Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3) cover
Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3) cover
Finta! L'Aveyron par ses voix

Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3)

Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3)

39min |08/06/2024
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Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3) cover
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Finta! L'Aveyron par ses voix

Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3)

Dans les coulisses du musée Soulages... avec Benoît Decron (3/3)

39min |08/06/2024
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Description

Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les halls Charles, le foirail, le jardin public cerné de son petit mur de pierres. C’était le Rodez d’avant, avant le musée Soulages. A cette époque-là, le pari soulevait plus de scepticisme que d’enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de corten qui sortent de terre pour s’adosser au jardin. Suivra l’inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C’était en 2014, il y a 10 ans. A chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective.


D’ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonne. Précieux gardiens de l’âme de Pierre Soulages, qu’ils ont tous côtoyé et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leurs côtés dans l’ombre des Outrenoirs, pour une série de Finta ! en trois épisodes consacrés aux 10 ans du musée Soulages.


EPISODE 3/3... avec Benoît Decron


La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu’il semble capable de se fondre dans l’esprit de l’artiste disparu, de penser comme il l’aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. A la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public.


Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste iconique de son vivant, à partir d’une feuille blanche dans une ville qu’il ne connaissait pas, Benoît Decron est aujourd’hui l’un des plus fins connaisseurs de l’œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. De son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d’orchestre : nous en parlons au micro de Finta ! Je le rencontre dans l’entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.


🎧 Pour réécouter l'épisode 1/2 avec Amandine Meunier, responsable des collections : c'est ici.

🎧 Et l'épisode 2/3 avec Christel Lagarrigue, dans l'atelier, c'est là.


🧡 Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les Halles Charles, le foireil, le jardin public cernés de son petit mur de pierre. C'était le Rodès d'avant. Avant, le musée Soulages. À cette époque-là, le Paris soulevait plus de scepticisme que d'enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de cortènes qui sortent de terre pour s'adosser au jardin. Suivra l'inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C'était en 2014, il y a dix ans. À chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective. D'ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonnent. Précieux gardiens de l'âme de Pierre Soulages qu'ils ont tous côtoyés et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leur côté, dans l'ombre des Outres-Noirs, pour une série de trois épisodes de Finta consacrés aux dix ans du musée Soulages. La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu'il semble capable de se fondre dans l'esprit de l'artiste disparu, de penser comme il l'aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. À la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public. Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste conique de son vivant, à partir d'une feuille blanche dans une ville qu'il ne connaissait pas, Benoît de Cron est aujourd'hui l'un des plus fins connaisseurs de l'œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. de son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d'orchestre, nous en parlons dans cet épisode au micro de Finta. Je le rencontre dans l'entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.

  • Speaker #1

    Je peux avoir un code postal, s'il vous plaît ? Le mien c'est de 1854 parce que j'habite à Ounel-Château. C'est celui de votre famille ?

  • Speaker #2

    Le tien,

  • Speaker #1

    Côte d'Azcad. 17 000.

  • Speaker #3

    Ah voilà.

  • Speaker #1

    Comme vous le savez sûrement, l'objet vous donne accès au musée de la ville. Le musée Fionnail, le musée de Mille-Fèches, pendant 28 jours. Les billets seront juste à faire à la vague.

  • Speaker #2

    Moi, l'ambiance que je voudrais, d'abord, je pense que le musée est immersif, parce que c'est quand même une expérience unique au monde que de rentrer dans le musée Soulages et se retrouver dans une salle qui est un petit peu enterrée et qui est sombre, avec du métal sur le sol et du métal sur le mur. Moi, ce que je voudrais que les gens ressentent, c'est et pourquoi pas moi ? Je m'appelle Benoît Decron, je suis né en 1959 à Niort, et je suis donc conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée Soulages. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est l'exposition permanente. On a juste la phase 5 et la phase 7 qui en ce moment sont en cours de rapprochage, donc il y aura un peu moins de commentaires à ce moment-là. Lorsque vous voyez ce pictogramme-là, il y aura un numéro en dessous. Vous saisissez le numéro sur le clavier, vous vous mettez à l'oreille. Si toutefois ça ne se lance pas, vous rappuyez sur Play. Moins et plus pour monter ou baisser le son, et Pause pour faire pause sur le commentaire. Donc c'est simple que ça.

  • Speaker #3

    Super. Merci. Soyez bienvenus.

  • Speaker #4

    Merci.

  • Speaker #2

    Ce que je trouve intéressant dans un musée, c'est d'intéresser les gens. Et je pense qu'il est beaucoup plus gratifiant d'aller chercher des gens qui n'y connaissent rien que d'essayer de satisfaire des gens qui croient tout connaître. Donc c'est ça qui m'intéresse dans le musée. Moi j'aime bien aller quelque part, dans un domaine que je connais mal ou peu, et que des gens me donnent envie de visiter. Voilà ce que je pourrais dire, ce que je souhaite que les gens... ressentent quand ils arrivent au musée. Et peut-être qu'il y a une deuxième chose aussi qui est importante, c'est que... Ça leur appartient. C'est-à-dire qu'en réalité, ce qu'il y a dans les musées, c'est fait pour que les gens les admirent, les regardent, les fréquentent. Et que, évidemment que ça appartient, qu'il y a un musée, une collectivité, un collectionneur, etc. Mais au fond, ce qu'on a dans les yeux... C'est quand même quelque chose qui nous appartient. Donc c'est pour ça que je dis que les œuvres, qui sont le miroir en quelque sorte de ce que les gens voient lors de leur pérégrination, eh bien ça leur appartient. Voilà ce que je pourrais dire. Moi je voudrais que les choses soient vraiment envisagées de la manière la plus simple possible.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez une anecdote là, depuis dix ans, un souvenir d'un visiteur en particulier, une remarque, quelque chose que vous avez entendu et qui vous fait dire que cet objectif-là, il est réussi ?

  • Speaker #2

    Bah, j'ai pas d'anecdote particulière, sauf peut-être une personne, une fois, qui est arrivée le matin à dix heures, et puis qui est repartie dix-huit heures. Elle était avec son livre, je pense qu'elle a eu tout le temps de lire son livre. Moi, ça me dérange pas que les gens... Fasse un stationnement extrêmement long, un peu ventouse, à l'intérieur du musée, parce que s'ils considèrent que le musée est un lieu à part, avec une certaine tranquillité, il faut qu'ils en profitent. Donc moi, c'est peut-être ce genre de souvenir. Et puis si, peut-être, j'ai le souvenir aussi d'avoir fait une visite, il y a assez longtemps, pour des gens non voyants. Et alors c'est intéressant de parler de noir, d'œuvre noire, à des gens qui sont non-voyants. Parce que le noir c'est aussi extrêmement large, le noir, du moins la vision du noir, ou ce qu'on peut imaginer du noir entre le psychologique, le visuel, l'optique, tout ce qu'on veut. Voilà, c'est ça, j'ai un sacré souvenir, parce qu'expliquer du noir à des gens qui ne voient pas, mais que les aveugles ne voient pas du noir, les aveugles voient de la lumière, les aveugles voient à leur manière des couleurs, des scintillements, je crois que c'est aussi quelque chose qui, à mon avis, est significatif. Avant de venir ici à Rodez, j'ai obtenu le concours de l'école du patrimoine. Ensuite, j'ai pris un premier poste à Langres pendant huit ans, où je gérais un musée de beaux-arts. Et puis ensuite, j'ai géré un musée d'art contemporain, moderne et contemporain, au Sable d'Olonne pendant 13 ans. Et ça fait 15 ans ici que je suis à Rodez. Je suis venu pour construire le musée et je suis venu surtout pour travailler avec Pierre Soulages. Parce que c'est une expérience hors normes que de travailler avec un artiste en activité. Donc... Je crois que j'ai eu cette chance inouïe d'être un peu plongé dans le creuset avec l'artiste, sa femme, Colette et toute l'équipe du reste. On a eu une chance formidable de travailler avec Pierre. Je n'ai jamais senti chez Pierre Soulages un quelconque affaiblissement lié à l'âge, par exemple. Jamais, jamais. Je pense que le musée Soulages m'a appris à comprendre que l'âge n'a rien à voir avec les artères. parce que l'âge c'est quelque chose qui est dans la tête il y a des gens qui peuvent avoir 25 ans qui peuvent être infiniment vieux et il y a des gens comme Pierre Soulages au delà de 100 ans qui ont une vista absolument incroyable C'est aussi une question de relation, c'est-à-dire avoir des relations avec l'artiste, avec sa femme. C'est pas la même chose que de travailler avec un artiste vivant et que de travailler avec des artistes qui sont morts. Si vous mettez Delacroix et Ingres sur le même mur dans un musée, vous allez le faire. Mais dans la vraie vie, ils n'auraient jamais exposé ensemble. Donc vous voyez déjà la différence. Et puis ça veut dire qu'il faut recueillir la vie de l'artiste, ça veut dire qu'il faut travailler avec lui, il faut partager les points de vue, c'est un travail qui est tressé en fait entre l'artiste, sa femme, nous l'équipe du musée, les architectes très importants, les architectes de RCR, et puis l'équipe technique de l'agglomération pour arriver à faire ce musée. Et on fait ce musée pour les œuvres de Pierre Soulages. Pour mettre en valeur son travail, mais pour les gens, pour les braves gens qui vont avoir envie de visiter ce musée. Si vous n'êtes pas de visiteurs dans un musée, les œuvres, elles ont besoin de vivre avec le regard des visiteurs.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous fait venir alors ? Qu'est-ce qui fait que vous signez pour l'aventure ?

  • Speaker #2

    Ce que je signe pour l'aventure, parce que d'abord, je ne connaissais pas Pierre Soulages, mais je connaissais son œuvre et qui m'intéressait, mais comme d'autres artistes. Et puis je me suis dit, c'est une occasion formidable de travailler avec un artiste qui touche sur le XXe et le XXIe siècle. C'est mon domaine qui me passionne. C'est aussi une expérience qui n'est pas simple, parce que ce n'est pas un long fleuve tranquille de travailler avec un artiste en activité. éclairer les oeuvres, les accrocher, faire des choix, faire des choix d'expo. Mais moi j'aime bien quand ça bouge. Et quand on suscite, je dirais, à la fois l'intérêt de l'artiste avec qui on travaille et du public. Et à la fois, évidemment, très naturellement, c'est monter une amitié professionnelle avec Pierre Soulages. On a eu l'honneur de travailler ensemble et puis une amitié tout court entre Pierre, Colette et moi. Et puis il y a un certain nombre de gens de l'équipe. La plupart des gens de l'équipe du musée Soulages sont des gens qui connaissaient bien Pierre Soulages, qui connaissent bien Colette et on est un peu une famille. Et donc c'est une chance absolument inouïe. Moi je trouve ça très bien. Et moi je suis resté là pendant 15 ans, ça fait 15 ans que je suis là. J'ai été sollicité plusieurs fois pour travailler dans les gros musées de province. voire dans des gros musées privés à Paris. Mais moi, j'ai accepté, je n'ai même pas donné suite, parce que je pense que c'est très important d'avoir une fidélité auprès de l'artiste et maintenant auprès de sa femme. Et croyez-moi, quand on donne de soi, quand on donne, je dirais, un peu de ce qu'on est, tout simplement, eh bien, on en est récompensé dans sa tête. Le plaisir, c'est de se dire, qu'est-ce que j'ai fait de bien ? Quelles ont été mes relations avec cet artiste ? Qu'est-ce qui lui a fait plaisir ? Pierre, il n'est plus là, mais il est toujours là. C'est-à-dire que tous les gens qui ont travaillé avec lui savent très bien que, Pierre Soulages, quand on monte une exposition avec ses œuvres, On sait d'avance ce qu'il veut, ce qu'il veut pas. C'est même peut-être, je dirais, même encore plus présent que quand il était vivant. parce qu'on sait comment il fonctionne. On n'est peut-être plus beaucoup, finalement, en France, à avoir monté, en présence de Pierre Soulages, des expositions. Et quelque chose qui me plaisait aussi dans cette aventure, c'était de partir ex nihilo, faire quelque chose à partir de zéro. Partir de zéro, c'est-à-dire un conservateur qui arrive, une secrétaire à un quart de temps, c'était ça au début, à mi-temps, ensuite, et puis créer une équipe où on est à peu près, maintenant, bon an, mal an, entre 35 et 40. Mais la force du musée... Parce qu'il ne faut pas se cacher, on est quand même dans une petite commune, modeste. La force du musée, c'est aussi, je dirais, l'enthousiasme de l'équipe et puis sa cohésion. Et ça, c'est ce que j'aime, moi. J'aime bien les choses qui sont incarnées.

  • Speaker #0

    Vous parlez de Rodez, une petite ville, mais il y avait aussi un grand scepticisme avant.

  • Speaker #2

    Bien sûr, mais je ne connais personne qui veut qu'on construise un musée dans sa ville. Pourquoi ? Parce que ça coûte trop cher, parce que ce n'est pas pour moi, parce que ça coûte trop cher. Il faudrait mieux mettre de l'argent, je ne sais pas, pour autre chose. Sauf qu'en fait la culture c'est quelque chose qui... C'est pas une espèce sonnante et trébuchante la culture, c'est aussi quelque chose qui est un peu immanent, c'est quelque chose qui apporte de l'émotion, de la joie de vivre, de la satisfaction de soi-même. Donc quand on a créé le musée... qu'on a fait nécessaire pour faire beaucoup de conférences. J'allais des fois dans des conseils municipaux à 10h du soir pour leur faire une conférence, pour leur expliquer que Soulages c'était bien. Je pouvais accepter qu'on me dise que c'était pas bien, mais par contre je pouvais pas accepter qu'on me dise que c'était n'importe quoi. On peut jamais dire à quelqu'un que ce qu'il fait c'est n'importe quoi. Parce que ça va, je dirais, des activités humaines les plus intimes aux activités du travail. Chacun fait un travail qui est important. Si vous voulez, ça fait quand même presque une quarantaine d'années que je fais ce travail. Donc, je pense que comme dans la vie, si on résout, je dirais, les choix, l'émotion à j'aime ou j'aime pas, c'est triste.

  • Speaker #3

    C'est pas moi.

  • Speaker #1

    Là où j'étais, personne.

  • Speaker #3

    Tu vois, là, je suis très relaxé. On a montré. Ouais.

  • Speaker #1

    On tourne sur tous les postes. En général, on est soit en salle, soit au contact accès hall. Donc, on accueille les visiteurs. On peut être aussi à la caisse. Du coup, on encaisse les visiteurs, que ce soit pour la partie boutique ou la partie billetterie. Donc, oui, les salles, le contact accès et après, c'est vraiment de l'encaissement. On est un peu sur tous les postes. sur tous les postes.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire que chaque jour,

  • Speaker #1

    vous passez sur tous les postes. Ça veut dire que parfois, on peut avoir une journée entière où on ne fait que de l'accueil, même en plein été, en fonction du dispo et tout ça. Et parfois, c'est dispatché, on peut avoir deux heures de salle d'affilée comme on peut avoir, ça peut être vraiment une heure de salle, une heure d'accueil, on n'a pas vraiment de planning, on fait en fonction des besoins et tout ça. Moi, être à l'accueil. Moi, j'aime bien être à l'accueil pour le côté boutique, le côté contact, le fait de parler avec les visiteurs. Après l'été, on n'a pas trop le temps de parler, en plein été, sur la période du 15 juillet au 15 août. parce que c'est assez intense. Donc là, ça fait plutôt rentrer les visiteurs. Mais sinon, après, il y a vraiment le contact en boutique. Dans les salles, on peut l'avoir aussi parce que les gens viennent nous poser des questions, s'arrêtent pour discuter avec nous, pour avoir des informations. Mais bon, j'aime bien ce poste-là. Voilà. Ça fait longtemps que vous travaillez en business ? Là, ça va faire trois ans au mois de mai. Trois ans au mois de mai. Ouais. Merci. Bonjour. Allô. Et voilà, on se voit ensuite. Oui, vous devez l'avoir sous votre billet. Regardez, c'est là. Vous l'avez là. Merci.

  • Speaker #3

    Merci bien.

  • Speaker #1

    Vous avez l'accès aux salles en bas et vous avez également l'exposition sur PirateBlock.

  • Speaker #2

    Toi.

  • Speaker #0

    Impossible.

  • Speaker #2

    Casier ? Impossible de me faire le casier.

  • Speaker #3

    Je me suis foutue.

  • Speaker #2

    J'arrive.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez m'expliquer aujourd'hui quel est votre rôle dans le musée ? Comment vous définissez votre métier ?

  • Speaker #2

    Alors d'abord je définirais mon métier comme quelque chose qui me passionne. Je pense que si je n'avais pas fait ce métier, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Peut-être voler des mobilettes, je ne sais pas. Mais en tout cas, ça me passionne et le métier, si je devais dire, c'est à la fois transmettre et conserver. Donc transmettre, c'est par les expositions qu'on crée, par les bouquins qu'on écrit, par le travail qu'on fait pour présenter telle ou telle chose. Et ça, c'est transmettre et partager. Et puis conserver... C'est qu'au fond, Pierre et Colette Soulages ont donné des œuvres de Pierre Soulages. On est dans un musée immunographique ici. Nous, on doit conserver très proprement ces œuvres-là, continuer à les étudier. Ça fait partie aussi, quelque part, de la conservation et de la transmission, les deux à la fois. Et que la personne qui arrivera après nous récupère les œuvres dans le même état. que quand nous on les a eus. Donc on est très sensible à ça. Après, la vie du musée c'est extrêmement large. Le conservateur de musée, c'est pas le vieux machin qui est assis derrière un bureau avec des piles de bouquins. Ça c'était il y a 50 ans. Le conservateur de musée c'est quelqu'un qui tire une équipe avec lui, qui entraîne son équipe. C'est une sorte de petit capitaine si on veut. Et c'est quelqu'un qui essaye aussi de transmettre sa passion aux gens avec qui il travaille. Moi j'ai la chance d'avoir une équipe ici tout à fait formidable, des gens qui sont plein de vie, plein d'idées, je trouve ça tout à fait passionnant. Donc c'est ça. Puis il y a une chose aussi à laquelle j'accorde beaucoup d'importance, c'est l'éducation et la médiation. Je crois qu'une bonne médiation, si les gens sont mal à l'aise par rapport à telle ou telle œuvre ou telle ou telle salle par exemple, je crois que c'est bien qu'il y ait quelqu'un qui les prenne comme à la veillée. et un guide conférencier, un médiateur, eh bien, le médiateur, il mène sa visite, je dirais un peu comme le chauffeur de bus. On dit du chauffeur de bus qu'il est le seul maître à Dieu, à bord, après Dieu. Mais c'est pareil. Chacun a sa manière différente de mener les gens, à les emmener vers la connaissance. Et comme je suis un ancien prof, j'aime bien que dans un musée, on puisse... Apprendre quelque chose, je trouve pas ça déplaisant, le côté pédagogique du musée. C'est quelque chose qui m'intéresse. Si je sors de quelque chose, de quelque endroit où je me rends, moi à titre personnel, en tant qu'être humain, j'aime bien retirer quelque chose de l'endroit où je suis allé. Voilà, donc ça, ça me paraît important. Mais vous savez, le rôle d'un conservateur de musée, c'est une sorte d'homme orchestre. Donc, il y a plein de choses possibles.

  • Speaker #0

    Justement, il y a...

  • Speaker #2

    C'est beaucoup de gestion, bien sûr, aussi. Évidemment, la gestion financière, la gestion du personnel, qui est important. Un personnel satisfait, c'est un personnel qui a envie de travailler avec vous, avec qui on fait des choses. Et un musée qui est bien géré, puisque nous, on est un établissement public, c'est-à-dire qu'on est à peu près à 65% d'autofinancement. C'est-à-dire que pour 10 euros qui rentrent au musée, il y a 6,5 euros qui sont gagnés par nous. C'est aussi très très important que chacun comprenne que le visiteur participe, exactement comme le spectateur qui va assister à un film, qui va au cinéma, le cinéphile, il participe à la réalisation des films. Donc s'il réalise quelque chose, une belle action, qui permet de participer à la vie du musée.

