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En un battement d'aile

47. Sécurité sociale de l’alimentation : un an d’expérimentation à Lyon

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36min |17/12/2025
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Description

Depuis un an, 138 foyers du 8ème arrondissement de Lyon participent à l’expérimentation de la Caisse de l’alimentation, portée par Territoires à Vivre et soutenue par la Métropole de Lyon. L’objectif : garantir un accès digne à des produits locaux et bio, en testant le principe de Sécurité sociale de l'alimentation.


Dans cet épisode, nous rencontrons :

  • Faten, maman solo, dont le quotidien a été transformé par la possibilité de choisir librement des aliments de qualité ;

  • Umi et Franck, qui découvrent le bio et l’agriculture locale tout en renforçant leur autonomie et leur cohésion de groupe ;

  • Sylvain, bénévole et membre du comité, qui raconte comment l’expérience lui a permis de retrouver un emploi et de tisser du lien social.


Mariella Eripret, coordinatrice du projet, nous explique les choix collectifs et les difficultés rencontrées : conventionner des producteurs locaux, gérer la diversité des besoins et maintenir la dignité de chacun. Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, rappelle l’enjeu politique de cette expérimentation : créer un modèle de solidarité alimentaire durable et ouvrir la voie à une « sécurité sociale de l’alimentation »


Un an après son lancement, cette initiative locale questionne plus largement : comment faire de l’alimentation un droit et non un privilège ?


Bonne écoute ! 🦋

Mixage : Pascal Gauthier


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Transcription

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses pour changer. Ma santé, avant tout, ma santé. Le bio m'apporte cette soif de bannir tout ce qui est industriel, d'être plus sensible aussi aux productions, fruits et légumes qui nous viennent d'ailleurs. Et que là, je fais très attention à voir la provenance, et que je ne le faisais pas. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir, et grâce. à cette expérimentation.

  • Florence Gault

    Pour Faten, habitante du 8e arrondissement de Lyon, la mise en place de la caisse de l'alimentation a été bien plus qu'un coup de pouce, elle a transformé son quotidien. Depuis un an, elle fait partie de la centaine de foyers qui testent cette expérimentation portée par Territoires à vivre Grand Lyon. Son objectif est garantir un accès digne à une alimentation locale et de qualité, choisie collectivement dans un quartier où les inégalités d'accès à une bonne alimentation restent fortes. Financée en grande partie par la métropole de Lyon et complétée par les cotisations d'habitants volontaires, cette caisse permet chaque mois d'utiliser un budget dédié chez des commerçants et producteurs conventionnés. Un an après son lancement, cette initiative révèle ses effets, une alimentation plus diversifiée, un pouvoir d'achat mieux orienté et surtout une gouvernance locale qui redonne du pouvoir d'agir aux habitants. Alors que l'expérimentation repose encore sur un modèle financier fragile, ... Elle ouvre une question plus large, comment repenser l'accès à une alimentation saine comme un droit et non comme une chance ? Reportage.

  • Extrait spectacle

    Il y a une fois dans un grand pays où 8 millions de personnes vivaient dans l'insécurité alimentaire, un petit groupe d'habitants et d'habitantes réunis avec la même conviction, l'alimentation c'est un droit. Depuis plusieurs années déjà circulait entre les foyers une idée folle, imaginée par tout un groupe de personnes, de chercheuses, d'associations, d'habitants. la création d'une sixième branche de la sécurité sociale, une branche dédiée à l'alimentation. Ce projet était alimenté par ce que les anciens avaient réussi à faire en 1947, lorsqu'à la sortie d'une immense guerre, les citoyens et leurs représentants s'étaient organisés pour faire de la santé un droit universel. Dans l'huitième arrondissement, à force d'indignation, de réunion, D'ateliers de cuisine, de visites et de rencontres, 30 personnes mobilisées autour des associations locales se sont lancées ensemble dans cette grande aventure. Connue sous le nom de Calimut, ce collectif est un riche assemblage de personnalités diverses. Ils se rassemblent, se construisent autour d'un rêve, celui de créer une société plus juste, plus solidaire. et d'améliorer l'accès à l'alimentation de qualité dans leur quartier.

  • Florence Gault

    Le 15 novembre dernier, la Caisse de l'alimentation du 8e arrondissement fêtait son premier anniversaire. Au programme, exposition, musique et temps d'échange, le public placé en cercle découvre une mise en scène artistique retraçant l'histoire de l'expérimentation. Les témoignages des habitants et de l'ensemble des parties prenantes ponctuent le récit. Une célébration immersive qui montre concrètement les changements que cette initiative a apporté dans leur quotidien.

  • Témoignage

    Bonsoir tout le monde, je suis Madame Aïba, je suis de Bayassan, moi je suis Camille, Benouit, Charles, Alain, mes épouses. Je vois des mamans autour des tables, moi j'ai toujours ravi quand je vois les gens qui s'entourent, c'est important. J'ai demandé, ils m'ont dit on fait un projet sur le quartier de la caisse alimentaire. Et moi je n'ai rien compris, mais j'ai dit ah d'accord, ok. Et de ce jour-là, je rentrais avec un immeuble.

  • Florence Gault

    Les interventions se succèdent et on découvre des histoires de vie transformées et des expériences personnelles qui révèlent l'impact de cette initiative. Parmi elles, celle d'Oumi et de Franck. Umi, maman de deux enfants et membre du comité qui a porté l'expérimentation, faisait partie des plus précaires. Sans revenu, elle dépendait auparavant de l'aide alimentaire associative. Franck, lui, a rejoint l'expérimentation en décembre 2024.

  • Umi

    Moi, au début... C'était difficile pour avoir un bon manger parce que je ne me sentais pas bien, parce que j'étais malade. Et puis il y a les trucs que je devais manger, il faut avoir de l'argent. Par exemple, il y a de l'huile d'olive, c'est cher.

  • Franck

    Moi, à la base, c'était des questionnements sur l'alimentation, le mieux manger. Et j'allais parfois dans des forums où j'ai entendu parler de cette caisse-là à Lyon 8. Et comme j'étais à Lyon 8, je me suis dit pourquoi pas, j'ai essayé.

  • Florence Gault

    Et c'était quoi les questions qu'il y avait à la base ?

  • Franck

    C'est sur le mieux manger, c'est comment bien manger, comment avoir une meilleure santé. En tout cas, c'est pas mal de questionnements par rapport à ça, l'alimentation. Et puis la justice aussi alimentaire. Je me préoccupais un peu sur la justice sociale alimentaire. Donc, c'est pour ça que je me suis aussi lancé dans cette expérience-là. Au début, il y avait pas mal de réunions sur la qualité, sur les produits, sur la justice sociale, tout ça. Donc, honnêtement, j'ai beaucoup appris. Et puis même quand j'ai commencé à acheter aussi bio, tout ça. J'ai vu que même ma santé s'est améliorée. On sent vraiment une différence.

  • Umi

    Avec cette somme-là, déjà, c'est temps d'incréduler dans la tête que le fin de mois, je vais recevoir quelque chose. Même si je n'ai pas de l'argent, j'ai petit quelque chose. Ça va m'apporter beaucoup de choses qui vont me faire bien manger, bien vivre. Déjà, ça, psychologiquement, ça va être dans ton corps.

  • Franck

    Et puis, on ne se sent pas jugé. C'est-à-dire que moi, personnellement, Biocop, c'était...

  • Umi

    C'est impossible.

  • Franck

    C'est impossible. Je passe, mais... Dès que c'est bio, bien dès que c'est... Je ne peux pas. Même dans les marchés, à certains marchés, je ne pouvais pas. Je ne pouvais même pas imaginer de passer et de prendre quelque chose. Et là, de pouvoir rentrer dans Biocop, c'était déjà...

  • Umi

    Et puis, le problème, quand tu rentres, il y a les gens, certains, parfois, ils te regardent. Mais tu rentres, tu choisis, tu paies avec ton dignité.

  • Franck

    C'est vrai que dans les magasins bio ou bien, même au niveau même, comment dire, de la réflexion, c'est différent. C'est-à-dire que... On a cette chance-là d'avoir été retenus pour expérimenter cela. Non seulement on mange bien, mais c'est aussi une ouverture d'esprit. On va voir des paysans, on va découvrir, on fait des actes de solidarité alimentaire, où on est ensemble, vraiment, au-delà seulement de l'alimentation, mais il y a toute une cohésion de groupe.

  • Umi

    Et puis ça, ma fille, elle avait tellement du poids. Maintenant, avec cette recette qu'on fait là, je le vois, elle est en train de maigrir. Elle ne veut même pas. Elle est trop paresseuse. Mais, par exemple, je fais le soir, carottes, les légumes différents. Elle va les manger le soir. Ça, je vois que même elle, les enfants d'aujourd'hui, il faut regarder ce qu'on donne aux enfants pour manger aussi. C'est important. Vraiment, c'est une fierté. Merci beaucoup, vraiment. On a assez parlé.

  • Florence Gault

    Sylvain, lui, habite dans le quartier monplaisir. Bénévole en cuisine à l'épicerie sociale et solidaire Épices et bons, il a participé à de nombreux ateliers culinaires où il a peu à peu trouvé sa vocation. En 2023, lors d'une présentation justement à Épices et bons, il découvre le projet de la caisse de l'alimentation et n'est pas vraiment convaincu de sa faisabilité. Il décide pourtant de faire partie du collectif qui met en place l'expérimentation.

  • Sylvain

    Au départ, j'étais très, très dubitatif. Tu vois, je me suis dit, c'est quoi ce machin encore ? Mais bon, allez, bref. Et on a démarré. Et du coup, j'ai senti tout de suite la même ferveur et une énergie, tu sais, comme les bâtons après une naissance, le battement d'un cœur. Et ça s'est amplifié, amplifié, amplifié, ce collectif. On s'est trouvé au départ tous les mois, tous les 15 jours, et ensuite toutes les semaines parce qu'on a multiplié de multiplier. par des commissions, des commissions, des commissions pour préparer tout le projet de la caisse.

  • Florence Gault

    Puisque l'idée, c'était vraiment que les habitants et ceux qui allaient participer à cette caisse de l'alimentation soient vraiment partie prenante et prennent toutes les décisions. C'est-à-dire qu'il n'y a personne qui est arrivé du dessus en disant on va procéder de telle et telle manière.

  • Sylvain

    Voilà, toujours en collab avec Territoires à Ville, donc Léa et Mariella et Amélie. Et on a monté notre projet petit à petit, petit à petit, jusqu'au lancement. l'inauguration qui s'est faite en septembre. 2024, et le démarrage de la caisse qui s'est fait octobre, pile. Premier octobre, lancement. Et donc là, ça fait un an.

  • Florence Gault

    Et alors ça, comment vous, vous avez vécu, vous avez dit tout à l'heure en témoignage ? que vous aussi ça a été une vraie aide dans un parcours de vie à un moment donné où c'était difficile et donc que c'était une manière de pouvoir accéder à l'alimentation de qualité.

  • Sylvain

    Alors moi je vais dire oui personnellement, moi je suis arrivé à Pissébon en poussant la porte, jamais je ne sais ce qui m'attendait, mais j'étais dans une situation de précarité due à un incident de vie, de santé et du coup malheureusement on n'est pas préparé, on n'est pas tout ça. il faut faire ça, j'ai aucun outil, je ne sais pas où je vais à l'inconnu, mais j'ai poussé cette porte. Et j'ai su tout de suite qu'ils avaient besoin de bénévoles, mais je ne savais pas ce qu'était un bénévole, moi, à l'époque. Rien du tout. Et je ne connaissais pas la précarité, je ne connaissais pas les situations, je ne connais pas cette structure. Et j'ai appris, j'ai découvert, mais en même temps, j'avais envie. Il y a un truc qui me poussait à m'engager là-dedans. et c'est pour ça qu'on m'a aidé et que ça m'a permis et ça et la caisse m'a permis si tu veux à un moment de dire mon téléphone il a sonné Vrac Métropole m'a téléphoné, dont ils ont une structure dans le 8ème qui s'appelle la MESA, et me dire « il y a un poste pour toi, donc c'est bénéfique » .

  • Florence Gault

    Et là, ce soir, on a entendu dans tous les témoignages, je trouve que c'est beaucoup ressorti, effectivement, des gens qui avaient du mal à boucler la fin de mois et donc de pouvoir se payer une alimentation de qualité, et qui, en trouvant ce collectif, ont aussi trouvé une solidarité et qui a permis pour un certain nombre de pouvoir retrouver du travail derrière. Ce qui n'était pas le but originel de la Caisse de l'alimentation, mais via ce collectif, ça allait beaucoup plus loin.

  • Sylvain

    Parce que sur Lyon, il y avait déjà des choses en amont qui se préparaient. Et du coup, le collectif a démarré. Et oui, il y a eu un truc qui s'est fait. Oui, il y a eu, je ne sais pas comment te dire, en fait, c'est ça, c'est une naissance, un battement de cœur. Mais il y a tellement eu des gens différents de fractures ou de fracturés. Et en fait, on s'est complété ou alors c'est comme Apple, tu vois. Et aujourd'hui, on continue à se côtoyer. On se voit, on se côtoie dans les structures qui sont partenaires aujourd'hui. Et moi, je dis, c'est la plus belle des richesses déjà ça.

  • Florence Gault

    Il y a eu des difficultés rencontrées justement dans toute la mise en œuvre ?

  • Sylvain

    Beaucoup de travail honnêtement. Ce n'était pas simple du tout. Mais tous ont compris. Et en fait, même les partenaires qu'on a intégrés petit à petit, parce qu'il y a eu des démarches de nous, et les questionnaires qui ont été mis en place, ça n'a pas été simple quand on allait les voir. Je parle des partenaires, c'est-à-dire les marchés, les petits producteurs, les épiceries. Bon, ils étaient déjà porteurs au projet, donc eux, ils ont adhéré. Mais il y avait une grosse volonté, on la sentait.

  • Florence Gault

    Et ça a changé quoi dans votre rapport à l'alimentation ?

  • Sylvain

    Moi, dû à mes soucis que j'ai rencontrés, j'avais arrêté le bio. Enfin, je mangeais, boire peu parce que c'était compliqué. Et puis, je n'avais plus envie de cuisiner honnêtement. Et là, le fait de côtoyer des gens. Avec des ateliers de cuisine, ça m'a redonné ça. Ensuite, il y a eu la caisse, donc ça m'a permis d'accéder à nouveau au bio. Et puis après, la suite, c'est d'avoir un emploi. Et je veux dire, aujourd'hui, je ne suis plus en précarité parce que j'ai un emploi. Mais je continue à fédérer et à soutenir, à former des gens, à leur dire, il existe ça, il existe ça. Si on peut orienter la caisse quand il y a des portes qui s'ouvrent et qu'on dit, oui, on peut prendre des nouveaux expérimentateurs, ben venez, je me renseigne et tout, on fait le truc direct.

  • Florence Gault

    Le 8e arrondissement de Lyon n'a pas été choisi par hasard pour cette expérimentation. En 2019, une étude commandée par la métropole de Lyon montrait qu'un tiers des habitants rencontraient des difficultés pour accéder à une alimentation de qualité et que 15%... ne mangeaient pas à leur faim. Pourtant, depuis quelques années, des initiatives locales tentent de transformer cette réalité. C'est à Épicentre, une épicerie sociale et solidaire, que je retrouve Mariella Eripret, chargée de mission démocratie alimentaire au sein de l'association Territoires à vivre, qui pilote l'expérimentation.

  • Mariella Eripret

    C'est ce territoire du 8e qui a été choisi, non seulement parce qu'il y a effectivement beaucoup de personnes qui ont des difficultés. Pour accéder à de l'alimentation de qualité, mais aussi parce qu'il y avait des démarches de démocratie alimentaire déjà engagées autour de la MESA, la Maison Engagée et Solidaire de l'Alimentation, qui a ouvert en 2022-2023. Et puis qu'il y avait plusieurs associations qui étaient actives aussi, comme le Secours Catholique, comme les deux épiceries sociales et solidaires, donc ICI, Épicentre, ainsi que Épices et Bons. On a la MESA donc, et puis plusieurs associations et des démarches. de démocratie où il y avait un comité d'habitants qui était mobilisé pour parler de ces questions d'alimentation dans le quartier. Et à la fois il y a aussi quand même une offre alimentaire de qualité mais qui n'est pas... pas bien répartis sur tout le territoire. Et donc, il y avait cet enjeu aussi à soutenir certains des lieux de l'arrondissement et peut-être en développer d'autres aussi par la suite.

  • Florence Gault

    Donc, ce quartier, c'était un peu la population cible que vous cherchiez à atteindre au travers de cette expérimentation ?

  • Mariella Eripret

    Oui, on cherchait à avoir une majorité de personnes en situation de précarité, mais ce projet de caisse de l'alimentation concerne en fait tout le monde. puisque le projet se base sur le concept de sécurité sociale de l'alimentation qui veut vraiment tendre vers l'universalité. C'est-à-dire que tout le monde est droit à une alimentation de qualité, mais on parle aussi des personnes qui n'ont pas forcément de soucis financiers et qui peuvent déjà avoir accès à cette alimentation, mais qui ne le font pas forcément parce qu'ils n'ont pas le temps ou pas forcément un intérêt pour ça. Et donc l'idée, c'est vraiment qu'on touche une mixité de personnes.

  • Florence Gault

    Donc il y a effectivement ceux qui bénéficient au travers de bons, on va revenir un peu sur le principe et sur concrètement comment ça fonctionne. Et puis il y a les personnes qui ont plus de moyens et donc qui peuvent contribuer à alimenter en fait cette caisse.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, on est sur un principe de cotisation selon le niveau de vie des personnes. Donc c'est à partir de 1 euro que les personnes cotisent et après il n'y a pas de limite. Donc il y a des personnes qui cotisent 300 euros et après tout le monde reçoit le même montant. Ce sont des crédits numériques sur une application et tout le monde a droit à 150 euros, quelle que soit sa situation. Donc ça, c'est 150 euros par personne et ça peut aller jusqu'à 450 euros selon la composition du foyer.

  • Florence Gault

    Ensuite, cet argent, on peut le dépenser dans des lieux partenaires comme l'épicentre où on se trouve aujourd'hui.

  • Mariella Eripret

    C'est ça. on a un peu Donc on est parti avec quatre lieux qui étaient conventionnés d'office, qui font partie des acteurs du comité technique de la caisse, donc avec lesquels on travaille depuis le début sur la mise en place du projet. Donc ce sont les deux épiceries sociales et solidaires, Épicentre, Épicébon, la MESA et une AMAP qui fait ses livraisons à la mairie du 8e, donc l'AMAP du Bachu. Et à partir de là, le comité habitant, donc une trentaine de volontaires du 8e, de tout profil, qui depuis février 2024 se réunissent toutes les deux semaines, puis maintenant tous les mois, ont décidé de conventionner d'autres lieux. Donc petit à petit, ça s'est fait avec une démarche d'aller rencontrer les gérants ou les producteurs. Ils ont préparé un questionnaire ensemble, ils ont réfléchi aux questions impertinentes à poser, qui devaient correspondre à des critères qu'ils ont mis en place eux-mêmes sur des critères de produits locaux, puis qui tendent vers plutôt le bio, en tout cas de l'agriculture paysanne. du respect des travailleurs sur tout un tas de critères sociaux et environnementaux. Et la décision est prise en session plénière avec l'ensemble des membres du comité pour décider par le consentement si le lieu est conventionné ou pas. Et donc petit à petit, depuis juillet 2024, où on a commencé les conventionnements, on est arrivé à 24 lieux.

