- Speaker #0
Bonjour à tous et bienvenue dans La Voix Juridique, le podcast qui met en avant les talents issus du monde juridique. Je m'appelle Tamara Morgado, je suis avocate et après avoir exercé pendant près de 20 ans, j'ai suivi ma passion pour l'humain et je me suis spécialisée dans le talent management. Le domaine juridique est riche et varié, ouvrant la porte à une multitude de carrières passionnantes et diverses. À travers ce podcast, mon objectif est de donner la parole aux talents juridiques, qu'ils soient juristes, avocats, fiscalistes ou qu'ils aient choisi une autre voie. Je souhaite vous inspirer et vous faire découvrir des parcours et des métiers uniques.
- Speaker #1
Pour ce troisième épisode, j'ai eu le plaisir d'échanger avec Pritam Singh, Chief Legal and Compliance Officer chez ABC Maritime. Pritam partage avec une grande transparence son parcours atypique, Toujours guidée par son instinct et une humilité remarquable. Notre conversation aborde des thèmes tels que le destin et la trajectoire personnelle. Bonne écoute !
- Speaker #0
Bonjour Pritam, je suis ravie de t'accueillir dans ce nouvel épisode de La Voix Juridique. Comment vas-tu ?
- Speaker #1
Écoute, je vais très bien. Je te remercie beaucoup pour l'invitation. Je suis très enthousiaste de participer à ça. C'est la première fois que je le fais, donc c'est tout à fait plaisant comme expérience. Je te remercie.
- Speaker #0
Je suis ravie en tout cas de t'accueillir. Est-ce que tu pourrais d'abord peut-être me parler ? Toi, et peut-être te présenter en quelques mots.
- Speaker #1
Oui, alors, j'ai 41 ans, ma maman est suisse, mon père est d'origine indienne. Je suis né et j'ai grandi en région leusénoise, plus précisément au Mont-sur-Leusanne. J'ai fait ma scolarité là-bas, mon gymnase, ce que les vaudois disent, gymnase. Je ne sais pas toi, en quel canton tu es à Genève, non ?
- Speaker #0
Moi j'ai grandi à Genève et c'était le collège.
- Speaker #1
Le collège, voilà. Collège slash gymnasium. Moi dans mon cas c'était à Beaulieu, c'est un des gymnases lusanois. Ensuite j'ai continué, je ne suis pas directement allé en droit. J'ai fait une année en sciences politiques parce que disons j'étais une personne très différente de ce que je suis aujourd'hui. Et puis, on va dire que peut-être que je me suis un peu cherché.
- Speaker #0
Ah, ben attends, j'aime bien ça. Raconte-moi un peu plus comment ça se fait. Donc, source politique pour comment tu es. Oui. Et tu n'as pas trop crocheté.
- Speaker #1
Non, ben écoute, si, je veux dire, je cultive mon honnêteté à la fin du gymnase. Travail, facture à payer, responsabilité, c'est des mots que j'avais déjà entendus, mais ça me semble extrêmement lointain. Et je n'avais pas compris qu'un jour, ça allait me concerner comme tout un chacun. Je me rappelle, j'ai fait une journée porte ouverte quand j'étais en troisième de gymnase à l'Uni. Et là, mon critère, c'était dans quelle faculté est-ce qu'il y a le moins d'heures par semaine ? Et c'était sciences sociales et politiques. Donc voilà, j'ai jeté mon dévolu sur cette faculté.
- Speaker #0
Donc ce n'était pas par passion ?
- Speaker #1
C'était non. Et puis d'ailleurs, même le peu d'heures, j'ai probablement courbé les trois quarts. Et puis un matin, je me suis levé et j'ai eu cette espèce d'épiphanie. J'ai compris qu'un jour, j'allais avoir des factures à payer et qu'il fallait quand même que je me pose la question du côté professionnalisant de ma formation. Et ensuite, après, j'ai procédé un peu par élimination parce qu'on connaît toi et moi. pas mal d'avocats juristes. Il y a vraiment des passionnés. C'est sur leur temps libre, ils vont aller lire la dernière juraison. Moi, j'ai jamais été comme ça. C'est un métier que j'aime beaucoup, mais j'ai jamais été un passionné. J'étais pas tout petit, on me disait pas un jour je serai grand, je serai avocat. Et du coup, j'ai un peu procédé par élimination. Enfant, j'aimais bien. J'ai toujours aimé tout ce qui était astrophysique, mais disons que les maths ne sont pas ma qualité première. Donc tout ce qui était scientifique, je l'ai exclu. Et puis l'économie, ça ne m'intéressait pas vraiment. Donc en fait, il restait un peu droit, ce qui m'a assez bien convenu. Parce que je pense que c'est quelqu'un qui a une assez bonne structure mentale. C'est assez carré. En plus, à l'époque, le zen était connu parce qu'il fallait apprendre par cœur. Ce qui est quelque chose, finalement, ça rebute un peu au début, mais en réalité, ce n'est pas si compliqué. Donc voilà, et puis depuis, je suis resté dans cette voie, mais ça n'a jamais été une passion.
- Speaker #0
Et c'était un moyen de se dire, de se projeter plus tard avec ce métier, parce qu'en fait finalement l'étude de droit t'amène à un métier, un médecin, un médecin qui apporte un métier, de dire ça, ça va me donner un métier, je vais pouvoir payer mes factures, c'était plutôt ça récemment ?
- Speaker #1
C'était ça, puis après, de fil en aiguille...... Les choses se sont enchaînées naturellement.
- Speaker #0
T'es devenu avocat, donc t'es vraiment allé jusqu'au bout des choses.
