Description
Entretien avec la chanteuse Alma Gloria Stone du Groupe de rock Lemonade ou nous évoquons les rapports entre rock et littérature.
Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
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Entretien avec la chanteuse Alma Gloria Stone du Groupe de rock Lemonade ou nous évoquons les rapports entre rock et littérature.
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Transcription
Bienvenue dans notre podcast Isadora BC, le podcast où une comédienne et un poète échangent autour d'une tasse de café. Aujourd'hui, notre invité c'est Alma Gloria Stone et le poète c'est Régis Dequet. Nous allons aborder ce jour la relation entre le rock et la littérature. Bonjour Alma Gloria Stone.
Bonjour !
Alors, tu chantes dans un groupe de rock qui se nomme Lemonade. Tu écris toi-même les paroles des chansons pour le groupe et ces textes se doivent d'être portés par une musique très énergique, une musique rock. Et comment est-ce que tu les conçois, ces textes ?
Alors, je ne suis pas la seule à écrire. Je propose généralement des brouillons qui sont validés par l'ensemble du groupe. On est cinq. il y a moi et quatre autres garçons. Et parfois, même d'autres membres du groupe me suggèrent telle ou telle phrase. Et puis après, moi, je vais aller construire autour de ça. Moi, j'aime beaucoup, en général, partir d'un thème, d'une image, d'une sensation et ensuite écrire une histoire autour de ça. Mais en général, c'est vraiment un mot ou une situation qui vient à l'esprit. C'est en général comme ça qu'on procède. Après, je m'inspire beaucoup de la poésie de Jim Morrison, de la beat generation, mais aussi des femmes du rock comme Stevie Nicks de Fleetwood Mac ou Mariska Veres de Shocking Blue.
D'accord. Est-ce qu'on peut parler de co-écriture ? Puisque tu écris avec tes collègues, tes musiciens.
Oui, tout à fait. C'est tout à fait de la co-écriture, surtout dans le sens où j'ai vraiment beaucoup besoin de leur avis. Avant de me lancer dans l'écriture d'un texte, en général on trouve l'instrumental en premier, puis ensuite moi je discute avec eux et je leur demande qu'est-ce que ça vous fait ressentir telle ou telle ambiance. Pour vous, le noteau au morceau, de quoi est-ce qu'il parle en fait ? Qu'est-ce que ça vous suggère ? Et puis à partir de ce qu'ils en pensent, j'écris par exemple une de nos dernières compos, j'avais envie de faire quelque chose un peu plus politique que d'habitude. Alors je leur en parle et ils me disent Ok, pas de souci, mais il faut le faire poétiquement. Donc en fait, c'est une petite consigne.
Une contrainte.
Une contrainte, voilà, c'est ça. On le fait tous ensemble.
D'accord. Donc la relation entre le rock et la littérature, évidemment, elle est assez riche, avec une influence réciproque qui s'est manifestée au fil du temps. De nombreux artistes rock ont été inspirés par des œuvres littéraires. On peut simplement nommer Bob Dylan, qui a souvent cité... Kerouac, Rimbaud, etc. L'œuvre de Bob Dylan, elle a elle-même été saluée par la littérature puisqu'il a eu un prix Nobel de littérature. Et toi Alma, comment est-ce que tu ressens cette relation entre la musique rock et la littérature en général ?
Je pense que la musique et la littérature, elles ont un lien ancestral, même historique, notamment dans la poésie. C'est vrai qu'avant, par exemple au XVe siècle, il y avait des poètes comme François Villon qui écrivaient des balades et des poèmes qui étaient faits pour être chantés et interprétés musicalement parlant. D'ailleurs, le lyrisme en poésie, ça tire son étymologie du joueur, de la lyre et du poète Apollon qui est toujours représenté avec un instrument de musique en main. Mais bon, ça, c'est une petite digression.
Moi, j'ai envie de dire, parce que tu fais référence à Apollon, mais pourtant, le rock, c'est assez dionysiaque.
Oui, c'est vrai. Je ne suis pas très fan de Dionysos pour autant, mais de Diogène, pas Dionysos.
Non, Dionysos. Je parlais de Dionysos, le dieu de l'ivresse. Oui,
c'est vrai.
Référence à Nietzsche.
Oui, effectivement. Là, je trouve que c'est une digresse. Non, mais pour revenir à ce que je disais, Je pense que la littérature, elle est inséparable du rock en réalité, parce que l'écriture, ça fait partie intégrante de la composition musicale, dans un premier temps, mais aussi parce qu'en littérature, on exprime des idées, on défend des choses, on fait acte de présence et on incarne ce lien entre soi et le monde. Et en musique, c'est un peu la même chose, je trouve, surtout dans le rock qui vient quand même du genre musical du blues. qui est un genre musical qui a servi à une époque d'émancipation et de moyens d'expression et de dénonciation de tout ce contexte colonial de l'époque. Donc si le rock... ça vient d'un mouvement musical qui utilise cet espace de création pour faire passer des messages, de la même manière que la littérature le fait, alors pour moi, le rock, il est très peu dissociable de la littérature et d'une certaine intellectualisation vis-à-vis des textes. Après, je ne veux pas dire que le rock doit être absolument intellectuel, pas du tout. Justement, c'est ça le rapport que j'aime, c'est qu'on peut prendre la puissance... de ce que peut renvoyer un texte littéraire et la mélanger à l'explosif d'un rythme de batterie ou de la furie d'une guitare.
D'accord. Alors, on va parler un peu rock, un petit peu, en prenant l'exemple, par exemple, de Led Zeppelin, un groupe que tu aimes bien, je crois. J'adore. Il faut savoir que dans les textes, Led Zeppelin, il est réinspiré du Seigneur des Anneaux, notamment de Tolkien, dans plusieurs de leurs chansons, dans Rumble On ou dans Misty Mountain Hope. il y a vraiment des références totales à Tolkien. Mettons, dans Rumble On, il parle du Mordor, des choses comme ça. Et puis dans Missy Montaigne Hop, il y a des références au Hobbit. Alors toi, Alma, est-ce que toi, tu intègres personnellement des références littéraires, des allusions ou des thématiques empruntées à la littérature pour les textes des chansons de Lemonade ?
Alors, juste pour la petite anecdote, dans le film que Led Zeppelin avait fait, The Song Remains the Same, Il y a quand même toute une scène, toute une partie scénarisée où on voit Robert Plant sur un cheval et Jimmy Page dans la forêt avec une fée. Comme ça, ça rappelle vachement aussi Le Seigneur des Anneaux. Mais oui, bien sûr que... D'ailleurs, plus qu'une inspiration, on a un morceau qui s'appelle Love Snake et qui est une adaptation musicale d'un poème de Jack Kerouac, Alan Ginsberg et Neil Cassady qui s'appelle Pull My Daisy. D'ailleurs, c'est un poème qui a ensuite, ils en ont fait un moyen métrage. Et donc, on a décidé d'adapter directement un de leurs poèmes en musique. Je pense que ce qui m'inspire le plus dans la littérature pour écrire des paroles, c'est plus les figures de style que l'on retrouve dans la poésie, genre métaphore, anaphore, pléonasme, etc. Et pour donner quand même une référence littéraire bien précise, qu'on a fait dans notre morceau Sailor, qui est un morceau qui parle d'un marin perdu en mer. Ça, c'est un gros clin d'œil qu'on a voulu faire au poème du bateau ivre de Rimbaud.
D'accord, merci. Alors, tu fais souvent référence, tu viens de le faire à Rimbaud, entre autres, à la poésie. On va reprendre l'exemple de quelqu'un, je vais parler de Patti Smith. qui a apporté une approche poétique et littéraire à ses textes, à tel point qu'elle a même édité des livres de poésie, Patrice Misse. Les paroles de ses chansons, évidemment, sont proches d'exercices poétiques. Mais toi, quel rapport est-ce que tu entretiens personnellement avec la poésie ?
Moi, j'en parle un peu depuis le début de poésie. C'est vrai que c'est quelque chose qui me tient énormément à cœur. J'ai un rapport très universitaire. Avec la poésie, j'ai fait mon mémoire de master sur la poésie de guerre d'Apollinaire, notamment sur son recueil Calligramme. Et en ce moment, en plus de chanter du rock, je fais une thèse autour d'une revue littéraire et philosophique du XXe siècle qui s'appelle Présence et qui est une revue qui a été dirigée par Gilbert Trouillet qui était un poète suisse-roman. Donc c'est vrai que la poésie fait partie de mon travail de recherche depuis plusieurs années, donc elle fait vraiment partie de ma vie. mais j'ai aussi un rapport plus naturel à la poésie j'avais des grands-pères qui en écrivaient mon père qui aussi a publié trois recueils moi-même j'écris de la poésie et j'écris de la poésie indépendamment de la composition pour Lemonade t'as cité tout à l'heure Patti Smith, j'ai envie d'ajouter à nouveau Bob Dylan, Jim Morrison Frank Zappa en fait tous Je trouvais qu'ils étaient des grands poètes, en plus d'être des musiciens. Et comme ce sont les groupes et les artistes que j'écoute, et que ce sont eux qui m'inspirent à travers... Enfin, c'est eux qui m'inspirent, et c'est à travers eux que j'ai découvert la musique principalement. Pour moi, la poésie, elle est essentielle au rock, et elle est essentielle à moi-même. Moi, j'écoute beaucoup Zappa en ce moment, et c'est vrai que ses textes, ils sont incroyables. Ça va plus loin, je trouve, même sa musique. Ces mélodies, ces solos, ils ont un caractère poétique qui pourrait finalement être une oeuvre surréaliste et dadaïste. Pour moi, la poésie, c'est essentiel à l'existence. Sans elle, je trouve que c'est le néant. Vive la poésie, vive le rock.
