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#103 Domitille Kiger Championne du Monde de parachutisme, Conférencière "Parachutisme, compétition et liberté " cover
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Elles Agissent

#103 Domitille Kiger Championne du Monde de parachutisme, Conférencière "Parachutisme, compétition et liberté "

#103 Domitille Kiger Championne du Monde de parachutisme, Conférencière "Parachutisme, compétition et liberté "

39min |30/10/2025
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#103 Domitille Kiger Championne du Monde de parachutisme, Conférencière "Parachutisme, compétition et liberté "

#103 Domitille Kiger Championne du Monde de parachutisme, Conférencière "Parachutisme, compétition et liberté "

39min |30/10/2025
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Description

“La peur ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant.”


L'épisode de demain accueille la championne du monde de parachutisme free fly, conférencière et désormais femme Forbes 2025, Domitille Kiger a passé plus de vingt ans à explorer le ciel !
Le vide, pour elle, n’a jamais été un espace de peur mais plutôt un lieu de liberté comme elle l'aime le souligner.


De 4000 mètres d’altitude à la scène des entreprises, elle a appris à transformer le risque en maîtrise, la peur en moteur, le collectif en force.


Dans cet épisode, elle me reçoit à un moment charnière : quelques jours avant d’accueillir son premier enfant.
Un entre-deux symbolique, où la championne de haut niveau s’apprête à redéfinir la notion même de performance, de rythme et d’équilibre.


Nous parlons de peur et de confiance, de leadership féminin et de mixité, de records du monde et de transitions intérieures.
De ces moments où il faut savoir lâcher prise pour continuer à s’élever.


Un épisode fort et apaisé à la fois, sur le courage, la transmission et l’art de continuer à voler, autrement.


Amy Chmielecki et sara curtis :

Deux parachutistes américaines basées en Arizona, pionnières du free fly et organisatrices des premiers records du monde féminins.
➤ Ce sont ses mentors, “ses mamans oiseaux”, celles qui lui ont appris à voler tête en bas et à organiser des records.

« Ce sont elles qui m’ont appris à dessiner une formation, à faire l’ingénierie du saut, à gérer le leadership de ces records. »


Cathy et Virginie Bouette et Karine Joly
➤ Championnes françaises de free fly, premières femmes à avoir été championnes du monde dans une discipline mixte.
➤ Domitille souligne leur rôle pionnier dans un sport encore très masculin.

« La première femme à être championne du monde, c’est Cathy Bouette, en 2008. Depuis, il y a eu Karine Joly en 2018. »


Anna Moxnes et Sharon Har-Noy
➤ Ses coorganisatrices actuelles dans l’équipe Joyrider et sur les records européens à venir.
➤ Domitille les décrit comme des partenaires de vision et de valeurs.

« On aligne nos valeurs avec notre pratique. C’est ce qui donne du sens à nos projets. »


Marie Eloy
➤ Fondatrice de Bouge ta Boîte, autrice de Les femmes sauveront-elles le monde ?
➤ Elle la cite comme une référence inspirante sur la mixité et le leadership féminin.

« Plus on aura de femmes en position de leadership, mieux le monde se portera. »


Marguerite Yourcenar
➤ Sa figure d’inspiration littéraire absolue.
➤ Domitille dit la relire “régulièrement et religieusement”.

« C’est mon inspiration absolue pour la littérature. C’est écrasant, mais tellement inspirant. »



Retrouvez toutes les informations sur www.ellesagissent.com

Retrouvez moi sur www.emilieberthet.fr

Sur mon Instagram Berthet_Emilie


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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Je suis Emilie Berthet Conférencière, productrice de podcasts, sophrologue et auteure, j’accompagne les organisations et les particuliers vers une meilleure compréhension de notre époque et à construire une société attentive aux enjeux humains. Femme Forbes 2025 et TEDx speaker.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Agir. J'ai choisi d'agir sans arrêt.

  • Speaker #1

    J'agis en enlevant mon t-shirt et en criant des slogans dans des endroits où je ne suis pas la bienvenue et à des gens qui ne sont pas forcément contents de me voir.

  • Speaker #2

    J'ai pas une action dont je suis fière, c'est je crois que toute action doit rendre fière.

  • Speaker #1

    J'ai pas de mots pour agir, c'est une action.

  • Speaker #0

    Bonjour Domitile.

  • Speaker #3

    Bonjour Émilie.

  • Speaker #0

    Merci d'être dans Elles agissent.

  • Speaker #3

    C'est un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Oui, moi aussi, je suis très, très contente. Alors, Domitille, tu es championne du monde de parachutisme, de saut synchronisé tête en haut. Est-ce que c'est bien ça ?

  • Speaker #3

    Alors, pas tout à fait.

  • Speaker #0

    Pas tout à fait. J'ai eu du mal à trouver, j'ai vu plusieurs thèmes, donc je préfère que tu me...

  • Speaker #3

    Alors, moi, je suis championne du monde de free fly, qui est une discipline artistique du parachutisme sportif. Donc, on n'est pas dans le parachutisme militaire, on est vraiment dans le sport. Et c'est un sport dans lequel tu as plein de disciplines différentes. Il y en a qui se passent. en chute libre, il y en a qui se passent sous voile et d'autres au moment du posé. Le free fly, c'est pendant la chute libre. En gros, c'est un peu comme du patinage artistique. Tu vas faire des manches de libre, donc des sauts de libre et des sauts d'imposé. Sur un saut d'imposé, toutes les équipes vont faire les mêmes figures et sont jugées sur la précision avec laquelle elles les réalisent. Et puis sur un saut de libre, tu crées 45 secondes pour créer la chorégraphie que tu veux. Et ça se passe en équipe de trois. Deux performeurs et un vidéomane. C'est les images que rapporte le vidéomane au sol qui servent au juge pour noter.

  • Speaker #0

    Merci de cette précision déjà. C'est depuis plus de 20 ans que tu fais partie de ces peut-être rares femmes, et tu vas me dire si je me trompe aussi ou pas, à défier la gravité. En tout cas, je n'ai pas vu beaucoup de femmes. Tu as hésité à un moment jeune entre ciel et terre, mais tu as choisi de faire du ciel ton espace d'équilibre. Tu jongles entre une totale maîtrise et une sensation de lâcher prise. Quand tu es là-haut, à quelques secondes du saut, qu'est-ce qui se passe en toi ? Est-ce que c'est le calme absolu ? Est-ce que c'est la concentration ? Parce qu'on est dans la rigueur aussi, dans la préparation. Qu'est-ce que tu ressens à ce moment-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ça va pas mal dépendre des sauts. Je ne vais pas ressentir la même chose tout le temps. Déjà, tout au long de ma vie et de ma carrière. Les premiers sauts par rapport aux sauts d'aujourd'hui, évidemment, en termes de stress, par exemple. Ce n'est pas tout à fait pareil. avant mon premier saut avant mes premiers sauts j'avais beaucoup de peur, une peur assez intense qui se manifeste par le cœur qui s'accélère, la respiration qui raccourcit, les pensées qui tournent un peu en boucle dans ta tête en te disant « Pourquoi je suis là ? » Et ça, évidemment, ça disparaît au fur et à mesure. Il n'y a pas vraiment un « on-off » . Tu ne passes pas de la terreur totale à la décontraction la plus absolue d'un saut à l'autre. On va dire que la peur diminue au fur et à mesure que tu améliores ta pratique, que tu comprends l'environnement, que tu comprends les enjeux. Et puis que tu fréquentes des gens qui font la même chose que toi, ça peut paraître idiot aussi, mais quand tu débarques dans quelque chose que tu n'as jamais fait et que tu ne connais personne qui le fait, ta méconnaissance de l'environnement accentue ta peur. Quand tu passes du temps avec que des gens qui font la même chose que toi, ça désacralise un peu l'action. Et puis le parachutisme en particulier, qui a cette image très dangereuse, trompe la mort. En fait, tu te rends compte à la pratique que ce n'est pas du tout le cas. Et donc, du coup, ça aide aussi à faire baisser un peu la peur entre la réalité de la pratique et ce que tu t'en étais imaginé.

  • Speaker #0

    Oui. Et puis, au moment où tu sautes, il y a tellement de préparation derrière que tu es dans un état peut-être qui n'est même plus au-delà de la peur, qui est peut-être dans ton objectif quand tu réalises, quand tu veux battre un record, etc.

  • Speaker #3

    Oui. Alors, les records, c'est encore autre chose. Un saut de record ou un saut de compétition. Là, la peur est à nouveau très intense avant de sauter, mais ce n'est pas tellement de la peur, c'est plus du track de performance. C'est la même chose qu'avant de monter sur scène pour une conférence. C'est la peur de contre-performer. Alors que tes premiers sauts, tu es dans une peur plus viscérale quand même. Ce n'est pas ultra naturel de se jeter d'un avion en parfait état de marche. Je pense d'un point de vue de l'évolution, c'est quand même assez récent. Donc, il y a quand même tout dans ton cerveau qui s'allume en disant non, non, non, mais pourquoi ? Et ce que tu dis est intéressant, le fait qu'il y ait toute cette préparation avant, c'est clairement le socle de raison sur lequel tu t'appuies pour pouvoir lâcher prise. Parce que lâcher prise sans avoir fait ce travail préliminaire, ce serait de l'inconscience, ce serait très dangereux, ce serait complètement idiot. C'est vrai qu'avant de faire un premier saut, tu vas te former avec des moniteurs diplômés d'État, tu vas utiliser du matériel qui est homologué, tu sautes d'un avion qui est aussi homologué pour ça. Donc tu as quand même tout un socle réglementaire et raisonnable et intelligent qui fait que tu peux pratiquer. Si tu ne fais pas ça, tu ne vas pas monter dans un avion aléatoire, casser la porte avec ton pied et sauter sans parachute. Tu peux le faire, mais du coup, tu meurs si tu fais ça. Tu veux le pratiquer comme sport, c'est dans un cadre qui est quand même très encadré. Et donc, ça, ça te permet d'arriver au moment de basculement en ayant cette confiance que tu peux le faire. Malheureusement, la mauvaise nouvelle, c'est que ce socle de raison, il ne va pas t'enlever la peur. Tu vas quand même, sur les premiers sauts, être très stressé, très nerveux. Et il faut trouver en toi les ressources pour basculer malgré cette peur-là. Pour moi, ce socle de raison, c'est l'étape numéro un. Elle est indispensable, elle est primordiale pour prendre des risques sans y laisser des plumes. Mais il faut quand même ensuite avoir ce petit moment de déconnexion. Et c'est vrai que quand on a réussi à le trouver, là, dans le cadre très anecdotique du parachutisme, mais en fait, quand tu l'as trouvé dans ce cadre-là, moi, ça me l'a fait à titre personnel, mais je l'ai constaté chez beaucoup de gens. derrière. Quand tu t'es rendu compte que tu étais capable de ça dans ce contexte-là, tu vas être plus facilement capable de l'être dans d'autres contextes aussi. Et c'est vrai que c'est un sport qui, moi, a eu une influence très forte sur la façon dont j'ai vécu ma vie derrière. Mais je le vois dans les gens à qui j'enseigne, c'est souvent la même chose. On a tous des histoires assez similaires, en fait. Ça booste bien la confiance en soi.

  • Speaker #0

    Dans une conversation qu'on avait eue hors micro, tu m'avais dit, enfin, tu avais dit une fois que tu n'avais pas vraiment ce syndrome de l'imposteur. Est-ce que c'est grâce aussi à ça ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense.

  • Speaker #0

    En tout cas, peut-être est-ce que tu as travaillé sur un dépassement de soi de différentes manières que tu peux appliquer dans le quotidien en fait ?

  • Speaker #3

    Alors, je n'ai pas vraiment l'impression d'avoir travaillé spécifiquement dessus. Mais par contre, je suis convaincue effectivement que cette vie aérienne et ces choix que j'ai faits et cette pratique assidue du parachutisme a contribué à me donner confiance en moi. Et c'est vrai que le syndrome de l'imposteur, c'est quelque chose dont on parle beaucoup aujourd'hui et dont je vois sincèrement et concrètement beaucoup de gens et beaucoup de femmes, on ne va pas se mentir, s'en déclarer victime. Et moi, je ne le ressens pas parce que j'ai l'impression d'avoir une bonne estimation de où je me place pour une activité particulière. et ne pas avoir le syndrome de l'imposteur ça ne veut pas dire avoir une surconfiance pas du tout, et que ce soit dans mon sport ou que ce soit dans d'autres activités que j'ai lancées derrière En fait, quand je débute quelque chose auquel je ne connais rien, je ne me sens pas comme une impostrice, je me sens comme une débutante. Et donc, j'accepte que le statut de débutant implique une médiocrité pratique. Quand tu ne sais pas faire un truc, tu n'es pas bon. Et ce n'est pas se sentir imposteur, c'est juste que c'est vrai, tu n'es pas bon, donc il faut apprendre. Ça demande du travail. Du travail, ça demande du temps. Et seulement avec le temps et l'expérience, tu vas arriver dans une phase de légitimité. Mais donc, je ne me sens pas imposteur quand je suis au début du chemin. Je suis juste débutante. Et puis, une fois que j'ai pris le temps et que j'ai fait les efforts pour arriver au bout du chemin, je ne suis pas une imposteur. Je suis arrivé là où mon travail m'a amené. Et puis après, le chemin entre les deux, il faut jauger un peu où t'en es. Mais voilà, je ne me sens pas impostrice parce que soit je suis débutante, soit je suis apprenante, soit je suis confirmée.

  • Speaker #0

    Ce syndrome, il peut être aussi impactant avant même de commencer. Tu vois, il peut te dire de ne pas y aller. et ça euh Ça, tu l'as travaillé aussi, peut-être, en te disant... Ça, c'est la confiance en soi. Je me force à y aller. Tu vois, j'y vais quand même. J'y vais, mais j'ai peur, mais j'y vais quand même. Je dis oui avant de... Tu sais, quand parfois, on a des propositions... Je ne sais pas, je n'ai jamais fait. Je dis oui, et après, j'apprends. Et j'apprends pour le faire. C'est ça aussi la une des clés.

  • Speaker #3

    Complètement. Et tu as raison. Je pense que le parachutisme m'a vachement aidé avec ma capacité à me dire j'y vais.

  • Speaker #0

    Bah ouais. Toi, tu n'arrêtes pas de te lancer. tu vas te dire ce truc de se lancer et d'ailleurs tu dis le vide ne fait pas peur il rend libre J'avais lu ou entendu ça. Est-ce que tu peux revenir sur cette pensée ? Qu'est-ce que tu ressens en disant ça ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, cette notion de vide, qui est ce qu'on redoute souvent le plus quand on imagine un saut en parachute, pour moi, une des leçons qui a été très fondatrice avec mon premier saut, c'est de me rendre compte que je n'étais pas du tout dans du vide. Alors, je sais que les gens souvent me disent « mais de quoi tu parles ? Tu sautes dans le vide, il n'y a rien autour de toi » . Alors oui, c'est vrai, mais en fait, on n'a pas du tout une impression de vide. Parce que quand on sort de l'avion, on est tout de suite dans un truc qui s'appelle le vent relatif. On ne va pas rentrer dans des grands détails techniques, mais en gros, c'est le vent subi par un objet en mouvement. C'est comme quand tu mets ta main en dehors de la voiture sur l'autoroute. Tu as une perception. Tu sens une pression sur ta main. Effectivement, si tu la regardes juste à main, elle est dans du rien, parce que le vent, ça ne se voit pas. Mais en termes de sensation, tu as une pression forte et plus la vitesse est rapide de la voiture ou de ta propre chute. En parachutisme, on est à peu près à 200 km heure si on est à plat. 300 km heure si on est à temps bas. Donc la densité, la texture, elle est quand même assez concrète et solide. Donc en fait, tu n'as pas du tout l'impression d'être dans du vide. Et tu as une influence sur ça. C'est pour ça qu'on arrive à faire des figures et à se déplacer et à voler relativement les uns par rapport aux autres avec précision. C'est parce que notre corps peut, comme te déplacer dans de l'eau, tu peux agir sur cet élément. Donc tu n'es pas dans du rien, tu es dans quelque chose que tu apprends à maîtriser. plus ou moins de grâce au début, ça prend quand même un peu de temps avant d'y arriver, mais t'es pas dans du vide. Et donc cette notion de te jeter dans le vide, en fait tu te rends compte seulement après l'avoir fait que c'était pas ce que tu croyais. Et ça aussi c'est quelque chose qui m'a donné je pense, je sais pas si c'est du courage, mais en tout cas une propension à être capable d'aller vers l'inconnu parce que ma première grosse expérience d'aller vers l'inconnu s'était avérée réconfortante. Les peurs que j'avais autour de ça, c'était avéré fausse. Et ce que j'avais découvert de l'autre côté de ces peurs, c'était avéré absolument fantastique à vivre. Donc, ça m'a donné des billes pour être capable de le faire dans d'autres contextes après.

  • Speaker #0

    Je voudrais revenir quand même sur ton parcours, parce qu'entre plaisir et devenir championne du monde, le plaisir ou la découverte de sautée... Qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #3

    J'ai un caractère un peu obsessionnel, on ne va pas se mentir. Quand j'aime un truc, j'aime vraiment beaucoup un truc et j'ai envie de faire que ça. Donc, les premières années de ma pratique, déjà, elles étaient quasiment qu'estivales parce que j'ai commencé, j'étais au lycée, après j'étais à la fac. Donc, je n'avais pas vraiment d'argent pour pratiquer. Et puis, en bonne parisienne qui se respecte, je n'avais pas le permis. Donc, à part l'été, une fois qu'on m'avait posé quelque part, je n'allais pas nulle part. Et donc, j'ai rapidement commencé à travailler les saisons d'été dans un centre de parachutisme pour pouvoir me payer mes sceaux. Et puis surtout, pour faire partie d'un groupe, pour faire partie d'une communauté. J'avais vraiment envie d'intégrer cet univers-là. Et le travail, même saisonnier, m'avait paru la meilleure façon de le faire. Et puis rapidement, forcément, j'avais 17, 18, 19 ans. Dans les magazines de para, tu vois les stars, les gens qui sont champions du monde. Et tu te dis, c'est complètement incroyable ce qu'ils font. à la fois visuellement et techniquement dans le sport, mais aussi les vies qu'ils mènent. Moi, j'étais absolument fascinée par ça.

  • Speaker #0

    C'est quoi ?

  • Speaker #3

    C'est des vies de liberté où tu passes, tu vas une semaine dans un pays, la semaine d'après dans un autre pays, où tu enseignes ta discipline, tu fais des compétitions. Et en fait, moi, je trouvais ça extrêmement attirant. J'avais vraiment envie de ça. Alors à côté, j'avais quand même toujours ma vie à Paris d'étudiante. Moi, j'ai fait des études d'histoire à la Sorbonne. J'ai fait un master en audiovisuel toujours à Paris. donc Au début, j'étais quand même sur des rails un peu plus classiques parce que c'était les seuls modèles que j'avais autour de moi. Mais le parachutisme commençait à me montrer d'autres modèles. Et je dois t'avouer que ces modèles-là me faisaient vachement plus kiffer que le très jeune adulte. Et donc, je me suis dit que la compétition, ça va être un excellent moyen à la fois de me perfectionner techniquement, parce que quand tu te concentres sur une discipline avec le même petit groupe de personnes dans un cadre d'entraînement, tu vas progresser beaucoup. plus vite que si juste tu fais des sauts à la cool le week-end avec tes copains, mais ça change un peu tout le temps et puis il n'y a pas vraiment de notion d'entraînement ou d'excellence. Donc j'avais à la fois envie de me perfectionner dans ma discipline, parce qu'en fait, mieux tu sais voler, plus c'est agréable de voler. Plus tu arrives à te déplacer instinctivement dans l'air, plus la sensation est agréable.

  • Speaker #0

    Voilà le moment. Exactement.

  • Speaker #3

    Donc il y avait à la fois ce côté purement sportif et technique. Mais il y avait aussi très fortement cette envie d'accéder à un mode de vie, à une communauté, parce que c'est un tout petit sport. Et donc, forcément, les gens qui arrivent au sommet de leur sport dans leur pays et ensuite au niveau mondial, ils se connaissent tous et ils voyagent ensemble et ils font des événements ensemble. C'est un petit monde, c'est une petite communauté. Et donc, moi, j'avais envie d'intégrer cet univers-là. Donc, ça a été un fort attrait. Donc j'ai commencé, j'ai monté une équipe avec deux copains. au début de façon, voilà, en se disant que, bon, on ne rêvait même pas d'être champion du monde, on en était à des années-lumières. Mais en fait, ça a été finalement assez vite parce qu'on a eu un bon timing, on est arrivé à un moment où les équipes de France de l'époque, qui étaient bien meilleures que nous, mais arrêtaient la compétition. Donc on a été repérés par la Fédération française de parachutisme qui nous a intégrés à son système. Alors d'abord, tu rentres en équipe Espoir et puis après en équipe de France et puis qui te soutiennent. qui te paye des sauts d'entraînement, qui te donne un coach, qui te donne un cadre dans lequel progresser. Donc moi, je suis très reconnaissante au système français qui m'a vraiment permis d'exploser en quelques années. Et puis, je me suis retrouvée dans cette espèce d'ascenseur. Après,

  • Speaker #0

    c'était parti. Je vais revenir à ce que je disais au tout début. J'aimerais que tu me donnes ton œil et que tu précises des choses. Je parlais de la place de la femme. En tout cas, moi, j'avais l'impression qu'elle n'avait pas beaucoup. Alors, ce que je voulais préciser, c'est Merci. Il y en a dans le record, etc. Tu le dis bien. Mais déjà, en termes de visibilité, alors déjà, ce n'est pas un sport qui est très visible pour le grand public. Il est aussi grâce à toi, en fait. En tant que femme, tu le rends aussi visible. J'aimerais que tu nous expliques aussi quelle a été cette place de la femme, si tu vois une évolution entre le début et maintenant, toi, personnellement, et de manière générale. Et qu'est-ce que ça peut aussi évoquer de plus large, plus politique, etc. Grande question.

  • Speaker #3

    Oui, alors c'est vrai qu'on n'est pas très nombreuses. Je pense que... Il doit y avoir, dans la pratique générale en France, je n'ai plus les chiffres précis en tête, mais il y a moins de 20% de femmes qui pratiquent. Quand on tombe dans des disciplines de spécialité comme la mienne, le free fly, si on regarde le nombre de brevets liés au free fly en France, je crois qu'on est même à moins de 15%, entre 12 et 15%. Et ça, c'est assez mondial. On va dire qu'il y a des pays où il y en a moins. Il ne doit pas y avoir beaucoup de pays où il y en a plus. On est à peu près dans cet ordre de grandeur. Donc, ce n'est clairement pas un sport féminin. Et là, il y aurait des études, je pense, très intéressantes à faire sur le sujet. Pourquoi est-ce que c'est un sport qui attire moins les femmes, qui garde moins les femmes ? Il y a beaucoup de femmes qui arrêtent après la maternité. Ah oui, c'est intéressant. Il y a quelques études qui sont faites un peu sur ces sujets-là, mais je pense qu'il y a encore de quoi creuser. Je pense que ça a beaucoup à voir avec la notion du rapport au risque, avec la notion de confiance en soi. Il y a des choses intéressantes à explorer de ce côté-là. et dans le haut niveau il y en a en fait plus un peu plus Un peu comme en entreprise ou en politique, généralement, plus tu montes dans les strates, moins t'as de nanas. Mais il y a des exceptions. Et en France, on a de très jolies exceptions. La première femme à être championne du monde, parce que moi, ma discipline, le free fly, elle est mixte. Techniquement, il n'y a pas de séparation homme-femme. Alors, il y a très peu de femmes, mais moi, j'étais en équipe avec deux garçons. Et l'année où j'ai gagné à Dubaï, où il y avait à peu près 23 pays représentés, Il devait y avoir 5 ou 6 nanas au total dans les équipes, donc il n'y en avait pas beaucoup.

  • Speaker #0

    En tout ?

  • Speaker #3

    En tout, oui. Mais moi, sur la première marche, et sur la troisième marche du podium, l'autre équipe de France, qui avait deux femmes, Virginie et Cathy Boit, Cathy Boit qui a été la toute première femme à être championne du monde de Free Fly en 2008. Depuis, il y en a eu deux autres, Karine Joly en 2018, qui est aussi une Française, et puis Anna Moxnes. pour la Norvège qui a gagné en 2021, je crois. Donc, il y a quand même régulièrement eu des femmes ces dernières années dans des équipes mixtes à chaque fois. Donc, messieurs, écoutez bien. Mais en fait, c'est un sport où les différences biologiques n'ont pas d'importance parce qu'il y a un minimum syndical de forme physique, d'explosivité, de gainage et tout, mais c'est quand même principalement un jeu mental. Donc le fait de physiquement être limité parce que tu peux soulever ou ta puissance cardiovasculaire n'a pas d'importance. À ce moment-là,

  • Speaker #0

    dans la pratique.