  • Florence Gault

    24 lieux comme ici à Épicente, fait en 2014. Pour la petite anecdote, il s'agissait d'un projet de fin d'études de 4 étudiants. C'est aujourd'hui Emmanuelle qui en assure la coordination.

  • Emmanuelle

    Notre particularité, c'est quand même d'accueillir un public qui rencontre des difficultés pour s'alimenter et qui est orienté par un travailleur social. Donc notre point fort à Épicentre, c'est qu'on a un travailleur social au sein de l'épicerie qui accompagne les personnes qui ont accès à l'épicerie. On propose des produits bio et locaux et frais.

  • Florence Gault

    En termes de tarification, comment ça fonctionne ?

  • Emmanuelle

    Alors, il y a effectivement une double tarification. Nous sommes une association, donc on vit de subventions et d'appels à projets. Pour la partie personnes accompagnées, qu'on appelle porteurs de projets, on bénéficie de produits issus de la banque alimentaire. Donc la banque alimentaire fait des ramasses auprès des grandes surfaces, carrefours, au champ, tous les matins. et nous prépare les palettes sur bon de commande. Donc chaque mardi, nous allons à la banque alimentaire récupérer notre palette.

  • Florence Gault

    Avec une petite difficulté en ce moment, vous disiez tout à l'heure qu'il y a un peu moins de stock qui vous est fourni.

  • Emmanuelle

    Alors effectivement, la banque alimentaire rencontre des difficultés pour répondre aux demandes des associations. Il y a 148 associations quand même qui vont à la banque alimentaire du Rhône, parce qu'il y a une baisse de quantité et de qualité. des produits issus des grandes surfaces.

  • Florence Gault

    Là, vous me montriez les frigos.

  • Emmanuelle

    Voilà, donc cette semaine, on n'a pas eu de frais, donc on a deux frigos qui sont vides, où il doit y avoir quatre yaourts pour 39 familles. C'est un peu comment on gère,

  • Florence Gault

    justement ?

  • Emmanuelle

    Eh bien, on essaie de faire entrer de la marchandise, mais on a une charte d'approvisionnement, on ne peut pas aller chez Carrefour pour acheter des yaourts pour revendre à l'épicerie. Donc on sollicite les associations du réseau ou les autres épiceries. voir si elles ont pu avoir des yaourts. Cette semaine, personne n'a eu de yaourt, donc il n'y a pas de yaourt cette semaine. Donc on a toujours un petit stock de produits qui ne sont pas en rayon, de petites nouveautés pour montrer aux gens que oui, il n'y a pas de yaourt, mais on a du pain ou un nouveau café ou on a eu pas mal de légumes cette semaine. Donc c'est plutôt intéressant.

  • Florence Gault

    Alors vous faites partie des magasins partenaires de la Caisse de l'alimentation. Comment vous percevez cette expérimentation ? Les gens que vous rencontrez qui viennent désormais dépenser leur bon ici, est-ce que ça a changé quelque chose ?

  • Emmanuelle

    Oui, alors au niveau de la fréquentation, oui, tout à fait. Deux points de vue, au niveau effectivement du collectif Calim. Mais la Calim maintenant propose des commandes auprès d'éleveurs et de producteurs et on est point relais. Donc les gens viennent récupérer leur colis de poissons, d'agneaux. Nous ça nous permet de rencontrer justement des éleveurs, des producteurs qui pourraient aussi peut-être proposer leurs produits au sein de l'épicerie. Puis ça nous permet de rencontrer aussi de futurs adhérents parce qu'on a une association qui ne serait pas venue si la Calim n'était pas au sein d'épicentre. Donc oui, c'est très intéressant à tout point de vue.

  • Florence Gault

    La caisse de l'alimentation du 8e arrondissement de Lyon est la troisième du genre dans la région, après celle de Diolophie dans la Drôme et de Saint-Etienne dans la Loire. Son budget de 755 000 euros sur 3 ans repose sur un montage hybride. 46% financé par la métropole de Lyon, 28% par l'État et 25% par les bénéficiaires eux-mêmes. Un modèle encore fragile, l'expérimentation devait s'arrêter en novembre dernier et la rallonge de 100 000 euros votée en loin par la métropole ne permet de prolonger l'expérience que de quelques mois. Pour envisager une suite, l'association Territoires à Vivre a lancé une campagne de financement participatif. Pour Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, en charge de l'agriculture, l'alimentation et la résilience du territoire, tout l'enjeu et de pérenniser l'expérimentation.

  • Jérémy Camus

    Aujourd'hui, l'enjeu de cette expérimentation, c'était aussi d'être pas hors sol par rapport à un plaidoyer politique, ou plutôt une posture politique, et dire, nous devons aujourd'hui recréer une solidarité autour de l'alimentation. L'alimentation, ce n'est pas un produit comme les autres, ce n'est pas une marchandise, c'est peut-être le premier médicament qu'on ingère au quotidien, c'est autant de dépenses, si on consommait bien, qui seraient évitées par la nation en termes de frais de santé. Il y a un rapport qui a été réalisé il y a un an maintenant, qui montrait que quasiment 19 milliards d'euros étaient dépensés chaque année par l'État et les collectivités pour compenser les effets de notre système alimentaire. 12,5 milliards concernaient juste les dépenses santé. Donc on peut aussi trouver des externalités positives, en quelque sorte, à mieux manger. Et donc ce n'est pas qu'un projet local, en fait. Moi, ce que j'ai toujours dit, ça doit être un projet à dimension nationale. Là, on parle de solidarité. Un système comme ça existe, il faut que cette solidarité... elle soit décidée à une échelle nationale. Donc c'est un projet politique avec un grand P, très noble, de dire on doit demain créer une nouvelle branche de la sécurité sociale qui s'occupe non pas de la santé, mais qui s'occupe de l'alimentation. Et on doit créer les mécanismes de cotisation qui sont nécessaires pour financer cette opération.

  • Florence Gault

    D'où l'idée d'une proposition de loi portée notamment par Boris Tavernier, qui devait être étudiée à l'Assemblée nationale, qui finalement ne l'a pas été. de manière à ce que le relais puisse être pris au niveau national et sortir de l'expérimentation locale.

  • Jérémy Camus

    Cette proposition de loi cherche surtout à refinancer les expérimentations existantes et en multiplier d'autres. C'est-à-dire qu'on continue à avoir les bons mécanismes à mettre en œuvre localement pour que cette sécurité sociale soit optimale. Et donc là, on a encore besoin d'expérimenter. On est loin d'avoir trouvé le mécanisme parfait. Il y a beaucoup d'expérimentations partout en France maintenant qui sont nées. Ces expériences d'association vont servir à demain, s'il y a cette prise de conscience nationale, d'être prêt à déployer. Au même titre qu'en 1945, il y avait déjà des caisses de santé qui existaient et les gens avaient trouvé déjà cette solidarité, avaient déjà défini leurs règles du jeu. Et ça a été assez rapide pour essaimer ce concept de sécurité sociale. Le grand enjeu pour moi, il est surtout dans les prochains débats qu'ils vont avoir à l'échelle nationale. et il y en a en 2027. On parle aujourd'hui d'une campagne présidentielle dans laquelle on pourrait demain intégrer pleinement ce sujet de la sécurité sociale de l'alimentation et c'est un sujet qui porte en fait, on le voit et là si on revient au local, on voit très bien la force que ce sujet a auprès des habitants. En fait, l'alimentation, c'est une des premières variables d'ajustement pour les personnes, en plus, les plus précaires ou les plus en difficulté. Et donc, arriver à se dire qu'on arrive à donner les moyens à ces gens de... trouver une alimentation saine dans leur assiette, c'est déjà un super indicateur. Et l'autre indicateur, moi je rappelle souvent qu'on a une crise agricole quand même qui gronde depuis deux ans, sur laquelle on n'a trouvé aucune solution pour répondre à une problématique qui est rémunérer dignement les agriculteurs dans ce pays. Et bien demain, si on avait à peu près 150 milliards d'euros par an liés à la sécurité sociale et l'alimentation pour aller dépenser cet argent auprès des producteurs locaux, je pense qu'on a trouvé là une belle solution à la crise agricole. et peut-être une nouvelle ère du monde agricole demain dans ce pays aussi.

  • Témoignage Faten

    Bonjour, je m'appelle Fatène et je viens faire mes courses à EPICENTRE. Je suis maman d'une fille. Donc, maman solo. Et je viens faire des courses à EpiCentre, où vous avez beaucoup de produits, diverses produits, aussi bien fruits et légumes, épicerie fine, épicerie légumes secs. Vous avez, entre autres, des boissons, tout ce qu'il faut pour égayer les papilles.

  • Florence Gault

    Et ça fait combien de temps que vous participez à cette expérimentation de Calim 8 ?

  • Témoignage Faten

    Ça fait un an aujourd'hui. Et un an, on espère que ça dure et ça continue. Je vais repérer. Je vais aller au fond du magasin pour après finir au frais. Là, il y a des tortillinis, légumes.

  • Florence Gault

    Ça donne envie, là ?

  • Témoignage Faten

    Oui, totalement. Donc du coup, je vais... le paquet. Et ensuite, comme tout est à côté, à proximité, je vais me retourner, je vais prendre des pâtes. Malgré qu'il y a le nitrice corps A, je ne fais pas attention à ça. Je fais très attention à le composant des pâtes. Et je sais que les pâtes semi-complètes sont très bonnes pour la santé. Enfin, les pâtes blanches. Du fromage.

  • Florence Gault

    L'emmental râpé.

  • Témoignage Faten

    L'emmental râpé. je regarde, sans additifs, voilà. Le beurre également, les fromages blancs.

  • Florence Gault

    Et donc là, par exemple, aujourd'hui, il n'y a pas grand-chose. Est-ce que des fois, c'est une difficulté de venir et puis se dire, ah, Flûte, là, aujourd'hui, je n'ai pas ce que je voulais ?

  • Témoignage Faten

    Tout à fait, parce que quand on pense à la famille et qu'on essaie d'acheter, on sort de faire un repas et qu'on ne trouve pas ce qu'il faut, on est un peu frustré, c'est sûr. Ensuite, je vais prendre des graines de la dorée.

  • Florence Gault

    Je vois que c'est très réfléchi quand même dans les courses.

  • Témoignage Faten

    C'est une question d'habitude, mais après, je peux passer à autre chose. Mais toujours, quoi qu'il en soit, c'est toujours des produits de bonne qualité et des produits bio.

  • Florence Gault

    Vous avez toujours eu cette attention-là à l'alimentation ou est-ce que ça s'est développé et peut-être approfondi avec l'expérimentation de Calim ?

  • Témoignage Faten

    Alors, il faut dire que l'anecdote, ça a été vraiment une recherche très intensive de produits bio, de trouver des structures où ils fournissent du bio et à moindre prix. Parce que personnellement, j'ai eu une maladie il y a 20 ans de ça, une maladie de Crohn. Et c'est ça qui m'a laissé réfléchir par l'alimentation. et je me suis rendu compte que plus je mangeais des poissons, produits sains et mieux ça allait dans mon transit. Et aujourd'hui, je vais essentiellement dans cette direction-là parce que c'est une question de vie, tout simplement de survie, je dirais.

  • Florence Gault

    Mais vous vous êtes rendu compte quand même que ça représentait un budget ?

  • Témoignage Faten

    C'est pour cela qu'on en revient à mon expérience qui a fait que je me suis dirigée tant bien que mal dans des structures bio. où c'était essentiel pour moi de manger des produits de qualité, des produits fermiers, des produits d'éleveurs. Et en faisant des recherches, bizarrement, je tombe sur l'expérimentation qui m'a tellement séduit. Et là, j'ai sauté le pas et je me suis dit que c'est une aubaine de pouvoir l'expérimenter, de pouvoir être acteur, de pouvoir avoir le pouvoir d'agir.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a changé en un an ?

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses qui ont changé, que j'achète essentiellement bio, que je vais essentiellement chez les producteurs, des produits qualitatifs et qui aussi gustativement meilleurs. Et il y a beaucoup de choses qui ont changé. avant tout ma santé, le fait d'avoir cet élan d'envie d'aller plus loin, d'envie de faire bouger des choses. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir et grâce à cette expérimentation, on le vit. Le rêve devient réalité.

  • Florence Gault

    Le rêve devient réalité. Les mots de Faten sont forts, mais ils reflètent bien les différents témoignages des habitants qui participent à cette expérimentation. Un an après son lancement, des changements notables ont été constatés, comme en témoigne Mariella Erypré en charge de la caisse.

  • Mariella Eripret

    On a un cabinet d'évaluation qui est mandaté par la métropole, qui a pu faire une évaluation du projet, avec des questionnaires, en rencontrant certains membres de la caisse. Et nous aussi, en tant qu'animatrice avec ma collègue Léa, on a beaucoup de retours très positifs, uniquement positifs. Il faut dire que les gens sont ravis de pouvoir découvrir des bons produits. Pour certains, c'est une aide financière parce qu'ils cotisent peu et donc ils bénéficient d'un versement assez conséquent. Ils sont donc très contents de pouvoir mieux se nourrir. Certains nous témoignent le fait qu'ils avaient plus de problèmes de santé avant. ou leurs conjoints ou leurs enfants ont des problèmes de santé et du coup, c'était important pour eux de pouvoir mieux manger. Et puis, il y a l'effet aussi sur la dignité, sur le fait de pouvoir rentrer dans des magasins comme ça, aller au marché, rencontrer les producteurs, pouvoir choisir ses produits. Le fait aussi de participer à un groupe, donc ça, c'est surtout pour les membres investis dans le comité décisionnaire Calim8, qui se rencontrent tous les mois maintenant et qui ont tissé des liens, comme je disais tout à l'heure. il y a un aspect quand même vraiment de... cohésion de groupe, de fierté de faire partie d'un projet, de pouvoir prendre des décisions et d'être entendue, et que ça fonctionne réellement. Il y a des bienfaits aussi en termes, c'est les producteurs qui nous le disent. Les producteurs, comme je disais, ne bénéficient pas d'une manne financière extraordinaire avec ce projet, mais le fait d'avoir des liens avec des personnes qu'ils ne voient pas habituellement sur le marché, ils sont contents de pouvoir... Il y a des voyages comme ça, d'une femme qui vient... puis qui leur a préparé des sirops, qui leur apporte des choses. Il y a une femme dans l'AMAP, l'Association pour le maintien d'une agriculture paysanne, qui ne connaissait pas le système des AMAP, et grâce à la caisse, elle est rentrée dans l'AMAP. Et les producteurs sont ravis, elle leur apporte des gâteaux, elle est hyper investie dans le truc. Il y a plein de petits témoignages comme ça.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a pu être difficile, ou quelles ont été les difficultés rencontrées au moment de la mise en place ?

  • Mariella Eripret

    Les difficultés rencontrées, je dirais que c'est sur la compréhension par chacun. C'est-à-dire que pour prendre des décisions à 30, il faut s'assurer que tout le monde ait bien compris les enjeux. Et ce n'est pas toujours simple, parce que ce sont des projets assez complexes. Donc l'idée, c'est de faire de l'éducation populaire, et que ça se transmette aussi entre les personnes qui sont un peu plus avancées et celles qui sont un peu plus en retrait. Les difficultés ça a pu être aussi en termes de lieux conventionnés. Donc ça prend du temps par exemple toute la démarche d'aller rencontrer des producteurs sur les marchés, de les interroger, le questionnaire est assez long quand même. Ils n'ont pas le temps, ils sont avec des clients. Puis certains n'ont jamais répondu à la sollicitation, la proposition d'être conventionnés. Et puis on a eu aussi un petit échec avec une boucherie halal. qui a été conventionné pendant deux mois dans le sixième arrondissement parce qu'on a beaucoup de musulmans dans la caisse et ils étaient ravis de pouvoir accéder à de la viande de très bonne qualité produite selon la charte du bio, qui est assez chère, que les personnes n'auraient pas accès s'il n'y avait pas la caisse. Et donc il y a eu un... un engouement fort pour cette boucherie pendant deux mois où beaucoup sont allés acheter leur viande, étaient ravis. Et puis, au bout de deux mois, le gérant a souhaité arrêter le conventionnement parce qu'il considérait que la clientèle amenée par Calimut ne correspondait pas à sa clientèle de luxe et son image de luxe. Ce ne sont pas les clients qui se sont plaints, c'est vraiment le gérant qui a considéré que ça ne correspondait pas à leur...

  • Florence Gault

    Ça, c'est vécu comment ?

  • Mariella Eripret

    C'est vécu très, très difficilement par beaucoup. Beaucoup n'ont pas compris. Moi, j'ai pu échanger avec le gérant. Et donc, selon moi, c'est quand même un peu du mépris de classe. Et donc, pour beaucoup de membres, ça a été une déception parce qu'ils n'ont plus accès à cette boucherie. Et ils se sentent un peu humiliés. En plus, sans doute que ce n'est pas tous les membres de Calim qui ont eu un comportement. Il y a deux, trois exemples de personnes qui ont été demandées pour aller faire pipi. ou qui ont été derrière le magasin pour expliquer comment couper la viande, comment ils voulaient... Mais c'est un peu drôle quand on y pense, mais en fait, le gérant n'a pas bien...

  • Florence Gault

    Vous avez célébré les un an de l'expérimentation. Il y avait vraiment beaucoup de convivialité. J'ai trouvé, en tout cas, d'un regard extérieur, il y avait vraiment quelque chose de très chaleureux, de très convivial. On sentait qu'il y avait un vrai lien qui s'était créé.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, surtout au sein des membres du comité Calim8. Donc, ces personnes qui se réunissent régulièrement. Parce qu'après, on a au total 138 foyers. qui expérimentent. Et donc, c'est vrai qu'on a une partie des personnes qu'on voit peu et qui font le projet un peu... Ils considèrent que c'est une petite aide financière et sont un peu moins partie prenante pour certains. On était un petit peu déçus parce qu'il y avait finalement que les membres habituels qu'on voit aux réunions avec quelques autres aussi qui sont venus, mais on aurait aimé qu'il y ait plus de personnes qui soient présentes à cet événement. Mais globalement, c'est vrai qu'il y a une belle... En tout cas, entre les 30 membres, Il y a une belle cohésion qui s'est créée et c'est vrai que l'aspect social est vraiment mis en avant.

  • Florence Gault

    Ainsi au total, 138 foyers participent à cette expérimentation, aux côtés de 24 commerces partenaires, épiceries sociales et solidaires, AMAP et producteurs. Une initiative encore fragile, mais qui montre à l'échelle d'un quartier ce que pourrait être un véritable droit. à l'alimentation.

