- Speaker #0
Bonjour à toutes et tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Décis des Hommes. Aujourd'hui, on va explorer un domaine à la croisée des chemins entre l'art et le numérique. Notre invité est Jean-Noël Lafargue, chercheur, auteur, artiste, enseignant. Il a contribué à tout un tas de projets qui va nous expliquer, autant des ouvrages de vulgarisation sur l'informatique, bandes dessinées, œuvres, etc. Jean-Noël, merci de vous joindre à nous.
- Speaker #1
Merci de m'accueillir.
- Speaker #0
Pour commencer, je pose toujours la même question à mes invités, c'est quel est votre tout premier souvenir de numérique ?
- Speaker #1
Oui, alors ça, ce n'est pas très dur de se rappeler. Pour moi, le premier souvenir, alors ça ne s'appelait pas numérique à l'époque, on n'avait pas l'idée de ce mot, c'était de l'ordinateur. C'est ce que je voyais dans les séries télévisées, et notamment une qui s'appelait L'Homme Invisible. Et donc, on voyait des grosses armoires avec... des dérouleurs de bandes magnétiques qui tournaient en permanence. Quand on posait une question à la machine, les bandes magnétiques se mettaient à tourner et on entendait des cliquetis étranges. Ça me fascinait. Je trouvais ça génial, une espèce de machine à penser un petit peu. Enfant assez petit, je m'intéressais à ça bien avant que les gens aient un ordinateur chez eux. Puis un petit peu plus tard, je me rappelle aussi, et là c'est un moment important, d'une image sur papier listing, donc un papier avec des picots sur le côté, et puis en vert et blanc, avec des lignes vertes et blanches, qui représentait le visage de Jésus, écrit avec des caractères, avec des lettres, et puis avec des nombres, avec des chiffres. Et le curé de ma vie adorait cette image. Pour lui, ça voulait dire que c'était la preuve que Dieu n'était pas l'ennemi de la science ou que la science n'était pas l'ennemi de Dieu. Et pour moi, ça voulait dire qu'on pouvait faire des images avec des lettres. Et je trouvais ça super aussi. C'est un autre souvenir de l'ordinateur. Mon troisième vrai souvenir, c'est 1982, où j'ai eu mon premier ordinateur.
- Speaker #0
C'était... C'était quoi comme ordinateur, la marque
- Speaker #1
Sipo ? C'était un Sinclair ZX81. C'était un tout petit ordinateur qu'on branchait sur la télé. C'était un petit boîtier en plastique. Il avait un kilo-octet de mémoire vive. On pouvait rentrer juste une page de code et on ne pouvait faire que coder. Il n'y avait pas de programme, il n'y avait pas d'interface, il n'y avait pas de souris. La seule interface, disons, c'était un prompt où on pouvait commencer à écrire. un programme en basique et puis quand on avait fini on écrivait run et ça lançait le programme.
- Speaker #0
Donc début des années 80 on parlait déjà de prompt. Oui,
- Speaker #1
non, ça c'est venu avec Linux, le mot prompt, je ne le connaissais pas en tout cas à l'époque. Pas qu'on disait l'invite.
- Speaker #0
Oui sûrement, c'était l'invite, c'était sur du style DOS ou des choses comme ça. Mais bien sûr. Oui, bien avant. Parfait, parfait. On va rentrer un peu plus dans votre parcours, parce que votre parcours, il y a plusieurs facettes. L'enseignement des nouveaux médias dans des écoles, dans des beaux-arts, d'après ce que j'ai pu voir, à différentes contributions littéraires, avec aussi des collaborations à des artistes. Qu'est-ce qui vous a conduit à arriver à ce croisement entre l'art numérique ? et aussi la pédagogie, parce que vous avez beaucoup de livres qui permettent de vulgariser l'informatique.
- Speaker #1
Tout à fait, c'est un petit peu le hasard en fait. Je suis entré au Beaux-Arts avec l'idée de devenir peintre, j'étais peintre réaliste, je voulais faire des... à une époque où ça ne se faisait plus trop d'ailleurs, il n'y avait pas tellement de peinture figurative, c'était mal vu. J'aimais beaucoup l'ordinateur, j'aimais le jeu vidéo à l'époque, mais pour moi, ce n'était pas lié, il n'y avait aucun rapport entre les deux. Et puis, j'ai dû faire mon service national, qui a duré deux ans. C'était un service d'objecteur de conscience, un service civil. Et j'étais dans un ministère où j'ai appris l'informatique, que je connaissais déjà un petit peu, mais là, j'ai vu l'informatique dans le monde du travail, pas juste comme jouet. parce que pour moi avant ça c'était un jouet. Je n'ai toujours pas cru que ça avait un rapport avec l'art, mais par contre j'ai commencé à bien connaître. Et puis j'ai quitté les Beaux-Arts pour rentrer à l'université avec l'idée de devenir prof de collège ou quelque chose comme ça. en art plastique. J'étais un jeune papa, donc il fallait que je sois un peu responsable. Et puis, ce n'est pas ce qui s'est passé. Je suis tombé sur une équipe incroyable en art plastique qui faisait des CD-ROM. C'était la grande époque du CD-ROM. Elle était vraiment très créative. J'ai compris qu'on pouvait faire de l'art avec l'ordinateur. Ça m'a passionné. Je me suis lancé là-dedans. Comme j'étais finalement assez bon pour l'art. pour aider les autres étudiants. Très, très vite, on m'a proposé une charge de cours. Et puis, de fil en aiguille, je suis devenu prof en école d'art. C'est très bizarre, mais ça s'est passé comme ça, par le hasard et puis le goût. Il n'y avait pas de plan.
- Speaker #0
Il n'y avait pas de plan. Ça arrivait là, comme ça, par hasard. Parce que vous l'avez dit, vous avez été très tôt dans le... la partie informatique enfin vous avez déjà été attiré par ça puis sûrement par le côté art aussi et finalement vous avez réussi à lier les deux c'est ça qui est aussi intéressant quoi sans penser que ça se passerait mais oui c'est exactement ce qui s'est passé et donc c'est le hasard le goût et puis aussi les personnes je suis tombé sur tout un tas de gens qui
- Speaker #1
ont cru en moi
- Speaker #0
Oui et puis j'avais écouté dans un TEDx que vous avez fait sur le fait aussi que très tôt vous avez été sensibilisés au fait que dans vos cours vos cours que le numérique allait prendre une place voilà je crois que au début vous étiez sur la partie retouche photo retouche photo et tout de suite vos profs disaient que bientôt les machines vont arriver bientôt enfin voilà que c'était trop tôt au moment où vous avez des études mais il fallait s'y préparer c'était un peu tout à fait mais ça c'est la même avant les beaux arbres
- Speaker #1
J'ai fait un lycée professionnel de retouche photo. Et c'était la retouche photo sans Photoshop, au pinceau, au crayon. Donc un métier qui n'existe plus. J'ai été formé trois ans à un métier qui a disparu complètement. Mais ce qui m'a appris quand même beaucoup de choses, bien sûr. Et c'est très bien pour ça. Mais voilà, là j'ai pu voir de près ce que fait le changement numérique. C'est-à-dire le fait que... un métier puisse complètement disparaître ou alors se transformer à un point incroyable. Je me rappelle que sous Photoshop, par exemple, alors que moi j'avais été formé très longtemps, mon épouse était plutôt meilleure que moi en très peu de temps. Alors qu'elle n'avait pas été spécialement formée à la retouche, mais l'outil avait changé le... Il obligeait toujours à avoir un œil, etc. Mais il y a tout un tas de savoir-faire dont il n'y avait plus besoin, comme savoir tailler ses crayons et nettoyer ses pinceaux, etc.
- Speaker #0
Justement, vous avez vu vraiment ce métier changer. Ce n'était pas vraiment votre métier au final. Vous avez, comme on dirait dans le monde de la start-up, pivoté. Vous avez pivoté. Et justement... pour aller dans cet échange-là. Pour vous, le numérique est en train de changer le monde, mais comment il est en train de changer la partie art et culture au sens large ? Parce que désormais, les artistes peuvent partager leurs œuvres en ligne, ils peuvent forcément aussi atteindre un public beaucoup plus large, ils utilisent aussi des outils innovants comme la réalité virtuelle et peut-être d'autres choses pour avancer. Comment vous voyez ça, vous, de ce côté-là ? Comment ça fait évoluer le métier ? Est-ce que aussi, dans les beaux-arts, ça fait évoluer les cours ? Enfin, voilà, tous ces choses-là.
