberté. On était, par exemple, après mai 68, c'est pour ça que nous on s'attache beaucoup aux années 70 aussi, c'est que c'était une période de libération. Et il y a eu notamment, peut-être on en parlera après, la création de l'ARC, l'Atelier de la Recherche et de la Création, au sein du Mobilier National. qui a donné lieu à des commandes du gouvernement de Georges Pompidou avec sa femme Claude qui était très férue de design et d'art pour meubler les palais d'État. Donc il y a eu en fait un espèce de souffle nouveau qui est arrivé à ce moment-là. On le voyait dans le cinéma avec les films de Jacques Tati, tous les films avec Louis de Funès. On a ces décors qui ont vraiment accompagné toute une génération. Et ce qui est amusant c'est que c'est Joséphine qui est spécialiste de cette époque-là alors qu'elle n'était pas du tout née puisqu'elle est née en 1994. Et c'est plutôt une époque qui a bercé mon enfance, mais en fait c'est vraiment sa spécialité. Et c'est elle d'ailleurs qui choisit chacune des créations que l'on va éditer.
- Speaker #0
Mais c'est une période qui est quand même très tendance. Qu'est-ce que ça veut dire, il y a beaucoup d'années de 70's dans le déco-design. Est-ce que ça dit quelque chose de notre société d'aujourd'hui, cet engouement pour les 70's ? C'est quoi le style 70's en fait ?
- Speaker #1
Déjà il faut savoir que c'était une période où le design était très bon, puisqu'il est toujours D'actualité, il n'a pas pris une ride, on a toujours envie de la voir. Et il faut savoir que Joséphine, avec sa grande sœur Delphine Bursaki, qui est architecte d'intérieur, en fait, elles ont baigné dans cet univers depuis leur enfance, puisque j'ai travaillé pas mal d'années chez Knoll. Comme je travaillais beaucoup, je les emmenais dans le showroom de Knoll quand elles étaient petites, et pour les occuper, je leur disais, étudiez chaque détail, l'histoire des designers, l'histoire des matériaux, des produits, parce que c'était des icônes du design. Après, j'ai dirigé Vitra. France pendant 26 ans. Donc même chose, je les emmenais au bureau en disant regardez pourquoi ça a été créé. C'est vrai que chez Vitra comme chez Knoll, les grands classiques, ce sont des classiques de ces époques-là. Donc elles ont vraiment grandi, elles ont été accompagnées par ces... Ces icônes et ces objets qu'on adore et je pense que ça a dû t'imprégner, non ?
- Speaker #2
Oui, c'est exactement ça.
- Speaker #1
C'est la première fois qu'on en parle d'ailleurs. C'est vrai ? De se dire que c'est peut-être grâce à votre parcours que ça a dû infuser chez votre fille ? Oui, mais je les revois toutes petites en train de faire des dessins et c'est vrai qu'elles ont vraiment été imprégnées par ça parce qu'elles venaient souvent au bureau et je viens d'avoir l'image.
- Speaker #0
Un flash. Et alors, comment est née cette idée de créer Source Édition ?
- Speaker #2
À la base, moi, j'avais monté Source Parisienne en 2019, spécialisé dans les objets et meubles vintage des années 50 à 70, signé par les designers. Et donc, j'avais aussi tout un travail de recherche pour mes clients qui me demandaient de sourcer, d'où le nom à la base. Et donc, on me demandait beaucoup de trouver la lampe de Ben Sildens, qui s'appelait à l'époque 10-445. et qui est maintenant réédité par Source Edition sous le nom de Jumel. Et donc en fait, tous mes clients me demandaient cette lampe que j'avais beaucoup de mal pour la trouver. Et donc j'en ai parlé à ma mère en lui disant, je ne sais pas du tout comment faire, tous mes clients me demandent cette lampe-là et je n'arrive pas du tout à la trouver en bon état ou à des prix qui restent quand même abordables.
- Speaker #1
Et c'est vrai que moi j'ai grandi dans des usines et le côté technique m'intéresse énormément. Et chez Vitra, c'est moi qui ai présenté Catherine Prouvé, la fille de Jean Prouvé à Vitra, à Rolf Elbaum. Donc la collection de Jean Prouvé, elle est arrivée chez Vitra parce que j'ai fait cette présentation et puis j'ai été impliquée aussi dans le développement de pas mal de produits chez Vitra. Donc j'ai cette casquette technique pour avoir travaillé avec des designers et des ingénieurs. Donc quand Joséphine m'a montré sa lampe, en me disant que je n'arrivais pas à la trouver, j'ai dit « ben on n'a qu'à la faire » . Parce qu'entre-temps, moi j'avais quitté mon poste de direction générale de Vitra après le confinement. En me disant, après 26 années en étant à ce poste, soit je pars maintenant pour faire quelque chose par moi-même, soit je reste pour toujours et j'ai choisi la première solution. En me disant, j'admirais beaucoup mes deux filles qui avaient monté leur société et donc je me suis dit, je saute dans le grand bain et j'ai accompagné des industriels, j'ai fait pas mal de missions, dont certaines avec Delphine et Joséphine, parce que ça touchait toujours aux lieux de vie, aux organisations d'entreprise et en fait, quand Joséphine m'a montré la lampe, ça a été une évidence pour nous. qu'il fallait qu'on réédite cette lampe. Donc après on est parti dans la recherche de la famille de Ben Svilden qui malheureusement était disparue depuis peu de temps et on a rencontré Juliette Svilden, la fille de Ben et qui d'ailleurs avait entendu parler de moi en parallèle par d'autres personnes. Donc quand on a présenté notre projet de réédition, la discussion s'est très bien passée, on a signé un contrat pour l'utilisation justement des droits et tout ce jour dans le respect vraiment... très fidèle de la création d'époque.
- Speaker #0
Ça veut dire quoi, rééditer fidèlement, justement ?