Description

Depuis un an, 138 foyers du 8ème arrondissement de Lyon participent à l’expérimentation de la Caisse de l’alimentation, portée par Territoires à Vivre et soutenue par la Métropole de Lyon. L’objectif : garantir un accès digne à des produits locaux et bio, en testant le principe de Sécurité sociale de l'alimentation.


Dans cet épisode, nous rencontrons :

  • Faten, maman solo, dont le quotidien a été transformé par la possibilité de choisir librement des aliments de qualité ;

  • Umi et Franck, qui découvrent le bio et l’agriculture locale tout en renforçant leur autonomie et leur cohésion de groupe ;

  • Sylvain, bénévole et membre du comité, qui raconte comment l’expérience lui a permis de retrouver un emploi et de tisser du lien social.


Mariella Eripret, coordinatrice du projet, nous explique les choix collectifs et les difficultés rencontrées : conventionner des producteurs locaux, gérer la diversité des besoins et maintenir la dignité de chacun. Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, rappelle l’enjeu politique de cette expérimentation : créer un modèle de solidarité alimentaire durable et ouvrir la voie à une « sécurité sociale de l’alimentation »


Un an après son lancement, cette initiative locale questionne plus largement : comment faire de l’alimentation un droit et non un privilège ?


Bonne écoute ! 🦋

Mixage : Pascal Gauthier


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Transcription

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses pour changer. Ma santé, avant tout, ma santé. Le bio m'apporte cette soif de bannir tout ce qui est industriel, d'être plus sensible aussi aux productions, fruits et légumes qui nous viennent d'ailleurs. Et que là, je fais très attention à voir la provenance, et que je ne le faisais pas. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir, et grâce. à cette expérimentation.

  • Florence Gault

    Pour Faten, habitante du 8e arrondissement de Lyon, la mise en place de la caisse de l'alimentation a été bien plus qu'un coup de pouce, elle a transformé son quotidien. Depuis un an, elle fait partie de la centaine de foyers qui testent cette expérimentation portée par Territoires à vivre Grand Lyon. Son objectif est garantir un accès digne à une alimentation locale et de qualité, choisie collectivement dans un quartier où les inégalités d'accès à une bonne alimentation restent fortes. Financée en grande partie par la métropole de Lyon et complétée par les cotisations d'habitants volontaires, cette caisse permet chaque mois d'utiliser un budget dédié chez des commerçants et producteurs conventionnés. Un an après son lancement, cette initiative révèle ses effets, une alimentation plus diversifiée, un pouvoir d'achat mieux orienté et surtout une gouvernance locale qui redonne du pouvoir d'agir aux habitants. Alors que l'expérimentation repose encore sur un modèle financier fragile, ... Elle ouvre une question plus large, comment repenser l'accès à une alimentation saine comme un droit et non comme une chance ? Reportage.

  • Extrait spectacle

    Il y a une fois dans un grand pays où 8 millions de personnes vivaient dans l'insécurité alimentaire, un petit groupe d'habitants et d'habitantes réunis avec la même conviction, l'alimentation c'est un droit. Depuis plusieurs années déjà circulait entre les foyers une idée folle, imaginée par tout un groupe de personnes, de chercheuses, d'associations, d'habitants. la création d'une sixième branche de la sécurité sociale, une branche dédiée à l'alimentation. Ce projet était alimenté par ce que les anciens avaient réussi à faire en 1947, lorsqu'à la sortie d'une immense guerre, les citoyens et leurs représentants s'étaient organisés pour faire de la santé un droit universel. Dans l'huitième arrondissement, à force d'indignation, de réunion, D'ateliers de cuisine, de visites et de rencontres, 30 personnes mobilisées autour des associations locales se sont lancées ensemble dans cette grande aventure. Connue sous le nom de Calimut, ce collectif est un riche assemblage de personnalités diverses. Ils se rassemblent, se construisent autour d'un rêve, celui de créer une société plus juste, plus solidaire. et d'améliorer l'accès à l'alimentation de qualité dans leur quartier.

  • Florence Gault

    Le 15 novembre dernier, la Caisse de l'alimentation du 8e arrondissement fêtait son premier anniversaire. Au programme, exposition, musique et temps d'échange, le public placé en cercle découvre une mise en scène artistique retraçant l'histoire de l'expérimentation. Les témoignages des habitants et de l'ensemble des parties prenantes ponctuent le récit. Une célébration immersive qui montre concrètement les changements que cette initiative a apporté dans leur quotidien.

  • Témoignage

    Bonsoir tout le monde, je suis Madame Aïba, je suis de Bayassan, moi je suis Camille, Benouit, Charles, Alain, mes épouses. Je vois des mamans autour des tables, moi j'ai toujours ravi quand je vois les gens qui s'entourent, c'est important. J'ai demandé, ils m'ont dit on fait un projet sur le quartier de la caisse alimentaire. Et moi je n'ai rien compris, mais j'ai dit ah d'accord, ok. Et de ce jour-là, je rentrais avec un immeuble.

  • Florence Gault

    Les interventions se succèdent et on découvre des histoires de vie transformées et des expériences personnelles qui révèlent l'impact de cette initiative. Parmi elles, celle d'Oumi et de Franck. Umi, maman de deux enfants et membre du comité qui a porté l'expérimentation, faisait partie des plus précaires. Sans revenu, elle dépendait auparavant de l'aide alimentaire associative. Franck, lui, a rejoint l'expérimentation en décembre 2024.

  • Umi

    Moi, au début... C'était difficile pour avoir un bon manger parce que je ne me sentais pas bien, parce que j'étais malade. Et puis il y a les trucs que je devais manger, il faut avoir de l'argent. Par exemple, il y a de l'huile d'olive, c'est cher.

  • Franck

    Moi, à la base, c'était des questionnements sur l'alimentation, le mieux manger. Et j'allais parfois dans des forums où j'ai entendu parler de cette caisse-là à Lyon 8. Et comme j'étais à Lyon 8, je me suis dit pourquoi pas, j'ai essayé.

  • Florence Gault

    Et c'était quoi les questions qu'il y avait à la base ?

  • Franck

    C'est sur le mieux manger, c'est comment bien manger, comment avoir une meilleure santé. En tout cas, c'est pas mal de questionnements par rapport à ça, l'alimentation. Et puis la justice aussi alimentaire. Je me préoccupais un peu sur la justice sociale alimentaire. Donc, c'est pour ça que je me suis aussi lancé dans cette expérience-là. Au début, il y avait pas mal de réunions sur la qualité, sur les produits, sur la justice sociale, tout ça. Donc, honnêtement, j'ai beaucoup appris. Et puis même quand j'ai commencé à acheter aussi bio, tout ça. J'ai vu que même ma santé s'est améliorée. On sent vraiment une différence.

  • Umi

    Avec cette somme-là, déjà, c'est temps d'incréduler dans la tête que le fin de mois, je vais recevoir quelque chose. Même si je n'ai pas de l'argent, j'ai petit quelque chose. Ça va m'apporter beaucoup de choses qui vont me faire bien manger, bien vivre. Déjà, ça, psychologiquement, ça va être dans ton corps.

  • Franck

    Et puis, on ne se sent pas jugé. C'est-à-dire que moi, personnellement, Biocop, c'était...

  • Umi

    C'est impossible.

  • Franck

    C'est impossible. Je passe, mais... Dès que c'est bio, bien dès que c'est... Je ne peux pas. Même dans les marchés, à certains marchés, je ne pouvais pas. Je ne pouvais même pas imaginer de passer et de prendre quelque chose. Et là, de pouvoir rentrer dans Biocop, c'était déjà...

  • Umi

    Et puis, le problème, quand tu rentres, il y a les gens, certains, parfois, ils te regardent. Mais tu rentres, tu choisis, tu paies avec ton dignité.

  • Franck

    C'est vrai que dans les magasins bio ou bien, même au niveau même, comment dire, de la réflexion, c'est différent. C'est-à-dire que... On a cette chance-là d'avoir été retenus pour expérimenter cela. Non seulement on mange bien, mais c'est aussi une ouverture d'esprit. On va voir des paysans, on va découvrir, on fait des actes de solidarité alimentaire, où on est ensemble, vraiment, au-delà seulement de l'alimentation, mais il y a toute une cohésion de groupe.

  • Umi

    Et puis ça, ma fille, elle avait tellement du poids. Maintenant, avec cette recette qu'on fait là, je le vois, elle est en train de maigrir. Elle ne veut même pas. Elle est trop paresseuse. Mais, par exemple, je fais le soir, carottes, les légumes différents. Elle va les manger le soir. Ça, je vois que même elle, les enfants d'aujourd'hui, il faut regarder ce qu'on donne aux enfants pour manger aussi. C'est important. Vraiment, c'est une fierté. Merci beaucoup, vraiment. On a assez parlé.

  • Florence Gault

    Sylvain, lui, habite dans le quartier monplaisir. Bénévole en cuisine à l'épicerie sociale et solidaire Épices et bons, il a participé à de nombreux ateliers culinaires où il a peu à peu trouvé sa vocation. En 2023, lors d'une présentation justement à Épices et bons, il découvre le projet de la caisse de l'alimentation et n'est pas vraiment convaincu de sa faisabilité. Il décide pourtant de faire partie du collectif qui met en place l'expérimentation.

  • Sylvain

    Au départ, j'étais très, très dubitatif. Tu vois, je me suis dit, c'est quoi ce machin encore ? Mais bon, allez, bref. Et on a démarré. Et du coup, j'ai senti tout de suite la même ferveur et une énergie, tu sais, comme les bâtons après une naissance, le battement d'un cœur. Et ça s'est amplifié, amplifié, amplifié, ce collectif. On s'est trouvé au départ tous les mois, tous les 15 jours, et ensuite toutes les semaines parce qu'on a multiplié de multiplier. par des commissions, des commissions, des commissions pour préparer tout le projet de la caisse.

  • Florence Gault

    Puisque l'idée, c'était vraiment que les habitants et ceux qui allaient participer à cette caisse de l'alimentation soient vraiment partie prenante et prennent toutes les décisions. C'est-à-dire qu'il n'y a personne qui est arrivé du dessus en disant on va procéder de telle et telle manière.

  • Sylvain

    Voilà, toujours en collab avec Territoires à Ville, donc Léa et Mariella et Amélie. Et on a monté notre projet petit à petit, petit à petit, jusqu'au lancement. l'inauguration qui s'est faite en septembre. 2024, et le démarrage de la caisse qui s'est fait octobre, pile. Premier octobre, lancement. Et donc là, ça fait un an.

  • Florence Gault

    Et alors ça, comment vous, vous avez vécu, vous avez dit tout à l'heure en témoignage ? que vous aussi ça a été une vraie aide dans un parcours de vie à un moment donné où c'était difficile et donc que c'était une manière de pouvoir accéder à l'alimentation de qualité.

  • Sylvain

    Alors moi je vais dire oui personnellement, moi je suis arrivé à Pissébon en poussant la porte, jamais je ne sais ce qui m'attendait, mais j'étais dans une situation de précarité due à un incident de vie, de santé et du coup malheureusement on n'est pas préparé, on n'est pas tout ça. il faut faire ça, j'ai aucun outil, je ne sais pas où je vais à l'inconnu, mais j'ai poussé cette porte. Et j'ai su tout de suite qu'ils avaient besoin de bénévoles, mais je ne savais pas ce qu'était un bénévole, moi, à l'époque. Rien du tout. Et je ne connaissais pas la précarité, je ne connaissais pas les situations, je ne connais pas cette structure. Et j'ai appris, j'ai découvert, mais en même temps, j'avais envie. Il y a un truc qui me poussait à m'engager là-dedans. et c'est pour ça qu'on m'a aidé et que ça m'a permis et ça et la caisse m'a permis si tu veux à un moment de dire mon téléphone il a sonné Vrac Métropole m'a téléphoné, dont ils ont une structure dans le 8ème qui s'appelle la MESA, et me dire « il y a un poste pour toi, donc c'est bénéfique » .

  • Florence Gault

    Et là, ce soir, on a entendu dans tous les témoignages, je trouve que c'est beaucoup ressorti, effectivement, des gens qui avaient du mal à boucler la fin de mois et donc de pouvoir se payer une alimentation de qualité, et qui, en trouvant ce collectif, ont aussi trouvé une solidarité et qui a permis pour un certain nombre de pouvoir retrouver du travail derrière. Ce qui n'était pas le but originel de la Caisse de l'alimentation, mais via ce collectif, ça allait beaucoup plus loin.

  • Sylvain

    Parce que sur Lyon, il y avait déjà des choses en amont qui se préparaient. Et du coup, le collectif a démarré. Et oui, il y a eu un truc qui s'est fait. Oui, il y a eu, je ne sais pas comment te dire, en fait, c'est ça, c'est une naissance, un battement de cœur. Mais il y a tellement eu des gens différents de fractures ou de fracturés. Et en fait, on s'est complété ou alors c'est comme Apple, tu vois. Et aujourd'hui, on continue à se côtoyer. On se voit, on se côtoie dans les structures qui sont partenaires aujourd'hui. Et moi, je dis, c'est la plus belle des richesses déjà ça.

  • Florence Gault

    Il y a eu des difficultés rencontrées justement dans toute la mise en œuvre ?

  • Sylvain

    Beaucoup de travail honnêtement. Ce n'était pas simple du tout. Mais tous ont compris. Et en fait, même les partenaires qu'on a intégrés petit à petit, parce qu'il y a eu des démarches de nous, et les questionnaires qui ont été mis en place, ça n'a pas été simple quand on allait les voir. Je parle des partenaires, c'est-à-dire les marchés, les petits producteurs, les épiceries. Bon, ils étaient déjà porteurs au projet, donc eux, ils ont adhéré. Mais il y avait une grosse volonté, on la sentait.

  • Florence Gault

    Et ça a changé quoi dans votre rapport à l'alimentation ?

  • Sylvain

    Moi, dû à mes soucis que j'ai rencontrés, j'avais arrêté le bio. Enfin, je mangeais, boire peu parce que c'était compliqué. Et puis, je n'avais plus envie de cuisiner honnêtement. Et là, le fait de côtoyer des gens. Avec des ateliers de cuisine, ça m'a redonné ça. Ensuite, il y a eu la caisse, donc ça m'a permis d'accéder à nouveau au bio. Et puis après, la suite, c'est d'avoir un emploi. Et je veux dire, aujourd'hui, je ne suis plus en précarité parce que j'ai un emploi. Mais je continue à fédérer et à soutenir, à former des gens, à leur dire, il existe ça, il existe ça. Si on peut orienter la caisse quand il y a des portes qui s'ouvrent et qu'on dit, oui, on peut prendre des nouveaux expérimentateurs, ben venez, je me renseigne et tout, on fait le truc direct.

  • Florence Gault

    Le 8e arrondissement de Lyon n'a pas été choisi par hasard pour cette expérimentation. En 2019, une étude commandée par la métropole de Lyon montrait qu'un tiers des habitants rencontraient des difficultés pour accéder à une alimentation de qualité et que 15%... ne mangeaient pas à leur faim. Pourtant, depuis quelques années, des initiatives locales tentent de transformer cette réalité. C'est à Épicentre, une épicerie sociale et solidaire, que je retrouve Mariella Eripret, chargée de mission démocratie alimentaire au sein de l'association Territoires à vivre, qui pilote l'expérimentation.

  • Mariella Eripret

    C'est ce territoire du 8e qui a été choisi, non seulement parce qu'il y a effectivement beaucoup de personnes qui ont des difficultés. Pour accéder à de l'alimentation de qualité, mais aussi parce qu'il y avait des démarches de démocratie alimentaire déjà engagées autour de la MESA, la Maison Engagée et Solidaire de l'Alimentation, qui a ouvert en 2022-2023. Et puis qu'il y avait plusieurs associations qui étaient actives aussi, comme le Secours Catholique, comme les deux épiceries sociales et solidaires, donc ICI, Épicentre, ainsi que Épices et Bons. On a la MESA donc, et puis plusieurs associations et des démarches. de démocratie où il y avait un comité d'habitants qui était mobilisé pour parler de ces questions d'alimentation dans le quartier. Et à la fois il y a aussi quand même une offre alimentaire de qualité mais qui n'est pas... pas bien répartis sur tout le territoire. Et donc, il y avait cet enjeu aussi à soutenir certains des lieux de l'arrondissement et peut-être en développer d'autres aussi par la suite.

  • Florence Gault

    Donc, ce quartier, c'était un peu la population cible que vous cherchiez à atteindre au travers de cette expérimentation ?

  • Mariella Eripret

    Oui, on cherchait à avoir une majorité de personnes en situation de précarité, mais ce projet de caisse de l'alimentation concerne en fait tout le monde. puisque le projet se base sur le concept de sécurité sociale de l'alimentation qui veut vraiment tendre vers l'universalité. C'est-à-dire que tout le monde est droit à une alimentation de qualité, mais on parle aussi des personnes qui n'ont pas forcément de soucis financiers et qui peuvent déjà avoir accès à cette alimentation, mais qui ne le font pas forcément parce qu'ils n'ont pas le temps ou pas forcément un intérêt pour ça. Et donc l'idée, c'est vraiment qu'on touche une mixité de personnes.

  • Florence Gault

    Donc il y a effectivement ceux qui bénéficient au travers de bons, on va revenir un peu sur le principe et sur concrètement comment ça fonctionne. Et puis il y a les personnes qui ont plus de moyens et donc qui peuvent contribuer à alimenter en fait cette caisse.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, on est sur un principe de cotisation selon le niveau de vie des personnes. Donc c'est à partir de 1 euro que les personnes cotisent et après il n'y a pas de limite. Donc il y a des personnes qui cotisent 300 euros et après tout le monde reçoit le même montant. Ce sont des crédits numériques sur une application et tout le monde a droit à 150 euros, quelle que soit sa situation. Donc ça, c'est 150 euros par personne et ça peut aller jusqu'à 450 euros selon la composition du foyer.

  • Florence Gault

    Ensuite, cet argent, on peut le dépenser dans des lieux partenaires comme l'épicentre où on se trouve aujourd'hui.

  • Mariella Eripret

    C'est ça. on a un peu Donc on est parti avec quatre lieux qui étaient conventionnés d'office, qui font partie des acteurs du comité technique de la caisse, donc avec lesquels on travaille depuis le début sur la mise en place du projet. Donc ce sont les deux épiceries sociales et solidaires, Épicentre, Épicébon, la MESA et une AMAP qui fait ses livraisons à la mairie du 8e, donc l'AMAP du Bachu. Et à partir de là, le comité habitant, donc une trentaine de volontaires du 8e, de tout profil, qui depuis février 2024 se réunissent toutes les deux semaines, puis maintenant tous les mois, ont décidé de conventionner d'autres lieux. Donc petit à petit, ça s'est fait avec une démarche d'aller rencontrer les gérants ou les producteurs. Ils ont préparé un questionnaire ensemble, ils ont réfléchi aux questions impertinentes à poser, qui devaient correspondre à des critères qu'ils ont mis en place eux-mêmes sur des critères de produits locaux, puis qui tendent vers plutôt le bio, en tout cas de l'agriculture paysanne. du respect des travailleurs sur tout un tas de critères sociaux et environnementaux. Et la décision est prise en session plénière avec l'ensemble des membres du comité pour décider par le consentement si le lieu est conventionné ou pas. Et donc petit à petit, depuis juillet 2024, où on a commencé les conventionnements, on est arrivé à 24 lieux.

