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Emmanuel Hache sur « l'insécurité minérale » | Interview du 27 février 2024 cover
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Futuribles, le podcast

Emmanuel Hache sur « l'insécurité minérale » | Interview du 27 février 2024

Emmanuel Hache sur « l'insécurité minérale » | Interview du 27 février 2024

12min |27/02/2024
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Description

Emmanuel Hache, économiste et prospectiviste à l’IFPEN (IFP Énergies nouvelles) et directeur de recherche à l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), auteur de l’article « Prospective de l’insécurité minérale » (Futuribles n° 458, janvier-février 2024) et de l’ouvrage Métaux, le nouvel or noir (Monaco : éditions du Rocher, 2023, coécrit avec Benjamin Louvet), propose dans cette interview un rapide coup de projecteur sur « l’insécurité minérale ».


Les récentes crises économiques, géopolitiques, de santé mondiale…, couplées aux enjeux et objectifs de lutte contre le changement climatique, ont considérablement renforcé les préoccupations de l’Union européenne et de ses pays membres pour leurs chaînes d’approvisionnement en certains produits et matériaux.

La première liste de matériaux dits « critiques » de l’Union date de 2011 et les stratégies de sécurisation de l’accès aux ressources sont bien plus anciennes, en particulier aux États-Unis. Néanmoins, le renforcement des alertes concernant les limites planétaires et les besoins spécifiques des secteurs clefs des transitions écologique et numérique confèrent un rôle très stratégique à divers minerais, métaux et matériaux, dont la majeure partie est produite hors d’Europe. Ces matières premières stratégiques indispensables aux transitions en cours pourraient rebattre les cartes sur la scène internationale, et sont au cœur des réflexions de l’Union en matière de souveraineté industrielle et de trajectoire bas-carbone.


Les questions :

  • 00:57 « Qu’il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l’accès aux matières premières jouera un rôle décisif dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. » (Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne lors de son discours sur l’état de l’Union européenne en septembre 2022). Que pensez-vous de cette phrase et de cette transition d’une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • 4:44 Cela s’inscrit dans un contexte géopolitique turbulent et fragmenté (« géofragmentation »). Comment les évolutions plus récentes du contexte géopolitique jouent-elles pour accentuer la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • 8:44 L’Union européenne a publié en 2023 un règlement sur les matériaux critiques pour l’Europe. Quels sont les principaux enjeux auxquels ce document cherche à répondre ?


Le site Internet de Futuribles : https://www.futuribles.com/

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👉 Twitter : https://twitter.com/futuribles_int


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Emmanuel Hache, bonjour. Merci de nous avoir rejoints. Vous êtes économiste et prospectiviste à l'IFP Énergie Nouvelle. Vous êtes directeur de recherche à l'IRIS, l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques. Et vous êtes auteur de l'article Prospective de l'insécurité minérale qui est paru dans le numéro de janvier-février 2024 de la revue Futurible. Vous avez également publié un ouvrage co-écrit avec Benjamin Louvet qui s'intitule Métaux, le nouvel or noir aux éditions du Rocher en 2023. Et donc vous êtes un des grands spécialistes de cette question qui agite aujourd'hui beaucoup sur les métaux stratégiques. Donc merci beaucoup d'avoir accepté de nous rejoindre et de répondre à quelques-unes de nos questions. Elles sont notamment abordées dans l'article de Futurib que je viens de mentionner. Première question, j'aimerais vous soumettre une phrase. d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, qu'elle a tenue lors de son discours sur l'état de l'Union en 2022 et vous interrogez un petit peu sur l'interprétation que vous pouvez faire de cette phrase. La présidente de l'Union européenne disait qu'il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l'accès aux matières premières jouera un rôle décisif. dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. Alors Emmanuel Hache, qu'est-ce que vous pensez effectivement de cette phrase et de cette transition finalement d'une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • Speaker #1

    Je pense tout simplement que cette phrase de Ursula von der Leyen, elle reflète le changement de paradigme. que l'on peut observer dans le secteur énergétique à l'heure actuelle, avec notamment le déploiement massif des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Et elle rappelle un petit peu ce que Thierry Breton, qui est commissaire européen au marché intérieur, il a prononcé un discours qui, j'allais dire, rajoute également une touche d'incertitude géopolitique quand il dit pas de batterie sans lithium, pas d'éoliennes en terre rare Et pour nos munitions, il nous faut du tungstène. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire tout simplement qu'on est dans une forme d'insécurité énergétique et de contexte insécuritaire en Europe. Et quelque part, ces propos reflètent toutes les questions qui sont liées à la souveraineté et à la dépendance. Pourquoi ? Parce que les matériaux critiques dans leur ensemble sont devenus des piliers. indispensable du déploiement de l'ensemble des équipements bas carbone que ce soit les métaux utilisés dans les batteries de véhicules électriques on pense notamment au nickel au manganèse au cobalt au lithium dans les technologies de l'éolien avec notamment la 7 cette permanence de la question des aimants permanent dans le solaire ou dans l'hydrogène est quelque part derrière Ces questions de dépendance, il y a la question de est-ce que ces matériaux ne vont pas constituer un frein ? C'est-à-dire que est-ce que nos dépendances ne vont pas constituer un frein aux deux grandes transitions, transition écologique et transition du numérique ? Et quelque part, ces propos européens, ils rappellent aussi l'accélération assez nette des enjeux qui sont liés aux minerais, aux métaux sur la scène internationale depuis une dizaine d'années. ou que ce soit les rapports de l'Agence internationale de l'énergie, de la Banque mondiale, tous mettent en évidence le fait que dans un monde bas carbone, on va avoir besoin de minerais, on va potentiellement en consommer quatre fois plus, on va avoir besoin de métaux. Et cette prise de conscience, elle s'est accompagnée d'une montée en puissance de l'ensemble des enjeux de sécurisation des approvisionnements. et dans un contexte de rivalité systémique entre la Chine et les États-Unis. Et ce qui est sûr, c'est que face à nous, on a des transitions qui vont être métallivores. Et face à ces transitions métallivores, on a des stratégies nationales et des stratégies internationales. Preuve en est, la plupart des politiques qui sont liées au matériau critique ont été développées entre 2013 et 2014. 2013 et 2023, ce qui montre qu'on est au cœur des enjeux de la transition, des transitions avec ces questions de matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Alors, vous l'avez dit, ce n'est pas une question nouvelle, puisque aux États-Unis, ça fait de très nombreuses années que ces matériaux apparaissent comme des matériaux stratégiques et donc font l'objet d'une attention particulière. L'Union européenne a mis en place sa première liste de matériaux critiques, je pense, en 2011. Néanmoins, ça s'inscrit, comme vous le disiez, dans un contexte qui est un contexte un petit peu différent, notamment d'un point de vue géopolitique. Je sais que vous aimez utiliser l'expression du FMI de géofragmentation. Alors comment est-ce que justement les évolutions plus récentes peut-être du contexte géopolitique jouent pour accentuer en quelque sorte la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • Speaker #1