- Speaker #1
Ça veut dire qu'en fait, on respecte à la fois les qualités techniques et esthétiques de l'objet, on ne change pas, on change le moins de choses possibles, mais comme on ne vous a pas encore dit, dans nos valeurs, en fait, une des valeurs vraiment essentielles, c'est de... toutes nos actions et nos productions et notre collection, ... doit respecter la nature, les humains et les animaux. Donc par exemple pour la lampe de Bensfiden, on s'est rendu compte alors d'abord on n'avait aucun plan technique, Bensfiden n'avait rien gardé donc on avait rien, on avait juste l'idée de lancer la lampe donc on a cassé notre tirelire avec Joséphine, on a acheté deux lampes vintage à Drouot parce qu'en fait Juliette nous a dit que les lampes n'étaient pas toutes fabriquées exactement pareil on s'est dit que c'était bien d'en avoir deux pour prendre le meilleur de chacune. En décortiquant la lampe, d'abord on a choisi un fabricant français, parce qu'on fabrique en priorité en France ou en Europe. Une fois qu'on a trouvé notre fabricant très professionnel, vraiment un fabricant de qualité, on a décortiqué les deux lampes et on s'est rendu compte d'abord que la structure était en acier. Donc en fait, tout en ayant l'aval, l'accord des ayants droit, on a transformé le matériau de la structure qui maintenant est en aluminium, donc recyclable. et plus légères. Et les globes, on a découvert, en fait, Juliette nous a dit, mais en fait, c'était des globes en opaline. Et en fait, on a fait des recherches, on s'est rendu compte que l'opaline, c'était vraiment pas très génial du tout, puisque c'est fabriqué avec du mercure, en tout cas des globes de l'époque. Et on s'est dit, on proscrit tout ça. Et donc, on a voulu trouver le même rendu que l'opaline, et ne pas avoir un verre inerte. Vous savez, un verre dépolé, qui n'a pas d'âme, mais qui n'a pas de... de caractère artisanal aussi, puisque c'est important de sentir la main de l'homme dans la fabrication. Et donc on a créé un moule, parce qu'en fait le verre est maintenant moulé, soufflé, dépolier à l'extérieur et laqué à l'intérieur, si bien que quand vous regardez la lampe, il y a un halo qui à chaque fois est unique, puisqu'en fait... On a une lampe très vivante.
- Speaker #0
On la regarde en même temps, elle est au-dessus de vous. Voilà,
- Speaker #1
exactement. Parce qu'en fait, ce qui est intéressant aussi, c'est pour ça qu'on a choisi cette lampe, que Joséphine a choisie, c'est qu'en fait, on aime bien des objets qui ont plusieurs vies et plusieurs usages.
- Speaker #2
Oui, donc là, dans le cas de la lampe jumelle, c'est aussi bien une lampe à poser qu'une applique murale. Donc en fait, en fonction des différentes étapes de la vie, où on déménage, où on a envie de changer son intérieur, en fait, on peut avoir cette lampe qui a... Donc ça a commencé avec cette lampe et ensuite Isabelle était très impliquée auprès du mobilier national.
- Speaker #1
Alors en fait moi depuis pas mal d'années je suis expert pour les commissions d'acquisition pour les mobiliers d'état. C'est à dire que régulièrement il y a des appels à projets, les designers proposent des créations et le mobilier national s'entoure de quelques experts pour choisir les bonnes pièces qui vont rentrer dans les collections nationales. Donc moi j'ai fait ça très régulièrement. Récemment j'ai été jury pour la Villa Médicis pour l'aménagement des chambres de visiteurs. Donc ça c'était un jury génial avec la Fondation Bétancourt où pendant deux ans on a choisi des équipes qui accompagnaient pour meubler les chambres avec des artisans de métiers d'art, également des architectes, des artistes, architectes d'intérieur, un projet incroyable. Et à chaque fois j'entendais Hervé Lemoyne, le président des manufactures nationales, un peu déploré. qu'en fait, ils avaient dans les réserves des trésors incroyables, dans les réserves et les archives. Mais en fait, à chaque fois, c'était des commandes qui avaient été passées par le gouvernement, par le Médium National, à des designers ou artistes, mais qui n'étaient jamais édités ensuite. Donc en fait, moi, je me souvenais de ça parce qu'ils me l'avaient dit plusieurs fois. Donc éditer,
- Speaker #0
ça veut dire, pour les auditeurs, par rapport à une réédition, éditer, c'est le commercialiser. Oui, c'est ça.
- Speaker #1
C'est-à-dire le refabriquer en série.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Et ce n'est pas seulement une commande, mais c'est un produit qu'on peut trouver en catalogue ou dans un magasin. Et en fait, ça n'était jamais le cas avec les créations de MobiNational, parce que MobiNational faisait le travail de développement, de fabrication des premières pièces, mais après ça s'arrêtait et ça restait en archive. Et donc, quand on a décidé de lancer Source Édition, j'ai appelé Hervé Lemoyne en disant « Voilà, ça y est, j'ai entendu ce que tu as dit, ça nous a motivés et on va créer Source Édition et on aimerait bien avoir accès. » aux fameux trésors des réserves et aux archives. Donc il était vraiment très heureux de notre appel. Et on a à ce moment-là rencontré l'équipe de l'Arc. Donc l'Arc qui a été créé il y a 60 ans par André Malraux, je vous en parlais tout à l'heure, pour justement meubler les palais d'État. Et en fait avec Joséphine, puisque c'est vraiment elle qui choisit, on a eu la chance de rencontrer d'abord l'équipe de l'Arc. On leur a dit, voilà, nous ce qui nous intéresse c'est tout ce qui est 50-70, sachant qu'on a... Peu d'années communes puisqu'ils ont été créés en 64, donc ça nous laisse 16 années sur notre période de prédilection. Et en fait, on leur a dit non, on bannit tout ce qui est plastique et chrome. Déjà, c'est clair, ça retirait déjà pas mal de créations. Et ensuite, ils nous ont proposé la collection de Thurène Chevalreau.
- Speaker #0
Ah donc ça vient d'eux en fait,
- Speaker #1
pour cette collection ?
- Speaker #2
En fait, on a deux collections avec le Mobilié National, donc deux designers. On a Thurène Chevalreau et André Monpoint. Et donc effectivement la collection de Thurène Chevalreau venait de la part directement de l'art qui avait vraiment comme envie de la voir rééditer et éditer pour certaines pièces.