  • Speaker #0

    Peut-être de manière un tout petit peu moins pragmatique, mais il y a un fantasme autour de la vie secrète des musées, de ce qui se passe une fois qu'on ferme les portes au public. Comment vous la définiriez, vous, cette ambiance dont vous parliez de cette vie muséale ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'ai une expérience, justement, j'en parlais tout à l'heure, pendant le Covid, on a accueilli ici une œuvre du musée du Louvre, le Prince de Goudéa, qui est une statue qui a 4000 ans, qui est une statue mésopotamienne, et donc, comme le musée ne pouvait pas se visiter, moi... J'étais tous les jours au musée et je me trouvais tout seul avec cette œuvre en conversation. Alors c'est vrai qu'une œuvre d'art, c'est l'œuvre d'art. C'est le rapport que vous avez à l'œuvre d'art. L'œuvre d'art, elle vous est abandonnée par le peintre, qui normalement n'a pas son mot à dire une fois qu'il l'a vendue au musée, ou donnée. Ensuite, il y a l'œuvre d'art qui vit de sa propre vie. Donc, vous êtes en présence de l'œuvre, donc l'œuvre est une présence. Et vous, comment vous fonctionnez ? Est-ce que vous avez bien mangé le matin ? Est-ce que vous avez écouté de la musique ? Est-ce que ceci, ce que cela ? Chacun avec sa propre vie et sa propre histoire. Donc moi j'ai tendance à penser que bon, être seul dans un musée c'est d'avoir une certaine tranquillité. Je reste absolument persuadé que le contact des œuvres, c'est une chance justement d'un conservateur de musée qui peut justement lui avoir cette... s'il veut il peut avoir toute l'attitude pour être seul au milieu des œuvres. Moi je plains mes collègues qui ne descendent pas dans leur musée une fois par jour. Vous pouvez demander aux collègues conservateurs de musées s'ils vont visiter leur musée une fois par jour. Moi, je m'efforce pratiquement, je dirais à 95%, une fois par jour, je visite le musée. Pour voir justement si les œuvres se portent bien, si elles n'ont pas besoin de me dire quelque chose, s'il y a quelque chose qui m'a échappé, que je n'ai pas vu, quelque chose où je me dis, tiens, ça, ça pourrait être mieux, ça, ça pourrait être ceci, ça pourrait être cela.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui continue à vous émerveiller dans les œuvres de soulage que vous avez ? Tous les jours sous les yeux ?

  • Speaker #2

    Les œuvres de Soulages ou les autres œuvres d'autres artistes, ce qui m'émerveille c'est de voir qu'à chaque fois que je la vois, il y a quelque chose que je n'ai pas vu, il y a quelque chose que je n'ai pas ressenti. Parfois je me suis rendu compte que je n'ai pas regardé. Parce que regarder c'est... des fois vous regardez mais vous ne regardez pas. C'est comme les gens, des fois vous les regardez mal, vous ne les regardez pas. Une oeuvre, il faut la considérer, il faut la regarder, il faut la fréquenter. Et donc on trouve toujours des détails, des choses qui... Et puis il y a cette émotion, et l'émotion c'est quelque chose qui ne se contient pas, c'est quelque chose qui ne se définit pas, et c'est quelque chose qui fait beaucoup... Tant vie et beaucoup de plaisir. On n'a pas besoin de lire 15 dictionnaires pour regarder une œuvre d'art. Je pense que ses propres émotions, le laisser aller, en fait, ça suffit. Moi, je dis toujours aux gens, c'est pas grave si vous ne connaissez pas, si vous n'êtes pas capable d'analyser telle ou telle œuvre d'art, si vous n'êtes pas capable de la mettre sur une échelle de valeur ou même sur une échelle de temps. Ce qui est important, c'est le plaisir que vous retenez. Il y a des gens qui peuvent se satisfaire de 20 minutes de visite de musée, il y a des gens qui en ont besoin de 3 heures. Là j'ai quitté un ami, il a visité le musée ce matin, il est retourné dans le musée pour voir des choses qu'il n'a pas vues. Donc voilà, et ça c'est gratuit. Je ne prêche pas que pour le musée Soulages, je prêche pour tous les musées. Un musée avec des œuvres figuratives, c'est certainement aussi complexe à appréhender maintenant pour un public du XXIe siècle que des salles avec des œuvres abstraites comme par exemple Soulages ou Kandinsky.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous travaillez les expositions temporaires justement ? Vous parliez là des œuvres des autres artistes que vous fréquentez aussi.

  • Speaker #2

    Moi je pense qu'il faut de la maturation. Déjà ça veut dire qu'il faut y réfléchir longuement à l'avance, savoir ce qu'on veut faire et se sentir prêt. Je pense que c'est un peu comme en amour. À un moment donné il faut se sentir prêt. Et même si l'amour c'est de la passion. Ce que je veux dire, c'est que quand je choisis une exposition, je réfléchis avec pas mal de choses. D'abord, je réfléchis pourquoi le faire. Donc, je dois pouvoir m'expliquer pourquoi j'ai envie de le faire et pourquoi j'ai envie de le faire au Musée Soulages. Par exemple, si on a fait Fernand Léger, tout le monde aime faire Fernand Léger, mais Pierre Soulages aimait bien Fernand Léger. Là, on va faire Lucio Fontana. Lucio Fontana, c'est un artiste que Pierre aime beaucoup. Donc, il y a ça. La deuxième chose, il y a le côté un petit peu stratégique, c'est-à-dire, pourquoi faire une exposition si cette même exposition a été faite il y a trois ans, à 100 kilomètres d'ici ? Donc, nous, on est dans une obligation de proposer des choses qui soient assez exceptionnelles. Et la troisième chose qui est importante... on n'a jamais de mal à se faire du bien ouais non

  • Speaker #3

    On a l'utilisation de plusieurs rouges, comme tout à l'heure, avec la préparation de l'arbre, la toile, la couche en verre ménière, ici qui va être le rouge, et le noir pour le plus épais, qui est rajouté par un fumier qui va être raclé. Vous savez, on a dit que la peinture était entaillée par un roi. Et alors, ce que je ne vous ai pas montré tout à l'heure, ce sont les outils utilisés par Soulages, qui ne sont pas franchement des outils d'artistes, mais ils sont des outils de peintres en bâtiment, même de maçons, on va dire.

  • Speaker #2

    Hop,

  • Speaker #3

    je vais vous montrer. dans des formats assez grands, mais ils ont aussi... Voilà. on retrouve les rives là, et là c'est une cordage chez les passants que vous utilisez si vous regardez vous avez des manteaux pour les joints de carrelage etc. donc là les outils plutôt rigides, là en métal on a des outils de peinture en bâtiment avec les spalters vous savez qui sont les pinceaux spalters avec ici les brosses, alors on dit plusieurs noms, les brosses à badigeons, les brosses à rochampire aussi je crois que Justin nous a parlé de l'écolage, il appelle ça des brosses à rochampire on se rend pas compte c'est presque la taille d'un visage humain ça est le diamètre est un peu toxique alors on voit aussi après soulage customisé les outils de ménage fabriquer des outils à partir de ce qu'il a sous la main donc là vous voyez cet emballé qui a été enveloppé dans de la mousse Vous avez, voilà, le métier, si les maris, c'est ça qu'on appelle ceci, c'est à racler les garnitures. Les maris, c'est ce que j'ai sur les mains de l'envoi, nous permettent, donc, pareil, de racler la matière, d'étaler la matière.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que vous avez appris de lui, vous ?

  • Speaker #2

    Soulages ? Oui. Alors moi, j'ai appris de Soulages que tout doit être dans le... Tout doit être dans le... quelque chose d'assez parfait dans le sens où tout est dans le détail. C'est-à-dire que quand on fait quelque chose, on parle de la pensée, on a pensé, la réalisation, et qu'on doit mener les choses toujours de la manière la plus parfaite possible, de manière à ce qu'une fois qu'on a terminé, si on prend un verre, on se dit on a fait le mieux qu'on pouvait faire. Ça, j'ai appris ça. Puis ce que j'ai appris de lui aussi, c'est beaucoup... C'est un homme qui a commencé à travailler avec d'autres artistes en 46, donc moi j'ai... beaucoup écouté Soulages sur ses relations avec des artistes qui maintenant ça passe à Paris-Mathusalem quoi, je sais pas moi par exemple Nicolas De Stael, Poliakoff, vous voyez ce que je veux dire, c'est formidable et puis moi j'ai appris aussi que les grands artistes Les personnalités très fortes, c'est celles qui doutent. Ceux qui ne doutent jamais, c'est des imbéciles. Dans tous les domaines, du reste. J'ai visité son atelier très souvent, et un homme comme ça, qui avait fait des centaines d'expositions, et qui avait exposé sur tous les continents, même à 100 ans, quand il montrait une œuvre, il attendait un avis. Quand quelqu'un a la certitude qu'il sait et qu'il sait surtout ce que doivent penser les autres et ce qu'on doit faire pour les autres, alors là, c'est toujours la porte ouverte, je pense, aux dérives. Moi je plains les gens qui ne s'intéressent à rien. J'ai toujours été surpris par les gens qui n'écoutent pas de musique. Par exemple, ça c'est un truc que je n'arrive pas à comprendre. Le musée c'est quand même une école de tolérance, une école de curiosité. Si ça ne sert pas à ça, je ne vois pas à quoi ça peut servir. Mais il ne faut pas non plus passer tout son temps à se dire ça sert à quoi.

  • Speaker #0

    Vous parliez de Soulages depuis qu'il est décédé. Le fait qu'il est presque d'autant plus présent dans les choix que vous faites, en tout cas dans votre esprit. Comment on fait pour lui survivre ?

  • Speaker #2

    survit tous d'abord on termine on survit tous d'abord on termine tous au cimetière on n'amène rien au cimetière pas ses richesses, pas ses tableaux, pas son fric pas ses disques, pas ses livres donc un jour où les gens les livres, ils ne vivent que du regard des gens, si vous avez une bibliothèque et que personne ne lit les bouquins que vous avez, autant les donner vos livres, donc moi je crois qu'on survit très bien on vit tout simplement quand Soulea je me disais il avait 102 ans, il disait qu'il en avait plus devant lui que derrière lui. Moi, ça me faisait marrer, quoi. Ça me faisait marrer. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que Pierre, ce qui l'intéressait, quand on lui a demandé le mot qu'il préférait dans la langue française, il disait encore Donc, ça veut dire que c'était quelqu'un qui avait une fringale de faire des choses, d'inventer des choses. C'était ça qui le passionnait, en fait, Pierre Soulages. C'était toujours faire des choses nouvelles. Et ça, ça n'a pas de prix. ...a sa vision de, comment dire, métaphysique. Moi, je pense qu'on survit très bien à tout et à tout le monde. Par contre, ou on devrait dire en revanche, en revanche, je pense que les œuvres d'art, et chez Pierre Soulages, survivent. Si Pierre Soulages... Ils n'ont pas eu d'enfant, Pierre Collet-Soulages. Je suis totalement persuadé que le succès d'année, en quelque sorte, même si ce terme n'est pas bien approprié, disons que le transfert, c'est le musée. Le musée, c'est peut-être ce qui incarne le plus Pierre Soulages. Le musée, dans un endroit qu'il a bien connu, à quelques centaines de mètres de sa maison, dans une ville qu'il a bien connue, dans un département qu'il a bien connu, dans des paysages qu'il a bien connus. Donc tout ça, c'est quand même très intéressant, c'est concentrique.

  • Speaker #0

    Et vous, vous vous sentez le messager de ça ?

  • Speaker #2

    Moi je me sens moi-même, avec l'équipe on a un message de transmission, donc on le fait, et si on l'a réussi on est content. Si nous on voit des gens, moi je vois l'équipe de médiation, des fois ils me racontent, ils ont abordé tel ou tel public, et qu'ils ont intéressé un public qui à première vue était compliqué, on est content. Je veux dire, vous savez, moi j'étais enseignant dans ma vie, dans une vie antérieure, j'étais trois ans professeur de français, de latin, d'histoire géo, un peu de tout, et on est content. Quand on a laissé quelque chose chez les gens, après il ne faut pas se leurrer, on ne laisse pas chez un gamin du CP, si vous lui laissez deux choses, c'est déjà formidable. Mais si on laisse quelque chose aux gens et qu'ils ont le sentiment en sortant que ce n'est pas n'importe quoi, que c'est bien, qu'ils ont vraiment ressenti une émotion, moi ça suffit à mon bonheur. Je n'ai pas besoin qu'on me l'écrive et qu'on me fasse une dissertation philosophique sur ça. Je pense qu'il faut voir les choses simplement. Il y a des choses qui peuvent être envisagées avec beaucoup de livres, de connaissances et de choses comme ça, ce qui est notre travail. Mais notre travail, c'est de faire de tout ça quelque chose qui est tout à fait acceptable pour des gens qui veulent entendre. Qui veulent entendre. C'est très important.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il vous restait encore des choses à découvrir de Soulages et de son travail ?

  • Speaker #2

    J'en découvre tous les jours. Je découvre des choses tous les jours, je découvre des choses qui, puisque là on est en train de travailler sur les archives, c'est des choses qui sont peut-être secondaires pour le grand public, mais qui pour nous sont intéressantes. On découvre des choses qu'il a écrites, qu'il a dites, qu'on ne savait pas, et on se dit, mais tiens, ça, c'est important, on va refaire quelque chose. Et puis de ça, pof, on va faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Vous avez toujours cru au succès du musée ?

  • Speaker #2

    Oui. De toute façon, on ne se pose pas la question. C'est-à-dire qu'en réalité, d'abord, je ne suis pas propriétaire du musée, déjà pour commencer. Personne n'est propriétaire d'un musée ou des œuvres d'un musée. Comme je le dis, c'est les spectateurs, les regardeurs qui sont propriétaires des œuvres. Moi, j'ai toujours pensé qu'au fond, il fallait faire le travail nécessaire pour intéresser les gens à l'œuvre de Soulages. Mais déjà, il y avait cette grande exposition de 2009 qui était quand même super importante, qui a fait connaître l'œuvre de Pierre Soulages. Nous on avait simplement à mettre en scène, à un peu scénariser, à animer l'oeuvre de Pierre Soulages pour que ça intéresse les gens. Et c'est jamais se décourager en disant ma fille peut faire la même chose, mon fils fait la même chose, ça veut rien dire, c'est tout noir. Vous aurez toujours des gens qui vont vous dire ça, il y a toujours des gens qui vont vous dire que je sais pas moi que Frank Zappa c'est de la mauvaise musique ou que le rock'n'roll c'est une musique de voyous. Je veux dire, c'est pas plus une musique de voyous que, je sais pas, la peinture de Caravage, qui lui, Caravage, vivait, était un mauvais garçon, vivait dans les quartiers un peu chauds de Naples. Vous voyez ce que je veux dire ? Il faut tout remettre en perspective. Donc moi, pas de soucis avec ça. Donc j'y ai toujours cru, bien sûr. Après, un musée, c'est comme un vélo. Si vous arrêtez de pédaler, vous tombez.

  • Speaker #0

    Quelle place il a trouvée dans le paysage muséal français ?

  • Speaker #2

    Musée Soulages ? Il a trouvé, je pense, une place comme un musée monographique, mais qui est quand même très original, de par l'immersion des œuvres. Et ça, c'est le fait des architectes d'ERCR, dans des sortes de cabines de métal, où on a... On a travaillé avec Pierre Soulages pour mettre ça au point, et avec les architectes, parce que Soulages ne voulait pas vraiment de scénographie, il voulait comme un accrochage qui ne s'arrête jamais. C'est formidable un accrochage qui ne s'arrête jamais. Quelque chose qui ne s'arrête jamais, c'est le mouvement perpétuel. Donc c'est une sorte de mouvement perpétuel, que nous on change toujours les accrochages dans le musée, c'est ce que voulait Pierre, et en plus il voulait une salle d'exposition temporaire. pour exposer d'autres artistes que lui. Pour pas qu'il soit dit, c'est Pierre Soulages, Isclairosa mort, ce vieux-là, ce musée, il est que pour lui, il est que pour personne d'autre. Alors nous, ici, on a exposé Yves Klein, Fernand Léger, Pablo Picasso, Le Corbusier, beaucoup de femmes. On va exposer beaucoup de femmes aussi en 2025. Voilà, donc c'est à tout le monde, je dirais. Pierre Soulages, quand on interrogeait sur le noir, parce que j'ai un tel, tel artiste, il a acheté un noir industriel, il a acheté le brevet, c'est le fameux Vantoblack, c'est, comment il s'appelle, c'est à Lichkapour. Et je demande à Soulages, et Soulages me dit, mais vous savez, le noir appartient à tout le monde. Alors le noir appartient à tout le monde et le noir ça veut dire plein de choses. C'est pas uniquement, quand on parle de la peinture de Pierre Soulages, quelque chose qui est dramatique. La peinture de Soulages c'est pas une peinture de cimetière. C'est que le noir c'est un vocabulaire, c'est une sorte de... C'est la classe quoi, tout simplement, quand on est bien habillé, quand on a une belle livrée, c'est ça le noir. C'est une sorte de sobriété. Et c'est ça qui, à mon sens, est important. C'est ça qui est important pour... pour parler de Pierre Soulages. On parlait des gens de la réception de l'œuvre de Pierre Soulages, je pensais que parce qu'il peignait en noir, c'était monochrome, ce qui n'est pas le cas. Ce sont des noirs très variés, travaillés avec beaucoup d'outils, et que d'autre part, le noir, on ne précipite pas les gens dans une mine. On voit très bien que le noir porte la lumière, dans cette lumière il y a des couleurs, il y a une grande variété dans tout ça. Et puis, ça fait toujours appel, comme la musique, ça fait toujours appel à l'émotion.

  • Speaker #0

    Si on se revoit dans 10 ans, qu'est-ce que vous espérez pouvoir me dire du musée dans 10 ans ?

  • Speaker #2

    J'en sais rien, je sais pas. Moi je dirais simplement que chacun aura fait son travail, et que ce qui compte c'est pas tellement les gens qui ont travaillé, c'est la mission qu'on s'est donnée, et le résultat qu'on a obtenu, et on verra le résultat du musée dans la fréquentation du musée bien sûr, mais dans le plaisir que les gens auront visité le musée. Personne n'est propriétaire des œuvres de Pierre Soulages. Je veux dire, c'est clair, je veux dire, Rodèze est connu mondialement maintenant grâce au musée Soulages. Je pense quand même que le musée a apporté quand même beaucoup de fréquentation sur la ville de Rodèze. C'est l'artiste lui-même qui fait que ça marche. C'est pas Decron, c'est pas les organisateurs des musées, c'est pas les cadres. Nous, on est là pour mettre en valeur l'œuvre d'un artiste et faire que non seulement ça plaise aux gens, mais qu'il s'y retrouve bien. Si quelqu'un dit, moi je reste dans le musée parce que j'ai envie d'y dormir, ou j'ai envie, je sais pas, d'y faire un peu de yoga, ou de lire un livre, ou même pourquoi pas faire du sumo, pourquoi pas, je veux dire, tout reste ouvert. Ça vous va ?

  • Speaker #0

    Oui, vous avez donné plein d'idées.

  • Speaker #2

    Bon.

  • Speaker #0

    On va vous proposer de faire du sumo. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Je vous en prie.

  • Speaker #0

    Ainsi s'achève ce troisième et dernier épisode de la série de Finta, consacré aux dix ans du musée Soulages de Rodez, en coulisses avec celles et ceux qui incarnent cette antre de l'outre-noir. J'espère qu'elle vous a plu. Je suis toujours curieuse d'avoir vos retours et de vous lire. Si vous appréciez Finta, parlez-en autour de vous, partagez les épisodes, c'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à ce travail indépendant. Finta est disponible gratuitement sur toutes les plateformes de podcast. Vous pouvez l'écouter sur Deezer, Spotify, Apple Podcast, Google Podcast. Vous pouvez aussi retrouver tous les épisodes ainsi que les ressources bibliographiques sur fintapodcast.fr. Et pour suivre Finta au quotidien, c'est sur Facebook et Instagram que l'on se retrouve. Merci de votre fidélité et à très bientôt.