    Alors effectivement j'aime bien utiliser ce terme de géofragmentation tout simplement parce que je trouve qu'il reflète à la fois une construction géopolitique, enfin d'un concept géopolitique qu'on pourrait appeler la désoccidentalisation ou le retour des blocs. ce qui n'est pas exactement la même chose, et également les questions commerciales, c'est-à-dire toutes les questions qui sont relatives au fait qu'est-ce qu'on est en train d'assister à un plateau de mondialisation ou est-ce qu'on est déjà dans une démondialisation. Le rapport du FMI de 2023, qui consacre un chapitre entier à cette question de la géofragmentation, il est particulièrement intéressant, pourquoi ? Parce qu'il met un tout petit peu en perspective tous les mouvements qu'on a pu observer. J'allais dire depuis la rivalité, comment dire, sous l'ère Trump entre les États-Unis et la Chine, et puis toute la dynamique économique qu'on a observée en fait sur la période post-Covid, la désorganisation des chaînes d'approvisionnement mondiales, la hausse des prix marqués des matières premières. Et donc quelque part, on a un sentiment que la géofragmentation, en tout cas le retour à des blocs de puissance avec en plus… chose un tout petit peu inédite, des formes de multi-alignement pour certains pays, une forme un petit peu contractuelle des relations internationales sur certains sujets. On va plutôt être associé ou allié à un bloc particulier. On peut penser notamment au positionnement de l'Inde dans la géopolitique actuelle, qui est véritablement un multi-aligné plutôt qu'un non-aligné. Et quelque part, la géofragmentation, pourquoi elle nous intéresse quand on travaille sur les matériaux critiques ? Tout simplement parce que... On a une incertitude notamment sur les prix des métaux et des conséquences des prix des métaux sur le coût de la transition et sur le coût des technologies. Pourquoi ? Parce que notamment dans ce rapport, et puis de nombreuses études mettent en évidence qu'un monde géofragmenté ou fragmenté, c'est un monde où on va payer beaucoup plus cher les métaux de transition, les métaux critiques. Pourquoi ? Parce que tout simplement, le segment des métaux, c'est un segment très particulier. sur les marchés internationaux de produits de base. Ce sont les marchés qui sont les plus internationalisés. La chaîne de valeur est découpée entre les minerais, les métaux et puis les équipements. Et quelque part, géofragmenter le monde, c'est renforcer la probabilité d'avoir des métaux plus chers, ce qui pourrait notamment nous emmener vers des équipements un tout petit peu plus chers que ce que l'on a à l'heure actuelle et donc renforcer le coût de la transition. Et derrière ? Cette question de la géofragmentation, il y a la question des multi-alliances et notamment cet esprit de club que l'on retrouve sur les marchés de matières premières. Club à la fois qui sont faits notamment des possibles cartels qu'on pourrait avoir sur les marchés de métaux critiques, notamment sur le lithium ou sur le nickel. Ou tout simplement club quand on regarde notamment la reconstitution ou la constitution des BRIC+, Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. et plus les six pays qui ont permis d'associer aux BRICS, on se pose la question notamment de, est-ce qu'on ne va pas avoir des clubs de matières premières qui sont en train de se reformer, comme j'allais dire, comme dans les années 60-70 ?

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Vous parlez de l'augmentation du coût de l'accès à ces matières premières critiques. De fait, elles deviennent stratégiques puisqu'elles portent aussi sur des secteurs qui sont essentiels pour l'économie et le fonctionnement des différents blocs. En l'occurrence, l'Union européenne a publié récemment, en 2023, un règlement sur les matériaux critiques. Est-ce que vous pouvez nous en préciser un petit peu les principaux enjeux, en tout cas les principaux enjeux ou les principaux défis auxquels ce document cherche à répondre ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense qu'il faut dire quelque chose d'assez intéressant sur ce règlement. C'est que Ursula von der Leyen avait fait de l'adoption d'une législation contraignante sur les matières premières critiques une des priorités de son mandat. Et on a véritablement une rapidité des négociations. Pourquoi ? Parce que le texte a été présenté en mars 2023 à la Commission. Et le Parlement et le Conseil de l'UE sont parvenus à un premier accord en novembre. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que véritablement, on a pris à corps et à cœur cette question des matériaux critiques. Après, grande différenciation par rapport à d'autres plans qu'on peut avoir, notamment aux États-Unis, au Japon ou au Royaume-Uni, c'est qu'on va avoir des objectifs chiffrés sur les différents stades de la chaîne de valeur. C'est-à-dire qu'horizon 2030, l'Union européenne a un objectif, par exemple, de 10% de la consommation européenne doit être... produits sur le sol européen en termes de minerais, c'est-à-dire pour le secteur extractif. Alors c'est quand même quelque chose d'assez fondamental. Pourquoi ? Parce que quelque part en Europe, on a un petit peu perdu le goût de la mine, j'ai envie de dire culturellement et économiquement. Donc ça veut dire véritablement, potentiellement réouvrir des mines sur le sol européen. Donc c'est un vrai challenge qu'on peut avoir en face de nous. On a aussi un objectif en termes de relocalisation de l'industrie de la transformation des minerais en métaux, ce qu'on appelle le raffinage, porté à entre 40 et 50 Et puis, on a un objectif sur le recyclage. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que potentiellement, on essaie de mettre, j'allais dire, en Europe, des objectifs qui permettraient d'assurer une certaine souveraineté européenne sur ces questions. Et puis, on a un dernier objectif. Là, il est complètement géopolitique. c'est que l'Union européenne ne doit pas être dépendant à plus de 65% d'un seul pays extérieur à la zone. C'était l'objectif anti-Chine, clairement. Pourquoi ? Parce que tout simplement, seule la Chine et quelques autres pays sur certains minerais, mais principalement, il est à destination de notre concurrent chinois, essayer de sortir de la dépendance à la Chine sur la question des matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Très bien, écoutez, merci beaucoup. Donc, sachant que tout ça s'inscrit effectivement dans un grand jeu, puisque la Chine elle-même a sa propre stratégie, ses propres, effectivement, limitations aux exportations que les États-Unis font d'eux-mêmes, etc. Emmanuel Hache, merci beaucoup. Et si jamais vous souhaitez en savoir plus, je recommande la lecture de votre très bon article dans le dernier numéro de Futurib de janvier-février 2024. Et si vous voulez en savoir encore plus, je rappelle qu'on peut se référer à votre ouvrage publié récemment sur le sujet. Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci infiniment.