  • Speaker #3

    En tout cas, on n'arrive pas dans les strates tellement extrêmes de ce type de performance que ça joue pour la pratique du parachutisme. Donc sur le papier, c'est un sport très égalitaire. Mais tu te rends compte quand même qu'il y a beaucoup moins de femmes dans ces positions-là. Et toi,

  • Speaker #0

    ta perception par rapport à ton parcours ?

  • Speaker #3

    Personnellement, dans mon parcours, je n'ai jamais l'impression d'en avoir souffert, moi. Mais j'ai bien conscience d'être plutôt une exception qu'une règle, de la même façon que j'ai eu la chance de traverser cette existence sans avoir été inquiétée par des sujets de harcèlement. J'ai une conscience bien aiguë de par mes amitiés, mes relations, que c'est une chance et c'est une rareté plus qu'une règle. Ce qui ne m'a pas empêché de constater chez les autres que ce n'était pas du tout le cas. Et notamment... dans le cadre des records de grande formation qui est un sujet qui, moi, depuis une dizaine d'années maintenant, est vraiment au centre de ma pratique. Alors, les records de grande formation, ça consiste à construire la plus grande figure accrochée les uns aux autres en chute libre. Donc, on a à peu près une minute où on sort de plein d'avions différents et on se rejoint pour former une espèce de grosse rosace. Et donc, établir un record, battre un record, ça veut dire construire une figure avec plus de personnes que le dernier record. Donc, c'est pour ça qu'on dit des chiffres. Par exemple, si le dernier record, il y avait une figure à 50 personnes, il faut que tu fasses... au minimum 51 personnes derrière. Et dans cet exercice-là, il y avait beaucoup moins de femmes, et surtout pendant très longtemps, et moi toutes les années où j'ai commencé d'abord à participer à ces records, avant de commencer à les organiser, c'était que des hommes en position de leadership. C'était des hommes qui les organisaient, c'était des hommes qui sélectionnaient les équipes pour participer. Et là, je me suis rendu compte que les femmes avaient vraiment beaucoup moins d'opportunités. Souvent jugées comme plus fragiles à la fois dans leur vol, on avait l'impression qu'à la moindre... petites secousses, elles allaient faire pchit et sortir de la formation, qu'elles arrivaient plus lentement, qu'elles étaient plus prudentes, mais aussi psychologiquement, qu'elles allaient craquer sous la pression, qu'elles seraient moins solides au moment où il faut performer, parce que, tu vois, quand je te dis tout à l'heure qu'il faut que, si tu dis tu vas faire un 100, il faut que 100 personnes soient là. Si tu en as 99 qui sont accrochées, mais qu'il y en a une qui n'est pas là, le record n'est pas validé. Donc la pression individuelle, elle est super forte. Et donc il y avait cette assumption un peu que... les femmes allaient moins gérer ce genre de pression et il y a un groupe de nanas aux Etats-Unis qui fort de cette constatation ont décidé qu'elles allaient commencer à organiser des records féminins donc avec que des nanas pour permettre un contexte d'entraînement d'opportunité, de prise de compétences et de vraiment technique mais aussi de prise de confiance pour leur permettre de s'entraîner de leur dire que c'est possible Donc moi, ces deux femmes-là, qui s'appellent Amy Chemelecki et Sarah Curtis, deux Américaines basées en Arizona, ça a été mes mentors au début. Ça a été mes premières coachs.

  • Speaker #0

    Ah, t'es passée par elles, en fait. Je suis passée par elles, oui,

  • Speaker #3

    tout à fait. En fait, moi, en 2008, j'avais 22 ans ou un truc comme ça. Je suis partie quelques mois aux Etats-Unis pour faire un gros coup de progression dans ma vie avant de commencer la compétition. C'est là que je les ai rencontrées. Elles ont fait partie des premières femmes qui m'ont appris à voler tête en bas. Vraiment, très littéralement, c'était mes mamans oiseaux. C'est devenu mes amis et mes mentors. C'est elles qui m'ont proposé d'intégrer l'équipe d'organisation des records féminins en 2013. Et c'est là que j'ai commencé à apprendre. C'est elles qui m'ont appris très concrètement à dessiner une formation, faire l'ingénierie du saut, qui m'ont vraiment montré les ficelles de ce genre d'exercice et qui, par la suite, ont vraiment fait évoluer la façon dont le leadership de ces records ont été organisés. Donc, c'est via elles que j'ai fait ça, que je suis rentrée là-dedans et je me suis rendue compte que parmi les participantes, en fait, ça changeait vraiment la donne. Ça permettait de donner confiance aux femmes. ça leur permettait de s'entraîner et ensuite de se sentir plus légitime pour aller postuler au record mixte.

  • Speaker #0

    Il a quand même fallu ça, en fait, finalement.

  • Speaker #3

    Il a fallu ça. Alors que moi, j'étais très, au début, j'avais des idées un peu arrêtées sur, comme le parachutisme, c'est un sport mixte, il ne doit pas y avoir de séparation.

  • Speaker #0

    Finalement, même si c'était presque inconscient, les femmes aussi n'y allaient pas.

  • Speaker #3

    J'ai vraiment changé d'avis sur ce sujet-là, en fait, en constatant autour de moi les... les conséquences et la réalité de ce que vivaient certaines femmes et comment ce contexte exclusivement féminin leur permettait ensuite de « ressauter dans le grand bain » et que ça leur donnait vraiment une force pour le faire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu trouves que ta visibilité actuelle aide à certaines femmes ? Est-ce qu'on te contacte par exemple en te demandant, en te disant ? Est-ce que tu penses que ça a été contribué ?

  • Speaker #3

    J'espère. et en fait souvent... On ne s'en rend pas compte parce que quand on est dans une logique soit de communication sur des réseaux sociaux ou des podcasts ou des interviews télé, on donne quelque chose, on exprime quelque chose, mais c'est assez unilatéral. Et en fait, là, c'est vrai que depuis un ou deux ans, je reçois des messages en privé ou parfois je croise des gens qui me disent « tu sais, à tel endroit, tu as dit ça et derrière, j'ai été faire ça et ça m'a aidé » . et ça pour moi le plus beau cadeau qu'on puisse me faire. Faut me rendre compte que ce que j'ai dit ou ce que j'ai représenté a pu aider quelqu'un à se dire « bah ouais, ouais, je peux le faire » . Quand on me dit un truc comme ça, je vais me coucher le soir en me disant que j'ai pas raté ma journée.

  • Speaker #0

    Je répondis sur ce que tu as dit tout à l'heure autour de la maternité. Parce que c'est une transition toute trouvée puisque tu attends ton premier enfant.

  • Speaker #3

    Ah, c'est ça mon soupeux !

  • Speaker #0

    Elle nous a laissé le temps de faire l'interview. Mais effectivement, voilà, d'ici peu, sur cette notion de maternité que certaines femmes arrêtaient, etc. Est-ce que toi, donc déjà, là, tu t'es arrêtée depuis un moment. Là, voilà,

  • Speaker #3

    la grossesse n'est pas extrêmement compatible avec le parachutisme.

  • Speaker #0

    Donc déjà, comment tu te sens par rapport à cet arrêt ? Parce que finalement, c'est aussi quelque chose qu'un homme ne vit pas.

  • Speaker #3

    Non, clairement pas.

  • Speaker #0

    Et est-ce que justement, ce rapport à la maternité, tu t'y projettes autour de... de cette notion qu'on parlait de risque, de saut, même d'intensité, de rythme, etc. Ou est-ce que tu verras au moment voulu ?

  • Speaker #3

    C'est sûr qu'en tant que femme et sportive, on ne vit pas la maternité de la même façon qu'un homme. Je sais que toutes mes années en équipe de France, on était dans un collectif avec une dizaine de personnes. Et sur ce collectif-là, il y a trois de mes potes, dont un de mes coéquipiers, qui ont eu des enfants. Pendant qu'on était en équipe de France, pendant nos grosses années d'entraînement et de compétition. Mais ils ont eu des enfants parce qu'ils avaient des femmes qui étaient là pour s'en occuper, pour les faire déjà, et après pour s'en occuper, et qui les laissaient et qui les soutenaient dans leur carrière sportive pour pouvoir voyager beaucoup et être beaucoup absent. Moi, clairement, ça n'aurait pas du tout été compatible, ça n'aurait pas été possible pour moi en tant que femme. C'est aussi pour ça que dans quelques jours, je vais avoir mon premier enfant, j'ai 40 ans et j'ai une maternité tardive parce que ma carrière n'a pas été compatible avec une maternité plus tôt. Alors après, comment est-ce que ça, ça va impacter mon rapport au risque et mon rapport au sport ? J'ai bien quelques théories, mais je reste assez prudente sur le fait de les exprimer, parce que je pense qu'entre ce qu'on s'imagine et ce qu'on vit, il y a un fossé, et que je ne voudrais surtout pas, en étant enregistrée, dire des grandes théories. Non, non, bien sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que tu te projettes sur une éventualité ?

  • Speaker #3

    Mais par contre, c'est sûr que ma pratique va changer. Après, c'est aussi une question de phase de vie, c'est-à-dire que pendant 20 ans, J'ai quand même été extrêmement monomaniaque sur le parachutisme. Je l'ai vraiment vécu à fond avec beaucoup d'intensité, ce qui était ce que je cherchais et ce que je désirais. Donc, parfaitement aligné avec ce que je voulais construire sur cette phase de vie, on va dire de 20 à 40. Là, de 40 à 60, j'ai d'autres ambitions aussi plus intellectuelles, plus entrepreneuriales qui donc me demandent du temps, de la concentration et des efforts. Et donc, on ne peut pas se disperser non plus dans trop de choses. En dehors même de la maternité, il est certain que la phase de vie qui m'attend va être moins tournée autour du parachutisme. Par contre, le parachutisme ne va pas en être exclu. Ce que j'ai décidé pour le moment, c'est de me concentrer vraiment sur les records. Parce que c'est là qu'est, je pense, ma zone de génie dans le parachutisme. C'est là que je suis, je pense, la meilleure. Et c'est le domaine dans lequel je pense pouvoir le mieux contribuer. Et puis, c'est aussi ce qui me fait kiffer. J'adore l'exercice, j'adore la complexité. intellectuelle, d'ingénierie de saut, humaine, qui est vraiment... qui doit faire faire un truc super difficile et super stressant à un groupe de gens. Et tu as un ou deux ans pour mener ce projet. C'est passionnant, j'adore ça, j'adore les gens avec qui je le fais. Donc, j'ai vraiment envie de me concentrer sur ça. Je vais faire moins de coaching individuel parce que je passe aussi un peu à autre chose dans ma vie. Aujourd'hui, je me conseille de monter une soufflerie à l'entrée du Futuroscope qui s'appelle Zero Gravity. J'ai monté il y a deux ans ma boîte pour encadrer les conférences que je fais en entreprise.

  • Speaker #0

    On va en parler, mais c'est vrai que c'est intéressant aussi de se dire que tu es OK avec une phase de ta vie qui est potentiellement terminée, en tout cas qui va prendre une autre tournure et que tu y vas avec assez de sérénité parce que pas de regrets, tu l'as fait et que la vie, c'est aussi plusieurs étapes. Et ça, c'est extrêmement inspirant aussi parce que parfois, on s'accroche à des choses qui ne sont plus en fait, qui vont être différentes.

  • Speaker #3

    Je suis vraiment à l'aise avec ça parce que j'ai... J'ai vécu cette phase de vie vraiment comme je l'ai voulu et vraiment pleinement. Donc, ce switch-là, il est désiré, il n'est pas subi. Et c'est vrai que j'avais une conversation il y a quelques temps avec une de mes copines qui me disait que moi, je faisais ma crise de la quarantaine à l'inverse de tout le monde. C'est-à-dire que plein d'amis, tu vois, parisiennes ou avec qui je connais depuis l'adolescence, qui ont fait des études, qui ont tout de suite eu un job, un vrai métier, comme diraient mes parents. Et puis qui, autour de la quarantaine, se disent « j'ai envie de faire autre chose, j'ai envie de me barrer, j'ai envie de faire ci, j'ai envie de faire ça » . Et en fait, moi, j'ai fait pendant 20 ans vraiment l'électron libre à vivre hyper intensément cette vie un peu qui peut sembler déraisonnable, mais qui, moi, m'a absolument comblée. Et du coup, aujourd'hui, j'ai envie de me poser un peu plus, j'ai envie de construire des choses différentes, j'ai envie de gagner ma vie différemment. et puis j'ai envie de faire la place pour cette petite fille qui arrive et pour vivre ma maternité en étant présente. et en ayant du temps pour ça.

  • Speaker #0

    Et justement, sur cette partie, comme tu disais, plus intellectuelle, plus de transmission, ça va aussi avec ta fille, je trouve, avec la maternité, l'idée de j'ai envie de transmettre maintenant, de parler. Tu fais pas mal de conférences. Quel est le thème ? Qu'est-ce que tu as envie vraiment justement d'aborder ? Qu'est-ce que tu abordes dans ces moments-là ? Qu'est-ce que tu transmets lors de tes conférences, lors de tes prises de parole ?

  • Speaker #3

    Mes prises de parole en entreprise, principalement, elles sont vraiment centrées autour de la notion de... travail d'équipe, comment est-ce qu'on fait ?

  • Speaker #0

    En tout cas, nous, dans le cadre des records de parachutisme, comment est-ce que j'amène une équipe à performer malgré les difficultés, malgré le stress intense ? Parce que je me suis rendu compte que c'est ce qui était, dans mon expérience de vie parachutiste, le plus à propos et le plus proche de la réalité de l'entreprise aujourd'hui. Donc, c'était vraiment... Tu vois, je ne me suis pas lancée dans la conférence en me disant « ma vie, mon œuvre, qu'est-ce que je peux raconter aux gens ? » Mais j'ai vraiment été... par plein de questions et d'interviews parce que moi, le monde de l'entreprise, au départ, m'était quand même relativement étranger. J'ai fait des études de sciences humaines et après, je me suis enfui avec le cirque. Donc, j'étais quand même assez loin de ces préoccupations-là. Donc, j'ai beaucoup discuté avec des gens qui vivent ça quotidiennement et j'ai essayé de comprendre dans les problématiques qu'ils rencontraient qu'est-ce qui, moi, dans mon expérience, pouvait illustrer une façon de faire qui marche dans un contexte très spécifique mais qui, finalement, a beaucoup de points de commun avec celui de l'entreprise. Qu'est-ce que je pouvais aller extraire et partager ? Et donc, finalement, il s'est avéré que le contexte des records était celui qui était le plus à propos pour ça. Et donc, tu vois ce socle de raison dont on parlait tout à l'heure, c'est un de mes piliers importants, comment tu poses les bases, comment tu découpes un objectif, comment tu t'assures que tu vas pouvoir faire des choses en ayant assuré tes arrières. Il y a tout le côté de sécurité psychologique comment tu crées au sein d'une équipe les conditions qui font que les gens vont se sentir à l'aise. La confiance en soi, la confiance dans les autres, la confiance dans son management. Et puis la sécurité d'oser parler, d'oser pointer du doigt des choses. Et puis le troisième aspect qui est hyper important pour moi, qui est autour de ta vision, de tes valeurs. Comment tu vas rallier un groupe autour d'un objectif qui les dépasse un peu, qui dépasse les motivations individuelles, pour rentrer dans une motivation collective. Un des exemples dont je parle beaucoup en entreprise, c'est celui de Project 19, le dernier record du monde féminin. Comment, sur le papier, on avait un saut, un record qui allait être très difficile à battre, pour toutes les problématiques qu'on a évoquées tout à l'heure, de recrutement, de trouver suffisamment de femmes, avec le turnover de pratiques, pour pouvoir battre un record. Et en fait, on s'est ralliés autour d'un symbole qui était à l'époque, parce qu'on devait célébrer le centenaire de l'amendement 19 de la Constitution américaine, qui a donné le droit de vote aux femmes. On a rallié l'équipe autour de ça et comment on a puisé dans ce symbole-là qui sincèrement impliquait tout le monde. Toutes les personnes dans l'équipe se sentaient concernées par ça parce qu'on vivait encore les conséquences de ces combats-là. Et alors nous, c'était autour de 2020, personne ne remettait en cause encore le 19e amendement, même s'il a l'extrême droite américaine depuis un an ou deux. C'est moins évident. Oui, c'est quelque chose qui nous paraissait complètement... improbable est en train de se passer, comme quoi les combats ne sont jamais finis. Mais en tout cas, en ralliant l'équipe autour de ce symbole fort, on les a vraiment aidés à se dépasser et à faire en sorte que même dans des conditions très difficiles, elles soient allées chercher au plus profond d'elles-mêmes une motivation supérieure à simplement la motivation de rajouter une ligne prestigieuse sur un CV parachutiste. Et ça, j'en suis convaincue et c'est quelque chose qu'on a mis en place depuis... dans tous les records qu'on a organisés, notamment avec Amy et Sarah aux Etats-Unis, avec qui on organise des records mixtes, maintenant aussi. Record du monde mixte, moi record de France, là on prépare le prochain gros projet record d'Europe qui aura lieu dans deux ans, on vient juste de commencer les préparations de tout ça. Mettre la mixité au cœur de la formation, mais aussi au cœur du leadership, enfin, vraiment d'aligner nos valeurs avec notre pratique. Et aujourd'hui, moi, ce qui m'intéresse avec le parachutisme, c'est de l'utiliser comme un un peu un terrain d'expérimentation. de leadership pour essayer de décortiquer ce qui fonctionne chez nous. Et c'est vrai que cette double casquette de conférencière sur ces thèmes-là et d'organisatrice de ces événements, ça se nourrit l'un l'autre.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Continuer à être active dans mon sport, ça continue à me donner du terrain et des enseignements que j'intègre et que je mets à jour régulièrement mes conférences avec ce que j'apprends dans ce terrain-là. Mais en même temps, avoir cet intérêt intellectuelle de décortiquer le truc. Je prends de la hauteur. En fait, cette casquette de conférencière, elle m'a fait porter un regard analytique sur ce que j'avais fait jusqu'à présent dans le cadre de mon sport, alors qu'avant, on faisait les choses un peu à l'instinct, et puis on voyait ce qui marchait ou pas, mais on n'était pas vraiment dans une analyse très profonde de ça. Cette casquette de conférencière, elle m'a permis ce regard, et du coup, les deux activités se répondent vachement bien, donc c'est cool.

  • Speaker #1

    Et alors, c'est pas pour rien, du coup, que tu es une femme Forbes. 2025, j'ai envie de te dire, parce que vu tout ce que tu me dis, l'intérêt et l'inspiration que tu dégages est évidente. Qu'est-ce que ça évoque pour toi, ça ? Qu'est-ce que tu as envie d'en faire aussi ? Qu'est-ce que ça représente ?

  • Speaker #0

    C'est un sacré honneur, parce que quand je vois la liste des 39 autres nanas, je suis sacrément fière d'en faire partie. Et puis ça, c'est un tremplin, je l'espère, et c'est vrai qu'on a déjà créé des liens entre nous qui sont super chouettes. J'ai rencontré des femmes que j'aurais jamais rencontrées dans un autre... dans une autre circonstance. La force du réseau, quelle qu'il soit. La force du réseau, quelle qu'il soit. Et puis tu vois, on revient à cette notion de groupe de femmes, d'entre-soi féminin qui peut paraître et qui est parfois décriée et puis peut-être de plus en plus aujourd'hui.

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire, quand c'était les hommes qui se rejoignaient en réseau, on ne disait rien.

  • Speaker #0

    On ne disait rien, c'est sûr. Mais il y a beaucoup de puissance. Parce qu'il y a ce lien-là qui peut sembler externe qui en fait relie des gens qui Il y a déjà des choses très chouettes qui se sont passées dans ce réseau-là. J'ai hâte de voir la suite.

  • Speaker #1

    Oui, totalement. On arrive à la fin de cet épisode. J'ai quelques questions signatures à te proposer.

  • Speaker #0

    C'est parti.

  • Speaker #1

    Déjà, pour toi, agir, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Il y a une notion de mise en mouvement dans le verbe agir. Et il y a une phrase que j'aime beaucoup qui dit « La peur, elle ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant. » Et ça, c'est... Quelque chose dont je suis absolument persuadée. Quand quelque chose te fait peur, tu peux rester assis sur ton canapé pendant trois heures en y pensant dans tous les sens, en te demandant comment tu vas faire pour la dépasser. Il ne va pas se passer grand chose. Dès le moment où tu agis, dès le moment où tu te mets en mouvement, souvent cette peur-là, elle disparaît. Moi, je l'ai vécu de façon très intrinsèque, que ce soit dans le cadre du parachutisme ou le cadre des conférences aussi. Avant de monter sur scène, avant de sauter de l'avion, tu as super peur. Et en fait, dès que tu agis, dès que tu rentres en mouvement, dès que tu as sauté de l'avion, dès que tu as commencé tes premières phrases, la peur disparaît. Donc pour moi, agir, c'est la meilleure façon de faire disparaître tes peurs. Encore une fois, il ne faut pas le faire n'importe comment. Faites vos devoirs avant.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as un domaine d'activité où tu aimerais voir plus d'action ? Autre que ce qu'on vient d'aborder.

  • Speaker #0

    Écoute, je pense qu'un domaine d'activité dans lequel j'aimerais voir plus d'action, c'est la peur. plus d'action, c'est vraiment l'égalité homme-femme. Je suis persuadée, et notamment quand je regarde l'actualité, que si on avait plus de femmes en position de leadership, le monde s'en porterait mieux. J'ai lu récemment le très bon livre de Marie-Éloi, « Les femmes sauveront-elles le monde ? » Oui, mais pas tout seul. Elle est passée chez toi. Je suis vraiment convaincue de ça.

  • Speaker #1

    Elle est très intéressante et vraiment, elle montre l'intérêt de la mixité.

  • Speaker #0

    La puissance de la mixité. Donc, je pense que plus d'action dans ce sens-là, ça ferait du bien à nos sociétés.

  • Speaker #1

    Et alors, dernière question, est-ce que tu as une ou des figures d'inspiration que tu voudrais nous partager ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors, j'en ai beaucoup. Tu m'arrêtes quand il faut s'arrêter ? Alors, dans mon sport, c'est les deux femmes dont j'ai parlé tout à l'heure, Amy Chemelecki et Sarah Curtis, ces deux Américaines qui ont été mes mentors. et qui ont été les premières femmes que j'ai vues vivre de ce sport. Donc, c'est qui ont un peu ouvert l'horizon des possibles. Je me suis rendu compte en allant en Arizona pour la première fois à 22 ans que c'était possible et que ça ouvrait un peu la voie pour moi. Alors après, une autre femme qui est probablement la plus grande source d'inspiration, mais ça, c'est dans le domaine littéraire, c'est Marguerite Ursenar. Je suis une fan absolue de Marguerite Ursenar. Elle trouverait probablement ce mot absolument exécrable. mais c'est une figure d'écrivain qui me passionne je la lis et la relis régulièrement et religieusement avec plaisir et avec intérêt à chaque fois et c'est vraiment c'est mon inspiration absolue pour la littérature c'est absolument écrasant comme Panthéon parce que tu dis je ne peux jamais être à la hauteur d'une écriture comme celle-là mais c'est vraiment quelqu'un qui m'inspire énormément

  • Speaker #1

    Bon et donc on se retrouve quand là sur un prochain record ?

  • Speaker #0

    Alors voilà, le prochain gros projet, Parra, c'est ce record d'Europe qui aura lieu à l'été 2027. On a déjà commencé à mettre en place les entraînements pour 2026. Et là, je suis avec mes deux co-organisatrices, Anna Moxnes pour la Norvège et Sharon Arnoy, qui vit aux États-Unis, d'origine israélienne, qui sont dans mon équipe Joyrider. C'est vrai que je n'ai pas parlé de tout ça, mais je suis partie d'une équipe de nanas depuis une dizaine d'années. Donc là, on est sur la partie, justement, vision. Quelles sont les valeurs qu'on veut mettre derrière ce record ? Qu'est-ce qu'on veut illustrer avec ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas un record pour un record.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un record pour un record. On veut vraiment... L'exploit sportif est chouette, mais ce n'est pas ça qui nous motive. Et donc là, on est dans la phase d'alignement sur les valeurs qu'on veut mettre derrière ce projet-là. Donc c'est génial.

  • Speaker #1

    C'est génial, oui.

  • Speaker #0

    Les conversations sont longues et mouvementées parfois, mais c'est vraiment chouette. D'ici quelques mois, on va commencer à passer à la partie plus logistique. On va suivre ça. Je vais faire un petit building public, je pense, sur LinkedIn, sur tous ces sujets-là.

  • Speaker #1

    Avec un grand plaisir et grand intérêt. Merci beaucoup pour cet échange inutile. C'était un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Merci, Emilia.

