- Speaker #0
Flamme des années 80.
- Speaker #1
Le podcast qui allume la femme.
- Speaker #0
Moi, c'est Sarah.
- Speaker #1
Et moi, c'est Angélica.
- Speaker #0
Alors, au mois de janvier, on va vous parler de la maternité. Et pour ça, aujourd'hui, on reçoit deux femmes inspirantes qui, elles, n'ont pas eu d'enfants par circonstance de la vie. Donc, Séverine et Pascal, qui sont là pour nous raconter leur histoire.
- Speaker #1
Bonjour.
- Speaker #2
Bonjour.
- Speaker #1
Ça va ?
- Speaker #2
Oui.
- Speaker #1
Un peu intimidée, mais ça va. Normal. Alors, qui veut commencer, se présenter, peut-être ? Pascale ?
- Speaker #2
Rapidement. Rapidement. Je suis Pascale, j'ai 67 ans et je suis à la retraite maintenant, donc c'est assez court. J'habite en région parisienne.
- Speaker #1
D'accord. Tu faisais quoi avant ?
- Speaker #2
La plus grande partie du temps, j'étais informaticienne, j'étais chef de projet informatique et puis à la fin, je me suis reconvertie pour faire de l'orientation. professionnelle. J'ai créé un cabinet de bilan de compétences, orientation professionnelle. Voilà. Ok.
- Speaker #1
Séverine ? Alors, moi, je suis Séverine. Je vis en région parisienne. Un peu comme Pascal, j'ai eu un autre métier avant. J'étais dans la sécurisation de recettes douanières. Et puis, j'ai fait une reconversion vers l'âge de 30 ans. Et aujourd'hui, je suis comédienne et voix off.
- Speaker #0
Super. Et donc, vous n'avez pas d'enfants, toutes les deux ?
- Speaker #2
Non.
- Speaker #1
Et non.
- Speaker #0
C'est un point commun.
- Speaker #1
C'est un point commun. On en a découvert un autre avec Pascal, puisqu'on a vécu à Sèvres toutes les deux, mais oui, c'est notre point commun.
- Speaker #0
D'accord. Et donc, en fait, c'est par circonstance de la vie, on peut appeler ça comme ça ?
- Speaker #2
Oui, c'est-à-dire que moi, j'ai jamais choisi d'en avoir ou de ne pas en avoir. C'est surtout que je ne me voyais pas avoir un enfant sans homme avec moi, enfin sans père, quoi. Et comme je n'ai pas trouvé le père, bon, je n'ai pas eu d'enfant. Et puis... Voilà, mais je n'avais pas de projet d'avoir un enfant à tout prix. Donc, ça s'est fait comme ça.
- Speaker #0
Et est-ce que dans ton parcours, il y a eu des moments où du coup, tu aurais voulu avoir rencontré quelqu'un ?
- Speaker #2
J'aurais bien aimé, oui, avoir rencontré quelqu'un. Des fois, je l'ai pensé que je rencontrais la bonne personne, puis ce n'était pas le cas. D'ailleurs, assez vite, je m'imaginais avec des enfants quand je rencontrais un homme. Mais bon, voilà, après, ça s'est fait comme ça. Je n'ai pas vraiment regret. du point de vue de ma vie individuelle. J'ai plutôt regretté à cause du regard des autres. Je pensais que c'était un choix vraiment individuel, que ça ne regardait que moi. Et en fait, je me suis rendue compte que non, ça posait problème, question, pour être bien insérée dans la société. C'est surtout le regard des autres. Les paroles, le regard, oui.
- Speaker #1
Et à tous les âges de la vie, tu la ressens ? Alors,
- Speaker #2
plus particulièrement quand j'étais en âge d'avoir des enfants à la maison, enfin donc jusqu'à l'âge de 45 ans, quelque chose comme ça, vis-à-vis des collègues, par exemple, qui m'en parlaient, ou des voisins, enfin tout ça. La première question, tu as des enfants, donc que dire ? Ben non, et puis je ne savais pas quoi dire. Parce que ça faisait un peu comme un froid. Je n'ai jamais trouvé la bonne réponse. J'ai failli dire, j'en ai plus, par exemple, pour me dire, pour arrêter de dire que voilà, inventer une histoire tragique, au moins, voilà, qu'il y ait quelque chose qui ait du contenu. Mais là, qu'est-ce qu'on peut dire ? Je ne sentais qu'un peu comme une consternation. Alors, je disais que j'avais un charme, mais bon, ça n'allait pas non plus. Donc, je n'ai jamais trouvé d'heure, j'aimerais bien. Il y a des femmes qui ont une réponse à ça, que dire quand on n'a pas d'enfant, et puis que soi-même on n'en est pas spécialement gênée, mais on sent que ça ne colle pas par rapport à quoi d'ailleurs. Et puis maintenant, j'ai 67 ans, c'est complètement différent. En plus je suis à la retraite, alors le bonheur par rapport à ce thème-là, c'est que moi je vois maintenant que les gens qui me conviennent. Donc, s'il y a des gens qui commencent à me... à m'embêter par rapport au fait de ne pas avoir d'enfants. Je ne les vois pas. Alors que quand on travaille, on est tenu d'avoir des relations avec plein de gens différents, ne serait-ce que pour garder son travail ou en trouver. Donc, je n'ai plus trop ce problème. Peut-être qu'on en parlera un petit peu plus avant.
- Speaker #0
Et du coup, ça fait écho, toi, Séverine, le regard des autres par rapport à...
- Speaker #1
Ça fait énormément écho parce que moi, j'ai beaucoup vécu à l'étranger. Je suis issue de plusieurs cultures et la notion de famille, de construction de famille est importante. Et moi, j'ai toujours voulu être maman. Mais j'ai toujours voulu être maman depuis que j'ai l'âge de 14 ou 15 ans, quoi. Et j'avais le projet d'être une maman de famille nombreuse. Et par contre, il y avait une chose dont j'étais... Il y avait quelque chose de très clair chez moi, un petit peu comme toi, Pascal. C'était, je n'amènerai pas un être humain pour qu'il soit malheureux sur Terre, je veux un environnement pour cet enfant. Et donc, du coup, je veux le papa et je veux la famille qui va avec, je veux le copain. C'est certainement en lien avec mon parcours. Et la vie a fait que j'ai eu des compagnons. Quand on est jeune, on a tous ce projet-là un petit peu. et puis... Dans les pays où j'ai grandi et j'ai évolué en tant que jeune adulte, les gens se mariaient très jeunes. Et en fait, j'étais un petit peu la vieille fille. Mais à 23, 24 ans, j'étais la vieille fille parce que je n'étais pas maquée, parce que je n'étais pas mariée et parce que je n'avais pas d'enfant. Donc, j'étais un petit peu pointée du doigt parce que j'étais un petit peu l'incasable. Mais pour moi, il y avait quelque chose qui était beaucoup plus important, c'était de trouver le bon partenaire de vie pour pouvoir accueillir. comme je le dis souvent, une âme, amener un enfant sur Terre, c'est une responsabilité. Et très jeune, j'avais conscience de cette responsabilité-là et je ne voulais pas amener un être humain sur Terre pour qu'il soit malheureux. En tout cas, il fallait que je fasse tout pour que le cadre soit au minimum là. Après la vie, elle se passe comme elle se passe, mais en tout cas, je devais essayer de donner le maximum de chance pour que tout se passe bien. Et puis, j'ai rencontré un compagnon de vie à l'âge de 25 ans. avec qui j'ai été pendant 5 ans. Et ça a fonctionné plutôt bien. Moi, j'étais dans une position de travail très établie. Je gagnais extrêmement bien ma vie, mon compagnon pareil et tout. Et puis, la vie a fait que je suis tombée enceinte. Et c'est pour ça que je dis, je n'ai pas d'enfant aujourd'hui, mais je répète, je n'ai pas d'enfant vivant. Parce que pour moi, cet enfant, il a existé. Et ce compagnon, en fait, n'a pas voulu de cet enfant parce que la chose qui était importante pour lui, c'était l'ascension professionnelle. C'était la richesse, etc. Alors qu'on avait vraiment tout ce qu'il fallait, on était plutôt bien l'outil. Et il m'a un petit peu laissée avec cette responsabilité-là. Donc je vais le dire en deux mots, parce que sur le moment, c'est très violent, mais vous allez voir comment les choses peuvent se passer des fois. Ça va peut-être inviter les personnes qui écoutent à mettre un peu plus de rondeur, même quand on veut dire un nom. Très contente, je lui ai annoncé que j'attendais un bébé. Ça faisait cinq ans qu'on était ensemble. Voilà, c'était la suite logique. Et il m'a regardée, il m'a fait « Bon, d'accord. Alors écoute, je vais aller faire du sport et je vais réfléchir. » Et je suis restée comme ça, avec ce truc-là en latence. J'habitais à l'époque dans un 500 mètres carrés et je tournais en rond dans le 500 mètres carrés. Et il y avait déjà ma petite voix intérieure qui me disait « Il ne veut pas de cet enfant et il ne le prendra pas, il ne l'acceptera pas. » Et moi, pendant ces deux heures où il est parti faire du sport, dans ma tête, j'ai commencé à me faire à l'idée et j'ai commencé à parler à