#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies cover
#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies

#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies

36min |01/01/2021
Play
#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies cover
#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies

#2 Jérémy Bismuth, l'ami de l'écologie qui fait transpirer les grands méchants lobbies

36min |01/01/2021
Play

Description

Direction le Sud-Aveyron pour ce deuxième épisode de Finta. Je rencontre aujourd’hui Jérémy Bismuth. Il est le créateur de la websérie « L’Ami des lobbies », qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. 

En déconstruisant le discours de lobbies industriels, depuis son petit village de Compeyre, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. 

Alors, cinquante ans après la lutte des paysans du Larzac voisin, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d’écologie des villes et d’écologie des champs, et de L’Ami des lobbies évidemment.

💬 "En vivant en milieu rural, je comprends qu’il y a des choses impossibles à imposer. Les choses ont besoin d’être amenées de manière plus souple, plus subtile et plus en compréhension avec les gens qui travaillent ici."


+


Pour aller plus loin sur les sujets abordés dans l'épisode

-  Glyphosate : « Faire en sorte que les lobbies ne gagnent pas toujours à la fin » (lemonde.fr) 

-  « Monsanto papers » : la guerre du géant des pesticides contre la science (lemonde.fr) 


Et pour regarder les épisodes de L'Ami des Lobbies sur Youtube, c'est par ici :  Ami des lobbies - YouTube 


💸 Si vous voulez soutenir financièrement Finta! et participer à renforcer son indépendance éditoriale, une cagnotte participative est en ligne. Juste ici !


🧡 Si vous aimez Finta! partagez-le! Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par Lola Cros, journaliste indépendante. Il est mixé par le studio Qude. Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts. Plus d'infos sur www.fintapodcast.fr


🔅 On se retrouve dès maintenant sur Instagram!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bientôt. Je rencontre aujourd'hui Jérémy Bismuth, il est le créateur de la web-série L'Amie des Lobby, qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. En déconstruisant le discours de lobby industriel, depuis le petit village de Comper, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. Alors, 50 ans après la lutte du Larzac, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d'écologie des villes et d'écologie des champs. C'est parti ! Jérémy, tu nous accueilles aujourd'hui dans un village tout particulier. Pourquoi ? Est-ce que tu peux nous dire où on se trouve ?

  • Speaker #1

    Oui, on est à Comper, dans l'Aveyron. C'est le village natal de mon arrière-grand-père. C'est le village dans lequel mes grands-parents habitent maintenant et dans lequel je vis avec ma famille depuis trois ans. C'est vraiment ici que j'ai appris à aimer, à respecter, à découvrir la nature. Et c'est aussi ici, avec toutes les aventures qu'on vivait, que je me suis mis à écrire mes premières petites histoires. Et donc, c'est en fait ici que mes deux passions sont nées, pour la nature et pour l'écriture.

  • Speaker #0

    Trois ans à Compayre, et depuis un an et demi maintenant, tu as ajouté un bébé dans la famille, l'ami des lobbies. Donc c'est une web-série que tu as créée autour du discours des lobbies, comment décrypter Déconstruire le discours des lobbies, quelle est l'émotion peut-être qui te guide à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Le point de départ, vraiment le tout premier point de départ de la websérie, il n'est pas encore du tout lié au lobbying, il n'est pas du tout lié au discours des lobbies, c'est juste l'écologie et l'envie de faire une petite websérie autour. Et ensuite, effectivement, ça a mûri pendant quasiment dix ans. Et je pense que l'émotion finalement qui a fait beaucoup, c'est la colère en fait. Parce qu'il y a des sujets qui sont incroyablement importants, qui ont des conséquences incroyables sur notre santé, sur notre environnement, sur notre avenir, et dont on ne parle pas du tout, ou alors dont on parle mal. Et donc ça m'énervait énormément. Et ça m'énervait beaucoup aussi d'entendre les détracteurs. Et donc à l'époque, je ne le savais pas encore, parce que je ne m'intéressais pas de près. en fait le discours des lobbies industriels, je ne les identifiais pas comme tels avant, mais maintenant je sais que ça vient de là, qui essayaient de noyer le poisson, qui essayaient de faire croire à une certaine normalité, qui appelaient à ne pas changer, à continuer exactement notre manière de vivre, qui appelaient à poursuivre notre manière de consommer comme si de rien n'était. Donc ça m'énervait énormément et donc j'avais envie, l'envie de faire cette websérie est devenue de plus en plus pressante. Mais encore une fois, au début, à ce moment-là, je n'étais toujours pas dans l'idée de prendre le point de vue des lobbies. D'ailleurs, j'ai commencé à écrire le tout premier épisode sur la déforestation avec un tout autre axe. Le personnage principal était un écolo. Alors, pour rendre la chose un peu rigolote, c'était un écolo un peu nul, un peu incompétent. Et puis, à côté, il y avait la scientifique qui était là pour apporter des vrais chiffres, des vraies données. Et puis j'ai écrit le premier épisode comme ça et j'ai trouvé que c'était un petit peu nul. Et du coup, je me suis dit, non, il faut trouver quelque chose de plus percutant, de plus incisif. Et effectivement, l'idée de prendre le point de vue des lobbies a paru bien plus percutante. Et c'était presque... Déjà, d'un point de vue scénaristique, c'était super parce que ça permettait de créer plus de situations rigolotes, finalement. Et du point de vue de l'argumentation, ça permettait de beaucoup mieux déconstruire le discours des détracteurs de l'écologie, de ceux qui font l'éloge de l'industrie et d'une course effrénée à la croissance. Donc en fait, c'est vrai que la colère y est pour beaucoup dans le choix de tourner en ridicule le discours des lobbies industriels. Il y avait aussi l'envie d'expliquer de manière très très imagée et de la manière la plus limpide possible. Toutes ces choses que j'avais en tête par rapport à l'écologie, parce que c'est vrai que moi, quand j'entendais des discours, quand je voyais des vidéos sur l'écologie, souvent je me disais, aïe aïe aïe, on ne comprend pas assez bien, ou ce n'est pas comme ça qu'il faut le montrer. Moi, j'adore la pédagogie, j'ai été prof de cinéma pendant deux ans, j'adorais ça, je ne sais pas si mes élèves diraient la même chose.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un temps particulier dans l'amitié lobby qui fait qu'en comprenant le message et là où tu veux nous amener, mais c'est du second degré. Il faut quand même arriver à comprendre. Et d'ailleurs, je crois que dans les premières vidéos, certains internautes n'avaient pas compris ce temps-là et sont clairement tombés dans le panneau alors que tu voulais montrer, par l'absurde, la manipulation.

  • Speaker #1

    Oui, c'est vrai qu'en fait, dans la vie des lobbies, on essaie toujours de faire en sorte que sur les premières secondes de la vidéo, on puisse croire qu'on est vraiment pro-industrie et anti-écolo. Au moins sur les premières secondes, ne serait-ce que pour... déstabiliser le spectateur et puis aussi pour essayer de nous mettre dans la poche au moins sur cinq secondes quelqu'un qui est vraiment anti écolo parce qu'on trouve ça rigolo que la personne se dise ah enfin une vidéo qui me plaît et puis sur les secondes suivantes ah non en fait je me suis fait avoir juste pour cette petite blague là ça nous fait plaisir mais normalement quand on a un tout petit peu de recul et quelques neurones qui nous restent normalement on comprend qu'on est foncièrement écolo dans la vidéo Mais c'est vrai que parfois on a des petites surprises, heureusement ça arrive très très rarement, mais on a toujours une petite surprise de quelqu'un qui nous dit « bande de salauds, vous voulez la déforestation ? » C'est drôle parce que ça reste minoritaire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu sais définir un lobby ?

  • Speaker #1

    Oui, alors un lobby c'est un groupe de pression. C'est vrai que le mot de lobby, il prête à beaucoup déjà de fantasmes et à beaucoup de contresens. Je le vois dans les commentaires parfois ou dans les messages qu'on reçoit. Les gens confondent le mot lobby avec le mot business, pour eux c'est la même chose, ou alors encore pire avec le mot de complot. Pour eux, lobby ça veut forcément dire qu'il y a un complot derrière, alors que pas du tout. Un lobby c'est juste un groupe de pression, c'est-à-dire que ce sont des gens ou des entreprises qui se mettent ensemble pour avoir plus de poids et pour influencer la politique, pour influencer nos décideurs, nos parlementaires. Il y a un autre aspect du lobbying qui est l'influence de l'opinion publique. Mais le principal objectif, c'est d'influencer les gens qui prennent des décisions. Le lobbying, il existe à toutes les échelles. C'est-à-dire que moi, par exemple, je fais partie d'une association écolo à Millau. On a zéro euro de budget, on est tous bénévoles, mais on essaye aussi de nous adresser aux élus de la ville de Millau pour attirer leur attention sur tel problème écologique, etc. Donc on peut très bien dire qu'à notre échelle, on fait du lobbying. À côté de ça, vous avez des lobbies qui ont des millions d'euros, mais vraiment, ce n'est pas une expression, c'est des millions d'euros à dépenser chaque année juste en lobbying. pour influencer l'opinion publique et surtout pour influencer les politiques. Nous, on va juste s'adresser aux élus. Vous avez d'autres lobbies qui vont envoyer directement un texte de loi pré-rédigé ou un amendement pré-rédigé aux parlementaires pour qu'ils le signent, qu'ils le votent. Donc voilà, vraiment, l'influence n'a rien à voir.

  • Speaker #0

    Toi, dans tes vidéos, tu as déconstruit le lobby de la chasse, le lobby de la déforestation, le lobby des pesticides, de la mode. Quoi d'autre ?

  • Speaker #1

    On s'est attaqué à la viande. On a été chercher aussi derrière des énergies fossiles. qui essayent de faire croire que le climat ne se réchauffe pas à cause de l'homme. Les gros lobbys industriels, ce qu'ils vont défendre d'abord, c'est leur portefeuille. C'est-à-dire qu'ils vont surveiller qu'aucune loi ne passe qui puisse freiner leur activité, voire stopper leur activité. Donc ils sont extrêmement vigilants par rapport à ça. Et ils vont tout faire pour que l'opinion publique et les politiques pensent qu'il n'y a rien à changer, qu'on peut continuer comme avant. Après, il y a un... Il y a l'étape encore plus sournoise, c'est quand ils défendent quelque chose qu'ils savent pertinemment qui est nocive pour la santé et l'environnement. Là, on passe à un stade vraiment immoral, puisqu'en plus, on a des preuves. Par exemple, on sait qu'ExxonMobil, un géant des énergies fossiles, sait depuis les années 70-80 que la combustion d'énergie fossile va emmener un réchauffement climatique qui va dérégler foncièrement tout le système Terre. En fait, quand on se rend compte que des industries comme ça savent tout le mal en fait qu'ils provoquent, mais qu'ils essayent de le cacher, de convaincre tout le monde qu'il n'y a aucun problème. Là, on est dans quelque chose quand même de très grave et de criminel. Quelqu'un qui voit nos vidéos, qui n'avait absolument pas conscience du sujet. Effectivement, j'espère déjà que ça va le faire rire un petit peu, parce que quand quelqu'un rit sur un sujet, ça veut dire qu'il est un petit peu avec nous. J'espère que ça peut l'amener à changer un petit peu ses habitudes de consommation. Les gens qui sont déjà sensibles au sujet, j'espère que ça va leur faire une petite piqûre de rappel et les inviter à s'engager, parce que c'est vrai que quand on fait les choses chez soi, tout seul, c'est déjà très bien, mais il faut vraiment passer à l'étape d'après, qui est de faire ces mêmes actions, mais en collectivité, dans une association, une ONG, et puis porter ce même discours. devant sa municipalité, sa région, son pays. On ne peut qu'espérer que les gens aient envie de s'engager. Au fil des épisodes, je pense qu'on va reconnaître un petit peu, enfin j'espère qu'on va reconnaître un petit peu la manière de procéder des lobbies, qui est un petit peu toujours la même.

  • Speaker #0

    Si un jour la majorité des Français vient à comprendre ce discours, cette rhétorique du lobby, est-ce que les lobbies sont amenés à muter, à évoluer ? On a du mal à croire qu'ils puissent disparaître un jour ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense que même si les gens commencent à comprendre facilement les méthodes des lobbies, je pense que ce n'est pas pour autant qu'on saura reconnaître une action de lobbying, parce que ça peut être... Tellement subtil, tellement détourné que même moi qui ai la tête dans le guidon tout le temps, je passe à côté de plein de choses certainement. Je pense qu'il faut vraiment être un spécialiste pour vraiment avoir l'œil dessus et reconnaître tout. On peut espérer que les lobbies disparaissent des cercles du pouvoir, que les lobbies soient considérées comme indésirables dans les parlements par exemple. Ce n'est pas quelque chose d'incroyable à mettre en place. C'est un peu difficile, mais ce n'est pas impossible. Il y a des députés qui travaillent là-dessus. Il y en a d'autres, au contraire, qui n'en pensent que c'est tout à fait nécessaire d'avoir des lobbies qui prennent rendez-vous avec des parlementaires. Je pense que c'est quelque chose de possible et de souhaitable que les lobbies ne soient plus autorisées à tourner autour des parlements français et européens. En revanche, une disparition totale, c'est impossible, puisqu'ils trouveront toujours une manière de... de s'exprimer d'une manière ou d'une autre. On a affaire vraiment aux maîtres de la communication. Ce sont les meilleurs en communication, puisqu'ils ont des budgets quasiment illimités. Quand on voit que le lobby des énergies fossiles consacre 250 millions d'euros par an, ils peuvent évidemment faire appel aux meilleures agences de communication du monde entier. Donc, ils ont la communication la plus subtile, la plus agressive aussi. la plus omniprésente qu'on puisse imaginer. Ils sont sur tous les réseaux, ils peuvent répondre du tac au tac, dès que quelque chose va à la rencontre, ils peuvent répondre faisant croire à l'opinion publique qu'il y a vraiment des gens qui défendent l'industrie et qui se tiennent vent debout contre tous les gens qui essaieraient de la contrer. Donc voilà, ils auront toujours une longueur d'avance sur tout le monde en matière de communication et seront toujours les premiers à évoluer et à s'adapter. aux nouveaux médias, aux nouveaux réseaux.

  • Speaker #0

    Le mot lobby a été catégorisé comme négatif. Oui. Ce mot-là. Mais il peut y avoir du bon lobby ou pas ?

  • Speaker #1

    En fait, je pense qu'il y a deux types de lobby foncièrement différents. Il y a les lobbies qui défendent une cause et les lobbies qui défendent un portefeuille. Et c'est sans doute un jugement de la valeur parce que la cause peut être complètement bidon. Je pense à nos amis, associations d'automobilistes qui veulent rouler à 200 sur les autoroutes. ou qui râlent dès qu'on baisse la vitesse limite, ils défendent une cause aussi. Après, nous aussi, au Écolo, on défend une cause. Et l'énorme différence avec les lobbies industriels, c'est que nous, quand on réussit à faire pression sur un gouvernement ou sur l'opinion publique, qu'est-ce qu'on y gagne ? Rien du tout. C'est-à-dire qu'on est content parce qu'il y aura peut-être moins de pesticides dans les champs, il y aura peut-être moins d'arbres qui vont être coupés, etc. Mais on ne va rien y gagner. Alors qu'un lobby industriel, quand il réussit son lobbying, C'est des milliards qui sauvent ou qui vont gagner peut-être. Et ça, ça m'énerve assez qu'on ne voit pas la différence. Et souvent les lobbies industriels jouent là-dessus. Ils savent très pertinemment que l'opinion publique ne connaît pas la différence. Et ils vont nous renvoyer dos à dos. C'est-à-dire que quand on dit « mais attendez, mais là, c'est complètement intéressé ce que vous faites, vous faites un énorme lobbying et tout » , ils nous disent « et vous les lobbies écolos alors, qu'est-ce que vous faites ? » « Oui, mais nous, on est bénévoles, on n'a rien à gagner » . Ça serait bien que les gens voient cette différence. Et au-delà de ça, parce qu'après, il y a des gros lobbies écolos. Par exemple, je pense à des ONG comme WWF qui sont importants. Ils ont un budget. Mais quand on regarde de plus près le budget, même de la plus grosse ONG comme le WWF est ridicule par rapport aux lobbies industrielles qu'ils ont en face. On est sur des lobbies dix fois plus élevées, au moins dix fois plus élevées pour l'industrie. Donc quand il y a même un lobby écolo ou ce que vous voulez, serait important, aurait de l'influence. Il faut toujours avoir en tête qu'en face, on a des gens qui ont un budget illimité.

  • Speaker #0

    J'ai appris récemment qu'il y avait des écoles,

  • Speaker #1

    des lobbies.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on apprend dans ces écoles ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne me suis pas penché exactement sur le programme qu'il y avait dans les écoles, mais effectivement, c'est super intéressant de voir ça. J'ai vu l'affiche sur l'étudiant.fr. Effectivement, on montre comment devenir lobbyiste. Il y a une belle photo d'un lobbyiste. En fait, c'est vrai que c'est intéressant de voir que ça devient... N'importe quel multinational se doit d'avoir un service de relations publiques. C'est le joli mot pour dire lobbying. Parce que ça devient aussi indispensable que d'avoir un service communication, un service comptabilité. C'est indispensable de surveiller la législation pour voir si son business ne va pas se faire torpiller par une nouvelle loi. De ce que j'ai pu voir, mais de loin, on apprend évidemment à communiquer. à rentrer en contact avec des politiques, à savoir approcher des politiques, à savoir influencer tout simplement, parce que le lobby, le mot principal, c'est de l'influence. Donc effectivement, ça s'apprend.

  • Speaker #0

    Et si on revient à toi ? C'est-à-dire que là, tu es perché à Pompei, dans un petit village au fin fond du Sud-Aveyron, et tu t'attaques au sujet les plus clivants aujourd'hui dans la société française. On est sur la chasse, sur les pesticides, on voit qu'il y a des oppositions, et les arguments d'un côté et de l'autre peuvent parfois s'entendre. On n'est pas sur du noir ou du blanc. Comment tu assumes, toi, de... d'aller te frotter à ces sujets-là, qui, dans tous les cas, vont faire réagir, qui peuvent amener à des réactions hyper violentes, sûrement en ligne, mais c'est toujours assez déstabilisant quand même, j'imagine, d'avoir des retours un peu énervés. Comment tu l'assumes, ça ? Et est-ce que ça a été un frein ? Est-ce que tu t'es posé la question de dire « Est-ce que j'y vais tout seul ? J'y vais quand même, même si j'ai une petite influence, c'est mieux que rien ? »

  • Speaker #1

    Alors déjà quand on a commencé la websérie, on a tourné trois épisodes d'un coup. On a tourné la déforestation, les pesticides, la chasse. Donc en les tournant, on était absolument sûr que personne ne les verrait. Parce qu'on débutait avec Adi et Laura, on est très très nuls en réseaux sociaux et en internet. Donc on était sûr qu'on mettrait des mois voire des années à avoir une minuscule audience. Donc on ne s'attendait pas du tout à ce que le premier épisode soit vu un million de fois sur Facebook. Donc en fait, les épisodes suivants, qui pour le coup étaient clivants, mais nous on n'en avait pas conscience, les pesticides et la chasse, on fait autant, voire plus de vues, et on n'imaginait pas du tout ça. Donc on ne pensait pas du tout, pour le coup, avoir la moindre influence et la moindre audience. Donc ça n'a pas du tout été quelque chose de réfléchi, on ne s'est pas dit, voilà, ça va être dur et tout. Non, non, on s'est dit, bon, on fait nos petites vidéos tout seul dans notre coin. On parle de choses qui nous font plaisir, de choses qui nous tiennent à cœur, de choses qui nous énervent, il faut qu'on en parle, mais on ne s'est pas dit que ça allait être un petit événement sur Internet, rien du tout. Quand j'écris les épisodes, je ne les écris pas du tout pour faire polémique ou en me disant « ce sujet est vachement bien, ça risque de faire réagir » . Non, pour l'instant, pour les dix épisodes, c'était la même chose, c'était uniquement des thèmes qui nous tenaient à cœur. Et donc je voulais parler tout de suite, on avait vraiment envie d'en parler, donc je me suis mis à l'écriture sur ces sujets-là. On a zéro stratégie pour l'instant, on ne s'est jamais dit, là il faudrait le sortir maintenant, ça serait bien. Non, c'est vraiment ce qui nous fait plaisir au moment où ça nous fait plaisir. Et donc voilà, c'était ça pour les pesticides de la chasse, que je voulais mettre en lumière, par exemple pour les pesticides, je pense à une petite chose qui me paraît folle, qui n'est pas centrale dans le problème des pesticides. Le fait qu'un des plus gros fabricants de pesticides d'aujourd'hui soit le même qui ait créé le gaz moutarde et le Ziclombé, ça me paraît fou qu'on ne le sache pas. Au moins, il faut le dire. Après, effectivement, il y a des gens à qui ça ne va pas plaire. Mais il faut juste le dire, c'est important quand même. Et pareil, sur la chasse, les arguments de la fédération de chasse sont totalement absurdes. Après, moi, je ne suis pas dans mon village, il y a une association de chasseurs. Je dis bonjour à des chasseurs tous les jours, on s'entend très bien. Il y en a qui ne sont pas très contents de l'épisode sur la chasse, mais il y en a d'autres à qui ça a fait vraiment marrer. Donc je n'ai pas de problème avec les chasseurs, mais la fédération de chasse, si, j'ai un problème avec elle. Parce qu'elle dit n'importe quoi, ses arguments sont complètement absurdes et elle véhicule de fausses idées. Donc ça, ça m'énerve. Je voulais vraiment ridiculiser les arguments qui défendent l'activité chasse. de manière inconditionnelle. Pour l'épisode de la déforestation, étant donné que la déforestation, c'est plutôt... Ça fait consensus, il n'y avait pas eu de soucis. Du coup, on était très contents, ça s'est bien passé. Et puis, quand on a sorti l'épisode sur l'épicile, vraiment, on a été assez choqués de certains commentaires. On ne s'attendait pas du tout à ce que les réactions s'y vivent. Ce qui me rassure quand même, c'est, tu sais, sur YouTube, tu as les pouces vers le haut, pouces vers le bas. Et puis, sur Facebook, tu as les réactions, rires, pouces, etc. Et en fait, sur YouTube, on peut, dans notre interface de YouTubeur, on peut voir les statistiques. Et en fait, sur l'ensemble de nos vidéos, on a 98% de gens qui aiment la vidéo, qui aiment les vidéos. Donc moi, c'est ça qui me rassure, parce que malheureusement, les commentaires, c'est très trompeur, parce que ce sont les gens qui détestent la vidéo qui vont finalement laisser les plus gros commentaires. Ces commentaires-là vont être likés, dislikés par les gens. On va y répondre et du coup, ils vont remonter. Et on va voir que ça. Donc en fait, c'est trompeur parce qu'on peut se dire mais en fait, les gens ont détesté la vidéo, mais pas du tout. 98% des gens l'ont aimée. Donc ça, ça me rassure. Si jamais il y avait 50% seulement de gens qui avaient aimé la vidéo, waouh, là je serais mal. Et je me dirais non, là on s'est vraiment raté. Il se passe quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des lobbies justement qui sont venus répondre à tes vidéos qui ont occupé l'espace commentaire pour se faire entendre ?

