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#133 Kirane, le respect du savoir faire indien cover
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DECODEUR, la décoration aujourd’hui

#133 Kirane, le respect du savoir faire indien

#133 Kirane, le respect du savoir faire indien

1h03 |05/12/2025
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DECODEUR, la décoration aujourd’hui

#133 Kirane, le respect du savoir faire indien

#133 Kirane, le respect du savoir faire indien

1h03 |05/12/2025
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Description

Décoration, design, création, savoir-faire, ces mots vous parlent ? Alors vous êtes au bon endroit !

Attention épisode génial !

C'est l'histoire de Karine qui, pendant un voyage en Inde, a eu un coup de foudre pour l'artisanat et le savoir faire local... mais aussi pour Banu, un indien qui lui faisait visiter un atelier. Elle sait que sa vie est là et avec lui. Ainsi est né Kirane. En très gros résumé car les détails sont évidemment dans le podcast !

Kirane est une marque de décoration textile, sincère et authentique, engagée et profondément humaine. Vous allez en avoir des frissons en écoutant Karine nous raconter son quotidien, entre beauté et galères. Tout est fabriqué à la main, dans le respect des traditions, avec des matières et des pigments naturels et surtout dans de bonnes conditions (Karine a crée "Villa Kirane" son propre atelier de confection dont Banu est responsable). 

 

Ensemble on parle 

  • de l'incroyable histoire de Kirane

  • l'importance pour elle d'avoir son propre atelier 

  • comment elle concilie le travail local versus les exigences du marché 

  • et les ponts entre Jaïpur et Paris 

  • ses plus grosses difficultés au quotidien et comment y remédier

  • la fast déco et les faux discours marketing 

  • la valeur du fait main 

  • les défis écologiques 

  • la joie de vivre et des couleurs 

  • sa passion pour le dessin et le manque de temps pour le faire 

  • la folie des sofa cover

  • la crise et l'avenir 

  • l'importance d'avoir des jeunes dans son équipe 

  • ses 3 maisons si différentes 

  • et bien plus encore !


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Merci beaucoup !   

Hortense Leluc, journaliste déco et fondatrice de DECODEUR  


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous, je suis Hortense Leluc et vous écoutez Décodeur, le podcast dans lequel j'échange avec des pros de la déco. Il y a plusieurs formats d'émissions qui tournent, stylé, archi-cool, le club ou les rencontres comme l'épisode qui va suivre, dans lequel un architecte ou un designer, une marque que vous aimez ou que vous allez découvrir, un entrepreneur ou un créatif va nous parler de sa manière de travailler, de ses produits. de son savoir-faire, sa vision, ses inspirations, bref, de l'envers du décor qu'on ne soupçonne pas toujours. Et c'est ça la force du podcast, on prend le temps, on va plus loin, on décortique, on apprend, on comprend. Il y a une forme d'intimité, de complicité et d'authenticité à laquelle je tiens beaucoup. Merci d'être si nombreux à écouter. Si vous venez de découvrir le podcast, bienvenue. N'oubliez pas de cliquer sur s'abonner pour ne pas rater les prochains épisodes. et si mon invité vous plaît, surtout n'hésitez pas à partager l'épisode en story ou à mettre 5 étoiles, tout ça m'aide beaucoup à me faire connaître encore plus. Bonjour à tous, cette fois dans Décodeur, on part en voyage. Un voyage loin des chaînes de production industrielle, loin des collections qui s'enchaînent à toute vitesse. On part en Inde, là où chaque motif raconte une histoire, où chaque... couleur est un langage et où la main de l'artisan est au cœur du projet. Aujourd'hui, je suis avec Karine Nally et on va vous parler de Kiran, une marque de décoration textile qui fait sans cesse des ponts entre la France et l'Inde, entre tradition et code contemporain. Kiran a son propre atelier de confection à Jaipur, en Inde, défend le fait main et préserve des savoir-faire ancestraux et créer des pièces qui ont une âme. J'ai donc profité de la présence de Karine à Paris pour organiser cet échange et en savoir plus sur cette jolie marque. Bonjour Karine.

  • Speaker #1

    Bonjour Hortense.

  • Speaker #0

    Je fais une petite parenthèse pour remercier Querk, qu'on enregistre chez Querk, que tu découvres avec moi ce matin. Ce sont des espaces de bureaux haut de gamme inspirés des codes de l'hôtellerie de luxe. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que vous pouvez, votre employeur peut avoir des bureaux chez Querk et vous pouvez bénéficier Merci. de la conciergerie, d'un barista, d'un service de restauration selon les lieux. Quercq peut aussi organiser vos événements d'entreprise. Chacun a un rooftop aussi, une salle de sport, un espace wellness. Bref, ce sont quatre adresses dans le huitième dont je voulais vous parler, qui sont très belles, très bien pensées.

  • Speaker #1

    Je confirme, on est dans le luxe.

  • Speaker #0

    Oui, on est hyper bien installés. Karine je me dis qu'on va peut-être Commencez par le début. Quelle est l'histoire de Kiran ? Comment ça a commencé ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un voyage en Inde. C'est une histoire de voyage toujours, Kiran. Donc, j'ai fait un voyage en Inde touristique. Ça faisait longtemps que je voulais aller en Inde, mais je ne l'avais jamais fait. Et je me retrouve en Inde, au milieu des tissus, des couleurs et de cette vie indienne. et ça a été... Ça a été un coup de foudre, un choc, un tsunami dans ma vie, professionnel et personnel, puisque l'histoire lie vraiment les deux. Et je suis tombée amoureuse du Blokprim, vraiment le premier atelier d'impression à la main, au Blok dans lequel je suis allée. Je ne sais pas, ça a été comme un choc. J'ai eu l'impression d'appartenir à ce monde. Et comme je ne fais jamais rien à moitié, je suis tombée amoureuse de la personne. qui m'a emmenée dans le premier atelier de Blockprint. Et donc, j'ai complètement changé de vie. Donc, Irane n'est pas née d'un business plan. C'est à peu près l'exact contraire de ça. À l'époque, moi, j'étais décoratrice et j'avais des boutiques de déco dans le sud de la France. Et du coup, j'ai très vite monté une petite collection pour mes boutiques au départ.

  • Speaker #0

    Ah oui, donc c'est vraiment parti d'un voyage personnel.

  • Speaker #1

    C'est un voyage personnel. Ça faisait très longtemps que je voulais aller en Inde. J'ai pas mal voyagé dans ma vie, mais l'Inde, vraiment, ça me tenait à cœur. Mais je ne l'avais jamais fait. Peut-être parce qu'il y avait quelque chose de spécial qui m'attendait là-bas. Donc, il fallait que ce soit le bon moment. Et voilà, vraiment, ça s'est fait très, très spontanément. Donc, c'est une histoire de cœur, de coups de fou, de... De passion, mais vraiment pour cette artisanat. J'ai vraiment ressenti quelque chose. J'étais là-bas chez moi. C'est très bizarre à expliquer. Alors, je sais qu'il y a plein de trucs sur l'un, la spiritualité. Ce n'est pas ce niveau-là. C'est vraiment dans ces ateliers. J'étais bien, j'étais chez moi. J'ai eu envie de faire quelque chose. Moi, j'ai fait l'école Esmod il y a très longtemps. Je suis donc styliste et comme toute styliste, je voulais un jour monter une marque, mais ça ne s'était jamais fait. Et moi, je suis quelqu'un de dentier et de spontané. Et en fait, j'attendais que la vie m'apporte cette idée, ce projet. Et là, ça a juste été une évidence en fait. Et donc, on a créé cette petite collection pour ma boutique de déco. Chaque année, j'exposais avec la boutique de déco en tant que décoratrice et boutique sur le salon Vivre Côté Sud à Aix-en-Provence. Kiran est vraiment née là. C'est-à-dire que j'ai décidé, parce qu'on était une fin d'année, qu'en juin, puisqu'il fallait s'inscrire, je présenterais une collection. Elle n'était pas faite, rien n'existait. Et c'est comme ça que Kiran est né. Et donc Kiran, l'essence de Kiran, le nom Kiran est né. C'était assez évident parce que Kiran en hindi veut dire rayon de soleil. Et qu'en fait, moi, je l'ai orthographié de manière à ce que ce soit l'anagramme de mon prénom Karine.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça, je me suis demandé. Tiens, quand je l'ai écrit, je me suis dit Karine, Kiran, est-ce qu'il y a quelque chose ? Voilà,

  • Speaker #1

    donc dans l'orthographe, enfin en hindi, il ne voit pas le lien. Mais voilà, on l'a orthographié de manière à ce que vraiment ça représente mon prénom.

  • Speaker #0

    Donc, ça a commencé avec une collection que tu vendais dans tes boutiques. Et après, à quel moment tu as fait la bascule d'abandonner les boutiques et de ne te consacrer qu'à Kiran ?

  • Speaker #1

    Alors, c'était un projet déjà dans ma vie d'arrêter ces boutiques. J'en avais vendu une, l'autre était en vente. C'était vraiment, j'avais envie d'arrêter les boutiques. Comme on n'a rien calculé. Voilà, vraiment, tout était très spontané. Donc, en fait, on s'est retrouvés sur le salon Côté Sud pour vendre en B2C à des particuliers. Mais ce salon Vivre Côté Sud, c'est aussi un salon où il y a du B2B. Et donc, on a été contactés par des boutiques. On s'est dit, ah, bon, OK, alors est-ce qu'on vend aux boutiques ? Oh, ben, t'as une commande, tu vas pas la refuser. Donc, on a eu une grosse commande d'une boutique qui ouvrait à Cannes, un concept store. et en fait il se trouve que cette cliente lorsqu'elle a reçu sa marchandise, a dit non, je ne m'attendais pas à ça, etc. A refusé la marchandise. Donc en fait, et puis moi à l'époque, j'étais tellement sur mon petit nuage, on était à Bali un peu en honeymoon. Je me suis dit mais qu'est-ce qu'elle nous énerve. Je lui ai dit ok, renvoyez tout. Et elle a tout renvoyé à Paris. Et quand je suis rentrée de vacances, je me suis dit on fait quoi de ça en fait ? Et c'est comme ça qu'on a monté un site. Parce qu'on s'est dit, maintenant, il faut vendre cette collection. Parce que c'était vraiment une grosse commande. Et mon fils qui était avec moi à ce moment-là, qui travaille dans l'image, etc. M'a dit, maman, moi, je peux te faire des photos. Et puis, on fait un site. Et donc, il m'a fait des photos et j'ai fait le site toute seule. Et c'est comme ça qu'on a lancé vraiment Kiran. Et moi, j'avais déjà une clientèle de mes boutiques de déco. Une mini, mini, mini notoriété sur Instagram. Et donc, les clientes ont commencé comme ça à acheter en ligne. Puis après, j'ai fait des ventes privées chez moi. Et les clientes sont venues. Ça s'est vraiment fait spontanément.

  • Speaker #0

    Mais ça t'a parfois dit, cette femme ? Pourquoi elle t'a rendu la marchandise ?

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui avait travaillé avec l'Inde et qui avait des mauvais souvenirs des ateliers. Elle avait eu des histoires compliquées dans des ateliers en Inde. Et quand elle a reçu, elle me disait « Ah non, mais c'est pas beau, ça sent pas bon » . Elle me disait que ça sent l'Inde. Je pense qu'elle avait besoin d'une petite thérapie concernant l'Inde. Quand j'ai reçu la marchandise à Paris, il y avait mes enfants, il y avait ma fille, il y avait ses copines. J'ai dit, dites-moi, ce n'est pas beau, ça sent mauvais. Ils m'ont tous dit, c'est quoi ton problème ? Je ne sais pas, il y a une dame qui nous retourne, qui nous dit que tout ça, ça ne va pas. Et tout le monde, mes amis, me disaient, mais non, c'est très bien. Donc, vraiment, si elle a la chance qu'elle écoute ce podcast, je la remercie grandement de nous avoir tout retourné. Parce qu'à cette époque-là, on était vraiment en mini-production. Et de toute façon, je n'aurais pas pu produire le double dans le même timing.

  • Speaker #0

    Excellent. Alors toi, tu vis entre Jaipur et Paris ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment.

  • Speaker #0

    Ou Paris ou le Sud ?

  • Speaker #1

    Paris, non, non. Alors le Sud, c'est terminé. Vraiment, je vis entre Jaipur, Paris et Essaouira. Parce que j'ai aussi un lieu à Essaouira et je répartis mon temps comme ça.

  • Speaker #0

    Parce qu'en plus, de ce que j'ai compris, tu as ton conjoint qui est en Inde, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà. Du coup, mon conjoint que j'ai rencontré en Inde est indien. Et donc, c'est lui qui dirige Villa Kiran, en fait, notre atelier de confection à l'époque. Donc,

  • Speaker #0

    tu ne vas pas deux fois par an en Inde ? Tu es vraiment beaucoup là-bas ?

  • Speaker #1

    Ah non, non. Alors... Il y a eu des époques où j'avais encore ma fille qui était à la maison. Donc là, je faisais beaucoup, beaucoup d'aller-retour. maintenant j'y vais Effectivement, deux fois par an, mais quand j'y vais, je reste trois mois.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Au niveau trajet, c'est deux fois par an, mais je reste longtemps. Oui, j'ai vraiment plusieurs vies en une.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te plaît tant ? Tu disais, c'est marrant, ce n'est pas forcément la spiritualité, la joie, etc. C'est toi plutôt, c'est le savoir-faire qui t'a tapé dans l'œil ?

  • Speaker #1

    Moi, c'est vraiment l'artisanat, les couleurs. Oui, alors il y a aussi la spiritualité, ça en fait partie, mais ce n'est pas ça vraiment qui… Ce qui m'a frappée, c'est l'artisanat, le fait que tout soit possible et en même temps que tout est complètement impossible, parce que c'est vraiment très difficile de travailler en Inde quand on a des deadlines, des contraintes de qualité, etc. Et pourtant, tout est possible, tout prend forme, tout naît sous nos yeux. Ils ont vraiment un savoir-faire qui est vraiment extraordinaire et sans limite.

  • Speaker #0

    Oui, toi, tu as ton propre atelier de confection, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, nous, on a eu très vite notre propre atelier de confection. Alors, au début, on a travaillé avec des petits ateliers et un sous-traitant. Et à un moment où on avait besoin d'un peu plus de production, on lui mettait un peu la pression. Et en fait, vraiment concrètement, un soir, on rentre du restaurant et on passe devant cet atelier en moto et je vois de la lumière. Et je dis donc à Banu, mon conjoint. « Regarde, ils ont oublié d'éteindre la lumière. » Et il me répond « Non, ils travaillent. » Je lui dis « Mais comment ça, ils travaillent ? » Il me dit « Tu as vu l'impression que tu leur as mis aujourd'hui ? Il faut qu'ils les finissent, ces robes. » Parce qu'à l'époque, on faisait des vêtements. « Il faut qu'ils les finissent, tes robes. » Donc, ils travaillent la nuit. Je lui dis « Non, mais ce n'est pas possible. » « Mais moi, je ne savais pas. » Et là, c'est à ce moment-là que je me suis dit « Non, alors moi, je veux un atelier. Je veux des employés salariés. » puisqu'en Inde, les employés sont tout le temps payés à la pièce. jamais, jamais salarié. Et moi, j'ai dit, voilà, je veux notre lieu, je veux des salariés, des gens dont on prend soin. Je ne veux pas qu'on travaille la nuit. S'il y a plus de travail, il y aura plus de salariés. Voilà, et vraiment, j'étais complètement naïve, mais c'est vraiment ça qui se passe en Inde et pas qu'en Inde. Et moi, j'ai dit, ah non, non, mais moi, ça ne m'intéresse pas du tout d'avoir une collection. Je ne me sentais vraiment pas à l'aise avec le fait que... Il y avait des gens qui bossaient toute la nuit pendant que nous, on allait dormir pour que le lendemain, on ait notre marchandise. Et donc, on a pris la décision à ce moment-là et on a monté d'abord un tout petit atelier avec un employé et puis quelqu'un qui faisait la couture, notre master. C'était le tout premier qu'on a débauché en fait parce qu'il était très, très mal payé, mal traité dans cet atelier avec lequel on sous-traitait. Donc, au début, on n'avait que lui. Et puis, on avait un homme un peu à tout faire, qui rangeait, qui coupait les fils, qui repassait. Et au début, on a commencé comme ça, vraiment tout mini. On a loué un petit studio. Il y avait deux mini pièces, une avec les tissus et une avec la machine à coudre et la table de couple.

  • Speaker #0

    Mais au moins, ils travaillaient dans de bonnes conditions.

  • Speaker #1

    Ils travaillaient dans de bonnes conditions. Pour moi, c'était évident. Mais encore une fois, j'étais très, très naïve. J'étais ignorante, en fait, sur le sujet. et Pour moi, c'était vital. Et depuis,

  • Speaker #0

    tu as grossi avec toujours, il y a toujours ces bonnes...

  • Speaker #1

    L'atelier a vraiment grandi. On s'est installé vraiment dans une villa l'année dernière. Donc là, ça dépend des moments, mais on est jusqu'à 5-6, plus les 5-6 qui cousent, plus les personnes qui coupent les fils, etc. Et en fait, chaque fois qu'on est à plus de travail, on rachète une machine et on recrute. Voilà, et moi, mes employés ont leur dimanche. Alors, je sais qu'ici, on va me dire, il faudrait deux jours, mais déjà en Inde, 95% des gens n'ont pas de dimanche, n'ont pas de jour de congé. Donc, moi, ils ont un salaire, des dimanches, quand ils doivent pas, ils ont des congés pour les fêtes, il y a différents festivals toute l'année, c'est très important. En Inde, Diwali, Holi, etc. Et oui, pour moi, c'est une évidence. C'est ça ou rien. C'est-à-dire, si je n'avais pas pu faire ça, Moi, ça ne m'intéresse pas de... de produire dans des grandes usines. La question ne s'est jamais posée, en fait.

  • Speaker #0

    Et tu accompagnes les femmes aussi, particulièrement, je crois ?

  • Speaker #1

    Alors, oui. On essaie de recruter des femmes. Moi, mon rêve, au départ, c'était un atelier de femmes. On a même monté une ONG. On voulait monter un atelier où on formait des femmes veuves, parce que les veuves, en Inde, ça pourrait durer des heures. La condition des femmes en Inde, mais en particulier les veuves sont rejetées de leur famille, etc. Et souvent avec leurs enfants. Donc, vraiment, moi, j'avais l'intention de monter un atelier avec des femmes veuves, de scolariser les enfants, plein, plein de bonnes intentions. C'est très, très difficile. La culture indienne, les traditions indiennes, c'est très difficile. On arrive avec tout. nos bonnes idées, mais c'est vraiment très compliqué à mettre en application. Donc ça, on n'a pas pu le faire. Moi, chaque fois que je peux, j'essaye de recruter des femmes. C'est très compliqué parce qu'elles viennent à l'entretien avec leur mari et en fait, c'est le mari qui décide ou pas. Souvent, elles ne peuvent pas sortir de la maison, donc on va les embaucher et puis dès qu'il y a un festival ou quelque chose, elles vont dire aujourd'hui, je ne viens pas, mais en fait, elles ne viennent plus pendant 15 jours. parce que Elles ont des obligations familiales qui sont bien plus importantes que celles qu'on peut avoir nous en tant que mère de famille ou épouse ici en France. Et du coup, recruter des femmes, c'est assez compliqué. Mais j'essaye toujours, je m'acharne, elles partent et puis j'en recrute d'autres, etc. Dès qu'elles ont des bébés, en général, elles partent, elles ne reviennent plus. Parfois même, on recrute des jeunes filles qu'on forme et puis à un moment, il faut qu'elles se marient. Et quand elles se marient, elles ne reviennent plus. Mais quand même, je continue parce que ce peu de temps qu'on leur donne d'indépendance, de valorisation de leur personne, c'est toujours ça. Peut-être qu'elles reviendront un jour. Et puis, en parallèle, on travaille pour le coup, là maintenant, avec une ONG qui est dans un village à côté de Jaipur, où ce sont vraiment toutes les femmes du village qui travaillent, qui viennent à tour de rôle. Donc, encore une fois, on leur donne des tâches sur lesquelles on n'a pas vraiment de deadline. Par exemple, nous, il y a des pompons souvent aux quatre coins de nos coussins. Donc, on va leur commander des pompons, mais ça peut être dans 15 jours, mais on sait qu'on a suffisamment de stock pour tenir 2-3 mois. Parce qu'ils nous disent dans 15 jours, mais s'il y a un festival ou quel que soit, un décès, il y a trois femmes, parce qu'elles sont souvent de la même famille, qui vont disparaître une quinzaine de jours et qui ne vont pas venir travailler. Donc, on essaye le plus possible de faire travailler cette association. Et puis, peut-être qu'un jour, on arrivera vraiment à en créer une, mais ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air.

  • Speaker #0

    Vous avez votre propre atelier de confection et tu travailles aussi avec des ateliers familiaux pour d'autres techniques ?

  • Speaker #1

    Alors, nous, notre atelier est un atelier de confection. C'est-à-dire qu'en fait, nous, on n'achète que du tissu blanc brut, soit qu'on fait teindre. Donc là, pareil, on travaille avec un atelier, un tout petit atelier où toute la teinture est faite de manière artisanale. Soit on le fait imprimer au block print, c'est la grosse majorité de nos collections. Et là, on travaille avec deux, trois ateliers qui sont effectivement des petits ateliers familiaux qu'on connaît ou on connaît tout le monde. Là, par exemple, l'impression est arrêtée pour trois semaines. C'est assez dramatique pour nous, pour notre réassort. Mais le fils se marie. Donc, pendant trois semaines, ils ont tout arrêté. Mais je suis invitée au mariage. Ce serait magnifique, mais ça ne va pas me donner mon stock de tissus. mais voilà donc on a effectivement nos petits ateliers de sous-traitants pour des métiers qu'on ne fait pas nous. Parce que nous, vraiment, Villa Kiran, c'est la confection, donc la couture en fait.

  • Speaker #0

    Oui, d'accord. Ok, je comprends. Et qu'est-ce qui est le plus complexe dans la fabrication artisanale en Inde ? Tu nous l'évoquais rapidement tout à l'heure. Qu'est-ce qui est difficile, dont on ne se rend pas compte, nous, tu vois ?

  • Speaker #1

    Alors, par exemple, le block print en soi. Donc, le block print, c'est moi, je vais dessiner un pattern, un motif. qu'on va faire graver sur des blocs en bois. Donc ça, c'est déjà un intermédiaire. Donc ça, c'est un tout petit atelier. Enfin, c'est deux messieurs qui gravent sur les blocs en bois, père et fils. Ensuite, on a la partie impression. Donc la partie impression, elle est compliquée parce que nous, ici, nos clients sont ravis d'avoir un tissu imprimé à la main. C'est génial. Là, c'est toujours une pièce unique, en fait. Et pourtant, ils ne sont pas prêts à avoir les petits défauts qui vont avec. C'est-à-dire qu'en fait, au moment où le tampon tremble dans l'encre, quand il le soulève, il peut y avoir une petite goutte. Si l'encre est un tout petit peu trop liquide, ça peut faire des petites gouttes sur le motif. La plupart de nos tissus, ce sont des pigments naturels. Donc, on n'a jamais deux fois exactement le même ocre. Le fond de nos tissus écrus, ce sont des noix, je ne sais plus le nom en français d'un arbre, des noix qui sont broyées. C'est une macération et en fait, le tissu blanc est teint dans ces noix qu'on macérait et ensuite séchées au soleil. Donc, en fonction de s'il y a plus ou moins de noix, est-ce qu'elles sont plus ou moins grosses, ils ne vont pas les compter, ils ne pèsent pas. C'est tout fait de manière très instinctive, aléatoire. Et donc, s'il fait très chaud ce jour-là, s'il y a du vent, s'il fait humide, le tissu va mettre une demi-heure ou est-ce qu'il va mettre une heure à sécher. Ça ne sera jamais exactement le même fond de tissu. Donc, on va d'un écrut très clair à un beige clair. Mais c'est quand même une nuance. Alors, en Inde, ils disent tout le temps, « Mais madame, c'est 20% difference, not big problem. » Oui, non, si. Pour moi, dans l'absolu, c'est vrai que ce n'est pas un problème vital. Mais pour nos clients, nous, on shoot le produit une fois. Moi, je ne peux pas le shooter à chaque fois qu'il revient, etc. Donc, on a un vrai problème sur, effectivement, les couleurs. C'est-à-dire qu'on va valider des couleurs, on va faire des essais, des tests. L'imprimé est parfait, mais on a une chance sur un million que ce soit exactement le même qui sorte en prod. Parfois, ça va être exactement le même. Ce sont des pièces de 10 mètres de tissu. On peut avoir quatre pièces dans la journée, ils vont imprimer quatre pièces exactement le même. Celle du lendemain, ce n'est pas exactement le même. Donc, c'est ça qui est vraiment très difficile dans la partie block print. Et puis, ce qui est compliqué en Inde à gérer, ce sont les délais. Il y a un rapport au temps qui n'est pas du tout le même que nous, un rapport à ce qui est grave qui n'est pas du tout le même que nous, mais vraiment pour tout. En Inde, ce n'est pas grave de mourir. Alors, livrer un tissu trois semaines en retard, ce n'est vraiment pas grave en fait. Et nous, c'est vraiment ça qui fait que c'est très compliqué d'avoir vraiment un mode artisanal de fabrication en Inde et un client final qui est français, européen et qui a des attentes.

  • Speaker #0

    Et comment tu arrives justement à concilier ces exigences du marché, la qualité, les volumes, les délais, etc. ? Il faut que tu t'adaptes en fait.

  • Speaker #1

    Il faut qu'on s'adapte, qu'on s'apparte. Il ne faudrait pas se stresser. Alors, nous, ne se stresse pas. Mais pour ne pas se stresser du tout, il faut être née en Inde, avoir grandi en Inde. Moi, ce n'est pas le cas. Je suis fille d'un industriel et d'une commerçante. Donc, effectivement, le stress et la pression, c'est mon quotidien. Donc, c'est très compliqué. Il faut vraiment prendre sur soi. Après, c'est une leçon de vie. Moi, c'est la vie que j'ai choisie. comme toute vie qu'on choisit, il y a des avantages et des inconvénients. Mais c'est loin d'être quelque chose de facile. Il faut s'y prendre en avance, mais on n'est jamais assez en avance. En fait, il faudrait qu'on soit très, très en avance de deux, trois collections au moins pour se dire, c'est quoi, ça va sortir en été 27. Si on ne l'a pas cette semaine, on l'a l'année prochaine. Sauf que nous, on est sur un circuit très, très, très court. On court après le temps, puisqu'à chaque fois, on se dit, on va y arriver, on va prendre de l'avance. Mais on vend plus, donc on a du réassort. Donc, ça nous mange le temps sur notre avance. Mais je pense que ce serait le seul moyen d'être un peu moins stressé. Ça serait d'avoir énormément d'avance. Du coup, le retard serait relatif. On y arrivera peut-être un jour.

  • Speaker #0

    Dans un monde idyllique, qu'est-ce qu'il faudrait faire pour pouvoir faire changer les choses ? On ne peut pas.

  • Speaker #1

    Ah non, rien. Changer, non. Et encore, d'être sur place, d'avoir... vraiment un responsable de la production, Banu, qui est 100% indien, mais qui, au bout d'huit ans, a quand même un petit pourcentage de France en lui, qui comprend nos exigences, qui comprend que quand on demande quelque chose, déjà, ce n'est pas en tant que personne que je le demande, c'est pour mes clients, et que ce n'est pas juste parce que je fais une chrisonnaire. C'est vraiment la cliente au bout qui a besoin d'un produit comme ci, comme ça. Et déjà, d'avoir quelqu'un qui est entre deux cultures, qui dirige tout ça, je pense que c'est déjà... vraiment extraordinaire. Après, non, on ne change pas. Moi, je croise pas mal de créatrices dans ma vie à Jaipur. Parfois, vraiment, elles sont... On a l'impression qu'elles viennent en Inde parce qu'elles viennent dix jours. Elles arrivent, rien n'est prêt, rien n'est comme elles voulaient, rien ne va, mais rien ne va. Et souvent, c'est très, très difficile à vivre. Et moi, je leur dis tout le temps, mais si tu ne peux plus produire, si tu n'y arrives plus physiquement, si ce n'est plus possible... va produire ailleurs, parce qu'ici, ça ne changera pas. On ne les changera pas. On est qui pour changer les gens ? Et puis, c'est nous qui sommes allés là-bas. Ils n'ont rien demandé, en fait. Donc, on va là-bas, on ne change pas les gens, on s'adapte et on essaie de trouver un mix, un mode de fonctionnement qui peut satisfaire notre client final, mais qui est complètement adapté.

  • Speaker #0

    Et toi, tu n'es pas tentée par... Pour bouger ou changer ? Non,

  • Speaker #1

    moi, si ça doit être fait, je ne sais pas, en Chine, sur des machines, moi, ça ne m'intéresse pas. Je ferai un autre métier. J'ouvrirai un food truck, je ferai des samosas, mais ça ne m'intéresse pas. Non, moi, qui râle, m'intéresse si ça reste 100% artisanal, si on respecte les gens, si on maîtrise la façon dont c'est fait. Si je continue, moi, de traîner dans des ateliers toute la journée où il fait 45 degrés et ça m'épuise et j'adore ça. C'est la vie qui m'intéresse derrière la marque. Si demain, on a des investisseurs qui nous disent qu'il faut tout délocaliser, je ne sais pas où. Non.

  • Speaker #0

    Comment tu vois l'évolution du marché, on en parle beaucoup avec la mode, entre la fast fashion et l'artisanat ? Donc la phase déco et l'artisanat, parce que tu as en face des marques de linge de lit qui n'ont pas tous ces inconnus.

  • Speaker #1

    C'est certain. De l'inclus, pardon. Globalement, même en mode, etc. Nous, on continuera. Je pense qu'il y aura toujours... Je pense que chacun a ses clients et que ce n'est pas grave. Il faut juste que nous, les petits, ceux qui travaillons vraiment avec l'artisanat, on en ait assez pour survivre. Je pense que ça passe par venir le raconter ce matin à toi et à tous ceux qui écouteront. C'est vraiment ça, c'est essayer chaque jour de poster des vidéos où on voit des block prints, ou expliquer comment sur le site expliquer ça, mais parce que les gens ne vont pas forcément lire, mais qu'on répète sur chaque produit que ça a été imprimé à la main, etc. Et puis, c'est un peu comme une mission. Et moi, j'ai vraiment cette mission. de défendre l'artisanat, de protéger cet artisanat et d'expliquer que Kiran, c'est de l'artisanat et d'espérer pour voir en vivre. Mais moi, je ne lutte pas contre la fast fashion. On ne peut pas, en fait. Et puis, peut-être qu'il y a des gens sur leur canapé qui ont un coussin de fast fashion. On ne va pas donner de nom de fast home collection. et qui ont un coussin Kiran par-dessus, parce que peut-être qu'ils n'ont pas les moyens d'avoir trois coussins Kiran et qu'ils vont acheter deux unis dans une enseigne et un imprimé. Et ce n'est pas grave, c'est le monde d'aujourd'hui, encore une fois, comme tout, il faut qu'on s'adapte, qu'on fasse notre place, mais pas forcément en luttant contre les autres, plutôt en essayant de valoriser ce qu'on a nous.

  • Speaker #0

    Et pourquoi le consommateur a du mal à percevoir le travail fait main ou à se pencher vers des marques ? C'est encore lent à arriver.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'aujourd'hui, le consommateur est complètement perdu. Quand il essaye de s'informer, il est désinformé parce qu'on lui raconte n'importe quoi.

  • Speaker #0

    Il raconte n'importe quoi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas. En ce moment, il y a beaucoup de... Non, je vais être obligée de citer des marques.

  • Speaker #0

    Non, mais sans se crier.

  • Speaker #1

    On sait sur Chine et compagnie. Et on va avoir Zara qui raconte que ce que fait Chine, c'est horrible. Mais Zara, ils font la même chose. En fait, c'est ça. Et les gens croient ce qu'on leur raconte. Bien sûr, Chine, c'est horrible. Mais il y en a plein d'autres, des marques avec des noms, des marques qui vendent cher et qui ont exactement le même mode de production. C'est moins de quantité. Moi, je les vois passer, les créatrices en Inde. Voilà, je vois où elles fabriquent. Dans des ateliers où ils bossent la nuit, où ils sont, moi je connais un couple d'indiens, ils sont à la tête d'une boîte où ils ont 7000 employés, ils ont 7000 machines à coudre. Donc je ne citerai pas les marques qu'ils fabriquent chez eux, mais c'est des marques qui parlent d'artisanat, qui disent moi quand je vais en Inde c'est mon pays de cœur. Voilà. Je parle parfois avec des créatrices et je leur dis, est-ce que tu as une idée du salaire moyen ? De combien est payé le gars qui est derrière la machine à coudre, qui fait ta robe ou ton coussin ? Elles n'en ont aucune idée, les gens n'en ont aucune idée. Parce que ce n'est pas leur problème. Elles viennent en Inde, elles veulent avoir le produit qu'elles veulent. Et puis elles tirent, elles grattent le prix parce qu'il faut qu'il soit le moins cher possible pour faire plus de marge. Parce que c'est très dur pour les marques aujourd'hui de survivre. Donc moi, je peux le comprendre. Mais quand je dis voilà la désinformation, c'est que ces gens-là vont dire moi je travaille dans un petit atelier familial. Mais ce n'est pas vrai, ça part la nuit, c'est fait par je ne sais pas qui, elles n'en ont aucune idée. Et de toute façon, si la production devient très importante, c'est-à-dire des marques qui vont vendre à 200 revendeurs, ça ne peut pas être artisanal et ils ne peuvent pas maîtriser, c'est impossible. Et le consommateur, il croit ce qu'on lui raconte. C'est normal, ça me paraît normal. Il s'informe, on lui dit quelque chose et il le croit.

  • Speaker #0

    Et le consommateur aussi, il n'a pas forcément le budget. Le fait main implique aussi un prix qui est un petit peu plus conséquent. Comment tu défendrais, toi, justement, ce prix ? Comment tu expliquerais aux gens qu'il faut, de toute façon, si c'est artisanal, ce sera forcément un peu plus cher ? Est-ce que le consommateur, il est prêt à l'entendre ?

  • Speaker #1

    Ben, certains, oui. D'autres l'entendent, le comprennent et pour autant, on n'en a pas les moyens. Mais nous, on le voit et c'est beau. Moi, j'ai des clientes fidèles depuis le début de Kira, mais qui achètent très, très peu. Mais c'est parce qu'elles veulent vraiment un coussin ou elles vont acheter la paire de rideaux, mais elles vont mettre six mois à se décider. Et moi, je trouve ça très touchant parce que dans ces clients-là, on sent une vraie conviction, un vrai parti pris. Donc, ce n'est pas forcément lié, bien sûr, c'est toujours lié aux moyens et à l'argent qu'on peut y consacrer. Mais voilà, moi, je pense qu'il faut informer les consommateurs. Et je pense encore une fois qu'ils peuvent, voilà, ils sont intelligents. Les gens sont intelligents et ils peuvent faire la part des choses. Ils comprennent. Nous, notre mission, c'est de leur montrer, leur expliquer, leur montrer la main, la main de l'homme, entre guillemets. Moi, je le fais beaucoup. Parce que nous, on a aussi des employés ou des sous-traitants qui ne veulent pas être filmés, mais on voit leurs mains tout le temps, on demande l'autorisation de leurs mains, parce que c'est ça qui est important. Et voilà, nous, chaque produit est créé par les mains de quelqu'un, de plusieurs personnes. Et c'est ça qui est beau. Et j'espère qu'on arrive à toucher le consommateur, en tout cas une partie des consommateurs, et qu'ils comprennent que voilà, leur objet est unique. Nous, il n'y a pas deux coussins. identiques, puisque d'un bout de tissu à l'autre, c'est vraiment la façon dont ça a été tamponné. Tout ce qui est tissu uni a été tissé à la main, teint à la main. Donc, nous, on répète, on montre, on explique et on espère que ça peut faire son effet sur plusieurs personnes. Aujourd'hui, les gens veulent beaucoup d'artisanat. On parle beaucoup de Made in France. Oui, c'est très bien, le Made in France. Je pense que peu de gens peuvent s'offrir le Made in France dans tous les domaines, que ce soit des meubles, du textile, des bijoux, en fait c'est très compliqué. Et puis, moi je fournis du travail à des êtres humains et j'estime qu'un travailleur français ou un travailleur indien mérite d'avoir un salaire et de nourrir sa famille de la même manière. Donc le Made in France c'est très très bien, mais moi je suis très très fière. d'avoir du Made in India. Ce n'est pas une maladie, ce n'est pas une part en fait.