- Speaker #1
Mais pour moi, c'était plus un enchaînement de maillons dans une chaîne, plus que quelque chose que j'aurais vraiment décrété. Parce qu'il y en avait, en première année du NID, je sais que je veux être pénaliste, ou je sais que je veux être magistrat, ou je sais que moi j'ai... Je n'ai jamais dit des choses comme ça. J'étais toujours un peu dans le flot. Et puis voilà, j'ai terminé mes études. Et puis après, j'ai trouvé une place de stage. Donc, j'ai fait mon stage. Et puis ensuite, j'ai terminé mon stage. Et puis, je suis retourné comme collaborateur. C'était chaque fois un peu le prolongement logique de ce qu'il y avait avant. Mais plus que finalement, une sorte d'histoire qui était... Je n'ai jamais forcé le destin, si tu veux. J'ai toujours...
- Speaker #0
Tu as suivi le chemin, les opportunités ? Un peu.
- Speaker #1
Et puis des fois, si je pousse à l'extrême, c'est des choses que j'ai eu dit. Finalement, je n'ai jamais rien décidé.
- Speaker #0
Oui, c'est ce que j'allais dire au niveau du choix.
- Speaker #1
J'ai été l'instrument de décision qui a été prise, mais ce n'était pas moi qui prenais ces décisions. Je suis très, très intuitif. Donc, comme je te dis, le jour où j'ai décidé que je démasquerais mon droit. Ce n'est pas l'aboutissement d'une longue réflexion avec un tableau, des plus éléments, une analyse SWOT et toutes ces choses. Je me lève un matin et je sais que c'est ce que je dois faire. J'ai toujours fonctionné comme ça, ce qui m'a globalement plutôt réussi. Il y a quelques jolis incidents de parcours aussi, mais ma foi, c'est toujours un peu à double tranchant.
- Speaker #0
Non, bien sûr. Donc, visiblement, ça ne faisait pas partie d'un rêve.
- Speaker #1
Non, non. Non, je pense que si on prend 10 personnes, c'est intéressant, c'est la question des passions. Il y en a certains, ils savent depuis toujours, et ça peut être professionnel ou non professionnel. Moi, la seule chose qui m'a vraiment toujours, c'est les arts martiaux que je fais depuis maintenant, passé 25 ans. J'ai dû un peu lever le pied avec l'âge et les blessures. Aussi loin que je me souvienne, c'est la seule chose où il y a eu cet espèce de phénomène de coup de foudre. Je me rappelle, c'était l'époque où il y avait tous ces mangas et ces films où le truc me subjuguait. Et puis j'ai vu ça, je me suis dit, OK, voilà ce que je veux faire. Je viens d'une famille de musiciens, donc ma maman voulait que je fasse du violon. Donc ça a été un peu disruptif quand j'ai dit, écoute, je veux arrêter le violon pour faire du kickboxing. Mais c'est la seule chose que tu as choisi. Oui, oui. Au début, c'était un peu la guerre d'usure, mais finalement, je suis quand même assez têtu. Donc, elle a bien vu. Ce que je veux dire,
- Speaker #0
c'est que là, tu as vraiment choisi quelque chose.
- Speaker #1
C'était quelque chose, il y avait un peu de scourge. C'était important pour toi. Mais c'est la seule chose. Sinon, tout ce qui est formation professionnelle, je n'ai jamais ressenti ce même appel, ni pour, disons, d'autres activités culturelles, artistiques, que ce soit la musique, que ce soit le théâtre, que ce soit l'écriture. Je pense être quelqu'un d'assez, mais typiquement, je n'ai pas. Quand j'entends des gens qui expliquent qu'un jour, ils ont besoin de se mettre à écrire, ou ils ont ces pensées qui doivent coucher sur le papier, moi, je n'ai pas ça. Je suis assez...
- Speaker #0
Tu l'exprimes différemment.
- Speaker #1
Voilà, je pense en effet, on est tous calibrés différemment. Et puis, en tout cas, je me remémore, je pense comme beaucoup de jeunes adultes, ados, on se pose ces questions. Pour ceux pour qui la voie est claire et toute tracée, finalement, ils s'en posent moins. Mais après, il y a tous les autres qui doivent décider qu'est-ce que je vais faire de ma vie. Et c'est vrai que j'ai presque une forme de jalousie envers les autres, pour qui avaient ce côté très indépendamment de l'activité concernée, mais qui savaient ce qu'ils voulaient faire de leur vie. Moi, c'est vrai que du coup, je me comparais à eux, puis je me disais, moi, je ne sais pas ce que je vais faire de ma vie.
- Speaker #0
On a tout de suite vie pour ça.
- Speaker #1
Oui, c'est ça.
- Speaker #0
Et donc, tu disais, tu as fait ton stage, tu as été collaborateur, donc tu as exercé la profession d'avocat dans une étude ?
- Speaker #1
Oui, c'est ça.
- Speaker #0
Et après ?
- Speaker #1
Oui, donc je suis retourné travailler au sein de l'étude où j'ai fait mon stage. Je suis resté trois ans collaborateur là-bas et j'approchais la trentaine. A l'époque, je n'étais pas marié, je n'avais pas d'enfant, donc je pense que toi aussi, c'est encore l'époque où tu es un peu libre comme l'air, il n'y a pas trop de responsabilités, donc tu peux te permettre de prendre des risques. C'est vrai que j'ai fait ça un peu en mode saut dans l'eau froide, mais je suis parti et je me suis mis à mon compte. De ce que je sais, toi tu as fait ça un peu aussi de façon similaire, c'est-à-dire très jeune, sans réseau, sans mandat. Il n'y a pas un peu une prise de risque épiscotée. Pareil, mon intuition me disait que c'était OK, que c'était la voie. Donc derrière, j'ai toujours eu la foi. Ça n'a jamais été un problème. Et puis ça s'est avéré être un pari payant. Et à l'approche de mes 30 ans, avec un autre avocat avec qui j'ai fait mon stage, qui est ensuite devenu un ami, on s'est installés les deux. Et puis voilà, on a ouvert notre crèmerie. C'est à Nyon.