  • Speaker #1

    Sur les pesticides, c'est sûr et certain. Sur les pesticides, ça a été vraiment... On a eu les commentaires les plus sournois et les plus vraiment mal tournés qu'on ait pu avoir sur tout. Même sur la chasse, on a eu des commentaires très vifs, très agressifs, même des menaces de mort venant de chasseurs. Mais ça ne nous dérangeait pas tellement parce qu'on trouvait ça normal que des chasseurs soient énervés. On trouvait ça normal qu'ils attaquent de manière frontale l'épisode. En revanche, sur les pesticides, c'était très sournois. Et j'ai commencé à reconnaître vraiment les structures de l'argumentaire lobbyiste dans ces commentaires-là, et aussi dans les messages privés qu'on a reçus. Et c'était un petit peu tout le temps les mêmes. Et si tu lis l'article dans Le Monde sur la stratégie de communication de Monsanto, en fait, du coup, on comprend tout. C'est vraiment appliqué à l'être. On se rend compte qu'il y a des gens qui bossent pour des agences de communication, qui répondent du tac au tac, qui scrutent Internet et les réseaux. Dès qu'il y a un article qui sort qui attaque les pesticides ou l'agrochimie, ils répondent tout de suite à un argumentaire qui est tout le temps le même. Décrédibilisation, et ensuite des arguments pro-industrie, etc. Donc pour les pesticides, c'est clair et net. Et on a eu des choses vraiment très étranges, notamment pour les pesticides. Alors là, pour le coup, ils ne l'ont pas envoyé sur la page d'Amidé Lobby, mais ils l'ont envoyé directement à Adi, le comédien. On l'a invité à rejoindre quelqu'un dans un parking le soir pour parler pesticides quand même. Donc c'était vraiment, vraiment chelou quand même.

  • Speaker #0

    Tu sens que tu touches vraiment les points de tension. Vraiment, c'est nerveux, c'est épidermique, tu as ces réactions-là. Parce qu'aussi peut-être, sur le sujet des pesticides, de la chasse, les personnes qui chassent ou qui, sur une exploitation, ont eu à utiliser des pesticides, se sentent attaquées directement. Alors que ce que tu dis est intéressant, c'est plutôt à la rhétorique. à la manipulation et des chasseurs ont été manipulés même par la fédération de chasse et des agriculteurs ont été manipulés par les lobbys pesticides agrochimiques donc avec toi tu es plutôt sûr ça sur et les consciences y compris des gens qui sont tombés dans le panneau sans forcément se rendre compte c'est ça ton idée

  • Speaker #1

    Peut-être oui alors après je Je me fais pas trop quand même d'illusions je pense que les chasseurs quoi qu'il arrive la vidéo va pas Pas trop leur plaire, c'est normal. Quoique, il y a quand même plein de chasseurs qui m'ont dit qu'ils s'étaient bien marrés en voyant la vidéo, donc ça me fait plaisir. Je me dis que quand même des gens ont compris que je ne stigmatisais pas tous les chasseurs, mais uniquement les excités de la gâchette, et surtout l'argumentaire de la Fédération de Chasse. Pour les pesticides, c'est encore... C'est vraiment délicat, parce que le recours aux pesticides, il a quasiment été imposé par toute la société. Donc je ne vois pas comment on aurait pu échapper à ça, à part vraiment ... à part vraiment des agriculteurs militants déjà dans les années 60-70 qui ont pu éventuellement refuser l'usage des pesticides, mais sinon, si on faisait son boulot normalement comme tout le monde, il n'y avait aucune raison de ne pas passer aux pesticides puisque toute la société disait que c'était excellent. Je ne veux pas du tout dire que ces gens-là se sont fait avoir parce que qui ne serait pas passé aux pesticides ? Des tas de gens qui ont des exploitations agricoles ou des élevages dans le coin et ils nous racontent comment dans les années 70, leur propre parents étaient... On a une amie qui nous a raconté comment sa mère était en pleurs quand elle s'est vue un petit peu forcer la main par des... À l'époque, ils appelaient ça des techniciens de chez Monsanto, de chez autre chose, en leur disant, mais vous êtes obligés de passer, de répandre ça maintenant sur vos cultures. C'est obligé, tout le monde fait ça, vous allez passer pour une abrutie si vous le faites pas. C'est vraiment ces gens-là qu'on a envie de mettre en lumière et de pointer du doigt.

  • Speaker #0

    Par rapport à... Merci. En Sud-Aveyron particulièrement, on est quand même sur un territoire qui est engagé. Il y a eu le Larzac, il y a un José Bové qui se tient toujours dans le coin, un McDo, un Burger King. Tu as quand même une population qui… qui est souvent �� battre le pavé. Il y a une histoire de la mobilisation, en Sud-Aveyron particulièrement. Quelle place il y a pour un activisme 2.0 comme tu le mènes finalement dans un département comme celui-là ? Est-ce que tu es en lien avec les activistes historiques ? Je pense au Larzac, naturellement.

  • Speaker #1

    Oui, je suis en lien avec eux, avec certains d'entre eux, parce que je suis dans une association qui s'appelle la Fédération des Grands Causses. qui est tenu par des anciens du Larzac, qui sont proches de José Bové. Et donc en fait, c'est vrai que les mobilisations qu'on fait sur le terrain ont encore tout leur sens, ont une grande importance. Je pense qu'il faut, pour les mobilisations de terrain, je pense qu'il faut... En revanche, un petit peu les faire évoluer pour ne pas qu'une manifestation, ça soit juste l'expression d'un ras-le-bol. Il faut vraiment que ça soit beaucoup plus ciblé. Alors moi, j'ai presque envie de dire, il faut presque que ça soit mis en scène, pour que ça soit percutant, original, que ça saute aux yeux. Et moi, c'est vrai que j'essaye d'apporter effectivement à ces mobilisations-là une audience sur Internet. parce que je pense maintenant qu'on ne peut absolument pas Pas se passer d'Internet quand on veut faire savoir quelque chose, mettre en lumière un problème, des enjeux, parce qu'on s'adresse tout de suite, enfin, si on s'en sort bien au niveau du travail, au niveau de la communication, on peut toucher des millions de gens. Donc tout prend de l'ampleur, tout peut en tout cas prendre de l'ampleur assez vite.

  • Speaker #0

    Quelle relation tu as avec cet enclavement rural qu'on connaît aux quatre coins de l'Aveyron pour le coup ? Est-ce que le numérique... peut être une voie de salut pour le rural ?

  • Speaker #1

    Pour moi, la notion d'enclavement n'est pas du tout liée à la ruralité. Parce que c'est vrai qu'avec ma famille, c'était vraiment en ville qu'on se sentait vraiment à l'étroit, qu'on s'entait, qu'on étouffait. Et depuis qu'on est là, on a vraiment une impression de liberté, de bouffée d'oxygène. Donc pour moi, je ne me sens pas du tout coincé dans un petit village. Moi, comme je te le disais, j'ai toujours fait des petits courts-métrages, des petites choses. J'avais très peu d'audience dans ce que je faisais quand j'étais sur Paris. Et maintenant que je suis dans l'Aveyron, je fais une petite web série et ça touche des millions de gens. Donc pour moi, il n'y a vraiment plus de lien direct entre la localisation, l'espace et la portée du travail qu'on fait. Ça fait des campagnes, un lieu d'avenir. Parce qu'en ville, c'est vrai que moi, ce qui me stressait un petit peu en ville, c'est qu'on a l'impression... On a l'impression parfois d'être hors sol, on a l'impression parfois d'être un petit peu des cochons sur Caillebauty, c'est-à-dire qu'on est complètement dépendant de tout. Si le magasin ferme, si les camions n'arrivent plus pour livrer la nourriture, qu'est-ce qu'on fait ? L'eau, qu'est-ce qu'on fait si elle est mauvaise au robinet, qu'est-ce qu'on fait ? Alors que vraiment, à la campagne, on peut être autonome, et l'autonomie, comme disait Pierre Rabhi, c'est quelque chose d'éminemment politique, vu les transformations qui nous attendent au niveau énergétique et au niveau... Au niveau de la consommation, je pense que c'est extrêmement important d'avoir un minimum d'autonomie alimentaire pour la suite.

  • Speaker #0

    Sur le territoire, tu parlais tout à l'heure des agriculteurs qui t'entourent, des chasseurs dans le village. Est-ce que le fait d'avoir les deux pieds vraiment ancrés dans la terre et sur un territoire qui connaît l'écologie, du moins la pratique n'a pas d'autre choix que de vivre avec sa nature dans tous les cas, est-ce que ça t'a apporté un regard particulier ? Est-ce que ça a nourri ? la construction de tes épisodes, peut-être que si tu étais resté à Paris, tu n'aurais pas eu ce lien au sol que le sud-Aveyron peut t'apporter.

  • Speaker #1

    Exactement, complètement. Le fait d'être dans l'Aveyron, le fait de parler tous les jours avec des gens qui bossent dans la nature, qui dépendent 100% du climat, de la terre, de la biodiversité, pour leur travail, ça a fait que... que les épisodes sont vraiment différents. Mais je pense notamment à l'épisode sur le loup qu'on a fait. Au départ, j'étais 100% parti pour faire un épisode écolo à Donf pour le loup, laisser le loup tranquille, on veut des loups partout. J'étais vraiment parti pour faire ça. Et puis, j'ai discuté avec 12 millions de gens et je me suis rendu compte que c'était plus compliqué que ça. Alors, on n'est pas hyper touché par le loup dans la région. mais il y a quand même des éleveurs qui le sont un petit peu, qui sont un tout petit peu plus loin, du côté de la lozère et qui sont extrêmement sensibles à ça. Et quand tu vois que tu parles du loup cinq minutes avec eux et qu'ils ont collé de larmes aux yeux, qu'ils arrivent tout de suite, tu fais « waouh, je vais me calmer tout de suite avec mes revendications parce que là il y a quelque chose qui m'échappe » . Notamment moi, par exemple, je suis végétarien mais assez souple, ça veut dire que je ne veux pas interdire aux gens de manger de la viande, je veux juste qu'ils baissent leur consommation parce que C'est du bon sens pour la santé, pour l'environnement, il faut baisser sa consommation, mais je ne suis pas de là à vouloir l'interdire. Et quand je parle avec des amis qui sont végétariens à donf ou qui sont véganes, parce que je suis super proche des mouvements véganes, je les comprends complètement et je les soutiens, mais je ne peux pas du tout en parler dans la région, ça n'aurait aucun sens. Je suis dans une région où tout le monde vit grâce à l'élevage. Donc en fait, ça ne serait pas seulement changer les habitudes alimentaires des gens, ça serait changer leur vie de A à Z. la vie qu'ils ont héritée de leurs ancêtres, donc ça n'a aucun sens. Donc c'est vrai que là, on se rend compte, quand on vit dans un milieu rural, que des petites choses qui sont hyper simples à mettre en place en ville, qui sont hyper fun, ça prend juste deux secondes de choisir tel produit au marché plutôt que celui-là. En fait, à la campagne, ça n'a rien à voir. C'est toute une vie qui change. Donc c'est super important pour moi d'être au contact de ces gens-là pour ne pas dire n'importe quoi et me rendre compte de ce qu'on prône. Mais sur le terrain, quel conseil en camp, ça a vraiment dans tout le territoire.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on en vient à un discours écolo qui peut être discrédité en deux secondes. Quand on est dans le rural, on entend le bobo parisien qui veut imposer son écologie. Peut-être pour ça que tu es pertinent en ce sens ?

  • Speaker #1

    Ce dont je m'en rends compte en vivant en milieu rural, c'est qu'il y a des choses qui sont impossibles, mais vraiment impossibles à imposer. Quand je vois par exemple la vidéo d'L214, je suis vraiment attristé par le sort qu'on réserve aux animaux pour produire du fromage. Mais quand on vit sur le terrain, on se rend bien compte que c'est impossible de changer la vie des gens. On a beau être révolté par le sort qu'on réserve aux animaux dans certains élevages, dans les abattoirs, on se rend bien compte que c'est toute la vie des gens qui travaillent, donc la vie de tout un territoire qui en dépend. et que les choses ont besoin d'être amenées de manière plus souple, plus subtile, et plus en compréhension avec les gens qui travaillent. Pour autant, je comprends complètement la démarche de l'A214. La sphère médiatique actuellement est tellement saturée de textes, d'images, de sons, que si on amène une revendication tout doucement, poliment, avec une petite voix fluette, personne ne va l'entendre. Donc parfois, il faut y aller comme un bourrin. Ça va faire peut-être de la peine à des gens, ça va en révolter d'autres, mais tant pis, le message est passé. Ce qui est sûr et certain, c'est que la consommation de viande ou de fromage ou de tous les produits animaux qui peuvent amener de la souffrance animale, quoi qu'il arrive, tous ces produits-là ne vont pas disparaître du jour au lendemain et ils ne vont même jamais disparaître. Mais ce qu'il faudrait essayer de faire, c'est exactement comme la consommation du vin en France, par exemple. Au début du 20e siècle, tout le monde buvait du vin, mais tout le temps. Même les enfants à la cantine, il y a eu du vin jusque dans les années 50, je crois, 50-60. Et donc le vin, qu'est-ce qui s'est passé avec le vin ? On a baissé énormément la consommation du vin, mais maintenant on boit du vin de qualité. Avant on buvait de la piquette tous les jours, maintenant on boit du très bon vin de temps en temps. Il faudrait que ce soit exactement la même chose avec les produits animaux. Il faudrait que ce soit de la viande excellente, des fromages excellents, mais peut-être pas tous les jours. Et dans cette optique-là, les élevages traditionnels n'ont pas de problème. aucun souci à se faire puisque c'est eux qu'on va aller chercher. C'est pas les élevages industriels avec 12 000 poulets dans un même hangar, c'est pas les cochons sur caillebottis. Ça, ça doit disparaître. Mais après les élevages traditionnels, c'est qu'ils doivent subsister et c'est vraiment ça que moi j'appelle de mes voeux. C'est pas une disparition de la filière qui n'arrivera pas de toute façon.

  • Speaker #0

    Comment tu l'as introduit cette nuance-là dans tes scénarios ?

  • Speaker #1

    Alors pour l'instant c'est vrai que je sais pas si je l'ai très bien fait comprendre. En tout cas j'essaye à chaque fois C'est par petits mots, par exemple, je pense à l'épisode sur la viande. J'ai essayé plusieurs fois dans l'épisode de bien faire comprendre qu'on s'attaquait à la viande industrielle. On fait bien comprendre, par exemple, que c'est une viande qui traverse trois fois l'Europe avant d'arriver dans notre assiette. Donc, évidemment, les éleveurs traditionnels comprennent bien que, et on ne parle pas d'eux, quand on parle d'élevage qui mange du soja OGM importé du Brésil, donc qui a causé de la déforestation. Les éleveurs qui ont leur bétail, qui mangent dehors et qui mangent du foin l'hiver, ça vient qu'on ne parle pas d'eux. Donc voilà, c'est par petits détails comme ça qu'à chaque fois, j'essaye de ne pas être dans la stigmatisation de toute une filière, de tous les travailleurs du secteur. Et souvent, je suis super content parce qu'on a des petits messages qui arrivent sur la page d'Amis des lobbies, de gens qui travaillent dans le milieu et qui me disent « Merci, j'ai vu votre truc, c'était super bien » . Ça serait vraiment un échec pour moi de me mettre à dos C'est même pas de mettre trado, c'est de faire de la peine aux gens qui sont pas concernés par le problème. Parce qu'un petit élevage à échelle humaine n'est pas concerné par le problème de la viande. Ce qui est catastrophique avec la consommation de viande, déjà c'est les gens qui mangent évidemment de la viande à tous les repas, mais c'est surtout des gens qui mangent de la viande de mauvaise qualité, qu'ils ont achetée dans une boîte au supermarché, et dans lequel, dans le steak haché, il y a 12 animaux, ou 60 animaux. et qui a été nourri au soja OGM, etc. C'est ça le problème. C'est pas le steak de l'Aubrac qui... qui s'est nourri correctement. Il faut réussir à être un minimum subtil quand même, mais il y a toujours une difficulté parce que nous aussi, on veut être percutant. Il faut un minimum. Il faut aussi rentrer dedans. Et aussi, on veut faire rire. Donc, quand on fait des blagues aussi, parfois, tout le monde peut se sentir concerné. Alors, on se moque surtout de l'industrie.

  • Speaker #0

    Peut-être pour terminer, Jérémy, quelle est la boussole de ta vie, l'engagement vraiment qui fait sens et qui fait que tu te lèves tous les matins ?

  • Speaker #1

    Ça va peut-être te paraître un petit peu bizarre parce que finalement, ça n'est pas complètement lié à mon engagement dans l'écologie. Parce qu'en fait, c'est vrai que dans l'écologie, je ne vois pas un point à atteindre parce qu'il y aura toujours à veiller, il y aura toujours à faire attention à ça. Il n'y aura pas un jour où on se dira ça y est, on a réussi. Donc, en revanche, moi, en ce moment, ce qui me trotte tout le temps en tête et ce qui me donne vraiment un objectif. C'est la même boussole que j'avais quand j'étais petit. Je l'ai oublié pendant pas mal d'années et là, ça revient très très fort. C'est l'envie de raconter des histoires, et de raconter des belles histoires, et de faire par exemple un long métrage, et d'être reconnu comme un conteur d'histoire. Ça, ça me ferait vraiment plaisir, et que ça soit mon métier. En ce moment, c'est vraiment la chose à laquelle je pense beaucoup et qui me fait rêver. Et je trouve qu'on peut faire passer beaucoup de choses dans la fiction. Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook, Finta.lepodcast, pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert, soyez curieux !

