- Speaker #0
Raconteurs et raconteuses, bienvenue dans La Machine à Écrire, le podcast de celles et ceux qui créent des histoires. Dans ce nouvel épisode, nous recevons les scénaristes du film Le Règne Animal.
- Speaker #1
Avec plus d'un million de spectateurs en salle, 12 nominations César et 5 statuettes remportées, Le Règne Animal a su mettre d'accord les critiques, le public et la profession.
- Speaker #0
À la croisée des genres, le film est d'abord le fruit de la rencontre entre une jeune scénariste en fin d'étude et un réalisateur-scénariste remarqué qui travaillait sur les mêmes thèmes. Avec eux, nous revenons sur cette collaboration et sur les différentes étapes de fabrication de ce long métrage à succès.
- Speaker #1
Notre premier invité est le scénariste et réalisateur Thomas Cayet, dont la carrière a décollé brusquement avec Les Combattants. A sa sortie, le film remporte les trois prix de la quinzaine des réalisateurs à Cannes, ainsi que le César du meilleur premier film. Par la suite, on retrouve Thomas au scénario de la série Trépalium, du film Ami Ami, et également derrière la caméra pour la série de science-fiction Ad Vitam sur Arte.
- Speaker #0
Alors qu'il participe au comité de lecture de la FEMIS, célèbre école de cinéma, il remarque le travail de fin d'étude de notre second invité, Pauline Munier. Le scénario parle déjà d'un père et d'un fils dans un monde où certaines personnes se transforment en créatures. Cela va être le point de départ d'une aventure cinématographique commune que nous allons revivre avec eux.
- Speaker #1
Alors, comment s'est faite l'écriture du règne animal ?
- Speaker #0
Comment le projet initial de Pauline a-t-il évolué après l'arrivée de Thomas ?
- Speaker #1
Comment s'est passée leur collaboration ?
- Speaker #0
Comment ont-ils mélangé les genres et les thèmes sans perdre le spectateur ?
- Speaker #1
Les films de genre ont-ils enfin trouvé leur place en France ?
- Speaker #0
C'est à toutes ces questions et à bien d'autres que nous répondons dans cet épisode.
- Speaker #1
Je suis Yannick Lejeune.
- Speaker #0
Et je suis Mike Cessnaud.
- Speaker #1
Générique.
- Speaker #2
Bonjour. Bonjour.
- Speaker #0
Bonjour.
- Speaker #1
Alors dans ce podcast, on a une question rituelle pour le commencer, c'est qu'est-ce qui fait une bonne histoire ?
- Speaker #3
Pour moi, ça doit passer par, je pense, l'émotion que je ressens dans les premières lignes, premières minutes de film ou premières écoutes. Ça m'arrive par exemple de commencer un bouquin ou de commencer un film ou d'écouter un album et de me dire, je l'arrête direct, ça ne me parle pas, mais des semaines plus tard ou des mois plus tard ou des années plus tard, là d'un coup, ça va me parler et je vais m'y projeter et donc ce sera une bonne histoire. Et toi Thomas ?
- Speaker #2
Elle est compliquée, je trouve, la question, parce qu'on a tout de suite envie, quand on nous demande ce que c'est qu'une bonne histoire, de faire une dissociation entre le fond et la forme, entre le récit et comment il est raconté, etc. Je trouve ça très difficile à faire. J'aurais tendance à dire que c'est quand les deux sont tressés de façon à ce qu'on n'arrive plus à faire la différence. Je crois beaucoup au début de l'histoire, au fait qu'on a un peu de patience du lecteur ou du spectateur. À ce moment-là, on bénéficie de cette patience et que c'est le moment d'envoyer une promesse. Donc, je dirais ça, la promesse, et puis l'espèce de miracle de rencontre entre un style et un sujet. Quand ça existe, il y a tout de suite de l'originalité, il y a tout de suite un truc qui appelle. On a envie de se dire que si on veut rester dans cet univers-là, il n'y a que là qu'on sera bien. Ça fait aussi écho à des émotions d'enfance de quand j'étais au cinéma. Je me souviens par exemple du début du film Le Dernier des Mohicans, je ne sais plus, je devais avoir 10 ans, de Michael Mann. Il y avait eu une panne de projecteur au bout de 4 minutes. Ça avait été le moment le plus long de ma vie. Je me suis dit qu'il faut absolument que ça redémarre, cette histoire, parce que je suis en mal de ce début d'histoire. Et paradoxalement, je me réjouis de cette panne parce que je reste avec le film. Ça a duré toute la vie.
- Speaker #1
donc c'est vrai que ça se joue beaucoup sur les débuts sur l'espèce d'appel d'air qu'on a au début d'une histoire à ce moment là du podcast d'habitude on a une deuxième question où on précise le genre qu'est-ce qui fait une bonne histoire pour tel ou tel genre sauf que dans votre cas précis c'est un film dans lequel il y en a plusieurs alors la première question ça serait 1 est-ce que vous pouvez nous pitchez votre film et deux est-ce que vous lui donneriez un genre précis ou s'il y en a plusieurs lesquels ça serait ?
- Speaker #2
moi je pitche pas le film c'est mort ça soit toi moi j'ai fait refait tu l'as fait je vais pas être original je veux dire ce que je dis dans ces cas là mais cela dit j'ai mis des mois à trouver une façon de le pitcher qui prenait moins d'une demi-heure On suit la relation entre un père et un fils dans un monde en mutation, où pour une raison mystérieuse, certains humains commencent à se transformer en animaux. Ça, c'est le pitch. Et les genres ? Alors, je me souviens plus de qui était cette citation, j'avais vu ça en exergue d'un bouquin de cinéma à la bibliothèque de la Cinémathèque française. Je crois que c'était Raoul Walsh qui disait ça, que tout... Bon film est un film d'aventure, mais c'est peut-être pas du tout lui. Et en tout cas, moi, c'est comme ça que je le vendais au moment de... Quand on a eu fini l'écriture et qu'on a commencé à chercher des partenaires.
- Speaker #3
C'est comme ça qu'on l'a écrit aussi.
- Speaker #2
Oui, avec cette idée que... Déjà, il y a un truc qui est formidable dans le film d'aventure, c'est que tous les genres y sont invités. Donc ça, c'est bien pour nous, qui avions envie de mêler plusieurs registres et plusieurs genres de récits. Et il y a un truc qui est bon aussi pour le spectateur, c'est que dans un film d'aventure, en théorie, en tout cas, on ne sait jamais à quoi s'attendre. Et ça, c'était aussi mon principe d'écriture. de se dire que chaque scène, ça doit être une porte vers un monde nouveau.
- Speaker #1
Alors, à la base, le règne animal, c'est une idée originelle de toi, Pauline ?
- Speaker #3
Oui, c'était mon travail de fin d'étude à l'UFMIS.
- Speaker #1
Et toi Thomas, tu t'es retrouvé à remplacer quelqu'un dans un jury de lecture.
- Speaker #2
Ouais.
- Speaker #1
Et c'est comme ça que vous vous êtes rencontrés. Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de ça ?
- Speaker #3
Bah ouais, en gros c'était en dernière année dans la formation scénario qui dure 4 ans à la féminisme. Chaque élève doit écrire donc à son... Son scénario qui sera sa carte de visite à la sortie, on va dire. Et donc, Thomas...
- Speaker #1
C'est un scénario de long ?
- Speaker #3
Scénario de long métrage, oui. Un scénario de long. On a toute l'année chacun pour l'écrire, ce qui est bien, parce que généralement, on a des temps beaucoup plus courts à l'école pour écrire des scénarios de long. Et donc là, je me rappelle que j'ai vu, quelques jours avant, qu'on passe devant ce jury, parce qu'en fait, trois fois dans l'année, en dernière année, il y a un jury de professionnels qui viennent un peu nous parler. Ils ont lu notre scénario avant, ils savent où on en est, et on discute en fait avec...
- Speaker #2
que voilà pour qu'ils nous aient oui d'ailleurs plus exactement parce que c'est vrai que j'ai tendance à résumer en disant c'est un jury c'est plus ils appellent ça un comité c'est de discuter et de permettre aux auteurs de rebondir c'est pas du tout de juger leur travail c'est pas l'examen de fin d'année non non non c'est censé être une discussion censée nous aider en fait et toi ton projet il était à ce stade là il était déjà terminé avec une histoire parce que je sais que vous l'avez beaucoup retravaillé alors en gros à ce stade là le scénario n'était pas terminé
- Speaker #3
Je pense que je devais avoir la moitié, je crois.
- Speaker #2
Il y avait toute l'histoire.
- Speaker #3
Il y avait toute l'histoire, mais en fait, c'est ça. C'est qu'il y avait un scénario pur, un peu plus de la moitié, et il y avait le reste qui était en traitement, en séquencier.
- Speaker #2
Mais en tout cas, pour répondre à ta question, il y avait un début, un milieu, une fin.
- Speaker #3
Oui, il y avait un début, un milieu, une fin. Il y avait Émile, François, les créatures, mais ça ne le vit, il n'avait vraiment rien à voir avec ce qu'on a fait ensuite avec Thomas. Et en tout cas, moi, je me rappelle que, j'avoue, la seule personne dont la vie m'apportait un peu pour ce comité, où je stressais, c'était Thomas, parce que j'avais vu Les Combattants plusieurs fois, j'avais vraiment beaucoup aimé. En fait, je me rappelle à l'époque où j'avais vu Les Combattants, c'était rare que je ressente ça devant un film, et donc j'avais eu ce que j'étais habituée à dire, une espèce de mini-obsession. Donc je l'avais regardé plusieurs fois et tout, j'aime bien faire ça avec les hommes, qui me plaisent. Et donc, je me demandais ce que ça allait donner à notre discussion avec Thomas. Et donc, Thomas est passé en dernier et j'étais bien stressée. Et quand Thomas a commencé à ouvrir la discussion avec moi à propos de mon scénario, c'était le premier moment pour moi dans le comité où il y avait une vraie discussion. Et ça a duré, je ne sais plus, peut-être une vingtaine de minutes. Mais je me souviens que c'était passionnant. J'avais ressenti un truc, je m'étais dit, c'est marrant, on se comprend trop bien, trop génial. Et j'étais sortie de là en me disant, ouais, c'est super, vraiment cool. Et toi,
- Speaker #1
qu'est-ce qui t'a marqué dans ce scénario ?