  • Florence Gault

    24 lieux comme ici à Épicente, fait en 2014. Pour la petite anecdote, il s'agissait d'un projet de fin d'études de 4 étudiants. C'est aujourd'hui Emmanuelle qui en assure la coordination.

  • Emmanuelle

    Notre particularité, c'est quand même d'accueillir un public qui rencontre des difficultés pour s'alimenter et qui est orienté par un travailleur social. Donc notre point fort à Épicentre, c'est qu'on a un travailleur social au sein de l'épicerie qui accompagne les personnes qui ont accès à l'épicerie. On propose des produits bio et locaux et frais.

  • Florence Gault

    En termes de tarification, comment ça fonctionne ?

  • Emmanuelle

    Alors, il y a effectivement une double tarification. Nous sommes une association, donc on vit de subventions et d'appels à projets. Pour la partie personnes accompagnées, qu'on appelle porteurs de projets, on bénéficie de produits issus de la banque alimentaire. Donc la banque alimentaire fait des ramasses auprès des grandes surfaces, carrefours, au champ, tous les matins. et nous prépare les palettes sur bon de commande. Donc chaque mardi, nous allons à la banque alimentaire récupérer notre palette.

  • Florence Gault

    Avec une petite difficulté en ce moment, vous disiez tout à l'heure qu'il y a un peu moins de stock qui vous est fourni.

  • Emmanuelle

    Alors effectivement, la banque alimentaire rencontre des difficultés pour répondre aux demandes des associations. Il y a 148 associations quand même qui vont à la banque alimentaire du Rhône, parce qu'il y a une baisse de quantité et de qualité. des produits issus des grandes surfaces.

  • Florence Gault

    Là, vous me montriez les frigos.

  • Emmanuelle

    Voilà, donc cette semaine, on n'a pas eu de frais, donc on a deux frigos qui sont vides, où il doit y avoir quatre yaourts pour 39 familles. C'est un peu comment on gère,

  • Florence Gault

    justement ?

  • Emmanuelle

    Eh bien, on essaie de faire entrer de la marchandise, mais on a une charte d'approvisionnement, on ne peut pas aller chez Carrefour pour acheter des yaourts pour revendre à l'épicerie. Donc on sollicite les associations du réseau ou les autres épiceries. voir si elles ont pu avoir des yaourts. Cette semaine, personne n'a eu de yaourt, donc il n'y a pas de yaourt cette semaine. Donc on a toujours un petit stock de produits qui ne sont pas en rayon, de petites nouveautés pour montrer aux gens que oui, il n'y a pas de yaourt, mais on a du pain ou un nouveau café ou on a eu pas mal de légumes cette semaine. Donc c'est plutôt intéressant.

  • Florence Gault

    Alors vous faites partie des magasins partenaires de la Caisse de l'alimentation. Comment vous percevez cette expérimentation ? Les gens que vous rencontrez qui viennent désormais dépenser leur bon ici, est-ce que ça a changé quelque chose ?

  • Emmanuelle

    Oui, alors au niveau de la fréquentation, oui, tout à fait. Deux points de vue, au niveau effectivement du collectif Calim. Mais la Calim maintenant propose des commandes auprès d'éleveurs et de producteurs et on est point relais. Donc les gens viennent récupérer leur colis de poissons, d'agneaux. Nous ça nous permet de rencontrer justement des éleveurs, des producteurs qui pourraient aussi peut-être proposer leurs produits au sein de l'épicerie. Puis ça nous permet de rencontrer aussi de futurs adhérents parce qu'on a une association qui ne serait pas venue si la Calim n'était pas au sein d'épicentre. Donc oui, c'est très intéressant à tout point de vue.

  • Florence Gault

    La caisse de l'alimentation du 8e arrondissement de Lyon est la troisième du genre dans la région, après celle de Diolophie dans la Drôme et de Saint-Etienne dans la Loire. Son budget de 755 000 euros sur 3 ans repose sur un montage hybride. 46% financé par la métropole de Lyon, 28% par l'État et 25% par les bénéficiaires eux-mêmes. Un modèle encore fragile, l'expérimentation devait s'arrêter en novembre dernier et la rallonge de 100 000 euros votée en loin par la métropole ne permet de prolonger l'expérience que de quelques mois. Pour envisager une suite, l'association Territoires à Vivre a lancé une campagne de financement participatif. Pour Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, en charge de l'agriculture, l'alimentation et la résilience du territoire, tout l'enjeu et de pérenniser l'expérimentation.

  • Jérémy Camus

    Aujourd'hui, l'enjeu de cette expérimentation, c'était aussi d'être pas hors sol par rapport à un plaidoyer politique, ou plutôt une posture politique, et dire, nous devons aujourd'hui recréer une solidarité autour de l'alimentation. L'alimentation, ce n'est pas un produit comme les autres, ce n'est pas une marchandise, c'est peut-être le premier médicament qu'on ingère au quotidien, c'est autant de dépenses, si on consommait bien, qui seraient évitées par la nation en termes de frais de santé. Il y a un rapport qui a été réalisé il y a un an maintenant, qui montrait que quasiment 19 milliards d'euros étaient dépensés chaque année par l'État et les collectivités pour compenser les effets de notre système alimentaire. 12,5 milliards concernaient juste les dépenses santé. Donc on peut aussi trouver des externalités positives, en quelque sorte, à mieux manger. Et donc ce n'est pas qu'un projet local, en fait. Moi, ce que j'ai toujours dit, ça doit être un projet à dimension nationale. Là, on parle de solidarité. Un système comme ça existe, il faut que cette solidarité... elle soit décidée à une échelle nationale. Donc c'est un projet politique avec un grand P, très noble, de dire on doit demain créer une nouvelle branche de la sécurité sociale qui s'occupe non pas de la santé, mais qui s'occupe de l'alimentation. Et on doit créer les mécanismes de cotisation qui sont nécessaires pour financer cette opération.

  • Florence Gault

    D'où l'idée d'une proposition de loi portée notamment par Boris Tavernier, qui devait être étudiée à l'Assemblée nationale, qui finalement ne l'a pas été. de manière à ce que le relais puisse être pris au niveau national et sortir de l'expérimentation locale.

  • Jérémy Camus

    Cette proposition de loi cherche surtout à refinancer les expérimentations existantes et en multiplier d'autres. C'est-à-dire qu'on continue à avoir les bons mécanismes à mettre en œuvre localement pour que cette sécurité sociale soit optimale. Et donc là, on a encore besoin d'expérimenter. On est loin d'avoir trouvé le mécanisme parfait. Il y a beaucoup d'expérimentations partout en France maintenant qui sont nées. Ces expériences d'association vont servir à demain, s'il y a cette prise de conscience nationale, d'être prêt à déployer. Au même titre qu'en 1945, il y avait déjà des caisses de santé qui existaient et les gens avaient trouvé déjà cette solidarité, avaient déjà défini leurs règles du jeu. Et ça a été assez rapide pour essaimer ce concept de sécurité sociale. Le grand enjeu pour moi, il est surtout dans les prochains débats qu'ils vont avoir à l'échelle nationale. et il y en a en 2027. On parle aujourd'hui d'une campagne présidentielle dans laquelle on pourrait demain intégrer pleinement ce sujet de la sécurité sociale de l'alimentation et c'est un sujet qui porte en fait, on le voit et là si on revient au local, on voit très bien la force que ce sujet a auprès des habitants. En fait, l'alimentation, c'est une des premières variables d'ajustement pour les personnes, en plus, les plus précaires ou les plus en difficulté. Et donc, arriver à se dire qu'on arrive à donner les moyens à ces gens de... trouver une alimentation saine dans leur assiette, c'est déjà un super indicateur. Et l'autre indicateur, moi je rappelle souvent qu'on a une crise agricole quand même qui gronde depuis deux ans, sur laquelle on n'a trouvé aucune solution pour répondre à une problématique qui est rémunérer dignement les agriculteurs dans ce pays. Et bien demain, si on avait à peu près 150 milliards d'euros par an liés à la sécurité sociale et l'alimentation pour aller dépenser cet argent auprès des producteurs locaux, je pense qu'on a trouvé là une belle solution à la crise agricole. et peut-être une nouvelle ère du monde agricole demain dans ce pays aussi.

  • Témoignage Faten

    Bonjour, je m'appelle Fatène et je viens faire mes courses à EPICENTRE. Je suis maman d'une fille. Donc, maman solo. Et je viens faire des courses à EpiCentre, où vous avez beaucoup de produits, diverses produits, aussi bien fruits et légumes, épicerie fine, épicerie légumes secs. Vous avez, entre autres, des boissons, tout ce qu'il faut pour égayer les papilles.

  • Florence Gault

    Et ça fait combien de temps que vous participez à cette expérimentation de Calim 8 ?

  • Témoignage Faten

    Ça fait un an aujourd'hui. Et un an, on espère que ça dure et ça continue. Je vais repérer. Je vais aller au fond du magasin pour après finir au frais. Là, il y a des tortillinis, légumes.

  • Florence Gault

    Ça donne envie, là ?

  • Témoignage Faten

    Oui, totalement. Donc du coup, je vais... le paquet. Et ensuite, comme tout est à côté, à proximité, je vais me retourner, je vais prendre des pâtes. Malgré qu'il y a le nitrice corps A, je ne fais pas attention à ça. Je fais très attention à le composant des pâtes. Et je sais que les pâtes semi-complètes sont très bonnes pour la santé. Enfin, les pâtes blanches. Du fromage.

  • Florence Gault

    L'emmental râpé.

  • Témoignage Faten

    L'emmental râpé. je regarde, sans additifs, voilà. Le beurre également, les fromages blancs.

  • Florence Gault

    Et donc là, par exemple, aujourd'hui, il n'y a pas grand-chose. Est-ce que des fois, c'est une difficulté de venir et puis se dire, ah, Flûte, là, aujourd'hui, je n'ai pas ce que je voulais ?

  • Témoignage Faten

    Tout à fait, parce que quand on pense à la famille et qu'on essaie d'acheter, on sort de faire un repas et qu'on ne trouve pas ce qu'il faut, on est un peu frustré, c'est sûr. Ensuite, je vais prendre des graines de la dorée.

  • Florence Gault

    Je vois que c'est très réfléchi quand même dans les courses.

  • Témoignage Faten

    C'est une question d'habitude, mais après, je peux passer à autre chose. Mais toujours, quoi qu'il en soit, c'est toujours des produits de bonne qualité et des produits bio.

  • Florence Gault

    Vous avez toujours eu cette attention-là à l'alimentation ou est-ce que ça s'est développé et peut-être approfondi avec l'expérimentation de Calim ?

  • Témoignage Faten

    Alors, il faut dire que l'anecdote, ça a été vraiment une recherche très intensive de produits bio, de trouver des structures où ils fournissent du bio et à moindre prix. Parce que personnellement, j'ai eu une maladie il y a 20 ans de ça, une maladie de Crohn. Et c'est ça qui m'a laissé réfléchir par l'alimentation. et je me suis rendu compte que plus je mangeais des poissons, produits sains et mieux ça allait dans mon transit. Et aujourd'hui, je vais essentiellement dans cette direction-là parce que c'est une question de vie, tout simplement de survie, je dirais.

  • Florence Gault

    Mais vous vous êtes rendu compte quand même que ça représentait un budget ?

  • Témoignage Faten

    C'est pour cela qu'on en revient à mon expérience qui a fait que je me suis dirigée tant bien que mal dans des structures bio. où c'était essentiel pour moi de manger des produits de qualité, des produits fermiers, des produits d'éleveurs. Et en faisant des recherches, bizarrement, je tombe sur l'expérimentation qui m'a tellement séduit. Et là, j'ai sauté le pas et je me suis dit que c'est une aubaine de pouvoir l'expérimenter, de pouvoir être acteur, de pouvoir avoir le pouvoir d'agir.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a changé en un an ?

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses qui ont changé, que j'achète essentiellement bio, que je vais essentiellement chez les producteurs, des produits qualitatifs et qui aussi gustativement meilleurs. Et il y a beaucoup de choses qui ont changé. avant tout ma santé, le fait d'avoir cet élan d'envie d'aller plus loin, d'envie de faire bouger des choses. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir et grâce à cette expérimentation, on le vit. Le rêve devient réalité.

  • Florence Gault

    Le rêve devient réalité. Les mots de Faten sont forts, mais ils reflètent bien les différents témoignages des habitants qui participent à cette expérimentation. Un an après son lancement, des changements notables ont été constatés, comme en témoigne Mariella Erypré en charge de la caisse.

  • Mariella Eripret

    On a un cabinet d'évaluation qui est mandaté par la métropole, qui a pu faire une évaluation du projet, avec des questionnaires, en rencontrant certains membres de la caisse. Et nous aussi, en tant qu'animatrice avec ma collègue Léa, on a beaucoup de retours très positifs, uniquement positifs. Il faut dire que les gens sont ravis de pouvoir découvrir des bons produits. Pour certains, c'est une aide financière parce qu'ils cotisent peu et donc ils bénéficient d'un versement assez conséquent. Ils sont donc très contents de pouvoir mieux se nourrir. Certains nous témoignent le fait qu'ils avaient plus de problèmes de santé avant. ou leurs conjoints ou leurs enfants ont des problèmes de santé et du coup, c'était important pour eux de pouvoir mieux manger. Et puis, il y a l'effet aussi sur la dignité, sur le fait de pouvoir rentrer dans des magasins comme ça, aller au marché, rencontrer les producteurs, pouvoir choisir ses produits. Le fait aussi de participer à un groupe, donc ça, c'est surtout pour les membres investis dans le comité décisionnaire Calim8, qui se rencontrent tous les mois maintenant et qui ont tissé des liens, comme je disais tout à l'heure. il y a un aspect quand même vraiment de... cohésion de groupe, de fierté de faire partie d'un projet, de pouvoir prendre des décisions et d'être entendue, et que ça fonctionne réellement. Il y a des bienfaits aussi en termes, c'est les producteurs qui nous le disent. Les producteurs, comme je disais, ne bénéficient pas d'une manne financière extraordinaire avec ce projet, mais le fait d'avoir des liens avec des personnes qu'ils ne voient pas habituellement sur le marché, ils sont contents de pouvoir... Il y a des voyages comme ça, d'une femme qui vient... puis qui leur a préparé des sirops, qui leur apporte des choses. Il y a une femme dans l'AMAP, l'Association pour le maintien d'une agriculture paysanne, qui ne connaissait pas le système des AMAP, et grâce à la caisse, elle est rentrée dans l'AMAP. Et les producteurs sont ravis, elle leur apporte des gâteaux, elle est hyper investie dans le truc. Il y a plein de petits témoignages comme ça.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a pu être difficile, ou quelles ont été les difficultés rencontrées au moment de la mise en place ?

  • Mariella Eripret

    Les difficultés rencontrées, je dirais que c'est sur la compréhension par chacun. C'est-à-dire que pour prendre des décisions à 30, il faut s'assurer que tout le monde ait bien compris les enjeux. Et ce n'est pas toujours simple, parce que ce sont des projets assez complexes. Donc l'idée, c'est de faire de l'éducation populaire, et que ça se transmette aussi entre les personnes qui sont un peu plus avancées et celles qui sont un peu plus en retrait. Les difficultés ça a pu être aussi en termes de lieux conventionnés. Donc ça prend du temps par exemple toute la démarche d'aller rencontrer des producteurs sur les marchés, de les interroger, le questionnaire est assez long quand même. Ils n'ont pas le temps, ils sont avec des clients. Puis certains n'ont jamais répondu à la sollicitation, la proposition d'être conventionnés. Et puis on a eu aussi un petit échec avec une boucherie halal. qui a été conventionné pendant deux mois dans le sixième arrondissement parce qu'on a beaucoup de musulmans dans la caisse et ils étaient ravis de pouvoir accéder à de la viande de très bonne qualité produite selon la charte du bio, qui est assez chère, que les personnes n'auraient pas accès s'il n'y avait pas la caisse. Et donc il y a eu un... un engouement fort pour cette boucherie pendant deux mois où beaucoup sont allés acheter leur viande, étaient ravis. Et puis, au bout de deux mois, le gérant a souhaité arrêter le conventionnement parce qu'il considérait que la clientèle amenée par Calimut ne correspondait pas à sa clientèle de luxe et son image de luxe. Ce ne sont pas les clients qui se sont plaints, c'est vraiment le gérant qui a considéré que ça ne correspondait pas à leur...

  • Florence Gault

    Ça, c'est vécu comment ?

  • Mariella Eripret

    C'est vécu très, très difficilement par beaucoup. Beaucoup n'ont pas compris. Moi, j'ai pu échanger avec le gérant. Et donc, selon moi, c'est quand même un peu du mépris de classe. Et donc, pour beaucoup de membres, ça a été une déception parce qu'ils n'ont plus accès à cette boucherie. Et ils se sentent un peu humiliés. En plus, sans doute que ce n'est pas tous les membres de Calim qui ont eu un comportement. Il y a deux, trois exemples de personnes qui ont été demandées pour aller faire pipi. ou qui ont été derrière le magasin pour expliquer comment couper la viande, comment ils voulaient... Mais c'est un peu drôle quand on y pense, mais en fait, le gérant n'a pas bien...

  • Florence Gault

    Vous avez célébré les un an de l'expérimentation. Il y avait vraiment beaucoup de convivialité. J'ai trouvé, en tout cas, d'un regard extérieur, il y avait vraiment quelque chose de très chaleureux, de très convivial. On sentait qu'il y avait un vrai lien qui s'était créé.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, surtout au sein des membres du comité Calim8. Donc, ces personnes qui se réunissent régulièrement. Parce qu'après, on a au total 138 foyers. qui expérimentent. Et donc, c'est vrai qu'on a une partie des personnes qu'on voit peu et qui font le projet un peu... Ils considèrent que c'est une petite aide financière et sont un peu moins partie prenante pour certains. On était un petit peu déçus parce qu'il y avait finalement que les membres habituels qu'on voit aux réunions avec quelques autres aussi qui sont venus, mais on aurait aimé qu'il y ait plus de personnes qui soient présentes à cet événement. Mais globalement, c'est vrai qu'il y a une belle... En tout cas, entre les 30 membres, Il y a une belle cohésion qui s'est créée et c'est vrai que l'aspect social est vraiment mis en avant.

  • Florence Gault

    Ainsi au total, 138 foyers participent à cette expérimentation, aux côtés de 24 commerces partenaires, épiceries sociales et solidaires, AMAP et producteurs. Une initiative encore fragile, mais qui montre à l'échelle d'un quartier ce que pourrait être un véritable droit. à l'alimentation.