Description

Direction le Sud-Aveyron pour ce deuxième épisode de Finta. Je rencontre aujourd’hui Jérémy Bismuth. Il est le créateur de la websérie « L’Ami des lobbies », qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. 

En déconstruisant le discours de lobbies industriels, depuis son petit village de Compeyre, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. 

Alors, cinquante ans après la lutte des paysans du Larzac voisin, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d’écologie des villes et d’écologie des champs, et de L’Ami des lobbies évidemment.

💬 "En vivant en milieu rural, je comprends qu’il y a des choses impossibles à imposer. Les choses ont besoin d’être amenées de manière plus souple, plus subtile et plus en compréhension avec les gens qui travaillent ici."


+


Pour aller plus loin sur les sujets abordés dans l'épisode

-  Glyphosate : « Faire en sorte que les lobbies ne gagnent pas toujours à la fin » (lemonde.fr) 

-  « Monsanto papers » : la guerre du géant des pesticides contre la science (lemonde.fr) 


Et pour regarder les épisodes de L'Ami des Lobbies sur Youtube, c'est par ici :  Ami des lobbies - YouTube 


💸 Si vous voulez soutenir financièrement Finta! et participer à renforcer son indépendance éditoriale, une cagnotte participative est en ligne. Juste ici !


🧡 Si vous aimez Finta! partagez-le! Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par Lola Cros, journaliste indépendante. Il est mixé par le studio Qude. Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts. Plus d'infos sur www.fintapodcast.fr


🔅 On se retrouve dès maintenant sur Instagram!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bientôt. Je rencontre aujourd'hui Jérémy Bismuth, il est le créateur de la web-série L'Amie des Lobby, qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. En déconstruisant le discours de lobby industriel, depuis le petit village de Comper, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. Alors, 50 ans après la lutte du Larzac, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d'écologie des villes et d'écologie des champs. C'est parti ! Jérémy, tu nous accueilles aujourd'hui dans un village tout particulier. Pourquoi ? Est-ce que tu peux nous dire où on se trouve ?

  • Speaker #1

    Oui, on est à Comper, dans l'Aveyron. C'est le village natal de mon arrière-grand-père. C'est le village dans lequel mes grands-parents habitent maintenant et dans lequel je vis avec ma famille depuis trois ans. C'est vraiment ici que j'ai appris à aimer, à respecter, à découvrir la nature. Et c'est aussi ici, avec toutes les aventures qu'on vivait, que je me suis mis à écrire mes premières petites histoires. Et donc, c'est en fait ici que mes deux passions sont nées, pour la nature et pour l'écriture.

  • Speaker #0

    Trois ans à Compayre, et depuis un an et demi maintenant, tu as ajouté un bébé dans la famille, l'ami des lobbies. Donc c'est une web-série que tu as créée autour du discours des lobbies, comment décrypter Déconstruire le discours des lobbies, quelle est l'émotion peut-être qui te guide à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Le point de départ, vraiment le tout premier point de départ de la websérie, il n'est pas encore du tout lié au lobbying, il n'est pas du tout lié au discours des lobbies, c'est juste l'écologie et l'envie de faire une petite websérie autour. Et ensuite, effectivement, ça a mûri pendant quasiment dix ans. Et je pense que l'émotion finalement qui a fait beaucoup, c'est la colère en fait. Parce qu'il y a des sujets qui sont incroyablement importants, qui ont des conséquences incroyables sur notre santé, sur notre environnement, sur notre avenir, et dont on ne parle pas du tout, ou alors dont on parle mal. Et donc ça m'énervait énormément. Et ça m'énervait beaucoup aussi d'entendre les détracteurs. Et donc à l'époque, je ne le savais pas encore, parce que je ne m'intéressais pas de près. en fait le discours des lobbies industriels, je ne les identifiais pas comme tels avant, mais maintenant je sais que ça vient de là, qui essayaient de noyer le poisson, qui essayaient de faire croire à une certaine normalité, qui appelaient à ne pas changer, à continuer exactement notre manière de vivre, qui appelaient à poursuivre notre manière de consommer comme si de rien n'était. Donc ça m'énervait énormément et donc j'avais envie, l'envie de faire cette websérie est devenue de plus en plus pressante. Mais encore une fois, au début, à ce moment-là, je n'étais toujours pas dans l'idée de prendre le point de vue des lobbies. D'ailleurs, j'ai commencé à écrire le tout premier épisode sur la déforestation avec un tout autre axe. Le personnage principal était un écolo. Alors, pour rendre la chose un peu rigolote, c'était un écolo un peu nul, un peu incompétent. Et puis, à côté, il y avait la scientifique qui était là pour apporter des vrais chiffres, des vraies données. Et puis j'ai écrit le premier épisode comme ça et j'ai trouvé que c'était un petit peu nul. Et du coup, je me suis dit, non, il faut trouver quelque chose de plus percutant, de plus incisif. Et effectivement, l'idée de prendre le point de vue des lobbies a paru bien plus percutante. Et c'était presque... Déjà, d'un point de vue scénaristique, c'était super parce que ça permettait de créer plus de situations rigolotes, finalement. Et du point de vue de l'argumentation, ça permettait de beaucoup mieux déconstruire le discours des détracteurs de l'écologie, de ceux qui font l'éloge de l'industrie et d'une course effrénée à la croissance. Donc en fait, c'est vrai que la colère y est pour beaucoup dans le choix de tourner en ridicule le discours des lobbies industriels. Il y avait aussi l'envie d'expliquer de manière très très imagée et de la manière la plus limpide possible. Toutes ces choses que j'avais en tête par rapport à l'écologie, parce que c'est vrai que moi, quand j'entendais des discours, quand je voyais des vidéos sur l'écologie, souvent je me disais, aïe aïe aïe, on ne comprend pas assez bien, ou ce n'est pas comme ça qu'il faut le montrer. Moi, j'adore la pédagogie, j'ai été prof de cinéma pendant deux ans, j'adorais ça, je ne sais pas si mes élèves diraient la même chose.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un temps particulier dans l'amitié lobby qui fait qu'en comprenant le message et là où tu veux nous amener, mais c'est du second degré. Il faut quand même arriver à comprendre. Et d'ailleurs, je crois que dans les premières vidéos, certains internautes n'avaient pas compris ce temps-là et sont clairement tombés dans le panneau alors que tu voulais montrer, par l'absurde, la manipulation.

  • Speaker #1

    Oui, c'est vrai qu'en fait, dans la vie des lobbies, on essaie toujours de faire en sorte que sur les premières secondes de la vidéo, on puisse croire qu'on est vraiment pro-industrie et anti-écolo. Au moins sur les premières secondes, ne serait-ce que pour... déstabiliser le spectateur et puis aussi pour essayer de nous mettre dans la poche au moins sur cinq secondes quelqu'un qui est vraiment anti écolo parce qu'on trouve ça rigolo que la personne se dise ah enfin une vidéo qui me plaît et puis sur les secondes suivantes ah non en fait je me suis fait avoir juste pour cette petite blague là ça nous fait plaisir mais normalement quand on a un tout petit peu de recul et quelques neurones qui nous restent normalement on comprend qu'on est foncièrement écolo dans la vidéo Mais c'est vrai que parfois on a des petites surprises, heureusement ça arrive très très rarement, mais on a toujours une petite surprise de quelqu'un qui nous dit « bande de salauds, vous voulez la déforestation ? » C'est drôle parce que ça reste minoritaire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu sais définir un lobby ?

  • Speaker #1

    Oui, alors un lobby c'est un groupe de pression. C'est vrai que le mot de lobby, il prête à beaucoup déjà de fantasmes et à beaucoup de contresens. Je le vois dans les commentaires parfois ou dans les messages qu'on reçoit. Les gens confondent le mot lobby avec le mot business, pour eux c'est la même chose, ou alors encore pire avec le mot de complot. Pour eux, lobby ça veut forcément dire qu'il y a un complot derrière, alors que pas du tout. Un lobby c'est juste un groupe de pression, c'est-à-dire que ce sont des gens ou des entreprises qui se mettent ensemble pour avoir plus de poids et pour influencer la politique, pour influencer nos décideurs, nos parlementaires. Il y a un autre aspect du lobbying qui est l'influence de l'opinion publique. Mais le principal objectif, c'est d'influencer les gens qui prennent des décisions. Le lobbying, il existe à toutes les échelles. C'est-à-dire que moi, par exemple, je fais partie d'une association écolo à Millau. On a zéro euro de budget, on est tous bénévoles, mais on essaye aussi de nous adresser aux élus de la ville de Millau pour attirer leur attention sur tel problème écologique, etc. Donc on peut très bien dire qu'à notre échelle, on fait du lobbying. À côté de ça, vous avez des lobbies qui ont des millions d'euros, mais vraiment, ce n'est pas une expression, c'est des millions d'euros à dépenser chaque année juste en lobbying. pour influencer l'opinion publique et surtout pour influencer les politiques. Nous, on va juste s'adresser aux élus. Vous avez d'autres lobbies qui vont envoyer directement un texte de loi pré-rédigé ou un amendement pré-rédigé aux parlementaires pour qu'ils le signent, qu'ils le votent. Donc voilà, vraiment, l'influence n'a rien à voir.

  • Speaker #0

    Toi, dans tes vidéos, tu as déconstruit le lobby de la chasse, le lobby de la déforestation, le lobby des pesticides, de la mode. Quoi d'autre ?

  • Speaker #1

    On s'est attaqué à la viande. On a été chercher aussi derrière des énergies fossiles. qui essayent de faire croire que le climat ne se réchauffe pas à cause de l'homme. Les gros lobbys industriels, ce qu'ils vont défendre d'abord, c'est leur portefeuille. C'est-à-dire qu'ils vont surveiller qu'aucune loi ne passe qui puisse freiner leur activité, voire stopper leur activité. Donc ils sont extrêmement vigilants par rapport à ça. Et ils vont tout faire pour que l'opinion publique et les politiques pensent qu'il n'y a rien à changer, qu'on peut continuer comme avant. Après, il y a un... Il y a l'étape encore plus sournoise, c'est quand ils défendent quelque chose qu'ils savent pertinemment qui est nocive pour la santé et l'environnement. Là, on passe à un stade vraiment immoral, puisqu'en plus, on a des preuves. Par exemple, on sait qu'ExxonMobil, un géant des énergies fossiles, sait depuis les années 70-80 que la combustion d'énergie fossile va emmener un réchauffement climatique qui va dérégler foncièrement tout le système Terre. En fait, quand on se rend compte que des industries comme ça savent tout le mal en fait qu'ils provoquent, mais qu'ils essayent de le cacher, de convaincre tout le monde qu'il n'y a aucun problème. Là, on est dans quelque chose quand même de très grave et de criminel. Quelqu'un qui voit nos vidéos, qui n'avait absolument pas conscience du sujet. Effectivement, j'espère déjà que ça va le faire rire un petit peu, parce que quand quelqu'un rit sur un sujet, ça veut dire qu'il est un petit peu avec nous. J'espère que ça peut l'amener à changer un petit peu ses habitudes de consommation. Les gens qui sont déjà sensibles au sujet, j'espère que ça va leur faire une petite piqûre de rappel et les inviter à s'engager, parce que c'est vrai que quand on fait les choses chez soi, tout seul, c'est déjà très bien, mais il faut vraiment passer à l'étape d'après, qui est de faire ces mêmes actions, mais en collectivité, dans une association, une ONG, et puis porter ce même discours. devant sa municipalité, sa région, son pays. On ne peut qu'espérer que les gens aient envie de s'engager. Au fil des épisodes, je pense qu'on va reconnaître un petit peu, enfin j'espère qu'on va reconnaître un petit peu la manière de procéder des lobbies, qui est un petit peu toujours la même.

  • Speaker #0

    Si un jour la majorité des Français vient à comprendre ce discours, cette rhétorique du lobby, est-ce que les lobbies sont amenés à muter, à évoluer ? On a du mal à croire qu'ils puissent disparaître un jour ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense que même si les gens commencent à comprendre facilement les méthodes des lobbies, je pense que ce n'est pas pour autant qu'on saura reconnaître une action de lobbying, parce que ça peut être... Tellement subtil, tellement détourné que même moi qui ai la tête dans le guidon tout le temps, je passe à côté de plein de choses certainement. Je pense qu'il faut vraiment être un spécialiste pour vraiment avoir l'œil dessus et reconnaître tout. On peut espérer que les lobbies disparaissent des cercles du pouvoir, que les lobbies soient considérées comme indésirables dans les parlements par exemple. Ce n'est pas quelque chose d'incroyable à mettre en place. C'est un peu difficile, mais ce n'est pas impossible. Il y a des députés qui travaillent là-dessus. Il y en a d'autres, au contraire, qui n'en pensent que c'est tout à fait nécessaire d'avoir des lobbies qui prennent rendez-vous avec des parlementaires. Je pense que c'est quelque chose de possible et de souhaitable que les lobbies ne soient plus autorisées à tourner autour des parlements français et européens. En revanche, une disparition totale, c'est impossible, puisqu'ils trouveront toujours une manière de... de s'exprimer d'une manière ou d'une autre. On a affaire vraiment aux maîtres de la communication. Ce sont les meilleurs en communication, puisqu'ils ont des budgets quasiment illimités. Quand on voit que le lobby des énergies fossiles consacre 250 millions d'euros par an, ils peuvent évidemment faire appel aux meilleures agences de communication du monde entier. Donc, ils ont la communication la plus subtile, la plus agressive aussi. la plus omniprésente qu'on puisse imaginer. Ils sont sur tous les réseaux, ils peuvent répondre du tac au tac, dès que quelque chose va à la rencontre, ils peuvent répondre faisant croire à l'opinion publique qu'il y a vraiment des gens qui défendent l'industrie et qui se tiennent vent debout contre tous les gens qui essaieraient de la contrer. Donc voilà, ils auront toujours une longueur d'avance sur tout le monde en matière de communication et seront toujours les premiers à évoluer et à s'adapter. aux nouveaux médias, aux nouveaux réseaux.

  • Speaker #0

    Le mot lobby a été catégorisé comme négatif. Oui. Ce mot-là. Mais il peut y avoir du bon lobby ou pas ?

  • Speaker #1

    En fait, je pense qu'il y a deux types de lobby foncièrement différents. Il y a les lobbies qui défendent une cause et les lobbies qui défendent un portefeuille. Et c'est sans doute un jugement de la valeur parce que la cause peut être complètement bidon. Je pense à nos amis, associations d'automobilistes qui veulent rouler à 200 sur les autoroutes. ou qui râlent dès qu'on baisse la vitesse limite, ils défendent une cause aussi. Après, nous aussi, au Écolo, on défend une cause. Et l'énorme différence avec les lobbies industriels, c'est que nous, quand on réussit à faire pression sur un gouvernement ou sur l'opinion publique, qu'est-ce qu'on y gagne ? Rien du tout. C'est-à-dire qu'on est content parce qu'il y aura peut-être moins de pesticides dans les champs, il y aura peut-être moins d'arbres qui vont être coupés, etc. Mais on ne va rien y gagner. Alors qu'un lobby industriel, quand il réussit son lobbying, C'est des milliards qui sauvent ou qui vont gagner peut-être. Et ça, ça m'énerve assez qu'on ne voit pas la différence. Et souvent les lobbies industriels jouent là-dessus. Ils savent très pertinemment que l'opinion publique ne connaît pas la différence. Et ils vont nous renvoyer dos à dos. C'est-à-dire que quand on dit « mais attendez, mais là, c'est complètement intéressé ce que vous faites, vous faites un énorme lobbying et tout » , ils nous disent « et vous les lobbies écolos alors, qu'est-ce que vous faites ? » « Oui, mais nous, on est bénévoles, on n'a rien à gagner » . Ça serait bien que les gens voient cette différence. Et au-delà de ça, parce qu'après, il y a des gros lobbies écolos. Par exemple, je pense à des ONG comme WWF qui sont importants. Ils ont un budget. Mais quand on regarde de plus près le budget, même de la plus grosse ONG comme le WWF est ridicule par rapport aux lobbies industrielles qu'ils ont en face. On est sur des lobbies dix fois plus élevées, au moins dix fois plus élevées pour l'industrie. Donc quand il y a même un lobby écolo ou ce que vous voulez, serait important, aurait de l'influence. Il faut toujours avoir en tête qu'en face, on a des gens qui ont un budget illimité.

  • Speaker #0

    J'ai appris récemment qu'il y avait des écoles,

  • Speaker #1

    des lobbies.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on apprend dans ces écoles ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne me suis pas penché exactement sur le programme qu'il y avait dans les écoles, mais effectivement, c'est super intéressant de voir ça. J'ai vu l'affiche sur l'étudiant.fr. Effectivement, on montre comment devenir lobbyiste. Il y a une belle photo d'un lobbyiste. En fait, c'est vrai que c'est intéressant de voir que ça devient... N'importe quel multinational se doit d'avoir un service de relations publiques. C'est le joli mot pour dire lobbying. Parce que ça devient aussi indispensable que d'avoir un service communication, un service comptabilité. C'est indispensable de surveiller la législation pour voir si son business ne va pas se faire torpiller par une nouvelle loi. De ce que j'ai pu voir, mais de loin, on apprend évidemment à communiquer. à rentrer en contact avec des politiques, à savoir approcher des politiques, à savoir influencer tout simplement, parce que le lobby, le mot principal, c'est de l'influence. Donc effectivement, ça s'apprend.

  • Speaker #0

    Et si on revient à toi ? C'est-à-dire que là, tu es perché à Pompei, dans un petit village au fin fond du Sud-Aveyron, et tu t'attaques au sujet les plus clivants aujourd'hui dans la société française. On est sur la chasse, sur les pesticides, on voit qu'il y a des oppositions, et les arguments d'un côté et de l'autre peuvent parfois s'entendre. On n'est pas sur du noir ou du blanc. Comment tu assumes, toi, de... d'aller te frotter à ces sujets-là, qui, dans tous les cas, vont faire réagir, qui peuvent amener à des réactions hyper violentes, sûrement en ligne, mais c'est toujours assez déstabilisant quand même, j'imagine, d'avoir des retours un peu énervés. Comment tu l'assumes, ça ? Et est-ce que ça a été un frein ? Est-ce que tu t'es posé la question de dire « Est-ce que j'y vais tout seul ? J'y vais quand même, même si j'ai une petite influence, c'est mieux que rien ? »

  • Speaker #1

    Alors déjà quand on a commencé la websérie, on a tourné trois épisodes d'un coup. On a tourné la déforestation, les pesticides, la chasse. Donc en les tournant, on était absolument sûr que personne ne les verrait. Parce qu'on débutait avec Adi et Laura, on est très très nuls en réseaux sociaux et en internet. Donc on était sûr qu'on mettrait des mois voire des années à avoir une minuscule audience. Donc on ne s'attendait pas du tout à ce que le premier épisode soit vu un million de fois sur Facebook. Donc en fait, les épisodes suivants, qui pour le coup étaient clivants, mais nous on n'en avait pas conscience, les pesticides et la chasse, on fait autant, voire plus de vues, et on n'imaginait pas du tout ça. Donc on ne pensait pas du tout, pour le coup, avoir la moindre influence et la moindre audience. Donc ça n'a pas du tout été quelque chose de réfléchi, on ne s'est pas dit, voilà, ça va être dur et tout. Non, non, on s'est dit, bon, on fait nos petites vidéos tout seul dans notre coin. On parle de choses qui nous font plaisir, de choses qui nous tiennent à cœur, de choses qui nous énervent, il faut qu'on en parle, mais on ne s'est pas dit que ça allait être un petit événement sur Internet, rien du tout. Quand j'écris les épisodes, je ne les écris pas du tout pour faire polémique ou en me disant « ce sujet est vachement bien, ça risque de faire réagir » . Non, pour l'instant, pour les dix épisodes, c'était la même chose, c'était uniquement des thèmes qui nous tenaient à cœur. Et donc je voulais parler tout de suite, on avait vraiment envie d'en parler, donc je me suis mis à l'écriture sur ces sujets-là. On a zéro stratégie pour l'instant, on ne s'est jamais dit, là il faudrait le sortir maintenant, ça serait bien. Non, c'est vraiment ce qui nous fait plaisir au moment où ça nous fait plaisir. Et donc voilà, c'était ça pour les pesticides de la chasse, que je voulais mettre en lumière, par exemple pour les pesticides, je pense à une petite chose qui me paraît folle, qui n'est pas centrale dans le problème des pesticides. Le fait qu'un des plus gros fabricants de pesticides d'aujourd'hui soit le même qui ait créé le gaz moutarde et le Ziclombé, ça me paraît fou qu'on ne le sache pas. Au moins, il faut le dire. Après, effectivement, il y a des gens à qui ça ne va pas plaire. Mais il faut juste le dire, c'est important quand même. Et pareil, sur la chasse, les arguments de la fédération de chasse sont totalement absurdes. Après, moi, je ne suis pas dans mon village, il y a une association de chasseurs. Je dis bonjour à des chasseurs tous les jours, on s'entend très bien. Il y en a qui ne sont pas très contents de l'épisode sur la chasse, mais il y en a d'autres à qui ça a fait vraiment marrer. Donc je n'ai pas de problème avec les chasseurs, mais la fédération de chasse, si, j'ai un problème avec elle. Parce qu'elle dit n'importe quoi, ses arguments sont complètement absurdes et elle véhicule de fausses idées. Donc ça, ça m'énerve. Je voulais vraiment ridiculiser les arguments qui défendent l'activité chasse. de manière inconditionnelle. Pour l'épisode de la déforestation, étant donné que la déforestation, c'est plutôt... Ça fait consensus, il n'y avait pas eu de soucis. Du coup, on était très contents, ça s'est bien passé. Et puis, quand on a sorti l'épisode sur l'épicile, vraiment, on a été assez choqués de certains commentaires. On ne s'attendait pas du tout à ce que les réactions s'y vivent. Ce qui me rassure quand même, c'est, tu sais, sur YouTube, tu as les pouces vers le haut, pouces vers le bas. Et puis, sur Facebook, tu as les réactions, rires, pouces, etc. Et en fait, sur YouTube, on peut, dans notre interface de YouTubeur, on peut voir les statistiques. Et en fait, sur l'ensemble de nos vidéos, on a 98% de gens qui aiment la vidéo, qui aiment les vidéos. Donc moi, c'est ça qui me rassure, parce que malheureusement, les commentaires, c'est très trompeur, parce que ce sont les gens qui détestent la vidéo qui vont finalement laisser les plus gros commentaires. Ces commentaires-là vont être likés, dislikés par les gens. On va y répondre et du coup, ils vont remonter. Et on va voir que ça. Donc en fait, c'est trompeur parce qu'on peut se dire mais en fait, les gens ont détesté la vidéo, mais pas du tout. 98% des gens l'ont aimée. Donc ça, ça me rassure. Si jamais il y avait 50% seulement de gens qui avaient aimé la vidéo, waouh, là je serais mal. Et je me dirais non, là on s'est vraiment raté. Il se passe quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des lobbies justement qui sont venus répondre à tes vidéos qui ont occupé l'espace commentaire pour se faire entendre ?