- Speaker #1
Oui, oui, ça fait évoluer les cours. Chaque année, c'est une des choses qui est intéressante avec le numérique. Donc, ça fait presque 30 ans que je l'enseigne. Et en fait, chaque année, il y a des choses nouvelles qui se passent. Quand j'ai démarré, on faisait des CD-ROP, et puis on s'est intéressé aux possibilités du web. Ce qui, bien sûr, a fait exploser tout un tas de choses. Et puis, il y a régulièrement des sujets nouveaux. Par exemple, la géolocalisation, le GPS, qui a été un sujet intéressant pour les artistes. Les réseaux sociaux, un sujet, puis un support de diffusion et de promotion intéressant pour les artistes. Et puis là, dernièrement, l'IA, évidemment, le métaverse peut-être, etc. Ce sont des nouveaux sujets qui parfois ne décollent pas vraiment et qui parfois rentrent dans la palette des outils des artistes ou dans les sujets. sur lesquels ils travaillent. Donc voilà, on ne s'ennuie jamais, il se passe toujours quelque chose avec le numérique, ça c'est le bon côté. Et puis voilà, ce qui change bien sûr tout le temps aussi, c'est le rapport de nos étudiants et puis du monde, pas du monde de l'art mais du public, le rapport de nos étudiants au numérique, puisque eux-mêmes en ont un, ils sont sur des réseaux sociaux, ils s'intéressent, ils ont leurs propres pratiques. parfois ils sont en avance sur nous, sur telle ou telle chose, ils connaissent tel support bien avant nous. C'est assez intéressant de voir qu'on ne peut pas du tout s'ennuyer avec ça. Et puis le public a changé.
- Speaker #0
Oui, le public.
- Speaker #1
Oui, on en reparlera peut-être plus tard, mais il y a une époque, disons il y a 30 ans, l'idée de faire une œuvre avec un ordinateur, il y a beaucoup de gens que ça a rebuté. beaucoup. Il disait, un ordinateur n'a pas de cœur, un ordinateur n'a pas d'âme, un ordinateur n'a pas de sentiments, ce qui est tout à fait vrai. Mais en même temps, si on y pense, un tube de peinture non plus n'a pas de cœur, n'a pas de sentiments. Et pourtant, c'est plutôt l'artiste. Et ce qui fait que l'outil... Mais les outils ont quand même une influence sur les œuvres, et c'est toujours important de... Mais ça, on va en reparler. C'est toujours important. de l'avoir en tête.
- Speaker #0
Et justement, dans les technologies qui émergent, qui sont utilisées dans l'art, c'est lesquelles en ce moment ? Qu'est-ce que vous voyez qui devient de plus en plus prenant et important ?
- Speaker #1
En ce moment, vraiment, et je croyais que ça passerait un petit peu plus vite, mais pas du tout, c'est quand même l'IA. Les IA génératives sont vraiment un gros sujet qui change beaucoup. beaucoup, y compris le marché de l'art, puisque mes étudiants ne sont pas forcément amenés à être des artistes, beaucoup vont être des designers graphiques, des illustrateurs, etc. Et certains se sentent en concurrence directe avec les machines, puisque maintenant, un commanditaire... qui s'abonnent à Mille Journées peut être un peu pénant et se dire, bon, ben voilà, pour 20 euros par mois, ça me coûte beaucoup moins cher que de demander une illustration à 400 euros à quelqu'un. Et donc, voilà. Et puis, en plus, le public ne va pas forcément voir la différence et tout. Donc, il y a vraiment un sujet de métier, là. Une transformation du métier. Mais c'est aussi un bon sujet d'exploration artistique. Il y a des artistes qui s'amusent très très bien avec l'IA et qu'ils en tirent des choses. Et ce qui est drôle, c'est qu'eux aussi sont abonnés à Midjournal, mais ils perdent plutôt plus de temps à travailler leur compte et tout que quelque chose. Ça ne leur fait pas gagner du temps ni de l'argent. Ça leur fait au contraire perdre du temps et c'est plutôt rigolo.
- Speaker #0
C'est ce que vous voyez. C'est que ça leur fait perdre plus de temps et qu'ils iraient presque plus vite. à faire leurs oeuvres de la manière, alors je vais pas dire à l'ancienne parce que c'est pas ça ce qui met de la faire sans l'aide de l'IA que de faire leurs promptes oui ?
- Speaker #1
Tout à fait c'est pas ce que je vois c'est ce que eux disent Eric Tabuchy qui est un super photographe qui a réalisé avec Nelly Monnier l'Atlas des Régions Naturelles où il va prendre des photos un petit peu partout en France et il a sorti Un petit peu plus tard, un autre atlas qui s'appelle le troisième atlas, dans lequel les photos ressemblent beaucoup à ce qu'il fait déjà, mais sont toutes faites par hier. Donc il fait des photos qui ressemblent beaucoup. Il y a des gens qui ont pris ça pour une vraie trahison, puisque c'est plus documentaire. Mais il ne fait pas ça pour gagner du temps. Il le disait lui-même, il perdait un temps fou. Par exemple, la couverture de son livre, qui est un graphisme assez simple qu'on pourrait programmer en deux minutes avec un langage de programmation tout bête, ou alors faire en deux minutes avec Illustrator. Lui, il a passé trois jours pour arriver à avoir exactement ce qu'il voulait. Mais il fallait que ce soit la machine qui le produise. Et donc, il s'est battu avec la machine. Il passe beaucoup de temps à se battre contre la machine. Et ce n'est pas le seul. Beaucoup font ça.
- Speaker #0
C'est intéressant d'entendre ça et c'est vrai qu'avec l'arrivée de ces outils, ces outils Midjourney, Dali, Adobe Firefly, qui permettent de pouvoir être potentiellement autonomes, je mets des guillemets autour de tout ça, parce que c'est aussi, moi ce que je veux faire passer, c'est que l'IA dans ces cas-là est un partenaire de création et non un simple outil. Parce que, comme vous le dites, c'est du temps à créer un bleu, bon prompt, etc. Tout le monde n'est pas spécialiste de ces outils-là. Et je trouve que c'est important d'avoir ce retour d'artistes. Ils disent qu'ils y passent beaucoup trop de temps finalement. Mais après, au bout d'un moment, ils vont quand même réussir à les apprivoiser, à les utiliser pour que ça devienne un partenaire. Mais c'est important aussi de le dire que l'intelligence artificielle, c'est au service de nous et des artistes.
- Speaker #1
Tout à fait. Et les bons artistes qui utilisent l'IA, quand je vois apparaître leur partenaire, production sur mon fil Instagram, par exemple, je vois tout de suite quel artiste c'est. Le style de la personne, etc. Ce n'est pas le style de mes journées. Et c'est pareil avec ChatGPT, par exemple. Nos étudiants doivent écrire, ils doivent produire des mémoires, des devoirs, etc. Et ils n'aiment pas tous ça, d'ailleurs. Il y en a plusieurs qui utilisent ChatGPT. Certains le font très bien. et d'autres très mal. Ceux qui le font très mal, on voit tout de suite des longues listes à points avec un propos un peu plat et sans aucun intérêt, etc. Alors qu'il y en a d'autres qui prennent ChatGPT pour un collaborateur. Pour eux, c'est une machine qui travaille avec eux, avec qui ils travaillent, à qui ils veulent faire dire ce qu'ils ont envie de dire, mais ils profitent de l'orthographe impeccable.
- Speaker #0
Ouais, de la bonne tournure de phrase, voilà.
- Speaker #1
Voilà, mais il ne se laisse pas diriger par les machines, c'est ça.
- Speaker #0
C'est là où demain on verra la différence aussi. Moi j'ai aussi ce cas-là dans la partie développement, par exemple, d'applications, où beaucoup utilisent l'IA pour développer, pour écrire des lignes de code, mais on part du principe que déjà, si le dev ne sait pas l'expliquer, ne sait pas l'analyser, et... ne sait pas le faire, pour nous c'est pas utile parce que demain il va falloir faire un debug, s'il l'a pas compris il trouvera pas. Voilà et donc
- Speaker #1
Nous on programme beaucoup et donc pareil on a exactement le même, la même analyse c'est à dire que si jamais on sait pas ce qu'on fait on aura un résultat assez piteux et puis et puis voilà Après, il y a un vrai danger avec le développement informatique avec TGPT. Ce n'est pas seulement ça. C'est aussi le fait que ces IA se basent quand même sur un corpus qu'ils ont été prendre à Stack Overflow, etc. Et un jour, personne n'aimentera plus tous ces forums. Et qu'est-ce qui va se passer ? et quoi est-ce que ces outils génératifs vont être nourris. Et c'est aussi le problème en art. Beaucoup d'artistes n'ont rien de loin comme ça contre l'IA, sauf qu'ils savent que ce sont leurs œuvres qui sont à l'intérieur, qui ont été aspirées sur Internet, et ils ont l'impression de se faire avoir, parce que leurs œuvres servent à créer d'autres œuvres discount.