On aurait pu évoquer même plein d'autres musiciens, qui ont des rapports à la littérature, même Bruce Springsteen, qui parfois, soit il a des textes, qui se rapprochent après d'une... d'une certaine littérature américaine assez réaliste en fait où ils décrivent l'endroit où ils vivent les relations avec son père, des choses comme ça
Crosby, Stylian Nash, ils faisaient aussi beaucoup ça en fait, ils racontaient des histoires mais c'est comme Creedence, Clearwater Revival c'est aussi des groupes qui étaient beaucoup plus dans comment dire la description un peu de la vie américaine c'est le pôle c'est un peu ça alors,
on parle de musique pour qu'on en écoute un peu quand même, j'imagine. J'aimerais qu'on puisse écouter un extrait d'une production du groupe Lemonade. Et puis ensuite, tu vas nous raconter un peu la genèse de ce texte. On parlera peut-être un peu du groupe. D'accord ?
Oui. Alors, je tiens juste à préciser que l'extrait qu'on va écouter, c'est un extrait d'un live qu'on a fait l'année dernière en Suisse. Donc voilà, ce n'est pas du tout de l'enregistrement studio, c'est vraiment le son live garage.
Oui, mais c'est pour avoir une idée. On te remercie beaucoup. C'est parti. Voilà, donc on vient d'écouter un morceau qui s'appelle comment ? Witch. Witch. Et alors, est-ce que tu peux nous raconter un peu la genèse de ce morceau ?
Je n'ai pas pris le morceau le plus poétique de notre set, mais c'est le premier live qui est disponible sur YouTube, d'ailleurs. Donc ce morceau Witch, il a existé en instrumental avant que le texte ne soit écrit. Donc on était avec les mecs de Lemonade, on avait envie de se défouler, d'aller chercher vraiment la colère, de faire sortir une certaine rage. Et toujours avec ce côté psychédélique de la guitare et du clavier. Pour le texte, c'est pareil. J'avais envie de m'exprimer sur ma colère. Moi, je viens de Paris, mais quand j'ai emménagé... Enfin, j'habite à Mulhouse maintenant depuis trois ans. Et quand j'ai emménagé à Mulhouse, je me suis un peu heurtée à des personnes qui m'ont fait comprendre que je n'étais pas forcément la bienvenue. Mais en fait, c'est vraiment ce côté très sectaire de toute ville qui ressemble à un village. J'étais l'étrangère. Et puis, je me suis heurtée aussi à une fille en particulier qui a causé beaucoup de tort dans ma vie et celle de mon entourage proche. Alors, j'ai écrit Witch, qui parle de la plus méchante sorcière du Grand Est. Donc, j'adore les sorcières, je tiens à préciser, mais je n'aime pas les sorcières qui détruisent des amitiés, des relations par pure perversité. Donc, ce texte, c'est une réponse violente à la toxicité de cette fille, mais aussi... aux comportements malsains de certaines femmes qui utilisent des valeurs très importantes comme la sororité à des fins toxiques, genre pour abuser de ta confiance ou de ta gentillesse ou genre te piquer ton mec ou ta meuf. Après, Witch, c'est aussi une référence littéraire, forcément, à la Loreley. C'est une sorcière alsacienne très connue, dont parle notamment Apollinaire dans son poème...
C'est le père Félix Képhène aussi.
Oui, tout à fait, oui. Bien sûr. Mais Apollinaire a écrit un poème au titre éponyme, La Loreley. Il parle de cette sorcière du Haut-Rhin. Mais la jeunesse du texte, c'était vraiment ça. C'était cette envie de mélanger le réel de la colère au mystique de notre musique un peu plus psyché.
Ok. Alors, on a entendu effectivement ce court extrait en live qui a été joué, tu disais, en Suisse, c'est ça ? En Suisse,
à Bâle, c'était en avril 2023.
D'accord. Alors, on entend les instruments. Tu peux peut-être nous présenter un petit peu le groupe ? On voit qu'il y a une batterie assez puissante.
Notre batteur, il est hollandais, il s'appelle Quirijn. Et c'est lui qui rapporte tout le côté très punk de notre musique, parce que c'est vraiment lui, ses influences sont très, très punk, les clashs.
On entend la frappe. En fait,
il est très grand, il a des très grands bras. Je pense que c'est aussi pour ceux qui ne se rendent pas compte de sa puissance.
Après, on a un guitariste qu'on entend bien, qui est présent, qui a un son un peu garage. Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de ce fameux guitariste ?
Tout à fait. Nico, que je connais, ça commence à faire un peu 4-5 ans, quelque chose comme ça, que j'ai rencontré pendant le confinement. Je l'ai rencontré par le biais d'un ami musicien. parce que je cherchais un guitariste et donc je l'ai rencontré, on a composé notre première chanson ensemble à distance parce qu'on était en plein confinement et du coup quand on s'est vu après ça a directement marché moi ce que j'aime beaucoup chez Nico c'est qu'il a énormément d'influences psychées, modernes actuelles, donc des groupes comme Alalas, Frankie and the Witch Fingers Altingoon, qui est du rock anatolien de ouf donc King's Desert and the Lizard Wizard il écoute aussi beaucoup de techno à côté qui n'est pas du tout un genre musical qui m'intéresse mais ça fait qu'il arrive à apporter une touche très moderne dans son son et dans la composition dans nos compositions touche moderne que moi je n'ai pas parce que j'ai pas autant d'influence actuelle, c'est plus les années 70 et la beat generation ok
Ensuite, il y a une basse aussi qu'on entend qui est assez présente, une bonne basse en plus.
Un autre bassiste, il est incroyable, il s'appelle Rob. Lui, c'est tout le côté Black Sabbath, Deep Purple à fond. Il a vraiment ce côté un peu rock, un peu américain comme ça que j'aime beaucoup. Genre, comment il s'appelle ? Leonard Skinner et tout ça. en fait je trouve que ça ça lit même très bien avec la batterie de Curaine parce que les deux sont dans une sorte de tonique qui du coup vraiment ça tient la baraque quoi.
Oui tout à fait et puis ? Et puis on a Tim au clavier alors Tim je vous avais vu moi à un concert au Culeau d'Orkamp il y a quelques années en fait effectivement donc Il me rappelait un peu les Dors, les vrais bronzareks.
Il va adorer entendre ça.
Il va être content.
Il va être content. Ah bah bien sûr, Tim, très très grand fan des Dors. D'ailleurs, je pense que c'est grâce à ça qu'on est devenus très amis très vite. La première fois que je l'ai rencontré, c'était à une soirée. En fait, on a commencé à parler des Dors et c'était un truc de fou. Et il me dit, moi, je connais toutes les chansons des Dances par cœur au clavier. Je fais, ah non, sérieusement ? Je ne te crois pas. Puis après, on a fait des répètes ensemble et je me suis rendu compte que c'était vrai. Et c'est dingue. Et en fait, Tim, c'est vraiment une personne que j'adore. Et j'adore sa manière de jouer parce qu'il parle en tous les sens. Il est capable d'improviser. Il a un peu une sorte d'oreille absolue où il est capable de s'en connaître un morceau, se caler dessus sans aucun problème et que ça ne fasse pas tâche. Pour moi, le son du clavier, il est... tellement important dans Lemonade. Il apporte à la fois la mélodie, mais à la fois ce que, par exemple, une guitare rythmique pourrait faire. Nous, on n'a pas de guitariste rythmique, on n'a que un guitariste lead, qui est Nico. Et finalement, ça ne manque pas, parce qu'il y a le clavier qui vient accompagner tout ça de manière vraiment géniale.
Eh bien, on va, je pense, pouvoir partager le lien, je ne sais pas...
On a Instagram, on met des petites photos, on met des petites vidéos. Et puis, on a un lien YouTube, une chaîne YouTube qui s'appelle Lemonade. Et là, on a deux lives qui sont disponibles. Puis, je ne suis pas sûre que je puisse en dire beaucoup, mais on sort un EP en 2025 qu'on va enregistrer en février prochain. Et puis, on a des petites dates à annoncer. Donc voilà, restez connectés sur les internets.