  • Speaker #1

    Sur les pesticides, c'est sûr et certain. Sur les pesticides, ça a été vraiment... On a eu les commentaires les plus sournois et les plus vraiment mal tournés qu'on ait pu avoir sur tout. Même sur la chasse, on a eu des commentaires très vifs, très agressifs, même des menaces de mort venant de chasseurs. Mais ça ne nous dérangeait pas tellement parce qu'on trouvait ça normal que des chasseurs soient énervés. On trouvait ça normal qu'ils attaquent de manière frontale l'épisode. En revanche, sur les pesticides, c'était très sournois. Et j'ai commencé à reconnaître vraiment les structures de l'argumentaire lobbyiste dans ces commentaires-là, et aussi dans les messages privés qu'on a reçus. Et c'était un petit peu tout le temps les mêmes. Et si tu lis l'article dans Le Monde sur la stratégie de communication de Monsanto, en fait, du coup, on comprend tout. C'est vraiment appliqué à l'être. On se rend compte qu'il y a des gens qui bossent pour des agences de communication, qui répondent du tac au tac, qui scrutent Internet et les réseaux. Dès qu'il y a un article qui sort qui attaque les pesticides ou l'agrochimie, ils répondent tout de suite à un argumentaire qui est tout le temps le même. Décrédibilisation, et ensuite des arguments pro-industrie, etc. Donc pour les pesticides, c'est clair et net. Et on a eu des choses vraiment très étranges, notamment pour les pesticides. Alors là, pour le coup, ils ne l'ont pas envoyé sur la page d'Amidé Lobby, mais ils l'ont envoyé directement à Adi, le comédien. On l'a invité à rejoindre quelqu'un dans un parking le soir pour parler pesticides quand même. Donc c'était vraiment, vraiment chelou quand même.

  • Speaker #0

    Tu sens que tu touches vraiment les points de tension. Vraiment, c'est nerveux, c'est épidermique, tu as ces réactions-là. Parce qu'aussi peut-être, sur le sujet des pesticides, de la chasse, les personnes qui chassent ou qui, sur une exploitation, ont eu à utiliser des pesticides, se sentent attaquées directement. Alors que ce que tu dis est intéressant, c'est plutôt à la rhétorique. à la manipulation et des chasseurs ont été manipulés même par la fédération de chasse et des agriculteurs ont été manipulés par les lobbys pesticides agrochimiques donc avec toi tu es plutôt sûr ça sur et les consciences y compris des gens qui sont tombés dans le panneau sans forcément se rendre compte c'est ça ton idée

  • Speaker #1

    Peut-être oui alors après je Je me fais pas trop quand même d'illusions je pense que les chasseurs quoi qu'il arrive la vidéo va pas Pas trop leur plaire, c'est normal. Quoique, il y a quand même plein de chasseurs qui m'ont dit qu'ils s'étaient bien marrés en voyant la vidéo, donc ça me fait plaisir. Je me dis que quand même des gens ont compris que je ne stigmatisais pas tous les chasseurs, mais uniquement les excités de la gâchette, et surtout l'argumentaire de la Fédération de Chasse. Pour les pesticides, c'est encore... C'est vraiment délicat, parce que le recours aux pesticides, il a quasiment été imposé par toute la société. Donc je ne vois pas comment on aurait pu échapper à ça, à part vraiment ... à part vraiment des agriculteurs militants déjà dans les années 60-70 qui ont pu éventuellement refuser l'usage des pesticides, mais sinon, si on faisait son boulot normalement comme tout le monde, il n'y avait aucune raison de ne pas passer aux pesticides puisque toute la société disait que c'était excellent. Je ne veux pas du tout dire que ces gens-là se sont fait avoir parce que qui ne serait pas passé aux pesticides ? Des tas de gens qui ont des exploitations agricoles ou des élevages dans le coin et ils nous racontent comment dans les années 70, leur propre parents étaient... On a une amie qui nous a raconté comment sa mère était en pleurs quand elle s'est vue un petit peu forcer la main par des... À l'époque, ils appelaient ça des techniciens de chez Monsanto, de chez autre chose, en leur disant, mais vous êtes obligés de passer, de répandre ça maintenant sur vos cultures. C'est obligé, tout le monde fait ça, vous allez passer pour une abrutie si vous le faites pas. C'est vraiment ces gens-là qu'on a envie de mettre en lumière et de pointer du doigt.

  • Speaker #0

    Par rapport à... Merci. En Sud-Aveyron particulièrement, on est quand même sur un territoire qui est engagé. Il y a eu le Larzac, il y a un José Bové qui se tient toujours dans le coin, un McDo, un Burger King. Tu as quand même une population qui… qui est souvent �� battre le pavé. Il y a une histoire de la mobilisation, en Sud-Aveyron particulièrement. Quelle place il y a pour un activisme 2.0 comme tu le mènes finalement dans un département comme celui-là ? Est-ce que tu es en lien avec les activistes historiques ? Je pense au Larzac, naturellement.

  • Speaker #1

    Oui, je suis en lien avec eux, avec certains d'entre eux, parce que je suis dans une association qui s'appelle la Fédération des Grands Causses. qui est tenu par des anciens du Larzac, qui sont proches de José Bové. Et donc en fait, c'est vrai que les mobilisations qu'on fait sur le terrain ont encore tout leur sens, ont une grande importance. Je pense qu'il faut, pour les mobilisations de terrain, je pense qu'il faut... En revanche, un petit peu les faire évoluer pour ne pas qu'une manifestation, ça soit juste l'expression d'un ras-le-bol. Il faut vraiment que ça soit beaucoup plus ciblé. Alors moi, j'ai presque envie de dire, il faut presque que ça soit mis en scène, pour que ça soit percutant, original, que ça saute aux yeux. Et moi, c'est vrai que j'essaye d'apporter effectivement à ces mobilisations-là une audience sur Internet. parce que je pense maintenant qu'on ne peut absolument pas Pas se passer d'Internet quand on veut faire savoir quelque chose, mettre en lumière un problème, des enjeux, parce qu'on s'adresse tout de suite, enfin, si on s'en sort bien au niveau du travail, au niveau de la communication, on peut toucher des millions de gens. Donc tout prend de l'ampleur, tout peut en tout cas prendre de l'ampleur assez vite.

  • Speaker #0

    Quelle relation tu as avec cet enclavement rural qu'on connaît aux quatre coins de l'Aveyron pour le coup ? Est-ce que le numérique... peut être une voie de salut pour le rural ?

  • Speaker #1

    Pour moi, la notion d'enclavement n'est pas du tout liée à la ruralité. Parce que c'est vrai qu'avec ma famille, c'était vraiment en ville qu'on se sentait vraiment à l'étroit, qu'on s'entait, qu'on étouffait. Et depuis qu'on est là, on a vraiment une impression de liberté, de bouffée d'oxygène. Donc pour moi, je ne me sens pas du tout coincé dans un petit village. Moi, comme je te le disais, j'ai toujours fait des petits courts-métrages, des petites choses. J'avais très peu d'audience dans ce que je faisais quand j'étais sur Paris. Et maintenant que je suis dans l'Aveyron, je fais une petite web série et ça touche des millions de gens. Donc pour moi, il n'y a vraiment plus de lien direct entre la localisation, l'espace et la portée du travail qu'on fait. Ça fait des campagnes, un lieu d'avenir. Parce qu'en ville, c'est vrai que moi, ce qui me stressait un petit peu en ville, c'est qu'on a l'impression... On a l'impression parfois d'être hors sol, on a l'impression parfois d'être un petit peu des cochons sur Caillebauty, c'est-à-dire qu'on est complètement dépendant de tout. Si le magasin ferme, si les camions n'arrivent plus pour livrer la nourriture, qu'est-ce qu'on fait ? L'eau, qu'est-ce qu'on fait si elle est mauvaise au robinet, qu'est-ce qu'on fait ? Alors que vraiment, à la campagne, on peut être autonome, et l'autonomie, comme disait Pierre Rabhi, c'est quelque chose d'éminemment politique, vu les transformations qui nous attendent au niveau énergétique et au niveau... Au niveau de la consommation, je pense que c'est extrêmement important d'avoir un minimum d'autonomie alimentaire pour la suite.

  • Speaker #0

    Sur le territoire, tu parlais tout à l'heure des agriculteurs qui t'entourent, des chasseurs dans le village. Est-ce que le fait d'avoir les deux pieds vraiment ancrés dans la terre et sur un territoire qui connaît l'écologie, du moins la pratique n'a pas d'autre choix que de vivre avec sa nature dans tous les cas, est-ce que ça t'a apporté un regard particulier ? Est-ce que ça a nourri ? la construction de tes épisodes, peut-être que si tu étais resté à Paris, tu n'aurais pas eu ce lien au sol que le sud-Aveyron peut t'apporter.

  • Speaker #1

    Exactement, complètement. Le fait d'être dans l'Aveyron, le fait de parler tous les jours avec des gens qui bossent dans la nature, qui dépendent 100% du climat, de la terre, de la biodiversité, pour leur travail, ça a fait que... que les épisodes sont vraiment différents. Mais je pense notamment à l'épisode sur le loup qu'on a fait. Au départ, j'étais 100% parti pour faire un épisode écolo à Donf pour le loup, laisser le loup tranquille, on veut des loups partout. J'étais vraiment parti pour faire ça. Et puis, j'ai discuté avec 12 millions de gens et je me suis rendu compte que c'était plus compliqué que ça. Alors, on n'est pas hyper touché par le loup dans la région. mais il y a quand même des éleveurs qui le sont un petit peu, qui sont un tout petit peu plus loin, du côté de la lozère et qui sont extrêmement sensibles à ça. Et quand tu vois que tu parles du loup cinq minutes avec eux et qu'ils ont collé de larmes aux yeux, qu'ils arrivent tout de suite, tu fais « waouh, je vais me calmer tout de suite avec mes revendications parce que là il y a quelque chose qui m'échappe » . Notamment moi, par exemple, je suis végétarien mais assez souple, ça veut dire que je ne veux pas interdire aux gens de manger de la viande, je veux juste qu'ils baissent leur consommation parce que C'est du bon sens pour la santé, pour l'environnement, il faut baisser sa consommation, mais je ne suis pas de là à vouloir l'interdire. Et quand je parle avec des amis qui sont végétariens à donf ou qui sont véganes, parce que je suis super proche des mouvements véganes, je les comprends complètement et je les soutiens, mais je ne peux pas du tout en parler dans la région, ça n'aurait aucun sens. Je suis dans une région où tout le monde vit grâce à l'élevage. Donc en fait, ça ne serait pas seulement changer les habitudes alimentaires des gens, ça serait changer leur vie de A à Z. la vie qu'ils ont héritée de leurs ancêtres, donc ça n'a aucun sens. Donc c'est vrai que là, on se rend compte, quand on vit dans un milieu rural, que des petites choses qui sont hyper simples à mettre en place en ville, qui sont hyper fun, ça prend juste deux secondes de choisir tel produit au marché plutôt que celui-là. En fait, à la campagne, ça n'a rien à voir. C'est toute une vie qui change. Donc c'est super important pour moi d'être au contact de ces gens-là pour ne pas dire n'importe quoi et me rendre compte de ce qu'on prône. Mais sur le terrain, quel conseil en camp, ça a vraiment dans tout le territoire.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on en vient à un discours écolo qui peut être discrédité en deux secondes. Quand on est dans le rural, on entend le bobo parisien qui veut imposer son écologie. Peut-être pour ça que tu es pertinent en ce sens ?

  • Speaker #1

    Ce dont je m'en rends compte en vivant en milieu rural, c'est qu'il y a des choses qui sont impossibles, mais vraiment impossibles à imposer. Quand je vois par exemple la vidéo d'L214, je suis vraiment attristé par le sort qu'on réserve aux animaux pour produire du fromage. Mais quand on vit sur le terrain, on se rend bien compte que c'est impossible de changer la vie des gens. On a beau être révolté par le sort qu'on réserve aux animaux dans certains élevages, dans les abattoirs, on se rend bien compte que c'est toute la vie des gens qui travaillent, donc la vie de tout un territoire qui en dépend. et que les choses ont besoin d'être amenées de manière plus souple, plus subtile, et plus en compréhension avec les gens qui travaillent. Pour autant, je comprends complètement la démarche de l'A214. La sphère médiatique actuellement est tellement saturée de textes, d'images, de sons, que si on amène une revendication tout doucement, poliment, avec une petite voix fluette, personne ne va l'entendre. Donc parfois, il faut y aller comme un bourrin. Ça va faire peut-être de la peine à des gens, ça va en révolter d'autres, mais tant pis, le message est passé. Ce qui est sûr et certain, c'est que la consommation de viande ou de fromage ou de tous les produits animaux qui peuvent amener de la souffrance animale, quoi qu'il arrive, tous ces produits-là ne vont pas disparaître du jour au lendemain et ils ne vont même jamais disparaître. Mais ce qu'il faudrait essayer de faire, c'est exactement comme la consommation du vin en France, par exemple. Au début du 20e siècle, tout le monde buvait du vin, mais tout le temps. Même les enfants à la cantine, il y a eu du vin jusque dans les années 50, je crois, 50-60. Et donc le vin, qu'est-ce qui s'est passé avec le vin ? On a baissé énormément la consommation du vin, mais maintenant on boit du vin de qualité. Avant on buvait de la piquette tous les jours, maintenant on boit du très bon vin de temps en temps. Il faudrait que ce soit exactement la même chose avec les produits animaux. Il faudrait que ce soit de la viande excellente, des fromages excellents, mais peut-être pas tous les jours. Et dans cette optique-là, les élevages traditionnels n'ont pas de problème. aucun souci à se faire puisque c'est eux qu'on va aller chercher. C'est pas les élevages industriels avec 12 000 poulets dans un même hangar, c'est pas les cochons sur caillebottis. Ça, ça doit disparaître. Mais après les élevages traditionnels, c'est qu'ils doivent subsister et c'est vraiment ça que moi j'appelle de mes voeux. C'est pas une disparition de la filière qui n'arrivera pas de toute façon.

  • Speaker #0

    Comment tu l'as introduit cette nuance-là dans tes scénarios ?

  • Speaker #1

    Alors pour l'instant c'est vrai que je sais pas si je l'ai très bien fait comprendre. En tout cas j'essaye à chaque fois C'est par petits mots, par exemple, je pense à l'épisode sur la viande. J'ai essayé plusieurs fois dans l'épisode de bien faire comprendre qu'on s'attaquait à la viande industrielle. On fait bien comprendre, par exemple, que c'est une viande qui traverse trois fois l'Europe avant d'arriver dans notre assiette. Donc, évidemment, les éleveurs traditionnels comprennent bien que, et on ne parle pas d'eux, quand on parle d'élevage qui mange du soja OGM importé du Brésil, donc qui a causé de la déforestation. Les éleveurs qui ont leur bétail, qui mangent dehors et qui mangent du foin l'hiver, ça vient qu'on ne parle pas d'eux. Donc voilà, c'est par petits détails comme ça qu'à chaque fois, j'essaye de ne pas être dans la stigmatisation de toute une filière, de tous les travailleurs du secteur. Et souvent, je suis super content parce qu'on a des petits messages qui arrivent sur la page d'Amis des lobbies, de gens qui travaillent dans le milieu et qui me disent « Merci, j'ai vu votre truc, c'était super bien » . Ça serait vraiment un échec pour moi de me mettre à dos C'est même pas de mettre trado, c'est de faire de la peine aux gens qui sont pas concernés par le problème. Parce qu'un petit élevage à échelle humaine n'est pas concerné par le problème de la viande. Ce qui est catastrophique avec la consommation de viande, déjà c'est les gens qui mangent évidemment de la viande à tous les repas, mais c'est surtout des gens qui mangent de la viande de mauvaise qualité, qu'ils ont achetée dans une boîte au supermarché, et dans lequel, dans le steak haché, il y a 12 animaux, ou 60 animaux. et qui a été nourri au soja OGM, etc. C'est ça le problème. C'est pas le steak de l'Aubrac qui... qui s'est nourri correctement. Il faut réussir à être un minimum subtil quand même, mais il y a toujours une difficulté parce que nous aussi, on veut être percutant. Il faut un minimum. Il faut aussi rentrer dedans. Et aussi, on veut faire rire. Donc, quand on fait des blagues aussi, parfois, tout le monde peut se sentir concerné. Alors, on se moque surtout de l'industrie.

  • Speaker #0

    Peut-être pour terminer, Jérémy, quelle est la boussole de ta vie, l'engagement vraiment qui fait sens et qui fait que tu te lèves tous les matins ?

  • Speaker #1

    Ça va peut-être te paraître un petit peu bizarre parce que finalement, ça n'est pas complètement lié à mon engagement dans l'écologie. Parce qu'en fait, c'est vrai que dans l'écologie, je ne vois pas un point à atteindre parce qu'il y aura toujours à veiller, il y aura toujours à faire attention à ça. Il n'y aura pas un jour où on se dira ça y est, on a réussi. Donc, en revanche, moi, en ce moment, ce qui me trotte tout le temps en tête et ce qui me donne vraiment un objectif. C'est la même boussole que j'avais quand j'étais petit. Je l'ai oublié pendant pas mal d'années et là, ça revient très très fort. C'est l'envie de raconter des histoires, et de raconter des belles histoires, et de faire par exemple un long métrage, et d'être reconnu comme un conteur d'histoire. Ça, ça me ferait vraiment plaisir, et que ça soit mon métier. En ce moment, c'est vraiment la chose à laquelle je pense beaucoup et qui me fait rêver. Et je trouve qu'on peut faire passer beaucoup de choses dans la fiction. Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook, Finta.lepodcast, pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert, soyez curieux !

Share

Embed

You may also like

Description

Direction le Sud-Aveyron pour ce deuxième épisode de Finta. Je rencontre aujourd’hui Jérémy Bismuth. Il est le créateur de la websérie « L’Ami des lobbies », qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. 

En déconstruisant le discours de lobbies industriels, depuis son petit village de Compeyre, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. 

Alors, cinquante ans après la lutte des paysans du Larzac voisin, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d’écologie des villes et d’écologie des champs, et de L’Ami des lobbies évidemment.

