- Speaker #0
Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Jedi Talks, dans lequel nous avons rencontré durant le congrès de la Société Française d'Endocrinologie qui s'est tenue à Lille, le professeur Venti Game et le professeur Prévost pour parler de leur parcours, de leurs travaux et de leur venue au congrès. Nous vous souhaitons une bonne écoute.
- Speaker #1
Bonjour professeur Van Tiguem, on va vous poser quelques questions. Alors vous êtes une figure bien connue de l'endocrino à Lille, pouvez nous parler un petit peu aujourd'hui de votre parcours et ce qui vous a conduit à vous engager dans le domaine de l'endocrinologie ?
- Speaker #2
Alors dans le domaine de la médecine c'est certainement un atavisme familial parce que ma grand-mère était beaucoup aimé beaucoup le soin Et aujourd'hui, juste cet automne, ça fait 50 ans que je suis entrée en médecine. Je ne dirais pas en religion, en religion de la médecine, parce que ça fait juste 50 ans que je suis rentrée à la faculté, dans la rue juste à côté, rue Paul-Duez. Et l'endocrinologie, je crois que c'est toujours une histoire de rencontre avec les maîtres. Donc j'avais rencontré le professeur Jean Lefebvre, qui était un grand clinicien, très humaniste, et c'est ce qui m'a donné envie de... de faire de l'endocrinologie parce que c'était une spécialité très physiopathologique. Lui-même avait un laboratoire et il m'a toujours poussé à poursuivre en recherche, même si initialement, comme beaucoup de personnes qui rentrent d'abord en médecine, c'était d'abord le soin qui m'intéressait. Donc j'ai eu un parcours un peu décalé parce que je ne souhaitais pas sacrifier ma vie de famille. Donc j'ai construit ma vie de famille parallèlement à la médecine et après je me suis davantage investie en recherche. Donc ça a été en deux temps comme un certain nombre de films.
- Speaker #1
Selon vous, quelles sont les grandes forces de l'endocrinologie hospitalière aujourd'hui ?
- Speaker #2
Les grandes forces de l'endocrinologie hospitalière pour moi, c'est la multidisciplinarité, surtout dans un grand CHU comme celui de Lille, et puis la recherche transnationale. Le fait de ne pas simplement traiter, mais de chercher pourquoi, comment, est-ce qu'on fait bien, est-ce qu'on peut faire mieux, etc.
- Speaker #1
Comment vous voyez la place justement des jeunes dans un service hospitalier et universitaire ? qui démarrent leur carrière d'endocrinologue ?
- Speaker #2
Alors je trouve que les jeunes dans un service hospitalier, quels qu'ils soient, sont une force formidable, parce qu'ils sont pleins d'enthousiasme, ils ne demandent qu'à apprendre, et si on leur donne des accroches pour travailler davantage en recherche, ils le feront bien volontiers. Et je pense que l'autre chose qui est importante dans le domaine de l'accroche avec les jeunes, c'est d'écouter leurs envies, parce que c'est assez... Rare, tous aient forcément envie de faire la thématique sur laquelle vous travaillez. Et donc ils ont envie d'innover, ils n'ont pas envie de faire la même chose que vous. Donc il faut bien écouter les projets qu'ils ont en tête et essayer, comme vous, vous êtes plus anciens et vous connaissez le bagon de l'université, d'accrocher leur souhait à un wagon qui est déjà parti et qui va les porter sur leur thématique. Et c'est comme ça aussi qu'on développe beaucoup de thématiques différentes.
- Speaker #1
C'est une bonne transition pour la question d'après, c'est sur l'encadrement justement de jeunes chercheurs, de jeunes cliniciens. Quel type de mentor vous avez l'impression d'être et comment vous accompagnez les jeunes dans leur parcours professionnel actuellement ?
- Speaker #2
Le type de mentor, je ne pense pas que je sois bon juge, je pense qu'il faut leur demander. Je pense qu'ils ont besoin de beaucoup de bienveillance parce que le début des études de médecine, comme beaucoup d'investissements au début, demandent des efforts importants. Et donc s'ils ne se sentent pas à l'aise dans un service où ils sont, je pense qu'ils ne resteront pas tout simplement. Donc il faut d'abord écouter ça, voir ce qu'ils cherchent et rester à l'écoute de leurs demandes.
- Speaker #1
Vous avez toujours œuvré pour rendre l'endocrinologie accessible. Ce soir, il y aura lors du congrès de la Société française d'endocrinologie une conférence grand public donnée par le professeur François Patou. Quel est le rôle que... Nous avons, en tant que cliniciens, en termes de vulgarisation scientifique et d'information du grand public.
- Speaker #2
Je crois que c'est très important d'expliquer aux gens, parce que tout le monde est capable de comprendre, même des personnes qui n'ont pas fait beaucoup d'études. Globalement, avec les réseaux sociaux, avec Internet, il y a un accès à l'information qui est beaucoup plus important. Et j'ai toujours été extrêmement surprise de l'investissement. Quand on effectue par exemple un essai clinique, un protocole de recherche clinique, on peut faire ça. Vous, ça ne va pas vous apporter grand-chose, mais ça aidera la recherche à avancer dans tel ou tel domaine. Il y a énormément de personnes, quand on leur explique bien, qui sont tout à fait d'accord, alors même que ça n'était pas forcément qu'un nid d'avance.
