- Speaker #0
tous, on a un exemple en tête de quelque chose qui n'a pas été prévu. Mais normalement, l'organisation est suffisamment agile et les personnes connaissent suffisamment l'ensemble des services pour trouver les solutions quand il le faut au dernier moment.
- Speaker #1
Bienvenue sur DinoSapiens. Je suis Bérangère du Cimetière. Je vous emmène à travers les épisodes du podcast à découvrir des facettes de la transformation des organisations avec des invités hors du commun. Elles et ils vous partagent leur expérience et leur savoir-faire. J'ai l'immense privilège aujourd'hui de vous proposer de revenir quelques mois en arrière dans cette parenthèse enchantée des Jeux de Paris 2024. Nous allons nous replonger dans l'organisation de la partie technologique des Jeux. En tant qu'usagers, vous vous en rendez sûrement compte, on ne prend conscience de l'existence ou de l'absence de la technique que lorsqu'il y a quelque chose qui ne marche pas. Et bien sous la surface de l'iceberg de... tout ce qui a fonctionné à merveille durant les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, venez découvrir avec moi la mécanique bien huilée mise en place par la Direction Technologique des Jeux. J'ai la grande chance de croiser le chemin aujourd'hui de Cédric Felous, le programme manager de toute la partie technologique des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Merci à Vincent Delamare, CEO et co-founder de Pélago, pour cette rencontre incroyable. Cédric Felous fait partie des ingénieurs en informatique, qui attachent avant tout une très grande importance au métier des utilisateurs. Toute sa carrière a été bâtie autour de son appétence pour la technologie et sa curiosité pour le terrain. Il commence dans le dur, pour reprendre son expression, sur un grand projet comptable chez EDF-GDF, très structuré. très organisé avant de rejoindre des organisations plus agiles en tant que chef de projet. Il occupe bien souvent des postes nouveaux, en création, à des moments critiques de la transformation des entreprises. En prenant la direction du programme de CRM mondial chez Eden Red au début des années 2000, c'est-à-dire très tôt dans la chronologie des CRM, Cédric Felous gagne la confiance de sa hiérarchie. Il vit ensuite de l'intérieur la transformation du ticket restaurant qui passe en 15 années du papier au titre de... dématérialisé. C'est un changement complet de business model. Eden Red est précurseur sur son marché. En France, en République tchèque, en Italie, Cédric compose avec les dimensions humaines et les dimensions IT avec succès. Il mène à bien les transformations stratégiques comme opérationnelles du groupe Eden Red sur toutes les facettes du nouveau business model au déploiement de nouvelles réglementations. Après Eden Red en 2015, Cédric Felous rejoint une PME dans le secteur de la grande distribution où il dessine le plan directeur de l'IT avant de créer sa propre entreprise puis de bifurquer vers du conseil aux entreprises en tant qu'indépendant. Il scrute alors le terrain de l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Il postule au rôle de programme manager de l'événement, reportant directement au directeur de la technologie, ancien athlète médaillé des Jeux Olympiques de surcroît Bruno Marie-Rose. Cédric nous parle aujourd'hui de son métier. de ceux qui le passionnent et il nous raconte les Jeux de Paris 2024, la gigantesque aventure qu'il a vécue, aux manettes d'un programme technologique et humain réalisé à la perfection. Bonjour Cédric.
- Speaker #0
Bonjour Hergère.
- Speaker #1
Merci infiniment de nous faire partager ton expérience de grand programme IT et en particulier le dernier que tu as mené avec les Jeux Olympiques et Paralympiques. Est-ce que tu pourrais d'abord définir pour nous Ce que tu appelles un programme ?
- Speaker #0
De mon point de vue, c'est souvent un sujet de vocabulaire. On appelle programme souvent un ensemble de projets, quand ces projets sont interdépendants. Quand ils ne sont pas interdépendants, on a un portefeuille de projets qui permet de gérer les ressources d'un projet à l'autre, etc. Mais la particularité du programme, c'est que ces projets sont interdépendants, il y a une coordination des projets à mener, une forte coordination. pas seulement sur les ressources et la disponibilité des ressources, mais aussi sur les fins de projet, les résultats des projets. Et on parle aussi souvent de programme quand ça s'accompagne d'une grande transformation dans l'entreprise. Donc ça peut être un projet SI unique, mais qui a des impacts dans l'ensemble de l'entreprise ou qui est juste une composante de la transformation du métier de l'entreprise, par exemple. Dans ce cas-là, je pense qu'on peut parler de programme parce qu'il y a une nécessité de coordonner l'ensemble des projets et pas seulement de les piloter en parallèle.