  • Speaker #0

    Tu as un engagement éthique et aussi durable. Donc les matières sont naturelles, tu le disais.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et les pigments aussi sont naturels.

  • Speaker #1

    Oui, alors les pigments, une grosse majorité de nos pigments sont naturels. Il y a une grosse partie de notre collection, tout ce qui est ocre, noir, brun, etc. C'est tout fait à partir de... De pigments naturels, de macérations, de graines broyées. Donc, on est vraiment sur des pigments naturels.

  • Speaker #0

    Et tu fabriques en petite quantité, mais pas à la commande.

  • Speaker #1

    Non.

  • Speaker #0

    Tu as quand même un petit stock pour pouvoir répondre.

  • Speaker #1

    Alors, nous, on imprime. En fait, c'est surtout sur les imprimés que le stock est compliqué à gérer. Parce que c'est quand même bien qu'on commande 500, 600 mètres d'un coup. pour être sûr d'avoir quand même... que ce soit imprimé au même moment, à la même saison, par rapport à ce qu'on disait tout à l'heure, au temps de séchage, etc. Et après, on fabrique les produits. Donc, nous, on est tout le temps en flux tendu parce qu'au fur et à mesure que Kirane se développe, qu'on a de plus en plus de clients, il faut qu'on recrute. Donc, on court en permanence. On fait du sur-mesure, très rarement, mais pour des décorateurs, etc., quand même sur des petites commandes. Et on court après le temps, tout le temps.

  • Speaker #0

    Et tes chutes de tissus, pareil, tu les transformes ?

  • Speaker #1

    On a très peu, en fait, des chutes parce que... Alors, moi, je fais les plans de coupe. Moi, j'ai une formation de styliste modéliste. Donc, la taille des coussins, la taille des rideaux, dans un sens, dans l'autre, pour avoir le moins de déchets possible. Et puis après, si on a une bande, par exemple, sur les sofas cover, on a une bande de 25 centimètres qui n'est pas utilisée. Ça, on le quilt, on le surpique. C'est avec ça qu'on fait nos trousses de toilettes. Donc, en fait, et moi, je l'aurais appris. Sous la table de coupe, on a plusieurs poubelles qui sont par taille de tissu. C'est-à-dire vraiment les tout petits bidules. Ça fait vraiment, c'est la poubelle. Vraiment, mais c'est mini. Et puis, les petites pièces de tissu, ça peut faire des patchworks, etc. Les moyennes pièces. Donc, on a des tailles de poubelle, en fait. Et moi, à chaque fois que je retourne en Inde, je récupère ces cartons. Et je dis, bon, OK, avec ce carton-là, qu'est-ce qu'on va faire ? Est-ce qu'on peut faire des patchworks ? On a un concept store à Jaipur. Là, les patchworks un peu plus aléatoires. Nous, on peut faire des produits qu'on vend dans le concept store. On fait des étuis à lunettes, des petits porte-monnaies. Souvent, on envoie en cadeau dans les commandes qu'on ne vend pas forcément. Mais on n'a presque pas de déchets. Vraiment le moins possible.

  • Speaker #0

    Et comment tu fais face ? aux défis écologiques en Inde, les matières, la teinture, le transport ?

  • Speaker #1

    Moi, à mon échelle, faire face, c'est difficile. Voilà, nous, on se dit que le fait déjà d'avoir le moins possible de déchets, et nous, on le voit, les déchets, c'est énorme. Après, on ne peut pas lutter sur le contre. Le fait que, voilà, ça part par avion. Nous, on ne travaille pas avec des containers, parce qu'on a des petits stocks et des délais restants. donc On fait au mieux, quoi. Chacun fait au mieux. Moi, j'essaie de...

  • Speaker #0

    On ne peut pas être sur tous les fronts.

  • Speaker #1

    On ne peut pas être sur tous les fronts. Et puis, en Inde, il y a un vrai sujet là-dessus, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pour ça que je te pose la question.

  • Speaker #1

    Oui, mais le site... Les citoyens sur l'eau, moi je leur apprends, par exemple, l'eau, on a un jardin, la personne qui arrose le jardin, quand ce n'est pas moi, parce que j'adore le faire moi, mais il peut laisser le tuyau, puis il s'en va, il va faire autre chose complètement, et il revient, c'est complètement noyé. Je leur explique que l'eau, ce n'est pas éternel. Pour eux, ça vient de sous le sol, donc ça va être pour toujours. Les ordures en Inde, le recyclage, enfin... Ils vont ouvrir, tu étais en voiture, et tu vois le gars d'à côté, il ouvre sa fenêtre, il lance sa bouteille d'eau. Ce n'est pas des scènes rares. Donc, il y a un vrai sujet, vraiment écologique. Moi, je dis tout le temps, si j'avais un engagement écologique, quel qu'il soit, je ne resterais pas à me battre en France pour les poubelles vertes ou jaunes. J'irais en Inde, j'irais en Afrique, parce qu'ils sont beaucoup plus nombreux. strictement rien compris. Ils en sont au balbutiement de tout ça. Ils pensent qu'en jetant un papier par la fenêtre, comme on ne le voit plus, il disparaît. Et c'est nous, il y a 50 ans. Et il y a un vrai sujet, il y a un vrai enseignement. Mais dans les écoles, ils commencent maintenant à les sensibiliser là-dessus. Donc, c'est le tout début, mais il y a du boulot.

  • Speaker #0

    En termes de création, c'est toi qui imagine toutes les collections textile. Surtout, tu fais les motifs, les dessins.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Comment tu t'épargnes ?

  • Speaker #1

    Je suis styliste, illustratrice. C'est mon métier.

  • Speaker #0

    Ah, illustratrice.

  • Speaker #1

    Oui. Moi, au départ, j'ai fait la formation S-MOD en mode enfantine. J'ai commencé ma carrière chez Petit Bateau. Moi, je dessinais des petits nounours, des petites fleurs, etc. Là, pour le coup, j'étais styliste et illustratrice. On faisait les deux. Moi, dessiner, c'est toute ma vie dessiner. Malheureusement, en tant que chef d'entreprise, je dessine beaucoup moins que ce que j'aimerais. Mais effectivement, je dessine tout, les motifs, les modèles. Certains motifs existent parce qu'il y a des... milliers de blocs chez nos imprimeurs et ils sont très jolis. Donc, voilà, moi, je vais me promener dans un atelier et puis aller fouiller dans les blocs et dire, ça, c'est quoi ? On l'essaye. Et parfois, le graphisme est super beau, mais ce sont toujours nos colorations. Voilà, nous, on n'achète aucun tissu déjà imprimé. Donc, certains blocs existent. Il y a des motifs vraiment traditionnels qui existent. Et puis sinon, moi, je dessine et on donne à graver.

  • Speaker #0

    Donc plusieurs fois par an, tu marches par collection, c'est selon ton inspiration ? Comment tu germes tes idées ?

  • Speaker #1

    Ça vient des voyages, j'ai plutôt un problème de trop d'idées que pas assez. Comment les canaliser, comment les faire entrer dans des collections ? Les motifs, c'est un peu tout le temps. C'est-à-dire que moi, je vais dessiner, je ne sais pas, je vais voir n'importe quoi, un papier peint, une expo, un papier peint ancien. N'importe quoi, une assiette vintage dans un restaurant, ça me donne une idée de fleur de motif et je vais dessiner tout le temps. Je dessine pas mal dans l'avion, dans les transports et je fais faire des blocs. Je dessine l'imprimé et je fais faire des blocs. Je vais décider que celui-ci va être en trois couleurs, quatre couleurs. Donc c'est un bloc par couleur, un tampon par couleur et je fais faire les blocs. Il y en a plein qu'on n'a jamais utilisé, qu'on utilisera peut-être un jour. Mais on est prêt, j'ai un peu ma bibliothèque de blocs, en fait, et de motifs. Et puis après, on se dit, tiens, j'ai envie d'une grande fleur. Ah, j'en avais dessiné une. Bon, pour cet hiver, elle va être plutôt dans les tons de brun. Et on fait des essais de couleurs. Mais sur ce qui est des motifs, ce n'est pas très saisonnier. On ne dessine pas des flocons de neige. Voilà, donc en fait, ça peut être toute l'année. Et c'est surtout la coloration qui détermine la saison.

  • Speaker #0

    Comment est réparti ton travail ? J'allais dire tu dis dans les transports, mais plutôt là-bas ou ici. Comment est organisé ton travail selon ce que tu fais en Inde et ce que tu fais en France ?

  • Speaker #1

    Mon travail est désorganisé, totalement désorganisé. Déjà parce qu'en Inde, l'organisation n'existe pas. Parce qu'en fait, on va se lever le matin et décider qu'on va faire ça, ça. On a un rendez-vous, machin, et puis tout change. Le rendez-vous s'annule. D'un coup, il y a une énorme averse, c'est trempé, tout est noyé, on ne peut plus partir. Donc ça, c'est la vie en Inde. Donc en Inde, tout est désorganisé. Je rêve d'avoir un planning. J'entendais un podcast où il disait que le vrai truc, c'est vraiment le planning. Il n'y a que comme ça que tu t'en sors. C'est pour ça que je ne m'en sors pas. Moi, je ne peux pas. Alors, j'arrive à faire ça. Les périodes où je suis en France, c'est un peu plus possible. et encore que... Pas vraiment parce que, ben voilà, ce matin... J'ai couru pour arriver ici alors que je pensais avoir du temps, mais en fait, il y a eu un souci à l'atelier. Donc, moi, quand je me réveille à 6h du matin, il est 10h30 déjà, donc ils sont déjà en train de bosser. Donc, il y a déjà plein de... Quand je me réveille, il y a déjà une liste de... Il s'est passé plein de trucs. Il y a plein de problèmes. Il n'y a plus de fil pour ça. Il n'y a pas ci, il n'y a pas ça. Il y a le tissu qui n'a pas été livré. Il y a FedEx qui n'est pas venu chercher les colis. Et donc déjà ça, ça me décale, même si je m'étais dit, oh tiens, aujourd'hui, je vais faire mon petit podcast, puis après, ta-ta-ta, ben voilà. Donc je suis très désorganisée. Quelqu'un m'avait dit un jour que j'étais éparpillée. Je trouvais ça joli, c'est assez vrai. C'est un joli mot.

  • Speaker #0

    Ça ne t'empêche pas d'avancer, de travailler chacun sa méthode.

  • Speaker #1

    C'est des tout doulisses que je ne suis pas. J'ai beaucoup trop de choses à faire, c'est beaucoup. Donc il n'y a pas de... Voilà, j'essaye... C'est pour ça que je dis que je dessine dans les transports, parce que dans l'avion, personne ne m'appelle. Donc, je suis tranquille. Vraiment, c'est pour dessiner. J'essaye de me trouver vraiment des moments calmes pour dessiner. Ça, c'est important. Et sinon, tout le reste du temps, je fais 10 000 trucs.

  • Speaker #0

    Il y a combien d'heures de décalage ?

  • Speaker #1

    4h30 en hiver, 3h30 en été. Ce n'est pas énorme.

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas énorme.

  • Speaker #1

    Mais c'est suffisant pour, en fait, lorsque je suis en France, me lever très, très, très tôt. Voilà. Ou quand je suis en Inde, travailler avec la France très, très, très tard. Donc, en fait, du coup, ce n'est pas un vrai décalage horaire, mais c'est un décalage horaire qui fait que je travaille 18 heures par jour.

  • Speaker #0

    Voilà. Donc, on disait que c'était une marque décoration textile. Tu fais des plaides, des rideaux, des housses de couettes, du linge de table, des coussins, des pareos, des cabas, des trousses. Pour l'instant, qu'est-ce qui se vend le mieux ? Est-ce que tu as des genres de bestes ?

  • Speaker #1

    Tout se vend. Et ça dépend des périodes. Là, en période où on arrive à Noël, on va vendre beaucoup de trousses, beaucoup de sacs, parce que c'est des cadeaux. L'été, on vend énormément de pareos, mais on les vend à Noël parce que nos pareos se portent en foulard, parce que ça fait un foulard très aérien, mais qui tient quand même chaud. Là, les housses de couettes, c'est plus en hiver. En période d'été et de Noël, on vend des nappes, parce que ça fait des grandes tables. donc il n'y a pas de... énormément de coussins et les sofa cover mais le coussin c'est vraiment un article où tu vas mettre deux coussins sur ton canapé et limite tu as changé ton salon parce que nos coussins sont quand même très très présents et puis c'est un petit budget on peut s'offrir j'ai

  • Speaker #0

    vu et tu as beaucoup de sofa cover ce qui est canon sofa cover en gros c'est pour mettre sur le canapé mais on peut mettre en bout de lit c'est un genre de boutique on pourrait dire que c'est un édredon

  • Speaker #1

    En Inde, ils les empilent sur les charpoils, dans le Rajasthan on dit les Ausha, mais sur ces lits indiens. Ils les empilent et ça sert de petit matelas. Nous, les nôtres, sommes beaucoup plus légers que vraiment un petit matelas de charpoil, mais c'est un peu salidé. Donc on peut le mettre en bout de lit, ça peut habiller un canapé, ça peut cacher un canapé qu'on n'aime plus, ça peut protéger un canapé des petits doigts au chocolat des enfants. Parce qu'ils sont déhoussables, ils sont lavables. Et c'est un produit qu'on vend vraiment beaucoup.

  • Speaker #0

    Je reviens sur un point qu'on a un petit peu abordé tout à l'heure sur le fait de comment on se démarque avec les autres marques. Mais surtout, j'ai envie de te demander comment va le business ? Tu vois, c'est un peu la crise. Enfin, un peu beaucoup. Comment t'affrontes-tu ? Alors,

  • Speaker #1

    comment on affronte ? Pour tout te dire, moi, il y a un peu plus d'un an, Je n'en pouvais plus. Donc, ma façon d'affronter, c'était de me dire, tu sais quoi, je vais tout arrêter, en fait. Voilà comment j'allais affronter. Et j'ai eu une très grande chance parce qu'un de mes fils, j'ai trois enfants, Justin, m'a dit, maman, n'arrête pas, tu as de l'or entre les mains, il faut qu'on en fasse quelque chose. alors c'est un de mes enfants un peu comme moi, mais ils le sont tous les trois mais un peu hyperactif et un peu touche à tout et il m'a dit moi j'ai du temps à consacrer On s'y met à fond, on redéveloppe, etc. Moi, j'ai écrit RAN, j'avais tout fait toute seule depuis le début. C'est-à-dire que j'avais fait le site, c'était moi qui gérais le site, mais j'ai fait le site toute seule. Instagram, c'était moi. Les lives, c'était Banu derrière la caméra. Et puis moi qui préparais tout le setup, le machin. Et puis je faisais le live. Et puis après, on prenait les commandes et on emballait. C'était 100% nous deux. Et en tout cas, 100% de ce qui était fait en France, le commercial, le machin, c'était moi. Donc c'était un peu trop et en fait on était un peu trop gros pour que ça fonctionne comme ça. Donc il y avait deux solutions, soit je redevenais très petit et en fait je chinais trois parce que moi je suis une passionnée. des tissus anciens, etc. Donc, je tinais trois bouts de tissu, je faisais faire quatre coussins, je les bandais en live et je gagnais trois sous comme ça. Soit on avait une taille critique et il fallait passer au-dessus. Donc là, on est passé au-dessus, on a refait un site, on a des gens qui gèrent la pub, des gens qui gèrent Instagram, même si c'est toujours moi qui suis derrière. En France, on a maintenant un dépôt, un hangar, on gère tous les envois. On est passé, il y a un an, à une autre... taille d'entreprise et un autre mode de fonctionnement, tout en gardant la fabrication artisanale. Donc là, on en est là. Donc, on peut dire que nous, on ne subit pas trop cette crise parce qu'on a augmenté notre chiffre d'affaires et nos ventes énormément en un an. Mais peut-être que si on n'était pas au milieu de cette crise, on aurait explosé en un an. Là, on n'a pas explosé. La bonne nouvelle pour nous, c'est que ça nous permet de grandir et de s'organiser en production derrière, pas à pas. Et ça, c'est super important pour qu'on garde notre ADN et notre mode de production artisanal. Donc, on ne va pas dire qu'on ne subit pas la crise, mais voilà, on vit dedans. De toute façon, qu'est-ce qu'on peut faire d'autre ? Donc voilà, on a changé de structure d'entreprise à ce moment-là. Donc, on a gardé la tête hors de l'eau. Mais c'est du travail acharné. On ne compte pas nos heures et on se fait peur. C'est très, très loin d'être l'opulence. Mais on est content de voir que les gens aiment, les clients sont contents. Ils commandent une fois une petite commande, puis la deuxième commande est plus importante, etc. Le fait d'avoir aussi une petite taille d'entreprise, ça nous permet d'être, même si le consommateur est derrière son écran, on est proche de lui quand même, on le suit. Une cliente qui va avoir un souci, Justin va l'appeler personnellement. Donc, on garde ce côté humain, vraiment. Donc,

  • Speaker #0

    il a intégré un peu l'entreprise ?

  • Speaker #1

    Oui. Et lui, il s'occupe de tout ce qui est marketing, commercial, expédition, etc. Et c'est lui qui gère les pubs, etc. Il fallait du sang neuf. Je suis un peu vieillissante. Et il fallait des trentenaires aujourd'hui dans un business. Voilà.

  • Speaker #0

    Tu te vois où dans dix ans ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas du tout Ailleurs Je serais contente de passer de voir Je ne me vois pas Je ne me vois pas retraitée Alors que pourtant dans dix ans je crois que c'est l'âge de la retraite Donc non je ne me vois pas retraitée Je me vois je ne sais pas ailleurs Peut-être en Inde Peut-être toujours avec Kiran J'adorerais Mais moi j'adorerais être la directrice artistique de Kiran Alors ça c'est mon grand rêve c'est mon grand. C'est-à-dire, en fait, dessiner, m'occuper des collections, mais des prototypes, ne pas gérer. Est-ce qu'il nous refaut 300 mètres de tissu ? On n'a plus de signes. Ne plus regarder les ventes sur le site. Voilà. Alors ça, ça serait mon grand rêve. Et si c'est comme ça dans dix ans, mais il faudrait que ce soit avant, parce que j'avais le craqué avant. Mais ça serait mon rêve. Ou alors complètement autre chose. Je ne sais pas, monter un atelier avec des femmes, un orphelinat, je n'en sais rien.

  • Speaker #0

    Quel conseil tu donnerais à quelqu'un qui voudrait entreprendre, un peu comme toi, dans un projet à impact, entre gros guillemets ? Un projet qui ait du sens. Les jeunes, ils vont arriver avec des projets qui ont du sens, plus que les anciennes générations.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il faut vraiment croire en ses idées. Je crois qu'il faut faire quelque chose qu'on aime. Tu me diras, il y en a plein qui réussissent en faisant des trucs qu'ils n'aiment pas. C'est-à-dire qu'en fait, ils font des projets à partir d'un business plan. On en voit des marques comme ça, que je ne citerai pas, qui d'un coup décollent. Mais parce que c'est quatre personnes autour du table qui se sont dit, comment on va pouvoir gagner de l'argent ? C'est l'exact contraire de ce que moi, je peux faire. Mais moi, je pense que pour être heureux et tous les matins... Parce qu'entreprendre, c'est difficile. Vraiment, on ne compte pas nos heures. En fait, on ne fait que ça. Moi, je ne fais que ça dans ma vie. Donc, je pense qu'il faut aimer ce qu'on fait et croire vraiment profondément en ce qu'on fait et ne pas compter ses heures. Et si on se plante, recommencer. Parce que ce n'est pas grave, parce qu'on aura appris. Et toujours croire en ses rêves. Oui,

  • Speaker #0

    c'est beau. C'est bien. Ça ressemble à quoi chez toi, en fait ? Parce que du coup, tu as deux maisons.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut mettre un S à toi ? Chez toi, les toits. Oui, tout à fait. Alors, j'ai trois maisons. Vraiment, je suis chanceuse. Alors, ça ressemble à quoi chez moi ? À Jaipur, c'est très, très coloré. Un peu trop à mon goût, mais en fait, il y a un an et demi, deux ans, j'ai eu la bonne idée avec Banu, mais c'était surtout mon idée, je ne vais pas l'accuser, le pauvre, d'ouvrir des chambres d'hôtes. Parce que j'avais eu dans ma vie, avec le papa de mes enfants, j'avais eu des chambres d'hôtes dans le Luberon. Et j'adore recevoir, j'adore accueillir les gens, j'adore cuisiner, j'adore parler de ce que j'aime. Donc, on s'est dit, voilà, on va ouvrir des chambres d'hôtes. d'autres à Jaipur et un concept store et ça faisait vraiment beaucoup et donc en fait on est donc un peu freiné des cas de fer et du coup on a emménagé dans nos chambres d'hôtes donc c'est hyper décoré on a plein de serviettes de bain toutes les couleurs toutes les coordonnées machin parce que j'avais fait ça très très très très fini j'ai jamais eu une maison aussi finie puisqu'en fait je vis on vit dans nos chambres d'hôtes donc c'est très coloré c'est très joyeux Mais ça fonctionne bien avec la vie à Jaipur. Donc voilà, c'est une maison joyeuse, colorée, lumineuse. Enfin, de toute façon, l'Inde, c'est lumineux. Moi, c'est ce qui me nourrit, c'est cette lumière tous les jours et cette énergie. Et donc, c'est vraiment un coin coloré, grand, où on reçoit beaucoup. Je fais pas mal de dîners, il y a pas mal de créateurs, créatrices qui passent. Donc, ça parle un peu toutes les langues. On fait des repas. Des grands repas dans le jardin. Voilà, c'est joyeux. Et donc, le rez-de-chaussée, c'est l'atelier. Donc, il y a des bouts de tissu aussi, des cartons. Voilà.

  • Speaker #0

    Génial. Après, la deuxième maison, c'est ?

  • Speaker #1

    Alors, la deuxième maison, c'est Essaouira. Essaouira, c'est un petit riad au cœur de la médina d'Essaouira. Donc, ça, c'est mon paradis. Donc là, c'est plus soft, c'est du tas de lacs, beige, marron, les portes sont noires, c'est plus neutre. Je l'avais fait avant Kiran, donc je l'ai un peu kiranisé. Maintenant, il y a quand même un peu de fleurs et de touches kiran dedans. Mais moi, j'aime aussi beaucoup l'artisanat marocain. J'aimerais vraiment en faire rentrer dans la collection kiran. Donc, j'ai pas mal. Les rideaux sont faits à partir de hikes marocains. C'est aussi une maison joyeuse qui est très grande, où j'aime beaucoup recevoir. J'aime bien qu'il y ait évidemment mes enfants, leurs conjoints, mes petits-enfants, parce que j'ai la chance d'être mamie. Voilà, c'est une maison qui est faite pour ça. Et en haut, sur la terrasse en haut, on a la cuisine et la pièce à vivre et une petite chambre. Et quand j'y suis seule, je ne vis que sur la terrasse, en fait. C'est comme si je vivais sur un appartement un peu en extérieur. Et j'ai toujours un moyen d'être bien quand je suis seule. Voilà, donc ça c'est la partie. marocaine et puis à paris j'ai rénové l'année dernière j'ai eu la chance de trouver trois chambres de bonne dans un état lamentable et j'ai tout cassé tout ça j'adore pas j'ai tout fait casser j'ai pas cassé moi et et fait un très joli petit nid sous les toits à paris et dans lequel je suis vraiment très très bien et où c'est vraiment déconseillé de venir si vous vous faites plus d'un mètre 85. Mais c'est vraiment un petit nid, tout mignon. Et là, c'est des coloris plutôt neutres. Là, j'ai eu besoin d'avoir un lieu neutre, parce que c'est souvent là aussi que je me pose pour dessiner. Donc, c'est calme, c'est neutre. Enfin, tous les marrons, là, c'est comme la table qu'on voit là. Tout dans les tons de beige chocolat, qui sont des tons que moi, j'ai toujours adoré. Très calme.

  • Speaker #0

    Oui. Comment on apporte de la joie dans son intérieur ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en étant heureux. Mais ça, ça ne passe pas par les collections Kira, non ? Alors moi, j'ai eu un moment de ma vie où j'ai décoré, enfin j'étais décoratrice, j'ai décoré des maisons pour des gens. Ce que j'avais le plus de mal à faire, c'était des gens qui me disaient, clé en main, vous décorez tout jusqu'à la petite cuillère et on s'installe. Je trouvais ça très bizarre, j'avais l'impression qu'ils ne s'installaient pas chez eux. Moi, je crois que la joie, c'est ce qu'une maison raconte en fait. Alors moi, je voyage beaucoup, donc c'est rapporter des choses. On peut, sans voyager, aller dans une petite brocante le dimanche, là où on habite, acheter un tout petit objet qui raconte une histoire, avoir un petit truc d'une de ses grands-mères et puis le petit truc d'un de ses grands-pères. Je ne sais pas, un truc des enfants qui va rappeler quelque chose. Moi, je pense que ça passe plus par l'âme qu'on y met, par l'amour des objets. moi j'ai à Jaipur alors à Au Maroc, c'est des meubles que j'ai fait faire, et puis beaucoup de meubles maçonnés, en fait, parce que c'est comme ça qu'on fait au Maroc. Mais en Inde, comme à Paris, on va dire que 90% de mes meubles, c'est des trucs que j'ai chinés, en fait. Et c'est vraiment... J'aime bien, quoi. Mon meuble vasque, c'est une vieille commode, j'imagine. Une mamie qui rangeait ses chaussettes et ses petites culottes. Voilà, moi, j'aime... Je pense que si votre maison raconte une histoire qui est la vôtre, donc pour moi, il n'y a pas de code. Je déteste les... les styles de maisons tout blancs ou tout comme ci, tout comme ça. Je trouve que c'est vraiment... Et si la maison a une âme avec des objets qu'on aime, qui racontent notre histoire, pour moi, c'est une maison joyeuse.

  • Speaker #0

    Et comment on ose le motif ou la couleur ? Ça, c'est plus difficile.

  • Speaker #1

    Oui, alors, c'est difficile pour moi, parce que pour moi, c'est très instinctif. En tant que décoratrice, je me souviens... C'est bien de décider, un exemple précis d'une cliente où on avait décidé de faire toute l'entrée en vert amande. Et puis quand son mari est arrivé le week-end, il lui a dit « mais pourquoi tout ça c'est vert, on refait en blanc ? » Il y a des gens vraiment que ça dérange. Pour moi, c'est très spontané. Je pense qu'il faut se faire confiance, il faut essayer. Il faut faire des choses pour soi. Je crois aussi que ce qui bloque beaucoup les gens, c'est qu'ils se disent « ah, mais s'il y a quelqu'un qui vient, puis chez ma copine, c'est comme ça. d'ailleurs si je fais un dîner il me faudrait une grande nappe une grande de table, alors qu'en fait, combien de dîners ils font par an ? C'est surtout comment il faut se faire confiance, mais pour plein de choses dans la vie, mais aussi pour sa déco, et se dire là, j'ai envie de rose, parce que j'ai vu ça, j'ai envie que ça explose, je vais mettre un petit coussin rose, on n'est pas obligé de peindre les murs en fuchsia. La peinture, pour moi, c'est facile, parce que je trouve que peindre un mur, c'est juste un dimanche, on en a plein dans l'année des dimanches. Et en fait, pour refaire sa pièce, il faut juste un dimanche, si elle n'est pas trop trop grande. Et un dimanche, il y a un pot de peinture et un pinceau. Donc, oser, en fait. Il faut oser, il faut prendre des risques. Et au pire, ce n'est pas grave. On peut offrir le coussin à une copine ou le mettre en vente sur le bon coin et s'en racheter un autre. Donc, il faut que ça tourne. Moi, j'aime bien aussi que les histoires tournent et ne pas se dire, j'ai cette déco et c'est pour 25 ans et ça ne bougera plus.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #1

    Non, globalement, il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser, c'est très agréable à entendre. Dernière question, si tu faisais un dîner sans table, avec six personnes, des personnalités ou pas, connues ou pas, décédées ou pas, qui seraient-elles ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai réfléchi à un dîner de femmes, parce que je fais souvent des dîners de femmes en Inde avec toutes les clés. Tu as envoyé la question hier,

  • Speaker #0

    on va le dire quand même.

  • Speaker #1

    Oui, ça se prépare, parce que sinon...

  • Speaker #0

    C'est la seule question que je... Oui, la seule. En avance. Voilà.

  • Speaker #1

    Alors, spontanément, je me dis Vanessa Paradis. Parce qu'en fait, Vanessa Paradis, c'est une femme de mon âge. Et voilà, qui a toujours gardé sa ligne, qui est joyeuse. Et en fait, on a un peu grandi ensemble. Et je me suis toujours dit que c'était quelqu'un que j'aimerais rencontrer. Qui doit être fort sympathique. Tina Kieffer. Tina Kieffer, parce qu'on en parlait avec l'ONG, les femmes en Inde, etc. Donc, elle a créé l'association, la fondation, je crois qu'on dit, Toutes à l'école. Et elle a scolarisé des centaines de petites filles. Certaines sont devenues des jeunes femmes maintenant au Cambodge. Et qu'en fait, en vrai, quand tu me disais où je voudrais être dans 10 ans, je voudrais être Tina Kieffer. Moi, je voudrais avoir fait un truc comme ça avant de mourir. Je ne sais pas si c'est dans 10 ans ou dans 15 ans. Mais voilà. Donc j'ai... Des milliards de questions à lui poser. Ambre Chalumeau, qui est une jeune femme, parce qu'il faut quand même un peu de sang jeune autour de cette table, qui est une jeune femme qui vient de sortir un premier roman, qui est chroniqueuse, passionnée de littérature. Et quand je l'entends présenter un livre, elle est chroniqueuse et elle a un podcast. J'ai tout le temps envie de le lire. Je trouve qu'elle transmet ça avec une joie naturelle et une passion qui me... qui me plaît énormément. Je n'ai pas du tout le temps de lire dans cette vie et ça me fait du bien de l'écouter. Meryl Streep, parce que pour moi, c'est l'actrice par définition qui a traversé les époques et qui est fidèle à elle-même. Amrita Shergill, qui est une peintre indo-hongroise. qui est née dans les années 20, c'était une peinte dans les années 30. Elle est morte très jeune et elle a beaucoup voyagé. Elle a vécu en Hongrie, puis en Inde, puis à Paris. C'était une femme très moderne pour son époque et qui a réussi à mélanger les cultures. Et ça se retrouve dans sa peinture. Et voilà, elle était féministe, elle était indépendante. Et ça me plaît bien comme idée. Je pense qu'elle aurait vraiment quelque chose à raconter d'intéressant. Elle avait un peu l'âge de mes grands-mères, donc ça serait pas mal. Et puis Françoise Dorgé, la créatrice fondatrice de la marque Caravan. Alors, vous pouvez peut-être trouver bizarre que je parle des concurrents, mais moi, je pense qu'on n'est pas des concurrents. On travaille tous ensemble sur les mêmes marchés. Et Françoise Dorgé, pour moi, elle a tout inventé, en fait. C'est la première qui a ramené l'idée des petits matelas indiens pour en faire des sofas cover. C'était son idée à elle. C'est la première qui a ramené... des tapis marocains, des tentes berbères, et qui s'est dit, on va les mettre dans les appart' des bobos parisiens. Et je pense que toutes les marques de textile, aujourd'hui, on lui doit tout à elle, en fait. Je ne sais pas si nous, on aurait osé le faire, si elle ne l'avait pas fait avant nous.

  • Speaker #0

    C'est smart de lui rendre... C'est très smart de ta part de lui faire ce clin d'œil.

  • Speaker #1

    Oui, mais je trouve que ça, il faut être... Moi, je suis quelqu'un d'assez droit et je trouve qu'il faut être honnête. C'est important, ça lui revient à elle. Après, peut-être qu'on l'aurait fait, peut-être que j'aurais été la première, ça n'aurait pas été elle, mais en tout cas, c'est elle. Et on lui rend, elle n'est plus chez Caravan aujourd'hui, mais ce Caravan d'avant qu'elle a créé à l'époque des... des boutiques, des petites boutiques caravanes et de tout ce qu'elle rapportait. Moi, j'y allais, ça me fascinait. Je n'avais pas mis un pied en Inde. Et puis peut-être aussi parce qu'on aurait des choses à se dire, parce que je pense qu'elle adore l'Inde, qu'elle vit aussi au Maroc et à Paris. Donc, on aurait sûrement des trucs à se raconter.

  • Speaker #0

    Plein de points en commun.

  • Speaker #1

    Voilà. Et si je peux rajouter une septième personne, j'aimerais que ma grand-mère italienne soit là pour que du coup, ce soit elle qui nous prépare les pâtes pour le dîner.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Voilà. Bon, merci beaucoup, Karine. c'était vraiment très sympa d'échanger avec toi c'est marrant toujours une émotion palpable de discuter avec quelqu'un qui travaille avec l'Inde. Je ne sais pas pourquoi, chaque fois ça me fait ça. C'est très fort ce que tu as raconté. C'est vraiment hyper intéressant.

  • Speaker #1

    Peut-être parce que c'est la passion, parce que c'est beaucoup d'amour, beaucoup de passion, beaucoup de patience. Et qu'effectivement, l'Inde, il y a un sujet dont on n'a pas parlé. Je me permets de le faire. Depuis 3-4 ans maintenant, on organise les Tyrannetours. où justement, pour partager cette passion, on accueille dix femmes pendant dix jours à Jaipur et qu'on les promène dans notre vie, dans nos ateliers. Il y a des cours de cuisine, des cours de block print, des cours, des formations, des présentations. On se balade aussi un peu aux alentours de Jaipur, on les emmène à la campagne, dans la famille de Banu en fait, vivre une journée vraiment traditionnelle indienne. Et pour se rattacher à ce que tu disais, je pense que c'est peut-être ça qui est émouvant. C'est que c'est ma vie, c'est ma passion. Et qu'avec les Kirin Tour, on la partage, cette passion.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est qu'un an, quatre fois par an ?

  • Speaker #1

    Non, on l'a fait deux fois par an. L'année dernière, on ne l'a fait qu'une fois. Et cette année, comme on était en pleine restructuration et réécriture de la marque, on ne l'a pas fait. Donc, le prochain sera normalement... en octobre-novembre 2026.

  • Speaker #0

    2026, ok. On peut te contacter. Femme du jour.

  • Speaker #1

    C'est très peu de place.

  • Speaker #0

    Femme du jour, génial. Eh bien, merci beaucoup, Karine.

  • Speaker #1

    Merci, ciao.

  • Speaker #0

    Décodeur, c'est terminé pour aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir écouté en entier. Si vous avez aimé, n'oubliez surtout pas de vous abonner au podcast pour ne pas rater les prochains épisodes et retrouver tous ceux qui ont déjà été enregistrés. N'hésitez pas non plus à le partager en l'envoyant à vos proches qui pourraient être intéressés ou en story Instagram. D'ailleurs, on peut se retrouver sur le compte Décodeur où je poste très régulièrement. Et si jamais vous avez 15 secondes, n'oubliez pas de laisser 5 étoiles ou un avis. C'est juste sous la liste des épisodes. Non seulement ça me fait très plaisir, évidemment, mais dans la jungle des podcasts, plus on a de notes, plus on se fait remarquer, ce qui est très important pour moi. Voilà, merci beaucoup et à tout de suite. très bientôt alors, ici ou ailleurs.