- Speaker #0
et donc voilà ils ont l'impression qu'il y a une escroquerie j'en connais beaucoup c'est sûr que sur l'impact du digital sur l'art il va y avoir un enjeu autour de la propriété intellectuelle mais ça on le sait au sens large du terme, on n'est pas que sur l'art et les artistes il y a aussi tout ce qui est autour des sources, comment, où je vais chercher, comment je réutilise etc. Et ça, c'est un vrai sujet. Pour l'instant, on ne sait pas trop. Il n'y a pas forcément de loi autour de tout ça, même si à l'heure où on enregistre, je crois que c'est cette semaine ou la semaine prochaine qu'on va avoir le décret européen sur l'IA qui va être porté sur le droit français. temporalité qui est un peu compliquée en ce moment sur la partie politique en France mais voilà il y a tous ces sujets là parce que c'est vrai qu'il perd la notion de son oeuvre et comme vous dites demain un promptia peut dire est-ce que tu peux me reproduire l'oeuvre de telle personne et la mettre de telle manière sur du pixart ou autre ou du style d'Andy Warhol ou des choses comme ça et là il perd un peu sa notion oui oui
- Speaker #1
Les réponses pour le moment ne sont pas très bonnes. Il y a des artistes qui ont réussi à obtenir, enfin, qui réclament et qui obtiennent l'opt-out. C'est-à-dire que, par exemple, si on demande à avoir une œuvre à la manière de Stark, le designer, on ne peut pas, à la mi-journée, dire Ah non, je n'ai pas le droit de faire du Stark Mais par contre, si on lui demande, on veut un press-agrumes futuriste en métal, etc., il va nous faire celui de Stark. parce qu'ils peuvent juste enlever le nom dans les promptes, mais pour le reste, personne n'est capable d'enlever des images du corpus qui a servi à entraîner Midjourney ou autre. Déjà, il est déjà entraîné, et puis il y a des milliards d'images, personne ne sait même complètement ce qu'il y a dedans. C'est assez intéressant. Mais là, je vois que les sociétés de droit, comme l'Assassin, ont... ou les DAGP, etc. Leur idée, c'est plutôt de régler tout ça avec des taxes à nouveau sur l'IA, comme on a déjà. Quand on achète une clé USB, il y a 2 euros dedans qui vont à la SACEM et autres, ce qui fait que tous ces gens ne râlent plus. Je ne sais pas si c'est la bonne solution, parce que... elle n'est pas forcément juste, à chaque fois l'argent est redistribué plutôt à ceux qui vendent déjà beaucoup. Quand on a une clé USB, les 2 euros, il y en a un qui va à la famille de Johnny Hallyday, etc.
- Speaker #0
Mais pas forcément aux artistes, à tous les artistes, c'est pas équitable. Et justement, toujours en continuant sur tout ce qui est rémunération, etc., on voit apparaître depuis quelques années l'essor du crypto art, la partie NFT, la montée en puissance qui a révolutionné le marché de l'art depuis 2020. Je crois même que ça atteint une valeur de 41 milliards de dollars. Ça rivalise quasiment avec le marché de l'art traditionnel, d'après ce que j'ai pu trouver dans les sources. Alors, la première question, c'est... Je sais que vous aimez vulgariser, est-ce que vous pouvez expliquer à nos auditeurs ce que c'est le NFT ?
- Speaker #1
Le NFT, pour ce que j'ai compris, parce que ce n'est pas si simple, je ne pratique pas et je ne comprends pas bien les plateformes, leurs règles et tout, et je n'ai pas envie de trop me lancer dedans, mais j'ai l'impression que ce sont des certificats de propriété qui, en général, certifient avant tout eux-mêmes. C'est-à-dire que le certificat est authentique, mais ça ne veut pas dire... Enfin, on pourrait faire un certificat authentique qui porte sur une offre qui n'appartient pas à celui qui a fait le certificat. Je ne sais pas si ça se fait. Mais voilà, ce sont des certificats qui sont inviolables et qui sont répliqués de manière cryptée sur des serveurs. Et tant qu'il y a des gens qui ont un programme en basique, et puis... Quand on avait fini, on écrivait run et ça lançait le programme.
- Speaker #0
Donc, à début des années 80, on parlait déjà de prompt. Oui,
- Speaker #1
c'est plutôt venu avec Linux, le mot prompt. Je ne le connaissais pas, en tout cas à l'époque. Je crois qu'on disait l'invite.
- Speaker #0
Oui, sûrement. C'était l'invite. C'était sur du style DOS ou les choses comme ça.
- Speaker #1
Mais bien avant.
- Speaker #0
Oui, bien avant. Parfait, parfait, parfait. On va rentrer un peu plus dans votre parcours parce que votre parcours, il y a plusieurs facettes. L'enseignement des nouveaux médias dans des écoles, dans des beaux-arts, d'après ce que j'ai pu voir, à différentes contributions littéraires, avec aussi des collaborations à des artistes. Qu'est-ce qui vous a conduit à arriver à ce croisement entre l'art numérique et aussi la pédagogie ? Beaucoup de livres qui permettent de vulgariser l'informatique.
- Speaker #1
Tout à fait. C'est un petit peu le hasard en fait. Je suis entré au Beaux-Arts. Avec l'idée de devenir peintre, j'étais peintre réaliste. Je voulais faire des... À une époque où ça ne se faisait plus trop, d'ailleurs. Il n'y avait pas tellement de peinture figurative. C'était mal vu. J'aimais beaucoup l'ordinateur. J'aimais le jeu vidéo à l'époque. Mais pour moi, ce n'était pas lié. Il n'y avait aucun rapport entre les deux. Et puis, j'ai dû faire mon service national, qui a duré deux ans. C'était un service d'objecteur de conscience, un service civil. Et... J'étais dans un ministère où j'ai appris l'informatique, que je connaissais déjà un petit peu, mais là j'ai vu l'informatique dans le monde du travail, pas juste comme jouet, puisque pour moi avant ça c'était un jouet. Je n'ai toujours pas cru que ça avait un rapport avec l'art, mais par contre j'ai commencé à bien connaître. Et puis j'ai quitté les Beaux-Arts pour rentrer à l'université avec l'idée de devenir prof de collège ou quelque chose comme ça. en art plastique. J'étais un jeune papa, donc il fallait que je sois un peu responsable. Et puis, ce n'est pas ce qui s'est passé. Je suis tombé sur une équipe incroyable en art plastique qui faisait des CD-ROM. C'était la grande époque du CD-ROM et qui était vraiment très créative. Et donc, j'ai compris qu'on pouvait faire de l'art avec l'ordinateur et ça m'a passionné. Je me suis lancé là-dedans. Comme j'étais finalement assez bon pour l'art. pour aider les autres étudiants. Très, très vite, on m'a proposé une charge de cours. Et puis, de fil en aiguille, je suis devenu prof en école d'art. C'est très bizarre, mais ça s'est passé comme ça, par le hasard et puis le goût. Il n'y avait pas de plan.
- Speaker #0
Il n'y avait pas de plan, voilà. Ça arrivait là, comme ça, par hasard. Parce que vous l'avez dit, vous avez été très tôt dans le... la partie informatique enfin vous avez déjà été attiré par ça puis sûrement par le côté art aussi et finalement vous avez réussi à lier les deux c'est ça qui est aussi intéressant quoi c'est que ça se passerait mais oui s'il s'est passé et donc c'est le hasard le goût et puis aussi les personnes je suis tombé sur tout un tas de gens qui
- Speaker #1
ont cru en moi
- Speaker #0
Oui et puis je vais écouter dans un TEDx que vous avez fait sur le fait aussi que très tôt vous avez été sensibilisés au fait que dans vos cours au cours que le numérique allait prendre une place voilà je crois que au début vous étiez sur la partie retouche photo retouche photo et tout de suite vos profs disaient que bientôt les machines vont arriver bientôt enfin voilà que c'était trop tôt au moment où vous avez des études mais il fallait s'y préparer c'est un peu tout à fait mais ça c'est la même avant les beaux arbres
- Speaker #1
J'ai fait un lycée professionnel de retouche photo. Et c'était la retouche photo sans Photoshop, au pinceau, au crayon. Donc un métier qui n'existe plus. J'ai été formé trois ans à un métier qui a disparu complètement. Mais ce qui m'a appris quand même beaucoup de choses, bien sûr. Et c'est très bien pour ça. Mais voilà, là j'ai pu voir de près ce que fait le changement numérique. C'est-à-dire le fait que... un métier puisse complètement disparaître ou alors se transformer à un point incroyable. Je me rappelle que sous Photoshop, par exemple, alors que moi j'avais été formé très longtemps, mon épouse était plutôt meilleure que moi en très peu de temps. Alors qu'elle n'avait pas été spécialement formée à la retouche, mais l'outil avait changé. Il obligeait toujours à avoir un œil, etc. Mais il y a tout un tas de savoir-faire dont il n'y avait plus besoin, comme savoir tailler ses crayons et nettoyer ses pinceaux, etc.
- Speaker #0
Justement, vous avez vu vraiment ce métier changer. Ce n'était pas vraiment votre métier au final. Vous avez, comme on dirait dans le monde de la startup, pivoté. Vous avez pivoté. Et justement... pour aller dans cet échange-là. Pour vous, le numérique est en train de changer le monde, mais comment il est en train de changer la partie art et culture au sens large ? Parce que désormais, les artistes peuvent partager leurs œuvres en ligne, ils peuvent forcément aussi atteindre un public beaucoup plus large, ils utilisent aussi des outils innovants comme la réalité virtuelle et peut-être d'autres choses pour avancer. Comment vous voyez ça, vous, de ce côté-là ? Comment ça fait évoluer le métier ? Est-ce que aussi, dans les beaux-arts, ça fait évoluer les cours ? Enfin, voilà, tous ces choses-là.
- Speaker #1
Oui, oui, ça fait évoluer les cours. Chaque année, c'est une des choses qui est intéressante avec le numérique. Donc ça fait presque 30 ans que je l'enseigne. Et en fait, chaque année, il y a des choses nouvelles qui se passent. Quand j'ai démarré, on faisait des CD-ROP, et puis on s'est intéressé aux possibilités du web, ce qui bien sûr a fait exploser tout un tas de choses.