- Speaker #2
...script de Pauline. Le premier truc, c'est quelque chose qui est de l'ordre de la qualité de la langue, de la voix, en fait, qui est derrière l'histoire. J'ai senti quelque chose qui était original, qui était singulier, et qui me parlait... Il y avait quelque chose de familier, en fait, dans ce langage. Dans cette façon d'aborder les scènes, dans cette façon de faire parler les personnages. Je dirais pas que je me suis reconnu, mais il y avait un peu un truc de cet ordre-là. Je me suis dit, tiens, c'est marrant. Cette scène-là, je l'aurais écrite un peu comme ça. Il y a un truc qui me semblait familier. Et ça allait même un peu au-delà. C'est-à-dire qu'au bout de trois scènes, je me suis dit, tiens, voilà quelqu'un avec qui je pourrais écrire. J'avais vraiment pensé tout de suite ça. Et après, dans le contenu de l'histoire elle-même, il y avait des choses qui faisaient étrangement écho à des envies que j'avais. Donc Pauline me disait, à l'instant, il y avait un père et un fils. Une figure autour de laquelle j'étais énormément en train de tourner depuis quelques mois, enfin même depuis quelques années parce que je sortais d'une série qui racontait ça, qui racontait un rapport de parentalité. Et là, j'avais très envie d'explorer ça plus à fond dans un long métrage. Il y avait une petite touche de fantastique et c'était aussi ce que j'étais en train de chercher. Et par ailleurs, il y avait cette métaphore de l'hybridation homme-animal qui était vraiment au carrefour de plein d'envie d'écriture et d'envie globale, de choses qui m'intéressaient parce que je trouvais que c'était une façon hyper... Super simple et très direct d'évoquer le rapport qu'on a à notre environnement, aux autres êtres humains, mais aussi à ce qui est non humain autour de nous, à tout ce qui est vivant autour de nous. Donc voilà, il y avait un système de signes qui m'attirait. Et puis cette voix qui portait ce récit que je trouvais... J'ai eu l'impression qu'on pouvait s'entendre. D'ailleurs, pour être totalement transparent sur ce comité, il était même un peu gênant ce comité.
- Speaker #3
Il était extrêmement gênant Thomas. Parce que... Il était très très gênant.
- Speaker #2
Parce que je parle en dernier, je suis le troisième à m'exprimer sur le sujet, je me lance et je dois m'arrêter genre dix minutes après, après une avalanche. de compliments et il y a un silence et il y a un des membres du jury qui se rendent vers moi et qui fait mais c'est quoi c'est une proposition qu'est-ce qui se passe et nous on est un peu comme ça partout
- Speaker #1
Pauline quand tu as l'idée initiale Qu'est-ce qui t'amène à écrire ce scénario ?
- Speaker #3
Alors moi, depuis que j'étais à la Féminis, ça faisait longtemps que je tournais autour du fantastique, en l'incorporant à chaque fois dans un monde comme le nôtre. J'essayais vraiment... C'est Thomas qui a cette expression, qui me l'a dite assez rapidement après notre rencontre. Mais j'essayais de créer une histoire où il y aurait du fantastique l'air de rien. J'avais plusieurs obsessions qui tournaient depuis quelques années. Et le point de départ du Rennes Animal, qui s'appelait donc Créature à l'époque, c'était le tout. Tout premier point de départ, la maladie mentale. Mais de manière très vaste et tout, parce que c'est des questions qui m'intéressent, qui me touchent. Bref, ça fait partie de mes obsessions, la marge notamment liée à la santé mentale. Et j'avais envie d'en parler. J'avais envie aussi d'écrire... un monde fantastique et ça m'est ça m'est venu comme ça l'idée qu'Emile serait une créature qu'en fait dans ce monde il y aurait des créatures mais évidemment c'est pas arrivé en une seconde c'est des choses qui ont tourné dans ma tête pendant longtemps que j'ai essayé autrement pendant quelques années et simplement là à ce moment là c'est venu comme ça et il s'avère que ça a fonctionné et que je l'ai senti comme ça et alors il y a votre rencontre vous
- Speaker #1
êtes là tous les deux, vous vous êtes encore des sourires donc ça a eu l'air de bien se passer et nous on s'est posé la question de comment on fait quand on est un scénariste qui est déjà réalisateur, a reconnu pour aller voir une étudiante en disant, j'aimerais bien écrire sur ton histoire et comment on fait quand on est étudiante pour pas se dire, là il y a eu, Luc Besson a été débouté dans l'histoire Eiffel il y a deux, trois jours. La scénariste Caroline Bongrand a raconté tout son parcours. Comment on fait pour pas dire, oh là là... Est-ce qu'il ne va pas m'arracher mon histoire ?
- Speaker #3
Évidemment, il faut faire attention. Quand on est scénariste, quand on est une jeune femme, ça c'est clair. Là, au départ, je ne me suis pas dit ça. Déjà, le premier truc, c'est que quand Thomas m'a appelé et qu'il m'a dit qu'il voulait qu'on se rencontre avec son producteur, je lui ai dit, simplement, mon année se termine dans un mois et j'ai envie de terminer ma version avant qu'on s'y mette. Déjà, il y a eu zéro problème. Il m'a dit, oui, bien sûr, évidemment, il n'y a pas de problème. Donc, c'est ce que j'ai fait. Et après, on ne s'est pas mis à écrire tout de suite. On a appris à se connaître parce que même si on avait eu tous les deux... une intuition du fait que vraiment on pourrait écrire ensemble, ça pouvait ne pas fonctionner, il fallait aller voir plus loin que ça. Et donc, pendant quelques mois, quelques semaines, c'était l'été 2019, on a vu des films enceintes, on s'est échangé des idées, on a complètement, on a tout remis à plat par rapport au scénario, on s'est échangé des tas et des tas de pistes. Et un truc que j'ai ressenti moi et que je ressens toujours maintenant, c'est qu'il y avait vraiment un rapport d'égalité. Même si Thomas avait déjà fait un long, une série, etc. et que moi, je sortais à peine de l'école, pour moi, c'était vraiment un rapport très égalitaire et du coup, hyper intéressant. On ne sait de rien se cacher, on se disait tout ce qui nous passait par la tête. Et donc, parfois, ça entraînait des journées qui pouvaient être... À la fin, on était un peu épuisés parce que vraiment, on laissait tout sortir. Et donc non, c'était au contraire... Enfin, c'était vraiment... C'était passionnant. Il y a aussi eu des moments de creux, mais c'est normal dans l'écriture parce que parfois, on est bloqué. C'est une phase qui arrive souvent. Et après, ça a continué comme ça. Pour moi, en tout cas. Qu'est-ce que t'en penses, toi ?
- Speaker #2
Déjà, je pouvais me mettre à ta place. C'est-à-dire que le... J'ai fait la même formation quelques années plus tôt, donc je vois ce que c'est, sortir de la FEMIS ou d'une école de cinéma quelconque, ou en tout cas démarrer une carrière de scénariste et d'avoir un premier écrit. J'étais assez préoccupé, inquiet de ça, que ça se passe bien et que ce ne soit pas l'histoire d'une dépossession. Après, j'ai essayé... Alors, il y a eu deux trucs. D'une part, c'est qu'on a effectivement pris le temps de se mettre ensemble au travail, parce qu'on a dû se rencontrer en mars ou avril, un truc comme ça.
- Speaker #3
Enfin, début mai, je crois. On s'est rencontrés.
- Speaker #2
Ah ouais ? Ouais. Bon, en tout cas...
- Speaker #3
En avril, non,
- Speaker #2
mais par exemple. Ouais, je crois que c'était en avril. Et en tout cas, on ne s'est pas mis au boulot avant vraiment. Enfin, on a commencé vraiment à réécrire en septembre. Donc, il y a eu du temps entre les deux. L'autre truc, c'est que j'ai essayé d'être direct avec Pauline sur le fait que le film que j'envisageais de faire... D'une part, on ne savait pas ce que c'était. Et le seul truc dont on pouvait être à peu près sûr, c'est que ça ne serait pas ce qu'elle avait écrit. Moi, ce qui me faisait le plus peur à ce moment-là, c'est de me dire, si tu tiens absolument à ce qui est dans ce scénario, je ne suis pas la bonne personne pour le réaliser. Je peux peut-être t'aider si tu veux en faire un film. Mais en tout cas, le film que je veux faire, même moi, je ne sais pas encore ce que c'est. Ce que j'ai compris, c'est qu'en le lisant, c'est que c'était possible qu'on travaille ensemble et qu'il y avait là-dedans des idées qu'on peut retravailler, etc. Je n'ai pas non plus sauté sur un récit, sur une histoire précise. D'ailleurs, ça a été assez long. On a repris le travail en septembre, c'est parce que les réunions qu'on avait eues avant avaient servi effectivement, comme disait Pauline, à détricoter... Moi, je posais énormément de questions à Pauline pour savoir s'il n'y avait pas des choses à côté desquelles j'étais passé, en termes de sens et en termes de potentiel d'histoire, de potentiel de scène, etc. On se posait beaucoup de questions sur toutes les dimensions du scénario, et quand on a vraiment... On a commencé à travailler en septembre, on a redémarré from scratch, ce qui n'était franchement pas easy. Je pense ni pour Pauline, tu me confirmeras ou pas, mais ce n'était pas facile pour Pauline parce qu'elle passe d'un truc où il y avait quand même 100 pages de scénario écrit à zéro. Donc ça, ce n'est quand même pas hyper...
- Speaker #3
Il y a à se reprendre le doute du scénariste.