On va regarder. Sur le site isadorabc.com, on va mettre évidemment les liens de l'Insta pour qu'on puisse vous suivre et du YouTube. Et puis évidemment...
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Entretien avec la chanteuse Alma Gloria Stone du Groupe de rock Lemonade ou nous évoquons les rapports entre rock et littérature.
Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
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Bienvenue dans notre podcast Isadora BC, le podcast où une comédienne et un poète échangent autour d'une tasse de café. Aujourd'hui, notre invité c'est Alma Gloria Stone et le poète c'est Régis Dequet. Nous allons aborder ce jour la relation entre le rock et la littérature. Bonjour Alma Gloria Stone.
Bonjour !
Alors, tu chantes dans un groupe de rock qui se nomme Lemonade. Tu écris toi-même les paroles des chansons pour le groupe et ces textes se doivent d'être portés par une musique très énergique, une musique rock. Et comment est-ce que tu les conçois, ces textes ?
Alors, je ne suis pas la seule à écrire. Je propose généralement des brouillons qui sont validés par l'ensemble du groupe. On est cinq. il y a moi et quatre autres garçons. Et parfois, même d'autres membres du groupe me suggèrent telle ou telle phrase. Et puis après, moi, je vais aller construire autour de ça. Moi, j'aime beaucoup, en général, partir d'un thème, d'une image, d'une sensation et ensuite écrire une histoire autour de ça. Mais en général, c'est vraiment un mot ou une situation qui vient à l'esprit. C'est en général comme ça qu'on procède. Après, je m'inspire beaucoup de la poésie de Jim Morrison, de la beat generation, mais aussi des femmes du rock comme Stevie Nicks de Fleetwood Mac ou Mariska Veres de Shocking Blue.
D'accord. Est-ce qu'on peut parler de co-écriture ? Puisque tu écris avec tes collègues, tes musiciens.
Oui, tout à fait. C'est tout à fait de la co-écriture, surtout dans le sens où j'ai vraiment beaucoup besoin de leur avis. Avant de me lancer dans l'écriture d'un texte, en général on trouve l'instrumental en premier, puis ensuite moi je discute avec eux et je leur demande qu'est-ce que ça vous fait ressentir telle ou telle ambiance. Pour vous, le noteau au morceau, de quoi est-ce qu'il parle en fait ? Qu'est-ce que ça vous suggère ? Et puis à partir de ce qu'ils en pensent, j'écris par exemple une de nos dernières compos, j'avais envie de faire quelque chose un peu plus politique que d'habitude. Alors je leur en parle et ils me disent Ok, pas de souci, mais il faut le faire poétiquement. Donc en fait, c'est une petite consigne.
Une contrainte.
Une contrainte, voilà, c'est ça. On le fait tous ensemble.
D'accord. Donc la relation entre le rock et la littérature, évidemment, elle est assez riche, avec une influence réciproque qui s'est manifestée au fil du temps. De nombreux artistes rock ont été inspirés par des œuvres littéraires. On peut simplement nommer Bob Dylan, qui a souvent cité... Kerouac, Rimbaud, etc. L'œuvre de Bob Dylan, elle a elle-même été saluée par la littérature puisqu'il a eu un prix Nobel de littérature. Et toi Alma, comment est-ce que tu ressens cette relation entre la musique rock et la littérature en général ?
Je pense que la musique et la littérature, elles ont un lien ancestral, même historique, notamment dans la poésie. C'est vrai qu'avant, par exemple au XVe siècle, il y avait des poètes comme François Villon qui écrivaient des balades et des poèmes qui étaient faits pour être chantés et interprétés musicalement parlant. D'ailleurs, le lyrisme en poésie, ça tire son étymologie du joueur, de la lyre et du poète Apollon qui est toujours représenté avec un instrument de musique en main. Mais bon, ça, c'est une petite digression.
Moi, j'ai envie de dire, parce que tu fais référence à Apollon, mais pourtant, le rock, c'est assez dionysiaque.
Oui, c'est vrai. Je ne suis pas très fan de Dionysos pour autant, mais de Diogène, pas Dionysos.
Non, Dionysos. Je parlais de Dionysos, le dieu de l'ivresse. Oui,
c'est vrai.
Référence à Nietzsche.
Oui, effectivement. Là, je trouve que c'est une digresse. Non, mais pour revenir à ce que je disais, Je pense que la littérature, elle est inséparable du rock en réalité, parce que l'écriture, ça fait partie intégrante de la composition musicale, dans un premier temps, mais aussi parce qu'en littérature, on exprime des idées, on défend des choses, on fait acte de présence et on incarne ce lien entre soi et le monde. Et en musique, c'est un peu la même chose, je trouve, surtout dans le rock qui vient quand même du genre musical du blues. qui est un genre musical qui a servi à une époque d'émancipation et de moyens d'expression et de dénonciation de tout ce contexte colonial de l'époque. Donc si le rock... ça vient d'un mouvement musical qui utilise cet espace de création pour faire passer des messages, de la même manière que la littérature le fait, alors pour moi, le rock, il est très peu dissociable de la littérature et d'une certaine intellectualisation vis-à-vis des textes. Après, je ne veux pas dire que le rock doit être absolument intellectuel, pas du tout. Justement, c'est ça le rapport que j'aime, c'est qu'on peut prendre la puissance... de ce que peut renvoyer un texte littéraire et la mélanger à l'explosif d'un rythme de batterie ou de la furie d'une guitare.
D'accord. Alors, on va parler un peu rock, un petit peu, en prenant l'exemple, par exemple, de Led Zeppelin, un groupe que tu aimes bien, je crois. J'adore. Il faut savoir que dans les textes, Led Zeppelin, il est réinspiré du Seigneur des Anneaux, notamment de Tolkien, dans plusieurs de leurs chansons, dans Rumble On ou dans Misty Mountain Hope. il y a vraiment des références totales à Tolkien. Mettons, dans Rumble On, il parle du Mordor, des choses comme ça. Et puis dans Missy Montaigne Hop, il y a des références au Hobbit. Alors toi, Alma, est-ce que toi, tu intègres personnellement des références littéraires, des allusions ou des thématiques empruntées à la littérature pour les textes des chansons de Lemonade ?
Alors, juste pour la petite anecdote, dans le film que Led Zeppelin avait fait, The Song Remains the Same, Il y a quand même toute une scène, toute une partie scénarisée où on voit Robert Plant sur un cheval et Jimmy Page dans la forêt avec une fée. Comme ça, ça rappelle vachement aussi Le Seigneur des Anneaux. Mais oui, bien sûr que... D'ailleurs, plus qu'une inspiration, on a un morceau qui s'appelle Love Snake et qui est une adaptation musicale d'un poème de Jack Kerouac, Alan Ginsberg et Neil Cassady qui s'appelle Pull My Daisy. D'ailleurs, c'est un poème qui a ensuite, ils en ont fait un moyen métrage. Et donc, on a décidé d'adapter directement un de leurs poèmes en musique. Je pense que ce qui m'inspire le plus dans la littérature pour écrire des paroles, c'est plus les figures de style que l'on retrouve dans la poésie, genre métaphore, anaphore, pléonasme, etc. Et pour donner quand même une référence littéraire bien précise, qu'on a fait dans notre morceau Sailor, qui est un morceau qui parle d'un marin perdu en mer. Ça, c'est un gros clin d'œil qu'on a voulu faire au poème du bateau ivre de Rimbaud.
D'accord, merci. Alors, tu fais souvent référence, tu viens de le faire à Rimbaud, entre autres, à la poésie. On va reprendre l'exemple de quelqu'un, je vais parler de Patti Smith. qui a apporté une approche poétique et littéraire à ses textes, à tel point qu'elle a même édité des livres de poésie, Patrice Misse. Les paroles de ses chansons, évidemment, sont proches d'exercices poétiques. Mais toi, quel rapport est-ce que tu entretiens personnellement avec la poésie ?
Moi, j'en parle un peu depuis le début de poésie. C'est vrai que c'est quelque chose qui me tient énormément à cœur. J'ai un rapport très universitaire. Avec la poésie, j'ai fait mon mémoire de master sur la poésie de guerre d'Apollinaire, notamment sur son recueil Calligramme. Et en ce moment, en plus de chanter du rock, je fais une thèse autour d'une revue littéraire et philosophique du XXe siècle qui s'appelle Présence et qui est une revue qui a été dirigée par Gilbert Trouillet qui était un poète suisse-roman. Donc c'est vrai que la poésie fait partie de mon travail de recherche depuis plusieurs années, donc elle fait vraiment partie de ma vie. mais j'ai aussi un rapport plus naturel à la poésie j'avais des grands-pères qui en écrivaient mon père qui aussi a publié trois recueils moi-même j'écris de la poésie et j'écris de la poésie indépendamment de la composition pour Lemonade t'as cité tout à l'heure Patti Smith, j'ai envie d'ajouter à nouveau Bob Dylan, Jim Morrison Frank Zappa en fait tous Je trouvais qu'ils étaient des grands poètes, en plus d'être des musiciens. Et comme ce sont les groupes et les artistes que j'écoute, et que ce sont eux qui m'inspirent à travers... Enfin, c'est eux qui m'inspirent, et c'est à travers eux que j'ai découvert la musique principalement. Pour moi, la poésie, elle est essentielle au rock, et elle est essentielle à moi-même. Moi, j'écoute beaucoup Zappa en ce moment, et c'est vrai que ses textes, ils sont incroyables. Ça va plus loin, je trouve, même sa musique. Ces mélodies, ces solos, ils ont un caractère poétique qui pourrait finalement être une oeuvre surréaliste et dadaïste. Pour moi, la poésie, c'est essentiel à l'existence. Sans elle, je trouve que c'est le néant. Vive la poésie, vive le rock.