Description

Décoration, design, création, savoir-faire, ces mots vous parlent ? Alors vous êtes au bon endroit !

Attention épisode génial !

C'est l'histoire de Karine qui, pendant un voyage en Inde, a eu un coup de foudre pour l'artisanat et le savoir faire local... mais aussi pour Banu, un indien qui lui faisait visiter un atelier. Elle sait que sa vie est là et avec lui. Ainsi est né Kirane. En très gros résumé car les détails sont évidemment dans le podcast !

Kirane est une marque de décoration textile, sincère et authentique, engagée et profondément humaine. Vous allez en avoir des frissons en écoutant Karine nous raconter son quotidien, entre beauté et galères. Tout est fabriqué à la main, dans le respect des traditions, avec des matières et des pigments naturels et surtout dans de bonnes conditions (Karine a crée "Villa Kirane" son propre atelier de confection dont Banu est responsable). 

 

Ensemble on parle 

  • de l'incroyable histoire de Kirane

  • l'importance pour elle d'avoir son propre atelier 

  • comment elle concilie le travail local versus les exigences du marché 

  • et les ponts entre Jaïpur et Paris 

  • ses plus grosses difficultés au quotidien et comment y remédier

  • la fast déco et les faux discours marketing 

  • la valeur du fait main 

  • les défis écologiques 

  • la joie de vivre et des couleurs 

  • sa passion pour le dessin et le manque de temps pour le faire 

  • la folie des sofa cover

  • la crise et l'avenir 

  • l'importance d'avoir des jeunes dans son équipe 

  • ses 3 maisons si différentes 

  • et bien plus encore !


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Merci beaucoup !   

Hortense Leluc, journaliste déco et fondatrice de DECODEUR  


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous, je suis Hortense Leluc et vous écoutez Décodeur, le podcast dans lequel j'échange avec des pros de la déco. Il y a plusieurs formats d'émissions qui tournent, stylé, archi-cool, le club ou les rencontres comme l'épisode qui va suivre, dans lequel un architecte ou un designer, une marque que vous aimez ou que vous allez découvrir, un entrepreneur ou un créatif va nous parler de sa manière de travailler, de ses produits. de son savoir-faire, sa vision, ses inspirations, bref, de l'envers du décor qu'on ne soupçonne pas toujours. Et c'est ça la force du podcast, on prend le temps, on va plus loin, on décortique, on apprend, on comprend. Il y a une forme d'intimité, de complicité et d'authenticité à laquelle je tiens beaucoup. Merci d'être si nombreux à écouter. Si vous venez de découvrir le podcast, bienvenue. N'oubliez pas de cliquer sur s'abonner pour ne pas rater les prochains épisodes. et si mon invité vous plaît, surtout n'hésitez pas à partager l'épisode en story ou à mettre 5 étoiles, tout ça m'aide beaucoup à me faire connaître encore plus. Bonjour à tous, cette fois dans Décodeur, on part en voyage. Un voyage loin des chaînes de production industrielle, loin des collections qui s'enchaînent à toute vitesse. On part en Inde, là où chaque motif raconte une histoire, où chaque... couleur est un langage et où la main de l'artisan est au cœur du projet. Aujourd'hui, je suis avec Karine Nally et on va vous parler de Kiran, une marque de décoration textile qui fait sans cesse des ponts entre la France et l'Inde, entre tradition et code contemporain. Kiran a son propre atelier de confection à Jaipur, en Inde, défend le fait main et préserve des savoir-faire ancestraux et créer des pièces qui ont une âme. J'ai donc profité de la présence de Karine à Paris pour organiser cet échange et en savoir plus sur cette jolie marque. Bonjour Karine.

  • Speaker #1

    Bonjour Hortense.

  • Speaker #0

    Je fais une petite parenthèse pour remercier Querk, qu'on enregistre chez Querk, que tu découvres avec moi ce matin. Ce sont des espaces de bureaux haut de gamme inspirés des codes de l'hôtellerie de luxe. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que vous pouvez, votre employeur peut avoir des bureaux chez Querk et vous pouvez bénéficier Merci. de la conciergerie, d'un barista, d'un service de restauration selon les lieux. Quercq peut aussi organiser vos événements d'entreprise. Chacun a un rooftop aussi, une salle de sport, un espace wellness. Bref, ce sont quatre adresses dans le huitième dont je voulais vous parler, qui sont très belles, très bien pensées.

  • Speaker #1

    Je confirme, on est dans le luxe.

  • Speaker #0

    Oui, on est hyper bien installés. Karine je me dis qu'on va peut-être Commencez par le début. Quelle est l'histoire de Kiran ? Comment ça a commencé ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un voyage en Inde. C'est une histoire de voyage toujours, Kiran. Donc, j'ai fait un voyage en Inde touristique. Ça faisait longtemps que je voulais aller en Inde, mais je ne l'avais jamais fait. Et je me retrouve en Inde, au milieu des tissus, des couleurs et de cette vie indienne. et ça a été... Ça a été un coup de foudre, un choc, un tsunami dans ma vie, professionnel et personnel, puisque l'histoire lie vraiment les deux. Et je suis tombée amoureuse du Blokprim, vraiment le premier atelier d'impression à la main, au Blok dans lequel je suis allée. Je ne sais pas, ça a été comme un choc. J'ai eu l'impression d'appartenir à ce monde. Et comme je ne fais jamais rien à moitié, je suis tombée amoureuse de la personne. qui m'a emmenée dans le premier atelier de Blockprint. Et donc, j'ai complètement changé de vie. Donc, Irane n'est pas née d'un business plan. C'est à peu près l'exact contraire de ça. À l'époque, moi, j'étais décoratrice et j'avais des boutiques de déco dans le sud de la France. Et du coup, j'ai très vite monté une petite collection pour mes boutiques au départ.

  • Speaker #0

    Ah oui, donc c'est vraiment parti d'un voyage personnel.

  • Speaker #1

    C'est un voyage personnel. Ça faisait très longtemps que je voulais aller en Inde. J'ai pas mal voyagé dans ma vie, mais l'Inde, vraiment, ça me tenait à cœur. Mais je ne l'avais jamais fait. Peut-être parce qu'il y avait quelque chose de spécial qui m'attendait là-bas. Donc, il fallait que ce soit le bon moment. Et voilà, vraiment, ça s'est fait très, très spontanément. Donc, c'est une histoire de cœur, de coups de fou, de... De passion, mais vraiment pour cette artisanat. J'ai vraiment ressenti quelque chose. J'étais là-bas chez moi. C'est très bizarre à expliquer. Alors, je sais qu'il y a plein de trucs sur l'un, la spiritualité. Ce n'est pas ce niveau-là. C'est vraiment dans ces ateliers. J'étais bien, j'étais chez moi. J'ai eu envie de faire quelque chose. Moi, j'ai fait l'école Esmod il y a très longtemps. Je suis donc styliste et comme toute styliste, je voulais un jour monter une marque, mais ça ne s'était jamais fait. Et moi, je suis quelqu'un de dentier et de spontané. Et en fait, j'attendais que la vie m'apporte cette idée, ce projet. Et là, ça a juste été une évidence en fait. Et donc, on a créé cette petite collection pour ma boutique de déco. Chaque année, j'exposais avec la boutique de déco en tant que décoratrice et boutique sur le salon Vivre Côté Sud à Aix-en-Provence. Kiran est vraiment née là. C'est-à-dire que j'ai décidé, parce qu'on était une fin d'année, qu'en juin, puisqu'il fallait s'inscrire, je présenterais une collection. Elle n'était pas faite, rien n'existait. Et c'est comme ça que Kiran est né. Et donc Kiran, l'essence de Kiran, le nom Kiran est né. C'était assez évident parce que Kiran en hindi veut dire rayon de soleil. Et qu'en fait, moi, je l'ai orthographié de manière à ce que ce soit l'anagramme de mon prénom Karine.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça, je me suis demandé. Tiens, quand je l'ai écrit, je me suis dit Karine, Kiran, est-ce qu'il y a quelque chose ? Voilà,

  • Speaker #1

    donc dans l'orthographe, enfin en hindi, il ne voit pas le lien. Mais voilà, on l'a orthographié de manière à ce que vraiment ça représente mon prénom.

  • Speaker #0

    Donc, ça a commencé avec une collection que tu vendais dans tes boutiques. Et après, à quel moment tu as fait la bascule d'abandonner les boutiques et de ne te consacrer qu'à Kiran ?

  • Speaker #1

    Alors, c'était un projet déjà dans ma vie d'arrêter ces boutiques. J'en avais vendu une, l'autre était en vente. C'était vraiment, j'avais envie d'arrêter les boutiques. Comme on n'a rien calculé. Voilà, vraiment, tout était très spontané. Donc, en fait, on s'est retrouvés sur le salon Côté Sud pour vendre en B2C à des particuliers. Mais ce salon Vivre Côté Sud, c'est aussi un salon où il y a du B2B. Et donc, on a été contactés par des boutiques. On s'est dit, ah, bon, OK, alors est-ce qu'on vend aux boutiques ? Oh, ben, t'as une commande, tu vas pas la refuser. Donc, on a eu une grosse commande d'une boutique qui ouvrait à Cannes, un concept store. et en fait il se trouve que cette cliente lorsqu'elle a reçu sa marchandise, a dit non, je ne m'attendais pas à ça, etc. A refusé la marchandise. Donc en fait, et puis moi à l'époque, j'étais tellement sur mon petit nuage, on était à Bali un peu en honeymoon. Je me suis dit mais qu'est-ce qu'elle nous énerve. Je lui ai dit ok, renvoyez tout. Et elle a tout renvoyé à Paris. Et quand je suis rentrée de vacances, je me suis dit on fait quoi de ça en fait ? Et c'est comme ça qu'on a monté un site. Parce qu'on s'est dit, maintenant, il faut vendre cette collection. Parce que c'était vraiment une grosse commande. Et mon fils qui était avec moi à ce moment-là, qui travaille dans l'image, etc. M'a dit, maman, moi, je peux te faire des photos. Et puis, on fait un site. Et donc, il m'a fait des photos et j'ai fait le site toute seule. Et c'est comme ça qu'on a lancé vraiment Kiran. Et moi, j'avais déjà une clientèle de mes boutiques de déco. Une mini, mini, mini notoriété sur Instagram. Et donc, les clientes ont commencé comme ça à acheter en ligne. Puis après, j'ai fait des ventes privées chez moi. Et les clientes sont venues. Ça s'est vraiment fait spontanément.

  • Speaker #0

    Mais ça t'a parfois dit, cette femme ? Pourquoi elle t'a rendu la marchandise ?

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui avait travaillé avec l'Inde et qui avait des mauvais souvenirs des ateliers. Elle avait eu des histoires compliquées dans des ateliers en Inde. Et quand elle a reçu, elle me disait « Ah non, mais c'est pas beau, ça sent pas bon » . Elle me disait que ça sent l'Inde. Je pense qu'elle avait besoin d'une petite thérapie concernant l'Inde. Quand j'ai reçu la marchandise à Paris, il y avait mes enfants, il y avait ma fille, il y avait ses copines. J'ai dit, dites-moi, ce n'est pas beau, ça sent mauvais. Ils m'ont tous dit, c'est quoi ton problème ? Je ne sais pas, il y a une dame qui nous retourne, qui nous dit que tout ça, ça ne va pas. Et tout le monde, mes amis, me disaient, mais non, c'est très bien. Donc, vraiment, si elle a la chance qu'elle écoute ce podcast, je la remercie grandement de nous avoir tout retourné. Parce qu'à cette époque-là, on était vraiment en mini-production. Et de toute façon, je n'aurais pas pu produire le double dans le même timing.

  • Speaker #0

    Excellent. Alors toi, tu vis entre Jaipur et Paris ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment.

  • Speaker #0

    Ou Paris ou le Sud ?

  • Speaker #1

    Paris, non, non. Alors le Sud, c'est terminé. Vraiment, je vis entre Jaipur, Paris et Essaouira. Parce que j'ai aussi un lieu à Essaouira et je répartis mon temps comme ça.

  • Speaker #0

    Parce qu'en plus, de ce que j'ai compris, tu as ton conjoint qui est en Inde, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà. Du coup, mon conjoint que j'ai rencontré en Inde est indien. Et donc, c'est lui qui dirige Villa Kiran, en fait, notre atelier de confection à l'époque. Donc,

  • Speaker #0

    tu ne vas pas deux fois par an en Inde ? Tu es vraiment beaucoup là-bas ?

  • Speaker #1

    Ah non, non. Alors... Il y a eu des époques où j'avais encore ma fille qui était à la maison. Donc là, je faisais beaucoup, beaucoup d'aller-retour. maintenant j'y vais Effectivement, deux fois par an, mais quand j'y vais, je reste trois mois.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Au niveau trajet, c'est deux fois par an, mais je reste longtemps. Oui, j'ai vraiment plusieurs vies en une.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te plaît tant ? Tu disais, c'est marrant, ce n'est pas forcément la spiritualité, la joie, etc. C'est toi plutôt, c'est le savoir-faire qui t'a tapé dans l'œil ?

  • Speaker #1

    Moi, c'est vraiment l'artisanat, les couleurs. Oui, alors il y a aussi la spiritualité, ça en fait partie, mais ce n'est pas ça vraiment qui… Ce qui m'a frappée, c'est l'artisanat, le fait que tout soit possible et en même temps que tout est complètement impossible, parce que c'est vraiment très difficile de travailler en Inde quand on a des deadlines, des contraintes de qualité, etc. Et pourtant, tout est possible, tout prend forme, tout naît sous nos yeux. Ils ont vraiment un savoir-faire qui est vraiment extraordinaire et sans limite.

  • Speaker #0

    Oui, toi, tu as ton propre atelier de confection, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, nous, on a eu très vite notre propre atelier de confection. Alors, au début, on a travaillé avec des petits ateliers et un sous-traitant. Et à un moment où on avait besoin d'un peu plus de production, on lui mettait un peu la pression. Et en fait, vraiment concrètement, un soir, on rentre du restaurant et on passe devant cet atelier en moto et je vois de la lumière. Et je dis donc à Banu, mon conjoint. « Regarde, ils ont oublié d'éteindre la lumière. » Et il me répond « Non, ils travaillent. » Je lui dis « Mais comment ça, ils travaillent ? » Il me dit « Tu as vu l'impression que tu leur as mis aujourd'hui ? Il faut qu'ils les finissent, ces robes. » Parce qu'à l'époque, on faisait des vêtements. « Il faut qu'ils les finissent, tes robes. » Donc, ils travaillent la nuit. Je lui dis « Non, mais ce n'est pas possible. » « Mais moi, je ne savais pas. » Et là, c'est à ce moment-là que je me suis dit « Non, alors moi, je veux un atelier. Je veux des employés salariés. » puisqu'en Inde, les employés sont tout le temps payés à la pièce. jamais, jamais salarié. Et moi, j'ai dit, voilà, je veux notre lieu, je veux des salariés, des gens dont on prend soin. Je ne veux pas qu'on travaille la nuit. S'il y a plus de travail, il y aura plus de salariés. Voilà, et vraiment, j'étais complètement naïve, mais c'est vraiment ça qui se passe en Inde et pas qu'en Inde. Et moi, j'ai dit, ah non, non, mais moi, ça ne m'intéresse pas du tout d'avoir une collection. Je ne me sentais vraiment pas à l'aise avec le fait que... Il y avait des gens qui bossaient toute la nuit pendant que nous, on allait dormir pour que le lendemain, on ait notre marchandise. Et donc, on a pris la décision à ce moment-là et on a monté d'abord un tout petit atelier avec un employé et puis quelqu'un qui faisait la couture, notre master. C'était le tout premier qu'on a débauché en fait parce qu'il était très, très mal payé, mal traité dans cet atelier avec lequel on sous-traitait. Donc, au début, on n'avait que lui. Et puis, on avait un homme un peu à tout faire, qui rangeait, qui coupait les fils, qui repassait. Et au début, on a commencé comme ça, vraiment tout mini. On a loué un petit studio. Il y avait deux mini pièces, une avec les tissus et une avec la machine à coudre et la table de couple.

  • Speaker #0

    Mais au moins, ils travaillaient dans de bonnes conditions.

  • Speaker #1

    Ils travaillaient dans de bonnes conditions. Pour moi, c'était évident. Mais encore une fois, j'étais très, très naïve. J'étais ignorante, en fait, sur le sujet. et Pour moi, c'était vital. Et depuis,

  • Speaker #0

    tu as grossi avec toujours, il y a toujours ces bonnes...

  • Speaker #1

    L'atelier a vraiment grandi. On s'est installé vraiment dans une villa l'année dernière. Donc là, ça dépend des moments, mais on est jusqu'à 5-6, plus les 5-6 qui cousent, plus les personnes qui coupent les fils, etc. Et en fait, chaque fois qu'on est à plus de travail, on rachète une machine et on recrute. Voilà, et moi, mes employés ont leur dimanche. Alors, je sais qu'ici, on va me dire, il faudrait deux jours, mais déjà en Inde, 95% des gens n'ont pas de dimanche, n'ont pas de jour de congé. Donc, moi, ils ont un salaire, des dimanches, quand ils doivent pas, ils ont des congés pour les fêtes, il y a différents festivals toute l'année, c'est très important. En Inde, Diwali, Holi, etc. Et oui, pour moi, c'est une évidence. C'est ça ou rien. C'est-à-dire, si je n'avais pas pu faire ça, Moi, ça ne m'intéresse pas de... de produire dans des grandes usines. La question ne s'est jamais posée, en fait.

  • Speaker #0

    Et tu accompagnes les femmes aussi, particulièrement, je crois ?

  • Speaker #1

    Alors, oui. On essaie de recruter des femmes. Moi, mon rêve, au départ, c'était un atelier de femmes. On a même monté une ONG. On voulait monter un atelier où on formait des femmes veuves, parce que les veuves, en Inde, ça pourrait durer des heures. La condition des femmes en Inde, mais en particulier les veuves sont rejetées de leur famille, etc. Et souvent avec leurs enfants. Donc, vraiment, moi, j'avais l'intention de monter un atelier avec des femmes veuves, de scolariser les enfants, plein, plein de bonnes intentions. C'est très, très difficile. La culture indienne, les traditions indiennes, c'est très difficile. On arrive avec tout. nos bonnes idées, mais c'est vraiment très compliqué à mettre en application. Donc ça, on n'a pas pu le faire. Moi, chaque fois que je peux, j'essaye de recruter des femmes. C'est très compliqué parce qu'elles viennent à l'entretien avec leur mari et en fait, c'est le mari qui décide ou pas. Souvent, elles ne peuvent pas sortir de la maison, donc on va les embaucher et puis dès qu'il y a un festival ou quelque chose, elles vont dire aujourd'hui, je ne viens pas, mais en fait, elles ne viennent plus pendant 15 jours. parce que Elles ont des obligations familiales qui sont bien plus importantes que celles qu'on peut avoir nous en tant que mère de famille ou épouse ici en France. Et du coup, recruter des femmes, c'est assez compliqué. Mais j'essaye toujours, je m'acharne, elles partent et puis j'en recrute d'autres, etc. Dès qu'elles ont des bébés, en général, elles partent, elles ne reviennent plus. Parfois même, on recrute des jeunes filles qu'on forme et puis à un moment, il faut qu'elles se marient. Et quand elles se marient, elles ne reviennent plus. Mais quand même, je continue parce que ce peu de temps qu'on leur donne d'indépendance, de valorisation de leur personne, c'est toujours ça. Peut-être qu'elles reviendront un jour. Et puis, en parallèle, on travaille pour le coup, là maintenant, avec une ONG qui est dans un village à côté de Jaipur, où ce sont vraiment toutes les femmes du village qui travaillent, qui viennent à tour de rôle. Donc, encore une fois, on leur donne des tâches sur lesquelles on n'a pas vraiment de deadline. Par exemple, nous, il y a des pompons souvent aux quatre coins de nos coussins. Donc, on va leur commander des pompons, mais ça peut être dans 15 jours, mais on sait qu'on a suffisamment de stock pour tenir 2-3 mois. Parce qu'ils nous disent dans 15 jours, mais s'il y a un festival ou quel que soit, un décès, il y a trois femmes, parce qu'elles sont souvent de la même famille, qui vont disparaître une quinzaine de jours et qui ne vont pas venir travailler. Donc, on essaye le plus possible de faire travailler cette association. Et puis, peut-être qu'un jour, on arrivera vraiment à en créer une, mais ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air.

  • Speaker #0

    Vous avez votre propre atelier de confection et tu travailles aussi avec des ateliers familiaux pour d'autres techniques ?

  • Speaker #1

    Alors, nous, notre atelier est un atelier de confection. C'est-à-dire qu'en fait, nous, on n'achète que du tissu blanc brut, soit qu'on fait teindre. Donc là, pareil, on travaille avec un atelier, un tout petit atelier où toute la teinture est faite de manière artisanale. Soit on le fait imprimer au block print, c'est la grosse majorité de nos collections. Et là, on travaille avec deux, trois ateliers qui sont effectivement des petits ateliers familiaux qu'on connaît ou on connaît tout le monde. Là, par exemple, l'impression est arrêtée pour trois semaines. C'est assez dramatique pour nous, pour notre réassort. Mais le fils se marie. Donc, pendant trois semaines, ils ont tout arrêté. Mais je suis invitée au mariage. Ce serait magnifique, mais ça ne va pas me donner mon stock de tissus. mais voilà donc on a effectivement nos petits ateliers de sous-traitants pour des métiers qu'on ne fait pas nous. Parce que nous, vraiment, Villa Kiran, c'est la confection, donc la couture en fait.

  • Speaker #0

    Oui, d'accord. Ok, je comprends. Et qu'est-ce qui est le plus complexe dans la fabrication artisanale en Inde ? Tu nous l'évoquais rapidement tout à l'heure. Qu'est-ce qui est difficile, dont on ne se rend pas compte, nous, tu vois ?

  • Speaker #1

    Alors, par exemple, le block print en soi. Donc, le block print, c'est moi, je vais dessiner un pattern, un motif. qu'on va faire graver sur des blocs en bois. Donc ça, c'est déjà un intermédiaire. Donc ça, c'est un tout petit atelier. Enfin, c'est deux messieurs qui gravent sur les blocs en bois, père et fils. Ensuite, on a la partie impression. Donc la partie impression, elle est compliquée parce que nous, ici, nos clients sont ravis d'avoir un tissu imprimé à la main. C'est génial. Là, c'est toujours une pièce unique, en fait. Et pourtant, ils ne sont pas prêts à avoir les petits défauts qui vont avec. C'est-à-dire qu'en fait, au moment où le tampon tremble dans l'encre, quand il le soulève, il peut y avoir une petite goutte. Si l'encre est un tout petit peu trop liquide, ça peut faire des petites gouttes sur le motif. La plupart de nos tissus, ce sont des pigments naturels. Donc, on n'a jamais deux fois exactement le même ocre. Le fond de nos tissus écrus, ce sont des noix, je ne sais plus le nom en français d'un arbre, des noix qui sont broyées. C'est une macération et en fait, le tissu blanc est teint dans ces noix qu'on macérait et ensuite séchées au soleil. Donc, en fonction de s'il y a plus ou moins de noix, est-ce qu'elles sont plus ou moins grosses, ils ne vont pas les compter, ils ne pèsent pas. C'est tout fait de manière très instinctive, aléatoire. Et donc, s'il fait très chaud ce jour-là, s'il y a du vent, s'il fait humide, le tissu va mettre une demi-heure ou est-ce qu'il va mettre une heure à sécher. Ça ne sera jamais exactement le même fond de tissu. Donc, on va d'un écrut très clair à un beige clair. Mais c'est quand même une nuance. Alors, en Inde, ils disent tout le temps, « Mais madame, c'est 20% difference, not big problem. » Oui, non, si. Pour moi, dans l'absolu, c'est vrai que ce n'est pas un problème vital. Mais pour nos clients, nous, on shoot le produit une fois. Moi, je ne peux pas le shooter à chaque fois qu'il revient, etc. Donc, on a un vrai problème sur, effectivement, les couleurs. C'est-à-dire qu'on va valider des couleurs, on va faire des essais, des tests. L'imprimé est parfait, mais on a une chance sur un million que ce soit exactement le même qui sorte en prod. Parfois, ça va être exactement le même. Ce sont des pièces de 10 mètres de tissu. On peut avoir quatre pièces dans la journée, ils vont imprimer quatre pièces exactement le même. Celle du lendemain, ce n'est pas exactement le même. Donc, c'est ça qui est vraiment très difficile dans la partie block print. Et puis, ce qui est compliqué en Inde à gérer, ce sont les délais. Il y a un rapport au temps qui n'est pas du tout le même que nous, un rapport à ce qui est grave qui n'est pas du tout le même que nous, mais vraiment pour tout. En Inde, ce n'est pas grave de mourir. Alors, livrer un tissu trois semaines en retard, ce n'est vraiment pas grave en fait. Et nous, c'est vraiment ça qui fait que c'est très compliqué d'avoir vraiment un mode artisanal de fabrication en Inde et un client final qui est français, européen et qui a des attentes.

  • Speaker #0

    Et comment tu arrives justement à concilier ces exigences du marché, la qualité, les volumes, les délais, etc. ? Il faut que tu t'adaptes en fait.

  • Speaker #1

    Il faut qu'on s'adapte, qu'on s'apparte. Il ne faudrait pas se stresser. Alors, nous, ne se stresse pas. Mais pour ne pas se stresser du tout, il faut être née en Inde, avoir grandi en Inde. Moi, ce n'est pas le cas. Je suis fille d'un industriel et d'une commerçante. Donc, effectivement, le stress et la pression, c'est mon quotidien. Donc, c'est très compliqué. Il faut vraiment prendre sur soi. Après, c'est une leçon de vie. Moi, c'est la vie que j'ai choisie. comme toute vie qu'on choisit, il y a des avantages et des inconvénients. Mais c'est loin d'être quelque chose de facile. Il faut s'y prendre en avance, mais on n'est jamais assez en avance. En fait, il faudrait qu'on soit très, très en avance de deux, trois collections au moins pour se dire, c'est quoi, ça va sortir en été 27. Si on ne l'a pas cette semaine, on l'a l'année prochaine. Sauf que nous, on est sur un circuit très, très, très court. On court après le temps, puisqu'à chaque fois, on se dit, on va y arriver, on va prendre de l'avance. Mais on vend plus, donc on a du réassort. Donc, ça nous mange le temps sur notre avance. Mais je pense que ce serait le seul moyen d'être un peu moins stressé. Ça serait d'avoir énormément d'avance. Du coup, le retard serait relatif. On y arrivera peut-être un jour.

  • Speaker #0

    Dans un monde idyllique, qu'est-ce qu'il faudrait faire pour pouvoir faire changer les choses ? On ne peut pas.

  • Speaker #1

    Ah non, rien. Changer, non. Et encore, d'être sur place, d'avoir... vraiment un responsable de la production, Banu, qui est 100% indien, mais qui, au bout d'huit ans, a quand même un petit pourcentage de France en lui, qui comprend nos exigences, qui comprend que quand on demande quelque chose, déjà, ce n'est pas en tant que personne que je le demande, c'est pour mes clients, et que ce n'est pas juste parce que je fais une chrisonnaire. C'est vraiment la cliente au bout qui a besoin d'un produit comme ci, comme ça. Et déjà, d'avoir quelqu'un qui est entre deux cultures, qui dirige tout ça, je pense que c'est déjà... vraiment extraordinaire. Après, non, on ne change pas. Moi, je croise pas mal de créatrices dans ma vie à Jaipur. Parfois, vraiment, elles sont... On a l'impression qu'elles viennent en Inde parce qu'elles viennent dix jours. Elles arrivent, rien n'est prêt, rien n'est comme elles voulaient, rien ne va, mais rien ne va. Et souvent, c'est très, très difficile à vivre. Et moi, je leur dis tout le temps, mais si tu ne peux plus produire, si tu n'y arrives plus physiquement, si ce n'est plus possible... va produire ailleurs, parce qu'ici, ça ne changera pas. On ne les changera pas. On est qui pour changer les gens ? Et puis, c'est nous qui sommes allés là-bas. Ils n'ont rien demandé, en fait. Donc, on va là-bas, on ne change pas les gens, on s'adapte et on essaie de trouver un mix, un mode de fonctionnement qui peut satisfaire notre client final, mais qui est complètement adapté.

  • Speaker #0

    Et toi, tu n'es pas tentée par... Pour bouger ou changer ? Non,

  • Speaker #1

    moi, si ça doit être fait, je ne sais pas, en Chine, sur des machines, moi, ça ne m'intéresse pas. Je ferai un autre métier. J'ouvrirai un food truck, je ferai des samosas, mais ça ne m'intéresse pas. Non, moi, qui râle, m'intéresse si ça reste 100% artisanal, si on respecte les gens, si on maîtrise la façon dont c'est fait. Si je continue, moi, de traîner dans des ateliers toute la journée où il fait 45 degrés et ça m'épuise et j'adore ça. C'est la vie qui m'intéresse derrière la marque. Si demain, on a des investisseurs qui nous disent qu'il faut tout délocaliser, je ne sais pas où. Non.

  • Speaker #0

    Comment tu vois l'évolution du marché, on en parle beaucoup avec la mode, entre la fast fashion et l'artisanat ? Donc la phase déco et l'artisanat, parce que tu as en face des marques de linge de lit qui n'ont pas tous ces inconnus.

  • Speaker #1

    C'est certain. De l'inclus, pardon. Globalement, même en mode, etc. Nous, on continuera. Je pense qu'il y aura toujours... Je pense que chacun a ses clients et que ce n'est pas grave. Il faut juste que nous, les petits, ceux qui travaillons vraiment avec l'artisanat, on en ait assez pour survivre. Je pense que ça passe par venir le raconter ce matin à toi et à tous ceux qui écouteront. C'est vraiment ça, c'est essayer chaque jour de poster des vidéos où on voit des block prints, ou expliquer comment sur le site expliquer ça, mais parce que les gens ne vont pas forcément lire, mais qu'on répète sur chaque produit que ça a été imprimé à la main, etc. Et puis, c'est un peu comme une mission. Et moi, j'ai vraiment cette mission. de défendre l'artisanat, de protéger cet artisanat et d'expliquer que Kiran, c'est de l'artisanat et d'espérer pour voir en vivre. Mais moi, je ne lutte pas contre la fast fashion. On ne peut pas, en fait. Et puis, peut-être qu'il y a des gens sur leur canapé qui ont un coussin de fast fashion. On ne va pas donner de nom de fast home collection. et qui ont un coussin Kiran par-dessus, parce que peut-être qu'ils n'ont pas les moyens d'avoir trois coussins Kiran et qu'ils vont acheter deux unis dans une enseigne et un imprimé. Et ce n'est pas grave, c'est le monde d'aujourd'hui, encore une fois, comme tout, il faut qu'on s'adapte, qu'on fasse notre place, mais pas forcément en luttant contre les autres, plutôt en essayant de valoriser ce qu'on a nous.

  • Speaker #0

    Et pourquoi le consommateur a du mal à percevoir le travail fait main ou à se pencher vers des marques ? C'est encore lent à arriver.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'aujourd'hui, le consommateur est complètement perdu. Quand il essaye de s'informer, il est désinformé parce qu'on lui raconte n'importe quoi.

  • Speaker #0

    Il raconte n'importe quoi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas. En ce moment, il y a beaucoup de... Non, je vais être obligée de citer des marques.

  • Speaker #0

    Non, mais sans se crier.

  • Speaker #1

    On sait sur Chine et compagnie. Et on va avoir Zara qui raconte que ce que fait Chine, c'est horrible. Mais Zara, ils font la même chose. En fait, c'est ça. Et les gens croient ce qu'on leur raconte. Bien sûr, Chine, c'est horrible. Mais il y en a plein d'autres, des marques avec des noms, des marques qui vendent cher et qui ont exactement le même mode de production. C'est moins de quantité. Moi, je les vois passer, les créatrices en Inde. Voilà, je vois où elles fabriquent. Dans des ateliers où ils bossent la nuit, où ils sont, moi je connais un couple d'indiens, ils sont à la tête d'une boîte où ils ont 7000 employés, ils ont 7000 machines à coudre. Donc je ne citerai pas les marques qu'ils fabriquent chez eux, mais c'est des marques qui parlent d'artisanat, qui disent moi quand je vais en Inde c'est mon pays de cœur. Voilà. Je parle parfois avec des créatrices et je leur dis, est-ce que tu as une idée du salaire moyen ? De combien est payé le gars qui est derrière la machine à coudre, qui fait ta robe ou ton coussin ? Elles n'en ont aucune idée, les gens n'en ont aucune idée. Parce que ce n'est pas leur problème. Elles viennent en Inde, elles veulent avoir le produit qu'elles veulent. Et puis elles tirent, elles grattent le prix parce qu'il faut qu'il soit le moins cher possible pour faire plus de marge. Parce que c'est très dur pour les marques aujourd'hui de survivre. Donc moi, je peux le comprendre. Mais quand je dis voilà la désinformation, c'est que ces gens-là vont dire moi je travaille dans un petit atelier familial. Mais ce n'est pas vrai, ça part la nuit, c'est fait par je ne sais pas qui, elles n'en ont aucune idée. Et de toute façon, si la production devient très importante, c'est-à-dire des marques qui vont vendre à 200 revendeurs, ça ne peut pas être artisanal et ils ne peuvent pas maîtriser, c'est impossible. Et le consommateur, il croit ce qu'on lui raconte. C'est normal, ça me paraît normal. Il s'informe, on lui dit quelque chose et il le croit.

  • Speaker #0

    Et le consommateur aussi, il n'a pas forcément le budget. Le fait main implique aussi un prix qui est un petit peu plus conséquent. Comment tu défendrais, toi, justement, ce prix ? Comment tu expliquerais aux gens qu'il faut, de toute façon, si c'est artisanal, ce sera forcément un peu plus cher ? Est-ce que le consommateur, il est prêt à l'entendre ?

  • Speaker #1

    Ben, certains, oui. D'autres l'entendent, le comprennent et pour autant, on n'en a pas les moyens. Mais nous, on le voit et c'est beau. Moi, j'ai des clientes fidèles depuis le début de Kira, mais qui achètent très, très peu. Mais c'est parce qu'elles veulent vraiment un coussin ou elles vont acheter la paire de rideaux, mais elles vont mettre six mois à se décider. Et moi, je trouve ça très touchant parce que dans ces clients-là, on sent une vraie conviction, un vrai parti pris. Donc, ce n'est pas forcément lié, bien sûr, c'est toujours lié aux moyens et à l'argent qu'on peut y consacrer. Mais voilà, moi, je pense qu'il faut informer les consommateurs. Et je pense encore une fois qu'ils peuvent, voilà, ils sont intelligents. Les gens sont intelligents et ils peuvent faire la part des choses. Ils comprennent. Nous, notre mission, c'est de leur montrer, leur expliquer, leur montrer la main, la main de l'homme, entre guillemets. Moi, je le fais beaucoup. Parce que nous, on a aussi des employés ou des sous-traitants qui ne veulent pas être filmés, mais on voit leurs mains tout le temps, on demande l'autorisation de leurs mains, parce que c'est ça qui est important. Et voilà, nous, chaque produit est créé par les mains de quelqu'un, de plusieurs personnes. Et c'est ça qui est beau. Et j'espère qu'on arrive à toucher le consommateur, en tout cas une partie des consommateurs, et qu'ils comprennent que voilà, leur objet est unique. Nous, il n'y a pas deux coussins. identiques, puisque d'un bout de tissu à l'autre, c'est vraiment la façon dont ça a été tamponné. Tout ce qui est tissu uni a été tissé à la main, teint à la main. Donc, nous, on répète, on montre, on explique et on espère que ça peut faire son effet sur plusieurs personnes. Aujourd'hui, les gens veulent beaucoup d'artisanat. On parle beaucoup de Made in France. Oui, c'est très bien, le Made in France. Je pense que peu de gens peuvent s'offrir le Made in France dans tous les domaines, que ce soit des meubles, du textile, des bijoux, en fait c'est très compliqué. Et puis, moi je fournis du travail à des êtres humains et j'estime qu'un travailleur français ou un travailleur indien mérite d'avoir un salaire et de nourrir sa famille de la même manière. Donc le Made in France c'est très très bien, mais moi je suis très très fière. d'avoir du Made in India. Ce n'est pas une maladie, ce n'est pas une part en fait.