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Description

Depuis un an, 138 foyers du 8ème arrondissement de Lyon participent à l’expérimentation de la Caisse de l’alimentation, portée par Territoires à Vivre et soutenue par la Métropole de Lyon. L’objectif : garantir un accès digne à des produits locaux et bio, en testant le principe de Sécurité sociale de l'alimentation.


Dans cet épisode, nous rencontrons :

  • Faten, maman solo, dont le quotidien a été transformé par la possibilité de choisir librement des aliments de qualité ;

  • Umi et Franck, qui découvrent le bio et l’agriculture locale tout en renforçant leur autonomie et leur cohésion de groupe ;

  • Sylvain, bénévole et membre du comité, qui raconte comment l’expérience lui a permis de retrouver un emploi et de tisser du lien social.


Mariella Eripret, coordinatrice du projet, nous explique les choix collectifs et les difficultés rencontrées : conventionner des producteurs locaux, gérer la diversité des besoins et maintenir la dignité de chacun. Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, rappelle l’enjeu politique de cette expérimentation : créer un modèle de solidarité alimentaire durable et ouvrir la voie à une « sécurité sociale de l’alimentation »


Un an après son lancement, cette initiative locale questionne plus largement : comment faire de l’alimentation un droit et non un privilège ?


Bonne écoute ! 🦋

Mixage : Pascal Gauthier


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Transcription

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses pour changer. Ma santé, avant tout, ma santé. Le bio m'apporte cette soif de bannir tout ce qui est industriel, d'être plus sensible aussi aux productions, fruits et légumes qui nous viennent d'ailleurs. Et que là, je fais très attention à voir la provenance, et que je ne le faisais pas. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir, et grâce. à cette expérimentation.

  • Florence Gault

    Pour Faten, habitante du 8e arrondissement de Lyon, la mise en place de la caisse de l'alimentation a été bien plus qu'un coup de pouce, elle a transformé son quotidien. Depuis un an, elle fait partie de la centaine de foyers qui testent cette expérimentation portée par Territoires à vivre Grand Lyon. Son objectif est garantir un accès digne à une alimentation locale et de qualité, choisie collectivement dans un quartier où les inégalités d'accès à une bonne alimentation restent fortes. Financée en grande partie par la métropole de Lyon et complétée par les cotisations d'habitants volontaires, cette caisse permet chaque mois d'utiliser un budget dédié chez des commerçants et producteurs conventionnés. Un an après son lancement, cette initiative révèle ses effets, une alimentation plus diversifiée, un pouvoir d'achat mieux orienté et surtout une gouvernance locale qui redonne du pouvoir d'agir aux habitants. Alors que l'expérimentation repose encore sur un modèle financier fragile, ... Elle ouvre une question plus large, comment repenser l'accès à une alimentation saine comme un droit et non comme une chance ? Reportage.

  • Extrait spectacle

    Il y a une fois dans un grand pays où 8 millions de personnes vivaient dans l'insécurité alimentaire, un petit groupe d'habitants et d'habitantes réunis avec la même conviction, l'alimentation c'est un droit. Depuis plusieurs années déjà circulait entre les foyers une idée folle, imaginée par tout un groupe de personnes, de chercheuses, d'associations, d'habitants. la création d'une sixième branche de la sécurité sociale, une branche dédiée à l'alimentation. Ce projet était alimenté par ce que les anciens avaient réussi à faire en 1947, lorsqu'à la sortie d'une immense guerre, les citoyens et leurs représentants s'étaient organisés pour faire de la santé un droit universel. Dans l'huitième arrondissement, à force d'indignation, de réunion, D'ateliers de cuisine, de visites et de rencontres, 30 personnes mobilisées autour des associations locales se sont lancées ensemble dans cette grande aventure. Connue sous le nom de Calimut, ce collectif est un riche assemblage de personnalités diverses. Ils se rassemblent, se construisent autour d'un rêve, celui de créer une société plus juste, plus solidaire. et d'améliorer l'accès à l'alimentation de qualité dans leur quartier.

  • Florence Gault

    Le 15 novembre dernier, la Caisse de l'alimentation du 8e arrondissement fêtait son premier anniversaire. Au programme, exposition, musique et temps d'échange, le public placé en cercle découvre une mise en scène artistique retraçant l'histoire de l'expérimentation. Les témoignages des habitants et de l'ensemble des parties prenantes ponctuent le récit. Une célébration immersive qui montre concrètement les changements que cette initiative a apporté dans leur quotidien.

  • Témoignage

    Bonsoir tout le monde, je suis Madame Aïba, je suis de Bayassan, moi je suis Camille, Benouit, Charles, Alain, mes épouses. Je vois des mamans autour des tables, moi j'ai toujours ravi quand je vois les gens qui s'entourent, c'est important. J'ai demandé, ils m'ont dit on fait un projet sur le quartier de la caisse alimentaire. Et moi je n'ai rien compris, mais j'ai dit ah d'accord, ok. Et de ce jour-là, je rentrais avec un immeuble.

  • Florence Gault

    Les interventions se succèdent et on découvre des histoires de vie transformées et des expériences personnelles qui révèlent l'impact de cette initiative. Parmi elles, celle d'Oumi et de Franck. Umi, maman de deux enfants et membre du comité qui a porté l'expérimentation, faisait partie des plus précaires. Sans revenu, elle dépendait auparavant de l'aide alimentaire associative. Franck, lui, a rejoint l'expérimentation en décembre 2024.

  • Umi

    Moi, au début... C'était difficile pour avoir un bon manger parce que je ne me sentais pas bien, parce que j'étais malade. Et puis il y a les trucs que je devais manger, il faut avoir de l'argent. Par exemple, il y a de l'huile d'olive, c'est cher.

  • Franck

    Moi, à la base, c'était des questionnements sur l'alimentation, le mieux manger. Et j'allais parfois dans des forums où j'ai entendu parler de cette caisse-là à Lyon 8. Et comme j'étais à Lyon 8, je me suis dit pourquoi pas, j'ai essayé.

  • Florence Gault

    Et c'était quoi les questions qu'il y avait à la base ?

  • Franck

    C'est sur le mieux manger, c'est comment bien manger, comment avoir une meilleure santé. En tout cas, c'est pas mal de questionnements par rapport à ça, l'alimentation. Et puis la justice aussi alimentaire. Je me préoccupais un peu sur la justice sociale alimentaire. Donc, c'est pour ça que je me suis aussi lancé dans cette expérience-là. Au début, il y avait pas mal de réunions sur la qualité, sur les produits, sur la justice sociale, tout ça. Donc, honnêtement, j'ai beaucoup appris. Et puis même quand j'ai commencé à acheter aussi bio, tout ça. J'ai vu que même ma santé s'est améliorée. On sent vraiment une différence.

  • Umi

    Avec cette somme-là, déjà, c'est temps d'incréduler dans la tête que le fin de mois, je vais recevoir quelque chose. Même si je n'ai pas de l'argent, j'ai petit quelque chose. Ça va m'apporter beaucoup de choses qui vont me faire bien manger, bien vivre. Déjà, ça, psychologiquement, ça va être dans ton corps.

  • Franck

    Et puis, on ne se sent pas jugé. C'est-à-dire que moi, personnellement, Biocop, c'était...

  • Umi

    C'est impossible.

  • Franck

    C'est impossible. Je passe, mais... Dès que c'est bio, bien dès que c'est... Je ne peux pas. Même dans les marchés, à certains marchés, je ne pouvais pas. Je ne pouvais même pas imaginer de passer et de prendre quelque chose. Et là, de pouvoir rentrer dans Biocop, c'était déjà...

  • Umi

    Et puis, le problème, quand tu rentres, il y a les gens, certains, parfois, ils te regardent. Mais tu rentres, tu choisis, tu paies avec ton dignité.

  • Franck

    C'est vrai que dans les magasins bio ou bien, même au niveau même, comment dire, de la réflexion, c'est différent. C'est-à-dire que... On a cette chance-là d'avoir été retenus pour expérimenter cela. Non seulement on mange bien, mais c'est aussi une ouverture d'esprit. On va voir des paysans, on va découvrir, on fait des actes de solidarité alimentaire, où on est ensemble, vraiment, au-delà seulement de l'alimentation, mais il y a toute une cohésion de groupe.

  • Umi

    Et puis ça, ma fille, elle avait tellement du poids. Maintenant, avec cette recette qu'on fait là, je le vois, elle est en train de maigrir. Elle ne veut même pas. Elle est trop paresseuse. Mais, par exemple, je fais le soir, carottes, les légumes différents. Elle va les manger le soir. Ça, je vois que même elle, les enfants d'aujourd'hui, il faut regarder ce qu'on donne aux enfants pour manger aussi. C'est important. Vraiment, c'est une fierté. Merci beaucoup, vraiment. On a assez parlé.

  • Florence Gault

    Sylvain, lui, habite dans le quartier monplaisir. Bénévole en cuisine à l'épicerie sociale et solidaire Épices et bons, il a participé à de nombreux ateliers culinaires où il a peu à peu trouvé sa vocation. En 2023, lors d'une présentation justement à Épices et bons, il découvre le projet de la caisse de l'alimentation et n'est pas vraiment convaincu de sa faisabilité. Il décide pourtant de faire partie du collectif qui met en place l'expérimentation.

  • Sylvain

    Au départ, j'étais très, très dubitatif. Tu vois, je me suis dit, c'est quoi ce machin encore ? Mais bon, allez, bref. Et on a démarré. Et du coup, j'ai senti tout de suite la même ferveur et une énergie, tu sais, comme les bâtons après une naissance, le battement d'un cœur. Et ça s'est amplifié, amplifié, amplifié, ce collectif. On s'est trouvé au départ tous les mois, tous les 15 jours, et ensuite toutes les semaines parce qu'on a multiplié de multiplier. par des commissions, des commissions, des commissions pour préparer tout le projet de la caisse.

  • Florence Gault

    Puisque l'idée, c'était vraiment que les habitants et ceux qui allaient participer à cette caisse de l'alimentation soient vraiment partie prenante et prennent toutes les décisions. C'est-à-dire qu'il n'y a personne qui est arrivé du dessus en disant on va procéder de telle et telle manière.

  • Sylvain

    Voilà, toujours en collab avec Territoires à Ville, donc Léa et Mariella et Amélie. Et on a monté notre projet petit à petit, petit à petit, jusqu'au lancement. l'inauguration qui s'est faite en septembre. 2024, et le démarrage de la caisse qui s'est fait octobre, pile. Premier octobre, lancement. Et donc là, ça fait un an.

  • Florence Gault

    Et alors ça, comment vous, vous avez vécu, vous avez dit tout à l'heure en témoignage ? que vous aussi ça a été une vraie aide dans un parcours de vie à un moment donné où c'était difficile et donc que c'était une manière de pouvoir accéder à l'alimentation de qualité.

  • Sylvain

    Alors moi je vais dire oui personnellement, moi je suis arrivé à Pissébon en poussant la porte, jamais je ne sais ce qui m'attendait, mais j'étais dans une situation de précarité due à un incident de vie, de santé et du coup malheureusement on n'est pas préparé, on n'est pas tout ça. il faut faire ça, j'ai aucun outil, je ne sais pas où je vais à l'inconnu, mais j'ai poussé cette porte. Et j'ai su tout de suite qu'ils avaient besoin de bénévoles, mais je ne savais pas ce qu'était un bénévole, moi, à l'époque. Rien du tout. Et je ne connaissais pas la précarité, je ne connaissais pas les situations, je ne connais pas cette structure. Et j'ai appris, j'ai découvert, mais en même temps, j'avais envie. Il y a un truc qui me poussait à m'engager là-dedans. et c'est pour ça qu'on m'a aidé et que ça m'a permis et ça et la caisse m'a permis si tu veux à un moment de dire mon téléphone il a sonné Vrac Métropole m'a téléphoné, dont ils ont une structure dans le 8ème qui s'appelle la MESA, et me dire « il y a un poste pour toi, donc c'est bénéfique » .

  • Florence Gault

    Et là, ce soir, on a entendu dans tous les témoignages, je trouve que c'est beaucoup ressorti, effectivement, des gens qui avaient du mal à boucler la fin de mois et donc de pouvoir se payer une alimentation de qualité, et qui, en trouvant ce collectif, ont aussi trouvé une solidarité et qui a permis pour un certain nombre de pouvoir retrouver du travail derrière. Ce qui n'était pas le but originel de la Caisse de l'alimentation, mais via ce collectif, ça allait beaucoup plus loin.

  • Sylvain

    Parce que sur Lyon, il y avait déjà des choses en amont qui se préparaient. Et du coup, le collectif a démarré. Et oui, il y a eu un truc qui s'est fait. Oui, il y a eu, je ne sais pas comment te dire, en fait, c'est ça, c'est une naissance, un battement de cœur. Mais il y a tellement eu des gens différents de fractures ou de fracturés. Et en fait, on s'est complété ou alors c'est comme Apple, tu vois. Et aujourd'hui, on continue à se côtoyer. On se voit, on se côtoie dans les structures qui sont partenaires aujourd'hui. Et moi, je dis, c'est la plus belle des richesses déjà ça.

  • Florence Gault

    Il y a eu des difficultés rencontrées justement dans toute la mise en œuvre ?

  • Sylvain

    Beaucoup de travail honnêtement. Ce n'était pas simple du tout. Mais tous ont compris. Et en fait, même les partenaires qu'on a intégrés petit à petit, parce qu'il y a eu des démarches de nous, et les questionnaires qui ont été mis en place, ça n'a pas été simple quand on allait les voir. Je parle des partenaires, c'est-à-dire les marchés, les petits producteurs, les épiceries. Bon, ils étaient déjà porteurs au projet, donc eux, ils ont adhéré. Mais il y avait une grosse volonté, on la sentait.

  • Florence Gault

    Et ça a changé quoi dans votre rapport à l'alimentation ?

  • Sylvain

    Moi, dû à mes soucis que j'ai rencontrés, j'avais arrêté le bio. Enfin, je mangeais, boire peu parce que c'était compliqué. Et puis, je n'avais plus envie de cuisiner honnêtement. Et là, le fait de côtoyer des gens. Avec des ateliers de cuisine, ça m'a redonné ça. Ensuite, il y a eu la caisse, donc ça m'a permis d'accéder à nouveau au bio. Et puis après, la suite, c'est d'avoir un emploi. Et je veux dire, aujourd'hui, je ne suis plus en précarité parce que j'ai un emploi. Mais je continue à fédérer et à soutenir, à former des gens, à leur dire, il existe ça, il existe ça. Si on peut orienter la caisse quand il y a des portes qui s'ouvrent et qu'on dit, oui, on peut prendre des nouveaux expérimentateurs, ben venez, je me renseigne et tout, on fait le truc direct.

  • Florence Gault

    Le 8e arrondissement de Lyon n'a pas été choisi par hasard pour cette expérimentation. En 2019, une étude commandée par la métropole de Lyon montrait qu'un tiers des habitants rencontraient des difficultés pour accéder à une alimentation de qualité et que 15%... ne mangeaient pas à leur faim. Pourtant, depuis quelques années, des initiatives locales tentent de transformer cette réalité. C'est à Épicentre, une épicerie sociale et solidaire, que je retrouve Mariella Eripret, chargée de mission démocratie alimentaire au sein de l'association Territoires à vivre, qui pilote l'expérimentation.

  • Mariella Eripret

    C'est ce territoire du 8e qui a été choisi, non seulement parce qu'il y a effectivement beaucoup de personnes qui ont des difficultés. Pour accéder à de l'alimentation de qualité, mais aussi parce qu'il y avait des démarches de démocratie alimentaire déjà engagées autour de la MESA, la Maison Engagée et Solidaire de l'Alimentation, qui a ouvert en 2022-2023. Et puis qu'il y avait plusieurs associations qui étaient actives aussi, comme le Secours Catholique, comme les deux épiceries sociales et solidaires, donc ICI, Épicentre, ainsi que Épices et Bons. On a la MESA donc, et puis plusieurs associations et des démarches. de démocratie où il y avait un comité d'habitants qui était mobilisé pour parler de ces questions d'alimentation dans le quartier. Et à la fois il y a aussi quand même une offre alimentaire de qualité mais qui n'est pas... pas bien répartis sur tout le territoire. Et donc, il y avait cet enjeu aussi à soutenir certains des lieux de l'arrondissement et peut-être en développer d'autres aussi par la suite.

  • Florence Gault

    Donc, ce quartier, c'était un peu la population cible que vous cherchiez à atteindre au travers de cette expérimentation ?

  • Mariella Eripret

    Oui, on cherchait à avoir une majorité de personnes en situation de précarité, mais ce projet de caisse de l'alimentation concerne en fait tout le monde. puisque le projet se base sur le concept de sécurité sociale de l'alimentation qui veut vraiment tendre vers l'universalité. C'est-à-dire que tout le monde est droit à une alimentation de qualité, mais on parle aussi des personnes qui n'ont pas forcément de soucis financiers et qui peuvent déjà avoir accès à cette alimentation, mais qui ne le font pas forcément parce qu'ils n'ont pas le temps ou pas forcément un intérêt pour ça. Et donc l'idée, c'est vraiment qu'on touche une mixité de personnes.

  • Florence Gault

    Donc il y a effectivement ceux qui bénéficient au travers de bons, on va revenir un peu sur le principe et sur concrètement comment ça fonctionne. Et puis il y a les personnes qui ont plus de moyens et donc qui peuvent contribuer à alimenter en fait cette caisse.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, on est sur un principe de cotisation selon le niveau de vie des personnes. Donc c'est à partir de 1 euro que les personnes cotisent et après il n'y a pas de limite. Donc il y a des personnes qui cotisent 300 euros et après tout le monde reçoit le même montant. Ce sont des crédits numériques sur une application et tout le monde a droit à 150 euros, quelle que soit sa situation. Donc ça, c'est 150 euros par personne et ça peut aller jusqu'à 450 euros selon la composition du foyer.

  • Florence Gault

    Ensuite, cet argent, on peut le dépenser dans des lieux partenaires comme l'épicentre où on se trouve aujourd'hui.

  • Mariella Eripret

    C'est ça. on a un peu Donc on est parti avec quatre lieux qui étaient conventionnés d'office, qui font partie des acteurs du comité technique de la caisse, donc avec lesquels on travaille depuis le début sur la mise en place du projet. Donc ce sont les deux épiceries sociales et solidaires, Épicentre, Épicébon, la MESA et une AMAP qui fait ses livraisons à la mairie du 8e, donc l'AMAP du Bachu. Et à partir de là, le comité habitant, donc une trentaine de volontaires du 8e, de tout profil, qui depuis février 2024 se réunissent toutes les deux semaines, puis maintenant tous les mois, ont décidé de conventionner d'autres lieux. Donc petit à petit, ça s'est fait avec une démarche d'aller rencontrer les gérants ou les producteurs. Ils ont préparé un questionnaire ensemble, ils ont réfléchi aux questions impertinentes à poser, qui devaient correspondre à des critères qu'ils ont mis en place eux-mêmes sur des critères de produits locaux, puis qui tendent vers plutôt le bio, en tout cas de l'agriculture paysanne. du respect des travailleurs sur tout un tas de critères sociaux et environnementaux. Et la décision est prise en session plénière avec l'ensemble des membres du comité pour décider par le consentement si le lieu est conventionné ou pas. Et donc petit à petit, depuis juillet 2024, où on a commencé les conventionnements, on est arrivé à 24 lieux.