On aurait pu évoquer même plein d'autres musiciens, qui ont des rapports à la littérature, même Bruce Springsteen, qui parfois, soit il a des textes, qui se rapprochent après d'une... d'une certaine littérature américaine assez réaliste en fait où ils décrivent l'endroit où ils vivent les relations avec son père, des choses comme ça
Crosby, Stylian Nash, ils faisaient aussi beaucoup ça en fait, ils racontaient des histoires mais c'est comme Creedence, Clearwater Revival c'est aussi des groupes qui étaient beaucoup plus dans comment dire la description un peu de la vie américaine c'est le pôle c'est un peu ça alors,
on parle de musique pour qu'on en écoute un peu quand même, j'imagine. J'aimerais qu'on puisse écouter un extrait d'une production du groupe Lemonade. Et puis ensuite, tu vas nous raconter un peu la genèse de ce texte. On parlera peut-être un peu du groupe. D'accord ?
Oui. Alors, je tiens juste à préciser que l'extrait qu'on va écouter, c'est un extrait d'un live qu'on a fait l'année dernière en Suisse. Donc voilà, ce n'est pas du tout de l'enregistrement studio, c'est vraiment le son live garage.
Oui, mais c'est pour avoir une idée. On te remercie beaucoup. C'est parti. Voilà, donc on vient d'écouter un morceau qui s'appelle comment ? Witch. Witch. Et alors, est-ce que tu peux nous raconter un peu la genèse de ce morceau ?
Je n'ai pas pris le morceau le plus poétique de notre set, mais c'est le premier live qui est disponible sur YouTube, d'ailleurs. Donc ce morceau Witch, il a existé en instrumental avant que le texte ne soit écrit. Donc on était avec les mecs de Lemonade, on avait envie de se défouler, d'aller chercher vraiment la colère, de faire sortir une certaine rage. Et toujours avec ce côté psychédélique de la guitare et du clavier. Pour le texte, c'est pareil. J'avais envie de m'exprimer sur ma colère. Moi, je viens de Paris, mais quand j'ai emménagé... Enfin, j'habite à Mulhouse maintenant depuis trois ans. Et quand j'ai emménagé à Mulhouse, je me suis un peu heurtée à des personnes qui m'ont fait comprendre que je n'étais pas forcément la bienvenue. Mais en fait, c'est vraiment ce côté très sectaire de toute ville qui ressemble à un village. J'étais l'étrangère. Et puis, je me suis heurtée aussi à une fille en particulier qui a causé beaucoup de tort dans ma vie et celle de mon entourage proche. Alors, j'ai écrit Witch, qui parle de la plus méchante sorcière du Grand Est. Donc, j'adore les sorcières, je tiens à préciser, mais je n'aime pas les sorcières qui détruisent des amitiés, des relations par pure perversité. Donc, ce texte, c'est une réponse violente à la toxicité de cette fille, mais aussi... aux comportements malsains de certaines femmes qui utilisent des valeurs très importantes comme la sororité à des fins toxiques, genre pour abuser de ta confiance ou de ta gentillesse ou genre te piquer ton mec ou ta meuf. Après, Witch, c'est aussi une référence littéraire, forcément, à la Loreley. C'est une sorcière alsacienne très connue, dont parle notamment Apollinaire dans son poème...
C'est le père Félix Képhène aussi.
Oui, tout à fait, oui. Bien sûr. Mais Apollinaire a écrit un poème au titre éponyme, La Loreley. Il parle de cette sorcière du Haut-Rhin. Mais la jeunesse du texte, c'était vraiment ça. C'était cette envie de mélanger le réel de la colère au mystique de notre musique un peu plus psyché.
Ok. Alors, on a entendu effectivement ce court extrait en live qui a été joué, tu disais, en Suisse, c'est ça ? En Suisse,
à Bâle, c'était en avril 2023.
D'accord. Alors, on entend les instruments. Tu peux peut-être nous présenter un petit peu le groupe ? On voit qu'il y a une batterie assez puissante.
Notre batteur, il est hollandais, il s'appelle Quirijn. Et c'est lui qui rapporte tout le côté très punk de notre musique, parce que c'est vraiment lui, ses influences sont très, très punk, les clashs.
On entend la frappe. En fait,
il est très grand, il a des très grands bras. Je pense que c'est aussi pour ceux qui ne se rendent pas compte de sa puissance.
Après, on a un guitariste qu'on entend bien, qui est présent, qui a un son un peu garage. Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de ce fameux guitariste ?
Tout à fait. Nico, que je connais, ça commence à faire un peu 4-5 ans, quelque chose comme ça, que j'ai rencontré pendant le confinement. Je l'ai rencontré par le biais d'un ami musicien. parce que je cherchais un guitariste et donc je l'ai rencontré, on a composé notre première chanson ensemble à distance parce qu'on était en plein confinement et du coup quand on s'est vu après ça a directement marché moi ce que j'aime beaucoup chez Nico c'est qu'il a énormément d'influences psychées, modernes actuelles, donc des groupes comme Alalas, Frankie and the Witch Fingers Altingoon, qui est du rock anatolien de ouf donc King's Desert and the Lizard Wizard il écoute aussi beaucoup de techno à côté qui n'est pas du tout un genre musical qui m'intéresse mais ça fait qu'il arrive à apporter une touche très moderne dans son son et dans la composition dans nos compositions touche moderne que moi je n'ai pas parce que j'ai pas autant d'influence actuelle, c'est plus les années 70 et la beat generation ok
Ensuite, il y a une basse aussi qu'on entend qui est assez présente, une bonne basse en plus.
Un autre bassiste, il est incroyable, il s'appelle Rob. Lui, c'est tout le côté Black Sabbath, Deep Purple à fond. Il a vraiment ce côté un peu rock, un peu américain comme ça que j'aime beaucoup. Genre, comment il s'appelle ? Leonard Skinner et tout ça. en fait je trouve que ça ça lit même très bien avec la batterie de Curaine parce que les deux sont dans une sorte de tonique qui du coup vraiment ça tient la baraque quoi.
Oui tout à fait et puis ? Et puis on a Tim au clavier alors Tim je vous avais vu moi à un concert au Culeau d'Orkamp il y a quelques années en fait effectivement donc Il me rappelait un peu les Dors, les vrais bronzareks.
Il va adorer entendre ça.
Il va être content.
Il va être content. Ah bah bien sûr, Tim, très très grand fan des Dors. D'ailleurs, je pense que c'est grâce à ça qu'on est devenus très amis très vite. La première fois que je l'ai rencontré, c'était à une soirée. En fait, on a commencé à parler des Dors et c'était un truc de fou. Et il me dit, moi, je connais toutes les chansons des Dances par cœur au clavier. Je fais, ah non, sérieusement ? Je ne te crois pas. Puis après, on a fait des répètes ensemble et je me suis rendu compte que c'était vrai. Et c'est dingue. Et en fait, Tim, c'est vraiment une personne que j'adore. Et j'adore sa manière de jouer parce qu'il parle en tous les sens. Il est capable d'improviser. Il a un peu une sorte d'oreille absolue où il est capable de s'en connaître un morceau, se caler dessus sans aucun problème et que ça ne fasse pas tâche. Pour moi, le son du clavier, il est... tellement important dans Lemonade. Il apporte à la fois la mélodie, mais à la fois ce que, par exemple, une guitare rythmique pourrait faire. Nous, on n'a pas de guitariste rythmique, on n'a que un guitariste lead, qui est Nico. Et finalement, ça ne manque pas, parce qu'il y a le clavier qui vient accompagner tout ça de manière vraiment géniale.
Eh bien, on va, je pense, pouvoir partager le lien, je ne sais pas...
On a Instagram, on met des petites photos, on met des petites vidéos. Et puis, on a un lien YouTube, une chaîne YouTube qui s'appelle Lemonade. Et là, on a deux lives qui sont disponibles. Puis, je ne suis pas sûre que je puisse en dire beaucoup, mais on sort un EP en 2025 qu'on va enregistrer en février prochain. Et puis, on a des petites dates à annoncer. Donc voilà, restez connectés sur les internets.
On va regarder. Sur le site isadorabc.com, on va mettre évidemment les liens de l'Insta pour qu'on puisse vous suivre et du YouTube. Et puis évidemment...