- Speaker #1
Et l'ensemble des fonctions aussi peut-être ?
- Speaker #0
Et l'ensemble des fonctions qui peuvent être impactées ou qui peuvent être... partie prenante de ce programme.
- Speaker #1
Et quels sont les principaux enjeux d'une transformation comme celle que tu as accompagnée chez Eden Red, le leader mondial du titre restaurant ?
- Speaker #0
Justement, c'était un cas de transformation plus qu'une transformation interne ou organisationnelle. C'était une vraie transformation du business model. Même si on a l'impression que le ticket restaurant papier ou électronique peut être équivalent, ça s'accompagnait d'une vraie transformation du business model, d'une entrée sur un marché différent avec des concurrents différents. Et donc il y avait des impacts sur l'ensemble du cœur de métier. Donc sur la production, puisqu'il s'agissait d'une production électronique et plus de production papier, mais aussi toute la partie marketing, toute la partie vente et toute l'organisation du groupe s'en est trouvée changée, y compris à l'international, puisque chaque filiale sur le papier était assez indépendante. Et avec l'introduction du ticket restaurant électronique et de l'ensemble des produits électroniques, il a fallu mutualiser de plus en plus des services. La difficulté dans ces cas-là, ça a été d'anticiper suffisamment cette transformation. Eden Red, ou en tout cas Accor Service à l'époque, était une division du groupe Accor qui a beaucoup d'argent, avec un business model très profitable. Et la difficulté était de se dire, on va changer de business model, mais cette profitabilité, il faut la conserver. Donc il fallait être capable de se transformer tout en continuant à générer du profit, de se transformer et de ne pas attendre et tirer l'ancien modèle jusqu'au bout. parce qu'on savait qu'il y aurait ce moment-là un trou, voire un retard sur le marché. Donc ça a été la complexité, ça a été d'anticiper ça. Ça n'a pas été simple, ça a pris beaucoup de temps, ça a demandé aussi pas mal de changements à la tête de l'entreprise pour emporter tout ça. Ça a demandé pas mal de courage, ça a demandé beaucoup de communication. Faire en sorte que l'ensemble des équipes partagent cette conviction, la nécessité et l'intérêt de ce changement, et de partager cet objectif dans toute l'organisation. C'était un enjeu... organisationnel, humain, qui était vraiment important. Quand on a un changement de business model comme ça, on injecte des nouvelles compétences, on va aller chercher des compétences sur le marché. Ça, ça n'a pas été facile de les intégrer. Il y a un peu cette bataille des anciens contre les nouveaux. Au départ, c'est les nouveaux qui perdent. Ils étaient dans un coin et puis personne ne voulait leur parler parce qu'ils étaient ceux qui allaient complètement changer la vie de tout le monde. Et puis petit à petit, c'est eux qui sont devenus... qui ont eu les budgets, qui ont été mis en avant sur la communication, etc. Et là, il a fallu aussi embarquer les anciens qui, eux, devaient se transformer et qu'on a dû accompagner dans l'évolution de leur métier, y compris avec des objectifs individuels.
- Speaker #1
Merci beaucoup, puisque c'est très important, ces éléments. La dimension de ce programme, ça a été quelque chose déjà de gigantesque. Et alors maintenant, passons à la deuxième partie, sur les Jeux de Paris 2024. le deuxième grand programme marquant de ta carrière et pas des moindres. Cet événement de portée planétaire était absolument gigantesque en termes de moyens et de portée. Peux-tu nous partager quelques chiffres sur la partie technologique ?