Description

Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les halls Charles, le foirail, le jardin public cerné de son petit mur de pierres. C’était le Rodez d’avant, avant le musée Soulages. A cette époque-là, le pari soulevait plus de scepticisme que d’enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de corten qui sortent de terre pour s’adosser au jardin. Suivra l’inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C’était en 2014, il y a 10 ans. A chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective.


D’ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonne. Précieux gardiens de l’âme de Pierre Soulages, qu’ils ont tous côtoyé et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leurs côtés dans l’ombre des Outrenoirs, pour une série de Finta ! en trois épisodes consacrés aux 10 ans du musée Soulages.


EPISODE 3/3... avec Benoît Decron


La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu’il semble capable de se fondre dans l’esprit de l’artiste disparu, de penser comme il l’aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. A la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public.


Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste iconique de son vivant, à partir d’une feuille blanche dans une ville qu’il ne connaissait pas, Benoît Decron est aujourd’hui l’un des plus fins connaisseurs de l’œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. De son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d’orchestre : nous en parlons au micro de Finta ! Je le rencontre dans l’entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.


🎧 Pour réécouter l'épisode 1/2 avec Amandine Meunier, responsable des collections : c'est ici.

🎧 Et l'épisode 2/3 avec Christel Lagarrigue, dans l'atelier, c'est là.


🧡 Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les Halles Charles, le foireil, le jardin public cernés de son petit mur de pierre. C'était le Rodès d'avant. Avant, le musée Soulages. À cette époque-là, le Paris soulevait plus de scepticisme que d'enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de cortènes qui sortent de terre pour s'adosser au jardin. Suivra l'inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C'était en 2014, il y a dix ans. À chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective. D'ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonnent. Précieux gardiens de l'âme de Pierre Soulages qu'ils ont tous côtoyés et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leur côté, dans l'ombre des Outres-Noirs, pour une série de trois épisodes de Finta consacrés aux dix ans du musée Soulages. La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu'il semble capable de se fondre dans l'esprit de l'artiste disparu, de penser comme il l'aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. À la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public. Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste conique de son vivant, à partir d'une feuille blanche dans une ville qu'il ne connaissait pas, Benoît de Cron est aujourd'hui l'un des plus fins connaisseurs de l'œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. de son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d'orchestre, nous en parlons dans cet épisode au micro de Finta. Je le rencontre dans l'entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.

  • Speaker #1

    Je peux avoir un code postal, s'il vous plaît ? Le mien c'est de 1854 parce que j'habite à Ounel-Château. C'est celui de votre famille ?

  • Speaker #2

    Le tien,

  • Speaker #1

    Côte d'Azcad. 17 000.

  • Speaker #3

    Ah voilà.

  • Speaker #1

    Comme vous le savez sûrement, l'objet vous donne accès au musée de la ville. Le musée Fionnail, le musée de Mille-Fèches, pendant 28 jours. Les billets seront juste à faire à la vague.

  • Speaker #2

    Moi, l'ambiance que je voudrais, d'abord, je pense que le musée est immersif, parce que c'est quand même une expérience unique au monde que de rentrer dans le musée Soulages et se retrouver dans une salle qui est un petit peu enterrée et qui est sombre, avec du métal sur le sol et du métal sur le mur. Moi, ce que je voudrais que les gens ressentent, c'est et pourquoi pas moi ? Je m'appelle Benoît Decron, je suis né en 1959 à Niort, et je suis donc conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée Soulages. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est l'exposition permanente. On a juste la phase 5 et la phase 7 qui en ce moment sont en cours de rapprochage, donc il y aura un peu moins de commentaires à ce moment-là. Lorsque vous voyez ce pictogramme-là, il y aura un numéro en dessous. Vous saisissez le numéro sur le clavier, vous vous mettez à l'oreille. Si toutefois ça ne se lance pas, vous rappuyez sur Play. Moins et plus pour monter ou baisser le son, et Pause pour faire pause sur le commentaire. Donc c'est simple que ça.

  • Speaker #3

    Super. Merci. Soyez bienvenus.

  • Speaker #4

    Merci.

  • Speaker #2

    Ce que je trouve intéressant dans un musée, c'est d'intéresser les gens. Et je pense qu'il est beaucoup plus gratifiant d'aller chercher des gens qui n'y connaissent rien que d'essayer de satisfaire des gens qui croient tout connaître. Donc c'est ça qui m'intéresse dans le musée. Moi j'aime bien aller quelque part, dans un domaine que je connais mal ou peu, et que des gens me donnent envie de visiter. Voilà ce que je pourrais dire, ce que je souhaite que les gens... ressentent quand ils arrivent au musée. Et peut-être qu'il y a une deuxième chose aussi qui est importante, c'est que... Ça leur appartient. C'est-à-dire qu'en réalité, ce qu'il y a dans les musées, c'est fait pour que les gens les admirent, les regardent, les fréquentent. Et que, évidemment que ça appartient, qu'il y a un musée, une collectivité, un collectionneur, etc. Mais au fond, ce qu'on a dans les yeux... C'est quand même quelque chose qui nous appartient. Donc c'est pour ça que je dis que les œuvres, qui sont le miroir en quelque sorte de ce que les gens voient lors de leur pérégrination, eh bien ça leur appartient. Voilà ce que je pourrais dire. Moi je voudrais que les choses soient vraiment envisagées de la manière la plus simple possible.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez une anecdote là, depuis dix ans, un souvenir d'un visiteur en particulier, une remarque, quelque chose que vous avez entendu et qui vous fait dire que cet objectif-là, il est réussi ?

  • Speaker #2

    Bah, j'ai pas d'anecdote particulière, sauf peut-être une personne, une fois, qui est arrivée le matin à dix heures, et puis qui est repartie dix-huit heures. Elle était avec son livre, je pense qu'elle a eu tout le temps de lire son livre. Moi, ça me dérange pas que les gens... Fasse un stationnement extrêmement long, un peu ventouse, à l'intérieur du musée, parce que s'ils considèrent que le musée est un lieu à part, avec une certaine tranquillité, il faut qu'ils en profitent. Donc moi, c'est peut-être ce genre de souvenir. Et puis si, peut-être, j'ai le souvenir aussi d'avoir fait une visite, il y a assez longtemps, pour des gens non voyants. Et alors c'est intéressant de parler de noir, d'œuvre noire, à des gens qui sont non-voyants. Parce que le noir c'est aussi extrêmement large, le noir, du moins la vision du noir, ou ce qu'on peut imaginer du noir entre le psychologique, le visuel, l'optique, tout ce qu'on veut. Voilà, c'est ça, j'ai un sacré souvenir, parce qu'expliquer du noir à des gens qui ne voient pas, mais que les aveugles ne voient pas du noir, les aveugles voient de la lumière, les aveugles voient à leur manière des couleurs, des scintillements, je crois que c'est aussi quelque chose qui, à mon avis, est significatif. Avant de venir ici à Rodez, j'ai obtenu le concours de l'école du patrimoine. Ensuite, j'ai pris un premier poste à Langres pendant huit ans, où je gérais un musée de beaux-arts. Et puis ensuite, j'ai géré un musée d'art contemporain, moderne et contemporain, au Sable d'Olonne pendant 13 ans. Et ça fait 15 ans ici que je suis à Rodez. Je suis venu pour construire le musée et je suis venu surtout pour travailler avec Pierre Soulages. Parce que c'est une expérience hors normes que de travailler avec un artiste en activité. Donc... Je crois que j'ai eu cette chance inouïe d'être un peu plongé dans le creuset avec l'artiste, sa femme, Colette et toute l'équipe du reste. On a eu une chance formidable de travailler avec Pierre. Je n'ai jamais senti chez Pierre Soulages un quelconque affaiblissement lié à l'âge, par exemple. Jamais, jamais. Je pense que le musée Soulages m'a appris à comprendre que l'âge n'a rien à voir avec les artères. parce que l'âge c'est quelque chose qui est dans la tête il y a des gens qui peuvent avoir 25 ans qui peuvent être infiniment vieux et il y a des gens comme Pierre Soulages au delà de 100 ans qui ont une vista absolument incroyable C'est aussi une question de relation, c'est-à-dire avoir des relations avec l'artiste, avec sa femme. C'est pas la même chose que de travailler avec un artiste vivant et que de travailler avec des artistes qui sont morts. Si vous mettez Delacroix et Ingres sur le même mur dans un musée, vous allez le faire. Mais dans la vraie vie, ils n'auraient jamais exposé ensemble. Donc vous voyez déjà la différence. Et puis ça veut dire qu'il faut recueillir la vie de l'artiste, ça veut dire qu'il faut travailler avec lui, il faut partager les points de vue, c'est un travail qui est tressé en fait entre l'artiste, sa femme, nous l'équipe du musée, les architectes très importants, les architectes de RCR, et puis l'équipe technique de l'agglomération pour arriver à faire ce musée. Et on fait ce musée pour les œuvres de Pierre Soulages. Pour mettre en valeur son travail, mais pour les gens, pour les braves gens qui vont avoir envie de visiter ce musée. Si vous n'êtes pas de visiteurs dans un musée, les œuvres, elles ont besoin de vivre avec le regard des visiteurs.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous fait venir alors ? Qu'est-ce qui fait que vous signez pour l'aventure ?

  • Speaker #2

    Ce que je signe pour l'aventure, parce que d'abord, je ne connaissais pas Pierre Soulages, mais je connaissais son œuvre et qui m'intéressait, mais comme d'autres artistes. Et puis je me suis dit, c'est une occasion formidable de travailler avec un artiste qui touche sur le XXe et le XXIe siècle. C'est mon domaine qui me passionne. C'est aussi une expérience qui n'est pas simple, parce que ce n'est pas un long fleuve tranquille de travailler avec un artiste en activité. éclairer les oeuvres, les accrocher, faire des choix, faire des choix d'expo. Mais moi j'aime bien quand ça bouge. Et quand on suscite, je dirais, à la fois l'intérêt de l'artiste avec qui on travaille et du public. Et à la fois, évidemment, très naturellement, c'est monter une amitié professionnelle avec Pierre Soulages. On a eu l'honneur de travailler ensemble et puis une amitié tout court entre Pierre, Colette et moi. Et puis il y a un certain nombre de gens de l'équipe. La plupart des gens de l'équipe du musée Soulages sont des gens qui connaissaient bien Pierre Soulages, qui connaissent bien Colette et on est un peu une famille. Et donc c'est une chance absolument inouïe. Moi je trouve ça très bien. Et moi je suis resté là pendant 15 ans, ça fait 15 ans que je suis là. J'ai été sollicité plusieurs fois pour travailler dans les gros musées de province. voire dans des gros musées privés à Paris. Mais moi, j'ai accepté, je n'ai même pas donné suite, parce que je pense que c'est très important d'avoir une fidélité auprès de l'artiste et maintenant auprès de sa femme. Et croyez-moi, quand on donne de soi, quand on donne, je dirais, un peu de ce qu'on est, tout simplement, eh bien, on en est récompensé dans sa tête. Le plaisir, c'est de se dire, qu'est-ce que j'ai fait de bien ? Quelles ont été mes relations avec cet artiste ? Qu'est-ce qui lui a fait plaisir ? Pierre, il n'est plus là, mais il est toujours là. C'est-à-dire que tous les gens qui ont travaillé avec lui savent très bien que, Pierre Soulages, quand on monte une exposition avec ses œuvres, On sait d'avance ce qu'il veut, ce qu'il veut pas. C'est même peut-être, je dirais, même encore plus présent que quand il était vivant. parce qu'on sait comment il fonctionne. On n'est peut-être plus beaucoup, finalement, en France, à avoir monté, en présence de Pierre Soulages, des expositions. Et quelque chose qui me plaisait aussi dans cette aventure, c'était de partir ex nihilo, faire quelque chose à partir de zéro. Partir de zéro, c'est-à-dire un conservateur qui arrive, une secrétaire à un quart de temps, c'était ça au début, à mi-temps, ensuite, et puis créer une équipe où on est à peu près, maintenant, bon an, mal an, entre 35 et 40. Mais la force du musée... Parce qu'il ne faut pas se cacher, on est quand même dans une petite commune, modeste. La force du musée, c'est aussi, je dirais, l'enthousiasme de l'équipe et puis sa cohésion. Et ça, c'est ce que j'aime, moi. J'aime bien les choses qui sont incarnées.

  • Speaker #0

    Vous parlez de Rodez, une petite ville, mais il y avait aussi un grand scepticisme avant.

  • Speaker #2

    Bien sûr, mais je ne connais personne qui veut qu'on construise un musée dans sa ville. Pourquoi ? Parce que ça coûte trop cher, parce que ce n'est pas pour moi, parce que ça coûte trop cher. Il faudrait mieux mettre de l'argent, je ne sais pas, pour autre chose. Sauf qu'en fait la culture c'est quelque chose qui... C'est pas une espèce sonnante et trébuchante la culture, c'est aussi quelque chose qui est un peu immanent, c'est quelque chose qui apporte de l'émotion, de la joie de vivre, de la satisfaction de soi-même. Donc quand on a créé le musée... qu'on a fait nécessaire pour faire beaucoup de conférences. J'allais des fois dans des conseils municipaux à 10h du soir pour leur faire une conférence, pour leur expliquer que Soulages c'était bien. Je pouvais accepter qu'on me dise que c'était pas bien, mais par contre je pouvais pas accepter qu'on me dise que c'était n'importe quoi. On peut jamais dire à quelqu'un que ce qu'il fait c'est n'importe quoi. Parce que ça va, je dirais, des activités humaines les plus intimes aux activités du travail. Chacun fait un travail qui est important. Si vous voulez, ça fait quand même presque une quarantaine d'années que je fais ce travail. Donc, je pense que comme dans la vie, si on résout, je dirais, les choix, l'émotion à j'aime ou j'aime pas, c'est triste.

  • Speaker #3

    C'est pas moi.

  • Speaker #1

    Là où j'étais, personne.

  • Speaker #3

    Tu vois, là, je suis très relaxé. On a montré. Ouais.

  • Speaker #1

    On tourne sur tous les postes. En général, on est soit en salle, soit au contact accès hall. Donc, on accueille les visiteurs. On peut être aussi à la caisse. Du coup, on encaisse les visiteurs, que ce soit pour la partie boutique ou la partie billetterie. Donc, oui, les salles, le contact accès et après, c'est vraiment de l'encaissement. On est un peu sur tous les postes. sur tous les postes.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire que chaque jour,

  • Speaker #1

    vous passez sur tous les postes. Ça veut dire que parfois, on peut avoir une journée entière où on ne fait que de l'accueil, même en plein été, en fonction du dispo et tout ça. Et parfois, c'est dispatché, on peut avoir deux heures de salle d'affilée comme on peut avoir, ça peut être vraiment une heure de salle, une heure d'accueil, on n'a pas vraiment de planning, on fait en fonction des besoins et tout ça. Moi, être à l'accueil. Moi, j'aime bien être à l'accueil pour le côté boutique, le côté contact, le fait de parler avec les visiteurs. Après l'été, on n'a pas trop le temps de parler, en plein été, sur la période du 15 juillet au 15 août. parce que c'est assez intense. Donc là, ça fait plutôt rentrer les visiteurs. Mais sinon, après, il y a vraiment le contact en boutique. Dans les salles, on peut l'avoir aussi parce que les gens viennent nous poser des questions, s'arrêtent pour discuter avec nous, pour avoir des informations. Mais bon, j'aime bien ce poste-là. Voilà. Ça fait longtemps que vous travaillez en business ? Là, ça va faire trois ans au mois de mai. Trois ans au mois de mai. Ouais. Merci. Bonjour. Allô. Et voilà, on se voit ensuite. Oui, vous devez l'avoir sous votre billet. Regardez, c'est là. Vous l'avez là. Merci.

  • Speaker #3

    Merci bien.

  • Speaker #1

    Vous avez l'accès aux salles en bas et vous avez également l'exposition sur PirateBlock.

  • Speaker #2

    Toi.

  • Speaker #0

    Impossible.

  • Speaker #2

    Casier ? Impossible de me faire le casier.

  • Speaker #3

    Je me suis foutue.

  • Speaker #2

    J'arrive.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez m'expliquer aujourd'hui quel est votre rôle dans le musée ? Comment vous définissez votre métier ?

  • Speaker #2

    Alors d'abord je définirais mon métier comme quelque chose qui me passionne. Je pense que si je n'avais pas fait ce métier, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Peut-être voler des mobilettes, je ne sais pas. Mais en tout cas, ça me passionne et le métier, si je devais dire, c'est à la fois transmettre et conserver. Donc transmettre, c'est par les expositions qu'on crée, par les bouquins qu'on écrit, par le travail qu'on fait pour présenter telle ou telle chose. Et ça, c'est transmettre et partager. Et puis conserver... C'est qu'au fond, Pierre et Colette Soulages ont donné des œuvres de Pierre Soulages. On est dans un musée immunographique ici. Nous, on doit conserver très proprement ces œuvres-là, continuer à les étudier. Ça fait partie aussi, quelque part, de la conservation et de la transmission, les deux à la fois. Et que la personne qui arrivera après nous récupère les œuvres dans le même état. que quand nous on les a eus. Donc on est très sensible à ça. Après, la vie du musée c'est extrêmement large. Le conservateur de musée, c'est pas le vieux machin qui est assis derrière un bureau avec des piles de bouquins. Ça c'était il y a 50 ans. Le conservateur de musée c'est quelqu'un qui tire une équipe avec lui, qui entraîne son équipe. C'est une sorte de petit capitaine si on veut. Et c'est quelqu'un qui essaye aussi de transmettre sa passion aux gens avec qui il travaille. Moi j'ai la chance d'avoir une équipe ici tout à fait formidable, des gens qui sont plein de vie, plein d'idées, je trouve ça tout à fait passionnant. Donc c'est ça. Puis il y a une chose aussi à laquelle j'accorde beaucoup d'importance, c'est l'éducation et la médiation. Je crois qu'une bonne médiation, si les gens sont mal à l'aise par rapport à telle ou telle œuvre ou telle ou telle salle par exemple, je crois que c'est bien qu'il y ait quelqu'un qui les prenne comme à la veillée. et un guide conférencier, un médiateur, eh bien, le médiateur, il mène sa visite, je dirais un peu comme le chauffeur de bus. On dit du chauffeur de bus qu'il est le seul maître à Dieu, à bord, après Dieu. Mais c'est pareil. Chacun a sa manière différente de mener les gens, à les emmener vers la connaissance. Et comme je suis un ancien prof, j'aime bien que dans un musée, on puisse... Apprendre quelque chose, je trouve pas ça déplaisant, le côté pédagogique du musée. C'est quelque chose qui m'intéresse. Si je sors de quelque chose, de quelque endroit où je me rends, moi à titre personnel, en tant qu'être humain, j'aime bien retirer quelque chose de l'endroit où je suis allé. Voilà, donc ça, ça me paraît important. Mais vous savez, le rôle d'un conservateur de musée, c'est une sorte d'homme orchestre. Donc, il y a plein de choses possibles.

  • Speaker #0

    Justement, il y a...

  • Speaker #2

    C'est beaucoup de gestion, bien sûr, aussi. Évidemment, la gestion financière, la gestion du personnel, qui est important. Un personnel satisfait, c'est un personnel qui a envie de travailler avec vous, avec qui on fait des choses. Et un musée qui est bien géré, puisque nous, on est un établissement public, c'est-à-dire qu'on est à peu près à 65% d'autofinancement. C'est-à-dire que pour 10 euros qui rentrent au musée, il y a 6,5 euros qui sont gagnés par nous. C'est aussi très très important que chacun comprenne que le visiteur participe, exactement comme le spectateur qui va assister à un film, qui va au cinéma, le cinéphile, il participe à la réalisation des films. Donc s'il réalise quelque chose, une belle action, qui permet de participer à la vie du musée.