- Speaker #0
Donc la voie entrepreneuriale à ce moment-là s'est ouverte.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Et j'en garde, c'était drôle parce qu'on se passait le téléphone à nous-mêmes. Mais j'en garde un excellent souvenir. Il y avait vraiment, il y avait ce flow, il y avait ce momentum, les choses tombaient, ça s'alignait comme ça de façon simple. Et finalement, contrairement à ce que je pensais. On avait souscrit une ligne de crédit assez importante pour nous permettre de payer nos factures. On n'en a jamais eu besoin parce que ça a tout de suite donné le tour.
- Speaker #0
Et là, il y a vraiment eu un choix par contre, par rapport à ce que tu disais tout à l'heure. C'est une opportunité parce que peut-être qu'ensemble,
- Speaker #1
vous en avez fait.
- Speaker #0
Mais de partir et de monter votre étude,
- Speaker #1
c'était... Dans le prolongement de ce que j'expliquais avant dans ma façon de fonctionner, De l'extérieur, c'est un choix. Parce que oui, un matin, un jour, je me suis dit, je veux mettre à mon compte. Mais dans mon fort intérieur, c'était une évidence. Parce qu'à l'époque, je me rappelle, je pense que comme jeune collaborateur, il y a eu une différence entre le stage et puis après, il y a eu cette phase de collaboration. Le stage, il y a un début, une fin, ça peut être très intense. Mais l'esprit, quand il sait que ça s'arrête, il est vaillant. Quand tout d'un coup, ça devient open-ended comme ça. Et puis, c'est vrai que jeunes collaborateurs, dans une étude de la place, on bosse beaucoup. Ça, c'est clair. Et on commence à se poser des questions. Est-ce que c'est vraiment ça que j'ai envie de faire de ma vie ? Est-ce que d'être là tous les week-ends à travailler, quand beaucoup de nos connaissances sont en train de griller des saucisses, puis d'aller à des festivals, je caricature un peu. Et c'est vrai que là, j'ai une...
- Speaker #0
C'est de l'avocat indépendant ?
- Speaker #1
Non, mais c'est vrai que finalement, c'est une profession multifacette. Et puis, disons, le barreau, ça reste... Ça reste relativement exigeant par rapport à d'autres facettes de la profession. Et puis, j'ai eu deux, trois entretiens auprès d'autres études. Donc, si tu veux, je cherchais, je ne m'étais pas, je n'avais pas fait ce choix de l'indépendance, jusqu'à ce qu'un matin, je me réveille, et puis c'était là. C'était ma voie, c'était ça que je devais faire. Et puis, je n'ai plus jamais postulé nulle part ailleurs. Et voilà, c'était ce qu'il fallait que je fasse. Donc, je me suis engagé là-dedans. Et puis, ça a pris une année entre le moment où je me lève le matin et je me dis, OK, je vais mettre à mon compte et le moment où ça s'est matérialisé.
- Speaker #0
Et comment ça se passe quand ça se matérialise,
- Speaker #1
justement ? C'était, non, vraiment, j'en garde. C'était une très bonne phase de ma vie.
- Speaker #0
Oui, tu as fait ça pendant combien de temps ?
- Speaker #1
Alors, au final, ça a duré cinq ans. Mais les deux, ça, c'était, j'avais 29 ans. Et puis ensuite, si tu veux, ma vie, je pense que finalement, c'est lié aussi à l'âge qui avance. Dans le schéma classique, la vie devient de plus en plus multidimensionnelle. On part de seul, libre comme l'air, après marié, après une famille et la vie devient plus multidimensionnelle. Et c'est ce qui s'est aussi passé pour moi. Donc peu après, c'était l'époque aussi où je me suis marié. Et disons, mon ex-femme était mon amour de jeunesse. On était ensemble depuis le gymnase. Donc si tu veux, au moment où on s'est marié, on se fréquentait déjà depuis une dizaine d'années. Donc on commençait à réfléchir. Ça commençait à s'imposer que si on avait fait toutes ces années ensemble, c'était probablement pour fonder une famille. Et je crois qu'elle et moi, on avait le souhait de faire ça quand on était encore relativement jeunes. Très peu de temps après avoir monté l'étude, j'ai eu des jumeaux. C'est vrai que ça a ajouté une dimension très importante à ma vie, qui jusque-là, je pouvais vraiment me consacrer principalement au travail. Ensuite, j'ai continué. L'étude s'est un peu développée. On a fusionné avec deux autres avocats. de la place nyonnaise. Et puis, après, alors c'est ce que je t'expliquais un peu avant, c'est là où ma vie privée, si tu veux, a une incidence sur ma vie professionnelle. Je me suis séparé de mon ex-femme et ça a un peu changé la donne pour moi, dans le sens où, alors disons, ça s'est accompagné d'une pression financière un peu accrue. Parce que... Bon, bah... Tu sais ce que c'est l'indépendance, des fois on a des super mois, mais des fois c'est un peu plus galère. Il y a aussi, moi je suis quand même assez anxieux de nature, donc il y a toujours ces incertitudes liées au lendemain, quand tout d'un coup on voit le carnet de commandes qui s'amenuise un peu, il y a une petite voix dans la tête qui commence à faire des scénarios catastrophes. Donc c'est vrai que j'ai eu un besoin de stabilité aussi au niveau des horaires, parce que je me