- Speaker #0
Oui, c'est vrai que les chiffres sont assez importants. Le premier, ce n'est pas un chiffre technologique, mais ça donne une idée de l'ampleur. Il y a eu 13,5 millions de spectateurs pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques, et donc beaucoup de services autour. Donc si on en vient à la technologie... On avait de la technologie déployée, alors il y avait 32 sports olympiques et 22 sports paralympiques sur une cinquantaine de sites majeurs. Donc les sites majeurs avec de la retransmission, avec une grosse présence de la technologie. Mais globalement, il y avait presque 200 sites sur lesquels la technologie était présente, sur lesquels des services technologiques étaient apportés, et notamment en termes de réseau. En termes d'équipement, ça voulait dire aussi qu'on a déployé par exemple plus de 9000 bornes Wi-Fi, qu'on a déployé 28000 équipements informatiques. des ordinateurs, des imprimantes, etc. Et donc tous ces déploiements-là permettaient d'opérer l'ensemble des systèmes nécessaires au jeu. Alors les systèmes, c'était par exemple un peu plus de 180 applications qu'il a fallu mettre en place, déployer pendant les jeux. Et puis des technologies un peu plus proches de l'événementiel, avec les écrans géants, les 7700 m² d'écrans géants qui ont été déployés, le tout supporté par... Le chiffre le plus emblématique sur le réseau qui est la longueur totale de fibre optique utilisée, ça ne veut pas dire nouvelle, mais utilisée, qui était de presque 400 000 kilomètres latéral à l'une.
- Speaker #1
Impressionnant, on ne s'imagine pas. Quelles sont les principales briques technologiques du projet ?
- Speaker #0
Les principales briques... J'en ai parlé un petit peu avec les chiffres clés. Il y a évidemment tous les systèmes d'information qui permettent de déployer des services, le contrôle d'accès, la billetterie, les services de food and beverage sur les sites, les services de transport qui sont très importants pour les athlètes, pour les médias, etc. Tous ces services sont sous-tendus par des équipements IT, des équipements réseau. Et puis il y a ces services technologiques plus liés à l'événementiel dont je parlais, liés à l'audiovisuel. les écrans géants, les systèmes de sonorisation sur les sites, et puis tout le service pour le broadcast. Il y a un broadcaster qui est une filiale du CIO, qui est en charge de mettre en image l'ensemble des jeux, et qui évidemment sont très consommateurs de services technologiques. Et en parallèle de tout ça, il y a évidemment les sujets de cybersécurité qui étaient constamment dans nos têtes, et qui ont un impact sur l'ensemble des sujets de la technologie. Et alors,
- Speaker #1
comment faut-il s'y prendre pour créer de zéro la partie technologique d'un projet d'ampleur internationale comme les Jeux et le réussir aussi bien, il faut dire ?
- Speaker #0
Pour partir de zéro, en fait, on est parti d'une vision qui avait été définie pour Paris 2024 globalement. Et je pense que ça a été une vraie force du projet global. C'est que cette vision qui avait été définie au moment de la candidature, il y avait eu beaucoup de travail au moment de la candidature, pour définir les objectifs globaux, la vision du projet et l'identité. des Jeux de Paris 2024, on a eu la chance et on a eu la possibilité et on a un management qui a cru jusqu'au bout, qui n'a rien lâché sur cette vision-là. Et cette vision, elle a été déclinée aussi en termes de technologie. On s'est donné des objectifs et on a réussi à les tenir. Les objectifs, c'était développer une expérience unique. Alors, c'est ce que disent souvent l'ensemble des directions technologiques des Jeux Olympiques et Paralympiques, mais pour nous, c'était l'expérience unique un peu plus. plus que ce qui avait été fait avant. Et puis c'était donc ambitieux, c'était innovant aussi, on avait un programme d'innovation sur la technologie et puis aussi avec des objectifs forts en termes de durabilité, de sobriété et là aussi c'était une déclinaison des objectifs de Paris 2024 qui était vraiment important. Après ce qu'on a mis en place aussi et ce que le directeur de la technologie Bruno Marie-Rose a su mettre en place, a voulu mettre en place dès le départ, c'était vraiment un état d'esprit particulier pour embarquer toutes les équipes. La première chose c'était... on y reviendra dans la transformation et dans la gestion des personnes, c'est l'évolution permanente. C'est un projet pendant 7 ans qui est en évolution permanente. Et l'organisation est en évolution permanente. Et le deuxième état d'esprit important, un mindset important, c'est créer la confiance autour de la technologie. De se dire que tous nos interlocuteurs, les parties prenantes, le CIO, les clients que sont la presse, les broadcasters, les partenaires ou les fonctions internes, la fonction financière par exemple. Être capable de créer cette confiance et de leur dire, voilà, être transparent sur ce que nous on fait, être transparent sur nos difficultés, mais leur dire ce qu'on vous dit, c'est ce qui va se passer. Et ça, ça a été un point important dès le départ, de se dire, on joue cette transparence et on crée cette confiance mutuelle jusqu'au bout. Et ça nous a aidés jusqu'au bout.
