- Speaker #0
Je pense que s'il m'était arrivé quelque chose en Suisse, ça aurait été plus compliqué.
- Speaker #1
C'est pas parce qu'on a idéalisé la Suisse que tout est vrai.
- Speaker #2
Bonjour et bienvenue dans cette salle de pause, le podcast du Chal. L'idée c'est de vous plonger au cœur de l'hôpital, pour découvrir ses métiers, ses coulisses et celles et ceux qui le font vivre. Dans cet épisode, vous l'avez entendu en intro, on va parler de la Suisse. Et oui. On parle souvent de soignants qui quittent la France pour la Suisse, mais certains font le chemin inverse. Deux infirmières du Chal vont partager leur expérience et nous expliquer pourquoi elles ont choisi de revenir travailler dans notre hôpital. On commence avec Laurine, 24 ans, infirmière en soins intensifs. Originaire de Montbéliard, en Franche-Comté, où elle a fait ses études d'infirmière, elle habite aujourd'hui près d'Evian. Elle est en couple, sans enfant, et son conjoint est maraîcher en France. Bonjour Laurine. Bonjour. Merci d'avoir accepté la proposition d'interview. Alors première question, pouvez-vous déjà nous raconter votre parcours d'infirmière, mais avant de partir en Suisse ?
- Speaker #1
Alors j'ai été diplômée du coup en 2021. Je cherchais avant tout des soins en milieu critique, donc ça s'est porté sur le châle, parce qu'on me proposait un poste en soins intensifs. Donc j'ai commencé ma carrière ici. Je suis restée trois ans. J'habite vers Evian. C'est vrai qu'au niveau de la route, ça commençait à peser sur ma fatigue. Je le ressentais vraiment. J'ai voulu chercher aux alentours. C'était pour ça que je m'étais portée vers la Suisse. C'était un service de réanimation. Je n'ai pas tellement d'autres expériences professionnelles à part les soins intensifs ici. Je cherchais toujours les soins intensifs, mais plutôt plus proche de chez moi.
- Speaker #2
Donc en fait, si je comprends bien, ce qui vous a motivé à travailler en Suisse, c'était plus une question de rapprochement, c'est ça ?
- Speaker #1
Plutôt le rapprochement. J'avais regardé avant sur Tonon s'ils ne cherchaient pas quelque chose au niveau des soins intensifs, ce qu'ils ne proposaient pas. Et donc, j'ai porté mon choix sur la Suisse. Alors, je ne dis pas que le salaire n'est pas attractif, qui ne m'a pas incité à y aller, mais c'était... Avant tout pour mon côté personnel, pour être moins fatiguée, et puis j'avais envie de découvrir aussi un autre service, et même dans un autre pays.
- Speaker #2
Alors, par rapport justement à cette expérience en Suisse, comment s'est passée votre intégration dans l'établissement suisse ?
- Speaker #1
Alors pour ma part, c'est ce qui a pêché en Suisse, donc ça a été très compliqué, parce que, je ne le cache pas du tout, mais les Français sont... On est encore plus attendu qu'un professionnel suisse qui entre dans un établissement suisse. C'est d'autant plus dur que toutes les normes, toutes les prises en charge sont complètement différentes comparées en France. C'est comme si on commençait un autre métier complètement, qui demande beaucoup de travail personnel, donc bien fatigant aussi, mais moi c'était l'intégration qui a le plus péché. là-bas que le travail en soi.
- Speaker #2
Parce que lors de votre intégration, vous vous êtes sentie bien encadrée, est-ce que vous avez par exemple été doublée ?
- Speaker #1
J'ai été doublée pendant trois semaines, je faisais 8h, 17h tous les jours, du lundi au vendredi, donc c'était enrichissant, mais c'est vrai qu'ils ont tendance à nous donner les patients, ils le disent clairement, les plus faciles, et des fois les patients qui ne voulaient pas prendre en charge parce que... Eux, ils étaient plutôt sur les patients intubés parce que moi j'étais en réanimation. Et puis l'entraide, on sentait que leur place était un peu mise sur la scellette dès qu'il y avait un nouvel arrivant, donc ils étaient très très méfiants. Et puis voilà, c'est pas une ambiance que j'ai connue en France où tout le monde était très content d'accueillir un nouvel élément et qui cherchait à... À transmettre le savoir, là-bas, c'était plutôt de le garder pour soi et mettre en difficulté l'autre.
