- Speaker #0
Vidal one,
- Speaker #1
donnons de la voix à la santé. Bonjour et bienvenue dans ce nouveau podcast Vidalone, le podcast qui donne de la voix aux soignants. Je suis le docteur Maud Arguello, médecin généraliste à l'UNEVILLE, et je suis accompagnée du docteur Clémentine Lambert, neuropédiatre et responsable du site pédiatrique du Centre de référence des maladies neuromusculaires du CHRU de Nancy. pour parler ensemble de l'amyotrophie spinale infantile. L'amyotrophie spinale infantile est une maladie rare et encore méconnue. Pour autant, elle n'est pas si rare puisqu'il s'agit de la troisième maladie neuromusculaire la plus fréquente. Son incidence est de 1 sur 10 000 et on relève une fréquence d'hétérozygotes porteurs sains estimée à 1 sur 40, ce qui en fait la deuxième maladie génétique de transmission autosomique récessive la plus fréquente chez l'enfant, après la mucoviscidose. qui est bien plus connu du grand public. Bonjour Clémentine, nous nous connaissons très bien, donc je me permettrai de te tutoyer. Bonjour Maud. Tout d'abord, pour commencer et brièvement, qu'est-ce que la SMA ?
- Speaker #0
Alors, l'amiotrophie spinale infantile, ou SMA, pour Spinal Muscular Atrophy, est, comme tu l'as très bien dit, une pathologie d'origine génétique, secondaire à une mutation, le plus souvent une délétion homozygote de l'exon 7, d'un gène qui s'appelle le gène SMN1, qui code pour une grosse protéine, qui est la protéine... SMN pour Survival of Motoneurone qui, comme son nom l'indique, est une protéine de survie et de maintien du bon fonctionnement du premier motoneurone de la corne antérieure de la moelle. En cas de mutation du gène SMN1, on observe donc un défaut de fabrication de cette protéine SMN, ce qui va se traduire par une perte progressive des motoneurones alpha de la corne antérieure de la moelle. Il s'agit donc d'un processus de dénervation, ce qui fait de la myotrophie spinale infantile une maladie neurodégénérative. qui va donc se traduire sur le plan clinique par une faiblesse musculaire d'aggravation progressive associée, selon le niveau de gravité de la pathologie, à des complications orthopédiques, respiratoires, bulbares. Un élément important à savoir est qu'il existe un second gène impliqué dans cette pathologie, à côté du gène SMN1, qui est le gène SMN2, qui code pour une petite portion de protéines SMN complètes et fonctionnelles qu'on estime grossièrement à 10%. Tous les individus disposent de une à sept copies de ce gène et donc tu comprendras aisément que plus on a de copies du gène SMN2, plus on va produire de protéines SMN fonctionnelles en compensation à celles non produites par SMN1 mutées et moins on va développer une forme grave de la pathologie. On définit donc ainsi cinq grades de sévérité de la SMA qui sont inversement corrélés au nombre de copies SMN2.
- Speaker #1
Il me semble que le type 1 est le plus marquant avec l'atteinte la plus sévère. Peux-tu nous en dire plus ?
- Speaker #0
Avant le type 1, il existe même un type plus sévère, qui est le type 0, dont les symptômes apparaissent malheureusement déjà en période anténatale dans le ventre de la maman et sont caractérisés par une hypomobilité fétale, un hydramnose, donc une augmentation du liquide amniotique par difficulté de suction et déglutition du fœtus et d'éventuelles rétractions orthopédiques. Ces petits patients naissent déjà paralytiques avec des signes d'insuffisance respiratoire ... et des difficultés de sucion-déglutition qui vont être pourvoyeurs d'un décès dans les premières semaines de vie. Pour cette forme sévère et déjà très symptomatique à la naissance, encore aujourd'hui, on décide de ne pas administrer de traitement. Après le type 0, il y a donc en effet le type 1 qui, comme tu l'as dit, représente la forme la plus fréquente, environ 60% des cas. Dans ce type-là, on observe un court intervalle libre de quelques semaines ou quelques mois. Puis les symptômes apparaissent, dans tous les cas avant l'âge de 6 mois, caractérisés par une hypotonie globale, donc à la fois axiale, qui va se traduire par des difficultés à l'acquisition de la tenue de tête, une impossibilité à l'acquisition de la station assise, mais aussi une hypotonie périphérique, une arréflexie, des fasciculations linguales, qui sont un signe pathognomonique de cette pathologie, puis rapidement une insuffisance respiratoire et des troubles bulbaires, responsables d'un décès en l'absence de traitement avant l'âge de 2 ans.