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Description
Entretien avec la chanteuse Alma Gloria Stone du Groupe de rock Lemonade ou nous évoquons les rapports entre rock et littérature.
Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
Transcription
Bienvenue dans notre podcast Isadora BC, le podcast où une comédienne et un poète échangent autour d'une tasse de café. Aujourd'hui, notre invité c'est Alma Gloria Stone et le poète c'est Régis Dequet. Nous allons aborder ce jour la relation entre le rock et la littérature. Bonjour Alma Gloria Stone.
Bonjour !
Alors, tu chantes dans un groupe de rock qui se nomme Lemonade. Tu écris toi-même les paroles des chansons pour le groupe et ces textes se doivent d'être portés par une musique très énergique, une musique rock. Et comment est-ce que tu les conçois, ces textes ?
Alors, je ne suis pas la seule à écrire. Je propose généralement des brouillons qui sont validés par l'ensemble du groupe. On est cinq. il y a moi et quatre autres garçons. Et parfois, même d'autres membres du groupe me suggèrent telle ou telle phrase. Et puis après, moi, je vais aller construire autour de ça. Moi, j'aime beaucoup, en général, partir d'un thème, d'une image, d'une sensation et ensuite écrire une histoire autour de ça. Mais en général, c'est vraiment un mot ou une situation qui vient à l'esprit. C'est en général comme ça qu'on procède. Après, je m'inspire beaucoup de la poésie de Jim Morrison, de la beat generation, mais aussi des femmes du rock comme Stevie Nicks de Fleetwood Mac ou Mariska Veres de Shocking Blue.
D'accord. Est-ce qu'on peut parler de co-écriture ? Puisque tu écris avec tes collègues, tes musiciens.
Oui, tout à fait. C'est tout à fait de la co-écriture, surtout dans le sens où j'ai vraiment beaucoup besoin de leur avis. Avant de me lancer dans l'écriture d'un texte, en général on trouve l'instrumental en premier, puis ensuite moi je discute avec eux et je leur demande qu'est-ce que ça vous fait ressentir telle ou telle ambiance. Pour vous, le noteau au morceau, de quoi est-ce qu'il parle en fait ? Qu'est-ce que ça vous suggère ? Et puis à partir de ce qu'ils en pensent, j'écris par exemple une de nos dernières compos, j'avais envie de faire quelque chose un peu plus politique que d'habitude. Alors je leur en parle et ils me disent Ok, pas de souci, mais il faut le faire poétiquement. Donc en fait, c'est une petite consigne.
Une contrainte.
Une contrainte, voilà, c'est ça. On le fait tous ensemble.
D'accord. Donc la relation entre le rock et la littérature, évidemment, elle est assez riche, avec une influence réciproque qui s'est manifestée au fil du temps. De nombreux artistes rock ont été inspirés par des œuvres littéraires. On peut simplement nommer Bob Dylan, qui a souvent cité... Kerouac, Rimbaud, etc. L'œuvre de Bob Dylan, elle a elle-même été saluée par la littérature puisqu'il a eu un prix Nobel de littérature. Et toi Alma, comment est-ce que tu ressens cette relation entre la musique rock et la littérature en général ?
Je pense que la musique et la littérature, elles ont un lien ancestral, même historique, notamment dans la poésie. C'est vrai qu'avant, par exemple au XVe siècle, il y avait des poètes comme François Villon qui écrivaient des balades et des poèmes qui étaient faits pour être chantés et interprétés musicalement parlant. D'ailleurs, le lyrisme en poésie, ça tire son étymologie du joueur, de la lyre et du poète Apollon qui est toujours représenté avec un instrument de musique en main. Mais bon, ça, c'est une petite digression.
Moi, j'ai envie de dire, parce que tu fais référence à Apollon, mais pourtant, le rock, c'est assez dionysiaque.
Oui, c'est vrai. Je ne suis pas très fan de Dionysos pour autant, mais de Diogène, pas Dionysos.
Non, Dionysos. Je parlais de Dionysos, le dieu de l'ivresse. Oui,
c'est vrai.
Référence à Nietzsche.
Oui, effectivement. Là, je trouve que c'est une digresse. Non, mais pour revenir à ce que je disais, Je pense que la littérature, elle est inséparable du rock en réalité, parce que l'écriture, ça fait partie intégrante de la composition musicale, dans un premier temps, mais aussi parce qu'en littérature, on exprime des idées, on défend des choses, on fait acte de présence et on incarne ce lien entre soi et le monde. Et en musique, c'est un peu la même chose, je trouve, surtout dans le rock qui vient quand même du genre musical du blues. qui est un genre musical qui a servi à une époque d'émancipation et de moyens d'expression et de dénonciation de tout ce contexte colonial de l'époque. Donc si le rock... ça vient d'un mouvement musical qui utilise cet espace de création pour faire passer des messages, de la même manière que la littérature le fait, alors pour moi, le rock, il est très peu dissociable de la littérature et d'une certaine intellectualisation vis-à-vis des textes. Après, je ne veux pas dire que le rock doit être absolument intellectuel, pas du tout. Justement, c'est ça le rapport que j'aime, c'est qu'on peut prendre la puissance... de ce que peut renvoyer un texte littéraire et la mélanger à l'explosif d'un rythme de batterie ou de la furie d'une guitare.
D'accord. Alors, on va parler un peu rock, un petit peu, en prenant l'exemple, par exemple, de Led Zeppelin, un groupe que tu aimes bien, je crois. J'adore. Il faut savoir que dans les textes, Led Zeppelin, il est réinspiré du Seigneur des Anneaux, notamment de Tolkien, dans plusieurs de leurs chansons, dans Rumble On ou dans Misty Mountain Hope. il y a vraiment des références totales à Tolkien. Mettons, dans Rumble On, il parle du Mordor, des choses comme ça. Et puis dans Missy Montaigne Hop, il y a des références au Hobbit. Alors toi, Alma, est-ce que toi, tu intègres personnellement des références littéraires, des allusions ou des thématiques empruntées à la littérature pour les textes des chansons de Lemonade ?
Alors, juste pour la petite anecdote, dans le film que Led Zeppelin avait fait, The Song Remains the Same, Il y a quand même toute une scène, toute une partie scénarisée où on voit Robert Plant sur un cheval et Jimmy Page dans la forêt avec une fée. Comme ça, ça rappelle vachement aussi Le Seigneur des Anneaux. Mais oui, bien sûr que... D'ailleurs, plus qu'une inspiration, on a un morceau qui s'appelle Love Snake et qui est une adaptation musicale d'un poème de Jack Kerouac, Alan Ginsberg et Neil Cassady qui s'appelle Pull My Daisy. D'ailleurs, c'est un poème qui a ensuite, ils en ont fait un moyen métrage. Et donc, on a décidé d'adapter directement un de leurs poèmes en musique. Je pense que ce qui m'inspire le plus dans la littérature pour écrire des paroles, c'est plus les figures de style que l'on retrouve dans la poésie, genre métaphore, anaphore, pléonasme, etc. Et pour donner quand même une référence littéraire bien précise, qu'on a fait dans notre morceau Sailor, qui est un morceau qui parle d'un marin perdu en mer. Ça, c'est un gros clin d'œil qu'on a voulu faire au poème du bateau ivre de Rimbaud.
D'accord, merci. Alors, tu fais souvent référence, tu viens de le faire à Rimbaud, entre autres, à la poésie. On va reprendre l'exemple de quelqu'un, je vais parler de Patti Smith. qui a apporté une approche poétique et littéraire à ses textes, à tel point qu'elle a même édité des livres de poésie, Patrice Misse. Les paroles de ses chansons, évidemment, sont proches d'exercices poétiques. Mais toi, quel rapport est-ce que tu entretiens personnellement avec la poésie ?
Moi, j'en parle un peu depuis le début de poésie. C'est vrai que c'est quelque chose qui me tient énormément à cœur. J'ai un rapport très universitaire. Avec la poésie, j'ai fait mon mémoire de master sur la poésie de guerre d'Apollinaire, notamment sur son recueil Calligramme. Et en ce moment, en plus de chanter du rock, je fais une thèse autour d'une revue littéraire et philosophique du XXe siècle qui s'appelle Présence et qui est une revue qui a été dirigée par Gilbert Trouillet qui était un poète suisse-roman. Donc c'est vrai que la poésie fait partie de mon travail de recherche depuis plusieurs années, donc elle fait vraiment partie de ma vie. mais j'ai aussi un rapport plus naturel à la poésie j'avais des grands-pères qui en écrivaient mon père qui aussi a publié trois recueils moi-même j'écris de la poésie et j'écris de la poésie indépendamment de la composition pour Lemonade t'as cité tout à l'heure Patti Smith, j'ai envie d'ajouter à nouveau Bob Dylan, Jim Morrison Frank Zappa en fait tous Je trouvais qu'ils étaient des grands poètes, en plus d'être des musiciens. Et comme ce sont les groupes et les artistes que j'écoute, et que ce sont eux qui m'inspirent à travers... Enfin, c'est eux qui m'inspirent, et c'est à travers eux que j'ai découvert la musique principalement. Pour moi, la poésie, elle est essentielle au rock, et elle est essentielle à moi-même. Moi, j'écoute beaucoup Zappa en ce moment, et c'est vrai que ses textes, ils sont incroyables. Ça va plus loin, je trouve, même sa musique. Ces mélodies, ces solos, ils ont un caractère poétique qui pourrait finalement être une oeuvre surréaliste et dadaïste. Pour moi, la poésie, c'est essentiel à l'existence. Sans elle, je trouve que c'est le néant. Vive la poésie, vive le rock.