- Speaker #2
Quelle différence vous constatez entre le système de santé suisse et français, notamment dans les conditions de travail ? Bon, on l'a un petit peu abordé. Et en termes aussi d'organisation ?
- Speaker #1
En Suisse, on est plus d'infirmiers pour la même quantité de patients. Par exemple, j'avais un voire grand maximum de patients à charge en réanimation. Et ici, on est à 4 ou 5 patients. Après, en réanimation, en France, c'est aussi autre chose. Je crois qu'ils peuvent aller jusqu'à 3. Et après, c'est... Les conditions de travail, alors je ne sais pas si c'est dans tous les services, parce que j'ai testé qu'un service, mais il y a moins cette notion d'entraide, il y a moins cette question de binôme que j'avais en France aussi. Les infirmiers sont différents des aides, qui s'appellent ça là-bas, au lieu des aides-soignants. Après, en différence, ils veulent quand même vraiment former, parce qu'il y avait une formation qui était proposée pour les soins intensifs, si vraiment je continuais là-bas. mais Sinon j'ai retrouvé à part quelques prises en charge différentes, forcément, mais je pense que d'un établissement français à un établissement autre, c'est forcément changeant. Mais après j'ai pas vu tellement d'autres différences et moi j'y suis restée que trois mois grand maximum.
- Speaker #2
Avec l'Urkult, donc votre expérience en Suisse, est-ce que ça a correspondu à vos attentes ?
- Speaker #1
Pas du tout ! Non, moi je cherche avant tout à être bien dans mon métier et travailler en équipe, ce que je ne retrouvais pas du tout là-bas. Être bien pour prendre en charge un patient. Il y a eu beaucoup d'attentes vis-à-vis d'autres professionnels. Je vous cite un exemple, il y a des patients qui attendent des cardiologues pendant un week-end, même si la situation est grave. c'est pas Il n'y a pas une... Comment ? On a tendance à dire que la Suisse, ils mettent beaucoup plus de moyens, les paramédicaux et médicaux sont beaucoup plus présents. Non, il y a du manque de personnel, comme en France. Il n'y a pas de grande différence. Et en pensant à son bien-être personnel, je pense qu'avec la route, elle y est quand même pour aller en Suisse. Certes, elle était moindre pour moi. Mais voilà, ça n'empêche pas de ne pas être bien dans son métier en raccourcissant le trajet.
- Speaker #2
Parce qu'en débutant à Evian, la Suisse, c'était plus simple pour vous, c'est ça ?
- Speaker #1
Moi, j'avais 30 minutes, mais après, on ne compte pas les bouchons. Et là, je suis plutôt à 45-50 minutes pour revenir en France.
- Speaker #2
Alors, si on parle maintenant de votre retour au châle, déjà, qu'est-ce qui a motivé votre retour au châle ?
- Speaker #1
Alors moi c'est un service que j'ai vraiment apprécié, tout le monde s'entraide, il y a beaucoup de bienveillance. Les soins qui sont proposés, ils correspondaient à mes attentes, autant dans la technique que dans le relationnel. Et puis j'ai eu une très très bonne expérience ici, il faut le dire, si je n'avais pas eu cette distance, qui fait que j'ai de la fatigue un peu plus que si je faisais moins de route. A part ça, je n'avais rien à reprocher au châle. Toutes mes demandes ont été, comment dire, correspondées à mes attentes. En fait, je n'avais rien à redire. Donc, je me suis retournée vers le châle très très vite.
- Speaker #2
Pour revenir Ausha, parce que ce n'est pas forcément un choix facile, la rémunération, qu'est-ce qui a pesé dans votre décision ? C'est vraiment le métier, l'accueil ? L'ambiance de travail ?
- Speaker #1
Oui, clairement le bien-être au travail, c'est-à-dire aller au travail avec le sourire, en sachant que même si certaines journées vont être dures vis-à-vis de la prise en charge des patients ou des urgences, d'avoir une équipe sur qui s'épauler, même si c'est fatigant à faire les trajets, c'est clairement ce qui, moi, m'a dit de revenir au châle. On m'a proposé plus d'une fois... d'emprunter des chambres de garde en cas de fatigue ou quoi que ce soit. Donc c'est aussi quelque chose qui est mis en avant et qui est clairement très, très, vraiment cool à savoir. Le châle peut mettre des solutions en place pour la fatigue, qui est le seul point un peu négatif, mais c'est pas... Voilà, c'est moi qui habite loin, c'est pas le châle qui peut se rapprocher.
- Speaker #2
Et puis pour revenir à votre retour, comment s'est passée votre réintégration dans le service ?