- Speaker #1
Parce qu'en fait c'est une collection qui avait été commandée à Thurène Chevalreau pour inventer le premier mobilier livré à plat en kit qui se monte sans outillage et sans vis. Et en fait il faut savoir que la petite table tient dans un tout petit carton qu'on peut mettre dans un sac et emporter avec soi. Et la petite table avec une galette par-dessus devient un pouf sur lequel on s'assoit. Donc c'est aussi, comme pour la lampe, on vous expliquait tout à l'heure, la même lampe peut être fixée au mur ou posée. On aime beaucoup les objets qui ont plusieurs fonctions et plusieurs vies. Et en fait, cette collection n'avait jamais été produite, il n'y avait que des prototypes.
- Speaker #2
Ils avaient encore dans leur réserve la table basse, donc la grande table basse, et ils avaient eux-mêmes recréé les prototypes de la table d'appoint. Mais donc d'origine de ces années-là, il ne leur restait que la table basse. Et en fait, pour cette collection-là, qui est quand même géniale parce que c'est un principe d'assemblage très très simple, donc en deux minutes c'est monté, on l'a du coup réédité et édité en changeant un petit peu les matériaux. Donc comme pour la jumelle, le plaquage était en palissandre, palissandre qui est maintenant un bois protégé et en plus qui vient de très loin. Et donc on l'a adapté pour faire du noyer, mais qu'on a teinté couleur palissandre. pour avoir toujours ce même effet mais tout en ayant un bois qui est plus vertueux.
- Speaker #1
Il faut savoir qu'à chaque fois qu'on change un matériau ou un détail, on a l'accord des ayants droit ou des designers. Et là en plus on doit avoir l'accord de mobilier national. Parce qu'en fait on a un contrat pour les collections en direct avec les designers ou ayants droit, c'est avec une personne. Et là c'est en fait avec le mobilier national et avec les familles des designers.
- Speaker #0
Mais en fait les rééditions... En vous entendant parler, c'est quand même un travail colossal, c'est se rajouter encore plus de problématiques, je dirais presque qu'une création.
- Speaker #2
Oui, et surtout qu'on n'a pas la flexibilité dans les nouvelles créations de pouvoir se dire, bon ben en fait on aimerait avoir une table de cette taille-là, parce que ça correspond peut-être aux normes d'aujourd'hui. Non, nous on va chercher justement... dans ces années-là, des produits qui sont encore intemporels et désirables de nos jours et qui vont le rester pendant encore très longtemps, tout en ayant à la base quand même des bons matériaux. Donc en fait, c'est vraiment plus compliqué, effectivement, à notre sens. Oui,
- Speaker #0
c'est un travail colossal. Et comment se déroule le processus de réédition d'une pièce ? J'imagine qu'il y a plein d'étapes entre... Voilà, on étudie les archives, vous rencontrez les créateurs. Quelles sont les grandes étapes ?
- Speaker #1
La première étape, c'est Joséphine qui fait sa liste au Père Noël de toutes les créations qu'elle voudrait qu'on... qu'on réédite, qui trouvent les designers qui les tiennent à cœur.
- Speaker #2
J'ai une liste de plus de 300 designers qui m'intéressent pour être rééditées. Après, la chose qui est la plus compliquée dans notre aventure, c'est de trouver surtout les designers, leurs contacts, s'ils sont encore vivants, ou les contacts des ayants droit, parce que souvent, ce n'est pas très identifié. On a dû faire, par exemple,
- Speaker #1
avec André Monpois, le canapé sur lequel nous sommes assis, c'était en fait la collection qui était... qui a été commandée en 1967 par le Média National à André-Montpoix pour meubler tout le ministère de la Santé et des Affaires Sociales. Et Simone Veil, quand elle est devenue ministre, a choisi d'avoir les fauteuils dans son bureau. Donc en fait, ce qui est important aussi, c'est que nous on aime bien le supplément d'âme des objets, l'histoire des objets, on considère qu'on est aussi une marque culturelle parce qu'on parle des designers, on les met à l'honneur, pas seulement pour les créations qu'on édite d'eux, mais également de tout leur panorama, de leur activité. Et ça, on se met à devoir de mémoire.
- Speaker #0
Et comment vous êtes reçus par ces créateurs, ceux qui ont créé l'I.I.C.U.T. ? Comment ils perçoivent même les rééditions ?
- Speaker #1
Alors déjà, il faut savoir que moi je suis quand même dans le métier depuis plus de 30 ans. J'ai été présidente du conseil d'administration de l'école des arts déco. Je suis impliquée dans beaucoup d'initiatives. Je fais beaucoup de... En fait, je suis très active en dehors de mes activités professionnelles. Je suis très active. dans tout ce qui touche à l'industrie, la culture, les femmes, qui est un sujet qui me tient à cœur. Donc en fait j'ai un bon réseau de personnes et quand on écrit en disant, en plus on est mère-fille, donc les gens sont touchés aussi par cette association de transmission en fait. Donc en fait c'est assez facile pour nous parce qu'on nous connaît, on nous connaît puis on a quand même un...
- Speaker #2
Oui, et au-delà de ça, c'est surtout qu'ils sont très heureux qu'on s'intéresse à eux de nos jours. Parce que beaucoup de designers qu'on rencontre et même qu'on a dans notre collection, leurs pièces peuvent faire des dizaines de milliers d'euros aux enchères ou sur le second marché. Mais eux, en tant que personnes telles quelles qu'on va voir directement, avec qui on discute, que ce soit eux ou leurs enfants, en fait, ce n'est plus vraiment souvent le cas. Donc, ils sont vraiment très, très heureux qu'on les rencontre. on partage avec eux des nouvelles choses. Oui, puis la réédition,
- Speaker #0
c'est valoriser cette histoire de patrimoine dont je parlais. Et je crois que vous êtes un peu engagée aussi contre cette idée de contrefaçon, où beaucoup de marques, finalement, reproduisent des icônes du design sans rien demander à personne.