💬 "En vivant en milieu rural, je comprends qu’il y a des choses impossibles à imposer. Les choses ont besoin d’être amenées de manière plus souple, plus subtile et plus en compréhension avec les gens qui travaillent ici."


+


Pour aller plus loin sur les sujets abordés dans l'épisode

-  Glyphosate : « Faire en sorte que les lobbies ne gagnent pas toujours à la fin » (lemonde.fr) 

-  « Monsanto papers » : la guerre du géant des pesticides contre la science (lemonde.fr) 


Et pour regarder les épisodes de L'Ami des Lobbies sur Youtube, c'est par ici :  Ami des lobbies - YouTube 


💸 Si vous voulez soutenir financièrement Finta! et participer à renforcer son indépendance éditoriale, une cagnotte participative est en ligne. Juste ici !


🧡 Si vous aimez Finta! partagez-le! Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par Lola Cros, journaliste indépendante. Il est mixé par le studio Qude. Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts. Plus d'infos sur www.fintapodcast.fr


🔅 On se retrouve dès maintenant sur Instagram!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bientôt. Je rencontre aujourd'hui Jérémy Bismuth, il est le créateur de la web-série L'Amie des Lobby, qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. En déconstruisant le discours de lobby industriel, depuis le petit village de Comper, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. Alors, 50 ans après la lutte du Larzac, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d'écologie des villes et d'écologie des champs. C'est parti ! Jérémy, tu nous accueilles aujourd'hui dans un village tout particulier. Pourquoi ? Est-ce que tu peux nous dire où on se trouve ?

  • Speaker #1

    Oui, on est à Comper, dans l'Aveyron. C'est le village natal de mon arrière-grand-père. C'est le village dans lequel mes grands-parents habitent maintenant et dans lequel je vis avec ma famille depuis trois ans. C'est vraiment ici que j'ai appris à aimer, à respecter, à découvrir la nature. Et c'est aussi ici, avec toutes les aventures qu'on vivait, que je me suis mis à écrire mes premières petites histoires. Et donc, c'est en fait ici que mes deux passions sont nées, pour la nature et pour l'écriture.

  • Speaker #0

    Trois ans à Compayre, et depuis un an et demi maintenant, tu as ajouté un bébé dans la famille, l'ami des lobbies. Donc c'est une web-série que tu as créée autour du discours des lobbies, comment décrypter Déconstruire le discours des lobbies, quelle est l'émotion peut-être qui te guide à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Le point de départ, vraiment le tout premier point de départ de la websérie, il n'est pas encore du tout lié au lobbying, il n'est pas du tout lié au discours des lobbies, c'est juste l'écologie et l'envie de faire une petite websérie autour. Et ensuite, effectivement, ça a mûri pendant quasiment dix ans. Et je pense que l'émotion finalement qui a fait beaucoup, c'est la colère en fait. Parce qu'il y a des sujets qui sont incroyablement importants, qui ont des conséquences incroyables sur notre santé, sur notre environnement, sur notre avenir, et dont on ne parle pas du tout, ou alors dont on parle mal. Et donc ça m'énervait énormément. Et ça m'énervait beaucoup aussi d'entendre les détracteurs. Et donc à l'époque, je ne le savais pas encore, parce que je ne m'intéressais pas de près. en fait le discours des lobbies industriels, je ne les identifiais pas comme tels avant, mais maintenant je sais que ça vient de là, qui essayaient de noyer le poisson, qui essayaient de faire croire à une certaine normalité, qui appelaient à ne pas changer, à continuer exactement notre manière de vivre, qui appelaient à poursuivre notre manière de consommer comme si de rien n'était. Donc ça m'énervait énormément et donc j'avais envie, l'envie de faire cette websérie est devenue de plus en plus pressante. Mais encore une fois, au début, à ce moment-là, je n'étais toujours pas dans l'idée de prendre le point de vue des lobbies. D'ailleurs, j'ai commencé à écrire le tout premier épisode sur la déforestation avec un tout autre axe. Le personnage principal était un écolo. Alors, pour rendre la chose un peu rigolote, c'était un écolo un peu nul, un peu incompétent. Et puis, à côté, il y avait la scientifique qui était là pour apporter des vrais chiffres, des vraies données. Et puis j'ai écrit le premier épisode comme ça et j'ai trouvé que c'était un petit peu nul. Et du coup, je me suis dit, non, il faut trouver quelque chose de plus percutant, de plus incisif. Et effectivement, l'idée de prendre le point de vue des lobbies a paru bien plus percutante. Et c'était presque... Déjà, d'un point de vue scénaristique, c'était super parce que ça permettait de créer plus de situations rigolotes, finalement. Et du point de vue de l'argumentation, ça permettait de beaucoup mieux déconstruire le discours des détracteurs de l'écologie, de ceux qui font l'éloge de l'industrie et d'une course effrénée à la croissance. Donc en fait, c'est vrai que la colère y est pour beaucoup dans le choix de tourner en ridicule le discours des lobbies industriels. Il y avait aussi l'envie d'expliquer de manière très très imagée et de la manière la plus limpide possible. Toutes ces choses que j'avais en tête par rapport à l'écologie, parce que c'est vrai que moi, quand j'entendais des discours, quand je voyais des vidéos sur l'écologie, souvent je me disais, aïe aïe aïe, on ne comprend pas assez bien, ou ce n'est pas comme ça qu'il faut le montrer. Moi, j'adore la pédagogie, j'ai été prof de cinéma pendant deux ans, j'adorais ça, je ne sais pas si mes élèves diraient la même chose.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un temps particulier dans l'amitié lobby qui fait qu'en comprenant le message et là où tu veux nous amener, mais c'est du second degré. Il faut quand même arriver à comprendre. Et d'ailleurs, je crois que dans les premières vidéos, certains internautes n'avaient pas compris ce temps-là et sont clairement tombés dans le panneau alors que tu voulais montrer, par l'absurde, la manipulation.

  • Speaker #1

    Oui, c'est vrai qu'en fait, dans la vie des lobbies, on essaie toujours de faire en sorte que sur les premières secondes de la vidéo, on puisse croire qu'on est vraiment pro-industrie et anti-écolo. Au moins sur les premières secondes, ne serait-ce que pour... déstabiliser le spectateur et puis aussi pour essayer de nous mettre dans la poche au moins sur cinq secondes quelqu'un qui est vraiment anti écolo parce qu'on trouve ça rigolo que la personne se dise ah enfin une vidéo qui me plaît et puis sur les secondes suivantes ah non en fait je me suis fait avoir juste pour cette petite blague là ça nous fait plaisir mais normalement quand on a un tout petit peu de recul et quelques neurones qui nous restent normalement on comprend qu'on est foncièrement écolo dans la vidéo Mais c'est vrai que parfois on a des petites surprises, heureusement ça arrive très très rarement, mais on a toujours une petite surprise de quelqu'un qui nous dit « bande de salauds, vous voulez la déforestation ? » C'est drôle parce que ça reste minoritaire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu sais définir un lobby ?

  • Speaker #1

    Oui, alors un lobby c'est un groupe de pression. C'est vrai que le mot de lobby, il prête à beaucoup déjà de fantasmes et à beaucoup de contresens. Je le vois dans les commentaires parfois ou dans les messages qu'on reçoit. Les gens confondent le mot lobby avec le mot business, pour eux c'est la même chose, ou alors encore pire avec le mot de complot. Pour eux, lobby ça veut forcément dire qu'il y a un complot derrière, alors que pas du tout. Un lobby c'est juste un groupe de pression, c'est-à-dire que ce sont des gens ou des entreprises qui se mettent ensemble pour avoir plus de poids et pour influencer la politique, pour influencer nos décideurs, nos parlementaires. Il y a un autre aspect du lobbying qui est l'influence de l'opinion publique. Mais le principal objectif, c'est d'influencer les gens qui prennent des décisions. Le lobbying, il existe à toutes les échelles. C'est-à-dire que moi, par exemple, je fais partie d'une association écolo à Millau. On a zéro euro de budget, on est tous bénévoles, mais on essaye aussi de nous adresser aux élus de la ville de Millau pour attirer leur attention sur tel problème écologique, etc. Donc on peut très bien dire qu'à notre échelle, on fait du lobbying. À côté de ça, vous avez des lobbies qui ont des millions d'euros, mais vraiment, ce n'est pas une expression, c'est des millions d'euros à dépenser chaque année juste en lobbying. pour influencer l'opinion publique et surtout pour influencer les politiques. Nous, on va juste s'adresser aux élus. Vous avez d'autres lobbies qui vont envoyer directement un texte de loi pré-rédigé ou un amendement pré-rédigé aux parlementaires pour qu'ils le signent, qu'ils le votent. Donc voilà, vraiment, l'influence n'a rien à voir.

  • Speaker #0

    Toi, dans tes vidéos, tu as déconstruit le lobby de la chasse, le lobby de la déforestation, le lobby des pesticides, de la mode. Quoi d'autre ?

  • Speaker #1

    On s'est attaqué à la viande. On a été chercher aussi derrière des énergies fossiles. qui essayent de faire croire que le climat ne se réchauffe pas à cause de l'homme. Les gros lobbys industriels, ce qu'ils vont défendre d'abord, c'est leur portefeuille. C'est-à-dire qu'ils vont surveiller qu'aucune loi ne passe qui puisse freiner leur activité, voire stopper leur activité. Donc ils sont extrêmement vigilants par rapport à ça. Et ils vont tout faire pour que l'opinion publique et les politiques pensent qu'il n'y a rien à changer, qu'on peut continuer comme avant. Après, il y a un... Il y a l'étape encore plus sournoise, c'est quand ils défendent quelque chose qu'ils savent pertinemment qui est nocive pour la santé et l'environnement. Là, on passe à un stade vraiment immoral, puisqu'en plus, on a des preuves. Par exemple, on sait qu'ExxonMobil, un géant des énergies fossiles, sait depuis les années 70-80 que la combustion d'énergie fossile va emmener un réchauffement climatique qui va dérégler foncièrement tout le système Terre. En fait, quand on se rend compte que des industries comme ça savent tout le mal en fait qu'ils provoquent, mais qu'ils essayent de le cacher, de convaincre tout le monde qu'il n'y a aucun problème. Là, on est dans quelque chose quand même de très grave et de criminel. Quelqu'un qui voit nos vidéos, qui n'avait absolument pas conscience du sujet. Effectivement, j'espère déjà que ça va le faire rire un petit peu, parce que quand quelqu'un rit sur un sujet, ça veut dire qu'il est un petit peu avec nous. J'espère que ça peut l'amener à changer un petit peu ses habitudes de consommation. Les gens qui sont déjà sensibles au sujet, j'espère que ça va leur faire une petite piqûre de rappel et les inviter à s'engager, parce que c'est vrai que quand on fait les choses chez soi, tout seul, c'est déjà très bien, mais il faut vraiment passer à l'étape d'après, qui est de faire ces mêmes actions, mais en collectivité, dans une association, une ONG, et puis porter ce même discours. devant sa municipalité, sa région, son pays. On ne peut qu'espérer que les gens aient envie de s'engager. Au fil des épisodes, je pense qu'on va reconnaître un petit peu, enfin j'espère qu'on va reconnaître un petit peu la manière de procéder des lobbies, qui est un petit peu toujours la même.

  • Speaker #0

    Si un jour la majorité des Français vient à comprendre ce discours, cette rhétorique du lobby, est-ce que les lobbies sont amenés à muter, à évoluer ? On a du mal à croire qu'ils puissent disparaître un jour ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense que même si les gens commencent à comprendre facilement les méthodes des lobbies, je pense que ce n'est pas pour autant qu'on saura reconnaître une action de lobbying, parce que ça peut être... Tellement subtil, tellement détourné que même moi qui ai la tête dans le guidon tout le temps, je passe à côté de plein de choses certainement. Je pense qu'il faut vraiment être un spécialiste pour vraiment avoir l'œil dessus et reconnaître tout. On peut espérer que les lobbies disparaissent des cercles du pouvoir, que les lobbies soient considérées comme indésirables dans les parlements par exemple. Ce n'est pas quelque chose d'incroyable à mettre en place. C'est un peu difficile, mais ce n'est pas impossible. Il y a des députés qui travaillent là-dessus. Il y en a d'autres, au contraire, qui n'en pensent que c'est tout à fait nécessaire d'avoir des lobbies qui prennent rendez-vous avec des parlementaires. Je pense que c'est quelque chose de possible et de souhaitable que les lobbies ne soient plus autorisées à tourner autour des parlements français et européens. En revanche, une disparition totale, c'est impossible, puisqu'ils trouveront toujours une manière de... de s'exprimer d'une manière ou d'une autre. On a affaire vraiment aux maîtres de la communication. Ce sont les meilleurs en communication, puisqu'ils ont des budgets quasiment illimités. Quand on voit que le lobby des énergies fossiles consacre 250 millions d'euros par an, ils peuvent évidemment faire appel aux meilleures agences de communication du monde entier. Donc, ils ont la communication la plus subtile, la plus agressive aussi. la plus omniprésente qu'on puisse imaginer. Ils sont sur tous les réseaux, ils peuvent répondre du tac au tac, dès que quelque chose va à la rencontre, ils peuvent répondre faisant croire à l'opinion publique qu'il y a vraiment des gens qui défendent l'industrie et qui se tiennent vent debout contre tous les gens qui essaieraient de la contrer. Donc voilà, ils auront toujours une longueur d'avance sur tout le monde en matière de communication et seront toujours les premiers à évoluer et à s'adapter. aux nouveaux médias, aux nouveaux réseaux.

  • Speaker #0

    Le mot lobby a été catégorisé comme négatif. Oui. Ce mot-là. Mais il peut y avoir du bon lobby ou pas ?

  • Speaker #1

    En fait, je pense qu'il y a deux types de lobby foncièrement différents. Il y a les lobbies qui défendent une cause et les lobbies qui défendent un portefeuille. Et c'est sans doute un jugement de la valeur parce que la cause peut être complètement bidon. Je pense à nos amis, associations d'automobilistes qui veulent rouler à 200 sur les autoroutes. ou qui râlent dès qu'on baisse la vitesse limite, ils défendent une cause aussi. Après, nous aussi, au Écolo, on défend une cause. Et l'énorme différence avec les lobbies industriels, c'est que nous, quand on réussit à faire pression sur un gouvernement ou sur l'opinion publique, qu'est-ce qu'on y gagne ? Rien du tout. C'est-à-dire qu'on est content parce qu'il y aura peut-être moins de pesticides dans les champs, il y aura peut-être moins d'arbres qui vont être coupés, etc. Mais on ne va rien y gagner. Alors qu'un lobby industriel, quand il réussit son lobbying, C'est des milliards qui sauvent ou qui vont gagner peut-être. Et ça, ça m'énerve assez qu'on ne voit pas la différence. Et souvent les lobbies industriels jouent là-dessus. Ils savent très pertinemment que l'opinion publique ne connaît pas la différence. Et ils vont nous renvoyer dos à dos. C'est-à-dire que quand on dit « mais attendez, mais là, c'est complètement intéressé ce que vous faites, vous faites un énorme lobbying et tout » , ils nous disent « et vous les lobbies écolos alors, qu'est-ce que vous faites ? » « Oui, mais nous, on est bénévoles, on n'a rien à gagner » . Ça serait bien que les gens voient cette différence. Et au-delà de ça, parce qu'après, il y a des gros lobbies écolos. Par exemple, je pense à des ONG comme WWF qui sont importants. Ils ont un budget. Mais quand on regarde de plus près le budget, même de la plus grosse ONG comme le WWF est ridicule par rapport aux lobbies industrielles qu'ils ont en face. On est sur des lobbies dix fois plus élevées, au moins dix fois plus élevées pour l'industrie. Donc quand il y a même un lobby écolo ou ce que vous voulez, serait important, aurait de l'influence. Il faut toujours avoir en tête qu'en face, on a des gens qui ont un budget illimité.

  • Speaker #0

    J'ai appris récemment qu'il y avait des écoles,

  • Speaker #1

    des lobbies.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on apprend dans ces écoles ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne me suis pas penché exactement sur le programme qu'il y avait dans les écoles, mais effectivement, c'est super intéressant de voir ça. J'ai vu l'affiche sur l'étudiant.fr. Effectivement, on montre comment devenir lobbyiste. Il y a une belle photo d'un lobbyiste. En fait, c'est vrai que c'est intéressant de voir que ça devient... N'importe quel multinational se doit d'avoir un service de relations publiques. C'est le joli mot pour dire lobbying. Parce que ça devient aussi indispensable que d'avoir un service communication, un service comptabilité. C'est indispensable de surveiller la législation pour voir si son business ne va pas se faire torpiller par une nouvelle loi. De ce que j'ai pu voir, mais de loin, on apprend évidemment à communiquer. à rentrer en contact avec des politiques, à savoir approcher des politiques, à savoir influencer tout simplement, parce que le lobby, le mot principal, c'est de l'influence. Donc effectivement, ça s'apprend.

  • Speaker #0

    Et si on revient à toi ? C'est-à-dire que là, tu es perché à Pompei, dans un petit village au fin fond du Sud-Aveyron, et tu t'attaques au sujet les plus clivants aujourd'hui dans la société française. On est sur la chasse, sur les pesticides, on voit qu'il y a des oppositions, et les arguments d'un côté et de l'autre peuvent parfois s'entendre. On n'est pas sur du noir ou du blanc. Comment tu assumes, toi, de... d'aller te frotter à ces sujets-là, qui, dans tous les cas, vont faire réagir, qui peuvent amener à des réactions hyper violentes, sûrement en ligne, mais c'est toujours assez déstabilisant quand même, j'imagine, d'avoir des retours un peu énervés. Comment tu l'assumes, ça ? Et est-ce que ça a été un frein ? Est-ce que tu t'es posé la question de dire « Est-ce que j'y vais tout seul ? J'y vais quand même, même si j'ai une petite influence, c'est mieux que rien ? »

  • Speaker #1

    Alors déjà quand on a commencé la websérie, on a tourné trois épisodes d'un coup. On a tourné la déforestation, les pesticides, la chasse. Donc en les tournant, on était absolument sûr que personne ne les verrait. Parce qu'on débutait avec Adi et Laura, on est très très nuls en réseaux sociaux et en internet. Donc on était sûr qu'on mettrait des mois voire des années à avoir une minuscule audience. Donc on ne s'attendait pas du tout à ce que le premier épisode soit vu un million de fois sur Facebook. Donc en fait, les épisodes suivants, qui pour le coup étaient clivants, mais nous on n'en avait pas conscience, les pesticides et la chasse, on fait autant, voire plus de vues, et on n'imaginait pas du tout ça. Donc on ne pensait pas du tout, pour le coup, avoir la moindre influence et la moindre audience. Donc ça n'a pas du tout été quelque chose de réfléchi, on ne s'est pas dit, voilà, ça va être dur et tout. Non, non, on s'est dit, bon, on fait nos petites vidéos tout seul dans notre coin. On parle de choses qui nous font plaisir, de choses qui nous tiennent à cœur, de choses qui nous énervent, il faut qu'on en parle, mais on ne s'est pas dit que ça allait être un petit événement sur Internet, rien du tout. Quand j'écris les épisodes, je ne les écris pas du tout pour faire polémique ou en me disant « ce sujet est vachement bien, ça risque de faire réagir » . Non, pour l'instant, pour les dix épisodes, c'était la même chose, c'était uniquement des thèmes qui nous tenaient à cœur. Et donc je voulais parler tout de suite, on avait vraiment envie d'en parler, donc je me suis mis à l'écriture sur ces sujets-là. On a zéro stratégie pour l'instant, on ne s'est jamais dit, là il faudrait le sortir maintenant, ça serait bien. Non, c'est vraiment ce qui nous fait plaisir au moment où ça nous fait plaisir. Et donc voilà, c'était ça pour les pesticides de la chasse, que je voulais mettre en lumière, par exemple pour les pesticides, je pense à une petite chose qui me paraît folle, qui n'est pas centrale dans le problème des pesticides. Le fait qu'un des plus gros fabricants de pesticides d'aujourd'hui soit le même qui ait créé le gaz moutarde et le Ziclombé, ça me paraît fou qu'on ne le sache pas. Au moins, il faut le dire. Après, effectivement, il y a des gens à qui ça ne va pas plaire. Mais il faut juste le dire, c'est important quand même. Et pareil, sur la chasse, les arguments de la fédération de chasse sont totalement absurdes. Après, moi, je ne suis pas dans mon village, il y a une association de chasseurs. Je dis bonjour à des chasseurs tous les jours, on s'entend très bien. Il y en a qui ne sont pas très contents de l'épisode sur la chasse, mais il y en a d'autres à qui ça a fait vraiment marrer. Donc je n'ai pas de problème avec les chasseurs, mais la fédération de chasse, si, j'ai un problème avec elle. Parce qu'elle dit n'importe quoi, ses arguments sont complètement absurdes et elle véhicule de fausses idées. Donc ça, ça m'énerve. Je voulais vraiment ridiculiser les arguments qui défendent l'activité chasse. de manière inconditionnelle. Pour l'épisode de la déforestation, étant donné que la déforestation, c'est plutôt... Ça fait consensus, il n'y avait pas eu de soucis. Du coup, on était très contents, ça s'est bien passé. Et puis, quand on a sorti l'épisode sur l'épicile, vraiment, on a été assez choqués de certains commentaires. On ne s'attendait pas du tout à ce que les réactions s'y vivent. Ce qui me rassure quand même, c'est, tu sais, sur YouTube, tu as les pouces vers le haut, pouces vers le bas. Et puis, sur Facebook, tu as les réactions, rires, pouces, etc. Et en fait, sur YouTube, on peut, dans notre interface de YouTubeur, on peut voir les statistiques. Et en fait, sur l'ensemble de nos vidéos, on a 98% de gens qui aiment la vidéo, qui aiment les vidéos. Donc moi, c'est ça qui me rassure, parce que malheureusement, les commentaires, c'est très trompeur, parce que ce sont les gens qui détestent la vidéo qui vont finalement laisser les plus gros commentaires. Ces commentaires-là vont être likés, dislikés par les gens. On va y répondre et du coup, ils vont remonter. Et on va voir que ça. Donc en fait, c'est trompeur parce qu'on peut se dire mais en fait, les gens ont détesté la vidéo, mais pas du tout. 98% des gens l'ont aimée. Donc ça, ça me rassure. Si jamais il y avait 50% seulement de gens qui avaient aimé la vidéo, waouh, là je serais mal. Et je me dirais non, là on s'est vraiment raté. Il se passe quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des lobbies justement qui sont venus répondre à tes vidéos qui ont occupé l'espace commentaire pour se faire entendre ?