suis toujours beaucoup impliqué. dans la vie de mes enfants. Donc ça supposait de pouvoir s'organiser, il fallait pouvoir avoir un planning qui était bien huilé. Et ça aussi, au fait, je crois que... À cette époque-là, j'étais vraiment un avocat généraliste qui faisait pas mal de judiciaires, pas mal de procédures. C'était les problèmes de monsieur et madame, tout le monde, beaucoup de litiges, beaucoup de droits de la famille. Et je crois que c'est comme ça, casser quelque chose là où jusque-là, disons, j'ai jamais été fan de conflit, comme je pense certaines personnes aiment ça. Mais jusque-là, ça m'avait jamais dérangé. Bon, il y avait un côté un peu challenging, c'était un peu... J'ai aussi un côté assez compétitif. Mais ma séparation a fait que j'ai eu une sorte de... Je ne voulais plus ça. J'ai eu une sorte d'aspiration de paix, d'harmonie. Et je ne voulais plus ça dans ma vie professionnelle, je ne voulais plus ça dans ma vie privée. Et c'est devenu, en peu de temps, jour après jour, de plus en plus difficile, par exemple, de faire du droit de la famille. Je suis vraiment arrivé à une situation... ou même des fois j'avais presque plus envie de faire la morale à mes propres clients que la partie adverse, et ça a causé une remise en question. Je me suis dit, ok, peut-être qu'il est temps de changer. Et là on était en 2000, ça faisait 5 ans que je m'étais mis à mon compte, je devais avoir 34 ou 35 ans, et alors ça a été fortuit, mais ma route a croisé la selle. d'un individu qui était associé d'une banque privée à Genève et puis qui avait développé au sein de cette banque une sorte de business unit qui s'appelait département family office. Mais ce n'était pas un family office, c'était si tu veux, la façon dont c'était pitché, c'était un point d'entrée pour l'ensemble des lignes de métier du groupe et il cherchait un profil un peu couteau suisse, tout terrain, un peu comme moi. parce que finalement, on a les défauts de ses qualités à l'inverse. Alors c'est vrai que jusque-là, je n'avais jamais été spécialisé. Donc là où certains de mes contemporains avaient déjà fait le brevet d'expert fiscal, où était le krach du krach des droits des brevets, moi j'avais toujours eu cette activité de généraliste. Mais en même temps, si quelqu'un me dit ok, je dois faire une poursuite je savais comment faire. Donc cette personne-là cherchait ce profil. Et puis, les conditions salariales étaient intéressantes. Ça répondait à ce besoin de stabilité que j'avais. Et puis après, je suis quelqu'un d'assez… je vais de l'avant, donc je ne passe pas des semaines et des semaines à réfléchir. Quand je décide, j'y vais, je fonce. Donc voilà, j'ai pris la décision de quitter l'étude et puis de rejoindre cette banque. Et il s'est avéré que finalement, l'environnement bancaire n'était pas celui qui me correspondait le mieux, sans porter aucun jugement. Je suis très reconnaissant d'avoir eu cette opportunité. Ça m'a permis de découvrir beaucoup de choses. J'ai fait par exemple de l'analyse crédit, de voir le fonctionnement d'une banque à l'interne, la compliance, l'informatique. Et en plus, c'était pendant le Covid. Donc, pour tout le monde, ça a été une expérience nouvelle. C'était très intéressant de voir comment la banque s'est organisée, je crois que ça a été très bien géré, mais ça ne me correspondait pas vraiment. Donc après à peu près deux ans, la décision a été prise d'aller de l'avant. Et là, alors de façon... Sur LinkedIn, il y a mon employeur actuel, qui est une société, peut-être on pourra dire un mot là-dessus par la suite. qui gère des bateaux marchands de haute mer. Donc vraiment quelque chose. Jusque-là, je n'avais jamais été de près ou de loin concerné par le shipping, le droit maritime, le négoce de matières premières. C'était vraiment un monde que je ne connaissais pas du tout. Et je crois que la raison, c'était alors, d'une part, j'avais bu une bouteille de rosée, je crois, donc j'étais un peu éméché. Et d'autre, c'était une postulation simplifiée sur LinkedIn. Donc sur le moment... pris dans l'allant du truc, je me suis dit why not ? J'ai postulé, mais vraiment rien me prédestinait à ça. Et puis comme quoi, des fois, c'est un proverbe que j'aime bien, je ne sais pas dans quelle mesure il est vrai, mais c'est qu'on rencontre son destin par les chemins qu'on prend pour l'éviter. Le lendemain, le CFO de la boîte m'a appelé, et puis c'était une sorte de coup de foudre, le courant a extrêmement bien passé. Deux jours après, je voyais le CEO, et puis voilà, dans la foulée. Et maintenant, ça fait trois ans et demi que je suis là-bas. que je suis leur avocat in-house, donc responsable du département juridique. C'est un cahier des charges assez varié. Un monde que je ne connaissais pas du tout, mais voilà, trois ans après, ça va, je me suis habitué. Et puis, comme quoi, rien n'est insurmontable. Il faut se faire confiance, il faut faire confiance un peu à la vie, et puis les solutions viennent. Et puis voilà, ça tombe sur ses pattes.