On aurait pu évoquer même plein d'autres musiciens, qui ont des rapports à la littérature, même Bruce Springsteen, qui parfois, soit il a des textes, qui se rapprochent après d'une... d'une certaine littérature américaine assez réaliste en fait où ils décrivent l'endroit où ils vivent les relations avec son père, des choses comme ça
Crosby, Stylian Nash, ils faisaient aussi beaucoup ça en fait, ils racontaient des histoires mais c'est comme Creedence, Clearwater Revival c'est aussi des groupes qui étaient beaucoup plus dans comment dire la description un peu de la vie américaine c'est le pôle c'est un peu ça alors,
on parle de musique pour qu'on en écoute un peu quand même, j'imagine. J'aimerais qu'on puisse écouter un extrait d'une production du groupe Lemonade. Et puis ensuite, tu vas nous raconter un peu la genèse de ce texte. On parlera peut-être un peu du groupe. D'accord ?
Oui. Alors, je tiens juste à préciser que l'extrait qu'on va écouter, c'est un extrait d'un live qu'on a fait l'année dernière en Suisse. Donc voilà, ce n'est pas du tout de l'enregistrement studio, c'est vraiment le son live garage.
Oui, mais c'est pour avoir une idée. On te remercie beaucoup. C'est parti. Voilà, donc on vient d'écouter un morceau qui s'appelle comment ? Witch. Witch. Et alors, est-ce que tu peux nous raconter un peu la genèse de ce morceau ?
Je n'ai pas pris le morceau le plus poétique de notre set, mais c'est le premier live qui est disponible sur YouTube, d'ailleurs. Donc ce morceau Witch, il a existé en instrumental avant que le texte ne soit écrit. Donc on était avec les mecs de Lemonade, on avait envie de se défouler, d'aller chercher vraiment la colère, de faire sortir une certaine rage. Et toujours avec ce côté psychédélique de la guitare et du clavier. Pour le texte, c'est pareil. J'avais envie de m'exprimer sur ma colère. Moi, je viens de Paris, mais quand j'ai emménagé... Enfin, j'habite à Mulhouse maintenant depuis trois ans. Et quand j'ai emménagé à Mulhouse, je me suis un peu heurtée à des personnes qui m'ont fait comprendre que je n'étais pas forcément la bienvenue. Mais en fait, c'est vraiment ce côté très sectaire de toute ville qui ressemble à un village. J'étais l'étrangère. Et puis, je me suis heurtée aussi à une fille en particulier qui a causé beaucoup de tort dans ma vie et celle de mon entourage proche. Alors, j'ai écrit Witch, qui parle de la plus méchante sorcière du Grand Est. Donc, j'adore les sorcières, je tiens à préciser, mais je n'aime pas les sorcières qui détruisent des amitiés, des relations par pure perversité. Donc, ce texte, c'est une réponse violente à la toxicité de cette fille, mais aussi... aux comportements malsains de certaines femmes qui utilisent des valeurs très importantes comme la sororité à des fins toxiques, genre pour abuser de ta confiance ou de ta gentillesse ou genre te piquer ton mec ou ta meuf. Après, Witch, c'est aussi une référence littéraire, forcément, à la Loreley. C'est une sorcière alsacienne très connue, dont parle notamment Apollinaire dans son poème...
C'est le père Félix Képhène aussi.
Oui, tout à fait, oui. Bien sûr. Mais Apollinaire a écrit un poème au titre éponyme, La Loreley. Il parle de cette sorcière du Haut-Rhin. Mais la jeunesse du texte, c'était vraiment ça. C'était cette envie de mélanger le réel de la colère au mystique de notre musique un peu plus psyché.
Ok. Alors, on a entendu effectivement ce court extrait en live qui a été joué, tu disais, en Suisse, c'est ça ? En Suisse,
à Bâle, c'était en avril 2023.
D'accord. Alors, on entend les instruments. Tu peux peut-être nous présenter un petit peu le groupe ? On voit qu'il y a une batterie assez puissante.
Notre batteur, il est hollandais, il s'appelle Quirijn. Et c'est lui qui rapporte tout le côté très punk de notre musique, parce que c'est vraiment lui, ses influences sont très, très punk, les clashs.
On entend la frappe. En fait,
il est très grand, il a des très grands bras. Je pense que c'est aussi pour ceux qui ne se rendent pas compte de sa puissance.
Après, on a un guitariste qu'on entend bien, qui est présent, qui a un son un peu garage. Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de ce fameux guitariste ?
Tout à fait. Nico, que je connais, ça commence à faire un peu 4-5 ans, quelque chose comme ça, que j'ai rencontré pendant le confinement. Je l'ai rencontré par le biais d'un ami musicien. parce que je cherchais un guitariste et donc je l'ai rencontré, on a composé notre première chanson ensemble à distance parce qu'on était en plein confinement et du coup quand on s'est vu après ça a directement marché moi ce que j'aime beaucoup chez Nico c'est qu'il a énormément d'influences psychées, modernes actuelles, donc des groupes comme Alalas, Frankie and the Witch Fingers Altingoon, qui est du rock anatolien de ouf donc King's Desert and the Lizard Wizard il écoute aussi beaucoup de techno à côté qui n'est pas du tout un genre musical qui m'intéresse mais ça fait qu'il arrive à apporter une touche très moderne dans son son et dans la composition dans nos compositions touche moderne que moi je n'ai pas parce que j'ai pas autant d'influence actuelle, c'est plus les années 70 et la beat generation ok
Ensuite, il y a une basse aussi qu'on entend qui est assez présente, une bonne basse en plus.
Un autre bassiste, il est incroyable, il s'appelle Rob. Lui, c'est tout le côté Black Sabbath, Deep Purple à fond. Il a vraiment ce côté un peu rock, un peu américain comme ça que j'aime beaucoup. Genre, comment il s'appelle ? Leonard Skinner et tout ça. en fait je trouve que ça ça lit même très bien avec la batterie de Curaine parce que les deux sont dans une sorte de tonique qui du coup vraiment ça tient la baraque quoi.
Oui tout à fait et puis ? Et puis on a Tim au clavier alors Tim je vous avais vu moi à un concert au Culeau d'Orkamp il y a quelques années en fait effectivement donc Il me rappelait un peu les Dors, les vrais bronzareks.
Il va adorer entendre ça.
Il va être content.
Il va être content. Ah bah bien sûr, Tim, très très grand fan des Dors. D'ailleurs, je pense que c'est grâce à ça qu'on est devenus très amis très vite. La première fois que je l'ai rencontré, c'était à une soirée. En fait, on a commencé à parler des Dors et c'était un truc de fou. Et il me dit, moi, je connais toutes les chansons des Dances par cœur au clavier. Je fais, ah non, sérieusement ? Je ne te crois pas. Puis après, on a fait des répètes ensemble et je me suis rendu compte que c'était vrai. Et c'est dingue. Et en fait, Tim, c'est vraiment une personne que j'adore. Et j'adore sa manière de jouer parce qu'il parle en tous les sens. Il est capable d'improviser. Il a un peu une sorte d'oreille absolue où il est capable de s'en connaître un morceau, se caler dessus sans aucun problème et que ça ne fasse pas tâche. Pour moi, le son du clavier, il est... tellement important dans Lemonade. Il apporte à la fois la mélodie, mais à la fois ce que, par exemple, une guitare rythmique pourrait faire. Nous, on n'a pas de guitariste rythmique, on n'a que un guitariste lead, qui est Nico. Et finalement, ça ne manque pas, parce qu'il y a le clavier qui vient accompagner tout ça de manière vraiment géniale.
Eh bien, on va, je pense, pouvoir partager le lien, je ne sais pas...
On a Instagram, on met des petites photos, on met des petites vidéos. Et puis, on a un lien YouTube, une chaîne YouTube qui s'appelle Lemonade. Et là, on a deux lives qui sont disponibles. Puis, je ne suis pas sûre que je puisse en dire beaucoup, mais on sort un EP en 2025 qu'on va enregistrer en février prochain. Et puis, on a des petites dates à annoncer. Donc voilà, restez connectés sur les internets.
On va regarder. Sur le site isadorabc.com, on va mettre évidemment les liens de l'Insta pour qu'on puisse vous suivre et du YouTube. Et puis évidemment...