  • Speaker #1

    Sur les pesticides, c'est sûr et certain. Sur les pesticides, ça a été vraiment... On a eu les commentaires les plus sournois et les plus vraiment mal tournés qu'on ait pu avoir sur tout. Même sur la chasse, on a eu des commentaires très vifs, très agressifs, même des menaces de mort venant de chasseurs. Mais ça ne nous dérangeait pas tellement parce qu'on trouvait ça normal que des chasseurs soient énervés. On trouvait ça normal qu'ils attaquent de manière frontale l'épisode. En revanche, sur les pesticides, c'était très sournois. Et j'ai commencé à reconnaître vraiment les structures de l'argumentaire lobbyiste dans ces commentaires-là, et aussi dans les messages privés qu'on a reçus. Et c'était un petit peu tout le temps les mêmes. Et si tu lis l'article dans Le Monde sur la stratégie de communication de Monsanto, en fait, du coup, on comprend tout. C'est vraiment appliqué à l'être. On se rend compte qu'il y a des gens qui bossent pour des agences de communication, qui répondent du tac au tac, qui scrutent Internet et les réseaux. Dès qu'il y a un article qui sort qui attaque les pesticides ou l'agrochimie, ils répondent tout de suite à un argumentaire qui est tout le temps le même. Décrédibilisation, et ensuite des arguments pro-industrie, etc. Donc pour les pesticides, c'est clair et net. Et on a eu des choses vraiment très étranges, notamment pour les pesticides. Alors là, pour le coup, ils ne l'ont pas envoyé sur la page d'Amidé Lobby, mais ils l'ont envoyé directement à Adi, le comédien. On l'a invité à rejoindre quelqu'un dans un parking le soir pour parler pesticides quand même. Donc c'était vraiment, vraiment chelou quand même.

  • Speaker #0

    Tu sens que tu touches vraiment les points de tension. Vraiment, c'est nerveux, c'est épidermique, tu as ces réactions-là. Parce qu'aussi peut-être, sur le sujet des pesticides, de la chasse, les personnes qui chassent ou qui, sur une exploitation, ont eu à utiliser des pesticides, se sentent attaquées directement. Alors que ce que tu dis est intéressant, c'est plutôt à la rhétorique. à la manipulation et des chasseurs ont été manipulés même par la fédération de chasse et des agriculteurs ont été manipulés par les lobbys pesticides agrochimiques donc avec toi tu es plutôt sûr ça sur et les consciences y compris des gens qui sont tombés dans le panneau sans forcément se rendre compte c'est ça ton idée

  • Speaker #1

    Peut-être oui alors après je Je me fais pas trop quand même d'illusions je pense que les chasseurs quoi qu'il arrive la vidéo va pas Pas trop leur plaire, c'est normal. Quoique, il y a quand même plein de chasseurs qui m'ont dit qu'ils s'étaient bien marrés en voyant la vidéo, donc ça me fait plaisir. Je me dis que quand même des gens ont compris que je ne stigmatisais pas tous les chasseurs, mais uniquement les excités de la gâchette, et surtout l'argumentaire de la Fédération de Chasse. Pour les pesticides, c'est encore... C'est vraiment délicat, parce que le recours aux pesticides, il a quasiment été imposé par toute la société. Donc je ne vois pas comment on aurait pu échapper à ça, à part vraiment ... à part vraiment des agriculteurs militants déjà dans les années 60-70 qui ont pu éventuellement refuser l'usage des pesticides, mais sinon, si on faisait son boulot normalement comme tout le monde, il n'y avait aucune raison de ne pas passer aux pesticides puisque toute la société disait que c'était excellent. Je ne veux pas du tout dire que ces gens-là se sont fait avoir parce que qui ne serait pas passé aux pesticides ? Des tas de gens qui ont des exploitations agricoles ou des élevages dans le coin et ils nous racontent comment dans les années 70, leur propre parents étaient... On a une amie qui nous a raconté comment sa mère était en pleurs quand elle s'est vue un petit peu forcer la main par des... À l'époque, ils appelaient ça des techniciens de chez Monsanto, de chez autre chose, en leur disant, mais vous êtes obligés de passer, de répandre ça maintenant sur vos cultures. C'est obligé, tout le monde fait ça, vous allez passer pour une abrutie si vous le faites pas. C'est vraiment ces gens-là qu'on a envie de mettre en lumière et de pointer du doigt.

  • Speaker #0

    Par rapport à... Merci. En Sud-Aveyron particulièrement, on est quand même sur un territoire qui est engagé. Il y a eu le Larzac, il y a un José Bové qui se tient toujours dans le coin, un McDo, un Burger King. Tu as quand même une population qui… qui est souvent �� battre le pavé. Il y a une histoire de la mobilisation, en Sud-Aveyron particulièrement. Quelle place il y a pour un activisme 2.0 comme tu le mènes finalement dans un département comme celui-là ? Est-ce que tu es en lien avec les activistes historiques ? Je pense au Larzac, naturellement.

  • Speaker #1

    Oui, je suis en lien avec eux, avec certains d'entre eux, parce que je suis dans une association qui s'appelle la Fédération des Grands Causses. qui est tenu par des anciens du Larzac, qui sont proches de José Bové. Et donc en fait, c'est vrai que les mobilisations qu'on fait sur le terrain ont encore tout leur sens, ont une grande importance. Je pense qu'il faut, pour les mobilisations de terrain, je pense qu'il faut... En revanche, un petit peu les faire évoluer pour ne pas qu'une manifestation, ça soit juste l'expression d'un ras-le-bol. Il faut vraiment que ça soit beaucoup plus ciblé. Alors moi, j'ai presque envie de dire, il faut presque que ça soit mis en scène, pour que ça soit percutant, original, que ça saute aux yeux. Et moi, c'est vrai que j'essaye d'apporter effectivement à ces mobilisations-là une audience sur Internet. parce que je pense maintenant qu'on ne peut absolument pas Pas se passer d'Internet quand on veut faire savoir quelque chose, mettre en lumière un problème, des enjeux, parce qu'on s'adresse tout de suite, enfin, si on s'en sort bien au niveau du travail, au niveau de la communication, on peut toucher des millions de gens. Donc tout prend de l'ampleur, tout peut en tout cas prendre de l'ampleur assez vite.

  • Speaker #0

    Quelle relation tu as avec cet enclavement rural qu'on connaît aux quatre coins de l'Aveyron pour le coup ? Est-ce que le numérique... peut être une voie de salut pour le rural ?

  • Speaker #1

    Pour moi, la notion d'enclavement n'est pas du tout liée à la ruralité. Parce que c'est vrai qu'avec ma famille, c'était vraiment en ville qu'on se sentait vraiment à l'étroit, qu'on s'entait, qu'on étouffait. Et depuis qu'on est là, on a vraiment une impression de liberté, de bouffée d'oxygène. Donc pour moi, je ne me sens pas du tout coincé dans un petit village. Moi, comme je te le disais, j'ai toujours fait des petits courts-métrages, des petites choses. J'avais très peu d'audience dans ce que je faisais quand j'étais sur Paris. Et maintenant que je suis dans l'Aveyron, je fais une petite web série et ça touche des millions de gens. Donc pour moi, il n'y a vraiment plus de lien direct entre la localisation, l'espace et la portée du travail qu'on fait. Ça fait des campagnes, un lieu d'avenir. Parce qu'en ville, c'est vrai que moi, ce qui me stressait un petit peu en ville, c'est qu'on a l'impression... On a l'impression parfois d'être hors sol, on a l'impression parfois d'être un petit peu des cochons sur Caillebauty, c'est-à-dire qu'on est complètement dépendant de tout. Si le magasin ferme, si les camions n'arrivent plus pour livrer la nourriture, qu'est-ce qu'on fait ? L'eau, qu'est-ce qu'on fait si elle est mauvaise au robinet, qu'est-ce qu'on fait ? Alors que vraiment, à la campagne, on peut être autonome, et l'autonomie, comme disait Pierre Rabhi, c'est quelque chose d'éminemment politique, vu les transformations qui nous attendent au niveau énergétique et au niveau... Au niveau de la consommation, je pense que c'est extrêmement important d'avoir un minimum d'autonomie alimentaire pour la suite.

  • Speaker #0

    Sur le territoire, tu parlais tout à l'heure des agriculteurs qui t'entourent, des chasseurs dans le village. Est-ce que le fait d'avoir les deux pieds vraiment ancrés dans la terre et sur un territoire qui connaît l'écologie, du moins la pratique n'a pas d'autre choix que de vivre avec sa nature dans tous les cas, est-ce que ça t'a apporté un regard particulier ? Est-ce que ça a nourri ? la construction de tes épisodes, peut-être que si tu étais resté à Paris, tu n'aurais pas eu ce lien au sol que le sud-Aveyron peut t'apporter.

  • Speaker #1

    Exactement, complètement. Le fait d'être dans l'Aveyron, le fait de parler tous les jours avec des gens qui bossent dans la nature, qui dépendent 100% du climat, de la terre, de la biodiversité, pour leur travail, ça a fait que... que les épisodes sont vraiment différents. Mais je pense notamment à l'épisode sur le loup qu'on a fait. Au départ, j'étais 100% parti pour faire un épisode écolo à Donf pour le loup, laisser le loup tranquille, on veut des loups partout. J'étais vraiment parti pour faire ça. Et puis, j'ai discuté avec 12 millions de gens et je me suis rendu compte que c'était plus compliqué que ça. Alors, on n'est pas hyper touché par le loup dans la région. mais il y a quand même des éleveurs qui le sont un petit peu, qui sont un tout petit peu plus loin, du côté de la lozère et qui sont extrêmement sensibles à ça. Et quand tu vois que tu parles du loup cinq minutes avec eux et qu'ils ont collé de larmes aux yeux, qu'ils arrivent tout de suite, tu fais « waouh, je vais me calmer tout de suite avec mes revendications parce que là il y a quelque chose qui m'échappe » . Notamment moi, par exemple, je suis végétarien mais assez souple, ça veut dire que je ne veux pas interdire aux gens de manger de la viande, je veux juste qu'ils baissent leur consommation parce que C'est du bon sens pour la santé, pour l'environnement, il faut baisser sa consommation, mais je ne suis pas de là à vouloir l'interdire. Et quand je parle avec des amis qui sont végétariens à donf ou qui sont véganes, parce que je suis super proche des mouvements véganes, je les comprends complètement et je les soutiens, mais je ne peux pas du tout en parler dans la région, ça n'aurait aucun sens. Je suis dans une région où tout le monde vit grâce à l'élevage. Donc en fait, ça ne serait pas seulement changer les habitudes alimentaires des gens, ça serait changer leur vie de A à Z. la vie qu'ils ont héritée de leurs ancêtres, donc ça n'a aucun sens. Donc c'est vrai que là, on se rend compte, quand on vit dans un milieu rural, que des petites choses qui sont hyper simples à mettre en place en ville, qui sont hyper fun, ça prend juste deux secondes de choisir tel produit au marché plutôt que celui-là. En fait, à la campagne, ça n'a rien à voir. C'est toute une vie qui change. Donc c'est super important pour moi d'être au contact de ces gens-là pour ne pas dire n'importe quoi et me rendre compte de ce qu'on prône. Mais sur le terrain, quel conseil en camp, ça a vraiment dans tout le territoire.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on en vient à un discours écolo qui peut être discrédité en deux secondes. Quand on est dans le rural, on entend le bobo parisien qui veut imposer son écologie. Peut-être pour ça que tu es pertinent en ce sens ?

  • Speaker #1

    Ce dont je m'en rends compte en vivant en milieu rural, c'est qu'il y a des choses qui sont impossibles, mais vraiment impossibles à imposer. Quand je vois par exemple la vidéo d'L214, je suis vraiment attristé par le sort qu'on réserve aux animaux pour produire du fromage. Mais quand on vit sur le terrain, on se rend bien compte que c'est impossible de changer la vie des gens. On a beau être révolté par le sort qu'on réserve aux animaux dans certains élevages, dans les abattoirs, on se rend bien compte que c'est toute la vie des gens qui travaillent, donc la vie de tout un territoire qui en dépend. et que les choses ont besoin d'être amenées de manière plus souple, plus subtile, et plus en compréhension avec les gens qui travaillent. Pour autant, je comprends complètement la démarche de l'A214. La sphère médiatique actuellement est tellement saturée de textes, d'images, de sons, que si on amène une revendication tout doucement, poliment, avec une petite voix fluette, personne ne va l'entendre. Donc parfois, il faut y aller comme un bourrin. Ça va faire peut-être de la peine à des gens, ça va en révolter d'autres, mais tant pis, le message est passé. Ce qui est sûr et certain, c'est que la consommation de viande ou de fromage ou de tous les produits animaux qui peuvent amener de la souffrance animale, quoi qu'il arrive, tous ces produits-là ne vont pas disparaître du jour au lendemain et ils ne vont même jamais disparaître. Mais ce qu'il faudrait essayer de faire, c'est exactement comme la consommation du vin en France, par exemple. Au début du 20e siècle, tout le monde buvait du vin, mais tout le temps. Même les enfants à la cantine, il y a eu du vin jusque dans les années 50, je crois, 50-60. Et donc le vin, qu'est-ce qui s'est passé avec le vin ? On a baissé énormément la consommation du vin, mais maintenant on boit du vin de qualité. Avant on buvait de la piquette tous les jours, maintenant on boit du très bon vin de temps en temps. Il faudrait que ce soit exactement la même chose avec les produits animaux. Il faudrait que ce soit de la viande excellente, des fromages excellents, mais peut-être pas tous les jours. Et dans cette optique-là, les élevages traditionnels n'ont pas de problème. aucun souci à se faire puisque c'est eux qu'on va aller chercher. C'est pas les élevages industriels avec 12 000 poulets dans un même hangar, c'est pas les cochons sur caillebottis. Ça, ça doit disparaître. Mais après les élevages traditionnels, c'est qu'ils doivent subsister et c'est vraiment ça que moi j'appelle de mes voeux. C'est pas une disparition de la filière qui n'arrivera pas de toute façon.

  • Speaker #0

    Comment tu l'as introduit cette nuance-là dans tes scénarios ?

  • Speaker #1

    Alors pour l'instant c'est vrai que je sais pas si je l'ai très bien fait comprendre. En tout cas j'essaye à chaque fois C'est par petits mots, par exemple, je pense à l'épisode sur la viande. J'ai essayé plusieurs fois dans l'épisode de bien faire comprendre qu'on s'attaquait à la viande industrielle. On fait bien comprendre, par exemple, que c'est une viande qui traverse trois fois l'Europe avant d'arriver dans notre assiette. Donc, évidemment, les éleveurs traditionnels comprennent bien que, et on ne parle pas d'eux, quand on parle d'élevage qui mange du soja OGM importé du Brésil, donc qui a causé de la déforestation. Les éleveurs qui ont leur bétail, qui mangent dehors et qui mangent du foin l'hiver, ça vient qu'on ne parle pas d'eux. Donc voilà, c'est par petits détails comme ça qu'à chaque fois, j'essaye de ne pas être dans la stigmatisation de toute une filière, de tous les travailleurs du secteur. Et souvent, je suis super content parce qu'on a des petits messages qui arrivent sur la page d'Amis des lobbies, de gens qui travaillent dans le milieu et qui me disent « Merci, j'ai vu votre truc, c'était super bien » . Ça serait vraiment un échec pour moi de me mettre à dos C'est même pas de mettre trado, c'est de faire de la peine aux gens qui sont pas concernés par le problème. Parce qu'un petit élevage à échelle humaine n'est pas concerné par le problème de la viande. Ce qui est catastrophique avec la consommation de viande, déjà c'est les gens qui mangent évidemment de la viande à tous les repas, mais c'est surtout des gens qui mangent de la viande de mauvaise qualité, qu'ils ont achetée dans une boîte au supermarché, et dans lequel, dans le steak haché, il y a 12 animaux, ou 60 animaux. et qui a été nourri au soja OGM, etc. C'est ça le problème. C'est pas le steak de l'Aubrac qui... qui s'est nourri correctement. Il faut réussir à être un minimum subtil quand même, mais il y a toujours une difficulté parce que nous aussi, on veut être percutant. Il faut un minimum. Il faut aussi rentrer dedans. Et aussi, on veut faire rire. Donc, quand on fait des blagues aussi, parfois, tout le monde peut se sentir concerné. Alors, on se moque surtout de l'industrie.

  • Speaker #0

    Peut-être pour terminer, Jérémy, quelle est la boussole de ta vie, l'engagement vraiment qui fait sens et qui fait que tu te lèves tous les matins ?

  • Speaker #1

    Ça va peut-être te paraître un petit peu bizarre parce que finalement, ça n'est pas complètement lié à mon engagement dans l'écologie. Parce qu'en fait, c'est vrai que dans l'écologie, je ne vois pas un point à atteindre parce qu'il y aura toujours à veiller, il y aura toujours à faire attention à ça. Il n'y aura pas un jour où on se dira ça y est, on a réussi. Donc, en revanche, moi, en ce moment, ce qui me trotte tout le temps en tête et ce qui me donne vraiment un objectif. C'est la même boussole que j'avais quand j'étais petit. Je l'ai oublié pendant pas mal d'années et là, ça revient très très fort. C'est l'envie de raconter des histoires, et de raconter des belles histoires, et de faire par exemple un long métrage, et d'être reconnu comme un conteur d'histoire. Ça, ça me ferait vraiment plaisir, et que ça soit mon métier. En ce moment, c'est vraiment la chose à laquelle je pense beaucoup et qui me fait rêver. Et je trouve qu'on peut faire passer beaucoup de choses dans la fiction. Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook, Finta.lepodcast, pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert, soyez curieux !

Description

Direction le Sud-Aveyron pour ce deuxième épisode de Finta. Je rencontre aujourd’hui Jérémy Bismuth. Il est le créateur de la websérie « L’Ami des lobbies », qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. 

En déconstruisant le discours de lobbies industriels, depuis son petit village de Compeyre, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. 

Alors, cinquante ans après la lutte des paysans du Larzac voisin, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d’écologie des villes et d’écologie des champs, et de L’Ami des lobbies évidemment.

💬 "En vivant en milieu rural, je comprends qu’il y a des choses impossibles à imposer. Les choses ont besoin d’être amenées de manière plus souple, plus subtile et plus en compréhension avec les gens qui travaillent ici."