  • Speaker #0

    Peut-être de manière un tout petit peu moins pragmatique, mais il y a un fantasme autour de la vie secrète des musées, de ce qui se passe une fois qu'on ferme les portes au public. Comment vous la définiriez, vous, cette ambiance dont vous parliez de cette vie muséale ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'ai une expérience, justement, j'en parlais tout à l'heure, pendant le Covid, on a accueilli ici une œuvre du musée du Louvre, le Prince de Goudéa, qui est une statue qui a 4000 ans, qui est une statue mésopotamienne, et donc, comme le musée ne pouvait pas se visiter, moi... J'étais tous les jours au musée et je me trouvais tout seul avec cette œuvre en conversation. Alors c'est vrai qu'une œuvre d'art, c'est l'œuvre d'art. C'est le rapport que vous avez à l'œuvre d'art. L'œuvre d'art, elle vous est abandonnée par le peintre, qui normalement n'a pas son mot à dire une fois qu'il l'a vendue au musée, ou donnée. Ensuite, il y a l'œuvre d'art qui vit de sa propre vie. Donc, vous êtes en présence de l'œuvre, donc l'œuvre est une présence. Et vous, comment vous fonctionnez ? Est-ce que vous avez bien mangé le matin ? Est-ce que vous avez écouté de la musique ? Est-ce que ceci, ce que cela ? Chacun avec sa propre vie et sa propre histoire. Donc moi j'ai tendance à penser que bon, être seul dans un musée c'est d'avoir une certaine tranquillité. Je reste absolument persuadé que le contact des œuvres, c'est une chance justement d'un conservateur de musée qui peut justement lui avoir cette... s'il veut il peut avoir toute l'attitude pour être seul au milieu des œuvres. Moi je plains mes collègues qui ne descendent pas dans leur musée une fois par jour. Vous pouvez demander aux collègues conservateurs de musées s'ils vont visiter leur musée une fois par jour. Moi, je m'efforce pratiquement, je dirais à 95%, une fois par jour, je visite le musée. Pour voir justement si les œuvres se portent bien, si elles n'ont pas besoin de me dire quelque chose, s'il y a quelque chose qui m'a échappé, que je n'ai pas vu, quelque chose où je me dis, tiens, ça, ça pourrait être mieux, ça, ça pourrait être ceci, ça pourrait être cela.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui continue à vous émerveiller dans les œuvres de soulage que vous avez ? Tous les jours sous les yeux ?

  • Speaker #2

    Les œuvres de Soulages ou les autres œuvres d'autres artistes, ce qui m'émerveille c'est de voir qu'à chaque fois que je la vois, il y a quelque chose que je n'ai pas vu, il y a quelque chose que je n'ai pas ressenti. Parfois je me suis rendu compte que je n'ai pas regardé. Parce que regarder c'est... des fois vous regardez mais vous ne regardez pas. C'est comme les gens, des fois vous les regardez mal, vous ne les regardez pas. Une oeuvre, il faut la considérer, il faut la regarder, il faut la fréquenter. Et donc on trouve toujours des détails, des choses qui... Et puis il y a cette émotion, et l'émotion c'est quelque chose qui ne se contient pas, c'est quelque chose qui ne se définit pas, et c'est quelque chose qui fait beaucoup... Tant vie et beaucoup de plaisir. On n'a pas besoin de lire 15 dictionnaires pour regarder une œuvre d'art. Je pense que ses propres émotions, le laisser aller, en fait, ça suffit. Moi, je dis toujours aux gens, c'est pas grave si vous ne connaissez pas, si vous n'êtes pas capable d'analyser telle ou telle œuvre d'art, si vous n'êtes pas capable de la mettre sur une échelle de valeur ou même sur une échelle de temps. Ce qui est important, c'est le plaisir que vous retenez. Il y a des gens qui peuvent se satisfaire de 20 minutes de visite de musée, il y a des gens qui en ont besoin de 3 heures. Là j'ai quitté un ami, il a visité le musée ce matin, il est retourné dans le musée pour voir des choses qu'il n'a pas vues. Donc voilà, et ça c'est gratuit. Je ne prêche pas que pour le musée Soulages, je prêche pour tous les musées. Un musée avec des œuvres figuratives, c'est certainement aussi complexe à appréhender maintenant pour un public du XXIe siècle que des salles avec des œuvres abstraites comme par exemple Soulages ou Kandinsky.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous travaillez les expositions temporaires justement ? Vous parliez là des œuvres des autres artistes que vous fréquentez aussi.

  • Speaker #2

    Moi je pense qu'il faut de la maturation. Déjà ça veut dire qu'il faut y réfléchir longuement à l'avance, savoir ce qu'on veut faire et se sentir prêt. Je pense que c'est un peu comme en amour. À un moment donné il faut se sentir prêt. Et même si l'amour c'est de la passion. Ce que je veux dire, c'est que quand je choisis une exposition, je réfléchis avec pas mal de choses. D'abord, je réfléchis pourquoi le faire. Donc, je dois pouvoir m'expliquer pourquoi j'ai envie de le faire et pourquoi j'ai envie de le faire au Musée Soulages. Par exemple, si on a fait Fernand Léger, tout le monde aime faire Fernand Léger, mais Pierre Soulages aimait bien Fernand Léger. Là, on va faire Lucio Fontana. Lucio Fontana, c'est un artiste que Pierre aime beaucoup. Donc, il y a ça. La deuxième chose, il y a le côté un petit peu stratégique, c'est-à-dire, pourquoi faire une exposition si cette même exposition a été faite il y a trois ans, à 100 kilomètres d'ici ? Donc, nous, on est dans une obligation de proposer des choses qui soient assez exceptionnelles. Et la troisième chose qui est importante... on n'a jamais de mal à se faire du bien ouais non

  • Speaker #3

    On a l'utilisation de plusieurs rouges, comme tout à l'heure, avec la préparation de l'arbre, la toile, la couche en verre ménière, ici qui va être le rouge, et le noir pour le plus épais, qui est rajouté par un fumier qui va être raclé. Vous savez, on a dit que la peinture était entaillée par un roi. Et alors, ce que je ne vous ai pas montré tout à l'heure, ce sont les outils utilisés par Soulages, qui ne sont pas franchement des outils d'artistes, mais ils sont des outils de peintres en bâtiment, même de maçons, on va dire.

  • Speaker #2

    Hop,

  • Speaker #3

    je vais vous montrer. dans des formats assez grands, mais ils ont aussi... Voilà. on retrouve les rives là, et là c'est une cordage chez les passants que vous utilisez si vous regardez vous avez des manteaux pour les joints de carrelage etc. donc là les outils plutôt rigides, là en métal on a des outils de peinture en bâtiment avec les spalters vous savez qui sont les pinceaux spalters avec ici les brosses, alors on dit plusieurs noms, les brosses à badigeons, les brosses à rochampire aussi je crois que Justin nous a parlé de l'écolage, il appelle ça des brosses à rochampire on se rend pas compte c'est presque la taille d'un visage humain ça est le diamètre est un peu toxique alors on voit aussi après soulage customisé les outils de ménage fabriquer des outils à partir de ce qu'il a sous la main donc là vous voyez cet emballé qui a été enveloppé dans de la mousse Vous avez, voilà, le métier, si les maris, c'est ça qu'on appelle ceci, c'est à racler les garnitures. Les maris, c'est ce que j'ai sur les mains de l'envoi, nous permettent, donc, pareil, de racler la matière, d'étaler la matière.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que vous avez appris de lui, vous ?

  • Speaker #2

    Soulages ? Oui. Alors moi, j'ai appris de Soulages que tout doit être dans le... Tout doit être dans le... quelque chose d'assez parfait dans le sens où tout est dans le détail. C'est-à-dire que quand on fait quelque chose, on parle de la pensée, on a pensé, la réalisation, et qu'on doit mener les choses toujours de la manière la plus parfaite possible, de manière à ce qu'une fois qu'on a terminé, si on prend un verre, on se dit on a fait le mieux qu'on pouvait faire. Ça, j'ai appris ça. Puis ce que j'ai appris de lui aussi, c'est beaucoup... C'est un homme qui a commencé à travailler avec d'autres artistes en 46, donc moi j'ai... beaucoup écouté Soulages sur ses relations avec des artistes qui maintenant ça passe à Paris-Mathusalem quoi, je sais pas moi par exemple Nicolas De Stael, Poliakoff, vous voyez ce que je veux dire, c'est formidable et puis moi j'ai appris aussi que les grands artistes Les personnalités très fortes, c'est celles qui doutent. Ceux qui ne doutent jamais, c'est des imbéciles. Dans tous les domaines, du reste. J'ai visité son atelier très souvent, et un homme comme ça, qui avait fait des centaines d'expositions, et qui avait exposé sur tous les continents, même à 100 ans, quand il montrait une œuvre, il attendait un avis. Quand quelqu'un a la certitude qu'il sait et qu'il sait surtout ce que doivent penser les autres et ce qu'on doit faire pour les autres, alors là, c'est toujours la porte ouverte, je pense, aux dérives. Moi je plains les gens qui ne s'intéressent à rien. J'ai toujours été surpris par les gens qui n'écoutent pas de musique. Par exemple, ça c'est un truc que je n'arrive pas à comprendre. Le musée c'est quand même une école de tolérance, une école de curiosité. Si ça ne sert pas à ça, je ne vois pas à quoi ça peut servir. Mais il ne faut pas non plus passer tout son temps à se dire ça sert à quoi.

  • Speaker #0

    Vous parliez de Soulages depuis qu'il est décédé. Le fait qu'il est presque d'autant plus présent dans les choix que vous faites, en tout cas dans votre esprit. Comment on fait pour lui survivre ?

  • Speaker #2

    survit tous d'abord on termine on survit tous d'abord on termine tous au cimetière on n'amène rien au cimetière pas ses richesses, pas ses tableaux, pas son fric pas ses disques, pas ses livres donc un jour où les gens les livres, ils ne vivent que du regard des gens, si vous avez une bibliothèque et que personne ne lit les bouquins que vous avez, autant les donner vos livres, donc moi je crois qu'on survit très bien on vit tout simplement quand Soulea je me disais il avait 102 ans, il disait qu'il en avait plus devant lui que derrière lui. Moi, ça me faisait marrer, quoi. Ça me faisait marrer. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que Pierre, ce qui l'intéressait, quand on lui a demandé le mot qu'il préférait dans la langue française, il disait encore Donc, ça veut dire que c'était quelqu'un qui avait une fringale de faire des choses, d'inventer des choses. C'était ça qui le passionnait, en fait, Pierre Soulages. C'était toujours faire des choses nouvelles. Et ça, ça n'a pas de prix. ...a sa vision de, comment dire, métaphysique. Moi, je pense qu'on survit très bien à tout et à tout le monde. Par contre, ou on devrait dire en revanche, en revanche, je pense que les œuvres d'art, et chez Pierre Soulages, survivent. Si Pierre Soulages... Ils n'ont pas eu d'enfant, Pierre Collet-Soulages. Je suis totalement persuadé que le succès d'année, en quelque sorte, même si ce terme n'est pas bien approprié, disons que le transfert, c'est le musée. Le musée, c'est peut-être ce qui incarne le plus Pierre Soulages. Le musée, dans un endroit qu'il a bien connu, à quelques centaines de mètres de sa maison, dans une ville qu'il a bien connue, dans un département qu'il a bien connu, dans des paysages qu'il a bien connus. Donc tout ça, c'est quand même très intéressant, c'est concentrique.

  • Speaker #0

    Et vous, vous vous sentez le messager de ça ?

  • Speaker #2

    Moi je me sens moi-même, avec l'équipe on a un message de transmission, donc on le fait, et si on l'a réussi on est content. Si nous on voit des gens, moi je vois l'équipe de médiation, des fois ils me racontent, ils ont abordé tel ou tel public, et qu'ils ont intéressé un public qui à première vue était compliqué, on est content. Je veux dire, vous savez, moi j'étais enseignant dans ma vie, dans une vie antérieure, j'étais trois ans professeur de français, de latin, d'histoire géo, un peu de tout, et on est content. Quand on a laissé quelque chose chez les gens, après il ne faut pas se leurrer, on ne laisse pas chez un gamin du CP, si vous lui laissez deux choses, c'est déjà formidable. Mais si on laisse quelque chose aux gens et qu'ils ont le sentiment en sortant que ce n'est pas n'importe quoi, que c'est bien, qu'ils ont vraiment ressenti une émotion, moi ça suffit à mon bonheur. Je n'ai pas besoin qu'on me l'écrive et qu'on me fasse une dissertation philosophique sur ça. Je pense qu'il faut voir les choses simplement. Il y a des choses qui peuvent être envisagées avec beaucoup de livres, de connaissances et de choses comme ça, ce qui est notre travail. Mais notre travail, c'est de faire de tout ça quelque chose qui est tout à fait acceptable pour des gens qui veulent entendre. Qui veulent entendre. C'est très important.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il vous restait encore des choses à découvrir de Soulages et de son travail ?

  • Speaker #2

    J'en découvre tous les jours. Je découvre des choses tous les jours, je découvre des choses qui, puisque là on est en train de travailler sur les archives, c'est des choses qui sont peut-être secondaires pour le grand public, mais qui pour nous sont intéressantes. On découvre des choses qu'il a écrites, qu'il a dites, qu'on ne savait pas, et on se dit, mais tiens, ça, c'est important, on va refaire quelque chose. Et puis de ça, pof, on va faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Vous avez toujours cru au succès du musée ?

  • Speaker #2

    Oui. De toute façon, on ne se pose pas la question. C'est-à-dire qu'en réalité, d'abord, je ne suis pas propriétaire du musée, déjà pour commencer. Personne n'est propriétaire d'un musée ou des œuvres d'un musée. Comme je le dis, c'est les spectateurs, les regardeurs qui sont propriétaires des œuvres. Moi, j'ai toujours pensé qu'au fond, il fallait faire le travail nécessaire pour intéresser les gens à l'œuvre de Soulages. Mais déjà, il y avait cette grande exposition de 2009 qui était quand même super importante, qui a fait connaître l'œuvre de Pierre Soulages. Nous on avait simplement à mettre en scène, à un peu scénariser, à animer l'oeuvre de Pierre Soulages pour que ça intéresse les gens. Et c'est jamais se décourager en disant ma fille peut faire la même chose, mon fils fait la même chose, ça veut rien dire, c'est tout noir. Vous aurez toujours des gens qui vont vous dire ça, il y a toujours des gens qui vont vous dire que je sais pas moi que Frank Zappa c'est de la mauvaise musique ou que le rock'n'roll c'est une musique de voyous. Je veux dire, c'est pas plus une musique de voyous que, je sais pas, la peinture de Caravage, qui lui, Caravage, vivait, était un mauvais garçon, vivait dans les quartiers un peu chauds de Naples. Vous voyez ce que je veux dire ? Il faut tout remettre en perspective. Donc moi, pas de soucis avec ça. Donc j'y ai toujours cru, bien sûr. Après, un musée, c'est comme un vélo. Si vous arrêtez de pédaler, vous tombez.

  • Speaker #0

    Quelle place il a trouvée dans le paysage muséal français ?

  • Speaker #2

    Musée Soulages ? Il a trouvé, je pense, une place comme un musée monographique, mais qui est quand même très original, de par l'immersion des œuvres. Et ça, c'est le fait des architectes d'ERCR, dans des sortes de cabines de métal, où on a... On a travaillé avec Pierre Soulages pour mettre ça au point, et avec les architectes, parce que Soulages ne voulait pas vraiment de scénographie, il voulait comme un accrochage qui ne s'arrête jamais. C'est formidable un accrochage qui ne s'arrête jamais. Quelque chose qui ne s'arrête jamais, c'est le mouvement perpétuel. Donc c'est une sorte de mouvement perpétuel, que nous on change toujours les accrochages dans le musée, c'est ce que voulait Pierre, et en plus il voulait une salle d'exposition temporaire. pour exposer d'autres artistes que lui. Pour pas qu'il soit dit, c'est Pierre Soulages, Isclairosa mort, ce vieux-là, ce musée, il est que pour lui, il est que pour personne d'autre. Alors nous, ici, on a exposé Yves Klein, Fernand Léger, Pablo Picasso, Le Corbusier, beaucoup de femmes. On va exposer beaucoup de femmes aussi en 2025. Voilà, donc c'est à tout le monde, je dirais. Pierre Soulages, quand on interrogeait sur le noir, parce que j'ai un tel, tel artiste, il a acheté un noir industriel, il a acheté le brevet, c'est le fameux Vantoblack, c'est, comment il s'appelle, c'est à Lichkapour. Et je demande à Soulages, et Soulages me dit, mais vous savez, le noir appartient à tout le monde. Alors le noir appartient à tout le monde et le noir ça veut dire plein de choses. C'est pas uniquement, quand on parle de la peinture de Pierre Soulages, quelque chose qui est dramatique. La peinture de Soulages c'est pas une peinture de cimetière. C'est que le noir c'est un vocabulaire, c'est une sorte de... C'est la classe quoi, tout simplement, quand on est bien habillé, quand on a une belle livrée, c'est ça le noir. C'est une sorte de sobriété. Et c'est ça qui, à mon sens, est important. C'est ça qui est important pour... pour parler de Pierre Soulages. On parlait des gens de la réception de l'œuvre de Pierre Soulages, je pensais que parce qu'il peignait en noir, c'était monochrome, ce qui n'est pas le cas. Ce sont des noirs très variés, travaillés avec beaucoup d'outils, et que d'autre part, le noir, on ne précipite pas les gens dans une mine. On voit très bien que le noir porte la lumière, dans cette lumière il y a des couleurs, il y a une grande variété dans tout ça. Et puis, ça fait toujours appel, comme la musique, ça fait toujours appel à l'émotion.

  • Speaker #0

    Si on se revoit dans 10 ans, qu'est-ce que vous espérez pouvoir me dire du musée dans 10 ans ?

  • Speaker #2

    J'en sais rien, je sais pas. Moi je dirais simplement que chacun aura fait son travail, et que ce qui compte c'est pas tellement les gens qui ont travaillé, c'est la mission qu'on s'est donnée, et le résultat qu'on a obtenu, et on verra le résultat du musée dans la fréquentation du musée bien sûr, mais dans le plaisir que les gens auront visité le musée. Personne n'est propriétaire des œuvres de Pierre Soulages. Je veux dire, c'est clair, je veux dire, Rodèze est connu mondialement maintenant grâce au musée Soulages. Je pense quand même que le musée a apporté quand même beaucoup de fréquentation sur la ville de Rodèze. C'est l'artiste lui-même qui fait que ça marche. C'est pas Decron, c'est pas les organisateurs des musées, c'est pas les cadres. Nous, on est là pour mettre en valeur l'œuvre d'un artiste et faire que non seulement ça plaise aux gens, mais qu'il s'y retrouve bien. Si quelqu'un dit, moi je reste dans le musée parce que j'ai envie d'y dormir, ou j'ai envie, je sais pas, d'y faire un peu de yoga, ou de lire un livre, ou même pourquoi pas faire du sumo, pourquoi pas, je veux dire, tout reste ouvert. Ça vous va ?

  • Speaker #0

    Oui, vous avez donné plein d'idées.

  • Speaker #2

    Bon.

  • Speaker #0

    On va vous proposer de faire du sumo. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Je vous en prie.

  • Speaker #0

    Ainsi s'achève ce troisième et dernier épisode de la série de Finta, consacré aux dix ans du musée Soulages de Rodez, en coulisses avec celles et ceux qui incarnent cette antre de l'outre-noir. J'espère qu'elle vous a plu. Je suis toujours curieuse d'avoir vos retours et de vous lire. Si vous appréciez Finta, parlez-en autour de vous, partagez les épisodes, c'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à ce travail indépendant. Finta est disponible gratuitement sur toutes les plateformes de podcast. Vous pouvez l'écouter sur Deezer, Spotify, Apple Podcast, Google Podcast. Vous pouvez aussi retrouver tous les épisodes ainsi que les ressources bibliographiques sur fintapodcast.fr. Et pour suivre Finta au quotidien, c'est sur Facebook et Instagram que l'on se retrouve. Merci de votre fidélité et à très bientôt.

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Description

Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les halls Charles, le foirail, le jardin public cerné de son petit mur de pierres. C’était le Rodez d’avant, avant le musée Soulages. A cette époque-là, le pari soulevait plus de scepticisme que d’enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de corten qui sortent de terre pour s’adosser au jardin. Suivra l’inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C’était en 2014, il y a 10 ans. A chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective.


D’ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonne. Précieux gardiens de l’âme de Pierre Soulages, qu’ils ont tous côtoyé et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leurs côtés dans l’ombre des Outrenoirs, pour une série de Finta ! en trois épisodes consacrés aux 10 ans du musée Soulages.