- Speaker #2
Exactement. La page blanche. Et donc on redémarra ça et ce n'était pas non plus très confortable pour moi parce que ça me donnait d'un coup le rôle de... Il va falloir que ça vienne de moi aussi. C'est-à-dire que ce n'est pas comme si on avait déjà toutes les clés dans un premier texte et maintenant il suffit juste de rajouter des briques, etc. Il fallait redémarrer à zéro et je sentais bien, même si on ne se l'est jamais dit comme ça, mais il fallait quand même que ça vienne de moi ce premier jet, parce que Pauline en gros avait déjà fait son premier jet. Donc c'était à mon tour. Donc voilà, et c'est vrai que de ce que... Là, je rejoins ce que tu disais tout à l'heure, c'est-à-dire que du coup, ça créait forcément un rapport qui est plus équitable.
- Speaker #3
et qui aussi c'est pas plus honnête mais en tout cas on se met tous les deux enfin voilà comme disait Thomas il fallait que son premier échec vienne et donc ça se fait pas en deux secondes il faut se sonder à l'intérieur et mettre ses tripes sur la table quoi donc c'est aussi un état un peu de fragilité et je pense qu'on a pas eu peur d'être fragile comme ça l'un avec l'autre pour trouver cette nouvelle histoire enfin cette nouvelle manière de raconter une histoire ça racontait quoi l'histoire ?
- Speaker #1
d'avant la tienne ?
- Speaker #3
Il y avait Émile, il y avait François, mais François était un personnage très secondaire. La mère d'Émile était...
- Speaker #2
Pour ceux qui ne suivent pas, Émile est le fils, François est le père.
- Speaker #3
Voilà. Émile, donc, était déjà une créature, c'était un secret entre lui et son père, et surtout, la mutation se manifestait de manière très différente, c'est-à-dire qu'en fait, c'était par crise, c'était quelque chose de cyclique. Quand les émotions d'Émile, par exemple, prenaient le pas sur sa raison pour aller vite, c'est là qu'il se mettait à muter.
- Speaker #1
C'est un peu un loup-garou, quoi.
- Speaker #3
Ça s'irait plus du côté du loup-garou, même si je n'avais pas envie de faire du loup-garou. Je cherchais, je pense. Mais à chaque métamorphose, il devenait un peu plus, un peu plus. Il y avait encore des créatures qui avaient des formes diverses. La mère d'Emile était à l'hôpital, mais pareil, elle était assez secondaire. Et l'autre personnage principal était Fix, mais qui n'était pas du tout un oiseau à ce moment-là. Fix qui est donc un personnage du règne animal qui devient un ami d'Emile. Et puis surtout, il y avait un truc un peu de géméléité entre Emile et Fix. qui avait plus ou moins la même mutation. Ça tournait pas du même côté que maintenant le règne animal. Et surtout, c'était beaucoup plus ma version à hauteur d'ado. C'était vraiment les ados, les personnages principaux. Pour le coup, là, j'aurais pu dire, ah bah oui, le genre, c'est du coming of age, presque purée dure. C'était plus à ce niveau-là.
- Speaker #1
Vous avez commencé à travailler ensemble. Vous avez, toi, t'as sorti ta version.
- Speaker #2
Alors non, non, en fait ça s'est pas passé comme ça. Le premier truc c'est d'essayer de comprendre, parce que moi à ce moment-là j'ai une liste de... Je me fais une liste pour moi-même de choses d'intention, de choses que j'aimerais voir figurer là-dedans, et aussi d'impossibilités, c'est-à-dire de choses qui étaient dans le scénario de Pauline et qui me parlent moins. Par exemple, sur cette question d'adolescence, l'âge des personnages me posait un problème, parce que j'avais pas très envie de parler de... Ils avaient autour de 13 ans, c'était...
- Speaker #3
Non, non, c'était plus qu'ils avaient 15. Ils avaient 14 ans.
- Speaker #2
Au moins, on était dans le cœur de l'adolescence, en tout cas, on était dans ce débat du cœur de l'adolescence. Et ça, rien que comprendre que ce n'était pas ça mon envie, ça a pris déjà du temps. Donc, il y a eu beaucoup de choses comme ça. Et ensuite, quand j'ai dit qu'il fallait que j'abonde, que ça vienne de moi, cette partie du travail, ça a pris la forme d'un synopsis, en fait. Une proposition d'histoire, en fait. C'était ça qui a été le point qui a été circonse.
- Speaker #3
C'est surtout un élément déclencheur.
- Speaker #2
On s'était vu pendant des semaines en décortiquant les thèmes, le pourquoi du comment, est-ce que la mutation, elle est cyclique ou est-ce que c'est quelque chose qui est progressif ? Qu'est-ce que ça éclaire ? C'est quoi la métaphore de fond, etc. ? On peut en parler éternellement, mais il y a un moment où il faut une histoire. Et ça, ça a été compliqué. Mais il y a un moment, en tout cas, au début du mois de novembre, où ça arrivait.
- Speaker #3
Mais avant ça, ça a été très difficile. Avant ça,
- Speaker #2
ça a été difficile. Il y a eu des moments de longues gênances.
- Speaker #3
Ouais, de malaise.
- Speaker #2
De malaise, ouais.
- Speaker #3
On avait un aise à dire non, mais clairement. Parce que tout le temps, on s'était beaucoup dit.
- Speaker #1
Oui,
- Speaker #2
parce qu'en fait, on a beaucoup analysé ce qu'on avait envie de faire, mais il n'y avait pas de...
- Speaker #1
Et c'était un malaise lié à un blocage ou au fait que vous arriviez à des points de tension ?
- Speaker #2
Non, c'est du blocage.
- Speaker #3
C'est du blocage, mais c'est pas de la tension entre nous. Je pense que c'est de la tension intérieure aussi, parce que... Non,
- Speaker #2
mais c'est très clair. C'est ce que tu as appelé tout à l'heure la bâche blanche. C'est ça, c'est-à-dire qu'il y a un moment où il faut pouvoir...
- Speaker #3
Qu'est-ce qu'on fait, quoi ? Qu'est-ce qu'on écrit ? Est-ce qu'il y a un film ? Est-ce qu'en fait, on va vraiment écrire ensemble ? Enfin, vraiment, tout était... C'est quoi,
- Speaker #0
vous faisiez quoi, vous ?
- Speaker #3
Eh ben, en fait, on s'est pas vus pendant trois semaines, je crois. Je crois qu'on a fait une coupure, non ? Pendant deux semaines ?
- Speaker #2
T'exagères, c'est pas trois semaines.
- Speaker #3
C'est pas trois semaines ?
- Speaker #2
Non, ça doit être moins que ça. Mais c'est possible que ce soit même dix jours et que ça nous ait semblé long après parce qu'à cette époque-là, on se voyait.
- Speaker #3
On se voyait tous les jours.
- Speaker #2
Mais même si c'était peut-être dix jours, j'en sais rien. Et en tout cas, un matin, je me suis levé et c'est sorti, quoi.
- Speaker #3
La vie d'art du mat, c'était génial.
- Speaker #2
Ouais, j'ai appelé mon épouse. Je lui ai dit, je crois qu'il faut que je te lise ça. Dis-moi si... Si je déraille ou s'il y a vraiment un film, et ça faisait une petite page, une vingt-trente lignes, et il y avait un déroulé avec l'idée qu'ils doivent déménager parce qu'il y a un centre qui vient d'être construit, l'idée qu'il va y avoir un problème avec le convoi et que...
- Speaker #3
L'idée de l'accident, pour moi c'est ça qui a changé.
- Speaker #2
Et du coup la disparition, qui dit disparition, dit quête de la mer, donc ça c'était...
- Speaker #3
C'est super, je ne m'en fous pas dans l'histoire.
- Speaker #2
Surtout, à cet endroit-là, c'est marrant parce que ça s'est décousu tout seul en l'écrivant, le fait d'avoir cette espèce de structure en X, c'est-à-dire d'avoir un personnage qui est très fort de ses certitudes. au début, qui est François, et qui va petit à petit mettre un genou à terre à mesure que son fils, lui, va prendre sa puissance. Et du coup, les deux personnages se croisent. Et donc, tout le récit devient structuré autour de ça, autour de la distance qu'il y a entre l'un et l'autre, et l'impression qu'on peut avoir qu'ils sont ensemble ou pas. Une des premières intentions que j'avais, c'était de donner une place première au personnage du père. Donc du coup, on en a discuté, j'ai appelé Pauline, je lui ai lu les...
- Speaker #3
À 8h du matin, j'avais mon cas.
- Speaker #2
T'exagères encore. Et là,
- Speaker #3
pour le coup, je n'exagère pas du tout, parce qu'à l'époque... Voilà, merci. On est d'accord.
- Speaker #2
Et je lui lis du coup le... l'histoire et voilà, on a été très convaincus et à partir de là, on a fait un travail plus classique de va-et-vient entre nous, de texte, de structure et de version.
- Speaker #3
C'est ça.
- Speaker #1
La question du père dont tu viens de parler, la relation père-fils, on l'a déjà un peu dans les combattants. Oui,
- Speaker #2
il est très absent de l'histoire, pour le coup.
- Speaker #1
Et toi, je crois que quand tu as écrit Le règne animal, tu venais d'être papa. Ouais. Donc c'est un truc qui t'habitait.
- Speaker #2
Je venais d'être papa, je l'étais en tout cas, c'était ma nouvelle condition depuis quelques années.
- Speaker #1
C'est un truc qui t'a évité. Toi, Pauline, comment tu reçois cette montée du père dans l'histoire et ce questionnement sur le lien père-fils qui est quand même très présent ?