- Speaker #1
Absolument. Et en fait, c'est vrai qu'on est très énervés contre les gens qui s'inspirent, qui disent « inspiration » , qui parfois osent même citer le nom du designer, alors que le designer n'a jamais donné ses droits, ne touche pas un seul euro sur les ventes. Et en fait, on a vraiment... On se sent à devoir de mémoire et aussi de retour du travail effectué au départ.
- Speaker #2
Oui, ça, vous parlez de retour de la mode des années 70's, mais en fait, la plupart des choses qui, maintenant, existent sur le marché, à part quand c'est du vintage ou des vraies rééditions officielles, c'est que des inspirations. Et ça, c'est vraiment la chose contre laquelle on se bat le plus actuellement.
- Speaker #0
Même contre l'inspiration ?
- Speaker #2
Oui.
- Speaker #1
Il y a tellement de belles choses à créer aujourd'hui.
- Speaker #2
Si vous êtes inspiré par cette année-là... rééditer des choses de ces années-là, mais aussi créer quelque chose de nouveau. Le fait de s'inspirer, je trouve que c'est vraiment se cacher derrière ce terme inspiration, mais en fait, c'est presque de la copie.
- Speaker #1
Et il y a aussi, quand on parle de pièces vintage qui se vendent des fortunes en salle des ventes, pour le design, il n'y a pas de droit de suite. Ça veut dire quoi, le droit de suite ? Vous savez, en art, quand une œuvre d'art est vendue, il y a un pourcentage de la vente qui est versée aux ayants droit ou à l'artiste. sur toutes les ventes sauf que le design n'est pas encore classifié comme étant toi qui es dans l'art contemporain tu peux être plus développé mais en tout cas les ayants droit ne touche jamais rien et vous je peux vous demander vous devez reverser oui bien sûr en fait nous on verse une partie des ventes on verse un pourcentage des ventes en termes de royalties aux ayants droit et c'est tout à fait moral et tout à fait normal.
- Speaker #0
Les ayants droit en fait c'est quoi ? Souvent c'est la famille, c'est des entreprises qui ont racheté, est-ce que j'imagine que ces designers sont décédés ?
- Speaker #1
Oui, justement avec André Monpois on a eu du mal parce que le mobilier national quand on est tombé sur cette collection nous a dit ça va être compliqué, on n'a pas de traces des ayants droit parce qu'il est mort à 51 ans, il n'avait pas d'enfant. Et comme nous on a une qualité qui peut être un défaut, c'est qu'on ne lâche jamais. C'est-à-dire que quand on a une idée on ne renonce pas. Donc on a appelé la terre entière pour trouver la famille d'André-Montpoix. On a fini par trouver, après avoir appelé un garagiste, une boulangère, etc. dans tous les coins de France, on a fini par trouver. Et en fait ce sont les héritiers, les ayants droit. Donc ça peut être des descendants directs ou indirects, ça peut être aussi, il y a certains designers qui ont fait don de leurs droits à une association. Donc ça peut être très varié, c'est pour ça que ce n'est pas toujours facile de trouver en fait.
- Speaker #0
Oui, j'imagine que ça fait partie du gros travail de démarrage.
- Speaker #1
Oui, c'est ça.
- Speaker #0
Et vous insistez aussi, je crois, sur la fabrication européenne et les matériaux durables. Ça se concrétise comment ?
- Speaker #1
Ça veut dire qu'on ne veut pas utiliser plastique, chrome, toutes les choses qui ne sont vraiment pas terribles pour la nature. Mais sinon, on aime bien les provenances locales, des circuits courts, des matériaux locaux, ça c'est important et naturel. Et aussi, il y a aussi une chose importante, c'est que tous nos produits sont... Par exemple, imaginons qu'un jour, vous fassiez tomber une lampe et qu'un globe se casse. Ils sont tous réparables. Vous pouvez vous procurer des pièces détachées. Et ça, c'est important aussi de savoir qu'une table ou une lampe que vous achetez aujourd'hui, dans 10 ans, si vous avez besoin de remplacer un pied ou de changer un globe, ça peut se faire.
- Speaker #2
Oui, et aussi, ils sont extrêmement bien produits. Par exemple, notre collection d'assises d'André Monpois, qui sont des chauffeuses et des canapés modulables. Elles sont faites avec des structures en bois massif. Donc vraiment, c'est des choses qui sont vraiment faites pour durer et ne pas être jetées au bout de quelques années.
- Speaker #0
Vous faites fabriquer où ?
- Speaker #2
On fait fabriquer exclusivement en France et en Italie. Et donc en priorité en France, mais nos voisins italiens savent aussi très bien faire le travail. Donc quand ce n'est pas possible en France, on va chez eux.
- Speaker #0
Et est-ce qu'il y a des... comment dirais-je... des difficultés à produire de manière responsable et un peu engagée, tout en respectant le produit d'origine, je dirais ?
- Speaker #1
En fait, justement, on adapte par rapport aux nouveaux matériaux, parce qu'on a la chance aujourd'hui d'avoir profusion de matériaux incroyables. Et donc ça, c'est quand même génial. Par exemple, tout ce qui est vernis, ce sont des vernis écologiques. On est dans des produits beaucoup moins chimiques qu'autrefois. Et on fait vraiment attention à ça. Donc, ce n'est pas compliqué, puisque maintenant, les fabricants se sont mis à proposer, à développer des bons produits. Puis, on bannit ceux qui ne sont pas vertueux. Oui, en fait,
- Speaker #2
les produits, on sait qu'on n'arrivera pas à les faire d'une bonne manière. On ne les choisit pas à la base.
- Speaker #0
Oui, OK. Et est-ce que finalement, une réédition, ce n'est pas un acte durable d'une certaine manière ?
- Speaker #1
Oui, parce qu'en fait, c'est... Et aussi, ce qui est important, c'est cette idée d'avoir une pièce qu'on va garder, qu'on va transmettre, qu'on va pouvoir revendre. Elle ne perd pas de sa valeur.
- Speaker #0
Est-ce que le grand public, vous pensez qu'il est sensible justement à ça ?