- Speaker #0
Régulièrement des sujets nouveaux, par exemple la géolocalisation, le GPS, qui a été un sujet intéressant pour les artistes. Les réseaux sociaux, un sujet et un support de diffusion et de promotion intéressants pour les artistes. Et puis là, dernièrement, l'IA, évidemment, le métaverse peut-être, etc. Ce sont des nouveaux sujets qui parfois ne dé... et parfois rentrent dans la palette des outils des artistes ou dans les sujets sur lesquels ils travaillent. Donc voilà, on ne s'ennuie jamais, il se passe toujours quelque chose avec le numérique, ça c'est le bon côté. Et puis voilà, ce qui change bien sûr tout le temps aussi, c'est le rapport de nos étudiants et du monde de l'art, mais du public. le rapport de nos étudiants au numérique, puisque eux-mêmes en ont un, ils sont sur des réseaux sociaux, ils ont leurs propres pratiques, parfois ils sont en avance sur nous, sur telle ou telle chose, ils connaissent tel support bien avant nous. C'est assez intéressant de voir qu'on ne peut pas du tout s'ennuyer avec ça. Et puis le public a changé.
- Speaker #1
Oui, le public.
- Speaker #0
Oui, on en reparlera peut-être plus tard, mais il y a une époque, disons il y a 30 ans, l'idée de faire une œuvre avec un ordinateur, il y a beaucoup de gens que ça rebutait. Beaucoup. Ils disaient, un ordinateur n'a pas de cœur, un ordinateur n'a pas d'âme, un ordinateur n'a pas de sentiments, ce qui est tout à fait vrai. Mais en même temps, si on y pense, un tube de peinture non plus n'a pas de cœur, n'a pas de sentiments. L'important c'est plutôt l'artiste et ce qui fait que l'outil, mais les outils ont quand même une influence sur les œuvres et c'est toujours important de l'avoir en tête.
- Speaker #1
Et justement, dans les technologies qui émergent, qui sont utilisées dans l'art, c'est lesquelles en ce moment, qu'est-ce que vous voyez qui devient de plus en plus prenant et important ?
- Speaker #0
En ce moment, vraiment, et je croyais que ça passerait un petit peu plus vite, mais pas du tout, c'est quand même l'IA. Les IA génératives sont vraiment un gros, gros sujet qui change beaucoup, y compris le marché de... Enfin, pas le marché de l'art, mais... Parce que mes étudiants ne sont pas forcément amenés à être des artistes. Beaucoup vont être juste des... Enfin, pas juste. Beaucoup vont être des designers graphiques et des illustrateurs, etc. et certains se sentent en concurrence directe avec les machines puisque maintenant un commanditaire qui s'abonne à mi-journée peut être un peu pénant et se dire pour 20 euros par mois ça me coûte beaucoup moins cher que de demander une illustration à 400 euros à quelqu'un et donc Et puis en plus, le public ne va pas forcément voir la différence. Donc il y a vraiment un sujet de métier, une transformation du métier. Mais c'est aussi un bon sujet d'exploration artistique. Il y a des artistes qui s'amusent très bien avec l'IA et qui en tirent des choses. Et ce qui est drôle, c'est qu'eux aussi sont abonnés à Midjournal, mais ils perdent plutôt plus de temps à travailler leur prompte. que quelque chose ça leur fait pas gagner du temps ni de l'argent ça leur fait au contraire perdre du temps et c'est plutôt rigolo c'est ce que vous voyez c'est que ça leur fait perdre plus de temps et qu'ils iraient presque plus vite à
- Speaker #1
faire leurs oeuvres de la manière, je vais pas dire à l'ancienne parce que c'est pas ça ce qui met de la faire sans l'aide de l'IA que de faire leur prompte tout à fait,
- Speaker #0
c'est pas ce que je vois c'est ce que eux disent... Je me rappelle par exemple d'Eric Tabuchy, qui est un super photographe, qui a réalisé avec Nelly Monnier l'Atlas des régions naturelles, où il va prendre des photos un petit peu partout en France. Et il a sorti un petit peu plus tard un autre atlas qui s'appelle le troisième atlas, dans lequel les photos ressemblent beaucoup à ce qu'il fait déjà, mais sont toutes faites par hier. Il fait des photos qui ressemblent beaucoup. Il y a des gens qui ont pris ça pour une vraie trahison, puisque c'est plus documentaire. Mais il ne fait pas ça pour gagner du temps. Il le disait lui-même, il perdait un temps fou. Par exemple, la couverture de son livre... qui est un graphisme assez simple qu'on pourrait programmer en deux minutes avec un langage de programmation tout bête, ou alors faire en deux minutes avec Illustrator. Lui, il a passé trois jours pour arriver à avoir exactement ce qu'il voulait. Mais il fallait que ce soit la machine qui le produise, et donc il s'est battu avec la machine. Il passe beaucoup de temps à se battre contre la machine, et ce n'est pas le seul, beaucoup font ça.
- Speaker #1
C'est intéressant d'entendre ça et c'est vrai qu'avec l'arrivée de ces outils, ces outils Midjourney, Dali, Adobe Firefly, qui permettent de pouvoir être potentiellement autonome, je mets des guillemets autour de tout ça, parce que c'est aussi, moi ce que je veux faire passer, c'est que l'IA dans ces cas-là est un partenaire de création et non un simple outil. Parce que, comme vous le dites, c'est du temps à créer un bleu, bon prompt, etc. Tout le monde n'est pas spécialiste de ces outils-là. Et je trouve que c'est important d'avoir ce retour d'artistes. Ils disent qu'ils y passent beaucoup trop de temps finalement. Mais après, au bout d'un moment, ils vont quand même réussir à les apprivoiser, à les utiliser pour que ça devienne un partenaire. Mais c'est important aussi de le dire que l'intelligence artificielle, c'est au service de nous et des artistes.
- Speaker #0
Tout à fait. Et les bons artistes qui utilisent l'IA, quand je vois apparaître leur production sur mon fil Instagram, par exemple, je vois tout de suite quel artiste c'est. Je reconnais le style de la personne, etc. Ce n'est pas le style de mes journées. Et c'est pareil avec TGPT, par exemple. Nos étudiants doivent écrire, ils doivent produire des mémoires, des devoirs, etc. Et ils n'aiment pas tous ça, d'ailleurs. Il y en a plusieurs qui utilisent ChatGPT, certains le font très bien et d'autres très mal. Ceux qui le font très mal, on voit tout de suite des longues listes à points avec un propos un peu plat et sans aucun intérêt, etc. Alors qu'il y en a d'autres qui prennent ChatGPT pour un collaborateur. Pour eux, c'est une machine qui travaille avec eux, avec qui ils travaillent, à qui ils veulent faire dire ce qu'ils ont envie de dire, mais ils profitent de l'orthographe impeccable.
- Speaker #1
de la bonne tournure de phrase voilà mais il ne se laisse pas diriger par les méchis c'est ça c'est là où demain on verra la différence aussi moi j'ai aussi ce cas là dans la partie développement par exemple d'application où beaucoup utilisent beaucoup utilisent l'IA pour développer pour écrire des lignes de code mais on part du principe que déjà si le dev ne sait pas l'expliquer ne sait pas l'analyser... ne sait pas le faire, pour nous c'est pas utile parce que demain il va falloir faire un debug, s'il l'a pas compris il trouvera pas.
- Speaker #0
Voilà et donc Nous on programme beaucoup et donc pareil on a exactement le même, la même analyse c'est à dire que si jamais on sait pas ce qu'on fait on aura un résultat assez piteux et puis voilà. Après, il y a un vrai danger avec le développement informatique avec TGPT. Ce n'est pas seulement ça. C'est aussi le fait que ces IA se basent quand même sur un corpus qu'ils ont été prendre à Stack Overflow, etc. Et un jour, personne n'aimentera plus tous ces forums. Et qu'est-ce qui va se passer ? et quoi est-ce que ces outils génératifs vont être nourris. Et c'est aussi le problème en art. Beaucoup d'artistes n'ont rien de loin comme ça contre l'IA, sauf qu'ils savent que ce sont leurs œuvres qui sont à l'intérieur, qui ont été aspirées sur Internet, et ils ont l'impression de se faire avoir, parce que leurs œuvres servent à créer d'autres œuvres discount.