- Speaker #3
Moi, ça m'allait très bien parce que... Les thématiques familiales, les relations d'un enfant avec son parent, que ce soit la mère, le père, c'était des choses qui m'habitaient depuis. longtemps, mais en essayant de me mettre à la place du parent, mais sans tout à fait y arriver, j'étais quand même plus à l'aise pour écrire Émile, on va dire que pour écrire François, par exemple, à l'époque de la V1, et donc, pour moi, cette envie de Thomas de donner une place à François, d'en faire le deuxième personnage principal, c'était génial, en fait, je pense qu'on s'est bien complétés là-dessus, et moi, ça m'allait très bien de filer une histoire familiale, de parentalité, parce que j'en avais envie, mais je savais pas forcément comment faire, enfin, comment l'aborder, en fait.
- Speaker #2
Mais disons qu'il y avait aussi, je me souviens très bien, des débats au tout début, sur la base de ton Premier script, mon leitmotiv c'était faut externaliser le conflit, c'est-à-dire que le conflit était très intérieur, du personnage d'Emile il y avait comme ça un peu un personnage de cocotte minute et on se demandait quand est-ce que ça éclate, quand est-ce que ça éclate etc. Ce qui est un type de récit. Là moi j'avais quand même le sentiment que pour que le film délivre son ampleur il fallait qu'il y ait quelque chose qui soit entre deux personnages et que ça circule avec un autre personnage. Et c'est vrai que ça a été un soulagement de voir que le père pouvait occuper une place prépondérante, puisse devenir un protagoniste, parce que d'un coup, il y avait évidemment la quête du fils, il y a la possibilité du secret, ce qu'on a découvert par la suite, parce qu'à cette époque-là, ce n'était même pas encore en place, et qu'Emile découvre sa propre mutation pendant le film, du coup, doivent mentir à son père. Il y a la question de comment un regard, le regard qu'on pose sur son enfant change, et c'est aujourd'hui ce qui structure vraiment le film. Il y a la question de comment ces deux personnages réagissent différemment à une société qui bascule, ce qui est encore un autre sujet qui permet de... de citiser aussi le propos et de l'élargir à tout l'environnement des personnages. C'était la porte qui manquait pour que d'un coup, le film puisse devenir aussi plus accessible, mais aussi plus spectaculaire, aussi plus...
- Speaker #3
Presque plus populaire,
- Speaker #2
j'allais Du coup,
- Speaker #1
vous avez posé ces sujets avant d'écrire les scènes qui les matérialisent ou c'est à l'écriture où vous dites finalement, il y a ce sujet qui est important qu'on doit aller chercher. Quel sujet ? Quand tu parles du rapport père-fils ou de comment la société réagit... Non,
- Speaker #2
c'est les sujets dont on parlait à bâton rompu déjà depuis...
- Speaker #3
Oui, oui, oui. Depuis plusieurs mois.
- Speaker #2
Et c'est juste que là, d'un coup, ça a pu éclore de manière organique. C'est-à-dire que d'un coup, on se dit, OK, il y a un gène mutant qui va changer le corps de cet adolescent. Donc ça, ça permettra de parler du passage à l'âge adulte, de la fin de l'adolescence, etc. Au-delà du personnage d'Emile, ça va contaminer la relation à son père dans les deux sens. C'est-à-dire que le père va évoluer, le fils va évoluer. Ça, ça permet de parler de la famille, et au-delà d'eux, ce gène mutant va transformer la société, le monde, polariser, pourquoi pas, cette petite ville entre ceux qui ont un instinct de rejet et ceux qui ont un instinct d'accueil, et donc ça, ça permet aussi de traiter du côté plus environnemental et politique de l'histoire. D'un coup, cet entonnoir, parce qu'on parlait beaucoup d'entonnoir,
- Speaker #3
c'est un très petit cercle de récits de l'état du monde,
- Speaker #2
et d'élargir au fur et à mesure, c'était possible.
- Speaker #0
Est-ce que vous avez eu un questionnement sur la multiplicité des thèmes, justement ? Parce que du coup, on le voit quand il y a des gens qui voient le film, qui ça leur a beaucoup plu, et ils disent j'ai vu une allégorie de ça, et d'autres qui disent moi j'ai pas du tout vu ça, j'ai vu autre chose. Est-ce que vous avez eu peur d'avoir plein de thèmes comme ça qui se superposent, que ça dissolve le propos ?
- Speaker #3
On avait envie en tout cas, je crois que la métaphore puisse être interprétée... différemment par chacun, qu'elle puisse parler à chacun. En tout cas, moi, ça me va très bien que les spectateurs puissent s'approprier le thème. Mais on ne voulait pas non plus se dire, les spectateurs peuvent s'approprier le thème, donc on n'a pas à le bosser. Chacun verra un peu ce qu'il a envie. Au contraire, on est passé par pas mal de phases, je crois, en disant, ça représente la maladie mentale, ça représente la marge à ce niveau-là, ça représente ci, ça représente ça. En fait, on a essayé d'un peu écumer tout ce que ça pouvait vouloir dire. en construisant quand même un récit, une structure très au taquet, étant donné que c'est hyper dense.
- Speaker #1
C'est pour ça qu'il n'y a pas d'explication ? Est-ce que c'est la métaphore ?
- Speaker #3
Dès le départ, on voulait...
- Speaker #2
En fait, c'est le premier endroit où ça a posé une question. C'est-à-dire, vu que la mutation, elle était en train de devenir autre chose, elle devenait, dans ce qu'on était en train de poser, elle était en train de devenir une maladie qui touchait mystérieusement des gens dans le monde entier. donc d'un coup on n'était plus dans une seule interprétation métaphorique ou purement fantastique On était dans un truc où on le racontait de manière réaliste en disant, voilà...
- Speaker #3
C'est une maladie.
- Speaker #2
Aujourd'hui, il y a, je sais pas, il y a la grippe espagnole, demain il y a la mutation en animaux. À partir du moment où c'est posé comme ça, les interprétations, elles peuvent être multiples. On a fait en sorte de les nourrir en gardant la possibilité qu'elles puissent être interprétées, quoi. Moi, aujourd'hui, j'avoue que c'est une des plus grandes fiertés quand... A la suite d'une projection, le public nous pose des questions sur... Effectivement, des gens, ils voient quelque chose de la crise migratoire, d'autres, du sort qu'on réserve effectivement aux pathologies psychiatriques en France. Mais on a eu des débats sur les transitions de genre, on a plein de choses, en fait. Et je pense que c'est à la force des histoires fantastiques. Après, on parle quand même toujours de la même chose, c'est-à-dire comment un corps social est capable ou pas d'absorber la différence. Ça, c'est quand même le sujet de fond. Je ne vais pas dire qu'on n'était pas surpris de la diversité, mais on est très heureux en tout cas, de la diversité des interprétations, je veux dire.
- Speaker #1
Ça, c'est pour la diversité des thèmes, mais il y a aussi une diversité de genre dans le film. Il y a des moments où il y a une course-poursuite qui est proche d'un thriller, un film d'action. Il y a des moments de comédie. Moi, j'ai pleuré plusieurs fois. Comment vous avez géré ça pour que la structure tienne debout ?
- Speaker #3
Déjà, en fait, on bossait ça en parallèle. D'un côté, la structure qui existait à un moment sur une frise Excel gigantesque créée par Thomas, ce qui m'impressionnait beaucoup. J'en rappelle que toi, parfois, au départ, quand on était à ce moment de la frise Excel pour gérer la structure au millimètre, parfois, tu me commandais des scènes, des trucs, et j'allais t'en envoyer 3 à 4 sur un sujet. Parfois, on s'en envoyait chacun, on s'en échangeait. En fait, on faisait les deux en même temps, un peu. Structure et écriture de scènes. Et je pense que c'est aussi comme ça qu'on a trouvé notre équilibre entre comédie, thriller... ...aventure, horreur... Je suis pas sûre qu'on soit déjà dit Tiens, cette scène, il faut l'écrire en comédie. C'est pas vraiment comme ça qu'on bossait. C'est que... Dis-moi, c'était un autre vécu. Dis-moi, c'est pas comme ça que tu l'écrives.
- Speaker #2
Pour moi, c'est... Comment dire ? En fait, quand tu dis le mot équilibre je me dis que c'est vraiment tout ce qu'on a essayé de ne pas faire. C'est-à-dire ? De chercher un équilibre entre les...
- Speaker #3
Ah bah si ! Ah non, entre les genres ! Non, non, un équilibre, c'est malgré tout.
- Speaker #2
C'était...
- Speaker #3
Non,
- Speaker #2
non, du tout. C'est juste que... pour être... Moi j'ai l'impression...
- Speaker #3
C'était pas un gros scénario je voulais dire, c'était pas comme ça.
- Speaker #2
Moi j'ai l'impression qu'en tout cas, quand je disais tout à l'heure que La Voix de Pauline m'avait intéressé dès les premières lignes, dès les premières scènes, c'est qu'il y avait déjà ça. C'est-à-dire que moi, mon premier film, c'est un peu pareil. On est dans un monde réaliste avec des choses qui se passent qui sont de l'ordre du fantastique ou de l'anticipation et c'est absorbé sans que le film devienne un monochrome de film de genre. et ça c'est vrai que c'est une hantise totale pour moi mais pour toi mais du coup on s'est dit dès le début que ça ne devait pas être ça donc qu'est-ce qui nous...
- Speaker #1
Pourquoi une hantise totale ? C'est vrai que dans Les Combattants il y a une partie presque comédie romantique il y a un film de survivaliste il y a un buddy movie,
- Speaker #2
il y a plein de choses Je suis incapable de l'expliquer, c'est une question d'appétence sur Les Combattants j'avais très clairement envie assez tôt dans l'écriture que le film traverse plein d'expériences différentes
- Speaker #3
Comme tu disais tout à l'heure que ça ouvre à chaque fois une nouvelle porte
- Speaker #2
Je parlais de ce début de la vie j'ai l'impression qu'on baigne dans des bains très différents d'un jour à l'autre, j'avais envie que le film soit à la hauteur de ça, ça m'intéressait et là j'avais envie de pousser ce truc là et comme c'était présent aussi dans ce qu'avait écrit Pauline c'est un truc, je pense qu'on en a jamais discuté de chercher un équilibre ou une moyenne entre les différents genres non ça pour le coup,
- Speaker #3
on ne s'est jamais dit ça on ne s'est jamais dit ça comme ça au contraire même,
- Speaker #2
j'ai eu l'impression qu'au fur et à mesure de l'écriture dès qu'il y avait une possibilité, on allait à fond dedans donc il y a eu des scènes, on y allait mais je me tiens de discussion avec toi en se disant il faut qu'on chiale allons-y au fond dans le mélo on est content on a envie de pleurer c'était plutôt comme ça les scènes d'action on y allait à fond dans le sanglant on n'a pas retenu grand chose on y allait à fond parce qu'on avait l'impression que comme on se sentait bien sur les personnages sur le point de vue etc
- Speaker #3
On écrivait ce qu'on avait envie d'écrire et on se disait, je pense aussi, en tant que spectateur, j'ai envie de voir ça. C'est ça qui nous tenait.