- Speaker #1
En fait, ce qui est important, c'est de leur raconter l'histoire, de leur raconter aussi l'origine des objets, l'âme des objets, l'histoire des objets. Parce qu'en fait, je pense qu'il est sensible à ça. Il faut savoir que nous, on fait un gros travail pour être dans les prix de marché. On n'est pas dans des prix super bas, mais on est dans des prix de beaux mobiliers. Compétitif. C'est important pour nous de regarder toujours le côté économique. On n'est pas du tout dans le collectible.
- Speaker #2
Oui, on commence par exemple avec 99 euros pour le mini-flor de Claude Courtecuisse en porcelaine, fait dans une manufacture qui a plus de 200 ans en France. Donc vraiment, on essaye d'offrir la meilleure qualité possible à nos clients, mais tout en ayant un prix qui soit quand même accessible.
- Speaker #0
Vous visez qui ? C'est qui votre clientèle ?
- Speaker #1
À la fois des collectionneurs ou pas forcément ? Non, pas forcément. Non, ça peut être collectionneur ou non. Des particuliers, mais également des entreprises, parce que nos produits, par exemple, le tissu du canapé Dialogue est classé M1, il est non-feu, donc il convient très bien aussi pour les hôtels, les bureaux, les restaurants. Donc on vise vraiment une clientèle à la fois de particuliers et à la fois de professionnels. Donc en fait, moi, par mon expérience, j'insuffle ces contraintes, entre guillemets, de normes. et d'adaptation au lieu public. Parce qu'en fait, c'est plus compliqué quand vous avez un produit que vous dites après, ah bah, si j'avais su, nous on est dès le départ, parce que notre marque n'existe que depuis 6 mois, 7 mois. Donc en fait, on est parti d'une page blanche et on a mis tout de suite ce qu'on voulait faire dès le départ, les valeurs, la stratégie. stratégie, etc.
- Speaker #0
Et donc là, vous avez quoi ? 6-7 mois, vous venez de dire, vous voulez porter où la marque ? Vous voyez où dans 5-10 ans ?
- Speaker #1
Alors déjà, il faut savoir qu'on a eu dès le départ une ambition importante et internationale, puisqu'on a lancé la marque à la Design Week de Milan, dans le salon Alcova, où on a reçu 25 000 personnes en une semaine. Donc déjà, on voulait montrer vraiment en lançant la marque qu'on avait cette ambition importante et internationale. Le showroom qu'on a ouvert sur La semaine dernière, donc en octobre, en fait on l'avait prévu seulement en 2027. Mais on a eu tellement de demandes, d'interviews aussi, on a eu des très beaux articles. On s'est dit non, c'est maintenant qu'il faut montrer notre collection au public. Et on a voulu être dans ce quartier près de la Place des Victoires parce qu'on est dans un quartier où il y a des architectes d'intérieur, des clients particuliers et professionnels qui viennent. Donc c'était important qu'on soit localisés dans ce quartier. On peut dire où on est exactement ? On est au 23 rue d'Abuqir.
- Speaker #2
23 rue d'Aboukir et c'est un showroom on peut rentrer c'est un showroom mais c'est un showroom mais aussi une boutique parce qu'on a du stock donc n'hésitez pas à venir voir et acheter et la conjoncture elle pourrait être un petit peu compliquée, vous comment se passent les débuts en fait ça se passe très bien nous ça se passe très bien parce que également à Milan on a été repéré par l'équipe du Bon Marché et donc on est au Bon Marché depuis le 30 août et donc jusqu'au 2 janvier
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #2
Donc on est très très contentes.
- Speaker #1
Et pour compléter, c'est vrai qu'au départ, au Bon Marché, on devait y être pendant un mois, puis ils nous ont prolongé un deuxième mois, un troisième mois,
- Speaker #2
et voilà, on reste.
- Speaker #1
On est très ravis.
- Speaker #0
Sur votre manière de travailler ensemble, vous êtes un duo intergénérationnel, je dirais. Comment ça fonctionne entre vous ? Vous avez chacun votre partie ? Oui,
- Speaker #2
on a chacune nos parties, mais on s'écoute beaucoup l'une et l'autre, et on travaille quand même vraiment le moins dans la main. Sur tous les sujets, mais c'est vrai qu'Isabelle sera plus sur les sujets commerciaux, réseaux et techniques. Et moi, je suis plus sur le sujet direction artistique, en ayant le choix des pièces, des matériaux, des couleurs, toute la communication, le marketing.
- Speaker #1
Je voudrais rajouter qu'en fait, ce n'est pas parce que Joséphine est ma fille qu'on a lancé Source Édition. Si elle n'avait pas été de ce niveau d'excellence, jamais je ne serais lancée dans cette entreprise. Avec juste ma fille, non, non, elle est absolument excellente. C'est un beau compliment.
- Speaker #0
Comment se répartissent même vos sensibilités au sein du duo ? Ce sont les mêmes ou pas ? Parce que vous avez vraiment une expérience différente. En fait,
- Speaker #1
ce ne sont pas du tout les mêmes. C'est pour ça que je respecte beaucoup la sensibilité de Joséphine sur le choix des pièces, le choix de toute la communication, tout ce qui est direction artistique. C'est vraiment elle. Parce que moi, parfois, je peux faire des gros dérapages, parce que j'aime bien les mélanges. C'est quoi des dérapages ? Par exemple, je peux...
- Speaker #2
Par exemple, à chaque fois que je choisis des fleurs, elle les trouve horribles.
- Speaker #0
Je trouve ce bouquet horrible,
- Speaker #1
mais elle l'aime beaucoup. Ah, magnifique ! Je dis non,
- Speaker #2
non, non, je vais quand même le faire, je vais quand même le faire, donc il faut que je me batte contre elle.
- Speaker #1
Je connais mes limites et comme vraiment, je sais qu'elle a très bon goût et qu'il faut partager son goût. Moi, je n'aurais pas du tout mis ça, mais je respecte. Donc voilà, on n'est pas du tout sur le même truc, mais je sais qu'elle est...
- Speaker #2
Mais elle aime les meubles sur ses éditions.