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Merci d'avoir pris le temps de l'écouter. Et n'hésitez pas, si vous avez aimé, à le partager, à le commenter, à faire vivre la communauté Elsagis. Je vous retrouve très vite pour un nouvel épisode. Et n'oubliez pas que des lives sont aussi disponibles sur mon compte Instagram emily.b.sophrologue et que vous pouvez aussi retrouver toutes les informations de l'épisode sur le site du podcast www.elsagis.com. A très bientôt !

Description

“La peur ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant.”


L'épisode de demain accueille la championne du monde de parachutisme free fly, conférencière et désormais femme Forbes 2025, Domitille Kiger a passé plus de vingt ans à explorer le ciel !
Le vide, pour elle, n’a jamais été un espace de peur mais plutôt un lieu de liberté comme elle l'aime le souligner.


De 4000 mètres d’altitude à la scène des entreprises, elle a appris à transformer le risque en maîtrise, la peur en moteur, le collectif en force.


Dans cet épisode, elle me reçoit à un moment charnière : quelques jours avant d’accueillir son premier enfant.
Un entre-deux symbolique, où la championne de haut niveau s’apprête à redéfinir la notion même de performance, de rythme et d’équilibre.


Nous parlons de peur et de confiance, de leadership féminin et de mixité, de records du monde et de transitions intérieures.
De ces moments où il faut savoir lâcher prise pour continuer à s’élever.


Un épisode fort et apaisé à la fois, sur le courage, la transmission et l’art de continuer à voler, autrement.


Amy Chmielecki et sara curtis :

Deux parachutistes américaines basées en Arizona, pionnières du free fly et organisatrices des premiers records du monde féminins.
➤ Ce sont ses mentors, “ses mamans oiseaux”, celles qui lui ont appris à voler tête en bas et à organiser des records.

« Ce sont elles qui m’ont appris à dessiner une formation, à faire l’ingénierie du saut, à gérer le leadership de ces records. »


Cathy et Virginie Bouette et Karine Joly
➤ Championnes françaises de free fly, premières femmes à avoir été championnes du monde dans une discipline mixte.
➤ Domitille souligne leur rôle pionnier dans un sport encore très masculin.

« La première femme à être championne du monde, c’est Cathy Bouette, en 2008. Depuis, il y a eu Karine Joly en 2018. »


Anna Moxnes et Sharon Har-Noy
➤ Ses coorganisatrices actuelles dans l’équipe Joyrider et sur les records européens à venir.
➤ Domitille les décrit comme des partenaires de vision et de valeurs.

« On aligne nos valeurs avec notre pratique. C’est ce qui donne du sens à nos projets. »


Marie Eloy
➤ Fondatrice de Bouge ta Boîte, autrice de Les femmes sauveront-elles le monde ?
➤ Elle la cite comme une référence inspirante sur la mixité et le leadership féminin.

« Plus on aura de femmes en position de leadership, mieux le monde se portera. »


Marguerite Yourcenar
➤ Sa figure d’inspiration littéraire absolue.
➤ Domitille dit la relire “régulièrement et religieusement”.

« C’est mon inspiration absolue pour la littérature. C’est écrasant, mais tellement inspirant. »



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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Je suis Emilie Berthet Conférencière, productrice de podcasts, sophrologue et auteure, j’accompagne les organisations et les particuliers vers une meilleure compréhension de notre époque et à construire une société attentive aux enjeux humains. Femme Forbes 2025 et TEDx speaker.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Agir. J'ai choisi d'agir sans arrêt.

  • Speaker #1

    J'agis en enlevant mon t-shirt et en criant des slogans dans des endroits où je ne suis pas la bienvenue et à des gens qui ne sont pas forcément contents de me voir.

  • Speaker #2

    J'ai pas une action dont je suis fière, c'est je crois que toute action doit rendre fière.

  • Speaker #1

    J'ai pas de mots pour agir, c'est une action.

  • Speaker #0

    Bonjour Domitile.

  • Speaker #3

    Bonjour Émilie.

  • Speaker #0

    Merci d'être dans Elles agissent.

  • Speaker #3

    C'est un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Oui, moi aussi, je suis très, très contente. Alors, Domitille, tu es championne du monde de parachutisme, de saut synchronisé tête en haut. Est-ce que c'est bien ça ?

  • Speaker #3

    Alors, pas tout à fait.

  • Speaker #0

    Pas tout à fait. J'ai eu du mal à trouver, j'ai vu plusieurs thèmes, donc je préfère que tu me...

  • Speaker #3

    Alors, moi, je suis championne du monde de free fly, qui est une discipline artistique du parachutisme sportif. Donc, on n'est pas dans le parachutisme militaire, on est vraiment dans le sport. Et c'est un sport dans lequel tu as plein de disciplines différentes. Il y en a qui se passent. en chute libre, il y en a qui se passent sous voile et d'autres au moment du posé. Le free fly, c'est pendant la chute libre. En gros, c'est un peu comme du patinage artistique. Tu vas faire des manches de libre, donc des sauts de libre et des sauts d'imposé. Sur un saut d'imposé, toutes les équipes vont faire les mêmes figures et sont jugées sur la précision avec laquelle elles les réalisent. Et puis sur un saut de libre, tu crées 45 secondes pour créer la chorégraphie que tu veux. Et ça se passe en équipe de trois. Deux performeurs et un vidéomane. C'est les images que rapporte le vidéomane au sol qui servent au juge pour noter.

  • Speaker #0

    Merci de cette précision déjà. C'est depuis plus de 20 ans que tu fais partie de ces peut-être rares femmes, et tu vas me dire si je me trompe aussi ou pas, à défier la gravité. En tout cas, je n'ai pas vu beaucoup de femmes. Tu as hésité à un moment jeune entre ciel et terre, mais tu as choisi de faire du ciel ton espace d'équilibre. Tu jongles entre une totale maîtrise et une sensation de lâcher prise. Quand tu es là-haut, à quelques secondes du saut, qu'est-ce qui se passe en toi ? Est-ce que c'est le calme absolu ? Est-ce que c'est la concentration ? Parce qu'on est dans la rigueur aussi, dans la préparation. Qu'est-ce que tu ressens à ce moment-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ça va pas mal dépendre des sauts. Je ne vais pas ressentir la même chose tout le temps. Déjà, tout au long de ma vie et de ma carrière. Les premiers sauts par rapport aux sauts d'aujourd'hui, évidemment, en termes de stress, par exemple. Ce n'est pas tout à fait pareil. avant mon premier saut avant mes premiers sauts j'avais beaucoup de peur, une peur assez intense qui se manifeste par le cœur qui s'accélère, la respiration qui raccourcit, les pensées qui tournent un peu en boucle dans ta tête en te disant « Pourquoi je suis là ? » Et ça, évidemment, ça disparaît au fur et à mesure. Il n'y a pas vraiment un « on-off » . Tu ne passes pas de la terreur totale à la décontraction la plus absolue d'un saut à l'autre. On va dire que la peur diminue au fur et à mesure que tu améliores ta pratique, que tu comprends l'environnement, que tu comprends les enjeux. Et puis que tu fréquentes des gens qui font la même chose que toi, ça peut paraître idiot aussi, mais quand tu débarques dans quelque chose que tu n'as jamais fait et que tu ne connais personne qui le fait, ta méconnaissance de l'environnement accentue ta peur. Quand tu passes du temps avec que des gens qui font la même chose que toi, ça désacralise un peu l'action. Et puis le parachutisme en particulier, qui a cette image très dangereuse, trompe la mort. En fait, tu te rends compte à la pratique que ce n'est pas du tout le cas. Et donc, du coup, ça aide aussi à faire baisser un peu la peur entre la réalité de la pratique et ce que tu t'en étais imaginé.

  • Speaker #0

    Oui. Et puis, au moment où tu sautes, il y a tellement de préparation derrière que tu es dans un état peut-être qui n'est même plus au-delà de la peur, qui est peut-être dans ton objectif quand tu réalises, quand tu veux battre un record, etc.

  • Speaker #3

    Oui. Alors, les records, c'est encore autre chose. Un saut de record ou un saut de compétition. Là, la peur est à nouveau très intense avant de sauter, mais ce n'est pas tellement de la peur, c'est plus du track de performance. C'est la même chose qu'avant de monter sur scène pour une conférence. C'est la peur de contre-performer. Alors que tes premiers sauts, tu es dans une peur plus viscérale quand même. Ce n'est pas ultra naturel de se jeter d'un avion en parfait état de marche. Je pense d'un point de vue de l'évolution, c'est quand même assez récent. Donc, il y a quand même tout dans ton cerveau qui s'allume en disant non, non, non, mais pourquoi ? Et ce que tu dis est intéressant, le fait qu'il y ait toute cette préparation avant, c'est clairement le socle de raison sur lequel tu t'appuies pour pouvoir lâcher prise. Parce que lâcher prise sans avoir fait ce travail préliminaire, ce serait de l'inconscience, ce serait très dangereux, ce serait complètement idiot. C'est vrai qu'avant de faire un premier saut, tu vas te former avec des moniteurs diplômés d'État, tu vas utiliser du matériel qui est homologué, tu sautes d'un avion qui est aussi homologué pour ça. Donc tu as quand même tout un socle réglementaire et raisonnable et intelligent qui fait que tu peux pratiquer. Si tu ne fais pas ça, tu ne vas pas monter dans un avion aléatoire, casser la porte avec ton pied et sauter sans parachute. Tu peux le faire, mais du coup, tu meurs si tu fais ça. Tu veux le pratiquer comme sport, c'est dans un cadre qui est quand même très encadré. Et donc, ça, ça te permet d'arriver au moment de basculement en ayant cette confiance que tu peux le faire. Malheureusement, la mauvaise nouvelle, c'est que ce socle de raison, il ne va pas t'enlever la peur. Tu vas quand même, sur les premiers sauts, être très stressé, très nerveux. Et il faut trouver en toi les ressources pour basculer malgré cette peur-là. Pour moi, ce socle de raison, c'est l'étape numéro un. Elle est indispensable, elle est primordiale pour prendre des risques sans y laisser des plumes. Mais il faut quand même ensuite avoir ce petit moment de déconnexion. Et c'est vrai que quand on a réussi à le trouver, là, dans le cadre très anecdotique du parachutisme, mais en fait, quand tu l'as trouvé dans ce cadre-là, moi, ça me l'a fait à titre personnel, mais je l'ai constaté chez beaucoup de gens. derrière. Quand tu t'es rendu compte que tu étais capable de ça dans ce contexte-là, tu vas être plus facilement capable de l'être dans d'autres contextes aussi. Et c'est vrai que c'est un sport qui, moi, a eu une influence très forte sur la façon dont j'ai vécu ma vie derrière. Mais je le vois dans les gens à qui j'enseigne, c'est souvent la même chose. On a tous des histoires assez similaires, en fait. Ça booste bien la confiance en soi.

  • Speaker #0

    Dans une conversation qu'on avait eue hors micro, tu m'avais dit, enfin, tu avais dit une fois que tu n'avais pas vraiment ce syndrome de l'imposteur. Est-ce que c'est grâce aussi à ça ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense.

  • Speaker #0

    En tout cas, peut-être est-ce que tu as travaillé sur un dépassement de soi de différentes manières que tu peux appliquer dans le quotidien en fait ?

  • Speaker #3

    Alors, je n'ai pas vraiment l'impression d'avoir travaillé spécifiquement dessus. Mais par contre, je suis convaincue effectivement que cette vie aérienne et ces choix que j'ai faits et cette pratique assidue du parachutisme a contribué à me donner confiance en moi. Et c'est vrai que le syndrome de l'imposteur, c'est quelque chose dont on parle beaucoup aujourd'hui et dont je vois sincèrement et concrètement beaucoup de gens et beaucoup de femmes, on ne va pas se mentir, s'en déclarer victime. Et moi, je ne le ressens pas parce que j'ai l'impression d'avoir une bonne estimation de où je me place pour une activité particulière. et ne pas avoir le syndrome de l'imposteur ça ne veut pas dire avoir une surconfiance pas du tout, et que ce soit dans mon sport ou que ce soit dans d'autres activités que j'ai lancées derrière En fait, quand je débute quelque chose auquel je ne connais rien, je ne me sens pas comme une impostrice, je me sens comme une débutante. Et donc, j'accepte que le statut de débutant implique une médiocrité pratique. Quand tu ne sais pas faire un truc, tu n'es pas bon. Et ce n'est pas se sentir imposteur, c'est juste que c'est vrai, tu n'es pas bon, donc il faut apprendre. Ça demande du travail. Du travail, ça demande du temps. Et seulement avec le temps et l'expérience, tu vas arriver dans une phase de légitimité. Mais donc, je ne me sens pas imposteur quand je suis au début du chemin. Je suis juste débutante. Et puis, une fois que j'ai pris le temps et que j'ai fait les efforts pour arriver au bout du chemin, je ne suis pas une imposteur. Je suis arrivé là où mon travail m'a amené. Et puis après, le chemin entre les deux, il faut jauger un peu où t'en es. Mais voilà, je ne me sens pas impostrice parce que soit je suis débutante, soit je suis apprenante, soit je suis confirmée.

  • Speaker #0

    Ce syndrome, il peut être aussi impactant avant même de commencer. Tu vois, il peut te dire de ne pas y aller. et ça euh Ça, tu l'as travaillé aussi, peut-être, en te disant... Ça, c'est la confiance en soi. Je me force à y aller. Tu vois, j'y vais quand même. J'y vais, mais j'ai peur, mais j'y vais quand même. Je dis oui avant de... Tu sais, quand parfois, on a des propositions... Je ne sais pas, je n'ai jamais fait. Je dis oui, et après, j'apprends. Et j'apprends pour le faire. C'est ça aussi la une des clés.

  • Speaker #3

    Complètement. Et tu as raison. Je pense que le parachutisme m'a vachement aidé avec ma capacité à me dire j'y vais.

  • Speaker #0

    Bah ouais. Toi, tu n'arrêtes pas de te lancer. tu vas te dire ce truc de se lancer et d'ailleurs tu dis le vide ne fait pas peur il rend libre J'avais lu ou entendu ça. Est-ce que tu peux revenir sur cette pensée ? Qu'est-ce que tu ressens en disant ça ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, cette notion de vide, qui est ce qu'on redoute souvent le plus quand on imagine un saut en parachute, pour moi, une des leçons qui a été très fondatrice avec mon premier saut, c'est de me rendre compte que je n'étais pas du tout dans du vide. Alors, je sais que les gens souvent me disent « mais de quoi tu parles ? Tu sautes dans le vide, il n'y a rien autour de toi » . Alors oui, c'est vrai, mais en fait, on n'a pas du tout une impression de vide. Parce que quand on sort de l'avion, on est tout de suite dans un truc qui s'appelle le vent relatif. On ne va pas rentrer dans des grands détails techniques, mais en gros, c'est le vent subi par un objet en mouvement. C'est comme quand tu mets ta main en dehors de la voiture sur l'autoroute. Tu as une perception. Tu sens une pression sur ta main. Effectivement, si tu la regardes juste à main, elle est dans du rien, parce que le vent, ça ne se voit pas. Mais en termes de sensation, tu as une pression forte et plus la vitesse est rapide de la voiture ou de ta propre chute. En parachutisme, on est à peu près à 200 km heure si on est à plat. 300 km heure si on est à temps bas. Donc la densité, la texture, elle est quand même assez concrète et solide. Donc en fait, tu n'as pas du tout l'impression d'être dans du vide. Et tu as une influence sur ça. C'est pour ça qu'on arrive à faire des figures et à se déplacer et à voler relativement les uns par rapport aux autres avec précision. C'est parce que notre corps peut, comme te déplacer dans de l'eau, tu peux agir sur cet élément. Donc tu n'es pas dans du rien, tu es dans quelque chose que tu apprends à maîtriser. plus ou moins de grâce au début, ça prend quand même un peu de temps avant d'y arriver, mais t'es pas dans du vide. Et donc cette notion de te jeter dans le vide, en fait tu te rends compte seulement après l'avoir fait que c'était pas ce que tu croyais. Et ça aussi c'est quelque chose qui m'a donné je pense, je sais pas si c'est du courage, mais en tout cas une propension à être capable d'aller vers l'inconnu parce que ma première grosse expérience d'aller vers l'inconnu s'était avérée réconfortante. Les peurs que j'avais autour de ça, c'était avéré fausse. Et ce que j'avais découvert de l'autre côté de ces peurs, c'était avéré absolument fantastique à vivre. Donc, ça m'a donné des billes pour être capable de le faire dans d'autres contextes après.

  • Speaker #0

    Je voudrais revenir quand même sur ton parcours, parce qu'entre plaisir et devenir championne du monde, le plaisir ou la découverte de sautée... Qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #3

    J'ai un caractère un peu obsessionnel, on ne va pas se mentir. Quand j'aime un truc, j'aime vraiment beaucoup un truc et j'ai envie de faire que ça. Donc, les premières années de ma pratique, déjà, elles étaient quasiment qu'estivales parce que j'ai commencé, j'étais au lycée, après j'étais à la fac. Donc, je n'avais pas vraiment d'argent pour pratiquer. Et puis, en bonne parisienne qui se respecte, je n'avais pas le permis. Donc, à part l'été, une fois qu'on m'avait posé quelque part, je n'allais pas nulle part. Et donc, j'ai rapidement commencé à travailler les saisons d'été dans un centre de parachutisme pour pouvoir me payer mes sceaux. Et puis surtout, pour faire partie d'un groupe, pour faire partie d'une communauté. J'avais vraiment envie d'intégrer cet univers-là. Et le travail, même saisonnier, m'avait paru la meilleure façon de le faire. Et puis rapidement, forcément, j'avais 17, 18, 19 ans. Dans les magazines de para, tu vois les stars, les gens qui sont champions du monde. Et tu te dis, c'est complètement incroyable ce qu'ils font. à la fois visuellement et techniquement dans le sport, mais aussi les vies qu'ils mènent. Moi, j'étais absolument fascinée par ça.

  • Speaker #0

    C'est quoi ?

  • Speaker #3

    C'est des vies de liberté où tu passes, tu vas une semaine dans un pays, la semaine d'après dans un autre pays, où tu enseignes ta discipline, tu fais des compétitions. Et en fait, moi, je trouvais ça extrêmement attirant. J'avais vraiment envie de ça. Alors à côté, j'avais quand même toujours ma vie à Paris d'étudiante. Moi, j'ai fait des études d'histoire à la Sorbonne. J'ai fait un master en audiovisuel toujours à Paris. donc Au début, j'étais quand même sur des rails un peu plus classiques parce que c'était les seuls modèles que j'avais autour de moi. Mais le parachutisme commençait à me montrer d'autres modèles. Et je dois t'avouer que ces modèles-là me faisaient vachement plus kiffer que le très jeune adulte. Et donc, je me suis dit que la compétition, ça va être un excellent moyen à la fois de me perfectionner techniquement, parce que quand tu te concentres sur une discipline avec le même petit groupe de personnes dans un cadre d'entraînement, tu vas progresser beaucoup. plus vite que si juste tu fais des sauts à la cool le week-end avec tes copains, mais ça change un peu tout le temps et puis il n'y a pas vraiment de notion d'entraînement ou d'excellence. Donc j'avais à la fois envie de me perfectionner dans ma discipline, parce qu'en fait, mieux tu sais voler, plus c'est agréable de voler. Plus tu arrives à te déplacer instinctivement dans l'air, plus la sensation est agréable.

  • Speaker #0

    Voilà le moment. Exactement.

  • Speaker #3

    Donc il y avait à la fois ce côté purement sportif et technique. Mais il y avait aussi très fortement cette envie d'accéder à un mode de vie, à une communauté, parce que c'est un tout petit sport. Et donc, forcément, les gens qui arrivent au sommet de leur sport dans leur pays et ensuite au niveau mondial, ils se connaissent tous et ils voyagent ensemble et ils font des événements ensemble. C'est un petit monde, c'est une petite communauté. Et donc, moi, j'avais envie d'intégrer cet univers-là. Donc, ça a été un fort attrait. Donc j'ai commencé, j'ai monté une équipe avec deux copains. au début de façon, voilà, en se disant que, bon, on ne rêvait même pas d'être champion du monde, on en était à des années-lumières. Mais en fait, ça a été finalement assez vite parce qu'on a eu un bon timing, on est arrivé à un moment où les équipes de France de l'époque, qui étaient bien meilleures que nous, mais arrêtaient la compétition. Donc on a été repérés par la Fédération française de parachutisme qui nous a intégrés à son système. Alors d'abord, tu rentres en équipe Espoir et puis après en équipe de France et puis qui te soutiennent. qui te paye des sauts d'entraînement, qui te donne un coach, qui te donne un cadre dans lequel progresser. Donc moi, je suis très reconnaissante au système français qui m'a vraiment permis d'exploser en quelques années. Et puis, je me suis retrouvée dans cette espèce d'ascenseur. Après,

  • Speaker #0

    c'était parti. Je vais revenir à ce que je disais au tout début. J'aimerais que tu me donnes ton œil et que tu précises des choses. Je parlais de la place de la femme. En tout cas, moi, j'avais l'impression qu'elle n'avait pas beaucoup. Alors, ce que je voulais préciser, c'est Merci. Il y en a dans le record, etc. Tu le dis bien. Mais déjà, en termes de visibilité, alors déjà, ce n'est pas un sport qui est très visible pour le grand public. Il est aussi grâce à toi, en fait. En tant que femme, tu le rends aussi visible. J'aimerais que tu nous expliques aussi quelle a été cette place de la femme, si tu vois une évolution entre le début et maintenant, toi, personnellement, et de manière générale. Et qu'est-ce que ça peut aussi évoquer de plus large, plus politique, etc. Grande question.

  • Speaker #3

    Oui, alors c'est vrai qu'on n'est pas très nombreuses. Je pense que... Il doit y avoir, dans la pratique générale en France, je n'ai plus les chiffres précis en tête, mais il y a moins de 20% de femmes qui pratiquent. Quand on tombe dans des disciplines de spécialité comme la mienne, le free fly, si on regarde le nombre de brevets liés au free fly en France, je crois qu'on est même à moins de 15%, entre 12 et 15%. Et ça, c'est assez mondial. On va dire qu'il y a des pays où il y en a moins. Il ne doit pas y avoir beaucoup de pays où il y en a plus. On est à peu près dans cet ordre de grandeur. Donc, ce n'est clairement pas un sport féminin. Et là, il y aurait des études, je pense, très intéressantes à faire sur le sujet. Pourquoi est-ce que c'est un sport qui attire moins les femmes, qui garde moins les femmes ? Il y a beaucoup de femmes qui arrêtent après la maternité. Ah oui, c'est intéressant. Il y a quelques études qui sont faites un peu sur ces sujets-là, mais je pense qu'il y a encore de quoi creuser. Je pense que ça a beaucoup à voir avec la notion du rapport au risque, avec la notion de confiance en soi. Il y a des choses intéressantes à explorer de ce côté-là. et dans le haut niveau il y en a en fait plus un peu plus Un peu comme en entreprise ou en politique, généralement, plus tu montes dans les strates, moins t'as de nanas. Mais il y a des exceptions. Et en France, on a de très jolies exceptions. La première femme à être championne du monde, parce que moi, ma discipline, le free fly, elle est mixte. Techniquement, il n'y a pas de séparation homme-femme. Alors, il y a très peu de femmes, mais moi, j'étais en équipe avec deux garçons. Et l'année où j'ai gagné à Dubaï, où il y avait à peu près 23 pays représentés, Il devait y avoir 5 ou 6 nanas au total dans les équipes, donc il n'y en avait pas beaucoup.

  • Speaker #0

    En tout ?

  • Speaker #3

    En tout, oui. Mais moi, sur la première marche, et sur la troisième marche du podium, l'autre équipe de France, qui avait deux femmes, Virginie et Cathy Boit, Cathy Boit qui a été la toute première femme à être championne du monde de Free Fly en 2008. Depuis, il y en a eu deux autres, Karine Joly en 2018, qui est aussi une Française, et puis Anna Moxnes. pour la Norvège qui a gagné en 2021, je crois. Donc, il y a quand même régulièrement eu des femmes ces dernières années dans des équipes mixtes à chaque fois. Donc, messieurs, écoutez bien. Mais en fait, c'est un sport où les différences biologiques n'ont pas d'importance parce qu'il y a un minimum syndical de forme physique, d'explosivité, de gainage et tout, mais c'est quand même principalement un jeu mental. Donc le fait de physiquement être limité parce que tu peux soulever ou ta puissance cardiovasculaire n'a pas d'importance. À ce moment-là,

  • Speaker #0

    dans la pratique.

  • Speaker #3

    En tout cas, on n'arrive pas dans les strates tellement extrêmes de ce type de performance que ça joue pour la pratique du parachutisme. Donc sur le papier, c'est un sport très égalitaire. Mais tu te rends compte quand même qu'il y a beaucoup moins de femmes dans ces positions-là. Et toi,

  • Speaker #0

    ta perception par rapport à ton parcours ?