- Speaker #1
J'ai d'abord renvoyé un message à ma cadre pour lui demander s'il cherchait quelqu'un, s'il y avait du personnel à remplacer, où j'ai très bien écouté et entendu. On m'a proposé un poste au CICS en premier pour remplacer un arrêt maternité. Donc j'ai saisi cette opportunité-là et... Et après je suis revenue assez rapidement, je pense qu'au bout de trois semaines j'ai réintégré le châle après ma démission en Suisse. Et puis l'équipe a bien apprécié, moi j'ai apprécié de ne pas avoir de petites phrases un peu « tu reviens » . C'était déjà un choix pas facile de quitter le châle. J'ai pris cette décision de revenir, mais on m'a très bien accueillie.
- Speaker #2
Quelle différence ressentez-vous entre votre expérience en Suisse et votre retour en France ?
- Speaker #1
En ayant confronté un petit peu, c'est sûr que je pense qu'il y a souvent des moments où on critique un peu le système français. Mais avant tout, je pense qu'en France, on peut assez bien communiquer avec l'ensemble de l'équipe. On est aussi bien entendu par des médecins que par toute l'équipe paramédicale et intervenant autres. Or en Suisse, on est infirmier, si on a une proposition, ce n'est pas à nous de la faire. Des fois c'est plutôt médical et on se fait vite remettre à notre place. Alors que là, il y a vraiment une collaboration avec toute l'équipe qui fait souvent évoluer les prêts en charge. D'avoir plusieurs regards, des fois c'est plutôt bénéfique.
- Speaker #2
C'est-à-dire qu'on prend mieux en compte votre métier, c'est ça ?
- Speaker #1
Oui, en tout cas, moi, pour ma part, peut-être que c'est parce que j'étais jeune en Suisse et puis nouvelle dans le service, mais des fois, on fait des propositions ici aux médecins et c'est vrai qu'ils les entendent et si c'est le cas, ils vont pousser envers notre demande et si ce n'est pas le cas, ils vont nous expliquer, alors qu'en Suisse, on n'est pas forcément écouté, on fait plus les soins prescrits et demandés. que autant.
- Speaker #2
Alors avec cette double expérience, quel regard portez-vous aujourd'hui sur le métier d'infirmière ?
- Speaker #1
En France, on est assez autonome, on peut anticiper plein de choses parce qu'on a cette liberté de faire des soins et il y a des situations qu'on a déjà vues. Après en Suisse, on est un peu plus restreint sur les choses à faire et c'est vraiment notre champ de compétences, tout ce qui est prescrit. Voilà, on a moins cette liberté de proposition, d'actes techniques aussi, parce qu'il y a beaucoup d'actes techniques qu'on peut faire en France qui ne sont pas reconnus en Suisse. Par exemple, le gaz du sang, c'est médical en Suisse, qu'on ne fait pas du tout. Donc oui, c'est vrai que j'ai l'impression que notre champ de compétences est un tout petit peu réduit quand même en Suisse qu'en France.
- Speaker #2
C'est des freins aussi en lien avec des procédures qui ne sont pas les mêmes, qui sont plus lourdes en Suisse.
- Speaker #1
Pas forcément, je pense que c'est avec leur système d'études. Les médecins apprennent à faire beaucoup de soins techniques là-bas. Sûrement en France, on les apprend, mais c'est vrai que vu que l'infirmière est capable de les réaliser, ça rentre dans leur champ de compétences, on leur laisse plus d'autonomie à faire plein de soins.
- Speaker #2
Quels seraient selon vous les atouts principaux du châle ?
- Speaker #1
Je pense que c'est... Un petit établissement, c'est pas petit non plus, mais je trouve que c'est assez familial. C'est le respect entre tous les professionnels. On se sent écouté. Si on a une demande, si c'est possible, on nous aiguille pour la réaliser. Il y a des formations qui sont mises en place. Et puis, il y a cette notion de famille, de collaboration entre chaque professionnel de santé. qui est assez bien et on propose comme je disais les chambres de garde voilà il y a plein de choses qui sont pour alors c'est vrai qu'en soins intensifs on voit un peu on est un peu dans notre service parce qu'on peut pas aller manger par exemple ou self voilà et on ne croise pas peut-être pas les autres professionnels de santé mais en tout cas c'est un un petit centre qui est familial où on a envie de soigner les patients. Et oui, ça donne du baume au cœur de venir travailler ici.
- Speaker #2
Quels conseils donneriez-vous à une infirmière qui hésite entre travailler en Suisse et rester en France ?