- Speaker #1
Quel était ton rôle exactement dans cette organisation ?
- Speaker #0
Le programme management, c'était beaucoup de coordination autour des sujets transverses, de budget, de planification, de gestion des risques. J'avais aussi dans mon périmètre la workforce management. Donc tous les sujets organisationnels et un peu de logistique qu'on appelle mobilisation, qui était de dire donner les moyens à tout le monde pendant les Jeux d'être au bon moment, au bon endroit, avec les bonnes formations, avec le bon transport, avec les bons services de restauration, d'hébergement. Tous ces sujets-là qui permettaient. La technologie, c'était 5300 personnes pendant les jeux. Et donc l'objectif, c'était que chacun soit au bon endroit au bon moment et avec les bonnes conditions pour faire son travail. Et en amont de ça, pour arriver à ce niveau de préparation, il y a toute la préparation amont et toute l'organisation de ce qu'on appelait la readiness et l'ensemble des événements, l'ensemble des plans de préparation collectives des équipes. Donc on a les événements test, on a des exercices de simulation, de répétition. On a des formations, évidemment. Et ces sujets-là étaient coordonnés par l'équipe de programme management. Et la dernière petite chose qui était dans ce périmètre-là, c'est le transfert of knowledge, capitalisé sur notre expérience pour partager cette expérience avec les futurs comités d'organisation.
- Speaker #1
Incroyable. Incroyable, t'as imaginé toute la préparation à mon 7 ans.
- Speaker #0
Oui, le premier, c'était Bruno Marie-Rose, qui est arrivé en premier dans l'organisation 7 ans avant les Jeux. Et puis petit à petit, il y a eu une montée en puissance progressive pour arriver pendant les Jeux à 5300 personnes sur la technologie. Sur l'ensemble des Jeux, on est plus en centaines de milliers.
- Speaker #1
On va en parler. Alors, quelle est ta plus grande fierté en tant que programme manager des Jeux ?
- Speaker #0
Ma fierté, elle est collective. C'est un peu facile de dire ça, mais c'est vrai. C'est-à-dire qu'on a répondu aux attentes. On le voit quand on en parle avec des gens qui nous disent « c'était bien » . On a répondu à notre propre exigence avec cette vision dont je parlais. On a tenu nos objectifs. C'est même plus que tenir. On était embarqués avec nos objectifs et on se les a appropriés et on les a livrés. Ça, ça a été une vraie fierté. Et puis après, d'un point de vue plus personnel, c'est le fait de pouvoir dire autour de moi que j'ai participé à ce projet-là. Et ça, c'est pour la vie. Je sais que je l'ai fait. Je sais que j'y ai participé. Et quoi qu'il arrive... Ça a marché.
- Speaker #1
Et rien ne pourra te l'enlever.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
Quand nous avons préparé l'épisode, il y a un aspect qui m'a vraiment marqué, c'est la gestion des effectifs, tant d'un point de vue humain que des activités et des contrats. Tu peux nous raconter ?