voix haute à ce petit ou cette petite, mais je pense que c'est un petit garçon parce que je l'ai vraiment ressenti comme tel. Et j'ai commencé à lui parler, à lui expliquer que je ne pourrais peut-être pas l'accueillir parce que son père n'est pas en capacité et en maturité d'accueillir, de l'accueillir maintenant, mais que moi, je l'aimais déjà. Et au bout de deux heures, il est revenu et il m'a dit écoute, non. parce que ma carrière professionnelle est plus importante. J'ai dit très bien. Donc moi, je vais prendre la responsabilité, je vais l'enlever, je ne vais pas le garder. Parce que je t'ai toujours dit qu'un enfant, ça s'accueille à deux, et je n'ai pas l'intention de reproduire un schéma où l'enfant n'est pas accueilli, donc je vais faire le nécessaire. Et ce qui a été terrible dans ce moment-là, c'est que finalement, il m'a laissé tout gérer toute seule. Et comme moi, je vivais dans un pays un peu particulier à l'époque, Et que pour moi, c'était une sorte de honte de venir face à mes parents et à leur dire, écoutez, je suis avec quelqu'un depuis cinq ans qui n'accepte pas d'avoir un enfant avec moi. Je ne l'ai pas dit à mes parents. Donc, j'ai affronté tout ça toute seule. Il n'est même pas venu à l'hôpital. Et quand je suis... L'intervention en elle-même s'est très mal passée parce que je l'ai très mal vécue, parce que cet enfant, je le voulais. J'ai terminé cet IVG, on va dire le mot comme ça, dans une détresse absolue. Et il est venu me chercher avec 30 minutes de retard parce qu'il avait une réunion. Et je savais à ce moment-là que cet homme-là, je le quitterais. J'ai pris le temps, j'ai pris une année, le temps de me réparer, d'encaisser ce moment-là. Et je me suis séparée de cette personne. Et ça a été le point de mire pour moi, de me dire plus jamais je vivrai cette situation-là. Plus jamais je revivrai ça parce que je pense qu'il n'y a pas plus grande détresse qu'on puisse vivre. que quand on a envie d'un enfant et qu'au final, voilà. Et les années se sont passées, j'ai eu d'autres compagnons. Je n'en ai pas eu 50, mais j'en ai eu quelques-uns. Et ce n'étaient pas les partenaires avec lesquels je voyais une construction possible. Et puis, il y a maintenant sept ans... J'ai rencontré mon compagnon actuel, et lui est papa de deux filles. Et j'ai vu en lui un homme fantastique, mais un super papa, etc. Et c'est quelqu'un qui a tout de suite été dans la générosité de compréhension que lui avait deux enfants et qu'on entamait une nouvelle relation qui ne pouvait pas m'interdire, entre guillemets, d'avoir un enfant. Et il m'a tout de suite mis à l'aise vis-à-vis de ça en disant « Si jamais tu tombes enceinte, on le garde » . Et pour moi, rien que le fait d'avoir ce truc-là, je me suis dit « waouh » . Et puis la vie a fait quelque chose. Et la vie, elle est comme ça. Suite à un problème de santé, on m'a annoncé très violentement, quelques mois après cette rencontre, qu'en fait je ne pourrais pas avoir d'enfant. Et là, ça a été la déflagration. Parce que tout revient, on repense à la décision qu'on a prise quelques années plus tôt et on se dit « est-ce que j'ai fait le bon choix ? » Et là, on se retrouve avec la gestion de « bon, là en fait, je ne peux pas et je ne peux plus » .
- Speaker #0
Une sorte de culpabilité peut-être ?
- Speaker #1
Oui, une culpabilité, un sentiment d'injustice absolu parce que je crois qu'il faudrait avoir un permis pour avoir des enfants. Moi, pour moi, c'est quand je vois le nombre d'enfants en souffrance et le nombre de personnes qui peuvent avoir des enfants avec leur corps parce que leur corps leur permet qu'ils ne se rendent pas compte du privilège que c'est d'avoir un enfant et d'en prendre soin et que c'est une responsabilité. C'est pas parce que juste on tire un coup et que moi, je me rends compte de toute la prise de conscience que dans laquelle je suis depuis des années et dans laquelle j'étais finalement déjà à l'adolescence. Je me dis mais quelle injustice parce que moi, finalement, j'en demandais. Au départ, j'en voulais 25, mais au final, j'aurais été très heureuse d'en avoir juste un. Mais au moins, je lui aurais donné le tout, le maximum. Je me rendais compte du privilège que c'était. Et là, moi, par contre, je ne peux pas en avoir. Et ça a été terrible. Et ce qui a été le plus terrible, ça a été de le vivre dans un silence absolu parce que la société fait que c'est un peu ce que tu disais tout à l'heure, Pascal. Tu n'as pas encore d'enfant. Mais en fait, on ne sait pas les combats invisibles que nous menons.
- Speaker #0
Je dis les combats invisibles parce que c'est vraiment des combats invisibles.
- Speaker #1
C'est des combats invisibles. Et quand vous m'avez proposé de me rencontrer, tu le sais, Sarah, j'ai beaucoup hésité à me présenter parce que c'est des combats qu'on ne soupçonne pas. Parce que quand on me voit comme ça, je pète la forme et c'est vrai, je vais très bien et tout. Mais oui, beaucoup de gens mènent des combats invisibles. Et c'est ce qu'il faudrait, c'est qu'on soit indulgents les uns envers les autres.
- Speaker #2
Et pas jugés.
- Speaker #1
Et pas jugés. Parce qu'en fait, on ne sait pas. Et ce que tu disais tout à l'heure par rapport au regard des autres, moi, je me suis retrouvée des fois en tournage où j'avais des copains, mais que je ne connaissais pas plus que ça, qui venaient et disaient « Eh oh, t'as vu l'heure qui tourne là ? C'est quand tu nous fais un mioche, toi ? » Mais en public. Ah bon ? Ouais. Ça m'est arrivé au travail. Et je me rappelle, d'une fois, c'était il y a trois ans, j'étais donc dans ce deuil de la non-maternité, parce qu'on parle de la maternité, mais c'est important de parler de la non-maternité. C'est aussi autre chose. et j'avais une réaction extrêmement violente. Je me disais, qu'est-ce que tu sais de ma vie ? Est-ce que tu sais que je ne peux pas avoir d'enfant ? Est-ce que tu sais la douleur que moi je vis et la force qu'il faut que je trouve chaque matin pour faire le deuil de ma non-maternité ? Est-ce que tu te rends compte ? Et ça avait laissé la personne un peu gênée et tout, mais ouais, les gens s'autorisent en fait à faire des réflexions, à imaginer des choses, de comment les choses devraient être. Mais des fois, les choses ne se passent pas comme on a envie, quoi.
- Speaker #0
Ça, c'est certain.
- Speaker #1
Voilà. Donc ouais, c'est des combats invisibles et ça me demande du courage d'en parler. Merci en tout cas, merci de partager ça avec nous C'est vrai que...
- Speaker #0
Et est-ce que Pascal, il y a des choses qui résonnent dans ce que vient de dire Séverine par rapport à ton expérience ?
- Speaker #2
Je me disais, c'est que moi j'ai même pas de raison d'avoir souffert de quelque chose tu vois, c'est-à-dire que je me sens pas à l'aise de me présenter sans enfant, alors que je peux même pas dire oui, c'est parce que j'ai pas pu j'ai été malade, oui, j'aurais bien voulu mais j'ai pas pu, non ... Donc, je ne sais même pas quoi dire. C'est-à-dire que c'est une absence ?
- Speaker #0
Oui, parce qu'il t'est arrivé quand même quelque chose. Oui,
- Speaker #2
mais oui. J'avais 36 ans, en fait, oui, parce que je me suis fait opérer d'une petite intervention, vraiment, qui devait être mineure. C'était un fibrome. Et puis, en fait, le chirurgien s'est rendu compte que j'avais des trompes qui étaient très fines. Et donc, il a jugé que c'était dangereux, que je pouvais avoir une grossesse extra-utérine. Donc, il les a coupées. Mais non. Sans me demander. Sans me demander, oui.
- Speaker #1
Mais non.
- Speaker #2
Si, si. Et j'avais 36 ans, puis ce n'était pas que l'époque comme maintenant. Maintenant, on irait se plaindre, enfin tout ça, je veux dire. J'ai été scotché et puis j'ai accepté, j'ai rien dit, enfin accepté, j'ai pleuré, il est venu me dire, mais vous savez maintenant on fait des PMA, des choses comme ça, ne vous inquiétez pas, d'ailleurs on a un service là, puis je vais faire venir la personne qui est spécialisée dans ce domaine, qui va venir vous expliquer, ce que j'ai appris par ailleurs, par après. Comme j'étais célibataire, je n'aurais jamais eu droit à cette fameuse PMA à l'époque. Donc, c'était interdit à l'époque. Ce n'était pas autorisé pour les personnes.
- Speaker #0
C'était autorisé depuis très peu de temps.