  • Speaker #0

    Tu as un engagement éthique et aussi durable. Donc les matières sont naturelles, tu le disais.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et les pigments aussi sont naturels.

  • Speaker #1

    Oui, alors les pigments, une grosse majorité de nos pigments sont naturels. Il y a une grosse partie de notre collection, tout ce qui est ocre, noir, brun, etc. C'est tout fait à partir de... De pigments naturels, de macérations, de graines broyées. Donc, on est vraiment sur des pigments naturels.

  • Speaker #0

    Et tu fabriques en petite quantité, mais pas à la commande.

  • Speaker #1

    Non.

  • Speaker #0

    Tu as quand même un petit stock pour pouvoir répondre.

  • Speaker #1

    Alors, nous, on imprime. En fait, c'est surtout sur les imprimés que le stock est compliqué à gérer. Parce que c'est quand même bien qu'on commande 500, 600 mètres d'un coup. pour être sûr d'avoir quand même... que ce soit imprimé au même moment, à la même saison, par rapport à ce qu'on disait tout à l'heure, au temps de séchage, etc. Et après, on fabrique les produits. Donc, nous, on est tout le temps en flux tendu parce qu'au fur et à mesure que Kirane se développe, qu'on a de plus en plus de clients, il faut qu'on recrute. Donc, on court en permanence. On fait du sur-mesure, très rarement, mais pour des décorateurs, etc., quand même sur des petites commandes. Et on court après le temps, tout le temps.

  • Speaker #0

    Et tes chutes de tissus, pareil, tu les transformes ?

  • Speaker #1

    On a très peu, en fait, des chutes parce que... Alors, moi, je fais les plans de coupe. Moi, j'ai une formation de styliste modéliste. Donc, la taille des coussins, la taille des rideaux, dans un sens, dans l'autre, pour avoir le moins de déchets possible. Et puis après, si on a une bande, par exemple, sur les sofas cover, on a une bande de 25 centimètres qui n'est pas utilisée. Ça, on le quilt, on le surpique. C'est avec ça qu'on fait nos trousses de toilettes. Donc, en fait, et moi, je l'aurais appris. Sous la table de coupe, on a plusieurs poubelles qui sont par taille de tissu. C'est-à-dire vraiment les tout petits bidules. Ça fait vraiment, c'est la poubelle. Vraiment, mais c'est mini. Et puis, les petites pièces de tissu, ça peut faire des patchworks, etc. Les moyennes pièces. Donc, on a des tailles de poubelle, en fait. Et moi, à chaque fois que je retourne en Inde, je récupère ces cartons. Et je dis, bon, OK, avec ce carton-là, qu'est-ce qu'on va faire ? Est-ce qu'on peut faire des patchworks ? On a un concept store à Jaipur. Là, les patchworks un peu plus aléatoires. Nous, on peut faire des produits qu'on vend dans le concept store. On fait des étuis à lunettes, des petits porte-monnaies. Souvent, on envoie en cadeau dans les commandes qu'on ne vend pas forcément. Mais on n'a presque pas de déchets. Vraiment le moins possible.

  • Speaker #0

    Et comment tu fais face ? aux défis écologiques en Inde, les matières, la teinture, le transport ?

  • Speaker #1

    Moi, à mon échelle, faire face, c'est difficile. Voilà, nous, on se dit que le fait déjà d'avoir le moins possible de déchets, et nous, on le voit, les déchets, c'est énorme. Après, on ne peut pas lutter sur le contre. Le fait que, voilà, ça part par avion. Nous, on ne travaille pas avec des containers, parce qu'on a des petits stocks et des délais restants. donc On fait au mieux, quoi. Chacun fait au mieux. Moi, j'essaie de...

  • Speaker #0

    On ne peut pas être sur tous les fronts.

  • Speaker #1

    On ne peut pas être sur tous les fronts. Et puis, en Inde, il y a un vrai sujet là-dessus, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pour ça que je te pose la question.

  • Speaker #1

    Oui, mais le site... Les citoyens sur l'eau, moi je leur apprends, par exemple, l'eau, on a un jardin, la personne qui arrose le jardin, quand ce n'est pas moi, parce que j'adore le faire moi, mais il peut laisser le tuyau, puis il s'en va, il va faire autre chose complètement, et il revient, c'est complètement noyé. Je leur explique que l'eau, ce n'est pas éternel. Pour eux, ça vient de sous le sol, donc ça va être pour toujours. Les ordures en Inde, le recyclage, enfin... Ils vont ouvrir, tu étais en voiture, et tu vois le gars d'à côté, il ouvre sa fenêtre, il lance sa bouteille d'eau. Ce n'est pas des scènes rares. Donc, il y a un vrai sujet, vraiment écologique. Moi, je dis tout le temps, si j'avais un engagement écologique, quel qu'il soit, je ne resterais pas à me battre en France pour les poubelles vertes ou jaunes. J'irais en Inde, j'irais en Afrique, parce qu'ils sont beaucoup plus nombreux. strictement rien compris. Ils en sont au balbutiement de tout ça. Ils pensent qu'en jetant un papier par la fenêtre, comme on ne le voit plus, il disparaît. Et c'est nous, il y a 50 ans. Et il y a un vrai sujet, il y a un vrai enseignement. Mais dans les écoles, ils commencent maintenant à les sensibiliser là-dessus. Donc, c'est le tout début, mais il y a du boulot.

  • Speaker #0

    En termes de création, c'est toi qui imagine toutes les collections textile. Surtout, tu fais les motifs, les dessins.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Comment tu t'épargnes ?

  • Speaker #1

    Je suis styliste, illustratrice. C'est mon métier.

  • Speaker #0

    Ah, illustratrice.

  • Speaker #1

    Oui. Moi, au départ, j'ai fait la formation S-MOD en mode enfantine. J'ai commencé ma carrière chez Petit Bateau. Moi, je dessinais des petits nounours, des petites fleurs, etc. Là, pour le coup, j'étais styliste et illustratrice. On faisait les deux. Moi, dessiner, c'est toute ma vie dessiner. Malheureusement, en tant que chef d'entreprise, je dessine beaucoup moins que ce que j'aimerais. Mais effectivement, je dessine tout, les motifs, les modèles. Certains motifs existent parce qu'il y a des... milliers de blocs chez nos imprimeurs et ils sont très jolis. Donc, voilà, moi, je vais me promener dans un atelier et puis aller fouiller dans les blocs et dire, ça, c'est quoi ? On l'essaye. Et parfois, le graphisme est super beau, mais ce sont toujours nos colorations. Voilà, nous, on n'achète aucun tissu déjà imprimé. Donc, certains blocs existent. Il y a des motifs vraiment traditionnels qui existent. Et puis sinon, moi, je dessine et on donne à graver.

  • Speaker #0

    Donc plusieurs fois par an, tu marches par collection, c'est selon ton inspiration ? Comment tu germes tes idées ?

  • Speaker #1

    Ça vient des voyages, j'ai plutôt un problème de trop d'idées que pas assez. Comment les canaliser, comment les faire entrer dans des collections ? Les motifs, c'est un peu tout le temps. C'est-à-dire que moi, je vais dessiner, je ne sais pas, je vais voir n'importe quoi, un papier peint, une expo, un papier peint ancien. N'importe quoi, une assiette vintage dans un restaurant, ça me donne une idée de fleur de motif et je vais dessiner tout le temps. Je dessine pas mal dans l'avion, dans les transports et je fais faire des blocs. Je dessine l'imprimé et je fais faire des blocs. Je vais décider que celui-ci va être en trois couleurs, quatre couleurs. Donc c'est un bloc par couleur, un tampon par couleur et je fais faire les blocs. Il y en a plein qu'on n'a jamais utilisé, qu'on utilisera peut-être un jour. Mais on est prêt, j'ai un peu ma bibliothèque de blocs, en fait, et de motifs. Et puis après, on se dit, tiens, j'ai envie d'une grande fleur. Ah, j'en avais dessiné une. Bon, pour cet hiver, elle va être plutôt dans les tons de brun. Et on fait des essais de couleurs. Mais sur ce qui est des motifs, ce n'est pas très saisonnier. On ne dessine pas des flocons de neige. Voilà, donc en fait, ça peut être toute l'année. Et c'est surtout la coloration qui détermine la saison.

  • Speaker #0

    Comment est réparti ton travail ? J'allais dire tu dis dans les transports, mais plutôt là-bas ou ici. Comment est organisé ton travail selon ce que tu fais en Inde et ce que tu fais en France ?

  • Speaker #1

    Mon travail est désorganisé, totalement désorganisé. Déjà parce qu'en Inde, l'organisation n'existe pas. Parce qu'en fait, on va se lever le matin et décider qu'on va faire ça, ça. On a un rendez-vous, machin, et puis tout change. Le rendez-vous s'annule. D'un coup, il y a une énorme averse, c'est trempé, tout est noyé, on ne peut plus partir. Donc ça, c'est la vie en Inde. Donc en Inde, tout est désorganisé. Je rêve d'avoir un planning. J'entendais un podcast où il disait que le vrai truc, c'est vraiment le planning. Il n'y a que comme ça que tu t'en sors. C'est pour ça que je ne m'en sors pas. Moi, je ne peux pas. Alors, j'arrive à faire ça. Les périodes où je suis en France, c'est un peu plus possible. et encore que... Pas vraiment parce que, ben voilà, ce matin... J'ai couru pour arriver ici alors que je pensais avoir du temps, mais en fait, il y a eu un souci à l'atelier. Donc, moi, quand je me réveille à 6h du matin, il est 10h30 déjà, donc ils sont déjà en train de bosser. Donc, il y a déjà plein de... Quand je me réveille, il y a déjà une liste de... Il s'est passé plein de trucs. Il y a plein de problèmes. Il n'y a plus de fil pour ça. Il n'y a pas ci, il n'y a pas ça. Il y a le tissu qui n'a pas été livré. Il y a FedEx qui n'est pas venu chercher les colis. Et donc déjà ça, ça me décale, même si je m'étais dit, oh tiens, aujourd'hui, je vais faire mon petit podcast, puis après, ta-ta-ta, ben voilà. Donc je suis très désorganisée. Quelqu'un m'avait dit un jour que j'étais éparpillée. Je trouvais ça joli, c'est assez vrai. C'est un joli mot.

  • Speaker #0

    Ça ne t'empêche pas d'avancer, de travailler chacun sa méthode.

  • Speaker #1

    C'est des tout doulisses que je ne suis pas. J'ai beaucoup trop de choses à faire, c'est beaucoup. Donc il n'y a pas de... Voilà, j'essaye... C'est pour ça que je dis que je dessine dans les transports, parce que dans l'avion, personne ne m'appelle. Donc, je suis tranquille. Vraiment, c'est pour dessiner. J'essaye de me trouver vraiment des moments calmes pour dessiner. Ça, c'est important. Et sinon, tout le reste du temps, je fais 10 000 trucs.

  • Speaker #0

    Il y a combien d'heures de décalage ?

  • Speaker #1

    4h30 en hiver, 3h30 en été. Ce n'est pas énorme.

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas énorme.

  • Speaker #1

    Mais c'est suffisant pour, en fait, lorsque je suis en France, me lever très, très, très tôt. Voilà. Ou quand je suis en Inde, travailler avec la France très, très, très tard. Donc, en fait, du coup, ce n'est pas un vrai décalage horaire, mais c'est un décalage horaire qui fait que je travaille 18 heures par jour.

  • Speaker #0

    Voilà. Donc, on disait que c'était une marque décoration textile. Tu fais des plaides, des rideaux, des housses de couettes, du linge de table, des coussins, des pareos, des cabas, des trousses. Pour l'instant, qu'est-ce qui se vend le mieux ? Est-ce que tu as des genres de bestes ?

  • Speaker #1

    Tout se vend. Et ça dépend des périodes. Là, en période où on arrive à Noël, on va vendre beaucoup de trousses, beaucoup de sacs, parce que c'est des cadeaux. L'été, on vend énormément de pareos, mais on les vend à Noël parce que nos pareos se portent en foulard, parce que ça fait un foulard très aérien, mais qui tient quand même chaud. Là, les housses de couettes, c'est plus en hiver. En période d'été et de Noël, on vend des nappes, parce que ça fait des grandes tables. donc il n'y a pas de... énormément de coussins et les sofa cover mais le coussin c'est vraiment un article où tu vas mettre deux coussins sur ton canapé et limite tu as changé ton salon parce que nos coussins sont quand même très très présents et puis c'est un petit budget on peut s'offrir j'ai

  • Speaker #0

    vu et tu as beaucoup de sofa cover ce qui est canon sofa cover en gros c'est pour mettre sur le canapé mais on peut mettre en bout de lit c'est un genre de boutique on pourrait dire que c'est un édredon

  • Speaker #1

    En Inde, ils les empilent sur les charpoils, dans le Rajasthan on dit les Ausha, mais sur ces lits indiens. Ils les empilent et ça sert de petit matelas. Nous, les nôtres, sommes beaucoup plus légers que vraiment un petit matelas de charpoil, mais c'est un peu salidé. Donc on peut le mettre en bout de lit, ça peut habiller un canapé, ça peut cacher un canapé qu'on n'aime plus, ça peut protéger un canapé des petits doigts au chocolat des enfants. Parce qu'ils sont déhoussables, ils sont lavables. Et c'est un produit qu'on vend vraiment beaucoup.

  • Speaker #0

    Je reviens sur un point qu'on a un petit peu abordé tout à l'heure sur le fait de comment on se démarque avec les autres marques. Mais surtout, j'ai envie de te demander comment va le business ? Tu vois, c'est un peu la crise. Enfin, un peu beaucoup. Comment t'affrontes-tu ? Alors,

  • Speaker #1

    comment on affronte ? Pour tout te dire, moi, il y a un peu plus d'un an, Je n'en pouvais plus. Donc, ma façon d'affronter, c'était de me dire, tu sais quoi, je vais tout arrêter, en fait. Voilà comment j'allais affronter. Et j'ai eu une très grande chance parce qu'un de mes fils, j'ai trois enfants, Justin, m'a dit, maman, n'arrête pas, tu as de l'or entre les mains, il faut qu'on en fasse quelque chose. alors c'est un de mes enfants un peu comme moi, mais ils le sont tous les trois mais un peu hyperactif et un peu touche à tout et il m'a dit moi j'ai du temps à consacrer On s'y met à fond, on redéveloppe, etc. Moi, j'ai écrit RAN, j'avais tout fait toute seule depuis le début. C'est-à-dire que j'avais fait le site, c'était moi qui gérais le site, mais j'ai fait le site toute seule. Instagram, c'était moi. Les lives, c'était Banu derrière la caméra. Et puis moi qui préparais tout le setup, le machin. Et puis je faisais le live. Et puis après, on prenait les commandes et on emballait. C'était 100% nous deux. Et en tout cas, 100% de ce qui était fait en France, le commercial, le machin, c'était moi. Donc c'était un peu trop et en fait on était un peu trop gros pour que ça fonctionne comme ça. Donc il y avait deux solutions, soit je redevenais très petit et en fait je chinais trois parce que moi je suis une passionnée. des tissus anciens, etc. Donc, je tinais trois bouts de tissu, je faisais faire quatre coussins, je les bandais en live et je gagnais trois sous comme ça. Soit on avait une taille critique et il fallait passer au-dessus. Donc là, on est passé au-dessus, on a refait un site, on a des gens qui gèrent la pub, des gens qui gèrent Instagram, même si c'est toujours moi qui suis derrière. En France, on a maintenant un dépôt, un hangar, on gère tous les envois. On est passé, il y a un an, à une autre... taille d'entreprise et un autre mode de fonctionnement, tout en gardant la fabrication artisanale. Donc là, on en est là. Donc, on peut dire que nous, on ne subit pas trop cette crise parce qu'on a augmenté notre chiffre d'affaires et nos ventes énormément en un an. Mais peut-être que si on n'était pas au milieu de cette crise, on aurait explosé en un an. Là, on n'a pas explosé. La bonne nouvelle pour nous, c'est que ça nous permet de grandir et de s'organiser en production derrière, pas à pas. Et ça, c'est super important pour qu'on garde notre ADN et notre mode de production artisanal. Donc, on ne va pas dire qu'on ne subit pas la crise, mais voilà, on vit dedans. De toute façon, qu'est-ce qu'on peut faire d'autre ? Donc voilà, on a changé de structure d'entreprise à ce moment-là. Donc, on a gardé la tête hors de l'eau. Mais c'est du travail acharné. On ne compte pas nos heures et on se fait peur. C'est très, très loin d'être l'opulence. Mais on est content de voir que les gens aiment, les clients sont contents. Ils commandent une fois une petite commande, puis la deuxième commande est plus importante, etc. Le fait d'avoir aussi une petite taille d'entreprise, ça nous permet d'être, même si le consommateur est derrière son écran, on est proche de lui quand même, on le suit. Une cliente qui va avoir un souci, Justin va l'appeler personnellement. Donc, on garde ce côté humain, vraiment. Donc,

  • Speaker #0

    il a intégré un peu l'entreprise ?

  • Speaker #1

    Oui. Et lui, il s'occupe de tout ce qui est marketing, commercial, expédition, etc. Et c'est lui qui gère les pubs, etc. Il fallait du sang neuf. Je suis un peu vieillissante. Et il fallait des trentenaires aujourd'hui dans un business. Voilà.

  • Speaker #0

    Tu te vois où dans dix ans ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas du tout Ailleurs Je serais contente de passer de voir Je ne me vois pas Je ne me vois pas retraitée Alors que pourtant dans dix ans je crois que c'est l'âge de la retraite Donc non je ne me vois pas retraitée Je me vois je ne sais pas ailleurs Peut-être en Inde Peut-être toujours avec Kiran J'adorerais Mais moi j'adorerais être la directrice artistique de Kiran Alors ça c'est mon grand rêve c'est mon grand. C'est-à-dire, en fait, dessiner, m'occuper des collections, mais des prototypes, ne pas gérer. Est-ce qu'il nous refaut 300 mètres de tissu ? On n'a plus de signes. Ne plus regarder les ventes sur le site. Voilà. Alors ça, ça serait mon grand rêve. Et si c'est comme ça dans dix ans, mais il faudrait que ce soit avant, parce que j'avais le craqué avant. Mais ça serait mon rêve. Ou alors complètement autre chose. Je ne sais pas, monter un atelier avec des femmes, un orphelinat, je n'en sais rien.

  • Speaker #0

    Quel conseil tu donnerais à quelqu'un qui voudrait entreprendre, un peu comme toi, dans un projet à impact, entre gros guillemets ? Un projet qui ait du sens. Les jeunes, ils vont arriver avec des projets qui ont du sens, plus que les anciennes générations.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il faut vraiment croire en ses idées. Je crois qu'il faut faire quelque chose qu'on aime. Tu me diras, il y en a plein qui réussissent en faisant des trucs qu'ils n'aiment pas. C'est-à-dire qu'en fait, ils font des projets à partir d'un business plan. On en voit des marques comme ça, que je ne citerai pas, qui d'un coup décollent. Mais parce que c'est quatre personnes autour du table qui se sont dit, comment on va pouvoir gagner de l'argent ? C'est l'exact contraire de ce que moi, je peux faire. Mais moi, je pense que pour être heureux et tous les matins... Parce qu'entreprendre, c'est difficile. Vraiment, on ne compte pas nos heures. En fait, on ne fait que ça. Moi, je ne fais que ça dans ma vie. Donc, je pense qu'il faut aimer ce qu'on fait et croire vraiment profondément en ce qu'on fait et ne pas compter ses heures. Et si on se plante, recommencer. Parce que ce n'est pas grave, parce qu'on aura appris. Et toujours croire en ses rêves. Oui,

  • Speaker #0

    c'est beau. C'est bien. Ça ressemble à quoi chez toi, en fait ? Parce que du coup, tu as deux maisons.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut mettre un S à toi ? Chez toi, les toits. Oui, tout à fait. Alors, j'ai trois maisons. Vraiment, je suis chanceuse. Alors, ça ressemble à quoi chez moi ? À Jaipur, c'est très, très coloré. Un peu trop à mon goût, mais en fait, il y a un an et demi, deux ans, j'ai eu la bonne idée avec Banu, mais c'était surtout mon idée, je ne vais pas l'accuser, le pauvre, d'ouvrir des chambres d'hôtes. Parce que j'avais eu dans ma vie, avec le papa de mes enfants, j'avais eu des chambres d'hôtes dans le Luberon. Et j'adore recevoir, j'adore accueillir les gens, j'adore cuisiner, j'adore parler de ce que j'aime. Donc, on s'est dit, voilà, on va ouvrir des chambres d'hôtes. d'autres à Jaipur et un concept store et ça faisait vraiment beaucoup et donc en fait on est donc un peu freiné des cas de fer et du coup on a emménagé dans nos chambres d'hôtes donc c'est hyper décoré on a plein de serviettes de bain toutes les couleurs toutes les coordonnées machin parce que j'avais fait ça très très très très fini j'ai jamais eu une maison aussi finie puisqu'en fait je vis on vit dans nos chambres d'hôtes donc c'est très coloré c'est très joyeux Mais ça fonctionne bien avec la vie à Jaipur. Donc voilà, c'est une maison joyeuse, colorée, lumineuse. Enfin, de toute façon, l'Inde, c'est lumineux. Moi, c'est ce qui me nourrit, c'est cette lumière tous les jours et cette énergie. Et donc, c'est vraiment un coin coloré, grand, où on reçoit beaucoup. Je fais pas mal de dîners, il y a pas mal de créateurs, créatrices qui passent. Donc, ça parle un peu toutes les langues. On fait des repas. Des grands repas dans le jardin. Voilà, c'est joyeux. Et donc, le rez-de-chaussée, c'est l'atelier. Donc, il y a des bouts de tissu aussi, des cartons. Voilà.

  • Speaker #0

    Génial. Après, la deuxième maison, c'est ?

  • Speaker #1

    Alors, la deuxième maison, c'est Essaouira. Essaouira, c'est un petit riad au cœur de la médina d'Essaouira. Donc, ça, c'est mon paradis. Donc là, c'est plus soft, c'est du tas de lacs, beige, marron, les portes sont noires, c'est plus neutre. Je l'avais fait avant Kiran, donc je l'ai un peu kiranisé. Maintenant, il y a quand même un peu de fleurs et de touches kiran dedans. Mais moi, j'aime aussi beaucoup l'artisanat marocain. J'aimerais vraiment en faire rentrer dans la collection kiran. Donc, j'ai pas mal. Les rideaux sont faits à partir de hikes marocains. C'est aussi une maison joyeuse qui est très grande, où j'aime beaucoup recevoir. J'aime bien qu'il y ait évidemment mes enfants, leurs conjoints, mes petits-enfants, parce que j'ai la chance d'être mamie. Voilà, c'est une maison qui est faite pour ça. Et en haut, sur la terrasse en haut, on a la cuisine et la pièce à vivre et une petite chambre. Et quand j'y suis seule, je ne vis que sur la terrasse, en fait. C'est comme si je vivais sur un appartement un peu en extérieur. Et j'ai toujours un moyen d'être bien quand je suis seule. Voilà, donc ça c'est la partie. marocaine et puis à paris j'ai rénové l'année dernière j'ai eu la chance de trouver trois chambres de bonne dans un état lamentable et j'ai tout cassé tout ça j'adore pas j'ai tout fait casser j'ai pas cassé moi et et fait un très joli petit nid sous les toits à paris et dans lequel je suis vraiment très très bien et où c'est vraiment déconseillé de venir si vous vous faites plus d'un mètre 85. Mais c'est vraiment un petit nid, tout mignon. Et là, c'est des coloris plutôt neutres. Là, j'ai eu besoin d'avoir un lieu neutre, parce que c'est souvent là aussi que je me pose pour dessiner. Donc, c'est calme, c'est neutre. Enfin, tous les marrons, là, c'est comme la table qu'on voit là. Tout dans les tons de beige chocolat, qui sont des tons que moi, j'ai toujours adoré. Très calme.

  • Speaker #0

    Oui. Comment on apporte de la joie dans son intérieur ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en étant heureux. Mais ça, ça ne passe pas par les collections Kira, non ? Alors moi, j'ai eu un moment de ma vie où j'ai décoré, enfin j'étais décoratrice, j'ai décoré des maisons pour des gens. Ce que j'avais le plus de mal à faire, c'était des gens qui me disaient, clé en main, vous décorez tout jusqu'à la petite cuillère et on s'installe. Je trouvais ça très bizarre, j'avais l'impression qu'ils ne s'installaient pas chez eux. Moi, je crois que la joie, c'est ce qu'une maison raconte en fait. Alors moi, je voyage beaucoup, donc c'est rapporter des choses. On peut, sans voyager, aller dans une petite brocante le dimanche, là où on habite, acheter un tout petit objet qui raconte une histoire, avoir un petit truc d'une de ses grands-mères et puis le petit truc d'un de ses grands-pères. Je ne sais pas, un truc des enfants qui va rappeler quelque chose. Moi, je pense que ça passe plus par l'âme qu'on y met, par l'amour des objets. moi j'ai à Jaipur alors à Au Maroc, c'est des meubles que j'ai fait faire, et puis beaucoup de meubles maçonnés, en fait, parce que c'est comme ça qu'on fait au Maroc. Mais en Inde, comme à Paris, on va dire que 90% de mes meubles, c'est des trucs que j'ai chinés, en fait. Et c'est vraiment... J'aime bien, quoi. Mon meuble vasque, c'est une vieille commode, j'imagine. Une mamie qui rangeait ses chaussettes et ses petites culottes. Voilà, moi, j'aime... Je pense que si votre maison raconte une histoire qui est la vôtre, donc pour moi, il n'y a pas de code. Je déteste les... les styles de maisons tout blancs ou tout comme ci, tout comme ça. Je trouve que c'est vraiment... Et si la maison a une âme avec des objets qu'on aime, qui racontent notre histoire, pour moi, c'est une maison joyeuse.

  • Speaker #0

    Et comment on ose le motif ou la couleur ? Ça, c'est plus difficile.

  • Speaker #1

    Oui, alors, c'est difficile pour moi, parce que pour moi, c'est très instinctif. En tant que décoratrice, je me souviens... C'est bien de décider, un exemple précis d'une cliente où on avait décidé de faire toute l'entrée en vert amande. Et puis quand son mari est arrivé le week-end, il lui a dit « mais pourquoi tout ça c'est vert, on refait en blanc ? » Il y a des gens vraiment que ça dérange. Pour moi, c'est très spontané. Je pense qu'il faut se faire confiance, il faut essayer. Il faut faire des choses pour soi. Je crois aussi que ce qui bloque beaucoup les gens, c'est qu'ils se disent « ah, mais s'il y a quelqu'un qui vient, puis chez ma copine, c'est comme ça. d'ailleurs si je fais un dîner il me faudrait une grande nappe une grande de table, alors qu'en fait, combien de dîners ils font par an ? C'est surtout comment il faut se faire confiance, mais pour plein de choses dans la vie, mais aussi pour sa déco, et se dire là, j'ai envie de rose, parce que j'ai vu ça, j'ai envie que ça explose, je vais mettre un petit coussin rose, on n'est pas obligé de peindre les murs en fuchsia. La peinture, pour moi, c'est facile, parce que je trouve que peindre un mur, c'est juste un dimanche, on en a plein dans l'année des dimanches. Et en fait, pour refaire sa pièce, il faut juste un dimanche, si elle n'est pas trop trop grande. Et un dimanche, il y a un pot de peinture et un pinceau. Donc, oser, en fait. Il faut oser, il faut prendre des risques. Et au pire, ce n'est pas grave. On peut offrir le coussin à une copine ou le mettre en vente sur le bon coin et s'en racheter un autre. Donc, il faut que ça tourne. Moi, j'aime bien aussi que les histoires tournent et ne pas se dire, j'ai cette déco et c'est pour 25 ans et ça ne bougera plus.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #1

    Non, globalement, il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser, c'est très agréable à entendre. Dernière question, si tu faisais un dîner sans table, avec six personnes, des personnalités ou pas, connues ou pas, décédées ou pas, qui seraient-elles ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai réfléchi à un dîner de femmes, parce que je fais souvent des dîners de femmes en Inde avec toutes les clés. Tu as envoyé la question hier,

  • Speaker #0

    on va le dire quand même.

  • Speaker #1

    Oui, ça se prépare, parce que sinon...

  • Speaker #0

    C'est la seule question que je... Oui, la seule. En avance. Voilà.

  • Speaker #1

    Alors, spontanément, je me dis Vanessa Paradis. Parce qu'en fait, Vanessa Paradis, c'est une femme de mon âge. Et voilà, qui a toujours gardé sa ligne, qui est joyeuse. Et en fait, on a un peu grandi ensemble. Et je me suis toujours dit que c'était quelqu'un que j'aimerais rencontrer. Qui doit être fort sympathique. Tina Kieffer. Tina Kieffer, parce qu'on en parlait avec l'ONG, les femmes en Inde, etc. Donc, elle a créé l'association, la fondation, je crois qu'on dit, Toutes à l'école. Et elle a scolarisé des centaines de petites filles. Certaines sont devenues des jeunes femmes maintenant au Cambodge. Et qu'en fait, en vrai, quand tu me disais où je voudrais être dans 10 ans, je voudrais être Tina Kieffer. Moi, je voudrais avoir fait un truc comme ça avant de mourir. Je ne sais pas si c'est dans 10 ans ou dans 15 ans. Mais voilà. Donc j'ai... Des milliards de questions à lui poser. Ambre Chalumeau, qui est une jeune femme, parce qu'il faut quand même un peu de sang jeune autour de cette table, qui est une jeune femme qui vient de sortir un premier roman, qui est chroniqueuse, passionnée de littérature. Et quand je l'entends présenter un livre, elle est chroniqueuse et elle a un podcast. J'ai tout le temps envie de le lire. Je trouve qu'elle transmet ça avec une joie naturelle et une passion qui me... qui me plaît énormément. Je n'ai pas du tout le temps de lire dans cette vie et ça me fait du bien de l'écouter. Meryl Streep, parce que pour moi, c'est l'actrice par définition qui a traversé les époques et qui est fidèle à elle-même. Amrita Shergill, qui est une peintre indo-hongroise. qui est née dans les années 20, c'était une peinte dans les années 30. Elle est morte très jeune et elle a beaucoup voyagé. Elle a vécu en Hongrie, puis en Inde, puis à Paris. C'était une femme très moderne pour son époque et qui a réussi à mélanger les cultures. Et ça se retrouve dans sa peinture. Et voilà, elle était féministe, elle était indépendante. Et ça me plaît bien comme idée. Je pense qu'elle aurait vraiment quelque chose à raconter d'intéressant. Elle avait un peu l'âge de mes grands-mères, donc ça serait pas mal. Et puis Françoise Dorgé, la créatrice fondatrice de la marque Caravan. Alors, vous pouvez peut-être trouver bizarre que je parle des concurrents, mais moi, je pense qu'on n'est pas des concurrents. On travaille tous ensemble sur les mêmes marchés. Et Françoise Dorgé, pour moi, elle a tout inventé, en fait. C'est la première qui a ramené l'idée des petits matelas indiens pour en faire des sofas cover. C'était son idée à elle. C'est la première qui a ramené... des tapis marocains, des tentes berbères, et qui s'est dit, on va les mettre dans les appart' des bobos parisiens. Et je pense que toutes les marques de textile, aujourd'hui, on lui doit tout à elle, en fait. Je ne sais pas si nous, on aurait osé le faire, si elle ne l'avait pas fait avant nous.

  • Speaker #0

    C'est smart de lui rendre... C'est très smart de ta part de lui faire ce clin d'œil.

  • Speaker #1

    Oui, mais je trouve que ça, il faut être... Moi, je suis quelqu'un d'assez droit et je trouve qu'il faut être honnête. C'est important, ça lui revient à elle. Après, peut-être qu'on l'aurait fait, peut-être que j'aurais été la première, ça n'aurait pas été elle, mais en tout cas, c'est elle. Et on lui rend, elle n'est plus chez Caravan aujourd'hui, mais ce Caravan d'avant qu'elle a créé à l'époque des... des boutiques, des petites boutiques caravanes et de tout ce qu'elle rapportait. Moi, j'y allais, ça me fascinait. Je n'avais pas mis un pied en Inde. Et puis peut-être aussi parce qu'on aurait des choses à se dire, parce que je pense qu'elle adore l'Inde, qu'elle vit aussi au Maroc et à Paris. Donc, on aurait sûrement des trucs à se raconter.

  • Speaker #0

    Plein de points en commun.

  • Speaker #1

    Voilà. Et si je peux rajouter une septième personne, j'aimerais que ma grand-mère italienne soit là pour que du coup, ce soit elle qui nous prépare les pâtes pour le dîner.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Voilà. Bon, merci beaucoup, Karine. c'était vraiment très sympa d'échanger avec toi c'est marrant toujours une émotion palpable de discuter avec quelqu'un qui travaille avec l'Inde. Je ne sais pas pourquoi, chaque fois ça me fait ça. C'est très fort ce que tu as raconté. C'est vraiment hyper intéressant.

  • Speaker #1

    Peut-être parce que c'est la passion, parce que c'est beaucoup d'amour, beaucoup de passion, beaucoup de patience. Et qu'effectivement, l'Inde, il y a un sujet dont on n'a pas parlé. Je me permets de le faire. Depuis 3-4 ans maintenant, on organise les Tyrannetours. où justement, pour partager cette passion, on accueille dix femmes pendant dix jours à Jaipur et qu'on les promène dans notre vie, dans nos ateliers. Il y a des cours de cuisine, des cours de block print, des cours, des formations, des présentations. On se balade aussi un peu aux alentours de Jaipur, on les emmène à la campagne, dans la famille de Banu en fait, vivre une journée vraiment traditionnelle indienne. Et pour se rattacher à ce que tu disais, je pense que c'est peut-être ça qui est émouvant. C'est que c'est ma vie, c'est ma passion. Et qu'avec les Kirin Tour, on la partage, cette passion.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est qu'un an, quatre fois par an ?

  • Speaker #1

    Non, on l'a fait deux fois par an. L'année dernière, on ne l'a fait qu'une fois. Et cette année, comme on était en pleine restructuration et réécriture de la marque, on ne l'a pas fait. Donc, le prochain sera normalement... en octobre-novembre 2026.

  • Speaker #0

    2026, ok. On peut te contacter. Femme du jour.

  • Speaker #1

    C'est très peu de place.

  • Speaker #0

    Femme du jour, génial. Eh bien, merci beaucoup, Karine.

  • Speaker #1

    Merci, ciao.

  • Speaker #0

    Décodeur, c'est terminé pour aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir écouté en entier. Si vous avez aimé, n'oubliez surtout pas de vous abonner au podcast pour ne pas rater les prochains épisodes et retrouver tous ceux qui ont déjà été enregistrés. N'hésitez pas non plus à le partager en l'envoyant à vos proches qui pourraient être intéressés ou en story Instagram. D'ailleurs, on peut se retrouver sur le compte Décodeur où je poste très régulièrement. Et si jamais vous avez 15 secondes, n'oubliez pas de laisser 5 étoiles ou un avis. C'est juste sous la liste des épisodes. Non seulement ça me fait très plaisir, évidemment, mais dans la jungle des podcasts, plus on a de notes, plus on se fait remarquer, ce qui est très important pour moi. Voilà, merci beaucoup et à tout de suite. très bientôt alors, ici ou ailleurs.