- Speaker #0
Oui, en fait, je parlais tout à l'heure de l'évolution permanente. C'est vrai que sur sept ans, mais en fait, les trois premières années, il y a peu de monde, on est dans la définition des principes, etc. Mais globalement, toutes les personnes qui arrivent au fur et à mesure, elles vont avoir plusieurs vies pendant tout le projet. Donc, il va y avoir des phases de design, il va y avoir des phases d'implémentation, de déploiement, il va y avoir des phases d'opération à la fin, pendant les jeux. Et l'objectif, parce qu'en fait, il y a des contraintes budgétaires, parce qu'il y a des contraintes de temps, on ne va pas avoir des gens spécialisés sur l'ensemble de ces phases. Donc il va falloir préparer ces personnes et toute la workforce à être complètement agiles et à pouvoir se transformer et changer de métier, avec même des allers-retours parce qu'il y a certaines choses qui sont en production bien avant et puis qui repartent après en design sur d'autres services. Et donc il va falloir adapter toutes ces personnes, ou en tout cas les accompagner dans ces changements. Ça a un impact sur le recrutement, donc peut-être qu'on ne va pas prendre le meilleur expert de l'architecture informatique. Mais on va prendre celui dont on sait qu'il va pouvoir designer une architecture solide, mais qui en plus va pouvoir être en opération pendant les jeux et en gestion de ces opérations pendant les jeux. Ça veut dire un accompagnement permanent, c'est ce que je disais. C'est-à-dire qu'on avait fait le choix et on avait cette... Je parlais des objectifs qu'on s'était donné à nous-mêmes. Un de ces objectifs, c'était de dire, on va proposer à tout le monde de rester jusqu'au bout. Parce qu'on aurait pu dire, il y a des gens qui sont spécialistes du design, et après on n'en a plus vraiment besoin. Et bien on les laisse repartir. on a voulu proposer à tout le monde de rester jusqu'au bout. Et donc ça veut dire qu'il fallait les accompagner, parce qu'évidemment, il n'y a plus rien à designer pendant les jeux. Donc il fallait qu'ils soient sur une autre fonction. Ça veut dire qu'on a défini des cycles de préparation, des cycles de formation, des répétitions, des ajustements sur l'organisation, sur les procédures, etc. Et puis on recommence. Et tous ces cycles-là, au fur et à mesure, on accueille de nouvelles personnes, puisqu'on recrutait en permanence. Et ces cycles-là venaient s'enrichir des nouvelles personnes qui arrivaient. Donc il fallait créer la confiance, le dialogue avec chacun, anticiper les coups de moins bien de certains, les doutes. Est-ce que je serais capable d'être en opération ? Parce que certains ne l'ont jamais fait. Il fallait qu'on ait une confiance mutuelle, qu'on sache qu'il y a un contrat. Parce qu'évidemment, on ne peut pas se permettre un échec pendant les opérations. Donc il fallait une confiance mutuelle, être sûr que la personne se sente à l'aise, et être sûr que le management se sente à l'aise pour lui confier les choses. D'autant qu'une fois qu'on est en opération, les gens ont un rôle. Et là, on n'a plus beaucoup de temps pour communiquer, etc. Il y a un objectif de résoudre 95% des incidents directement sur le site. Sinon, le centre des opérations est complètement submergé. Donc cet objectif-là, ça veut dire une grande autonomie pour les personnes, ça veut dire les accompagner. Et cette confiance-là, on crée pendant les années de préparation et ces cycles de préparation avec les équipes. Donc c'est beaucoup de management, au sens classique, mais un peu accéléré quand même, parce que ça se passe sur des cycles assez courts. parce qu'il y a chacun d'entre nous, on a vécu beaucoup de phases d'une vie professionnelle normale en quelques années.
- Speaker #1
Et les grandes manœuvres de l'événementiel, de la préparation amont aux exercices et à la fin de l'histoire, ça ressemble à quoi ?
- Speaker #0
En fait, les opérations, je parle beaucoup pour la technologie, mais c'est vrai pour l'ensemble des fonctions, c'est deux fois quinze jours, c'est très court dans le temps, même s'il y a des choses un peu en amont, etc. La billetterie commence... plus tôt, la gestion des volontaires commence plus tôt, mais globalement les opérations c'est deux fois quinze jours. C'est une mécanique qui est forcément très huilée, très processée. Il y a beaucoup de politiques et procédures qui permettent d'encadrer le travail, de savoir comment réagir et d'anticiper la plupart des événements. Et donc ça veut dire que la préparation elle se fait à plusieurs niveaux. Il faut se préparer individuellement, préparer les collaborateurs. Il y avait des programmes d'observation sur des événements. Ils sont allés à Tokyo, ils sont allés sur les jeux du Commonwealth à Birmingham pour voir comment ça se passait, pour comprendre. pour voir des opérations. Il y en a certains même qui sont allés tenir des rôles opérationnels à Tokyo, dans un programme de détachement. De la même façon que nous, on a accueilli des gens de Los Angeles en détachement pendant les Jeux. Et puis, il y a la préparation des modèles de support. Ce que je disais, écrire les procédures, être sûr qu'on anticipe le plus possible tous les problèmes qui peuvent arriver et savoir comment réagir dans ce cas-là. Et puis, évidemment, se former à ces procédures, les tester sur des événements, voir si elles fonctionnent, et puis les améliorer dans un cycle d'amélioration continue. Et puis le dernier niveau de préparation, c'est la préparation de l'organisation, être sûr que tout le monde fonctionne bien ensemble, que le centre des opérations fonctionne bien avec les sites, communique bien, que tout le monde est clair sur comment travailler avec les autres, parce qu'il n'y a pas de place pendant les opérations pour l'improvisation. Et donc ça, ça passe beaucoup par des simulations, par des exercices tabletop, et puis des répétitions. Et sur la technologie, on a deux exercices particuliers qui ont été faits en mars et en mai 2024, où on met sous. sous stress l'ensemble de l'organisation. Il y avait plus de 1000 participants avec des scénarios de tests un peu catastrophiques pour voir comment réagissent les équipes sous stress, comment réagissent les équipes face à un événement connu mais... un peu inimaginable. Et voilà, ça fait partie de la préparation, de stresser l'organisation pour qu'elle se sente prête et en confiance, suffisamment de confiance pour aller opérer les jeux.