- Speaker #2
Très peu de temps, exactement. Oui, tout à fait. Donc, bon, je n'aurais même pas pu. Et voilà. Mais c'est vrai que ça m'a... J'ai pris quand même... J'étais quand même restée dans l'idée que peut-être je pouvais avoir, par une intervention médicale, avoir un enfant. Et donc, je ne sais pas, c'est passé comme ça. J'ai fait un petit cauchemar quand même. Mais je ne l'ai pas... Comme, ouais, j'étais quand même assez, je ne sais pas, un peu enfantine ou naïve dans ma tête, en fait. Réagir un peu comme un enfant et qui on dit, c'est comme ça, c'est comme ça. Et puis voilà, c'est tout. Puis comme je n'avais pas une volonté absolue d'avoir un enfant, que je n'avais toujours pas de père, j'avais 36 ans et je me disais, à cet âge-là, c'est quand même déjà un peu mal barré. Je ne me voyais pas avoir un enfant après 40 ans. C'était... Maintenant, c'est vrai que les femmes en ont beaucoup plus tardivement. Mais à cette époque, ça me semblait... Je ne voulais pas être une vieille maman, en fait. Et donc, je me disais, de toute façon, c'était déjà assez mal parti. Donc voilà, je l'ai pris comme ça. Pas trop mal quand même.
- Speaker #0
Oui, on est un peu sans...
- Speaker #1
Moi, je suis choquée. Parce qu'en fait, je me rends compte que les choses ne changent finalement pas. On décide pour nous, on décide pour nos corps. Comment est-ce qu'on peut s'autoriser ? en tant que médecin, quand on a prêté le serment d'Hippocrate.
- Speaker #2
J'ai argumenté quand même en disant qu'il fallait que c'était pour mon bien. Il aurait fallu me réouvrir. Oui,
- Speaker #1
mais c'est une décision qui t'appartenait. En cas où tu décidais. C'est ça. C'est une décision que notre corps nous appartient. On n'a pas le droit d'en disposer. Hormis en cas d'urgence vitale. Quand on prête le serment d'Hippocrate, mon père est chirurgien, quand on prête le serment d'Hippocrate, Mais on ne s'autorise pas à faire ce genre de choses. Moi, je trouve ça extrêmement violent pour moi. Parce que c'était à toi de décider si tu avais envie ou pas qu'on t'enlève un morceau de ton corps ou pas, et de faire ou pas. Et on est en 2023, 2024, aube 2024. Mais pitié, laissez les femmes décider de leur corps. Demandez-leur, posez-leur la question. Nous sommes concernées. Arrêtez de prendre les décisions pour nous. Arrêtez de décider pour nous de ce qui est bien et de ce qui n'est pas bien. C'est comme dernièrement, j'ai vu il n'y a pas très longtemps sur une émission de télé, où tu avais sept bonhommes qui étaient en train de parler de la ménopause. Mais est-ce que vous savez de quoi vous parlez ? Mais parce qu'il y a votre putain de place en fait ! Est-ce qu'on vient de vous parler de l'endropause ? Est-ce qu'on sait nous ce que vous vivez au moment de l'endropause ? Mais foutez-nous la paix !
- Speaker #0
Ils ne savent pas souvent que ça existe l'endropause.
- Speaker #1
Oui ! Si je peux me permettre, c'est bizarrement qu'ils ne connaissent pas trop. Je trouve ça extrêmement violent pour les hommes qui se comportent bien. Et pour le personnel médical qui a la bonne approche. Parce que finalement, on les assimile à ceux qui ne se comportent pas bien. Tu sais, c'est comme quand tu prends un morceau de neige et que tu mets une tâche d'encre noire. On va voir que la tâche d'encre... Et malheureusement, il y a des hommes et des médecins qui se permettent de faire... Moi, c'est...
- Speaker #2
C'est un gros sujet. Tout le monde se fait un sujet de la médecine, surtout actuellement. Donc, je crois qu'on peut...
- Speaker #1
On va parler de la santé.
- Speaker #0
Oui, au mois de mars, on va parler de la santé.
- Speaker #1
Exactement. Mais pour revenir, du coup, Pascal... Donc, tu te réveilles de ton opération et donc, le médecin te dit...
- Speaker #2
Il passe dans la chambre, gentiment, il ferme la porte et puis il vient m'annoncer ça avec beaucoup de douceur, oui.
- Speaker #1
Oui, ben oui. Et après, il te dit que tu peux faire un parcours. Oui. Et après, est-ce qu'il décide de te suivre quand même ?
- Speaker #2
Est-ce qu'on te propose de voir un psychologue ? Ah non, non.
- Speaker #0
C'était il y a 30 ans.
- Speaker #2
Ah non, il y a... Non, non, un psychologue, non. Non, le psychologue, disons que c'était surtout le médecin qui est venu m'expliquer comment, au cas où j'ai envie d'un enfant, comment je pourrais faire. C'était plutôt, je pense qu'il le prenait comme ça.
- Speaker #1
On ne t'a pas proposé d'être accompagnée par rapport à ce qui est arrivé ?
- Speaker #2
Non, non, ça, oui. Ah non, non, puis je ne l'aurais pas. Oui, c'est vrai que non, pas du tout.
- Speaker #0
C'est vrai qu'à l'époque, c'était différent, même si on a fait quand même quelques scolées.
- Speaker #2
C'était l'hôpital des Diaconesses. Alors pour moi, les Diaconesses, ça veut dire des femmes qui sont, je ne sais pas, j'imagine quelque chose de très maternel. D'ailleurs, il y avait une maternité, bien sûr, dans cet endroit. Ah bah, dis donc ! Non, mais je n'ai pas mal pris, finalement. Peut-être que je l'ai enfouie, je ne sais pas. Non, j'avoue que ça m'a fait un peu de mal, mais pas trop, quand même.
- Speaker #0
Je pense qu'à un moment donné, l'être humain est bien fait, il y a une part du cerveau qui protège aussi. Oui, peut-être,
- Speaker #2
oui, je sais. Oui, il fait en sorte que ça ne fait pas partie des choses qui m'ont beaucoup traumatisée en fait.
- Speaker #1
Très bien, mais du coup parce que moi je vais poser une question peut-être bête ça sert à ça aussi Donc voilà, en fait du coup une fois qu'on t'avait enlevé les trompes,
- Speaker #2
il était impossible de faire un enfant à part un enfant Quand il reste les ovules parce qu'on n'a pas atteint les ovaires mais il n'y a pas de tuyau quand il permet de... D'aller nicher.
- Speaker #1
Oui, donc du coup, il faut passer par une intervention externe,
- Speaker #2
mais c'est possible. Oui, c'est possible. Si tu étais à l'époque, donc il fallait être mariée.
- Speaker #1
Ah oui, d'accord. Et donc,
- Speaker #2
c'est ce qu'on ne m'a pas dit. Oui, oui, oui. En couple, peut-être, il fallait, je ne sais pas. En tout cas, il y avait un côté administratif qui se mêlait de ta vie.
- Speaker #1
Bien sûr, oui.
- Speaker #2
Et qui disait si tu avais le droit ou pas. Alors, quand tu fais naturellement, tu ne demandes rien. Ça se fait comme tu disais, très facilement. Et là, ça devenait compliqué.
- Speaker #0
D'où le permis d'être parent.
- Speaker #2
Le permis de parole. Ah oui.
- Speaker #1
Ah, il y a du boulot, hein ? Ah bah oui, c'est sûr. Ah, il y a du boulot, hein. Et est-ce que,
- Speaker #0
vu comme, enfin, on va aller dans quelque chose de plus positif, vous avez quand même réussi, finalement, à accepter, en fait, une forme de résilience, dans un sens, et pour toi, et pour toi, Séverine. Et qu'est-ce que, si aujourd'hui, des femmes nous écoutent et sont en train de vivre, soit, peut-être... Quelque chose de différent, mais une intervention chirurgicale ou un événement. Moi,
- Speaker #2
ce n'est pas ça qui m'a fait une barrière. C'est plutôt quand j'ai eu 40 ans. Là, je me suis dit, c'était la date. La date m'a été donnée, la date, l'âge. Et je me suis dit, là, ça y est, c'est terminé. C'est plutôt une décision, je ne sais pas, ça venait de l'intérieur. Là, je maîtrise. C'est moi qui avais décidé qu'à 40 ans, je ne ferais plus d'enfants. Et quand c'est arrivé, c'est là que ça m'a fait un choc beaucoup plus que quand j'ai eu ce problème.
- Speaker #0
Ça a été un choc que tu as fait.
- Speaker #2
Oui,
- Speaker #1
oui. Parce qu'au jour de tes 40 ans, tu t'es dit, bon, ça y est, moi, je m'étais donné ça. Et donc,
- Speaker #2
voilà, je n'aurais pas d'enfants. Je pensais que je n'aurais plus d'enfants. Et d'ailleurs, un truc bizarre, enfin, qui m'a un peu surpris, c'est que je me suis moins intéressée aux hommes. C'est bizarre. Oui, oui. C'est bien. Je veux dire, même du point de vue sexuel, j'étais étonnée que ça avait moins de magie en coche, donc j'étais moins motivée.
- Speaker #1
Oui, parce qu'il y avait moins la recherche du père idéal.