- Speaker #2
C'est des goûts de cinéma. Par exemple, j'adore Bong Joon-ho. Je trouve que c'est un truc qui est hyper réjouissant dans son cinéma. Je pense que le fait qu'on soit bien avec ses personnages permet une plasticité, une flexibilité. tombe et ça bouge énormément d'une scène à l'autre. On peut avoir une scène hyper tragique qui devient d'un coup totalement burlesque avant de virer vers le thriller et on n'a pas de problème avec ça parce qu'on est aux premières loges de ce que les personnages ressentent et que la vie parfois elle est aussi brutale que ça. Donc ça s'y prêtait fort et du coup c'est vrai qu'il y a... Bon je réagissais tout à l'heure au mot équilibre quand tu dis équilibre mais c'est vrai qu'on n'a pas du tout cherché d'équilibre j'ai l'impression.
- Speaker #3
Ouais mais on s'est mal compris alors. Parce que je trouve quand même que le scénario est très déséquilibré d'une certaine manière. Dans son déséquilibre il est équilibré. Ce que je veux dire c'est que je me Je me souviens par exemple qu'il y avait des choses, justement, le fait qu'on puisse rigoler avec des ados qui disent n'importe quoi, ensuite qu'on se mette à chialer dans la forêt, etc. Ça pouvait faire peur, par exemple, à l'étape d'après avec les diffuseurs et tout. Pourtant, tout le monde est tombé dans le scénario. Et c'est là que je trouve qu'on a quand même réussi à créer un monde, peut-être que je devrais le dire comme ça, mais où...
- Speaker #2
Là où ça a posé des questions, c'est sur l'étiquetage du film. C'est que très rapidement, on me demandait, mais alors c'est quoi ? J'avais mes réponses, je disais c'est un film de personnages. Est-ce qu'il y a une réponse de Normand ? Ou alors je dis, c'est un film d'aventure, ce qui permettait de collecter tous les registres. Mais en revanche, sur le film lui-même, que ce soit au tournage ou au montage, ça n'a jamais posé le moindre problème. Au contraire, ça a revitalisé constamment l'histoire. Et vu que c'est quand même ça, au fond, ce que ça raconte, c'est d'ailleurs une anomalie qui rend un monde plus vivant, j'avais l'impression que...
- Speaker #3
On sait souvent que le scénario doit muter.
- Speaker #2
Le film doit être hybride et le film doit muter.
- Speaker #0
Est-ce que le côté très réaliste du film, son naturalisme, le fait que c'est des personnages comme tout le monde, est-ce que justement ça permet ça ?
- Speaker #2
Moi je crois.
- Speaker #3
C'est le fameux fantastique l'air de rien aussi.
- Speaker #2
Je crois que c'est ça qui permet qu'on ait envie d'y aller aussi parce qu'on se sent accueilli dans un univers qui nous ressemble et on s'amuse à voir comment tout se met à glisser ou tous les rapports sont bouleversés, etc. Là où quand on démarre, quand je disais tout à l'heure comme... dans le monochrome, soit en projetant l'histoire dans un futur, soit en projetant directement l'univers et la forme dans un espace qui est plus théorique, le risque, c'est d'avoir cette espèce d'écran, cette espèce de distance à ce qu'on parle, en se disant, OK, maintenant, on va vérifier si toutes les règles sont respectées, si on déborde pas. Là, tout devenait possible, et c'est ça qui était hyper réjouissant.
- Speaker #1
Alors, le film, il a marqué les gens parce qu'il est assez singulier pour toutes ces raisons, mais est-ce que vous, dans votre tête, vous aviez des modèles ? Est-ce qu'il y avait des références ? Vous vous disiez, en fait, je veux aller vers ça.
- Speaker #3
Alors, je dirais pas des modèles, mais oui, il y avait des films qui nous tournaient dans la tête, ça c'est clair. Des livres aussi. Il y avait pas mal de films de Miyazaki. Il y avait Clint Eastwood, Un monde parfait, Running on Empty, qui revenait beaucoup dans nos discussions. Après, on s'échangeait aussi, c'était bien parce qu'on s'échangeait pas mal de bouquins, de musiques, etc. Et il y avait tout ça qui nous nourrissait. Il y avait, comme Thomas l'a dit, aussi les films de Bong Joon-ho, mais il n'y avait pas... on se disait pas tiens on veut faire du Bong Joon Ho on veut faire du Miyazaki mais on s'est beaucoup nourri pendant cette période là c'était bien mais généralement on se faisait aussi découvrir des trucs on se rendait compte aussi qu'on aimait par exemple je sais pas la même musique de Placebo qui date d'il y a 20 ans et puis on l'aime tous les deux et donc tiens on va l'écouter cette semaine d'écriture il y avait ça aussi qui nous nourrissait et qui devenait qui faisait partie du coup des références mais en fait il y en a plein il n'y en a pas qu'une la première ayant été je pense Black Hole
- Speaker #2
Black Hole ouais qui était un peu un truc où il y a un peu de mutation une BD de Charles Burns Voilà qu'il y a un grand classique de la BD américaine avec des ados qui mutent, qui mutent bizarrement, d'ailleurs on ne sait pas trop en ils ont des bubons, des...
- Speaker #3
Des queues, des trucs chelous.
- Speaker #2
Des queues de cochons, des cornes de... Et oui, il y avait des références au niveau du genre, donc on a parlé du cinéma de Bong Joon-ho, celui de Miyazaki, on a parlé de La Mouche, ça nous est arrivé de parler de La Mouche, parce que c'est un des rares films qui traitaient la question de la mutation comme quelque chose de progressif et de... scientifique, c'est-à-dire de crédible, pas justement comme une crise de loup-garou ou comme quelque chose de magique. Ils ne sont pas très nombreux, les films à le faire, donc celui-là, je me souviens qu'on en parlait. Et après, sur le rapport père-fils, oui, c'est vrai, il y avait Un Monde Parfait, il y avait A bout de course, il y avait ce film de Ozu auquel je revenais souvent, qui était Il était un père, et voilà, on a parlé de pas mal de choses. Là,
- Speaker #0
tu parlais de l'influence de bandes dessinées. Vous avez travaillé avec un auteur de bande dessinée, je crois, à un moment donné, au moment du storyboard, quelque chose comme ça ?
- Speaker #2
Alors non, c'est bien avant. C'est vraiment, en fait, c'est le moment où le tournage a commencé progressivement à basculer dans la prépa. Donc ça, c'est fin 2020. C'est un moment où j'ai contacté Frédéric Petters, qui est un auteur de BD suisse, et on a travaillé à distance. Je lui ai envoyé le scénario et il a travaillé à l'élaboration d'un bestiaire. Je faisais des retours là-dessus, je m'envoyais des références. C'est marrant parce que je me souviens que la première image de fixe que j'ai reçue, c'était Brian Molko de Placebo justement. Je lui avais envoyé ça comme photo en disant voilà, j'aimerais bien qu'il ressemble à Brian Molko.
- Speaker #3
On avait fait un croisement entre Brian Molko et quelqu'un d'autre je crois.
- Speaker #2
Alors oui, après il y a eu une phase effectivement où c'était... Guillaume Depardieu oui voilà c'était ça il y a eu plein de versions de cet homme oiseau et donc lui il bossait et je lui faisais des gros briefs sur comment la mutation pouvait tiens est-ce que c'est pas intéressant qu'elle surgisse d'abord par un bras ou de l'intérieur vers l'extérieur est-ce qu'il n'y a pas un bec qui éclate le visage en deux donc il y a des trucs hyper sordides il y a des dessins magnifiques d'ailleurs et puis c'est vraiment un moment où on cherchait comment ça allait être visible ce changement du corps si ça allait intervenir chez tous les gens atteints de la même façon ou pas. Et ça, ça a duré 5-6 mois. Donc, il y a des centaines de dessins. Et après ça, il y a eu d'autres dessinateurs, d'autres phases de dessin. Là, c'était encore un dessin qui était très... Pas abstrait, mais hyper coloré, très BD, très libre, où on ne se posait pas des questions de gravité, de comment on va devoir... Est-ce qu'il y aura un comédien à l'intérieur ? On ne se posait pas du tout ces questions-là. On était vraiment dans le fantasme pur. Et ensuite, on a commencé... Le casting et le travail avec des character designers qui, eux, avaient pour contrainte d'imaginer qu'il y avait un corps à l'intérieur ou parfois même déjà un acteur défini puisqu'on... À partir du moment où on a commencé à valider les comédiens, ils ont travaillé sur les photos et les décors des comédiens.
- Speaker #1
Est-ce que ça a influé sur l'écriture, cette phase de préparation, ou même la réalité à un moment du budget nécessaire pour faire les effets spéciaux ? Est-ce que vous avez des scènes qui n'ont pas pu être tournées ?
- Speaker #2
En fait, cette prépa a démarré, comme je disais, en novembre ou décembre 2020. Et le scénario, on a continué à l'écrire jusqu'au tournage. Donc il y a eu deux ans, on ne travaillait plus exactement de la même façon avec Pauline, qui était partie un peu sur d'autres projets à ce moment-là. Mais déjà...