- Speaker #1
La partie technologique des JO, c'est presque un commando de l'armée alors ?
- Speaker #0
Oui, j'avais fait visiter à un moment notre centre des opérations, un général de l'armée justement, qui travaillait autour des jeux pour l'État. Et on avait fait ce parallèle en fait, c'est-à-dire que ce que nous on appelait nos répétitions technologiques, en fait ils me disaient que c'était... très très ressemblant à des manœuvres militaires. Et c'est le même type d'exercice avec l'organisation en place et des événements qui sont déclenchés. Et évaluer la réaction des équipes, la préparation des équipes et éventuellement ajuster l'organisation.
- Speaker #1
Donc rien n'est improvisé, il y a une confiance absolue entre les femmes et les hommes qui travaillent sur l'événement et on répète.
- Speaker #0
Oui, c'est ça. Après, tous, on a un exemple en tête de quelque chose qui n'a pas été prévu. Et on... Mais... Normalement, l'organisation est suffisamment agile et les personnes connaissent suffisamment l'ensemble des services pour trouver les solutions quand il le faut, au dernier moment, etc. On a tous en tête des exemples de 30 minutes avant, il y a quelque chose qui ne marche pas, il faut comprendre, il faut trouver la solution.
- Speaker #1
Quelles émotions t'ont traversé du début à la dissolution de l'organisation ?
- Speaker #0
À peu près toutes. C'est des émotions, beaucoup d'émotions collectives, de fatigue, de transport. mais aussi de coordination, de succès collectif, de solidarité, d'émerveillement aussi parce que globalement on était quand même un groupe de gens passionnés, on savait tous pourquoi on travaillait, donc il y a beaucoup de ces émotions collectives. Si je parle un peu plus de moi, mes moteurs tout au long du projet c'était beaucoup la fierté d'en faire partie, la fierté de contribuer à un événement qui compte beaucoup pour moi d'un point de vue personnel parce que... parce que j'ai toujours suivi les Jeux Olympiques et Paralympiques, et puis parce que c'était dans ma ville. Donc ça, c'était vraiment un moteur pour moi. Et puis, ma passion du sport faisait que je me rappelais toujours qu'on était là pour travailler pour les athlètes, pour leur donner les conditions de s'exprimer, de faire des exploits et de retransmettre ces exploits au monde entier. Et de ce point de vue-là, travailler dans l'équipe de Bruno Marie-Rose, qui avait vécu ça en tant qu'athlète, voilà, de tout. de temps en temps, quand on est fin de journée, fatigué, etc. Il y avait une petite anecdote qui nous... Il en avait beaucoup, mais il ne leur donnait pas beaucoup. Mais de temps en temps, il expliquait, là à Los Angeles, j'étais dans le couloir à côté de Carl Lewis. Forcément, c'est des moments, ça rebooste un peu, parce qu'on se rappelle qu'on travaille pour ça. On travaillait avec Bruno, de ce point de vue-là, et c'était un petit plus. Il y avait d'autres Olympiens dans l'organisation, mais évidemment, la proximité avec Bruno était importante.
- Speaker #1
Et alors après ? Comment se fait le transfert de compétences ? C'est fini ? On replie ? Il y a un certain temps pour replier l'organisation ? Comment on transfère ?