- Speaker #2
Oui, et puis de ce miracle aussi, qu'un acte sexuel puisse déboucher sur une nouvelle vie. Je ne me rendais pas compte de tout ça avant de savoir qu'il n'y aurait plus.
- Speaker #0
Inconsciemment, en fait.
- Speaker #2
Oui, oui, tout à fait. Inconsciemment, oui.
- Speaker #1
Est-ce qu'il y a d'autres choses qui t'ont sauté aux yeux, du coup ? Parce qu'il y a ça, une fois que tu t'es dit, c'est bon, je n'aurai plus d'enfant. Est-ce qu'il y a d'autres choses dont tu ne te rendais pas compte avant ?
- Speaker #2
Non, je ne me souviens pas en tout cas. Non, je ne crois pas. Je ne m'en souviens pas.
- Speaker #0
Et est-ce que vous auriez des conseils, par exemple, à donner à des femmes qui nous écoutent et qui viennent justement d'avoir soit des nouvelles de santé, soit arriver à l'âge justement ?
- Speaker #2
Oui, ça peut flirter à la fois ou en avant.
- Speaker #0
Ce moment en fait un peu charnière, est-ce que vous avez des conseils ou des choses que vous aimeriez partager ?
- Speaker #1
En fait, je ne pense pas qu'on puisse donner de conseils parce que chaque femme va vivre ce moment de maternité ou de non-maternité à sa manière, en fonction de son vécu, en fonction de l'accompagnement aussi des personnes qui sont autour d'elle, etc. Moi, ce que je voudrais dire, c'est que tout à l'heure, tu disais quelque chose sur le côté un peu, on est venu t'annoncer comme ça, bon, on vous a enlevé le machin. Moi, je voudrais revenir sur une étape qui est cruciale pour la question que tu viens de poser. C'est le moment où moi, j'étais partie faire des tests pour voir si tout fonctionnait bien, parce que j'étais au taquet et qu'il y avait peut-être une possibilité d'avoir un enfant. C'est la manière dont ma gynéco m'a reçue. Donc, je suis arrivée dans le truc et elle me dit « Bon, Séverine, je ne vais pas passer par quatre chemins. Donc, voilà, vous ne pouvez pas avoir d'enfant, donc il va falloir faire votre deuil. Je suis désolée, il faut que je vous laisse parce qu'en fait, j'ai une patiente juste derrière. » Mais non. Mais si. Et c'est comme ça que moi, je l'ai eue, la nouvelle. Donc vous imaginez, entre la manière de vous le dire... et la manière de le vivre, l'annonce du truc, ça a été absolument terrible. Je ne sais même pas comment j'ai fait pour rentrer chez moi. Moi, ce que je veux dire, je ne vais pas mentir ou cacher les années qui viennent de passer. Je viens de passer certainement les années les plus difficiles de ma vie. Mais en même temps, ce que je voudrais dire à la femme ou aux femmes qui m'entendent et qui ont une résonance avec ce que moi j'ai vécu ou avec ce que Pascal a vécu, C'est vous dire, une maternité ou une non-maternité ne vous définit pas. Ce n'est pas ça qui va faire de vous la femme et ce que vous allez accomplir par la suite. Moi, j'ai eu une phase de deuil très importante. Je l'ai eu inconsciente et consciente à un point que je m'étais teint les cheveux en noir. Alors, je suis blonde. Je l'ai réalisé il n'y a pas très longtemps. C'était comme si je portais le voile noir sur la non-maternité que j'aurais voulu avoir. Et c'est vrai qu'au tout départ, je n'arrivais pas à imaginer qu'il pouvait y avoir autre chose après. Et quelque chose de lumineux, quelque chose de bien. Pour moi, la vie, elle s'arrêtait, mais parce que ce n'était pas finalement le regard que moi j'avais. C'était le regard qu'on pouvait me porter. Et moi, ce que j'ai envie de dire à ces femmes-là, c'est que ça m'a demandé un travail personnel profond. J'ai entamé un cheminement avec quelqu'un qui m'a accompagnée. C'est important de se faire accompagner, parce qu'on ne peut pas tout dire à ses proches. On n'a pas l'espace de tout dire à ses proches, parce que nos proches ne sont pas dans nos baskets et peuvent ne pas comprendre. Et c'est OK. On a besoin d'être avec quelqu'un qui soit impartial, quelqu'un qui soit objectif et qui soit juste là à l'écoute, qui soit là pour entendre, pour accueillir la parole, la souffrance et qui va nous donner des clés objectives, pas des clés avec des jugements parce que c'est un amoureux, c'est une amie, etc. Je trouve que c'est important de se faire accompagner. Il ne faut pas hésiter à faire des recherches d'associations, de groupes de paroles. Il existe des groupes de femmes où on peut s'exprimer et on a la liberté de s'exprimer dans... Toute la détresse et aussi dans toute la colère, parce que ça génère aussi beaucoup de colère. Et ce que j'ai envie de dire, c'est que si aujourd'hui je vais bien, c'est parce que j'ai accueilli toutes les émotions qui m'ont traversée, qui m'ont noyée. J'ai décidé d'embrasser ma misère la plus profonde sur ma non-maternité. J'ai décidé qu'il fallait que j'aille au bout de ça. pour que quelque chose de plus lumineux en ressorte. Et donc j'ai fait un cheminement personnel, je me suis remis au sport, j'ai réétabli mes objectifs de vie, j'ai surtout compté les belles choses que j'avais autour de moi et sur lesquelles je pouvais compter. Et on a de belles choses autour de nous, on a de belles personnes autour de nous. Et j'ai décidé que ça n'allait pas me définir. Et j'ai décidé que j'allais, à partir de ce moment-là, arrêter de laisser les autres me définir par rapport à leur regard. Je suis ce que je suis et votre regard ne me définit pas. Et à partir de ce moment-là, j'ai mis en place plein de choses qui ont permis beaucoup de libération émotionnelle, beaucoup de compréhension, de prise de conscience aussi, de schéma peut-être dans lesquels j'étais. Et j'ai décidé que j'allais faire du reste de ma vie ma plus belle vie. Et donc, je me suis jetée à corps perdu dans le travail. Je me suis jetée à corps perdu dans mon couple. Et cette non-maternité et ce deuil de la non-maternité arrivait à... En fait, j'ai vécu les deux, la maternité et la non-maternité. J'ai compris à travers mon cheminement que être maman avec son corps, c'est une chose, mais on peut être maman avec son cœur. Et j'ai décidé d'être la maman de beaucoup d'enfants. Et donc, ce que j'ai fait, c'est que je suis avec une association. où je suis la marraine de José et de Thomas, si vous m'entendez, je vous embrasse, mes petits pouliennes, qui sont au Togo. Et j'essaye de pouvoir leurs besoins, j'essaye de pouvoir leurs besoins scolaires, etc., les cadeaux, les trucs, les machins. J'ai la chance d'avoir deux nièces et deux neveux, dont je suis très proche. Et c'est surtout, je suis... J'ai une espèce d'ouverture avec les enfants, je me rends compte, qui font que... Enfin, qui fait que... je vais être maman d'une certaine manière, sans l'avoir été avec mon corps finalement, mais je vais l'être dans mon cœur et dans ma tête. Et je vais être très portée justement sur le bien-être de l'enfant, sur le soutien à l'enfant. Et donc du coup, j'ai décidé d'axer mon champ d'action là-dessus. Et ce qu'il y a de fou, c'est qu'il y a une vie après ça. Et on peut être très bien. Et on peut être très bien dans ses baskets. Et on peut faire le deuil de tout ça. et on peut même réaliser que finalement en tout cas moi, tout ce cheminement là m'a permis de réaliser que je n'ai peut-être pas eu d'enfant là dans cette vie mais ça m'a permis en fait de me rapprocher de mon propre enfant intérieur de me réconcilier avec mon propre enfant intérieur et de vivre tout simplement et donc je vis, je profite j'apprécie, j'essaye de faire le maximum de choses qui m'enrichit
- Speaker #2
Et comment tu fais par rapport aux gens qui ont des enfants ? Comment tu te comportes ou comment tu te sens ?
- Speaker #1
Je me sens très bien au départ, les deux premières années. Dès que je voyais des enfants ou des personnes qui avaient des poupons, je pleurais.
- Speaker #0
Et maintenant ?