- Speaker #1
et donc voilà ils ont l'impression qu'il y a une escroquerie j'en connais beaucoup c'est sûr que sur l'impact du digital sur l'art il va y avoir un enjeu autour de la propriété intellectuelle mais ça on le sait au sens large du terme on n'est pas que sur l'art et les artistes il y a aussi tout ce qui est autour des sources où je vais chercher comment je réutilise etc. Et ça, c'est un vrai sujet. Pour l'instant, on ne sait pas trop. Il n'y a pas forcément de loi autour de tout ça, même si à l'heure où on enregistre, je crois que c'est cette semaine ou la semaine prochaine qu'on va avoir le décret européen sur l'IA qui va être porté sur le droit français. Normalement, après... temporalité qui est un peu compliquée en ce moment sur la partie politique en France, mais voilà il y a tous ces sujets là, parce que c'est vrai qu'il perd la notion de son oeuvre, et comme vous dites demain, il peut dire un promptia peut dire, est-ce que tu peux me reproduire l'oeuvre de telle personne et la mettre de telle manière, sur du pixart ou autre, ou du style d'Andy Warhol, ou des choses comme ça et là, il perd un peu sa notion oui,
- Speaker #0
oui Les réponses pour le moment ne sont pas très bonnes. Il y a des artistes qui ont réussi à obtenir, enfin, qui réclament et qui obtiennent l'opt-out. C'est-à-dire que, par exemple, si on demande d'avoir une œuvre à la manière de Stark, le designer, on ne peut pas. Mid-journée, il va dire Ah non, je n'ai pas le droit de faire du Stark Mais par contre, si on lui demande, on veut un press-agrumes futuriste en métal, etc., il va nous faire celui de Stark. parce qu'ils peuvent juste enlever le nom dans les promptes, mais pour le reste, personne n'est capable d'enlever des images du corpus qui a servi à entraîner Midjourney ou autre. Déjà, il est déjà entraîné, et puis il y a des milliards d'images, personne ne sait même complètement ce qu'il y a dedans. C'est assez intéressant. Mais là, je vois que les sociétés de droit, comme l'Assassin, ont... ou les DAGP, etc. Leur idée, c'est plutôt de régler tout ça avec des taxes à nouveau, comme on a déjà. Quand on achète une clé USB, il y a 2 euros dedans qui vont à la SACEM et autres, ce qui fait que tous ces gens ne râlent plus. Je ne sais pas si c'est la bonne solution, parce que... elle n'est pas forcément juste. À chaque fois, l'argent est redistribué plutôt à ceux qui vendent déjà beaucoup. Quand on a une clé USB, les 2 euros, il y en a un qui va à la famille de Johnny Hallyday, mais pas forcément aux...
- Speaker #1
Oui, aux artistes, à tous les artistes. Ce n'est pas équitable. Ce n'est pas équitable. Et justement, toujours en continuant sur tout ce qui est rémunération, on voit apparaître... depuis quelques années, l'essor du crypto art, la partie NFT, la montée en puissance qui a révolutionné le marché de l'art depuis 2020. Je crois même que ça atteint une valeur de 41 milliards de dollars. Ça rivalise quasiment avec le marché de l'art traditionnel, d'après ce que j'ai pu trouver dans les sources. Alors, la première question, je sais que vous aimez vulgariser, c'est est-ce que vous pouvez expliquer à nos auditeurs ce que c'est le NFT ? Voilà.
- Speaker #0
pour ce que j'ai compris, parce que ce n'est pas si simple. Je ne frappule pas et je ne comprends pas bien les plateformes, leurs règles et tout, et je n'ai pas envie de trop me lancer dedans. Mais j'ai l'impression que ce sont des certificats de propriété qui, en général, certifient avant tout eux-mêmes. C'est-à-dire que le certificat est authentique, mais ça ne veut pas dire… Enfin, on pourrait faire un certificat authentique qui porte sur une offre qui n'appartient pas à celui qui a fait le certificat. Je ne sais pas si ça se fait. Mais voilà, ce sont des certificats qui sont inviolables et qui sont répliqués de manière cryptée sur des serveurs. Et tant qu'il y a des gens pour maintenir les serveurs en question, ces certificats sont authentiques. Mais ils ne contiennent pas forcément l'œuvre, même s'il y en a dans lesquels on peut mettre du texte et on pourrait mettre le code, etc. Mais voilà, j'étais un petit peu réservé sur le principe parce que je ne comprends pas bien l'économie, etc. Et puis surtout, je vois une économie qui repose vraiment sur des serveurs allumés en permanence, etc. Je ne sais pas si c'est bien, mais après, il n'y a pas que ça.
- Speaker #1
c'est forcément un vrai sujet c'est qu'il y a le côté aussi environnement qui pose question parce que on le voit que ce soit sur l'IA la blockchain et donc les NFT forcément ça consomme beaucoup et c'est là où des industries comme Nvidia pour ne pas les citer parce que c'est quand même eux qui sont principalement sur le marché je pense qu'il doit avoir quasi tout le marché tout le marché de tout ça on a vu leur progression au niveau de la bourse qui est assez incroyable même et ben ça consomme tout ça ça consomme c'est des grosses consommations et et derrière voilà ça pose question sur le nft aussi a toujours toujours un peu le côté le côté qu'est ce que ça va enfin est ce que ça va durer c'est quand même assez volatile aussi Mais il y a quand même des choses qui se sont vendues assez cher. Je crois, là, j'ai des exemples d'une œuvre qui s'appelle The Merge de l'artiste Pac, qui a été vendue 91,9 millions de dollars en 2021 sur une plateforme d'enchaire. C'est quand même assez énorme. Il a été acheté par, j'ai les chiffres là devant moi, quasiment 29 000 personnes. qui ont acheté 266 000 unités d'oeuvre. Donc en fait, ce que vous expliquez, c'est que le NFT, on va acheter une partie de l'oeuvre. Voilà.
- Speaker #0
Et surtout, on achète le certificat. Mais le truc avec ça, c'est plutôt qui m'embête, c'est pas tellement l'énergie, au sens où si l'énergie, bien sûr c'est un problème, mais on peut dire ça aussi avec l'IA, on peut dire ça aussi avec tous nos serveurs. On utilise beaucoup d'énergie de toute façon. Donc le NFT, oui, mais je ne sais pas s'il faut se focaliser dessus. Bien que ce soit vraiment très gourmand, mais je vois qu'il y a des NFT maintenant qui sont censés consommer beaucoup moins ou des monnaies qui sont censées être beaucoup plus économes en énergie. Je ne sais pas si ça se réglera. Mais il y a aussi la pérennité. J'ai réalisé une douzaine de CD-ROM dans les années… 1990 et à l'époque on disait que c'est des roms allait remplacer le livre C'était vraiment une il y avait une fois est ce qu'on se disait déjà c'est immortel c'est des roms puisque c'est numérique on peut le recopier tant qu'on veut et puis première chose et deuxième chose et ben ça va beaucoup plus loin que le livre puisqu'on peut mettre beaucoup plus de texte, on peut mettre d'autres genres de médias, etc. De loin, ça avait l'air vrai. Et puis dans la pratique, il n'y a aucun déciderum que j'ai fait que je pourrais voir maintenant. Je ne peux pas émettre. Je suis 25 ans plus tard, tout est mort. Et c'est pareil avec les NFT, enfin, ce n'est pas que c'est pareil avec les NFT, mais si jamais tel système de blockchain est abandonné par ceux qui le maintiennent, eh bien, les... les certificats en question n'auront plus aucune valeur particulière. Donc, il y a un petit risque d'obsolescence. Ça, c'est une chose à laquelle je n'avais pas pensé il y a 30 ans, quand j'ai commencé. Ce n'était pas un sujet. Et maintenant, j'y suis relativement attentif.
- Speaker #1
Donc, voilà. Mais est-ce que ça, ça commence à faire ses enseignées, c'est expliqué par le store ? Oui, oui.
- Speaker #0
On parle beaucoup de ça aux étudiants. Mais pour revenir au NFT d'une manière beaucoup plus positive, ce que j'ai trouvé vraiment intéressant, pour moi qui aime le code créatif, comme on dit, donc l'utilisation du code pour produire des œuvres plastiques, c'est que pour la première fois, ça a créé une sorte de business model pour le code créatif, qui jusqu'ici, on n'avait pas. Et voilà. Et puis, il y a... tout un tas de gens qui vendent des œuvres sur des plateformes. Il n'y avait jusqu'ici pas de moyens. Évidemment, il y avait des expositions où on pouvait acheter des impressions, des choses au traceur et tout. D'ailleurs, le traceur marche bien maintenant. Mais les NFT ont donné quelque chose d'assez cohérent puisque c'est de l'art numérique sur un support numérique. Et donc ça c'est la partie positive des NFT. Mais je ne me suis pas lancé dedans du tout, ni comme acheteur, ni comme producteur.
- Speaker #1
D'accord. Moi non plus, j'ai un peu du mal, enfin producteur c'est sûr que non, mais en tant qu'acheteur non, j'ai encore un peu de mal à avoir, enfin avoir, pas l'intérêt, parce que bon je pense qu'il y a un intérêt, il y a quelque chose, mais voilà, c'est aussi du placement, enfin c'est aussi du placement, enfin c'est... C'est clairement considéré de façon comme du placement.
- Speaker #0
Oui, oui. Et puis, pas que. En fait, la question avec l'art, c'est que depuis toujours, il y a l'idée de l'original. L'originalité. On achète... Disons, ça nous arrive à tous, peut-être, d'acheter un poster de... d'un beau tableau qu'on aime, mais on ne le paierait pas plusieurs millions. Par contre, une œuvre qui est complètement unique, un tableau qui n'existe qu'un exemplaire, on comprend qu'il ait une valeur importante. On peut discuter de sa valeur et se dire que c'est exagéré, etc. C'est de la spéculation ou autre. Mais l'idée de l'œuvre qui n'existe qu'en un exemplaire, où les œuvres multiples mais avec des exemplaires numérotés, on comprend tous l'idée, et donc les NFT ont permis ça, ont permis de rendre peut-être un peu artificiellement des œuvres numériques uniques, en particulier sous forme de multiples. Et donc c'était intéressant.