- Speaker #0
Oui, on voit que c'est une succession d'expériences en fait. Oui, oui. Que tu as vécu les unes après les autres. Oui. Ou que peut-être que, comme tu disais, il n'y a pas forcément de choix conscient. Mais il y avait des graines quand même qui étaient plantées et à chaque fois tu as eu l'opportunité qui est arrivée quelque temps après. Oui,
- Speaker #1
oui, oui, c'est cette sensation. Alors on verra parce qu'il faut peut-être que si j'ai le privilège de vivre, peut-être qu'un jour je regarderai en arrière et puis ça confirmera ce ressenti que j'ai un peu. Mais il y a une part de destin là-dedans. Au niveau de mon ressenti, c'est en effet comme si les choses sont arrivées au moment où elles devaient arriver. Et que sur le moment... On ne comprend pas la cohérence. You don't connect the dots. Il y a cette phase de Steve Jobs que tu peux... You can only connect the dots looking behind. On verra si ça se confirme ou pas pour moi. Mais aujourd'hui, à 41 ans, c'est vrai que... Autant je ne comprenais pas la logique sur le moment. Pourquoi est-ce qu'il y a cet embranchement-là sur le réseau ferroviaire et que le train va dans cette direction ? Mais après coup, je le comprends. Et ce qui est d'encourageant, c'est cette idée de blessing in disguise. d'événements qui sur le moment peuvent être très très éprouvant très difficile à vivre qui en réalité sont là pour nous apprendre quelque chose pour nous permettre d'évoluer pour nous permettre de développer notre caractère et puis de faire de nous des personnes meilleures évidemment je l'avais beaucoup entendu jusqu'à ce que ça m'arrive il y avait toujours eu le côté un peu j'ai oui oui facile à dire mais après mais ça s'avère vrai c'est vraiment je crois que ça a clé à la... Le développement personnel fonctionne comme ça. Si on est toujours en eau calme, on ne va pas apprendre à se connaître et on ne va pas se développer. Donc, il faut aussi ces phases de secousse.
- Speaker #0
Et pour toi, c'est quoi le moment clé qui a fait que les choses ont changé dans ta vie professionnelle ?
- Speaker #1
Pour moi, c'est ma séparation. Parce que ça faisait 14 ans qu'on était ensemble. Je viens notamment du côté oriental de mon papa. Disons que j'ai été éduqué de façon plutôt classique. où la famille est vraiment une valeur centrale dans la culture indienne, même si maintenant ça change aussi, puisque l'Inde s'est pas mal occidentalisée, mais historiquement c'est un contrat à la vie et à la mort. On ne divorce pas. Si on se marie, on a des problèmes, ok, mais quitte à être séparés sous le même toit, on maintient le noyau familial, on ne divorce pas. Chez moi c'était extrêmement ancré. Et donc ça a été une redistribution complète des cartes et une remise en question complète. Donc c'est vraiment, ça a été un reset sur tout. Et c'est ça qui a été le moment déterminant, je crois. Des fois je me demande comme ça, un peu comme Mind the Game, il y a ces films où il y a des univers parallèles, et puis si les choses ne s'étaient pas passées comme ça, je ne sais pas où je serais. Mais je pense que ma vie serait assez différente.
- Speaker #0
Et tu serais différent aussi.
- Speaker #1
Et je serais différent. Et évidemment que c'est comparé. Peut-être pas, mais je préfère ma vie comme ça. Je pense que je suis quelqu'un de plus abouti en ayant eu cette trajectoire-là, parce que ça m'a permis de me remettre en question. C'est toujours une discussion, est-ce que les gens changent ou est-ce qu'ils évoluent ? Alors moi, ma position c'était toujours non, on ne change pas, c'est la nature profonde. Dans mon cas, je veux dire, il y a tellement de choses que j'ai changées, mais qui peuvent être des choses, je prends un exemple tout bête, mais j'avais vraiment une peur bleue des chiens. C'était quelque chose qui était viscéral, et j'ai complètement perdu ça, complètement perdu, mais à tel point où j'ai vraiment changé.
- Speaker #0
C'est la plasticité du cerveau, les nouvelles connexions qu'on met en place, donc quand on dit que personne ne change, c'est faux.
- Speaker #1
Oui, et moi je trouve ça très inspirant cette idée de voilà. Il n'y a pas de fatalité finalement. On n'est pas condamné à être ce qu'on est et on n'est pas comme ça parce qu'on est comme ça. Et il faut avoir le courage de se réinventer. Et si un trait de notre personnalité nous déplait, il faut empoigner le taureau par les cornes. Et en effet, on peut vraiment se réinventer complètement.
- Speaker #0
Ce qui est intéressant de voir aussi, vu que tu nous parles avec beaucoup de transparence et je te remercie, c'est à quel point le métier d'avocat peut être dur dans notre vie personnelle. Ça veut dire que l'équilibre vie privée et vie professionnelle est assez compliqué chez l'avocat, surtout l'avocat qui a sa propre étude. Je ne sais pas ce que tu en penses.
- Speaker #1
Oui, je crois qu'en effet, j'ai beaucoup de... De juristes au sens large font aussi ce constat. Si je regarde mes contemporains, beaucoup sont partis dans l'avocature et beaucoup en sont revenus. Les femmes, mais pas que. J'ai aussi beaucoup de personnes à qui j'étais à l'université Homme qui maintenant sont juristes in-house depuis des années et qui ne se verraient pas retourner au barreau. Dans ma propre trajectoire, évidemment. Une séparation est toujours multifactorielle. Ce n'est jamais noir ou blanc, ce n'est jamais la faute d'une seule personne. Mais évidemment que ce travail très prenant a probablement été un des facteurs qui fait que j'ai négligé d'autres choses. Et je ne referai pas les mêmes choix aujourd'hui. Je hiérarchiserai clairement mes priorités différemment.
- Speaker #0
Mais c'est un métier qui... permettent difficilement d'hiérarchiser les priorités parce qu'on est assez pris dans la vie des autres. Oui,
- Speaker #1
mais dans le même temps, c'est une profession éminemment noble. Et moi, je conserve toute mon affection pour cette profession. Alors, elle l'est sous nos latitudes, mais quand tu vois des pays ou dans des régimes totalitaires où les avocats risquent leur vie, là, il y a vraiment quelque chose d'extrêmement héroïque. Et je pense que c'est dans l'ADN de cette profession.