- Speaker #1
En fait, il y a une bascule qui s'est passée un petit peu comme toi. C'est-à-dire qu'à un moment donné, je me suis dit, en fait, tu ne peux pas. Ton corps ne peut pas. Et en fait, ça sert à quoi de te laisser aller dans quelque chose que tu ne peux pas maîtriser ? Et moi, je suis quelqu'un de très spirituel. Et du coup, je vais du principe que les épreuves que nous vivons sont là. On a un choix. Soit on en tire de la peine, soit on en tire une leçon ou un enseignement. Et moi, j'ai décidé d'en prendre un enseignement. Et je me suis dit que je devais être heureuse pour ces gens qui avaient des enfants. Et que c'était bien que ces enfants aient des parents comme ceux que je croisais, parce que c'était des super parents. Et que j'allais être la tati qui déchire pour tous ces gamins-là. Et donc, pour tous les couples autour de moi qui ont des enfants, j'ai le surnom de la tati qui déchire. C'est-à-dire que je vais être la tati un peu folding, qui va faire plein de trucs un peu cinglés, avec lesquels les gamins vont s'éclater et tout. Et ça, en fait, ça a réveillé vraiment mon enfant intérieur et je le vis très bien. Et je le vis très bien. Et aujourd'hui, je réalise que... Alors, je ne sais pas, c'est très ambivalent. Je ne sais pas si c'était une bonne chose de ne pas avoir d'enfant vivant. Parce que le premier que j'ai eu, voilà, ça restera mon enfant. Mais aujourd'hui, ça me permet de me... consacrer à moi-même ce que je ne faisais pas avant. J'ai une grande famille, j'ai eu beaucoup de responsabilités très jeune et en fait, pour la première fois de ma vie, j'apprends à m'occuper de moi et j'apprends donc à m'occuper de mon enfant intérieur. Et j'en éprouve beaucoup de plaisir et ce que je découvre est plutôt sympa. Donc, ouais, ça va plutôt pas mal en fait. Et j'ai vraiment envie de dire, tout dépend de la manière dont vous avez envie de... de vivre cet événement. Il faut accueillir le deuil, il faut accueillir l'annonce parce qu'on n'est pas des robots, on est des êtres humains. Mais il y a une vie après et elle peut être très jolie. Et aujourd'hui, quand je vois un enfant, je n'ai pas de douleur. Quand je vois mes amis avec leurs enfants, je n'ai pas de douleur. En fait, je suis heureuse pour eux. Je suis heureuse pour ces enfants parce qu'ils sont accueillis et ils représentent ce que moi, je voulais pour mon enfant. Moi, je n'ai pas eu cette chance-là, mais eux l'ont.
- Speaker #2
Ce qui est intéressant, c'est que tu racontes aussi le parcours et qu'il y a eu des moments où tu ne pouvais pas justement les regarder et qu'il y a eu une transformation qui s'est faite. Donc, c'est ça qui est intéressant, c'est que rien n'est figé dans le marbre et qu'à un moment donné, ça peut être ça, mais qu'après, ça évolue.
- Speaker #1
En fait, il faut se donner le temps et les femmes qui m'entendent aujourd'hui et qui vivent ça, mais accordez-vous le temps, vous avez le droit parce que c'est une déflagration terrible. Et les proches qui entendent et qui ont des proches et des femmes qui sont dans cette situation, mais soyez doux avec ces femmes. Soyez indulgents, soyez... calme, soyez réconfortant, soyez pas jugeant, parce que vous n'imaginez pas la douleur que ça peut provoquer. Et ce qu'il y a, c'est qu'il y a une espèce de... pas de fierté, mais on veut montrer qu'on va tenir, on veut donner le change, parce que quelque part, la société ne nous donne pas l'espace pour nous écrouler. C'est à nous de nous donner l'espace pour nous écrouler. Il faut s'écrouler pour pouvoir remonter. Et moi, c'est un espace que j'ai créé pour moi. Je me suis écroulée. J'ai pris 20 kilos. J'étais défaite, mais j'ai décidé que j'allais m'en sortir. Mais j'ai accueilli, c'est ce que je disais, j'ai accueilli ma misère la plus profonde. Et j'ai été voir un thérapeute. Et après, j'ai recommencé à faire du sport. Et j'ai commencé à me dire, mais qu'est-ce que tu peux faire pour... Eh bien, j'ai trouvé les voies et moyens. Et il faut s'écouter soi, il faut s'écouter. Voilà. Le regard des autres, en fait, n'est que leur regard. Et ça ne nous définit pas.
- Speaker #3
On parle de deuil en plus et comme... tous les deuils, il y a un vrai processus au deuil qui est reconnu psychologiquement et des étapes. Et c'est vrai qu'un deuil, ce n'est pas forcément la mort d'un être proche, c'est la mort de quelque chose qu'on accepte aussi pour donner un nouveau. Donc c'est hyper important de mettre ce nom de deuil et d'accueillir effectivement les étapes et de savoir qu'elles existent et qu'il y a un après.
- Speaker #1
Il y a un après. Et moi, je l'appelle mon deuxième printemps. Et c'est vrai que que quand ça m'est arrivé, je n'aurais pas pu croire que c'était possible. Et ce qu'il y a, c'est qu'en France, on n'a pas les infrastructures pour ça. On n'a pas vraiment un soutien là-dessus. Et quand on regarde la manière dont les médias souvent parlent de ça, etc., c'est toujours très... Je n'ai pas envie de dire cadré, mais on a un a priori, on a un axe et on ne peut pas en sortir. Mais en fait, les femmes, c'est comme un diamant. C'est multifacette et chaque femme va vivre cette expérience-là. D'une manière, différente avec son parcours, etc. Et on se doit d'accueillir la manière dont chaque femme vit ça. Et il n'y a pas une manière de le vivre. Il y a 50 manières. Et tu vois, moi, je trouve ça remarquable, ton expérience, Pascal, parce que ça montre que, ouais, toi, tu ne savais pas trop. Et c'est OK. Et en fait, ces femmes-là, elles ont le droit d'exister. Elles ont le droit d'avoir ce sentiment-là. Elles ont le... Foutez-nous la paix. C'est notre corps. Moi, j'avais cette envie. Toi, tu ne savais pas trop. Et c'est OK, on ne devrait pas avoir à se justifier et à essayer de trouver...
- Speaker #0
C'est ça, c'est un peu un mystère. Je me dis, pourquoi ? Qu'est-ce qui échappe dans ces conversations où on nous demande, oui, tu as des enfants, ou que quelqu'un nous parle beaucoup de ses enfants sans se rendre compte que toi, tu n'en as pas. Donc, peut-être qu'il faut un peu moins parler, comme des sujets qui ne sont pas en commun. Ou alors, après, c'est les petits-enfants. Moi, je croyais que j'allais être tranquille une fois avec l'âge. En fait, non, je n'avais pas pensé aux petits-enfants. En plus, ça se multiplie, il y en a encore plus. Par contre, moi, je regrette un peu. Je regrette de ne pas avoir de petits-enfants. Par contre, j'aurais bien aimé en avoir. Ça m'aurait fait très plaisir. Des enfants, non, c'est marrant, ça ne m'a pas manqué. Mais des petits-enfants, oui. Ne serait-ce que pour rester en contact avec la jeunesse. Et je trouve ça sympa. Je ne sais pas, je leur aurais montré plein de choses. Je les aurais emmenées dans plein d'endroits. Mais ça, j'ai...
- Speaker #1
On partage ça parce que tu vois, moi, ce que j'ai décidé de faire, c'est que comme je ne peux pas avoir d'enfant, moi, je suis issue d'un premier mariage et je suis le seul enfant de ce mariage. Ma maman s'est remariée avec mon papa de cœur. C'est mon phare, c'est ma lumière, c'est la personne qui m'a accueillie, qui m'a choisie. Tu vois, c'est ce que je disais par rapport au fait d'accueillir un enfant. Lui, il m'a accueilli alors que je n'étais pas son enfant. Donc, j'ai eu aussi un très bel exemple d'accueil d'un enfant qui n'est pas le sien. Et en fait, quand tu regardes avec ma fratrie... En fait, il n'y a pas de différence. Je suis sa fille et je suis sa fille aînée. Et en fait, j'avais besoin de léguer quelque chose. Et moi, là où c'était douloureux pour moi, c'était de me dire que je n'allais rien léguer, qu'après moi, il n'y aurait rien. Et ça, ça a été le deuil aussi très dur pour moi. C'est de me dire, après moi, il n'y aura plus rien. Mes frères, qui sont issus de ce second mariage avec mon papa, ont des enfants et la vie va continuer. Mais après moi, il n'y aura plus rien. Je ne vais laisser aucune trace.
- Speaker #3
Je rebondis juste parce que moi, c'est quelque chose aussi qui me parle vachement et qui, je ne sais pas si je veux des enfants spécialement ou pas, mais cette espèce de question qui n'est rien après, qu'on ne laisse pas de traces, parce que c'est vrai, il y a la transmission. Et puis, il y a quand même, on ne va pas se mentir, l'être humain a quelque chose comme ça, la mort, la disparition sans rien laisser. En fait, c'est très compliqué. Et le problème de laisser la trace derrière nous et puis de... Moi, pareil, je suis fille unique du côté de mon père, pas du côté de ma mère, mais je me dis, c'est-à-dire qu'avec moi, du côté de mon père, en fait, cette filiation s'arrête, en fait. Et je me dis, mon Dieu, je n'ai pas fait le travail de continuer cette filiation aussi, cette espèce de culpabilité et de peur par rapport à ça. Donc, je trouve ça hyper intéressant, la question de laisser une trace.