EPISODE 3/3... avec Benoît Decron


La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu’il semble capable de se fondre dans l’esprit de l’artiste disparu, de penser comme il l’aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. A la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public.


Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste iconique de son vivant, à partir d’une feuille blanche dans une ville qu’il ne connaissait pas, Benoît Decron est aujourd’hui l’un des plus fins connaisseurs de l’œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. De son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d’orchestre : nous en parlons au micro de Finta ! Je le rencontre dans l’entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.


🎧 Pour réécouter l'épisode 1/2 avec Amandine Meunier, responsable des collections : c'est ici.

🎧 Et l'épisode 2/3 avec Christel Lagarrigue, dans l'atelier, c'est là.


🧡 Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les Halles Charles, le foireil, le jardin public cernés de son petit mur de pierre. C'était le Rodès d'avant. Avant, le musée Soulages. À cette époque-là, le Paris soulevait plus de scepticisme que d'enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de cortènes qui sortent de terre pour s'adosser au jardin. Suivra l'inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C'était en 2014, il y a dix ans. À chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective. D'ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonnent. Précieux gardiens de l'âme de Pierre Soulages qu'ils ont tous côtoyés et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leur côté, dans l'ombre des Outres-Noirs, pour une série de trois épisodes de Finta consacrés aux dix ans du musée Soulages. La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu'il semble capable de se fondre dans l'esprit de l'artiste disparu, de penser comme il l'aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. À la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public. Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste conique de son vivant, à partir d'une feuille blanche dans une ville qu'il ne connaissait pas, Benoît de Cron est aujourd'hui l'un des plus fins connaisseurs de l'œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. de son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d'orchestre, nous en parlons dans cet épisode au micro de Finta. Je le rencontre dans l'entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.

  • Speaker #1

    Je peux avoir un code postal, s'il vous plaît ? Le mien c'est de 1854 parce que j'habite à Ounel-Château. C'est celui de votre famille ?

  • Speaker #2

    Le tien,

  • Speaker #1

    Côte d'Azcad. 17 000.

  • Speaker #3

    Ah voilà.

  • Speaker #1

    Comme vous le savez sûrement, l'objet vous donne accès au musée de la ville. Le musée Fionnail, le musée de Mille-Fèches, pendant 28 jours. Les billets seront juste à faire à la vague.

  • Speaker #2

    Moi, l'ambiance que je voudrais, d'abord, je pense que le musée est immersif, parce que c'est quand même une expérience unique au monde que de rentrer dans le musée Soulages et se retrouver dans une salle qui est un petit peu enterrée et qui est sombre, avec du métal sur le sol et du métal sur le mur. Moi, ce que je voudrais que les gens ressentent, c'est et pourquoi pas moi ? Je m'appelle Benoît Decron, je suis né en 1959 à Niort, et je suis donc conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée Soulages. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est l'exposition permanente. On a juste la phase 5 et la phase 7 qui en ce moment sont en cours de rapprochage, donc il y aura un peu moins de commentaires à ce moment-là. Lorsque vous voyez ce pictogramme-là, il y aura un numéro en dessous. Vous saisissez le numéro sur le clavier, vous vous mettez à l'oreille. Si toutefois ça ne se lance pas, vous rappuyez sur Play. Moins et plus pour monter ou baisser le son, et Pause pour faire pause sur le commentaire. Donc c'est simple que ça.

  • Speaker #3

    Super. Merci. Soyez bienvenus.

  • Speaker #4

    Merci.

  • Speaker #2

    Ce que je trouve intéressant dans un musée, c'est d'intéresser les gens. Et je pense qu'il est beaucoup plus gratifiant d'aller chercher des gens qui n'y connaissent rien que d'essayer de satisfaire des gens qui croient tout connaître. Donc c'est ça qui m'intéresse dans le musée. Moi j'aime bien aller quelque part, dans un domaine que je connais mal ou peu, et que des gens me donnent envie de visiter. Voilà ce que je pourrais dire, ce que je souhaite que les gens... ressentent quand ils arrivent au musée. Et peut-être qu'il y a une deuxième chose aussi qui est importante, c'est que... Ça leur appartient. C'est-à-dire qu'en réalité, ce qu'il y a dans les musées, c'est fait pour que les gens les admirent, les regardent, les fréquentent. Et que, évidemment que ça appartient, qu'il y a un musée, une collectivité, un collectionneur, etc. Mais au fond, ce qu'on a dans les yeux... C'est quand même quelque chose qui nous appartient. Donc c'est pour ça que je dis que les œuvres, qui sont le miroir en quelque sorte de ce que les gens voient lors de leur pérégrination, eh bien ça leur appartient. Voilà ce que je pourrais dire. Moi je voudrais que les choses soient vraiment envisagées de la manière la plus simple possible.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez une anecdote là, depuis dix ans, un souvenir d'un visiteur en particulier, une remarque, quelque chose que vous avez entendu et qui vous fait dire que cet objectif-là, il est réussi ?

  • Speaker #2

    Bah, j'ai pas d'anecdote particulière, sauf peut-être une personne, une fois, qui est arrivée le matin à dix heures, et puis qui est repartie dix-huit heures. Elle était avec son livre, je pense qu'elle a eu tout le temps de lire son livre. Moi, ça me dérange pas que les gens... Fasse un stationnement extrêmement long, un peu ventouse, à l'intérieur du musée, parce que s'ils considèrent que le musée est un lieu à part, avec une certaine tranquillité, il faut qu'ils en profitent. Donc moi, c'est peut-être ce genre de souvenir. Et puis si, peut-être, j'ai le souvenir aussi d'avoir fait une visite, il y a assez longtemps, pour des gens non voyants. Et alors c'est intéressant de parler de noir, d'œuvre noire, à des gens qui sont non-voyants. Parce que le noir c'est aussi extrêmement large, le noir, du moins la vision du noir, ou ce qu'on peut imaginer du noir entre le psychologique, le visuel, l'optique, tout ce qu'on veut. Voilà, c'est ça, j'ai un sacré souvenir, parce qu'expliquer du noir à des gens qui ne voient pas, mais que les aveugles ne voient pas du noir, les aveugles voient de la lumière, les aveugles voient à leur manière des couleurs, des scintillements, je crois que c'est aussi quelque chose qui, à mon avis, est significatif. Avant de venir ici à Rodez, j'ai obtenu le concours de l'école du patrimoine. Ensuite, j'ai pris un premier poste à Langres pendant huit ans, où je gérais un musée de beaux-arts. Et puis ensuite, j'ai géré un musée d'art contemporain, moderne et contemporain, au Sable d'Olonne pendant 13 ans. Et ça fait 15 ans ici que je suis à Rodez. Je suis venu pour construire le musée et je suis venu surtout pour travailler avec Pierre Soulages. Parce que c'est une expérience hors normes que de travailler avec un artiste en activité. Donc... Je crois que j'ai eu cette chance inouïe d'être un peu plongé dans le creuset avec l'artiste, sa femme, Colette et toute l'équipe du reste. On a eu une chance formidable de travailler avec Pierre. Je n'ai jamais senti chez Pierre Soulages un quelconque affaiblissement lié à l'âge, par exemple. Jamais, jamais. Je pense que le musée Soulages m'a appris à comprendre que l'âge n'a rien à voir avec les artères. parce que l'âge c'est quelque chose qui est dans la tête il y a des gens qui peuvent avoir 25 ans qui peuvent être infiniment vieux et il y a des gens comme Pierre Soulages au delà de 100 ans qui ont une vista absolument incroyable C'est aussi une question de relation, c'est-à-dire avoir des relations avec l'artiste, avec sa femme. C'est pas la même chose que de travailler avec un artiste vivant et que de travailler avec des artistes qui sont morts. Si vous mettez Delacroix et Ingres sur le même mur dans un musée, vous allez le faire. Mais dans la vraie vie, ils n'auraient jamais exposé ensemble. Donc vous voyez déjà la différence. Et puis ça veut dire qu'il faut recueillir la vie de l'artiste, ça veut dire qu'il faut travailler avec lui, il faut partager les points de vue, c'est un travail qui est tressé en fait entre l'artiste, sa femme, nous l'équipe du musée, les architectes très importants, les architectes de RCR, et puis l'équipe technique de l'agglomération pour arriver à faire ce musée. Et on fait ce musée pour les œuvres de Pierre Soulages. Pour mettre en valeur son travail, mais pour les gens, pour les braves gens qui vont avoir envie de visiter ce musée. Si vous n'êtes pas de visiteurs dans un musée, les œuvres, elles ont besoin de vivre avec le regard des visiteurs.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous fait venir alors ? Qu'est-ce qui fait que vous signez pour l'aventure ?

  • Speaker #2

    Ce que je signe pour l'aventure, parce que d'abord, je ne connaissais pas Pierre Soulages, mais je connaissais son œuvre et qui m'intéressait, mais comme d'autres artistes. Et puis je me suis dit, c'est une occasion formidable de travailler avec un artiste qui touche sur le XXe et le XXIe siècle. C'est mon domaine qui me passionne. C'est aussi une expérience qui n'est pas simple, parce que ce n'est pas un long fleuve tranquille de travailler avec un artiste en activité. éclairer les oeuvres, les accrocher, faire des choix, faire des choix d'expo. Mais moi j'aime bien quand ça bouge. Et quand on suscite, je dirais, à la fois l'intérêt de l'artiste avec qui on travaille et du public. Et à la fois, évidemment, très naturellement, c'est monter une amitié professionnelle avec Pierre Soulages. On a eu l'honneur de travailler ensemble et puis une amitié tout court entre Pierre, Colette et moi. Et puis il y a un certain nombre de gens de l'équipe. La plupart des gens de l'équipe du musée Soulages sont des gens qui connaissaient bien Pierre Soulages, qui connaissent bien Colette et on est un peu une famille. Et donc c'est une chance absolument inouïe. Moi je trouve ça très bien. Et moi je suis resté là pendant 15 ans, ça fait 15 ans que je suis là. J'ai été sollicité plusieurs fois pour travailler dans les gros musées de province. voire dans des gros musées privés à Paris. Mais moi, j'ai accepté, je n'ai même pas donné suite, parce que je pense que c'est très important d'avoir une fidélité auprès de l'artiste et maintenant auprès de sa femme. Et croyez-moi, quand on donne de soi, quand on donne, je dirais, un peu de ce qu'on est, tout simplement, eh bien, on en est récompensé dans sa tête. Le plaisir, c'est de se dire, qu'est-ce que j'ai fait de bien ? Quelles ont été mes relations avec cet artiste ? Qu'est-ce qui lui a fait plaisir ? Pierre, il n'est plus là, mais il est toujours là. C'est-à-dire que tous les gens qui ont travaillé avec lui savent très bien que, Pierre Soulages, quand on monte une exposition avec ses œuvres, On sait d'avance ce qu'il veut, ce qu'il veut pas. C'est même peut-être, je dirais, même encore plus présent que quand il était vivant. parce qu'on sait comment il fonctionne. On n'est peut-être plus beaucoup, finalement, en France, à avoir monté, en présence de Pierre Soulages, des expositions. Et quelque chose qui me plaisait aussi dans cette aventure, c'était de partir ex nihilo, faire quelque chose à partir de zéro. Partir de zéro, c'est-à-dire un conservateur qui arrive, une secrétaire à un quart de temps, c'était ça au début, à mi-temps, ensuite, et puis créer une équipe où on est à peu près, maintenant, bon an, mal an, entre 35 et 40. Mais la force du musée... Parce qu'il ne faut pas se cacher, on est quand même dans une petite commune, modeste. La force du musée, c'est aussi, je dirais, l'enthousiasme de l'équipe et puis sa cohésion. Et ça, c'est ce que j'aime, moi. J'aime bien les choses qui sont incarnées.

  • Speaker #0

    Vous parlez de Rodez, une petite ville, mais il y avait aussi un grand scepticisme avant.

  • Speaker #2

    Bien sûr, mais je ne connais personne qui veut qu'on construise un musée dans sa ville. Pourquoi ? Parce que ça coûte trop cher, parce que ce n'est pas pour moi, parce que ça coûte trop cher. Il faudrait mieux mettre de l'argent, je ne sais pas, pour autre chose. Sauf qu'en fait la culture c'est quelque chose qui... C'est pas une espèce sonnante et trébuchante la culture, c'est aussi quelque chose qui est un peu immanent, c'est quelque chose qui apporte de l'émotion, de la joie de vivre, de la satisfaction de soi-même. Donc quand on a créé le musée... qu'on a fait nécessaire pour faire beaucoup de conférences. J'allais des fois dans des conseils municipaux à 10h du soir pour leur faire une conférence, pour leur expliquer que Soulages c'était bien. Je pouvais accepter qu'on me dise que c'était pas bien, mais par contre je pouvais pas accepter qu'on me dise que c'était n'importe quoi. On peut jamais dire à quelqu'un que ce qu'il fait c'est n'importe quoi. Parce que ça va, je dirais, des activités humaines les plus intimes aux activités du travail. Chacun fait un travail qui est important. Si vous voulez, ça fait quand même presque une quarantaine d'années que je fais ce travail. Donc, je pense que comme dans la vie, si on résout, je dirais, les choix, l'émotion à j'aime ou j'aime pas, c'est triste.

  • Speaker #3

    C'est pas moi.

  • Speaker #1

    Là où j'étais, personne.

  • Speaker #3

    Tu vois, là, je suis très relaxé. On a montré. Ouais.

  • Speaker #1

    On tourne sur tous les postes. En général, on est soit en salle, soit au contact accès hall. Donc, on accueille les visiteurs. On peut être aussi à la caisse. Du coup, on encaisse les visiteurs, que ce soit pour la partie boutique ou la partie billetterie. Donc, oui, les salles, le contact accès et après, c'est vraiment de l'encaissement. On est un peu sur tous les postes. sur tous les postes.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire que chaque jour,

  • Speaker #1

    vous passez sur tous les postes. Ça veut dire que parfois, on peut avoir une journée entière où on ne fait que de l'accueil, même en plein été, en fonction du dispo et tout ça. Et parfois, c'est dispatché, on peut avoir deux heures de salle d'affilée comme on peut avoir, ça peut être vraiment une heure de salle, une heure d'accueil, on n'a pas vraiment de planning, on fait en fonction des besoins et tout ça. Moi, être à l'accueil. Moi, j'aime bien être à l'accueil pour le côté boutique, le côté contact, le fait de parler avec les visiteurs. Après l'été, on n'a pas trop le temps de parler, en plein été, sur la période du 15 juillet au 15 août. parce que c'est assez intense. Donc là, ça fait plutôt rentrer les visiteurs. Mais sinon, après, il y a vraiment le contact en boutique. Dans les salles, on peut l'avoir aussi parce que les gens viennent nous poser des questions, s'arrêtent pour discuter avec nous, pour avoir des informations. Mais bon, j'aime bien ce poste-là. Voilà. Ça fait longtemps que vous travaillez en business ? Là, ça va faire trois ans au mois de mai. Trois ans au mois de mai. Ouais. Merci. Bonjour. Allô. Et voilà, on se voit ensuite. Oui, vous devez l'avoir sous votre billet. Regardez, c'est là. Vous l'avez là. Merci.

  • Speaker #3

    Merci bien.

  • Speaker #1

    Vous avez l'accès aux salles en bas et vous avez également l'exposition sur PirateBlock.

  • Speaker #2

    Toi.

  • Speaker #0

    Impossible.

  • Speaker #2

    Casier ? Impossible de me faire le casier.

  • Speaker #3

    Je me suis foutue.

  • Speaker #2

    J'arrive.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez m'expliquer aujourd'hui quel est votre rôle dans le musée ? Comment vous définissez votre métier ?

  • Speaker #2

    Alors d'abord je définirais mon métier comme quelque chose qui me passionne. Je pense que si je n'avais pas fait ce métier, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Peut-être voler des mobilettes, je ne sais pas. Mais en tout cas, ça me passionne et le métier, si je devais dire, c'est à la fois transmettre et conserver. Donc transmettre, c'est par les expositions qu'on crée, par les bouquins qu'on écrit, par le travail qu'on fait pour présenter telle ou telle chose. Et ça, c'est transmettre et partager. Et puis conserver... C'est qu'au fond, Pierre et Colette Soulages ont donné des œuvres de Pierre Soulages. On est dans un musée immunographique ici. Nous, on doit conserver très proprement ces œuvres-là, continuer à les étudier. Ça fait partie aussi, quelque part, de la conservation et de la transmission, les deux à la fois. Et que la personne qui arrivera après nous récupère les œuvres dans le même état. que quand nous on les a eus. Donc on est très sensible à ça. Après, la vie du musée c'est extrêmement large. Le conservateur de musée, c'est pas le vieux machin qui est assis derrière un bureau avec des piles de bouquins. Ça c'était il y a 50 ans. Le conservateur de musée c'est quelqu'un qui tire une équipe avec lui, qui entraîne son équipe. C'est une sorte de petit capitaine si on veut. Et c'est quelqu'un qui essaye aussi de transmettre sa passion aux gens avec qui il travaille. Moi j'ai la chance d'avoir une équipe ici tout à fait formidable, des gens qui sont plein de vie, plein d'idées, je trouve ça tout à fait passionnant. Donc c'est ça. Puis il y a une chose aussi à laquelle j'accorde beaucoup d'importance, c'est l'éducation et la médiation. Je crois qu'une bonne médiation, si les gens sont mal à l'aise par rapport à telle ou telle œuvre ou telle ou telle salle par exemple, je crois que c'est bien qu'il y ait quelqu'un qui les prenne comme à la veillée. et un guide conférencier, un médiateur, eh bien, le médiateur, il mène sa visite, je dirais un peu comme le chauffeur de bus. On dit du chauffeur de bus qu'il est le seul maître à Dieu, à bord, après Dieu. Mais c'est pareil. Chacun a sa manière différente de mener les gens, à les emmener vers la connaissance. Et comme je suis un ancien prof, j'aime bien que dans un musée, on puisse... Apprendre quelque chose, je trouve pas ça déplaisant, le côté pédagogique du musée. C'est quelque chose qui m'intéresse. Si je sors de quelque chose, de quelque endroit où je me rends, moi à titre personnel, en tant qu'être humain, j'aime bien retirer quelque chose de l'endroit où je suis allé. Voilà, donc ça, ça me paraît important. Mais vous savez, le rôle d'un conservateur de musée, c'est une sorte d'homme orchestre. Donc, il y a plein de choses possibles.

  • Speaker #0

    Justement, il y a...

  • Speaker #2

    C'est beaucoup de gestion, bien sûr, aussi. Évidemment, la gestion financière, la gestion du personnel, qui est important. Un personnel satisfait, c'est un personnel qui a envie de travailler avec vous, avec qui on fait des choses. Et un musée qui est bien géré, puisque nous, on est un établissement public, c'est-à-dire qu'on est à peu près à 65% d'autofinancement. C'est-à-dire que pour 10 euros qui rentrent au musée, il y a 6,5 euros qui sont gagnés par nous. C'est aussi très très important que chacun comprenne que le visiteur participe, exactement comme le spectateur qui va assister à un film, qui va au cinéma, le cinéphile, il participe à la réalisation des films. Donc s'il réalise quelque chose, une belle action, qui permet de participer à la vie du musée.