- Speaker #1
Ah, j'adore ! Non, non, j'adore. Non, non, tous les choix de la collection. Je les accompagne et les valide. Et parfois d'ailleurs, j'interdis, non c'est un peu beaucoup. Parfois Joséphine dans sa liste au Père Noël de tous les produits, je lui dis non mais là, techniquement c'est très compliqué. Et c'est vrai que quand on a des produits qui nécessitent par exemple des outillages qui coûtent des fortunes, on est obligé quand même d'intégrer le prix d'investissement de départ dans les prix des produits. Et moi je connais bien la réalité du marché, donc je lui dis là. On va être pas du tout sur notre cible et on va avoir des prix trop importants et on veut pas justement de clivage et d'élitisme excessif.
- Speaker #0
Et j'ai une question un peu perso mais quand vous voyez le week-end vous arrivez à ne pas parler de boulot ou en fait c'est tout le temps au coeur ? Et quand vous êtes au travail est-ce que vous arrivez à cadrer de ne pas parler de la plus vite du temps ?
- Speaker #2
Oui et en plus on a même deux groupes sur WhatsApp, un où on parle de trucs perso et un où on parle de trucs pro et on écrit sur ces deux groupes plusieurs fois au cours de la journée. On n'a pas de problème à savoir quel sujet doit être dirigé vers quoi. Et en plus, on a l'habitude de travailler ensemble, puisqu'avec Delphine, ma sœur, qui a aussi réalisé, qui nous a aussi fait ce magnifique showroom où l'on est aujourd'hui. On a déjà travaillé ensemble dans le passé, donc j'ai déjà travaillé moi directement avec Delphine sur certains projets d'aménagement, puisqu'elle est architecte d'intérieur. Elle a aussi travaillé avec Isabelle, on a aussi travaillé toutes les trois ensemble. Donc on a l'habitude en famille de travailler ensemble.
- Speaker #1
On s'est même commencé il y a beaucoup plus longtemps, puisqu'en fait, moi, j'ai toujours adoré déménager. Parce qu'en fait, j'ai constaté, je voyageais pas mal pour mon travail, et je me disais, mais il y a des villes étrangères que je connais mieux que certains de quartiers de Paris. Donc un jour, j'ai dit à mes filles, on va déménager. tous les 7 ans, par exemple, tous les 5 ou 7 ans, et on va changer de village dans Paris. Et en fait, à chaque fois, je leur disais, ben voilà, ça c'est votre espace, votre chambre, vous faites ce que vous voulez, vous choisissez les finitions, vous faites le plan, etc. Et ça a commencé, elles avaient, je sais pas, 8 et 10 ans. Donc depuis qu'elles ont 8 et 10 ans, elles choisissent les couleurs des murs, elles agencent. Donc je leur ai toujours dit...
- Speaker #2
Elles trouvent même la maison.
- Speaker #1
Oui, elles trouvent même la maison. Un jour, je...
- Speaker #2
D'Alphine, surtout.
- Speaker #1
Ah ouais, ça c'était bien. Un jour, j'ai dit, il faut qu'on déménage. Vous aviez quoi, 11 ? 10 et 12 ans et elles me disent quelques jours après alors tu en es où je m'attendais moi je travaille énormément j'ai pas le temps de chercher mais je vous donne les critères et en rentrant de l'école avec la nounou vous arrêtez dans les agences immobilières vous regardez et je visiterai trois maisons et au bout de trois maisons si ça marche pas on arrête parce que j'ai pas que ça à faire et un jour j'arrive un mois après mais j'ai complètement oublié que je leur avais dit ça et Delphine donc ma fille aînée On m'a dit qu'on avait pris rendez-vous demain à 8h. Je me suis dit qu'il fallait que je vous déposassiez à l'école et que je vais visiter. J'arrive à 8h, je ne savais pas du tout où j'allais et je tombe sur un truc incroyable. J'adore les lieux à révéler, les lieux qui ne sont pas aimés, qui sont abandonnés ou qui sont à transformer. J'arrive assez bien à sentir le potentiel d'un lieu. Et là, je tombe sur un truc incroyable. qui était en mauvais état mais avec des volumes intéressants et je me dis mais c'est génial donc je l'envoie là, il n'y avait pas encore des, c'était il y a vraiment longtemps vous n'aviez pas de portable du tout, vous étiez trop petit donc je contacte la nounou, je dis à 4h15 à la sortie de l'école, rendez-vous à cet endroit-là conseil de famille et j'ai un grand frère architecte donc je dis à mon grand frère de venir et donc à la sortie de l'école on a visité et j'ai fait une offre qui a été acceptée et là je leur ai dit parce que c'est vous qui avez trouvé la maison, choisissez où vous voulez vous installer et Et vous dessinez ce que vous voulez. Donc Delphine...
- Speaker #2
Et donc cette maison, c'était une ancienne fabrique de peinture. Donc vraiment un lieu entièrement à refaire.
- Speaker #1
Donc elles ont commencé, voilà, toutes petites.
- Speaker #0
C'est rigolo. Isabelle aussi, je mentionne quand même que vous avez un très beau parcours. Vous avez été nommée Chevalier des Arts et des Lettres et Chevalier de la Légion d'Honneur. Bravo.
- Speaker #1
Merci.
- Speaker #0
Donc vous avez pu quand même, depuis toutes ces années, traverser pas mal de... de décennies et vous devez avoir une belle vision du design. Qu'est-ce que vous nous diriez là-dessus ?