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Description

Décoration, design, création, savoir-faire, ces mots vous parlent ? Alors vous êtes au bon endroit !

Attention épisode génial !

C'est l'histoire de Karine qui, pendant un voyage en Inde, a eu un coup de foudre pour l'artisanat et le savoir faire local... mais aussi pour Banu, un indien qui lui faisait visiter un atelier. Elle sait que sa vie est là et avec lui. Ainsi est né Kirane. En très gros résumé car les détails sont évidemment dans le podcast !

Kirane est une marque de décoration textile, sincère et authentique, engagée et profondément humaine. Vous allez en avoir des frissons en écoutant Karine nous raconter son quotidien, entre beauté et galères. Tout est fabriqué à la main, dans le respect des traditions, avec des matières et des pigments naturels et surtout dans de bonnes conditions (Karine a crée "Villa Kirane" son propre atelier de confection dont Banu est responsable). 

 

Ensemble on parle 

  • de l'incroyable histoire de Kirane

  • l'importance pour elle d'avoir son propre atelier 

  • comment elle concilie le travail local versus les exigences du marché 

  • et les ponts entre Jaïpur et Paris 

  • ses plus grosses difficultés au quotidien et comment y remédier

  • la fast déco et les faux discours marketing 

  • la valeur du fait main 

  • les défis écologiques 

  • la joie de vivre et des couleurs 

  • sa passion pour le dessin et le manque de temps pour le faire 

  • la folie des sofa cover

  • la crise et l'avenir 

  • l'importance d'avoir des jeunes dans son équipe 

  • ses 3 maisons si différentes 

  • et bien plus encore !


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Merci beaucoup !   

Hortense Leluc, journaliste déco et fondatrice de DECODEUR  


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous, je suis Hortense Leluc et vous écoutez Décodeur, le podcast dans lequel j'échange avec des pros de la déco. Il y a plusieurs formats d'émissions qui tournent, stylé, archi-cool, le club ou les rencontres comme l'épisode qui va suivre, dans lequel un architecte ou un designer, une marque que vous aimez ou que vous allez découvrir, un entrepreneur ou un créatif va nous parler de sa manière de travailler, de ses produits. de son savoir-faire, sa vision, ses inspirations, bref, de l'envers du décor qu'on ne soupçonne pas toujours. Et c'est ça la force du podcast, on prend le temps, on va plus loin, on décortique, on apprend, on comprend. Il y a une forme d'intimité, de complicité et d'authenticité à laquelle je tiens beaucoup. Merci d'être si nombreux à écouter. Si vous venez de découvrir le podcast, bienvenue. N'oubliez pas de cliquer sur s'abonner pour ne pas rater les prochains épisodes. et si mon invité vous plaît, surtout n'hésitez pas à partager l'épisode en story ou à mettre 5 étoiles, tout ça m'aide beaucoup à me faire connaître encore plus. Bonjour à tous, cette fois dans Décodeur, on part en voyage. Un voyage loin des chaînes de production industrielle, loin des collections qui s'enchaînent à toute vitesse. On part en Inde, là où chaque motif raconte une histoire, où chaque... couleur est un langage et où la main de l'artisan est au cœur du projet. Aujourd'hui, je suis avec Karine Nally et on va vous parler de Kiran, une marque de décoration textile qui fait sans cesse des ponts entre la France et l'Inde, entre tradition et code contemporain. Kiran a son propre atelier de confection à Jaipur, en Inde, défend le fait main et préserve des savoir-faire ancestraux et créer des pièces qui ont une âme. J'ai donc profité de la présence de Karine à Paris pour organiser cet échange et en savoir plus sur cette jolie marque. Bonjour Karine.

  • Speaker #1

    Bonjour Hortense.

  • Speaker #0

    Je fais une petite parenthèse pour remercier Querk, qu'on enregistre chez Querk, que tu découvres avec moi ce matin. Ce sont des espaces de bureaux haut de gamme inspirés des codes de l'hôtellerie de luxe. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que vous pouvez, votre employeur peut avoir des bureaux chez Querk et vous pouvez bénéficier Merci. de la conciergerie, d'un barista, d'un service de restauration selon les lieux. Quercq peut aussi organiser vos événements d'entreprise. Chacun a un rooftop aussi, une salle de sport, un espace wellness. Bref, ce sont quatre adresses dans le huitième dont je voulais vous parler, qui sont très belles, très bien pensées.

  • Speaker #1

    Je confirme, on est dans le luxe.

  • Speaker #0

    Oui, on est hyper bien installés. Karine je me dis qu'on va peut-être Commencez par le début. Quelle est l'histoire de Kiran ? Comment ça a commencé ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un voyage en Inde. C'est une histoire de voyage toujours, Kiran. Donc, j'ai fait un voyage en Inde touristique. Ça faisait longtemps que je voulais aller en Inde, mais je ne l'avais jamais fait. Et je me retrouve en Inde, au milieu des tissus, des couleurs et de cette vie indienne. et ça a été... Ça a été un coup de foudre, un choc, un tsunami dans ma vie, professionnel et personnel, puisque l'histoire lie vraiment les deux. Et je suis tombée amoureuse du Blokprim, vraiment le premier atelier d'impression à la main, au Blok dans lequel je suis allée. Je ne sais pas, ça a été comme un choc. J'ai eu l'impression d'appartenir à ce monde. Et comme je ne fais jamais rien à moitié, je suis tombée amoureuse de la personne. qui m'a emmenée dans le premier atelier de Blockprint. Et donc, j'ai complètement changé de vie. Donc, Irane n'est pas née d'un business plan. C'est à peu près l'exact contraire de ça. À l'époque, moi, j'étais décoratrice et j'avais des boutiques de déco dans le sud de la France. Et du coup, j'ai très vite monté une petite collection pour mes boutiques au départ.

  • Speaker #0

    Ah oui, donc c'est vraiment parti d'un voyage personnel.

  • Speaker #1

    C'est un voyage personnel. Ça faisait très longtemps que je voulais aller en Inde. J'ai pas mal voyagé dans ma vie, mais l'Inde, vraiment, ça me tenait à cœur. Mais je ne l'avais jamais fait. Peut-être parce qu'il y avait quelque chose de spécial qui m'attendait là-bas. Donc, il fallait que ce soit le bon moment. Et voilà, vraiment, ça s'est fait très, très spontanément. Donc, c'est une histoire de cœur, de coups de fou, de... De passion, mais vraiment pour cette artisanat. J'ai vraiment ressenti quelque chose. J'étais là-bas chez moi. C'est très bizarre à expliquer. Alors, je sais qu'il y a plein de trucs sur l'un, la spiritualité. Ce n'est pas ce niveau-là. C'est vraiment dans ces ateliers. J'étais bien, j'étais chez moi. J'ai eu envie de faire quelque chose. Moi, j'ai fait l'école Esmod il y a très longtemps. Je suis donc styliste et comme toute styliste, je voulais un jour monter une marque, mais ça ne s'était jamais fait. Et moi, je suis quelqu'un de dentier et de spontané. Et en fait, j'attendais que la vie m'apporte cette idée, ce projet. Et là, ça a juste été une évidence en fait. Et donc, on a créé cette petite collection pour ma boutique de déco. Chaque année, j'exposais avec la boutique de déco en tant que décoratrice et boutique sur le salon Vivre Côté Sud à Aix-en-Provence. Kiran est vraiment née là. C'est-à-dire que j'ai décidé, parce qu'on était une fin d'année, qu'en juin, puisqu'il fallait s'inscrire, je présenterais une collection. Elle n'était pas faite, rien n'existait. Et c'est comme ça que Kiran est né. Et donc Kiran, l'essence de Kiran, le nom Kiran est né. C'était assez évident parce que Kiran en hindi veut dire rayon de soleil. Et qu'en fait, moi, je l'ai orthographié de manière à ce que ce soit l'anagramme de mon prénom Karine.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça, je me suis demandé. Tiens, quand je l'ai écrit, je me suis dit Karine, Kiran, est-ce qu'il y a quelque chose ? Voilà,

  • Speaker #1

    donc dans l'orthographe, enfin en hindi, il ne voit pas le lien. Mais voilà, on l'a orthographié de manière à ce que vraiment ça représente mon prénom.

  • Speaker #0

    Donc, ça a commencé avec une collection que tu vendais dans tes boutiques. Et après, à quel moment tu as fait la bascule d'abandonner les boutiques et de ne te consacrer qu'à Kiran ?

  • Speaker #1

    Alors, c'était un projet déjà dans ma vie d'arrêter ces boutiques. J'en avais vendu une, l'autre était en vente. C'était vraiment, j'avais envie d'arrêter les boutiques. Comme on n'a rien calculé. Voilà, vraiment, tout était très spontané. Donc, en fait, on s'est retrouvés sur le salon Côté Sud pour vendre en B2C à des particuliers. Mais ce salon Vivre Côté Sud, c'est aussi un salon où il y a du B2B. Et donc, on a été contactés par des boutiques. On s'est dit, ah, bon, OK, alors est-ce qu'on vend aux boutiques ? Oh, ben, t'as une commande, tu vas pas la refuser. Donc, on a eu une grosse commande d'une boutique qui ouvrait à Cannes, un concept store. et en fait il se trouve que cette cliente lorsqu'elle a reçu sa marchandise, a dit non, je ne m'attendais pas à ça, etc. A refusé la marchandise. Donc en fait, et puis moi à l'époque, j'étais tellement sur mon petit nuage, on était à Bali un peu en honeymoon. Je me suis dit mais qu'est-ce qu'elle nous énerve. Je lui ai dit ok, renvoyez tout. Et elle a tout renvoyé à Paris. Et quand je suis rentrée de vacances, je me suis dit on fait quoi de ça en fait ? Et c'est comme ça qu'on a monté un site. Parce qu'on s'est dit, maintenant, il faut vendre cette collection. Parce que c'était vraiment une grosse commande. Et mon fils qui était avec moi à ce moment-là, qui travaille dans l'image, etc. M'a dit, maman, moi, je peux te faire des photos. Et puis, on fait un site. Et donc, il m'a fait des photos et j'ai fait le site toute seule. Et c'est comme ça qu'on a lancé vraiment Kiran. Et moi, j'avais déjà une clientèle de mes boutiques de déco. Une mini, mini, mini notoriété sur Instagram. Et donc, les clientes ont commencé comme ça à acheter en ligne. Puis après, j'ai fait des ventes privées chez moi. Et les clientes sont venues. Ça s'est vraiment fait spontanément.

  • Speaker #0

    Mais ça t'a parfois dit, cette femme ? Pourquoi elle t'a rendu la marchandise ?

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui avait travaillé avec l'Inde et qui avait des mauvais souvenirs des ateliers. Elle avait eu des histoires compliquées dans des ateliers en Inde. Et quand elle a reçu, elle me disait « Ah non, mais c'est pas beau, ça sent pas bon » . Elle me disait que ça sent l'Inde. Je pense qu'elle avait besoin d'une petite thérapie concernant l'Inde. Quand j'ai reçu la marchandise à Paris, il y avait mes enfants, il y avait ma fille, il y avait ses copines. J'ai dit, dites-moi, ce n'est pas beau, ça sent mauvais. Ils m'ont tous dit, c'est quoi ton problème ? Je ne sais pas, il y a une dame qui nous retourne, qui nous dit que tout ça, ça ne va pas. Et tout le monde, mes amis, me disaient, mais non, c'est très bien. Donc, vraiment, si elle a la chance qu'elle écoute ce podcast, je la remercie grandement de nous avoir tout retourné. Parce qu'à cette époque-là, on était vraiment en mini-production. Et de toute façon, je n'aurais pas pu produire le double dans le même timing.

  • Speaker #0

    Excellent. Alors toi, tu vis entre Jaipur et Paris ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment.

  • Speaker #0

    Ou Paris ou le Sud ?

  • Speaker #1

    Paris, non, non. Alors le Sud, c'est terminé. Vraiment, je vis entre Jaipur, Paris et Essaouira. Parce que j'ai aussi un lieu à Essaouira et je répartis mon temps comme ça.

  • Speaker #0

    Parce qu'en plus, de ce que j'ai compris, tu as ton conjoint qui est en Inde, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà. Du coup, mon conjoint que j'ai rencontré en Inde est indien. Et donc, c'est lui qui dirige Villa Kiran, en fait, notre atelier de confection à l'époque. Donc,

  • Speaker #0

    tu ne vas pas deux fois par an en Inde ? Tu es vraiment beaucoup là-bas ?

  • Speaker #1

    Ah non, non. Alors... Il y a eu des époques où j'avais encore ma fille qui était à la maison. Donc là, je faisais beaucoup, beaucoup d'aller-retour. maintenant j'y vais Effectivement, deux fois par an, mais quand j'y vais, je reste trois mois.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Au niveau trajet, c'est deux fois par an, mais je reste longtemps. Oui, j'ai vraiment plusieurs vies en une.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te plaît tant ? Tu disais, c'est marrant, ce n'est pas forcément la spiritualité, la joie, etc. C'est toi plutôt, c'est le savoir-faire qui t'a tapé dans l'œil ?

  • Speaker #1

    Moi, c'est vraiment l'artisanat, les couleurs. Oui, alors il y a aussi la spiritualité, ça en fait partie, mais ce n'est pas ça vraiment qui… Ce qui m'a frappée, c'est l'artisanat, le fait que tout soit possible et en même temps que tout est complètement impossible, parce que c'est vraiment très difficile de travailler en Inde quand on a des deadlines, des contraintes de qualité, etc. Et pourtant, tout est possible, tout prend forme, tout naît sous nos yeux. Ils ont vraiment un savoir-faire qui est vraiment extraordinaire et sans limite.

  • Speaker #0

    Oui, toi, tu as ton propre atelier de confection, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, nous, on a eu très vite notre propre atelier de confection. Alors, au début, on a travaillé avec des petits ateliers et un sous-traitant. Et à un moment où on avait besoin d'un peu plus de production, on lui mettait un peu la pression. Et en fait, vraiment concrètement, un soir, on rentre du restaurant et on passe devant cet atelier en moto et je vois de la lumière. Et je dis donc à Banu, mon conjoint. « Regarde, ils ont oublié d'éteindre la lumière. » Et il me répond « Non, ils travaillent. » Je lui dis « Mais comment ça, ils travaillent ? » Il me dit « Tu as vu l'impression que tu leur as mis aujourd'hui ? Il faut qu'ils les finissent, ces robes. » Parce qu'à l'époque, on faisait des vêtements. « Il faut qu'ils les finissent, tes robes. » Donc, ils travaillent la nuit. Je lui dis « Non, mais ce n'est pas possible. » « Mais moi, je ne savais pas. » Et là, c'est à ce moment-là que je me suis dit « Non, alors moi, je veux un atelier. Je veux des employés salariés. » puisqu'en Inde, les employés sont tout le temps payés à la pièce. jamais, jamais salarié. Et moi, j'ai dit, voilà, je veux notre lieu, je veux des salariés, des gens dont on prend soin. Je ne veux pas qu'on travaille la nuit. S'il y a plus de travail, il y aura plus de salariés. Voilà, et vraiment, j'étais complètement naïve, mais c'est vraiment ça qui se passe en Inde et pas qu'en Inde. Et moi, j'ai dit, ah non, non, mais moi, ça ne m'intéresse pas du tout d'avoir une collection. Je ne me sentais vraiment pas à l'aise avec le fait que... Il y avait des gens qui bossaient toute la nuit pendant que nous, on allait dormir pour que le lendemain, on ait notre marchandise. Et donc, on a pris la décision à ce moment-là et on a monté d'abord un tout petit atelier avec un employé et puis quelqu'un qui faisait la couture, notre master. C'était le tout premier qu'on a débauché en fait parce qu'il était très, très mal payé, mal traité dans cet atelier avec lequel on sous-traitait. Donc, au début, on n'avait que lui. Et puis, on avait un homme un peu à tout faire, qui rangeait, qui coupait les fils, qui repassait. Et au début, on a commencé comme ça, vraiment tout mini. On a loué un petit studio. Il y avait deux mini pièces, une avec les tissus et une avec la machine à coudre et la table de couple.

  • Speaker #0

    Mais au moins, ils travaillaient dans de bonnes conditions.

  • Speaker #1

    Ils travaillaient dans de bonnes conditions. Pour moi, c'était évident. Mais encore une fois, j'étais très, très naïve. J'étais ignorante, en fait, sur le sujet. et Pour moi, c'était vital. Et depuis,

  • Speaker #0

    tu as grossi avec toujours, il y a toujours ces bonnes...

  • Speaker #1

    L'atelier a vraiment grandi. On s'est installé vraiment dans une villa l'année dernière. Donc là, ça dépend des moments, mais on est jusqu'à 5-6, plus les 5-6 qui cousent, plus les personnes qui coupent les fils, etc. Et en fait, chaque fois qu'on est à plus de travail, on rachète une machine et on recrute. Voilà, et moi, mes employés ont leur dimanche. Alors, je sais qu'ici, on va me dire, il faudrait deux jours, mais déjà en Inde, 95% des gens n'ont pas de dimanche, n'ont pas de jour de congé. Donc, moi, ils ont un salaire, des dimanches, quand ils doivent pas, ils ont des congés pour les fêtes, il y a différents festivals toute l'année, c'est très important. En Inde, Diwali, Holi, etc. Et oui, pour moi, c'est une évidence. C'est ça ou rien. C'est-à-dire, si je n'avais pas pu faire ça, Moi, ça ne m'intéresse pas de... de produire dans des grandes usines. La question ne s'est jamais posée, en fait.

  • Speaker #0

    Et tu accompagnes les femmes aussi, particulièrement, je crois ?

  • Speaker #1

    Alors, oui. On essaie de recruter des femmes. Moi, mon rêve, au départ, c'était un atelier de femmes. On a même monté une ONG. On voulait monter un atelier où on formait des femmes veuves, parce que les veuves, en Inde, ça pourrait durer des heures. La condition des femmes en Inde, mais en particulier les veuves sont rejetées de leur famille, etc. Et souvent avec leurs enfants. Donc, vraiment, moi, j'avais l'intention de monter un atelier avec des femmes veuves, de scolariser les enfants, plein, plein de bonnes intentions. C'est très, très difficile. La culture indienne, les traditions indiennes, c'est très difficile. On arrive avec tout. nos bonnes idées, mais c'est vraiment très compliqué à mettre en application. Donc ça, on n'a pas pu le faire. Moi, chaque fois que je peux, j'essaye de recruter des femmes. C'est très compliqué parce qu'elles viennent à l'entretien avec leur mari et en fait, c'est le mari qui décide ou pas. Souvent, elles ne peuvent pas sortir de la maison, donc on va les embaucher et puis dès qu'il y a un festival ou quelque chose, elles vont dire aujourd'hui, je ne viens pas, mais en fait, elles ne viennent plus pendant 15 jours. parce que Elles ont des obligations familiales qui sont bien plus importantes que celles qu'on peut avoir nous en tant que mère de famille ou épouse ici en France. Et du coup, recruter des femmes, c'est assez compliqué. Mais j'essaye toujours, je m'acharne, elles partent et puis j'en recrute d'autres, etc. Dès qu'elles ont des bébés, en général, elles partent, elles ne reviennent plus. Parfois même, on recrute des jeunes filles qu'on forme et puis à un moment, il faut qu'elles se marient. Et quand elles se marient, elles ne reviennent plus. Mais quand même, je continue parce que ce peu de temps qu'on leur donne d'indépendance, de valorisation de leur personne, c'est toujours ça. Peut-être qu'elles reviendront un jour. Et puis, en parallèle, on travaille pour le coup, là maintenant, avec une ONG qui est dans un village à côté de Jaipur, où ce sont vraiment toutes les femmes du village qui travaillent, qui viennent à tour de rôle. Donc, encore une fois, on leur donne des tâches sur lesquelles on n'a pas vraiment de deadline. Par exemple, nous, il y a des pompons souvent aux quatre coins de nos coussins. Donc, on va leur commander des pompons, mais ça peut être dans 15 jours, mais on sait qu'on a suffisamment de stock pour tenir 2-3 mois. Parce qu'ils nous disent dans 15 jours, mais s'il y a un festival ou quel que soit, un décès, il y a trois femmes, parce qu'elles sont souvent de la même famille, qui vont disparaître une quinzaine de jours et qui ne vont pas venir travailler. Donc, on essaye le plus possible de faire travailler cette association. Et puis, peut-être qu'un jour, on arrivera vraiment à en créer une, mais ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air.

  • Speaker #0

    Vous avez votre propre atelier de confection et tu travailles aussi avec des ateliers familiaux pour d'autres techniques ?

  • Speaker #1

    Alors, nous, notre atelier est un atelier de confection. C'est-à-dire qu'en fait, nous, on n'achète que du tissu blanc brut, soit qu'on fait teindre. Donc là, pareil, on travaille avec un atelier, un tout petit atelier où toute la teinture est faite de manière artisanale. Soit on le fait imprimer au block print, c'est la grosse majorité de nos collections. Et là, on travaille avec deux, trois ateliers qui sont effectivement des petits ateliers familiaux qu'on connaît ou on connaît tout le monde. Là, par exemple, l'impression est arrêtée pour trois semaines. C'est assez dramatique pour nous, pour notre réassort. Mais le fils se marie. Donc, pendant trois semaines, ils ont tout arrêté. Mais je suis invitée au mariage. Ce serait magnifique, mais ça ne va pas me donner mon stock de tissus. mais voilà donc on a effectivement nos petits ateliers de sous-traitants pour des métiers qu'on ne fait pas nous. Parce que nous, vraiment, Villa Kiran, c'est la confection, donc la couture en fait.

  • Speaker #0

    Oui, d'accord. Ok, je comprends. Et qu'est-ce qui est le plus complexe dans la fabrication artisanale en Inde ? Tu nous l'évoquais rapidement tout à l'heure. Qu'est-ce qui est difficile, dont on ne se rend pas compte, nous, tu vois ?

  • Speaker #1

    Alors, par exemple, le block print en soi. Donc, le block print, c'est moi, je vais dessiner un pattern, un motif. qu'on va faire graver sur des blocs en bois. Donc ça, c'est déjà un intermédiaire. Donc ça, c'est un tout petit atelier. Enfin, c'est deux messieurs qui gravent sur les blocs en bois, père et fils. Ensuite, on a la partie impression. Donc la partie impression, elle est compliquée parce que nous, ici, nos clients sont ravis d'avoir un tissu imprimé à la main. C'est génial. Là, c'est toujours une pièce unique, en fait. Et pourtant, ils ne sont pas prêts à avoir les petits défauts qui vont avec. C'est-à-dire qu'en fait, au moment où le tampon tremble dans l'encre, quand il le soulève, il peut y avoir une petite goutte. Si l'encre est un tout petit peu trop liquide, ça peut faire des petites gouttes sur le motif. La plupart de nos tissus, ce sont des pigments naturels. Donc, on n'a jamais deux fois exactement le même ocre. Le fond de nos tissus écrus, ce sont des noix, je ne sais plus le nom en français d'un arbre, des noix qui sont broyées. C'est une macération et en fait, le tissu blanc est teint dans ces noix qu'on macérait et ensuite séchées au soleil. Donc, en fonction de s'il y a plus ou moins de noix, est-ce qu'elles sont plus ou moins grosses, ils ne vont pas les compter, ils ne pèsent pas. C'est tout fait de manière très instinctive, aléatoire. Et donc, s'il fait très chaud ce jour-là, s'il y a du vent, s'il fait humide, le tissu va mettre une demi-heure ou est-ce qu'il va mettre une heure à sécher. Ça ne sera jamais exactement le même fond de tissu. Donc, on va d'un écrut très clair à un beige clair. Mais c'est quand même une nuance. Alors, en Inde, ils disent tout le temps, « Mais madame, c'est 20% difference, not big problem. » Oui, non, si. Pour moi, dans l'absolu, c'est vrai que ce n'est pas un problème vital. Mais pour nos clients, nous, on shoot le produit une fois. Moi, je ne peux pas le shooter à chaque fois qu'il revient, etc. Donc, on a un vrai problème sur, effectivement, les couleurs. C'est-à-dire qu'on va valider des couleurs, on va faire des essais, des tests. L'imprimé est parfait, mais on a une chance sur un million que ce soit exactement le même qui sorte en prod. Parfois, ça va être exactement le même. Ce sont des pièces de 10 mètres de tissu. On peut avoir quatre pièces dans la journée, ils vont imprimer quatre pièces exactement le même. Celle du lendemain, ce n'est pas exactement le même. Donc, c'est ça qui est vraiment très difficile dans la partie block print. Et puis, ce qui est compliqué en Inde à gérer, ce sont les délais. Il y a un rapport au temps qui n'est pas du tout le même que nous, un rapport à ce qui est grave qui n'est pas du tout le même que nous, mais vraiment pour tout. En Inde, ce n'est pas grave de mourir. Alors, livrer un tissu trois semaines en retard, ce n'est vraiment pas grave en fait. Et nous, c'est vraiment ça qui fait que c'est très compliqué d'avoir vraiment un mode artisanal de fabrication en Inde et un client final qui est français, européen et qui a des attentes.

  • Speaker #0

    Et comment tu arrives justement à concilier ces exigences du marché, la qualité, les volumes, les délais, etc. ? Il faut que tu t'adaptes en fait.

  • Speaker #1

    Il faut qu'on s'adapte, qu'on s'apparte. Il ne faudrait pas se stresser. Alors, nous, ne se stresse pas. Mais pour ne pas se stresser du tout, il faut être née en Inde, avoir grandi en Inde. Moi, ce n'est pas le cas. Je suis fille d'un industriel et d'une commerçante. Donc, effectivement, le stress et la pression, c'est mon quotidien. Donc, c'est très compliqué. Il faut vraiment prendre sur soi. Après, c'est une leçon de vie. Moi, c'est la vie que j'ai choisie. comme toute vie qu'on choisit, il y a des avantages et des inconvénients. Mais c'est loin d'être quelque chose de facile. Il faut s'y prendre en avance, mais on n'est jamais assez en avance. En fait, il faudrait qu'on soit très, très en avance de deux, trois collections au moins pour se dire, c'est quoi, ça va sortir en été 27. Si on ne l'a pas cette semaine, on l'a l'année prochaine. Sauf que nous, on est sur un circuit très, très, très court. On court après le temps, puisqu'à chaque fois, on se dit, on va y arriver, on va prendre de l'avance. Mais on vend plus, donc on a du réassort. Donc, ça nous mange le temps sur notre avance. Mais je pense que ce serait le seul moyen d'être un peu moins stressé. Ça serait d'avoir énormément d'avance. Du coup, le retard serait relatif. On y arrivera peut-être un jour.

  • Speaker #0

    Dans un monde idyllique, qu'est-ce qu'il faudrait faire pour pouvoir faire changer les choses ? On ne peut pas.

  • Speaker #1

    Ah non, rien. Changer, non. Et encore, d'être sur place, d'avoir... vraiment un responsable de la production, Banu, qui est 100% indien, mais qui, au bout d'huit ans, a quand même un petit pourcentage de France en lui, qui comprend nos exigences, qui comprend que quand on demande quelque chose, déjà, ce n'est pas en tant que personne que je le demande, c'est pour mes clients, et que ce n'est pas juste parce que je fais une chrisonnaire. C'est vraiment la cliente au bout qui a besoin d'un produit comme ci, comme ça. Et déjà, d'avoir quelqu'un qui est entre deux cultures, qui dirige tout ça, je pense que c'est déjà... vraiment extraordinaire. Après, non, on ne change pas. Moi, je croise pas mal de créatrices dans ma vie à Jaipur. Parfois, vraiment, elles sont... On a l'impression qu'elles viennent en Inde parce qu'elles viennent dix jours. Elles arrivent, rien n'est prêt, rien n'est comme elles voulaient, rien ne va, mais rien ne va. Et souvent, c'est très, très difficile à vivre. Et moi, je leur dis tout le temps, mais si tu ne peux plus produire, si tu n'y arrives plus physiquement, si ce n'est plus possible... va produire ailleurs, parce qu'ici, ça ne changera pas. On ne les changera pas. On est qui pour changer les gens ? Et puis, c'est nous qui sommes allés là-bas. Ils n'ont rien demandé, en fait. Donc, on va là-bas, on ne change pas les gens, on s'adapte et on essaie de trouver un mix, un mode de fonctionnement qui peut satisfaire notre client final, mais qui est complètement adapté.

  • Speaker #0

    Et toi, tu n'es pas tentée par... Pour bouger ou changer ? Non,

  • Speaker #1

    moi, si ça doit être fait, je ne sais pas, en Chine, sur des machines, moi, ça ne m'intéresse pas. Je ferai un autre métier. J'ouvrirai un food truck, je ferai des samosas, mais ça ne m'intéresse pas. Non, moi, qui râle, m'intéresse si ça reste 100% artisanal, si on respecte les gens, si on maîtrise la façon dont c'est fait. Si je continue, moi, de traîner dans des ateliers toute la journée où il fait 45 degrés et ça m'épuise et j'adore ça. C'est la vie qui m'intéresse derrière la marque. Si demain, on a des investisseurs qui nous disent qu'il faut tout délocaliser, je ne sais pas où. Non.

  • Speaker #0

    Comment tu vois l'évolution du marché, on en parle beaucoup avec la mode, entre la fast fashion et l'artisanat ? Donc la phase déco et l'artisanat, parce que tu as en face des marques de linge de lit qui n'ont pas tous ces inconnus.

  • Speaker #1

    C'est certain. De l'inclus, pardon. Globalement, même en mode, etc. Nous, on continuera. Je pense qu'il y aura toujours... Je pense que chacun a ses clients et que ce n'est pas grave. Il faut juste que nous, les petits, ceux qui travaillons vraiment avec l'artisanat, on en ait assez pour survivre. Je pense que ça passe par venir le raconter ce matin à toi et à tous ceux qui écouteront. C'est vraiment ça, c'est essayer chaque jour de poster des vidéos où on voit des block prints, ou expliquer comment sur le site expliquer ça, mais parce que les gens ne vont pas forcément lire, mais qu'on répète sur chaque produit que ça a été imprimé à la main, etc. Et puis, c'est un peu comme une mission. Et moi, j'ai vraiment cette mission. de défendre l'artisanat, de protéger cet artisanat et d'expliquer que Kiran, c'est de l'artisanat et d'espérer pour voir en vivre. Mais moi, je ne lutte pas contre la fast fashion. On ne peut pas, en fait. Et puis, peut-être qu'il y a des gens sur leur canapé qui ont un coussin de fast fashion. On ne va pas donner de nom de fast home collection. et qui ont un coussin Kiran par-dessus, parce que peut-être qu'ils n'ont pas les moyens d'avoir trois coussins Kiran et qu'ils vont acheter deux unis dans une enseigne et un imprimé. Et ce n'est pas grave, c'est le monde d'aujourd'hui, encore une fois, comme tout, il faut qu'on s'adapte, qu'on fasse notre place, mais pas forcément en luttant contre les autres, plutôt en essayant de valoriser ce qu'on a nous.

  • Speaker #0

    Et pourquoi le consommateur a du mal à percevoir le travail fait main ou à se pencher vers des marques ? C'est encore lent à arriver.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'aujourd'hui, le consommateur est complètement perdu. Quand il essaye de s'informer, il est désinformé parce qu'on lui raconte n'importe quoi.

  • Speaker #0

    Il raconte n'importe quoi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas. En ce moment, il y a beaucoup de... Non, je vais être obligée de citer des marques.

  • Speaker #0

    Non, mais sans se crier.

  • Speaker #1

    On sait sur Chine et compagnie. Et on va avoir Zara qui raconte que ce que fait Chine, c'est horrible. Mais Zara, ils font la même chose. En fait, c'est ça. Et les gens croient ce qu'on leur raconte. Bien sûr, Chine, c'est horrible. Mais il y en a plein d'autres, des marques avec des noms, des marques qui vendent cher et qui ont exactement le même mode de production. C'est moins de quantité. Moi, je les vois passer, les créatrices en Inde. Voilà, je vois où elles fabriquent. Dans des ateliers où ils bossent la nuit, où ils sont, moi je connais un couple d'indiens, ils sont à la tête d'une boîte où ils ont 7000 employés, ils ont 7000 machines à coudre. Donc je ne citerai pas les marques qu'ils fabriquent chez eux, mais c'est des marques qui parlent d'artisanat, qui disent moi quand je vais en Inde c'est mon pays de cœur. Voilà. Je parle parfois avec des créatrices et je leur dis, est-ce que tu as une idée du salaire moyen ? De combien est payé le gars qui est derrière la machine à coudre, qui fait ta robe ou ton coussin ? Elles n'en ont aucune idée, les gens n'en ont aucune idée. Parce que ce n'est pas leur problème. Elles viennent en Inde, elles veulent avoir le produit qu'elles veulent. Et puis elles tirent, elles grattent le prix parce qu'il faut qu'il soit le moins cher possible pour faire plus de marge. Parce que c'est très dur pour les marques aujourd'hui de survivre. Donc moi, je peux le comprendre. Mais quand je dis voilà la désinformation, c'est que ces gens-là vont dire moi je travaille dans un petit atelier familial. Mais ce n'est pas vrai, ça part la nuit, c'est fait par je ne sais pas qui, elles n'en ont aucune idée. Et de toute façon, si la production devient très importante, c'est-à-dire des marques qui vont vendre à 200 revendeurs, ça ne peut pas être artisanal et ils ne peuvent pas maîtriser, c'est impossible. Et le consommateur, il croit ce qu'on lui raconte. C'est normal, ça me paraît normal. Il s'informe, on lui dit quelque chose et il le croit.

  • Speaker #0

    Et le consommateur aussi, il n'a pas forcément le budget. Le fait main implique aussi un prix qui est un petit peu plus conséquent. Comment tu défendrais, toi, justement, ce prix ? Comment tu expliquerais aux gens qu'il faut, de toute façon, si c'est artisanal, ce sera forcément un peu plus cher ? Est-ce que le consommateur, il est prêt à l'entendre ?

  • Speaker #1

    Ben, certains, oui. D'autres l'entendent, le comprennent et pour autant, on n'en a pas les moyens. Mais nous, on le voit et c'est beau. Moi, j'ai des clientes fidèles depuis le début de Kira, mais qui achètent très, très peu. Mais c'est parce qu'elles veulent vraiment un coussin ou elles vont acheter la paire de rideaux, mais elles vont mettre six mois à se décider. Et moi, je trouve ça très touchant parce que dans ces clients-là, on sent une vraie conviction, un vrai parti pris. Donc, ce n'est pas forcément lié, bien sûr, c'est toujours lié aux moyens et à l'argent qu'on peut y consacrer. Mais voilà, moi, je pense qu'il faut informer les consommateurs. Et je pense encore une fois qu'ils peuvent, voilà, ils sont intelligents. Les gens sont intelligents et ils peuvent faire la part des choses. Ils comprennent. Nous, notre mission, c'est de leur montrer, leur expliquer, leur montrer la main, la main de l'homme, entre guillemets. Moi, je le fais beaucoup. Parce que nous, on a aussi des employés ou des sous-traitants qui ne veulent pas être filmés, mais on voit leurs mains tout le temps, on demande l'autorisation de leurs mains, parce que c'est ça qui est important. Et voilà, nous, chaque produit est créé par les mains de quelqu'un, de plusieurs personnes. Et c'est ça qui est beau. Et j'espère qu'on arrive à toucher le consommateur, en tout cas une partie des consommateurs, et qu'ils comprennent que voilà, leur objet est unique. Nous, il n'y a pas deux coussins. identiques, puisque d'un bout de tissu à l'autre, c'est vraiment la façon dont ça a été tamponné. Tout ce qui est tissu uni a été tissé à la main, teint à la main. Donc, nous, on répète, on montre, on explique et on espère que ça peut faire son effet sur plusieurs personnes. Aujourd'hui, les gens veulent beaucoup d'artisanat. On parle beaucoup de Made in France. Oui, c'est très bien, le Made in France. Je pense que peu de gens peuvent s'offrir le Made in France dans tous les domaines, que ce soit des meubles, du textile, des bijoux, en fait c'est très compliqué. Et puis, moi je fournis du travail à des êtres humains et j'estime qu'un travailleur français ou un travailleur indien mérite d'avoir un salaire et de nourrir sa famille de la même manière. Donc le Made in France c'est très très bien, mais moi je suis très très fière. d'avoir du Made in India. Ce n'est pas une maladie, ce n'est pas une part en fait.

