undefined cover
undefined cover
Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez cover
Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez cover
L'envers du récit

Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez

Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez

21min |21/05/2024
Play
undefined cover
undefined cover
Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez cover
Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez cover
L'envers du récit

Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez

Sur les traces du loup, avec la photographe Sophie Rodriguez

21min |21/05/2024
Play

Description

L’envers du récit, saison spéciale "Dans l’œil des photographes de La Croix", épisode 4 sur 4.


Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et quatre participations aux Jeux Olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme.


Pour "La Croix l’hebdo", elle est partie en juin 2021 dans les Alpes-de-Haute-Provence avec le journaliste Olivier Tallès, afin de suivre une intervention de la "Brigade loup". Cette entité, rattachée à l’Office français de la biodiversité, est habilitée à tuer les spécimens qui attaqueraient un troupeau. Pendant trois jours et deux nuits, Sophie Rodriguez a sillonné les montagnes et les pâturages à l’affût de ce prédateur, qui est également une espèce protégée depuis 1979.


Dans cette saison spéciale du podcast "L’envers du récit", des photographes reviennent sur les coulisses de reportages, réalisés pour le journal "La Croix". À bord du RER B, auprès des migrants à Calais, sur les traces du loup... Ils nous racontent leur travail de terrain et les choix qu’ils ont faits pour traduire ces histoires en images.


► Retrouvez l'article de Olivier Tallès et les photographies de Sophie Rodriguez :

https://www.la-croix.com/traces-loup-brigade-traque-protege-2021-08-13-1201170704


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


CRÉDITS :


Rédaction en chef : Fabienne Lemahieu. Réalisation : Clémence Maret, Célestine Albert-Steward et Flavien Edenne. Entretien et textes : Clémence Maret. Captation, montage et mixage : Flavien Edenne. Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Création musicale : Emmanuel Viau. Responsable marketing et voix : Laurence Szabason. Illustration : Mathieu Ughetti.


L'envers du récit est un podcast original de LA CROIX – Mai 2024


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, la chaleur va être représentée par une couleur blanche. Donc en fait, il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes. Moi, j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques. Franchement, pour moi, ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer.

  • Speaker #1

    Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et 4 participations aux Jeux olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme. Pour la Croix-Lepedot, elle est partie en juin 2021 dans les Alpes de Haute-Provence. Avec le journaliste Olivier Clalès, elle a suivi pendant 3 jours et 2 nuits une intervention de la brigade du Loup. Dans ce podcast, un photographe revient sur les coulisses d'un reportage réalisé pour La Croix. Il nous explique son travail de terrain et les choix qu'il a fait pour raconter cette histoire en images. Vous écoutez l'Envers du récit.