Chapters

  • Question 1

    00:57

  • Question 2

    04:44

  • Chapitre 3

    08:44

Description

Emmanuel Hache, économiste et prospectiviste à l’IFPEN (IFP Énergies nouvelles) et directeur de recherche à l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), auteur de l’article « Prospective de l’insécurité minérale » (Futuribles n° 458, janvier-février 2024) et de l’ouvrage Métaux, le nouvel or noir (Monaco : éditions du Rocher, 2023, coécrit avec Benjamin Louvet), propose dans cette interview un rapide coup de projecteur sur « l’insécurité minérale ».


Les récentes crises économiques, géopolitiques, de santé mondiale…, couplées aux enjeux et objectifs de lutte contre le changement climatique, ont considérablement renforcé les préoccupations de l’Union européenne et de ses pays membres pour leurs chaînes d’approvisionnement en certains produits et matériaux.

La première liste de matériaux dits « critiques » de l’Union date de 2011 et les stratégies de sécurisation de l’accès aux ressources sont bien plus anciennes, en particulier aux États-Unis. Néanmoins, le renforcement des alertes concernant les limites planétaires et les besoins spécifiques des secteurs clefs des transitions écologique et numérique confèrent un rôle très stratégique à divers minerais, métaux et matériaux, dont la majeure partie est produite hors d’Europe. Ces matières premières stratégiques indispensables aux transitions en cours pourraient rebattre les cartes sur la scène internationale, et sont au cœur des réflexions de l’Union en matière de souveraineté industrielle et de trajectoire bas-carbone.


Les questions :

  • 00:57 « Qu’il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l’accès aux matières premières jouera un rôle décisif dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. » (Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne lors de son discours sur l’état de l’Union européenne en septembre 2022). Que pensez-vous de cette phrase et de cette transition d’une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • 4:44 Cela s’inscrit dans un contexte géopolitique turbulent et fragmenté (« géofragmentation »). Comment les évolutions plus récentes du contexte géopolitique jouent-elles pour accentuer la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • 8:44 L’Union européenne a publié en 2023 un règlement sur les matériaux critiques pour l’Europe. Quels sont les principaux enjeux auxquels ce document cherche à répondre ?


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Transcription

  • Speaker #0

    Emmanuel Hache, bonjour. Merci de nous avoir rejoints. Vous êtes économiste et prospectiviste à l'IFP Énergie Nouvelle. Vous êtes directeur de recherche à l'IRIS, l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques. Et vous êtes auteur de l'article Prospective de l'insécurité minérale qui est paru dans le numéro de janvier-février 2024 de la revue Futurible. Vous avez également publié un ouvrage co-écrit avec Benjamin Louvet qui s'intitule Métaux, le nouvel or noir aux éditions du Rocher en 2023. Et donc vous êtes un des grands spécialistes de cette question qui agite aujourd'hui beaucoup sur les métaux stratégiques. Donc merci beaucoup d'avoir accepté de nous rejoindre et de répondre à quelques-unes de nos questions. Elles sont notamment abordées dans l'article de Futurib que je viens de mentionner. Première question, j'aimerais vous soumettre une phrase. d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, qu'elle a tenue lors de son discours sur l'état de l'Union en 2022 et vous interrogez un petit peu sur l'interprétation que vous pouvez faire de cette phrase. La présidente de l'Union européenne disait qu'il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l'accès aux matières premières jouera un rôle décisif. dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. Alors Emmanuel Hache, qu'est-ce que vous pensez effectivement de cette phrase et de cette transition finalement d'une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • Speaker #1

    Je pense tout simplement que cette phrase de Ursula von der Leyen, elle reflète le changement de paradigme. que l'on peut observer dans le secteur énergétique à l'heure actuelle, avec notamment le déploiement massif des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Et elle rappelle un petit peu ce que Thierry Breton, qui est commissaire européen au marché intérieur, il a prononcé un discours qui, j'allais dire, rajoute également une touche d'incertitude géopolitique quand il dit pas de batterie sans lithium, pas d'éoliennes en terre rare Et pour nos munitions, il nous faut du tungstène. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire tout simplement qu'on est dans une forme d'insécurité énergétique et de contexte insécuritaire en Europe. Et quelque part, ces propos reflètent toutes les questions qui sont liées à la souveraineté et à la dépendance. Pourquoi ? Parce que les matériaux critiques dans leur ensemble sont devenus des piliers. indispensable du déploiement de l'ensemble des équipements bas carbone que ce soit les métaux utilisés dans les batteries de véhicules électriques on pense notamment au nickel au manganèse au cobalt au lithium dans les technologies de l'éolien avec notamment la 7 cette permanence de la question des aimants permanent dans le solaire ou dans l'hydrogène est quelque part derrière Ces questions de dépendance, il y a la question de est-ce que ces matériaux ne vont pas constituer un frein ? C'est-à-dire que est-ce que nos dépendances ne vont pas constituer un frein aux deux grandes transitions, transition écologique et transition du numérique ? Et quelque part, ces propos européens, ils rappellent aussi l'accélération assez nette des enjeux qui sont liés aux minerais, aux métaux sur la scène internationale depuis une dizaine d'années. ou que ce soit les rapports de l'Agence internationale de l'énergie, de la Banque mondiale, tous mettent en évidence le fait que dans un monde bas carbone, on va avoir besoin de minerais, on va potentiellement en consommer quatre fois plus, on va avoir besoin de métaux. Et cette prise de conscience, elle s'est accompagnée d'une montée en puissance de l'ensemble des enjeux de sécurisation des approvisionnements. et dans un contexte de rivalité systémique entre la Chine et les États-Unis. Et ce qui est sûr, c'est que face à nous, on a des transitions qui vont être métallivores. Et face à ces transitions métallivores, on a des stratégies nationales et des stratégies internationales. Preuve en est, la plupart des politiques qui sont liées au matériau critique ont été développées entre 2013 et 2014. 2013 et 2023, ce qui montre qu'on est au cœur des enjeux de la transition, des transitions avec ces questions de matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Alors, vous l'avez dit, ce n'est pas une question nouvelle, puisque aux États-Unis, ça fait de très nombreuses années que ces matériaux apparaissent comme des matériaux stratégiques et donc font l'objet d'une attention particulière. L'Union européenne a mis en place sa première liste de matériaux critiques, je pense, en 2011. Néanmoins, ça s'inscrit, comme vous le disiez, dans un contexte qui est un contexte un petit peu différent, notamment d'un point de vue géopolitique. Je sais que vous aimez utiliser l'expression du FMI de géofragmentation. Alors comment est-ce que justement les évolutions plus récentes peut-être du contexte géopolitique jouent pour accentuer en quelque sorte la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • Speaker #1