Description
Entretien avec la chanteuse Alma Gloria Stone du Groupe de rock Lemonade ou nous évoquons les rapports entre rock et littérature.
Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
Transcription
Bienvenue dans notre podcast Isadora BC, le podcast où une comédienne et un poète échangent autour d'une tasse de café. Aujourd'hui, notre invité c'est Alma Gloria Stone et le poète c'est Régis Dequet. Nous allons aborder ce jour la relation entre le rock et la littérature. Bonjour Alma Gloria Stone.
Bonjour !
Alors, tu chantes dans un groupe de rock qui se nomme Lemonade. Tu écris toi-même les paroles des chansons pour le groupe et ces textes se doivent d'être portés par une musique très énergique, une musique rock. Et comment est-ce que tu les conçois, ces textes ?
Alors, je ne suis pas la seule à écrire. Je propose généralement des brouillons qui sont validés par l'ensemble du groupe. On est cinq. il y a moi et quatre autres garçons. Et parfois, même d'autres membres du groupe me suggèrent telle ou telle phrase. Et puis après, moi, je vais aller construire autour de ça. Moi, j'aime beaucoup, en général, partir d'un thème, d'une image, d'une sensation et ensuite écrire une histoire autour de ça. Mais en général, c'est vraiment un mot ou une situation qui vient à l'esprit. C'est en général comme ça qu'on procède. Après, je m'inspire beaucoup de la poésie de Jim Morrison, de la beat generation, mais aussi des femmes du rock comme Stevie Nicks de Fleetwood Mac ou Mariska Veres de Shocking Blue.
D'accord. Est-ce qu'on peut parler de co-écriture ? Puisque tu écris avec tes collègues, tes musiciens.
Oui, tout à fait. C'est tout à fait de la co-écriture, surtout dans le sens où j'ai vraiment beaucoup besoin de leur avis. Avant de me lancer dans l'écriture d'un texte, en général on trouve l'instrumental en premier, puis ensuite moi je discute avec eux et je leur demande qu'est-ce que ça vous fait ressentir telle ou telle ambiance. Pour vous, le noteau au morceau, de quoi est-ce qu'il parle en fait ? Qu'est-ce que ça vous suggère ? Et puis à partir de ce qu'ils en pensent, j'écris par exemple une de nos dernières compos, j'avais envie de faire quelque chose un peu plus politique que d'habitude. Alors je leur en parle et ils me disent Ok, pas de souci, mais il faut le faire poétiquement. Donc en fait, c'est une petite consigne.
Une contrainte.
Une contrainte, voilà, c'est ça. On le fait tous ensemble.
D'accord. Donc la relation entre le rock et la littérature, évidemment, elle est assez riche, avec une influence réciproque qui s'est manifestée au fil du temps. De nombreux artistes rock ont été inspirés par des œuvres littéraires. On peut simplement nommer Bob Dylan, qui a souvent cité... Kerouac, Rimbaud, etc. L'œuvre de Bob Dylan, elle a elle-même été saluée par la littérature puisqu'il a eu un prix Nobel de littérature. Et toi Alma, comment est-ce que tu ressens cette relation entre la musique rock et la littérature en général ?
Je pense que la musique et la littérature, elles ont un lien ancestral, même historique, notamment dans la poésie. C'est vrai qu'avant, par exemple au XVe siècle, il y avait des poètes comme François Villon qui écrivaient des balades et des poèmes qui étaient faits pour être chantés et interprétés musicalement parlant. D'ailleurs, le lyrisme en poésie, ça tire son étymologie du joueur, de la lyre et du poète Apollon qui est toujours représenté avec un instrument de musique en main. Mais bon, ça, c'est une petite digression.
Moi, j'ai envie de dire, parce que tu fais référence à Apollon, mais pourtant, le rock, c'est assez dionysiaque.
Oui, c'est vrai. Je ne suis pas très fan de Dionysos pour autant, mais de Diogène, pas Dionysos.
Non, Dionysos. Je parlais de Dionysos, le dieu de l'ivresse. Oui,
c'est vrai.
Référence à Nietzsche.
Oui, effectivement. Là, je trouve que c'est une digresse. Non, mais pour revenir à ce que je disais, Je pense que la littérature, elle est inséparable du rock en réalité, parce que l'écriture, ça fait partie intégrante de la composition musicale, dans un premier temps, mais aussi parce qu'en littérature, on exprime des idées, on défend des choses, on fait acte de présence et on incarne ce lien entre soi et le monde. Et en musique, c'est un peu la même chose, je trouve, surtout dans le rock qui vient quand même du genre musical du blues. qui est un genre musical qui a servi à une époque d'émancipation et de moyens d'expression et de dénonciation de tout ce contexte colonial de l'époque. Donc si le rock... ça vient d'un mouvement musical qui utilise cet espace de création pour faire passer des messages, de la même manière que la littérature le fait, alors pour moi, le rock, il est très peu dissociable de la littérature et d'une certaine intellectualisation vis-à-vis des textes. Après, je ne veux pas dire que le rock doit être absolument intellectuel, pas du tout. Justement, c'est ça le rapport que j'aime, c'est qu'on peut prendre la puissance... de ce que peut renvoyer un texte littéraire et la mélanger à l'explosif d'un rythme de batterie ou de la furie d'une guitare.
D'accord. Alors, on va parler un peu rock, un petit peu, en prenant l'exemple, par exemple, de Led Zeppelin, un groupe que tu aimes bien, je crois. J'adore. Il faut savoir que dans les textes, Led Zeppelin, il est réinspiré du Seigneur des Anneaux, notamment de Tolkien, dans plusieurs de leurs chansons, dans Rumble On ou dans Misty Mountain Hope. il y a vraiment des références totales à Tolkien. Mettons, dans Rumble On, il parle du Mordor, des choses comme ça. Et puis dans Missy Montaigne Hop, il y a des références au Hobbit. Alors toi, Alma, est-ce que toi, tu intègres personnellement des références littéraires, des allusions ou des thématiques empruntées à la littérature pour les textes des chansons de Lemonade ?
Alors, juste pour la petite anecdote, dans le film que Led Zeppelin avait fait, The Song Remains the Same, Il y a quand même toute une scène, toute une partie scénarisée où on voit Robert Plant sur un cheval et Jimmy Page dans la forêt avec une fée. Comme ça, ça rappelle vachement aussi Le Seigneur des Anneaux. Mais oui, bien sûr que... D'ailleurs, plus qu'une inspiration, on a un morceau qui s'appelle Love Snake et qui est une adaptation musicale d'un poème de Jack Kerouac, Alan Ginsberg et Neil Cassady qui s'appelle Pull My Daisy. D'ailleurs, c'est un poème qui a ensuite, ils en ont fait un moyen métrage. Et donc, on a décidé d'adapter directement un de leurs poèmes en musique. Je pense que ce qui m'inspire le plus dans la littérature pour écrire des paroles, c'est plus les figures de style que l'on retrouve dans la poésie, genre métaphore, anaphore, pléonasme, etc. Et pour donner quand même une référence littéraire bien précise, qu'on a fait dans notre morceau Sailor, qui est un morceau qui parle d'un marin perdu en mer. Ça, c'est un gros clin d'œil qu'on a voulu faire au poème du bateau ivre de Rimbaud.
D'accord, merci. Alors, tu fais souvent référence, tu viens de le faire à Rimbaud, entre autres, à la poésie. On va reprendre l'exemple de quelqu'un, je vais parler de Patti Smith. qui a apporté une approche poétique et littéraire à ses textes, à tel point qu'elle a même édité des livres de poésie, Patrice Misse. Les paroles de ses chansons, évidemment, sont proches d'exercices poétiques. Mais toi, quel rapport est-ce que tu entretiens personnellement avec la poésie ?
Moi, j'en parle un peu depuis le début de poésie. C'est vrai que c'est quelque chose qui me tient énormément à cœur. J'ai un rapport très universitaire. Avec la poésie, j'ai fait mon mémoire de master sur la poésie de guerre d'Apollinaire, notamment sur son recueil Calligramme. Et en ce moment, en plus de chanter du rock, je fais une thèse autour d'une revue littéraire et philosophique du XXe siècle qui s'appelle Présence et qui est une revue qui a été dirigée par Gilbert Trouillet qui était un poète suisse-roman. Donc c'est vrai que la poésie fait partie de mon travail de recherche depuis plusieurs années, donc elle fait vraiment partie de ma vie. mais j'ai aussi un rapport plus naturel à la poésie j'avais des grands-pères qui en écrivaient mon père qui aussi a publié trois recueils moi-même j'écris de la poésie et j'écris de la poésie indépendamment de la composition pour Lemonade t'as cité tout à l'heure Patti Smith, j'ai envie d'ajouter à nouveau Bob Dylan, Jim Morrison Frank Zappa en fait tous Je trouvais qu'ils étaient des grands poètes, en plus d'être des musiciens. Et comme ce sont les groupes et les artistes que j'écoute, et que ce sont eux qui m'inspirent à travers... Enfin, c'est eux qui m'inspirent, et c'est à travers eux que j'ai découvert la musique principalement. Pour moi, la poésie, elle est essentielle au rock, et elle est essentielle à moi-même. Moi, j'écoute beaucoup Zappa en ce moment, et c'est vrai que ses textes, ils sont incroyables. Ça va plus loin, je trouve, même sa musique. Ces mélodies, ces solos, ils ont un caractère poétique qui pourrait finalement être une oeuvre surréaliste et dadaïste. Pour moi, la poésie, c'est essentiel à l'existence. Sans elle, je trouve que c'est le néant. Vive la poésie, vive le rock.