  • Speaker #3

    Personnellement, dans mon parcours, je n'ai jamais l'impression d'en avoir souffert, moi. Mais j'ai bien conscience d'être plutôt une exception qu'une règle, de la même façon que j'ai eu la chance de traverser cette existence sans avoir été inquiétée par des sujets de harcèlement. J'ai une conscience bien aiguë de par mes amitiés, mes relations, que c'est une chance et c'est une rareté plus qu'une règle. Ce qui ne m'a pas empêché de constater chez les autres que ce n'était pas du tout le cas. Et notamment... dans le cadre des records de grande formation qui est un sujet qui, moi, depuis une dizaine d'années maintenant, est vraiment au centre de ma pratique. Alors, les records de grande formation, ça consiste à construire la plus grande figure accrochée les uns aux autres en chute libre. Donc, on a à peu près une minute où on sort de plein d'avions différents et on se rejoint pour former une espèce de grosse rosace. Et donc, établir un record, battre un record, ça veut dire construire une figure avec plus de personnes que le dernier record. Donc, c'est pour ça qu'on dit des chiffres. Par exemple, si le dernier record, il y avait une figure à 50 personnes, il faut que tu fasses... au minimum 51 personnes derrière. Et dans cet exercice-là, il y avait beaucoup moins de femmes, et surtout pendant très longtemps, et moi toutes les années où j'ai commencé d'abord à participer à ces records, avant de commencer à les organiser, c'était que des hommes en position de leadership. C'était des hommes qui les organisaient, c'était des hommes qui sélectionnaient les équipes pour participer. Et là, je me suis rendu compte que les femmes avaient vraiment beaucoup moins d'opportunités. Souvent jugées comme plus fragiles à la fois dans leur vol, on avait l'impression qu'à la moindre... petites secousses, elles allaient faire pchit et sortir de la formation, qu'elles arrivaient plus lentement, qu'elles étaient plus prudentes, mais aussi psychologiquement, qu'elles allaient craquer sous la pression, qu'elles seraient moins solides au moment où il faut performer, parce que, tu vois, quand je te dis tout à l'heure qu'il faut que, si tu dis tu vas faire un 100, il faut que 100 personnes soient là. Si tu en as 99 qui sont accrochées, mais qu'il y en a une qui n'est pas là, le record n'est pas validé. Donc la pression individuelle, elle est super forte. Et donc il y avait cette assumption un peu que... les femmes allaient moins gérer ce genre de pression et il y a un groupe de nanas aux Etats-Unis qui fort de cette constatation ont décidé qu'elles allaient commencer à organiser des records féminins donc avec que des nanas pour permettre un contexte d'entraînement d'opportunité, de prise de compétences et de vraiment technique mais aussi de prise de confiance pour leur permettre de s'entraîner de leur dire que c'est possible Donc moi, ces deux femmes-là, qui s'appellent Amy Chemelecki et Sarah Curtis, deux Américaines basées en Arizona, ça a été mes mentors au début. Ça a été mes premières coachs.

  • Speaker #0

    Ah, t'es passée par elles, en fait. Je suis passée par elles, oui,

  • Speaker #3

    tout à fait. En fait, moi, en 2008, j'avais 22 ans ou un truc comme ça. Je suis partie quelques mois aux Etats-Unis pour faire un gros coup de progression dans ma vie avant de commencer la compétition. C'est là que je les ai rencontrées. Elles ont fait partie des premières femmes qui m'ont appris à voler tête en bas. Vraiment, très littéralement, c'était mes mamans oiseaux. C'est devenu mes amis et mes mentors. C'est elles qui m'ont proposé d'intégrer l'équipe d'organisation des records féminins en 2013. Et c'est là que j'ai commencé à apprendre. C'est elles qui m'ont appris très concrètement à dessiner une formation, faire l'ingénierie du saut, qui m'ont vraiment montré les ficelles de ce genre d'exercice et qui, par la suite, ont vraiment fait évoluer la façon dont le leadership de ces records ont été organisés. Donc, c'est via elles que j'ai fait ça, que je suis rentrée là-dedans et je me suis rendue compte que parmi les participantes, en fait, ça changeait vraiment la donne. Ça permettait de donner confiance aux femmes. ça leur permettait de s'entraîner et ensuite de se sentir plus légitime pour aller postuler au record mixte.

  • Speaker #0

    Il a quand même fallu ça, en fait, finalement.

  • Speaker #3

    Il a fallu ça. Alors que moi, j'étais très, au début, j'avais des idées un peu arrêtées sur, comme le parachutisme, c'est un sport mixte, il ne doit pas y avoir de séparation.

  • Speaker #0

    Finalement, même si c'était presque inconscient, les femmes aussi n'y allaient pas.

  • Speaker #3

    J'ai vraiment changé d'avis sur ce sujet-là, en fait, en constatant autour de moi les... les conséquences et la réalité de ce que vivaient certaines femmes et comment ce contexte exclusivement féminin leur permettait ensuite de « ressauter dans le grand bain » et que ça leur donnait vraiment une force pour le faire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu trouves que ta visibilité actuelle aide à certaines femmes ? Est-ce qu'on te contacte par exemple en te demandant, en te disant ? Est-ce que tu penses que ça a été contribué ?

  • Speaker #3

    J'espère. et en fait souvent... On ne s'en rend pas compte parce que quand on est dans une logique soit de communication sur des réseaux sociaux ou des podcasts ou des interviews télé, on donne quelque chose, on exprime quelque chose, mais c'est assez unilatéral. Et en fait, là, c'est vrai que depuis un ou deux ans, je reçois des messages en privé ou parfois je croise des gens qui me disent « tu sais, à tel endroit, tu as dit ça et derrière, j'ai été faire ça et ça m'a aidé » . et ça pour moi le plus beau cadeau qu'on puisse me faire. Faut me rendre compte que ce que j'ai dit ou ce que j'ai représenté a pu aider quelqu'un à se dire « bah ouais, ouais, je peux le faire » . Quand on me dit un truc comme ça, je vais me coucher le soir en me disant que j'ai pas raté ma journée.

  • Speaker #0

    Je répondis sur ce que tu as dit tout à l'heure autour de la maternité. Parce que c'est une transition toute trouvée puisque tu attends ton premier enfant.

  • Speaker #3

    Ah, c'est ça mon soupeux !

  • Speaker #0

    Elle nous a laissé le temps de faire l'interview. Mais effectivement, voilà, d'ici peu, sur cette notion de maternité que certaines femmes arrêtaient, etc. Est-ce que toi, donc déjà, là, tu t'es arrêtée depuis un moment. Là, voilà,

  • Speaker #3

    la grossesse n'est pas extrêmement compatible avec le parachutisme.

  • Speaker #0

    Donc déjà, comment tu te sens par rapport à cet arrêt ? Parce que finalement, c'est aussi quelque chose qu'un homme ne vit pas.

  • Speaker #3

    Non, clairement pas.

  • Speaker #0

    Et est-ce que justement, ce rapport à la maternité, tu t'y projettes autour de... de cette notion qu'on parlait de risque, de saut, même d'intensité, de rythme, etc. Ou est-ce que tu verras au moment voulu ?

  • Speaker #3

    C'est sûr qu'en tant que femme et sportive, on ne vit pas la maternité de la même façon qu'un homme. Je sais que toutes mes années en équipe de France, on était dans un collectif avec une dizaine de personnes. Et sur ce collectif-là, il y a trois de mes potes, dont un de mes coéquipiers, qui ont eu des enfants. Pendant qu'on était en équipe de France, pendant nos grosses années d'entraînement et de compétition. Mais ils ont eu des enfants parce qu'ils avaient des femmes qui étaient là pour s'en occuper, pour les faire déjà, et après pour s'en occuper, et qui les laissaient et qui les soutenaient dans leur carrière sportive pour pouvoir voyager beaucoup et être beaucoup absent. Moi, clairement, ça n'aurait pas du tout été compatible, ça n'aurait pas été possible pour moi en tant que femme. C'est aussi pour ça que dans quelques jours, je vais avoir mon premier enfant, j'ai 40 ans et j'ai une maternité tardive parce que ma carrière n'a pas été compatible avec une maternité plus tôt. Alors après, comment est-ce que ça, ça va impacter mon rapport au risque et mon rapport au sport ? J'ai bien quelques théories, mais je reste assez prudente sur le fait de les exprimer, parce que je pense qu'entre ce qu'on s'imagine et ce qu'on vit, il y a un fossé, et que je ne voudrais surtout pas, en étant enregistrée, dire des grandes théories. Non, non, bien sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que tu te projettes sur une éventualité ?

  • Speaker #3

    Mais par contre, c'est sûr que ma pratique va changer. Après, c'est aussi une question de phase de vie, c'est-à-dire que pendant 20 ans, J'ai quand même été extrêmement monomaniaque sur le parachutisme. Je l'ai vraiment vécu à fond avec beaucoup d'intensité, ce qui était ce que je cherchais et ce que je désirais. Donc, parfaitement aligné avec ce que je voulais construire sur cette phase de vie, on va dire de 20 à 40. Là, de 40 à 60, j'ai d'autres ambitions aussi plus intellectuelles, plus entrepreneuriales qui donc me demandent du temps, de la concentration et des efforts. Et donc, on ne peut pas se disperser non plus dans trop de choses. En dehors même de la maternité, il est certain que la phase de vie qui m'attend va être moins tournée autour du parachutisme. Par contre, le parachutisme ne va pas en être exclu. Ce que j'ai décidé pour le moment, c'est de me concentrer vraiment sur les records. Parce que c'est là qu'est, je pense, ma zone de génie dans le parachutisme. C'est là que je suis, je pense, la meilleure. Et c'est le domaine dans lequel je pense pouvoir le mieux contribuer. Et puis, c'est aussi ce qui me fait kiffer. J'adore l'exercice, j'adore la complexité. intellectuelle, d'ingénierie de saut, humaine, qui est vraiment... qui doit faire faire un truc super difficile et super stressant à un groupe de gens. Et tu as un ou deux ans pour mener ce projet. C'est passionnant, j'adore ça, j'adore les gens avec qui je le fais. Donc, j'ai vraiment envie de me concentrer sur ça. Je vais faire moins de coaching individuel parce que je passe aussi un peu à autre chose dans ma vie. Aujourd'hui, je me conseille de monter une soufflerie à l'entrée du Futuroscope qui s'appelle Zero Gravity. J'ai monté il y a deux ans ma boîte pour encadrer les conférences que je fais en entreprise.

  • Speaker #0

    On va en parler, mais c'est vrai que c'est intéressant aussi de se dire que tu es OK avec une phase de ta vie qui est potentiellement terminée, en tout cas qui va prendre une autre tournure et que tu y vas avec assez de sérénité parce que pas de regrets, tu l'as fait et que la vie, c'est aussi plusieurs étapes. Et ça, c'est extrêmement inspirant aussi parce que parfois, on s'accroche à des choses qui ne sont plus en fait, qui vont être différentes.

  • Speaker #3

    Je suis vraiment à l'aise avec ça parce que j'ai... J'ai vécu cette phase de vie vraiment comme je l'ai voulu et vraiment pleinement. Donc, ce switch-là, il est désiré, il n'est pas subi. Et c'est vrai que j'avais une conversation il y a quelques temps avec une de mes copines qui me disait que moi, je faisais ma crise de la quarantaine à l'inverse de tout le monde. C'est-à-dire que plein d'amis, tu vois, parisiennes ou avec qui je connais depuis l'adolescence, qui ont fait des études, qui ont tout de suite eu un job, un vrai métier, comme diraient mes parents. Et puis qui, autour de la quarantaine, se disent « j'ai envie de faire autre chose, j'ai envie de me barrer, j'ai envie de faire ci, j'ai envie de faire ça » . Et en fait, moi, j'ai fait pendant 20 ans vraiment l'électron libre à vivre hyper intensément cette vie un peu qui peut sembler déraisonnable, mais qui, moi, m'a absolument comblée. Et du coup, aujourd'hui, j'ai envie de me poser un peu plus, j'ai envie de construire des choses différentes, j'ai envie de gagner ma vie différemment. et puis j'ai envie de faire la place pour cette petite fille qui arrive et pour vivre ma maternité en étant présente. et en ayant du temps pour ça.

  • Speaker #0

    Et justement, sur cette partie, comme tu disais, plus intellectuelle, plus de transmission, ça va aussi avec ta fille, je trouve, avec la maternité, l'idée de j'ai envie de transmettre maintenant, de parler. Tu fais pas mal de conférences. Quel est le thème ? Qu'est-ce que tu as envie vraiment justement d'aborder ? Qu'est-ce que tu abordes dans ces moments-là ? Qu'est-ce que tu transmets lors de tes conférences, lors de tes prises de parole ?

  • Speaker #3

    Mes prises de parole en entreprise, principalement, elles sont vraiment centrées autour de la notion de... travail d'équipe, comment est-ce qu'on fait ?

  • Speaker #0

    En tout cas, nous, dans le cadre des records de parachutisme, comment est-ce que j'amène une équipe à performer malgré les difficultés, malgré le stress intense ? Parce que je me suis rendu compte que c'est ce qui était, dans mon expérience de vie parachutiste, le plus à propos et le plus proche de la réalité de l'entreprise aujourd'hui. Donc, c'était vraiment... Tu vois, je ne me suis pas lancée dans la conférence en me disant « ma vie, mon œuvre, qu'est-ce que je peux raconter aux gens ? » Mais j'ai vraiment été... par plein de questions et d'interviews parce que moi, le monde de l'entreprise, au départ, m'était quand même relativement étranger. J'ai fait des études de sciences humaines et après, je me suis enfui avec le cirque. Donc, j'étais quand même assez loin de ces préoccupations-là. Donc, j'ai beaucoup discuté avec des gens qui vivent ça quotidiennement et j'ai essayé de comprendre dans les problématiques qu'ils rencontraient qu'est-ce qui, moi, dans mon expérience, pouvait illustrer une façon de faire qui marche dans un contexte très spécifique mais qui, finalement, a beaucoup de points de commun avec celui de l'entreprise. Qu'est-ce que je pouvais aller extraire et partager ? Et donc, finalement, il s'est avéré que le contexte des records était celui qui était le plus à propos pour ça. Et donc, tu vois ce socle de raison dont on parlait tout à l'heure, c'est un de mes piliers importants, comment tu poses les bases, comment tu découpes un objectif, comment tu t'assures que tu vas pouvoir faire des choses en ayant assuré tes arrières. Il y a tout le côté de sécurité psychologique comment tu crées au sein d'une équipe les conditions qui font que les gens vont se sentir à l'aise. La confiance en soi, la confiance dans les autres, la confiance dans son management. Et puis la sécurité d'oser parler, d'oser pointer du doigt des choses. Et puis le troisième aspect qui est hyper important pour moi, qui est autour de ta vision, de tes valeurs. Comment tu vas rallier un groupe autour d'un objectif qui les dépasse un peu, qui dépasse les motivations individuelles, pour rentrer dans une motivation collective. Un des exemples dont je parle beaucoup en entreprise, c'est celui de Project 19, le dernier record du monde féminin. Comment, sur le papier, on avait un saut, un record qui allait être très difficile à battre, pour toutes les problématiques qu'on a évoquées tout à l'heure, de recrutement, de trouver suffisamment de femmes, avec le turnover de pratiques, pour pouvoir battre un record. Et en fait, on s'est ralliés autour d'un symbole qui était à l'époque, parce qu'on devait célébrer le centenaire de l'amendement 19 de la Constitution américaine, qui a donné le droit de vote aux femmes. On a rallié l'équipe autour de ça et comment on a puisé dans ce symbole-là qui sincèrement impliquait tout le monde. Toutes les personnes dans l'équipe se sentaient concernées par ça parce qu'on vivait encore les conséquences de ces combats-là. Et alors nous, c'était autour de 2020, personne ne remettait en cause encore le 19e amendement, même s'il a l'extrême droite américaine depuis un an ou deux. C'est moins évident. Oui, c'est quelque chose qui nous paraissait complètement... improbable est en train de se passer, comme quoi les combats ne sont jamais finis. Mais en tout cas, en ralliant l'équipe autour de ce symbole fort, on les a vraiment aidés à se dépasser et à faire en sorte que même dans des conditions très difficiles, elles soient allées chercher au plus profond d'elles-mêmes une motivation supérieure à simplement la motivation de rajouter une ligne prestigieuse sur un CV parachutiste. Et ça, j'en suis convaincue et c'est quelque chose qu'on a mis en place depuis... dans tous les records qu'on a organisés, notamment avec Amy et Sarah aux Etats-Unis, avec qui on organise des records mixtes, maintenant aussi. Record du monde mixte, moi record de France, là on prépare le prochain gros projet record d'Europe qui aura lieu dans deux ans, on vient juste de commencer les préparations de tout ça. Mettre la mixité au cœur de la formation, mais aussi au cœur du leadership, enfin, vraiment d'aligner nos valeurs avec notre pratique. Et aujourd'hui, moi, ce qui m'intéresse avec le parachutisme, c'est de l'utiliser comme un un peu un terrain d'expérimentation. de leadership pour essayer de décortiquer ce qui fonctionne chez nous. Et c'est vrai que cette double casquette de conférencière sur ces thèmes-là et d'organisatrice de ces événements, ça se nourrit l'un l'autre.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Continuer à être active dans mon sport, ça continue à me donner du terrain et des enseignements que j'intègre et que je mets à jour régulièrement mes conférences avec ce que j'apprends dans ce terrain-là. Mais en même temps, avoir cet intérêt intellectuelle de décortiquer le truc. Je prends de la hauteur. En fait, cette casquette de conférencière, elle m'a fait porter un regard analytique sur ce que j'avais fait jusqu'à présent dans le cadre de mon sport, alors qu'avant, on faisait les choses un peu à l'instinct, et puis on voyait ce qui marchait ou pas, mais on n'était pas vraiment dans une analyse très profonde de ça. Cette casquette de conférencière, elle m'a permis ce regard, et du coup, les deux activités se répondent vachement bien, donc c'est cool.

  • Speaker #1

    Et alors, c'est pas pour rien, du coup, que tu es une femme Forbes. 2025, j'ai envie de te dire, parce que vu tout ce que tu me dis, l'intérêt et l'inspiration que tu dégages est évidente. Qu'est-ce que ça évoque pour toi, ça ? Qu'est-ce que tu as envie d'en faire aussi ? Qu'est-ce que ça représente ?

  • Speaker #0

    C'est un sacré honneur, parce que quand je vois la liste des 39 autres nanas, je suis sacrément fière d'en faire partie. Et puis ça, c'est un tremplin, je l'espère, et c'est vrai qu'on a déjà créé des liens entre nous qui sont super chouettes. J'ai rencontré des femmes que j'aurais jamais rencontrées dans un autre... dans une autre circonstance. La force du réseau, quelle qu'il soit. La force du réseau, quelle qu'il soit. Et puis tu vois, on revient à cette notion de groupe de femmes, d'entre-soi féminin qui peut paraître et qui est parfois décriée et puis peut-être de plus en plus aujourd'hui.

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire, quand c'était les hommes qui se rejoignaient en réseau, on ne disait rien.

  • Speaker #0

    On ne disait rien, c'est sûr. Mais il y a beaucoup de puissance. Parce qu'il y a ce lien-là qui peut sembler externe qui en fait relie des gens qui Il y a déjà des choses très chouettes qui se sont passées dans ce réseau-là. J'ai hâte de voir la suite.

  • Speaker #1

    Oui, totalement. On arrive à la fin de cet épisode. J'ai quelques questions signatures à te proposer.

  • Speaker #0

    C'est parti.

  • Speaker #1

    Déjà, pour toi, agir, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Il y a une notion de mise en mouvement dans le verbe agir. Et il y a une phrase que j'aime beaucoup qui dit « La peur, elle ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant. » Et ça, c'est... Quelque chose dont je suis absolument persuadée. Quand quelque chose te fait peur, tu peux rester assis sur ton canapé pendant trois heures en y pensant dans tous les sens, en te demandant comment tu vas faire pour la dépasser. Il ne va pas se passer grand chose. Dès le moment où tu agis, dès le moment où tu te mets en mouvement, souvent cette peur-là, elle disparaît. Moi, je l'ai vécu de façon très intrinsèque, que ce soit dans le cadre du parachutisme ou le cadre des conférences aussi. Avant de monter sur scène, avant de sauter de l'avion, tu as super peur. Et en fait, dès que tu agis, dès que tu rentres en mouvement, dès que tu as sauté de l'avion, dès que tu as commencé tes premières phrases, la peur disparaît. Donc pour moi, agir, c'est la meilleure façon de faire disparaître tes peurs. Encore une fois, il ne faut pas le faire n'importe comment. Faites vos devoirs avant.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as un domaine d'activité où tu aimerais voir plus d'action ? Autre que ce qu'on vient d'aborder.

  • Speaker #0

    Écoute, je pense qu'un domaine d'activité dans lequel j'aimerais voir plus d'action, c'est la peur. plus d'action, c'est vraiment l'égalité homme-femme. Je suis persuadée, et notamment quand je regarde l'actualité, que si on avait plus de femmes en position de leadership, le monde s'en porterait mieux. J'ai lu récemment le très bon livre de Marie-Éloi, « Les femmes sauveront-elles le monde ? » Oui, mais pas tout seul. Elle est passée chez toi. Je suis vraiment convaincue de ça.

  • Speaker #1

    Elle est très intéressante et vraiment, elle montre l'intérêt de la mixité.

  • Speaker #0

    La puissance de la mixité. Donc, je pense que plus d'action dans ce sens-là, ça ferait du bien à nos sociétés.

  • Speaker #1

    Et alors, dernière question, est-ce que tu as une ou des figures d'inspiration que tu voudrais nous partager ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors, j'en ai beaucoup. Tu m'arrêtes quand il faut s'arrêter ? Alors, dans mon sport, c'est les deux femmes dont j'ai parlé tout à l'heure, Amy Chemelecki et Sarah Curtis, ces deux Américaines qui ont été mes mentors. et qui ont été les premières femmes que j'ai vues vivre de ce sport. Donc, c'est qui ont un peu ouvert l'horizon des possibles. Je me suis rendu compte en allant en Arizona pour la première fois à 22 ans que c'était possible et que ça ouvrait un peu la voie pour moi. Alors après, une autre femme qui est probablement la plus grande source d'inspiration, mais ça, c'est dans le domaine littéraire, c'est Marguerite Ursenar. Je suis une fan absolue de Marguerite Ursenar. Elle trouverait probablement ce mot absolument exécrable. mais c'est une figure d'écrivain qui me passionne je la lis et la relis régulièrement et religieusement avec plaisir et avec intérêt à chaque fois et c'est vraiment c'est mon inspiration absolue pour la littérature c'est absolument écrasant comme Panthéon parce que tu dis je ne peux jamais être à la hauteur d'une écriture comme celle-là mais c'est vraiment quelqu'un qui m'inspire énormément

  • Speaker #1

    Bon et donc on se retrouve quand là sur un prochain record ?

  • Speaker #0

    Alors voilà, le prochain gros projet, Parra, c'est ce record d'Europe qui aura lieu à l'été 2027. On a déjà commencé à mettre en place les entraînements pour 2026. Et là, je suis avec mes deux co-organisatrices, Anna Moxnes pour la Norvège et Sharon Arnoy, qui vit aux États-Unis, d'origine israélienne, qui sont dans mon équipe Joyrider. C'est vrai que je n'ai pas parlé de tout ça, mais je suis partie d'une équipe de nanas depuis une dizaine d'années. Donc là, on est sur la partie, justement, vision. Quelles sont les valeurs qu'on veut mettre derrière ce record ? Qu'est-ce qu'on veut illustrer avec ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas un record pour un record.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un record pour un record. On veut vraiment... L'exploit sportif est chouette, mais ce n'est pas ça qui nous motive. Et donc là, on est dans la phase d'alignement sur les valeurs qu'on veut mettre derrière ce projet-là. Donc c'est génial.

  • Speaker #1

    C'est génial, oui.

  • Speaker #0

    Les conversations sont longues et mouvementées parfois, mais c'est vraiment chouette. D'ici quelques mois, on va commencer à passer à la partie plus logistique. On va suivre ça. Je vais faire un petit building public, je pense, sur LinkedIn, sur tous ces sujets-là.

  • Speaker #1

    Avec un grand plaisir et grand intérêt. Merci beaucoup pour cet échange inutile. C'était un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Merci, Emilia.

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Merci d'avoir pris le temps de l'écouter. Et n'hésitez pas, si vous avez aimé, à le partager, à le commenter, à faire vivre la communauté Elsagis. Je vous retrouve très vite pour un nouvel épisode. Et n'oubliez pas que des lives sont aussi disponibles sur mon compte Instagram emily.b.sophrologue et que vous pouvez aussi retrouver toutes les informations de l'épisode sur le site du podcast www.elsagis.com. A très bientôt !