    Alors effectivement j'aime bien utiliser ce terme de géofragmentation tout simplement parce que je trouve qu'il reflète à la fois une construction géopolitique, enfin d'un concept géopolitique qu'on pourrait appeler la désoccidentalisation ou le retour des blocs. ce qui n'est pas exactement la même chose, et également les questions commerciales, c'est-à-dire toutes les questions qui sont relatives au fait qu'est-ce qu'on est en train d'assister à un plateau de mondialisation ou est-ce qu'on est déjà dans une démondialisation. Le rapport du FMI de 2023, qui consacre un chapitre entier à cette question de la géofragmentation, il est particulièrement intéressant, pourquoi ? Parce qu'il met un tout petit peu en perspective tous les mouvements qu'on a pu observer. J'allais dire depuis la rivalité, comment dire, sous l'ère Trump entre les États-Unis et la Chine, et puis toute la dynamique économique qu'on a observée en fait sur la période post-Covid, la désorganisation des chaînes d'approvisionnement mondiales, la hausse des prix marqués des matières premières. Et donc quelque part, on a un sentiment que la géofragmentation, en tout cas le retour à des blocs de puissance avec en plus… chose un tout petit peu inédite, des formes de multi-alignement pour certains pays, une forme un petit peu contractuelle des relations internationales sur certains sujets. On va plutôt être associé ou allié à un bloc particulier. On peut penser notamment au positionnement de l'Inde dans la géopolitique actuelle, qui est véritablement un multi-aligné plutôt qu'un non-aligné. Et quelque part, la géofragmentation, pourquoi elle nous intéresse quand on travaille sur les matériaux critiques ? Tout simplement parce que... On a une incertitude notamment sur les prix des métaux et des conséquences des prix des métaux sur le coût de la transition et sur le coût des technologies. Pourquoi ? Parce que notamment dans ce rapport, et puis de nombreuses études mettent en évidence qu'un monde géofragmenté ou fragmenté, c'est un monde où on va payer beaucoup plus cher les métaux de transition, les métaux critiques. Pourquoi ? Parce que tout simplement, le segment des métaux, c'est un segment très particulier. sur les marchés internationaux de produits de base. Ce sont les marchés qui sont les plus internationalisés. La chaîne de valeur est découpée entre les minerais, les métaux et puis les équipements. Et quelque part, géofragmenter le monde, c'est renforcer la probabilité d'avoir des métaux plus chers, ce qui pourrait notamment nous emmener vers des équipements un tout petit peu plus chers que ce que l'on a à l'heure actuelle et donc renforcer le coût de la transition. Et derrière ? Cette question de la géofragmentation, il y a la question des multi-alliances et notamment cet esprit de club que l'on retrouve sur les marchés de matières premières. Club à la fois qui sont faits notamment des possibles cartels qu'on pourrait avoir sur les marchés de métaux critiques, notamment sur le lithium ou sur le nickel. Ou tout simplement club quand on regarde notamment la reconstitution ou la constitution des BRIC+, Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. et plus les six pays qui ont permis d'associer aux BRICS, on se pose la question notamment de, est-ce qu'on ne va pas avoir des clubs de matières premières qui sont en train de se reformer, comme j'allais dire, comme dans les années 60-70 ?

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Vous parlez de l'augmentation du coût de l'accès à ces matières premières critiques. De fait, elles deviennent stratégiques puisqu'elles portent aussi sur des secteurs qui sont essentiels pour l'économie et le fonctionnement des différents blocs. En l'occurrence, l'Union européenne a publié récemment, en 2023, un règlement sur les matériaux critiques. Est-ce que vous pouvez nous en préciser un petit peu les principaux enjeux, en tout cas les principaux enjeux ou les principaux défis auxquels ce document cherche à répondre ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense qu'il faut dire quelque chose d'assez intéressant sur ce règlement. C'est que Ursula von der Leyen avait fait de l'adoption d'une législation contraignante sur les matières premières critiques une des priorités de son mandat. Et on a véritablement une rapidité des négociations. Pourquoi ? Parce que le texte a été présenté en mars 2023 à la Commission. Et le Parlement et le Conseil de l'UE sont parvenus à un premier accord en novembre. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que véritablement, on a pris à corps et à cœur cette question des matériaux critiques. Après, grande différenciation par rapport à d'autres plans qu'on peut avoir, notamment aux États-Unis, au Japon ou au Royaume-Uni, c'est qu'on va avoir des objectifs chiffrés sur les différents stades de la chaîne de valeur. C'est-à-dire qu'horizon 2030, l'Union européenne a un objectif, par exemple, de 10% de la consommation européenne doit être... produits sur le sol européen en termes de minerais, c'est-à-dire pour le secteur extractif. Alors c'est quand même quelque chose d'assez fondamental. Pourquoi ? Parce que quelque part en Europe, on a un petit peu perdu le goût de la mine, j'ai envie de dire culturellement et économiquement. Donc ça veut dire véritablement, potentiellement réouvrir des mines sur le sol européen. Donc c'est un vrai challenge qu'on peut avoir en face de nous. On a aussi un objectif en termes de relocalisation de l'industrie de la transformation des minerais en métaux, ce qu'on appelle le raffinage, porté à entre 40 et 50 Et puis, on a un objectif sur le recyclage. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que potentiellement, on essaie de mettre, j'allais dire, en Europe, des objectifs qui permettraient d'assurer une certaine souveraineté européenne sur ces questions. Et puis, on a un dernier objectif. Là, il est complètement géopolitique. c'est que l'Union européenne ne doit pas être dépendant à plus de 65% d'un seul pays extérieur à la zone. C'était l'objectif anti-Chine, clairement. Pourquoi ? Parce que tout simplement, seule la Chine et quelques autres pays sur certains minerais, mais principalement, il est à destination de notre concurrent chinois, essayer de sortir de la dépendance à la Chine sur la question des matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Très bien, écoutez, merci beaucoup. Donc, sachant que tout ça s'inscrit effectivement dans un grand jeu, puisque la Chine elle-même a sa propre stratégie, ses propres, effectivement, limitations aux exportations que les États-Unis font d'eux-mêmes, etc. Emmanuel Hache, merci beaucoup. Et si jamais vous souhaitez en savoir plus, je recommande la lecture de votre très bon article dans le dernier numéro de Futurib de janvier-février 2024. Et si vous voulez en savoir encore plus, je rappelle qu'on peut se référer à votre ouvrage publié récemment sur le sujet. Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci infiniment.