  • Florence Gault

    24 lieux comme ici à Épicente, fait en 2014. Pour la petite anecdote, il s'agissait d'un projet de fin d'études de 4 étudiants. C'est aujourd'hui Emmanuelle qui en assure la coordination.

  • Emmanuelle

    Notre particularité, c'est quand même d'accueillir un public qui rencontre des difficultés pour s'alimenter et qui est orienté par un travailleur social. Donc notre point fort à Épicentre, c'est qu'on a un travailleur social au sein de l'épicerie qui accompagne les personnes qui ont accès à l'épicerie. On propose des produits bio et locaux et frais.

  • Florence Gault

    En termes de tarification, comment ça fonctionne ?

  • Emmanuelle

    Alors, il y a effectivement une double tarification. Nous sommes une association, donc on vit de subventions et d'appels à projets. Pour la partie personnes accompagnées, qu'on appelle porteurs de projets, on bénéficie de produits issus de la banque alimentaire. Donc la banque alimentaire fait des ramasses auprès des grandes surfaces, carrefours, au champ, tous les matins. et nous prépare les palettes sur bon de commande. Donc chaque mardi, nous allons à la banque alimentaire récupérer notre palette.

  • Florence Gault

    Avec une petite difficulté en ce moment, vous disiez tout à l'heure qu'il y a un peu moins de stock qui vous est fourni.

  • Emmanuelle

    Alors effectivement, la banque alimentaire rencontre des difficultés pour répondre aux demandes des associations. Il y a 148 associations quand même qui vont à la banque alimentaire du Rhône, parce qu'il y a une baisse de quantité et de qualité. des produits issus des grandes surfaces.

  • Florence Gault

    Là, vous me montriez les frigos.

  • Emmanuelle

    Voilà, donc cette semaine, on n'a pas eu de frais, donc on a deux frigos qui sont vides, où il doit y avoir quatre yaourts pour 39 familles. C'est un peu comment on gère,

  • Florence Gault

    justement ?

  • Emmanuelle

    Eh bien, on essaie de faire entrer de la marchandise, mais on a une charte d'approvisionnement, on ne peut pas aller chez Carrefour pour acheter des yaourts pour revendre à l'épicerie. Donc on sollicite les associations du réseau ou les autres épiceries. voir si elles ont pu avoir des yaourts. Cette semaine, personne n'a eu de yaourt, donc il n'y a pas de yaourt cette semaine. Donc on a toujours un petit stock de produits qui ne sont pas en rayon, de petites nouveautés pour montrer aux gens que oui, il n'y a pas de yaourt, mais on a du pain ou un nouveau café ou on a eu pas mal de légumes cette semaine. Donc c'est plutôt intéressant.

  • Florence Gault

    Alors vous faites partie des magasins partenaires de la Caisse de l'alimentation. Comment vous percevez cette expérimentation ? Les gens que vous rencontrez qui viennent désormais dépenser leur bon ici, est-ce que ça a changé quelque chose ?

  • Emmanuelle

    Oui, alors au niveau de la fréquentation, oui, tout à fait. Deux points de vue, au niveau effectivement du collectif Calim. Mais la Calim maintenant propose des commandes auprès d'éleveurs et de producteurs et on est point relais. Donc les gens viennent récupérer leur colis de poissons, d'agneaux. Nous ça nous permet de rencontrer justement des éleveurs, des producteurs qui pourraient aussi peut-être proposer leurs produits au sein de l'épicerie. Puis ça nous permet de rencontrer aussi de futurs adhérents parce qu'on a une association qui ne serait pas venue si la Calim n'était pas au sein d'épicentre. Donc oui, c'est très intéressant à tout point de vue.

  • Florence Gault

    La caisse de l'alimentation du 8e arrondissement de Lyon est la troisième du genre dans la région, après celle de Diolophie dans la Drôme et de Saint-Etienne dans la Loire. Son budget de 755 000 euros sur 3 ans repose sur un montage hybride. 46% financé par la métropole de Lyon, 28% par l'État et 25% par les bénéficiaires eux-mêmes. Un modèle encore fragile, l'expérimentation devait s'arrêter en novembre dernier et la rallonge de 100 000 euros votée en loin par la métropole ne permet de prolonger l'expérience que de quelques mois. Pour envisager une suite, l'association Territoires à Vivre a lancé une campagne de financement participatif. Pour Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, en charge de l'agriculture, l'alimentation et la résilience du territoire, tout l'enjeu et de pérenniser l'expérimentation.

  • Jérémy Camus

    Aujourd'hui, l'enjeu de cette expérimentation, c'était aussi d'être pas hors sol par rapport à un plaidoyer politique, ou plutôt une posture politique, et dire, nous devons aujourd'hui recréer une solidarité autour de l'alimentation. L'alimentation, ce n'est pas un produit comme les autres, ce n'est pas une marchandise, c'est peut-être le premier médicament qu'on ingère au quotidien, c'est autant de dépenses, si on consommait bien, qui seraient évitées par la nation en termes de frais de santé. Il y a un rapport qui a été réalisé il y a un an maintenant, qui montrait que quasiment 19 milliards d'euros étaient dépensés chaque année par l'État et les collectivités pour compenser les effets de notre système alimentaire. 12,5 milliards concernaient juste les dépenses santé. Donc on peut aussi trouver des externalités positives, en quelque sorte, à mieux manger. Et donc ce n'est pas qu'un projet local, en fait. Moi, ce que j'ai toujours dit, ça doit être un projet à dimension nationale. Là, on parle de solidarité. Un système comme ça existe, il faut que cette solidarité... elle soit décidée à une échelle nationale. Donc c'est un projet politique avec un grand P, très noble, de dire on doit demain créer une nouvelle branche de la sécurité sociale qui s'occupe non pas de la santé, mais qui s'occupe de l'alimentation. Et on doit créer les mécanismes de cotisation qui sont nécessaires pour financer cette opération.

  • Florence Gault

    D'où l'idée d'une proposition de loi portée notamment par Boris Tavernier, qui devait être étudiée à l'Assemblée nationale, qui finalement ne l'a pas été. de manière à ce que le relais puisse être pris au niveau national et sortir de l'expérimentation locale.

  • Jérémy Camus

    Cette proposition de loi cherche surtout à refinancer les expérimentations existantes et en multiplier d'autres. C'est-à-dire qu'on continue à avoir les bons mécanismes à mettre en œuvre localement pour que cette sécurité sociale soit optimale. Et donc là, on a encore besoin d'expérimenter. On est loin d'avoir trouvé le mécanisme parfait. Il y a beaucoup d'expérimentations partout en France maintenant qui sont nées. Ces expériences d'association vont servir à demain, s'il y a cette prise de conscience nationale, d'être prêt à déployer. Au même titre qu'en 1945, il y avait déjà des caisses de santé qui existaient et les gens avaient trouvé déjà cette solidarité, avaient déjà défini leurs règles du jeu. Et ça a été assez rapide pour essaimer ce concept de sécurité sociale. Le grand enjeu pour moi, il est surtout dans les prochains débats qu'ils vont avoir à l'échelle nationale. et il y en a en 2027. On parle aujourd'hui d'une campagne présidentielle dans laquelle on pourrait demain intégrer pleinement ce sujet de la sécurité sociale de l'alimentation et c'est un sujet qui porte en fait, on le voit et là si on revient au local, on voit très bien la force que ce sujet a auprès des habitants. En fait, l'alimentation, c'est une des premières variables d'ajustement pour les personnes, en plus, les plus précaires ou les plus en difficulté. Et donc, arriver à se dire qu'on arrive à donner les moyens à ces gens de... trouver une alimentation saine dans leur assiette, c'est déjà un super indicateur. Et l'autre indicateur, moi je rappelle souvent qu'on a une crise agricole quand même qui gronde depuis deux ans, sur laquelle on n'a trouvé aucune solution pour répondre à une problématique qui est rémunérer dignement les agriculteurs dans ce pays. Et bien demain, si on avait à peu près 150 milliards d'euros par an liés à la sécurité sociale et l'alimentation pour aller dépenser cet argent auprès des producteurs locaux, je pense qu'on a trouvé là une belle solution à la crise agricole. et peut-être une nouvelle ère du monde agricole demain dans ce pays aussi.

  • Témoignage Faten

    Bonjour, je m'appelle Fatène et je viens faire mes courses à EPICENTRE. Je suis maman d'une fille. Donc, maman solo. Et je viens faire des courses à EpiCentre, où vous avez beaucoup de produits, diverses produits, aussi bien fruits et légumes, épicerie fine, épicerie légumes secs. Vous avez, entre autres, des boissons, tout ce qu'il faut pour égayer les papilles.

  • Florence Gault

    Et ça fait combien de temps que vous participez à cette expérimentation de Calim 8 ?

  • Témoignage Faten

    Ça fait un an aujourd'hui. Et un an, on espère que ça dure et ça continue. Je vais repérer. Je vais aller au fond du magasin pour après finir au frais. Là, il y a des tortillinis, légumes.

  • Florence Gault

    Ça donne envie, là ?

  • Témoignage Faten

    Oui, totalement. Donc du coup, je vais... le paquet. Et ensuite, comme tout est à côté, à proximité, je vais me retourner, je vais prendre des pâtes. Malgré qu'il y a le nitrice corps A, je ne fais pas attention à ça. Je fais très attention à le composant des pâtes. Et je sais que les pâtes semi-complètes sont très bonnes pour la santé. Enfin, les pâtes blanches. Du fromage.

  • Florence Gault

    L'emmental râpé.

  • Témoignage Faten

    L'emmental râpé. je regarde, sans additifs, voilà. Le beurre également, les fromages blancs.

  • Florence Gault

    Et donc là, par exemple, aujourd'hui, il n'y a pas grand-chose. Est-ce que des fois, c'est une difficulté de venir et puis se dire, ah, Flûte, là, aujourd'hui, je n'ai pas ce que je voulais ?

  • Témoignage Faten

    Tout à fait, parce que quand on pense à la famille et qu'on essaie d'acheter, on sort de faire un repas et qu'on ne trouve pas ce qu'il faut, on est un peu frustré, c'est sûr. Ensuite, je vais prendre des graines de la dorée.

  • Florence Gault

    Je vois que c'est très réfléchi quand même dans les courses.

  • Témoignage Faten

    C'est une question d'habitude, mais après, je peux passer à autre chose. Mais toujours, quoi qu'il en soit, c'est toujours des produits de bonne qualité et des produits bio.

  • Florence Gault

    Vous avez toujours eu cette attention-là à l'alimentation ou est-ce que ça s'est développé et peut-être approfondi avec l'expérimentation de Calim ?

  • Témoignage Faten

    Alors, il faut dire que l'anecdote, ça a été vraiment une recherche très intensive de produits bio, de trouver des structures où ils fournissent du bio et à moindre prix. Parce que personnellement, j'ai eu une maladie il y a 20 ans de ça, une maladie de Crohn. Et c'est ça qui m'a laissé réfléchir par l'alimentation. et je me suis rendu compte que plus je mangeais des poissons, produits sains et mieux ça allait dans mon transit. Et aujourd'hui, je vais essentiellement dans cette direction-là parce que c'est une question de vie, tout simplement de survie, je dirais.

  • Florence Gault

    Mais vous vous êtes rendu compte quand même que ça représentait un budget ?

  • Témoignage Faten

    C'est pour cela qu'on en revient à mon expérience qui a fait que je me suis dirigée tant bien que mal dans des structures bio. où c'était essentiel pour moi de manger des produits de qualité, des produits fermiers, des produits d'éleveurs. Et en faisant des recherches, bizarrement, je tombe sur l'expérimentation qui m'a tellement séduit. Et là, j'ai sauté le pas et je me suis dit que c'est une aubaine de pouvoir l'expérimenter, de pouvoir être acteur, de pouvoir avoir le pouvoir d'agir.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a changé en un an ?

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses qui ont changé, que j'achète essentiellement bio, que je vais essentiellement chez les producteurs, des produits qualitatifs et qui aussi gustativement meilleurs. Et il y a beaucoup de choses qui ont changé. avant tout ma santé, le fait d'avoir cet élan d'envie d'aller plus loin, d'envie de faire bouger des choses. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir et grâce à cette expérimentation, on le vit. Le rêve devient réalité.

  • Florence Gault

    Le rêve devient réalité. Les mots de Faten sont forts, mais ils reflètent bien les différents témoignages des habitants qui participent à cette expérimentation. Un an après son lancement, des changements notables ont été constatés, comme en témoigne Mariella Erypré en charge de la caisse.

  • Mariella Eripret

    On a un cabinet d'évaluation qui est mandaté par la métropole, qui a pu faire une évaluation du projet, avec des questionnaires, en rencontrant certains membres de la caisse. Et nous aussi, en tant qu'animatrice avec ma collègue Léa, on a beaucoup de retours très positifs, uniquement positifs. Il faut dire que les gens sont ravis de pouvoir découvrir des bons produits. Pour certains, c'est une aide financière parce qu'ils cotisent peu et donc ils bénéficient d'un versement assez conséquent. Ils sont donc très contents de pouvoir mieux se nourrir. Certains nous témoignent le fait qu'ils avaient plus de problèmes de santé avant. ou leurs conjoints ou leurs enfants ont des problèmes de santé et du coup, c'était important pour eux de pouvoir mieux manger. Et puis, il y a l'effet aussi sur la dignité, sur le fait de pouvoir rentrer dans des magasins comme ça, aller au marché, rencontrer les producteurs, pouvoir choisir ses produits. Le fait aussi de participer à un groupe, donc ça, c'est surtout pour les membres investis dans le comité décisionnaire Calim8, qui se rencontrent tous les mois maintenant et qui ont tissé des liens, comme je disais tout à l'heure. il y a un aspect quand même vraiment de... cohésion de groupe, de fierté de faire partie d'un projet, de pouvoir prendre des décisions et d'être entendue, et que ça fonctionne réellement. Il y a des bienfaits aussi en termes, c'est les producteurs qui nous le disent. Les producteurs, comme je disais, ne bénéficient pas d'une manne financière extraordinaire avec ce projet, mais le fait d'avoir des liens avec des personnes qu'ils ne voient pas habituellement sur le marché, ils sont contents de pouvoir... Il y a des voyages comme ça, d'une femme qui vient... puis qui leur a préparé des sirops, qui leur apporte des choses. Il y a une femme dans l'AMAP, l'Association pour le maintien d'une agriculture paysanne, qui ne connaissait pas le système des AMAP, et grâce à la caisse, elle est rentrée dans l'AMAP. Et les producteurs sont ravis, elle leur apporte des gâteaux, elle est hyper investie dans le truc. Il y a plein de petits témoignages comme ça.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a pu être difficile, ou quelles ont été les difficultés rencontrées au moment de la mise en place ?

  • Mariella Eripret

    Les difficultés rencontrées, je dirais que c'est sur la compréhension par chacun. C'est-à-dire que pour prendre des décisions à 30, il faut s'assurer que tout le monde ait bien compris les enjeux. Et ce n'est pas toujours simple, parce que ce sont des projets assez complexes. Donc l'idée, c'est de faire de l'éducation populaire, et que ça se transmette aussi entre les personnes qui sont un peu plus avancées et celles qui sont un peu plus en retrait. Les difficultés ça a pu être aussi en termes de lieux conventionnés. Donc ça prend du temps par exemple toute la démarche d'aller rencontrer des producteurs sur les marchés, de les interroger, le questionnaire est assez long quand même. Ils n'ont pas le temps, ils sont avec des clients. Puis certains n'ont jamais répondu à la sollicitation, la proposition d'être conventionnés. Et puis on a eu aussi un petit échec avec une boucherie halal. qui a été conventionné pendant deux mois dans le sixième arrondissement parce qu'on a beaucoup de musulmans dans la caisse et ils étaient ravis de pouvoir accéder à de la viande de très bonne qualité produite selon la charte du bio, qui est assez chère, que les personnes n'auraient pas accès s'il n'y avait pas la caisse. Et donc il y a eu un... un engouement fort pour cette boucherie pendant deux mois où beaucoup sont allés acheter leur viande, étaient ravis. Et puis, au bout de deux mois, le gérant a souhaité arrêter le conventionnement parce qu'il considérait que la clientèle amenée par Calimut ne correspondait pas à sa clientèle de luxe et son image de luxe. Ce ne sont pas les clients qui se sont plaints, c'est vraiment le gérant qui a considéré que ça ne correspondait pas à leur...

  • Florence Gault

    Ça, c'est vécu comment ?

  • Mariella Eripret

    C'est vécu très, très difficilement par beaucoup. Beaucoup n'ont pas compris. Moi, j'ai pu échanger avec le gérant. Et donc, selon moi, c'est quand même un peu du mépris de classe. Et donc, pour beaucoup de membres, ça a été une déception parce qu'ils n'ont plus accès à cette boucherie. Et ils se sentent un peu humiliés. En plus, sans doute que ce n'est pas tous les membres de Calim qui ont eu un comportement. Il y a deux, trois exemples de personnes qui ont été demandées pour aller faire pipi. ou qui ont été derrière le magasin pour expliquer comment couper la viande, comment ils voulaient... Mais c'est un peu drôle quand on y pense, mais en fait, le gérant n'a pas bien...

  • Florence Gault

    Vous avez célébré les un an de l'expérimentation. Il y avait vraiment beaucoup de convivialité. J'ai trouvé, en tout cas, d'un regard extérieur, il y avait vraiment quelque chose de très chaleureux, de très convivial. On sentait qu'il y avait un vrai lien qui s'était créé.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, surtout au sein des membres du comité Calim8. Donc, ces personnes qui se réunissent régulièrement. Parce qu'après, on a au total 138 foyers. qui expérimentent. Et donc, c'est vrai qu'on a une partie des personnes qu'on voit peu et qui font le projet un peu... Ils considèrent que c'est une petite aide financière et sont un peu moins partie prenante pour certains. On était un petit peu déçus parce qu'il y avait finalement que les membres habituels qu'on voit aux réunions avec quelques autres aussi qui sont venus, mais on aurait aimé qu'il y ait plus de personnes qui soient présentes à cet événement. Mais globalement, c'est vrai qu'il y a une belle... En tout cas, entre les 30 membres, Il y a une belle cohésion qui s'est créée et c'est vrai que l'aspect social est vraiment mis en avant.

  • Florence Gault

    Ainsi au total, 138 foyers participent à cette expérimentation, aux côtés de 24 commerces partenaires, épiceries sociales et solidaires, AMAP et producteurs. Une initiative encore fragile, mais qui montre à l'échelle d'un quartier ce que pourrait être un véritable droit. à l'alimentation.