- Speaker #3
elle lisait toutes les versions et puis il y avait des moments où c'était bien que tu proposes que tu écrives des scènes que je reprenne un peu des trucs de mon côté ça te permettait toi aussi ensuite d'avoir du recul sur l'écriture puisque tu gérais aussi la prépa et tout ça faisait beaucoup c'est à dire que c'était
- Speaker #2
un moment curieux parce que j'avais jamais expérimenté ça le fait que déjà d'une prépa aussi longue et le fait que le scénario allait être autant impacté par la prépa c'est à dire qu'effectivement à ce moment là c'était de Tout devenait des... C'était une série de contraintes dont on apprenait à comprendre pas à pas tous les aboutissants, parce que au scénario, on écrit un homme oiseau s'envole depuis un tronc. Et derrière, on se retrouve avec des questions et des... Il y a un nombre de réunions autour de juste cette phrase qui est assez difficile à imaginer. Et au fur et à mesure qu'on commence à comprendre les contraintes, où on a envie d'aller, si on a plutôt envie de filmer des vrais corps, ou si on veut tourner tout sur fond vert, il y a plein d'options possibles pour faire ça. Et à mesure que je choisis l'endroit où je pense le film doit aller, forcément ça crée à certains endroits des opportunités, et à d'autres des contraintes telles qu'on doit abandonner des scènes.
- Speaker #3
Notamment la scène à l'hôpital, au début.
- Speaker #2
Celle-là, elle est une sortie du jeu. assez tard, vraiment juste avant le tournage parce qu'il y avait aussi un besoin d'air c'était quoi comme scène ?
- Speaker #3
c'était la scène de l'hôpital quand Emile et François rendent visite à Lana la mère d'Emile en fait on voyait dans l'hôpital pas mal de personnes créatures il y en avait peut-être pas 10 mais il y en avait bien 5 un truc comme ça 7 ou 8 et il a fallu tout couper, maintenant il reste l'enfant fourmilier mais...
- Speaker #2
En fait, cette séquence, juste après la discussion avec le médecin, aujourd'hui, ça se termine, on va voir ta maman, cut, on est dans la chambre, ce qui semble très logique en termes de cinéma. Là, il se levait, il parcourait, il déambulait dans l'hôpital et ça permettait de voir un peu ce à quoi on allait être. confronté pendant le reste du film.
- Speaker #1
C'est marrant parce que ça raconte pas du tout la même chose, parce que finalement avec le film qu'on a vu nous, on attend très longtemps avant d'avoir une vraie vision des créatures.
- Speaker #0
Parce que là sur la mer, on la voit que de dos, on la voit qu'un oeil, on la voit spécialement...
- Speaker #2
C'est ça que j'ai trouvé au final contradictoire, c'était le fait que... Alors il y avait deux trucs, je parle même pas du budget, parce que la séquence était effectivement très lourde, mais le budget, prépa et temps de tournage, etc. Tout était très lourd. Mais disons qu'il y avait un premier problème, c'est qu'on mettait une promesse à cet endroit-là de quantité de choses à montrer qui allaient être dures à tenir après et en plus c'est pas très intéressant c'est-à-dire que le film il est pas autour de ça il est autour de l'intimité des personnages et des émotions etc donc c'était un peu bizarre de faire un espèce d'appel c'est un vestige de quand on se faisait kiffer en fait oui je pense c'est un espèce d'appel au spectaculaire qu'il n'y a plus trop de raison d'être à ce stade-là peut-être sa volonté aussi de démarrer un film en en mettant plein les yeux non mais non parce que la première scène c'est déjà ça à la fin c'était contradictoire c'était un doublon c'était une sorte de doublon bizarre et je crois que quand même c'était peut-être un reste à force d'entendre qu'il faut qu'on explique de surexpliquer et donc ça c'était le dernier truc on s'est dit bon alors on explique mais sans expliquer c'est-à-dire qu'on va montrer ce qui est un peu habile au scénario mais en fait quand on voit ce qu'il va falloir enfin ce qu'il va falloir déployer pour faire un truc dont en fait qu'on n'a vraiment pas envie de faire c'est vraiment le truc on s'était juré depuis le début de ne pas faire c'était d'expliquer voilà donc on prend le spectateur par la main alors voilà parce qu'évidemment en ambulant dans cet hôpital on voyait différentes espèces animales mais on voyait aussi différents états de mutation donc ça expliquait finalement beaucoup de choses et finalement c'était quand même beaucoup plus intéressant de soustraire ça et de laisser au film dans sa grande courbe toute cette idée de se dire ok maintenant le spectateur comprend de manière subtile on comprend tout ça puisqu'on voit Fix avec juste un bras on voit la mer et on comprend très bien le concept ça a été un soulagement total d'enlever cette scène hum
- Speaker #3
alors qu'on la croyait totalement enracinée mais c'est sûr vous ne trouvez pas l'enlever je l'ai enlevé je ne me souviens plus janvier 2022 donc c'est vraiment juste avant le tournage et dès le lendemain je me suis dit mais quelle bonne idée non mais en plus évidemment parce que vraiment tout était là pareil l'œil de la mer depuis très longtemps on savait qu'on n'en verrait pas plus fixe qu'il y a qu'un bras mutant au départ ça n'avait plus de sens de la garder comme ça à quel point c'est écrit dans le scénario justement les
- Speaker #1
éléments liés à la mutation en fixe qui sont tous écrits comme vocales, même les expressions de visage, est-ce que ça,
- Speaker #3
c'est... Alors ça, c'était pas écrit, et ça, pour le coup, c'est le travail de Tom Mercier, qui joue Fix. Lui, en fait, il a fait un travail énorme pour apprendre à parler comme un oiseau. Nous, parfois, je pense qu'il devait y avoir, je sais pas, un mot, peut-être une ligne par-ci par-là, pour dire, ah, Emile entend un cri, un cri un peu strident, un cri un peu comme ça. Enfin, Tom, il a très bien compris le personnage, en fait, parce qu'il a appris tout seul à faire ça, et à comprendre. Nous, par exemple, si on avait écrit qu'une ligne, voilà, un cri strident, un cri apeuré, il donnait plus, quand même. Et toi, t'as pu le voir au tournage, il a Il parlait de l'oiseau, quoi.
- Speaker #2
Il a appris avec des gens dont c'est le métier. Il a eu des mois d'entraînement avec des chanteurs d'oiseaux professionnels. Il a fait tout un travail pour inverser le flux d'air et produire des sons en aspirant l'air, etc. Et puis aussi un travail sur la posture, la respiration. Ce qui fait qu'au final, il est devenu sa propre créature. Il a inventé sa propre façon d'être fixe. Après, sur la question de la mutation au scénario... Non,
- Speaker #3
mais c'est très précis.
- Speaker #2
Il y avait... Ça dépend. Sur l'Anne,
- Speaker #3
on l'était moins, mais sur Émile et tout...
- Speaker #2
On était précis, mais ça a changé énormément tout au long du temps.
- Speaker #3
Bien sûr, mais on avait envie d'être précis. Ce n'est pas quelque chose non plus qu'on laissait à côté. Je me rappelle qu'on s'est tapé la tête parfois sur Émile.
- Speaker #2
J'avais une frise en tout cas de ça. Dans la fameuse frise Excel, à chaque étape de travail, il y a des lignes qui se rajoutent pour voir comment les décors vont évoluer. Il y avait évidemment des lignes sur la question de la mutation et qu'est-ce qu'on envoie. À quel moment Émile mute ? Est-ce que c'est les griffes ? Est-ce que c'est les dents ? Qu'est-ce qu'on envoie ? L'histoire du dos est arrivée assez tard. On avait l'acteur évidemment, on teste avec les prothésistes pour voir si ça marche, si ça nous plaît, si c'est intéressant. Et ça, ça fait évoluer le scénario jusqu'au tournage. Et après, il y a quelques espèces aussi qui ont changé. Ça évolue, ça va vers le moins. C'est-à-dire qu'on épure. Au fur et à mesure, on a épuré, comme on fait pour n'importe quel sujet. Quand on passe à la réalisation, on fait des choix.
- Speaker #1
Justement, le réalisateur que tu es, il bosse comment avec le scénariste qui est à l'intérieur de toi et avec Pauline ? Quand au moment de la réalisation tu décides qu'il y a un truc tu vas l'enlever parce que ça marche pas, tu résistes par rapport à l'écriture que t'as faite, t'appelles Pauline, qu'est-ce qui se passe ?
- Speaker #2
Franchement ça dépend de ce que je commence à comprendre depuis 10-12 ans que je fais ce métier. Il y a un peu un truc qui est équivalent au scénario et au montage, c'est que quand on coupe on remet jamais. C'est en ça que je résiste. Quand on croit à une idée, il faut d'abord se battre pour qu'elle fonctionne. Mon monteur il dit ça assez souvent, je suis totalement d'accord là-dessus. que ce soit au montage et à l'écriture aussi c'est-à-dire que la plus grande facilité c'est de couper parce qu'on trouve toujours une autre façon de dire machin mais quand on croit à quelque chose quand on a une image en tête il faut se battre pour qu'elle marche donc quand on a fini de faire en sorte que ça fonctionne l'enlever c'est toujours un petit peu difficile mais pour autant il y a des moments ça résiste et puis des moments ça résiste pas ou alors on cherche à enlever à un endroit et c'est à un autre endroit qui saute par exemple typiquement la scène de l'hôpital dont on parlait tout à l'heure, elle a sauté au moment où on me demandait de faire sauter celle du supermarché. Et la scène du supermarché, si on y réfléchit, elle n'est pas du tout obligatoire dans la dramaturgie. On aurait pu vraiment raconter ça autrement.
- Speaker #3
Moi,
- Speaker #1
j'avais une superbe...