- Speaker #0
C'est un métier qui est magnifique.
- Speaker #1
Et je vois beaucoup des pénalistes qui n'ont probablement pas la meilleure life balance, mais en même temps, fonctionnellement au niveau de la société, il faut des gens passionnés comme ça, parce que c'est eux qui vont monter au barricade pour servir de garde-fous à un niveau sociétal quand tout d'un coup c'est en train de déraper. Et je suis assez fier d'appartenir à cette... profession-là.
- Speaker #0
Et j'ai l'impression qu'on a tous aussi ce besoin de justice qui est assez ancré dans cette valeur, cette blessure de l'injustice peut-être, qui fait qu'on fait souvent ce métier vers des tripes.
- Speaker #1
Oui, il y a une part d'idéalisme dans mon cas, ça a aussi été. Oui, je reste aujourd'hui encore assez idéaliste. Absolument, c'est lié à ça. Oui, oui. Donc voilà. On verra aussi l'avenir de la profession. Les cartes se redistribuent. Maintenant, il y a l'intelligence artificielle qui émerge. Mais j'espère qu'en tout cas, notamment les avocats qui se lancent pourront continuer de s'en sortir sans trop devoir sacrifier parce que ça me fait un peu souci. Quand je vois beaucoup de jeunes confrères qui travaillent 100 heures par semaine et qui tirent le diable par la queue et qui... doivent s'occuper de clients qui sont des malades mentaux, qui les menacent. On a tous un peu connu ça. Alors que fondamentalement, ils font ça, c'est presque de la philanthropie ce qu'ils font. Ils mériteraient avec tous ces efforts de pouvoir être à l'abri de toute préoccupation financière. Historiquement, c'est le cas. J'espère que ça pourra le rester. Parce que c'est beaucoup de sacrifices pour faire tout ça. Si on devait arriver à une situation où il y a plus retour sur investissement, on peut se sentir un peu floué finalement. Je pense notamment même pour les gens issus de l'immigration, où la première génération est venue, c'est sacrifié pour que les générations qui suivent puissent avoir cet ascenseur social. Et s'il n'y a pas le retour sur investissement escompté, c'est un peu une injustice aussi. Finalement, on a fait toutes ces études.
- Speaker #0
Tu l'as vécu comme ça, toi, comme une injustice ?
- Speaker #1
Alors, moi, par chance, je viens d'une famille qui n'a jamais eu trop de problèmes financiers. Donc, je serais malvenu de me comparer à ces gens-là. Mais ce que je vis un peu comme une injustice, c'est vrai, c'est un peu le sentiment de classe moyenne supérieure, de regarder autour de soi et je suis totalement, il n'y a rien que j'exécre plus qu'une société darwiniste à l'américaine où on laisse le faible sur le bord de la route, on ne lui tombe pas la main et puis on dit que c'était son problème. Mais d'un autre côté, je pense qu'on est finalement cette classe moyenne qui est pressée comme un citron, qui permet de financer toutes les prestations d'aide. qui paye énormément d'impôts, qui ne demande jamais rien. Moi, je veux dire, j'ai jamais touché un franc d'assistance, j'ai toujours payé mes impôts en bon citoyen. Et c'est vrai que je me demande, alors que je ne suis pas invincible, peut-être que demain, c'est moi qui ne vais pas pouvoir me sortir de mon lit et qui aurai besoin de l'aide. Est-ce qu'elle sera là, ce jour-là ? Parce que des fois, j'ai cette sensation que... La moindre amende, le moindre truc, le moindre excès de vitesse, la moindre petite erreur dans la déclaration d'impôt, on ne fait pas de cadeau. Donc est-ce qu'il y a de la justice dans la façon dont ça fonctionne ? Est-ce que si moi un jour je suis en situation de devoir bénéficier de la solidarité, est-ce qu'elle sera là ce jour-là ? Et je l'espère parce que sinon j'aurais vraiment un sentiment d'avoir été floué.
- Speaker #0
Je comprends. Aujourd'hui tu as... Ton besoin de sécurité, tu l'as comblé un petit peu en devenant juriste d'entreprise. Est-ce que tu peux nous expliquer, au-delà de ce que ça t'apporte d'un point de vue sécuritaire, mais qu'est-ce que tu fais au quotidien aujourd'hui ?
- Speaker #1
Oui, absolument.
- Speaker #0
Parce que c'est des métiers qu'on connaît peu en fait. Le métier d'avocat, on le connaît à peu près, on s'imagine, on a tous regardé des films. Mais c'est intéressant, je trouve, de s'intéresser aussi aux autres métiers.
- Speaker #1
Oui, surtout que c'est... Alors bon, moi j'espère avoir un égo qui est sous contrôle, donc j'ai aucun problème à dire que je suis juriste. C'est-à-dire, sur le prix de trois de mes connaissances, moi j'ai dit je suis juriste, et l'avocat a dit non, je suis juriste, c'est tout à fait, j'ai aucun problème avec ça. Alors c'est très protéiforme, je veux dire, ça recouvre le quotidien du juriste, ça va dépendre du domaine dans lequel il est, ça va dépendre... Du côté international ou non, de l'entreprise, ça va dépendre du domaine d'activité.
- Speaker #0
Et là, ABC Maritime ?