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Description

“La peur ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant.”


L'épisode de demain accueille la championne du monde de parachutisme free fly, conférencière et désormais femme Forbes 2025, Domitille Kiger a passé plus de vingt ans à explorer le ciel !
Le vide, pour elle, n’a jamais été un espace de peur mais plutôt un lieu de liberté comme elle l'aime le souligner.


De 4000 mètres d’altitude à la scène des entreprises, elle a appris à transformer le risque en maîtrise, la peur en moteur, le collectif en force.


Dans cet épisode, elle me reçoit à un moment charnière : quelques jours avant d’accueillir son premier enfant.
Un entre-deux symbolique, où la championne de haut niveau s’apprête à redéfinir la notion même de performance, de rythme et d’équilibre.


Nous parlons de peur et de confiance, de leadership féminin et de mixité, de records du monde et de transitions intérieures.
De ces moments où il faut savoir lâcher prise pour continuer à s’élever.


Un épisode fort et apaisé à la fois, sur le courage, la transmission et l’art de continuer à voler, autrement.


Amy Chmielecki et sara curtis :

Deux parachutistes américaines basées en Arizona, pionnières du free fly et organisatrices des premiers records du monde féminins.
➤ Ce sont ses mentors, “ses mamans oiseaux”, celles qui lui ont appris à voler tête en bas et à organiser des records.

« Ce sont elles qui m’ont appris à dessiner une formation, à faire l’ingénierie du saut, à gérer le leadership de ces records. »


Cathy et Virginie Bouette et Karine Joly
➤ Championnes françaises de free fly, premières femmes à avoir été championnes du monde dans une discipline mixte.
➤ Domitille souligne leur rôle pionnier dans un sport encore très masculin.

« La première femme à être championne du monde, c’est Cathy Bouette, en 2008. Depuis, il y a eu Karine Joly en 2018. »


Anna Moxnes et Sharon Har-Noy
➤ Ses coorganisatrices actuelles dans l’équipe Joyrider et sur les records européens à venir.
➤ Domitille les décrit comme des partenaires de vision et de valeurs.

« On aligne nos valeurs avec notre pratique. C’est ce qui donne du sens à nos projets. »


Marie Eloy
➤ Fondatrice de Bouge ta Boîte, autrice de Les femmes sauveront-elles le monde ?
➤ Elle la cite comme une référence inspirante sur la mixité et le leadership féminin.

« Plus on aura de femmes en position de leadership, mieux le monde se portera. »


Marguerite Yourcenar
➤ Sa figure d’inspiration littéraire absolue.
➤ Domitille dit la relire “régulièrement et religieusement”.

« C’est mon inspiration absolue pour la littérature. C’est écrasant, mais tellement inspirant. »



Retrouvez toutes les informations sur www.ellesagissent.com

Retrouvez moi sur www.emilieberthet.fr

Sur mon Instagram Berthet_Emilie


N'hésitez pas à laisser 5 étoiles et un commentaire pour rendre visible ce podcast !


Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Je suis Emilie Berthet Conférencière, productrice de podcasts, sophrologue et auteure, j’accompagne les organisations et les particuliers vers une meilleure compréhension de notre époque et à construire une société attentive aux enjeux humains. Femme Forbes 2025 et TEDx speaker.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Agir. J'ai choisi d'agir sans arrêt.

  • Speaker #1

    J'agis en enlevant mon t-shirt et en criant des slogans dans des endroits où je ne suis pas la bienvenue et à des gens qui ne sont pas forcément contents de me voir.

  • Speaker #2

    J'ai pas une action dont je suis fière, c'est je crois que toute action doit rendre fière.

  • Speaker #1

    J'ai pas de mots pour agir, c'est une action.

  • Speaker #0

    Bonjour Domitile.

  • Speaker #3

    Bonjour Émilie.

  • Speaker #0

    Merci d'être dans Elles agissent.

  • Speaker #3

    C'est un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Oui, moi aussi, je suis très, très contente. Alors, Domitille, tu es championne du monde de parachutisme, de saut synchronisé tête en haut. Est-ce que c'est bien ça ?

  • Speaker #3

    Alors, pas tout à fait.

  • Speaker #0

    Pas tout à fait. J'ai eu du mal à trouver, j'ai vu plusieurs thèmes, donc je préfère que tu me...

  • Speaker #3

    Alors, moi, je suis championne du monde de free fly, qui est une discipline artistique du parachutisme sportif. Donc, on n'est pas dans le parachutisme militaire, on est vraiment dans le sport. Et c'est un sport dans lequel tu as plein de disciplines différentes. Il y en a qui se passent. en chute libre, il y en a qui se passent sous voile et d'autres au moment du posé. Le free fly, c'est pendant la chute libre. En gros, c'est un peu comme du patinage artistique. Tu vas faire des manches de libre, donc des sauts de libre et des sauts d'imposé. Sur un saut d'imposé, toutes les équipes vont faire les mêmes figures et sont jugées sur la précision avec laquelle elles les réalisent. Et puis sur un saut de libre, tu crées 45 secondes pour créer la chorégraphie que tu veux. Et ça se passe en équipe de trois. Deux performeurs et un vidéomane. C'est les images que rapporte le vidéomane au sol qui servent au juge pour noter.

  • Speaker #0

    Merci de cette précision déjà. C'est depuis plus de 20 ans que tu fais partie de ces peut-être rares femmes, et tu vas me dire si je me trompe aussi ou pas, à défier la gravité. En tout cas, je n'ai pas vu beaucoup de femmes. Tu as hésité à un moment jeune entre ciel et terre, mais tu as choisi de faire du ciel ton espace d'équilibre. Tu jongles entre une totale maîtrise et une sensation de lâcher prise. Quand tu es là-haut, à quelques secondes du saut, qu'est-ce qui se passe en toi ? Est-ce que c'est le calme absolu ? Est-ce que c'est la concentration ? Parce qu'on est dans la rigueur aussi, dans la préparation. Qu'est-ce que tu ressens à ce moment-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ça va pas mal dépendre des sauts. Je ne vais pas ressentir la même chose tout le temps. Déjà, tout au long de ma vie et de ma carrière. Les premiers sauts par rapport aux sauts d'aujourd'hui, évidemment, en termes de stress, par exemple. Ce n'est pas tout à fait pareil. avant mon premier saut avant mes premiers sauts j'avais beaucoup de peur, une peur assez intense qui se manifeste par le cœur qui s'accélère, la respiration qui raccourcit, les pensées qui tournent un peu en boucle dans ta tête en te disant « Pourquoi je suis là ? » Et ça, évidemment, ça disparaît au fur et à mesure. Il n'y a pas vraiment un « on-off » . Tu ne passes pas de la terreur totale à la décontraction la plus absolue d'un saut à l'autre. On va dire que la peur diminue au fur et à mesure que tu améliores ta pratique, que tu comprends l'environnement, que tu comprends les enjeux. Et puis que tu fréquentes des gens qui font la même chose que toi, ça peut paraître idiot aussi, mais quand tu débarques dans quelque chose que tu n'as jamais fait et que tu ne connais personne qui le fait, ta méconnaissance de l'environnement accentue ta peur. Quand tu passes du temps avec que des gens qui font la même chose que toi, ça désacralise un peu l'action. Et puis le parachutisme en particulier, qui a cette image très dangereuse, trompe la mort. En fait, tu te rends compte à la pratique que ce n'est pas du tout le cas. Et donc, du coup, ça aide aussi à faire baisser un peu la peur entre la réalité de la pratique et ce que tu t'en étais imaginé.

  • Speaker #0

    Oui. Et puis, au moment où tu sautes, il y a tellement de préparation derrière que tu es dans un état peut-être qui n'est même plus au-delà de la peur, qui est peut-être dans ton objectif quand tu réalises, quand tu veux battre un record, etc.

  • Speaker #3

    Oui. Alors, les records, c'est encore autre chose. Un saut de record ou un saut de compétition. Là, la peur est à nouveau très intense avant de sauter, mais ce n'est pas tellement de la peur, c'est plus du track de performance. C'est la même chose qu'avant de monter sur scène pour une conférence. C'est la peur de contre-performer. Alors que tes premiers sauts, tu es dans une peur plus viscérale quand même. Ce n'est pas ultra naturel de se jeter d'un avion en parfait état de marche. Je pense d'un point de vue de l'évolution, c'est quand même assez récent. Donc, il y a quand même tout dans ton cerveau qui s'allume en disant non, non, non, mais pourquoi ? Et ce que tu dis est intéressant, le fait qu'il y ait toute cette préparation avant, c'est clairement le socle de raison sur lequel tu t'appuies pour pouvoir lâcher prise. Parce que lâcher prise sans avoir fait ce travail préliminaire, ce serait de l'inconscience, ce serait très dangereux, ce serait complètement idiot. C'est vrai qu'avant de faire un premier saut, tu vas te former avec des moniteurs diplômés d'État, tu vas utiliser du matériel qui est homologué, tu sautes d'un avion qui est aussi homologué pour ça. Donc tu as quand même tout un socle réglementaire et raisonnable et intelligent qui fait que tu peux pratiquer. Si tu ne fais pas ça, tu ne vas pas monter dans un avion aléatoire, casser la porte avec ton pied et sauter sans parachute. Tu peux le faire, mais du coup, tu meurs si tu fais ça. Tu veux le pratiquer comme sport, c'est dans un cadre qui est quand même très encadré. Et donc, ça, ça te permet d'arriver au moment de basculement en ayant cette confiance que tu peux le faire. Malheureusement, la mauvaise nouvelle, c'est que ce socle de raison, il ne va pas t'enlever la peur. Tu vas quand même, sur les premiers sauts, être très stressé, très nerveux. Et il faut trouver en toi les ressources pour basculer malgré cette peur-là. Pour moi, ce socle de raison, c'est l'étape numéro un. Elle est indispensable, elle est primordiale pour prendre des risques sans y laisser des plumes. Mais il faut quand même ensuite avoir ce petit moment de déconnexion. Et c'est vrai que quand on a réussi à le trouver, là, dans le cadre très anecdotique du parachutisme, mais en fait, quand tu l'as trouvé dans ce cadre-là, moi, ça me l'a fait à titre personnel, mais je l'ai constaté chez beaucoup de gens. derrière. Quand tu t'es rendu compte que tu étais capable de ça dans ce contexte-là, tu vas être plus facilement capable de l'être dans d'autres contextes aussi. Et c'est vrai que c'est un sport qui, moi, a eu une influence très forte sur la façon dont j'ai vécu ma vie derrière. Mais je le vois dans les gens à qui j'enseigne, c'est souvent la même chose. On a tous des histoires assez similaires, en fait. Ça booste bien la confiance en soi.

  • Speaker #0

    Dans une conversation qu'on avait eue hors micro, tu m'avais dit, enfin, tu avais dit une fois que tu n'avais pas vraiment ce syndrome de l'imposteur. Est-ce que c'est grâce aussi à ça ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense.

  • Speaker #0

    En tout cas, peut-être est-ce que tu as travaillé sur un dépassement de soi de différentes manières que tu peux appliquer dans le quotidien en fait ?

  • Speaker #3

    Alors, je n'ai pas vraiment l'impression d'avoir travaillé spécifiquement dessus. Mais par contre, je suis convaincue effectivement que cette vie aérienne et ces choix que j'ai faits et cette pratique assidue du parachutisme a contribué à me donner confiance en moi. Et c'est vrai que le syndrome de l'imposteur, c'est quelque chose dont on parle beaucoup aujourd'hui et dont je vois sincèrement et concrètement beaucoup de gens et beaucoup de femmes, on ne va pas se mentir, s'en déclarer victime. Et moi, je ne le ressens pas parce que j'ai l'impression d'avoir une bonne estimation de où je me place pour une activité particulière. et ne pas avoir le syndrome de l'imposteur ça ne veut pas dire avoir une surconfiance pas du tout, et que ce soit dans mon sport ou que ce soit dans d'autres activités que j'ai lancées derrière En fait, quand je débute quelque chose auquel je ne connais rien, je ne me sens pas comme une impostrice, je me sens comme une débutante. Et donc, j'accepte que le statut de débutant implique une médiocrité pratique. Quand tu ne sais pas faire un truc, tu n'es pas bon. Et ce n'est pas se sentir imposteur, c'est juste que c'est vrai, tu n'es pas bon, donc il faut apprendre. Ça demande du travail. Du travail, ça demande du temps. Et seulement avec le temps et l'expérience, tu vas arriver dans une phase de légitimité. Mais donc, je ne me sens pas imposteur quand je suis au début du chemin. Je suis juste débutante. Et puis, une fois que j'ai pris le temps et que j'ai fait les efforts pour arriver au bout du chemin, je ne suis pas une imposteur. Je suis arrivé là où mon travail m'a amené. Et puis après, le chemin entre les deux, il faut jauger un peu où t'en es. Mais voilà, je ne me sens pas impostrice parce que soit je suis débutante, soit je suis apprenante, soit je suis confirmée.

  • Speaker #0

    Ce syndrome, il peut être aussi impactant avant même de commencer. Tu vois, il peut te dire de ne pas y aller. et ça euh Ça, tu l'as travaillé aussi, peut-être, en te disant... Ça, c'est la confiance en soi. Je me force à y aller. Tu vois, j'y vais quand même. J'y vais, mais j'ai peur, mais j'y vais quand même. Je dis oui avant de... Tu sais, quand parfois, on a des propositions... Je ne sais pas, je n'ai jamais fait. Je dis oui, et après, j'apprends. Et j'apprends pour le faire. C'est ça aussi la une des clés.

  • Speaker #3

    Complètement. Et tu as raison. Je pense que le parachutisme m'a vachement aidé avec ma capacité à me dire j'y vais.

  • Speaker #0

    Bah ouais. Toi, tu n'arrêtes pas de te lancer. tu vas te dire ce truc de se lancer et d'ailleurs tu dis le vide ne fait pas peur il rend libre J'avais lu ou entendu ça. Est-ce que tu peux revenir sur cette pensée ? Qu'est-ce que tu ressens en disant ça ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, cette notion de vide, qui est ce qu'on redoute souvent le plus quand on imagine un saut en parachute, pour moi, une des leçons qui a été très fondatrice avec mon premier saut, c'est de me rendre compte que je n'étais pas du tout dans du vide. Alors, je sais que les gens souvent me disent « mais de quoi tu parles ? Tu sautes dans le vide, il n'y a rien autour de toi » . Alors oui, c'est vrai, mais en fait, on n'a pas du tout une impression de vide. Parce que quand on sort de l'avion, on est tout de suite dans un truc qui s'appelle le vent relatif. On ne va pas rentrer dans des grands détails techniques, mais en gros, c'est le vent subi par un objet en mouvement. C'est comme quand tu mets ta main en dehors de la voiture sur l'autoroute. Tu as une perception. Tu sens une pression sur ta main. Effectivement, si tu la regardes juste à main, elle est dans du rien, parce que le vent, ça ne se voit pas. Mais en termes de sensation, tu as une pression forte et plus la vitesse est rapide de la voiture ou de ta propre chute. En parachutisme, on est à peu près à 200 km heure si on est à plat. 300 km heure si on est à temps bas. Donc la densité, la texture, elle est quand même assez concrète et solide. Donc en fait, tu n'as pas du tout l'impression d'être dans du vide. Et tu as une influence sur ça. C'est pour ça qu'on arrive à faire des figures et à se déplacer et à voler relativement les uns par rapport aux autres avec précision. C'est parce que notre corps peut, comme te déplacer dans de l'eau, tu peux agir sur cet élément. Donc tu n'es pas dans du rien, tu es dans quelque chose que tu apprends à maîtriser. plus ou moins de grâce au début, ça prend quand même un peu de temps avant d'y arriver, mais t'es pas dans du vide. Et donc cette notion de te jeter dans le vide, en fait tu te rends compte seulement après l'avoir fait que c'était pas ce que tu croyais. Et ça aussi c'est quelque chose qui m'a donné je pense, je sais pas si c'est du courage, mais en tout cas une propension à être capable d'aller vers l'inconnu parce que ma première grosse expérience d'aller vers l'inconnu s'était avérée réconfortante. Les peurs que j'avais autour de ça, c'était avéré fausse. Et ce que j'avais découvert de l'autre côté de ces peurs, c'était avéré absolument fantastique à vivre. Donc, ça m'a donné des billes pour être capable de le faire dans d'autres contextes après.

  • Speaker #0

    Je voudrais revenir quand même sur ton parcours, parce qu'entre plaisir et devenir championne du monde, le plaisir ou la découverte de sautée... Qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #3

    J'ai un caractère un peu obsessionnel, on ne va pas se mentir. Quand j'aime un truc, j'aime vraiment beaucoup un truc et j'ai envie de faire que ça. Donc, les premières années de ma pratique, déjà, elles étaient quasiment qu'estivales parce que j'ai commencé, j'étais au lycée, après j'étais à la fac. Donc, je n'avais pas vraiment d'argent pour pratiquer. Et puis, en bonne parisienne qui se respecte, je n'avais pas le permis. Donc, à part l'été, une fois qu'on m'avait posé quelque part, je n'allais pas nulle part. Et donc, j'ai rapidement commencé à travailler les saisons d'été dans un centre de parachutisme pour pouvoir me payer mes sceaux. Et puis surtout, pour faire partie d'un groupe, pour faire partie d'une communauté. J'avais vraiment envie d'intégrer cet univers-là. Et le travail, même saisonnier, m'avait paru la meilleure façon de le faire. Et puis rapidement, forcément, j'avais 17, 18, 19 ans. Dans les magazines de para, tu vois les stars, les gens qui sont champions du monde. Et tu te dis, c'est complètement incroyable ce qu'ils font. à la fois visuellement et techniquement dans le sport, mais aussi les vies qu'ils mènent. Moi, j'étais absolument fascinée par ça.

  • Speaker #0

    C'est quoi ?

  • Speaker #3

    C'est des vies de liberté où tu passes, tu vas une semaine dans un pays, la semaine d'après dans un autre pays, où tu enseignes ta discipline, tu fais des compétitions. Et en fait, moi, je trouvais ça extrêmement attirant. J'avais vraiment envie de ça. Alors à côté, j'avais quand même toujours ma vie à Paris d'étudiante. Moi, j'ai fait des études d'histoire à la Sorbonne. J'ai fait un master en audiovisuel toujours à Paris. donc Au début, j'étais quand même sur des rails un peu plus classiques parce que c'était les seuls modèles que j'avais autour de moi. Mais le parachutisme commençait à me montrer d'autres modèles. Et je dois t'avouer que ces modèles-là me faisaient vachement plus kiffer que le très jeune adulte. Et donc, je me suis dit que la compétition, ça va être un excellent moyen à la fois de me perfectionner techniquement, parce que quand tu te concentres sur une discipline avec le même petit groupe de personnes dans un cadre d'entraînement, tu vas progresser beaucoup. plus vite que si juste tu fais des sauts à la cool le week-end avec tes copains, mais ça change un peu tout le temps et puis il n'y a pas vraiment de notion d'entraînement ou d'excellence. Donc j'avais à la fois envie de me perfectionner dans ma discipline, parce qu'en fait, mieux tu sais voler, plus c'est agréable de voler. Plus tu arrives à te déplacer instinctivement dans l'air, plus la sensation est agréable.

  • Speaker #0

    Voilà le moment. Exactement.

  • Speaker #3

    Donc il y avait à la fois ce côté purement sportif et technique. Mais il y avait aussi très fortement cette envie d'accéder à un mode de vie, à une communauté, parce que c'est un tout petit sport. Et donc, forcément, les gens qui arrivent au sommet de leur sport dans leur pays et ensuite au niveau mondial, ils se connaissent tous et ils voyagent ensemble et ils font des événements ensemble. C'est un petit monde, c'est une petite communauté. Et donc, moi, j'avais envie d'intégrer cet univers-là. Donc, ça a été un fort attrait. Donc j'ai commencé, j'ai monté une équipe avec deux copains. au début de façon, voilà, en se disant que, bon, on ne rêvait même pas d'être champion du monde, on en était à des années-lumières. Mais en fait, ça a été finalement assez vite parce qu'on a eu un bon timing, on est arrivé à un moment où les équipes de France de l'époque, qui étaient bien meilleures que nous, mais arrêtaient la compétition. Donc on a été repérés par la Fédération française de parachutisme qui nous a intégrés à son système. Alors d'abord, tu rentres en équipe Espoir et puis après en équipe de France et puis qui te soutiennent. qui te paye des sauts d'entraînement, qui te donne un coach, qui te donne un cadre dans lequel progresser. Donc moi, je suis très reconnaissante au système français qui m'a vraiment permis d'exploser en quelques années. Et puis, je me suis retrouvée dans cette espèce d'ascenseur. Après,

  • Speaker #0

    c'était parti. Je vais revenir à ce que je disais au tout début. J'aimerais que tu me donnes ton œil et que tu précises des choses. Je parlais de la place de la femme. En tout cas, moi, j'avais l'impression qu'elle n'avait pas beaucoup. Alors, ce que je voulais préciser, c'est Merci. Il y en a dans le record, etc. Tu le dis bien. Mais déjà, en termes de visibilité, alors déjà, ce n'est pas un sport qui est très visible pour le grand public. Il est aussi grâce à toi, en fait. En tant que femme, tu le rends aussi visible. J'aimerais que tu nous expliques aussi quelle a été cette place de la femme, si tu vois une évolution entre le début et maintenant, toi, personnellement, et de manière générale. Et qu'est-ce que ça peut aussi évoquer de plus large, plus politique, etc. Grande question.

  • Speaker #3

    Oui, alors c'est vrai qu'on n'est pas très nombreuses. Je pense que... Il doit y avoir, dans la pratique générale en France, je n'ai plus les chiffres précis en tête, mais il y a moins de 20% de femmes qui pratiquent. Quand on tombe dans des disciplines de spécialité comme la mienne, le free fly, si on regarde le nombre de brevets liés au free fly en France, je crois qu'on est même à moins de 15%, entre 12 et 15%. Et ça, c'est assez mondial. On va dire qu'il y a des pays où il y en a moins. Il ne doit pas y avoir beaucoup de pays où il y en a plus. On est à peu près dans cet ordre de grandeur. Donc, ce n'est clairement pas un sport féminin. Et là, il y aurait des études, je pense, très intéressantes à faire sur le sujet. Pourquoi est-ce que c'est un sport qui attire moins les femmes, qui garde moins les femmes ? Il y a beaucoup de femmes qui arrêtent après la maternité. Ah oui, c'est intéressant. Il y a quelques études qui sont faites un peu sur ces sujets-là, mais je pense qu'il y a encore de quoi creuser. Je pense que ça a beaucoup à voir avec la notion du rapport au risque, avec la notion de confiance en soi. Il y a des choses intéressantes à explorer de ce côté-là. et dans le haut niveau il y en a en fait plus un peu plus Un peu comme en entreprise ou en politique, généralement, plus tu montes dans les strates, moins t'as de nanas. Mais il y a des exceptions. Et en France, on a de très jolies exceptions. La première femme à être championne du monde, parce que moi, ma discipline, le free fly, elle est mixte. Techniquement, il n'y a pas de séparation homme-femme. Alors, il y a très peu de femmes, mais moi, j'étais en équipe avec deux garçons. Et l'année où j'ai gagné à Dubaï, où il y avait à peu près 23 pays représentés, Il devait y avoir 5 ou 6 nanas au total dans les équipes, donc il n'y en avait pas beaucoup.

  • Speaker #0

    En tout ?

  • Speaker #3

    En tout, oui. Mais moi, sur la première marche, et sur la troisième marche du podium, l'autre équipe de France, qui avait deux femmes, Virginie et Cathy Boit, Cathy Boit qui a été la toute première femme à être championne du monde de Free Fly en 2008. Depuis, il y en a eu deux autres, Karine Joly en 2018, qui est aussi une Française, et puis Anna Moxnes. pour la Norvège qui a gagné en 2021, je crois. Donc, il y a quand même régulièrement eu des femmes ces dernières années dans des équipes mixtes à chaque fois. Donc, messieurs, écoutez bien. Mais en fait, c'est un sport où les différences biologiques n'ont pas d'importance parce qu'il y a un minimum syndical de forme physique, d'explosivité, de gainage et tout, mais c'est quand même principalement un jeu mental. Donc le fait de physiquement être limité parce que tu peux soulever ou ta puissance cardiovasculaire n'a pas d'importance. À ce moment-là,

  • Speaker #0

    dans la pratique.

  • Speaker #3

    En tout cas, on n'arrive pas dans les strates tellement extrêmes de ce type de performance que ça joue pour la pratique du parachutisme. Donc sur le papier, c'est un sport très égalitaire. Mais tu te rends compte quand même qu'il y a beaucoup moins de femmes dans ces positions-là. Et toi,

  • Speaker #0

    ta perception par rapport à ton parcours ?