  • Speaker #0

    Je m'appelle Sophie Rodriguez, je suis photojournaliste depuis 2019 et ma première collaboration avec La Croix, ça date d'avril 2020. C'est une photo qui avait été publiée dans La Croix le quotidien sur la problématique des étudiants qui étaient confinés dans leur chambre universitaire pendant le Covid. Il y a plusieurs reportages qui ont suivi, notamment un grand reportage en néonatologie à Grenoble dont vous avez parlé dans l'envers du récit. J'ai eu une première vie, j'ai fait de la compétition sportive, donc j'étais athlète de haut niveau pendant une quinzaine d'années. Je faisais du snowboard, une première vie assez riche, mais bon, comme tout sport, ça a une fin. Et moi, j'ai toujours été passionnée par le journalisme. Pendant que je faisais ma carrière sportive, j'avais voulu faire une école de journalisme, et on m'avait refusé parce que c'était compliqué en termes d'agenda. Mais bon, j'avais gardé ça à l'esprit. Et j'avais aussi cette passion de la photo que je pratiquais de manière totalement amateur. Je faisais des photos de vacances, mais j'aimais bien ça. Et en fin de carrière sportive, quand je commençais à me poser réellement des questions sur ma reconversion, j'ai découvert qu'en fait, ces deux passions, ça faisait un métier. Ça faisait photojournaliste. Et du coup, j'ai foncé bien en tête. Et je me suis formée pendant plusieurs mois à Paris. Et puis voilà, je me suis installée en tant que photojournaliste indépendante à Grenoble. Ces deux carrières pour moi, elles sont complètement imbriquées, parce que c'est vrai que la photo, ce n'est pas facile, on se retrouve dans un milieu très concurrentiel. Au début, quand j'ai dit que je voulais devenir photojournaliste, on m'a un peu rayonnée, on m'a dit que ça allait être compliqué, surtout en n'étant pas à Paris. Donc je me suis servi de mon passé de sportive, un peu combative, à me fixer les objectifs et ne rien lâcher pour arriver à mon rêve de devenir photojournaliste. Le reportage dont on va parler aujourd'hui, ça s'appelle Sur les traces du loup publié en août 2021. Et l'objectif, c'était de documenter les actions mises en place pour régler la problématique de la cohabitation du loup avec les éleveurs, de montrer un petit peu ce qui se passait sur le terrain. Parce que c'est vrai que le loup, c'est quand même particulier, parce que c'est une espèce protégée qui est aussi régulée. C'est quand même un paradoxe, et donc le but, c'était de... De refaire un petit bilan sur le loup en France, quelles questions sont soulevées par rapport à sa présence ? Quand j'ai contacté la brigade Lou pour faire ce sujet, j'ai été assez étonnée, mais ça n'a pas été si difficile que ça de les convaincre de les suivre. J'ai expliqué clairement que le but c'était ni plus ni moins de documenter leur mission et que rien ne serait mis en sienne ou joué, le but c'était juste de montrer ce qu'ils faisaient. Alors à l'époque du reportage, en 2021, il y avait 920 loups à peu près sur le territoire français. Aujourd'hui il y en a à peu près 1100. Il faut savoir que cette population de loups est principalement répartie dans le quart sud-est de la France, de la Haute-Savoie jusqu'au sud aux Alpes-Maritimes. En passant par l'Isère, les Hautes-Alpes, la Drôme, tous ces départements, il y a une grosse présence du loup. La régulation du loup s'opère principalement via deux entités, les lieutenants de louveterie. Ce sont des chasseurs qui ont une habilitation particulière pour faire de la régulation d'espèces. Alors 90% du temps, ils font du sanglier. Mais ils peuvent être amenés, sur décision du préfet, à faire de la régulation de loups. Et il y a aussi la brigade qu'on a suivie, la brigade loups, qui eux dépendent de l'OFB, l'Office français de la biodiversité. Et donc cette brigade loups est destinée à assurer la régulation de l'espèce, en tout cas à gérer les problématiques de cohabitation. Ils viennent en aide aux éleveurs après des attaques répétées sur des troupeaux. J'avais déjà travaillé sur le sujet pour un autre média l'été précédent, à l'été 2020. J'avais déjà passé cinq mois à documenter un petit peu tout ce qui se passe autour du loup. C'est-à-dire que j'avais suivi cette fameuse brigade loup. J'avais fait à peu près cinq, six immersions lors de tirs de défense renforcés auprès de troupeaux de moutons. J'avais fait des immersions avec les louvetiers. J'avais passé du temps aussi, j'avais fait des affûts avec des photographes animaliers. qui sont passionnés par le loup et qui passent des nuits en montagne pour faire des belles photos de loups. J'avais essayé de voir tous ceux qui sont liés de près ou de loin par cette question du loup. Donc j'étais allée voir énormément d'éleveurs, d'associations, pour comprendre un petit peu pourquoi ce sujet est si problématique, il est si clivant, et pourquoi on n'a toujours pas trouvé de solution en fait. Les premiers contacts avec Lacroix, ils se sont faits en mars 2021. En fait, j'avais été au courant par une journaliste que Lacroix avait la volonté de faire un sujet sur le loup. J'ai contacté Bruno Arbezu, qui s'occupe de la photo, à l'hebdo, pour parler de ce que j'avais déjà fait. Et du coup, la relation s'est faite. Il m'a mis en relation avec Olivier Thalès, le journaliste de Lacroix. Donc, on a échangé pas mal avec Olivier, justement, pour voir comment mettre sur pied ce reportage. Comment documenter ce qu'on avait envie de raconter ? L'objectif c'était vraiment d'assister à une mission de la brigade Loup de l'OFB. Puis après il y a eu aussi des questions pratiques, c'est-à-dire où on va, quand on y va. C'est toujours un peu compliqué pour ces sujets qu'on ne peut pas vraiment prévoir à l'avance. Il faut savoir que les opérations qui sont menées par la brigade Loup, elles sont consécutives à des attaques répétées sur un même troupeau. Donc on ne peut pas savoir à l'avance, il va y avoir une mission sur tel alpage, Donc on a su seulement quatre jours avant où est-ce que la brigade Loup allait intervenir dans la semaine qu'on avait nous identifié comme étant possible. Donc c'est vrai que c'était un peu de la dernière minute, mais ça c'est bien ces sujets où on ne sait pas trop à l'avance où on va, on découvre tout, ça met un peu d'adrénaline. Avec Olivier Thalès, journaliste, même si la mise en contact entre nous deux s'était effectuée au mois de mars, on a décidé d'attendre la mi-juin pour faire le reportage parce que c'était le début de la saison des attaques sur les troupeaux. Et on est partis dans les Alpes de Haute-Provence, aux alentours d'un village qui s'appelle Entreveine. Alors c'est assez bucolique, on est entouré de champs de lavande, il y a des petites collines, c'est très mignon, c'est très isolé, il y a très peu de réseau. Donc le reportage était prévu sur trois jours. L'objectif c'était de suivre la brigade loup de jour et de nuit, sachant que leur action principale se déroule la nuit. La journée, il ne se passe pas grand chose, donc c'était l'occasion pour Olivier, le journaliste. de faire ses interviews, de parler un petit peu plus spécifiquement des missions de la brigade avec les agents. Pour moi, c'était l'occasion d'aller faire des photos un petit peu de contexte, de paysages, de troupeaux. J'ai aussi pas mal cherché des traces de la question du loup. Alors souvent, pour ce genre de questions, on trouve des banderoles, des pancartes, parce que c'est vrai qu'il y a beaucoup de personnes, beaucoup d'associations qui sont impliquées sur cette question du loup. Et ensuite, par contre, le gros du travail commençait, on va dire, sur le coup de 17 heures. On a rejoint les agents de la brigade Loup. Généralement, on cassait la croûte avec eux avant de partir sur le terrain. Et ensuite, direction le troupeau. Donc là, on allait rencontrer généralement le berger et l'éleveur. Les agents de la brigade rencontrent toujours ces personnes-là avant d'opérer une mission de surveillance auprès de leur troupeau. Et ensuite, les agents de la brigade commencent à préparer leur matériel, ils étudient un petit peu le terrain. Là, quand nous, on était à Entreveines, notamment le premier soir, on était sur un troupeau, il y avait déjà eu beaucoup d'attaques, ils avaient déjà fait beaucoup de missions là-bas, donc ils connaissaient très bien le terrain. Donc là, tout de suite, ils étaient quatre, les agents, ils se sont répartis en deux groupes de deux, ils savaient exactement quelles positions de surveillance et de tir ils devaient occuper, donc ça s'est fait assez rapidement. À savoir que ces positions de tir... C'est vraiment très précis les critères qu'ils doivent prendre en compte, parce qu'évidemment il y a des dangers, donc il faut absolument pas qu'il y ait de routes en face, de maisons, il faut qu'ils puissent tirer sans risquer d'atteindre des choses qu'il ne faudrait pas. Donc voilà, les deux groupes se font comme ça. Nous, on reste avec un des binômes. Et là, la tente commence, parce que là, on est vraiment au cœur de la mission. Les agents, il y en a un, généralement, qui est à la lunette thermique et qui observe en fait ce qui se passe. Et l'autre qui est avec le fusil. Ils n'ont qu'une arme pour deux. Et c'est lui qui est chargé de tirer en fonction de si une attaque se profile ou pas. Avant de tirer. Pour être sûre que ce soit bien un loup, parce que c'est vrai qu'il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, en fait la chaleur va être représentée par une couleur blanche, donc en fait il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes, moi j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques, franchement pour moi ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés en fait, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Donc ils ont une grande torche. Seulement à ce moment-là, quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer. Alors nous, dans notre cas, pas de loup à l'horizon. La soirée a été calme. On est restés en place dans le champ jusqu'à environ une heure du matin, je pense, parce que les attaques se produisent généralement en début de nuit. C'est vraiment à ce moment-là que la prédation est la plus importante. Et à une heure du matin, on remballe et on rentre. Le moment qui m'a le plus marquée, c'est vraiment la phase d'observation, de voir à quel point les agents... sont passionnés par la faune sauvage qu'ils regardent tous les soirs. Il faut imaginer, c'est tous les soirs. C'est des heures et des heures et des heures d'affût, selon les départements, à peu près de mai à septembre. Ils sont tous les soirs, quatre soirs par semaine dehors, et 99% de leur temps est dédié à cette observation. C'est un travail vraiment éprouvant pour eux, parce que c'est dans une position très statique. Et ils sont encore comme des enfants à regarder le spectacle des animaux sauvages qui s'offrent à eux. C'est vrai que ça, ça m'a assez touchée parce qu'on est dans une mission qui est assez dure quand même. On parle quand même de potentiellement tuer un animal sauvage plutôt beau et malgré un imaginaire un petit peu dur autour du loup qui est quand même plutôt sympathique. Enfin en tout cas, la mission est dure. Et je trouve que la douceur portée par ces agents à ces animaux qui les fascinent et qui les passionnent, j'avais trouvé ça assez touchant. Du coup, moi j'ai essayé d'illustrer ça. Il y a une photo dès la deuxième page du magazine. Il y a deux agents de la brigade loup qui sont postés dans le champ. C'était l'endroit où ils avaient décidé de s'installer pour potentiellement tirer. Et donc il y en a un qui est allongé avec un fusil. et une lunette de précision, donc ça fait vraiment une image un peu sniper qu'on a plutôt l'habitude de voir sur des terrains de guerre. Et puis, il y a son collègue à côté qui est en observation à la jumelle thermique. C'est assez étonnant de voir ça parce qu'on voit bien que ce n'est pas des chasseurs. Ils sont en t-shirt clair. Mais c'est vrai que du coup, ça interroge. On se dit, tiens, pourquoi il y a ce fusil ? Qu'est-ce qu'ils observent ? C'est vrai que c'est une photo qui est assez symbolique de cette phase d'observation qui est en fait la principale part de leur activité. Pour ce reportage, il y a deux grosses difficultés en termes de photos. La première, c'est qu'en fait, on parle d'un sujet qu'on ne peut pas montrer. On parle du loup, mais moi, je n'ai pas de photo de loup. Ça, c'était une grosse problématique, mais très intéressante parce que du coup, ça permet de chercher en photo qu'est-ce qui peut symboliser cette présence-là, de chercher peut-être une charge émotionnelle liée au sujet, mais sans montrer le sujet totalement frontalement. Il faut savoir qu'avoir une photo de loup, c'est quasiment impossible dans le sens où il faudrait... Il aurait fallu que je passe vraiment 3-4 mois d'affilée en montagne pour avoir la chance de voir un loup. Et le problème, c'est que vu qu'ils sortent quasiment que la nuit, c'était quasiment impossible de faire une photo de loup. Le deuxième gros problème, c'était aussi la question de la nuit. Les missions de la brigade Lou, notamment des louvetiers, c'est pareil, elles se déroulent la nuit. Donc moi, j'avais un petit créneau, on va dire à partir du moment où la lumière commence à décliner, coucher de soleil, mais qui ne fait encore pas totalement nuit. C'est là qu'il fallait que je fasse toutes mes images, parce qu'après, une fois qu'il faisait complètement nuit... Je pouvais quasiment plus rien faire. Bon, j'ai quand même trouvé quelques astuces. Par exemple, la troisième page du reportage, on a une photo qui est très sombre. On distingue en fait la silhouette d'un... On imagine que c'est un homme, ça pourrait être une femme, mais c'est un homme, qui regarde dans une jumelle, qui en l'occurrence est une lunette thermique, et en fait il n'y a qu'un point de lumière qui vient éclairer son œil. Donc on voit dans la photo, il n'y a quasiment que son œil qui est éclairé. Là c'est vraiment un agent de la brigade Lou qui est en position d'observation, et c'est vrai que cette photo, je la trouvais assez parlante, parce qu'elle reflète bien l'ambiance sombre du reportage, la difficulté aussi de leur tâche, parce que... Beaucoup m'ont dit qu'ils avaient aussi des soucis de vue à cause de cette lunette thermique qui crée de la lumière. Comme nous, quand on regarde un écran allumé et qu'on est dans du noir, on est ébloui. Et en fait, eux, ils sont très éblouis par cette lunette thermique. Et c'est très difficile pour eux d'enchaîner des nuits comme ça à observer. Par rapport à la problématique de ne pas pouvoir montrer vraiment l'objet du reportage, on peut retrouver aussi une photo. En arrière-plan, on a un champ. Et en premier plan, on a un panneau avec écrit ici, le petit chaperon rouge n'est pas un conte. Là, en fait, je me suis rendue sur un lieu où il y avait une attaque et l'éleveur avait, pour médiatiser un petit peu ce qui s'était passé, il avait décidé de poser des pancartes dans son champ pour expliquer ce qui s'était passé par rapport au loup. Donc c'est vrai que ça, c'était pour moi un bon moyen de coller au sujet sans vraiment le montrer frontalement. C'est vrai que le loup, c'est un sujet très sensible. Ça déchaîne les passions et puis tout le monde a un avis là-dessus. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai voulu m'intéresser à ce sujet. Moi, l'objectif, c'était vraiment de documenter ce que je voyais et de photographier tout ça, évidemment sans aucune mise en scène. Et effectivement, le but, c'était aussi d'aller voir toutes les parties prenantes pour schématiser les deux clans, les pour et les anti. Donc c'est pour ça que je suis allée voir le côté régulation, Brigade Loup, Lieutenant de Louveterie, mais je suis aussi allée voir les photographes animaliers qui se passionnent pour les loups et qui sont opposés à ces opérations de régulation, en tout cas dans les conditions dans lesquelles elles s'opèrent actuellement. Je suis allée voir des associations. Tous les éleveurs ne sont pas contre la présence du loup. J'ai rencontré notamment une éleveuse qui me disait Oui, j'ai été attaquée, j'ai eu beaucoup de bêtes tuées, mais c'est le jeu. J'ai essayé vraiment de chercher les différents points de vue, mais en photo, la commande, c'était quand même de suivre la brigade loup, donc une mission de régulation. Parce qu'en fait, c'est ça qui est un petit peu visuel. La partie, on va dire, des pro-loups, ceux qui veulent vraiment que l'espèce soit sanctuarisée, on va dire, c'est un peu dur de dire ça, mais malheureusement, il n'y a rien à montrer. C'est plus facile de montrer la régulation que de montrer la volonté de ne pas entraver le développement de la population de loups. Sur le terrain, la coopération avec Olivier Thalès, le journaliste, ça s'est très bien passé, c'est vraiment génial de pouvoir être en binôme. Olivier peut prendre le temps de discuter avec les agents, moi je fais autre chose en photo, en fonction de ce que lui racontent les personnes interviewées, moi ça m'oriente aussi sur mes photos, c'est vraiment un reportage à quatre mains. Et ça c'est vraiment indispensable qu'on puisse... Faire coïncider le récit et la partie visuelle. Et c'est pour ça que d'ailleurs sur le terrain, avec Olivier, on est toujours en temble. À la fin de ce reportage, j'étais vraiment encore plus passionnée par la question. C'est complexe parce qu'en fait on se retrouve face à une grande détresse de la part de certains éleveurs et en même temps on est face à une espèce animale qui est absolument magnifique et effectivement on ne comprend pas pourquoi il faudrait aller... avoir une action sur cette espèce-là dans son milieu naturel. La seule certitude avec laquelle je suis repartie de ce sujet, c'est que je n'avais pas la solution. Souvent, autour de la question du loup, on peut entendre il ne suffit plus de manger de viande, il suffit de… Mais ce n'est pas aussi simple que ça. Et justement, en rencontrant toutes les personnes qui sont liées au loup au quotidien, J'ai pu comprendre à quel point c'est pas si simple. Malheureusement, j'ai pas trouvé de solution. Quand je rentre de reportage, là, j'ai 560 photos. Dans un premier temps, je les regarde toutes une par une et il y a un choix qui s'opère vraiment purement esthétique. Et ensuite, petit à petit, j'écrème en fonction de la pertinence, on va dire, informationnelle. J'ai besoin aussi d'avoir du paysage, j'ai besoin d'avoir des portraits, j'ai besoin d'avoir des détails. Le but, ce n'est pas s'ennuyer parce que dans un reportage, on ne va pas mettre dix photos de paysages. Donc vraiment, d'essayer de créer un ensemble cohérent et qui donne le plus d'informations possible sans perdre de vue l'esthétique des photos. Ensuite, effectivement, toutes les photos sont retouchées. Alors, c'est jamais enlever des choses ou rajouter des choses. Mais ça peut être des petites corrections en termes de luminosité. Ça peut être un petit peu de vignettage. Le vignettage, c'est quand on assombrit un petit peu les bords de la photo pour resserrer un petit peu le regard du spectateur sur l'élément qu'on a envie de mettre en avant. Là, dans ce sujet-là, où il y a pas mal de couleurs vertes, parce qu'on est beaucoup dehors, il y a beaucoup d'herbes, c'est compliqué à traiter les verts en photo. Il faut essayer de les homogénéiser. Voilà, donc je retouche. Toujours les photos que j'envoie en sélection finale. Et là, en sélection finale, sur les 560 photos, j'ai envoyé une cinquantaine de photos. Donc ça, c'est ma sélection finale. Et dans l'article, il en reste 8, je dirais, à peu près. Alors, à la suite de ce reportage, c'est vrai que maintenant, je suis beaucoup l'actualité liée au loup. Après, niveau photo, je sais que c'est quelque chose que je veux continuer, mais je n'ai encore pas trouvé totalement la manière de faire. Il faudrait que je trouve une méthode photographique un petit peu différente, je pense, pour continuer ce sujet. Je ne l'ai encore pas trouvé, mais il y aura une suite, je pense.

  • Speaker #1

    Vous venez d'écouter un épisode de L'Envers du récit. N'hésitez pas à le partager et à vous abonner à notre podcast. Les photos de Sophie Rodriguez pour ce reportage sur les traces du loup sont à retrouver sur le site et l'appli Lacroix. Vous trouverez le lien dans le texte de description qui accompagne ce podcast. L'Envers du récit est un podcast original de Lacroix.