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  • Question 1

    00:57

  • Question 2

    04:44

  • Chapitre 3

    08:44

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Emmanuel Hache, économiste et prospectiviste à l’IFPEN (IFP Énergies nouvelles) et directeur de recherche à l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), auteur de l’article « Prospective de l’insécurité minérale » (Futuribles n° 458, janvier-février 2024) et de l’ouvrage Métaux, le nouvel or noir (Monaco : éditions du Rocher, 2023, coécrit avec Benjamin Louvet), propose dans cette interview un rapide coup de projecteur sur « l’insécurité minérale ».


Les récentes crises économiques, géopolitiques, de santé mondiale…, couplées aux enjeux et objectifs de lutte contre le changement climatique, ont considérablement renforcé les préoccupations de l’Union européenne et de ses pays membres pour leurs chaînes d’approvisionnement en certains produits et matériaux.

La première liste de matériaux dits « critiques » de l’Union date de 2011 et les stratégies de sécurisation de l’accès aux ressources sont bien plus anciennes, en particulier aux États-Unis. Néanmoins, le renforcement des alertes concernant les limites planétaires et les besoins spécifiques des secteurs clefs des transitions écologique et numérique confèrent un rôle très stratégique à divers minerais, métaux et matériaux, dont la majeure partie est produite hors d’Europe. Ces matières premières stratégiques indispensables aux transitions en cours pourraient rebattre les cartes sur la scène internationale, et sont au cœur des réflexions de l’Union en matière de souveraineté industrielle et de trajectoire bas-carbone.


Les questions :

  • 00:57 « Qu’il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l’accès aux matières premières jouera un rôle décisif dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. » (Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne lors de son discours sur l’état de l’Union européenne en septembre 2022). Que pensez-vous de cette phrase et de cette transition d’une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • 4:44 Cela s’inscrit dans un contexte géopolitique turbulent et fragmenté (« géofragmentation »). Comment les évolutions plus récentes du contexte géopolitique jouent-elles pour accentuer la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • 8:44 L’Union européenne a publié en 2023 un règlement sur les matériaux critiques pour l’Europe. Quels sont les principaux enjeux auxquels ce document cherche à répondre ?


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Transcription

  • Speaker #0

    Emmanuel Hache, bonjour. Merci de nous avoir rejoints. Vous êtes économiste et prospectiviste à l'IFP Énergie Nouvelle. Vous êtes directeur de recherche à l'IRIS, l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques. Et vous êtes auteur de l'article Prospective de l'insécurité minérale qui est paru dans le numéro de janvier-février 2024 de la revue Futurible. Vous avez également publié un ouvrage co-écrit avec Benjamin Louvet qui s'intitule Métaux, le nouvel or noir aux éditions du Rocher en 2023. Et donc vous êtes un des grands spécialistes de cette question qui agite aujourd'hui beaucoup sur les métaux stratégiques. Donc merci beaucoup d'avoir accepté de nous rejoindre et de répondre à quelques-unes de nos questions. Elles sont notamment abordées dans l'article de Futurib que je viens de mentionner. Première question, j'aimerais vous soumettre une phrase. d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, qu'elle a tenue lors de son discours sur l'état de l'Union en 2022 et vous interrogez un petit peu sur l'interprétation que vous pouvez faire de cette phrase. La présidente de l'Union européenne disait qu'il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l'accès aux matières premières jouera un rôle décisif. dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. Alors Emmanuel Hache, qu'est-ce que vous pensez effectivement de cette phrase et de cette transition finalement d'une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • Speaker #1

    Je pense tout simplement que cette phrase de Ursula von der Leyen, elle reflète le changement de paradigme. que l'on peut observer dans le secteur énergétique à l'heure actuelle, avec notamment le déploiement massif des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Et elle rappelle un petit peu ce que Thierry Breton, qui est commissaire européen au marché intérieur, il a prononcé un discours qui, j'allais dire, rajoute également une touche d'incertitude géopolitique quand il dit pas de batterie sans lithium, pas d'éoliennes en terre rare Et pour nos munitions, il nous faut du tungstène. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire tout simplement qu'on est dans une forme d'insécurité énergétique et de contexte insécuritaire en Europe. Et quelque part, ces propos reflètent toutes les questions qui sont liées à la souveraineté et à la dépendance. Pourquoi ? Parce que les matériaux critiques dans leur ensemble sont devenus des piliers. indispensable du déploiement de l'ensemble des équipements bas carbone que ce soit les métaux utilisés dans les batteries de véhicules électriques on pense notamment au nickel au manganèse au cobalt au lithium dans les technologies de l'éolien avec notamment la 7 cette permanence de la question des aimants permanent dans le solaire ou dans l'hydrogène est quelque part derrière Ces questions de dépendance, il y a la question de est-ce que ces matériaux ne vont pas constituer un frein ? C'est-à-dire que est-ce que nos dépendances ne vont pas constituer un frein aux deux grandes transitions, transition écologique et transition du numérique ? Et quelque part, ces propos européens, ils rappellent aussi l'accélération assez nette des enjeux qui sont liés aux minerais, aux métaux sur la scène internationale depuis une dizaine d'années. ou que ce soit les rapports de l'Agence internationale de l'énergie, de la Banque mondiale, tous mettent en évidence le fait que dans un monde bas carbone, on va avoir besoin de minerais, on va potentiellement en consommer quatre fois plus, on va avoir besoin de métaux. Et cette prise de conscience, elle s'est accompagnée d'une montée en puissance de l'ensemble des enjeux de sécurisation des approvisionnements. et dans un contexte de rivalité systémique entre la Chine et les États-Unis. Et ce qui est sûr, c'est que face à nous, on a des transitions qui vont être métallivores. Et face à ces transitions métallivores, on a des stratégies nationales et des stratégies internationales. Preuve en est, la plupart des politiques qui sont liées au matériau critique ont été développées entre 2013 et 2014. 2013 et 2023, ce qui montre qu'on est au cœur des enjeux de la transition, des transitions avec ces questions de matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Alors, vous l'avez dit, ce n'est pas une question nouvelle, puisque aux États-Unis, ça fait de très nombreuses années que ces matériaux apparaissent comme des matériaux stratégiques et donc font l'objet d'une attention particulière. L'Union européenne a mis en place sa première liste de matériaux critiques, je pense, en 2011. Néanmoins, ça s'inscrit, comme vous le disiez, dans un contexte qui est un contexte un petit peu différent, notamment d'un point de vue géopolitique. Je sais que vous aimez utiliser l'expression du FMI de géofragmentation. Alors comment est-ce que justement les évolutions plus récentes peut-être du contexte géopolitique jouent pour accentuer en quelque sorte la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • Speaker #1