- Speaker #1
Une thématique qu'on a abordée dans des épisodes précédents, parce qu'on est allé dans d'autres congrès, on a l'impression que parfois les jeunes se freinent à venir à des congrès. Quel conseil vous pourrez donner à des jeunes qui veulent venir à la SFE ? Et comment aborder un congrès comme celui-ci pour qu'il soit le plus bénéfique dans leur formation possible ?
- Speaker #2
Alors je pense que la première chose, les jeunes ne comprennent pas toujours l'intérêt d'adhérer aux sociétés savantes. Sociétés savantes, c'est un peu ringard. Or l'adhésion à ces sociétés, que ce soit nationales ou européennes, est très peu coûteuse. Et elle leur donne beaucoup d'avantages puisque tout est fait justement pour essayer de favoriser leur insertion. Donc ça leur permet d'avoir des courses de voyage et je pense qu'une fois qu'ils sont venus, une fois parce qu'ils ont présenté un poster, c'est pas difficile de faire un abstract, il suffit de demander à leur seigneur, il aura toujours une idée. Et donc ça va leur permettre de rencontrer des personnes, de rencontrer ce goût de la vie, enfin ce sentiment de fête aussi qu'on a de plus en plus, je trouve, dans ce congrès, qu'on avait peut-être un peu moins avant, peut-être qu'on intégrait moins les jeunes aussi. Enfin je n'ai pas le souvenir tout à fait de cette même intégration quand j'étais plus jeune, je crois que ça a fait beaucoup de... de progrès, je crois que c'est important. Et donc, on parlait tout à l'heure d'intelligence artificielle, je pense que le fait de se rencontrer, le fait d'aller faire un tour en ville, de se rencontrer au dîner de gala des orateurs, ce que vous voulez, c'est une forte incitation, parce que vous allez avoir des accroches, puis vous allez avoir des idées, puis vous allez avoir des projets, puis vous aurez envie de revenir et de faire quelque chose.
- Speaker #1
Merci beaucoup. Bonjour professeur Prévost, on va parler aujourd'hui de votre carrière. Peut-être que des gens connaissent déjà les débuts de votre carrière. Vous avez été doctorant ici à Lille, vous êtes aujourd'hui président du comité local d'organisation du Congrès. Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de votre parcours et de votre engagement dans la recherche en endocrinologie ?
- Speaker #3
Bonjour, mon engagement en sciences découle d'une passion de jeunesse qui est la zoologie. notamment l'herpétologie, donc la science des reptiles. Je me suis passionné depuis le plus jeune âge pour ces animaux. À l'époque, par exemple, on cherchait à savoir comment on pouvait les reproduire en captivité. Du coup, j'ai étudié leur biologie en tant qu'amateur avant de rentrer à l'université. On avait de cesse de changer les conditions environnementales, la température, la lumière, l'humidité. pour réussir à avoir une reproduction en captivité. Et ce qui m'a petit à petit amené à la science et à l'endocrinologie, l'endocrinologie de la reproduction, mais aussi à l'interaction entre les organes reproducteurs et le cerveau, qui va piloter tout ça. Et donc, de fil en aiguille, je suis arrivé à faire, à l'époque, ce qu'on appelait un DEA, maintenant on dirait un Master de Recherche. Et puis donc à Paris, je suis venu à Lille pour travailler justement sur cette communication entre les gonades et le cerveau, et notamment l'hypothalamus. Je suis rentré dans le monde de l'endocrinologie que j'avais étudié auparavant, et ça a toujours été une passion et ça continue d'être une passion.
- Speaker #1
Votre carrière vous a amené à voyager, à faire des collaborations internationales. Quel regard vous portez sur ces expériences à la fois de voyage, de collaboration, et comment elles ont impacté votre parcours ?
- Speaker #3
Ces voyages et collaborations, et notamment les séjours qu'on peut appeler par exemple des séjours postdoctoraux de plusieurs années à l'étranger, sont une immense richesse car elles vous permettent déjà d'apprendre une autre langue, notamment l'anglais qui est la langue malheureusement dans la science. Mais aussi apprendre une autre culture de la recherche, mais aussi comment fonctionne une société. Et du coup, glaner le meilleur de chaque système, le système anglo-saxon, américain ou autre, et le système français. Et quand on revient en France monter son groupe, son laboratoire, et bien essayer de combiner le tout pour essayer d'avoir la même... Le meilleur encadrement possible des personnes qui travaillent avec nous et assuffler une énergie qui va stimuler les gens et garder... essayer de cultiver leur passion.