  • Speaker #0

    Peut-être de manière un tout petit peu moins pragmatique, mais il y a un fantasme autour de la vie secrète des musées, de ce qui se passe une fois qu'on ferme les portes au public. Comment vous la définiriez, vous, cette ambiance dont vous parliez de cette vie muséale ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'ai une expérience, justement, j'en parlais tout à l'heure, pendant le Covid, on a accueilli ici une œuvre du musée du Louvre, le Prince de Goudéa, qui est une statue qui a 4000 ans, qui est une statue mésopotamienne, et donc, comme le musée ne pouvait pas se visiter, moi... J'étais tous les jours au musée et je me trouvais tout seul avec cette œuvre en conversation. Alors c'est vrai qu'une œuvre d'art, c'est l'œuvre d'art. C'est le rapport que vous avez à l'œuvre d'art. L'œuvre d'art, elle vous est abandonnée par le peintre, qui normalement n'a pas son mot à dire une fois qu'il l'a vendue au musée, ou donnée. Ensuite, il y a l'œuvre d'art qui vit de sa propre vie. Donc, vous êtes en présence de l'œuvre, donc l'œuvre est une présence. Et vous, comment vous fonctionnez ? Est-ce que vous avez bien mangé le matin ? Est-ce que vous avez écouté de la musique ? Est-ce que ceci, ce que cela ? Chacun avec sa propre vie et sa propre histoire. Donc moi j'ai tendance à penser que bon, être seul dans un musée c'est d'avoir une certaine tranquillité. Je reste absolument persuadé que le contact des œuvres, c'est une chance justement d'un conservateur de musée qui peut justement lui avoir cette... s'il veut il peut avoir toute l'attitude pour être seul au milieu des œuvres. Moi je plains mes collègues qui ne descendent pas dans leur musée une fois par jour. Vous pouvez demander aux collègues conservateurs de musées s'ils vont visiter leur musée une fois par jour. Moi, je m'efforce pratiquement, je dirais à 95%, une fois par jour, je visite le musée. Pour voir justement si les œuvres se portent bien, si elles n'ont pas besoin de me dire quelque chose, s'il y a quelque chose qui m'a échappé, que je n'ai pas vu, quelque chose où je me dis, tiens, ça, ça pourrait être mieux, ça, ça pourrait être ceci, ça pourrait être cela.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui continue à vous émerveiller dans les œuvres de soulage que vous avez ? Tous les jours sous les yeux ?

  • Speaker #2

    Les œuvres de Soulages ou les autres œuvres d'autres artistes, ce qui m'émerveille c'est de voir qu'à chaque fois que je la vois, il y a quelque chose que je n'ai pas vu, il y a quelque chose que je n'ai pas ressenti. Parfois je me suis rendu compte que je n'ai pas regardé. Parce que regarder c'est... des fois vous regardez mais vous ne regardez pas. C'est comme les gens, des fois vous les regardez mal, vous ne les regardez pas. Une oeuvre, il faut la considérer, il faut la regarder, il faut la fréquenter. Et donc on trouve toujours des détails, des choses qui... Et puis il y a cette émotion, et l'émotion c'est quelque chose qui ne se contient pas, c'est quelque chose qui ne se définit pas, et c'est quelque chose qui fait beaucoup... Tant vie et beaucoup de plaisir. On n'a pas besoin de lire 15 dictionnaires pour regarder une œuvre d'art. Je pense que ses propres émotions, le laisser aller, en fait, ça suffit. Moi, je dis toujours aux gens, c'est pas grave si vous ne connaissez pas, si vous n'êtes pas capable d'analyser telle ou telle œuvre d'art, si vous n'êtes pas capable de la mettre sur une échelle de valeur ou même sur une échelle de temps. Ce qui est important, c'est le plaisir que vous retenez. Il y a des gens qui peuvent se satisfaire de 20 minutes de visite de musée, il y a des gens qui en ont besoin de 3 heures. Là j'ai quitté un ami, il a visité le musée ce matin, il est retourné dans le musée pour voir des choses qu'il n'a pas vues. Donc voilà, et ça c'est gratuit. Je ne prêche pas que pour le musée Soulages, je prêche pour tous les musées. Un musée avec des œuvres figuratives, c'est certainement aussi complexe à appréhender maintenant pour un public du XXIe siècle que des salles avec des œuvres abstraites comme par exemple Soulages ou Kandinsky.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous travaillez les expositions temporaires justement ? Vous parliez là des œuvres des autres artistes que vous fréquentez aussi.

  • Speaker #2

    Moi je pense qu'il faut de la maturation. Déjà ça veut dire qu'il faut y réfléchir longuement à l'avance, savoir ce qu'on veut faire et se sentir prêt. Je pense que c'est un peu comme en amour. À un moment donné il faut se sentir prêt. Et même si l'amour c'est de la passion. Ce que je veux dire, c'est que quand je choisis une exposition, je réfléchis avec pas mal de choses. D'abord, je réfléchis pourquoi le faire. Donc, je dois pouvoir m'expliquer pourquoi j'ai envie de le faire et pourquoi j'ai envie de le faire au Musée Soulages. Par exemple, si on a fait Fernand Léger, tout le monde aime faire Fernand Léger, mais Pierre Soulages aimait bien Fernand Léger. Là, on va faire Lucio Fontana. Lucio Fontana, c'est un artiste que Pierre aime beaucoup. Donc, il y a ça. La deuxième chose, il y a le côté un petit peu stratégique, c'est-à-dire, pourquoi faire une exposition si cette même exposition a été faite il y a trois ans, à 100 kilomètres d'ici ? Donc, nous, on est dans une obligation de proposer des choses qui soient assez exceptionnelles. Et la troisième chose qui est importante... on n'a jamais de mal à se faire du bien ouais non

  • Speaker #3

    On a l'utilisation de plusieurs rouges, comme tout à l'heure, avec la préparation de l'arbre, la toile, la couche en verre ménière, ici qui va être le rouge, et le noir pour le plus épais, qui est rajouté par un fumier qui va être raclé. Vous savez, on a dit que la peinture était entaillée par un roi. Et alors, ce que je ne vous ai pas montré tout à l'heure, ce sont les outils utilisés par Soulages, qui ne sont pas franchement des outils d'artistes, mais ils sont des outils de peintres en bâtiment, même de maçons, on va dire.

  • Speaker #2

    Hop,

  • Speaker #3

    je vais vous montrer. dans des formats assez grands, mais ils ont aussi... Voilà. on retrouve les rives là, et là c'est une cordage chez les passants que vous utilisez si vous regardez vous avez des manteaux pour les joints de carrelage etc. donc là les outils plutôt rigides, là en métal on a des outils de peinture en bâtiment avec les spalters vous savez qui sont les pinceaux spalters avec ici les brosses, alors on dit plusieurs noms, les brosses à badigeons, les brosses à rochampire aussi je crois que Justin nous a parlé de l'écolage, il appelle ça des brosses à rochampire on se rend pas compte c'est presque la taille d'un visage humain ça est le diamètre est un peu toxique alors on voit aussi après soulage customisé les outils de ménage fabriquer des outils à partir de ce qu'il a sous la main donc là vous voyez cet emballé qui a été enveloppé dans de la mousse Vous avez, voilà, le métier, si les maris, c'est ça qu'on appelle ceci, c'est à racler les garnitures. Les maris, c'est ce que j'ai sur les mains de l'envoi, nous permettent, donc, pareil, de racler la matière, d'étaler la matière.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que vous avez appris de lui, vous ?

  • Speaker #2

    Soulages ? Oui. Alors moi, j'ai appris de Soulages que tout doit être dans le... Tout doit être dans le... quelque chose d'assez parfait dans le sens où tout est dans le détail. C'est-à-dire que quand on fait quelque chose, on parle de la pensée, on a pensé, la réalisation, et qu'on doit mener les choses toujours de la manière la plus parfaite possible, de manière à ce qu'une fois qu'on a terminé, si on prend un verre, on se dit on a fait le mieux qu'on pouvait faire. Ça, j'ai appris ça. Puis ce que j'ai appris de lui aussi, c'est beaucoup... C'est un homme qui a commencé à travailler avec d'autres artistes en 46, donc moi j'ai... beaucoup écouté Soulages sur ses relations avec des artistes qui maintenant ça passe à Paris-Mathusalem quoi, je sais pas moi par exemple Nicolas De Stael, Poliakoff, vous voyez ce que je veux dire, c'est formidable et puis moi j'ai appris aussi que les grands artistes Les personnalités très fortes, c'est celles qui doutent. Ceux qui ne doutent jamais, c'est des imbéciles. Dans tous les domaines, du reste. J'ai visité son atelier très souvent, et un homme comme ça, qui avait fait des centaines d'expositions, et qui avait exposé sur tous les continents, même à 100 ans, quand il montrait une œuvre, il attendait un avis. Quand quelqu'un a la certitude qu'il sait et qu'il sait surtout ce que doivent penser les autres et ce qu'on doit faire pour les autres, alors là, c'est toujours la porte ouverte, je pense, aux dérives. Moi je plains les gens qui ne s'intéressent à rien. J'ai toujours été surpris par les gens qui n'écoutent pas de musique. Par exemple, ça c'est un truc que je n'arrive pas à comprendre. Le musée c'est quand même une école de tolérance, une école de curiosité. Si ça ne sert pas à ça, je ne vois pas à quoi ça peut servir. Mais il ne faut pas non plus passer tout son temps à se dire ça sert à quoi.

  • Speaker #0

    Vous parliez de Soulages depuis qu'il est décédé. Le fait qu'il est presque d'autant plus présent dans les choix que vous faites, en tout cas dans votre esprit. Comment on fait pour lui survivre ?

  • Speaker #2

    survit tous d'abord on termine on survit tous d'abord on termine tous au cimetière on n'amène rien au cimetière pas ses richesses, pas ses tableaux, pas son fric pas ses disques, pas ses livres donc un jour où les gens les livres, ils ne vivent que du regard des gens, si vous avez une bibliothèque et que personne ne lit les bouquins que vous avez, autant les donner vos livres, donc moi je crois qu'on survit très bien on vit tout simplement quand Soulea je me disais il avait 102 ans, il disait qu'il en avait plus devant lui que derrière lui. Moi, ça me faisait marrer, quoi. Ça me faisait marrer. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que Pierre, ce qui l'intéressait, quand on lui a demandé le mot qu'il préférait dans la langue française, il disait encore Donc, ça veut dire que c'était quelqu'un qui avait une fringale de faire des choses, d'inventer des choses. C'était ça qui le passionnait, en fait, Pierre Soulages. C'était toujours faire des choses nouvelles. Et ça, ça n'a pas de prix. ...a sa vision de, comment dire, métaphysique. Moi, je pense qu'on survit très bien à tout et à tout le monde. Par contre, ou on devrait dire en revanche, en revanche, je pense que les œuvres d'art, et chez Pierre Soulages, survivent. Si Pierre Soulages... Ils n'ont pas eu d'enfant, Pierre Collet-Soulages. Je suis totalement persuadé que le succès d'année, en quelque sorte, même si ce terme n'est pas bien approprié, disons que le transfert, c'est le musée. Le musée, c'est peut-être ce qui incarne le plus Pierre Soulages. Le musée, dans un endroit qu'il a bien connu, à quelques centaines de mètres de sa maison, dans une ville qu'il a bien connue, dans un département qu'il a bien connu, dans des paysages qu'il a bien connus. Donc tout ça, c'est quand même très intéressant, c'est concentrique.

  • Speaker #0

    Et vous, vous vous sentez le messager de ça ?

  • Speaker #2

    Moi je me sens moi-même, avec l'équipe on a un message de transmission, donc on le fait, et si on l'a réussi on est content. Si nous on voit des gens, moi je vois l'équipe de médiation, des fois ils me racontent, ils ont abordé tel ou tel public, et qu'ils ont intéressé un public qui à première vue était compliqué, on est content. Je veux dire, vous savez, moi j'étais enseignant dans ma vie, dans une vie antérieure, j'étais trois ans professeur de français, de latin, d'histoire géo, un peu de tout, et on est content. Quand on a laissé quelque chose chez les gens, après il ne faut pas se leurrer, on ne laisse pas chez un gamin du CP, si vous lui laissez deux choses, c'est déjà formidable. Mais si on laisse quelque chose aux gens et qu'ils ont le sentiment en sortant que ce n'est pas n'importe quoi, que c'est bien, qu'ils ont vraiment ressenti une émotion, moi ça suffit à mon bonheur. Je n'ai pas besoin qu'on me l'écrive et qu'on me fasse une dissertation philosophique sur ça. Je pense qu'il faut voir les choses simplement. Il y a des choses qui peuvent être envisagées avec beaucoup de livres, de connaissances et de choses comme ça, ce qui est notre travail. Mais notre travail, c'est de faire de tout ça quelque chose qui est tout à fait acceptable pour des gens qui veulent entendre. Qui veulent entendre. C'est très important.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il vous restait encore des choses à découvrir de Soulages et de son travail ?

  • Speaker #2

    J'en découvre tous les jours. Je découvre des choses tous les jours, je découvre des choses qui, puisque là on est en train de travailler sur les archives, c'est des choses qui sont peut-être secondaires pour le grand public, mais qui pour nous sont intéressantes. On découvre des choses qu'il a écrites, qu'il a dites, qu'on ne savait pas, et on se dit, mais tiens, ça, c'est important, on va refaire quelque chose. Et puis de ça, pof, on va faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Vous avez toujours cru au succès du musée ?

  • Speaker #2

    Oui. De toute façon, on ne se pose pas la question. C'est-à-dire qu'en réalité, d'abord, je ne suis pas propriétaire du musée, déjà pour commencer. Personne n'est propriétaire d'un musée ou des œuvres d'un musée. Comme je le dis, c'est les spectateurs, les regardeurs qui sont propriétaires des œuvres. Moi, j'ai toujours pensé qu'au fond, il fallait faire le travail nécessaire pour intéresser les gens à l'œuvre de Soulages. Mais déjà, il y avait cette grande exposition de 2009 qui était quand même super importante, qui a fait connaître l'œuvre de Pierre Soulages. Nous on avait simplement à mettre en scène, à un peu scénariser, à animer l'oeuvre de Pierre Soulages pour que ça intéresse les gens. Et c'est jamais se décourager en disant ma fille peut faire la même chose, mon fils fait la même chose, ça veut rien dire, c'est tout noir. Vous aurez toujours des gens qui vont vous dire ça, il y a toujours des gens qui vont vous dire que je sais pas moi que Frank Zappa c'est de la mauvaise musique ou que le rock'n'roll c'est une musique de voyous. Je veux dire, c'est pas plus une musique de voyous que, je sais pas, la peinture de Caravage, qui lui, Caravage, vivait, était un mauvais garçon, vivait dans les quartiers un peu chauds de Naples. Vous voyez ce que je veux dire ? Il faut tout remettre en perspective. Donc moi, pas de soucis avec ça. Donc j'y ai toujours cru, bien sûr. Après, un musée, c'est comme un vélo. Si vous arrêtez de pédaler, vous tombez.

  • Speaker #0

    Quelle place il a trouvée dans le paysage muséal français ?

  • Speaker #2

    Musée Soulages ? Il a trouvé, je pense, une place comme un musée monographique, mais qui est quand même très original, de par l'immersion des œuvres. Et ça, c'est le fait des architectes d'ERCR, dans des sortes de cabines de métal, où on a... On a travaillé avec Pierre Soulages pour mettre ça au point, et avec les architectes, parce que Soulages ne voulait pas vraiment de scénographie, il voulait comme un accrochage qui ne s'arrête jamais. C'est formidable un accrochage qui ne s'arrête jamais. Quelque chose qui ne s'arrête jamais, c'est le mouvement perpétuel. Donc c'est une sorte de mouvement perpétuel, que nous on change toujours les accrochages dans le musée, c'est ce que voulait Pierre, et en plus il voulait une salle d'exposition temporaire. pour exposer d'autres artistes que lui. Pour pas qu'il soit dit, c'est Pierre Soulages, Isclairosa mort, ce vieux-là, ce musée, il est que pour lui, il est que pour personne d'autre. Alors nous, ici, on a exposé Yves Klein, Fernand Léger, Pablo Picasso, Le Corbusier, beaucoup de femmes. On va exposer beaucoup de femmes aussi en 2025. Voilà, donc c'est à tout le monde, je dirais. Pierre Soulages, quand on interrogeait sur le noir, parce que j'ai un tel, tel artiste, il a acheté un noir industriel, il a acheté le brevet, c'est le fameux Vantoblack, c'est, comment il s'appelle, c'est à Lichkapour. Et je demande à Soulages, et Soulages me dit, mais vous savez, le noir appartient à tout le monde. Alors le noir appartient à tout le monde et le noir ça veut dire plein de choses. C'est pas uniquement, quand on parle de la peinture de Pierre Soulages, quelque chose qui est dramatique. La peinture de Soulages c'est pas une peinture de cimetière. C'est que le noir c'est un vocabulaire, c'est une sorte de... C'est la classe quoi, tout simplement, quand on est bien habillé, quand on a une belle livrée, c'est ça le noir. C'est une sorte de sobriété. Et c'est ça qui, à mon sens, est important. C'est ça qui est important pour... pour parler de Pierre Soulages. On parlait des gens de la réception de l'œuvre de Pierre Soulages, je pensais que parce qu'il peignait en noir, c'était monochrome, ce qui n'est pas le cas. Ce sont des noirs très variés, travaillés avec beaucoup d'outils, et que d'autre part, le noir, on ne précipite pas les gens dans une mine. On voit très bien que le noir porte la lumière, dans cette lumière il y a des couleurs, il y a une grande variété dans tout ça. Et puis, ça fait toujours appel, comme la musique, ça fait toujours appel à l'émotion.

  • Speaker #0

    Si on se revoit dans 10 ans, qu'est-ce que vous espérez pouvoir me dire du musée dans 10 ans ?

  • Speaker #2

    J'en sais rien, je sais pas. Moi je dirais simplement que chacun aura fait son travail, et que ce qui compte c'est pas tellement les gens qui ont travaillé, c'est la mission qu'on s'est donnée, et le résultat qu'on a obtenu, et on verra le résultat du musée dans la fréquentation du musée bien sûr, mais dans le plaisir que les gens auront visité le musée. Personne n'est propriétaire des œuvres de Pierre Soulages. Je veux dire, c'est clair, je veux dire, Rodèze est connu mondialement maintenant grâce au musée Soulages. Je pense quand même que le musée a apporté quand même beaucoup de fréquentation sur la ville de Rodèze. C'est l'artiste lui-même qui fait que ça marche. C'est pas Decron, c'est pas les organisateurs des musées, c'est pas les cadres. Nous, on est là pour mettre en valeur l'œuvre d'un artiste et faire que non seulement ça plaise aux gens, mais qu'il s'y retrouve bien. Si quelqu'un dit, moi je reste dans le musée parce que j'ai envie d'y dormir, ou j'ai envie, je sais pas, d'y faire un peu de yoga, ou de lire un livre, ou même pourquoi pas faire du sumo, pourquoi pas, je veux dire, tout reste ouvert. Ça vous va ?

  • Speaker #0

    Oui, vous avez donné plein d'idées.

  • Speaker #2

    Bon.

  • Speaker #0

    On va vous proposer de faire du sumo. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Je vous en prie.

  • Speaker #0

    Ainsi s'achève ce troisième et dernier épisode de la série de Finta, consacré aux dix ans du musée Soulages de Rodez, en coulisses avec celles et ceux qui incarnent cette antre de l'outre-noir. J'espère qu'elle vous a plu. Je suis toujours curieuse d'avoir vos retours et de vous lire. Si vous appréciez Finta, parlez-en autour de vous, partagez les épisodes, c'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à ce travail indépendant. Finta est disponible gratuitement sur toutes les plateformes de podcast. Vous pouvez l'écouter sur Deezer, Spotify, Apple Podcast, Google Podcast. Vous pouvez aussi retrouver tous les épisodes ainsi que les ressources bibliographiques sur fintapodcast.fr. Et pour suivre Finta au quotidien, c'est sur Facebook et Instagram que l'on se retrouve. Merci de votre fidélité et à très bientôt.

Description

Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les halls Charles, le foirail, le jardin public cerné de son petit mur de pierres. C’était le Rodez d’avant, avant le musée Soulages. A cette époque-là, le pari soulevait plus de scepticisme que d’enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de corten qui sortent de terre pour s’adosser au jardin. Suivra l’inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C’était en 2014, il y a 10 ans. A chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective.


D’ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonne. Précieux gardiens de l’âme de Pierre Soulages, qu’ils ont tous côtoyé et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leurs côtés dans l’ombre des Outrenoirs, pour une série de Finta ! en trois épisodes consacrés aux 10 ans du musée Soulages.


EPISODE 3/3... avec Benoît Decron


La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu’il semble capable de se fondre dans l’esprit de l’artiste disparu, de penser comme il l’aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. A la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public.


Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste iconique de son vivant, à partir d’une feuille blanche dans une ville qu’il ne connaissait pas, Benoît Decron est aujourd’hui l’un des plus fins connaisseurs de l’œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. De son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d’orchestre : nous en parlons au micro de Finta ! Je le rencontre dans l’entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.