- Speaker #1
Ça permet aussi finalement à l'artiste de se faire rémunérer. Peut-être... Plus rapidement, finalement. Peut-être plus rapidement. Après, il faut voir aussi ce que ça va devenir dans le futur. Comme vous l'avez dit, il faut voir tout ce qui est autour de la législation et aussi de la pérennité et de la durabilité de tout ça. Il faut des gens pour maintenir ces serveurs. Il faut des serveurs qui soient de plus en plus aussi responsables, etc. L'avenir nous le dira sur ce sujet-là. Et moi, je voulais revenir sur un sujet, vous avez dit, c'est aussi toujours pareil par rapport, vous avez dit que les étudiants apprennent à coder, à programmer. Et donc, ils utilisent des logiciels, l'intelligence artificielle pour créer leurs œuvres, pour aller beaucoup plus loin dans leur créativité. Et justement, vous aviez écrit en 2010 un livre sur ça, qui s'appelait Processing, le code informatique comme outil de création. 2010, c'était il y a 15 ans déjà, vous étiez déjà dans les prémices de l'usage de l'algo. Comment ça se concrétise, comment ça fonctionne pour un artiste d'utiliser la programmation ?
- Speaker #0
Juste sur l'histoire, je ne suis vraiment pas dans les débuts, les débuts c'est les années 60, donc là je n'étais même pas né. Mais donc il y a des artistes comme Vera Molnar, qui est morte il n'y a pas très longtemps, ou Manfred Mohr, et puis tout un tas d'autres, qui ont eu l'idée, souvent ils étaient eux-mêmes un peu ingénieurs, ou même beaucoup ingénieurs parfois, mais qui ont eu l'idée qu'on pourrait utiliser le code et les mathématiques pour produire de l'art. Donc ça c'est relativement ancien, mais c'était quand même vraiment une niche. Petit à petit avec la démocratisation de l'ordinateur, l'ordinateur est devenu à la fois un outil et aussi un média, puisque maintenant on regarde aussi les œuvres sur internet par exemple, où avec le CD-ROM il fallait un ordinateur pour regarder le CD-ROM. Et donc voilà, ça se démocratise tout à fait, et les outils aussi se démocratisent. les artistes dont je parlais des années 60, il fallait qu'ils aient accès à des laboratoires universitaires et on leur donnait quelques minutes de temps de calcul pour faire des choses. Maintenant tout le monde a un ordinateur chez lui ou tout le monde a un ordinateur dans la poche, en tout cas en le sachant ou pas, enfin en sachant ou pas que c'est un ordinateur, mais c'est tellement répandu.
- Speaker #1
Et donc là, les étudiants utilisent des outils de création, enfin vous leur apprenez à utiliser des outils de création. Voilà, c'est comme quoi par exemple, concrètement ?
- Speaker #0
C'est vraiment processing, pour une raison, qui est le traumatisme de l'époque du CD-ROM. J'étais directeur, qui était un logiciel propriétaire, et un jour, directeur a été racheté dans un pack, parce que ça ne les intéressait pas, mais ils ont acheté toute la boîte Macromedia. ce qui les intéressait c'était Flash. Ils l'ont acheté, enfin Adobe l'a acheté, et puis n'en a rien fait. Le logiciel est mort, et donc tout le temps investi à apprendre et à enseigner, d'ailleurs le directeur était un peu perdu. Donc là, je me suis dit quand même qu'il fallait se rabattre sur des outils libres, obligatoires. Donc Processing, parce que je l'aime beaucoup, c'est un petit peu... Il y a une interface assez intéressante pour apprendre de manière progressive. On a juste une fenêtre, on tape du code, on appuie sur play et ça nous lance le tabac. Ce n'est pas comme les IDE un petit peu sérieuses où il faut… où il faut dire qu'on veut charger telle librairie, etc. Là aussi, d'ailleurs, il y a des librairies. Mais disons que, contrairement à des langages un petit peu généralistes, Processing sert à faire de la création visuelle. Donc, il sait déjà qu'on veut afficher des choses. On n'a pas besoin de lui expliquer tout un tas de trucs. Mais en revanche, c'est une très bonne initiation au code, à l'algorithme, etc. Il y en a d'autres. Par exemple Scratch, même pour des adultes c'est assez intéressant. Il y a après ça Python qui est très à la mode et qui là aussi est ouvert, ce n'est pas propriétaire. Et puis tous les langages du web sont intéressants aussi, JavaScript par exemple. Moi j'aime beaucoup Processing, je suis vraiment habitué à ça et je l'enseigne depuis très très longtemps. Peut-être qu'un jour, il faudra que je change et que je passe à d'autres outils. Mais tant qu'il fonctionne bien, je trouve que c'est un bon compromis entre le temps d'apprentissage et la qualité des choses qu'on peut faire. Et voilà.
- Speaker #1
Et quoi qu'il arrive, ça reste qu'un outil. Ça permet au moins d'amener aux étudiants la manière de travailler sur ces outils et après à eux de se faire leur... leurs propres idées. Ça ne veut pas dire que s'ils changent un jour d'outil, qu'ils ne sauront pas l'utiliser. Il faudra qu'ils s'adaptent. Mais la manière dont on travaille reste à l'oeuvre.
- Speaker #0
Ils comprennent la logique, l'idée. Ils comprennent un peu les maths. Je leur fais faire un peu de mathématiques à mon niveau. Je n'ai pas le bac. Mon niveau est faible. J'ai un niveau troisième. Mais n'empêche, eux, souvent un petit peu oublié ces matelas alors que qui sont très pratiques pour produire des images et puis et puis voilà donc les cours que je leur donne basse et en première année je leur montre les choses très progressivement et tape la même chose que moi ils font des petites variantes et puis voilà et ensuite pendant trois quatre ans beaucoup d'étudiants ne font plus de code du tout et c'est au moment de leur diplôme en cinquième année que souvent ils ils viennent me voir en disant je suis sûr que telle ou telle chose on pourrait le faire avec du code et ils ont raison et on le fait ensemble et c'est bien et puis il y a chaque année 2-3 geeks qui sont à fond dans le code et qui eux ont à peine besoin des profs ils se débrouillent très très bien oui il y en a certains qui ont plus d'appétence que d'autres voilà ce que je veux en tout cas c'est que pour tous les autres qu'ils aient vraiment une idée de ce qui peuvent faire, de ce qu'ils pourraient faire. Je ne leur demande pas de devenir ingénieur, ce n'est pas du tout ça. Je ne pourrais pas, d'ailleurs. Mais voilà, je leur demande d'avoir une idée de ce qu'ils pourraient faire, une idée des possibilités.
- Speaker #1
Et justement, par rapport à ça, un étudiant des Beaux-Arts, derrière, il ne sait pas bien quoi, mais quels sont ses métiers qu'il va avoir ? Parce que... Tout le monde pense que les beaux-arts, on sort et on devient artiste et on vit de tout ça, mais je pense que c'est qu'une minorité. Sur des métiers où ils vont utiliser le numérique, qu'est-ce que va être leur métier derrière ?
- Speaker #0
C'est une vraie question qui n'est pas si facile à résoudre, parce que nous-mêmes, on fait des études régulièrement pour voir ce que deviennent nos étudiants. C'est plutôt intéressant. On voit que souvent... ils arrivent à rester dans le champ artistique au sens large, bien qu'il y en ait qui finalement ont appris à plus s'intéresser à l'art grâce à l'école. Ils quittent l'école, il y en a qui ont un papier et tout. Et c'est peut-être notre faute ou peut-être que c'est bien même. De toute façon, tout le monde ne doit pas forcément être artiste. Et on en aide plusieurs gens. Ce qu'on apprend en école d'art, d'abord, c'est à être un peu débrouillard, à fabriquer ses propres outils. J'ai retrouvé un étudiant il y a quelques jours. Lui, il est devenu scénographe d'exposition. Il est un peu artiste, mais lui-même n'a pas forcément d'œuvres qu'il montre beaucoup. Mais il montre les expositions pour tout un tas d'artistes. Donc, des musées l'embauchent pour faire de la scénographie. Il n'a pas fait une formation de scénographie. Il a fait juste une formation d'art. Et puis... et il est débrouillard. C'est très souvent le cas, on en a beaucoup qui font ça, qui travaillent dans des métiers autour de la création artistique, qui sont embauchés par des centres d'art ou des choses comme ça. Évidemment, certains deviennent artistes et évidemment, c'est une minorité qui arrivera à en vivre vraiment. Ce n'est pas si facile de vivre de l'art. Et puis nous, on est en design, design numérique, enfin pas design numérique, design graphique et design numérique. Et nos étudiants vont devenir graphistes, éditer des livres, faire des choses comme ça. Ou pour ceux qui étaient vraiment spécialisés dans le numérique, faire des bornes numériques pour des musées ou des choses comme ça. Tout est possible, ou du web design évidemment.
- Speaker #1
Ouais, un peu du XUI peut-être, ceux qui vont spécialiser dedans, l'expérience, enfin tout ce qui est autour de l'expérience utilisateur, des choses comme ça.
- Speaker #0
Tout à fait, voilà, là c'est la mentalité du design, le design c'est à la fois devoir répondre à des problèmes, mais pas juste comme prestataire, il faut vraiment réfléchir à ces problèmes, et par exemple réfléchir à la manière dont on utilise les objets, leur but, etc., objets au sens large, un site web étant un objet. en design et donc voilà c'est une mentalité qui est particulière et voilà nos étudiants trouvent des emplois dans ce registre justement
- Speaker #1
lors de la prochaine biennale du design à Saint-Etienne il y aura une partie sur l'IA et le design, une grosse partie autour de tout ça pour échanger sur ce qu'apporte l'IA dans le design ou vice versa, comment on design aussi l'IA.