- Speaker #1
Alors là, c'est en effet ce domaine des services maritimes. Donc cette société gère des bateaux marchands, principalement des pétroliers, des cargos, des portes-containers en haute mer. Donc en général, si tu t'imagines le bateau, il aura un propriétaire, qui est ce qu'on appelle dans le jargon un armateur. Et si l'armateur dispose lui-même du savoir-faire pour le gérer, il peut le faire entre guillemets in-house. Mais dans bien des cas, ça va être outsourcé et l'armateur va se tourner vers un prestataire qui va se charger de la gestion technique et ou commerciale. Et ou du personnel, ce qu'on appelle dans le jargon le crewing, puisque c'est un peu du temporaire, l'emploi de marins qui sont employés lors de la mission, et puis ça va dépendre des voyages des bateaux. Et ça c'est aussi une large partie de la gestion d'un bateau. Donc nous on est spécialisés là-dedans, on travaille avec des armateurs qui nous sous-traitent cette partie-là du schéma économique. Évidemment la Suisse n'est pas la place qui vient en premier lieu à l'esprit quand on pense à la mer, quand on pense au shipping, mais il n'en reste pas moins que c'est quand même, disons, il y a quand même deux, trois sociétés qui sont actives là-dedans. Parce que c'est un domaine qui est connexe aux négoces. Et la Suisse est une des places mondiales, notamment Genève, du négoce de matières premières. On a des géants comme Trafigura, Glencore, Cargill. Et tous ces gens-là travaillent avec à frette des bateaux. Et dans la constellation, il y a un besoin d'avoir des managers de bateaux qui jouent un rôle. Donc ce n'est pas aussi improbable que ce qu'on pourrait penser quand on entend ça un peu de l'extérieur. Le cahier des charges est très varié. Donc, ça passe de la revue de tous les contrats qu'on signe, tant les contrats liés à l'entreprise, le bail des locaux, les contrats de travail des employés, les contrats d'assurance, tout ce qui est non maritime. Et ensuite... toute la documentation contractuelle, donc les contrats de management de bateau, les contrats d'affrêtement, les contrats d'assurance avec les assureurs spécialisés, parce que c'est une industrie où l'assurance a une part vraiment extrêmement importante. Compte tenu du fait qu'un voyage en mer, ce qui est certain, c'est que ça va mal se passer. Donc tout bateau doit être assuré. Donc ça, c'est aussi, disons, de mon ressort. Après, il y a la gestion du contentieux, parce que même si, étant encore, on est une PME familiale, donc évidemment qu'on se doit d'être pragmatique, on ne peut pas se permettre de dépenser des fortunes en arbitrage qui vont durer des années, qu'on a tendance à être assez pragmatique, mais disons, tout ça finit sur mon bureau. Alors là, c'est là où le fait d'avoir été avocat, d'avoir fait du judiciaire, de m'être familiarisé, d'avoir... d'avoir fait de l'arbitrage, ça me permet d'avoir une approche qui est vraiment pratique, là où d'autres juristes auraient peut-être une approche un peu plus académique. Ça me permet aussi de ne pas nécessairement devoir mandater à l'externe. Donc ça permet un gain de productivité, de streamliner comme ça les démarches. Et puis après, ce qu'on a fait là aussi, comme j'avais disons un peu cette casquette de généraliste, on a fait aussi une petite... de permanence juridique in-house parce que finalement, on a des collègues, on les côtoie, on partage d'une activité professionnelle mais les problématiques humaines sont transversales. Donc, ils divorcent aussi, ils ont aussi des litiges avec leurs voisins, ils font aussi des excès de vitesse.
- Speaker #0
Excellent, donc tu as ta propre permanence.
- Speaker #1
Voilà, on a fait ça. Évidemment, on a exclu tout ce qui était prud'homme droit du travail parce que là, il y a un petit conflit d'intérêt. Mais sinon, moi j'ai le goût de ça, j'ai toujours été bon camarade pour ça. Alors je l'ai eu fait un peu, et puis voilà, c'était finalement win-win pour tout le monde.
- Speaker #0
C'est génial, parce que tu as vraiment traversé plusieurs mondes différents, que ce soit le barreau, avec toutes ses facettes, mais aussi le bancaire un petit peu, et puis là, un univers complètement différent.
- Speaker #1
Là, en effet, tu pars du bancaire, autant sur le moment, c'est vrai que souvent... Comment on dit ? Comparaison n'est pas raison, mais en même temps...
- Speaker #0
On a des adages,
- Speaker #1
en fait. Oui, j'adore les adages. C'est vrai, mais c'est vrai que j'ai pu éprouver un peu de frustration, même un peu de tristesse, des fois en comparant mon parcours à celui de certains de mes contemporains qui ont vraiment eu le partner strike classique. Et puis, là où moi, j'étais un peu là dans ces phases de transition, ils sont partenaires dans des grandes études, sans être jaloux du tout, parce qu'ils ont travaillé dur et ils le méritent. C'est vrai que... J'avais une sorte de petit complexe d'infériorité à un moment donné, je me suis dit mais enfin... Et maintenant, il y a ceci de plaisant que là il y a cette cohérence. Au fait, tout ce que j'ai fait, toutes ces différentes compétences, maintenant elles s'imbriquent et là je vois la cohérence, je vois la logique que je ne voyais pas sur le moment. En me disant mais enfin, qu'est-ce que je passe d'une étude d'avocat généraliste à aller travailler dans une banque privée, ensuite de partir de là pour aller travailler dans une société qui gère des bateaux. Mais maintenant, aujourd'hui, oui. Tout ça était... Il y avait une cohérence. Et je suis très content que les choses se soient déroulées comme ça. Et si c'était un frère, je me souhaiterais que ça se passe de la même manière.
- Speaker #0
Oui, on voit que ton parcours, il est unique. Donc, incomparable. Le fait de se comparer est tellement destructeur, finalement.