- Speaker #1
Et qu'en est-il des autres types de sévérité moins importantes ?
- Speaker #0
Après le type 1, on observe le type 2, pour lequel les symptômes apparaissent un peu plus tardivement, entre l'âge de 6 et 18 mois. Les enfants présentent donc une période initiale de développement psychomoteur normal, puis vont développer une faiblesse motrice proximale d'aggravation progressive, rendant l'acquisition de la marche autonome impossible. On va également observer des complications orthopédiques importantes, en particulier une scoliose sévère et des complications respiratoires. Ces enfants atteignent l'âge adulte, mais avec un handicap sévère. Et puis... Après le type 2, on observe un type plus léger, le type 3, pour lequel les symptômes apparaissent encore plus tardivement, après l'âge de 18 mois. Pour ce type-là, l'enfant acquiert une marche autonome, mais va ensuite présenter des difficultés motrices globales, qui peuvent être pourvoyeuses d'une perte de la marche, une fatigabilité, en lien avec un déficit moteur qui prédomine en proximal, là aussi avec des complications potentielles orthopédiques et respiratoires. Pour ce type, cependant, l'espérance de vie est normale.
- Speaker #1
Est-ce qu'il n'y a que les enfants qui sont concernés ?
- Speaker #0
Non, la maladie peut même survenir à l'âge adulte. Il s'agit d'ailleurs du dernier type, le type 4, que je connais moins étant pédiatre. Cependant, pour ce type, globalement, les symptômes apparaissent la troisième décennie de vie. La présentation clinique mime un tableau de myopathie des ceintures.
- Speaker #1
Très bien. Une fois le diagnostic posé, quelle sera la prise en charge et le suivi de ces enfants ?
- Speaker #0
Alors ce qu'il faut savoir, c'est que la prise en charge des maladies neuromusculaires est organisée par l'intermédiaire d'une filière maladie rare, qui s'appelle la filière Filnemus, qui est donc la filière des maladies neuromusculaires. Et cette filière assure une gestion homogène de ces pathologies sur tout le territoire français par intermédiaire de centres experts, qu'on appelle centres de compétences et de références. Et le CHR de Nancy est un centre de références des maladies neuromusculaires.
- Speaker #1
D'accord, et concrètement chez toi, dans le service dans lequel tu travailles, comment ça se passe ?
- Speaker #0
Pour parler plus précisément de mon centre, la gestion est assez similaire à celle des autres centres pédiatriques neuromusculaires français. Globalement, les enfants ou adolescents sont reçus en consultation de première fois par mes soins, essentiellement à visée diagnostique. Ensuite, ils vont être suivis régulièrement, en moyenne tous les six mois, mais ça dépend bien évidemment de la pathologie et de la gravité de la pathologie, par une équipe pluridisciplinaire qui m'entoure, qui regroupe. mon médecin MPR, le docteur Ragomandry, mon médecin pneumopédiat, le professeur Schweitzer, un cardiopédiat, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes, une orthophoniste, une psychologue, une assistante sociale, etc. Et donc, les enfants vont être vus par toute cette équipe, par l'intermédiaire de journées d'hôpitaux de jour qui sont organisées sur un même site géographique, qui sont les consultations neuropédiatrie et MPR à l'hôpital d'enfants du CHRU de Nancy. Retrouvez nos formations sur Vidal Campus.
- Speaker #1
J'ai vu dans l'actualité, et par l'intermédiaire du Téléthon notamment, que le paysage de la SMA avait été transformé ces dernières années avec l'arrivée de thérapies innovantes. Est-ce que tu peux nous en dire plus ?
- Speaker #0
Alors oui, ce qu'il faut savoir déjà, c'est qu'il y a quelques années, malheureusement pour cette pathologie, on ne disposait pas de traitement curatif. On mettait donc en place une prise en charge symptomatique, assez similaire à la prise en charge d'autres pathologies neuromusculaires, donc à la fois orthopédiques, respiratoires, nutritionnelles, etc. Et puis, des thérapies sont arrivées sur le devant de la scène il y a une dizaine d'années maintenant.
- Speaker #1
Très bien. Et est-ce que l'on sait si ces thérapeutiques sont efficaces ?