+


Pour aller plus loin sur les sujets abordés dans l'épisode

-  Glyphosate : « Faire en sorte que les lobbies ne gagnent pas toujours à la fin » (lemonde.fr) 

-  « Monsanto papers » : la guerre du géant des pesticides contre la science (lemonde.fr) 


Et pour regarder les épisodes de L'Ami des Lobbies sur Youtube, c'est par ici :  Ami des lobbies - YouTube 


💸 Si vous voulez soutenir financièrement Finta! et participer à renforcer son indépendance éditoriale, une cagnotte participative est en ligne. Juste ici !


🧡 Si vous aimez Finta! partagez-le! Finta est un podcast écrit, réalisé et produit par Lola Cros, journaliste indépendante. Il est mixé par le studio Qude. Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts. Plus d'infos sur www.fintapodcast.fr


🔅 On se retrouve dès maintenant sur Instagram!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Finta, c'est le podcast qui nourrit des esprits, des envies d'agir et des espoirs très concrets à l'échelle locale. Finta part de l'Aveyron pour explorer les voies de la ruralité, à la rencontre de celles et ceux qui incarnent la diversité et l'incroyable vivacité de territoires que l'on croyait oubliés. Je m'appelle Lola Cross, je suis journaliste et je vous emmène bientôt. Je rencontre aujourd'hui Jérémy Bismuth, il est le créateur de la web-série L'Amie des Lobby, qui compte 100 000 abonnés sur Youtube et déjà des millions de vues sur ses vidéos. En déconstruisant le discours de lobby industriel, depuis le petit village de Comper, Jérémy Bismuth contribue à rendre chacun de nous acteur de notre information et de nos choix citoyens. Alors, 50 ans après la lutte du Larzac, avec lui, on va parler de militantisme numérique, d'écologie des villes et d'écologie des champs. C'est parti ! Jérémy, tu nous accueilles aujourd'hui dans un village tout particulier. Pourquoi ? Est-ce que tu peux nous dire où on se trouve ?

  • Speaker #1

    Oui, on est à Comper, dans l'Aveyron. C'est le village natal de mon arrière-grand-père. C'est le village dans lequel mes grands-parents habitent maintenant et dans lequel je vis avec ma famille depuis trois ans. C'est vraiment ici que j'ai appris à aimer, à respecter, à découvrir la nature. Et c'est aussi ici, avec toutes les aventures qu'on vivait, que je me suis mis à écrire mes premières petites histoires. Et donc, c'est en fait ici que mes deux passions sont nées, pour la nature et pour l'écriture.

  • Speaker #0

    Trois ans à Compayre, et depuis un an et demi maintenant, tu as ajouté un bébé dans la famille, l'ami des lobbies. Donc c'est une web-série que tu as créée autour du discours des lobbies, comment décrypter Déconstruire le discours des lobbies, quelle est l'émotion peut-être qui te guide à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Le point de départ, vraiment le tout premier point de départ de la websérie, il n'est pas encore du tout lié au lobbying, il n'est pas du tout lié au discours des lobbies, c'est juste l'écologie et l'envie de faire une petite websérie autour. Et ensuite, effectivement, ça a mûri pendant quasiment dix ans. Et je pense que l'émotion finalement qui a fait beaucoup, c'est la colère en fait. Parce qu'il y a des sujets qui sont incroyablement importants, qui ont des conséquences incroyables sur notre santé, sur notre environnement, sur notre avenir, et dont on ne parle pas du tout, ou alors dont on parle mal. Et donc ça m'énervait énormément. Et ça m'énervait beaucoup aussi d'entendre les détracteurs. Et donc à l'époque, je ne le savais pas encore, parce que je ne m'intéressais pas de près. en fait le discours des lobbies industriels, je ne les identifiais pas comme tels avant, mais maintenant je sais que ça vient de là, qui essayaient de noyer le poisson, qui essayaient de faire croire à une certaine normalité, qui appelaient à ne pas changer, à continuer exactement notre manière de vivre, qui appelaient à poursuivre notre manière de consommer comme si de rien n'était. Donc ça m'énervait énormément et donc j'avais envie, l'envie de faire cette websérie est devenue de plus en plus pressante. Mais encore une fois, au début, à ce moment-là, je n'étais toujours pas dans l'idée de prendre le point de vue des lobbies. D'ailleurs, j'ai commencé à écrire le tout premier épisode sur la déforestation avec un tout autre axe. Le personnage principal était un écolo. Alors, pour rendre la chose un peu rigolote, c'était un écolo un peu nul, un peu incompétent. Et puis, à côté, il y avait la scientifique qui était là pour apporter des vrais chiffres, des vraies données. Et puis j'ai écrit le premier épisode comme ça et j'ai trouvé que c'était un petit peu nul. Et du coup, je me suis dit, non, il faut trouver quelque chose de plus percutant, de plus incisif. Et effectivement, l'idée de prendre le point de vue des lobbies a paru bien plus percutante. Et c'était presque... Déjà, d'un point de vue scénaristique, c'était super parce que ça permettait de créer plus de situations rigolotes, finalement. Et du point de vue de l'argumentation, ça permettait de beaucoup mieux déconstruire le discours des détracteurs de l'écologie, de ceux qui font l'éloge de l'industrie et d'une course effrénée à la croissance. Donc en fait, c'est vrai que la colère y est pour beaucoup dans le choix de tourner en ridicule le discours des lobbies industriels. Il y avait aussi l'envie d'expliquer de manière très très imagée et de la manière la plus limpide possible. Toutes ces choses que j'avais en tête par rapport à l'écologie, parce que c'est vrai que moi, quand j'entendais des discours, quand je voyais des vidéos sur l'écologie, souvent je me disais, aïe aïe aïe, on ne comprend pas assez bien, ou ce n'est pas comme ça qu'il faut le montrer. Moi, j'adore la pédagogie, j'ai été prof de cinéma pendant deux ans, j'adorais ça, je ne sais pas si mes élèves diraient la même chose.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un temps particulier dans l'amitié lobby qui fait qu'en comprenant le message et là où tu veux nous amener, mais c'est du second degré. Il faut quand même arriver à comprendre. Et d'ailleurs, je crois que dans les premières vidéos, certains internautes n'avaient pas compris ce temps-là et sont clairement tombés dans le panneau alors que tu voulais montrer, par l'absurde, la manipulation.

  • Speaker #1

    Oui, c'est vrai qu'en fait, dans la vie des lobbies, on essaie toujours de faire en sorte que sur les premières secondes de la vidéo, on puisse croire qu'on est vraiment pro-industrie et anti-écolo. Au moins sur les premières secondes, ne serait-ce que pour... déstabiliser le spectateur et puis aussi pour essayer de nous mettre dans la poche au moins sur cinq secondes quelqu'un qui est vraiment anti écolo parce qu'on trouve ça rigolo que la personne se dise ah enfin une vidéo qui me plaît et puis sur les secondes suivantes ah non en fait je me suis fait avoir juste pour cette petite blague là ça nous fait plaisir mais normalement quand on a un tout petit peu de recul et quelques neurones qui nous restent normalement on comprend qu'on est foncièrement écolo dans la vidéo Mais c'est vrai que parfois on a des petites surprises, heureusement ça arrive très très rarement, mais on a toujours une petite surprise de quelqu'un qui nous dit « bande de salauds, vous voulez la déforestation ? » C'est drôle parce que ça reste minoritaire.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu sais définir un lobby ?

  • Speaker #1

    Oui, alors un lobby c'est un groupe de pression. C'est vrai que le mot de lobby, il prête à beaucoup déjà de fantasmes et à beaucoup de contresens. Je le vois dans les commentaires parfois ou dans les messages qu'on reçoit. Les gens confondent le mot lobby avec le mot business, pour eux c'est la même chose, ou alors encore pire avec le mot de complot. Pour eux, lobby ça veut forcément dire qu'il y a un complot derrière, alors que pas du tout. Un lobby c'est juste un groupe de pression, c'est-à-dire que ce sont des gens ou des entreprises qui se mettent ensemble pour avoir plus de poids et pour influencer la politique, pour influencer nos décideurs, nos parlementaires. Il y a un autre aspect du lobbying qui est l'influence de l'opinion publique. Mais le principal objectif, c'est d'influencer les gens qui prennent des décisions. Le lobbying, il existe à toutes les échelles. C'est-à-dire que moi, par exemple, je fais partie d'une association écolo à Millau. On a zéro euro de budget, on est tous bénévoles, mais on essaye aussi de nous adresser aux élus de la ville de Millau pour attirer leur attention sur tel problème écologique, etc. Donc on peut très bien dire qu'à notre échelle, on fait du lobbying. À côté de ça, vous avez des lobbies qui ont des millions d'euros, mais vraiment, ce n'est pas une expression, c'est des millions d'euros à dépenser chaque année juste en lobbying. pour influencer l'opinion publique et surtout pour influencer les politiques. Nous, on va juste s'adresser aux élus. Vous avez d'autres lobbies qui vont envoyer directement un texte de loi pré-rédigé ou un amendement pré-rédigé aux parlementaires pour qu'ils le signent, qu'ils le votent. Donc voilà, vraiment, l'influence n'a rien à voir.

  • Speaker #0

    Toi, dans tes vidéos, tu as déconstruit le lobby de la chasse, le lobby de la déforestation, le lobby des pesticides, de la mode. Quoi d'autre ?

  • Speaker #1

    On s'est attaqué à la viande. On a été chercher aussi derrière des énergies fossiles. qui essayent de faire croire que le climat ne se réchauffe pas à cause de l'homme. Les gros lobbys industriels, ce qu'ils vont défendre d'abord, c'est leur portefeuille. C'est-à-dire qu'ils vont surveiller qu'aucune loi ne passe qui puisse freiner leur activité, voire stopper leur activité. Donc ils sont extrêmement vigilants par rapport à ça. Et ils vont tout faire pour que l'opinion publique et les politiques pensent qu'il n'y a rien à changer, qu'on peut continuer comme avant. Après, il y a un... Il y a l'étape encore plus sournoise, c'est quand ils défendent quelque chose qu'ils savent pertinemment qui est nocive pour la santé et l'environnement. Là, on passe à un stade vraiment immoral, puisqu'en plus, on a des preuves. Par exemple, on sait qu'ExxonMobil, un géant des énergies fossiles, sait depuis les années 70-80 que la combustion d'énergie fossile va emmener un réchauffement climatique qui va dérégler foncièrement tout le système Terre. En fait, quand on se rend compte que des industries comme ça savent tout le mal en fait qu'ils provoquent, mais qu'ils essayent de le cacher, de convaincre tout le monde qu'il n'y a aucun problème. Là, on est dans quelque chose quand même de très grave et de criminel. Quelqu'un qui voit nos vidéos, qui n'avait absolument pas conscience du sujet. Effectivement, j'espère déjà que ça va le faire rire un petit peu, parce que quand quelqu'un rit sur un sujet, ça veut dire qu'il est un petit peu avec nous. J'espère que ça peut l'amener à changer un petit peu ses habitudes de consommation. Les gens qui sont déjà sensibles au sujet, j'espère que ça va leur faire une petite piqûre de rappel et les inviter à s'engager, parce que c'est vrai que quand on fait les choses chez soi, tout seul, c'est déjà très bien, mais il faut vraiment passer à l'étape d'après, qui est de faire ces mêmes actions, mais en collectivité, dans une association, une ONG, et puis porter ce même discours. devant sa municipalité, sa région, son pays. On ne peut qu'espérer que les gens aient envie de s'engager. Au fil des épisodes, je pense qu'on va reconnaître un petit peu, enfin j'espère qu'on va reconnaître un petit peu la manière de procéder des lobbies, qui est un petit peu toujours la même.

  • Speaker #0

    Si un jour la majorité des Français vient à comprendre ce discours, cette rhétorique du lobby, est-ce que les lobbies sont amenés à muter, à évoluer ? On a du mal à croire qu'ils puissent disparaître un jour ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense que même si les gens commencent à comprendre facilement les méthodes des lobbies, je pense que ce n'est pas pour autant qu'on saura reconnaître une action de lobbying, parce que ça peut être... Tellement subtil, tellement détourné que même moi qui ai la tête dans le guidon tout le temps, je passe à côté de plein de choses certainement. Je pense qu'il faut vraiment être un spécialiste pour vraiment avoir l'œil dessus et reconnaître tout. On peut espérer que les lobbies disparaissent des cercles du pouvoir, que les lobbies soient considérées comme indésirables dans les parlements par exemple. Ce n'est pas quelque chose d'incroyable à mettre en place. C'est un peu difficile, mais ce n'est pas impossible. Il y a des députés qui travaillent là-dessus. Il y en a d'autres, au contraire, qui n'en pensent que c'est tout à fait nécessaire d'avoir des lobbies qui prennent rendez-vous avec des parlementaires. Je pense que c'est quelque chose de possible et de souhaitable que les lobbies ne soient plus autorisées à tourner autour des parlements français et européens. En revanche, une disparition totale, c'est impossible, puisqu'ils trouveront toujours une manière de... de s'exprimer d'une manière ou d'une autre. On a affaire vraiment aux maîtres de la communication. Ce sont les meilleurs en communication, puisqu'ils ont des budgets quasiment illimités. Quand on voit que le lobby des énergies fossiles consacre 250 millions d'euros par an, ils peuvent évidemment faire appel aux meilleures agences de communication du monde entier. Donc, ils ont la communication la plus subtile, la plus agressive aussi. la plus omniprésente qu'on puisse imaginer. Ils sont sur tous les réseaux, ils peuvent répondre du tac au tac, dès que quelque chose va à la rencontre, ils peuvent répondre faisant croire à l'opinion publique qu'il y a vraiment des gens qui défendent l'industrie et qui se tiennent vent debout contre tous les gens qui essaieraient de la contrer. Donc voilà, ils auront toujours une longueur d'avance sur tout le monde en matière de communication et seront toujours les premiers à évoluer et à s'adapter. aux nouveaux médias, aux nouveaux réseaux.

  • Speaker #0

    Le mot lobby a été catégorisé comme négatif. Oui. Ce mot-là. Mais il peut y avoir du bon lobby ou pas ?

  • Speaker #1

    En fait, je pense qu'il y a deux types de lobby foncièrement différents. Il y a les lobbies qui défendent une cause et les lobbies qui défendent un portefeuille. Et c'est sans doute un jugement de la valeur parce que la cause peut être complètement bidon. Je pense à nos amis, associations d'automobilistes qui veulent rouler à 200 sur les autoroutes. ou qui râlent dès qu'on baisse la vitesse limite, ils défendent une cause aussi. Après, nous aussi, au Écolo, on défend une cause. Et l'énorme différence avec les lobbies industriels, c'est que nous, quand on réussit à faire pression sur un gouvernement ou sur l'opinion publique, qu'est-ce qu'on y gagne ? Rien du tout. C'est-à-dire qu'on est content parce qu'il y aura peut-être moins de pesticides dans les champs, il y aura peut-être moins d'arbres qui vont être coupés, etc. Mais on ne va rien y gagner. Alors qu'un lobby industriel, quand il réussit son lobbying, C'est des milliards qui sauvent ou qui vont gagner peut-être. Et ça, ça m'énerve assez qu'on ne voit pas la différence. Et souvent les lobbies industriels jouent là-dessus. Ils savent très pertinemment que l'opinion publique ne connaît pas la différence. Et ils vont nous renvoyer dos à dos. C'est-à-dire que quand on dit « mais attendez, mais là, c'est complètement intéressé ce que vous faites, vous faites un énorme lobbying et tout » , ils nous disent « et vous les lobbies écolos alors, qu'est-ce que vous faites ? » « Oui, mais nous, on est bénévoles, on n'a rien à gagner » . Ça serait bien que les gens voient cette différence. Et au-delà de ça, parce qu'après, il y a des gros lobbies écolos. Par exemple, je pense à des ONG comme WWF qui sont importants. Ils ont un budget. Mais quand on regarde de plus près le budget, même de la plus grosse ONG comme le WWF est ridicule par rapport aux lobbies industrielles qu'ils ont en face. On est sur des lobbies dix fois plus élevées, au moins dix fois plus élevées pour l'industrie. Donc quand il y a même un lobby écolo ou ce que vous voulez, serait important, aurait de l'influence. Il faut toujours avoir en tête qu'en face, on a des gens qui ont un budget illimité.

  • Speaker #0

    J'ai appris récemment qu'il y avait des écoles,

  • Speaker #1

    des lobbies.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on apprend dans ces écoles ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne me suis pas penché exactement sur le programme qu'il y avait dans les écoles, mais effectivement, c'est super intéressant de voir ça. J'ai vu l'affiche sur l'étudiant.fr. Effectivement, on montre comment devenir lobbyiste. Il y a une belle photo d'un lobbyiste. En fait, c'est vrai que c'est intéressant de voir que ça devient... N'importe quel multinational se doit d'avoir un service de relations publiques. C'est le joli mot pour dire lobbying. Parce que ça devient aussi indispensable que d'avoir un service communication, un service comptabilité. C'est indispensable de surveiller la législation pour voir si son business ne va pas se faire torpiller par une nouvelle loi. De ce que j'ai pu voir, mais de loin, on apprend évidemment à communiquer. à rentrer en contact avec des politiques, à savoir approcher des politiques, à savoir influencer tout simplement, parce que le lobby, le mot principal, c'est de l'influence. Donc effectivement, ça s'apprend.

  • Speaker #0

    Et si on revient à toi ? C'est-à-dire que là, tu es perché à Pompei, dans un petit village au fin fond du Sud-Aveyron, et tu t'attaques au sujet les plus clivants aujourd'hui dans la société française. On est sur la chasse, sur les pesticides, on voit qu'il y a des oppositions, et les arguments d'un côté et de l'autre peuvent parfois s'entendre. On n'est pas sur du noir ou du blanc. Comment tu assumes, toi, de... d'aller te frotter à ces sujets-là, qui, dans tous les cas, vont faire réagir, qui peuvent amener à des réactions hyper violentes, sûrement en ligne, mais c'est toujours assez déstabilisant quand même, j'imagine, d'avoir des retours un peu énervés. Comment tu l'assumes, ça ? Et est-ce que ça a été un frein ? Est-ce que tu t'es posé la question de dire « Est-ce que j'y vais tout seul ? J'y vais quand même, même si j'ai une petite influence, c'est mieux que rien ? »

  • Speaker #1

    Alors déjà quand on a commencé la websérie, on a tourné trois épisodes d'un coup. On a tourné la déforestation, les pesticides, la chasse. Donc en les tournant, on était absolument sûr que personne ne les verrait. Parce qu'on débutait avec Adi et Laura, on est très très nuls en réseaux sociaux et en internet. Donc on était sûr qu'on mettrait des mois voire des années à avoir une minuscule audience. Donc on ne s'attendait pas du tout à ce que le premier épisode soit vu un million de fois sur Facebook. Donc en fait, les épisodes suivants, qui pour le coup étaient clivants, mais nous on n'en avait pas conscience, les pesticides et la chasse, on fait autant, voire plus de vues, et on n'imaginait pas du tout ça. Donc on ne pensait pas du tout, pour le coup, avoir la moindre influence et la moindre audience. Donc ça n'a pas du tout été quelque chose de réfléchi, on ne s'est pas dit, voilà, ça va être dur et tout. Non, non, on s'est dit, bon, on fait nos petites vidéos tout seul dans notre coin. On parle de choses qui nous font plaisir, de choses qui nous tiennent à cœur, de choses qui nous énervent, il faut qu'on en parle, mais on ne s'est pas dit que ça allait être un petit événement sur Internet, rien du tout. Quand j'écris les épisodes, je ne les écris pas du tout pour faire polémique ou en me disant « ce sujet est vachement bien, ça risque de faire réagir » . Non, pour l'instant, pour les dix épisodes, c'était la même chose, c'était uniquement des thèmes qui nous tenaient à cœur. Et donc je voulais parler tout de suite, on avait vraiment envie d'en parler, donc je me suis mis à l'écriture sur ces sujets-là. On a zéro stratégie pour l'instant, on ne s'est jamais dit, là il faudrait le sortir maintenant, ça serait bien. Non, c'est vraiment ce qui nous fait plaisir au moment où ça nous fait plaisir. Et donc voilà, c'était ça pour les pesticides de la chasse, que je voulais mettre en lumière, par exemple pour les pesticides, je pense à une petite chose qui me paraît folle, qui n'est pas centrale dans le problème des pesticides. Le fait qu'un des plus gros fabricants de pesticides d'aujourd'hui soit le même qui ait créé le gaz moutarde et le Ziclombé, ça me paraît fou qu'on ne le sache pas. Au moins, il faut le dire. Après, effectivement, il y a des gens à qui ça ne va pas plaire. Mais il faut juste le dire, c'est important quand même. Et pareil, sur la chasse, les arguments de la fédération de chasse sont totalement absurdes. Après, moi, je ne suis pas dans mon village, il y a une association de chasseurs. Je dis bonjour à des chasseurs tous les jours, on s'entend très bien. Il y en a qui ne sont pas très contents de l'épisode sur la chasse, mais il y en a d'autres à qui ça a fait vraiment marrer. Donc je n'ai pas de problème avec les chasseurs, mais la fédération de chasse, si, j'ai un problème avec elle. Parce qu'elle dit n'importe quoi, ses arguments sont complètement absurdes et elle véhicule de fausses idées. Donc ça, ça m'énerve. Je voulais vraiment ridiculiser les arguments qui défendent l'activité chasse. de manière inconditionnelle. Pour l'épisode de la déforestation, étant donné que la déforestation, c'est plutôt... Ça fait consensus, il n'y avait pas eu de soucis. Du coup, on était très contents, ça s'est bien passé. Et puis, quand on a sorti l'épisode sur l'épicile, vraiment, on a été assez choqués de certains commentaires. On ne s'attendait pas du tout à ce que les réactions s'y vivent. Ce qui me rassure quand même, c'est, tu sais, sur YouTube, tu as les pouces vers le haut, pouces vers le bas. Et puis, sur Facebook, tu as les réactions, rires, pouces, etc. Et en fait, sur YouTube, on peut, dans notre interface de YouTubeur, on peut voir les statistiques. Et en fait, sur l'ensemble de nos vidéos, on a 98% de gens qui aiment la vidéo, qui aiment les vidéos. Donc moi, c'est ça qui me rassure, parce que malheureusement, les commentaires, c'est très trompeur, parce que ce sont les gens qui détestent la vidéo qui vont finalement laisser les plus gros commentaires. Ces commentaires-là vont être likés, dislikés par les gens. On va y répondre et du coup, ils vont remonter. Et on va voir que ça. Donc en fait, c'est trompeur parce qu'on peut se dire mais en fait, les gens ont détesté la vidéo, mais pas du tout. 98% des gens l'ont aimée. Donc ça, ça me rassure. Si jamais il y avait 50% seulement de gens qui avaient aimé la vidéo, waouh, là je serais mal. Et je me dirais non, là on s'est vraiment raté. Il se passe quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des lobbies justement qui sont venus répondre à tes vidéos qui ont occupé l'espace commentaire pour se faire entendre ?