- Speaker #1
Chacun est libre de son choix, mais je pense qu'avant tout, il faut trouver un endroit où on sent bien où aller travailler. Moi, je l'ai trouvé au Châle. Parce que c'est une famille, parce qu'on apprendra toujours. On a vraiment cette quête de formation et puis de transmission à autrui. Et parce que... Parce que c'est bien de venir soigner en France, il faut des infirmières en France et que c'est pas parce qu'on a idéalisé la Suisse que tout est vrai. Il y a plein de contraintes à ne pas aller travailler en Suisse, la route, le salaire, il y a plein d'autres choses à prendre en compte que le salaire en Suisse qui ne fait pas forcément le bonheur dans sa vie quotidienne et au travail.
- Speaker #2
Est-ce que vous avez des projets professionnels à venir ?
- Speaker #1
Pour l'instant, c'est vraiment retrouver ce goût du soin que j'avais un peu perdu en Suisse. Mais non, pourquoi pas faire des formations en lien avec les soins d'urgence à voir.
- Speaker #2
Merci Laurine d'avoir accepté de répondre à ces questions. Et puis, bonne continuation dans votre travail.
- Speaker #1
Merci beaucoup.
- Speaker #2
On poursuit avec Louise, 25 ans, infirmière en chirurgie orthopédique. Originaire de Morlaix en Bretagne, elle a fait ses études d'infirmière à Paris à la Salle Pétrière. Elle habite aujourd'hui à Saint-Pierre en Fossigny. Elle est en couple, sans enfant et son conjoint travaille en Suisse. Bonjour Louise.
- Speaker #0
Bonjour.
- Speaker #2
Merci d'avoir accepté la proposition d'interview. Alors, première question, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
- Speaker #0
Donc moi je suis une infirmière en chirurgie actuellement au Châle. J'ai quitté le Châle il y a un an pour aller en Suisse et je suis revenue il y a à peu près trois mois.
- Speaker #2
D'accord. Pouvez-vous déjà nous raconter votre parcours d'infirmier, mais avant de quitter la Suisse ?
- Speaker #0
Donc avant de quitter la Suisse, j'ai fait mes trois ans de diplôme d'infirmière sur Paris. Après je suis venue, donc en Haute-Savoie au Châle. J'ai travaillé... J'ai passé un peu plus de deux ans au Châle en chirurgo. Et après j'ai quitté la chirurgo pour venir.
- Speaker #2
Vous êtes arrivée au Châle en Ottawa, c'était quand ?
- Speaker #0
2022.
- Speaker #2
Et donc qu'est-ce qui vous a motivée pour aller travailler en Suisse ?
- Speaker #0
C'était le côté, il y a eu le côté financier, il y a eu le côté aussi de moins de patients à charge. de ce qu'on me disait, de ce qu'on me racontait. Et après, il y avait aussi l'alternance jour-nuit qui était compliquée pour moi.
- Speaker #2
Donc c'était une histoire de conditions de travail en fait. Oui. Comment s'est passé, alors là vous êtes en Suisse, comment s'est passée déjà votre intégration ?
- Speaker #0
Mon intégration plutôt bonne, ça il n'y avait aucun souci, les filles elles étaient très accueillantes, c'était plus de mon côté que du côté vraiment... Tu travailles ensemble.
- Speaker #2
Oui, donc bien encadré au départ, le poste était doublé au début. Donc au niveau intégration, quelles étaient déjà les différences que vous avez constatées entre le système de santé suisse et en France ?
- Speaker #0
La différence de système, c'est qu'ils payent leurs assurances maladie, donc ils attendent une qualité de soins qui est très bonne. Et après moi j'étais dans le secteur privé donc c'était en plus, ils prenaient des prestations en plus qu'on devait leur apporter. S'ils nous demandaient quelque chose on devait vraiment être...
- Speaker #2
Mais quel type de prestations en plus par exemple ?
- Speaker #0
Il y avait un petit côté hôtelier que moi j'ai eu du mal.
- Speaker #2
Oui vous étiez dans une clinique privée en Suisse ? Oui tout à fait. D'accord. Donc c'était la nature du travail, est-ce qu'en termes de conditions de travail, en termes d'organisation ?
- Speaker #0
Les conditions de travail, moi j'avais un poste de nuit donc je voyais pas la différence avec la France en fait parce qu'il n'y avait pas autant d'effectifs la nuit que le jour donc forcément nous on avait le même nombre de patients à charge qu'en France donc ça ça m'a pas vraiment changé après.