- Speaker #0
Alors, il y a deux choses dans ta question. Il y a la dissolution, c'est-à-dire qu'effectivement, comment est-ce qu'on ferme l'organisation ? Donc là, il y a quelques mois, c'est encore en cours. C'est prévu jusqu'en juin 2025. Après, ça va être l'organisation et l'association va être confiée à un liquidateur, etc. Mais donc, il n'y a que... encore quelques personnes qui travaillaient à la dissolution, c'est-à-dire clôturer les contrats, etc. Ça, ça se fait très vite. C'est-à-dire que le 15 septembre, il n'y avait plus qu'un quart des effectifs, et l'ensemble des partenaires, la plupart des partenaires étaient déjà partis. Donc on était quelques centaines, et puis ça s'est descendu très très vite. Donc ça, c'est la dissolution. Fermer proprement, fermer les contrats, s'assurer que le liquidateur n'aura pas de litiges à gérer, etc. C'est la première chose. La deuxième chose, c'est le transfert de compétences, mais en fait, je parlerai plus d'un transfert d'expérience. qui a un partage d'expérience que d'un transfert de compétences. Tous les jeux sont différents, tous les jeux doivent se démarquer des précédents, ils ont une identité particulière. Nous, évidemment, on avait comme référence Tokyo, mais qui était un peu particulier avec le Covid. On avait Rio, on avait Londres, qui étaient des éditions. Et Pékin, si on remonte dans les 15 dernières années, c'était des éditions complètement différentes. Et nous aussi, on a voulu se démarquer. Donc, au-delà d'un transfert de compétences, oui, il y a quelques petites choses qu'on peut donner. C'est surtout un transfert d'expérience, un partage d'expérience, pour leur dire, voilà. Vous allez vous poser ces questions-là, on ne sait pas comment vous allez y répondre, mais pensez-y. À un moment, il va falloir que vous y répondiez. Nous, on peut vous dire comment on y a répondu, mais de toute façon, vous aurez votre propre réponse, donc ce n'est pas un problème. Mais c'est comme ça qu'on a essayé d'orienter ce partage d'expérience avec les équipes. Et puis, il y a beaucoup d'interactions avec les équipes. Nous, à cause du Covid, on n'a pas beaucoup échangé avec Tokyo, mais les équipes de Los Angeles pour 2028 et de Milan Cortina pour 2026, on les connaît bien. Ils sont venus souvent. et on a beaucoup échangé avec eux.
- Speaker #1
Merci. Alors, pour finir sur cet événement extraordinaire, est-ce que tu as un souvenir, une anecdote, un tour de main qui t'est plus cher et que tu emportes avec toi dans ta prochaine aventure ?
- Speaker #0
Plein de souvenirs personnels. Question difficile. Question difficile. Question difficile. On a tous en tête le moment, etc. Beaucoup de souvenirs personnels, beaucoup de moments. Voilà, la cérémonie d'ouverture que j'ai vécue à notre siège, au siège de Paris 2024 avec mes collègues. C'est-à-dire qu'on n'était pas en shift à ce moment-là, c'était d'autres personnes, mais on est restés quand même à côté, en soutien de nos collègues, et puis on regardait la cérémonie d'ouverture ensemble et on voyait que tout se passait bien. C'est bien, bon, il pleuvait un peu, mais globalement, c'était un moment partagé assez incroyable. J'y étais aussi,
- Speaker #1
je confirme, il pleuvait un peu.
- Speaker #0
et puis on a fait un moment, un séminaire technologique à l'INSEP, moi j'étais jamais allé à l'INSEP donc c'est l'Institut National du Sport c'était un moment incroyable, c'est des images qu'on voit à la télé et puis on est allé on a découvert cet endroit central du sport en France c'était un moment personnellement très fort on a même défilé sur les Champs-Elysées le 14 septembre avec les athlètes le comité d'organisation, on a eu cette Ausha alors nos patrons et Tony Estanguet en premier ont On parlait de l'armée bleue parce qu'on avait nos uniformes bleus et donc on a défilé comme l'armée bleue sur les Champs-Élysées. Donc ça, c'est des moments intenses, très, très intenses, très forts qu'on a vécu et que j'emporte avec moi, clairement. Et après, d'un point de vue plus professionnel... C'est la solidarité des équipes. Le fait qu'on ait cet objectif commun, qu'on sache qu'on partira tous ensemble et donc on réussira tous ensemble. Il y avait un esprit de solidarité en particulier dans mon équipe parce qu'en fonction des sujets, on avait tous des sujets transverses. Donc en fonction des sujets, l'intensité n'était pas forcément au même moment. Et l'équipe était en permanence à s'entraider, à se dire « Moi j'ai un peu de temps, est-ce que je peux faire ça pour toi ? » Repérer les moments difficiles pour certains, travailler ensemble. à résoudre des problèmes. C'était vrai dans mon équipe, c'était vrai entre les équipes, c'était vrai au niveau de la direction de technologie. On avait ce niveau de solidarité et ça, d'un point de vue professionnel, c'est ça que je retiens, qui était vraiment très fort. Et c'est des conditions particulières, mais réussir à s'approcher de ça dans mes futures expériences de management, ça sera un objectif. De se dire que, de créer cette solidarité sur l'ensemble de l'équipe.