- Speaker #0
Ce sont toujours très bien les expéditions à Saint-Etienne du design, je suis patient de voir ce qu'ils vont faire sur l'IA. Ils ont sorti déjà une revue à Saint-Etienne, les imuts sur l'IA en design.
- Speaker #1
C'est vrai, c'est vrai, donc ce sera l'occasion de se voir alors Jean-Paul à Saint-Etienne. Donc ça sera l'occasion de se voir. Et donc, ok. Et moi, je voulais revenir aussi sur un autre pan de vos activités au sens large. C'est un sujet qui m'intéresse beaucoup et c'est ce qui m'a amené aussi à vouloir échanger avec vous. C'est un peu l'art et la vulgarisation scientifique. Parce que c'est un sujet qui m'intéresse beaucoup. Je suis déessayer des hommes et là aussi pour... vulgariser, simplifier, montrer un petit peu ce qu'est le numérique et un peu le décrypter. Moi aussi, j'aime enseigner. Je suis même allé essayer d'aller dans des écoles primaires pour parler cybersécurité, risques numériques, etc. Je trouve qu'en France, on est un tout petit peu en retard sur ces sujets-là. Je trouve qu'on forme trop tard nos élèves et nos étudiants. Donc, voilà, j'essaye de donner un petit peu des fois de mon temps pour y aller. Et vous, vous avez contribué à la petite BDTech des savoirs avec des titres comme Internet ou l'intelligence artificielle. Et vous, comment vous abordez ce défi de rendre ces sujets complexes accessibles dans un format en plus bande dessinée, donc qui va être très lisible par tout le monde ? Comment vous abordez ça ?
- Speaker #0
Alors, c'est assez intéressant. Bon. La petite Bénéthèque des savoirs, ça a été monté par David Van Der Molen et Nathalie Van Kampenout, qui sont en Belgique et qui ont voulu créer une espèce de que sais-je en bande dessinée. C'était un petit peu ça le pitch de départ, avec l'idée à chaque fois d'avoir des spécialistes vraiment sérieux, comme Hubert Reeves pour l'astrophysique par exemple, ou Bernard Serret pour les requins, un super requinologue, enfin le plus célèbre requinologue du monde. donc des gens quand même importants dans leur domaine et ils les mettent avec des auteurs de bande dessinée eux-mêmes sérieux, des très bons auteurs Voilà, alors moi je suis un peu un escroc, puisque je ne suis pas scientifique, ni même un spécialiste finalement, mais David Van Der Molen avait vraiment confiance en moi sur les sujets liés au numérique, et donc il m'a fait travailler avec des gens super, comme Mathieu Bourgnat, avec qui j'ai réalisé la bande dessinée Internet, et puis avec Marion Montaigne. avec qui j'ai réalisé la bande dessinée sur l'intelligence artificielle, qui parle un petit peu de toute l'IA d'avant les IA génératives. Donc, c'est assez amusant qu'on ait sorti ça. Avant, c'est une autre IA, finalement. Ce n'est pas tellement celle qui nous fait parler en ce moment. Mais l'histoire est quand même intéressante. Je me suis toujours intéressé à l'histoire des techniques. Et puis, à l'histoire des techniques et en même temps à les comprendre, finalement. Donc, voilà, l'idée m'a plu. J'ai travaillé de manière différente avec les deux auteurs. Marion Montaigne, c'est à la fois une super humoriste et puis, je ne vais pas dire une chercheuse, parce que ce n'est pas le mot, mais disons qu'elle travaille vraiment avec le principe de l'enquête. Elle va voir des scientifiques, elle discute avec eux, etc. Donc moi, en tant que co-scénariste, je n'allais pas écrire des gags pour elle, même si j'en ai un dans le livre. Mais disons que c'est elle qui sait faire rire les gens, ce n'est pas moi. Et puis, je n'allais pas non plus lui imposer un texte monolithique. Au contraire, on est partis tous les deux, on est allés rencontrer des chercheurs qui nous ont raconté ce sur quoi ils travaillaient, etc. Donc j'ai plutôt suivi Marion Lonteng, que était son... son scénariste au sens où tu lui aurais donné un texte qu'elle devait illustrer ça ne s'est pas passé du tout comme ça et puis le deuxième, Mathieu Bourgnat je lui ai donné un texte tout fait donc je ne faisais que 5 pages mais qui expliquait vraiment un petit peu tous les enjeux d'internet et tout, il l'a adapté vraiment dans l'ordre où c'était écrit avec le fil de ma pensée mais en ayant une idée lui-même très très bonne au départ, qui est le prétexte. C'est-à-dire qu'on utilise une vieille dame qui découvre Internet et qui existe. C'est Ayasten Chakarian, qui est une dame en Géorgie, qui a cassé un câble et qui a coupé Internet pour tout le Moyen-Orient, juste d'un coup de pioche. C'est elle qu'on utilise comme héroïne, et qui se fait expliquer par un câble de fibre optique. internet et ce qui était intéressant là c'était l'échange parce que même si Mathieu est plus jeune que moi et que en théorie il est un digital native il connaissait pas si bien internet donc et par contre il adore comprendre lui même il a fait un super livre sur la physique quantique par exemple et donc dans l'échange il fallait que j'arrive à lui expliquer les choses et donc la vulgarisation s'est fait comme ça fallait déjà que j'explique les choses au dessinateur pour qu'ils puissent ensuite leur donner une forme qui fonctionne.
- Speaker #1
Super intéressant. Moi, je trouve qu'avoir ce type de format un peu différent pour sensibiliser un large public, d'autres publics, parce que tout le monde n'est pas sensible à des livres, il y en a qui aiment les BD, il y en a qui aiment écouter, il y en a qui aiment... Et je trouve que c'est assez intéressant parce que c'est des sujets qui peuvent permettre de... de sensibiliser sur les enjeux du numérique. On peut prendre l'exemple aussi du livre sur l'environnement de Marc Giancovici. Ça y est, j'ai oublié le nom. L'histoire de la fin du monde. Un monde sans fin, voilà. Un monde sans fin qui permet d'illustrer différemment certains sujets. Je trouve que pour moi, c'est important d'arriver à trouver d'autres manières de sensibiliser sur des enjeux actuels. Parce que... Et comme vous l'avez dit, vous avez fait l'intelligence artificielle avant que ChatGPT et autres arrivent.
- Speaker #0
C'est intéressant d'utiliser l'image, d'utiliser la narration. La bande dessinée, c'est de la séquence et de la narration. Ça amène d'autres choses. Moi, j'aime beaucoup lire les essais, même un peu secs et tout. C'est intéressant, mais il y a d'autres choses où finalement d'autres formats sont intéressants. Je vois par exemple mes étudiants, souvent je leur dis que je vais les aider à faire telle ou telle chose, et ils me disent Oh non, t'inquiète, je vais aller regarder un tuto sur YouTube Parce que c'est leur manière d'apprendre pour beaucoup de choses, et puis ça marche assez bien en fait. Donc voilà, on a une palette qui augmente. Et la bande dessinée didactique, instructive, etc., c'est devenu un vrai truc. C'est 15% des bandes dessinées maintenant. C'est énorme. Notamment toutes les bandes dessinées qui font l'histoire de quelque chose. Il y en a énormément. Et puis parfois, on y gagne vraiment quelque chose. C'est vraiment bien.
- Speaker #1
On arrive tout doucement à la fin de l'épisode. Je voulais juste revenir sur certaines de vos œuvres, comme les fins du monde de l'Antiquité à nos jours. Parce que pour moi, je pense qu'on peut explorer le numérique à travers différentes œuvres. J'ai relu dernièrement Le Meilleur des Mondes, ou Daldos Huxley. J'ai relu aussi 1984. 1984, voilà des sujets avec qui ont été écrits il y a déjà quelques années, où on voit qu'on y est en plein dedans. Et à votre avis, dans votre livre Les fins du monde de l'Antiquité à nos jours est-ce qu'on peut y voir un parallèle entre ce que vous avez imaginé et nos préoccupations qu'on a aujourd'hui face aux avancées technologiques ? Parce que je suis en train de retrouver, il avait été écrit en 2012.