Description

L’envers du récit, saison spéciale "Dans l’œil des photographes de La Croix", épisode 4 sur 4.


Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et quatre participations aux Jeux Olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme.


Pour "La Croix l’hebdo", elle est partie en juin 2021 dans les Alpes-de-Haute-Provence avec le journaliste Olivier Tallès, afin de suivre une intervention de la "Brigade loup". Cette entité, rattachée à l’Office français de la biodiversité, est habilitée à tuer les spécimens qui attaqueraient un troupeau. Pendant trois jours et deux nuits, Sophie Rodriguez a sillonné les montagnes et les pâturages à l’affût de ce prédateur, qui est également une espèce protégée depuis 1979.


Dans cette saison spéciale du podcast "L’envers du récit", des photographes reviennent sur les coulisses de reportages, réalisés pour le journal "La Croix". À bord du RER B, auprès des migrants à Calais, sur les traces du loup... Ils nous racontent leur travail de terrain et les choix qu’ils ont faits pour traduire ces histoires en images.


► Retrouvez l'article de Olivier Tallès et les photographies de Sophie Rodriguez :

https://www.la-croix.com/traces-loup-brigade-traque-protege-2021-08-13-1201170704


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


CRÉDITS :


Rédaction en chef : Fabienne Lemahieu. Réalisation : Clémence Maret, Célestine Albert-Steward et Flavien Edenne. Entretien et textes : Clémence Maret. Captation, montage et mixage : Flavien Edenne. Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Création musicale : Emmanuel Viau. Responsable marketing et voix : Laurence Szabason. Illustration : Mathieu Ughetti.


L'envers du récit est un podcast original de LA CROIX – Mai 2024


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, la chaleur va être représentée par une couleur blanche. Donc en fait, il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes. Moi, j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques. Franchement, pour moi, ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer.

  • Speaker #1

    Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et 4 participations aux Jeux olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme. Pour la Croix-Lepedot, elle est partie en juin 2021 dans les Alpes de Haute-Provence. Avec le journaliste Olivier Clalès, elle a suivi pendant 3 jours et 2 nuits une intervention de la brigade du Loup. Dans ce podcast, un photographe revient sur les coulisses d'un reportage réalisé pour La Croix. Il nous explique son travail de terrain et les choix qu'il a fait pour raconter cette histoire en images. Vous écoutez l'Envers du récit.