- Speaker #1
Vous avez reçu plusieurs prix prestigieux pour vos recherches, donc je vais poser deux questions à ce propos. La première c'est, quand on reçoit des prix, il y a aussi probablement des obstacles et des échecs avant dans le parcours. Est-ce qu'il y a un événement marquant de votre carrière que vous voudriez partager, qui vous a inspiré ou qui vous a aidé peut-être à rebondir sur d'autres choses positives par la suite ?
- Speaker #3
Alors les obstacles, on en rencontre toujours, des fois de la part des collègues, des fois de la part des administrations, mais vraiment la richesse du monde de la recherche, c'est le travail en équipe et avoir le bonheur d'encadrer des étudiants au master, mais aussi en thèse et aussi de pouvoir encadrer des chercheurs postdoctorants. et chacun d'entre eux apporte une richesse. incommensurable au groupe apporte ses propres idées, façons de voir les choses et nous on a la chance d'avoir une équipe internationale donc en plus on a plusieurs cultures au sein du laboratoire et ça conduit à une émulation qui est tout à fait extraordinaire pour garder notre motivation, cette passion et découvrir des choses nouvelles et Quant au prix que j'ai reçu, ils sont liés à des choses qu'on a découvertes avec l'une de mes étudiantes en thèse, Constantina est si présent, que l'on ne soupçonnait pas, et une deuxième aussi découverte que l'on a faite alors qu'on n'attendait pas du tout. Donc pour vous dire par exemple que la GNRH, l'hormone qui va contrôler la mise en place de la fonction de reproduction. dès la naissance, au moment de la mi-puberté, va jouer certainement un rôle fondamental dans la programmation du cerveau et de l'organisme. Et plus tard, cette même hormone et surtout son rythme pulsatile de sécrétion, qui est indispensable au maintien de la fonction de reproduction, est aussi indispensable au maintien de la cognition. Et du coup, quand ce rythme va être dérégulé, soit par des événements de la vie tels que... la ménopause ou le vieillissement, c'est là où ça va augmenter le risque de développer un déclin cognitif.
- Speaker #1
Alors ça répond à une autre question qui était celle sur le rôle des pères, des collègues et des mentors. Est-ce que vous voulez rajouter justement quelque chose sur la notion d'équipe et peut-être de groupe dans la recherche ?
- Speaker #3
Oui, tout à fait. Déjà les collaborations, je n'en ai pas parlé, mais en fait... Je pense que la science, et j'imagine que le monde médical aussi, tout repose sur la générosité. La générosité et le partage, le partage d'idées. Et quand on est généreux envers les membres de son équipe, les gens apportent encore plus que si on ne l'était pas. Et c'est la même chose pour les collaborateurs. Cette générosité va instaurer un climat de confiance. et de partage et c'est sûr que la recherche, qu'elle soit fondamentale ou clinique, nécessite de très nombreuses compétences qui ne sont pas présentes très souvent dans un seul endroit. Et justement, la facilité que l'on a à interagir avec d'autres collègues et à les intéresser à notre sujet pour qu'ils nous prêtent leur approche, leur technique, leur passion, et bien c'est... C'est vraiment ce qui fait la richesse de ce métier qui est vraiment multiple.
- Speaker #1
Je vais poser une question qu'on a aussi posée, c'est sur le type de mentor que vous êtes. J'ai un peu l'impression avec vos réponses que c'est plutôt bienveillant aussi, mais est-ce que vous avez une vision sur le type de mentorat que vous avez auprès de vos confrères ?
- Speaker #3
Alors, la bienveillance et bien sûr le maître mot. Donc j'avais mon mentor en post-doc. En Oregon, aux États-Unis, qui me disait, eh bien, dans un laboratoire, on a divers types de personnes, et notre rôle en tant que mentor, c'est d'essayer de tirer le meilleur de chacun d'entre eux, sachant que parfois, les niveaux sont différents, les attentes sont différentes. Donc ça, c'est une règle. Alors, moi, je pense être bienveillant, mais, alors, je ne sais pas, avec l'âge... Il y a une certaine crainte qui s'instaure et du coup il y a parfois une dichotomie entre les différentes personnes qui travaillent directement avec moi, certaines qui n'ont pas peur et qui rentrent dans mon bureau dès qu'ils ont une question et auquel cas on peut communiquer. en temps réel et du coup résoudre des choses et je peux leur apporter de l'aide tout de suite. Et d'autres qui ont la crainte de franchir la porte de mon bureau et du coup, on se voit une fois par mois ou tous les deux mois. Et là, je pense que ça peut nuire à leur projet. Et donc, si j'ai un conseil à donner aux jeunes chercheurs, c'est vraiment ne pas hésiter à aller voir leurs encadrants, leurs mentors, même s'ils sont très occupés, s'ils vous ont pris. prix, c'est qu'ils voulaient vous encadrer et du coup, n'hésitez pas à les déranger. Forcément, ils n'ont jamais le temps mais c'est à vous de venir leur parler et de leur tirer les verres du nez.
- Speaker #1
Très bien. Merci beaucoup pour ces bons conseils et vos réponses.