- Speaker #0
Oui, tout à fait. Donc très longtemps après Le meilleur des mondes qui est de 1932 et puis 1984 qui est de 1959. Donc on est plus loin. Donc là c'est assez amusant, c'est un projet d'école d'art au départ. Chaque année je dois trouver des sujets de workshop. Donc un workshop, on travaille une semaine sur quelque chose. Et puis on parlait un petit peu partout de la fin du monde des mayas. C'était un truc, une espèce de gag, le calendrier Maya qui annonçait la fin du monde. Mais comme ça faisait beaucoup de bruit et que le sujet m'avait toujours intéressé, je me suis dit que c'était un bon prétexte et j'ai organisé un workshop avec mes étudiants là-dessus. Ils ont proposé plein de choses sur la fin du monde. Pendant que j'étais en train de les accompagner, j'ai monté un petit blog qui s'appelait Fin du monde sur lequel je mettais de la documentation, je parlais de films, de choses comme ça. Et une éditrice, Amélie Petit, m'a proposé d'en faire un livre, et même un beau livre, donc c'est un livre qui fait 2 kilos en fait, il est très illustré. Et voilà, et donc je me suis intéressé à toutes les histoires de fin du monde, d'abord mythologiques et puis religieuses, puisque au départ c'est ça la fin du monde, c'est... Tout va changer. Et puis, enfin, tout va changer parce que Dieu va revenir, les morts vont renaître, etc. C'est ça la fin du monde de l'Apocalypse, par exemple. Et puis, je me suis intéressé après, aux fins du monde moderne, celle où on pense que c'est l'humain qui va tout détruire. Donc, on pense qu'avec la bombe atomique, avec l'écologie, avec l'ordinateur aussi, eh bien, on va être la cause de notre propre... properte. Et ce qui est intéressant, quand j'ai écrit le livre, on ne parlait pas encore beaucoup de collapsologie, etc., mais c'est là que j'ai rencontré les gens qui sont là-dedans et qui s'intéressent à l'effondrement. Et donc, ce sont des sujets d'aujourd'hui, et eux-mêmes ont un rapport assez intéressant en numérique, justement, et à l'idée que le numérique tel qu'il est, dirigé par des grandes sociétés, etc., nous amène un petit peu à... à notre perte. Donc il y a une réflexion là dessus. Et puis là depuis les idées génératives, on est aussi dans une espèce d'idée de fin du monde. On a en fait des collapsologues, comment ils s'appellent, des transhumanistes, donc qui sont persuadés que à un moment l'ordinateur va devenir plus, pas seulement plus intelligent, mais plus, enfin va devenir conscient et va pouvoir nous supplanter ou nous absorber. C'est-à-dire qu'il y a beaucoup de gens qui croient qu'on va devenir immortel parce qu'on va transférer nos pensées, notre personnalité, etc. sur des supports numériques. Et finalement, c'est un petit peu pareil que l'apocalypse religieuse d'il y a 2000 ans, où il y avait l'idée que la fin du monde, c'était le passage à un autre état de l'existence, où finalement les morts renaissent, etc. Ça m'amuse de faire le parallèle, jouer un parallèle entre l'apocalypse numérique actuelle et le... Dans toutes ces dimensions, il y a beaucoup de choses. Et puis les apocalypses religieuses. Voilà, ça c'est le lien que je fais, mais que je ne fais pas spécialement dans le livre. C'est le lien que je fais depuis.
- Speaker #1
Après, comme on a pu le voir avec 1984 ou Le Meilleur des Mondes. Ok, on arrive à la fin. J'ai encore deux questions à vous poser. Les questions habituelles, c'est... Est-ce que vous avez une œuvre... Un livre, une série, un film, peu importe, que vous recommandez à nos auditeurs, soit pour approfondir la réflexion sur le lien entre un numérique ou totalement autre chose, quelque chose qui vous inspire, il n'y a pas de règle.
- Speaker #0
Oui, alors, ce n'est pas si facile, évidemment, puisqu'il y en a des milliers. Il y a beaucoup de choses qui m'intéressent, ça dépend un petit peu de ce à quoi on s'intéresse. Toutes les semaines, je vois des étudiants, par exemple, qui sont en train de travailler sur leur mémoire et qui ont besoin de... de références, etc. Je peux retrouver des dizaines de livres, de films, moi ou mes collègues. On passe notre temps à ça. Alors, par facilité, je vais plutôt choisir un livre qui vient de sortir ou plutôt qui fait l'actualité. C'est pour ça qu'il est intéressant. Une actualité pas si populaire. Je ne pense pas qu'on en parle partout. Mais c'est un livre qui s'appelle Persistance du Merveilleux par Nicolas Nova. qui est sorti en novembre dernier chez Premier Parallèle et il est vraiment intéressant donc je commence à ce livre parce que Nicolas Nova, l'auteur est mort il y a quelques semaines très jeune de un arrêt de valeur j'avais vu passer l'info et c'était un type passionnant un anthropologue du numérique et donc dans Persistant du Merveilleux, il s'intéresse à l'idée de ce qu'on appelle le petit peuple chez les Nordiques, c'est-à-dire les elfes, les trolls, etc. Et il dit que tous ces lutins, les fantômes, etc. ont un petit peu disparu de nos vies. Il n'y a plus de lutins dans les sous-bois, on ne parle plus de fantômes, de maisons hantées, etc. Et ils sont maintenant sur nos ordinateurs. s'intéresse pour ça au vocabulaire par exemple en disant voilà on parle de troll on parle de démon pour les programmes qui font tourner nos systèmes d'exploitation et puis il y a tout un tas de genre de fantômes sur les ordinateurs et donc le livre est là dessus c'est sur l'idée que le merveilleux maintenant est en partie dans l'ordinateur je n'ai pas fini j'ai à peine commencé Mais j'ai très confiance dans le contenu, puisque Nicolas Nova ne m'a jamais su dans ses livres. C'était vraiment quelqu'un de brillant.
- Speaker #1
J'en ai entendu parler, parce que forcément, étant ligérien, lui d'origine, ça a forcément fait bien raisonner sur le territoire. Et puis voilà, par rapport à ce qu'il était aussi, moi je ne le connaissais pas avant ça, et ça m'a permis d'y intéresser, de regarder ce qu'il avait fait. ce qu'il avait fait. Je note bien le livre, je mettrai le lien aussi pour les auditeurs et puis je le note bien pour moi, le lire après. Et dernière question, un petit passage de témoin, un invité à me conseiller, qu'il pourrait me parler de numérique, que ce soit en lien avec l'art ou autre chose.
- Speaker #0
Oui, je n'ai pas complètement pensé, il y a plein de gens, il y a plein, plein de gens. Je n'ai pas parlé tout à l'heure de Jean-Michel Géridan, qui est la personne avec qui j'ai écrit le livre sur... processus. On en a fait trois éditions ensemble. Et lui, maintenant, il est directeur du Centre National du Graphisme à Chaumont. Et il s'est toujours beaucoup intéressé au numérique. Et en même temps, il est dans le design graphique. Ça peut être quelqu'un d'intéressant. Donc, Jean-Michel Géridan. Sinon, je ne sais pas. J'ai envie de dire dans quel domaine précis.
- Speaker #1
Il n'y a pas de domaine. Voilà. Il m'a donné un nom, ça me va.
- Speaker #0
Il est très amusant et très bien.
- Speaker #1
Ça marche, ça marche. Merci beaucoup Jean-Noël pour cet échange très riche. J'ai bien aimé parce que c'était un pan que je n'avais pas trouvé, que je n'avais pas pu explorer sur la partie art. Je trouve que vous avez offert un beau regard sur les interactions entre art et numérique. C'était top.
- Speaker #0
Merci beaucoup.
- Speaker #1
et chers auditeurs si cet épisode vous a plu n'oubliez pas de nous suivre, de partager le podcast et de nous laisser la meilleure des notes je vous mettrai tout dans la bio pour retrouver les ouvrages de Jean-Noël et tout ce qui a pu être cité aussi dans la description de l'épisode Jean-Noël on peut vous retrouver sur LinkedIn et peut-être aussi ailleurs non ?
- Speaker #0
Oui, en ce moment tout le monde se pose la question de s'il faut quitter certains réseaux sociaux et tout je suis sur tous les réseaux sociaux et complètement pris ceux du fait divers, donc les mastodontes, etc. Mais donc, je suis un petit peu partout pour le moment. Et voilà. Alors, à vrai dire, j'en quitterai sans doute aucun. Mais par contre, je vais peut-être moins m'investir sur certains. Par exemple, Twitter est devenu assez insupportable. Pas tellement pour les raisons qu'on dit, si je peux finir là-dessus. Il y a beaucoup de gens pour qui ce qui n'est pas bien sur Instagram, sur Twitter, c'est que ce n'est pas modéré. Mais ce n'est pas vrai, c'est complètement modéré, c'est plutôt ça le problème. Moi, je n'ai rien contre la liberté, mais je vois sur Twitter qu'un post sur deux, c'est quelqu'un à qui je ne me suis pas abonné, qu'on m'impose, et qui m'amène un discours que je n'ai pas envie spécialement de lire.
- Speaker #1
C'est sûr qu'on pourrait relancer la belle discussion. je crois qu'il ya eu un test qui a été fait dernièrement par une journaliste et a recréé un compte n'a rien publié qui n'a rien mis en centre d'intérêt et lui est remonté certaines choses voilà voilà que sur des gens qui ne sont pas connectés et sur certaines idées surtout voilà donc c'est ça qui pose question mais ça on rentre dans la manipulation aussi des réseaux sociaux je crois qu'on peut On peut reciter le film Netflix derrière les écrans de fumée qui montre bien que nous sommes manipulés sur ces sujets et qu'il faut en reprendre le contrôle. Mais voilà, ça pourrait être l'objet d'une autre discussion, je pense, Jean-Noël.
- Speaker #0
Je le cite souvent parce qu'il dit bien qu'on croit qu'on va sur Internet, mais en fait, c'est Internet qui nous regarde et c'est ça qui est intéressant.
- Speaker #1
C'est vrai, c'est vrai, c'est vrai. Non, mais top ! Merci beaucoup encore Jean-Noël et puis à très bientôt pour un nouvel épisode de DSI et des hommes