  • Speaker #0

    Je m'appelle Sophie Rodriguez, je suis photojournaliste depuis 2019 et ma première collaboration avec La Croix, ça date d'avril 2020. C'est une photo qui avait été publiée dans La Croix le quotidien sur la problématique des étudiants qui étaient confinés dans leur chambre universitaire pendant le Covid. Il y a plusieurs reportages qui ont suivi, notamment un grand reportage en néonatologie à Grenoble dont vous avez parlé dans l'envers du récit. J'ai eu une première vie, j'ai fait de la compétition sportive, donc j'étais athlète de haut niveau pendant une quinzaine d'années. Je faisais du snowboard, une première vie assez riche, mais bon, comme tout sport, ça a une fin. Et moi, j'ai toujours été passionnée par le journalisme. Pendant que je faisais ma carrière sportive, j'avais voulu faire une école de journalisme, et on m'avait refusé parce que c'était compliqué en termes d'agenda. Mais bon, j'avais gardé ça à l'esprit. Et j'avais aussi cette passion de la photo que je pratiquais de manière totalement amateur. Je faisais des photos de vacances, mais j'aimais bien ça. Et en fin de carrière sportive, quand je commençais à me poser réellement des questions sur ma reconversion, j'ai découvert qu'en fait, ces deux passions, ça faisait un métier. Ça faisait photojournaliste. Et du coup, j'ai foncé bien en tête. Et je me suis formée pendant plusieurs mois à Paris. Et puis voilà, je me suis installée en tant que photojournaliste indépendante à Grenoble. Ces deux carrières pour moi, elles sont complètement imbriquées, parce que c'est vrai que la photo, ce n'est pas facile, on se retrouve dans un milieu très concurrentiel. Au début, quand j'ai dit que je voulais devenir photojournaliste, on m'a un peu rayonnée, on m'a dit que ça allait être compliqué, surtout en n'étant pas à Paris. Donc je me suis servi de mon passé de sportive, un peu combative, à me fixer les objectifs et ne rien lâcher pour arriver à mon rêve de devenir photojournaliste. Le reportage dont on va parler aujourd'hui, ça s'appelle Sur les traces du loup publié en août 2021. Et l'objectif, c'était de documenter les actions mises en place pour régler la problématique de la cohabitation du loup avec les éleveurs, de montrer un petit peu ce qui se passait sur le terrain. Parce que c'est vrai que le loup, c'est quand même particulier, parce que c'est une espèce protégée qui est aussi régulée. C'est quand même un paradoxe, et donc le but, c'était de... De refaire un petit bilan sur le loup en France, quelles questions sont soulevées par rapport à sa présence ? Quand j'ai contacté la brigade Lou pour faire ce sujet, j'ai été assez étonnée, mais ça n'a pas été si difficile que ça de les convaincre de les suivre. J'ai expliqué clairement que le but c'était ni plus ni moins de documenter leur mission et que rien ne serait mis en sienne ou joué, le but c'était juste de montrer ce qu'ils faisaient. Alors à l'époque du reportage, en 2021, il y avait 920 loups à peu près sur le territoire français. Aujourd'hui il y en a à peu près 1100. Il faut savoir que cette population de loups est principalement répartie dans le quart sud-est de la France, de la Haute-Savoie jusqu'au sud aux Alpes-Maritimes. En passant par l'Isère, les Hautes-Alpes, la Drôme, tous ces départements, il y a une grosse présence du loup. La régulation du loup s'opère principalement via deux entités, les lieutenants de louveterie. Ce sont des chasseurs qui ont une habilitation particulière pour faire de la régulation d'espèces. Alors 90% du temps, ils font du sanglier. Mais ils peuvent être amenés, sur décision du préfet, à faire de la régulation de loups. Et il y a aussi la brigade qu'on a suivie, la brigade loups, qui eux dépendent de l'OFB, l'Office français de la biodiversité. Et donc cette brigade loups est destinée à assurer la régulation de l'espèce, en tout cas à gérer les problématiques de cohabitation. Ils viennent en aide aux éleveurs après des attaques répétées sur des troupeaux. J'avais déjà travaillé sur le sujet pour un autre média l'été précédent, à l'été 2020. J'avais déjà passé cinq mois à documenter un petit peu tout ce qui se passe autour du loup. C'est-à-dire que j'avais suivi cette fameuse brigade loup. J'avais fait à peu près cinq, six immersions lors de tirs de défense renforcés auprès de troupeaux de moutons. J'avais fait des immersions avec les louvetiers. J'avais passé du temps aussi, j'avais fait des affûts avec des photographes animaliers. qui sont passionnés par le loup et qui passent des nuits en montagne pour faire des belles photos de loups. J'avais essayé de voir tous ceux qui sont liés de près ou de loin par cette question du loup. Donc j'étais allée voir énormément d'éleveurs, d'associations, pour comprendre un petit peu pourquoi ce sujet est si problématique, il est si clivant, et pourquoi on n'a toujours pas trouvé de solution en fait. Les premiers contacts avec Lacroix, ils se sont faits en mars 2021. En fait, j'avais été au courant par une journaliste que Lacroix avait la volonté de faire un sujet sur le loup. J'ai contacté Bruno Arbezu, qui s'occupe de la photo, à l'hebdo, pour parler de ce que j'avais déjà fait. Et du coup, la relation s'est faite. Il m'a mis en relation avec Olivier Thalès, le journaliste de Lacroix. Donc, on a échangé pas mal avec Olivier, justement, pour voir comment mettre sur pied ce reportage. Comment documenter ce qu'on avait envie de raconter ? L'objectif c'était vraiment d'assister à une mission de la brigade Loup de l'OFB. Puis après il y a eu aussi des questions pratiques, c'est-à-dire où on va, quand on y va. C'est toujours un peu compliqué pour ces sujets qu'on ne peut pas vraiment prévoir à l'avance. Il faut savoir que les opérations qui sont menées par la brigade Loup, elles sont consécutives à des attaques répétées sur un même troupeau. Donc on ne peut pas savoir à l'avance, il va y avoir une mission sur tel alpage, Donc on a su seulement quatre jours avant où est-ce que la brigade Loup allait intervenir dans la semaine qu'on avait nous identifié comme étant possible. Donc c'est vrai que c'était un peu de la dernière minute, mais ça c'est bien ces sujets où on ne sait pas trop à l'avance où on va, on découvre tout, ça met un peu d'adrénaline. Avec Olivier Thalès, journaliste, même si la mise en contact entre nous deux s'était effectuée au mois de mars, on a décidé d'attendre la mi-juin pour faire le reportage parce que c'était le début de la saison des attaques sur les troupeaux. Et on est partis dans les Alpes de Haute-Provence, aux alentours d'un village qui s'appelle Entreveine. Alors c'est assez bucolique, on est entouré de champs de lavande, il y a des petites collines, c'est très mignon, c'est très isolé, il y a très peu de réseau. Donc le reportage était prévu sur trois jours. L'objectif c'était de suivre la brigade loup de jour et de nuit, sachant que leur action principale se déroule la nuit. La journée, il ne se passe pas grand chose, donc c'était l'occasion pour Olivier, le journaliste. de faire ses interviews, de parler un petit peu plus spécifiquement des missions de la brigade avec les agents. Pour moi, c'était l'occasion d'aller faire des photos un petit peu de contexte, de paysages, de troupeaux. J'ai aussi pas mal cherché des traces de la question du loup. Alors souvent, pour ce genre de questions, on trouve des banderoles, des pancartes, parce que c'est vrai qu'il y a beaucoup de personnes, beaucoup d'associations qui sont impliquées sur cette question du loup. Et ensuite, par contre, le gros du travail commençait, on va dire, sur le coup de 17 heures. On a rejoint les agents de la brigade Loup. Généralement, on cassait la croûte avec eux avant de partir sur le terrain. Et ensuite, direction le troupeau. Donc là, on allait rencontrer généralement le berger et l'éleveur. Les agents de la brigade rencontrent toujours ces personnes-là avant d'opérer une mission de surveillance auprès de leur troupeau. Et ensuite, les agents de la brigade commencent à préparer leur matériel, ils étudient un petit peu le terrain. Là, quand nous, on était à Entreveines, notamment le premier soir, on était sur un troupeau, il y avait déjà eu beaucoup d'attaques, ils avaient déjà fait beaucoup de missions là-bas, donc ils connaissaient très bien le terrain. Donc là, tout de suite, ils étaient quatre, les agents, ils se sont répartis en deux groupes de deux, ils savaient exactement quelles positions de surveillance et de tir ils devaient occuper, donc ça s'est fait assez rapidement. À savoir que ces positions de tir... C'est vraiment très précis les critères qu'ils doivent prendre en compte, parce qu'évidemment il y a des dangers, donc il faut absolument pas qu'il y ait de routes en face, de maisons, il faut qu'ils puissent tirer sans risquer d'atteindre des choses qu'il ne faudrait pas. Donc voilà, les deux groupes se font comme ça. Nous, on reste avec un des binômes. Et là, la tente commence, parce que là, on est vraiment au cœur de la mission. Les agents, il y en a un, généralement, qui est à la lunette thermique et qui observe en fait ce qui se passe. Et l'autre qui est avec le fusil. Ils n'ont qu'une arme pour deux. Et c'est lui qui est chargé de tirer en fonction de si une attaque se profile ou pas. Avant de tirer. Pour être sûre que ce soit bien un loup, parce que c'est vrai qu'il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, en fait la chaleur va être représentée par une couleur blanche, donc en fait il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes, moi j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques, franchement pour moi ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés en fait, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Donc ils ont une grande torche. Seulement à ce moment-là, quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer. Alors nous, dans notre cas, pas de loup à l'horizon. La soirée a été calme. On est restés en place dans le champ jusqu'à environ une heure du matin, je pense, parce que les attaques se produisent généralement en début de nuit. C'est vraiment à ce moment-là que la prédation est la plus importante. Et à une heure du matin, on remballe et on rentre. Le moment qui m'a le plus marquée, c'est vraiment la phase d'observation, de voir à quel point les agents... sont passionnés par la faune sauvage qu'ils regardent tous les soirs. Il faut imaginer, c'est tous les soirs. C'est des heures et des heures et des heures d'affût, selon les départements, à peu près de mai à septembre. Ils sont tous les soirs, quatre soirs par semaine dehors, et 99% de leur temps est dédié à cette observation. C'est un travail vraiment éprouvant pour eux, parce que c'est dans une position très statique. Et ils sont encore comme des enfants à regarder le spectacle des animaux sauvages qui s'offrent à eux. C'est vrai que ça, ça m'a assez touchée parce qu'on est dans une mission qui est assez dure quand même. On parle quand même de potentiellement tuer un animal sauvage plutôt beau et malgré un imaginaire un petit peu dur autour du loup qui est quand même plutôt sympathique. Enfin en tout cas, la mission est dure. Et je trouve que la douceur portée par ces agents à ces animaux qui les fascinent et qui les passionnent, j'avais trouvé ça assez touchant. Du coup, moi j'ai essayé d'illustrer ça. Il y a une photo dès la deuxième page du magazine. Il y a deux agents de la brigade loup qui sont postés dans le champ. C'était l'endroit où ils avaient décidé de s'installer pour potentiellement tirer. Et donc il y en a un qui est allongé avec un fusil. et une lunette de précision, donc ça fait vraiment une image un peu sniper qu'on a plutôt l'habitude de voir sur des terrains de guerre. Et puis, il y a son collègue à côté qui est en observation à la jumelle thermique. C'est assez étonnant de voir ça parce qu'on voit bien que ce n'est pas des chasseurs. Ils sont en t-shirt clair. Mais c'est vrai que du coup, ça interroge. On se dit, tiens, pourquoi il y a ce fusil ? Qu'est-ce qu'ils observent ? C'est vrai que c'est une photo qui est assez symbolique de cette phase d'observation qui est en fait la principale part de leur activité. Pour ce reportage, il y a deux grosses difficultés en termes de photos. La première, c'est qu'en fait, on parle d'un sujet qu'on ne peut pas montrer. On parle du loup, mais moi, je n'ai pas de photo de loup. Ça, c'était une grosse problématique, mais très intéressante parce que du coup, ça permet de chercher en photo qu'est-ce qui peut symboliser cette présence-là, de chercher peut-être une charge émotionnelle liée au sujet, mais sans montrer le sujet totalement frontalement. Il faut savoir qu'avoir une photo de loup, c'est quasiment impossible dans le sens où il faudrait... Il aurait fallu que je passe vraiment 3-4 mois d'affilée en montagne pour avoir la chance de voir un loup. Et le problème, c'est que vu qu'ils sortent quasiment que la nuit, c'était quasiment impossible de faire une photo de loup. Le deuxième gros problème, c'était aussi la question de la nuit. Les missions de la brigade Lou, notamment des louvetiers, c'est pareil, elles se déroulent la nuit. Donc moi, j'avais un petit créneau, on va dire à partir du moment où la lumière commence à décliner, coucher de soleil, mais qui ne fait encore pas totalement nuit. C'est là qu'il fallait que je fasse toutes mes images, parce qu'après, une fois qu'il faisait complètement nuit... Je pouvais quasiment plus rien faire. Bon, j'ai quand même trouvé quelques astuces. Par exemple, la troisième page du reportage, on a une photo qui est très sombre. On distingue en fait la silhouette d'un... On imagine que c'est un homme, ça pourrait être une femme, mais c'est un homme, qui regarde dans une jumelle, qui en l'occurrence est une lunette thermique, et en fait il n'y a qu'un point de lumière qui vient éclairer son œil. Donc on voit dans la photo, il n'y a quasiment que son œil qui est éclairé. Là c'est vraiment un agent de la brigade Lou qui est en position d'observation, et c'est vrai que cette photo, je la trouvais assez parlante, parce qu'elle reflète bien l'ambiance sombre du reportage, la difficulté aussi de leur tâche, parce que... Beaucoup m'ont dit qu'ils avaient aussi des soucis de vue à cause de cette lunette thermique qui crée de la lumière. Comme nous, quand on regarde un écran allumé et qu'on est dans du noir, on est ébloui. Et en fait, eux, ils sont très éblouis par cette lunette thermique. Et c'est très difficile pour eux d'enchaîner des nuits comme ça à observer. Par rapport à la problématique de ne pas pouvoir montrer vraiment l'objet du reportage, on peut retrouver aussi une photo. En arrière-plan, on a un champ. Et en premier plan, on a un panneau avec écrit ici, le petit chaperon rouge n'est pas un conte. Là, en fait, je me suis rendue sur un lieu où il y avait une attaque et l'éleveur avait, pour médiatiser un petit peu ce qui s'était passé, il avait décidé de poser des pancartes dans son champ pour expliquer ce qui s'était passé par rapport au loup. Donc c'est vrai que ça, c'était pour moi un bon moyen de coller au sujet sans vraiment le montrer frontalement. C'est vrai que le loup, c'est un sujet très sensible. Ça déchaîne les passions et puis tout le monde a un avis là-dessus. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai voulu m'intéresser à ce sujet. Moi, l'objectif, c'était vraiment de documenter ce que je voyais et de photographier tout ça, évidemment sans aucune mise en scène. Et effectivement, le but, c'était aussi d'aller voir toutes les parties prenantes pour schématiser les deux clans, les pour et les anti. Donc c'est pour ça que je suis allée voir le côté régulation, Brigade Loup, Lieutenant de Louveterie, mais je suis aussi allée voir les photographes animaliers qui se passionnent pour les loups et qui sont opposés à ces opérations de régulation, en tout cas dans les conditions dans lesquelles elles s'opèrent actuellement. Je suis allée voir des associations. Tous les éleveurs ne sont pas contre la présence du loup. J'ai rencontré notamment une éleveuse qui me disait Oui, j'ai été attaquée, j'ai eu beaucoup de bêtes tuées, mais c'est le jeu. J'ai essayé vraiment de chercher les différents points de vue, mais en photo, la commande, c'était quand même de suivre la brigade loup, donc une mission de régulation. Parce qu'en fait, c'est ça qui est un petit peu visuel. La partie, on va dire, des pro-loups, ceux qui veulent vraiment que l'espèce soit sanctuarisée, on va dire, c'est un peu dur de dire ça, mais malheureusement, il n'y a rien à montrer. C'est plus facile de montrer la régulation que de montrer la volonté de ne pas entraver le développement de la population de loups. Sur le terrain, la coopération avec Olivier Thalès, le journaliste, ça s'est très bien passé, c'est vraiment génial de pouvoir être en binôme. Olivier peut prendre le temps de discuter avec les agents, moi je fais autre chose en photo, en fonction de ce que lui racontent les personnes interviewées, moi ça m'oriente aussi sur mes photos, c'est vraiment un reportage à quatre mains. Et ça c'est vraiment indispensable qu'on puisse... Faire coïncider le récit et la partie visuelle. Et c'est pour ça que d'ailleurs sur le terrain, avec Olivier, on est toujours en temble. À la fin de ce reportage, j'étais vraiment encore plus passionnée par la question. C'est complexe parce qu'en fait on se retrouve face à une grande détresse de la part de certains éleveurs et en même temps on est face à une espèce animale qui est absolument magnifique et effectivement on ne comprend pas pourquoi il faudrait aller... avoir une action sur cette espèce-là dans son milieu naturel. La seule certitude avec laquelle je suis repartie de ce sujet, c'est que je n'avais pas la solution. Souvent, autour de la question du loup, on peut entendre il ne suffit plus de manger de viande, il suffit de… Mais ce n'est pas aussi simple que ça. Et justement, en rencontrant toutes les personnes qui sont liées au loup au quotidien, J'ai pu comprendre à quel point c'est pas si simple. Malheureusement, j'ai pas trouvé de solution. Quand je rentre de reportage, là, j'ai 560 photos. Dans un premier temps, je les regarde toutes une par une et il y a un choix qui s'opère vraiment purement esthétique. Et ensuite, petit à petit, j'écrème en fonction de la pertinence, on va dire, informationnelle. J'ai besoin aussi d'avoir du paysage, j'ai besoin d'avoir des portraits, j'ai besoin d'avoir des détails. Le but, ce n'est pas s'ennuyer parce que dans un reportage, on ne va pas mettre dix photos de paysages. Donc vraiment, d'essayer de créer un ensemble cohérent et qui donne le plus d'informations possible sans perdre de vue l'esthétique des photos. Ensuite, effectivement, toutes les photos sont retouchées. Alors, c'est jamais enlever des choses ou rajouter des choses. Mais ça peut être des petites corrections en termes de luminosité. Ça peut être un petit peu de vignettage. Le vignettage, c'est quand on assombrit un petit peu les bords de la photo pour resserrer un petit peu le regard du spectateur sur l'élément qu'on a envie de mettre en avant. Là, dans ce sujet-là, où il y a pas mal de couleurs vertes, parce qu'on est beaucoup dehors, il y a beaucoup d'herbes, c'est compliqué à traiter les verts en photo. Il faut essayer de les homogénéiser. Voilà, donc je retouche. Toujours les photos que j'envoie en sélection finale. Et là, en sélection finale, sur les 560 photos, j'ai envoyé une cinquantaine de photos. Donc ça, c'est ma sélection finale. Et dans l'article, il en reste 8, je dirais, à peu près. Alors, à la suite de ce reportage, c'est vrai que maintenant, je suis beaucoup l'actualité liée au loup. Après, niveau photo, je sais que c'est quelque chose que je veux continuer, mais je n'ai encore pas trouvé totalement la manière de faire. Il faudrait que je trouve une méthode photographique un petit peu différente, je pense, pour continuer ce sujet. Je ne l'ai encore pas trouvé, mais il y aura une suite, je pense.

  • Speaker #1

    Vous venez d'écouter un épisode de L'Envers du récit. N'hésitez pas à le partager et à vous abonner à notre podcast. Les photos de Sophie Rodriguez pour ce reportage sur les traces du loup sont à retrouver sur le site et l'appli Lacroix. Vous trouverez le lien dans le texte de description qui accompagne ce podcast. L'Envers du récit est un podcast original de Lacroix.

Share

Embed

You may also like

Description

L’envers du récit, saison spéciale "Dans l’œil des photographes de La Croix", épisode 4 sur 4.


Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et quatre participations aux Jeux Olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme.