🎧 Pour réécouter l'épisode 1/2 avec Amandine Meunier, responsable des collections : c'est ici.

🎧 Et l'épisode 2/3 avec Christel Lagarrigue, dans l'atelier, c'est là.


🧡 Finta est un podcast réalisé, produit et écrit par Lola Cros. Il est mixé par le studio Qude. Plus d'infos : www.fintapodcast.fr Retrouvez tous les épisodes de Finta! gratuitement sur les applis de podcasts.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il suffit de peu pour que remontent des souvenirs partagés. Les Halles Charles, le foireil, le jardin public cernés de son petit mur de pierre. C'était le Rodès d'avant. Avant, le musée Soulages. À cette époque-là, le Paris soulevait plus de scepticisme que d'enthousiasme. Puis viennent les images de la première pierre, de ces immenses blocs de cortènes qui sortent de terre pour s'adosser au jardin. Suivra l'inauguration en présence du président Hollande et du grand Pierre Soulages, déjà haut de 95 printemps. C'était en 2014, il y a dix ans. À chaque étape de sa construction, les souvenirs individuels croisent la mémoire collective. D'ici 2025, le musée Soulages franchira la barre du million et demi de visiteurs accueillis. Derrière le rideau, dans les réserves, les bureaux et les coulisses, une trentaine de salariés bourdonnent. Précieux gardiens de l'âme de Pierre Soulages qu'ils ont tous côtoyés et avec qui ils ont appris à travailler, ces femmes et ces hommes incarnent le musée et le font vivre chaque jour. Je vous invite à plonger à leur côté, dans l'ombre des Outres-Noirs, pour une série de trois épisodes de Finta consacrés aux dix ans du musée Soulages. La voix de Pierre Soulages trotte dans sa tête comme un petit refrain, si bien qu'il semble capable de se fondre dans l'esprit de l'artiste disparu, de penser comme il l'aurait fait, de lire entre les lignes et les tableaux. À la fois tête pensante et capitaine du navire, le conservateur en chef et directeur Benoît Decron mène le musée Soulages depuis 15 ans, bien avant son ouverture au public. Curieux de relever le défi de travailler avec un artiste conique de son vivant, à partir d'une feuille blanche dans une ville qu'il ne connaissait pas, Benoît de Cron est aujourd'hui l'un des plus fins connaisseurs de l'œuvre de Pierre Soulages, avec qui il a tissé une solide amitié. de son rôle pivot au musée Soulages, de sa vision pour les dix prochaines années, de sa responsabilité de chef d'orchestre, nous en parlons dans cet épisode au micro de Finta. Je le rencontre dans l'entrée du musée Soulages, entouré des équipes qui accueillent les visiteurs chaque jour.

  • Speaker #1

    Je peux avoir un code postal, s'il vous plaît ? Le mien c'est de 1854 parce que j'habite à Ounel-Château. C'est celui de votre famille ?

  • Speaker #2

    Le tien,

  • Speaker #1

    Côte d'Azcad. 17 000.

  • Speaker #3

    Ah voilà.

  • Speaker #1

    Comme vous le savez sûrement, l'objet vous donne accès au musée de la ville. Le musée Fionnail, le musée de Mille-Fèches, pendant 28 jours. Les billets seront juste à faire à la vague.

  • Speaker #2

    Moi, l'ambiance que je voudrais, d'abord, je pense que le musée est immersif, parce que c'est quand même une expérience unique au monde que de rentrer dans le musée Soulages et se retrouver dans une salle qui est un petit peu enterrée et qui est sombre, avec du métal sur le sol et du métal sur le mur. Moi, ce que je voudrais que les gens ressentent, c'est et pourquoi pas moi ? Je m'appelle Benoît Decron, je suis né en 1959 à Niort, et je suis donc conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée Soulages. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est l'exposition permanente. On a juste la phase 5 et la phase 7 qui en ce moment sont en cours de rapprochage, donc il y aura un peu moins de commentaires à ce moment-là. Lorsque vous voyez ce pictogramme-là, il y aura un numéro en dessous. Vous saisissez le numéro sur le clavier, vous vous mettez à l'oreille. Si toutefois ça ne se lance pas, vous rappuyez sur Play. Moins et plus pour monter ou baisser le son, et Pause pour faire pause sur le commentaire. Donc c'est simple que ça.

  • Speaker #3

    Super. Merci. Soyez bienvenus.

  • Speaker #4

    Merci.

  • Speaker #2

    Ce que je trouve intéressant dans un musée, c'est d'intéresser les gens. Et je pense qu'il est beaucoup plus gratifiant d'aller chercher des gens qui n'y connaissent rien que d'essayer de satisfaire des gens qui croient tout connaître. Donc c'est ça qui m'intéresse dans le musée. Moi j'aime bien aller quelque part, dans un domaine que je connais mal ou peu, et que des gens me donnent envie de visiter. Voilà ce que je pourrais dire, ce que je souhaite que les gens... ressentent quand ils arrivent au musée. Et peut-être qu'il y a une deuxième chose aussi qui est importante, c'est que... Ça leur appartient. C'est-à-dire qu'en réalité, ce qu'il y a dans les musées, c'est fait pour que les gens les admirent, les regardent, les fréquentent. Et que, évidemment que ça appartient, qu'il y a un musée, une collectivité, un collectionneur, etc. Mais au fond, ce qu'on a dans les yeux... C'est quand même quelque chose qui nous appartient. Donc c'est pour ça que je dis que les œuvres, qui sont le miroir en quelque sorte de ce que les gens voient lors de leur pérégrination, eh bien ça leur appartient. Voilà ce que je pourrais dire. Moi je voudrais que les choses soient vraiment envisagées de la manière la plus simple possible.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous avez une anecdote là, depuis dix ans, un souvenir d'un visiteur en particulier, une remarque, quelque chose que vous avez entendu et qui vous fait dire que cet objectif-là, il est réussi ?

  • Speaker #2

    Bah, j'ai pas d'anecdote particulière, sauf peut-être une personne, une fois, qui est arrivée le matin à dix heures, et puis qui est repartie dix-huit heures. Elle était avec son livre, je pense qu'elle a eu tout le temps de lire son livre. Moi, ça me dérange pas que les gens... Fasse un stationnement extrêmement long, un peu ventouse, à l'intérieur du musée, parce que s'ils considèrent que le musée est un lieu à part, avec une certaine tranquillité, il faut qu'ils en profitent. Donc moi, c'est peut-être ce genre de souvenir. Et puis si, peut-être, j'ai le souvenir aussi d'avoir fait une visite, il y a assez longtemps, pour des gens non voyants. Et alors c'est intéressant de parler de noir, d'œuvre noire, à des gens qui sont non-voyants. Parce que le noir c'est aussi extrêmement large, le noir, du moins la vision du noir, ou ce qu'on peut imaginer du noir entre le psychologique, le visuel, l'optique, tout ce qu'on veut. Voilà, c'est ça, j'ai un sacré souvenir, parce qu'expliquer du noir à des gens qui ne voient pas, mais que les aveugles ne voient pas du noir, les aveugles voient de la lumière, les aveugles voient à leur manière des couleurs, des scintillements, je crois que c'est aussi quelque chose qui, à mon avis, est significatif. Avant de venir ici à Rodez, j'ai obtenu le concours de l'école du patrimoine. Ensuite, j'ai pris un premier poste à Langres pendant huit ans, où je gérais un musée de beaux-arts. Et puis ensuite, j'ai géré un musée d'art contemporain, moderne et contemporain, au Sable d'Olonne pendant 13 ans. Et ça fait 15 ans ici que je suis à Rodez. Je suis venu pour construire le musée et je suis venu surtout pour travailler avec Pierre Soulages. Parce que c'est une expérience hors normes que de travailler avec un artiste en activité. Donc... Je crois que j'ai eu cette chance inouïe d'être un peu plongé dans le creuset avec l'artiste, sa femme, Colette et toute l'équipe du reste. On a eu une chance formidable de travailler avec Pierre. Je n'ai jamais senti chez Pierre Soulages un quelconque affaiblissement lié à l'âge, par exemple. Jamais, jamais. Je pense que le musée Soulages m'a appris à comprendre que l'âge n'a rien à voir avec les artères. parce que l'âge c'est quelque chose qui est dans la tête il y a des gens qui peuvent avoir 25 ans qui peuvent être infiniment vieux et il y a des gens comme Pierre Soulages au delà de 100 ans qui ont une vista absolument incroyable C'est aussi une question de relation, c'est-à-dire avoir des relations avec l'artiste, avec sa femme. C'est pas la même chose que de travailler avec un artiste vivant et que de travailler avec des artistes qui sont morts. Si vous mettez Delacroix et Ingres sur le même mur dans un musée, vous allez le faire. Mais dans la vraie vie, ils n'auraient jamais exposé ensemble. Donc vous voyez déjà la différence. Et puis ça veut dire qu'il faut recueillir la vie de l'artiste, ça veut dire qu'il faut travailler avec lui, il faut partager les points de vue, c'est un travail qui est tressé en fait entre l'artiste, sa femme, nous l'équipe du musée, les architectes très importants, les architectes de RCR, et puis l'équipe technique de l'agglomération pour arriver à faire ce musée. Et on fait ce musée pour les œuvres de Pierre Soulages. Pour mettre en valeur son travail, mais pour les gens, pour les braves gens qui vont avoir envie de visiter ce musée. Si vous n'êtes pas de visiteurs dans un musée, les œuvres, elles ont besoin de vivre avec le regard des visiteurs.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui vous fait venir alors ? Qu'est-ce qui fait que vous signez pour l'aventure ?

  • Speaker #2

    Ce que je signe pour l'aventure, parce que d'abord, je ne connaissais pas Pierre Soulages, mais je connaissais son œuvre et qui m'intéressait, mais comme d'autres artistes. Et puis je me suis dit, c'est une occasion formidable de travailler avec un artiste qui touche sur le XXe et le XXIe siècle. C'est mon domaine qui me passionne. C'est aussi une expérience qui n'est pas simple, parce que ce n'est pas un long fleuve tranquille de travailler avec un artiste en activité. éclairer les oeuvres, les accrocher, faire des choix, faire des choix d'expo. Mais moi j'aime bien quand ça bouge. Et quand on suscite, je dirais, à la fois l'intérêt de l'artiste avec qui on travaille et du public. Et à la fois, évidemment, très naturellement, c'est monter une amitié professionnelle avec Pierre Soulages. On a eu l'honneur de travailler ensemble et puis une amitié tout court entre Pierre, Colette et moi. Et puis il y a un certain nombre de gens de l'équipe. La plupart des gens de l'équipe du musée Soulages sont des gens qui connaissaient bien Pierre Soulages, qui connaissent bien Colette et on est un peu une famille. Et donc c'est une chance absolument inouïe. Moi je trouve ça très bien. Et moi je suis resté là pendant 15 ans, ça fait 15 ans que je suis là. J'ai été sollicité plusieurs fois pour travailler dans les gros musées de province. voire dans des gros musées privés à Paris. Mais moi, j'ai accepté, je n'ai même pas donné suite, parce que je pense que c'est très important d'avoir une fidélité auprès de l'artiste et maintenant auprès de sa femme. Et croyez-moi, quand on donne de soi, quand on donne, je dirais, un peu de ce qu'on est, tout simplement, eh bien, on en est récompensé dans sa tête. Le plaisir, c'est de se dire, qu'est-ce que j'ai fait de bien ? Quelles ont été mes relations avec cet artiste ? Qu'est-ce qui lui a fait plaisir ? Pierre, il n'est plus là, mais il est toujours là. C'est-à-dire que tous les gens qui ont travaillé avec lui savent très bien que, Pierre Soulages, quand on monte une exposition avec ses œuvres, On sait d'avance ce qu'il veut, ce qu'il veut pas. C'est même peut-être, je dirais, même encore plus présent que quand il était vivant. parce qu'on sait comment il fonctionne. On n'est peut-être plus beaucoup, finalement, en France, à avoir monté, en présence de Pierre Soulages, des expositions. Et quelque chose qui me plaisait aussi dans cette aventure, c'était de partir ex nihilo, faire quelque chose à partir de zéro. Partir de zéro, c'est-à-dire un conservateur qui arrive, une secrétaire à un quart de temps, c'était ça au début, à mi-temps, ensuite, et puis créer une équipe où on est à peu près, maintenant, bon an, mal an, entre 35 et 40. Mais la force du musée... Parce qu'il ne faut pas se cacher, on est quand même dans une petite commune, modeste. La force du musée, c'est aussi, je dirais, l'enthousiasme de l'équipe et puis sa cohésion. Et ça, c'est ce que j'aime, moi. J'aime bien les choses qui sont incarnées.

  • Speaker #0

    Vous parlez de Rodez, une petite ville, mais il y avait aussi un grand scepticisme avant.

  • Speaker #2

    Bien sûr, mais je ne connais personne qui veut qu'on construise un musée dans sa ville. Pourquoi ? Parce que ça coûte trop cher, parce que ce n'est pas pour moi, parce que ça coûte trop cher. Il faudrait mieux mettre de l'argent, je ne sais pas, pour autre chose. Sauf qu'en fait la culture c'est quelque chose qui... C'est pas une espèce sonnante et trébuchante la culture, c'est aussi quelque chose qui est un peu immanent, c'est quelque chose qui apporte de l'émotion, de la joie de vivre, de la satisfaction de soi-même. Donc quand on a créé le musée... qu'on a fait nécessaire pour faire beaucoup de conférences. J'allais des fois dans des conseils municipaux à 10h du soir pour leur faire une conférence, pour leur expliquer que Soulages c'était bien. Je pouvais accepter qu'on me dise que c'était pas bien, mais par contre je pouvais pas accepter qu'on me dise que c'était n'importe quoi. On peut jamais dire à quelqu'un que ce qu'il fait c'est n'importe quoi. Parce que ça va, je dirais, des activités humaines les plus intimes aux activités du travail. Chacun fait un travail qui est important. Si vous voulez, ça fait quand même presque une quarantaine d'années que je fais ce travail. Donc, je pense que comme dans la vie, si on résout, je dirais, les choix, l'émotion à j'aime ou j'aime pas, c'est triste.

  • Speaker #3

    C'est pas moi.

  • Speaker #1

    Là où j'étais, personne.

  • Speaker #3

    Tu vois, là, je suis très relaxé. On a montré. Ouais.

  • Speaker #1

    On tourne sur tous les postes. En général, on est soit en salle, soit au contact accès hall. Donc, on accueille les visiteurs. On peut être aussi à la caisse. Du coup, on encaisse les visiteurs, que ce soit pour la partie boutique ou la partie billetterie. Donc, oui, les salles, le contact accès et après, c'est vraiment de l'encaissement. On est un peu sur tous les postes. sur tous les postes.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire que chaque jour,

  • Speaker #1

    vous passez sur tous les postes. Ça veut dire que parfois, on peut avoir une journée entière où on ne fait que de l'accueil, même en plein été, en fonction du dispo et tout ça. Et parfois, c'est dispatché, on peut avoir deux heures de salle d'affilée comme on peut avoir, ça peut être vraiment une heure de salle, une heure d'accueil, on n'a pas vraiment de planning, on fait en fonction des besoins et tout ça. Moi, être à l'accueil. Moi, j'aime bien être à l'accueil pour le côté boutique, le côté contact, le fait de parler avec les visiteurs. Après l'été, on n'a pas trop le temps de parler, en plein été, sur la période du 15 juillet au 15 août. parce que c'est assez intense. Donc là, ça fait plutôt rentrer les visiteurs. Mais sinon, après, il y a vraiment le contact en boutique. Dans les salles, on peut l'avoir aussi parce que les gens viennent nous poser des questions, s'arrêtent pour discuter avec nous, pour avoir des informations. Mais bon, j'aime bien ce poste-là. Voilà. Ça fait longtemps que vous travaillez en business ? Là, ça va faire trois ans au mois de mai. Trois ans au mois de mai. Ouais. Merci. Bonjour. Allô. Et voilà, on se voit ensuite. Oui, vous devez l'avoir sous votre billet. Regardez, c'est là. Vous l'avez là. Merci.

  • Speaker #3

    Merci bien.

  • Speaker #1

    Vous avez l'accès aux salles en bas et vous avez également l'exposition sur PirateBlock.

  • Speaker #2

    Toi.

  • Speaker #0

    Impossible.

  • Speaker #2

    Casier ? Impossible de me faire le casier.

  • Speaker #3

    Je me suis foutue.

  • Speaker #2

    J'arrive.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez m'expliquer aujourd'hui quel est votre rôle dans le musée ? Comment vous définissez votre métier ?

  • Speaker #2

    Alors d'abord je définirais mon métier comme quelque chose qui me passionne. Je pense que si je n'avais pas fait ce métier, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Peut-être voler des mobilettes, je ne sais pas. Mais en tout cas, ça me passionne et le métier, si je devais dire, c'est à la fois transmettre et conserver. Donc transmettre, c'est par les expositions qu'on crée, par les bouquins qu'on écrit, par le travail qu'on fait pour présenter telle ou telle chose. Et ça, c'est transmettre et partager. Et puis conserver... C'est qu'au fond, Pierre et Colette Soulages ont donné des œuvres de Pierre Soulages. On est dans un musée immunographique ici. Nous, on doit conserver très proprement ces œuvres-là, continuer à les étudier. Ça fait partie aussi, quelque part, de la conservation et de la transmission, les deux à la fois. Et que la personne qui arrivera après nous récupère les œuvres dans le même état. que quand nous on les a eus. Donc on est très sensible à ça. Après, la vie du musée c'est extrêmement large. Le conservateur de musée, c'est pas le vieux machin qui est assis derrière un bureau avec des piles de bouquins. Ça c'était il y a 50 ans. Le conservateur de musée c'est quelqu'un qui tire une équipe avec lui, qui entraîne son équipe. C'est une sorte de petit capitaine si on veut. Et c'est quelqu'un qui essaye aussi de transmettre sa passion aux gens avec qui il travaille. Moi j'ai la chance d'avoir une équipe ici tout à fait formidable, des gens qui sont plein de vie, plein d'idées, je trouve ça tout à fait passionnant. Donc c'est ça. Puis il y a une chose aussi à laquelle j'accorde beaucoup d'importance, c'est l'éducation et la médiation. Je crois qu'une bonne médiation, si les gens sont mal à l'aise par rapport à telle ou telle œuvre ou telle ou telle salle par exemple, je crois que c'est bien qu'il y ait quelqu'un qui les prenne comme à la veillée. et un guide conférencier, un médiateur, eh bien, le médiateur, il mène sa visite, je dirais un peu comme le chauffeur de bus. On dit du chauffeur de bus qu'il est le seul maître à Dieu, à bord, après Dieu. Mais c'est pareil. Chacun a sa manière différente de mener les gens, à les emmener vers la connaissance. Et comme je suis un ancien prof, j'aime bien que dans un musée, on puisse... Apprendre quelque chose, je trouve pas ça déplaisant, le côté pédagogique du musée. C'est quelque chose qui m'intéresse. Si je sors de quelque chose, de quelque endroit où je me rends, moi à titre personnel, en tant qu'être humain, j'aime bien retirer quelque chose de l'endroit où je suis allé. Voilà, donc ça, ça me paraît important. Mais vous savez, le rôle d'un conservateur de musée, c'est une sorte d'homme orchestre. Donc, il y a plein de choses possibles.

  • Speaker #0

    Justement, il y a...

  • Speaker #2

    C'est beaucoup de gestion, bien sûr, aussi. Évidemment, la gestion financière, la gestion du personnel, qui est important. Un personnel satisfait, c'est un personnel qui a envie de travailler avec vous, avec qui on fait des choses. Et un musée qui est bien géré, puisque nous, on est un établissement public, c'est-à-dire qu'on est à peu près à 65% d'autofinancement. C'est-à-dire que pour 10 euros qui rentrent au musée, il y a 6,5 euros qui sont gagnés par nous. C'est aussi très très important que chacun comprenne que le visiteur participe, exactement comme le spectateur qui va assister à un film, qui va au cinéma, le cinéphile, il participe à la réalisation des films. Donc s'il réalise quelque chose, une belle action, qui permet de participer à la vie du musée.