  • Speaker #3

    Personnellement, dans mon parcours, je n'ai jamais l'impression d'en avoir souffert, moi. Mais j'ai bien conscience d'être plutôt une exception qu'une règle, de la même façon que j'ai eu la chance de traverser cette existence sans avoir été inquiétée par des sujets de harcèlement. J'ai une conscience bien aiguë de par mes amitiés, mes relations, que c'est une chance et c'est une rareté plus qu'une règle. Ce qui ne m'a pas empêché de constater chez les autres que ce n'était pas du tout le cas. Et notamment... dans le cadre des records de grande formation qui est un sujet qui, moi, depuis une dizaine d'années maintenant, est vraiment au centre de ma pratique. Alors, les records de grande formation, ça consiste à construire la plus grande figure accrochée les uns aux autres en chute libre. Donc, on a à peu près une minute où on sort de plein d'avions différents et on se rejoint pour former une espèce de grosse rosace. Et donc, établir un record, battre un record, ça veut dire construire une figure avec plus de personnes que le dernier record. Donc, c'est pour ça qu'on dit des chiffres. Par exemple, si le dernier record, il y avait une figure à 50 personnes, il faut que tu fasses... au minimum 51 personnes derrière. Et dans cet exercice-là, il y avait beaucoup moins de femmes, et surtout pendant très longtemps, et moi toutes les années où j'ai commencé d'abord à participer à ces records, avant de commencer à les organiser, c'était que des hommes en position de leadership. C'était des hommes qui les organisaient, c'était des hommes qui sélectionnaient les équipes pour participer. Et là, je me suis rendu compte que les femmes avaient vraiment beaucoup moins d'opportunités. Souvent jugées comme plus fragiles à la fois dans leur vol, on avait l'impression qu'à la moindre... petites secousses, elles allaient faire pchit et sortir de la formation, qu'elles arrivaient plus lentement, qu'elles étaient plus prudentes, mais aussi psychologiquement, qu'elles allaient craquer sous la pression, qu'elles seraient moins solides au moment où il faut performer, parce que, tu vois, quand je te dis tout à l'heure qu'il faut que, si tu dis tu vas faire un 100, il faut que 100 personnes soient là. Si tu en as 99 qui sont accrochées, mais qu'il y en a une qui n'est pas là, le record n'est pas validé. Donc la pression individuelle, elle est super forte. Et donc il y avait cette assumption un peu que... les femmes allaient moins gérer ce genre de pression et il y a un groupe de nanas aux Etats-Unis qui fort de cette constatation ont décidé qu'elles allaient commencer à organiser des records féminins donc avec que des nanas pour permettre un contexte d'entraînement d'opportunité, de prise de compétences et de vraiment technique mais aussi de prise de confiance pour leur permettre de s'entraîner de leur dire que c'est possible Donc moi, ces deux femmes-là, qui s'appellent Amy Chemelecki et Sarah Curtis, deux Américaines basées en Arizona, ça a été mes mentors au début. Ça a été mes premières coachs.

  • Speaker #0

    Ah, t'es passée par elles, en fait. Je suis passée par elles, oui,

  • Speaker #3

    tout à fait. En fait, moi, en 2008, j'avais 22 ans ou un truc comme ça. Je suis partie quelques mois aux Etats-Unis pour faire un gros coup de progression dans ma vie avant de commencer la compétition. C'est là que je les ai rencontrées. Elles ont fait partie des premières femmes qui m'ont appris à voler tête en bas. Vraiment, très littéralement, c'était mes mamans oiseaux. C'est devenu mes amis et mes mentors. C'est elles qui m'ont proposé d'intégrer l'équipe d'organisation des records féminins en 2013. Et c'est là que j'ai commencé à apprendre. C'est elles qui m'ont appris très concrètement à dessiner une formation, faire l'ingénierie du saut, qui m'ont vraiment montré les ficelles de ce genre d'exercice et qui, par la suite, ont vraiment fait évoluer la façon dont le leadership de ces records ont été organisés. Donc, c'est via elles que j'ai fait ça, que je suis rentrée là-dedans et je me suis rendue compte que parmi les participantes, en fait, ça changeait vraiment la donne. Ça permettait de donner confiance aux femmes. ça leur permettait de s'entraîner et ensuite de se sentir plus légitime pour aller postuler au record mixte.

  • Speaker #0

    Il a quand même fallu ça, en fait, finalement.

  • Speaker #3

    Il a fallu ça. Alors que moi, j'étais très, au début, j'avais des idées un peu arrêtées sur, comme le parachutisme, c'est un sport mixte, il ne doit pas y avoir de séparation.

  • Speaker #0

    Finalement, même si c'était presque inconscient, les femmes aussi n'y allaient pas.

  • Speaker #3

    J'ai vraiment changé d'avis sur ce sujet-là, en fait, en constatant autour de moi les... les conséquences et la réalité de ce que vivaient certaines femmes et comment ce contexte exclusivement féminin leur permettait ensuite de « ressauter dans le grand bain » et que ça leur donnait vraiment une force pour le faire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu trouves que ta visibilité actuelle aide à certaines femmes ? Est-ce qu'on te contacte par exemple en te demandant, en te disant ? Est-ce que tu penses que ça a été contribué ?

  • Speaker #3

    J'espère. et en fait souvent... On ne s'en rend pas compte parce que quand on est dans une logique soit de communication sur des réseaux sociaux ou des podcasts ou des interviews télé, on donne quelque chose, on exprime quelque chose, mais c'est assez unilatéral. Et en fait, là, c'est vrai que depuis un ou deux ans, je reçois des messages en privé ou parfois je croise des gens qui me disent « tu sais, à tel endroit, tu as dit ça et derrière, j'ai été faire ça et ça m'a aidé » . et ça pour moi le plus beau cadeau qu'on puisse me faire. Faut me rendre compte que ce que j'ai dit ou ce que j'ai représenté a pu aider quelqu'un à se dire « bah ouais, ouais, je peux le faire » . Quand on me dit un truc comme ça, je vais me coucher le soir en me disant que j'ai pas raté ma journée.

  • Speaker #0

    Je répondis sur ce que tu as dit tout à l'heure autour de la maternité. Parce que c'est une transition toute trouvée puisque tu attends ton premier enfant.

  • Speaker #3

    Ah, c'est ça mon soupeux !

  • Speaker #0

    Elle nous a laissé le temps de faire l'interview. Mais effectivement, voilà, d'ici peu, sur cette notion de maternité que certaines femmes arrêtaient, etc. Est-ce que toi, donc déjà, là, tu t'es arrêtée depuis un moment. Là, voilà,

  • Speaker #3

    la grossesse n'est pas extrêmement compatible avec le parachutisme.

  • Speaker #0

    Donc déjà, comment tu te sens par rapport à cet arrêt ? Parce que finalement, c'est aussi quelque chose qu'un homme ne vit pas.

  • Speaker #3

    Non, clairement pas.

  • Speaker #0

    Et est-ce que justement, ce rapport à la maternité, tu t'y projettes autour de... de cette notion qu'on parlait de risque, de saut, même d'intensité, de rythme, etc. Ou est-ce que tu verras au moment voulu ?

  • Speaker #3

    C'est sûr qu'en tant que femme et sportive, on ne vit pas la maternité de la même façon qu'un homme. Je sais que toutes mes années en équipe de France, on était dans un collectif avec une dizaine de personnes. Et sur ce collectif-là, il y a trois de mes potes, dont un de mes coéquipiers, qui ont eu des enfants. Pendant qu'on était en équipe de France, pendant nos grosses années d'entraînement et de compétition. Mais ils ont eu des enfants parce qu'ils avaient des femmes qui étaient là pour s'en occuper, pour les faire déjà, et après pour s'en occuper, et qui les laissaient et qui les soutenaient dans leur carrière sportive pour pouvoir voyager beaucoup et être beaucoup absent. Moi, clairement, ça n'aurait pas du tout été compatible, ça n'aurait pas été possible pour moi en tant que femme. C'est aussi pour ça que dans quelques jours, je vais avoir mon premier enfant, j'ai 40 ans et j'ai une maternité tardive parce que ma carrière n'a pas été compatible avec une maternité plus tôt. Alors après, comment est-ce que ça, ça va impacter mon rapport au risque et mon rapport au sport ? J'ai bien quelques théories, mais je reste assez prudente sur le fait de les exprimer, parce que je pense qu'entre ce qu'on s'imagine et ce qu'on vit, il y a un fossé, et que je ne voudrais surtout pas, en étant enregistrée, dire des grandes théories. Non, non, bien sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que tu te projettes sur une éventualité ?

  • Speaker #3

    Mais par contre, c'est sûr que ma pratique va changer. Après, c'est aussi une question de phase de vie, c'est-à-dire que pendant 20 ans, J'ai quand même été extrêmement monomaniaque sur le parachutisme. Je l'ai vraiment vécu à fond avec beaucoup d'intensité, ce qui était ce que je cherchais et ce que je désirais. Donc, parfaitement aligné avec ce que je voulais construire sur cette phase de vie, on va dire de 20 à 40. Là, de 40 à 60, j'ai d'autres ambitions aussi plus intellectuelles, plus entrepreneuriales qui donc me demandent du temps, de la concentration et des efforts. Et donc, on ne peut pas se disperser non plus dans trop de choses. En dehors même de la maternité, il est certain que la phase de vie qui m'attend va être moins tournée autour du parachutisme. Par contre, le parachutisme ne va pas en être exclu. Ce que j'ai décidé pour le moment, c'est de me concentrer vraiment sur les records. Parce que c'est là qu'est, je pense, ma zone de génie dans le parachutisme. C'est là que je suis, je pense, la meilleure. Et c'est le domaine dans lequel je pense pouvoir le mieux contribuer. Et puis, c'est aussi ce qui me fait kiffer. J'adore l'exercice, j'adore la complexité. intellectuelle, d'ingénierie de saut, humaine, qui est vraiment... qui doit faire faire un truc super difficile et super stressant à un groupe de gens. Et tu as un ou deux ans pour mener ce projet. C'est passionnant, j'adore ça, j'adore les gens avec qui je le fais. Donc, j'ai vraiment envie de me concentrer sur ça. Je vais faire moins de coaching individuel parce que je passe aussi un peu à autre chose dans ma vie. Aujourd'hui, je me conseille de monter une soufflerie à l'entrée du Futuroscope qui s'appelle Zero Gravity. J'ai monté il y a deux ans ma boîte pour encadrer les conférences que je fais en entreprise.

  • Speaker #0

    On va en parler, mais c'est vrai que c'est intéressant aussi de se dire que tu es OK avec une phase de ta vie qui est potentiellement terminée, en tout cas qui va prendre une autre tournure et que tu y vas avec assez de sérénité parce que pas de regrets, tu l'as fait et que la vie, c'est aussi plusieurs étapes. Et ça, c'est extrêmement inspirant aussi parce que parfois, on s'accroche à des choses qui ne sont plus en fait, qui vont être différentes.

  • Speaker #3

    Je suis vraiment à l'aise avec ça parce que j'ai... J'ai vécu cette phase de vie vraiment comme je l'ai voulu et vraiment pleinement. Donc, ce switch-là, il est désiré, il n'est pas subi. Et c'est vrai que j'avais une conversation il y a quelques temps avec une de mes copines qui me disait que moi, je faisais ma crise de la quarantaine à l'inverse de tout le monde. C'est-à-dire que plein d'amis, tu vois, parisiennes ou avec qui je connais depuis l'adolescence, qui ont fait des études, qui ont tout de suite eu un job, un vrai métier, comme diraient mes parents. Et puis qui, autour de la quarantaine, se disent « j'ai envie de faire autre chose, j'ai envie de me barrer, j'ai envie de faire ci, j'ai envie de faire ça » . Et en fait, moi, j'ai fait pendant 20 ans vraiment l'électron libre à vivre hyper intensément cette vie un peu qui peut sembler déraisonnable, mais qui, moi, m'a absolument comblée. Et du coup, aujourd'hui, j'ai envie de me poser un peu plus, j'ai envie de construire des choses différentes, j'ai envie de gagner ma vie différemment. et puis j'ai envie de faire la place pour cette petite fille qui arrive et pour vivre ma maternité en étant présente. et en ayant du temps pour ça.

  • Speaker #0

    Et justement, sur cette partie, comme tu disais, plus intellectuelle, plus de transmission, ça va aussi avec ta fille, je trouve, avec la maternité, l'idée de j'ai envie de transmettre maintenant, de parler. Tu fais pas mal de conférences. Quel est le thème ? Qu'est-ce que tu as envie vraiment justement d'aborder ? Qu'est-ce que tu abordes dans ces moments-là ? Qu'est-ce que tu transmets lors de tes conférences, lors de tes prises de parole ?

  • Speaker #3

    Mes prises de parole en entreprise, principalement, elles sont vraiment centrées autour de la notion de... travail d'équipe, comment est-ce qu'on fait ?

  • Speaker #0

    En tout cas, nous, dans le cadre des records de parachutisme, comment est-ce que j'amène une équipe à performer malgré les difficultés, malgré le stress intense ? Parce que je me suis rendu compte que c'est ce qui était, dans mon expérience de vie parachutiste, le plus à propos et le plus proche de la réalité de l'entreprise aujourd'hui. Donc, c'était vraiment... Tu vois, je ne me suis pas lancée dans la conférence en me disant « ma vie, mon œuvre, qu'est-ce que je peux raconter aux gens ? » Mais j'ai vraiment été... par plein de questions et d'interviews parce que moi, le monde de l'entreprise, au départ, m'était quand même relativement étranger. J'ai fait des études de sciences humaines et après, je me suis enfui avec le cirque. Donc, j'étais quand même assez loin de ces préoccupations-là. Donc, j'ai beaucoup discuté avec des gens qui vivent ça quotidiennement et j'ai essayé de comprendre dans les problématiques qu'ils rencontraient qu'est-ce qui, moi, dans mon expérience, pouvait illustrer une façon de faire qui marche dans un contexte très spécifique mais qui, finalement, a beaucoup de points de commun avec celui de l'entreprise. Qu'est-ce que je pouvais aller extraire et partager ? Et donc, finalement, il s'est avéré que le contexte des records était celui qui était le plus à propos pour ça. Et donc, tu vois ce socle de raison dont on parlait tout à l'heure, c'est un de mes piliers importants, comment tu poses les bases, comment tu découpes un objectif, comment tu t'assures que tu vas pouvoir faire des choses en ayant assuré tes arrières. Il y a tout le côté de sécurité psychologique comment tu crées au sein d'une équipe les conditions qui font que les gens vont se sentir à l'aise. La confiance en soi, la confiance dans les autres, la confiance dans son management. Et puis la sécurité d'oser parler, d'oser pointer du doigt des choses. Et puis le troisième aspect qui est hyper important pour moi, qui est autour de ta vision, de tes valeurs. Comment tu vas rallier un groupe autour d'un objectif qui les dépasse un peu, qui dépasse les motivations individuelles, pour rentrer dans une motivation collective. Un des exemples dont je parle beaucoup en entreprise, c'est celui de Project 19, le dernier record du monde féminin. Comment, sur le papier, on avait un saut, un record qui allait être très difficile à battre, pour toutes les problématiques qu'on a évoquées tout à l'heure, de recrutement, de trouver suffisamment de femmes, avec le turnover de pratiques, pour pouvoir battre un record. Et en fait, on s'est ralliés autour d'un symbole qui était à l'époque, parce qu'on devait célébrer le centenaire de l'amendement 19 de la Constitution américaine, qui a donné le droit de vote aux femmes. On a rallié l'équipe autour de ça et comment on a puisé dans ce symbole-là qui sincèrement impliquait tout le monde. Toutes les personnes dans l'équipe se sentaient concernées par ça parce qu'on vivait encore les conséquences de ces combats-là. Et alors nous, c'était autour de 2020, personne ne remettait en cause encore le 19e amendement, même s'il a l'extrême droite américaine depuis un an ou deux. C'est moins évident. Oui, c'est quelque chose qui nous paraissait complètement... improbable est en train de se passer, comme quoi les combats ne sont jamais finis. Mais en tout cas, en ralliant l'équipe autour de ce symbole fort, on les a vraiment aidés à se dépasser et à faire en sorte que même dans des conditions très difficiles, elles soient allées chercher au plus profond d'elles-mêmes une motivation supérieure à simplement la motivation de rajouter une ligne prestigieuse sur un CV parachutiste. Et ça, j'en suis convaincue et c'est quelque chose qu'on a mis en place depuis... dans tous les records qu'on a organisés, notamment avec Amy et Sarah aux Etats-Unis, avec qui on organise des records mixtes, maintenant aussi. Record du monde mixte, moi record de France, là on prépare le prochain gros projet record d'Europe qui aura lieu dans deux ans, on vient juste de commencer les préparations de tout ça. Mettre la mixité au cœur de la formation, mais aussi au cœur du leadership, enfin, vraiment d'aligner nos valeurs avec notre pratique. Et aujourd'hui, moi, ce qui m'intéresse avec le parachutisme, c'est de l'utiliser comme un un peu un terrain d'expérimentation. de leadership pour essayer de décortiquer ce qui fonctionne chez nous. Et c'est vrai que cette double casquette de conférencière sur ces thèmes-là et d'organisatrice de ces événements, ça se nourrit l'un l'autre.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Continuer à être active dans mon sport, ça continue à me donner du terrain et des enseignements que j'intègre et que je mets à jour régulièrement mes conférences avec ce que j'apprends dans ce terrain-là. Mais en même temps, avoir cet intérêt intellectuelle de décortiquer le truc. Je prends de la hauteur. En fait, cette casquette de conférencière, elle m'a fait porter un regard analytique sur ce que j'avais fait jusqu'à présent dans le cadre de mon sport, alors qu'avant, on faisait les choses un peu à l'instinct, et puis on voyait ce qui marchait ou pas, mais on n'était pas vraiment dans une analyse très profonde de ça. Cette casquette de conférencière, elle m'a permis ce regard, et du coup, les deux activités se répondent vachement bien, donc c'est cool.

  • Speaker #1

    Et alors, c'est pas pour rien, du coup, que tu es une femme Forbes. 2025, j'ai envie de te dire, parce que vu tout ce que tu me dis, l'intérêt et l'inspiration que tu dégages est évidente. Qu'est-ce que ça évoque pour toi, ça ? Qu'est-ce que tu as envie d'en faire aussi ? Qu'est-ce que ça représente ?

  • Speaker #0

    C'est un sacré honneur, parce que quand je vois la liste des 39 autres nanas, je suis sacrément fière d'en faire partie. Et puis ça, c'est un tremplin, je l'espère, et c'est vrai qu'on a déjà créé des liens entre nous qui sont super chouettes. J'ai rencontré des femmes que j'aurais jamais rencontrées dans un autre... dans une autre circonstance. La force du réseau, quelle qu'il soit. La force du réseau, quelle qu'il soit. Et puis tu vois, on revient à cette notion de groupe de femmes, d'entre-soi féminin qui peut paraître et qui est parfois décriée et puis peut-être de plus en plus aujourd'hui.

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire, quand c'était les hommes qui se rejoignaient en réseau, on ne disait rien.

  • Speaker #0

    On ne disait rien, c'est sûr. Mais il y a beaucoup de puissance. Parce qu'il y a ce lien-là qui peut sembler externe qui en fait relie des gens qui Il y a déjà des choses très chouettes qui se sont passées dans ce réseau-là. J'ai hâte de voir la suite.

  • Speaker #1

    Oui, totalement. On arrive à la fin de cet épisode. J'ai quelques questions signatures à te proposer.

  • Speaker #0

    C'est parti.

  • Speaker #1

    Déjà, pour toi, agir, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Il y a une notion de mise en mouvement dans le verbe agir. Et il y a une phrase que j'aime beaucoup qui dit « La peur, elle ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant. » Et ça, c'est... Quelque chose dont je suis absolument persuadée. Quand quelque chose te fait peur, tu peux rester assis sur ton canapé pendant trois heures en y pensant dans tous les sens, en te demandant comment tu vas faire pour la dépasser. Il ne va pas se passer grand chose. Dès le moment où tu agis, dès le moment où tu te mets en mouvement, souvent cette peur-là, elle disparaît. Moi, je l'ai vécu de façon très intrinsèque, que ce soit dans le cadre du parachutisme ou le cadre des conférences aussi. Avant de monter sur scène, avant de sauter de l'avion, tu as super peur. Et en fait, dès que tu agis, dès que tu rentres en mouvement, dès que tu as sauté de l'avion, dès que tu as commencé tes premières phrases, la peur disparaît. Donc pour moi, agir, c'est la meilleure façon de faire disparaître tes peurs. Encore une fois, il ne faut pas le faire n'importe comment. Faites vos devoirs avant.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as un domaine d'activité où tu aimerais voir plus d'action ? Autre que ce qu'on vient d'aborder.

  • Speaker #0

    Écoute, je pense qu'un domaine d'activité dans lequel j'aimerais voir plus d'action, c'est la peur. plus d'action, c'est vraiment l'égalité homme-femme. Je suis persuadée, et notamment quand je regarde l'actualité, que si on avait plus de femmes en position de leadership, le monde s'en porterait mieux. J'ai lu récemment le très bon livre de Marie-Éloi, « Les femmes sauveront-elles le monde ? » Oui, mais pas tout seul. Elle est passée chez toi. Je suis vraiment convaincue de ça.

  • Speaker #1

    Elle est très intéressante et vraiment, elle montre l'intérêt de la mixité.

  • Speaker #0

    La puissance de la mixité. Donc, je pense que plus d'action dans ce sens-là, ça ferait du bien à nos sociétés.

  • Speaker #1

    Et alors, dernière question, est-ce que tu as une ou des figures d'inspiration que tu voudrais nous partager ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors, j'en ai beaucoup. Tu m'arrêtes quand il faut s'arrêter ? Alors, dans mon sport, c'est les deux femmes dont j'ai parlé tout à l'heure, Amy Chemelecki et Sarah Curtis, ces deux Américaines qui ont été mes mentors. et qui ont été les premières femmes que j'ai vues vivre de ce sport. Donc, c'est qui ont un peu ouvert l'horizon des possibles. Je me suis rendu compte en allant en Arizona pour la première fois à 22 ans que c'était possible et que ça ouvrait un peu la voie pour moi. Alors après, une autre femme qui est probablement la plus grande source d'inspiration, mais ça, c'est dans le domaine littéraire, c'est Marguerite Ursenar. Je suis une fan absolue de Marguerite Ursenar. Elle trouverait probablement ce mot absolument exécrable. mais c'est une figure d'écrivain qui me passionne je la lis et la relis régulièrement et religieusement avec plaisir et avec intérêt à chaque fois et c'est vraiment c'est mon inspiration absolue pour la littérature c'est absolument écrasant comme Panthéon parce que tu dis je ne peux jamais être à la hauteur d'une écriture comme celle-là mais c'est vraiment quelqu'un qui m'inspire énormément

  • Speaker #1

    Bon et donc on se retrouve quand là sur un prochain record ?

  • Speaker #0

    Alors voilà, le prochain gros projet, Parra, c'est ce record d'Europe qui aura lieu à l'été 2027. On a déjà commencé à mettre en place les entraînements pour 2026. Et là, je suis avec mes deux co-organisatrices, Anna Moxnes pour la Norvège et Sharon Arnoy, qui vit aux États-Unis, d'origine israélienne, qui sont dans mon équipe Joyrider. C'est vrai que je n'ai pas parlé de tout ça, mais je suis partie d'une équipe de nanas depuis une dizaine d'années. Donc là, on est sur la partie, justement, vision. Quelles sont les valeurs qu'on veut mettre derrière ce record ? Qu'est-ce qu'on veut illustrer avec ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas un record pour un record.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un record pour un record. On veut vraiment... L'exploit sportif est chouette, mais ce n'est pas ça qui nous motive. Et donc là, on est dans la phase d'alignement sur les valeurs qu'on veut mettre derrière ce projet-là. Donc c'est génial.

  • Speaker #1

    C'est génial, oui.

  • Speaker #0

    Les conversations sont longues et mouvementées parfois, mais c'est vraiment chouette. D'ici quelques mois, on va commencer à passer à la partie plus logistique. On va suivre ça. Je vais faire un petit building public, je pense, sur LinkedIn, sur tous ces sujets-là.

  • Speaker #1

    Avec un grand plaisir et grand intérêt. Merci beaucoup pour cet échange inutile. C'était un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Merci, Emilia.

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Merci d'avoir pris le temps de l'écouter. Et n'hésitez pas, si vous avez aimé, à le partager, à le commenter, à faire vivre la communauté Elsagis. Je vous retrouve très vite pour un nouvel épisode. Et n'oubliez pas que des lives sont aussi disponibles sur mon compte Instagram emily.b.sophrologue et que vous pouvez aussi retrouver toutes les informations de l'épisode sur le site du podcast www.elsagis.com. A très bientôt !

Description

“La peur ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant.”