  • Speaker #0

    Tu as un engagement éthique et aussi durable. Donc les matières sont naturelles, tu le disais.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et les pigments aussi sont naturels.

  • Speaker #1

    Oui, alors les pigments, une grosse majorité de nos pigments sont naturels. Il y a une grosse partie de notre collection, tout ce qui est ocre, noir, brun, etc. C'est tout fait à partir de... De pigments naturels, de macérations, de graines broyées. Donc, on est vraiment sur des pigments naturels.

  • Speaker #0

    Et tu fabriques en petite quantité, mais pas à la commande.

  • Speaker #1

    Non.

  • Speaker #0

    Tu as quand même un petit stock pour pouvoir répondre.

  • Speaker #1

    Alors, nous, on imprime. En fait, c'est surtout sur les imprimés que le stock est compliqué à gérer. Parce que c'est quand même bien qu'on commande 500, 600 mètres d'un coup. pour être sûr d'avoir quand même... que ce soit imprimé au même moment, à la même saison, par rapport à ce qu'on disait tout à l'heure, au temps de séchage, etc. Et après, on fabrique les produits. Donc, nous, on est tout le temps en flux tendu parce qu'au fur et à mesure que Kirane se développe, qu'on a de plus en plus de clients, il faut qu'on recrute. Donc, on court en permanence. On fait du sur-mesure, très rarement, mais pour des décorateurs, etc., quand même sur des petites commandes. Et on court après le temps, tout le temps.

  • Speaker #0

    Et tes chutes de tissus, pareil, tu les transformes ?

  • Speaker #1

    On a très peu, en fait, des chutes parce que... Alors, moi, je fais les plans de coupe. Moi, j'ai une formation de styliste modéliste. Donc, la taille des coussins, la taille des rideaux, dans un sens, dans l'autre, pour avoir le moins de déchets possible. Et puis après, si on a une bande, par exemple, sur les sofas cover, on a une bande de 25 centimètres qui n'est pas utilisée. Ça, on le quilt, on le surpique. C'est avec ça qu'on fait nos trousses de toilettes. Donc, en fait, et moi, je l'aurais appris. Sous la table de coupe, on a plusieurs poubelles qui sont par taille de tissu. C'est-à-dire vraiment les tout petits bidules. Ça fait vraiment, c'est la poubelle. Vraiment, mais c'est mini. Et puis, les petites pièces de tissu, ça peut faire des patchworks, etc. Les moyennes pièces. Donc, on a des tailles de poubelle, en fait. Et moi, à chaque fois que je retourne en Inde, je récupère ces cartons. Et je dis, bon, OK, avec ce carton-là, qu'est-ce qu'on va faire ? Est-ce qu'on peut faire des patchworks ? On a un concept store à Jaipur. Là, les patchworks un peu plus aléatoires. Nous, on peut faire des produits qu'on vend dans le concept store. On fait des étuis à lunettes, des petits porte-monnaies. Souvent, on envoie en cadeau dans les commandes qu'on ne vend pas forcément. Mais on n'a presque pas de déchets. Vraiment le moins possible.

  • Speaker #0

    Et comment tu fais face ? aux défis écologiques en Inde, les matières, la teinture, le transport ?

  • Speaker #1

    Moi, à mon échelle, faire face, c'est difficile. Voilà, nous, on se dit que le fait déjà d'avoir le moins possible de déchets, et nous, on le voit, les déchets, c'est énorme. Après, on ne peut pas lutter sur le contre. Le fait que, voilà, ça part par avion. Nous, on ne travaille pas avec des containers, parce qu'on a des petits stocks et des délais restants. donc On fait au mieux, quoi. Chacun fait au mieux. Moi, j'essaie de...

  • Speaker #0

    On ne peut pas être sur tous les fronts.

  • Speaker #1

    On ne peut pas être sur tous les fronts. Et puis, en Inde, il y a un vrai sujet là-dessus, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pour ça que je te pose la question.

  • Speaker #1

    Oui, mais le site... Les citoyens sur l'eau, moi je leur apprends, par exemple, l'eau, on a un jardin, la personne qui arrose le jardin, quand ce n'est pas moi, parce que j'adore le faire moi, mais il peut laisser le tuyau, puis il s'en va, il va faire autre chose complètement, et il revient, c'est complètement noyé. Je leur explique que l'eau, ce n'est pas éternel. Pour eux, ça vient de sous le sol, donc ça va être pour toujours. Les ordures en Inde, le recyclage, enfin... Ils vont ouvrir, tu étais en voiture, et tu vois le gars d'à côté, il ouvre sa fenêtre, il lance sa bouteille d'eau. Ce n'est pas des scènes rares. Donc, il y a un vrai sujet, vraiment écologique. Moi, je dis tout le temps, si j'avais un engagement écologique, quel qu'il soit, je ne resterais pas à me battre en France pour les poubelles vertes ou jaunes. J'irais en Inde, j'irais en Afrique, parce qu'ils sont beaucoup plus nombreux. strictement rien compris. Ils en sont au balbutiement de tout ça. Ils pensent qu'en jetant un papier par la fenêtre, comme on ne le voit plus, il disparaît. Et c'est nous, il y a 50 ans. Et il y a un vrai sujet, il y a un vrai enseignement. Mais dans les écoles, ils commencent maintenant à les sensibiliser là-dessus. Donc, c'est le tout début, mais il y a du boulot.

  • Speaker #0

    En termes de création, c'est toi qui imagine toutes les collections textile. Surtout, tu fais les motifs, les dessins.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Comment tu t'épargnes ?

  • Speaker #1

    Je suis styliste, illustratrice. C'est mon métier.

  • Speaker #0

    Ah, illustratrice.

  • Speaker #1

    Oui. Moi, au départ, j'ai fait la formation S-MOD en mode enfantine. J'ai commencé ma carrière chez Petit Bateau. Moi, je dessinais des petits nounours, des petites fleurs, etc. Là, pour le coup, j'étais styliste et illustratrice. On faisait les deux. Moi, dessiner, c'est toute ma vie dessiner. Malheureusement, en tant que chef d'entreprise, je dessine beaucoup moins que ce que j'aimerais. Mais effectivement, je dessine tout, les motifs, les modèles. Certains motifs existent parce qu'il y a des... milliers de blocs chez nos imprimeurs et ils sont très jolis. Donc, voilà, moi, je vais me promener dans un atelier et puis aller fouiller dans les blocs et dire, ça, c'est quoi ? On l'essaye. Et parfois, le graphisme est super beau, mais ce sont toujours nos colorations. Voilà, nous, on n'achète aucun tissu déjà imprimé. Donc, certains blocs existent. Il y a des motifs vraiment traditionnels qui existent. Et puis sinon, moi, je dessine et on donne à graver.

  • Speaker #0

    Donc plusieurs fois par an, tu marches par collection, c'est selon ton inspiration ? Comment tu germes tes idées ?

  • Speaker #1

    Ça vient des voyages, j'ai plutôt un problème de trop d'idées que pas assez. Comment les canaliser, comment les faire entrer dans des collections ? Les motifs, c'est un peu tout le temps. C'est-à-dire que moi, je vais dessiner, je ne sais pas, je vais voir n'importe quoi, un papier peint, une expo, un papier peint ancien. N'importe quoi, une assiette vintage dans un restaurant, ça me donne une idée de fleur de motif et je vais dessiner tout le temps. Je dessine pas mal dans l'avion, dans les transports et je fais faire des blocs. Je dessine l'imprimé et je fais faire des blocs. Je vais décider que celui-ci va être en trois couleurs, quatre couleurs. Donc c'est un bloc par couleur, un tampon par couleur et je fais faire les blocs. Il y en a plein qu'on n'a jamais utilisé, qu'on utilisera peut-être un jour. Mais on est prêt, j'ai un peu ma bibliothèque de blocs, en fait, et de motifs. Et puis après, on se dit, tiens, j'ai envie d'une grande fleur. Ah, j'en avais dessiné une. Bon, pour cet hiver, elle va être plutôt dans les tons de brun. Et on fait des essais de couleurs. Mais sur ce qui est des motifs, ce n'est pas très saisonnier. On ne dessine pas des flocons de neige. Voilà, donc en fait, ça peut être toute l'année. Et c'est surtout la coloration qui détermine la saison.

  • Speaker #0

    Comment est réparti ton travail ? J'allais dire tu dis dans les transports, mais plutôt là-bas ou ici. Comment est organisé ton travail selon ce que tu fais en Inde et ce que tu fais en France ?

  • Speaker #1

    Mon travail est désorganisé, totalement désorganisé. Déjà parce qu'en Inde, l'organisation n'existe pas. Parce qu'en fait, on va se lever le matin et décider qu'on va faire ça, ça. On a un rendez-vous, machin, et puis tout change. Le rendez-vous s'annule. D'un coup, il y a une énorme averse, c'est trempé, tout est noyé, on ne peut plus partir. Donc ça, c'est la vie en Inde. Donc en Inde, tout est désorganisé. Je rêve d'avoir un planning. J'entendais un podcast où il disait que le vrai truc, c'est vraiment le planning. Il n'y a que comme ça que tu t'en sors. C'est pour ça que je ne m'en sors pas. Moi, je ne peux pas. Alors, j'arrive à faire ça. Les périodes où je suis en France, c'est un peu plus possible. et encore que... Pas vraiment parce que, ben voilà, ce matin... J'ai couru pour arriver ici alors que je pensais avoir du temps, mais en fait, il y a eu un souci à l'atelier. Donc, moi, quand je me réveille à 6h du matin, il est 10h30 déjà, donc ils sont déjà en train de bosser. Donc, il y a déjà plein de... Quand je me réveille, il y a déjà une liste de... Il s'est passé plein de trucs. Il y a plein de problèmes. Il n'y a plus de fil pour ça. Il n'y a pas ci, il n'y a pas ça. Il y a le tissu qui n'a pas été livré. Il y a FedEx qui n'est pas venu chercher les colis. Et donc déjà ça, ça me décale, même si je m'étais dit, oh tiens, aujourd'hui, je vais faire mon petit podcast, puis après, ta-ta-ta, ben voilà. Donc je suis très désorganisée. Quelqu'un m'avait dit un jour que j'étais éparpillée. Je trouvais ça joli, c'est assez vrai. C'est un joli mot.

  • Speaker #0

    Ça ne t'empêche pas d'avancer, de travailler chacun sa méthode.

  • Speaker #1

    C'est des tout doulisses que je ne suis pas. J'ai beaucoup trop de choses à faire, c'est beaucoup. Donc il n'y a pas de... Voilà, j'essaye... C'est pour ça que je dis que je dessine dans les transports, parce que dans l'avion, personne ne m'appelle. Donc, je suis tranquille. Vraiment, c'est pour dessiner. J'essaye de me trouver vraiment des moments calmes pour dessiner. Ça, c'est important. Et sinon, tout le reste du temps, je fais 10 000 trucs.

  • Speaker #0

    Il y a combien d'heures de décalage ?

  • Speaker #1

    4h30 en hiver, 3h30 en été. Ce n'est pas énorme.

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas énorme.

  • Speaker #1

    Mais c'est suffisant pour, en fait, lorsque je suis en France, me lever très, très, très tôt. Voilà. Ou quand je suis en Inde, travailler avec la France très, très, très tard. Donc, en fait, du coup, ce n'est pas un vrai décalage horaire, mais c'est un décalage horaire qui fait que je travaille 18 heures par jour.

  • Speaker #0

    Voilà. Donc, on disait que c'était une marque décoration textile. Tu fais des plaides, des rideaux, des housses de couettes, du linge de table, des coussins, des pareos, des cabas, des trousses. Pour l'instant, qu'est-ce qui se vend le mieux ? Est-ce que tu as des genres de bestes ?

  • Speaker #1

    Tout se vend. Et ça dépend des périodes. Là, en période où on arrive à Noël, on va vendre beaucoup de trousses, beaucoup de sacs, parce que c'est des cadeaux. L'été, on vend énormément de pareos, mais on les vend à Noël parce que nos pareos se portent en foulard, parce que ça fait un foulard très aérien, mais qui tient quand même chaud. Là, les housses de couettes, c'est plus en hiver. En période d'été et de Noël, on vend des nappes, parce que ça fait des grandes tables. donc il n'y a pas de... énormément de coussins et les sofa cover mais le coussin c'est vraiment un article où tu vas mettre deux coussins sur ton canapé et limite tu as changé ton salon parce que nos coussins sont quand même très très présents et puis c'est un petit budget on peut s'offrir j'ai

  • Speaker #0

    vu et tu as beaucoup de sofa cover ce qui est canon sofa cover en gros c'est pour mettre sur le canapé mais on peut mettre en bout de lit c'est un genre de boutique on pourrait dire que c'est un édredon

  • Speaker #1

    En Inde, ils les empilent sur les charpoils, dans le Rajasthan on dit les Ausha, mais sur ces lits indiens. Ils les empilent et ça sert de petit matelas. Nous, les nôtres, sommes beaucoup plus légers que vraiment un petit matelas de charpoil, mais c'est un peu salidé. Donc on peut le mettre en bout de lit, ça peut habiller un canapé, ça peut cacher un canapé qu'on n'aime plus, ça peut protéger un canapé des petits doigts au chocolat des enfants. Parce qu'ils sont déhoussables, ils sont lavables. Et c'est un produit qu'on vend vraiment beaucoup.

  • Speaker #0

    Je reviens sur un point qu'on a un petit peu abordé tout à l'heure sur le fait de comment on se démarque avec les autres marques. Mais surtout, j'ai envie de te demander comment va le business ? Tu vois, c'est un peu la crise. Enfin, un peu beaucoup. Comment t'affrontes-tu ? Alors,

  • Speaker #1

    comment on affronte ? Pour tout te dire, moi, il y a un peu plus d'un an, Je n'en pouvais plus. Donc, ma façon d'affronter, c'était de me dire, tu sais quoi, je vais tout arrêter, en fait. Voilà comment j'allais affronter. Et j'ai eu une très grande chance parce qu'un de mes fils, j'ai trois enfants, Justin, m'a dit, maman, n'arrête pas, tu as de l'or entre les mains, il faut qu'on en fasse quelque chose. alors c'est un de mes enfants un peu comme moi, mais ils le sont tous les trois mais un peu hyperactif et un peu touche à tout et il m'a dit moi j'ai du temps à consacrer On s'y met à fond, on redéveloppe, etc. Moi, j'ai écrit RAN, j'avais tout fait toute seule depuis le début. C'est-à-dire que j'avais fait le site, c'était moi qui gérais le site, mais j'ai fait le site toute seule. Instagram, c'était moi. Les lives, c'était Banu derrière la caméra. Et puis moi qui préparais tout le setup, le machin. Et puis je faisais le live. Et puis après, on prenait les commandes et on emballait. C'était 100% nous deux. Et en tout cas, 100% de ce qui était fait en France, le commercial, le machin, c'était moi. Donc c'était un peu trop et en fait on était un peu trop gros pour que ça fonctionne comme ça. Donc il y avait deux solutions, soit je redevenais très petit et en fait je chinais trois parce que moi je suis une passionnée. des tissus anciens, etc. Donc, je tinais trois bouts de tissu, je faisais faire quatre coussins, je les bandais en live et je gagnais trois sous comme ça. Soit on avait une taille critique et il fallait passer au-dessus. Donc là, on est passé au-dessus, on a refait un site, on a des gens qui gèrent la pub, des gens qui gèrent Instagram, même si c'est toujours moi qui suis derrière. En France, on a maintenant un dépôt, un hangar, on gère tous les envois. On est passé, il y a un an, à une autre... taille d'entreprise et un autre mode de fonctionnement, tout en gardant la fabrication artisanale. Donc là, on en est là. Donc, on peut dire que nous, on ne subit pas trop cette crise parce qu'on a augmenté notre chiffre d'affaires et nos ventes énormément en un an. Mais peut-être que si on n'était pas au milieu de cette crise, on aurait explosé en un an. Là, on n'a pas explosé. La bonne nouvelle pour nous, c'est que ça nous permet de grandir et de s'organiser en production derrière, pas à pas. Et ça, c'est super important pour qu'on garde notre ADN et notre mode de production artisanal. Donc, on ne va pas dire qu'on ne subit pas la crise, mais voilà, on vit dedans. De toute façon, qu'est-ce qu'on peut faire d'autre ? Donc voilà, on a changé de structure d'entreprise à ce moment-là. Donc, on a gardé la tête hors de l'eau. Mais c'est du travail acharné. On ne compte pas nos heures et on se fait peur. C'est très, très loin d'être l'opulence. Mais on est content de voir que les gens aiment, les clients sont contents. Ils commandent une fois une petite commande, puis la deuxième commande est plus importante, etc. Le fait d'avoir aussi une petite taille d'entreprise, ça nous permet d'être, même si le consommateur est derrière son écran, on est proche de lui quand même, on le suit. Une cliente qui va avoir un souci, Justin va l'appeler personnellement. Donc, on garde ce côté humain, vraiment. Donc,

  • Speaker #0

    il a intégré un peu l'entreprise ?

  • Speaker #1

    Oui. Et lui, il s'occupe de tout ce qui est marketing, commercial, expédition, etc. Et c'est lui qui gère les pubs, etc. Il fallait du sang neuf. Je suis un peu vieillissante. Et il fallait des trentenaires aujourd'hui dans un business. Voilà.

  • Speaker #0

    Tu te vois où dans dix ans ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas du tout Ailleurs Je serais contente de passer de voir Je ne me vois pas Je ne me vois pas retraitée Alors que pourtant dans dix ans je crois que c'est l'âge de la retraite Donc non je ne me vois pas retraitée Je me vois je ne sais pas ailleurs Peut-être en Inde Peut-être toujours avec Kiran J'adorerais Mais moi j'adorerais être la directrice artistique de Kiran Alors ça c'est mon grand rêve c'est mon grand. C'est-à-dire, en fait, dessiner, m'occuper des collections, mais des prototypes, ne pas gérer. Est-ce qu'il nous refaut 300 mètres de tissu ? On n'a plus de signes. Ne plus regarder les ventes sur le site. Voilà. Alors ça, ça serait mon grand rêve. Et si c'est comme ça dans dix ans, mais il faudrait que ce soit avant, parce que j'avais le craqué avant. Mais ça serait mon rêve. Ou alors complètement autre chose. Je ne sais pas, monter un atelier avec des femmes, un orphelinat, je n'en sais rien.

  • Speaker #0

    Quel conseil tu donnerais à quelqu'un qui voudrait entreprendre, un peu comme toi, dans un projet à impact, entre gros guillemets ? Un projet qui ait du sens. Les jeunes, ils vont arriver avec des projets qui ont du sens, plus que les anciennes générations.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il faut vraiment croire en ses idées. Je crois qu'il faut faire quelque chose qu'on aime. Tu me diras, il y en a plein qui réussissent en faisant des trucs qu'ils n'aiment pas. C'est-à-dire qu'en fait, ils font des projets à partir d'un business plan. On en voit des marques comme ça, que je ne citerai pas, qui d'un coup décollent. Mais parce que c'est quatre personnes autour du table qui se sont dit, comment on va pouvoir gagner de l'argent ? C'est l'exact contraire de ce que moi, je peux faire. Mais moi, je pense que pour être heureux et tous les matins... Parce qu'entreprendre, c'est difficile. Vraiment, on ne compte pas nos heures. En fait, on ne fait que ça. Moi, je ne fais que ça dans ma vie. Donc, je pense qu'il faut aimer ce qu'on fait et croire vraiment profondément en ce qu'on fait et ne pas compter ses heures. Et si on se plante, recommencer. Parce que ce n'est pas grave, parce qu'on aura appris. Et toujours croire en ses rêves. Oui,

  • Speaker #0

    c'est beau. C'est bien. Ça ressemble à quoi chez toi, en fait ? Parce que du coup, tu as deux maisons.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut mettre un S à toi ? Chez toi, les toits. Oui, tout à fait. Alors, j'ai trois maisons. Vraiment, je suis chanceuse. Alors, ça ressemble à quoi chez moi ? À Jaipur, c'est très, très coloré. Un peu trop à mon goût, mais en fait, il y a un an et demi, deux ans, j'ai eu la bonne idée avec Banu, mais c'était surtout mon idée, je ne vais pas l'accuser, le pauvre, d'ouvrir des chambres d'hôtes. Parce que j'avais eu dans ma vie, avec le papa de mes enfants, j'avais eu des chambres d'hôtes dans le Luberon. Et j'adore recevoir, j'adore accueillir les gens, j'adore cuisiner, j'adore parler de ce que j'aime. Donc, on s'est dit, voilà, on va ouvrir des chambres d'hôtes. d'autres à Jaipur et un concept store et ça faisait vraiment beaucoup et donc en fait on est donc un peu freiné des cas de fer et du coup on a emménagé dans nos chambres d'hôtes donc c'est hyper décoré on a plein de serviettes de bain toutes les couleurs toutes les coordonnées machin parce que j'avais fait ça très très très très fini j'ai jamais eu une maison aussi finie puisqu'en fait je vis on vit dans nos chambres d'hôtes donc c'est très coloré c'est très joyeux Mais ça fonctionne bien avec la vie à Jaipur. Donc voilà, c'est une maison joyeuse, colorée, lumineuse. Enfin, de toute façon, l'Inde, c'est lumineux. Moi, c'est ce qui me nourrit, c'est cette lumière tous les jours et cette énergie. Et donc, c'est vraiment un coin coloré, grand, où on reçoit beaucoup. Je fais pas mal de dîners, il y a pas mal de créateurs, créatrices qui passent. Donc, ça parle un peu toutes les langues. On fait des repas. Des grands repas dans le jardin. Voilà, c'est joyeux. Et donc, le rez-de-chaussée, c'est l'atelier. Donc, il y a des bouts de tissu aussi, des cartons. Voilà.

  • Speaker #0

    Génial. Après, la deuxième maison, c'est ?

  • Speaker #1

    Alors, la deuxième maison, c'est Essaouira. Essaouira, c'est un petit riad au cœur de la médina d'Essaouira. Donc, ça, c'est mon paradis. Donc là, c'est plus soft, c'est du tas de lacs, beige, marron, les portes sont noires, c'est plus neutre. Je l'avais fait avant Kiran, donc je l'ai un peu kiranisé. Maintenant, il y a quand même un peu de fleurs et de touches kiran dedans. Mais moi, j'aime aussi beaucoup l'artisanat marocain. J'aimerais vraiment en faire rentrer dans la collection kiran. Donc, j'ai pas mal. Les rideaux sont faits à partir de hikes marocains. C'est aussi une maison joyeuse qui est très grande, où j'aime beaucoup recevoir. J'aime bien qu'il y ait évidemment mes enfants, leurs conjoints, mes petits-enfants, parce que j'ai la chance d'être mamie. Voilà, c'est une maison qui est faite pour ça. Et en haut, sur la terrasse en haut, on a la cuisine et la pièce à vivre et une petite chambre. Et quand j'y suis seule, je ne vis que sur la terrasse, en fait. C'est comme si je vivais sur un appartement un peu en extérieur. Et j'ai toujours un moyen d'être bien quand je suis seule. Voilà, donc ça c'est la partie. marocaine et puis à paris j'ai rénové l'année dernière j'ai eu la chance de trouver trois chambres de bonne dans un état lamentable et j'ai tout cassé tout ça j'adore pas j'ai tout fait casser j'ai pas cassé moi et et fait un très joli petit nid sous les toits à paris et dans lequel je suis vraiment très très bien et où c'est vraiment déconseillé de venir si vous vous faites plus d'un mètre 85. Mais c'est vraiment un petit nid, tout mignon. Et là, c'est des coloris plutôt neutres. Là, j'ai eu besoin d'avoir un lieu neutre, parce que c'est souvent là aussi que je me pose pour dessiner. Donc, c'est calme, c'est neutre. Enfin, tous les marrons, là, c'est comme la table qu'on voit là. Tout dans les tons de beige chocolat, qui sont des tons que moi, j'ai toujours adoré. Très calme.

  • Speaker #0

    Oui. Comment on apporte de la joie dans son intérieur ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en étant heureux. Mais ça, ça ne passe pas par les collections Kira, non ? Alors moi, j'ai eu un moment de ma vie où j'ai décoré, enfin j'étais décoratrice, j'ai décoré des maisons pour des gens. Ce que j'avais le plus de mal à faire, c'était des gens qui me disaient, clé en main, vous décorez tout jusqu'à la petite cuillère et on s'installe. Je trouvais ça très bizarre, j'avais l'impression qu'ils ne s'installaient pas chez eux. Moi, je crois que la joie, c'est ce qu'une maison raconte en fait. Alors moi, je voyage beaucoup, donc c'est rapporter des choses. On peut, sans voyager, aller dans une petite brocante le dimanche, là où on habite, acheter un tout petit objet qui raconte une histoire, avoir un petit truc d'une de ses grands-mères et puis le petit truc d'un de ses grands-pères. Je ne sais pas, un truc des enfants qui va rappeler quelque chose. Moi, je pense que ça passe plus par l'âme qu'on y met, par l'amour des objets. moi j'ai à Jaipur alors à Au Maroc, c'est des meubles que j'ai fait faire, et puis beaucoup de meubles maçonnés, en fait, parce que c'est comme ça qu'on fait au Maroc. Mais en Inde, comme à Paris, on va dire que 90% de mes meubles, c'est des trucs que j'ai chinés, en fait. Et c'est vraiment... J'aime bien, quoi. Mon meuble vasque, c'est une vieille commode, j'imagine. Une mamie qui rangeait ses chaussettes et ses petites culottes. Voilà, moi, j'aime... Je pense que si votre maison raconte une histoire qui est la vôtre, donc pour moi, il n'y a pas de code. Je déteste les... les styles de maisons tout blancs ou tout comme ci, tout comme ça. Je trouve que c'est vraiment... Et si la maison a une âme avec des objets qu'on aime, qui racontent notre histoire, pour moi, c'est une maison joyeuse.

  • Speaker #0

    Et comment on ose le motif ou la couleur ? Ça, c'est plus difficile.

  • Speaker #1

    Oui, alors, c'est difficile pour moi, parce que pour moi, c'est très instinctif. En tant que décoratrice, je me souviens... C'est bien de décider, un exemple précis d'une cliente où on avait décidé de faire toute l'entrée en vert amande. Et puis quand son mari est arrivé le week-end, il lui a dit « mais pourquoi tout ça c'est vert, on refait en blanc ? » Il y a des gens vraiment que ça dérange. Pour moi, c'est très spontané. Je pense qu'il faut se faire confiance, il faut essayer. Il faut faire des choses pour soi. Je crois aussi que ce qui bloque beaucoup les gens, c'est qu'ils se disent « ah, mais s'il y a quelqu'un qui vient, puis chez ma copine, c'est comme ça. d'ailleurs si je fais un dîner il me faudrait une grande nappe une grande de table, alors qu'en fait, combien de dîners ils font par an ? C'est surtout comment il faut se faire confiance, mais pour plein de choses dans la vie, mais aussi pour sa déco, et se dire là, j'ai envie de rose, parce que j'ai vu ça, j'ai envie que ça explose, je vais mettre un petit coussin rose, on n'est pas obligé de peindre les murs en fuchsia. La peinture, pour moi, c'est facile, parce que je trouve que peindre un mur, c'est juste un dimanche, on en a plein dans l'année des dimanches. Et en fait, pour refaire sa pièce, il faut juste un dimanche, si elle n'est pas trop trop grande. Et un dimanche, il y a un pot de peinture et un pinceau. Donc, oser, en fait. Il faut oser, il faut prendre des risques. Et au pire, ce n'est pas grave. On peut offrir le coussin à une copine ou le mettre en vente sur le bon coin et s'en racheter un autre. Donc, il faut que ça tourne. Moi, j'aime bien aussi que les histoires tournent et ne pas se dire, j'ai cette déco et c'est pour 25 ans et ça ne bougera plus.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #1

    Non, globalement, il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser, c'est très agréable à entendre. Dernière question, si tu faisais un dîner sans table, avec six personnes, des personnalités ou pas, connues ou pas, décédées ou pas, qui seraient-elles ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai réfléchi à un dîner de femmes, parce que je fais souvent des dîners de femmes en Inde avec toutes les clés. Tu as envoyé la question hier,

  • Speaker #0

    on va le dire quand même.

  • Speaker #1

    Oui, ça se prépare, parce que sinon...

  • Speaker #0

    C'est la seule question que je... Oui, la seule. En avance. Voilà.

  • Speaker #1

    Alors, spontanément, je me dis Vanessa Paradis. Parce qu'en fait, Vanessa Paradis, c'est une femme de mon âge. Et voilà, qui a toujours gardé sa ligne, qui est joyeuse. Et en fait, on a un peu grandi ensemble. Et je me suis toujours dit que c'était quelqu'un que j'aimerais rencontrer. Qui doit être fort sympathique. Tina Kieffer. Tina Kieffer, parce qu'on en parlait avec l'ONG, les femmes en Inde, etc. Donc, elle a créé l'association, la fondation, je crois qu'on dit, Toutes à l'école. Et elle a scolarisé des centaines de petites filles. Certaines sont devenues des jeunes femmes maintenant au Cambodge. Et qu'en fait, en vrai, quand tu me disais où je voudrais être dans 10 ans, je voudrais être Tina Kieffer. Moi, je voudrais avoir fait un truc comme ça avant de mourir. Je ne sais pas si c'est dans 10 ans ou dans 15 ans. Mais voilà. Donc j'ai... Des milliards de questions à lui poser. Ambre Chalumeau, qui est une jeune femme, parce qu'il faut quand même un peu de sang jeune autour de cette table, qui est une jeune femme qui vient de sortir un premier roman, qui est chroniqueuse, passionnée de littérature. Et quand je l'entends présenter un livre, elle est chroniqueuse et elle a un podcast. J'ai tout le temps envie de le lire. Je trouve qu'elle transmet ça avec une joie naturelle et une passion qui me... qui me plaît énormément. Je n'ai pas du tout le temps de lire dans cette vie et ça me fait du bien de l'écouter. Meryl Streep, parce que pour moi, c'est l'actrice par définition qui a traversé les époques et qui est fidèle à elle-même. Amrita Shergill, qui est une peintre indo-hongroise. qui est née dans les années 20, c'était une peinte dans les années 30. Elle est morte très jeune et elle a beaucoup voyagé. Elle a vécu en Hongrie, puis en Inde, puis à Paris. C'était une femme très moderne pour son époque et qui a réussi à mélanger les cultures. Et ça se retrouve dans sa peinture. Et voilà, elle était féministe, elle était indépendante. Et ça me plaît bien comme idée. Je pense qu'elle aurait vraiment quelque chose à raconter d'intéressant. Elle avait un peu l'âge de mes grands-mères, donc ça serait pas mal. Et puis Françoise Dorgé, la créatrice fondatrice de la marque Caravan. Alors, vous pouvez peut-être trouver bizarre que je parle des concurrents, mais moi, je pense qu'on n'est pas des concurrents. On travaille tous ensemble sur les mêmes marchés. Et Françoise Dorgé, pour moi, elle a tout inventé, en fait. C'est la première qui a ramené l'idée des petits matelas indiens pour en faire des sofas cover. C'était son idée à elle. C'est la première qui a ramené... des tapis marocains, des tentes berbères, et qui s'est dit, on va les mettre dans les appart' des bobos parisiens. Et je pense que toutes les marques de textile, aujourd'hui, on lui doit tout à elle, en fait. Je ne sais pas si nous, on aurait osé le faire, si elle ne l'avait pas fait avant nous.

  • Speaker #0

    C'est smart de lui rendre... C'est très smart de ta part de lui faire ce clin d'œil.

  • Speaker #1

    Oui, mais je trouve que ça, il faut être... Moi, je suis quelqu'un d'assez droit et je trouve qu'il faut être honnête. C'est important, ça lui revient à elle. Après, peut-être qu'on l'aurait fait, peut-être que j'aurais été la première, ça n'aurait pas été elle, mais en tout cas, c'est elle. Et on lui rend, elle n'est plus chez Caravan aujourd'hui, mais ce Caravan d'avant qu'elle a créé à l'époque des... des boutiques, des petites boutiques caravanes et de tout ce qu'elle rapportait. Moi, j'y allais, ça me fascinait. Je n'avais pas mis un pied en Inde. Et puis peut-être aussi parce qu'on aurait des choses à se dire, parce que je pense qu'elle adore l'Inde, qu'elle vit aussi au Maroc et à Paris. Donc, on aurait sûrement des trucs à se raconter.

  • Speaker #0

    Plein de points en commun.

  • Speaker #1

    Voilà. Et si je peux rajouter une septième personne, j'aimerais que ma grand-mère italienne soit là pour que du coup, ce soit elle qui nous prépare les pâtes pour le dîner.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Voilà. Bon, merci beaucoup, Karine. c'était vraiment très sympa d'échanger avec toi c'est marrant toujours une émotion palpable de discuter avec quelqu'un qui travaille avec l'Inde. Je ne sais pas pourquoi, chaque fois ça me fait ça. C'est très fort ce que tu as raconté. C'est vraiment hyper intéressant.

  • Speaker #1

    Peut-être parce que c'est la passion, parce que c'est beaucoup d'amour, beaucoup de passion, beaucoup de patience. Et qu'effectivement, l'Inde, il y a un sujet dont on n'a pas parlé. Je me permets de le faire. Depuis 3-4 ans maintenant, on organise les Tyrannetours. où justement, pour partager cette passion, on accueille dix femmes pendant dix jours à Jaipur et qu'on les promène dans notre vie, dans nos ateliers. Il y a des cours de cuisine, des cours de block print, des cours, des formations, des présentations. On se balade aussi un peu aux alentours de Jaipur, on les emmène à la campagne, dans la famille de Banu en fait, vivre une journée vraiment traditionnelle indienne. Et pour se rattacher à ce que tu disais, je pense que c'est peut-être ça qui est émouvant. C'est que c'est ma vie, c'est ma passion. Et qu'avec les Kirin Tour, on la partage, cette passion.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est qu'un an, quatre fois par an ?

  • Speaker #1

    Non, on l'a fait deux fois par an. L'année dernière, on ne l'a fait qu'une fois. Et cette année, comme on était en pleine restructuration et réécriture de la marque, on ne l'a pas fait. Donc, le prochain sera normalement... en octobre-novembre 2026.

  • Speaker #0

    2026, ok. On peut te contacter. Femme du jour.

  • Speaker #1

    C'est très peu de place.

  • Speaker #0

    Femme du jour, génial. Eh bien, merci beaucoup, Karine.

  • Speaker #1

    Merci, ciao.

  • Speaker #0

    Décodeur, c'est terminé pour aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir écouté en entier. Si vous avez aimé, n'oubliez surtout pas de vous abonner au podcast pour ne pas rater les prochains épisodes et retrouver tous ceux qui ont déjà été enregistrés. N'hésitez pas non plus à le partager en l'envoyant à vos proches qui pourraient être intéressés ou en story Instagram. D'ailleurs, on peut se retrouver sur le compte Décodeur où je poste très régulièrement. Et si jamais vous avez 15 secondes, n'oubliez pas de laisser 5 étoiles ou un avis. C'est juste sous la liste des épisodes. Non seulement ça me fait très plaisir, évidemment, mais dans la jungle des podcasts, plus on a de notes, plus on se fait remarquer, ce qui est très important pour moi. Voilà, merci beaucoup et à tout de suite. très bientôt alors, ici ou ailleurs.