Pour "La Croix l’hebdo", elle est partie en juin 2021 dans les Alpes-de-Haute-Provence avec le journaliste Olivier Tallès, afin de suivre une intervention de la "Brigade loup". Cette entité, rattachée à l’Office français de la biodiversité, est habilitée à tuer les spécimens qui attaqueraient un troupeau. Pendant trois jours et deux nuits, Sophie Rodriguez a sillonné les montagnes et les pâturages à l’affût de ce prédateur, qui est également une espèce protégée depuis 1979.


Dans cette saison spéciale du podcast "L’envers du récit", des photographes reviennent sur les coulisses de reportages, réalisés pour le journal "La Croix". À bord du RER B, auprès des migrants à Calais, sur les traces du loup... Ils nous racontent leur travail de terrain et les choix qu’ils ont faits pour traduire ces histoires en images.


► Retrouvez l'article de Olivier Tallès et les photographies de Sophie Rodriguez :

https://www.la-croix.com/traces-loup-brigade-traque-protege-2021-08-13-1201170704


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


CRÉDITS :


Rédaction en chef : Fabienne Lemahieu. Réalisation : Clémence Maret, Célestine Albert-Steward et Flavien Edenne. Entretien et textes : Clémence Maret. Captation, montage et mixage : Flavien Edenne. Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Création musicale : Emmanuel Viau. Responsable marketing et voix : Laurence Szabason. Illustration : Mathieu Ughetti.


L'envers du récit est un podcast original de LA CROIX – Mai 2024


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, la chaleur va être représentée par une couleur blanche. Donc en fait, il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes. Moi, j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques. Franchement, pour moi, ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer.

  • Speaker #1

    Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et 4 participations aux Jeux olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme. Pour la Croix-Lepedot, elle est partie en juin 2021 dans les Alpes de Haute-Provence. Avec le journaliste Olivier Clalès, elle a suivi pendant 3 jours et 2 nuits une intervention de la brigade du Loup. Dans ce podcast, un photographe revient sur les coulisses d'un reportage réalisé pour La Croix. Il nous explique son travail de terrain et les choix qu'il a fait pour raconter cette histoire en images. Vous écoutez l'Envers du récit.