Description

Depuis un an, 138 foyers du 8ème arrondissement de Lyon participent à l’expérimentation de la Caisse de l’alimentation, portée par Territoires à Vivre et soutenue par la Métropole de Lyon. L’objectif : garantir un accès digne à des produits locaux et bio, en testant le principe de Sécurité sociale de l'alimentation.


Dans cet épisode, nous rencontrons :

  • Faten, maman solo, dont le quotidien a été transformé par la possibilité de choisir librement des aliments de qualité ;

  • Umi et Franck, qui découvrent le bio et l’agriculture locale tout en renforçant leur autonomie et leur cohésion de groupe ;

  • Sylvain, bénévole et membre du comité, qui raconte comment l’expérience lui a permis de retrouver un emploi et de tisser du lien social.


Mariella Eripret, coordinatrice du projet, nous explique les choix collectifs et les difficultés rencontrées : conventionner des producteurs locaux, gérer la diversité des besoins et maintenir la dignité de chacun. Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, rappelle l’enjeu politique de cette expérimentation : créer un modèle de solidarité alimentaire durable et ouvrir la voie à une « sécurité sociale de l’alimentation »


Un an après son lancement, cette initiative locale questionne plus largement : comment faire de l’alimentation un droit et non un privilège ?


Bonne écoute ! 🦋

Mixage : Pascal Gauthier


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Transcription

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses pour changer. Ma santé, avant tout, ma santé. Le bio m'apporte cette soif de bannir tout ce qui est industriel, d'être plus sensible aussi aux productions, fruits et légumes qui nous viennent d'ailleurs. Et que là, je fais très attention à voir la provenance, et que je ne le faisais pas. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir, et grâce. à cette expérimentation.

  • Florence Gault

    Pour Faten, habitante du 8e arrondissement de Lyon, la mise en place de la caisse de l'alimentation a été bien plus qu'un coup de pouce, elle a transformé son quotidien. Depuis un an, elle fait partie de la centaine de foyers qui testent cette expérimentation portée par Territoires à vivre Grand Lyon. Son objectif est garantir un accès digne à une alimentation locale et de qualité, choisie collectivement dans un quartier où les inégalités d'accès à une bonne alimentation restent fortes. Financée en grande partie par la métropole de Lyon et complétée par les cotisations d'habitants volontaires, cette caisse permet chaque mois d'utiliser un budget dédié chez des commerçants et producteurs conventionnés. Un an après son lancement, cette initiative révèle ses effets, une alimentation plus diversifiée, un pouvoir d'achat mieux orienté et surtout une gouvernance locale qui redonne du pouvoir d'agir aux habitants. Alors que l'expérimentation repose encore sur un modèle financier fragile, ... Elle ouvre une question plus large, comment repenser l'accès à une alimentation saine comme un droit et non comme une chance ? Reportage.

  • Extrait spectacle

    Il y a une fois dans un grand pays où 8 millions de personnes vivaient dans l'insécurité alimentaire, un petit groupe d'habitants et d'habitantes réunis avec la même conviction, l'alimentation c'est un droit. Depuis plusieurs années déjà circulait entre les foyers une idée folle, imaginée par tout un groupe de personnes, de chercheuses, d'associations, d'habitants. la création d'une sixième branche de la sécurité sociale, une branche dédiée à l'alimentation. Ce projet était alimenté par ce que les anciens avaient réussi à faire en 1947, lorsqu'à la sortie d'une immense guerre, les citoyens et leurs représentants s'étaient organisés pour faire de la santé un droit universel. Dans l'huitième arrondissement, à force d'indignation, de réunion, D'ateliers de cuisine, de visites et de rencontres, 30 personnes mobilisées autour des associations locales se sont lancées ensemble dans cette grande aventure. Connue sous le nom de Calimut, ce collectif est un riche assemblage de personnalités diverses. Ils se rassemblent, se construisent autour d'un rêve, celui de créer une société plus juste, plus solidaire. et d'améliorer l'accès à l'alimentation de qualité dans leur quartier.

  • Florence Gault

    Le 15 novembre dernier, la Caisse de l'alimentation du 8e arrondissement fêtait son premier anniversaire. Au programme, exposition, musique et temps d'échange, le public placé en cercle découvre une mise en scène artistique retraçant l'histoire de l'expérimentation. Les témoignages des habitants et de l'ensemble des parties prenantes ponctuent le récit. Une célébration immersive qui montre concrètement les changements que cette initiative a apporté dans leur quotidien.

  • Témoignage

    Bonsoir tout le monde, je suis Madame Aïba, je suis de Bayassan, moi je suis Camille, Benouit, Charles, Alain, mes épouses. Je vois des mamans autour des tables, moi j'ai toujours ravi quand je vois les gens qui s'entourent, c'est important. J'ai demandé, ils m'ont dit on fait un projet sur le quartier de la caisse alimentaire. Et moi je n'ai rien compris, mais j'ai dit ah d'accord, ok. Et de ce jour-là, je rentrais avec un immeuble.

  • Florence Gault

    Les interventions se succèdent et on découvre des histoires de vie transformées et des expériences personnelles qui révèlent l'impact de cette initiative. Parmi elles, celle d'Oumi et de Franck. Umi, maman de deux enfants et membre du comité qui a porté l'expérimentation, faisait partie des plus précaires. Sans revenu, elle dépendait auparavant de l'aide alimentaire associative. Franck, lui, a rejoint l'expérimentation en décembre 2024.

  • Umi

    Moi, au début... C'était difficile pour avoir un bon manger parce que je ne me sentais pas bien, parce que j'étais malade. Et puis il y a les trucs que je devais manger, il faut avoir de l'argent. Par exemple, il y a de l'huile d'olive, c'est cher.

  • Franck

    Moi, à la base, c'était des questionnements sur l'alimentation, le mieux manger. Et j'allais parfois dans des forums où j'ai entendu parler de cette caisse-là à Lyon 8. Et comme j'étais à Lyon 8, je me suis dit pourquoi pas, j'ai essayé.

  • Florence Gault

    Et c'était quoi les questions qu'il y avait à la base ?

  • Franck

    C'est sur le mieux manger, c'est comment bien manger, comment avoir une meilleure santé. En tout cas, c'est pas mal de questionnements par rapport à ça, l'alimentation. Et puis la justice aussi alimentaire. Je me préoccupais un peu sur la justice sociale alimentaire. Donc, c'est pour ça que je me suis aussi lancé dans cette expérience-là. Au début, il y avait pas mal de réunions sur la qualité, sur les produits, sur la justice sociale, tout ça. Donc, honnêtement, j'ai beaucoup appris. Et puis même quand j'ai commencé à acheter aussi bio, tout ça. J'ai vu que même ma santé s'est améliorée. On sent vraiment une différence.

  • Umi

    Avec cette somme-là, déjà, c'est temps d'incréduler dans la tête que le fin de mois, je vais recevoir quelque chose. Même si je n'ai pas de l'argent, j'ai petit quelque chose. Ça va m'apporter beaucoup de choses qui vont me faire bien manger, bien vivre. Déjà, ça, psychologiquement, ça va être dans ton corps.

  • Franck

    Et puis, on ne se sent pas jugé. C'est-à-dire que moi, personnellement, Biocop, c'était...

  • Umi

    C'est impossible.

  • Franck

    C'est impossible. Je passe, mais... Dès que c'est bio, bien dès que c'est... Je ne peux pas. Même dans les marchés, à certains marchés, je ne pouvais pas. Je ne pouvais même pas imaginer de passer et de prendre quelque chose. Et là, de pouvoir rentrer dans Biocop, c'était déjà...

  • Umi

    Et puis, le problème, quand tu rentres, il y a les gens, certains, parfois, ils te regardent. Mais tu rentres, tu choisis, tu paies avec ton dignité.

  • Franck

    C'est vrai que dans les magasins bio ou bien, même au niveau même, comment dire, de la réflexion, c'est différent. C'est-à-dire que... On a cette chance-là d'avoir été retenus pour expérimenter cela. Non seulement on mange bien, mais c'est aussi une ouverture d'esprit. On va voir des paysans, on va découvrir, on fait des actes de solidarité alimentaire, où on est ensemble, vraiment, au-delà seulement de l'alimentation, mais il y a toute une cohésion de groupe.

  • Umi

    Et puis ça, ma fille, elle avait tellement du poids. Maintenant, avec cette recette qu'on fait là, je le vois, elle est en train de maigrir. Elle ne veut même pas. Elle est trop paresseuse. Mais, par exemple, je fais le soir, carottes, les légumes différents. Elle va les manger le soir. Ça, je vois que même elle, les enfants d'aujourd'hui, il faut regarder ce qu'on donne aux enfants pour manger aussi. C'est important. Vraiment, c'est une fierté. Merci beaucoup, vraiment. On a assez parlé.

  • Florence Gault

    Sylvain, lui, habite dans le quartier monplaisir. Bénévole en cuisine à l'épicerie sociale et solidaire Épices et bons, il a participé à de nombreux ateliers culinaires où il a peu à peu trouvé sa vocation. En 2023, lors d'une présentation justement à Épices et bons, il découvre le projet de la caisse de l'alimentation et n'est pas vraiment convaincu de sa faisabilité. Il décide pourtant de faire partie du collectif qui met en place l'expérimentation.

  • Sylvain

    Au départ, j'étais très, très dubitatif. Tu vois, je me suis dit, c'est quoi ce machin encore ? Mais bon, allez, bref. Et on a démarré. Et du coup, j'ai senti tout de suite la même ferveur et une énergie, tu sais, comme les bâtons après une naissance, le battement d'un cœur. Et ça s'est amplifié, amplifié, amplifié, ce collectif. On s'est trouvé au départ tous les mois, tous les 15 jours, et ensuite toutes les semaines parce qu'on a multiplié de multiplier. par des commissions, des commissions, des commissions pour préparer tout le projet de la caisse.

  • Florence Gault

    Puisque l'idée, c'était vraiment que les habitants et ceux qui allaient participer à cette caisse de l'alimentation soient vraiment partie prenante et prennent toutes les décisions. C'est-à-dire qu'il n'y a personne qui est arrivé du dessus en disant on va procéder de telle et telle manière.

  • Sylvain

    Voilà, toujours en collab avec Territoires à Ville, donc Léa et Mariella et Amélie. Et on a monté notre projet petit à petit, petit à petit, jusqu'au lancement. l'inauguration qui s'est faite en septembre. 2024, et le démarrage de la caisse qui s'est fait octobre, pile. Premier octobre, lancement. Et donc là, ça fait un an.

  • Florence Gault

    Et alors ça, comment vous, vous avez vécu, vous avez dit tout à l'heure en témoignage ? que vous aussi ça a été une vraie aide dans un parcours de vie à un moment donné où c'était difficile et donc que c'était une manière de pouvoir accéder à l'alimentation de qualité.

  • Sylvain

    Alors moi je vais dire oui personnellement, moi je suis arrivé à Pissébon en poussant la porte, jamais je ne sais ce qui m'attendait, mais j'étais dans une situation de précarité due à un incident de vie, de santé et du coup malheureusement on n'est pas préparé, on n'est pas tout ça. il faut faire ça, j'ai aucun outil, je ne sais pas où je vais à l'inconnu, mais j'ai poussé cette porte. Et j'ai su tout de suite qu'ils avaient besoin de bénévoles, mais je ne savais pas ce qu'était un bénévole, moi, à l'époque. Rien du tout. Et je ne connaissais pas la précarité, je ne connaissais pas les situations, je ne connais pas cette structure. Et j'ai appris, j'ai découvert, mais en même temps, j'avais envie. Il y a un truc qui me poussait à m'engager là-dedans. et c'est pour ça qu'on m'a aidé et que ça m'a permis et ça et la caisse m'a permis si tu veux à un moment de dire mon téléphone il a sonné Vrac Métropole m'a téléphoné, dont ils ont une structure dans le 8ème qui s'appelle la MESA, et me dire « il y a un poste pour toi, donc c'est bénéfique » .

  • Florence Gault

    Et là, ce soir, on a entendu dans tous les témoignages, je trouve que c'est beaucoup ressorti, effectivement, des gens qui avaient du mal à boucler la fin de mois et donc de pouvoir se payer une alimentation de qualité, et qui, en trouvant ce collectif, ont aussi trouvé une solidarité et qui a permis pour un certain nombre de pouvoir retrouver du travail derrière. Ce qui n'était pas le but originel de la Caisse de l'alimentation, mais via ce collectif, ça allait beaucoup plus loin.

  • Sylvain

    Parce que sur Lyon, il y avait déjà des choses en amont qui se préparaient. Et du coup, le collectif a démarré. Et oui, il y a eu un truc qui s'est fait. Oui, il y a eu, je ne sais pas comment te dire, en fait, c'est ça, c'est une naissance, un battement de cœur. Mais il y a tellement eu des gens différents de fractures ou de fracturés. Et en fait, on s'est complété ou alors c'est comme Apple, tu vois. Et aujourd'hui, on continue à se côtoyer. On se voit, on se côtoie dans les structures qui sont partenaires aujourd'hui. Et moi, je dis, c'est la plus belle des richesses déjà ça.

  • Florence Gault

    Il y a eu des difficultés rencontrées justement dans toute la mise en œuvre ?

  • Sylvain

    Beaucoup de travail honnêtement. Ce n'était pas simple du tout. Mais tous ont compris. Et en fait, même les partenaires qu'on a intégrés petit à petit, parce qu'il y a eu des démarches de nous, et les questionnaires qui ont été mis en place, ça n'a pas été simple quand on allait les voir. Je parle des partenaires, c'est-à-dire les marchés, les petits producteurs, les épiceries. Bon, ils étaient déjà porteurs au projet, donc eux, ils ont adhéré. Mais il y avait une grosse volonté, on la sentait.

  • Florence Gault

    Et ça a changé quoi dans votre rapport à l'alimentation ?

  • Sylvain

    Moi, dû à mes soucis que j'ai rencontrés, j'avais arrêté le bio. Enfin, je mangeais, boire peu parce que c'était compliqué. Et puis, je n'avais plus envie de cuisiner honnêtement. Et là, le fait de côtoyer des gens. Avec des ateliers de cuisine, ça m'a redonné ça. Ensuite, il y a eu la caisse, donc ça m'a permis d'accéder à nouveau au bio. Et puis après, la suite, c'est d'avoir un emploi. Et je veux dire, aujourd'hui, je ne suis plus en précarité parce que j'ai un emploi. Mais je continue à fédérer et à soutenir, à former des gens, à leur dire, il existe ça, il existe ça. Si on peut orienter la caisse quand il y a des portes qui s'ouvrent et qu'on dit, oui, on peut prendre des nouveaux expérimentateurs, ben venez, je me renseigne et tout, on fait le truc direct.

  • Florence Gault

    Le 8e arrondissement de Lyon n'a pas été choisi par hasard pour cette expérimentation. En 2019, une étude commandée par la métropole de Lyon montrait qu'un tiers des habitants rencontraient des difficultés pour accéder à une alimentation de qualité et que 15%... ne mangeaient pas à leur faim. Pourtant, depuis quelques années, des initiatives locales tentent de transformer cette réalité. C'est à Épicentre, une épicerie sociale et solidaire, que je retrouve Mariella Eripret, chargée de mission démocratie alimentaire au sein de l'association Territoires à vivre, qui pilote l'expérimentation.

  • Mariella Eripret

    C'est ce territoire du 8e qui a été choisi, non seulement parce qu'il y a effectivement beaucoup de personnes qui ont des difficultés. Pour accéder à de l'alimentation de qualité, mais aussi parce qu'il y avait des démarches de démocratie alimentaire déjà engagées autour de la MESA, la Maison Engagée et Solidaire de l'Alimentation, qui a ouvert en 2022-2023. Et puis qu'il y avait plusieurs associations qui étaient actives aussi, comme le Secours Catholique, comme les deux épiceries sociales et solidaires, donc ICI, Épicentre, ainsi que Épices et Bons. On a la MESA donc, et puis plusieurs associations et des démarches. de démocratie où il y avait un comité d'habitants qui était mobilisé pour parler de ces questions d'alimentation dans le quartier. Et à la fois il y a aussi quand même une offre alimentaire de qualité mais qui n'est pas... pas bien répartis sur tout le territoire. Et donc, il y avait cet enjeu aussi à soutenir certains des lieux de l'arrondissement et peut-être en développer d'autres aussi par la suite.

  • Florence Gault

    Donc, ce quartier, c'était un peu la population cible que vous cherchiez à atteindre au travers de cette expérimentation ?

  • Mariella Eripret

    Oui, on cherchait à avoir une majorité de personnes en situation de précarité, mais ce projet de caisse de l'alimentation concerne en fait tout le monde. puisque le projet se base sur le concept de sécurité sociale de l'alimentation qui veut vraiment tendre vers l'universalité. C'est-à-dire que tout le monde est droit à une alimentation de qualité, mais on parle aussi des personnes qui n'ont pas forcément de soucis financiers et qui peuvent déjà avoir accès à cette alimentation, mais qui ne le font pas forcément parce qu'ils n'ont pas le temps ou pas forcément un intérêt pour ça. Et donc l'idée, c'est vraiment qu'on touche une mixité de personnes.

  • Florence Gault

    Donc il y a effectivement ceux qui bénéficient au travers de bons, on va revenir un peu sur le principe et sur concrètement comment ça fonctionne. Et puis il y a les personnes qui ont plus de moyens et donc qui peuvent contribuer à alimenter en fait cette caisse.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, on est sur un principe de cotisation selon le niveau de vie des personnes. Donc c'est à partir de 1 euro que les personnes cotisent et après il n'y a pas de limite. Donc il y a des personnes qui cotisent 300 euros et après tout le monde reçoit le même montant. Ce sont des crédits numériques sur une application et tout le monde a droit à 150 euros, quelle que soit sa situation. Donc ça, c'est 150 euros par personne et ça peut aller jusqu'à 450 euros selon la composition du foyer.

  • Florence Gault

    Ensuite, cet argent, on peut le dépenser dans des lieux partenaires comme l'épicentre où on se trouve aujourd'hui.

  • Mariella Eripret

    C'est ça. on a un peu Donc on est parti avec quatre lieux qui étaient conventionnés d'office, qui font partie des acteurs du comité technique de la caisse, donc avec lesquels on travaille depuis le début sur la mise en place du projet. Donc ce sont les deux épiceries sociales et solidaires, Épicentre, Épicébon, la MESA et une AMAP qui fait ses livraisons à la mairie du 8e, donc l'AMAP du Bachu. Et à partir de là, le comité habitant, donc une trentaine de volontaires du 8e, de tout profil, qui depuis février 2024 se réunissent toutes les deux semaines, puis maintenant tous les mois, ont décidé de conventionner d'autres lieux. Donc petit à petit, ça s'est fait avec une démarche d'aller rencontrer les gérants ou les producteurs. Ils ont préparé un questionnaire ensemble, ils ont réfléchi aux questions impertinentes à poser, qui devaient correspondre à des critères qu'ils ont mis en place eux-mêmes sur des critères de produits locaux, puis qui tendent vers plutôt le bio, en tout cas de l'agriculture paysanne. du respect des travailleurs sur tout un tas de critères sociaux et environnementaux. Et la décision est prise en session plénière avec l'ensemble des membres du comité pour décider par le consentement si le lieu est conventionné ou pas. Et donc petit à petit, depuis juillet 2024, où on a commencé les conventionnements, on est arrivé à 24 lieux.