- Speaker #0
Alors, avec le recul dont on dispose désormais, on peut dire que ces thérapies sont efficaces, c'est-à-dire qu'elles permettent d'arrêter le processus d'énervation. C'est comme un arrêt sur image. Donc, par exemple, pour nos petits patients type 1, ces thérapies leur permettent de rester en vie, de ne pas bénéficier en permanence d'une ventilation et d'un support nutritionnel. et de progresser sur le plan moteur, ce qui est déjà beaucoup, puisque je rappelle qu'en l'absence de traitement, ces patients décèdent avant l'âge de 2 ans. Pour autant, ce dont on s'est rendu compte, c'est que ces thérapies ne permettent pas de récupérer ce qui a été perdu. Donc les enfants traités après l'âge d'apparition des symptômes gardent, selon la gravité de la pathologie, qui est en lien, comme je l'ai dit tout à l'heure, avec le nombre de copies SMN2, l'âge d'apparition des symptômes, les acquisitions motrices, et puis selon l'âge de début de traitement, un handicap plus ou moins sévère.
- Speaker #1
Alors, ne faut-il pas les administrer avant l'apparition des premiers symptômes, justement le plus tôt possible ?
- Speaker #0
Tout à fait. En fait, c'est suite au constat mondial au sein de la population neuromusculaire pédiatrique qui a été que ces traitements permettaient de modifier significativement l'histoire naturelle de la pathologie, mais ne guérissaient pas les enfants en cas d'administration trop tardive, qu'est apparue l'hypothèse qu'il était donc nécessaire de traiter le plus tôt possible avant l'apparition des symptômes. Donc... en période néonatale. Suite à cette hypothèse, le dépistage de la pathologie est né dans de nombreux États et est désormais mis en place. C'est notamment le cas dans tous les États des États-Unis, dans les États du Canada, en Australie, dans certains pays d'Europe, tels que l'Allemagne et la Belgique. Et depuis la mise en place de ce dépistage, plusieurs études ont été publiées démontrant les différences significatives d'évolution des patients traités en présymptomatique en comparaison à ce traité. après l'apparition des symptômes, avec une évolution subnormale pour les patients dépistés, en tout cas les premières années de vie.
- Speaker #1
Et qu'en est-il de la France pour ce dépistage ?
- Speaker #0
Alors malheureusement, alors que la France était pionnière dans le domaine du dépistage néonatal initialement, il semblerait que cela ne soit plus tout à fait le cas, en tout cas concernant cette pathologie, puisque aujourd'hui le dépistage n'est pas déployé à l'échelle nationale. Pour autant, ce dépistage existe en France depuis deux ans maintenant, mais dans uniquement deux régions de France, qui sont le Grand Est, notre région, et la Nouvelle-Aquitaine, par l'intermédiaire d'un projet de recherche, un projet pilote, qui s'appelle le projet Dépisma. qui a été donc mis en place grâce au professeur Legelle, neuropédiatre au CHU de Strasbourg, et dont l'objectif était de démontrer la faisabilité de ce dépistage pour bien évidemment l'étendre ensuite au territoire national. Alors les objectifs principaux de cette étude étaient en fait de mettre en évidence son exhaustivité et puis la rapidité d'administration du traitement pour les patients dépistés. Alors, en quoi consiste ce dépistage ? C'est très facile. En fait, il a lieu au même moment que le dépistage habituel, donc le gutterie, au deuxième ou troisième jour de vie de l'enfant, avant sa sortie de maternité. Au lieu de prélever une seule goutte de sang, on prélève deux gouttes au talon de l'enfant. On met la première goutte sur le buvard destiné au gutterie. Et puis la seconde goutte, on la pose sur un second buvard qui va être destiné spécifiquement au dépistage de la myotrophie spinale infantile. Les deux buvards sont envoyés au centre... régional de dépistage néonatal et puis du centre régional de dépistage néonatal, le second buvard va être transmis au laboratoire de biologie moléculaire de référence régionale qui va donc effectuer le dépistage, qui est aujourd'hui rendu en moyenne à 7 jours dans les deux régions. Concernant les résultats de cette étude, en fait on est extrêmement satisfaits puisqu'on a une exhaustivité qui est estimée en moyenne à 94% à deux ans du projet dans les deux régions, donc qui est bien supérieur à ce qu'on espérait. alors qu'il s'agit du premier dépistage génétique. Et pour ce qui est du traitement, en fait, aujourd'hui, à deux ans du projet, on a dépisté 14 patients. Et pour ce qui est des petits patients dépistés traités, ils ont été traités en moyenne à 21 jours de vie, qui est là aussi un délai bien inférieur à celui fixé initialement de six semaines. Donc, ces résultats sont extrêmement positifs. Ils ont été renforcés par la publication d'une note de cadrage par la HAS en juin 2023, qui a validé l'indication de généralisation nationale de ce dépistage. dépistage et pour autant nous sommes toujours en attente d'une extension au territoire national qu'on espère pour septembre 2025.