  • Speaker #0

    Je m'appelle Sophie Rodriguez, je suis photojournaliste depuis 2019 et ma première collaboration avec La Croix, ça date d'avril 2020. C'est une photo qui avait été publiée dans La Croix le quotidien sur la problématique des étudiants qui étaient confinés dans leur chambre universitaire pendant le Covid. Il y a plusieurs reportages qui ont suivi, notamment un grand reportage en néonatologie à Grenoble dont vous avez parlé dans l'envers du récit. J'ai eu une première vie, j'ai fait de la compétition sportive, donc j'étais athlète de haut niveau pendant une quinzaine d'années. Je faisais du snowboard, une première vie assez riche, mais bon, comme tout sport, ça a une fin. Et moi, j'ai toujours été passionnée par le journalisme. Pendant que je faisais ma carrière sportive, j'avais voulu faire une école de journalisme, et on m'avait refusé parce que c'était compliqué en termes d'agenda. Mais bon, j'avais gardé ça à l'esprit. Et j'avais aussi cette passion de la photo que je pratiquais de manière totalement amateur. Je faisais des photos de vacances, mais j'aimais bien ça. Et en fin de carrière sportive, quand je commençais à me poser réellement des questions sur ma reconversion, j'ai découvert qu'en fait, ces deux passions, ça faisait un métier. Ça faisait photojournaliste. Et du coup, j'ai foncé bien en tête. Et je me suis formée pendant plusieurs mois à Paris. Et puis voilà, je me suis installée en tant que photojournaliste indépendante à Grenoble. Ces deux carrières pour moi, elles sont complètement imbriquées, parce que c'est vrai que la photo, ce n'est pas facile, on se retrouve dans un milieu très concurrentiel. Au début, quand j'ai dit que je voulais devenir photojournaliste, on m'a un peu rayonnée, on m'a dit que ça allait être compliqué, surtout en n'étant pas à Paris. Donc je me suis servi de mon passé de sportive, un peu combative, à me fixer les objectifs et ne rien lâcher pour arriver à mon rêve de devenir photojournaliste. Le reportage dont on va parler aujourd'hui, ça s'appelle Sur les traces du loup publié en août 2021. Et l'objectif, c'était de documenter les actions mises en place pour régler la problématique de la cohabitation du loup avec les éleveurs, de montrer un petit peu ce qui se passait sur le terrain. Parce que c'est vrai que le loup, c'est quand même particulier, parce que c'est une espèce protégée qui est aussi régulée. C'est quand même un paradoxe, et donc le but, c'était de... De refaire un petit bilan sur le loup en France, quelles questions sont soulevées par rapport à sa présence ? Quand j'ai contacté la brigade Lou pour faire ce sujet, j'ai été assez étonnée, mais ça n'a pas été si difficile que ça de les convaincre de les suivre. J'ai expliqué clairement que le but c'était ni plus ni moins de documenter leur mission et que rien ne serait mis en sienne ou joué, le but c'était juste de montrer ce qu'ils faisaient. Alors à l'époque du reportage, en 2021, il y avait 920 loups à peu près sur le territoire français. Aujourd'hui il y en a à peu près 1100. Il faut savoir que cette population de loups est principalement répartie dans le quart sud-est de la France, de la Haute-Savoie jusqu'au sud aux Alpes-Maritimes. En passant par l'Isère, les Hautes-Alpes, la Drôme, tous ces départements, il y a une grosse présence du loup. La régulation du loup s'opère principalement via deux entités, les lieutenants de louveterie. Ce sont des chasseurs qui ont une habilitation particulière pour faire de la régulation d'espèces. Alors 90% du temps, ils font du sanglier. Mais ils peuvent être amenés, sur décision du préfet, à faire de la régulation de loups. Et il y a aussi la brigade qu'on a suivie, la brigade loups, qui eux dépendent de l'OFB, l'Office français de la biodiversité. Et donc cette brigade loups est destinée à assurer la régulation de l'espèce, en tout cas à gérer les problématiques de cohabitation. Ils viennent en aide aux éleveurs après des attaques répétées sur des troupeaux. J'avais déjà travaillé sur le sujet pour un autre média l'été précédent, à l'été 2020. J'avais déjà passé cinq mois à documenter un petit peu tout ce qui se passe autour du loup. C'est-à-dire que j'avais suivi cette fameuse brigade loup. J'avais fait à peu près cinq, six immersions lors de tirs de défense renforcés auprès de troupeaux de moutons. J'avais fait des immersions avec les louvetiers. J'avais passé du temps aussi, j'avais fait des affûts avec des photographes animaliers. qui sont passionnés par le loup et qui passent des nuits en montagne pour faire des belles photos de loups. J'avais essayé de voir tous ceux qui sont liés de près ou de loin par cette question du loup. Donc j'étais allée voir énormément d'éleveurs, d'associations, pour comprendre un petit peu pourquoi ce sujet est si problématique, il est si clivant, et pourquoi on n'a toujours pas trouvé de solution en fait. Les premiers contacts avec Lacroix, ils se sont faits en mars 2021. En fait, j'avais été au courant par une journaliste que Lacroix avait la volonté de faire un sujet sur le loup. J'ai contacté Bruno Arbezu, qui s'occupe de la photo, à l'hebdo, pour parler de ce que j'avais déjà fait. Et du coup, la relation s'est faite. Il m'a mis en relation avec Olivier Thalès, le journaliste de Lacroix. Donc, on a échangé pas mal avec Olivier, justement, pour voir comment mettre sur pied ce reportage. Comment documenter ce qu'on avait envie de raconter ? L'objectif c'était vraiment d'assister à une mission de la brigade Loup de l'OFB. Puis après il y a eu aussi des questions pratiques, c'est-à-dire où on va, quand on y va. C'est toujours un peu compliqué pour ces sujets qu'on ne peut pas vraiment prévoir à l'avance. Il faut savoir que les opérations qui sont menées par la brigade Loup, elles sont consécutives à des attaques répétées sur un même troupeau. Donc on ne peut pas savoir à l'avance, il va y avoir une mission sur tel alpage, Donc on a su seulement quatre jours avant où est-ce que la brigade Loup allait intervenir dans la semaine qu'on avait nous identifié comme étant possible. Donc c'est vrai que c'était un peu de la dernière minute, mais ça c'est bien ces sujets où on ne sait pas trop à l'avance où on va, on découvre tout, ça met un peu d'adrénaline. Avec Olivier Thalès, journaliste, même si la mise en contact entre nous deux s'était effectuée au mois de mars, on a décidé d'attendre la mi-juin pour faire le reportage parce que c'était le début de la saison des attaques sur les troupeaux. Et on est partis dans les Alpes de Haute-Provence, aux alentours d'un village qui s'appelle Entreveine. Alors c'est assez bucolique, on est entouré de champs de lavande, il y a des petites collines, c'est très mignon, c'est très isolé, il y a très peu de réseau. Donc le reportage était prévu sur trois jours. L'objectif c'était de suivre la brigade loup de jour et de nuit, sachant que leur action principale se déroule la nuit. La journée, il ne se passe pas grand chose, donc c'était l'occasion pour Olivier, le journaliste. de faire ses interviews, de parler un petit peu plus spécifiquement des missions de la brigade avec les agents. Pour moi, c'était l'occasion d'aller faire des photos un petit peu de contexte, de paysages, de troupeaux. J'ai aussi pas mal cherché des traces de la question du loup. Alors souvent, pour ce genre de questions, on trouve des banderoles, des pancartes, parce que c'est vrai qu'il y a beaucoup de personnes, beaucoup d'associations qui sont impliquées sur cette question du loup. Et ensuite, par contre, le gros du travail commençait, on va dire, sur le coup de 17 heures. On a rejoint les agents de la brigade Loup. Généralement, on cassait la croûte avec eux avant de partir sur le terrain. Et ensuite, direction le troupeau. Donc là, on allait rencontrer généralement le berger et l'éleveur. Les agents de la brigade rencontrent toujours ces personnes-là avant d'opérer une mission de surveillance auprès de leur troupeau. Et ensuite, les agents de la brigade commencent à préparer leur matériel, ils étudient un petit peu le terrain. Là, quand nous, on était à Entreveines, notamment le premier soir, on était sur un troupeau, il y avait déjà eu beaucoup d'attaques, ils avaient déjà fait beaucoup de missions là-bas, donc ils connaissaient très bien le terrain. Donc là, tout de suite, ils étaient quatre, les agents, ils se sont répartis en deux groupes de deux, ils savaient exactement quelles positions de surveillance et de tir ils devaient occuper, donc ça s'est fait assez rapidement. À savoir que ces positions de tir... C'est vraiment très précis les critères qu'ils doivent prendre en compte, parce qu'évidemment il y a des dangers, donc il faut absolument pas qu'il y ait de routes en face, de maisons, il faut qu'ils puissent tirer sans risquer d'atteindre des choses qu'il ne faudrait pas. Donc voilà, les deux groupes se font comme ça. Nous, on reste avec un des binômes. Et là, la tente commence, parce que là, on est vraiment au cœur de la mission. Les agents, il y en a un, généralement, qui est à la lunette thermique et qui observe en fait ce qui se passe. Et l'autre qui est avec le fusil. Ils n'ont qu'une arme pour deux. Et c'est lui qui est chargé de tirer en fonction de si une attaque se profile ou pas. Avant de tirer. Pour être sûre que ce soit bien un loup, parce que c'est vrai qu'il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, en fait la chaleur va être représentée par une couleur blanche, donc en fait il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes, moi j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques, franchement pour moi ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés en fait, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Donc ils ont une grande torche. Seulement à ce moment-là, quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer. Alors nous, dans notre cas, pas de loup à l'horizon. La soirée a été calme. On est restés en place dans le champ jusqu'à environ une heure du matin, je pense, parce que les attaques se produisent généralement en début de nuit. C'est vraiment à ce moment-là que la prédation est la plus importante. Et à une heure du matin, on remballe et on rentre. Le moment qui m'a le plus marquée, c'est vraiment la phase d'observation, de voir à quel point les agents... sont passionnés par la faune sauvage qu'ils regardent tous les soirs. Il faut imaginer, c'est tous les soirs. C'est des heures et des heures et des heures d'affût, selon les départements, à peu près de mai à septembre. Ils sont tous les soirs, quatre soirs par semaine dehors, et 99% de leur temps est dédié à cette observation. C'est un travail vraiment éprouvant pour eux, parce que c'est dans une position très statique. Et ils sont encore comme des enfants à regarder le spectacle des animaux sauvages qui s'offrent à eux. C'est vrai que ça, ça m'a assez touchée parce qu'on est dans une mission qui est assez dure quand même. On parle quand même de potentiellement tuer un animal sauvage plutôt beau et malgré un imaginaire un petit peu dur autour du loup qui est quand même plutôt sympathique. Enfin en tout cas, la mission est dure. Et je trouve que la douceur portée par ces agents à ces animaux qui les fascinent et qui les passionnent, j'avais trouvé ça assez touchant. Du coup, moi j'ai essayé d'illustrer ça. Il y a une photo dès la deuxième page du magazine. Il y a deux agents de la brigade loup qui sont postés dans le champ. C'était l'endroit où ils avaient décidé de s'installer pour potentiellement tirer. Et donc il y en a un qui est allongé avec un fusil. et une lunette de précision, donc ça fait vraiment une image un peu sniper qu'on a plutôt l'habitude de voir sur des terrains de guerre. Et puis, il y a son collègue à côté qui est en observation à la jumelle thermique. C'est assez étonnant de voir ça parce qu'on voit bien que ce n'est pas des chasseurs. Ils sont en t-shirt clair. Mais c'est vrai que du coup, ça interroge. On se dit, tiens, pourquoi il y a ce fusil ? Qu'est-ce qu'ils observent ? C'est vrai que c'est une photo qui est assez symbolique de cette phase d'observation qui est en fait la principale part de leur activité. Pour ce reportage, il y a deux grosses difficultés en termes de photos. La première, c'est qu'en fait, on parle d'un sujet qu'on ne peut pas montrer. On parle du loup, mais moi, je n'ai pas de photo de loup. Ça, c'était une grosse problématique, mais très intéressante parce que du coup, ça permet de chercher en photo qu'est-ce qui peut symboliser cette présence-là, de chercher peut-être une charge émotionnelle liée au sujet, mais sans montrer le sujet totalement frontalement. Il faut savoir qu'avoir une photo de loup, c'est quasiment impossible dans le sens où il faudrait... Il aurait fallu que je passe vraiment 3-4 mois d'affilée en montagne pour avoir la chance de voir un loup. Et le problème, c'est que vu qu'ils sortent quasiment que la nuit, c'était quasiment impossible de faire une photo de loup. Le deuxième gros problème, c'était aussi la question de la nuit. Les missions de la brigade Lou, notamment des louvetiers, c'est pareil, elles se déroulent la nuit. Donc moi, j'avais un petit créneau, on va dire à partir du moment où la lumière commence à décliner, coucher de soleil, mais qui ne fait encore pas totalement nuit. C'est là qu'il fallait que je fasse toutes mes images, parce qu'après, une fois qu'il faisait complètement nuit... Je pouvais quasiment plus rien faire. Bon, j'ai quand même trouvé quelques astuces. Par exemple, la troisième page du reportage, on a une photo qui est très sombre. On distingue en fait la silhouette d'un... On imagine que c'est un homme, ça pourrait être une femme, mais c'est un homme, qui regarde dans une jumelle, qui en l'occurrence est une lunette thermique, et en fait il n'y a qu'un point de lumière qui vient éclairer son œil. Donc on voit dans la photo, il n'y a quasiment que son œil qui est éclairé. Là c'est vraiment un agent de la brigade Lou qui est en position d'observation, et c'est vrai que cette photo, je la trouvais assez parlante, parce qu'elle reflète bien l'ambiance sombre du reportage, la difficulté aussi de leur tâche, parce que... Beaucoup m'ont dit qu'ils avaient aussi des soucis de vue à cause de cette lunette thermique qui crée de la lumière. Comme nous, quand on regarde un écran allumé et qu'on est dans du noir, on est ébloui. Et en fait, eux, ils sont très éblouis par cette lunette thermique. Et c'est très difficile pour eux d'enchaîner des nuits comme ça à observer. Par rapport à la problématique de ne pas pouvoir montrer vraiment l'objet du reportage, on peut retrouver aussi une photo. En arrière-plan, on a un champ. Et en premier plan, on a un panneau avec écrit ici, le petit chaperon rouge n'est pas un conte. Là, en fait, je me suis rendue sur un lieu où il y avait une attaque et l'éleveur avait, pour médiatiser un petit peu ce qui s'était passé, il avait décidé de poser des pancartes dans son champ pour expliquer ce qui s'était passé par rapport au loup. Donc c'est vrai que ça, c'était pour moi un bon moyen de coller au sujet sans vraiment le montrer frontalement. C'est vrai que le loup, c'est un sujet très sensible. Ça déchaîne les passions et puis tout le monde a un avis là-dessus. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai voulu m'intéresser à ce sujet. Moi, l'objectif, c'était vraiment de documenter ce que je voyais et de photographier tout ça, évidemment sans aucune mise en scène. Et effectivement, le but, c'était aussi d'aller voir toutes les parties prenantes pour schématiser les deux clans, les pour et les anti. Donc c'est pour ça que je suis allée voir le côté régulation, Brigade Loup, Lieutenant de Louveterie, mais je suis aussi allée voir les photographes animaliers qui se passionnent pour les loups et qui sont opposés à ces opérations de régulation, en tout cas dans les conditions dans lesquelles elles s'opèrent actuellement. Je suis allée voir des associations. Tous les éleveurs ne sont pas contre la présence du loup. J'ai rencontré notamment une éleveuse qui me disait Oui, j'ai été attaquée, j'ai eu beaucoup de bêtes tuées, mais c'est le jeu. J'ai essayé vraiment de chercher les différents points de vue, mais en photo, la commande, c'était quand même de suivre la brigade loup, donc une mission de régulation. Parce qu'en fait, c'est ça qui est un petit peu visuel. La partie, on va dire, des pro-loups, ceux qui veulent vraiment que l'espèce soit sanctuarisée, on va dire, c'est un peu dur de dire ça, mais malheureusement, il n'y a rien à montrer. C'est plus facile de montrer la régulation que de montrer la volonté de ne pas entraver le développement de la population de loups. Sur le terrain, la coopération avec Olivier Thalès, le journaliste, ça s'est très bien passé, c'est vraiment génial de pouvoir être en binôme. Olivier peut prendre le temps de discuter avec les agents, moi je fais autre chose en photo, en fonction de ce que lui racontent les personnes interviewées, moi ça m'oriente aussi sur mes photos, c'est vraiment un reportage à quatre mains. Et ça c'est vraiment indispensable qu'on puisse... Faire coïncider le récit et la partie visuelle. Et c'est pour ça que d'ailleurs sur le terrain, avec Olivier, on est toujours en temble. À la fin de ce reportage, j'étais vraiment encore plus passionnée par la question. C'est complexe parce qu'en fait on se retrouve face à une grande détresse de la part de certains éleveurs et en même temps on est face à une espèce animale qui est absolument magnifique et effectivement on ne comprend pas pourquoi il faudrait aller... avoir une action sur cette espèce-là dans son milieu naturel. La seule certitude avec laquelle je suis repartie de ce sujet, c'est que je n'avais pas la solution. Souvent, autour de la question du loup, on peut entendre il ne suffit plus de manger de viande, il suffit de… Mais ce n'est pas aussi simple que ça. Et justement, en rencontrant toutes les personnes qui sont liées au loup au quotidien, J'ai pu comprendre à quel point c'est pas si simple. Malheureusement, j'ai pas trouvé de solution. Quand je rentre de reportage, là, j'ai 560 photos. Dans un premier temps, je les regarde toutes une par une et il y a un choix qui s'opère vraiment purement esthétique. Et ensuite, petit à petit, j'écrème en fonction de la pertinence, on va dire, informationnelle. J'ai besoin aussi d'avoir du paysage, j'ai besoin d'avoir des portraits, j'ai besoin d'avoir des détails. Le but, ce n'est pas s'ennuyer parce que dans un reportage, on ne va pas mettre dix photos de paysages. Donc vraiment, d'essayer de créer un ensemble cohérent et qui donne le plus d'informations possible sans perdre de vue l'esthétique des photos. Ensuite, effectivement, toutes les photos sont retouchées. Alors, c'est jamais enlever des choses ou rajouter des choses. Mais ça peut être des petites corrections en termes de luminosité. Ça peut être un petit peu de vignettage. Le vignettage, c'est quand on assombrit un petit peu les bords de la photo pour resserrer un petit peu le regard du spectateur sur l'élément qu'on a envie de mettre en avant. Là, dans ce sujet-là, où il y a pas mal de couleurs vertes, parce qu'on est beaucoup dehors, il y a beaucoup d'herbes, c'est compliqué à traiter les verts en photo. Il faut essayer de les homogénéiser. Voilà, donc je retouche. Toujours les photos que j'envoie en sélection finale. Et là, en sélection finale, sur les 560 photos, j'ai envoyé une cinquantaine de photos. Donc ça, c'est ma sélection finale. Et dans l'article, il en reste 8, je dirais, à peu près. Alors, à la suite de ce reportage, c'est vrai que maintenant, je suis beaucoup l'actualité liée au loup. Après, niveau photo, je sais que c'est quelque chose que je veux continuer, mais je n'ai encore pas trouvé totalement la manière de faire. Il faudrait que je trouve une méthode photographique un petit peu différente, je pense, pour continuer ce sujet. Je ne l'ai encore pas trouvé, mais il y aura une suite, je pense.

  • Speaker #1

    Vous venez d'écouter un épisode de L'Envers du récit. N'hésitez pas à le partager et à vous abonner à notre podcast. Les photos de Sophie Rodriguez pour ce reportage sur les traces du loup sont à retrouver sur le site et l'appli Lacroix. Vous trouverez le lien dans le texte de description qui accompagne ce podcast. L'Envers du récit est un podcast original de Lacroix.

Description

L’envers du récit, saison spéciale "Dans l’œil des photographes de La Croix", épisode 4 sur 4.


Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et quatre participations aux Jeux Olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme.