- Speaker #1
Oui, le design pour moi c'est quelque chose d'essentiel. Je regrette que ça ne soit plus pas assez inscrit dans les politiques publiques. Parce que quand on voit par exemple des pays comme l'Allemagne qui a une industrie très forte, c'est parce que le design a été intégré au sein du gouvernement et dans les groupes industriels. Et en France, parce que je suis aussi administrateur de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale qui a été créée par Bonaparte en 1801. qui est cet hôtel particulier qui est Place Saint-Germain-des-Prés. Et en fait, je suis vice-présidente du comité Construction et Beaux-Arts et nous remettons des prix, deux prix d'encouragement par an depuis des décennies à des chefs d'entreprise, soit les jeunes pour les montgolfiers ou les patrons d'industrie avec les chaptales. Donc je défends beaucoup cette notion d'industrie et je regrette qu'il y ait eu des politiques publiques qui ont considéré que la France ne devait pas être un pays avec des industries salissantes. et que beaucoup d'industries soient parties vraiment dans des pays lointains, y compris des métiers à tisser, des outils incroyables. On a perdu beaucoup, l'industrie a beaucoup souffert en France et je combats beaucoup pour mettre en valeur. Et d'ailleurs avec quelques-uns de notre comité, nous avons créé un cycle de conférences qui s'appelle Design Industry, parce qu'en fait je défends beaucoup l'idée qu'un designer peut réveiller une industrie et peut transformer une entreprise. Donc on a des témoignages. de directeurs, de patrons d'industrie qui ont rencontré un designer et ça a donné lieu à des changements d'entreprise et des succès absolument indéniables et vérifiables. Donc ça c'est vraiment mon cheval de bataille, c'est de défendre l'industrie et également la culture. Je fais beaucoup de choses au sein du ministère de la Culture, notamment j'accompagne un cycle de formation qui s'appelle le CHEC, c'est le cycle des hautes études de la culture qui est une formation continue sur 9 mois, 3 jours par mois. où des auditeurs qui font acte de candidature suivent un programme sur les politiques culturelles absolument incroyable. Et je suis dans le conseil d'orientation depuis avant l'origine de ce cycle qui a un grand succès maintenant et qui rassemble des gens du public et du privé sur des sujets. Et je défends à chaque fois, chaque année, les sujets design et architecture. Donc ça c'est vraiment mes... prédilection et mes passions.
- Speaker #0
Vous dormez la nuit ? Vous avez un peu de temps ? Ah oui, en fait, moi,
- Speaker #1
il faut savoir que je dors... Il m'arrive parfois de faire des voyages avec mes meilleures copines et parfois on partage une chambre parce que ça fait un peu colonie de vacances. Et elles sont assez sidérées parce qu'on parle beaucoup dans la même chambre. Il m'arrive de m'endormir au milieu d'une phrase. C'est-à-dire que je pose l'oreille, la tête sur l'oreiller, je m'endors immédiatement, donc je récupère bien.
- Speaker #0
Comment vous imaginez le design de demain ? Est-ce que vous pensez que, justement, c'est plutôt un retour aux sources ou va y avoir plutôt une réinvention totale ? Pour vous, c'est plutôt le retour aux sources, c'est l'important ? Non, pas forcément.
- Speaker #1
En fait, il n'y a pas une seule tendance. Ce design de demain, il y a plein de tendances, plein de directions différentes. Alors, nous, notre tendance, on la sent très ancrée. Parce qu'en notre époque...
- Speaker #2
Oui, après, j'avoue, j'aime pas trop le mot tendance. Nous, on essaye vraiment d'être dans quelque chose qui va durer le plus longtemps possible et qui n'est pas un cycle qui a voué à disparaître à la saison prochaine. Donc c'est vrai que je sais pas...
- Speaker #0
Est-ce qu'il y a des designers contemporains avec qui vous aimeriez collaborer dans le futur ? Ou vous êtes plutôt sur de... Est-ce que vous allez toujours rester 50 à 70 ?
- Speaker #2
On va peut-être élargir à 40. 90, plutôt dans ce sens-là. Mais non, en tout cas, il y a des très bons éditeurs et des très bons designers de nos jours qui s'occupent du design contemporain et nous, ce n'est pas notre volonté d'aller sur ce sujet-là. Peut-être faire des collaborations sur certains de nos meubles avec des marques ou des artistes ou des choses comme ça, mais pas... Pas avoir de designer contemporain. Et là,
- Speaker #0
vous avez déjà en tête les prochaines pièces ? Vous êtes déjà en train de travailler sur les prochaines pièces ? Oui,
- Speaker #2
on est déjà dans des phases...
- Speaker #0
Vous allez vous fixer un rythme ?
- Speaker #2
On ne se fixe pas du tout de rythme, parce que c'est tellement long et fastidieux, déjà, de trouver les endroits, comme on en a parlé, mais également les bons fabricants, parce qu'on a envie d'être à des bons prix, mais aussi de bien fabriquer en France ou en Europe. Et donc, c'est long, donc on n'a pas envie de se mettre la pression pour sortir quelque chose dans la hâte, qui n'est pas parfait, selon nous. Parce que nous, on est vraiment très perfectionnistes. On a vraiment envie de proposer à notre client quelque chose qu'on aimerait avoir nous-mêmes le mieux possible. Et donc, on espère sortir des choses tous les ans. Mais on ne se fixe pas une date. Mais en tout cas, oui, on a déjà des choses qui sont en prototypage actuellement. Aujourd'hui,
- Speaker #0
il y a combien de produits ?
- Speaker #2
On a huit produits de cinq designers.
- Speaker #0
Et avec des finitions différentes ?
- Speaker #2
Avec des finitions différentes, oui.
- Speaker #0
Ok. Je crois qu'on a fait un peu le tour du sujet. Est-ce que vous... Vous pensez avoir tout dit ? Vous voulez rajouter quelque chose ?
- Speaker #2
Peut-être, on peut parler un peu des pièces.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #2
Puisqu'on a cinq designers, ça peut aller plutôt rapidement.