  • Speaker #0

    Peut-être de manière un tout petit peu moins pragmatique, mais il y a un fantasme autour de la vie secrète des musées, de ce qui se passe une fois qu'on ferme les portes au public. Comment vous la définiriez, vous, cette ambiance dont vous parliez de cette vie muséale ?

  • Speaker #2

    Alors moi, j'ai une expérience, justement, j'en parlais tout à l'heure, pendant le Covid, on a accueilli ici une œuvre du musée du Louvre, le Prince de Goudéa, qui est une statue qui a 4000 ans, qui est une statue mésopotamienne, et donc, comme le musée ne pouvait pas se visiter, moi... J'étais tous les jours au musée et je me trouvais tout seul avec cette œuvre en conversation. Alors c'est vrai qu'une œuvre d'art, c'est l'œuvre d'art. C'est le rapport que vous avez à l'œuvre d'art. L'œuvre d'art, elle vous est abandonnée par le peintre, qui normalement n'a pas son mot à dire une fois qu'il l'a vendue au musée, ou donnée. Ensuite, il y a l'œuvre d'art qui vit de sa propre vie. Donc, vous êtes en présence de l'œuvre, donc l'œuvre est une présence. Et vous, comment vous fonctionnez ? Est-ce que vous avez bien mangé le matin ? Est-ce que vous avez écouté de la musique ? Est-ce que ceci, ce que cela ? Chacun avec sa propre vie et sa propre histoire. Donc moi j'ai tendance à penser que bon, être seul dans un musée c'est d'avoir une certaine tranquillité. Je reste absolument persuadé que le contact des œuvres, c'est une chance justement d'un conservateur de musée qui peut justement lui avoir cette... s'il veut il peut avoir toute l'attitude pour être seul au milieu des œuvres. Moi je plains mes collègues qui ne descendent pas dans leur musée une fois par jour. Vous pouvez demander aux collègues conservateurs de musées s'ils vont visiter leur musée une fois par jour. Moi, je m'efforce pratiquement, je dirais à 95%, une fois par jour, je visite le musée. Pour voir justement si les œuvres se portent bien, si elles n'ont pas besoin de me dire quelque chose, s'il y a quelque chose qui m'a échappé, que je n'ai pas vu, quelque chose où je me dis, tiens, ça, ça pourrait être mieux, ça, ça pourrait être ceci, ça pourrait être cela.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui continue à vous émerveiller dans les œuvres de soulage que vous avez ? Tous les jours sous les yeux ?

  • Speaker #2

    Les œuvres de Soulages ou les autres œuvres d'autres artistes, ce qui m'émerveille c'est de voir qu'à chaque fois que je la vois, il y a quelque chose que je n'ai pas vu, il y a quelque chose que je n'ai pas ressenti. Parfois je me suis rendu compte que je n'ai pas regardé. Parce que regarder c'est... des fois vous regardez mais vous ne regardez pas. C'est comme les gens, des fois vous les regardez mal, vous ne les regardez pas. Une oeuvre, il faut la considérer, il faut la regarder, il faut la fréquenter. Et donc on trouve toujours des détails, des choses qui... Et puis il y a cette émotion, et l'émotion c'est quelque chose qui ne se contient pas, c'est quelque chose qui ne se définit pas, et c'est quelque chose qui fait beaucoup... Tant vie et beaucoup de plaisir. On n'a pas besoin de lire 15 dictionnaires pour regarder une œuvre d'art. Je pense que ses propres émotions, le laisser aller, en fait, ça suffit. Moi, je dis toujours aux gens, c'est pas grave si vous ne connaissez pas, si vous n'êtes pas capable d'analyser telle ou telle œuvre d'art, si vous n'êtes pas capable de la mettre sur une échelle de valeur ou même sur une échelle de temps. Ce qui est important, c'est le plaisir que vous retenez. Il y a des gens qui peuvent se satisfaire de 20 minutes de visite de musée, il y a des gens qui en ont besoin de 3 heures. Là j'ai quitté un ami, il a visité le musée ce matin, il est retourné dans le musée pour voir des choses qu'il n'a pas vues. Donc voilà, et ça c'est gratuit. Je ne prêche pas que pour le musée Soulages, je prêche pour tous les musées. Un musée avec des œuvres figuratives, c'est certainement aussi complexe à appréhender maintenant pour un public du XXIe siècle que des salles avec des œuvres abstraites comme par exemple Soulages ou Kandinsky.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que vous travaillez les expositions temporaires justement ? Vous parliez là des œuvres des autres artistes que vous fréquentez aussi.

  • Speaker #2

    Moi je pense qu'il faut de la maturation. Déjà ça veut dire qu'il faut y réfléchir longuement à l'avance, savoir ce qu'on veut faire et se sentir prêt. Je pense que c'est un peu comme en amour. À un moment donné il faut se sentir prêt. Et même si l'amour c'est de la passion. Ce que je veux dire, c'est que quand je choisis une exposition, je réfléchis avec pas mal de choses. D'abord, je réfléchis pourquoi le faire. Donc, je dois pouvoir m'expliquer pourquoi j'ai envie de le faire et pourquoi j'ai envie de le faire au Musée Soulages. Par exemple, si on a fait Fernand Léger, tout le monde aime faire Fernand Léger, mais Pierre Soulages aimait bien Fernand Léger. Là, on va faire Lucio Fontana. Lucio Fontana, c'est un artiste que Pierre aime beaucoup. Donc, il y a ça. La deuxième chose, il y a le côté un petit peu stratégique, c'est-à-dire, pourquoi faire une exposition si cette même exposition a été faite il y a trois ans, à 100 kilomètres d'ici ? Donc, nous, on est dans une obligation de proposer des choses qui soient assez exceptionnelles. Et la troisième chose qui est importante... on n'a jamais de mal à se faire du bien ouais non

  • Speaker #3

    On a l'utilisation de plusieurs rouges, comme tout à l'heure, avec la préparation de l'arbre, la toile, la couche en verre ménière, ici qui va être le rouge, et le noir pour le plus épais, qui est rajouté par un fumier qui va être raclé. Vous savez, on a dit que la peinture était entaillée par un roi. Et alors, ce que je ne vous ai pas montré tout à l'heure, ce sont les outils utilisés par Soulages, qui ne sont pas franchement des outils d'artistes, mais ils sont des outils de peintres en bâtiment, même de maçons, on va dire.

  • Speaker #2

    Hop,

  • Speaker #3

    je vais vous montrer. dans des formats assez grands, mais ils ont aussi... Voilà. on retrouve les rives là, et là c'est une cordage chez les passants que vous utilisez si vous regardez vous avez des manteaux pour les joints de carrelage etc. donc là les outils plutôt rigides, là en métal on a des outils de peinture en bâtiment avec les spalters vous savez qui sont les pinceaux spalters avec ici les brosses, alors on dit plusieurs noms, les brosses à badigeons, les brosses à rochampire aussi je crois que Justin nous a parlé de l'écolage, il appelle ça des brosses à rochampire on se rend pas compte c'est presque la taille d'un visage humain ça est le diamètre est un peu toxique alors on voit aussi après soulage customisé les outils de ménage fabriquer des outils à partir de ce qu'il a sous la main donc là vous voyez cet emballé qui a été enveloppé dans de la mousse Vous avez, voilà, le métier, si les maris, c'est ça qu'on appelle ceci, c'est à racler les garnitures. Les maris, c'est ce que j'ai sur les mains de l'envoi, nous permettent, donc, pareil, de racler la matière, d'étaler la matière.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que vous avez appris de lui, vous ?

  • Speaker #2

    Soulages ? Oui. Alors moi, j'ai appris de Soulages que tout doit être dans le... Tout doit être dans le... quelque chose d'assez parfait dans le sens où tout est dans le détail. C'est-à-dire que quand on fait quelque chose, on parle de la pensée, on a pensé, la réalisation, et qu'on doit mener les choses toujours de la manière la plus parfaite possible, de manière à ce qu'une fois qu'on a terminé, si on prend un verre, on se dit on a fait le mieux qu'on pouvait faire. Ça, j'ai appris ça. Puis ce que j'ai appris de lui aussi, c'est beaucoup... C'est un homme qui a commencé à travailler avec d'autres artistes en 46, donc moi j'ai... beaucoup écouté Soulages sur ses relations avec des artistes qui maintenant ça passe à Paris-Mathusalem quoi, je sais pas moi par exemple Nicolas De Stael, Poliakoff, vous voyez ce que je veux dire, c'est formidable et puis moi j'ai appris aussi que les grands artistes Les personnalités très fortes, c'est celles qui doutent. Ceux qui ne doutent jamais, c'est des imbéciles. Dans tous les domaines, du reste. J'ai visité son atelier très souvent, et un homme comme ça, qui avait fait des centaines d'expositions, et qui avait exposé sur tous les continents, même à 100 ans, quand il montrait une œuvre, il attendait un avis. Quand quelqu'un a la certitude qu'il sait et qu'il sait surtout ce que doivent penser les autres et ce qu'on doit faire pour les autres, alors là, c'est toujours la porte ouverte, je pense, aux dérives. Moi je plains les gens qui ne s'intéressent à rien. J'ai toujours été surpris par les gens qui n'écoutent pas de musique. Par exemple, ça c'est un truc que je n'arrive pas à comprendre. Le musée c'est quand même une école de tolérance, une école de curiosité. Si ça ne sert pas à ça, je ne vois pas à quoi ça peut servir. Mais il ne faut pas non plus passer tout son temps à se dire ça sert à quoi.

  • Speaker #0

    Vous parliez de Soulages depuis qu'il est décédé. Le fait qu'il est presque d'autant plus présent dans les choix que vous faites, en tout cas dans votre esprit. Comment on fait pour lui survivre ?

  • Speaker #2

    survit tous d'abord on termine on survit tous d'abord on termine tous au cimetière on n'amène rien au cimetière pas ses richesses, pas ses tableaux, pas son fric pas ses disques, pas ses livres donc un jour où les gens les livres, ils ne vivent que du regard des gens, si vous avez une bibliothèque et que personne ne lit les bouquins que vous avez, autant les donner vos livres, donc moi je crois qu'on survit très bien on vit tout simplement quand Soulea je me disais il avait 102 ans, il disait qu'il en avait plus devant lui que derrière lui. Moi, ça me faisait marrer, quoi. Ça me faisait marrer. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que Pierre, ce qui l'intéressait, quand on lui a demandé le mot qu'il préférait dans la langue française, il disait encore Donc, ça veut dire que c'était quelqu'un qui avait une fringale de faire des choses, d'inventer des choses. C'était ça qui le passionnait, en fait, Pierre Soulages. C'était toujours faire des choses nouvelles. Et ça, ça n'a pas de prix. ...a sa vision de, comment dire, métaphysique. Moi, je pense qu'on survit très bien à tout et à tout le monde. Par contre, ou on devrait dire en revanche, en revanche, je pense que les œuvres d'art, et chez Pierre Soulages, survivent. Si Pierre Soulages... Ils n'ont pas eu d'enfant, Pierre Collet-Soulages. Je suis totalement persuadé que le succès d'année, en quelque sorte, même si ce terme n'est pas bien approprié, disons que le transfert, c'est le musée. Le musée, c'est peut-être ce qui incarne le plus Pierre Soulages. Le musée, dans un endroit qu'il a bien connu, à quelques centaines de mètres de sa maison, dans une ville qu'il a bien connue, dans un département qu'il a bien connu, dans des paysages qu'il a bien connus. Donc tout ça, c'est quand même très intéressant, c'est concentrique.

  • Speaker #0

    Et vous, vous vous sentez le messager de ça ?

  • Speaker #2

    Moi je me sens moi-même, avec l'équipe on a un message de transmission, donc on le fait, et si on l'a réussi on est content. Si nous on voit des gens, moi je vois l'équipe de médiation, des fois ils me racontent, ils ont abordé tel ou tel public, et qu'ils ont intéressé un public qui à première vue était compliqué, on est content. Je veux dire, vous savez, moi j'étais enseignant dans ma vie, dans une vie antérieure, j'étais trois ans professeur de français, de latin, d'histoire géo, un peu de tout, et on est content. Quand on a laissé quelque chose chez les gens, après il ne faut pas se leurrer, on ne laisse pas chez un gamin du CP, si vous lui laissez deux choses, c'est déjà formidable. Mais si on laisse quelque chose aux gens et qu'ils ont le sentiment en sortant que ce n'est pas n'importe quoi, que c'est bien, qu'ils ont vraiment ressenti une émotion, moi ça suffit à mon bonheur. Je n'ai pas besoin qu'on me l'écrive et qu'on me fasse une dissertation philosophique sur ça. Je pense qu'il faut voir les choses simplement. Il y a des choses qui peuvent être envisagées avec beaucoup de livres, de connaissances et de choses comme ça, ce qui est notre travail. Mais notre travail, c'est de faire de tout ça quelque chose qui est tout à fait acceptable pour des gens qui veulent entendre. Qui veulent entendre. C'est très important.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il vous restait encore des choses à découvrir de Soulages et de son travail ?

  • Speaker #2

    J'en découvre tous les jours. Je découvre des choses tous les jours, je découvre des choses qui, puisque là on est en train de travailler sur les archives, c'est des choses qui sont peut-être secondaires pour le grand public, mais qui pour nous sont intéressantes. On découvre des choses qu'il a écrites, qu'il a dites, qu'on ne savait pas, et on se dit, mais tiens, ça, c'est important, on va refaire quelque chose. Et puis de ça, pof, on va faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Vous avez toujours cru au succès du musée ?

  • Speaker #2

    Oui. De toute façon, on ne se pose pas la question. C'est-à-dire qu'en réalité, d'abord, je ne suis pas propriétaire du musée, déjà pour commencer. Personne n'est propriétaire d'un musée ou des œuvres d'un musée. Comme je le dis, c'est les spectateurs, les regardeurs qui sont propriétaires des œuvres. Moi, j'ai toujours pensé qu'au fond, il fallait faire le travail nécessaire pour intéresser les gens à l'œuvre de Soulages. Mais déjà, il y avait cette grande exposition de 2009 qui était quand même super importante, qui a fait connaître l'œuvre de Pierre Soulages. Nous on avait simplement à mettre en scène, à un peu scénariser, à animer l'oeuvre de Pierre Soulages pour que ça intéresse les gens. Et c'est jamais se décourager en disant ma fille peut faire la même chose, mon fils fait la même chose, ça veut rien dire, c'est tout noir. Vous aurez toujours des gens qui vont vous dire ça, il y a toujours des gens qui vont vous dire que je sais pas moi que Frank Zappa c'est de la mauvaise musique ou que le rock'n'roll c'est une musique de voyous. Je veux dire, c'est pas plus une musique de voyous que, je sais pas, la peinture de Caravage, qui lui, Caravage, vivait, était un mauvais garçon, vivait dans les quartiers un peu chauds de Naples. Vous voyez ce que je veux dire ? Il faut tout remettre en perspective. Donc moi, pas de soucis avec ça. Donc j'y ai toujours cru, bien sûr. Après, un musée, c'est comme un vélo. Si vous arrêtez de pédaler, vous tombez.

  • Speaker #0

    Quelle place il a trouvée dans le paysage muséal français ?

  • Speaker #2

    Musée Soulages ? Il a trouvé, je pense, une place comme un musée monographique, mais qui est quand même très original, de par l'immersion des œuvres. Et ça, c'est le fait des architectes d'ERCR, dans des sortes de cabines de métal, où on a... On a travaillé avec Pierre Soulages pour mettre ça au point, et avec les architectes, parce que Soulages ne voulait pas vraiment de scénographie, il voulait comme un accrochage qui ne s'arrête jamais. C'est formidable un accrochage qui ne s'arrête jamais. Quelque chose qui ne s'arrête jamais, c'est le mouvement perpétuel. Donc c'est une sorte de mouvement perpétuel, que nous on change toujours les accrochages dans le musée, c'est ce que voulait Pierre, et en plus il voulait une salle d'exposition temporaire. pour exposer d'autres artistes que lui. Pour pas qu'il soit dit, c'est Pierre Soulages, Isclairosa mort, ce vieux-là, ce musée, il est que pour lui, il est que pour personne d'autre. Alors nous, ici, on a exposé Yves Klein, Fernand Léger, Pablo Picasso, Le Corbusier, beaucoup de femmes. On va exposer beaucoup de femmes aussi en 2025. Voilà, donc c'est à tout le monde, je dirais. Pierre Soulages, quand on interrogeait sur le noir, parce que j'ai un tel, tel artiste, il a acheté un noir industriel, il a acheté le brevet, c'est le fameux Vantoblack, c'est, comment il s'appelle, c'est à Lichkapour. Et je demande à Soulages, et Soulages me dit, mais vous savez, le noir appartient à tout le monde. Alors le noir appartient à tout le monde et le noir ça veut dire plein de choses. C'est pas uniquement, quand on parle de la peinture de Pierre Soulages, quelque chose qui est dramatique. La peinture de Soulages c'est pas une peinture de cimetière. C'est que le noir c'est un vocabulaire, c'est une sorte de... C'est la classe quoi, tout simplement, quand on est bien habillé, quand on a une belle livrée, c'est ça le noir. C'est une sorte de sobriété. Et c'est ça qui, à mon sens, est important. C'est ça qui est important pour... pour parler de Pierre Soulages. On parlait des gens de la réception de l'œuvre de Pierre Soulages, je pensais que parce qu'il peignait en noir, c'était monochrome, ce qui n'est pas le cas. Ce sont des noirs très variés, travaillés avec beaucoup d'outils, et que d'autre part, le noir, on ne précipite pas les gens dans une mine. On voit très bien que le noir porte la lumière, dans cette lumière il y a des couleurs, il y a une grande variété dans tout ça. Et puis, ça fait toujours appel, comme la musique, ça fait toujours appel à l'émotion.

  • Speaker #0

    Si on se revoit dans 10 ans, qu'est-ce que vous espérez pouvoir me dire du musée dans 10 ans ?

  • Speaker #2

    J'en sais rien, je sais pas. Moi je dirais simplement que chacun aura fait son travail, et que ce qui compte c'est pas tellement les gens qui ont travaillé, c'est la mission qu'on s'est donnée, et le résultat qu'on a obtenu, et on verra le résultat du musée dans la fréquentation du musée bien sûr, mais dans le plaisir que les gens auront visité le musée. Personne n'est propriétaire des œuvres de Pierre Soulages. Je veux dire, c'est clair, je veux dire, Rodèze est connu mondialement maintenant grâce au musée Soulages. Je pense quand même que le musée a apporté quand même beaucoup de fréquentation sur la ville de Rodèze. C'est l'artiste lui-même qui fait que ça marche. C'est pas Decron, c'est pas les organisateurs des musées, c'est pas les cadres. Nous, on est là pour mettre en valeur l'œuvre d'un artiste et faire que non seulement ça plaise aux gens, mais qu'il s'y retrouve bien. Si quelqu'un dit, moi je reste dans le musée parce que j'ai envie d'y dormir, ou j'ai envie, je sais pas, d'y faire un peu de yoga, ou de lire un livre, ou même pourquoi pas faire du sumo, pourquoi pas, je veux dire, tout reste ouvert. Ça vous va ?

  • Speaker #0

    Oui, vous avez donné plein d'idées.

  • Speaker #2

    Bon.

  • Speaker #0

    On va vous proposer de faire du sumo. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Je vous en prie.

  • Speaker #0

    Ainsi s'achève ce troisième et dernier épisode de la série de Finta, consacré aux dix ans du musée Soulages de Rodez, en coulisses avec celles et ceux qui incarnent cette antre de l'outre-noir. J'espère qu'elle vous a plu. Je suis toujours curieuse d'avoir vos retours et de vous lire. Si vous appréciez Finta, parlez-en autour de vous, partagez les épisodes, c'est le meilleur soutien que vous puissiez apporter à ce travail indépendant. Finta est disponible gratuitement sur toutes les plateformes de podcast. Vous pouvez l'écouter sur Deezer, Spotify, Apple Podcast, Google Podcast. Vous pouvez aussi retrouver tous les épisodes ainsi que les ressources bibliographiques sur fintapodcast.fr. Et pour suivre Finta au quotidien, c'est sur Facebook et Instagram que l'on se retrouve. Merci de votre fidélité et à très bientôt.

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