Pour "La Croix l’hebdo", elle est partie en juin 2021 dans les Alpes-de-Haute-Provence avec le journaliste Olivier Tallès, afin de suivre une intervention de la "Brigade loup". Cette entité, rattachée à l’Office français de la biodiversité, est habilitée à tuer les spécimens qui attaqueraient un troupeau. Pendant trois jours et deux nuits, Sophie Rodriguez a sillonné les montagnes et les pâturages à l’affût de ce prédateur, qui est également une espèce protégée depuis 1979.


Dans cette saison spéciale du podcast "L’envers du récit", des photographes reviennent sur les coulisses de reportages, réalisés pour le journal "La Croix". À bord du RER B, auprès des migrants à Calais, sur les traces du loup... Ils nous racontent leur travail de terrain et les choix qu’ils ont faits pour traduire ces histoires en images.


► Retrouvez l'article de Olivier Tallès et les photographies de Sophie Rodriguez :

https://www.la-croix.com/traces-loup-brigade-traque-protege-2021-08-13-1201170704


► Vous avez une question ou une remarque ? Écrivez-nous à cette adresse : podcast.lacroix@groupebayard.com


CRÉDITS :


Rédaction en chef : Fabienne Lemahieu. Réalisation : Clémence Maret, Célestine Albert-Steward et Flavien Edenne. Entretien et textes : Clémence Maret. Captation, montage et mixage : Flavien Edenne. Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Création musicale : Emmanuel Viau. Responsable marketing et voix : Laurence Szabason. Illustration : Mathieu Ughetti.


L'envers du récit est un podcast original de LA CROIX – Mai 2024


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, la chaleur va être représentée par une couleur blanche. Donc en fait, il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes. Moi, j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques. Franchement, pour moi, ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer.

  • Speaker #1

    Sophie Rodriguez est une ancienne snowboardeuse française. Après 15 ans de compétition et 4 participations aux Jeux olympiques, elle a choisi de se reconvertir dans le photojournalisme. Pour la Croix-Lepedot, elle est partie en juin 2021 dans les Alpes de Haute-Provence. Avec le journaliste Olivier Clalès, elle a suivi pendant 3 jours et 2 nuits une intervention de la brigade du Loup. Dans ce podcast, un photographe revient sur les coulisses d'un reportage réalisé pour La Croix. Il nous explique son travail de terrain et les choix qu'il a fait pour raconter cette histoire en images. Vous écoutez l'Envers du récit.