- Speaker #1
Oui, oui.
- Speaker #0
Tu ne peux pas comparer ton parcours, ton histoire qui est unique à un autre parcours. Tout le monde est là-dedans, mais... On voit à quel point c'est destructeur et totalement illogique.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai. C'est vrai qu'il y a une société très compétitive, très capitaliste, mais en effet, et dans tout, dans le sport, c'est la même chose. En réalité, il faut qu'on se compare à la version de nous-mêmes qu'on était hier. Notre seul ennemi, c'est nous-mêmes dans un sens. Nos limitations, nos pensées limitantes, toutes ces choses, peu importe le voisin. Et chacun son chemin, chacun sa croix, chacun son parcours. et on a tous des combats différents à mener.
- Speaker #0
Est-ce que dans tes différents parcours, tu as eu un mentor ou quelqu'un qui t'a inspiré ?
- Speaker #1
Alors, je ne dirais pas un mentor parce que j'ai toujours été, ça c'est mon côté un peu verso, je crois, j'ai toujours été assez, dès qu'il y a une petite touche de sectaire dans quelque chose ou de gourou, j'ai une sorte de réflexe naturel de repousser ça, que ce soit dans le sport. ou dans le monde associatif, dès l'instant où il y a un peu une figure comme ça de gourou qui émerge, j'ai une sorte de réaction de rejet compulsive. C'est quelque chose qui me dérange profondément. Donc, je ne dirais pas que j'ai...
- Speaker #0
L'inspiration,
- Speaker #1
c'est différent quand même. Alors oui, pas de mentor, ni d'idole, mais par contre, énormément de sources d'inspiration, oui. Alors bien sûr, énormément, disons. Pour ça, je pense être assez éclectique. Donc, ça peut aller de... Il y a des exemples. Cristiano Ronaldo est quelqu'un que j'aime beaucoup. Des fois, les intellectuels ont tendance à être un peu...
- Speaker #0
C'est peut-être en dehors du métier d'avocat ou de l'autre métier. C'est des inspirations qui sont pas mal dans le sport.
- Speaker #1
Alors il y a ça, mais il y a aussi quelqu'un comme Freddie Mercury, par exemple, disons, cette abnégation, cette foi en sa bonne étoile qu'il a toujours eue. Le sport, alors j'aime beaucoup les arts martiaux, je suis un grand fan de MMA, donc c'est ces combats en cage, je suis ça depuis des années. Je ne pratique pas parce que maintenant à 41 ans, de toute façon j'ai toujours été un peu trop gentil pour envisager pouvoir faire ça professionnellement. Mais c'est des gens pour qui j'ai énormément de respect parce que c'est très méritoire ce qu'ils font.
- Speaker #0
Tu fais toujours partie de ta vie quand même les arts martiaux ?
- Speaker #1
Oui, je m'entraîne presque encore tous les jours. C'est vraiment un facteur de stabilité. Et il y a toujours eu, alors moi je sais que j'ai toujours eu ça, j'ai toujours eu tendance un peu cette propension à admirer chez les autres ce que je n'avais pas chez moi. Alors ça peut être artistique, par exemple si je vois un violoniste virtuose ou un grand artiste ou un écrivain, évidemment moi je ne serais pas capable de faire ce qu'ils font. Et je suis assez content parce qu'il fut un temps où ça pouvait être, il y avait une forme de jalousie, mais je crois que ça j'ai complètement mis de côté. Et puis maintenant il ne reste que le côté vraiment inspirant, je me dis waouh, quand même on est… On est une espèce assez incroyable, on arrive vraiment à faire des choses. Ça peut être un gymnaste aux Jeux Olympiques qui fait un quadruple supérieur, ça peut être un aventurier qui ne dort pas pendant quatre jours, ça peut être Wim Hof qui s'immerge dans l'eau froide pendant une semaine. Et maintenant, j'ai retrouvé un peu cet émerveillement devant ces choses-là. Donc oui, il y en a eu plein. Mais finalement, le dénominateur commun de tout ça, c'est cette constance, la discipline, c'est important. Le mental. Le mental aussi un peu, que de temps en temps il y a cette synchronicité, il y a cet alignement qui font qu'on rencontre les bonnes personnes au bon moment et que la réussite, si on veut pouvoir comme ça, il faut rester humble parce que c'est un mythe le self-made man, personne n'est self-made parce que déjà les aptitudes, on les a, on n'a pas choisi, on est né avec, donc si on a un don, on est né avec. Et ensuite, on n'est rien sans les autres. Donc tout ça, je veux dire, s'il y a une logique à cette vaste histoire, elle ne peut s'appréhender que de façon holistique, que au niveau du tout. Personne n'est le centre de l'histoire, personne n'est l'héros de l'histoire. Notre vie ne fait sens qu'en lien avec les autres. On est des fourmis dans une fourmière. Et il ne faut pas l'oublier, parce que tout d'un coup, si on cède un peu aux sirènes de l'ego, on pense qu'on est le maître du monde, et boum, il y a un cancer. Et boum, il y a un accident et on perd un proche et quelque chose. Et ça nous rappelle à notre condition, à notre finitude. Et voilà, si on peut le garder à l'esprit, c'est mieux. Ça permet de vivre avec un peu plus de recul et probablement d'essayer d'apprécier ce qu'on a dans l'instant présent, en sachant que demain, ça nous sera peut-être enlevé.
- Speaker #0
Merci pour ça. C'est belle parole. J'ai envie de terminer là-dessus. C'est un très beau message. Merci beaucoup. Merci beaucoup d'avoir été là.
- Speaker #1
Merci beaucoup. Merci à toi et merci pour ton amitié. Ça compte.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #1
Merci.
- Speaker #0
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