Description

Décoration, design, création, savoir-faire, ces mots vous parlent ? Alors vous êtes au bon endroit !

Attention épisode génial !

C'est l'histoire de Karine qui, pendant un voyage en Inde, a eu un coup de foudre pour l'artisanat et le savoir faire local... mais aussi pour Banu, un indien qui lui faisait visiter un atelier. Elle sait que sa vie est là et avec lui. Ainsi est né Kirane. En très gros résumé car les détails sont évidemment dans le podcast !

Kirane est une marque de décoration textile, sincère et authentique, engagée et profondément humaine. Vous allez en avoir des frissons en écoutant Karine nous raconter son quotidien, entre beauté et galères. Tout est fabriqué à la main, dans le respect des traditions, avec des matières et des pigments naturels et surtout dans de bonnes conditions (Karine a crée "Villa Kirane" son propre atelier de confection dont Banu est responsable). 

 

Ensemble on parle 

  • de l'incroyable histoire de Kirane

  • l'importance pour elle d'avoir son propre atelier 

  • comment elle concilie le travail local versus les exigences du marché 

  • et les ponts entre Jaïpur et Paris 

  • ses plus grosses difficultés au quotidien et comment y remédier

  • la fast déco et les faux discours marketing 

  • la valeur du fait main 

  • les défis écologiques 

  • la joie de vivre et des couleurs 

  • sa passion pour le dessin et le manque de temps pour le faire 

  • la folie des sofa cover

  • la crise et l'avenir 

  • l'importance d'avoir des jeunes dans son équipe 

  • ses 3 maisons si différentes 

  • et bien plus encore !


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Merci beaucoup !   

Hortense Leluc, journaliste déco et fondatrice de DECODEUR  


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous, je suis Hortense Leluc et vous écoutez Décodeur, le podcast dans lequel j'échange avec des pros de la déco. Il y a plusieurs formats d'émissions qui tournent, stylé, archi-cool, le club ou les rencontres comme l'épisode qui va suivre, dans lequel un architecte ou un designer, une marque que vous aimez ou que vous allez découvrir, un entrepreneur ou un créatif va nous parler de sa manière de travailler, de ses produits. de son savoir-faire, sa vision, ses inspirations, bref, de l'envers du décor qu'on ne soupçonne pas toujours. Et c'est ça la force du podcast, on prend le temps, on va plus loin, on décortique, on apprend, on comprend. Il y a une forme d'intimité, de complicité et d'authenticité à laquelle je tiens beaucoup. Merci d'être si nombreux à écouter. Si vous venez de découvrir le podcast, bienvenue. N'oubliez pas de cliquer sur s'abonner pour ne pas rater les prochains épisodes. et si mon invité vous plaît, surtout n'hésitez pas à partager l'épisode en story ou à mettre 5 étoiles, tout ça m'aide beaucoup à me faire connaître encore plus. Bonjour à tous, cette fois dans Décodeur, on part en voyage. Un voyage loin des chaînes de production industrielle, loin des collections qui s'enchaînent à toute vitesse. On part en Inde, là où chaque motif raconte une histoire, où chaque... couleur est un langage et où la main de l'artisan est au cœur du projet. Aujourd'hui, je suis avec Karine Nally et on va vous parler de Kiran, une marque de décoration textile qui fait sans cesse des ponts entre la France et l'Inde, entre tradition et code contemporain. Kiran a son propre atelier de confection à Jaipur, en Inde, défend le fait main et préserve des savoir-faire ancestraux et créer des pièces qui ont une âme. J'ai donc profité de la présence de Karine à Paris pour organiser cet échange et en savoir plus sur cette jolie marque. Bonjour Karine.

  • Speaker #1

    Bonjour Hortense.

  • Speaker #0

    Je fais une petite parenthèse pour remercier Querk, qu'on enregistre chez Querk, que tu découvres avec moi ce matin. Ce sont des espaces de bureaux haut de gamme inspirés des codes de l'hôtellerie de luxe. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que vous pouvez, votre employeur peut avoir des bureaux chez Querk et vous pouvez bénéficier Merci. de la conciergerie, d'un barista, d'un service de restauration selon les lieux. Quercq peut aussi organiser vos événements d'entreprise. Chacun a un rooftop aussi, une salle de sport, un espace wellness. Bref, ce sont quatre adresses dans le huitième dont je voulais vous parler, qui sont très belles, très bien pensées.

  • Speaker #1

    Je confirme, on est dans le luxe.

  • Speaker #0

    Oui, on est hyper bien installés. Karine je me dis qu'on va peut-être Commencez par le début. Quelle est l'histoire de Kiran ? Comment ça a commencé ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est un voyage en Inde. C'est une histoire de voyage toujours, Kiran. Donc, j'ai fait un voyage en Inde touristique. Ça faisait longtemps que je voulais aller en Inde, mais je ne l'avais jamais fait. Et je me retrouve en Inde, au milieu des tissus, des couleurs et de cette vie indienne. et ça a été... Ça a été un coup de foudre, un choc, un tsunami dans ma vie, professionnel et personnel, puisque l'histoire lie vraiment les deux. Et je suis tombée amoureuse du Blokprim, vraiment le premier atelier d'impression à la main, au Blok dans lequel je suis allée. Je ne sais pas, ça a été comme un choc. J'ai eu l'impression d'appartenir à ce monde. Et comme je ne fais jamais rien à moitié, je suis tombée amoureuse de la personne. qui m'a emmenée dans le premier atelier de Blockprint. Et donc, j'ai complètement changé de vie. Donc, Irane n'est pas née d'un business plan. C'est à peu près l'exact contraire de ça. À l'époque, moi, j'étais décoratrice et j'avais des boutiques de déco dans le sud de la France. Et du coup, j'ai très vite monté une petite collection pour mes boutiques au départ.

  • Speaker #0

    Ah oui, donc c'est vraiment parti d'un voyage personnel.

  • Speaker #1

    C'est un voyage personnel. Ça faisait très longtemps que je voulais aller en Inde. J'ai pas mal voyagé dans ma vie, mais l'Inde, vraiment, ça me tenait à cœur. Mais je ne l'avais jamais fait. Peut-être parce qu'il y avait quelque chose de spécial qui m'attendait là-bas. Donc, il fallait que ce soit le bon moment. Et voilà, vraiment, ça s'est fait très, très spontanément. Donc, c'est une histoire de cœur, de coups de fou, de... De passion, mais vraiment pour cette artisanat. J'ai vraiment ressenti quelque chose. J'étais là-bas chez moi. C'est très bizarre à expliquer. Alors, je sais qu'il y a plein de trucs sur l'un, la spiritualité. Ce n'est pas ce niveau-là. C'est vraiment dans ces ateliers. J'étais bien, j'étais chez moi. J'ai eu envie de faire quelque chose. Moi, j'ai fait l'école Esmod il y a très longtemps. Je suis donc styliste et comme toute styliste, je voulais un jour monter une marque, mais ça ne s'était jamais fait. Et moi, je suis quelqu'un de dentier et de spontané. Et en fait, j'attendais que la vie m'apporte cette idée, ce projet. Et là, ça a juste été une évidence en fait. Et donc, on a créé cette petite collection pour ma boutique de déco. Chaque année, j'exposais avec la boutique de déco en tant que décoratrice et boutique sur le salon Vivre Côté Sud à Aix-en-Provence. Kiran est vraiment née là. C'est-à-dire que j'ai décidé, parce qu'on était une fin d'année, qu'en juin, puisqu'il fallait s'inscrire, je présenterais une collection. Elle n'était pas faite, rien n'existait. Et c'est comme ça que Kiran est né. Et donc Kiran, l'essence de Kiran, le nom Kiran est né. C'était assez évident parce que Kiran en hindi veut dire rayon de soleil. Et qu'en fait, moi, je l'ai orthographié de manière à ce que ce soit l'anagramme de mon prénom Karine.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça, je me suis demandé. Tiens, quand je l'ai écrit, je me suis dit Karine, Kiran, est-ce qu'il y a quelque chose ? Voilà,

  • Speaker #1

    donc dans l'orthographe, enfin en hindi, il ne voit pas le lien. Mais voilà, on l'a orthographié de manière à ce que vraiment ça représente mon prénom.

  • Speaker #0

    Donc, ça a commencé avec une collection que tu vendais dans tes boutiques. Et après, à quel moment tu as fait la bascule d'abandonner les boutiques et de ne te consacrer qu'à Kiran ?

  • Speaker #1

    Alors, c'était un projet déjà dans ma vie d'arrêter ces boutiques. J'en avais vendu une, l'autre était en vente. C'était vraiment, j'avais envie d'arrêter les boutiques. Comme on n'a rien calculé. Voilà, vraiment, tout était très spontané. Donc, en fait, on s'est retrouvés sur le salon Côté Sud pour vendre en B2C à des particuliers. Mais ce salon Vivre Côté Sud, c'est aussi un salon où il y a du B2B. Et donc, on a été contactés par des boutiques. On s'est dit, ah, bon, OK, alors est-ce qu'on vend aux boutiques ? Oh, ben, t'as une commande, tu vas pas la refuser. Donc, on a eu une grosse commande d'une boutique qui ouvrait à Cannes, un concept store. et en fait il se trouve que cette cliente lorsqu'elle a reçu sa marchandise, a dit non, je ne m'attendais pas à ça, etc. A refusé la marchandise. Donc en fait, et puis moi à l'époque, j'étais tellement sur mon petit nuage, on était à Bali un peu en honeymoon. Je me suis dit mais qu'est-ce qu'elle nous énerve. Je lui ai dit ok, renvoyez tout. Et elle a tout renvoyé à Paris. Et quand je suis rentrée de vacances, je me suis dit on fait quoi de ça en fait ? Et c'est comme ça qu'on a monté un site. Parce qu'on s'est dit, maintenant, il faut vendre cette collection. Parce que c'était vraiment une grosse commande. Et mon fils qui était avec moi à ce moment-là, qui travaille dans l'image, etc. M'a dit, maman, moi, je peux te faire des photos. Et puis, on fait un site. Et donc, il m'a fait des photos et j'ai fait le site toute seule. Et c'est comme ça qu'on a lancé vraiment Kiran. Et moi, j'avais déjà une clientèle de mes boutiques de déco. Une mini, mini, mini notoriété sur Instagram. Et donc, les clientes ont commencé comme ça à acheter en ligne. Puis après, j'ai fait des ventes privées chez moi. Et les clientes sont venues. Ça s'est vraiment fait spontanément.

  • Speaker #0

    Mais ça t'a parfois dit, cette femme ? Pourquoi elle t'a rendu la marchandise ?

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui avait travaillé avec l'Inde et qui avait des mauvais souvenirs des ateliers. Elle avait eu des histoires compliquées dans des ateliers en Inde. Et quand elle a reçu, elle me disait « Ah non, mais c'est pas beau, ça sent pas bon » . Elle me disait que ça sent l'Inde. Je pense qu'elle avait besoin d'une petite thérapie concernant l'Inde. Quand j'ai reçu la marchandise à Paris, il y avait mes enfants, il y avait ma fille, il y avait ses copines. J'ai dit, dites-moi, ce n'est pas beau, ça sent mauvais. Ils m'ont tous dit, c'est quoi ton problème ? Je ne sais pas, il y a une dame qui nous retourne, qui nous dit que tout ça, ça ne va pas. Et tout le monde, mes amis, me disaient, mais non, c'est très bien. Donc, vraiment, si elle a la chance qu'elle écoute ce podcast, je la remercie grandement de nous avoir tout retourné. Parce qu'à cette époque-là, on était vraiment en mini-production. Et de toute façon, je n'aurais pas pu produire le double dans le même timing.

  • Speaker #0

    Excellent. Alors toi, tu vis entre Jaipur et Paris ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment.

  • Speaker #0

    Ou Paris ou le Sud ?

  • Speaker #1

    Paris, non, non. Alors le Sud, c'est terminé. Vraiment, je vis entre Jaipur, Paris et Essaouira. Parce que j'ai aussi un lieu à Essaouira et je répartis mon temps comme ça.

  • Speaker #0

    Parce qu'en plus, de ce que j'ai compris, tu as ton conjoint qui est en Inde, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà. Du coup, mon conjoint que j'ai rencontré en Inde est indien. Et donc, c'est lui qui dirige Villa Kiran, en fait, notre atelier de confection à l'époque. Donc,

  • Speaker #0

    tu ne vas pas deux fois par an en Inde ? Tu es vraiment beaucoup là-bas ?

  • Speaker #1

    Ah non, non. Alors... Il y a eu des époques où j'avais encore ma fille qui était à la maison. Donc là, je faisais beaucoup, beaucoup d'aller-retour. maintenant j'y vais Effectivement, deux fois par an, mais quand j'y vais, je reste trois mois.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est ça.

  • Speaker #1

    Au niveau trajet, c'est deux fois par an, mais je reste longtemps. Oui, j'ai vraiment plusieurs vies en une.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te plaît tant ? Tu disais, c'est marrant, ce n'est pas forcément la spiritualité, la joie, etc. C'est toi plutôt, c'est le savoir-faire qui t'a tapé dans l'œil ?

  • Speaker #1

    Moi, c'est vraiment l'artisanat, les couleurs. Oui, alors il y a aussi la spiritualité, ça en fait partie, mais ce n'est pas ça vraiment qui… Ce qui m'a frappée, c'est l'artisanat, le fait que tout soit possible et en même temps que tout est complètement impossible, parce que c'est vraiment très difficile de travailler en Inde quand on a des deadlines, des contraintes de qualité, etc. Et pourtant, tout est possible, tout prend forme, tout naît sous nos yeux. Ils ont vraiment un savoir-faire qui est vraiment extraordinaire et sans limite.

  • Speaker #0

    Oui, toi, tu as ton propre atelier de confection, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, nous, on a eu très vite notre propre atelier de confection. Alors, au début, on a travaillé avec des petits ateliers et un sous-traitant. Et à un moment où on avait besoin d'un peu plus de production, on lui mettait un peu la pression. Et en fait, vraiment concrètement, un soir, on rentre du restaurant et on passe devant cet atelier en moto et je vois de la lumière. Et je dis donc à Banu, mon conjoint. « Regarde, ils ont oublié d'éteindre la lumière. » Et il me répond « Non, ils travaillent. » Je lui dis « Mais comment ça, ils travaillent ? » Il me dit « Tu as vu l'impression que tu leur as mis aujourd'hui ? Il faut qu'ils les finissent, ces robes. » Parce qu'à l'époque, on faisait des vêtements. « Il faut qu'ils les finissent, tes robes. » Donc, ils travaillent la nuit. Je lui dis « Non, mais ce n'est pas possible. » « Mais moi, je ne savais pas. » Et là, c'est à ce moment-là que je me suis dit « Non, alors moi, je veux un atelier. Je veux des employés salariés. » puisqu'en Inde, les employés sont tout le temps payés à la pièce. jamais, jamais salarié. Et moi, j'ai dit, voilà, je veux notre lieu, je veux des salariés, des gens dont on prend soin. Je ne veux pas qu'on travaille la nuit. S'il y a plus de travail, il y aura plus de salariés. Voilà, et vraiment, j'étais complètement naïve, mais c'est vraiment ça qui se passe en Inde et pas qu'en Inde. Et moi, j'ai dit, ah non, non, mais moi, ça ne m'intéresse pas du tout d'avoir une collection. Je ne me sentais vraiment pas à l'aise avec le fait que... Il y avait des gens qui bossaient toute la nuit pendant que nous, on allait dormir pour que le lendemain, on ait notre marchandise. Et donc, on a pris la décision à ce moment-là et on a monté d'abord un tout petit atelier avec un employé et puis quelqu'un qui faisait la couture, notre master. C'était le tout premier qu'on a débauché en fait parce qu'il était très, très mal payé, mal traité dans cet atelier avec lequel on sous-traitait. Donc, au début, on n'avait que lui. Et puis, on avait un homme un peu à tout faire, qui rangeait, qui coupait les fils, qui repassait. Et au début, on a commencé comme ça, vraiment tout mini. On a loué un petit studio. Il y avait deux mini pièces, une avec les tissus et une avec la machine à coudre et la table de couple.

  • Speaker #0

    Mais au moins, ils travaillaient dans de bonnes conditions.

  • Speaker #1

    Ils travaillaient dans de bonnes conditions. Pour moi, c'était évident. Mais encore une fois, j'étais très, très naïve. J'étais ignorante, en fait, sur le sujet. et Pour moi, c'était vital. Et depuis,

  • Speaker #0

    tu as grossi avec toujours, il y a toujours ces bonnes...

  • Speaker #1

    L'atelier a vraiment grandi. On s'est installé vraiment dans une villa l'année dernière. Donc là, ça dépend des moments, mais on est jusqu'à 5-6, plus les 5-6 qui cousent, plus les personnes qui coupent les fils, etc. Et en fait, chaque fois qu'on est à plus de travail, on rachète une machine et on recrute. Voilà, et moi, mes employés ont leur dimanche. Alors, je sais qu'ici, on va me dire, il faudrait deux jours, mais déjà en Inde, 95% des gens n'ont pas de dimanche, n'ont pas de jour de congé. Donc, moi, ils ont un salaire, des dimanches, quand ils doivent pas, ils ont des congés pour les fêtes, il y a différents festivals toute l'année, c'est très important. En Inde, Diwali, Holi, etc. Et oui, pour moi, c'est une évidence. C'est ça ou rien. C'est-à-dire, si je n'avais pas pu faire ça, Moi, ça ne m'intéresse pas de... de produire dans des grandes usines. La question ne s'est jamais posée, en fait.

  • Speaker #0

    Et tu accompagnes les femmes aussi, particulièrement, je crois ?

  • Speaker #1

    Alors, oui. On essaie de recruter des femmes. Moi, mon rêve, au départ, c'était un atelier de femmes. On a même monté une ONG. On voulait monter un atelier où on formait des femmes veuves, parce que les veuves, en Inde, ça pourrait durer des heures. La condition des femmes en Inde, mais en particulier les veuves sont rejetées de leur famille, etc. Et souvent avec leurs enfants. Donc, vraiment, moi, j'avais l'intention de monter un atelier avec des femmes veuves, de scolariser les enfants, plein, plein de bonnes intentions. C'est très, très difficile. La culture indienne, les traditions indiennes, c'est très difficile. On arrive avec tout. nos bonnes idées, mais c'est vraiment très compliqué à mettre en application. Donc ça, on n'a pas pu le faire. Moi, chaque fois que je peux, j'essaye de recruter des femmes. C'est très compliqué parce qu'elles viennent à l'entretien avec leur mari et en fait, c'est le mari qui décide ou pas. Souvent, elles ne peuvent pas sortir de la maison, donc on va les embaucher et puis dès qu'il y a un festival ou quelque chose, elles vont dire aujourd'hui, je ne viens pas, mais en fait, elles ne viennent plus pendant 15 jours. parce que Elles ont des obligations familiales qui sont bien plus importantes que celles qu'on peut avoir nous en tant que mère de famille ou épouse ici en France. Et du coup, recruter des femmes, c'est assez compliqué. Mais j'essaye toujours, je m'acharne, elles partent et puis j'en recrute d'autres, etc. Dès qu'elles ont des bébés, en général, elles partent, elles ne reviennent plus. Parfois même, on recrute des jeunes filles qu'on forme et puis à un moment, il faut qu'elles se marient. Et quand elles se marient, elles ne reviennent plus. Mais quand même, je continue parce que ce peu de temps qu'on leur donne d'indépendance, de valorisation de leur personne, c'est toujours ça. Peut-être qu'elles reviendront un jour. Et puis, en parallèle, on travaille pour le coup, là maintenant, avec une ONG qui est dans un village à côté de Jaipur, où ce sont vraiment toutes les femmes du village qui travaillent, qui viennent à tour de rôle. Donc, encore une fois, on leur donne des tâches sur lesquelles on n'a pas vraiment de deadline. Par exemple, nous, il y a des pompons souvent aux quatre coins de nos coussins. Donc, on va leur commander des pompons, mais ça peut être dans 15 jours, mais on sait qu'on a suffisamment de stock pour tenir 2-3 mois. Parce qu'ils nous disent dans 15 jours, mais s'il y a un festival ou quel que soit, un décès, il y a trois femmes, parce qu'elles sont souvent de la même famille, qui vont disparaître une quinzaine de jours et qui ne vont pas venir travailler. Donc, on essaye le plus possible de faire travailler cette association. Et puis, peut-être qu'un jour, on arrivera vraiment à en créer une, mais ce n'est pas aussi simple que ça en a l'air.

  • Speaker #0

    Vous avez votre propre atelier de confection et tu travailles aussi avec des ateliers familiaux pour d'autres techniques ?

  • Speaker #1

    Alors, nous, notre atelier est un atelier de confection. C'est-à-dire qu'en fait, nous, on n'achète que du tissu blanc brut, soit qu'on fait teindre. Donc là, pareil, on travaille avec un atelier, un tout petit atelier où toute la teinture est faite de manière artisanale. Soit on le fait imprimer au block print, c'est la grosse majorité de nos collections. Et là, on travaille avec deux, trois ateliers qui sont effectivement des petits ateliers familiaux qu'on connaît ou on connaît tout le monde. Là, par exemple, l'impression est arrêtée pour trois semaines. C'est assez dramatique pour nous, pour notre réassort. Mais le fils se marie. Donc, pendant trois semaines, ils ont tout arrêté. Mais je suis invitée au mariage. Ce serait magnifique, mais ça ne va pas me donner mon stock de tissus. mais voilà donc on a effectivement nos petits ateliers de sous-traitants pour des métiers qu'on ne fait pas nous. Parce que nous, vraiment, Villa Kiran, c'est la confection, donc la couture en fait.

  • Speaker #0

    Oui, d'accord. Ok, je comprends. Et qu'est-ce qui est le plus complexe dans la fabrication artisanale en Inde ? Tu nous l'évoquais rapidement tout à l'heure. Qu'est-ce qui est difficile, dont on ne se rend pas compte, nous, tu vois ?

  • Speaker #1

    Alors, par exemple, le block print en soi. Donc, le block print, c'est moi, je vais dessiner un pattern, un motif. qu'on va faire graver sur des blocs en bois. Donc ça, c'est déjà un intermédiaire. Donc ça, c'est un tout petit atelier. Enfin, c'est deux messieurs qui gravent sur les blocs en bois, père et fils. Ensuite, on a la partie impression. Donc la partie impression, elle est compliquée parce que nous, ici, nos clients sont ravis d'avoir un tissu imprimé à la main. C'est génial. Là, c'est toujours une pièce unique, en fait. Et pourtant, ils ne sont pas prêts à avoir les petits défauts qui vont avec. C'est-à-dire qu'en fait, au moment où le tampon tremble dans l'encre, quand il le soulève, il peut y avoir une petite goutte. Si l'encre est un tout petit peu trop liquide, ça peut faire des petites gouttes sur le motif. La plupart de nos tissus, ce sont des pigments naturels. Donc, on n'a jamais deux fois exactement le même ocre. Le fond de nos tissus écrus, ce sont des noix, je ne sais plus le nom en français d'un arbre, des noix qui sont broyées. C'est une macération et en fait, le tissu blanc est teint dans ces noix qu'on macérait et ensuite séchées au soleil. Donc, en fonction de s'il y a plus ou moins de noix, est-ce qu'elles sont plus ou moins grosses, ils ne vont pas les compter, ils ne pèsent pas. C'est tout fait de manière très instinctive, aléatoire. Et donc, s'il fait très chaud ce jour-là, s'il y a du vent, s'il fait humide, le tissu va mettre une demi-heure ou est-ce qu'il va mettre une heure à sécher. Ça ne sera jamais exactement le même fond de tissu. Donc, on va d'un écrut très clair à un beige clair. Mais c'est quand même une nuance. Alors, en Inde, ils disent tout le temps, « Mais madame, c'est 20% difference, not big problem. » Oui, non, si. Pour moi, dans l'absolu, c'est vrai que ce n'est pas un problème vital. Mais pour nos clients, nous, on shoot le produit une fois. Moi, je ne peux pas le shooter à chaque fois qu'il revient, etc. Donc, on a un vrai problème sur, effectivement, les couleurs. C'est-à-dire qu'on va valider des couleurs, on va faire des essais, des tests. L'imprimé est parfait, mais on a une chance sur un million que ce soit exactement le même qui sorte en prod. Parfois, ça va être exactement le même. Ce sont des pièces de 10 mètres de tissu. On peut avoir quatre pièces dans la journée, ils vont imprimer quatre pièces exactement le même. Celle du lendemain, ce n'est pas exactement le même. Donc, c'est ça qui est vraiment très difficile dans la partie block print. Et puis, ce qui est compliqué en Inde à gérer, ce sont les délais. Il y a un rapport au temps qui n'est pas du tout le même que nous, un rapport à ce qui est grave qui n'est pas du tout le même que nous, mais vraiment pour tout. En Inde, ce n'est pas grave de mourir. Alors, livrer un tissu trois semaines en retard, ce n'est vraiment pas grave en fait. Et nous, c'est vraiment ça qui fait que c'est très compliqué d'avoir vraiment un mode artisanal de fabrication en Inde et un client final qui est français, européen et qui a des attentes.

  • Speaker #0

    Et comment tu arrives justement à concilier ces exigences du marché, la qualité, les volumes, les délais, etc. ? Il faut que tu t'adaptes en fait.

  • Speaker #1

    Il faut qu'on s'adapte, qu'on s'apparte. Il ne faudrait pas se stresser. Alors, nous, ne se stresse pas. Mais pour ne pas se stresser du tout, il faut être née en Inde, avoir grandi en Inde. Moi, ce n'est pas le cas. Je suis fille d'un industriel et d'une commerçante. Donc, effectivement, le stress et la pression, c'est mon quotidien. Donc, c'est très compliqué. Il faut vraiment prendre sur soi. Après, c'est une leçon de vie. Moi, c'est la vie que j'ai choisie. comme toute vie qu'on choisit, il y a des avantages et des inconvénients. Mais c'est loin d'être quelque chose de facile. Il faut s'y prendre en avance, mais on n'est jamais assez en avance. En fait, il faudrait qu'on soit très, très en avance de deux, trois collections au moins pour se dire, c'est quoi, ça va sortir en été 27. Si on ne l'a pas cette semaine, on l'a l'année prochaine. Sauf que nous, on est sur un circuit très, très, très court. On court après le temps, puisqu'à chaque fois, on se dit, on va y arriver, on va prendre de l'avance. Mais on vend plus, donc on a du réassort. Donc, ça nous mange le temps sur notre avance. Mais je pense que ce serait le seul moyen d'être un peu moins stressé. Ça serait d'avoir énormément d'avance. Du coup, le retard serait relatif. On y arrivera peut-être un jour.

  • Speaker #0

    Dans un monde idyllique, qu'est-ce qu'il faudrait faire pour pouvoir faire changer les choses ? On ne peut pas.

  • Speaker #1

    Ah non, rien. Changer, non. Et encore, d'être sur place, d'avoir... vraiment un responsable de la production, Banu, qui est 100% indien, mais qui, au bout d'huit ans, a quand même un petit pourcentage de France en lui, qui comprend nos exigences, qui comprend que quand on demande quelque chose, déjà, ce n'est pas en tant que personne que je le demande, c'est pour mes clients, et que ce n'est pas juste parce que je fais une chrisonnaire. C'est vraiment la cliente au bout qui a besoin d'un produit comme ci, comme ça. Et déjà, d'avoir quelqu'un qui est entre deux cultures, qui dirige tout ça, je pense que c'est déjà... vraiment extraordinaire. Après, non, on ne change pas. Moi, je croise pas mal de créatrices dans ma vie à Jaipur. Parfois, vraiment, elles sont... On a l'impression qu'elles viennent en Inde parce qu'elles viennent dix jours. Elles arrivent, rien n'est prêt, rien n'est comme elles voulaient, rien ne va, mais rien ne va. Et souvent, c'est très, très difficile à vivre. Et moi, je leur dis tout le temps, mais si tu ne peux plus produire, si tu n'y arrives plus physiquement, si ce n'est plus possible... va produire ailleurs, parce qu'ici, ça ne changera pas. On ne les changera pas. On est qui pour changer les gens ? Et puis, c'est nous qui sommes allés là-bas. Ils n'ont rien demandé, en fait. Donc, on va là-bas, on ne change pas les gens, on s'adapte et on essaie de trouver un mix, un mode de fonctionnement qui peut satisfaire notre client final, mais qui est complètement adapté.

  • Speaker #0

    Et toi, tu n'es pas tentée par... Pour bouger ou changer ? Non,

  • Speaker #1

    moi, si ça doit être fait, je ne sais pas, en Chine, sur des machines, moi, ça ne m'intéresse pas. Je ferai un autre métier. J'ouvrirai un food truck, je ferai des samosas, mais ça ne m'intéresse pas. Non, moi, qui râle, m'intéresse si ça reste 100% artisanal, si on respecte les gens, si on maîtrise la façon dont c'est fait. Si je continue, moi, de traîner dans des ateliers toute la journée où il fait 45 degrés et ça m'épuise et j'adore ça. C'est la vie qui m'intéresse derrière la marque. Si demain, on a des investisseurs qui nous disent qu'il faut tout délocaliser, je ne sais pas où. Non.

  • Speaker #0

    Comment tu vois l'évolution du marché, on en parle beaucoup avec la mode, entre la fast fashion et l'artisanat ? Donc la phase déco et l'artisanat, parce que tu as en face des marques de linge de lit qui n'ont pas tous ces inconnus.

  • Speaker #1

    C'est certain. De l'inclus, pardon. Globalement, même en mode, etc. Nous, on continuera. Je pense qu'il y aura toujours... Je pense que chacun a ses clients et que ce n'est pas grave. Il faut juste que nous, les petits, ceux qui travaillons vraiment avec l'artisanat, on en ait assez pour survivre. Je pense que ça passe par venir le raconter ce matin à toi et à tous ceux qui écouteront. C'est vraiment ça, c'est essayer chaque jour de poster des vidéos où on voit des block prints, ou expliquer comment sur le site expliquer ça, mais parce que les gens ne vont pas forcément lire, mais qu'on répète sur chaque produit que ça a été imprimé à la main, etc. Et puis, c'est un peu comme une mission. Et moi, j'ai vraiment cette mission. de défendre l'artisanat, de protéger cet artisanat et d'expliquer que Kiran, c'est de l'artisanat et d'espérer pour voir en vivre. Mais moi, je ne lutte pas contre la fast fashion. On ne peut pas, en fait. Et puis, peut-être qu'il y a des gens sur leur canapé qui ont un coussin de fast fashion. On ne va pas donner de nom de fast home collection. et qui ont un coussin Kiran par-dessus, parce que peut-être qu'ils n'ont pas les moyens d'avoir trois coussins Kiran et qu'ils vont acheter deux unis dans une enseigne et un imprimé. Et ce n'est pas grave, c'est le monde d'aujourd'hui, encore une fois, comme tout, il faut qu'on s'adapte, qu'on fasse notre place, mais pas forcément en luttant contre les autres, plutôt en essayant de valoriser ce qu'on a nous.

  • Speaker #0

    Et pourquoi le consommateur a du mal à percevoir le travail fait main ou à se pencher vers des marques ? C'est encore lent à arriver.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'aujourd'hui, le consommateur est complètement perdu. Quand il essaye de s'informer, il est désinformé parce qu'on lui raconte n'importe quoi.

  • Speaker #0

    Il raconte n'importe quoi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas. En ce moment, il y a beaucoup de... Non, je vais être obligée de citer des marques.

  • Speaker #0

    Non, mais sans se crier.

  • Speaker #1

    On sait sur Chine et compagnie. Et on va avoir Zara qui raconte que ce que fait Chine, c'est horrible. Mais Zara, ils font la même chose. En fait, c'est ça. Et les gens croient ce qu'on leur raconte. Bien sûr, Chine, c'est horrible. Mais il y en a plein d'autres, des marques avec des noms, des marques qui vendent cher et qui ont exactement le même mode de production. C'est moins de quantité. Moi, je les vois passer, les créatrices en Inde. Voilà, je vois où elles fabriquent. Dans des ateliers où ils bossent la nuit, où ils sont, moi je connais un couple d'indiens, ils sont à la tête d'une boîte où ils ont 7000 employés, ils ont 7000 machines à coudre. Donc je ne citerai pas les marques qu'ils fabriquent chez eux, mais c'est des marques qui parlent d'artisanat, qui disent moi quand je vais en Inde c'est mon pays de cœur. Voilà. Je parle parfois avec des créatrices et je leur dis, est-ce que tu as une idée du salaire moyen ? De combien est payé le gars qui est derrière la machine à coudre, qui fait ta robe ou ton coussin ? Elles n'en ont aucune idée, les gens n'en ont aucune idée. Parce que ce n'est pas leur problème. Elles viennent en Inde, elles veulent avoir le produit qu'elles veulent. Et puis elles tirent, elles grattent le prix parce qu'il faut qu'il soit le moins cher possible pour faire plus de marge. Parce que c'est très dur pour les marques aujourd'hui de survivre. Donc moi, je peux le comprendre. Mais quand je dis voilà la désinformation, c'est que ces gens-là vont dire moi je travaille dans un petit atelier familial. Mais ce n'est pas vrai, ça part la nuit, c'est fait par je ne sais pas qui, elles n'en ont aucune idée. Et de toute façon, si la production devient très importante, c'est-à-dire des marques qui vont vendre à 200 revendeurs, ça ne peut pas être artisanal et ils ne peuvent pas maîtriser, c'est impossible. Et le consommateur, il croit ce qu'on lui raconte. C'est normal, ça me paraît normal. Il s'informe, on lui dit quelque chose et il le croit.

  • Speaker #0

    Et le consommateur aussi, il n'a pas forcément le budget. Le fait main implique aussi un prix qui est un petit peu plus conséquent. Comment tu défendrais, toi, justement, ce prix ? Comment tu expliquerais aux gens qu'il faut, de toute façon, si c'est artisanal, ce sera forcément un peu plus cher ? Est-ce que le consommateur, il est prêt à l'entendre ?

  • Speaker #1

    Ben, certains, oui. D'autres l'entendent, le comprennent et pour autant, on n'en a pas les moyens. Mais nous, on le voit et c'est beau. Moi, j'ai des clientes fidèles depuis le début de Kira, mais qui achètent très, très peu. Mais c'est parce qu'elles veulent vraiment un coussin ou elles vont acheter la paire de rideaux, mais elles vont mettre six mois à se décider. Et moi, je trouve ça très touchant parce que dans ces clients-là, on sent une vraie conviction, un vrai parti pris. Donc, ce n'est pas forcément lié, bien sûr, c'est toujours lié aux moyens et à l'argent qu'on peut y consacrer. Mais voilà, moi, je pense qu'il faut informer les consommateurs. Et je pense encore une fois qu'ils peuvent, voilà, ils sont intelligents. Les gens sont intelligents et ils peuvent faire la part des choses. Ils comprennent. Nous, notre mission, c'est de leur montrer, leur expliquer, leur montrer la main, la main de l'homme, entre guillemets. Moi, je le fais beaucoup. Parce que nous, on a aussi des employés ou des sous-traitants qui ne veulent pas être filmés, mais on voit leurs mains tout le temps, on demande l'autorisation de leurs mains, parce que c'est ça qui est important. Et voilà, nous, chaque produit est créé par les mains de quelqu'un, de plusieurs personnes. Et c'est ça qui est beau. Et j'espère qu'on arrive à toucher le consommateur, en tout cas une partie des consommateurs, et qu'ils comprennent que voilà, leur objet est unique. Nous, il n'y a pas deux coussins. identiques, puisque d'un bout de tissu à l'autre, c'est vraiment la façon dont ça a été tamponné. Tout ce qui est tissu uni a été tissé à la main, teint à la main. Donc, nous, on répète, on montre, on explique et on espère que ça peut faire son effet sur plusieurs personnes. Aujourd'hui, les gens veulent beaucoup d'artisanat. On parle beaucoup de Made in France. Oui, c'est très bien, le Made in France. Je pense que peu de gens peuvent s'offrir le Made in France dans tous les domaines, que ce soit des meubles, du textile, des bijoux, en fait c'est très compliqué. Et puis, moi je fournis du travail à des êtres humains et j'estime qu'un travailleur français ou un travailleur indien mérite d'avoir un salaire et de nourrir sa famille de la même manière. Donc le Made in France c'est très très bien, mais moi je suis très très fière. d'avoir du Made in India. Ce n'est pas une maladie, ce n'est pas une part en fait.