L'épisode de demain accueille la championne du monde de parachutisme free fly, conférencière et désormais femme Forbes 2025, Domitille Kiger a passé plus de vingt ans à explorer le ciel !
Le vide, pour elle, n’a jamais été un espace de peur mais plutôt un lieu de liberté comme elle l'aime le souligner.


De 4000 mètres d’altitude à la scène des entreprises, elle a appris à transformer le risque en maîtrise, la peur en moteur, le collectif en force.


Dans cet épisode, elle me reçoit à un moment charnière : quelques jours avant d’accueillir son premier enfant.
Un entre-deux symbolique, où la championne de haut niveau s’apprête à redéfinir la notion même de performance, de rythme et d’équilibre.


Nous parlons de peur et de confiance, de leadership féminin et de mixité, de records du monde et de transitions intérieures.
De ces moments où il faut savoir lâcher prise pour continuer à s’élever.


Un épisode fort et apaisé à la fois, sur le courage, la transmission et l’art de continuer à voler, autrement.


Amy Chmielecki et sara curtis :

Deux parachutistes américaines basées en Arizona, pionnières du free fly et organisatrices des premiers records du monde féminins.
➤ Ce sont ses mentors, “ses mamans oiseaux”, celles qui lui ont appris à voler tête en bas et à organiser des records.

« Ce sont elles qui m’ont appris à dessiner une formation, à faire l’ingénierie du saut, à gérer le leadership de ces records. »


Cathy et Virginie Bouette et Karine Joly
➤ Championnes françaises de free fly, premières femmes à avoir été championnes du monde dans une discipline mixte.
➤ Domitille souligne leur rôle pionnier dans un sport encore très masculin.

« La première femme à être championne du monde, c’est Cathy Bouette, en 2008. Depuis, il y a eu Karine Joly en 2018. »


Anna Moxnes et Sharon Har-Noy
➤ Ses coorganisatrices actuelles dans l’équipe Joyrider et sur les records européens à venir.
➤ Domitille les décrit comme des partenaires de vision et de valeurs.

« On aligne nos valeurs avec notre pratique. C’est ce qui donne du sens à nos projets. »


Marie Eloy
➤ Fondatrice de Bouge ta Boîte, autrice de Les femmes sauveront-elles le monde ?
➤ Elle la cite comme une référence inspirante sur la mixité et le leadership féminin.

« Plus on aura de femmes en position de leadership, mieux le monde se portera. »


Marguerite Yourcenar
➤ Sa figure d’inspiration littéraire absolue.
➤ Domitille dit la relire “régulièrement et religieusement”.

« C’est mon inspiration absolue pour la littérature. C’est écrasant, mais tellement inspirant. »



Retrouvez toutes les informations sur www.ellesagissent.com

Retrouvez moi sur www.emilieberthet.fr

Sur mon Instagram Berthet_Emilie


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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Je suis Emilie Berthet Conférencière, productrice de podcasts, sophrologue et auteure, j’accompagne les organisations et les particuliers vers une meilleure compréhension de notre époque et à construire une société attentive aux enjeux humains. Femme Forbes 2025 et TEDx speaker.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Agir. J'ai choisi d'agir sans arrêt.

  • Speaker #1

    J'agis en enlevant mon t-shirt et en criant des slogans dans des endroits où je ne suis pas la bienvenue et à des gens qui ne sont pas forcément contents de me voir.

  • Speaker #2

    J'ai pas une action dont je suis fière, c'est je crois que toute action doit rendre fière.

  • Speaker #1

    J'ai pas de mots pour agir, c'est une action.

  • Speaker #0

    Bonjour Domitile.

  • Speaker #3

    Bonjour Émilie.

  • Speaker #0

    Merci d'être dans Elles agissent.

  • Speaker #3

    C'est un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Oui, moi aussi, je suis très, très contente. Alors, Domitille, tu es championne du monde de parachutisme, de saut synchronisé tête en haut. Est-ce que c'est bien ça ?

  • Speaker #3

    Alors, pas tout à fait.

  • Speaker #0

    Pas tout à fait. J'ai eu du mal à trouver, j'ai vu plusieurs thèmes, donc je préfère que tu me...

  • Speaker #3

    Alors, moi, je suis championne du monde de free fly, qui est une discipline artistique du parachutisme sportif. Donc, on n'est pas dans le parachutisme militaire, on est vraiment dans le sport. Et c'est un sport dans lequel tu as plein de disciplines différentes. Il y en a qui se passent. en chute libre, il y en a qui se passent sous voile et d'autres au moment du posé. Le free fly, c'est pendant la chute libre. En gros, c'est un peu comme du patinage artistique. Tu vas faire des manches de libre, donc des sauts de libre et des sauts d'imposé. Sur un saut d'imposé, toutes les équipes vont faire les mêmes figures et sont jugées sur la précision avec laquelle elles les réalisent. Et puis sur un saut de libre, tu crées 45 secondes pour créer la chorégraphie que tu veux. Et ça se passe en équipe de trois. Deux performeurs et un vidéomane. C'est les images que rapporte le vidéomane au sol qui servent au juge pour noter.

  • Speaker #0

    Merci de cette précision déjà. C'est depuis plus de 20 ans que tu fais partie de ces peut-être rares femmes, et tu vas me dire si je me trompe aussi ou pas, à défier la gravité. En tout cas, je n'ai pas vu beaucoup de femmes. Tu as hésité à un moment jeune entre ciel et terre, mais tu as choisi de faire du ciel ton espace d'équilibre. Tu jongles entre une totale maîtrise et une sensation de lâcher prise. Quand tu es là-haut, à quelques secondes du saut, qu'est-ce qui se passe en toi ? Est-ce que c'est le calme absolu ? Est-ce que c'est la concentration ? Parce qu'on est dans la rigueur aussi, dans la préparation. Qu'est-ce que tu ressens à ce moment-là ?

  • Speaker #3

    Alors, ça va pas mal dépendre des sauts. Je ne vais pas ressentir la même chose tout le temps. Déjà, tout au long de ma vie et de ma carrière. Les premiers sauts par rapport aux sauts d'aujourd'hui, évidemment, en termes de stress, par exemple. Ce n'est pas tout à fait pareil. avant mon premier saut avant mes premiers sauts j'avais beaucoup de peur, une peur assez intense qui se manifeste par le cœur qui s'accélère, la respiration qui raccourcit, les pensées qui tournent un peu en boucle dans ta tête en te disant « Pourquoi je suis là ? » Et ça, évidemment, ça disparaît au fur et à mesure. Il n'y a pas vraiment un « on-off » . Tu ne passes pas de la terreur totale à la décontraction la plus absolue d'un saut à l'autre. On va dire que la peur diminue au fur et à mesure que tu améliores ta pratique, que tu comprends l'environnement, que tu comprends les enjeux. Et puis que tu fréquentes des gens qui font la même chose que toi, ça peut paraître idiot aussi, mais quand tu débarques dans quelque chose que tu n'as jamais fait et que tu ne connais personne qui le fait, ta méconnaissance de l'environnement accentue ta peur. Quand tu passes du temps avec que des gens qui font la même chose que toi, ça désacralise un peu l'action. Et puis le parachutisme en particulier, qui a cette image très dangereuse, trompe la mort. En fait, tu te rends compte à la pratique que ce n'est pas du tout le cas. Et donc, du coup, ça aide aussi à faire baisser un peu la peur entre la réalité de la pratique et ce que tu t'en étais imaginé.

  • Speaker #0

    Oui. Et puis, au moment où tu sautes, il y a tellement de préparation derrière que tu es dans un état peut-être qui n'est même plus au-delà de la peur, qui est peut-être dans ton objectif quand tu réalises, quand tu veux battre un record, etc.

  • Speaker #3

    Oui. Alors, les records, c'est encore autre chose. Un saut de record ou un saut de compétition. Là, la peur est à nouveau très intense avant de sauter, mais ce n'est pas tellement de la peur, c'est plus du track de performance. C'est la même chose qu'avant de monter sur scène pour une conférence. C'est la peur de contre-performer. Alors que tes premiers sauts, tu es dans une peur plus viscérale quand même. Ce n'est pas ultra naturel de se jeter d'un avion en parfait état de marche. Je pense d'un point de vue de l'évolution, c'est quand même assez récent. Donc, il y a quand même tout dans ton cerveau qui s'allume en disant non, non, non, mais pourquoi ? Et ce que tu dis est intéressant, le fait qu'il y ait toute cette préparation avant, c'est clairement le socle de raison sur lequel tu t'appuies pour pouvoir lâcher prise. Parce que lâcher prise sans avoir fait ce travail préliminaire, ce serait de l'inconscience, ce serait très dangereux, ce serait complètement idiot. C'est vrai qu'avant de faire un premier saut, tu vas te former avec des moniteurs diplômés d'État, tu vas utiliser du matériel qui est homologué, tu sautes d'un avion qui est aussi homologué pour ça. Donc tu as quand même tout un socle réglementaire et raisonnable et intelligent qui fait que tu peux pratiquer. Si tu ne fais pas ça, tu ne vas pas monter dans un avion aléatoire, casser la porte avec ton pied et sauter sans parachute. Tu peux le faire, mais du coup, tu meurs si tu fais ça. Tu veux le pratiquer comme sport, c'est dans un cadre qui est quand même très encadré. Et donc, ça, ça te permet d'arriver au moment de basculement en ayant cette confiance que tu peux le faire. Malheureusement, la mauvaise nouvelle, c'est que ce socle de raison, il ne va pas t'enlever la peur. Tu vas quand même, sur les premiers sauts, être très stressé, très nerveux. Et il faut trouver en toi les ressources pour basculer malgré cette peur-là. Pour moi, ce socle de raison, c'est l'étape numéro un. Elle est indispensable, elle est primordiale pour prendre des risques sans y laisser des plumes. Mais il faut quand même ensuite avoir ce petit moment de déconnexion. Et c'est vrai que quand on a réussi à le trouver, là, dans le cadre très anecdotique du parachutisme, mais en fait, quand tu l'as trouvé dans ce cadre-là, moi, ça me l'a fait à titre personnel, mais je l'ai constaté chez beaucoup de gens. derrière. Quand tu t'es rendu compte que tu étais capable de ça dans ce contexte-là, tu vas être plus facilement capable de l'être dans d'autres contextes aussi. Et c'est vrai que c'est un sport qui, moi, a eu une influence très forte sur la façon dont j'ai vécu ma vie derrière. Mais je le vois dans les gens à qui j'enseigne, c'est souvent la même chose. On a tous des histoires assez similaires, en fait. Ça booste bien la confiance en soi.

  • Speaker #0

    Dans une conversation qu'on avait eue hors micro, tu m'avais dit, enfin, tu avais dit une fois que tu n'avais pas vraiment ce syndrome de l'imposteur. Est-ce que c'est grâce aussi à ça ?

  • Speaker #3

    Oui, je pense.

  • Speaker #0

    En tout cas, peut-être est-ce que tu as travaillé sur un dépassement de soi de différentes manières que tu peux appliquer dans le quotidien en fait ?

  • Speaker #3

    Alors, je n'ai pas vraiment l'impression d'avoir travaillé spécifiquement dessus. Mais par contre, je suis convaincue effectivement que cette vie aérienne et ces choix que j'ai faits et cette pratique assidue du parachutisme a contribué à me donner confiance en moi. Et c'est vrai que le syndrome de l'imposteur, c'est quelque chose dont on parle beaucoup aujourd'hui et dont je vois sincèrement et concrètement beaucoup de gens et beaucoup de femmes, on ne va pas se mentir, s'en déclarer victime. Et moi, je ne le ressens pas parce que j'ai l'impression d'avoir une bonne estimation de où je me place pour une activité particulière. et ne pas avoir le syndrome de l'imposteur ça ne veut pas dire avoir une surconfiance pas du tout, et que ce soit dans mon sport ou que ce soit dans d'autres activités que j'ai lancées derrière En fait, quand je débute quelque chose auquel je ne connais rien, je ne me sens pas comme une impostrice, je me sens comme une débutante. Et donc, j'accepte que le statut de débutant implique une médiocrité pratique. Quand tu ne sais pas faire un truc, tu n'es pas bon. Et ce n'est pas se sentir imposteur, c'est juste que c'est vrai, tu n'es pas bon, donc il faut apprendre. Ça demande du travail. Du travail, ça demande du temps. Et seulement avec le temps et l'expérience, tu vas arriver dans une phase de légitimité. Mais donc, je ne me sens pas imposteur quand je suis au début du chemin. Je suis juste débutante. Et puis, une fois que j'ai pris le temps et que j'ai fait les efforts pour arriver au bout du chemin, je ne suis pas une imposteur. Je suis arrivé là où mon travail m'a amené. Et puis après, le chemin entre les deux, il faut jauger un peu où t'en es. Mais voilà, je ne me sens pas impostrice parce que soit je suis débutante, soit je suis apprenante, soit je suis confirmée.

  • Speaker #0

    Ce syndrome, il peut être aussi impactant avant même de commencer. Tu vois, il peut te dire de ne pas y aller. et ça euh Ça, tu l'as travaillé aussi, peut-être, en te disant... Ça, c'est la confiance en soi. Je me force à y aller. Tu vois, j'y vais quand même. J'y vais, mais j'ai peur, mais j'y vais quand même. Je dis oui avant de... Tu sais, quand parfois, on a des propositions... Je ne sais pas, je n'ai jamais fait. Je dis oui, et après, j'apprends. Et j'apprends pour le faire. C'est ça aussi la une des clés.

  • Speaker #3

    Complètement. Et tu as raison. Je pense que le parachutisme m'a vachement aidé avec ma capacité à me dire j'y vais.

  • Speaker #0

    Bah ouais. Toi, tu n'arrêtes pas de te lancer. tu vas te dire ce truc de se lancer et d'ailleurs tu dis le vide ne fait pas peur il rend libre J'avais lu ou entendu ça. Est-ce que tu peux revenir sur cette pensée ? Qu'est-ce que tu ressens en disant ça ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, cette notion de vide, qui est ce qu'on redoute souvent le plus quand on imagine un saut en parachute, pour moi, une des leçons qui a été très fondatrice avec mon premier saut, c'est de me rendre compte que je n'étais pas du tout dans du vide. Alors, je sais que les gens souvent me disent « mais de quoi tu parles ? Tu sautes dans le vide, il n'y a rien autour de toi » . Alors oui, c'est vrai, mais en fait, on n'a pas du tout une impression de vide. Parce que quand on sort de l'avion, on est tout de suite dans un truc qui s'appelle le vent relatif. On ne va pas rentrer dans des grands détails techniques, mais en gros, c'est le vent subi par un objet en mouvement. C'est comme quand tu mets ta main en dehors de la voiture sur l'autoroute. Tu as une perception. Tu sens une pression sur ta main. Effectivement, si tu la regardes juste à main, elle est dans du rien, parce que le vent, ça ne se voit pas. Mais en termes de sensation, tu as une pression forte et plus la vitesse est rapide de la voiture ou de ta propre chute. En parachutisme, on est à peu près à 200 km heure si on est à plat. 300 km heure si on est à temps bas. Donc la densité, la texture, elle est quand même assez concrète et solide. Donc en fait, tu n'as pas du tout l'impression d'être dans du vide. Et tu as une influence sur ça. C'est pour ça qu'on arrive à faire des figures et à se déplacer et à voler relativement les uns par rapport aux autres avec précision. C'est parce que notre corps peut, comme te déplacer dans de l'eau, tu peux agir sur cet élément. Donc tu n'es pas dans du rien, tu es dans quelque chose que tu apprends à maîtriser. plus ou moins de grâce au début, ça prend quand même un peu de temps avant d'y arriver, mais t'es pas dans du vide. Et donc cette notion de te jeter dans le vide, en fait tu te rends compte seulement après l'avoir fait que c'était pas ce que tu croyais. Et ça aussi c'est quelque chose qui m'a donné je pense, je sais pas si c'est du courage, mais en tout cas une propension à être capable d'aller vers l'inconnu parce que ma première grosse expérience d'aller vers l'inconnu s'était avérée réconfortante. Les peurs que j'avais autour de ça, c'était avéré fausse. Et ce que j'avais découvert de l'autre côté de ces peurs, c'était avéré absolument fantastique à vivre. Donc, ça m'a donné des billes pour être capable de le faire dans d'autres contextes après.

  • Speaker #0

    Je voudrais revenir quand même sur ton parcours, parce qu'entre plaisir et devenir championne du monde, le plaisir ou la découverte de sautée... Qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #3

    J'ai un caractère un peu obsessionnel, on ne va pas se mentir. Quand j'aime un truc, j'aime vraiment beaucoup un truc et j'ai envie de faire que ça. Donc, les premières années de ma pratique, déjà, elles étaient quasiment qu'estivales parce que j'ai commencé, j'étais au lycée, après j'étais à la fac. Donc, je n'avais pas vraiment d'argent pour pratiquer. Et puis, en bonne parisienne qui se respecte, je n'avais pas le permis. Donc, à part l'été, une fois qu'on m'avait posé quelque part, je n'allais pas nulle part. Et donc, j'ai rapidement commencé à travailler les saisons d'été dans un centre de parachutisme pour pouvoir me payer mes sceaux. Et puis surtout, pour faire partie d'un groupe, pour faire partie d'une communauté. J'avais vraiment envie d'intégrer cet univers-là. Et le travail, même saisonnier, m'avait paru la meilleure façon de le faire. Et puis rapidement, forcément, j'avais 17, 18, 19 ans. Dans les magazines de para, tu vois les stars, les gens qui sont champions du monde. Et tu te dis, c'est complètement incroyable ce qu'ils font. à la fois visuellement et techniquement dans le sport, mais aussi les vies qu'ils mènent. Moi, j'étais absolument fascinée par ça.

  • Speaker #0

    C'est quoi ?

  • Speaker #3

    C'est des vies de liberté où tu passes, tu vas une semaine dans un pays, la semaine d'après dans un autre pays, où tu enseignes ta discipline, tu fais des compétitions. Et en fait, moi, je trouvais ça extrêmement attirant. J'avais vraiment envie de ça. Alors à côté, j'avais quand même toujours ma vie à Paris d'étudiante. Moi, j'ai fait des études d'histoire à la Sorbonne. J'ai fait un master en audiovisuel toujours à Paris. donc Au début, j'étais quand même sur des rails un peu plus classiques parce que c'était les seuls modèles que j'avais autour de moi. Mais le parachutisme commençait à me montrer d'autres modèles. Et je dois t'avouer que ces modèles-là me faisaient vachement plus kiffer que le très jeune adulte. Et donc, je me suis dit que la compétition, ça va être un excellent moyen à la fois de me perfectionner techniquement, parce que quand tu te concentres sur une discipline avec le même petit groupe de personnes dans un cadre d'entraînement, tu vas progresser beaucoup. plus vite que si juste tu fais des sauts à la cool le week-end avec tes copains, mais ça change un peu tout le temps et puis il n'y a pas vraiment de notion d'entraînement ou d'excellence. Donc j'avais à la fois envie de me perfectionner dans ma discipline, parce qu'en fait, mieux tu sais voler, plus c'est agréable de voler. Plus tu arrives à te déplacer instinctivement dans l'air, plus la sensation est agréable.

  • Speaker #0

    Voilà le moment. Exactement.

  • Speaker #3

    Donc il y avait à la fois ce côté purement sportif et technique. Mais il y avait aussi très fortement cette envie d'accéder à un mode de vie, à une communauté, parce que c'est un tout petit sport. Et donc, forcément, les gens qui arrivent au sommet de leur sport dans leur pays et ensuite au niveau mondial, ils se connaissent tous et ils voyagent ensemble et ils font des événements ensemble. C'est un petit monde, c'est une petite communauté. Et donc, moi, j'avais envie d'intégrer cet univers-là. Donc, ça a été un fort attrait. Donc j'ai commencé, j'ai monté une équipe avec deux copains. au début de façon, voilà, en se disant que, bon, on ne rêvait même pas d'être champion du monde, on en était à des années-lumières. Mais en fait, ça a été finalement assez vite parce qu'on a eu un bon timing, on est arrivé à un moment où les équipes de France de l'époque, qui étaient bien meilleures que nous, mais arrêtaient la compétition. Donc on a été repérés par la Fédération française de parachutisme qui nous a intégrés à son système. Alors d'abord, tu rentres en équipe Espoir et puis après en équipe de France et puis qui te soutiennent. qui te paye des sauts d'entraînement, qui te donne un coach, qui te donne un cadre dans lequel progresser. Donc moi, je suis très reconnaissante au système français qui m'a vraiment permis d'exploser en quelques années. Et puis, je me suis retrouvée dans cette espèce d'ascenseur. Après,

  • Speaker #0

    c'était parti. Je vais revenir à ce que je disais au tout début. J'aimerais que tu me donnes ton œil et que tu précises des choses. Je parlais de la place de la femme. En tout cas, moi, j'avais l'impression qu'elle n'avait pas beaucoup. Alors, ce que je voulais préciser, c'est Merci. Il y en a dans le record, etc. Tu le dis bien. Mais déjà, en termes de visibilité, alors déjà, ce n'est pas un sport qui est très visible pour le grand public. Il est aussi grâce à toi, en fait. En tant que femme, tu le rends aussi visible. J'aimerais que tu nous expliques aussi quelle a été cette place de la femme, si tu vois une évolution entre le début et maintenant, toi, personnellement, et de manière générale. Et qu'est-ce que ça peut aussi évoquer de plus large, plus politique, etc. Grande question.

  • Speaker #3

    Oui, alors c'est vrai qu'on n'est pas très nombreuses. Je pense que... Il doit y avoir, dans la pratique générale en France, je n'ai plus les chiffres précis en tête, mais il y a moins de 20% de femmes qui pratiquent. Quand on tombe dans des disciplines de spécialité comme la mienne, le free fly, si on regarde le nombre de brevets liés au free fly en France, je crois qu'on est même à moins de 15%, entre 12 et 15%. Et ça, c'est assez mondial. On va dire qu'il y a des pays où il y en a moins. Il ne doit pas y avoir beaucoup de pays où il y en a plus. On est à peu près dans cet ordre de grandeur. Donc, ce n'est clairement pas un sport féminin. Et là, il y aurait des études, je pense, très intéressantes à faire sur le sujet. Pourquoi est-ce que c'est un sport qui attire moins les femmes, qui garde moins les femmes ? Il y a beaucoup de femmes qui arrêtent après la maternité. Ah oui, c'est intéressant. Il y a quelques études qui sont faites un peu sur ces sujets-là, mais je pense qu'il y a encore de quoi creuser. Je pense que ça a beaucoup à voir avec la notion du rapport au risque, avec la notion de confiance en soi. Il y a des choses intéressantes à explorer de ce côté-là. et dans le haut niveau il y en a en fait plus un peu plus Un peu comme en entreprise ou en politique, généralement, plus tu montes dans les strates, moins t'as de nanas. Mais il y a des exceptions. Et en France, on a de très jolies exceptions. La première femme à être championne du monde, parce que moi, ma discipline, le free fly, elle est mixte. Techniquement, il n'y a pas de séparation homme-femme. Alors, il y a très peu de femmes, mais moi, j'étais en équipe avec deux garçons. Et l'année où j'ai gagné à Dubaï, où il y avait à peu près 23 pays représentés, Il devait y avoir 5 ou 6 nanas au total dans les équipes, donc il n'y en avait pas beaucoup.

  • Speaker #0

    En tout ?

  • Speaker #3

    En tout, oui. Mais moi, sur la première marche, et sur la troisième marche du podium, l'autre équipe de France, qui avait deux femmes, Virginie et Cathy Boit, Cathy Boit qui a été la toute première femme à être championne du monde de Free Fly en 2008. Depuis, il y en a eu deux autres, Karine Joly en 2018, qui est aussi une Française, et puis Anna Moxnes. pour la Norvège qui a gagné en 2021, je crois. Donc, il y a quand même régulièrement eu des femmes ces dernières années dans des équipes mixtes à chaque fois. Donc, messieurs, écoutez bien. Mais en fait, c'est un sport où les différences biologiques n'ont pas d'importance parce qu'il y a un minimum syndical de forme physique, d'explosivité, de gainage et tout, mais c'est quand même principalement un jeu mental. Donc le fait de physiquement être limité parce que tu peux soulever ou ta puissance cardiovasculaire n'a pas d'importance. À ce moment-là,

  • Speaker #0

    dans la pratique.

  • Speaker #3

    En tout cas, on n'arrive pas dans les strates tellement extrêmes de ce type de performance que ça joue pour la pratique du parachutisme. Donc sur le papier, c'est un sport très égalitaire. Mais tu te rends compte quand même qu'il y a beaucoup moins de femmes dans ces positions-là. Et toi,

  • Speaker #0

    ta perception par rapport à ton parcours ?