- Speaker #1
Et quels conseils voudrais-tu donner aux jeunes femmes et aux jeunes hommes qui se lancent dans les métiers de la technologie pour les inspirer dans leur parcours ?
- Speaker #0
On parle beaucoup de la révolution numérique, enfin des révolutions numériques, parce que depuis le temps qu'on en parle, il y a eu plusieurs couches. Et la dernière évidemment qui est très à la mode, c'est l'intelligence artificielle, qui est vraiment dont tout le monde parle en ce moment. Moi je dirais que quelqu'un qui veut se diriger vers ça, c'est... Ils gardent en tête que tu vas participer, tu vas contribuer à une révolution. Je pense que c'est un peu comme les ingénieurs posés chaussés au 19e siècle ou qui concevaient les viaducs pour les lignes de chemin de fer, ou les ingénieurs qui ont développé la révolution automobile, etc. Je pense que travailler dans ce domaine aujourd'hui, c'est faire partie d'une révolution comme ça et d'amener cette technologie au quotidien, au service de chacun. le plus possible, parce que ça c'est aussi mon moteur personnel de se dire qu'on travaille pour chacun et pour améliorer la vie de tout le monde et que le numérique ça doit être ça.
- Speaker #1
Un grand merci Cédric d'être venu nous partager cette aventure extraordinaire, aussi riche. Je pense que moi je ne soupçonnais pas du tout l'ampleur de l'événement et du programme que tu as géré.
- Speaker #0
Merci à toi. C'était un Un grand plaisir de se replonger dans ces souvenirs-là, je ne le cache pas. Et en préparant et dans les premières discussions qu'on a eues, je me suis dit, ah tiens, oui, c'est vrai, il faudrait que je dise ça. Mais il y en a plein d'autres. Et je pense que chacun d'entre nous, on pourrait amener autant de visions, autant d'anecdotes, etc. Mais plus quand même probablement la fierté d'avoir bien réussi le truc.
- Speaker #1
Est-ce qu'il y a quelques personnes à qui tu veux rendre hommage en particulier ?
- Speaker #0
J'en ai parlé un petit peu tout au long. mais c'est parti enfin tout est parti quand même de nos patrons Tony et Stang en tête cette vision qui avait été définie parce qu'il a commencé avec la candidature cette vision qui avait été définie qu'il a tenue et puis il a toujours été notre tête de pont et toujours avec nous toujours très solidaire des équipes etc et ça s'est retrouvé à tous les niveaux avec Bruno avec l'ensemble des directeurs technologie et du board technologie et puis au sein de nos équipes j'espère voilà c'était c'était un Un projet complètement collectif.
- Speaker #1
Merci beaucoup.
- Speaker #0
Merci à toi.
- Speaker #1
La parenthèse enchantée des Jeux se referme maintenant dans Dino Sapiens. Je ne sais pas vous, mais moi, je ressens encore l'émotion de ce grand événement qu'on a vécu l'été dernier. Je voudrais avec cet épisode très humblement remercier toutes celles et ceux qui ont travaillé sur les Jeux de Paris 2024, qui m'ont fait vibrer et rêver, et qui m'ont permis de découvrir ma ville sous les couleurs magnifiques d'un esprit olympique. humain et rayonnant. Je me permets aussi de dédier cet épisode aux équipes avec lesquelles je travaille actuellement sur un projet technologique important et innovant qui ont cette conviction qu'ensemble, on peut défier la complexité et aller plus loin. À très vite sur Dinosapiens, et d'ici là, évitons l'extinction !