  • Florence Gault

    24 lieux comme ici à Épicente, fait en 2014. Pour la petite anecdote, il s'agissait d'un projet de fin d'études de 4 étudiants. C'est aujourd'hui Emmanuelle qui en assure la coordination.

  • Emmanuelle

    Notre particularité, c'est quand même d'accueillir un public qui rencontre des difficultés pour s'alimenter et qui est orienté par un travailleur social. Donc notre point fort à Épicentre, c'est qu'on a un travailleur social au sein de l'épicerie qui accompagne les personnes qui ont accès à l'épicerie. On propose des produits bio et locaux et frais.

  • Florence Gault

    En termes de tarification, comment ça fonctionne ?

  • Emmanuelle

    Alors, il y a effectivement une double tarification. Nous sommes une association, donc on vit de subventions et d'appels à projets. Pour la partie personnes accompagnées, qu'on appelle porteurs de projets, on bénéficie de produits issus de la banque alimentaire. Donc la banque alimentaire fait des ramasses auprès des grandes surfaces, carrefours, au champ, tous les matins. et nous prépare les palettes sur bon de commande. Donc chaque mardi, nous allons à la banque alimentaire récupérer notre palette.

  • Florence Gault

    Avec une petite difficulté en ce moment, vous disiez tout à l'heure qu'il y a un peu moins de stock qui vous est fourni.

  • Emmanuelle

    Alors effectivement, la banque alimentaire rencontre des difficultés pour répondre aux demandes des associations. Il y a 148 associations quand même qui vont à la banque alimentaire du Rhône, parce qu'il y a une baisse de quantité et de qualité. des produits issus des grandes surfaces.

  • Florence Gault

    Là, vous me montriez les frigos.

  • Emmanuelle

    Voilà, donc cette semaine, on n'a pas eu de frais, donc on a deux frigos qui sont vides, où il doit y avoir quatre yaourts pour 39 familles. C'est un peu comment on gère,

  • Florence Gault

    justement ?

  • Emmanuelle

    Eh bien, on essaie de faire entrer de la marchandise, mais on a une charte d'approvisionnement, on ne peut pas aller chez Carrefour pour acheter des yaourts pour revendre à l'épicerie. Donc on sollicite les associations du réseau ou les autres épiceries. voir si elles ont pu avoir des yaourts. Cette semaine, personne n'a eu de yaourt, donc il n'y a pas de yaourt cette semaine. Donc on a toujours un petit stock de produits qui ne sont pas en rayon, de petites nouveautés pour montrer aux gens que oui, il n'y a pas de yaourt, mais on a du pain ou un nouveau café ou on a eu pas mal de légumes cette semaine. Donc c'est plutôt intéressant.

  • Florence Gault

    Alors vous faites partie des magasins partenaires de la Caisse de l'alimentation. Comment vous percevez cette expérimentation ? Les gens que vous rencontrez qui viennent désormais dépenser leur bon ici, est-ce que ça a changé quelque chose ?

  • Emmanuelle

    Oui, alors au niveau de la fréquentation, oui, tout à fait. Deux points de vue, au niveau effectivement du collectif Calim. Mais la Calim maintenant propose des commandes auprès d'éleveurs et de producteurs et on est point relais. Donc les gens viennent récupérer leur colis de poissons, d'agneaux. Nous ça nous permet de rencontrer justement des éleveurs, des producteurs qui pourraient aussi peut-être proposer leurs produits au sein de l'épicerie. Puis ça nous permet de rencontrer aussi de futurs adhérents parce qu'on a une association qui ne serait pas venue si la Calim n'était pas au sein d'épicentre. Donc oui, c'est très intéressant à tout point de vue.

  • Florence Gault

    La caisse de l'alimentation du 8e arrondissement de Lyon est la troisième du genre dans la région, après celle de Diolophie dans la Drôme et de Saint-Etienne dans la Loire. Son budget de 755 000 euros sur 3 ans repose sur un montage hybride. 46% financé par la métropole de Lyon, 28% par l'État et 25% par les bénéficiaires eux-mêmes. Un modèle encore fragile, l'expérimentation devait s'arrêter en novembre dernier et la rallonge de 100 000 euros votée en loin par la métropole ne permet de prolonger l'expérience que de quelques mois. Pour envisager une suite, l'association Territoires à Vivre a lancé une campagne de financement participatif. Pour Jérémy Camus, vice-président de la métropole de Lyon, en charge de l'agriculture, l'alimentation et la résilience du territoire, tout l'enjeu et de pérenniser l'expérimentation.

  • Jérémy Camus

    Aujourd'hui, l'enjeu de cette expérimentation, c'était aussi d'être pas hors sol par rapport à un plaidoyer politique, ou plutôt une posture politique, et dire, nous devons aujourd'hui recréer une solidarité autour de l'alimentation. L'alimentation, ce n'est pas un produit comme les autres, ce n'est pas une marchandise, c'est peut-être le premier médicament qu'on ingère au quotidien, c'est autant de dépenses, si on consommait bien, qui seraient évitées par la nation en termes de frais de santé. Il y a un rapport qui a été réalisé il y a un an maintenant, qui montrait que quasiment 19 milliards d'euros étaient dépensés chaque année par l'État et les collectivités pour compenser les effets de notre système alimentaire. 12,5 milliards concernaient juste les dépenses santé. Donc on peut aussi trouver des externalités positives, en quelque sorte, à mieux manger. Et donc ce n'est pas qu'un projet local, en fait. Moi, ce que j'ai toujours dit, ça doit être un projet à dimension nationale. Là, on parle de solidarité. Un système comme ça existe, il faut que cette solidarité... elle soit décidée à une échelle nationale. Donc c'est un projet politique avec un grand P, très noble, de dire on doit demain créer une nouvelle branche de la sécurité sociale qui s'occupe non pas de la santé, mais qui s'occupe de l'alimentation. Et on doit créer les mécanismes de cotisation qui sont nécessaires pour financer cette opération.

  • Florence Gault

    D'où l'idée d'une proposition de loi portée notamment par Boris Tavernier, qui devait être étudiée à l'Assemblée nationale, qui finalement ne l'a pas été. de manière à ce que le relais puisse être pris au niveau national et sortir de l'expérimentation locale.

  • Jérémy Camus

    Cette proposition de loi cherche surtout à refinancer les expérimentations existantes et en multiplier d'autres. C'est-à-dire qu'on continue à avoir les bons mécanismes à mettre en œuvre localement pour que cette sécurité sociale soit optimale. Et donc là, on a encore besoin d'expérimenter. On est loin d'avoir trouvé le mécanisme parfait. Il y a beaucoup d'expérimentations partout en France maintenant qui sont nées. Ces expériences d'association vont servir à demain, s'il y a cette prise de conscience nationale, d'être prêt à déployer. Au même titre qu'en 1945, il y avait déjà des caisses de santé qui existaient et les gens avaient trouvé déjà cette solidarité, avaient déjà défini leurs règles du jeu. Et ça a été assez rapide pour essaimer ce concept de sécurité sociale. Le grand enjeu pour moi, il est surtout dans les prochains débats qu'ils vont avoir à l'échelle nationale. et il y en a en 2027. On parle aujourd'hui d'une campagne présidentielle dans laquelle on pourrait demain intégrer pleinement ce sujet de la sécurité sociale de l'alimentation et c'est un sujet qui porte en fait, on le voit et là si on revient au local, on voit très bien la force que ce sujet a auprès des habitants. En fait, l'alimentation, c'est une des premières variables d'ajustement pour les personnes, en plus, les plus précaires ou les plus en difficulté. Et donc, arriver à se dire qu'on arrive à donner les moyens à ces gens de... trouver une alimentation saine dans leur assiette, c'est déjà un super indicateur. Et l'autre indicateur, moi je rappelle souvent qu'on a une crise agricole quand même qui gronde depuis deux ans, sur laquelle on n'a trouvé aucune solution pour répondre à une problématique qui est rémunérer dignement les agriculteurs dans ce pays. Et bien demain, si on avait à peu près 150 milliards d'euros par an liés à la sécurité sociale et l'alimentation pour aller dépenser cet argent auprès des producteurs locaux, je pense qu'on a trouvé là une belle solution à la crise agricole. et peut-être une nouvelle ère du monde agricole demain dans ce pays aussi.

  • Témoignage Faten

    Bonjour, je m'appelle Fatène et je viens faire mes courses à EPICENTRE. Je suis maman d'une fille. Donc, maman solo. Et je viens faire des courses à EpiCentre, où vous avez beaucoup de produits, diverses produits, aussi bien fruits et légumes, épicerie fine, épicerie légumes secs. Vous avez, entre autres, des boissons, tout ce qu'il faut pour égayer les papilles.

  • Florence Gault

    Et ça fait combien de temps que vous participez à cette expérimentation de Calim 8 ?

  • Témoignage Faten

    Ça fait un an aujourd'hui. Et un an, on espère que ça dure et ça continue. Je vais repérer. Je vais aller au fond du magasin pour après finir au frais. Là, il y a des tortillinis, légumes.

  • Florence Gault

    Ça donne envie, là ?

  • Témoignage Faten

    Oui, totalement. Donc du coup, je vais... le paquet. Et ensuite, comme tout est à côté, à proximité, je vais me retourner, je vais prendre des pâtes. Malgré qu'il y a le nitrice corps A, je ne fais pas attention à ça. Je fais très attention à le composant des pâtes. Et je sais que les pâtes semi-complètes sont très bonnes pour la santé. Enfin, les pâtes blanches. Du fromage.

  • Florence Gault

    L'emmental râpé.

  • Témoignage Faten

    L'emmental râpé. je regarde, sans additifs, voilà. Le beurre également, les fromages blancs.

  • Florence Gault

    Et donc là, par exemple, aujourd'hui, il n'y a pas grand-chose. Est-ce que des fois, c'est une difficulté de venir et puis se dire, ah, Flûte, là, aujourd'hui, je n'ai pas ce que je voulais ?

  • Témoignage Faten

    Tout à fait, parce que quand on pense à la famille et qu'on essaie d'acheter, on sort de faire un repas et qu'on ne trouve pas ce qu'il faut, on est un peu frustré, c'est sûr. Ensuite, je vais prendre des graines de la dorée.

  • Florence Gault

    Je vois que c'est très réfléchi quand même dans les courses.

  • Témoignage Faten

    C'est une question d'habitude, mais après, je peux passer à autre chose. Mais toujours, quoi qu'il en soit, c'est toujours des produits de bonne qualité et des produits bio.

  • Florence Gault

    Vous avez toujours eu cette attention-là à l'alimentation ou est-ce que ça s'est développé et peut-être approfondi avec l'expérimentation de Calim ?

  • Témoignage Faten

    Alors, il faut dire que l'anecdote, ça a été vraiment une recherche très intensive de produits bio, de trouver des structures où ils fournissent du bio et à moindre prix. Parce que personnellement, j'ai eu une maladie il y a 20 ans de ça, une maladie de Crohn. Et c'est ça qui m'a laissé réfléchir par l'alimentation. et je me suis rendu compte que plus je mangeais des poissons, produits sains et mieux ça allait dans mon transit. Et aujourd'hui, je vais essentiellement dans cette direction-là parce que c'est une question de vie, tout simplement de survie, je dirais.

  • Florence Gault

    Mais vous vous êtes rendu compte quand même que ça représentait un budget ?

  • Témoignage Faten

    C'est pour cela qu'on en revient à mon expérience qui a fait que je me suis dirigée tant bien que mal dans des structures bio. où c'était essentiel pour moi de manger des produits de qualité, des produits fermiers, des produits d'éleveurs. Et en faisant des recherches, bizarrement, je tombe sur l'expérimentation qui m'a tellement séduit. Et là, j'ai sauté le pas et je me suis dit que c'est une aubaine de pouvoir l'expérimenter, de pouvoir être acteur, de pouvoir avoir le pouvoir d'agir.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a changé en un an ?

  • Témoignage Faten

    Il y a beaucoup de choses qui ont changé, que j'achète essentiellement bio, que je vais essentiellement chez les producteurs, des produits qualitatifs et qui aussi gustativement meilleurs. Et il y a beaucoup de choses qui ont changé. avant tout ma santé, le fait d'avoir cet élan d'envie d'aller plus loin, d'envie de faire bouger des choses. On vit dans une vie qu'on souhaitait avoir et grâce à cette expérimentation, on le vit. Le rêve devient réalité.

  • Florence Gault

    Le rêve devient réalité. Les mots de Faten sont forts, mais ils reflètent bien les différents témoignages des habitants qui participent à cette expérimentation. Un an après son lancement, des changements notables ont été constatés, comme en témoigne Mariella Erypré en charge de la caisse.

  • Mariella Eripret

    On a un cabinet d'évaluation qui est mandaté par la métropole, qui a pu faire une évaluation du projet, avec des questionnaires, en rencontrant certains membres de la caisse. Et nous aussi, en tant qu'animatrice avec ma collègue Léa, on a beaucoup de retours très positifs, uniquement positifs. Il faut dire que les gens sont ravis de pouvoir découvrir des bons produits. Pour certains, c'est une aide financière parce qu'ils cotisent peu et donc ils bénéficient d'un versement assez conséquent. Ils sont donc très contents de pouvoir mieux se nourrir. Certains nous témoignent le fait qu'ils avaient plus de problèmes de santé avant. ou leurs conjoints ou leurs enfants ont des problèmes de santé et du coup, c'était important pour eux de pouvoir mieux manger. Et puis, il y a l'effet aussi sur la dignité, sur le fait de pouvoir rentrer dans des magasins comme ça, aller au marché, rencontrer les producteurs, pouvoir choisir ses produits. Le fait aussi de participer à un groupe, donc ça, c'est surtout pour les membres investis dans le comité décisionnaire Calim8, qui se rencontrent tous les mois maintenant et qui ont tissé des liens, comme je disais tout à l'heure. il y a un aspect quand même vraiment de... cohésion de groupe, de fierté de faire partie d'un projet, de pouvoir prendre des décisions et d'être entendue, et que ça fonctionne réellement. Il y a des bienfaits aussi en termes, c'est les producteurs qui nous le disent. Les producteurs, comme je disais, ne bénéficient pas d'une manne financière extraordinaire avec ce projet, mais le fait d'avoir des liens avec des personnes qu'ils ne voient pas habituellement sur le marché, ils sont contents de pouvoir... Il y a des voyages comme ça, d'une femme qui vient... puis qui leur a préparé des sirops, qui leur apporte des choses. Il y a une femme dans l'AMAP, l'Association pour le maintien d'une agriculture paysanne, qui ne connaissait pas le système des AMAP, et grâce à la caisse, elle est rentrée dans l'AMAP. Et les producteurs sont ravis, elle leur apporte des gâteaux, elle est hyper investie dans le truc. Il y a plein de petits témoignages comme ça.

  • Florence Gault

    Qu'est-ce qui a pu être difficile, ou quelles ont été les difficultés rencontrées au moment de la mise en place ?

  • Mariella Eripret

    Les difficultés rencontrées, je dirais que c'est sur la compréhension par chacun. C'est-à-dire que pour prendre des décisions à 30, il faut s'assurer que tout le monde ait bien compris les enjeux. Et ce n'est pas toujours simple, parce que ce sont des projets assez complexes. Donc l'idée, c'est de faire de l'éducation populaire, et que ça se transmette aussi entre les personnes qui sont un peu plus avancées et celles qui sont un peu plus en retrait. Les difficultés ça a pu être aussi en termes de lieux conventionnés. Donc ça prend du temps par exemple toute la démarche d'aller rencontrer des producteurs sur les marchés, de les interroger, le questionnaire est assez long quand même. Ils n'ont pas le temps, ils sont avec des clients. Puis certains n'ont jamais répondu à la sollicitation, la proposition d'être conventionnés. Et puis on a eu aussi un petit échec avec une boucherie halal. qui a été conventionné pendant deux mois dans le sixième arrondissement parce qu'on a beaucoup de musulmans dans la caisse et ils étaient ravis de pouvoir accéder à de la viande de très bonne qualité produite selon la charte du bio, qui est assez chère, que les personnes n'auraient pas accès s'il n'y avait pas la caisse. Et donc il y a eu un... un engouement fort pour cette boucherie pendant deux mois où beaucoup sont allés acheter leur viande, étaient ravis. Et puis, au bout de deux mois, le gérant a souhaité arrêter le conventionnement parce qu'il considérait que la clientèle amenée par Calimut ne correspondait pas à sa clientèle de luxe et son image de luxe. Ce ne sont pas les clients qui se sont plaints, c'est vraiment le gérant qui a considéré que ça ne correspondait pas à leur...

  • Florence Gault

    Ça, c'est vécu comment ?

  • Mariella Eripret

    C'est vécu très, très difficilement par beaucoup. Beaucoup n'ont pas compris. Moi, j'ai pu échanger avec le gérant. Et donc, selon moi, c'est quand même un peu du mépris de classe. Et donc, pour beaucoup de membres, ça a été une déception parce qu'ils n'ont plus accès à cette boucherie. Et ils se sentent un peu humiliés. En plus, sans doute que ce n'est pas tous les membres de Calim qui ont eu un comportement. Il y a deux, trois exemples de personnes qui ont été demandées pour aller faire pipi. ou qui ont été derrière le magasin pour expliquer comment couper la viande, comment ils voulaient... Mais c'est un peu drôle quand on y pense, mais en fait, le gérant n'a pas bien...

  • Florence Gault

    Vous avez célébré les un an de l'expérimentation. Il y avait vraiment beaucoup de convivialité. J'ai trouvé, en tout cas, d'un regard extérieur, il y avait vraiment quelque chose de très chaleureux, de très convivial. On sentait qu'il y avait un vrai lien qui s'était créé.

  • Mariella Eripret

    Tout à fait, surtout au sein des membres du comité Calim8. Donc, ces personnes qui se réunissent régulièrement. Parce qu'après, on a au total 138 foyers. qui expérimentent. Et donc, c'est vrai qu'on a une partie des personnes qu'on voit peu et qui font le projet un peu... Ils considèrent que c'est une petite aide financière et sont un peu moins partie prenante pour certains. On était un petit peu déçus parce qu'il y avait finalement que les membres habituels qu'on voit aux réunions avec quelques autres aussi qui sont venus, mais on aurait aimé qu'il y ait plus de personnes qui soient présentes à cet événement. Mais globalement, c'est vrai qu'il y a une belle... En tout cas, entre les 30 membres, Il y a une belle cohésion qui s'est créée et c'est vrai que l'aspect social est vraiment mis en avant.

  • Florence Gault

    Ainsi au total, 138 foyers participent à cette expérimentation, aux côtés de 24 commerces partenaires, épiceries sociales et solidaires, AMAP et producteurs. Une initiative encore fragile, mais qui montre à l'échelle d'un quartier ce que pourrait être un véritable droit. à l'alimentation.

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