- Speaker #2
J'avais une impossibilité vraiment viscérale à enlever cette scène parce que... T'as fait un équilibrage de budget ? Des fois, c'est un peu compliqué. Et après, Pauline, oui, je l'ai appelée pour la tenir au courant et discuter avec elle de ces trucs-là, mais à un moment, quand on commence à rentrer trop profondément dans la prépa, ça devient impossible de partager tous les enjeux qui sont derrière une scène. Ce qui est sûr, c'est qu'on a discuté à chaque coupe importante. Moi, c'est ultra important pour moi d'entendre à quel point t'étais OK avec ça.
- Speaker #3
j'ai créé une écriture de scène par exemple genre avec Nina, Emile chez oui là ça c'est encore autre chose parce que c'est des trucs qu'on peut discuter jusqu'au bout parce que ça il n'y avait pas d'énormes moyens déployés derrière ces scènes là ça c'est sûr en tout cas tu m'as appelé je me rappelle dès qu'il y avait une décision à prendre tu me tenais au courant que tu sois déjà convaincu ou pas tu me tenais tout le temps au courant et tu me faisais aussi un topo chaque fin de semaine de tournage et c'était agréable ah oui sur le tournage pour me dire un peu même bon bah ça ça aurait été fait comme ci comme ça machin c'était bien Oui,
- Speaker #1
mais je crois que c'est pas trop classique dans le monde du cinéma. Les cinéaristes, une fois qu'ils ont rendu leur copie, en général...
- Speaker #3
On n'est plus tenus au courant. Là, c'était vraiment bien. Enfin, je veux dire, le dialogue ne s'est pas arrêté une fois, en gros, qu'il n'y avait plus à écrire, quoi.
- Speaker #1
Et une fois qu'il y a eu le montage de fait, t'as vu le film à quelle étape, toi ?
- Speaker #3
C'est bien parce que je me rappelle, j'arrêterais pas de demander à Thomas quand je voyais le film, et Thomas me disait Non mais tu verras quand il sera fini, il faut qu'il soit fini, enfin bon mais fini entre guillemets parce qu'évidemment il y avait encore des choses à faire et tout. Et j'étais méga stressée de le voir. Et on a bu un café avant, bref on s'est retrouvés avant, on a bu un café une heure et tout, je me rappelle pas du tout de quoi on a parlé parce que moi je me disais Bon allez, je vais le voir et tout. Et j'étais très crispée dans mon fauteuil. Bon évidemment ça a commencé, j'ai commencé à pleurer mais... Enfin voilà, c'est là, ça existe et tout. Franchement, j'ai un peu, comment dire, je me suis un peu fait percuter par un tractopelle aussi, émotionnel quand même.
- Speaker #1
Il y avait déjà la musique dans la version que tu as vue ?
- Speaker #3
Il y avait déjà la musique et tout, il y avait déjà la musique.
- Speaker #2
Oui, disons que c'était quand même presque terminé, les effets spéciaux n'étaient pas totalement finis. Oui,
- Speaker #3
il y avait des petits trucs à faire.
- Speaker #2
Il y avait des moments où il y avait des petits agissements de transparence, un peu chelou, carrément moche.
- Speaker #3
Oui, fixe, fixe, on le croit les formes à qui ils veulent. Non mais bon, en fait... Le film s'est terminé. Plusieurs personnes se sont tournées vers moi et moi, j'ai dit non, non, mais je reviens. J'ai fumé trois clopes assises par terre. Devant le ciné, j'étais comme ça. Je me suis... Enfin, je le savais déjà, mais je me suis aussi rendue compte qu'on s'était vraiment compris avec Thomas, en fait. Parce que je voyais les scènes. J'ai pas une seconde eu un truc de déception. C'était pas du tout là que ça se jouait. Je me suis dit, ah ouais, vraiment. c'est jusqu'au bout oui oui c'était exactement ça en fait qu'il fallait faire depuis le début et donc c'était très fort en fait et je me rappelle après on est parti déjeuner avec Pierre le producteur et d'autres personnes de l'équipe du film et Pierre essaie de me poser un peu des questions et tout de faire des blagues et moi je n'ai pas décroché un mot du déjeuner parce que j'étais dans dans l'émotion du truc et aussi dans j'étais c'est même pas exactement heureux c'est peut-être plus que ça on s'est dit avec Thomas qu'on avait fait le film qui nous manquait quand on était peut-être plus jeunes mais qui nous manquait depuis longtemps et c'est vraiment ça que j'ai ressenti et c'était incroyable je sais pas exactement Le déclare précisément, mais c'était dingue.
- Speaker #1
Quand tu dis le film qui nous manquait, on a l'impression que les films de genre commencent à trouver un public en France, parce qu'il y a des gens de notre génération qui ont ces envies-là. Nous, on a commencé le podcast avec les gens de la Nuée, il y en a eu d'autres, il y a eu dans la Brume, Grave, et ainsi de suite. Récemment, il y a eu Vermine. Est-ce que vous pensez que ça va devenir un genre plus facile à monter ? Est-ce que ça a été une galère quand vous avez présenté ça devant les producteurs ? Comment ça s'est passé ?
- Speaker #2
On me pose sans arrêt la question, comment les producteurs réagissent ? En fait, les producteurs, c'est nos partenaires. C'est un duo qui est ultra lié. producteur réalisateur et c'est ensemble qu'on va chercher des moyens pour faire les films. Moi j'ai pas à convaincre mon producteur si moi je suis convaincu il voudra m'aider à faire mon film. Après...
- Speaker #1
Après il y a les diffuseurs.
- Speaker #2
Après voilà, après c'est autre chose c'est trouver l'argent, trouver les partenaires qui nous font confiance, trouver un distributeur, convaincre des chaînes de télévision, trouver de l'argent public aussi le CNC etc. Ça n'a pas été un parcours extrêmement simple pour plein de raisons la première c'est qu'évidemment le film coûte cher et que passé un certain budget on pourrait croire qu'il appartient au marché. Or ce film, il n'appartient pas complètement au marché. On espère qu'il va pouvoir toucher des gens, mais on a aussi besoin de nos partenaires plus classiques, du cinéma indépendant, du CNC, de l'aide d'une région, etc. Donc faire ce grand écart entre, par exemple, l'avance sur recettes et un distributeur comme Studio Canal, ce n'est pas une évidence. Donc ça, ça a été quelque chose qu'il a fallu mettre en place. qui a pris du temps. Le deuxième truc qui est, là on revient aux questions que tu me posais tout à l'heure, c'est la question des registres, le fait que le film, on puisse pas exactement le mettre dans une case, donc ça c'est compliqué, mais en plus, si on rajoute le fait qu'il y a une dimension fantastique avec des créatures, alors là on rajoute un risque qui est énorme, c'est un risque industriel, de faire un film qui est soit regardable parce que c'est atroce ce qu'on monte, soit qui est carrément grotesque parce que les effets sont ratés. Ce qui est compliqué à ce stade-là, c'est qu'on a un scénario dont on est plus ou moins content, et à côté de ça, on a franchement... On a un carton à dessin, mais on a envie de ne pas l'ouvrir. Parce que pour expliquer la marge qu'il y a entre les dessins et ce qui va devenir dans le film, c'est presque impossible. Donc moi, j'avais l'impression qu'un rendez-vous se passait bien quand on nous demandait... de pas ouvrir le carton on a des dessins c'est pas la peine on a compris tac mais là ok le rendez-vous s'est bien passé quand il faut montrer les dessins c'est plus compliqué parce que ça veut dire qu'il va falloir rediscuter de tout de quelle forme ça va avoir etc donc nous ce qu'on a fait avec mon producteur c'est que la prépa a été assez longue autour d'un an et demi avec beaucoup de phases de dessin beaucoup de phases de design Et on a laissé les bureaux ouverts, c'est-à-dire qu'on disait à nos partenaires Venez, on vous montre où on en est, etc. On a été assez transparent là-dessus. Mais en tout cas, c'est sûr que c'était un vrai prototype de financement, en plus d'être un vrai prototype aussi tout court. Ça veut dire qu'il y a eu un peu une pression aussi au moment où c'est sorti, en disant On espère que la porte qu'on ouvre, elle ne va pas se refermer avec nous, parce que ça aurait été un échec commercial, total. C'était la double peine. Non seulement ça ne marchait pas pour nous, mais on refermait pour quelques années peut-être cette possibilité-là. Donc ça, c'est vrai que ça a été un vrai soulagement, une très bonne surprise, le fait que les gens se les changent et que ça fonctionne en salle.
- Speaker #1
Avant ça, tu as participé à deux séries de science-fiction, dont une que tu as réalisée. Oui. Quelle est ton expérience de tout ça ?
- Speaker #2
La première, c'est vraiment une première expérience de co-écriture. Donc, je suis resté assez loin du plateau, etc.
- Speaker #1
Donc, ça, c'était très pallium.
- Speaker #2
Ouais. Donc, ce n'est pas moi qui l'ai réalisé. Mais sur Advitam, c'était une expérience très joyeuse, hyper intense. Ce qui était hyper intéressant, c'était l'aspect du tournage long. C'est le tournage, enfin, jusqu'au règne animal, en tout cas, qui était le plus long que j'ai eu à faire. Et j'ai trouvé ça super d'avoir du temps avec les acteurs, de pouvoir déployer un univers. Le tournage de séries télé, c'est des tournages qui sont très, très intenses parce que, tout simplement, concrètement, le minutage utile... par jour est trois fois supérieur à celui du cinéma. On passe de... Voilà, au cinéma, on doit être autour de deux minutes par jour utiles, tournées, et on peut être à 6, 7, 8, 10 en série. C'est une super école au sens où ça pousse à l'efficacité, on n'a rien le droit de rater, il faut être très précis avec les acteurs. Ça a été à la fois une super école et un projet que j'ai trouvé très... Enfin, moi, j'ai eu beaucoup de plaisir à monner jusqu'au bout. Et puis, c'était aussi une façon de mettre les deux pieds dans la SF, et ça, c'était assez marrant, et avec une grande liberté, parce que Arte nous a laissés... avec bienveillance et exigence mais nous a laissé beaucoup de liberté pour la conduite de cette série et ça t'a été utile pour la réalisation du Rien Animal après ? ça a pris des temps oui je pense que j'ai eu des effets spéciaux alors en effets spéciaux oui peut-être parce qu'il y en avait quand même pas mal donc c'est vrai que à force de travailler avec des gens dont le langage à la base est très loin du nôtre on se comprend mieux quand même plus on travaille ensemble mieux on se comprend c'est surtout sur le sur savoir ce qu'on veut je trouve que c'est une excellente école de la... La série là-dessus, on rentre des choses qui sur le plan de travail semblent impossibles, sur le découpage, sur la façon de se retourner quand les éléments sont contre nous, il y a ce truc comme ça très intense, très vif en série télé. Et aussi un truc qui est génial, c'est le rapport au comédien. Ça dépend peut-être des séries, mais en tout cas il y a quand même beaucoup de personnages généralement dans une série, plus de personnages dans une série que dans un film. Il y a beaucoup de gens qu'on accueille pour un jour, deux jours, d'autres pour dix, donc les rapports sont sans arrêt différents, mais c'est à la fois une arborescence de relations humaines qui est hyper enrichissante.