- Speaker #1
Alors, la trace, on la laisse, en fait. Mais ça m'a pris beaucoup de temps pour le comprendre et c'est tout mon cheminement personnel et spirituel qui m'amène à cette réflexion-là. Et d'ailleurs, je remercie deux personnes, je vais dire leur nom parce que c'est important, c'est Pierre-Antoine Catrice, qui m'accompagne depuis trois ans sur ce sujet-là, et Améio Malm. Allez les rechercher sur Internet, ce sont des personnes qui pourront vous aider dans ce cheminement. Ce sont des thérapeutes psychomotionnels, etc., avec des vraies qualités et qui prennent l'ensemble, c'est-à-dire que ce n'est pas juste le physique. Il y a l'émotionnel, il y a le subtil, il y a le physique. Il y a tout un accompagnement. Et je leur dois beaucoup et je vous remercie si vous m'entendez. La notion de la trace, pour moi, elle était importante. Après moi, il n'y avait plus rien. Et du coup, ça me remettait moins en question par rapport à mais qui je suis ? Quelle est mon importance ? En fait, du coup, je suis importante pour personne. Je ne suis rien pour personne. Après moi, il n'y a plus rien. Et ça, ça a été un moment très douloureux. Et grâce à ces deux thérapeutes et aussi au travail que j'ai fait moi, parce que finalement le thérapeute il est là pour vous aider, mais le travail vous le faites vous, donc ne lâchez rien, faites-le le travail. J'ai réalisé que la trace elle n'est pas que physique, elle n'est pas que filiale. La trace elle est émotionnelle. La trace elle est dans l'amour aussi que l'on apporte à nos proches, à nos amis, à ce que l'on partage, à ce que l'on lègue aussi d'une autre manière. Et moi, j'ai trouvé plusieurs voies. J'ai repris mon arbre généalogique et j'ai pris la décision, puisque moi, j'étais le seul enfant de mes deux parents, j'ai réalisé en fait que moi, petite Séverine, En fait, j'étais le lien avec six familles différentes à moi toute seule, avec les mariages, les remariages, etc. Et quand je vois mon arbre généalogique à partir de moi, je ne l'ai pas créé à partir de mes parents, je l'ai créé à partir de moi seule, mes parents avec leur remariage, etc. Je me suis rendu compte que moi, j'étais le lien entre toutes ces personnes-là. Et ce que j'ai décidé de faire ? C'est que même avec des membres de ma famille que je n'ai pas connus, etc., j'ai fait des recherches, ça m'a pris plus de 4 ans. Je vais offrir, au prochain Noël, cet arbre généalogique à tous les membres de cette famille que j'ai retrouvés. Et je crois qu'il y en a 200 ou 300. Et je vais léguer cet arbre généalogique à mes neveux, à mes nièces, à mes cousins, pour qu'eux le continuent et me fassent exister à travers cet arbre. Ça, c'est la première manière que j'ai trouvée d'exister après. C'est hyper beau,
- Speaker #3
ça me met des frissons.
- Speaker #1
C'est la première manière que j'ai trouvé d'exister. Ensuite, ma deuxième manière d'exister, une fois que je serai partie, c'est que les vêtements, c'est très futile. Beaucoup de gens sont dans la consommation, etc. Moi, j'ai décidé d'investir mes petits deniers dans des bijoux, mais des bijoux de valeur. Et ces bijoux, je les léguerai à mes nièces, à mes neveux, à tous les membres de ma famille. Et ils vont se le passer, de génération en génération. Et j'ai décidé de faire comme ça. Ça sera ma manière. Et puis, je pense que la meilleure trace qu'on puisse laisser au monde, mais ça, c'est après tout le travail de deuil et de renaissance, c'est l'amour que je leur porte.
- Speaker #2
Est-ce que ça fait écho pour toi ?
- Speaker #0
Le manque, l'absence de trace, moi, je le vois plutôt comme une épreuve à affronter. Pas justement à chercher quelque chose pour s'en... s'en extraire. C'est un peu comme la mort, quoi. C'est une fin, c'est plutôt la regarder en face, regarder en face l'absence de traces et la disparition. Moi, je le prends plutôt comme une épreuve philosophique à affronter et à se transformer soi-même à partir de ça, d'accepter ça profondément.
- Speaker #2
Et ça te touche,
- Speaker #0
du coup ? Disons que c'est quelque chose que j'essaye de faire maintenant, parce que... lié à mon âge, parce qu'évidemment, l'idée de la mort sera plus présente. Ça me touche. De faire ça, tu veux dire, de faire ce travail, d'accepter le manque de traces, c'est une épreuve, oui, qui n'est pas forcément drôle, mais que je me dis qu'il faut que je la fasse. Et puis pour l'arbre généalogique, c'est drôle parce que Moi qui n'ai pas d'enfant, je pense que c'est moi qui suis chargée aussi de l'arbre. C'est ça ?
- Speaker #1
C'est ça,
- Speaker #0
mais oui. Moi aussi, j'ai fait l'arbre, j'ai cherché, je suis allée dans des archives. Parce qu'à l'époque, il n'y avait pas tout sur Internet, tout ça. Et donc, moi aussi, c'est moi qui connais le plus la famille. Et puis, je suis en tâche de renouer, de relier, plutôt de garder le lien. qui n'étaient pas vidantes, avec certains types.
- Speaker #1
On a ce truc-là.
- Speaker #0
Je me dis, dans une fratrie, je ne sais pas, une fratrie, disons, j'ai l'impression qu'il y en a toujours un qui est chargé de garder le lien.
- Speaker #1
Il y aura
- Speaker #0
13, mais au moins, il n'y aura rien après, mais il y aura le avant qui sera conservé.
- Speaker #1
On a ce truc-là en commun, parce que souvent, dans ma venue, on dit c'est toi qui maintiens le lien. et c'est vrai et même avec des membres de notre famille qu'on n'a pas forcément vu parce que nous on est un peu aux quatre points du monde là dernièrement on était dans une cousinade ma mère elle n'avait pas vu ses cousins depuis 40 ans et donc on s'est retrouvés ça recrée le lien et je leur ai annoncé qu'ils allaient recevoir cet arbre généalogique et tout le monde disait ah mais moi j'ai toujours eu l'idée mais je n'ai jamais pu le faire mais peut-être parce qu'en fait c'est à moi de le faire ils sont pris aussi dans beaucoup parce qu'on a aussi beaucoup de disponibilité Merci. Ça dépend. Ça dépend. Ah oui, moi, je n'en ai pas beaucoup. J'aimerais que mes journées fassent 36 heures, des fois.
- Speaker #2
C'est peut-être le temps de se consacrer à la famille, entre guillemets, de ce lien. Oui,
- Speaker #0
voilà, c'est ça. Nous, on participe quelque part à la famille, même si on ne participe pas avec des enfants.
- Speaker #1
En fait, ça vient, tu vois, de l'inné et de l'acquis, je trouve. Ça tient de l'idée de l'inné et de l'acquis. Parce que finalement, quand on est, je pense, dans une vie de famille normale, où les choses se font, on n'est pas dans cette recherche intérieure. Et je pense que quand on est dans une recherche, quelle qu'elle soit, du coup, c'est vrai qu'on va avoir tendance à chercher. C'est vrai qu'il y a tout le monde dans la famille.
- Speaker #0
En cas où on n'a pas d'enfant non plus, c'est mon seul frère et il n'a pas d'enfant non plus, il ne s'intéresse pas du tout à la famille. Donc, ce n'est pas fatal. Je veux dire, ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'enfant qu'on ne s'intéresse pas.
- Speaker #2
Mais vous êtes deux femmes, vous êtes célibataires.
- Speaker #0
Mais peut-être sous une femme, je ne sais pas.
- Speaker #3
Et moi, Pascal, j'avais une question parce que est-ce que tu as l'impression que ça a changé depuis des années ? Parce que toi, tu nous parles de ton expérience il y a 30 ans. Est-ce que le regard sur les femmes, tu as l'impression qu'il y a quand même une évolution ? Nous, on a l'impression, mais est-ce que toi, tu le ressens par rapport à il y a 30 ans.
- Speaker #0
Sur ce sujet-là ? Oui. Oui, je ne saurais pas dire.
- Speaker #3
Tu as l'impression qu'on en parle plus ?
- Speaker #0
J'ai l'impression qu'il y a toujours peut-être de plus en plus cette mise en avant sur un piédestal de l'enfant. Je trouve que ça s'est au contraire aggravé. Je pense que dans mon jeune temps, on était plus libre justement. C'est pour ça que j'ai toujours pensé que c'était à moi de décider et que ça n'avait rien à voir avec la société. Elle n'avait rien à voir avec ça. Je pensais que quand on était dans une société comme ça, qui donnait la liberté complète... Et c'est petit à petit, au contraire, que la maternité a été vraiment mise en valeur. Beaucoup, beaucoup, beaucoup. Ça m'a vraiment étonnée. Je me suis demandé pourquoi, qu'est-ce qu'il y avait derrière. Quel intérêt ça servait de faire ça. Et donc, je me suis dit, ça n'a pas arrangé les choses, je trouve. Parce que ça devenait encore plus difficile d'être sans enfant. Parce que c'était tellement valorisé. Non, je trouve que ça s'est plutôt allé. Enfin, c'est allé, non, ça a changé. Mais dans ce sens-là, je trouve, oui.