- Speaker #0
C'est vrai qu'on n'a pas fait de zoom sur chacune des pièces. On a abordé un petit peu. Donc, il y a quoi ? Donc,
- Speaker #2
on a cinq designers, deux d'entre eux avec du mobilier national. Donc, on les a abordés. Ce sont Thurène Chevalereau pour les meubles en kit et André Monpois pour la série d'assises modulables. Oui. Ensuite, on a Giuseppe Rivadossi, qui est un maître ébéniste salien, qui a été sacré maître des métiers d'art par la Triennale de Milan. Il est vraiment un designer qui me tenait beaucoup à cœur et qui n'avait jamais accepté d'être édité. On y est allé un peu au culot en se disant qu'on essaye, mais ce n'est pas en ses habitudes. En tout cas, il n'a jamais accepté d'être édité. Il a quand même 91 ans, donc ça ne va peut-être pas changer maintenant. Et finalement, il a adoré notre projet, adoré notre expérience et aussi adoré le fait qu'on soit mère et fille, parce que lui-même travaille avec ses deux fils qui maintenant gèrent son atelier. Donc c'est un banc et un tabouret qui s'appellent Basilio, qui sont en tilleul massif, parce que c'est le bois qui est originaire de leur région dans le nord de l'Italie, et qui peut être entièrement sculpté à la main ou en version lisse. Et c'est vraiment des vrais objets d'art à eux-mêmes et fabriqués dans l'atelier de Giuseppe et de ses deux fils. Ensuite on a le mini fleur de Claude Courtecuisse qui est un designer incroyable. On est beaucoup en contact avec lui, on l'a toutes les semaines au téléphone et il vient beaucoup nous voir. Il est absolument génial. C'est un petit objet en biscuit de porcelaine qui est un hommage à sa maman qui gardait toujours la dernière fleur fraîche d'un bouquet fané et qui l'a metté dans sa tasse favorite. Pour faire perdurer ce geste de l'être aimé qui nous offre des fleurs, il a créé ce petit objet qui a la particularité d'être creux à sa base, donc qui n'est pas un mini fleur habituel. C'est pour continuer à le mettre dans son contenant favori. C'est vraiment un objet qui est très poétique et qui parle très facilement à un grand nombre de gens et qu'on a voulu le plus accessible possible, comme on vous l'a expliqué au début. Ensuite, on a Ben's We Dance avec cette fameuse lampe qui s'appelle maintenant Jumel, qui est absolument magnifique et qui existe en quatre couleurs. Pour l'histoire, pour chaque nom des produits, on a demandé aux designers ou à leur famille de nous trouver des noms parce qu'ils avaient tous souvent des noms plutôt d'archives. avec des numéros ou sans nom. A chaque fois, ce sont des noms qui viennent de la part des familles et qui, une fois mises tous ensemble, vont très bien. Jumelles, c'est parce que Ben a pris cette lampe, parce que c'est deux demi-globes mis ensemble. On a Tutu, donc ces petits-enfants qui sont les ayants droits, ces quatre petits-enfants. C'était le surnom qu'ils donnaient à leur grand-père. qui s'appelle Thurène. Et l'art qui a eu l'idée de mettre un trait d'union entre Thu et Thu pour faire l'assemblage Tenon et Mortez, qui est en fait l'assemblage de ces tables. Et Dialogue, c'était aussi le dialogue avec le passé, le présent, dialoguer avec son voisin. C'était aussi un siège qui a été mis dans le bureau de Simone Veil, donc qui a assisté à beaucoup de dialogues, effectivement.
- Speaker #1
Et Basidio pour la collection de José Péry-Vadossi. Donc en fait, chaque objet a vraiment une âme. On les livre avec un certificat d'authenticité. Ils sont tous signés. Donc il y a une plaque en aluminium avec l'année de création, la signature du designer, l'endroit de fabrication. Et donc comme ça, ça garantit que le produit est authentique.
- Speaker #0
Génial. J'ai ma dernière petite question culte que je ne vous ai pas donnée avant, mais vous m'avez dit que vous écoutiez le podcast, donc peut-être que ça va vous parler. Si vous faisiez un dîner... Toutes les deux avec six personnalités qu'elles soient décédées ou vivantes qui serait-elle connue ou pas ?
- Speaker #1
C'est le même dîner que toutes les deux ? Ou on a chacune notre dîner ? Non, faites le même dîner.
- Speaker #2
Moi j'aimerais bien surtout qu'il y ait tous les designers de notre collection qu'on n'a pas pu rencontrer.
- Speaker #1
C'est génial.
- Speaker #2
Donc André Monpois, Thurène Chevalereau et Ebens Wildens parce qu'on connaît. Claude Courtecus et Giuseppe qui sont encore avec nous. Mais c'est surtout ces trois designers-là que j'aimerais avoir autour d'une table et savoir ce qu'ils pensent du coup de nos rééditions et avoir leur avis sur notre aventure.
- Speaker #0
Bravo. Bonne réponse. Et vous ? Je suis dans le même dîner. Oui, mais sinon, imaginons que c'est une entité, on va dire, les anciens, les designers avec lesquels que vous reprenez et qui seraient les autres personnalités ?
- Speaker #1
Ça fait pas mal de monde. Moi, je dirais Jean Prouvé. Qui on pourrait inviter ?
- Speaker #2
J'en ai donné trois. Tu trouves les autres ?
- Speaker #1
C'est pas facile. Non,
- Speaker #0
c'est pas facile. Des écrivains, des chanteurs, des personnalités.
- Speaker #2
Moi, j'aimerais bien aussi avoir le président Pompidou qui a justement contribué à toutes ces années-là, à toute cette vague des designs. Du coup, moi,
- Speaker #1
j'invite aussi Claude Pompidou, sa femme, qui était quand même très motrice dans le sujet. Ça, c'est une super idée. Voilà.
- Speaker #0
Ok, super dîner. Merci beaucoup de nous avoir expliqué tout ça.
- Speaker #1
Merci beaucoup. Merci.
- Speaker #0
Décodeur, c'est terminé pour aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir écouté en entier. Si vous avez aimé, n'oubliez surtout pas de vous abonner au podcast pour ne pas rater les prochains épisodes et retrouver tous ceux qui ont déjà été enregistrés. N'hésitez pas non plus à le partager en l'envoyant à vos proches qui pourraient être intéressés ou en story Instagram. D'ailleurs, on peut se retrouver sur le compte Décodeur, où je poste très régulièrement. Et si jamais vous avez 15 secondes, n'oubliez pas de laisser 5 étoiles ou un avis. C'est juste sous la liste des épisodes. Non seulement ça me fait très plaisir, évidemment, mais dans la jungle des podcasts, plus on a de notes, plus on se fait remarquer, ce qui est très important pour moi. Voilà, merci beaucoup et à très bientôt alors, ici ou ailleurs.