  • Speaker #0

    Tu as un engagement éthique et aussi durable. Donc les matières sont naturelles, tu le disais.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et les pigments aussi sont naturels.

  • Speaker #1

    Oui, alors les pigments, une grosse majorité de nos pigments sont naturels. Il y a une grosse partie de notre collection, tout ce qui est ocre, noir, brun, etc. C'est tout fait à partir de... De pigments naturels, de macérations, de graines broyées. Donc, on est vraiment sur des pigments naturels.

  • Speaker #0

    Et tu fabriques en petite quantité, mais pas à la commande.

  • Speaker #1

    Non.

  • Speaker #0

    Tu as quand même un petit stock pour pouvoir répondre.

  • Speaker #1

    Alors, nous, on imprime. En fait, c'est surtout sur les imprimés que le stock est compliqué à gérer. Parce que c'est quand même bien qu'on commande 500, 600 mètres d'un coup. pour être sûr d'avoir quand même... que ce soit imprimé au même moment, à la même saison, par rapport à ce qu'on disait tout à l'heure, au temps de séchage, etc. Et après, on fabrique les produits. Donc, nous, on est tout le temps en flux tendu parce qu'au fur et à mesure que Kirane se développe, qu'on a de plus en plus de clients, il faut qu'on recrute. Donc, on court en permanence. On fait du sur-mesure, très rarement, mais pour des décorateurs, etc., quand même sur des petites commandes. Et on court après le temps, tout le temps.

  • Speaker #0

    Et tes chutes de tissus, pareil, tu les transformes ?

  • Speaker #1

    On a très peu, en fait, des chutes parce que... Alors, moi, je fais les plans de coupe. Moi, j'ai une formation de styliste modéliste. Donc, la taille des coussins, la taille des rideaux, dans un sens, dans l'autre, pour avoir le moins de déchets possible. Et puis après, si on a une bande, par exemple, sur les sofas cover, on a une bande de 25 centimètres qui n'est pas utilisée. Ça, on le quilt, on le surpique. C'est avec ça qu'on fait nos trousses de toilettes. Donc, en fait, et moi, je l'aurais appris. Sous la table de coupe, on a plusieurs poubelles qui sont par taille de tissu. C'est-à-dire vraiment les tout petits bidules. Ça fait vraiment, c'est la poubelle. Vraiment, mais c'est mini. Et puis, les petites pièces de tissu, ça peut faire des patchworks, etc. Les moyennes pièces. Donc, on a des tailles de poubelle, en fait. Et moi, à chaque fois que je retourne en Inde, je récupère ces cartons. Et je dis, bon, OK, avec ce carton-là, qu'est-ce qu'on va faire ? Est-ce qu'on peut faire des patchworks ? On a un concept store à Jaipur. Là, les patchworks un peu plus aléatoires. Nous, on peut faire des produits qu'on vend dans le concept store. On fait des étuis à lunettes, des petits porte-monnaies. Souvent, on envoie en cadeau dans les commandes qu'on ne vend pas forcément. Mais on n'a presque pas de déchets. Vraiment le moins possible.

  • Speaker #0

    Et comment tu fais face ? aux défis écologiques en Inde, les matières, la teinture, le transport ?

  • Speaker #1

    Moi, à mon échelle, faire face, c'est difficile. Voilà, nous, on se dit que le fait déjà d'avoir le moins possible de déchets, et nous, on le voit, les déchets, c'est énorme. Après, on ne peut pas lutter sur le contre. Le fait que, voilà, ça part par avion. Nous, on ne travaille pas avec des containers, parce qu'on a des petits stocks et des délais restants. donc On fait au mieux, quoi. Chacun fait au mieux. Moi, j'essaie de...

  • Speaker #0

    On ne peut pas être sur tous les fronts.

  • Speaker #1

    On ne peut pas être sur tous les fronts. Et puis, en Inde, il y a un vrai sujet là-dessus, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pour ça que je te pose la question.

  • Speaker #1

    Oui, mais le site... Les citoyens sur l'eau, moi je leur apprends, par exemple, l'eau, on a un jardin, la personne qui arrose le jardin, quand ce n'est pas moi, parce que j'adore le faire moi, mais il peut laisser le tuyau, puis il s'en va, il va faire autre chose complètement, et il revient, c'est complètement noyé. Je leur explique que l'eau, ce n'est pas éternel. Pour eux, ça vient de sous le sol, donc ça va être pour toujours. Les ordures en Inde, le recyclage, enfin... Ils vont ouvrir, tu étais en voiture, et tu vois le gars d'à côté, il ouvre sa fenêtre, il lance sa bouteille d'eau. Ce n'est pas des scènes rares. Donc, il y a un vrai sujet, vraiment écologique. Moi, je dis tout le temps, si j'avais un engagement écologique, quel qu'il soit, je ne resterais pas à me battre en France pour les poubelles vertes ou jaunes. J'irais en Inde, j'irais en Afrique, parce qu'ils sont beaucoup plus nombreux. strictement rien compris. Ils en sont au balbutiement de tout ça. Ils pensent qu'en jetant un papier par la fenêtre, comme on ne le voit plus, il disparaît. Et c'est nous, il y a 50 ans. Et il y a un vrai sujet, il y a un vrai enseignement. Mais dans les écoles, ils commencent maintenant à les sensibiliser là-dessus. Donc, c'est le tout début, mais il y a du boulot.

  • Speaker #0

    En termes de création, c'est toi qui imagine toutes les collections textile. Surtout, tu fais les motifs, les dessins.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Comment tu t'épargnes ?

  • Speaker #1

    Je suis styliste, illustratrice. C'est mon métier.

  • Speaker #0

    Ah, illustratrice.

  • Speaker #1

    Oui. Moi, au départ, j'ai fait la formation S-MOD en mode enfantine. J'ai commencé ma carrière chez Petit Bateau. Moi, je dessinais des petits nounours, des petites fleurs, etc. Là, pour le coup, j'étais styliste et illustratrice. On faisait les deux. Moi, dessiner, c'est toute ma vie dessiner. Malheureusement, en tant que chef d'entreprise, je dessine beaucoup moins que ce que j'aimerais. Mais effectivement, je dessine tout, les motifs, les modèles. Certains motifs existent parce qu'il y a des... milliers de blocs chez nos imprimeurs et ils sont très jolis. Donc, voilà, moi, je vais me promener dans un atelier et puis aller fouiller dans les blocs et dire, ça, c'est quoi ? On l'essaye. Et parfois, le graphisme est super beau, mais ce sont toujours nos colorations. Voilà, nous, on n'achète aucun tissu déjà imprimé. Donc, certains blocs existent. Il y a des motifs vraiment traditionnels qui existent. Et puis sinon, moi, je dessine et on donne à graver.

  • Speaker #0

    Donc plusieurs fois par an, tu marches par collection, c'est selon ton inspiration ? Comment tu germes tes idées ?

  • Speaker #1

    Ça vient des voyages, j'ai plutôt un problème de trop d'idées que pas assez. Comment les canaliser, comment les faire entrer dans des collections ? Les motifs, c'est un peu tout le temps. C'est-à-dire que moi, je vais dessiner, je ne sais pas, je vais voir n'importe quoi, un papier peint, une expo, un papier peint ancien. N'importe quoi, une assiette vintage dans un restaurant, ça me donne une idée de fleur de motif et je vais dessiner tout le temps. Je dessine pas mal dans l'avion, dans les transports et je fais faire des blocs. Je dessine l'imprimé et je fais faire des blocs. Je vais décider que celui-ci va être en trois couleurs, quatre couleurs. Donc c'est un bloc par couleur, un tampon par couleur et je fais faire les blocs. Il y en a plein qu'on n'a jamais utilisé, qu'on utilisera peut-être un jour. Mais on est prêt, j'ai un peu ma bibliothèque de blocs, en fait, et de motifs. Et puis après, on se dit, tiens, j'ai envie d'une grande fleur. Ah, j'en avais dessiné une. Bon, pour cet hiver, elle va être plutôt dans les tons de brun. Et on fait des essais de couleurs. Mais sur ce qui est des motifs, ce n'est pas très saisonnier. On ne dessine pas des flocons de neige. Voilà, donc en fait, ça peut être toute l'année. Et c'est surtout la coloration qui détermine la saison.

  • Speaker #0

    Comment est réparti ton travail ? J'allais dire tu dis dans les transports, mais plutôt là-bas ou ici. Comment est organisé ton travail selon ce que tu fais en Inde et ce que tu fais en France ?

  • Speaker #1

    Mon travail est désorganisé, totalement désorganisé. Déjà parce qu'en Inde, l'organisation n'existe pas. Parce qu'en fait, on va se lever le matin et décider qu'on va faire ça, ça. On a un rendez-vous, machin, et puis tout change. Le rendez-vous s'annule. D'un coup, il y a une énorme averse, c'est trempé, tout est noyé, on ne peut plus partir. Donc ça, c'est la vie en Inde. Donc en Inde, tout est désorganisé. Je rêve d'avoir un planning. J'entendais un podcast où il disait que le vrai truc, c'est vraiment le planning. Il n'y a que comme ça que tu t'en sors. C'est pour ça que je ne m'en sors pas. Moi, je ne peux pas. Alors, j'arrive à faire ça. Les périodes où je suis en France, c'est un peu plus possible. et encore que... Pas vraiment parce que, ben voilà, ce matin... J'ai couru pour arriver ici alors que je pensais avoir du temps, mais en fait, il y a eu un souci à l'atelier. Donc, moi, quand je me réveille à 6h du matin, il est 10h30 déjà, donc ils sont déjà en train de bosser. Donc, il y a déjà plein de... Quand je me réveille, il y a déjà une liste de... Il s'est passé plein de trucs. Il y a plein de problèmes. Il n'y a plus de fil pour ça. Il n'y a pas ci, il n'y a pas ça. Il y a le tissu qui n'a pas été livré. Il y a FedEx qui n'est pas venu chercher les colis. Et donc déjà ça, ça me décale, même si je m'étais dit, oh tiens, aujourd'hui, je vais faire mon petit podcast, puis après, ta-ta-ta, ben voilà. Donc je suis très désorganisée. Quelqu'un m'avait dit un jour que j'étais éparpillée. Je trouvais ça joli, c'est assez vrai. C'est un joli mot.

  • Speaker #0

    Ça ne t'empêche pas d'avancer, de travailler chacun sa méthode.

  • Speaker #1

    C'est des tout doulisses que je ne suis pas. J'ai beaucoup trop de choses à faire, c'est beaucoup. Donc il n'y a pas de... Voilà, j'essaye... C'est pour ça que je dis que je dessine dans les transports, parce que dans l'avion, personne ne m'appelle. Donc, je suis tranquille. Vraiment, c'est pour dessiner. J'essaye de me trouver vraiment des moments calmes pour dessiner. Ça, c'est important. Et sinon, tout le reste du temps, je fais 10 000 trucs.

  • Speaker #0

    Il y a combien d'heures de décalage ?

  • Speaker #1

    4h30 en hiver, 3h30 en été. Ce n'est pas énorme.

  • Speaker #0

    Non, ce n'est pas énorme.

  • Speaker #1

    Mais c'est suffisant pour, en fait, lorsque je suis en France, me lever très, très, très tôt. Voilà. Ou quand je suis en Inde, travailler avec la France très, très, très tard. Donc, en fait, du coup, ce n'est pas un vrai décalage horaire, mais c'est un décalage horaire qui fait que je travaille 18 heures par jour.

  • Speaker #0

    Voilà. Donc, on disait que c'était une marque décoration textile. Tu fais des plaides, des rideaux, des housses de couettes, du linge de table, des coussins, des pareos, des cabas, des trousses. Pour l'instant, qu'est-ce qui se vend le mieux ? Est-ce que tu as des genres de bestes ?

  • Speaker #1

    Tout se vend. Et ça dépend des périodes. Là, en période où on arrive à Noël, on va vendre beaucoup de trousses, beaucoup de sacs, parce que c'est des cadeaux. L'été, on vend énormément de pareos, mais on les vend à Noël parce que nos pareos se portent en foulard, parce que ça fait un foulard très aérien, mais qui tient quand même chaud. Là, les housses de couettes, c'est plus en hiver. En période d'été et de Noël, on vend des nappes, parce que ça fait des grandes tables. donc il n'y a pas de... énormément de coussins et les sofa cover mais le coussin c'est vraiment un article où tu vas mettre deux coussins sur ton canapé et limite tu as changé ton salon parce que nos coussins sont quand même très très présents et puis c'est un petit budget on peut s'offrir j'ai

  • Speaker #0

    vu et tu as beaucoup de sofa cover ce qui est canon sofa cover en gros c'est pour mettre sur le canapé mais on peut mettre en bout de lit c'est un genre de boutique on pourrait dire que c'est un édredon

  • Speaker #1

    En Inde, ils les empilent sur les charpoils, dans le Rajasthan on dit les Ausha, mais sur ces lits indiens. Ils les empilent et ça sert de petit matelas. Nous, les nôtres, sommes beaucoup plus légers que vraiment un petit matelas de charpoil, mais c'est un peu salidé. Donc on peut le mettre en bout de lit, ça peut habiller un canapé, ça peut cacher un canapé qu'on n'aime plus, ça peut protéger un canapé des petits doigts au chocolat des enfants. Parce qu'ils sont déhoussables, ils sont lavables. Et c'est un produit qu'on vend vraiment beaucoup.

  • Speaker #0

    Je reviens sur un point qu'on a un petit peu abordé tout à l'heure sur le fait de comment on se démarque avec les autres marques. Mais surtout, j'ai envie de te demander comment va le business ? Tu vois, c'est un peu la crise. Enfin, un peu beaucoup. Comment t'affrontes-tu ? Alors,

  • Speaker #1

    comment on affronte ? Pour tout te dire, moi, il y a un peu plus d'un an, Je n'en pouvais plus. Donc, ma façon d'affronter, c'était de me dire, tu sais quoi, je vais tout arrêter, en fait. Voilà comment j'allais affronter. Et j'ai eu une très grande chance parce qu'un de mes fils, j'ai trois enfants, Justin, m'a dit, maman, n'arrête pas, tu as de l'or entre les mains, il faut qu'on en fasse quelque chose. alors c'est un de mes enfants un peu comme moi, mais ils le sont tous les trois mais un peu hyperactif et un peu touche à tout et il m'a dit moi j'ai du temps à consacrer On s'y met à fond, on redéveloppe, etc. Moi, j'ai écrit RAN, j'avais tout fait toute seule depuis le début. C'est-à-dire que j'avais fait le site, c'était moi qui gérais le site, mais j'ai fait le site toute seule. Instagram, c'était moi. Les lives, c'était Banu derrière la caméra. Et puis moi qui préparais tout le setup, le machin. Et puis je faisais le live. Et puis après, on prenait les commandes et on emballait. C'était 100% nous deux. Et en tout cas, 100% de ce qui était fait en France, le commercial, le machin, c'était moi. Donc c'était un peu trop et en fait on était un peu trop gros pour que ça fonctionne comme ça. Donc il y avait deux solutions, soit je redevenais très petit et en fait je chinais trois parce que moi je suis une passionnée. des tissus anciens, etc. Donc, je tinais trois bouts de tissu, je faisais faire quatre coussins, je les bandais en live et je gagnais trois sous comme ça. Soit on avait une taille critique et il fallait passer au-dessus. Donc là, on est passé au-dessus, on a refait un site, on a des gens qui gèrent la pub, des gens qui gèrent Instagram, même si c'est toujours moi qui suis derrière. En France, on a maintenant un dépôt, un hangar, on gère tous les envois. On est passé, il y a un an, à une autre... taille d'entreprise et un autre mode de fonctionnement, tout en gardant la fabrication artisanale. Donc là, on en est là. Donc, on peut dire que nous, on ne subit pas trop cette crise parce qu'on a augmenté notre chiffre d'affaires et nos ventes énormément en un an. Mais peut-être que si on n'était pas au milieu de cette crise, on aurait explosé en un an. Là, on n'a pas explosé. La bonne nouvelle pour nous, c'est que ça nous permet de grandir et de s'organiser en production derrière, pas à pas. Et ça, c'est super important pour qu'on garde notre ADN et notre mode de production artisanal. Donc, on ne va pas dire qu'on ne subit pas la crise, mais voilà, on vit dedans. De toute façon, qu'est-ce qu'on peut faire d'autre ? Donc voilà, on a changé de structure d'entreprise à ce moment-là. Donc, on a gardé la tête hors de l'eau. Mais c'est du travail acharné. On ne compte pas nos heures et on se fait peur. C'est très, très loin d'être l'opulence. Mais on est content de voir que les gens aiment, les clients sont contents. Ils commandent une fois une petite commande, puis la deuxième commande est plus importante, etc. Le fait d'avoir aussi une petite taille d'entreprise, ça nous permet d'être, même si le consommateur est derrière son écran, on est proche de lui quand même, on le suit. Une cliente qui va avoir un souci, Justin va l'appeler personnellement. Donc, on garde ce côté humain, vraiment. Donc,

  • Speaker #0

    il a intégré un peu l'entreprise ?

  • Speaker #1

    Oui. Et lui, il s'occupe de tout ce qui est marketing, commercial, expédition, etc. Et c'est lui qui gère les pubs, etc. Il fallait du sang neuf. Je suis un peu vieillissante. Et il fallait des trentenaires aujourd'hui dans un business. Voilà.

  • Speaker #0

    Tu te vois où dans dix ans ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas du tout Ailleurs Je serais contente de passer de voir Je ne me vois pas Je ne me vois pas retraitée Alors que pourtant dans dix ans je crois que c'est l'âge de la retraite Donc non je ne me vois pas retraitée Je me vois je ne sais pas ailleurs Peut-être en Inde Peut-être toujours avec Kiran J'adorerais Mais moi j'adorerais être la directrice artistique de Kiran Alors ça c'est mon grand rêve c'est mon grand. C'est-à-dire, en fait, dessiner, m'occuper des collections, mais des prototypes, ne pas gérer. Est-ce qu'il nous refaut 300 mètres de tissu ? On n'a plus de signes. Ne plus regarder les ventes sur le site. Voilà. Alors ça, ça serait mon grand rêve. Et si c'est comme ça dans dix ans, mais il faudrait que ce soit avant, parce que j'avais le craqué avant. Mais ça serait mon rêve. Ou alors complètement autre chose. Je ne sais pas, monter un atelier avec des femmes, un orphelinat, je n'en sais rien.

  • Speaker #0

    Quel conseil tu donnerais à quelqu'un qui voudrait entreprendre, un peu comme toi, dans un projet à impact, entre gros guillemets ? Un projet qui ait du sens. Les jeunes, ils vont arriver avec des projets qui ont du sens, plus que les anciennes générations.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il faut vraiment croire en ses idées. Je crois qu'il faut faire quelque chose qu'on aime. Tu me diras, il y en a plein qui réussissent en faisant des trucs qu'ils n'aiment pas. C'est-à-dire qu'en fait, ils font des projets à partir d'un business plan. On en voit des marques comme ça, que je ne citerai pas, qui d'un coup décollent. Mais parce que c'est quatre personnes autour du table qui se sont dit, comment on va pouvoir gagner de l'argent ? C'est l'exact contraire de ce que moi, je peux faire. Mais moi, je pense que pour être heureux et tous les matins... Parce qu'entreprendre, c'est difficile. Vraiment, on ne compte pas nos heures. En fait, on ne fait que ça. Moi, je ne fais que ça dans ma vie. Donc, je pense qu'il faut aimer ce qu'on fait et croire vraiment profondément en ce qu'on fait et ne pas compter ses heures. Et si on se plante, recommencer. Parce que ce n'est pas grave, parce qu'on aura appris. Et toujours croire en ses rêves. Oui,

  • Speaker #0

    c'est beau. C'est bien. Ça ressemble à quoi chez toi, en fait ? Parce que du coup, tu as deux maisons.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'on peut mettre un S à toi ? Chez toi, les toits. Oui, tout à fait. Alors, j'ai trois maisons. Vraiment, je suis chanceuse. Alors, ça ressemble à quoi chez moi ? À Jaipur, c'est très, très coloré. Un peu trop à mon goût, mais en fait, il y a un an et demi, deux ans, j'ai eu la bonne idée avec Banu, mais c'était surtout mon idée, je ne vais pas l'accuser, le pauvre, d'ouvrir des chambres d'hôtes. Parce que j'avais eu dans ma vie, avec le papa de mes enfants, j'avais eu des chambres d'hôtes dans le Luberon. Et j'adore recevoir, j'adore accueillir les gens, j'adore cuisiner, j'adore parler de ce que j'aime. Donc, on s'est dit, voilà, on va ouvrir des chambres d'hôtes. d'autres à Jaipur et un concept store et ça faisait vraiment beaucoup et donc en fait on est donc un peu freiné des cas de fer et du coup on a emménagé dans nos chambres d'hôtes donc c'est hyper décoré on a plein de serviettes de bain toutes les couleurs toutes les coordonnées machin parce que j'avais fait ça très très très très fini j'ai jamais eu une maison aussi finie puisqu'en fait je vis on vit dans nos chambres d'hôtes donc c'est très coloré c'est très joyeux Mais ça fonctionne bien avec la vie à Jaipur. Donc voilà, c'est une maison joyeuse, colorée, lumineuse. Enfin, de toute façon, l'Inde, c'est lumineux. Moi, c'est ce qui me nourrit, c'est cette lumière tous les jours et cette énergie. Et donc, c'est vraiment un coin coloré, grand, où on reçoit beaucoup. Je fais pas mal de dîners, il y a pas mal de créateurs, créatrices qui passent. Donc, ça parle un peu toutes les langues. On fait des repas. Des grands repas dans le jardin. Voilà, c'est joyeux. Et donc, le rez-de-chaussée, c'est l'atelier. Donc, il y a des bouts de tissu aussi, des cartons. Voilà.

  • Speaker #0

    Génial. Après, la deuxième maison, c'est ?

  • Speaker #1

    Alors, la deuxième maison, c'est Essaouira. Essaouira, c'est un petit riad au cœur de la médina d'Essaouira. Donc, ça, c'est mon paradis. Donc là, c'est plus soft, c'est du tas de lacs, beige, marron, les portes sont noires, c'est plus neutre. Je l'avais fait avant Kiran, donc je l'ai un peu kiranisé. Maintenant, il y a quand même un peu de fleurs et de touches kiran dedans. Mais moi, j'aime aussi beaucoup l'artisanat marocain. J'aimerais vraiment en faire rentrer dans la collection kiran. Donc, j'ai pas mal. Les rideaux sont faits à partir de hikes marocains. C'est aussi une maison joyeuse qui est très grande, où j'aime beaucoup recevoir. J'aime bien qu'il y ait évidemment mes enfants, leurs conjoints, mes petits-enfants, parce que j'ai la chance d'être mamie. Voilà, c'est une maison qui est faite pour ça. Et en haut, sur la terrasse en haut, on a la cuisine et la pièce à vivre et une petite chambre. Et quand j'y suis seule, je ne vis que sur la terrasse, en fait. C'est comme si je vivais sur un appartement un peu en extérieur. Et j'ai toujours un moyen d'être bien quand je suis seule. Voilà, donc ça c'est la partie. marocaine et puis à paris j'ai rénové l'année dernière j'ai eu la chance de trouver trois chambres de bonne dans un état lamentable et j'ai tout cassé tout ça j'adore pas j'ai tout fait casser j'ai pas cassé moi et et fait un très joli petit nid sous les toits à paris et dans lequel je suis vraiment très très bien et où c'est vraiment déconseillé de venir si vous vous faites plus d'un mètre 85. Mais c'est vraiment un petit nid, tout mignon. Et là, c'est des coloris plutôt neutres. Là, j'ai eu besoin d'avoir un lieu neutre, parce que c'est souvent là aussi que je me pose pour dessiner. Donc, c'est calme, c'est neutre. Enfin, tous les marrons, là, c'est comme la table qu'on voit là. Tout dans les tons de beige chocolat, qui sont des tons que moi, j'ai toujours adoré. Très calme.

  • Speaker #0

    Oui. Comment on apporte de la joie dans son intérieur ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, en étant heureux. Mais ça, ça ne passe pas par les collections Kira, non ? Alors moi, j'ai eu un moment de ma vie où j'ai décoré, enfin j'étais décoratrice, j'ai décoré des maisons pour des gens. Ce que j'avais le plus de mal à faire, c'était des gens qui me disaient, clé en main, vous décorez tout jusqu'à la petite cuillère et on s'installe. Je trouvais ça très bizarre, j'avais l'impression qu'ils ne s'installaient pas chez eux. Moi, je crois que la joie, c'est ce qu'une maison raconte en fait. Alors moi, je voyage beaucoup, donc c'est rapporter des choses. On peut, sans voyager, aller dans une petite brocante le dimanche, là où on habite, acheter un tout petit objet qui raconte une histoire, avoir un petit truc d'une de ses grands-mères et puis le petit truc d'un de ses grands-pères. Je ne sais pas, un truc des enfants qui va rappeler quelque chose. Moi, je pense que ça passe plus par l'âme qu'on y met, par l'amour des objets. moi j'ai à Jaipur alors à Au Maroc, c'est des meubles que j'ai fait faire, et puis beaucoup de meubles maçonnés, en fait, parce que c'est comme ça qu'on fait au Maroc. Mais en Inde, comme à Paris, on va dire que 90% de mes meubles, c'est des trucs que j'ai chinés, en fait. Et c'est vraiment... J'aime bien, quoi. Mon meuble vasque, c'est une vieille commode, j'imagine. Une mamie qui rangeait ses chaussettes et ses petites culottes. Voilà, moi, j'aime... Je pense que si votre maison raconte une histoire qui est la vôtre, donc pour moi, il n'y a pas de code. Je déteste les... les styles de maisons tout blancs ou tout comme ci, tout comme ça. Je trouve que c'est vraiment... Et si la maison a une âme avec des objets qu'on aime, qui racontent notre histoire, pour moi, c'est une maison joyeuse.

  • Speaker #0

    Et comment on ose le motif ou la couleur ? Ça, c'est plus difficile.

  • Speaker #1

    Oui, alors, c'est difficile pour moi, parce que pour moi, c'est très instinctif. En tant que décoratrice, je me souviens... C'est bien de décider, un exemple précis d'une cliente où on avait décidé de faire toute l'entrée en vert amande. Et puis quand son mari est arrivé le week-end, il lui a dit « mais pourquoi tout ça c'est vert, on refait en blanc ? » Il y a des gens vraiment que ça dérange. Pour moi, c'est très spontané. Je pense qu'il faut se faire confiance, il faut essayer. Il faut faire des choses pour soi. Je crois aussi que ce qui bloque beaucoup les gens, c'est qu'ils se disent « ah, mais s'il y a quelqu'un qui vient, puis chez ma copine, c'est comme ça. d'ailleurs si je fais un dîner il me faudrait une grande nappe une grande de table, alors qu'en fait, combien de dîners ils font par an ? C'est surtout comment il faut se faire confiance, mais pour plein de choses dans la vie, mais aussi pour sa déco, et se dire là, j'ai envie de rose, parce que j'ai vu ça, j'ai envie que ça explose, je vais mettre un petit coussin rose, on n'est pas obligé de peindre les murs en fuchsia. La peinture, pour moi, c'est facile, parce que je trouve que peindre un mur, c'est juste un dimanche, on en a plein dans l'année des dimanches. Et en fait, pour refaire sa pièce, il faut juste un dimanche, si elle n'est pas trop trop grande. Et un dimanche, il y a un pot de peinture et un pinceau. Donc, oser, en fait. Il faut oser, il faut prendre des risques. Et au pire, ce n'est pas grave. On peut offrir le coussin à une copine ou le mettre en vente sur le bon coin et s'en racheter un autre. Donc, il faut que ça tourne. Moi, j'aime bien aussi que les histoires tournent et ne pas se dire, j'ai cette déco et c'est pour 25 ans et ça ne bougera plus.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #1

    Non, globalement, il ne faut pas se stresser.

  • Speaker #0

    Il ne faut pas se stresser, c'est très agréable à entendre. Dernière question, si tu faisais un dîner sans table, avec six personnes, des personnalités ou pas, connues ou pas, décédées ou pas, qui seraient-elles ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai réfléchi à un dîner de femmes, parce que je fais souvent des dîners de femmes en Inde avec toutes les clés. Tu as envoyé la question hier,

  • Speaker #0

    on va le dire quand même.

  • Speaker #1

    Oui, ça se prépare, parce que sinon...

  • Speaker #0

    C'est la seule question que je... Oui, la seule. En avance. Voilà.

  • Speaker #1

    Alors, spontanément, je me dis Vanessa Paradis. Parce qu'en fait, Vanessa Paradis, c'est une femme de mon âge. Et voilà, qui a toujours gardé sa ligne, qui est joyeuse. Et en fait, on a un peu grandi ensemble. Et je me suis toujours dit que c'était quelqu'un que j'aimerais rencontrer. Qui doit être fort sympathique. Tina Kieffer. Tina Kieffer, parce qu'on en parlait avec l'ONG, les femmes en Inde, etc. Donc, elle a créé l'association, la fondation, je crois qu'on dit, Toutes à l'école. Et elle a scolarisé des centaines de petites filles. Certaines sont devenues des jeunes femmes maintenant au Cambodge. Et qu'en fait, en vrai, quand tu me disais où je voudrais être dans 10 ans, je voudrais être Tina Kieffer. Moi, je voudrais avoir fait un truc comme ça avant de mourir. Je ne sais pas si c'est dans 10 ans ou dans 15 ans. Mais voilà. Donc j'ai... Des milliards de questions à lui poser. Ambre Chalumeau, qui est une jeune femme, parce qu'il faut quand même un peu de sang jeune autour de cette table, qui est une jeune femme qui vient de sortir un premier roman, qui est chroniqueuse, passionnée de littérature. Et quand je l'entends présenter un livre, elle est chroniqueuse et elle a un podcast. J'ai tout le temps envie de le lire. Je trouve qu'elle transmet ça avec une joie naturelle et une passion qui me... qui me plaît énormément. Je n'ai pas du tout le temps de lire dans cette vie et ça me fait du bien de l'écouter. Meryl Streep, parce que pour moi, c'est l'actrice par définition qui a traversé les époques et qui est fidèle à elle-même. Amrita Shergill, qui est une peintre indo-hongroise. qui est née dans les années 20, c'était une peinte dans les années 30. Elle est morte très jeune et elle a beaucoup voyagé. Elle a vécu en Hongrie, puis en Inde, puis à Paris. C'était une femme très moderne pour son époque et qui a réussi à mélanger les cultures. Et ça se retrouve dans sa peinture. Et voilà, elle était féministe, elle était indépendante. Et ça me plaît bien comme idée. Je pense qu'elle aurait vraiment quelque chose à raconter d'intéressant. Elle avait un peu l'âge de mes grands-mères, donc ça serait pas mal. Et puis Françoise Dorgé, la créatrice fondatrice de la marque Caravan. Alors, vous pouvez peut-être trouver bizarre que je parle des concurrents, mais moi, je pense qu'on n'est pas des concurrents. On travaille tous ensemble sur les mêmes marchés. Et Françoise Dorgé, pour moi, elle a tout inventé, en fait. C'est la première qui a ramené l'idée des petits matelas indiens pour en faire des sofas cover. C'était son idée à elle. C'est la première qui a ramené... des tapis marocains, des tentes berbères, et qui s'est dit, on va les mettre dans les appart' des bobos parisiens. Et je pense que toutes les marques de textile, aujourd'hui, on lui doit tout à elle, en fait. Je ne sais pas si nous, on aurait osé le faire, si elle ne l'avait pas fait avant nous.

  • Speaker #0

    C'est smart de lui rendre... C'est très smart de ta part de lui faire ce clin d'œil.

  • Speaker #1

    Oui, mais je trouve que ça, il faut être... Moi, je suis quelqu'un d'assez droit et je trouve qu'il faut être honnête. C'est important, ça lui revient à elle. Après, peut-être qu'on l'aurait fait, peut-être que j'aurais été la première, ça n'aurait pas été elle, mais en tout cas, c'est elle. Et on lui rend, elle n'est plus chez Caravan aujourd'hui, mais ce Caravan d'avant qu'elle a créé à l'époque des... des boutiques, des petites boutiques caravanes et de tout ce qu'elle rapportait. Moi, j'y allais, ça me fascinait. Je n'avais pas mis un pied en Inde. Et puis peut-être aussi parce qu'on aurait des choses à se dire, parce que je pense qu'elle adore l'Inde, qu'elle vit aussi au Maroc et à Paris. Donc, on aurait sûrement des trucs à se raconter.

  • Speaker #0

    Plein de points en commun.

  • Speaker #1

    Voilà. Et si je peux rajouter une septième personne, j'aimerais que ma grand-mère italienne soit là pour que du coup, ce soit elle qui nous prépare les pâtes pour le dîner.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Voilà. Bon, merci beaucoup, Karine. c'était vraiment très sympa d'échanger avec toi c'est marrant toujours une émotion palpable de discuter avec quelqu'un qui travaille avec l'Inde. Je ne sais pas pourquoi, chaque fois ça me fait ça. C'est très fort ce que tu as raconté. C'est vraiment hyper intéressant.

  • Speaker #1

    Peut-être parce que c'est la passion, parce que c'est beaucoup d'amour, beaucoup de passion, beaucoup de patience. Et qu'effectivement, l'Inde, il y a un sujet dont on n'a pas parlé. Je me permets de le faire. Depuis 3-4 ans maintenant, on organise les Tyrannetours. où justement, pour partager cette passion, on accueille dix femmes pendant dix jours à Jaipur et qu'on les promène dans notre vie, dans nos ateliers. Il y a des cours de cuisine, des cours de block print, des cours, des formations, des présentations. On se balade aussi un peu aux alentours de Jaipur, on les emmène à la campagne, dans la famille de Banu en fait, vivre une journée vraiment traditionnelle indienne. Et pour se rattacher à ce que tu disais, je pense que c'est peut-être ça qui est émouvant. C'est que c'est ma vie, c'est ma passion. Et qu'avec les Kirin Tour, on la partage, cette passion.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est qu'un an, quatre fois par an ?

  • Speaker #1

    Non, on l'a fait deux fois par an. L'année dernière, on ne l'a fait qu'une fois. Et cette année, comme on était en pleine restructuration et réécriture de la marque, on ne l'a pas fait. Donc, le prochain sera normalement... en octobre-novembre 2026.

  • Speaker #0

    2026, ok. On peut te contacter. Femme du jour.

  • Speaker #1

    C'est très peu de place.

  • Speaker #0

    Femme du jour, génial. Eh bien, merci beaucoup, Karine.

  • Speaker #1

    Merci, ciao.

  • Speaker #0

    Décodeur, c'est terminé pour aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir écouté en entier. Si vous avez aimé, n'oubliez surtout pas de vous abonner au podcast pour ne pas rater les prochains épisodes et retrouver tous ceux qui ont déjà été enregistrés. N'hésitez pas non plus à le partager en l'envoyant à vos proches qui pourraient être intéressés ou en story Instagram. D'ailleurs, on peut se retrouver sur le compte Décodeur où je poste très régulièrement. Et si jamais vous avez 15 secondes, n'oubliez pas de laisser 5 étoiles ou un avis. C'est juste sous la liste des épisodes. Non seulement ça me fait très plaisir, évidemment, mais dans la jungle des podcasts, plus on a de notes, plus on se fait remarquer, ce qui est très important pour moi. Voilà, merci beaucoup et à tout de suite. très bientôt alors, ici ou ailleurs.

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