- Speaker #1
Je suis d'accord. Pourtant, on n'a pas le même âge, mais moi, je suis assez d'accord avec toi. Cette valorisation, voilà. En fait, c'est comme si on était déterminés par le fait qu'on puisse avoir un enfant ou pas.
- Speaker #2
Ce qui est intéressant, c'est les nouvelles générations qui arrivent, qui ont 20 ans. Quand on les interroge et quand on leur parle, ils ne veulent plus faire d'enfants. Mais avant...
- Speaker #0
Oui, ça, c'est vrai.
- Speaker #2
C'est là qu'il y en a beaucoup.
- Speaker #0
C'est assez nouveau. Oui, oui, ça, c'est assez nouveau.
- Speaker #2
C'est une espèce de revendication.
- Speaker #0
Mais alors aussi, peut-être que c'est valorisé aussi par les médias, parce qu'il y a l'écologie et tout ça. Alors, l'écologie étant tellement mise en avant, que c'est encore peut-être une idéologie encore. J'ai l'impression que c'est toujours dans des idéologies.
- Speaker #1
Idéologie, exactement.
- Speaker #0
Et on sert à l'idéologie du moment.
- Speaker #1
Tu sais, c'est un petit peu comme si on était les fusibles. Oui. Tu sais ? et La femme, alors la femme, voilà, alors il y a le truc de la sexualité. Alors, en fait, on ne nous fout jamais la paix. Parce qu'à partir du moment où, avant que tu sois réglée, c'est déjà problématique. Déjà, quand tu nais que tu es une fille, ça peut des fois être problématique. Tu as le souci au moment de tes règles. Après, est-ce que tu vas être assez baisable ? Après, tu vas avoir le truc de l'accouchement. En tout cas, de la maternité. Après, accouchement. Après, est-ce que tu vas être assez baisable ? Parce qu'en fait, voilà, tu as les vergetures, les trucs. En fait, on ne nous fout pas. pas la paix. Et en fait, on n'accepte pas on n'accepte pas le cycle de la vie de la femme telle qu'elle doit le vivre. C'est-à-dire que c'est l'ordre des choses de vouloir un enfant ou de ne pas en vouloir, ça nous appartient. C'est dans l'ordre des choses, à un moment donné, que le corps s'arrête de fonctionner avec la ménopause et qu'on ne puisse plus. Et c'est pas une... tard, il faut arrêter avec ça, parce que ça, ça fait souvent écho avec le poids aussi qu'on peut avoir. Ah, t'as pas d'enfant ? Ah ouais, bah attends, t'es ménopausée. Enfin, il y a des espèces d'imbrications, des fois, qui sont insupportables. Et quand tu vas dans d'autres pays, tu te rends compte que c'est pas vécu du tout de la même manière.
- Speaker #0
Dans quel pays,
- Speaker #1
par exemple ? Bah, par exemple, en Asie, parce que je reprends le... Moi, j'ai halluciné quand j'avais vu cette espèce d'émission avec les sept bonhommes qui étaient en train de parler de la ménopause. non mais pitié quoi, arrêtez invitez au moins une femme qui va savoir de quoi elle parle mais arrêtez de... de décider pour nous et de parler de choses que vous ne connaissez pas. Ok, il y a un médecin, il reste un bonhomme. Le médecin, à la limite, il est un peu plus légitime quand même. Par exemple, dans certains pays d'Asie ou du Moyen-Orient, une femme, par exemple, qui n'a pas eu d'enfant pour des questions, etc., elle ne va pas forcément être rejetée. Elle va plutôt être considérée dans certains pays comme une personne sage, qui va avoir une mission, entre guillemets, pour la communauté, un peu comme une, j'ai envie de dire, une femme sagesse, oui. Par exemple, les femmes ménopausées en Asie ou dans certains pays, surtout en Afrique, et ça c'est génial, parce que moi j'ai beaucoup vécu en Afrique, c'est considéré comme un deuxième prénom. Cette femme-là, elle a une puissance, j'ai envie de dire de frappe, très importante dans la société. Elle est respectée. Aujourd'hui, elle ne peut pas faire d'enfant ou elle n'a pas eu d'enfant, etc. Mais c'est une femme qui a une sagesse, qui a une expérience de vie et qui va servir à la communauté, qui va servir aux jeunes générations.
- Speaker #0
De par sa différence.
- Speaker #1
De par sa différence. de son expérience. On a vécu des choses qui nous permettent aujourd'hui de pouvoir partager. On ne va pas avoir forcément des choses qui vont être tout le temps en corrélation, mais le fait de partager va peut-être résonner à un moment donné ou à un autre. On n'est pas juste un corps, quoi. On n'est pas juste un ventre. On est bien plus que ça. Et ça, je n'ai pas la sensation qu'on aille dans le bon sens. Alors, il y a des mouvements qui essayent de changer ça et là où je pense que les choses changent, c'est que les femmes prennent la parole, et que les femmes osent s'exprimer, et que les femmes osent prendre l'espace médiatique pour exprimer leur réalité. Et les réseaux sociaux ont ce côté positif parce que ça peut avoir d'autres côtés négatifs. Mais pour moi, les réseaux sociaux ont ce côté positif de pouvoir laisser les femmes s'exprimer. Elles ont un son pour pouvoir s'exprimer dans leur réalité. Ce qu'on n'a pas forcément avec les médias qui continuent toujours avec la case dans laquelle on doit rentrer. Voilà, t'as 20 ans, t'es là-dessus. T'as 30 ans, t'es là-dessus. À partir de 40 ans, ta vie, elle est foutue. À 45 ans, t'es là. Et c'est insupportable. Et là, la nouvelle génération, tu as entièrement raison. Je trouve qu'elle vient bousculer tout ça. On est en train de bousculer des codes. Alors, c'est très inconfortable parce que du coup, on ne sait pas trop où on va. Mais ils ont le mérite de mettre les pieds dans le plat,
- Speaker #2
pour moi. Et puis, ils s'assument complètement. Ils n'ont pas d'enfants et ils n'ont pas... Et comme ils s'assument tellement, c'est qu'on ne va pas aller les faire chier parce que c'est clair, c'est net. Ce n'est pas nos générations.
- Speaker #0
Il faut presque qu'ils se justifient maintenant d'en avoir. Oui,
- Speaker #3
c'est vrai.
- Speaker #0
C'est un pacte écologique. Presque justifié l'inverse. Donc, je ne sais pas si c'est plus qu'avant un choix vraiment individuel. Il faut toujours expliquer par rapport à une position dominante, en fait.
- Speaker #2
Ça s'inverse.
- Speaker #1
Et là où tu as aussi raison, Pascal, parce que ça résonne là pendant que je t'entends parler, c'est en fait toute notre vie, en tant que femme, on doit se justifier d'avoir eu des enfants ou pas. Et ça peut être dans des cercles de famille.
- Speaker #0
trois, il faut que tu te...
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Quatre, ça va. Voilà. Un, ça ne va pas. C'est une copine qui m'a dit ça un jour. Elle m'a dit, te trompe-toi. Moi, j'ai qu'un enfant. On ne me laisse pas tranquille parce qu'on me dit, pourquoi un seul ? Donc, c'était deux qu'il fallait. Trois, il faut se justifier aussi. Pas bon. Trois, bien raisonnable.
- Speaker #2
Et si tu en as plus que quatre,
- Speaker #1
alors là... Voilà. Et quand tu n'en as pas, et là... Et en fait, tu te rends compte que finalement, on se justifie tout le temps et à tous les âges et à tout moment. à tout moment. Je pense qu'encore aujourd'hui.
- Speaker #0
C'est à nous de le justifier. Mais en fait,
- Speaker #1
pourquoi tu poses la question à un moment donné ? On peut parler d'autres choses que ce n'est pas ça qui me définit, en fait. Ce n'est pas ça qui définit toi.
- Speaker #0
Ça définit un contexte. Si on te demande où tu habites, des choses comme ça, ça fait partie un peu d'un ensemble. Ce n'est pas forcément intrusif aussi, mais c'est quand on répond.
- Speaker #1
Non, c'est vrai, ça fait partie.
- Speaker #0
C'est pas la question qui est un problème,
- Speaker #1
c'est la réponse qui pose problème.
- Speaker #0
Comment on a posé cette réponse ?
- Speaker #2
On n'est pas forcément obligé de répondre, on se doit dans l'obligation de répondre exactement la vérité. Oui,
- Speaker #0
c'est vrai, oui.
- Speaker #2
Une fois, j'étais avec une de mes meilleures amies qui commençait à se lancer dans une explication de son histoire. Et j'ai arrêté, j'ai dit, tu sais que t'es pas obligé de répondre en fait. Mais c'était pas à moi qu'elle posait la question et je sentais qu'elle se lançait dans une explication.
- Speaker #1
Mais ça montre. Ça montre qu'en fait, on est obligé de se justifier tout le temps.
- Speaker #0
C'est qu'on n'a pas forcément envie.