  • Speaker #0

    Je m'appelle Sophie Rodriguez, je suis photojournaliste depuis 2019 et ma première collaboration avec La Croix, ça date d'avril 2020. C'est une photo qui avait été publiée dans La Croix le quotidien sur la problématique des étudiants qui étaient confinés dans leur chambre universitaire pendant le Covid. Il y a plusieurs reportages qui ont suivi, notamment un grand reportage en néonatologie à Grenoble dont vous avez parlé dans l'envers du récit. J'ai eu une première vie, j'ai fait de la compétition sportive, donc j'étais athlète de haut niveau pendant une quinzaine d'années. Je faisais du snowboard, une première vie assez riche, mais bon, comme tout sport, ça a une fin. Et moi, j'ai toujours été passionnée par le journalisme. Pendant que je faisais ma carrière sportive, j'avais voulu faire une école de journalisme, et on m'avait refusé parce que c'était compliqué en termes d'agenda. Mais bon, j'avais gardé ça à l'esprit. Et j'avais aussi cette passion de la photo que je pratiquais de manière totalement amateur. Je faisais des photos de vacances, mais j'aimais bien ça. Et en fin de carrière sportive, quand je commençais à me poser réellement des questions sur ma reconversion, j'ai découvert qu'en fait, ces deux passions, ça faisait un métier. Ça faisait photojournaliste. Et du coup, j'ai foncé bien en tête. Et je me suis formée pendant plusieurs mois à Paris. Et puis voilà, je me suis installée en tant que photojournaliste indépendante à Grenoble. Ces deux carrières pour moi, elles sont complètement imbriquées, parce que c'est vrai que la photo, ce n'est pas facile, on se retrouve dans un milieu très concurrentiel. Au début, quand j'ai dit que je voulais devenir photojournaliste, on m'a un peu rayonnée, on m'a dit que ça allait être compliqué, surtout en n'étant pas à Paris. Donc je me suis servi de mon passé de sportive, un peu combative, à me fixer les objectifs et ne rien lâcher pour arriver à mon rêve de devenir photojournaliste. Le reportage dont on va parler aujourd'hui, ça s'appelle Sur les traces du loup publié en août 2021. Et l'objectif, c'était de documenter les actions mises en place pour régler la problématique de la cohabitation du loup avec les éleveurs, de montrer un petit peu ce qui se passait sur le terrain. Parce que c'est vrai que le loup, c'est quand même particulier, parce que c'est une espèce protégée qui est aussi régulée. C'est quand même un paradoxe, et donc le but, c'était de... De refaire un petit bilan sur le loup en France, quelles questions sont soulevées par rapport à sa présence ? Quand j'ai contacté la brigade Lou pour faire ce sujet, j'ai été assez étonnée, mais ça n'a pas été si difficile que ça de les convaincre de les suivre. J'ai expliqué clairement que le but c'était ni plus ni moins de documenter leur mission et que rien ne serait mis en sienne ou joué, le but c'était juste de montrer ce qu'ils faisaient. Alors à l'époque du reportage, en 2021, il y avait 920 loups à peu près sur le territoire français. Aujourd'hui il y en a à peu près 1100. Il faut savoir que cette population de loups est principalement répartie dans le quart sud-est de la France, de la Haute-Savoie jusqu'au sud aux Alpes-Maritimes. En passant par l'Isère, les Hautes-Alpes, la Drôme, tous ces départements, il y a une grosse présence du loup. La régulation du loup s'opère principalement via deux entités, les lieutenants de louveterie. Ce sont des chasseurs qui ont une habilitation particulière pour faire de la régulation d'espèces. Alors 90% du temps, ils font du sanglier. Mais ils peuvent être amenés, sur décision du préfet, à faire de la régulation de loups. Et il y a aussi la brigade qu'on a suivie, la brigade loups, qui eux dépendent de l'OFB, l'Office français de la biodiversité. Et donc cette brigade loups est destinée à assurer la régulation de l'espèce, en tout cas à gérer les problématiques de cohabitation. Ils viennent en aide aux éleveurs après des attaques répétées sur des troupeaux. J'avais déjà travaillé sur le sujet pour un autre média l'été précédent, à l'été 2020. J'avais déjà passé cinq mois à documenter un petit peu tout ce qui se passe autour du loup. C'est-à-dire que j'avais suivi cette fameuse brigade loup. J'avais fait à peu près cinq, six immersions lors de tirs de défense renforcés auprès de troupeaux de moutons. J'avais fait des immersions avec les louvetiers. J'avais passé du temps aussi, j'avais fait des affûts avec des photographes animaliers. qui sont passionnés par le loup et qui passent des nuits en montagne pour faire des belles photos de loups. J'avais essayé de voir tous ceux qui sont liés de près ou de loin par cette question du loup. Donc j'étais allée voir énormément d'éleveurs, d'associations, pour comprendre un petit peu pourquoi ce sujet est si problématique, il est si clivant, et pourquoi on n'a toujours pas trouvé de solution en fait. Les premiers contacts avec Lacroix, ils se sont faits en mars 2021. En fait, j'avais été au courant par une journaliste que Lacroix avait la volonté de faire un sujet sur le loup. J'ai contacté Bruno Arbezu, qui s'occupe de la photo, à l'hebdo, pour parler de ce que j'avais déjà fait. Et du coup, la relation s'est faite. Il m'a mis en relation avec Olivier Thalès, le journaliste de Lacroix. Donc, on a échangé pas mal avec Olivier, justement, pour voir comment mettre sur pied ce reportage. Comment documenter ce qu'on avait envie de raconter ? L'objectif c'était vraiment d'assister à une mission de la brigade Loup de l'OFB. Puis après il y a eu aussi des questions pratiques, c'est-à-dire où on va, quand on y va. C'est toujours un peu compliqué pour ces sujets qu'on ne peut pas vraiment prévoir à l'avance. Il faut savoir que les opérations qui sont menées par la brigade Loup, elles sont consécutives à des attaques répétées sur un même troupeau. Donc on ne peut pas savoir à l'avance, il va y avoir une mission sur tel alpage, Donc on a su seulement quatre jours avant où est-ce que la brigade Loup allait intervenir dans la semaine qu'on avait nous identifié comme étant possible. Donc c'est vrai que c'était un peu de la dernière minute, mais ça c'est bien ces sujets où on ne sait pas trop à l'avance où on va, on découvre tout, ça met un peu d'adrénaline. Avec Olivier Thalès, journaliste, même si la mise en contact entre nous deux s'était effectuée au mois de mars, on a décidé d'attendre la mi-juin pour faire le reportage parce que c'était le début de la saison des attaques sur les troupeaux. Et on est partis dans les Alpes de Haute-Provence, aux alentours d'un village qui s'appelle Entreveine. Alors c'est assez bucolique, on est entouré de champs de lavande, il y a des petites collines, c'est très mignon, c'est très isolé, il y a très peu de réseau. Donc le reportage était prévu sur trois jours. L'objectif c'était de suivre la brigade loup de jour et de nuit, sachant que leur action principale se déroule la nuit. La journée, il ne se passe pas grand chose, donc c'était l'occasion pour Olivier, le journaliste. de faire ses interviews, de parler un petit peu plus spécifiquement des missions de la brigade avec les agents. Pour moi, c'était l'occasion d'aller faire des photos un petit peu de contexte, de paysages, de troupeaux. J'ai aussi pas mal cherché des traces de la question du loup. Alors souvent, pour ce genre de questions, on trouve des banderoles, des pancartes, parce que c'est vrai qu'il y a beaucoup de personnes, beaucoup d'associations qui sont impliquées sur cette question du loup. Et ensuite, par contre, le gros du travail commençait, on va dire, sur le coup de 17 heures. On a rejoint les agents de la brigade Loup. Généralement, on cassait la croûte avec eux avant de partir sur le terrain. Et ensuite, direction le troupeau. Donc là, on allait rencontrer généralement le berger et l'éleveur. Les agents de la brigade rencontrent toujours ces personnes-là avant d'opérer une mission de surveillance auprès de leur troupeau. Et ensuite, les agents de la brigade commencent à préparer leur matériel, ils étudient un petit peu le terrain. Là, quand nous, on était à Entreveines, notamment le premier soir, on était sur un troupeau, il y avait déjà eu beaucoup d'attaques, ils avaient déjà fait beaucoup de missions là-bas, donc ils connaissaient très bien le terrain. Donc là, tout de suite, ils étaient quatre, les agents, ils se sont répartis en deux groupes de deux, ils savaient exactement quelles positions de surveillance et de tir ils devaient occuper, donc ça s'est fait assez rapidement. À savoir que ces positions de tir... C'est vraiment très précis les critères qu'ils doivent prendre en compte, parce qu'évidemment il y a des dangers, donc il faut absolument pas qu'il y ait de routes en face, de maisons, il faut qu'ils puissent tirer sans risquer d'atteindre des choses qu'il ne faudrait pas. Donc voilà, les deux groupes se font comme ça. Nous, on reste avec un des binômes. Et là, la tente commence, parce que là, on est vraiment au cœur de la mission. Les agents, il y en a un, généralement, qui est à la lunette thermique et qui observe en fait ce qui se passe. Et l'autre qui est avec le fusil. Ils n'ont qu'une arme pour deux. Et c'est lui qui est chargé de tirer en fonction de si une attaque se profile ou pas. Avant de tirer. Pour être sûre que ce soit bien un loup, parce que c'est vrai qu'il faut imaginer que les agences qui voient dans leur jumelle thermique, en fait la chaleur va être représentée par une couleur blanche, donc en fait il n'y a qu'une silhouette. On voit un animal à quatre pattes, moi j'ai vu un loup dans les lunettes thermiques, franchement pour moi ça pourrait être un renard, ça pourrait être un chat, ça pourrait être n'importe quoi. Donc ils sont obligés en fait, avant de tirer, d'éclairer l'animal. Donc ils ont une grande torche. Seulement à ce moment-là, quand ils sont sûrs d'avoir bien identifié un loup, ils peuvent tirer. Alors nous, dans notre cas, pas de loup à l'horizon. La soirée a été calme. On est restés en place dans le champ jusqu'à environ une heure du matin, je pense, parce que les attaques se produisent généralement en début de nuit. C'est vraiment à ce moment-là que la prédation est la plus importante. Et à une heure du matin, on remballe et on rentre. Le moment qui m'a le plus marquée, c'est vraiment la phase d'observation, de voir à quel point les agents... sont passionnés par la faune sauvage qu'ils regardent tous les soirs. Il faut imaginer, c'est tous les soirs. C'est des heures et des heures et des heures d'affût, selon les départements, à peu près de mai à septembre. Ils sont tous les soirs, quatre soirs par semaine dehors, et 99% de leur temps est dédié à cette observation. C'est un travail vraiment éprouvant pour eux, parce que c'est dans une position très statique. Et ils sont encore comme des enfants à regarder le spectacle des animaux sauvages qui s'offrent à eux. C'est vrai que ça, ça m'a assez touchée parce qu'on est dans une mission qui est assez dure quand même. On parle quand même de potentiellement tuer un animal sauvage plutôt beau et malgré un imaginaire un petit peu dur autour du loup qui est quand même plutôt sympathique. Enfin en tout cas, la mission est dure. Et je trouve que la douceur portée par ces agents à ces animaux qui les fascinent et qui les passionnent, j'avais trouvé ça assez touchant. Du coup, moi j'ai essayé d'illustrer ça. Il y a une photo dès la deuxième page du magazine. Il y a deux agents de la brigade loup qui sont postés dans le champ. C'était l'endroit où ils avaient décidé de s'installer pour potentiellement tirer. Et donc il y en a un qui est allongé avec un fusil. et une lunette de précision, donc ça fait vraiment une image un peu sniper qu'on a plutôt l'habitude de voir sur des terrains de guerre. Et puis, il y a son collègue à côté qui est en observation à la jumelle thermique. C'est assez étonnant de voir ça parce qu'on voit bien que ce n'est pas des chasseurs. Ils sont en t-shirt clair. Mais c'est vrai que du coup, ça interroge. On se dit, tiens, pourquoi il y a ce fusil ? Qu'est-ce qu'ils observent ? C'est vrai que c'est une photo qui est assez symbolique de cette phase d'observation qui est en fait la principale part de leur activité. Pour ce reportage, il y a deux grosses difficultés en termes de photos. La première, c'est qu'en fait, on parle d'un sujet qu'on ne peut pas montrer. On parle du loup, mais moi, je n'ai pas de photo de loup. Ça, c'était une grosse problématique, mais très intéressante parce que du coup, ça permet de chercher en photo qu'est-ce qui peut symboliser cette présence-là, de chercher peut-être une charge émotionnelle liée au sujet, mais sans montrer le sujet totalement frontalement. Il faut savoir qu'avoir une photo de loup, c'est quasiment impossible dans le sens où il faudrait... Il aurait fallu que je passe vraiment 3-4 mois d'affilée en montagne pour avoir la chance de voir un loup. Et le problème, c'est que vu qu'ils sortent quasiment que la nuit, c'était quasiment impossible de faire une photo de loup. Le deuxième gros problème, c'était aussi la question de la nuit. Les missions de la brigade Lou, notamment des louvetiers, c'est pareil, elles se déroulent la nuit. Donc moi, j'avais un petit créneau, on va dire à partir du moment où la lumière commence à décliner, coucher de soleil, mais qui ne fait encore pas totalement nuit. C'est là qu'il fallait que je fasse toutes mes images, parce qu'après, une fois qu'il faisait complètement nuit... Je pouvais quasiment plus rien faire. Bon, j'ai quand même trouvé quelques astuces. Par exemple, la troisième page du reportage, on a une photo qui est très sombre. On distingue en fait la silhouette d'un... On imagine que c'est un homme, ça pourrait être une femme, mais c'est un homme, qui regarde dans une jumelle, qui en l'occurrence est une lunette thermique, et en fait il n'y a qu'un point de lumière qui vient éclairer son œil. Donc on voit dans la photo, il n'y a quasiment que son œil qui est éclairé. Là c'est vraiment un agent de la brigade Lou qui est en position d'observation, et c'est vrai que cette photo, je la trouvais assez parlante, parce qu'elle reflète bien l'ambiance sombre du reportage, la difficulté aussi de leur tâche, parce que... Beaucoup m'ont dit qu'ils avaient aussi des soucis de vue à cause de cette lunette thermique qui crée de la lumière. Comme nous, quand on regarde un écran allumé et qu'on est dans du noir, on est ébloui. Et en fait, eux, ils sont très éblouis par cette lunette thermique. Et c'est très difficile pour eux d'enchaîner des nuits comme ça à observer. Par rapport à la problématique de ne pas pouvoir montrer vraiment l'objet du reportage, on peut retrouver aussi une photo. En arrière-plan, on a un champ. Et en premier plan, on a un panneau avec écrit ici, le petit chaperon rouge n'est pas un conte. Là, en fait, je me suis rendue sur un lieu où il y avait une attaque et l'éleveur avait, pour médiatiser un petit peu ce qui s'était passé, il avait décidé de poser des pancartes dans son champ pour expliquer ce qui s'était passé par rapport au loup. Donc c'est vrai que ça, c'était pour moi un bon moyen de coller au sujet sans vraiment le montrer frontalement. C'est vrai que le loup, c'est un sujet très sensible. Ça déchaîne les passions et puis tout le monde a un avis là-dessus. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai voulu m'intéresser à ce sujet. Moi, l'objectif, c'était vraiment de documenter ce que je voyais et de photographier tout ça, évidemment sans aucune mise en scène. Et effectivement, le but, c'était aussi d'aller voir toutes les parties prenantes pour schématiser les deux clans, les pour et les anti. Donc c'est pour ça que je suis allée voir le côté régulation, Brigade Loup, Lieutenant de Louveterie, mais je suis aussi allée voir les photographes animaliers qui se passionnent pour les loups et qui sont opposés à ces opérations de régulation, en tout cas dans les conditions dans lesquelles elles s'opèrent actuellement. Je suis allée voir des associations. Tous les éleveurs ne sont pas contre la présence du loup. J'ai rencontré notamment une éleveuse qui me disait Oui, j'ai été attaquée, j'ai eu beaucoup de bêtes tuées, mais c'est le jeu. J'ai essayé vraiment de chercher les différents points de vue, mais en photo, la commande, c'était quand même de suivre la brigade loup, donc une mission de régulation. Parce qu'en fait, c'est ça qui est un petit peu visuel. La partie, on va dire, des pro-loups, ceux qui veulent vraiment que l'espèce soit sanctuarisée, on va dire, c'est un peu dur de dire ça, mais malheureusement, il n'y a rien à montrer. C'est plus facile de montrer la régulation que de montrer la volonté de ne pas entraver le développement de la population de loups. Sur le terrain, la coopération avec Olivier Thalès, le journaliste, ça s'est très bien passé, c'est vraiment génial de pouvoir être en binôme. Olivier peut prendre le temps de discuter avec les agents, moi je fais autre chose en photo, en fonction de ce que lui racontent les personnes interviewées, moi ça m'oriente aussi sur mes photos, c'est vraiment un reportage à quatre mains. Et ça c'est vraiment indispensable qu'on puisse... Faire coïncider le récit et la partie visuelle. Et c'est pour ça que d'ailleurs sur le terrain, avec Olivier, on est toujours en temble. À la fin de ce reportage, j'étais vraiment encore plus passionnée par la question. C'est complexe parce qu'en fait on se retrouve face à une grande détresse de la part de certains éleveurs et en même temps on est face à une espèce animale qui est absolument magnifique et effectivement on ne comprend pas pourquoi il faudrait aller... avoir une action sur cette espèce-là dans son milieu naturel. La seule certitude avec laquelle je suis repartie de ce sujet, c'est que je n'avais pas la solution. Souvent, autour de la question du loup, on peut entendre il ne suffit plus de manger de viande, il suffit de… Mais ce n'est pas aussi simple que ça. Et justement, en rencontrant toutes les personnes qui sont liées au loup au quotidien, J'ai pu comprendre à quel point c'est pas si simple. Malheureusement, j'ai pas trouvé de solution. Quand je rentre de reportage, là, j'ai 560 photos. Dans un premier temps, je les regarde toutes une par une et il y a un choix qui s'opère vraiment purement esthétique. Et ensuite, petit à petit, j'écrème en fonction de la pertinence, on va dire, informationnelle. J'ai besoin aussi d'avoir du paysage, j'ai besoin d'avoir des portraits, j'ai besoin d'avoir des détails. Le but, ce n'est pas s'ennuyer parce que dans un reportage, on ne va pas mettre dix photos de paysages. Donc vraiment, d'essayer de créer un ensemble cohérent et qui donne le plus d'informations possible sans perdre de vue l'esthétique des photos. Ensuite, effectivement, toutes les photos sont retouchées. Alors, c'est jamais enlever des choses ou rajouter des choses. Mais ça peut être des petites corrections en termes de luminosité. Ça peut être un petit peu de vignettage. Le vignettage, c'est quand on assombrit un petit peu les bords de la photo pour resserrer un petit peu le regard du spectateur sur l'élément qu'on a envie de mettre en avant. Là, dans ce sujet-là, où il y a pas mal de couleurs vertes, parce qu'on est beaucoup dehors, il y a beaucoup d'herbes, c'est compliqué à traiter les verts en photo. Il faut essayer de les homogénéiser. Voilà, donc je retouche. Toujours les photos que j'envoie en sélection finale. Et là, en sélection finale, sur les 560 photos, j'ai envoyé une cinquantaine de photos. Donc ça, c'est ma sélection finale. Et dans l'article, il en reste 8, je dirais, à peu près. Alors, à la suite de ce reportage, c'est vrai que maintenant, je suis beaucoup l'actualité liée au loup. Après, niveau photo, je sais que c'est quelque chose que je veux continuer, mais je n'ai encore pas trouvé totalement la manière de faire. Il faudrait que je trouve une méthode photographique un petit peu différente, je pense, pour continuer ce sujet. Je ne l'ai encore pas trouvé, mais il y aura une suite, je pense.

  • Speaker #1

    Vous venez d'écouter un épisode de L'Envers du récit. N'hésitez pas à le partager et à vous abonner à notre podcast. Les photos de Sophie Rodriguez pour ce reportage sur les traces du loup sont à retrouver sur le site et l'appli Lacroix. Vous trouverez le lien dans le texte de description qui accompagne ce podcast. L'Envers du récit est un podcast original de Lacroix.

Share

Embed

You may also like