    Alors effectivement j'aime bien utiliser ce terme de géofragmentation tout simplement parce que je trouve qu'il reflète à la fois une construction géopolitique, enfin d'un concept géopolitique qu'on pourrait appeler la désoccidentalisation ou le retour des blocs. ce qui n'est pas exactement la même chose, et également les questions commerciales, c'est-à-dire toutes les questions qui sont relatives au fait qu'est-ce qu'on est en train d'assister à un plateau de mondialisation ou est-ce qu'on est déjà dans une démondialisation. Le rapport du FMI de 2023, qui consacre un chapitre entier à cette question de la géofragmentation, il est particulièrement intéressant, pourquoi ? Parce qu'il met un tout petit peu en perspective tous les mouvements qu'on a pu observer. J'allais dire depuis la rivalité, comment dire, sous l'ère Trump entre les États-Unis et la Chine, et puis toute la dynamique économique qu'on a observée en fait sur la période post-Covid, la désorganisation des chaînes d'approvisionnement mondiales, la hausse des prix marqués des matières premières. Et donc quelque part, on a un sentiment que la géofragmentation, en tout cas le retour à des blocs de puissance avec en plus… chose un tout petit peu inédite, des formes de multi-alignement pour certains pays, une forme un petit peu contractuelle des relations internationales sur certains sujets. On va plutôt être associé ou allié à un bloc particulier. On peut penser notamment au positionnement de l'Inde dans la géopolitique actuelle, qui est véritablement un multi-aligné plutôt qu'un non-aligné. Et quelque part, la géofragmentation, pourquoi elle nous intéresse quand on travaille sur les matériaux critiques ? Tout simplement parce que... On a une incertitude notamment sur les prix des métaux et des conséquences des prix des métaux sur le coût de la transition et sur le coût des technologies. Pourquoi ? Parce que notamment dans ce rapport, et puis de nombreuses études mettent en évidence qu'un monde géofragmenté ou fragmenté, c'est un monde où on va payer beaucoup plus cher les métaux de transition, les métaux critiques. Pourquoi ? Parce que tout simplement, le segment des métaux, c'est un segment très particulier. sur les marchés internationaux de produits de base. Ce sont les marchés qui sont les plus internationalisés. La chaîne de valeur est découpée entre les minerais, les métaux et puis les équipements. Et quelque part, géofragmenter le monde, c'est renforcer la probabilité d'avoir des métaux plus chers, ce qui pourrait notamment nous emmener vers des équipements un tout petit peu plus chers que ce que l'on a à l'heure actuelle et donc renforcer le coût de la transition. Et derrière ? Cette question de la géofragmentation, il y a la question des multi-alliances et notamment cet esprit de club que l'on retrouve sur les marchés de matières premières. Club à la fois qui sont faits notamment des possibles cartels qu'on pourrait avoir sur les marchés de métaux critiques, notamment sur le lithium ou sur le nickel. Ou tout simplement club quand on regarde notamment la reconstitution ou la constitution des BRIC+, Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. et plus les six pays qui ont permis d'associer aux BRICS, on se pose la question notamment de, est-ce qu'on ne va pas avoir des clubs de matières premières qui sont en train de se reformer, comme j'allais dire, comme dans les années 60-70 ?

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Vous parlez de l'augmentation du coût de l'accès à ces matières premières critiques. De fait, elles deviennent stratégiques puisqu'elles portent aussi sur des secteurs qui sont essentiels pour l'économie et le fonctionnement des différents blocs. En l'occurrence, l'Union européenne a publié récemment, en 2023, un règlement sur les matériaux critiques. Est-ce que vous pouvez nous en préciser un petit peu les principaux enjeux, en tout cas les principaux enjeux ou les principaux défis auxquels ce document cherche à répondre ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense qu'il faut dire quelque chose d'assez intéressant sur ce règlement. C'est que Ursula von der Leyen avait fait de l'adoption d'une législation contraignante sur les matières premières critiques une des priorités de son mandat. Et on a véritablement une rapidité des négociations. Pourquoi ? Parce que le texte a été présenté en mars 2023 à la Commission. Et le Parlement et le Conseil de l'UE sont parvenus à un premier accord en novembre. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que véritablement, on a pris à corps et à cœur cette question des matériaux critiques. Après, grande différenciation par rapport à d'autres plans qu'on peut avoir, notamment aux États-Unis, au Japon ou au Royaume-Uni, c'est qu'on va avoir des objectifs chiffrés sur les différents stades de la chaîne de valeur. C'est-à-dire qu'horizon 2030, l'Union européenne a un objectif, par exemple, de 10% de la consommation européenne doit être... produits sur le sol européen en termes de minerais, c'est-à-dire pour le secteur extractif. Alors c'est quand même quelque chose d'assez fondamental. Pourquoi ? Parce que quelque part en Europe, on a un petit peu perdu le goût de la mine, j'ai envie de dire culturellement et économiquement. Donc ça veut dire véritablement, potentiellement réouvrir des mines sur le sol européen. Donc c'est un vrai challenge qu'on peut avoir en face de nous. On a aussi un objectif en termes de relocalisation de l'industrie de la transformation des minerais en métaux, ce qu'on appelle le raffinage, porté à entre 40 et 50 Et puis, on a un objectif sur le recyclage. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que potentiellement, on essaie de mettre, j'allais dire, en Europe, des objectifs qui permettraient d'assurer une certaine souveraineté européenne sur ces questions. Et puis, on a un dernier objectif. Là, il est complètement géopolitique. c'est que l'Union européenne ne doit pas être dépendant à plus de 65% d'un seul pays extérieur à la zone. C'était l'objectif anti-Chine, clairement. Pourquoi ? Parce que tout simplement, seule la Chine et quelques autres pays sur certains minerais, mais principalement, il est à destination de notre concurrent chinois, essayer de sortir de la dépendance à la Chine sur la question des matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Très bien, écoutez, merci beaucoup. Donc, sachant que tout ça s'inscrit effectivement dans un grand jeu, puisque la Chine elle-même a sa propre stratégie, ses propres, effectivement, limitations aux exportations que les États-Unis font d'eux-mêmes, etc. Emmanuel Hache, merci beaucoup. Et si jamais vous souhaitez en savoir plus, je recommande la lecture de votre très bon article dans le dernier numéro de Futurib de janvier-février 2024. Et si vous voulez en savoir encore plus, je rappelle qu'on peut se référer à votre ouvrage publié récemment sur le sujet. Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci infiniment.

Chapters

  • Question 1

    00:57

  • Question 2

    04:44

  • Chapitre 3

    08:44

Description

Emmanuel Hache, économiste et prospectiviste à l’IFPEN (IFP Énergies nouvelles) et directeur de recherche à l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), auteur de l’article « Prospective de l’insécurité minérale » (Futuribles n° 458, janvier-février 2024) et de l’ouvrage Métaux, le nouvel or noir (Monaco : éditions du Rocher, 2023, coécrit avec Benjamin Louvet), propose dans cette interview un rapide coup de projecteur sur « l’insécurité minérale ».