- Speaker #1
Donc en attendant l'élargissement de ce dépistage, je comprends bien qu'il convient de rester alerte sur les symptômes évocateurs de la SMA afin de la diagnostiquer le plus précocement possible, chaque jour passant, amputant le pronostic futur et même post-traitement de ces enfants. Donc concrètement, dans ma pratique quotidienne, quels peuvent être mes rôles en tant que médecin généraliste dans l'accompagnement de ces patients ?
- Speaker #0
C'est d'abord connaître la pathologie, puisque comme tu l'as très bien dit en début de ce podcast, certes c'est une maladie rare, mais qui n'est pas si rare. Et puis c'est la deuxième maladie génétique de transmission autosomique récessible la plus fréquente après la mucoviscidose. Et malgré cela, elle est encore très méconnue du grand public, mais même des soignants. Donc c'est connaître la pathologie, en particulier les signes d'alerte en fonction des différents âges et donc des différents types, la faire connaître. Et puis ensuite, savoir adresser le plus rapidement possible l'enfant, l'adolescent ou l'adulte, dès la suspicion clinique, à un expert de la pathologie, donc neuropédiatre ou neurologue spécialisé dans les pathologies neuromusculaires, au centre expert le plus proche du domicile du patient. Un rôle qui me semble aussi important à jouer par le médecin généraliste, c'est l'accompagnement du patient et de la famille dans la démarche de consulter, parce que ce n'est pas toujours quelque chose de simple. notamment pour les patients adultes, et ensuite soutenir la nécessité de poursuivre le suivi pluridisciplinaire spécialisé au long cours, grâce notamment à la relation de confiance établie entre les médecins traitants et les patients et leur famille.
- Speaker #1
Très bien, et je me permets de revenir sur le fait d'adresser le plus rapidement possible, mais comment savoir qui contacter et quel est le centre le plus proche ?
- Speaker #0
Alors, notre filière Phinomus dispose d'un site internet dédié, et en fait, en se rendant sur ce site, dès la page d'accueil, tu peux cliquer sur la carte interactive. En cliquant sur la carte interactive, tu arrives sur une page où il existe un encart marqué « Où consulter ? » . Et donc, tout simplement, en cliquant sur cet encart, il te suffit de taper le nom de ta ville et on t'indique le centre d'où dépend ton patient et les coordonnées du secrétariat pour prendre rendez-vous.
- Speaker #1
Eh bien, merci beaucoup Clémentine pour toutes ces informations. Si je résume donc, l'amyotrophie spinale infantile est une maladie neurodégénérative d'origine génétique. dont il existe différents types de sévérités variables. Le diagnostic est avant tout clinique. Il s'agit d'une attente motrice progressive qui se traduit par une hypotonie globale chez le tout petit avec difficultés respiratoires et nutritionnelles et par une faiblesse musculaire qui prédomine à la racine des membres chez les plus grands et les adultes avec notamment une abolition des réflexes ostéotendineux qu'il est important de rechercher en consultation. La prise en charge est coordonnée par un centre expert, en partage avec le médecin traitant, autour de différents actes, neurologiques, rééducatifs, respiratoires, nutritionnels. Et il existe désormais des thérapies qui ont montré leur efficacité et ce d'autant plus qu'elles sont administrées lorsque la maladie n'est pas évoluée. C'est pourquoi un diagnostic précoce est fondamental. Il faut donc savoir reconnaître les signes d'appel et référer au centre expert au moindre doute et sans délai.
- Speaker #0
C'est exactement ça. Je finirais juste par dire que nous attendons avec une grande impatience l'extension au territoire national du dépistage néonatal, puisqu'il n'est plus acceptable de voir encore aujourd'hui arriver à nos consultations des bébés déjà symptomatiques qu'on va devoir accompagner en soins palliatifs en cas de forme trop sévère, ou qui vont garder, malgré l'administration d'un traitement, un handicap significatif.
- Speaker #1
Merci beaucoup.
- Speaker #0
Merci à toi, Maude.
- Speaker #1
À bientôt pour un nouveau podcast Vidalone. Celui-ci a été réalisé avec le soutien institutionnel de Biogen.