- Speaker #1
Mais parce qu'en fait, on est dans le déni de ce que nous sommes. La société, ou en tout cas les personnes qui ont ce type de comportement, sont dans le... En fait, je bafouille un peu parce qu'en fait, il y a deux choses pour moi. Est-ce qu'en fait, notre présence les confronte ? Est-ce qu'on fait effet miroir avec des choses auxquelles ces personnes-là ne veulent pas faire face ? Est-ce qu'en fait... On ne fait pas effet miroir avec ce que la société n'a pas envie de voir, n'a pas envie de découvrir. Parce que finalement, ça dérange peut-être.
- Speaker #0
Peut-être, oui. Oui, j'en ai fait. Pourquoi ?
- Speaker #1
Pourquoi ? Tu vois ?
- Speaker #2
Parce qu'on a quand même plus de temps quand on n'est pas maman. On a le temps de savoir qui on est, de se rencontrer. Chose que quand tu as un, deux ou trois enfants...
- Speaker #0
C'est ton projet. Oui, c'est mon projet. Voilà.
- Speaker #2
Et du coup, ça fait...
- Speaker #0
Alors ça, on me l'a souvent dit. Oui, mais toi, tu as du temps. Oui, bien sûr.
- Speaker #1
Mais bien évidemment.
- Speaker #0
Oui, même pour appliquer. Voilà, vous travaillez des choses très anodines. Tiens, je vais partir une semaine à tel endroit. Ben oui, toi, évidemment.
- Speaker #1
Tu as le temps. Tu peux. Donc, on te remet dans un truc de culpabilité. Je ne m'y attendais pas du tout. Non, mais tu te rends compte ? Et c'est ça, finalement, la charge mentale qui est sur la femme, en fait, tout le temps. C'est, en fait, quoi que tu fasses, c'est jamais bien. C'est jamais là où on veut, c'est jamais...
- Speaker #0
C'est pas avec tout le monde, c'est ça.
- Speaker #1
Là, je parle vraiment dans un contexte général de société. Ça ne correspond jamais vraiment. C'est pour ça que je dis, il faut s'affranchir, il faut s'écouter, il faut faire comme on sent. Parce que finalement, on aura beau tout faire, et je suis sûre, si on faisait tout comme tout le monde voulait et comme la société voudrait, ça n'irait pas. Donc pourquoi ? Faisons comme on a envie, comme on le peut, souvent. Parce que des fois, on ne fait pas toujours ce qu'on veut. Fais ce qu'on peut. Avec ce qu'on a. Et avec ce qu'on a. Et dans le temps qui nous est imparti. Et ce n'est pas forcément facile.
- Speaker #2
On a pu s'accorder le droit de dire, non, je n'ai pas envie de répondre à cette question.
- Speaker #0
Je me dis que c'est tout comme répondre quand on est au chômage, par exemple, qu'est-ce que tu fais dans la vie ? Bon, on sait bien que c'est notre métier qui est questionné et qu'on est justement au chômage. Je me dis que ça doit faire un petit peu pareil dans un blanc. Quand on est dans le non, on n'a pas quoi. On n'a pas l'enfant, on n'a pas le travail, on n'a pas la maison peut-être. Ben oui, t'habites où ? Ben non, je suis... Je n'ai pas de domicile, j'habite chez des copains, je ne sais pas. Je pense qu'à chaque fois,
- Speaker #2
ça doit... C'est valorisé. Ce qui est valorisé, c'est la maison, le package. Et l'intérieur de comment est-ce que tu te sens et comment est-ce que tu vis ta vie, on ne nous pose pas forcément la question.
- Speaker #0
Non,
- Speaker #2
c'est vrai. On veut savoir comment... L'extérieur, c'est génial. Mais si l'extérieur est super, et on en connaît tous... Si on manque des choses...
- Speaker #0
Non mais ça...
- Speaker #2
Il n'y a plus de lumière à l'intérieur,
- Speaker #1
mais au moins, ça passe. Je suis assez d'accord avec ce que tu viens de dire, Sarah, parce qu'en fait, finalement, qu'on soit un homme ou qu'on soit une femme, parce que ce qui est important, c'est sa maison intérieure au final. Et ces fameuses cases dans lesquelles nous sommes. parce que nous le restons quand même. La société, les grégores, est des fois très fort. On reste quand même dans des cases, etc. Je pense qu'en fait, on vient réveiller quand on a des parcours différents, des parcours atypiques, des parcours en dehors des cases et de la société. Je pense qu'on vient inconsciemment réveiller les insécurités des autres.
- Speaker #3
Mais complètement.
- Speaker #1
Et en fait, ce qui se passe, c'est de voir quelqu'un qui fonctionne différemment ou qui a une expérience de vie différente. ou qui voient la vie de manière différente, ça nous met face à nous et ça nous met en fait face Ausha et au non-choix que l'on a pris tout au long de notre vie. Et la chose que l'on n'a pas envie de faire, et je m'inclus dedans, c'est que souvent on n'a pas envie d'aller voir, on n'a pas envie de faire le bilan, de se poser la question. Quand on regarde, et ça va être le sujet d'un cours que je vais réaliser dans pas longtemps, La société ne se pose plus de questions. Aujourd'hui, c'est blanc, noir, c'est bien, c'est pas bien, j'aime, j'aime pas, j'achète, j'achète pas. En fait, on n'est plus dans un recul, on n'est plus dans une... Juste, on se pose en conscience en se disant, est-ce que c'est juste ? Est-ce que ça me parle ? Est-ce que je le ressens ? Est-ce que j'en ai envie ? Et du coup, quand on est, nous, dans ces questionnements-là, à travers les parcours qu'on a eus, parce que je pense que quand on a des parcours aussi comme ça, on se pose peut-être un peu plus de questions. en fait, ça va réveiller des questions chez les autres qui les terrorisent. Parce que si jamais la réponse qu'ils recevaient n'était pas celle, n'était pas la bonne, et s'ils s'étaient trompés, mais bienvenue dans notre monde, vous savez quoi ? Il n'y a personne qui réussit tout du premier coup. Et on se trompe tous. Et ça fait partie du chemin. Ce qui est important, c'est de savoir de quelle manière on répond à l'erreur ou au trauma ou au deuil. Qu'est-ce qu'on décide d'en faire, en fait ? Et en fait, je pense que c'est ça que nous réveillons chez les gens qui ont... décidés ou qui, malgré eux, sont dans ce truc très... dans cette case, dans cette maison d'extérieur, je crois qu'on vient réveiller des... Si moi je vais regarder, qu'est-ce qui va se passer chez moi ?
- Speaker #0
Et surtout,
- Speaker #1
quand on est parvenu, comme Pascal, parce que je pense qu'on est dans le même cas, je me permets de le dire un peu, où on a passé le cap de la non-maternité et de la maternité, et qu'on est bien notre peau, et qu'on se construit, qu'on est heureux, et qu'on avance, et qu'on s'établit, en fait, ça les dérange encore plus, parce que... Ça leur montre qu'il y a aussi une vie après. Et si nous, qui avons fait le choix ou le non-choix de ne pas avoir d'enfant, en fait, c'est eux, c'est à quel moment qu'ils se sont posé des questions. Et comment ça se fait qu'ils sont... Et du coup, ça, voilà, on les dérange quelque part. En fait, ça dérange le confort. Mais on sait très bien que la magie se produit quand on sort de sa zone de confort. Donc, nous, on est sortis de notre zone de confort, pour le coup.
- Speaker #2
C'est joli de finir avec la magie.
- Speaker #3
Votre zone de confort pour qu'il y ait de la magie.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #2
Est-ce que vous voulez rajouter un dernier quelque chose ? On arrive à la fin de notre interview.
- Speaker #1
Non, moi j'ai juste envie de vous dire, peu importe ce que vous êtes en train de vivre par rapport à la maternité ou la non-maternité, faites de votre mieux, soyez indulgente avec vous, entourez-vous des personnes qui vont vous valoriser, qui vont vous aider dans cette étape et surtout dites-vous que ce n'est qu'une étape, elle ne vous définit pas et vous allez vivre des choses extraordinaires. Je ne suis pas mieux que vous. Pascal non plus et on a voulu témoigner en tout cas moi j'ai voulu témoigner, ça m'a demandé beaucoup de courage parce que je suis quelqu'un qui protège mon intimité mais parce que tout ça n'est pas vain et qu'il fallait que ça vous serve il y a une vie après et elle va être super, vous allez voir
- Speaker #0
La magie est plus fine.
- Speaker #1
Voilà.
- Speaker #0
Bon, ben, merci beaucoup.
- Speaker #1
Merci beaucoup. Merci à vous. Merci. On a réussi à ce sujet. Exactement. Oui, mais c'est intéressant. Oui. Et, ben, merci à toutes celles et ceux qui nous ont écoutés. On vous mettra les informations des thérapeutes et de l'association aussi, peut-être, sous le podcast. On vous donnera les noms et les adresses pour les femmes que ça intéresse et qui veulent euh... qui veulent consulter tout ça pour s'inspirer des parents.
- Speaker #0
Merci beaucoup, Pascal. Merci, Sarah.
- Speaker #1
Merci, Angelica. Merci, Sarah, aussi. Merci, à très bientôt, à la semaine prochaine.
- Speaker #0
Voilà, avec une autre histoire de maternité ou de non-maternité. Flamme des années 80.
- Speaker #1
Le podcast qui allume la femme.