Les récentes crises économiques, géopolitiques, de santé mondiale…, couplées aux enjeux et objectifs de lutte contre le changement climatique, ont considérablement renforcé les préoccupations de l’Union européenne et de ses pays membres pour leurs chaînes d’approvisionnement en certains produits et matériaux.

La première liste de matériaux dits « critiques » de l’Union date de 2011 et les stratégies de sécurisation de l’accès aux ressources sont bien plus anciennes, en particulier aux États-Unis. Néanmoins, le renforcement des alertes concernant les limites planétaires et les besoins spécifiques des secteurs clefs des transitions écologique et numérique confèrent un rôle très stratégique à divers minerais, métaux et matériaux, dont la majeure partie est produite hors d’Europe. Ces matières premières stratégiques indispensables aux transitions en cours pourraient rebattre les cartes sur la scène internationale, et sont au cœur des réflexions de l’Union en matière de souveraineté industrielle et de trajectoire bas-carbone.


Les questions :

  • 00:57 « Qu’il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l’accès aux matières premières jouera un rôle décisif dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. » (Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne lors de son discours sur l’état de l’Union européenne en septembre 2022). Que pensez-vous de cette phrase et de cette transition d’une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • 4:44 Cela s’inscrit dans un contexte géopolitique turbulent et fragmenté (« géofragmentation »). Comment les évolutions plus récentes du contexte géopolitique jouent-elles pour accentuer la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • 8:44 L’Union européenne a publié en 2023 un règlement sur les matériaux critiques pour l’Europe. Quels sont les principaux enjeux auxquels ce document cherche à répondre ?


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  • Speaker #0

    Emmanuel Hache, bonjour. Merci de nous avoir rejoints. Vous êtes économiste et prospectiviste à l'IFP Énergie Nouvelle. Vous êtes directeur de recherche à l'IRIS, l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques. Et vous êtes auteur de l'article Prospective de l'insécurité minérale qui est paru dans le numéro de janvier-février 2024 de la revue Futurible. Vous avez également publié un ouvrage co-écrit avec Benjamin Louvet qui s'intitule Métaux, le nouvel or noir aux éditions du Rocher en 2023. Et donc vous êtes un des grands spécialistes de cette question qui agite aujourd'hui beaucoup sur les métaux stratégiques. Donc merci beaucoup d'avoir accepté de nous rejoindre et de répondre à quelques-unes de nos questions. Elles sont notamment abordées dans l'article de Futurib que je viens de mentionner. Première question, j'aimerais vous soumettre une phrase. d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, qu'elle a tenue lors de son discours sur l'état de l'Union en 2022 et vous interrogez un petit peu sur l'interprétation que vous pouvez faire de cette phrase. La présidente de l'Union européenne disait qu'il soit question de puces électroniques personnalisées pour la réalité virtuelle ou de cellules de stockage pour les installations solaires, l'accès aux matières premières jouera un rôle décisif. dans le succès de notre transition vers une économie durable et numérique. Le lithium et les terres rares seront bientôt plus importants encore que le pétrole et le gaz. Alors Emmanuel Hache, qu'est-ce que vous pensez effectivement de cette phrase et de cette transition finalement d'une géopolitique des hydrocarbures vers une géopolitique des minéraux ?

  • Speaker #1

    Je pense tout simplement que cette phrase de Ursula von der Leyen, elle reflète le changement de paradigme. que l'on peut observer dans le secteur énergétique à l'heure actuelle, avec notamment le déploiement massif des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Et elle rappelle un petit peu ce que Thierry Breton, qui est commissaire européen au marché intérieur, il a prononcé un discours qui, j'allais dire, rajoute également une touche d'incertitude géopolitique quand il dit pas de batterie sans lithium, pas d'éoliennes en terre rare Et pour nos munitions, il nous faut du tungstène. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire tout simplement qu'on est dans une forme d'insécurité énergétique et de contexte insécuritaire en Europe. Et quelque part, ces propos reflètent toutes les questions qui sont liées à la souveraineté et à la dépendance. Pourquoi ? Parce que les matériaux critiques dans leur ensemble sont devenus des piliers. indispensable du déploiement de l'ensemble des équipements bas carbone que ce soit les métaux utilisés dans les batteries de véhicules électriques on pense notamment au nickel au manganèse au cobalt au lithium dans les technologies de l'éolien avec notamment la 7 cette permanence de la question des aimants permanent dans le solaire ou dans l'hydrogène est quelque part derrière Ces questions de dépendance, il y a la question de est-ce que ces matériaux ne vont pas constituer un frein ? C'est-à-dire que est-ce que nos dépendances ne vont pas constituer un frein aux deux grandes transitions, transition écologique et transition du numérique ? Et quelque part, ces propos européens, ils rappellent aussi l'accélération assez nette des enjeux qui sont liés aux minerais, aux métaux sur la scène internationale depuis une dizaine d'années. ou que ce soit les rapports de l'Agence internationale de l'énergie, de la Banque mondiale, tous mettent en évidence le fait que dans un monde bas carbone, on va avoir besoin de minerais, on va potentiellement en consommer quatre fois plus, on va avoir besoin de métaux. Et cette prise de conscience, elle s'est accompagnée d'une montée en puissance de l'ensemble des enjeux de sécurisation des approvisionnements. et dans un contexte de rivalité systémique entre la Chine et les États-Unis. Et ce qui est sûr, c'est que face à nous, on a des transitions qui vont être métallivores. Et face à ces transitions métallivores, on a des stratégies nationales et des stratégies internationales. Preuve en est, la plupart des politiques qui sont liées au matériau critique ont été développées entre 2013 et 2014. 2013 et 2023, ce qui montre qu'on est au cœur des enjeux de la transition, des transitions avec ces questions de matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Alors, vous l'avez dit, ce n'est pas une question nouvelle, puisque aux États-Unis, ça fait de très nombreuses années que ces matériaux apparaissent comme des matériaux stratégiques et donc font l'objet d'une attention particulière. L'Union européenne a mis en place sa première liste de matériaux critiques, je pense, en 2011. Néanmoins, ça s'inscrit, comme vous le disiez, dans un contexte qui est un contexte un petit peu différent, notamment d'un point de vue géopolitique. Je sais que vous aimez utiliser l'expression du FMI de géofragmentation. Alors comment est-ce que justement les évolutions plus récentes peut-être du contexte géopolitique jouent pour accentuer en quelque sorte la dimension critique de la disponibilité de ces ressources ?