  • Speaker #1

    Sur les pesticides, c'est sûr et certain. Sur les pesticides, ça a été vraiment... On a eu les commentaires les plus sournois et les plus vraiment mal tournés qu'on ait pu avoir sur tout. Même sur la chasse, on a eu des commentaires très vifs, très agressifs, même des menaces de mort venant de chasseurs. Mais ça ne nous dérangeait pas tellement parce qu'on trouvait ça normal que des chasseurs soient énervés. On trouvait ça normal qu'ils attaquent de manière frontale l'épisode. En revanche, sur les pesticides, c'était très sournois. Et j'ai commencé à reconnaître vraiment les structures de l'argumentaire lobbyiste dans ces commentaires-là, et aussi dans les messages privés qu'on a reçus. Et c'était un petit peu tout le temps les mêmes. Et si tu lis l'article dans Le Monde sur la stratégie de communication de Monsanto, en fait, du coup, on comprend tout. C'est vraiment appliqué à l'être. On se rend compte qu'il y a des gens qui bossent pour des agences de communication, qui répondent du tac au tac, qui scrutent Internet et les réseaux. Dès qu'il y a un article qui sort qui attaque les pesticides ou l'agrochimie, ils répondent tout de suite à un argumentaire qui est tout le temps le même. Décrédibilisation, et ensuite des arguments pro-industrie, etc. Donc pour les pesticides, c'est clair et net. Et on a eu des choses vraiment très étranges, notamment pour les pesticides. Alors là, pour le coup, ils ne l'ont pas envoyé sur la page d'Amidé Lobby, mais ils l'ont envoyé directement à Adi, le comédien. On l'a invité à rejoindre quelqu'un dans un parking le soir pour parler pesticides quand même. Donc c'était vraiment, vraiment chelou quand même.

  • Speaker #0

    Tu sens que tu touches vraiment les points de tension. Vraiment, c'est nerveux, c'est épidermique, tu as ces réactions-là. Parce qu'aussi peut-être, sur le sujet des pesticides, de la chasse, les personnes qui chassent ou qui, sur une exploitation, ont eu à utiliser des pesticides, se sentent attaquées directement. Alors que ce que tu dis est intéressant, c'est plutôt à la rhétorique. à la manipulation et des chasseurs ont été manipulés même par la fédération de chasse et des agriculteurs ont été manipulés par les lobbys pesticides agrochimiques donc avec toi tu es plutôt sûr ça sur et les consciences y compris des gens qui sont tombés dans le panneau sans forcément se rendre compte c'est ça ton idée

  • Speaker #1

    Peut-être oui alors après je Je me fais pas trop quand même d'illusions je pense que les chasseurs quoi qu'il arrive la vidéo va pas Pas trop leur plaire, c'est normal. Quoique, il y a quand même plein de chasseurs qui m'ont dit qu'ils s'étaient bien marrés en voyant la vidéo, donc ça me fait plaisir. Je me dis que quand même des gens ont compris que je ne stigmatisais pas tous les chasseurs, mais uniquement les excités de la gâchette, et surtout l'argumentaire de la Fédération de Chasse. Pour les pesticides, c'est encore... C'est vraiment délicat, parce que le recours aux pesticides, il a quasiment été imposé par toute la société. Donc je ne vois pas comment on aurait pu échapper à ça, à part vraiment ... à part vraiment des agriculteurs militants déjà dans les années 60-70 qui ont pu éventuellement refuser l'usage des pesticides, mais sinon, si on faisait son boulot normalement comme tout le monde, il n'y avait aucune raison de ne pas passer aux pesticides puisque toute la société disait que c'était excellent. Je ne veux pas du tout dire que ces gens-là se sont fait avoir parce que qui ne serait pas passé aux pesticides ? Des tas de gens qui ont des exploitations agricoles ou des élevages dans le coin et ils nous racontent comment dans les années 70, leur propre parents étaient... On a une amie qui nous a raconté comment sa mère était en pleurs quand elle s'est vue un petit peu forcer la main par des... À l'époque, ils appelaient ça des techniciens de chez Monsanto, de chez autre chose, en leur disant, mais vous êtes obligés de passer, de répandre ça maintenant sur vos cultures. C'est obligé, tout le monde fait ça, vous allez passer pour une abrutie si vous le faites pas. C'est vraiment ces gens-là qu'on a envie de mettre en lumière et de pointer du doigt.

  • Speaker #0

    Par rapport à... Merci. En Sud-Aveyron particulièrement, on est quand même sur un territoire qui est engagé. Il y a eu le Larzac, il y a un José Bové qui se tient toujours dans le coin, un McDo, un Burger King. Tu as quand même une population qui… qui est souvent �� battre le pavé. Il y a une histoire de la mobilisation, en Sud-Aveyron particulièrement. Quelle place il y a pour un activisme 2.0 comme tu le mènes finalement dans un département comme celui-là ? Est-ce que tu es en lien avec les activistes historiques ? Je pense au Larzac, naturellement.

  • Speaker #1

    Oui, je suis en lien avec eux, avec certains d'entre eux, parce que je suis dans une association qui s'appelle la Fédération des Grands Causses. qui est tenu par des anciens du Larzac, qui sont proches de José Bové. Et donc en fait, c'est vrai que les mobilisations qu'on fait sur le terrain ont encore tout leur sens, ont une grande importance. Je pense qu'il faut, pour les mobilisations de terrain, je pense qu'il faut... En revanche, un petit peu les faire évoluer pour ne pas qu'une manifestation, ça soit juste l'expression d'un ras-le-bol. Il faut vraiment que ça soit beaucoup plus ciblé. Alors moi, j'ai presque envie de dire, il faut presque que ça soit mis en scène, pour que ça soit percutant, original, que ça saute aux yeux. Et moi, c'est vrai que j'essaye d'apporter effectivement à ces mobilisations-là une audience sur Internet. parce que je pense maintenant qu'on ne peut absolument pas Pas se passer d'Internet quand on veut faire savoir quelque chose, mettre en lumière un problème, des enjeux, parce qu'on s'adresse tout de suite, enfin, si on s'en sort bien au niveau du travail, au niveau de la communication, on peut toucher des millions de gens. Donc tout prend de l'ampleur, tout peut en tout cas prendre de l'ampleur assez vite.

  • Speaker #0

    Quelle relation tu as avec cet enclavement rural qu'on connaît aux quatre coins de l'Aveyron pour le coup ? Est-ce que le numérique... peut être une voie de salut pour le rural ?

  • Speaker #1

    Pour moi, la notion d'enclavement n'est pas du tout liée à la ruralité. Parce que c'est vrai qu'avec ma famille, c'était vraiment en ville qu'on se sentait vraiment à l'étroit, qu'on s'entait, qu'on étouffait. Et depuis qu'on est là, on a vraiment une impression de liberté, de bouffée d'oxygène. Donc pour moi, je ne me sens pas du tout coincé dans un petit village. Moi, comme je te le disais, j'ai toujours fait des petits courts-métrages, des petites choses. J'avais très peu d'audience dans ce que je faisais quand j'étais sur Paris. Et maintenant que je suis dans l'Aveyron, je fais une petite web série et ça touche des millions de gens. Donc pour moi, il n'y a vraiment plus de lien direct entre la localisation, l'espace et la portée du travail qu'on fait. Ça fait des campagnes, un lieu d'avenir. Parce qu'en ville, c'est vrai que moi, ce qui me stressait un petit peu en ville, c'est qu'on a l'impression... On a l'impression parfois d'être hors sol, on a l'impression parfois d'être un petit peu des cochons sur Caillebauty, c'est-à-dire qu'on est complètement dépendant de tout. Si le magasin ferme, si les camions n'arrivent plus pour livrer la nourriture, qu'est-ce qu'on fait ? L'eau, qu'est-ce qu'on fait si elle est mauvaise au robinet, qu'est-ce qu'on fait ? Alors que vraiment, à la campagne, on peut être autonome, et l'autonomie, comme disait Pierre Rabhi, c'est quelque chose d'éminemment politique, vu les transformations qui nous attendent au niveau énergétique et au niveau... Au niveau de la consommation, je pense que c'est extrêmement important d'avoir un minimum d'autonomie alimentaire pour la suite.

  • Speaker #0

    Sur le territoire, tu parlais tout à l'heure des agriculteurs qui t'entourent, des chasseurs dans le village. Est-ce que le fait d'avoir les deux pieds vraiment ancrés dans la terre et sur un territoire qui connaît l'écologie, du moins la pratique n'a pas d'autre choix que de vivre avec sa nature dans tous les cas, est-ce que ça t'a apporté un regard particulier ? Est-ce que ça a nourri ? la construction de tes épisodes, peut-être que si tu étais resté à Paris, tu n'aurais pas eu ce lien au sol que le sud-Aveyron peut t'apporter.

  • Speaker #1

    Exactement, complètement. Le fait d'être dans l'Aveyron, le fait de parler tous les jours avec des gens qui bossent dans la nature, qui dépendent 100% du climat, de la terre, de la biodiversité, pour leur travail, ça a fait que... que les épisodes sont vraiment différents. Mais je pense notamment à l'épisode sur le loup qu'on a fait. Au départ, j'étais 100% parti pour faire un épisode écolo à Donf pour le loup, laisser le loup tranquille, on veut des loups partout. J'étais vraiment parti pour faire ça. Et puis, j'ai discuté avec 12 millions de gens et je me suis rendu compte que c'était plus compliqué que ça. Alors, on n'est pas hyper touché par le loup dans la région. mais il y a quand même des éleveurs qui le sont un petit peu, qui sont un tout petit peu plus loin, du côté de la lozère et qui sont extrêmement sensibles à ça. Et quand tu vois que tu parles du loup cinq minutes avec eux et qu'ils ont collé de larmes aux yeux, qu'ils arrivent tout de suite, tu fais « waouh, je vais me calmer tout de suite avec mes revendications parce que là il y a quelque chose qui m'échappe » . Notamment moi, par exemple, je suis végétarien mais assez souple, ça veut dire que je ne veux pas interdire aux gens de manger de la viande, je veux juste qu'ils baissent leur consommation parce que C'est du bon sens pour la santé, pour l'environnement, il faut baisser sa consommation, mais je ne suis pas de là à vouloir l'interdire. Et quand je parle avec des amis qui sont végétariens à donf ou qui sont véganes, parce que je suis super proche des mouvements véganes, je les comprends complètement et je les soutiens, mais je ne peux pas du tout en parler dans la région, ça n'aurait aucun sens. Je suis dans une région où tout le monde vit grâce à l'élevage. Donc en fait, ça ne serait pas seulement changer les habitudes alimentaires des gens, ça serait changer leur vie de A à Z. la vie qu'ils ont héritée de leurs ancêtres, donc ça n'a aucun sens. Donc c'est vrai que là, on se rend compte, quand on vit dans un milieu rural, que des petites choses qui sont hyper simples à mettre en place en ville, qui sont hyper fun, ça prend juste deux secondes de choisir tel produit au marché plutôt que celui-là. En fait, à la campagne, ça n'a rien à voir. C'est toute une vie qui change. Donc c'est super important pour moi d'être au contact de ces gens-là pour ne pas dire n'importe quoi et me rendre compte de ce qu'on prône. Mais sur le terrain, quel conseil en camp, ça a vraiment dans tout le territoire.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on en vient à un discours écolo qui peut être discrédité en deux secondes. Quand on est dans le rural, on entend le bobo parisien qui veut imposer son écologie. Peut-être pour ça que tu es pertinent en ce sens ?

  • Speaker #1

    Ce dont je m'en rends compte en vivant en milieu rural, c'est qu'il y a des choses qui sont impossibles, mais vraiment impossibles à imposer. Quand je vois par exemple la vidéo d'L214, je suis vraiment attristé par le sort qu'on réserve aux animaux pour produire du fromage. Mais quand on vit sur le terrain, on se rend bien compte que c'est impossible de changer la vie des gens. On a beau être révolté par le sort qu'on réserve aux animaux dans certains élevages, dans les abattoirs, on se rend bien compte que c'est toute la vie des gens qui travaillent, donc la vie de tout un territoire qui en dépend. et que les choses ont besoin d'être amenées de manière plus souple, plus subtile, et plus en compréhension avec les gens qui travaillent. Pour autant, je comprends complètement la démarche de l'A214. La sphère médiatique actuellement est tellement saturée de textes, d'images, de sons, que si on amène une revendication tout doucement, poliment, avec une petite voix fluette, personne ne va l'entendre. Donc parfois, il faut y aller comme un bourrin. Ça va faire peut-être de la peine à des gens, ça va en révolter d'autres, mais tant pis, le message est passé. Ce qui est sûr et certain, c'est que la consommation de viande ou de fromage ou de tous les produits animaux qui peuvent amener de la souffrance animale, quoi qu'il arrive, tous ces produits-là ne vont pas disparaître du jour au lendemain et ils ne vont même jamais disparaître. Mais ce qu'il faudrait essayer de faire, c'est exactement comme la consommation du vin en France, par exemple. Au début du 20e siècle, tout le monde buvait du vin, mais tout le temps. Même les enfants à la cantine, il y a eu du vin jusque dans les années 50, je crois, 50-60. Et donc le vin, qu'est-ce qui s'est passé avec le vin ? On a baissé énormément la consommation du vin, mais maintenant on boit du vin de qualité. Avant on buvait de la piquette tous les jours, maintenant on boit du très bon vin de temps en temps. Il faudrait que ce soit exactement la même chose avec les produits animaux. Il faudrait que ce soit de la viande excellente, des fromages excellents, mais peut-être pas tous les jours. Et dans cette optique-là, les élevages traditionnels n'ont pas de problème. aucun souci à se faire puisque c'est eux qu'on va aller chercher. C'est pas les élevages industriels avec 12 000 poulets dans un même hangar, c'est pas les cochons sur caillebottis. Ça, ça doit disparaître. Mais après les élevages traditionnels, c'est qu'ils doivent subsister et c'est vraiment ça que moi j'appelle de mes voeux. C'est pas une disparition de la filière qui n'arrivera pas de toute façon.

  • Speaker #0

    Comment tu l'as introduit cette nuance-là dans tes scénarios ?

  • Speaker #1

    Alors pour l'instant c'est vrai que je sais pas si je l'ai très bien fait comprendre. En tout cas j'essaye à chaque fois C'est par petits mots, par exemple, je pense à l'épisode sur la viande. J'ai essayé plusieurs fois dans l'épisode de bien faire comprendre qu'on s'attaquait à la viande industrielle. On fait bien comprendre, par exemple, que c'est une viande qui traverse trois fois l'Europe avant d'arriver dans notre assiette. Donc, évidemment, les éleveurs traditionnels comprennent bien que, et on ne parle pas d'eux, quand on parle d'élevage qui mange du soja OGM importé du Brésil, donc qui a causé de la déforestation. Les éleveurs qui ont leur bétail, qui mangent dehors et qui mangent du foin l'hiver, ça vient qu'on ne parle pas d'eux. Donc voilà, c'est par petits détails comme ça qu'à chaque fois, j'essaye de ne pas être dans la stigmatisation de toute une filière, de tous les travailleurs du secteur. Et souvent, je suis super content parce qu'on a des petits messages qui arrivent sur la page d'Amis des lobbies, de gens qui travaillent dans le milieu et qui me disent « Merci, j'ai vu votre truc, c'était super bien » . Ça serait vraiment un échec pour moi de me mettre à dos C'est même pas de mettre trado, c'est de faire de la peine aux gens qui sont pas concernés par le problème. Parce qu'un petit élevage à échelle humaine n'est pas concerné par le problème de la viande. Ce qui est catastrophique avec la consommation de viande, déjà c'est les gens qui mangent évidemment de la viande à tous les repas, mais c'est surtout des gens qui mangent de la viande de mauvaise qualité, qu'ils ont achetée dans une boîte au supermarché, et dans lequel, dans le steak haché, il y a 12 animaux, ou 60 animaux. et qui a été nourri au soja OGM, etc. C'est ça le problème. C'est pas le steak de l'Aubrac qui... qui s'est nourri correctement. Il faut réussir à être un minimum subtil quand même, mais il y a toujours une difficulté parce que nous aussi, on veut être percutant. Il faut un minimum. Il faut aussi rentrer dedans. Et aussi, on veut faire rire. Donc, quand on fait des blagues aussi, parfois, tout le monde peut se sentir concerné. Alors, on se moque surtout de l'industrie.

  • Speaker #0

    Peut-être pour terminer, Jérémy, quelle est la boussole de ta vie, l'engagement vraiment qui fait sens et qui fait que tu te lèves tous les matins ?

  • Speaker #1

    Ça va peut-être te paraître un petit peu bizarre parce que finalement, ça n'est pas complètement lié à mon engagement dans l'écologie. Parce qu'en fait, c'est vrai que dans l'écologie, je ne vois pas un point à atteindre parce qu'il y aura toujours à veiller, il y aura toujours à faire attention à ça. Il n'y aura pas un jour où on se dira ça y est, on a réussi. Donc, en revanche, moi, en ce moment, ce qui me trotte tout le temps en tête et ce qui me donne vraiment un objectif. C'est la même boussole que j'avais quand j'étais petit. Je l'ai oublié pendant pas mal d'années et là, ça revient très très fort. C'est l'envie de raconter des histoires, et de raconter des belles histoires, et de faire par exemple un long métrage, et d'être reconnu comme un conteur d'histoire. Ça, ça me ferait vraiment plaisir, et que ça soit mon métier. En ce moment, c'est vraiment la chose à laquelle je pense beaucoup et qui me fait rêver. Et je trouve qu'on peut faire passer beaucoup de choses dans la fiction. Merci à toi.

  • Speaker #0

    Merci. Vous êtes arrivés au bout de ce nouvel épisode de Finta. S'il vous a plu, parlez-en autour de vous, partagez-le à vos amis. C'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à Finta pour qu'il continue son chemin. Retrouvez Finta sur Instagram et sur Facebook, Finta.lepodcast, pour ne rien rater des nouveaux épisodes et de leurs coulisses. On se retrouve dans 15 jours. D'ici là, gardez l'œil ouvert, soyez curieux !

Share

Embed

You may also like