- Speaker #2
Sauf que là vous étiez uniquement de nuit ?
- Speaker #0
Oui tout à fait.
- Speaker #2
Donc là quelque part c'était un confort de travail ?
- Speaker #0
J'aimais bien ce côté là. D'être que de nuit, au moins j'avais un rythme et je savais à quoi m'attendre.
- Speaker #2
Au niveau de l'organisation, le travail en équipe, ça allait ?
- Speaker #0
Oui. Après, il y a le côté pharmacologique qui change évidemment. On va apprendre tous les médicaments. Il y a eu une adaptation au début aussi pour ça.
- Speaker #2
On n'est pas sur les mêmes protocoles ?
- Speaker #0
Oui, pas les mêmes protocoles, pas les mêmes médicaments, les mêmes noms. La molécule reste la même, mais ils parlent en nom pas commercial, donc du coup, c'est un peu compliqué.
- Speaker #2
Il y a plein de choses, de nouvelles choses à assimiler, c'est ça ?
- Speaker #0
Oui, tout à fait.
- Speaker #2
Qu'est-ce que vous a apporté globalement cette expérience en Suisse ?
- Speaker #0
L'adaptation quand même, parce qu'il fallait quand même s'adapter à un nouveau cadre de travail, des nouvelles prestations qui étaient attendues, le côté patient aussi, clients qui attendaient de nous.
- Speaker #2
Et donc qu'est-ce qui a fait finalement que vous êtes revenu en France ? Quel a été un peu le déclic ?
- Speaker #0
Le déclic, je dirais qu'il y a l'ambiance de travail, parce que nous on a une très bonne équipe en chirurgie, donc c'était très dur de ne pas avoir la même chose, mais au final je sais que je ne retrouverai jamais la même chose, même si demain je devrais être amenée à partir. Et puis aussi le côté vraiment clientèle, le côté hôtelier qui est vraiment compliqué. que moi j'avais vraiment du mal et puis les soins, ce qu'on ne peut pas faire. Tous les soins, en France on a une autonomie, on fait des soins sans parfois attendre le médecin qui nous le prescrive parce qu'on sait qu'il va nous le demander donc on va les faire en amont et après l'appeler. Alors que là-bas, comme tout est prescrit, tout est facturé, si je me permettais de faire quelque chose... que le médecin ne voulait pas, au niveau de la facture, c'était compliqué. Donc il y a ça aussi, j'ai trouvé que je perdais un petit peu de technique, et puis même de connaissances. Au final, de faire les liens et tout ça, je les faisais, mais je ne pouvais pas les mettre en pratique, et ça c'était compliqué.
- Speaker #2
Donc ce que vous voulez dire, c'est que vous êtes jeune infirmière, et vous avez peur de... perdre une certaine compétence parce qu'en Suisse, quelque part, il y a moins de place à l'autonomie, à des prises d'initiatives.
- Speaker #0
Tout à fait, c'est ça. C'est vraiment les prises d'initiatives que nous, on peut prendre en France. Je donne des exemples, mais par exemple, on a un patient qui taquicarde en post-op. On va se dire... On va faire un bilan sanguin d'urgence avant d'appeler l'anesthésiste et une fois qu'on a les résultats, on va l'appeler. Tout ça, je ne peux pas le faire. Je suis obligée d'alerter d'abord et que chaque chose, il me demandera, je le ferai, mais je ne peux rien faire.
- Speaker #2
Sans l'accord du médecin ? Oui. Ah oui, d'accord. Ça,
- Speaker #0
ça change beaucoup.
- Speaker #2
Bien sûr. Au-delà de l'ambiance qui était plutôt bonne, d'après ce que je comprends, mais c'était la nature même du travail. Vous avez le sentiment de perdre un peu, une certaine autonomie. Donc c'est quelque part un intérêt pour le travail ?
- Speaker #0
Oui, c'est ça. C'est plus pour le travail et pour le pourquoi j'ai fait infirmière, qui m'a fait revenir en France.
- Speaker #2
Ça a perdu un peu de sens, c'est ça ?
- Speaker #0
Oui, un petit peu.
- Speaker #2
Et puis, vous êtes revenue parce que vous avez quitté la chirurto, pour revenir en chirurto, c'est ça ? Oui. Vous avez aussi retrouvé un peu l'équipe ?