On aurait pu évoquer même plein d'autres musiciens, qui ont des rapports à la littérature, même Bruce Springsteen, qui parfois, soit il a des textes, qui se rapprochent après d'une... d'une certaine littérature américaine assez réaliste en fait où ils décrivent l'endroit où ils vivent les relations avec son père, des choses comme ça
Crosby, Stylian Nash, ils faisaient aussi beaucoup ça en fait, ils racontaient des histoires mais c'est comme Creedence, Clearwater Revival c'est aussi des groupes qui étaient beaucoup plus dans comment dire la description un peu de la vie américaine c'est le pôle c'est un peu ça alors,
on parle de musique pour qu'on en écoute un peu quand même, j'imagine. J'aimerais qu'on puisse écouter un extrait d'une production du groupe Lemonade. Et puis ensuite, tu vas nous raconter un peu la genèse de ce texte. On parlera peut-être un peu du groupe. D'accord ?
Oui. Alors, je tiens juste à préciser que l'extrait qu'on va écouter, c'est un extrait d'un live qu'on a fait l'année dernière en Suisse. Donc voilà, ce n'est pas du tout de l'enregistrement studio, c'est vraiment le son live garage.
Oui, mais c'est pour avoir une idée. On te remercie beaucoup. C'est parti. Voilà, donc on vient d'écouter un morceau qui s'appelle comment ? Witch. Witch. Et alors, est-ce que tu peux nous raconter un peu la genèse de ce morceau ?
Je n'ai pas pris le morceau le plus poétique de notre set, mais c'est le premier live qui est disponible sur YouTube, d'ailleurs. Donc ce morceau Witch, il a existé en instrumental avant que le texte ne soit écrit. Donc on était avec les mecs de Lemonade, on avait envie de se défouler, d'aller chercher vraiment la colère, de faire sortir une certaine rage. Et toujours avec ce côté psychédélique de la guitare et du clavier. Pour le texte, c'est pareil. J'avais envie de m'exprimer sur ma colère. Moi, je viens de Paris, mais quand j'ai emménagé... Enfin, j'habite à Mulhouse maintenant depuis trois ans. Et quand j'ai emménagé à Mulhouse, je me suis un peu heurtée à des personnes qui m'ont fait comprendre que je n'étais pas forcément la bienvenue. Mais en fait, c'est vraiment ce côté très sectaire de toute ville qui ressemble à un village. J'étais l'étrangère. Et puis, je me suis heurtée aussi à une fille en particulier qui a causé beaucoup de tort dans ma vie et celle de mon entourage proche. Alors, j'ai écrit Witch, qui parle de la plus méchante sorcière du Grand Est. Donc, j'adore les sorcières, je tiens à préciser, mais je n'aime pas les sorcières qui détruisent des amitiés, des relations par pure perversité. Donc, ce texte, c'est une réponse violente à la toxicité de cette fille, mais aussi... aux comportements malsains de certaines femmes qui utilisent des valeurs très importantes comme la sororité à des fins toxiques, genre pour abuser de ta confiance ou de ta gentillesse ou genre te piquer ton mec ou ta meuf. Après, Witch, c'est aussi une référence littéraire, forcément, à la Loreley. C'est une sorcière alsacienne très connue, dont parle notamment Apollinaire dans son poème...
C'est le père Félix Képhène aussi.
Oui, tout à fait, oui. Bien sûr. Mais Apollinaire a écrit un poème au titre éponyme, La Loreley. Il parle de cette sorcière du Haut-Rhin. Mais la jeunesse du texte, c'était vraiment ça. C'était cette envie de mélanger le réel de la colère au mystique de notre musique un peu plus psyché.
Ok. Alors, on a entendu effectivement ce court extrait en live qui a été joué, tu disais, en Suisse, c'est ça ? En Suisse,
à Bâle, c'était en avril 2023.
D'accord. Alors, on entend les instruments. Tu peux peut-être nous présenter un petit peu le groupe ? On voit qu'il y a une batterie assez puissante.
Notre batteur, il est hollandais, il s'appelle Quirijn. Et c'est lui qui rapporte tout le côté très punk de notre musique, parce que c'est vraiment lui, ses influences sont très, très punk, les clashs.
On entend la frappe. En fait,
il est très grand, il a des très grands bras. Je pense que c'est aussi pour ceux qui ne se rendent pas compte de sa puissance.
Après, on a un guitariste qu'on entend bien, qui est présent, qui a un son un peu garage. Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de ce fameux guitariste ?
Tout à fait. Nico, que je connais, ça commence à faire un peu 4-5 ans, quelque chose comme ça, que j'ai rencontré pendant le confinement. Je l'ai rencontré par le biais d'un ami musicien. parce que je cherchais un guitariste et donc je l'ai rencontré, on a composé notre première chanson ensemble à distance parce qu'on était en plein confinement et du coup quand on s'est vu après ça a directement marché moi ce que j'aime beaucoup chez Nico c'est qu'il a énormément d'influences psychées, modernes actuelles, donc des groupes comme Alalas, Frankie and the Witch Fingers Altingoon, qui est du rock anatolien de ouf donc King's Desert and the Lizard Wizard il écoute aussi beaucoup de techno à côté qui n'est pas du tout un genre musical qui m'intéresse mais ça fait qu'il arrive à apporter une touche très moderne dans son son et dans la composition dans nos compositions touche moderne que moi je n'ai pas parce que j'ai pas autant d'influence actuelle, c'est plus les années 70 et la beat generation ok
Ensuite, il y a une basse aussi qu'on entend qui est assez présente, une bonne basse en plus.
Un autre bassiste, il est incroyable, il s'appelle Rob. Lui, c'est tout le côté Black Sabbath, Deep Purple à fond. Il a vraiment ce côté un peu rock, un peu américain comme ça que j'aime beaucoup. Genre, comment il s'appelle ? Leonard Skinner et tout ça. en fait je trouve que ça ça lit même très bien avec la batterie de Curaine parce que les deux sont dans une sorte de tonique qui du coup vraiment ça tient la baraque quoi.
Oui tout à fait et puis ? Et puis on a Tim au clavier alors Tim je vous avais vu moi à un concert au Culeau d'Orkamp il y a quelques années en fait effectivement donc Il me rappelait un peu les Dors, les vrais bronzareks.
Il va adorer entendre ça.
Il va être content.
Il va être content. Ah bah bien sûr, Tim, très très grand fan des Dors. D'ailleurs, je pense que c'est grâce à ça qu'on est devenus très amis très vite. La première fois que je l'ai rencontré, c'était à une soirée. En fait, on a commencé à parler des Dors et c'était un truc de fou. Et il me dit, moi, je connais toutes les chansons des Dances par cœur au clavier. Je fais, ah non, sérieusement ? Je ne te crois pas. Puis après, on a fait des répètes ensemble et je me suis rendu compte que c'était vrai. Et c'est dingue. Et en fait, Tim, c'est vraiment une personne que j'adore. Et j'adore sa manière de jouer parce qu'il parle en tous les sens. Il est capable d'improviser. Il a un peu une sorte d'oreille absolue où il est capable de s'en connaître un morceau, se caler dessus sans aucun problème et que ça ne fasse pas tâche. Pour moi, le son du clavier, il est... tellement important dans Lemonade. Il apporte à la fois la mélodie, mais à la fois ce que, par exemple, une guitare rythmique pourrait faire. Nous, on n'a pas de guitariste rythmique, on n'a que un guitariste lead, qui est Nico. Et finalement, ça ne manque pas, parce qu'il y a le clavier qui vient accompagner tout ça de manière vraiment géniale.
Eh bien, on va, je pense, pouvoir partager le lien, je ne sais pas...
On a Instagram, on met des petites photos, on met des petites vidéos. Et puis, on a un lien YouTube, une chaîne YouTube qui s'appelle Lemonade. Et là, on a deux lives qui sont disponibles. Puis, je ne suis pas sûre que je puisse en dire beaucoup, mais on sort un EP en 2025 qu'on va enregistrer en février prochain. Et puis, on a des petites dates à annoncer. Donc voilà, restez connectés sur les internets.
On va regarder. Sur le site isadorabc.com, on va mettre évidemment les liens de l'Insta pour qu'on puisse vous suivre et du YouTube. Et puis évidemment...
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