  • Speaker #1

    Alors effectivement j'aime bien utiliser ce terme de géofragmentation tout simplement parce que je trouve qu'il reflète à la fois une construction géopolitique, enfin d'un concept géopolitique qu'on pourrait appeler la désoccidentalisation ou le retour des blocs. ce qui n'est pas exactement la même chose, et également les questions commerciales, c'est-à-dire toutes les questions qui sont relatives au fait qu'est-ce qu'on est en train d'assister à un plateau de mondialisation ou est-ce qu'on est déjà dans une démondialisation. Le rapport du FMI de 2023, qui consacre un chapitre entier à cette question de la géofragmentation, il est particulièrement intéressant, pourquoi ? Parce qu'il met un tout petit peu en perspective tous les mouvements qu'on a pu observer. J'allais dire depuis la rivalité, comment dire, sous l'ère Trump entre les États-Unis et la Chine, et puis toute la dynamique économique qu'on a observée en fait sur la période post-Covid, la désorganisation des chaînes d'approvisionnement mondiales, la hausse des prix marqués des matières premières. Et donc quelque part, on a un sentiment que la géofragmentation, en tout cas le retour à des blocs de puissance avec en plus… chose un tout petit peu inédite, des formes de multi-alignement pour certains pays, une forme un petit peu contractuelle des relations internationales sur certains sujets. On va plutôt être associé ou allié à un bloc particulier. On peut penser notamment au positionnement de l'Inde dans la géopolitique actuelle, qui est véritablement un multi-aligné plutôt qu'un non-aligné. Et quelque part, la géofragmentation, pourquoi elle nous intéresse quand on travaille sur les matériaux critiques ? Tout simplement parce que... On a une incertitude notamment sur les prix des métaux et des conséquences des prix des métaux sur le coût de la transition et sur le coût des technologies. Pourquoi ? Parce que notamment dans ce rapport, et puis de nombreuses études mettent en évidence qu'un monde géofragmenté ou fragmenté, c'est un monde où on va payer beaucoup plus cher les métaux de transition, les métaux critiques. Pourquoi ? Parce que tout simplement, le segment des métaux, c'est un segment très particulier. sur les marchés internationaux de produits de base. Ce sont les marchés qui sont les plus internationalisés. La chaîne de valeur est découpée entre les minerais, les métaux et puis les équipements. Et quelque part, géofragmenter le monde, c'est renforcer la probabilité d'avoir des métaux plus chers, ce qui pourrait notamment nous emmener vers des équipements un tout petit peu plus chers que ce que l'on a à l'heure actuelle et donc renforcer le coût de la transition. Et derrière ? Cette question de la géofragmentation, il y a la question des multi-alliances et notamment cet esprit de club que l'on retrouve sur les marchés de matières premières. Club à la fois qui sont faits notamment des possibles cartels qu'on pourrait avoir sur les marchés de métaux critiques, notamment sur le lithium ou sur le nickel. Ou tout simplement club quand on regarde notamment la reconstitution ou la constitution des BRIC+, Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud. et plus les six pays qui ont permis d'associer aux BRICS, on se pose la question notamment de, est-ce qu'on ne va pas avoir des clubs de matières premières qui sont en train de se reformer, comme j'allais dire, comme dans les années 60-70 ?

  • Speaker #0

    Merci beaucoup. Vous parlez de l'augmentation du coût de l'accès à ces matières premières critiques. De fait, elles deviennent stratégiques puisqu'elles portent aussi sur des secteurs qui sont essentiels pour l'économie et le fonctionnement des différents blocs. En l'occurrence, l'Union européenne a publié récemment, en 2023, un règlement sur les matériaux critiques. Est-ce que vous pouvez nous en préciser un petit peu les principaux enjeux, en tout cas les principaux enjeux ou les principaux défis auxquels ce document cherche à répondre ?

  • Speaker #1

    Déjà, je pense qu'il faut dire quelque chose d'assez intéressant sur ce règlement. C'est que Ursula von der Leyen avait fait de l'adoption d'une législation contraignante sur les matières premières critiques une des priorités de son mandat. Et on a véritablement une rapidité des négociations. Pourquoi ? Parce que le texte a été présenté en mars 2023 à la Commission. Et le Parlement et le Conseil de l'UE sont parvenus à un premier accord en novembre. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que véritablement, on a pris à corps et à cœur cette question des matériaux critiques. Après, grande différenciation par rapport à d'autres plans qu'on peut avoir, notamment aux États-Unis, au Japon ou au Royaume-Uni, c'est qu'on va avoir des objectifs chiffrés sur les différents stades de la chaîne de valeur. C'est-à-dire qu'horizon 2030, l'Union européenne a un objectif, par exemple, de 10% de la consommation européenne doit être... produits sur le sol européen en termes de minerais, c'est-à-dire pour le secteur extractif. Alors c'est quand même quelque chose d'assez fondamental. Pourquoi ? Parce que quelque part en Europe, on a un petit peu perdu le goût de la mine, j'ai envie de dire culturellement et économiquement. Donc ça veut dire véritablement, potentiellement réouvrir des mines sur le sol européen. Donc c'est un vrai challenge qu'on peut avoir en face de nous. On a aussi un objectif en termes de relocalisation de l'industrie de la transformation des minerais en métaux, ce qu'on appelle le raffinage, porté à entre 40 et 50 Et puis, on a un objectif sur le recyclage. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que potentiellement, on essaie de mettre, j'allais dire, en Europe, des objectifs qui permettraient d'assurer une certaine souveraineté européenne sur ces questions. Et puis, on a un dernier objectif. Là, il est complètement géopolitique. c'est que l'Union européenne ne doit pas être dépendant à plus de 65% d'un seul pays extérieur à la zone. C'était l'objectif anti-Chine, clairement. Pourquoi ? Parce que tout simplement, seule la Chine et quelques autres pays sur certains minerais, mais principalement, il est à destination de notre concurrent chinois, essayer de sortir de la dépendance à la Chine sur la question des matériaux critiques.

  • Speaker #0

    Très bien, écoutez, merci beaucoup. Donc, sachant que tout ça s'inscrit effectivement dans un grand jeu, puisque la Chine elle-même a sa propre stratégie, ses propres, effectivement, limitations aux exportations que les États-Unis font d'eux-mêmes, etc. Emmanuel Hache, merci beaucoup. Et si jamais vous souhaitez en savoir plus, je recommande la lecture de votre très bon article dans le dernier numéro de Futurib de janvier-février 2024. Et si vous voulez en savoir encore plus, je rappelle qu'on peut se référer à votre ouvrage publié récemment sur le sujet. Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci infiniment.

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  • Question 1

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