- Speaker #0
Je pense qu'à la fin, je perdais un petit peu confiance en moi. Je me suis dit, il faut que je retourne dans le... Enfin, si je pouvais, bien sûr, s'il y avait des places, retourner dans le service où j'étais pour reprendre mes marques et après, peut-être évoluer ou changer de service. Mais au départ, j'ai recontacté ma cadre, mon ancien cadre, directement.
- Speaker #2
Oui. Et du coup... Du coup, l'expérience suisse a duré combien de temps en fait ?
- Speaker #0
Six mois.
- Speaker #2
Six mois. Alors maintenant, on va parler de votre retour au châle. Quels critères ont pesé dans votre décision ? Parce que vous parliez quand même de le salaire, c'est ce qu'on entend le plus. Est-ce que quelque part, ce n'est pas un choix forcément évident ?
- Speaker #0
Enfin, moi, la question sur le salaire, c'est… Ça n'a pas du tout joué au fait, je ne sais pas comment dire, mais je ne me suis pas posé la question du salaire. Je me suis dit si je suis mieux dans mon travail, mieux dans ma tête, que je reprends le goût à refaire le travail d'avant, ce n'est pas grave.
- Speaker #2
Alors on va aborder maintenant la dernière partie, c'est votre regard sur le métier et les perspectives. Donc première question, avec cette double expérience. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur le métier d'infirmière en France et le métier d'infirmière en Suisse ?
- Speaker #0
Je pense qu'en France on est beaucoup plus autonome, on peut faire beaucoup plus de liens. Le fait qu'on n'ait pas un médecin à disposition tout le temps fait qu'on développe des connaissances et des liens beaucoup plus rapidement et ce qui nous permet de prendre en charge ou en soin des urgences beaucoup plus facilement. Je pense que s'il m'était arrivé quelque chose en Suisse, ça aurait été plus compliqué. Alors qu'au jour d'aujourd'hui, depuis que je suis revenue, j'ai eu plusieurs urgences et tout s'est bien passé. Je pense qu'il y a ça, vraiment le côté connaissance et lien d'une infirmière en France est quand même bien au-dessus.
- Speaker #2
Ça vous permet d'avoir une certaine confiance ?
- Speaker #0
Oui, Complètement. Je perdais ces boss. C'est ça aussi qui m'a fait revenir en France. C'est que je perdais confiance un petit peu en moi s'il devait m'arriver quelque chose là-bas.
- Speaker #2
Quels sont selon vous les atouts principaux du châle ?
- Speaker #0
Je pense qu'il y a l'ambiance, les liens qu'on crée entre collègues qui est hyper importante. Je pense que c'est ce qu'on se dit toutes, c'est que demain si on est amené à changer d'équipe... On ne retrouvera jamais ce qu'on a, nous en tout cas en chirurto, après j'ai fait que la chirurto, donc je ne peux pas... Je sais qu'en viscérale c'est pareil, parce qu'on parle un petit peu avec elle, et en gastro aussi, mais c'est vraiment ça. Il y a aussi le fait de pouvoir parler facilement avec notre cadre, ou avec les chirurgiens, ou la médecin généraliste.
- Speaker #2
Mais ça vous l'aviez quand même aussi avec eux en Suisse ?
- Speaker #0
Non, beaucoup moins. On n'avait pas de proximité avec eux. pas de proximité, c'est pas ça que je veux dire, mais on n'y avait pas de discussion avec les chirurgiens, ils nous demandaient de faire ça et puis...
- Speaker #2
C'est beaucoup plus hiérarchisé ?
- Speaker #0
Oui, tout à fait, oui oui. Voilà et puis après il y a aussi, c'est des locaux qui sont hyper récents, ça c'est top.
- Speaker #2
Quel conseil donneriez-vous à une infirmière qui hésite entre travailler en Suisse et en France ?
- Speaker #0
Faut pas, enfin si c'est que l'argent, oui. Mais si c'est le côté vraiment prise en soins et tout ça, ça ne sera pas mieux ailleurs. Il n'y a aucune rivalité pour le côté français. On soigne très bien, on n'a aucun souci. Parce que je sais que parfois, on peut dire oui, mais on est mieux soigné en Suisse. Moi, j'ai vu des choses, on n'est pas mieux soigné en Suisse.
- Speaker #2
Merci d'avoir accepté de répondre à ces questions et puis bonne continuation dans votre travail.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #2
Merci encore à Louise et à Laurine pour leur temps et leur témoignage. Merci à toutes et à tous pour votre écoute. N'hésitez pas à partager ce podcast auprès de vos proches. Et à très bientôt en salle de pause.