- Speaker #1
Il y a quelques semaines, c'était les Césars. Thomas, tu commençais à être un habitué. C'était le César du meilleur premier film pour le premier film. Et puis là, 12 nominations, 5 récompenses. Comment vous avez vécu tout ça ?
- Speaker #3
Bah ça fait plaisir, on était contents.
- Speaker #1
Quand on sort de la famille, c'est confiné au César, comment ça se passe ?
- Speaker #3
Franchement c'est cool, ça c'est clair. Je pense qu'on était très heureux, notamment aussi parce que là, les Césars que le Rennes Animal a gagnés, c'était sur pas mal de postes de techniciens, des métiers qui ne sont pas forcément toujours très visibles. Donc on était vraiment heureux de ça aussi. Que ce soit David, le frère de Thomas, Ariane, la costumière qui gagne, et toutes les personnes aussi des VFX, toutes les personnes qui ont été récompensées pour le film,
- Speaker #2
et puis 5 c'est vrai que c'est beaucoup en sortant un peu de la féminisme pour mon premier film j'étais contente ouais c'est beaucoup globalement je veux dire on est très satisfait parce qu'il y a aussi la possibilité d'avoir 12 nominations et rien ça arrive non mais en vrai c'était une belle fête c'était une belle fête ces nominations et ces prix aussi et le fait que ça rejaillisse sur l'ensemble des métiers du film de l'image du son la musique etc enfin voilà c'est c'est Je ne dirais pas que c'est un aboutissement, parce que ce n'est évidemment pas pour ça qu'on fait un film, mais c'est toujours agréable de voir qu'un film est bien reçu, qu'il a une cote d'amour, qu'il s'enracine quelque part un peu dans le paysage.
- Speaker #1
Alors vous n'avez qu'une compétition assez tranchée avec un autre film, donc vous savez ce que c'est d'être dans le top du palmarès avec un autre. Du coup, on a une vraie question. Barbie ou Oppenheimer ?
- Speaker #3
Ah putain, je n'en ai vu aucun des deux. Je suis une mauvaise cinéphile.
- Speaker #2
Moi j'ai vu les deux Non mais je dirais Oppenheimer quand même après j'ai mal vu Barbie je l'ai vu avec mes enfants en VF du coup je suis passé totalement à côté du jeu des acteurs c'était pas un bon service à rendre à ce film
- Speaker #1
C'est quoi la dernière bonne histoire que vous avez lue, vue ou entendue et que vous recommanderiez ?
- Speaker #3
En ce moment, j'écoute les albums de Syd Barrett et pour moi, c'est un genre de récit, la musique. Moi, ça me parle de mon propre rapport à la création, à la créativité et voilà, je me perds un peu là-dedans, mais ça me fait du bien. Et sinon, une série que j'ai vue qui m'a plu, c'est The Killing, la version danoise, mais que j'avais jamais vue, la première saison de 20 épisodes. Et j'ai beaucoup aimé l'écriture, même si ça date peut-être un petit peu, vu que ça a 13 maintenant, ou même un peu plus, je crois. C'est l'histoire d'un meurtre, une jeune fille qui est tuée, et ça mêle la campagne d'un jeune, d'un politicien qui veut être maire de Copenhague, l'enquête d'une flic et de son collègue, et la vie des parents de la fille assassinée après le meurtre. Et je trouve ça hyper bien équilibré, vraiment, je trouve ça très bien, et je trouve aussi que le récit est... constamment tendu pas de manière artificielle là pour le coup j'ai aimé penser à l'écriture des épisodes pendant que je regardais la série parce que je trouvais ça très bien écrit et toi Thomas ?
- Speaker #2
au cinéma ces derniers temps je suis allé voir il y a une rétro Park Chan-wook mais je sais pas si c'est vraiment les histoires qui me plaisent parce qu'elles sont on atteint des niveaux de sordide c'est la trilogie de la vengeance qui repasse actuellement donc Sympathy for Mr Vengeance Old Boy Lady Vengeance mais en mise en scène c'est juste fou donc ça je... Je prends un plaisir énorme à voir ou revoir ces films. Plaisir pas que d'ailleurs, s'ils font mal aussi les films. On attend quand même des niveaux d'horreur et de sordide. Mais voilà, en tout cas, c'est intéressant. Non, j'ai découvert un film qui est sorti en 2019 qui s'appelle Les Éblouis, il y a quelques jours. Et j'ai trouvé le film. C'est quoi ? C'est un film de Sarah Succo qui raconte l'histoire d'une famille sous emprise d'une communauté religieuse.
- Speaker #1
Un truc qui est basé sur sa vie réelle.
- Speaker #2
Oui, absolument. Et j'ai trouvé le film bouleversant et très original dans sa... dans sa façon, dans sa narration. On parlait tout à l'heure des débuts d'histoire. Là, la fin, ce dernier plan, j'avais juste envie qu'il ne s'arrête pas. On avait envie de rester avec eux, ces personnages. Ça, c'est quand même signe que ça s'est très bien passé.
- Speaker #1
Pour finir, quel est le meilleur conseil d'écriture que vous ayez reçu et que vous pourriez transmettre à votre tour ?
- Speaker #3
Moi, le meilleur, c'est Thomas qui me l'a donné.
- Speaker #2
Je me méfie.
- Speaker #3
Non, ça va. C'est trois mots. C'est suis ton désir Suis ton désir suis ton désir si tu sens que t'es pas dans la scène ou que t'es pas exactement là où t'es écrit enfin soit tu continues à chercher soit si tu sens que c'est pas là ou que t'as pas envie ou que tu ne ressens rien n'y va pas parce que c'est pas par là qu'il faut aller ou en tout cas ça ne te fera pas du bien enfin je pourrais développer suis ton désir mais pour moi c'est ça enfin c'est un bon conseil et toi Thomas est-ce que t'as un autre conseil que ça ?
- Speaker #2
Un autre conseil, je repense à Schrader, là, d'un coup, le scénariste de Taxi Driver, qui est aussi réalisateur de pas mal de très bons films et qui est enseignant en dramaturgie à UCLA, il me semble. Et en tout cas, lui, dans les différentes phases d'écriture, il y en a une que je trouve intéressante. Il parle de tradition orale du scénario, c'est-à-dire qu'un scénario, avant d'être quelque chose d'écrit, doit être quelque chose qu'on doit être capable de raconter oralement.
- Speaker #1
Comme si on racontait à son pote.
- Speaker #2
Comme si on racontait la meilleure anecdote de sa vie à son pote et qu'on arrive à le captiver de bout en bout. Ce qui est vraiment hyper chaud, c'est un exercice qu'on s'est coltiné avec Pauline. Et c'est vraiment pas facile de raconter de bout en bout un film, mais c'est vrai que quand on y arrive, quand on commence à être capable de capter quelqu'un sur 20-30 minutes de narration, on est au bon moment pour écrire. Du coup, j'essaie de résumer la pensée de Schrader, mais c'est de retarder l'écriture en fait. C'est de pas se jeter dans l'écriture dès qu'on pense avoir un début de structure ou quoi. Lui, il considère que c'est un moment assez rapide, l'écriture qui arrive après ce travail-là.
- Speaker #0
Ça me paraît un bon conseil pour conclure. pour cette épisode.
- Speaker #1
Eh bien, merci.
- Speaker #3
De rien.
- Speaker #2
Merci beaucoup. Merci.
- Speaker #0
C'est ainsi que se termine cet épisode de La Machine à Écrire. Nous espérons que vous avez passé un bon moment avec nos invités, que l'on remercie pour leur temps et leur générosité.
- Speaker #1
On vous invite à voir ou à revoir Le Règne Animal en ce moment sur Canal+, et en VOD, et même encore à l'affiche dans certains cinémas.
- Speaker #0
Si vous aimez La Machine à Écrire, n'hésitez pas à nous dire quels sont les invités que vous aimeriez entendre dans de prochains épisodes. Vous pouvez nous l'écrire dans les commentaires sur Apple Podcasts et sur Instagram.
- Speaker #1
N'hésitez pas non plus à nous proposer des thèmes et à nous partager les sujets d'écriture qui vous intéressent le plus. On fera de notre mieux pour les inclure dans de futurs épisodes.
- Speaker #0
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- Speaker #1
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- Speaker #0
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- Speaker #1
Si vous le souhaitez, vous pouvez également nous suivre sur vos réseaux sociaux préférés et parler de nous à votre entourage, le bouche à oreille est le meilleur moyen de nous aider à grandir.
- Speaker #0
Avant de se quitter, nous tenons à remercier la Société Nationale de Bande Dessinée, l'atelier de Mathieu Sapin et Christophe Blain qui nous héberge pour les enregistrements.
- Speaker #1
Et surtout un grand merci à vous pour votre soutien et votre fidélité. On se retrouve au prochain épisode et d'ici là, on vous dit à bientôt !
- Speaker #2
Merci.