  • Speaker #3

    Personnellement, dans mon parcours, je n'ai jamais l'impression d'en avoir souffert, moi. Mais j'ai bien conscience d'être plutôt une exception qu'une règle, de la même façon que j'ai eu la chance de traverser cette existence sans avoir été inquiétée par des sujets de harcèlement. J'ai une conscience bien aiguë de par mes amitiés, mes relations, que c'est une chance et c'est une rareté plus qu'une règle. Ce qui ne m'a pas empêché de constater chez les autres que ce n'était pas du tout le cas. Et notamment... dans le cadre des records de grande formation qui est un sujet qui, moi, depuis une dizaine d'années maintenant, est vraiment au centre de ma pratique. Alors, les records de grande formation, ça consiste à construire la plus grande figure accrochée les uns aux autres en chute libre. Donc, on a à peu près une minute où on sort de plein d'avions différents et on se rejoint pour former une espèce de grosse rosace. Et donc, établir un record, battre un record, ça veut dire construire une figure avec plus de personnes que le dernier record. Donc, c'est pour ça qu'on dit des chiffres. Par exemple, si le dernier record, il y avait une figure à 50 personnes, il faut que tu fasses... au minimum 51 personnes derrière. Et dans cet exercice-là, il y avait beaucoup moins de femmes, et surtout pendant très longtemps, et moi toutes les années où j'ai commencé d'abord à participer à ces records, avant de commencer à les organiser, c'était que des hommes en position de leadership. C'était des hommes qui les organisaient, c'était des hommes qui sélectionnaient les équipes pour participer. Et là, je me suis rendu compte que les femmes avaient vraiment beaucoup moins d'opportunités. Souvent jugées comme plus fragiles à la fois dans leur vol, on avait l'impression qu'à la moindre... petites secousses, elles allaient faire pchit et sortir de la formation, qu'elles arrivaient plus lentement, qu'elles étaient plus prudentes, mais aussi psychologiquement, qu'elles allaient craquer sous la pression, qu'elles seraient moins solides au moment où il faut performer, parce que, tu vois, quand je te dis tout à l'heure qu'il faut que, si tu dis tu vas faire un 100, il faut que 100 personnes soient là. Si tu en as 99 qui sont accrochées, mais qu'il y en a une qui n'est pas là, le record n'est pas validé. Donc la pression individuelle, elle est super forte. Et donc il y avait cette assumption un peu que... les femmes allaient moins gérer ce genre de pression et il y a un groupe de nanas aux Etats-Unis qui fort de cette constatation ont décidé qu'elles allaient commencer à organiser des records féminins donc avec que des nanas pour permettre un contexte d'entraînement d'opportunité, de prise de compétences et de vraiment technique mais aussi de prise de confiance pour leur permettre de s'entraîner de leur dire que c'est possible Donc moi, ces deux femmes-là, qui s'appellent Amy Chemelecki et Sarah Curtis, deux Américaines basées en Arizona, ça a été mes mentors au début. Ça a été mes premières coachs.

  • Speaker #0

    Ah, t'es passée par elles, en fait. Je suis passée par elles, oui,

  • Speaker #3

    tout à fait. En fait, moi, en 2008, j'avais 22 ans ou un truc comme ça. Je suis partie quelques mois aux Etats-Unis pour faire un gros coup de progression dans ma vie avant de commencer la compétition. C'est là que je les ai rencontrées. Elles ont fait partie des premières femmes qui m'ont appris à voler tête en bas. Vraiment, très littéralement, c'était mes mamans oiseaux. C'est devenu mes amis et mes mentors. C'est elles qui m'ont proposé d'intégrer l'équipe d'organisation des records féminins en 2013. Et c'est là que j'ai commencé à apprendre. C'est elles qui m'ont appris très concrètement à dessiner une formation, faire l'ingénierie du saut, qui m'ont vraiment montré les ficelles de ce genre d'exercice et qui, par la suite, ont vraiment fait évoluer la façon dont le leadership de ces records ont été organisés. Donc, c'est via elles que j'ai fait ça, que je suis rentrée là-dedans et je me suis rendue compte que parmi les participantes, en fait, ça changeait vraiment la donne. Ça permettait de donner confiance aux femmes. ça leur permettait de s'entraîner et ensuite de se sentir plus légitime pour aller postuler au record mixte.

  • Speaker #0

    Il a quand même fallu ça, en fait, finalement.

  • Speaker #3

    Il a fallu ça. Alors que moi, j'étais très, au début, j'avais des idées un peu arrêtées sur, comme le parachutisme, c'est un sport mixte, il ne doit pas y avoir de séparation.

  • Speaker #0

    Finalement, même si c'était presque inconscient, les femmes aussi n'y allaient pas.

  • Speaker #3

    J'ai vraiment changé d'avis sur ce sujet-là, en fait, en constatant autour de moi les... les conséquences et la réalité de ce que vivaient certaines femmes et comment ce contexte exclusivement féminin leur permettait ensuite de « ressauter dans le grand bain » et que ça leur donnait vraiment une force pour le faire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu trouves que ta visibilité actuelle aide à certaines femmes ? Est-ce qu'on te contacte par exemple en te demandant, en te disant ? Est-ce que tu penses que ça a été contribué ?

  • Speaker #3

    J'espère. et en fait souvent... On ne s'en rend pas compte parce que quand on est dans une logique soit de communication sur des réseaux sociaux ou des podcasts ou des interviews télé, on donne quelque chose, on exprime quelque chose, mais c'est assez unilatéral. Et en fait, là, c'est vrai que depuis un ou deux ans, je reçois des messages en privé ou parfois je croise des gens qui me disent « tu sais, à tel endroit, tu as dit ça et derrière, j'ai été faire ça et ça m'a aidé » . et ça pour moi le plus beau cadeau qu'on puisse me faire. Faut me rendre compte que ce que j'ai dit ou ce que j'ai représenté a pu aider quelqu'un à se dire « bah ouais, ouais, je peux le faire » . Quand on me dit un truc comme ça, je vais me coucher le soir en me disant que j'ai pas raté ma journée.

  • Speaker #0

    Je répondis sur ce que tu as dit tout à l'heure autour de la maternité. Parce que c'est une transition toute trouvée puisque tu attends ton premier enfant.

  • Speaker #3

    Ah, c'est ça mon soupeux !

  • Speaker #0

    Elle nous a laissé le temps de faire l'interview. Mais effectivement, voilà, d'ici peu, sur cette notion de maternité que certaines femmes arrêtaient, etc. Est-ce que toi, donc déjà, là, tu t'es arrêtée depuis un moment. Là, voilà,

  • Speaker #3

    la grossesse n'est pas extrêmement compatible avec le parachutisme.

  • Speaker #0

    Donc déjà, comment tu te sens par rapport à cet arrêt ? Parce que finalement, c'est aussi quelque chose qu'un homme ne vit pas.

  • Speaker #3

    Non, clairement pas.

  • Speaker #0

    Et est-ce que justement, ce rapport à la maternité, tu t'y projettes autour de... de cette notion qu'on parlait de risque, de saut, même d'intensité, de rythme, etc. Ou est-ce que tu verras au moment voulu ?

  • Speaker #3

    C'est sûr qu'en tant que femme et sportive, on ne vit pas la maternité de la même façon qu'un homme. Je sais que toutes mes années en équipe de France, on était dans un collectif avec une dizaine de personnes. Et sur ce collectif-là, il y a trois de mes potes, dont un de mes coéquipiers, qui ont eu des enfants. Pendant qu'on était en équipe de France, pendant nos grosses années d'entraînement et de compétition. Mais ils ont eu des enfants parce qu'ils avaient des femmes qui étaient là pour s'en occuper, pour les faire déjà, et après pour s'en occuper, et qui les laissaient et qui les soutenaient dans leur carrière sportive pour pouvoir voyager beaucoup et être beaucoup absent. Moi, clairement, ça n'aurait pas du tout été compatible, ça n'aurait pas été possible pour moi en tant que femme. C'est aussi pour ça que dans quelques jours, je vais avoir mon premier enfant, j'ai 40 ans et j'ai une maternité tardive parce que ma carrière n'a pas été compatible avec une maternité plus tôt. Alors après, comment est-ce que ça, ça va impacter mon rapport au risque et mon rapport au sport ? J'ai bien quelques théories, mais je reste assez prudente sur le fait de les exprimer, parce que je pense qu'entre ce qu'on s'imagine et ce qu'on vit, il y a un fossé, et que je ne voudrais surtout pas, en étant enregistrée, dire des grandes théories. Non, non, bien sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que tu te projettes sur une éventualité ?

  • Speaker #3

    Mais par contre, c'est sûr que ma pratique va changer. Après, c'est aussi une question de phase de vie, c'est-à-dire que pendant 20 ans, J'ai quand même été extrêmement monomaniaque sur le parachutisme. Je l'ai vraiment vécu à fond avec beaucoup d'intensité, ce qui était ce que je cherchais et ce que je désirais. Donc, parfaitement aligné avec ce que je voulais construire sur cette phase de vie, on va dire de 20 à 40. Là, de 40 à 60, j'ai d'autres ambitions aussi plus intellectuelles, plus entrepreneuriales qui donc me demandent du temps, de la concentration et des efforts. Et donc, on ne peut pas se disperser non plus dans trop de choses. En dehors même de la maternité, il est certain que la phase de vie qui m'attend va être moins tournée autour du parachutisme. Par contre, le parachutisme ne va pas en être exclu. Ce que j'ai décidé pour le moment, c'est de me concentrer vraiment sur les records. Parce que c'est là qu'est, je pense, ma zone de génie dans le parachutisme. C'est là que je suis, je pense, la meilleure. Et c'est le domaine dans lequel je pense pouvoir le mieux contribuer. Et puis, c'est aussi ce qui me fait kiffer. J'adore l'exercice, j'adore la complexité. intellectuelle, d'ingénierie de saut, humaine, qui est vraiment... qui doit faire faire un truc super difficile et super stressant à un groupe de gens. Et tu as un ou deux ans pour mener ce projet. C'est passionnant, j'adore ça, j'adore les gens avec qui je le fais. Donc, j'ai vraiment envie de me concentrer sur ça. Je vais faire moins de coaching individuel parce que je passe aussi un peu à autre chose dans ma vie. Aujourd'hui, je me conseille de monter une soufflerie à l'entrée du Futuroscope qui s'appelle Zero Gravity. J'ai monté il y a deux ans ma boîte pour encadrer les conférences que je fais en entreprise.

  • Speaker #0

    On va en parler, mais c'est vrai que c'est intéressant aussi de se dire que tu es OK avec une phase de ta vie qui est potentiellement terminée, en tout cas qui va prendre une autre tournure et que tu y vas avec assez de sérénité parce que pas de regrets, tu l'as fait et que la vie, c'est aussi plusieurs étapes. Et ça, c'est extrêmement inspirant aussi parce que parfois, on s'accroche à des choses qui ne sont plus en fait, qui vont être différentes.

  • Speaker #3

    Je suis vraiment à l'aise avec ça parce que j'ai... J'ai vécu cette phase de vie vraiment comme je l'ai voulu et vraiment pleinement. Donc, ce switch-là, il est désiré, il n'est pas subi. Et c'est vrai que j'avais une conversation il y a quelques temps avec une de mes copines qui me disait que moi, je faisais ma crise de la quarantaine à l'inverse de tout le monde. C'est-à-dire que plein d'amis, tu vois, parisiennes ou avec qui je connais depuis l'adolescence, qui ont fait des études, qui ont tout de suite eu un job, un vrai métier, comme diraient mes parents. Et puis qui, autour de la quarantaine, se disent « j'ai envie de faire autre chose, j'ai envie de me barrer, j'ai envie de faire ci, j'ai envie de faire ça » . Et en fait, moi, j'ai fait pendant 20 ans vraiment l'électron libre à vivre hyper intensément cette vie un peu qui peut sembler déraisonnable, mais qui, moi, m'a absolument comblée. Et du coup, aujourd'hui, j'ai envie de me poser un peu plus, j'ai envie de construire des choses différentes, j'ai envie de gagner ma vie différemment. et puis j'ai envie de faire la place pour cette petite fille qui arrive et pour vivre ma maternité en étant présente. et en ayant du temps pour ça.

  • Speaker #0

    Et justement, sur cette partie, comme tu disais, plus intellectuelle, plus de transmission, ça va aussi avec ta fille, je trouve, avec la maternité, l'idée de j'ai envie de transmettre maintenant, de parler. Tu fais pas mal de conférences. Quel est le thème ? Qu'est-ce que tu as envie vraiment justement d'aborder ? Qu'est-ce que tu abordes dans ces moments-là ? Qu'est-ce que tu transmets lors de tes conférences, lors de tes prises de parole ?

  • Speaker #3

    Mes prises de parole en entreprise, principalement, elles sont vraiment centrées autour de la notion de... travail d'équipe, comment est-ce qu'on fait ?

  • Speaker #0

    En tout cas, nous, dans le cadre des records de parachutisme, comment est-ce que j'amène une équipe à performer malgré les difficultés, malgré le stress intense ? Parce que je me suis rendu compte que c'est ce qui était, dans mon expérience de vie parachutiste, le plus à propos et le plus proche de la réalité de l'entreprise aujourd'hui. Donc, c'était vraiment... Tu vois, je ne me suis pas lancée dans la conférence en me disant « ma vie, mon œuvre, qu'est-ce que je peux raconter aux gens ? » Mais j'ai vraiment été... par plein de questions et d'interviews parce que moi, le monde de l'entreprise, au départ, m'était quand même relativement étranger. J'ai fait des études de sciences humaines et après, je me suis enfui avec le cirque. Donc, j'étais quand même assez loin de ces préoccupations-là. Donc, j'ai beaucoup discuté avec des gens qui vivent ça quotidiennement et j'ai essayé de comprendre dans les problématiques qu'ils rencontraient qu'est-ce qui, moi, dans mon expérience, pouvait illustrer une façon de faire qui marche dans un contexte très spécifique mais qui, finalement, a beaucoup de points de commun avec celui de l'entreprise. Qu'est-ce que je pouvais aller extraire et partager ? Et donc, finalement, il s'est avéré que le contexte des records était celui qui était le plus à propos pour ça. Et donc, tu vois ce socle de raison dont on parlait tout à l'heure, c'est un de mes piliers importants, comment tu poses les bases, comment tu découpes un objectif, comment tu t'assures que tu vas pouvoir faire des choses en ayant assuré tes arrières. Il y a tout le côté de sécurité psychologique comment tu crées au sein d'une équipe les conditions qui font que les gens vont se sentir à l'aise. La confiance en soi, la confiance dans les autres, la confiance dans son management. Et puis la sécurité d'oser parler, d'oser pointer du doigt des choses. Et puis le troisième aspect qui est hyper important pour moi, qui est autour de ta vision, de tes valeurs. Comment tu vas rallier un groupe autour d'un objectif qui les dépasse un peu, qui dépasse les motivations individuelles, pour rentrer dans une motivation collective. Un des exemples dont je parle beaucoup en entreprise, c'est celui de Project 19, le dernier record du monde féminin. Comment, sur le papier, on avait un saut, un record qui allait être très difficile à battre, pour toutes les problématiques qu'on a évoquées tout à l'heure, de recrutement, de trouver suffisamment de femmes, avec le turnover de pratiques, pour pouvoir battre un record. Et en fait, on s'est ralliés autour d'un symbole qui était à l'époque, parce qu'on devait célébrer le centenaire de l'amendement 19 de la Constitution américaine, qui a donné le droit de vote aux femmes. On a rallié l'équipe autour de ça et comment on a puisé dans ce symbole-là qui sincèrement impliquait tout le monde. Toutes les personnes dans l'équipe se sentaient concernées par ça parce qu'on vivait encore les conséquences de ces combats-là. Et alors nous, c'était autour de 2020, personne ne remettait en cause encore le 19e amendement, même s'il a l'extrême droite américaine depuis un an ou deux. C'est moins évident. Oui, c'est quelque chose qui nous paraissait complètement... improbable est en train de se passer, comme quoi les combats ne sont jamais finis. Mais en tout cas, en ralliant l'équipe autour de ce symbole fort, on les a vraiment aidés à se dépasser et à faire en sorte que même dans des conditions très difficiles, elles soient allées chercher au plus profond d'elles-mêmes une motivation supérieure à simplement la motivation de rajouter une ligne prestigieuse sur un CV parachutiste. Et ça, j'en suis convaincue et c'est quelque chose qu'on a mis en place depuis... dans tous les records qu'on a organisés, notamment avec Amy et Sarah aux Etats-Unis, avec qui on organise des records mixtes, maintenant aussi. Record du monde mixte, moi record de France, là on prépare le prochain gros projet record d'Europe qui aura lieu dans deux ans, on vient juste de commencer les préparations de tout ça. Mettre la mixité au cœur de la formation, mais aussi au cœur du leadership, enfin, vraiment d'aligner nos valeurs avec notre pratique. Et aujourd'hui, moi, ce qui m'intéresse avec le parachutisme, c'est de l'utiliser comme un un peu un terrain d'expérimentation. de leadership pour essayer de décortiquer ce qui fonctionne chez nous. Et c'est vrai que cette double casquette de conférencière sur ces thèmes-là et d'organisatrice de ces événements, ça se nourrit l'un l'autre.

  • Speaker #1

    Bien sûr.

  • Speaker #0

    Continuer à être active dans mon sport, ça continue à me donner du terrain et des enseignements que j'intègre et que je mets à jour régulièrement mes conférences avec ce que j'apprends dans ce terrain-là. Mais en même temps, avoir cet intérêt intellectuelle de décortiquer le truc. Je prends de la hauteur. En fait, cette casquette de conférencière, elle m'a fait porter un regard analytique sur ce que j'avais fait jusqu'à présent dans le cadre de mon sport, alors qu'avant, on faisait les choses un peu à l'instinct, et puis on voyait ce qui marchait ou pas, mais on n'était pas vraiment dans une analyse très profonde de ça. Cette casquette de conférencière, elle m'a permis ce regard, et du coup, les deux activités se répondent vachement bien, donc c'est cool.

  • Speaker #1

    Et alors, c'est pas pour rien, du coup, que tu es une femme Forbes. 2025, j'ai envie de te dire, parce que vu tout ce que tu me dis, l'intérêt et l'inspiration que tu dégages est évidente. Qu'est-ce que ça évoque pour toi, ça ? Qu'est-ce que tu as envie d'en faire aussi ? Qu'est-ce que ça représente ?

  • Speaker #0

    C'est un sacré honneur, parce que quand je vois la liste des 39 autres nanas, je suis sacrément fière d'en faire partie. Et puis ça, c'est un tremplin, je l'espère, et c'est vrai qu'on a déjà créé des liens entre nous qui sont super chouettes. J'ai rencontré des femmes que j'aurais jamais rencontrées dans un autre... dans une autre circonstance. La force du réseau, quelle qu'il soit. La force du réseau, quelle qu'il soit. Et puis tu vois, on revient à cette notion de groupe de femmes, d'entre-soi féminin qui peut paraître et qui est parfois décriée et puis peut-être de plus en plus aujourd'hui.

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire, quand c'était les hommes qui se rejoignaient en réseau, on ne disait rien.

  • Speaker #0

    On ne disait rien, c'est sûr. Mais il y a beaucoup de puissance. Parce qu'il y a ce lien-là qui peut sembler externe qui en fait relie des gens qui Il y a déjà des choses très chouettes qui se sont passées dans ce réseau-là. J'ai hâte de voir la suite.

  • Speaker #1

    Oui, totalement. On arrive à la fin de cet épisode. J'ai quelques questions signatures à te proposer.

  • Speaker #0

    C'est parti.

  • Speaker #1

    Déjà, pour toi, agir, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Il y a une notion de mise en mouvement dans le verbe agir. Et il y a une phrase que j'aime beaucoup qui dit « La peur, elle ne disparaît pas en pensant, elle disparaît en agissant. » Et ça, c'est... Quelque chose dont je suis absolument persuadée. Quand quelque chose te fait peur, tu peux rester assis sur ton canapé pendant trois heures en y pensant dans tous les sens, en te demandant comment tu vas faire pour la dépasser. Il ne va pas se passer grand chose. Dès le moment où tu agis, dès le moment où tu te mets en mouvement, souvent cette peur-là, elle disparaît. Moi, je l'ai vécu de façon très intrinsèque, que ce soit dans le cadre du parachutisme ou le cadre des conférences aussi. Avant de monter sur scène, avant de sauter de l'avion, tu as super peur. Et en fait, dès que tu agis, dès que tu rentres en mouvement, dès que tu as sauté de l'avion, dès que tu as commencé tes premières phrases, la peur disparaît. Donc pour moi, agir, c'est la meilleure façon de faire disparaître tes peurs. Encore une fois, il ne faut pas le faire n'importe comment. Faites vos devoirs avant.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as un domaine d'activité où tu aimerais voir plus d'action ? Autre que ce qu'on vient d'aborder.

  • Speaker #0

    Écoute, je pense qu'un domaine d'activité dans lequel j'aimerais voir plus d'action, c'est la peur. plus d'action, c'est vraiment l'égalité homme-femme. Je suis persuadée, et notamment quand je regarde l'actualité, que si on avait plus de femmes en position de leadership, le monde s'en porterait mieux. J'ai lu récemment le très bon livre de Marie-Éloi, « Les femmes sauveront-elles le monde ? » Oui, mais pas tout seul. Elle est passée chez toi. Je suis vraiment convaincue de ça.

  • Speaker #1

    Elle est très intéressante et vraiment, elle montre l'intérêt de la mixité.

  • Speaker #0

    La puissance de la mixité. Donc, je pense que plus d'action dans ce sens-là, ça ferait du bien à nos sociétés.

  • Speaker #1

    Et alors, dernière question, est-ce que tu as une ou des figures d'inspiration que tu voudrais nous partager ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors, j'en ai beaucoup. Tu m'arrêtes quand il faut s'arrêter ? Alors, dans mon sport, c'est les deux femmes dont j'ai parlé tout à l'heure, Amy Chemelecki et Sarah Curtis, ces deux Américaines qui ont été mes mentors. et qui ont été les premières femmes que j'ai vues vivre de ce sport. Donc, c'est qui ont un peu ouvert l'horizon des possibles. Je me suis rendu compte en allant en Arizona pour la première fois à 22 ans que c'était possible et que ça ouvrait un peu la voie pour moi. Alors après, une autre femme qui est probablement la plus grande source d'inspiration, mais ça, c'est dans le domaine littéraire, c'est Marguerite Ursenar. Je suis une fan absolue de Marguerite Ursenar. Elle trouverait probablement ce mot absolument exécrable. mais c'est une figure d'écrivain qui me passionne je la lis et la relis régulièrement et religieusement avec plaisir et avec intérêt à chaque fois et c'est vraiment c'est mon inspiration absolue pour la littérature c'est absolument écrasant comme Panthéon parce que tu dis je ne peux jamais être à la hauteur d'une écriture comme celle-là mais c'est vraiment quelqu'un qui m'inspire énormément

  • Speaker #1

    Bon et donc on se retrouve quand là sur un prochain record ?

  • Speaker #0

    Alors voilà, le prochain gros projet, Parra, c'est ce record d'Europe qui aura lieu à l'été 2027. On a déjà commencé à mettre en place les entraînements pour 2026. Et là, je suis avec mes deux co-organisatrices, Anna Moxnes pour la Norvège et Sharon Arnoy, qui vit aux États-Unis, d'origine israélienne, qui sont dans mon équipe Joyrider. C'est vrai que je n'ai pas parlé de tout ça, mais je suis partie d'une équipe de nanas depuis une dizaine d'années. Donc là, on est sur la partie, justement, vision. Quelles sont les valeurs qu'on veut mettre derrière ce record ? Qu'est-ce qu'on veut illustrer avec ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas un record pour un record.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas un record pour un record. On veut vraiment... L'exploit sportif est chouette, mais ce n'est pas ça qui nous motive. Et donc là, on est dans la phase d'alignement sur les valeurs qu'on veut mettre derrière ce projet-là. Donc c'est génial.

  • Speaker #1

    C'est génial, oui.

  • Speaker #0

    Les conversations sont longues et mouvementées parfois, mais c'est vraiment chouette. D'ici quelques mois, on va commencer à passer à la partie plus logistique. On va suivre ça. Je vais faire un petit building public, je pense, sur LinkedIn, sur tous ces sujets-là.

  • Speaker #1

    Avec un grand plaisir et grand intérêt. Merci beaucoup pour cet échange inutile. C'était un vrai plaisir.

  • Speaker #0

    Merci, Emilia.

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Merci d'avoir pris le temps de l'écouter. Et n'hésitez pas, si vous avez aimé, à le partager, à le commenter, à faire vivre la communauté Elsagis. Je vous retrouve très vite pour un nouvel épisode. Et n'oubliez pas que des lives sont aussi disponibles sur mon compte Instagram emily.b.sophrologue et que vous pouvez aussi retrouver toutes les informations de l'épisode sur le site du podcast www.elsagis.com. A très bientôt !

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